Migrations, une histoire européenne

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MIGRATIONS, UNE HISTOIRE EUROPÉENNE

EXPOSITION RÉALISÉE PAR EXPOZAO METTEZ VOTRE HISTOIRE EN SCÈNE

UNIVERSITÉ PERMANENTE

30 septembre 2015 - Des réfugiés syriens et irakiens débarquant sur l’île de Lesbos (Grèce) en provenance de Turquie. Ils sont accueillis par les bénévoles de l’ONG espagnole « Proactiva bras ouverts » [Crédits : Ggia – CC]


ÉDITO Les images des derniers mois et des dernières années montrant des réfugiés totalement démunis et en très grand nombre – souvent des familles entières –, tentant de gagner les pays de l’Union européenne pour fuir la guerre en Syrie ou en Irak, ont fortement marqué les esprits. Si l’arrivée en une très courte période de plus d’un million de réfugiés issus de régions situées hors du continent est totalement inédite dans notre histoire contemporaine, elle ne doit pas faire oublier le fait que l’histoire européenne a été e ponctuée, tout au long du xx siècle, de nombreux déplacements de populations. D’abord terre d’émigration, l’Europe est progressivement devenue terre d’asile pour les opprimés du monde entier, mais aussi terre d’accueil pour combler ses besoins en main-d’œuvre ou encore pour les populations déplacées par les guerres et par la décolonisation. Cette exposition offre une plongée dans un volet majeur de l'histoire européenne depuis 1900 en revenant sur les vagues migratoires internationales, souvent de très grande envergure, qui n’ont cessé de la jalonner. L’ampleur du sujet interdit toute exhaustivité, mais la connaissance de ces multiples épisodes permet une relecture de l’histoire européenne sur le temps long. C’est d’abord l’Europe occidentale qui est la première destination des migrants, issus pour la plupart de ses périphéries méditerranéennes et orientales, puis progressivement du monde arabo-musulman, d’Afrique et d’Asie, dans le contexte global d’une mondialisation des migrations. Cette exposition propose d’abord une approche spatio-temporelle qui permet de distinguer des périodes chronologiques différentes. Elle présente ensuite des exemples de vagues migratoires en fonction des motivations et des causes de l’exil : les réfugiés politiques, les retours des empires coloniaux, les migrants économiques, en ayant conscience que tout exil est contraint et que ces classifications se heurtent souvent à la complexité des situations.

1909 – Etats-Unis – La famille polonaise des Slebzak émigrée aux USA et travaillant dans une ferme du Maryland. Tout le monde travaille à l’exception des plus petits. [Library of Congress – Domaine public]


MIGRER EN EUROPE e AU XX SIÈCLE

Mai 1919, Marsavan - Réfugiés arméniens rescapés des massacres perpétrés dans l'Empire ottoman depuis 1915. [Library of Congress – Domaine public]


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1913 - Enfants italiens émigrés avec leur famille aux Etats-Unis. [Agence Rol – BNF – Domaine public]

L’EUROPE, TERRE D’ÉMIGRATION JUSQU’À LA PREMIÈRE GUERRE MONDIALE Crédits : FNSP. Sciences Po - Atelier de cartographie

Au début du xx siècle, l’Europe, qui domine le monde, est davantage une terre d’émigration que d’immigration. Cette période de forte croissance démographique est ainsi marquée par des départs massifs de différents pays d’Europe (Irlande, Italie du Sud, Pologne principalement) vers les Amériques. e

particulier dans l’est et le sud du pays, ainsi qu’en Californie. De 1870 à 1920, près de 20 millions d’Européens se seraient installés outre-Atlantique. Cette ruée vers les États-Unis se réduit très nettement après la Première Guerre mondiale quand les autorités américaines mettent en place des quotas de migrants par nationalités.

Juillet 1909 - États-Unis - Une jeune fille polonaise et sa maman pendant la cueillette des baies dans le Maryland. En hiver cette famille s’installe à Dunbar, sur la côte, où elle travaille à l’écaillage d’huîtres. [US Library of Congress – Domaine public]

Les migrants cherchent pour la plupart à échapper à la misère de leur région d’origine ou aux discriminations politiques et religieuses, et à recréer leur vie ailleurs, dans le contexte de l’industrialisation et des transformations rapides des sociétés européennes. Les États-Unis, qui souhaitent développer certaines régions sous-peuplées et leur industrie, encouragent ce mouvement par une politique visant à accroître l’installation de migrants à travers le territoire. Les nouveaux arrivés se répartissent en

Les États-Unis ne sont cependant pas la seule destination des migrants européens aux Amériques. Une partie importante d’entre eux gagnent l’Amérique du Sud, notamment le Brésil où 1,5 million d’Italiens et 150 000 Polonais s’installent e au début du xx siècle, plus particulièrement à São Paulo. Ils sont également très nombreux à partir dans la région de Buenos Aires où ils vont largement contribuer à l’essor de la société argentine. D’autres Européens s’installent aussi en Australie et en Nouvelle-Zélande, ou encore dans certaines colonies de peuplement en Afrique (comme l’Algérie ou l’Afrique du Sud).

Octobre 1912 - Immigrants en transit à Ellis Island avant leur entrée sur le territoire américain. [US Library of Congress - Domaine public]


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ENTRE 1919 ET 1945, D’IMPORTANTS FLUX MIGRATOIRES DANS UNE EUROPE DÉSTABILISÉE

1920 - Réfugiés grecs et arméniens dans des baraquements près d’Athènes. [Library of Congress – Domaine public]

19 juin 1940 - Réfugiés français sur la route de l’exode après l’invasion allemande. [Archives fédérales allemandes - CC]

Les États-nations mettent en place dès les années 1920 des politiques migratoires plus strictes, notamment par des surveillances frontalières renforcées et par l’exigence de passeports en bonne et due forme. Certains régimes autoritaires contrôlent les flux migratoires vers leurs colonies ou au service de leurs ambitions politiques – comme l’Italie fasciste. L’émigration massive vers les Amériques se tarit progressivement, même si des Européens continuent de s’installer dans le monde entier tout e au long du xx siècle pour des motivations économiques et politiques, restant ainsi des acteurs majeurs de la mondialisation.

Crédits : FNSP. Sciences Po - Atelier de cartographie

La fin de la Première Guerre mondiale entraîne la disparition des grands empires multinationaux européens – aux premiers rangs desquels l’Empire austro-hongrois, l’Empire russe et l’Empire ottoman –, la création de nouveaux États, l’instabilité politique et l’agitation révolutionnaire. Guerres, dictatures et conflits multiples provoquent l’afflux en Europe occidentale de nombreux réfugiés. Dans la période qui suit la Première Guerre mondiale s’organisent également des flux migratoires directement négociés par certains États qui cherchent à attirer de la main-d’œuvre de l’étranger pour compenser les énormes pertes humaines de la guerre. C’est, par exemple, le cas de la France qui signe des accords avec l’Italie, la Pologne ou encore la Tchécoslovaquie pour faire venir des dizaines de milliers de travailleurs de ces pays. Cependant la crise économique des années 1930 met un terme à cette ouverture. Considérés comme une « solution » dans une situation de pénurie de main-d’œuvre, les travailleurs étrangers deviennent rapidement un « problème » quand le travail vient à manquer. Pointés du doigt par de nombreux Français et certaines forces politiques, ils doivent rentrer, volontairement ou non, dans leurs pays d’origine. Ce sera le cas de milliers de Polonais qui prennent alors le chemin du retour. La Seconde Guerre mondiale, outre les dizaines de millions de morts qu’elle cause, entraîne également de gigantesques mouvements de populations, bien au-delà des millions de militaires emprisonnés dans les pays belligérants. Mais ces déplacements restent internes à notre continent et ne sauraient s’étudier en dehors du contexte très spécifique des totalitarismes nazis et soviétiques : exodes massifs de dizaines de millions de civils pour fuir les combats – comme les Français et les Belges en 1940 face au blitzkrieg allemand à l’Ouest ou les Allemands en 1944-1945 devant l’avancée inexorable de l’Armée rouge –, déplacements volontaires ou forcés de millions de travailleurs vers l’Allemagne, déportations politiques de millions de personnes vers les camps de concentration allemands ou les goulags staliniens, déportation massive et sans retour de six millions de Juifs vers les centres de mise à mort nazis.

1920 – Réfugiés arméniens installés en bordure de la mer Noire, près de Novorossisk. [Library of Congress – Domaine public]


MIGRER EN EUROPE e AU XX SIÈCLE Le 20 juin 1987, après six jours d’escale dans le chantier naval Keppel, à Singapour, le Rose Schiaffino largue les amarres à destination de Rouen, qu’il atteindra un mois plus tard. À son bord, 229 réfugiés vietnamiens. [© Laurent Charpentier]

Après 1945, l’immigration devient un phénomène majeur de l’histoire de l’Europe. La guerre froide naît en Europe en 1947 et entraîne la division du continent sous la domination des deux superpuissances, les États-Unis et l’URSS. L’Europe de l’Ouest et l’Europe centrale et orientale vivent des histoires différentes, et notamment en ce qui concerne les migrations, qui prennent une ampleur considérable à l’Ouest.

Crédits : FNSP. Sciences Po - Atelier de cartographie

L’IMMIGRATION MASSIVE EN EUROPE OCCIDENTALE DURANT LA GUERRE FROIDE notamment). Le recrutement de travailleurs étrangers est souvent encadré par des structures d’État, comme l’ONI (Office national des migrations) créé en France en 1945 et qui ouvre plusieurs bureaux à l’étranger pour favoriser les recrutements. Cette migration économique ralentit à la fin des années 1960 pour quasiment s’arrêter avec le choc pétrolier de 1973 qui enraye la dynamique économique ouest-européenne. Guerre froide et décolonisation génèrent également de nouveaux courants d’immigration à caractère politique. L’indépendance des colonies européennes amène ainsi le rapatriement de centaines de milliers d’Européens qui y étaient jusqu’alors installés. Les persécutions politiques à l’Est entraînent l’exil de nombreux Européens vers les pays occidentaux, mais la majeure partie de ce flux reste concentrée en Allemagne (près de 4 millions d’Allemands de l’Est s’installent en Allemagne de l’Ouest, essentiellement avant la construction du mur de Berlin en 1961, et 200 000 Hongrois quittent leur pays après l’échec de la révolution de 1956 réprimée par l’URSS). Populations allemandes expulsés d'Europe centrale après 1945. [Domaine public]

Les ravages de la Seconde Guerre mondiale créent un énorme besoin de main-d’œuvre tout particulièrement dans le nordouest de l’Europe, en reconstruction grâce à l’aide américaine, puis en pleine croissance économique jusqu’en 1974 durant les Trente Glorieuses. Des millions de travailleurs rejoignent l’Europe. Ils sont issus des périphéries méditerranéennes (Espagne, Portugal, Italie du Sud, Yougoslavie) et des anciennes colonies qui prennent tour à tour leur indépendance (dans l’immédiat après-guerre pour les colonies britanniques ; dans les années 1950 et 1960 pour les colonies françaises, belges et hollandaises

La division du monde en deux camps pèse sur les nouveaux flux migratoires. Les guerres dans le Sud-Est asiatique et les atrocités commises par les régimes communistes conduisent également des millions de Vietnamiens à l’exil. De nombreux boat people trouvent refuge en Europe occidentale, qui accueille également des réfugiés politiques sud-américains persécutés par les régimes autoritaires d’extrême-droite, notamment plusieurs milliers de Chiliens qui fuient en France la dictature du général Pinochet après son coup d’État de 1973. Cependant, l’immigration en Europe durant la guerre froide reste essentiellement d’origine économique. Début 1989 - Agents est-allemands assurant le contrôle du mur de Berlin construit en 1961 pour empêcher le passage de la RDA vers la RFA. [CC]


MIGRER EN EUROPE e AU XX SIÈCLE Octobre 2015 - Lesbos, Grèce. Arrivée de réfugiés. [Ben White/CAFOD]

La chute du mur de Berlin et la disparition de l’URSS ouvrent une nouvelle page de l’histoire de l’Europe dans un contexte marqué par une mondialisation accélérée. De nouveaux flux migratoires secouent le continent, toujours à destination de l’Europe occidentale, mais également de l’Europe orientale. L’Union européenne et la Russie sont aujourd’hui les principales destinations des migrants.

Un espace intérieur plus ouvert La construction européenne a fondamentalement fait évoluer la conception des migrations en Europe. La liberté de circulation à l’intérieur des frontières européennes est en effet l’un des principaux acquis de l’intégration communautaire. La libre circulation des travailleurs, prévue dans le cadre de la Communauté économique européenne par le traité de Rome de 1957, s’élargit avec le traité de Maastricht en 1992 à tous les citoyens de l’Union européenne. Chaque citoyen de l’UE peut désormais s’installer dans un autre État sans avoir à demander ni visa ni permis de travail et sans limitation de durée, même si certaines restrictions existent encore. Les accords de Schengen signés en 1985 – et qui entrent en vigueur à partir de 1995 – suppriment les contrôles aux frontières intérieures de 26 États signataires. L’Union européenne élargie, de 1995 à 2013, de 15 à 28 États membres a vu s’accroître les migrations internes de travailleurs, issues essentiellement de ses périphéries orientales (la Pologne notamment) vers son centre économique (le nord-ouest de l’Europe et surtout le Royaume-Uni). En 2015, 500 000 Polonais vivent et travaillent au Royaume-Uni. La crise économique de 2008 provoque également des migrations du sud de l’Europe en difficulté vers le nord plus prospère. Mais cette évolution n’est pas sans susciter des craintes et des appréhensions, témoignant de l’absence de consensus sur le sujet. La peur de « l’invasion » de travailleurs d’Europe centrale a ainsi pleinement joué dans le « non » français au référendum de 2005 sur le traité constitutionnel européen et sur le vote du Brexit par les Britanniques en juin 2016.

Mais une Europe plus fermée ? L’ouverture des frontières internes des pays membres de l’espace Schengen s’est accompagnée d’une nouvelle législation visant à renforcer les frontières extérieures de l’Union et à harmoniser les procédures de contrôle, ainsi que la coopération policière et judiciaire. En effet, depuis la fin des années 1970, face à la crise

Crédits : FNSP. Sciences Po - Atelier de cartographie

L’EUROPE DEPUIS 1990, UN ESPACE DE LIBRE CIRCULATION FERMÉ AUX MIGRANTS EXTRAEUROPÉENS ?

économique et à la montée du chômage de masse, les pays d’Europe occidentale ont mis fin aux grandes migrations légales de travailleurs. Les législations n’autorisent plus que le regroupement familial et les arrivées d’étudiants, et luttent désormais contre l’immigration clandestine, sous la pression des nouveaux partis populistes hostiles aux immigrés. La France est la première concernée, avec la montée du Front national dès 1983, puis l’ensemble de l’Europe du Nord-Ouest est gagné par cette tendance à partir des années 1990. La disparition du bloc soviétique entraîne une déstabilisation politique et de nombreux conflits, notamment la guerre en ex-Yougoslavie, provoquant une vague nouvelle de réfugiés politiques entre 1992 et 2000. Les bouleversements politiques dans le voisinage européen, et notamment dans le pourtour méditerranéen, ouvrent une nouvelle période marquée par d’importants flux de réfugiés. À partir de 2010, les conflits qui y surgissent (Syrie, Libye notamment) provoquent un nouvel afflux de réfugiés politiques dans des proportions inédites depuis la première moitié du xxe siècle. Si le nombre de migrants internationaux augmentait de deux millions par an durant les années 1990, il s’est accru de 4,6 millions par an pendant la période 2000-2010.

L’Europe peine à trouver une réponse commune et cohérente à ce défi migratoire Le renforcement de la surveillance des frontières extérieures de l’UE se heurte à d’importantes limites, notamment en Grèce, dont la myriade d’îles situées au large de la Turquie apparaît extrêmement difficile à contrôler. Malgré de nouvelles initiatives comme la décision prise en juin 2016 de créer un corps de garde-frontières européens, la libre circulation et l’ouverture des frontières font l’objet de très fortes critiques. Face à l’afflux massif de réfugiés notamment syriens et irakiens en 2015, plusieurs États membres – dont l’Autriche, la République tchèque, la Hongrie ou encore la Slovaquie – ont décidé de réintroduire des contrôles à leurs frontières. Certains d’entre eux rejettent également la politique de répartition des migrants entre les États membres initiée par la Commission européenne en 2015. Alors que l’Union européenne se présente comme un espace de paix et de liberté, la volonté réaffirmée par une part importante de ses États membres de mieux protéger les frontières extérieures face à l’afflux de réfugiés qui, pour la plupart, cherchent une vie meilleure et à fuir leur pays en guerre, pose question.

2016 - Affiche sur un mur de Barcelone. [Joan - Barcelone - CC]


L’EUROPE, TERRE D’ACCUEIL DES RÉFUGIÉS POLITIQUES

1914 - Paris - Arrivée de réfugiés belges ayant pris la fuite après l'invasion de leur pays par les troupes allemandes. [US Library of Congress - Domaine public]


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1916 -1920 LES ARMÉNIENS FUIENT L’EMPIRE OTTOMAN

Photo non datée - Orphelins arméniens déplacés d'Anatolie. [US Library of Congress - Domaine public]

Au début du xx siècle, l’Empire ottoman connaît de multiples difficultés, notamment économiques. Dans ce contexte, la population arménienne chrétienne, qui vit depuis des siècles en relative bonne intelligence avec la population musulmane majoritaire, devient un bouc émissaire. Les premiers massacres d’Arméniens ont lieu dans les années 1895-1896 – ils auraient fait près de 200 000 victimes. e

Crédits : FNSP. Sciences Po - Atelier de cartographie

Les défaites de l’armée ottomane face aux armées russes au début de la Première Guerre mondiale fournissent au gouvernement nationaliste au pouvoir à Istanbul un nouveau prétexte à l’extrême déchaînement de violence qui va s’abattre sur le peuple arménien de 1915 à 1917. Jugée favorable à l’ennemi, cette communauté est victime de déportations et de massacres systématiques reconnus comme le premier génocide de l’histoire de l’humanité. Entre 800 000 et 1,5 million d’hommes, de femmes et d’enfants disparaissent, environ la moitié de la population arménienne de l’Empire.

NOMBRE : ENVIRON 350 000 MIGRANTS DESTINATION : MULTIPLES NATIONALITÉS : ARMÉNIENS

Dans ce contexte de péril imminent s’engage la fuite de centaines de milliers d’Arméniens dans des conditions tragiques, notamment 200 000 d’entre eux qui convergent vers la toute jeune république d’Arménie. Le pays, né sur les décombres de l’Empire russe, n’est cependant pas du tout prêt à les recevoir et subit une situation sanitaire effroyable, avec notamment 20 % de la population atteinte du typhus.

LE CAMPS ODDO Le camp Oddo pour les réfugiés arméniens était le plus important des camps marseillais. Du 27 novembre 1922 au 22 avril 1927, il a accueilli 4 463 réfugiés auxquels il faut ajouter les 405 enfants nés sur place. Une école franco-arménienne fut installée dans le camp.

Dessin de A. S. Safrastian, paru en janvier 1916 dans le Journal Ararat (Londres), représentant la fuite des 250 000 Arméniens de Van fuyant l'avancée ottomane en août 1915. [US Library of Congress - Domaine public]

Des rescapés, au nombre de 58 000, finissent par atteindre la France au début des années 1920, d’autres rejoignent les États-Unis ou encore l’Amérique latine. Ils obtiennent progressivement des documents leur garantissant un statut de réfugié. Ils créent la base d’une large diaspora à l’étranger. Pendant des décennies, celle-ci multiplie les actions pour faire reconnaître la réalité du génocide perpétré contre leur peuple.


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1918 -1921 LES RÉFUGIÉS RUSSES

Face aux succès de l’Armée rouge et à l’oppression communiste, près de 2 millions d’opposants au nouveau régime tentent de gagner des contrées plus pacifiées, notamment à l’Ouest. Ils sont 600 000 à s’installer en Allemagne et 400 000 en France, deux pays qui, eux aussi saignés par la guerre, ont besoin de main-d’œuvre. La France apporte un soutien pour rapatrier des soldats des armées blanches acculés face aux armées rouges. En 1920, elle place ainsi sous sa protection une flotte qui permet l’évacuation de 146 200 réfugiés (dont 29 000 civils) en Crimée.

Crédits : FNSP. Sciences Po - Atelier de cartographie

L’Empire russe, qui entre en guerre dès 1914 aux côtés de la France et de l’Angleterre contre l’Allemagne et l’Autriche-Hongrie, est un « colosse aux pieds d’argile », dont la société fragile ne peut supporter l’effort immense demandé pour faire face à une guerre totale. Aux premières victoires succèdent bientôt de lourdes défaites. Le régime se lézarde et face à une situation de plus en plus difficile, le tsar Nicolas II se résout à abdiquer, le 2 mars 1917. Un nouveau pouvoir, dominé par des radicaux communistes (les bolchéviques), parvient à s’imposer, fin 1917. Il prend très vite la forme d’une dictature, conduisant à une guerre civile qui se généralise à partir de 1919, opposant les armées bolchéviques, dites « rouges », aux armées fidèles à l’ancien régime impérial, dites « blanches », soutenues par les Alliés occidentaux.

Entre 1921 et 1923 - Réfugiés russes (lieu non précisé). [US Library of Congress - Domaine public]

NOMBRE : ENTRE 1 100 000 ET 1 500 000 MIGRANTS DESTINATION : EUROPE OCCIDENTALE (FRANCE, ALLEMAGNE, ROYAUME-UNI, BELGIQUE) NATIONALITÉS : RUSSES Après des mois d’errance en attendant que des pays acceptent de leur ouvrir leurs portes – le Brésil avait accepté d’en recevoir une grande partie mais se ravise finalement –, ils seront répartis entre plusieurs pays, la France et la Serbie en accueillant une part importante. La diaspora russe qui se développe alors en Europe occidentale reste marquée par le souvenir et la nostalgie d’une Russie disparue et souvent magnifiée. De nombreuses associations communautaires se créent, au sein desquelles les émigrés se rencontrent, font et refont le récit de la révolution, rêvant parfois d’un hypothétique retour.

Dans les années 1930, plus de 300 000 Espagnols sont présents en France, essentiellement des travailleurs venus participer au redressement économique du pays après la Première Guerre mondiale. La guerre civile, qui oppose entre juillet 1936 et avril 1939 le gouvernement républicain légitime aux insurgés nationalistes soutenus par l’Allemagne nazie et l’Italie fasciste, pousse des centaines de milliers d’Espagnols à s’exiler vers la France. L’exode s’accélère alors que la victoire de Franco devient inéluctable au début de l’année 1939. Une fuite désespérée de l’armée républicaine de Catalogne et de nombreux civils s’engage à travers les cols enneigés des Pyrénées et sous la menace des bombardiers des armées nationalistes.

Crédits : FNSP. Sciences Po - Atelier de cartographie

1939 LES RÉFUGIÉS ESPAGNOLS EN FRANCE NOMBRE : ENVIRON 475 000 MIGRANTS DESTINATION : FRANCE NATIONALITÉS : ESPAGNOLS La France ouvre sa frontière le 28 janvier 1939 aux réfugiés civils espagnols, puis, le 5 février 1939, aux soldats de l’armée républicaine en déroute. En quelques jours, près de 450 000 personnes la franchissent. Les autorités françaises sont débordées par ces exilés « rouges » qui ne sont pas les bienvenus. Mais, à partir de septembre 1939, ils fournissent une main-d’œuvre à l’économie nationale et 80 000 s’engagent dans la défense du pays. D’autres rentrent en Espagne, 15 000 partent en Amérique latine. La moitié des réfugiés sont toujours présents en France en mai 1940 et subissent les difficultés de l’Occupation. Pendant la guerre, 30 000 sont déportés en Allemagne.

Enfants espagnols faisant le signe du salut républicain avant leur évacuation pendant la guerre civile espagnole (1936-39). [Domaine public]


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Février 1939 – Arrivée à Londres de jeunes juifs fuyant l’Allemagne nazie. [Archives fédérales allemandes - Domaine public]

1933 -1939 LES JUIFS FUIENT L'ALLEMAGNE HITLÉRIENNE

Les conditions de vie de ceux qui restent en Allemagne se dégradent rapidement jusqu’à l’explosion de violence de la « nuit de Cristal », le 7 novembre 1938, au cours de laquelle près de 7 500 magasins tenus par des Juifs sont pillés et 35 000 personnes arrêtées et déportées.

LA CONFÉRENCE D’ÉVIAN, QUAND LE MONDE ABANDONNE LES JUIFS Réunissant 32 pays dont la France, les États-Unis et le Royaume-Uni (l’URSS décline l’invitation ainsi que l’Italie), la conférence d’Évian, convoquée à l’initiative du président américain Franklin Roosevelt du 6 au 16 juillet 1938, vise à trouver des solutions pour venir en aide aux réfugiés juifs allemands et autrichiens (l’Autriche vient d’être annexée à l’Allemagne en mars 1938). Tout au long de la conférence, les différentes délégations tirent prétexte de leurs législations nationales pour expliquer pourquoi elles ne peuvent pas accueillir davantage de réfugiés juifs. Seule la République dominicaine accepte finalement d’en recevoir, et encore contre des subventions. Une proposition qui n’est finalement même pas suivie d’effets.

Crédits : FNSP. Sciences Po - Atelier de cartographie

En 1933, à l’arrivée au pouvoir d’Hitler, la population juive d’Allemagne compte un peu plus de 500 000 personnes, ce qui représente moins de 1 % des habitants du pays. Près de 80 % d’entre eux sont de nationalité allemande. Dès les premiers mois de leur arrivée au pouvoir, les nazis excluent les Juifs de la fonction publique, mènent contre eux des campagnes d’intimidation organisées notamment par les milices SA. Dans ce contexte, de 1933 à 1938, une part de la population juive, près de 130 000 personnes, décide de fuir, principalement à destination des pays européens voisins (France, Belgique, Pays-Bas, Danemark, Tchécoslovaquie et Suisse).

NOMBRE : ENVIRON 300 000 MIGRANTS DESTINATION : FRANCE, BELGIQUE, GRANDE-BRETAGNE, ETATS-UNIS NATIONALITÉS : ALLEMANDS POUR LA PLUPART Face à cette dramatique évolution, une partie importante de la communauté juive, qui était malgré tout jusque-là restée en Allemagne, décide de fuir à son tour ; une mission particulièrement ardue car la plupart des États du monde témoignent d’une solidarité toute relative à l’égard de cette population, comme en atteste la conférence d’Évian de 1938 (voir encadré). Malgré ces difficultés, 120 000 d’entre eux parviennent tout de même à quitter l’Allemagne en 1938-1939. Il reste toutefois plus de 200 000 Juifs en Allemagne au début de la Seconde Guerre mondiale. Ceux qui s’enfuient doivent tout abandonner, les nazis ne leur permettant d’emporter que le strict minimum et confisquant systématiquement leurs biens après leur départ. Après la fin de la Seconde Guerre mondiale et la tragédie de la Shoah, des centaines de milliers de rescapés des camps trouvent refuge dans des centres de regroupements mis en place par les Alliés, notamment en Allemagne. Beaucoup de survivants originaires d’Allemagne ou d’Europe centrale et orientale refuseront d’y retourner, notamment du fait de la persistance de l’antisémitisme et de pogroms (en juillet 1946, à Kielce, en Pologne, 42 Juifs sont tués lors d’un massacre). Malgré une législation sur les migrations alors encore très restrictive, 80 000 Juifs sont admis aux États-Unis entre 1945 et 1952. Un grand nombre de survivants du génocide viennent également s’installer dans l’État d’Israël qui voit le jour en 1948.

Avril 1933 - Membres de la milice SA apposant une affiche antisémite sur un commerce peu après l’arrivée au pouvoir des nazis en Allemagne. [Archives fédérales allemandes - Domaine public]


L’EUROPE, TERRE D’ACCUEIL DES RÉFUGIÉS POLITIQUES Septembre 1973 - Palais présidentiel de la Moneda après le coup d'Etat du général Pinochet. [santiagonostalgico - CC]

1973 LES RÉFUGIÉS CHILIENS EN FRANCE

De nombreuses associations s’organisent pour apporter leur aide et de multiples initiatives de solidarité sont lancées pour accueillir les Chiliens qui le souhaitent et qui ont la possibilité de rejoindre la France. Dès le 28 septembre 1973, sous la pression populaire, le gouvernement français permet l’accueil des réfugiés politiques du Chili, pourvoyant dans un premier temps à leur hébergement et leur octroyant une aide médicale gratuite. Dans les mois qui suivent le coup d’État, 15 000 Chiliens arrivent en France – pour la plupart des cadres politiques et syndicaux.

1979 L’ACCUEIL DES « BOAT PEOPLE » Après une longue guerre menée par les États-Unis pour défendre le Sud-Vietnam, Saigon tombe en 1975 aux mains des communistes menés par Hô Chi Minh, le leader de la république communiste du Vietnam du Nord. Rapidement, un régime dirigiste et répressif se met en place sur l’ensemble du pays réunifié. S’ajoutant aux incertitudes du contexte régional – sur fond d’intervention au Cambodge et de guerre avec la Chine –, cette situation pousse une partie de la population à fuir par la mer sur de frêles embarcations, au péril de leur vie, sous la menace des tempêtes et des pirates qui sévissent sur la zone.

Crédits : FNSP. Sciences Po - Atelier de cartographie

Le coup d’État qui renverse le président chilien Salvador Allende, le 11 septembre 1973, signe la fin de l’expérience socialiste chilienne, entamée à peine 3 ans auparavant. En réponse à la violence et à la répression qui s’abattent sur les opposants au nouveau régime militaire du général Pinochet, un très fort mouvement de solidarité se développe en Europe envers la population chilienne.

NOMBRE : 15 000 MIGRANTS DESTINATION : FRANCE NATIONALITÉS : CHILIENS

En juillet 1979, une conférence internationale réunit à Genève 65 gouvernements qui, sous la pression populaire, se mettent d’accord pour recevoir 260 000 réfugiés. La France accepte d’en accueillir 128 531, ce qui constitue la plus grande vague d’immigration d’origine asiatique en France.

Le flot ne s’interrompt pas et cette situation fortement médiatisée crée un émoi considérable en Occident. De nombreuses associations et des intellectuels multiplient les pressions pour inciter le pouvoir politique à agir. Au cours d’une rencontre restée célèbre, deux intellectuels qui se sont longtemps opposés, Raymond Aron et Jean-Paul Sartre, se rendent au palais de l’Élysée pour plaider devant le président français Valéry Giscard d’Estaing l’urgence d’agir. Des associations lancent également des opérations pour secourir les boat people en détresse.

Crédits : FNSP. Sciences Po - Atelier de cartographie

Pendant les seules années 1979-1981, près de 600 000 boat people prennent la mer. Environ 250 000 d’entre eux perdent la vie dont un grand nombre de femmes et d’enfants. Ceux qui sont sauvés par des bateaux étrangers sont transférés à Hong Kong ou en Malaisie, où ils sont placés dans des camps entourés de barbelés, dont les images provoquent le scandale.

NOMBRE : PLUS DE 1,1 MILLION DE MIGRANTS (DONT 130 000 ACCUEILLIS EN FRANCE) DESTINATION : MULTIPLES NATIONALITÉS : VIETNAMIENS, CAMBODGIENS, LAOTIENS 1988 - Boat-people parti du delta du Mékong 5 jours plus tôt, en panne et à la dérive. Il sera secouru par un navire humanitaire. [© Laurent Charpentier]


L’EUROPE, TERRE D’ACCUEIL DES RÉFUGIÉS POLITIQUES ANNÉES 1990 LES RÉFUGIÉS DES GUERRES DANS LES BALKANS

Janvier 1995 – Troupes de l’ONU à Sarajevo au plus fort du conflit. [CC]

Beaucoup se réfugient à l’étranger. C’est un exode sans précédent depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Pendant toute la durée de la guerre, près de 63 % des musulmans de Bosnie, 67 % des Croates de Bosnie et 30 % des Serbes de Bosnie ont dû, à un moment ou à un autre, quitter leur foyer. Les pays européens accueillent la grande majorité des exilés, notamment l’Allemagne (345 000), la Suède (130 000), l’Autriche (86 000) et la Suisse (25 000). Près de 100 000 se réfugient également en Amérique du Nord et en Australie.

Guerre de 1991-1995

En 1989, le président de l’une des entités du pays, Slobodan Milošević, n’hésite pas à flatter le nationalisme de la Serbie à des fins politiques, contribuant ainsi à exacerber les tensions nationales. Ces tensions débouchent sur un conflit qui ensanglante la région pendant plus de quatre ans, de 1992 à 1995 et entraîne de considérables déplacements de populations. En 1992, alors que la guerre vient à peine de débuter, 700 000 personnes, dont 600 000 Bosniaques et 100 000 Croates, ont déjà quitté leur foyer.

Crédits : FNSP. Sciences Po - Atelier de cartographie

Depuis la mort de Tito en 1980, les spécialistes des Balkans ne cessent de prédire l’éclatement de la Yougoslavie réputée ne maintenir son unité que grâce au charisme de ce leader. De fait, les tensions sont réelles entre les nationalités composant cet État multinational dominé par les Serbes orthodoxes et partagé, de surcroît, entre une partie ouest, catholique, relativement favorisée, et des flancs sud-est, musulmans et pauvres.

NOMBRE : PLUS DE 5 MILLIONS DE MIGRANTS DESTINATION : MULTIPLES (AUTRES ENTITÉS DE YOUGOSLAVIE ET ÉTRANGER) NATIONALITÉS : YOUGOSLAVES, CROATES, BOSNIAQUES, SERBES

Guerre du Kosovo – 1998-1999

Crédits : FNSP. Sciences Po - Atelier de cartographie

En 1998, la guerre reprend dans une autre zone de l’ex-Yougoslavie, le Kosovo, alors province de la Serbie toujours dirigée par Slobodan Milošević. Les tensions n’ont cessé de croître dans cette province depuis 1989, lorsque Slobodan Milošević en a supprimé l’autonomie administrative. Au fil des années, la résistance pacifique kosovare des débuts se radicalise et Milošević fait intervenir l’armée yougoslave au printemps 1998 pour mater la rébellion qui s’amorce.

NOMBRE : 980 000 MIGRANTS DESTINATION : MULTIPLES, PRINCIPALEMENT ALBANIE ET MACÉDOINE NATIONALITÉS : YOUGOSLAVES (DANS LA CONFIGURATION DU PAYS RÉDUITE À LA SERBIE, AU MONTÉNÉGRO ET AU KOSOVO)

Face à la violence des opérations, près de la moitié de la population kosovare prend la fuite. En juin 1999, on dénombre ainsi 981 000 réfugiés kosovars, dont 443 100 en Albanie et 248 000 en Macédoine. Après une intervention de l’Otan, début 1999, qui oblige la Serbie à retirer son armée, certains reviennent. Mais encore aujourd’hui, alors que le Kosovo a accédé à l’indépendance, 10 % de la population kosovare vit toujours à l’étranger. L’instabilité et la précarité du nouvel État encouragent toujours une forte émigration. Environ 350 00 Kosovars sont installés en Suisse et plus de 300 000 en Allemagne.

Mars 1999 - Macédoine : Arrivée de Kosovars après le début des opérations militaires serbes contre ce territoire. [UN]


L’EUROPE, TERRE D’ACCUEIL DES RÉFUGIÉS POLITIQUES 3 septembre 2015 - Réfugiés entamant une grève de la faim en face de la gare de Budapest Keleti. [Mstyslav Chernov - CC]

Depuis le début des années 2010, les multiples crises au Moyen-Orient, la situation en Afghanistan, le besoin de fuir d’une grande partie de la population d’Afrique sub-saharienne ont conduit à une croissance du nombre de réfugiés comparable par son ampleur à celle connue lors de la Seconde Guerre mondiale. Si l’on comptait 19,4 millions de réfugiés dans le monde en 2005 ce nombre est passé à 52,9 millions en 2015. En 2016, les plus grands groupes de migrants sont issus de Syrie et d’Irak. La plupart d’entre eux ne sont pas en Europe mais sont soit réfugiés intérieurs dans leur pays, soit réfugiés dans un pays voisin. En 2015, le Liban en accueillait 1,3 million, soit un chiffre record de près de 3 000 réfugiés pour 10 000 habitants ; la Turquie, quant à elle, est devenue avec le conflit syrien le premier pays hôte de réfugiés dans le monde, avec 2,5 millions de personnes accueillies sur son territoire en 2015.

[Annick Sterkendries]

Somalie, Soudan et Erythrée : une longue route vers l’Europe Les principaux flux actuels de migrations d’Afrique vers l’Europe concernent les migrants de Somalie, du Soudan ou d’Érythrée. Ces deux premiers pays connaissent une instabilité chronique alors que le dernier subit une féroce dictature. Fuyant un quotidien et des perspectives de misère, beaucoup d’habitants de ces États cherchent à rejoindre l’Europe. Ils tentent, le plus souvent, une traversée de la Méditerranée sur des embarcations de fortune en faisant appel à des passeurs sans scrupules. Le départ se fait majoritairement de la Libye, dans un contexte de délitement général de cet État depuis la chute du régime de Kadhafi, à l’automne 2011. En 2015, parmi plus d’un million de migrants ayant rejoint l’Europe par la mer, 3770 ont péri durant leur traversée. Ce chiffre s’élève à plus de 2900 pour le seul premier semestre 2016.

Crédits : FNSP. Sciences Po - Atelier de cartographie

DEPUIS 2010 LES RÉFUGIÉS DU MOYEN-ORIENT ET D’AFRIQUE NOMBRE : 1,5 MILLION DE MIGRANTS DEPUIS 2014 DESTINATION : UNION EUROPÉENNE NATIONALITÉS : SYRIENS, IRAKIENS, AFGHANS, ERYTHRÉENS, SOUDANAIS Également périlleuse est la route qu’empruntent de nombreux Érythréens et Soudanais qui cherchent à atteindre l’Europe via le Sinaï. Des tribus bédouines y profitent du passage de ces réfugiés pour les rançonner, organisant même des prises d’otages de masse avec rançon.

Migrations d’Asie centrale et du Moyen-Orient (Afghans, Kurdes, Irakiens, Syriens) Les mouvements vers l’Europe de populations du MoyenOrient et d’Asie centrale sont anciens. Avec l’intervention soviétique en Afghanistan, lancée en 1979, plus de 6 millions d’Afghans s’étaient déjà exilés dont une partie – minoritaire, mais non négligeable – vers l’Europe. Ce flux afghan ne s’est jamais véritablement tari, à l’exception d’une brève période, suivant l’intervention militaire occidentale dans ce pays en 2001, après laquelle une vague de retours s’était produite. Les demandes d’asile de réfugiés afghans dans les pays de l’UE ont ainsi quadruplé en 2015. À ces réfugiés afghans se sont ajoutées, dès les années 1980, des migrations d’Irakiens durant la guerre Iran-Irak (19801988) et des populations kurdes d’Irak fuyant la répression opérée par le régime de Saddam Hussein. Cette migration des Kurdes d’Irak prend la forme d’un véritable exode après la guerre du Golfe (1991) quand le régime de Bagdad décide de se venger du « manque de loyauté » de ce peuple pendant le conflit et procède à des massacres de masse. L’intervention américaine de 2003 et la guerre civile qui a suivi ont encore amplifié le phénomène, avec notamment l’exil massif des chrétiens d’Irak. La guerre civile qui a gagné la Syrie à partir de 2011, la sanglante répression opérée par le régime de Bachar Al-Assad et la terreur semée à partir de 2014 par le groupe État islamique ont aussi poussé de vastes franges de la population de ce pays de 22 millions d’habitants – auparavant relativement prospère – à se réfugier hors des frontières nationales. La moitié de la population s’est déplacée depuis le début du conflit. Encore concentrés dans les pays frontaliers au début de la guerre, plusieurs centaines de milliers décident de se réfugier en Europe à partir de 2014.

Juin 2015 - Sauvetage de migrants au large des côtes italiennes. [Marine irlandaise - CC]


L’EUROPE, TERRE D’ACCUEIL DES RÉFUGIÉS POLITIQUES

27 novembre - Manifestation pro-européenne à Kiev, prélude à l'Euromaïdan [Evgeny Feldman - CC]

2014 LES RÉFUGIÉS UKRAINIENS En 2013-2014 se déroule en Ukraine la révolution dite d’Euromaïdan qui vise à faire chuter le pouvoir corrompu de Viktor Ianoukovitch. Triomphante dans la capitale, Kiev, cette révolution se heurte cependant à de virulentes oppositions dans certaines régions orientales et méridionales.

Crédits : FNSP. Sciences Po - Atelier de cartographie

NOMBRE : 2 300 000 MIGRANTS DESTINATION : AUTRES RÉGIONS D’UKRAINE, RUSSIE NATIONALITÉS : UKRAINIENS

Infrastructures mobiles à destination des réfugiés du Donbass. [Gov.ua]

Profitant de la situation confuse et perturbée, Moscou annexe, en avril 2014, au terme d’une opération expresse, la péninsule de Crimée, région ukrainienne largement russophone et siège de plusieurs bases militaires russes. Quelques semaines plus tard éclate, dans l’est de l’Ukraine, une guerre ouverte opposant forces séparatistes soutenues par Moscou et l’armée gouvernementale secondée par des milices loyales à Kiev.

Mai 2015 – Ruines du monastère Iversky près de l’aéroport de Donetsk. [Mstyslav Chernov - CC]

Cette situation en Crimée a contraint plusieurs dizaines de milliers d’habitants, refusant la nouvelle citoyenneté russe qui leur était imposée, à fuir en Ukraine continentale. À ces premiers réfugiés de Crimée au printemps 2014 s’ajoutent, quelques mois plus tard, ceux des zones en guerre de l’est de l’Ukraine. Près d’1,7 million d'Ukrainiens ont aujourd’hui trouvé refuge dans d’autres régions d’Ukraine tandis que 600 000 personnes se sont installées dans d’autres pays, en Russie principalement.

19 février 2014 - Place Maïdan, Kiev Le quartier général des protestataires après un violent incendie. [Amakuha - CC]


RETOURS ET RAPATRIEMENTS

1921 - Salonique - Petit garçon de la communauté grecque d'Anatolie rapatrié en Grèce après la "Grande catastrophe" et installé dans des camps provisoires. [US Library of Congress - Domaine public]


RETOURS ET RAPATRIEMENTS 1922. Port du Pirée (Grèce). Ateliers de barbiers improvisés pour les populations réfugiées d’Anatolie. [US Library of Congress - Domaine public]

Avec le délitement de l’Empire ottoman sorti vaincu de la Grande Guerre, plusieurs puissances alliées occupent une grande partie de son territoire qu’elles ont pour mission de pacifier. Dans ce cadre, la Grèce est investie d’un mandat dans l’ouest de l’Asie Mineure. Ses troupes, qui débarquent en mai 1919 à Smyrne, « interprètent » ce mandat de maintien de l’ordre comme l’autorisation de conquérir une partie de l’Empire peuplée d’une importante population de culture gréco-chrétienne et de constituer ainsi une Grande Grèce. Grisées par la réaction des chrétiens qui accueillent les soldats du roi Constantin en libérateurs, les troupes grecques poussent leur avantage plus à l’est, menaçant Ankara en 1921. Dans l’intervalle, les armées turques, sous l’impulsion de plusieurs généraux dont Mustapha Kemal – le futur Atatürk –, ont été réorganisées et parviennent à retourner la situation en opposant une résistance efficace. Les victoires changent de camp, et progressivement les soldats turcs repoussent les

À la fin de la Seconde Guerre mondiale, l’Allemagne est divisée et largement amputée par rapport à la situation qui prévalait en 1933. Une partie de ses anciens territoires orientaux passent ainsi sous souveraineté polonaise ou soviétique. Les Allemands qui vivaient dans ces territoires depuis des décennies, sinon des siècles, sont expulsés par les nouvelles autorités et sont sommés de rejoindre les nouvelles frontières du pays. S’ajoute également l’expulsion massive des citoyens de langue allemande de Tchécoslovaquie, de Roumanie ou encore de Yougoslavie.

NOMBRE : 1 700 000 MIGRANTS DESTINATION : GRÈCE OU ANATOLIE NATIONALITÉS : GRECS ET OTTOMANS Grecs vers l’ouest, jusqu’à Smyrne, où elles avaient débarqué trois ans auparavant. Dans la panique s’engagent de vastes opérations d’évacuation des troupes grecques. Dans leur sillage suivent également une grande partie des populations chrétiennes qui les avaient accueillies en libérateurs et craignent désormais des représailles turques. En quelques semaines, près de 500 000 Grecs sont évacués d’Asie Mineure sur 178 bateaux. En 1923, le traité de Lausanne acte cette situation et décide de poursuivre l’« homogénéisation » des deux États dans le but « d’éviter de nouveaux conflits ». Ce traité impose de massifs transferts de populations. Au total, entre 1912 et 1924, ce sont près de 1 200 000 Grecs qui quittent la Turquie, tandis que 500 000 musulmans de Thrace et d’Épire doivent quitter la Grèce.

Crédits : FNSP. Sciences Po - Atelier de cartographie

1945 -1950 LES ALLEMANDS D’EUROPE CENTRALE EXPULSÉS… EN ALLEMAGNE

Crédits : FNSP. Sciences Po - Atelier de cartographie

1922 -1924 LA « GRANDE CATASTROPHE » DES GRECS D’ORIENT

NOMBRE : 14 MILLIONS DE MIGRANTS DESTINATION : TERRITOIRE DE L’ALLEMAGNE DANS SES FRONTIÈRES POST-1945 NATIONALITÉS : ALLEMANDS, TCHÉCOSLOVAQUES, ROUMAINS... Près de 14 millions de personnes prennent ainsi le chemin de l’exil. Des centaines de milliers de ces déplacés ne survivent pas à cette épreuve, ce déplacement s’effectuant dans des conditions le plus souvent dramatiques. En 1950, 12,5 millions d’expulsés vivent ainsi dans les deux Allemagnes (RFA et RDA) et 500 000 en Autriche. Après des premières années marquées par le dénuement, dans une Allemagne d’après-guerre détruite et surpeuplée, ces exilés parviennent progressivement à s’intégrer grâce au développement économique rapide à partir des années 1950.

1945 - Réfugiés de Prusse en route vers les frontières de la nouvelle Allemagne. [Archives fédérales allemandes - Domaine public]


RETOURS ET RAPATRIEMENTS

11 Novembre 1975 - Luanda - Angola. Troupes du mouvement de libération angolais célébrant la fin de la présence portugaise. Cette indépendance est le prélude au retour de 500 000 Portugais en métropole. [UN Photo-Jean Pierre Laffont]

1945 -1975 LES RETOURS DES EMPIRES COLONIAUX

Les indépendances marocaines et tunisiennes, en 1956, conduisent à des départs de populations françaises qui, s’ils n’ont pas le caractère précipité qu’aura le retrait de la communauté française d’Algérie, prennent cependant une dimension massive (plus de 300 000 personnes au total). Dans le cas de l’Algérie, le rapatriement au tournant des années 1960 va toucher près d’un million de Français installés sur place, pour certains, depuis plusieurs générations. Ils n’ont pour beaucoup pas d’autre choix – compte tenu de la situation sécuritaire à la fin de la guerre d’indépendance – que de gagner

Crédits : FNSP. Sciences Po - Atelier de cartographie

La décolonisation touche la quasi-totalité des anciennes possessions européennes après la Seconde Guerre mondiale. Elle engendre un rapatriement massif d’Européens entre 1945 et 1975. La France est particulièrement concernée avec près de 1 500 000 rapatriés entre 1954 et 1962, essentiellement en provenance du Maghreb.

LES EUROPÉENS RAPATRIÉS DES COLONIES, 1945-1962

Pays Français

Nombre

En provenance de

75 000 138 000 172 000 950 000 15 000 10 000

Indochine Tunisie Maroc Algérie Egypte Guinée

300 000

Indonésie

500 000 300 000

Angola Mozambique

150 000 150 000 30 000

Inde Rhodésie Kenya

Belges

100 000

Congo belge (ex-Zaïre)

Italiens

200 000

Ethiopie, Erythrée, Libye et Somalie

Néerlandais Portugais Britanniques

Source : Chaliand, Jan et Rageau, 1994, © Seuil

la métropole que la plupart ne connaissent pas. De nombreux supplétifs de l’armée française, les harkis, les accompagnent avec leur famille. Cet afflux considérable se heurte à l’impréparation des autorités françaises et à une relative hostilité de la population de métropole face aux « pieds-noirs ».

Du fait de la situation de croissance économique, de l’ordre de 5 à 7 % par an, et de la création de 4 millions d’emplois nouveaux entre 1959 et 1975, les reconversions, au moins pour l’aspect économique, peuvent néanmoins s’effectuer sans énormes difficultés. Cette immigration, combinée à l’afflux de ressortissants des anciennes colonies, va contribuer à hauteur de 30 % à l’accroissement total de la population française sur la période 1946-1980.

Juillet 1959 - Réfugiés européens en provenance d'Asie orientale à leur arrivée à l'aéroport de Nice. [UN]


RETOURS ET RAPATRIEMENTS

Tchernobyl, Ukraine - Monument du souvenir de la catastrophe nucléaire survenue en avril 1986. [Matti Paavonen - CC]

1986 LES DÉPLACEMENTS DE POPULATIONS LORS DE LA CATASTROPHE DE TCHERNOBYL

NOMBRE : 350 000 MIGRANTS DESTINATION : AUTRES LOCALITÉS PLUS ÉLOIGNÉES NATIONALITÉS : SOVIÉTIQUES

Les 40 000 habitants de la ville de Pripiat commencent à être évacués 30 heures après l’accident, puis le périmètre s’élargit pour concerner bientôt près de 250 000 habitants issus de villes et de localités situées dans un périmètre de 30 km autour de la centrale, en Ukraine mais aussi au Belarus. Ces évacuations s’étendront ensuite à d’autres zones.

La catastrophe de Tchernobyl, outre le désastre écologique qu’elle représente, ouvre un nouveau chapitre dans l’histoire des déplacements de populations en obligeant pour la première fois à l’évacuation d’une superficie considérable du fait d’une catastrophe nucléaire qui, par son ampleur, sa soudaineté et sa violence, impose, dans les jours qui suivent, l’évacuation et la réinstallation de milliers d’habitants, de façon d’abord provisoire, puis permanente. C’est à la suite d’un test mal calibré et d’une série d’erreurs humaines que 2 des 4 réacteurs de la centrale de Tchernobyl (située au nord de Kiev en Ukraine) explosent le 26 avril 1986. Les 1 200 tonnes de la dalle de béton recouvrant le réacteur sont projetées dans l’air et retombent sur le cœur du réacteur en le fracturant, libérant des substances radioactives qui se propagent dans l’Europe entière. Malgré des premières dénégations des autorités soviétiques qui cherchent d’abord à dissimuler la gravité de la situation à la population locale et aux yeux du monde, le Kremlin est bientôt contraint d’en reconnaître la gravité et de lancer de premières évacuations, tout en minimisant les menaces pour ne pas créer de panique.

Tchernobyl - Ancienne entrée de la ville. [CC]

Contrairement à ce qui leur avait été initialement annoncé, il apparaît bien vite que les personnes évacuées vont l’être pour longtemps. En 2016, trente ans après la catastrophe, une large zone d’exclusion de 2 600 km² autour de la centrale est toujours interdite d’accès, même si quelques centaines de « résidents illégaux » ont préféré rester y vivre, en dépit du danger. Certaines des zones les plus fortement touchées par les radiations devraient rester impropres à la vie pendant des décennies, voire des siècles.

Bâtiment précipitamment abandonné en 1986 après l'explosion nucléaire.


RETOURS ET RAPATRIEMENTS 1988 - Famille russe de Sibérie tout juste arrivée en Allemagne. [Archives fédérales allemandes - Domaine public]

Crédits : FNSP. Sciences Po - Atelier de cartographie

1988 -1999 L’ARRIVÉE DES AUSSIEDLER EN ALLEMAGNE Après la dislocation du bloc soviétique à la fin des années 1980 et avec l’ouverture du rideau de fer, un vaste mouvement de migration de populations d’origine allemande, les Aussiedler, se développe. Il concerne en grande majorité des ressortissants soviétiques qui, cherchant à échapper aux affres de la transition post-soviétique, se tournent vers l’Allemagne où les demandes d’asile explosent, passant de 100 000 en 1988 à 440 000 en 1992.

NOMBRE : 4 MILLIONS DE MIGRANTS DEPUIS 1950, LA PLUS GRANDE PARTIE ENTRE 1988 ET 1999, DONT 2 MILLIONS DEPUIS L’EX-URSS DESTINATION : ALLEMAGNE NATIONALITÉS : DIVERSES, MAIS ESSENTIELLEMENT EX-SOVIÉTIQUES

Tout citoyen des pays d’Europe de l’Est justifiant d’une parenté allemande peut en effet prétendre à une installation légale. Après la chute de l’URSS, près de 2 millions d’Aussiedler font ainsi le choix de rejoindre ce pays pour des raisons économiques.

De façon à gérer cet afflux, les candidats à l’installation en Allemagne sont d’abord rassemblés dans des centres de transit puis répartis entre les 16 Länder, suivant un système de quotas qui vise à éviter de trop fortes concentrations régionales (limité à 220 000 personnes par an à partir de 1993).

En quelques années se constitue en Allemagne le troisième foyer de population juive d’Europe De 1990 à 2012, près de 200 000 Juifs émigrent des États de l’ex-URSS vers l’Allemagne, constituant en une période particulièrement brève la troisième communauté juive la plus importante d’Europe après la France et le Royaume-Uni.

L’intégration de cette communauté se révèle complexe. Beaucoup de ces migrants, parlant souvent assez mal l’allemand, peinent à trouver un emploi dans l’Allemagne du milieu des années 1990 qui traverse des difficultés économiques dues notamment au coût de la réunification.

L’URSS n’a cessé de voir ses populations se déplacer, au gré de déportations de masse et d’impératifs économiques ou politiques plus ou moins cohérents décidés par le pouvoir central. Dans ce contexte, lors de la dislocation de l’URSS en 15 républiques indépendantes fin 1991, près de 25 millions de Russes se retrouvent hors des nouvelles frontières de la Russie. Une partie d’entre eux – entre 8 et 10 millions – décident de gagner la Russie. Beaucoup cherchent à échapper à des conditions économiques alors encore plus difficiles dans certains de ces nouveaux États qu’en Russie même. Ils souhaitent également souvent fuir les conflits qui éclatent en divers points de l’ex-Empire (Caucase, Moldavie, Tadjikistan), ou encore les vexations qu’ils commencent à endurer dans certains des nouveaux États où s’imposent des langues nationales qu’ils ne maîtrisent généralement pas.

Crédits : FNSP. Sciences Po - Atelier de cartographie

ANNÉES 1990 LE RETOUR DES « PIEDS-ROUGES » EN RUSSIE NOMBRE : ENTRE 8 ET 10 MILLIONS DE MIGRANTS DESTINATION : RUSSIE DANS SES FRONTIÈRES POST-1991 NATIONALITÉS : RUSSES S’ajoutent à ce flot de rapatriés, entre 1990 et 1994, les centaines de milliers de soldats russes stationnés, jusqu’alors, en Europe de l’Est dans le cadre des accords du pacte de Varsovie. Cette immigration permet de compenser l’émigration de nombreux Russes qui décident de rejoindre l’Allemagne, Israël ou les États-Unis principalement. S’ajouteront enfin des migrations internes à la Russie avec notamment plus d’un million de réfugiés de Tchétchénie, du fait des deux guerres qui éclatent entre le pouvoir central et cette république rebelle en 1994 et 1999. 1992 - Russie - Marché improvisé à Novgorod. [Brian Kelley - CC]


MIGRATIONS ÉCONOMIQUES

1962 - Mineur italien dans le Walsum en RFA. [Archives fédérales allemandes]


MIGRATIONS ÉCONOMIQUES Anciennes mines de Flers-en-Escrebieux. [Domaine public]

1919 -1925

La France sort de la Première Guerre mondiale avec un bilan humain désastreux : 1 325 000 victimes, des jeunes hommes pour la plupart, et 1 100 000 invalides sur une population active d’environ 20 millions d’habitants (hommes et femmes confondus). Face à cette hécatombe et à une croissance naturelle faible e depuis le xix siècle, le pays a un besoin urgent de maind’œuvre pour relancer son agriculture et son industrie. Les autorités décident ainsi de faire appel à des travailleurs étrangers. Cette politique est gérée conjointement par les entreprises – notamment dans les bassins sidérurgiques du nord de la France – et par le gouvernement qui signe, en 1919, des conventions avec l’Italie et la Pologne pour organiser l’arrivée de ressortissants de ces pays.

Crédits : FNSP. Sciences Po - Atelier de cartographie

LES TRAVAILLEURS EUROPÉENS EN FRANCE APRÈS LA PREMIÈRE GUERRE MONDIALE

NOMBRE : 2 MILLIONS DE MIGRANTS DESTINATION : FRANCE NATIONALITÉS : ITALIENS, POLONAIS, ESPAGNOLS Une majorité de ces ouvriers rejoint les bassins miniers du nord de la France mais il y a bien d’autres cas de figure. Par exemple, 40 000 paysans italiens s’installent dans le Sud-Ouest, tandis que de nombreux paysans belges qui s’étaient réfugiés en France pendant la guerre finissent par y faire souche, reprenant notamment des exploitations agricoles abandonnées, suite le plus souvent à la mort de l’exploitant sur le front. Près d’1 million d’Italiens, 700 000 Polonais et 300 000 Espagnols arrivent en France au cours de ces années. Une partie significative d’entre eux (1 million) est naturalisée entre 1921 et 1939.

1950 -1980

Après la Seconde Guerre mondiale, le Portugal s’enfonce progressivement dans une atonie économique et culturelle qui pousse des centaines de milliers de Portugais à choisir l’exode pour trouver ailleurs du travail et de meilleures rémunérations. Même si la France ne parvient pas à s’accorder avec le régime de Salazar pour organiser cette migration, de très nombreux Portugais tentent individuellement leur chance en gagnant illégalement la France. Les autorités françaises régularisent ensuite leur situation en leur attribuant sans réelles difficultés des permis de travail et de résidence. Beaucoup de Portugais décident également de fuir leur pays pour échapper à un service militaire qui dure quatre années et qui signifie, le plus souvent, la participation à des opérations militaires dans les colonies. De 1960 à 1973, 1,2 million de Portugais gagnent ainsi d’autres pays du continent, dont la France pour 900 000 d’entre eux.

Crédits : FNSP. Sciences Po - Atelier de cartographie

LES PORTUGAIS, LES ESPAGNOLS ET LES ITALIENS QUITTENT LEUR PAYS POUR TRAVAILLER DANS LE NORDOUEST DE L’EUROPE

NOMBRE : 900 000 MIGRANTS DESTINATION : SUISSE, ALLEMAGNE ET FRANCE NOTAMMENT NATIONALITÉS : PORTUGAIS, ESPAGNOLS, ITALIENS Des Italiens, dont le pays a été durement éprouvé par la guerre, décident également de quitter leur pays dès la fin du conflit. Ces départs reçoivent le soutien de l’État qui négocie des accords en ce sens avec d’autres pays (France, Belgique en 1946 et Allemagne en 1955). De 1945 à 1960, près de 750 000 s’installent à l’étranger. L’Espagne enfin suit la même dynamique, bien que plus tardivement, l’État franquiste ayant restreint les sorties du territoire jusqu’en 1959. S’amorce après cette date une migration massive. De 1964 à 1974, près de 900 000 départs sont enregistrés à destination principalement de la Suisse, de l’Allemagne et de la France. S’y ajoutent également des migrations saisonnières, dans l’industrie viticole française surtout. Famille portugaise arrivée en France dans le milieu des années 1970. [M. Da Mota]


MIGRATIONS ÉCONOMIQUES

Travailleur issu de l'immigration en France dans les années 1960. [Archives de Rhône-Alpes]

1947-1974

Crédits : FNSP. Sciences Po - Atelier de cartographie

L’IMMIGRATION ÉCONOMIQUE POSTCOLONIALE EN FRANCE ET AU ROYAUME-UNI L’immigration maghrébine en France À la suite des indépendances marocaines et tunisiennes en 1956, puis de l’indépendance algérienne en 1962, un grand nombre de ressortissants de ces trois pays décident d’émigrer dans l’ancienne puissance coloniale, souvent pour des raisons économiques. Cette démarche est facilitée par les grands besoins de l’économie française en main-d’œuvre jusqu’au début des années 1970. Ce mouvement concerne d’abord les Marocains. Alors qu’ils sont 33 300 en France en 1962, ils sont 260 000 en 1975, puis 431 000 en 1982. Le gouvernement marocain confronté à un essor démographique particulièrement fort ne s’oppose pas à ces départs qu’il observe même plutôt avec bienveillance.

En Tunisie, l’indépendance amorce également une puissante vague de départ qui touche bien sûr les coloniaux mais également près de 10 % de la population tunisienne. De 34 000 en 1962, le nombre de Tunisiens en France passe à 139 000 en 1975 puis à 206 000 en 1990. Le même mouvement déjà amorcé avec l’Algérie se renforce après l’indépendance du pays, qui intervient en 1962. De 350 000 Algériens en France en 1962, ce chiffre monte rapidement à 500 000 en 1967. À partir de cette période, un contingentement de 35 000 entrées annuelles est mis en place avant que l’immigration d’Algérie ne soit complètement suspendue en 1974, à l’exception des regroupements familiaux.

UNE IMMIGRATION PLUS LIMITÉE DES ANCIENNES COLONIES FRANÇAISES DU SAHEL À cette immigration maghrébine s’ajoute un courant migratoire important mais plus limité venant des anciennes colonies françaises d’Afrique subsaharienne, travailleurs temporaires dans les années soixante, suivi d’une immigration plus définitive à partir de 1974 avec les difficultés des pays du Sahel et le regroupement familial.

NOMBRE : PRÈS DE 3 MILLIONS DE MIGRANTS DESTINATION : FRANCE, BELGIQUE, SUISSE, ALLEMAGNE... NATIONALITÉS : MAROCAINS, ALGÉRIENS, TUNISIENS

L’immigration indo-pakistanaise au Royaume-Uni Suite au processus de décolonisation rapidement mené par le Royaume-Uni après la Seconde Guerre mondiale, un mouvement d’émigration massive vers la métropole se développe. Il est facilité par l’adoption, en 1948, du British Nationality Act qui permet aux ressortissants des anciennes colonies britanniques de s’installer dans l’ancienne métropole sans restriction. Dans ce contexte, le nombre d’immigrants annuels passe de 55 000 en 1955 à 136 000 en 1962.

1986 - Royaume-Uni. Jeunes britanniques issus de l'immigration bangladaise. [Al Cane - CC]

Aux premiers flux, principalement issus des Caraïbes, succède une migration très importante du sous-continent indien. De ce fait, dès 1960, le Royaume-Uni compte déjà une population de près de 500 000 personnes issue du Commonwealth nouvellement créé. À noter que le Royaume-Uni accueille également un grand nombre d’Indiens expulsés des nouveaux États d’Afrique de l’Est au moment de l’indépendance de ceux-ci, ainsi que des Chinois. Ces arrivées vont créer des frictions, amenant le gouvernement à légiférer pour restreindre les conditions d’immigration des ressortissants des pays du Commonwealth en les alignant progressivement sur celles des autres pays. 2006 - Un mariage traditionnel indien à Nottingham, au Royaume-Uni. [mattbuck - CC]


MIGRATIONS ÉCONOMIQUES 1990 - Berlin - Femme turque sur un marché. [Archives fédérales allemandes - Domaine public]

1961-1973

Compte tenu de la fulgurante croissance de l’Allemagne de l’Ouest après-guerre, les arrivées massives de citoyens d’Allemagne de l’Est ne suffisent pas à répondre à la demande de main-d’œuvre toujours plus forte de l’économie. C’est pourquoi la RFA signe en 1961 avec la Turquie un accord visant à attirer des « travailleurs invités ». Cet accord trouve un large écho auprès de la population turque. De 6 500 en 1960, le nombre de Turcs en Allemagne passe à 1 675 000 en 1990.

Crédits : FNSP. Sciences Po - Atelier de cartographie

L’IMMIGRATION TURQUE VERS LE « MIRACLE ÉCONOMIQUE ALLEMAND » NOMBRE : 1 675 000 MIGRANTS DESTINATION : ALLEMAGNE NATIONALITÉS : TURCS Les travailleurs étrangers viennent notamment occuper des postes peu qualifiés aux conditions salariales jugées peu attractives pour les Allemands. En 1973, avec le ralentissement économique, l’arrêt des recrutements met un terme aux migrations. Un grand nombre d’immigrés turcs craignent de ne plus pouvoir revenir en Allemagne s’ils quittent le pays et décident d’y faire venir leur famille. À cette forte présence turque s’ajoute également un grand nombre de migrants portugais et yougoslaves notamment. Cette immigration étrangère se concentre alors autour des grands centres industriels de l’Allemagne de l’Ouest.

2008 - Kiel - Allemands d'origine turque célébrant la victoire de l'équipe de football turque. [Arne List - CC]

Crédits : FNSP. Sciences Po - Atelier de cartographie

À PARTIR DE 1990 LES ALBANAIS FUIENT VERS LA GRÈCE ET L’ITALIE Pendant des décennies, sous la férule du dictateur communiste Enver Hoxha resté au pouvoir à Tirana de 1944 à 1985, l’Albanie est une « république ermite » de la Méditerranée, totalement repliée sur elle-même. Fuir cette « prison à ciel ouvert » est un objectif pour beaucoup d’Albanais, même si c’est une aventure particulièrement risquée en raison de la mise en place d’une surveillance militaire très resserrée et de la menace d’une clôture électrifiée le long de la frontière. Avec la progressive démocratisation du pays lors de la chute du communisme au début des années 1990 et compte tenu de la situation économique désastreuse qui voit le PIB, déjà très faible, s’effondrer de 40 %, un vaste mouvement d’émigration s’amorce.

NOMBRE : 400 000 MIGRANTS DESTINATION : GRÈCE ET ITALIE NATIONALITÉS : ALBANAIS Des régions entières du pays se vident, alors que s’entassent sur des embarcations de fortune les candidats à l’exil qui affluent dans les ports italiens de Bari ou Brindisi. La nouvelle crise économique et sociale qui affecte l’Albanie à partir de 1997 relance encore les vagues de départs. Au plus fort de la crise, on compte près de 400 000 Albanais en Grèce et un peu moins en Italie, soit plus de 10 % de la population albanaise… 1991 - Vlorë (Albanie) - Des milliers d'Albanais tentent de rejoindre l'Italie. [Luca Turi - CC]


MIGRATIONS ÉCONOMIQUES

DEPUIS LA FIN DES ANNÉES 1990

Septembre 2014 - Heure de pointe dans le métro londonien. [Sarah Tz - CC]

Crédits : FNSP. Sciences Po - Atelier de cartographie

LA QUESTION MIGRATOIRE AU ROYAUME-UNI Un « eldorado » difficilement accessible pour les migrants illégaux À la fin des années 1990, une vague de migration en provenance d’Afghanistan et d’Afrique sub-saharienne, mais aussi du Kosovo, se développe à destination du Royaume-Uni. Les migrants y sont attirés notamment par une législation spécifique – absence de contrôle d’identité une fois sur le territoire britannique – et par une croissance économique robuste. Cependant, du fait de contrôles très stricts des ferrys et du tunnel sous la Manche (le Royaume-Uni ne fait pas parti de l’espace Schengen), rejoindre l’Angleterre est une aventure particulièrement compliquée et, dès la fin des années 1990, une grande partie des candidats à l’installation au RoyaumeUni doivent patienter avant une hypothétique traversée. Un camp est mis en place en 1999 à Sangatte, pour éviter que ne se forme un stationnement non contrôlé.

NOMBRE : 3,5 MILLIONS MIGRANTS DESTINATION : ROYAUME-UNI NATIONALITÉS : DIVERSES Aujourd’hui encore la région de Calais accueille des milliers de candidats au départ vers l’Angleterre qui, chaque jour, tentent leur chance pour se glisser illégalement dans un camion en partance pour la Grande-Bretagne.

Mais un pays qui accueille de nombreux travailleurs d’Europe centrale Si le Royaume-Uni cherche à lutter contre l’immigration illégale, son développement économique florissant dans les années 2000 et les nouveaux besoins en maind’œuvre que cette croissance induit le poussent à ouvrir largement ses portes aux travailleurs issus de l’Union européenne. En 2004, alors que l’Union procédait à un élargissement à 10 pays d’Europe centrale, la Grande-Bretagne est de ce fait l’un des seuls pays, avec l’Irlande et le Danemark, à ouvrir immédiatement son marché du travail aux ressortissants de ces pays. Des dizaines de milliers de Polonais gagnent dès lors les Îles britanniques pour y occuper des postes qualifiés (médecins, personnels médicaux…) ou moins qualifiés, dans l’agriculture ou le tourisme notamment.

Cependant pour éviter un « appel d’air », le camp est démantelé en 2002, sans arrêter le flux de réfugiés. La Grande-Bretagne et la France signent alors, en 2003, le traité du Touquet, qui encadre juridiquement les contrôles effectués par des agents français et britanniques, indifféremment dans les deux pays, et définit les modalités du partage du traitement des demandes d’asile ; un traité parmi la douzaine d’accords bilatéraux qui organisent le contrôle de cette frontière particulière mais qui n’ont pas, loin s’en faut, réglé ce problème.

Avec 500 000 Polonais installés en Grande-Bretagne, ceux-ci constituent aujourd’hui la première nationalité étrangère au Royaume-Uni. Mais cette présence est très contestée par une partie des Britanniques et soulève de nombreux problèmes politiques. Juin 2016 - Royaume-Uni. Ouvriers à Londres. [Maureen Barlin - CC]


MIGRATIONS ÉCONOMIQUES Juin 2013 - Portugal. Lisbonne compte une importante communauté africaine issue notamment des anciennes colonies portugaises. [mgkm photography - CC]

1998 -2008

Au tournant du xxi siècle, l’Espagne et le Portugal deviennent à leur tour des pays d’immigration, après avoir envoyé des millions de travailleurs en Europe et dans le monde depuis plusieurs siècles. La croissance économique importante de ces deux pays, leurs langues parlées dans le monde entier et notamment en Amérique latine, la proximité avec l’Afrique, la libre circulation en Europe et des législations souvent conciliantes favorisent cette nouvelle configuration.

Crédits : FNSP. Sciences Po - Atelier de cartographie

LA PÉNINSULE IBÉRIQUE, UNE NOUVELLE TERRE D’IMMIGRATION e

L’augmentation du nombre d’immigrants est spectaculaire : l’Espagne en compte officiellement 542 000 en 1998 et 3,8 millions en 2005 ! 37 % viennent d’Amérique latine, 22 % de l’Union européenne, 19 % d’Afrique (surtout du Maroc) et 13 % des pays d’Europe centrale (Polonais, Roumains et Bulgares). Au Portugal, le flux est moins important, mais la population étrangère double entre 1999 et 2007. Le pays compte officiellement 450 000 résidants étrangers en 2004, venant des anciennes colonies africaines, mais aussi du Brésil et d’Europe centrale et orientale (Roumains, Moldaves, Ukrainiens).

NOMBRE : 3,5 ET 5 MILLIONS DE MIGRANTS DESTINATION : ESPAGNE, PORTUGAL NATIONALITÉS : AMÉRIQUE LATINE, EUROPE CENTRALE, MAROC La crise économique de 2008, renforcée par la crise budgétaire à partir de 2010, marque un tournant dans cette croissance avec une augmentation impressionnante du chômage. Les jeunes diplômés espagnols et portugais sont même obligés d’émigrer à nouveau pour trouver un emploi dans les pays du nord de l’Europe. Le solde migratoire espagnol redevient négatif, le pays perd 250 000 habitants en 2013.

Crédits : FNSP. Sciences Po - Atelier de cartographie

ANNÉES 2000 L’AFFLUX DE MIGRANTS DES RÉPUBLIQUES EX-SOVIÉTIQUES EN RUSSIE Au début des années 2000, la Russie connaît une très nette embellie économique, largement liée à l’envol des cours du pétrole et du gaz dont le pays est l’un des principaux exportateurs du monde. Cet essor économique crée de nouveaux besoins et de nouveaux emplois qui ne peuvent être tous pourvus par les Russes, compte tenu notamment de la démographie déclinante du pays. Cette situation entraîne une poussée de l’immigration en Russie en provenance, principalement, des anciennes républiques soviétiques, notamment du Caucase et d’Asie centrale.

NOMBRE : ENVIRON 10 MILLIONS DE MIGRANTS DESTINATION : RUSSIE NATIONALITÉS : OUZBEKS, TADJIKS, KIRGHIZES, GÉORGIENS... En 2010, 863 000 travailleurs étrangers sont recrutés dont près de 30 % d’Ouzbeks, 135 000 Tadjiks et près de 117 000 Chinois. Moscou a, par plusieurs initiatives, tenté d’orienter ces populations vers les petites et moyennes villes pour les redynamiser, mais sans réel succès. La situation des migrants en Russie est souvent difficile, notamment en raison d’un racisme qui s’est renforcé du fait des difficultés économiques de la Russie depuis 2009.

2008 - Russie - Marché ouzbek à Moscou. [Olga Pavlovsky - CC]


CONCLUSION Où vont les réfugiés et les migrants en Europe depuis 2015 ? Depuis quelques années, le nombre de réfugiés qui arrivent en Europe se maintient à très haut niveau du fait principalement de la guerre civile en Syrie, même si l’Europe n’en accueille qu’une faible proportion comparativement aux pays voisins de la zone de conflit comme la Turquie ou le Liban. En 2015, plus de 1,2 million de demandes d’asile ont été introduites auprès des pays de l’Union européenne, soit près du double du chiffre de l’année 2014. Compte tenu du contexte extrêmement dégradé en Syrie, le nombre de demandes d’asile – dont la plupart proviennent de Syrie – suivies de réponses positives a connu une augmentation importante de 75 % cette même année. En 2015, l’Union européenne ayant accepté d’accueillir près de 360 080 réfugiés.

PAYS DE PROVENANCE DES DEMANDEURS D'ASILE EN EUROPE EN 2015 30% 25% 20% 15% 10% 5% 0%

Syrie

Albanie

Érythrée

Kosovo

Irak

Serbie Afghanistan

Mali

L’Allemagne est sans surprise – compte tenu de sa politique ouverte dans la crise des réfugiés – le pays d’Europe qui a le plus donné une suite favorable aux demandes d’asile qui lui ont été adressées. Le pays a ainsi validé 148 215 demandes en 2015, représentant 41 % des acceptations totales des pays de l’UE. Le pays a été suivi de la Suède dont la politique se distingue également depuis des décennies par une ouverture aux réfugiés. Sur les 80 000 demandes d’asile introduites auprès des autorités françaises en 2015, une suite a été apportée à 19 000 d’entre elles. Par habitant, ce sont la Suède, Malte et l’Autriche qui ont accepté le plus de réfugiés en 2015. NOMBRE DE DEMANDES D'ASILES ACCEPTÉES PAR PAYS EN 2015

PAYS EUROPÉENS AYANT ACCUEILLI LE PLUS DE DEMANDEURS D'ASILE PAR HABITANT EN 2015 (EN % DE LA POPULATION DU PAYS)

Allemagne

Suède

Suède

Malte

Italie

Autriche

France

Chypre

Royaume-Uni

Allemagne

Autriche

Danemark

Pays-Bas

Suisse

Suisse

Bulgarie

Bulgarie

Norvège

Belgique

Pays-Bas

Danemark

Belgique

Norvège

Grèce

Grèce

Italie

Finlande

France

Chypre

Luxembourg

Malte

Finlande

Espagne

Royaume-Uni

Irlande

Islande

Pologne

Liechtenstein

Hongrie

Irlande

0

30000

60000

90000

120000

150000

0,0

0,1

0,2

0,3

0,4

0,5

0,6

0,7

0,8

D’autres pays, notamment les États entrés lors des derniers élargissements de l’Union en 2004, se montrent bien plus rétifs face à ce défi.


CRÉDITS Cette exposition a été réalisée dans le cadre d’une initiative conjointe de la Ville de Nantes (Cosmopolis), de Nantes Métropole, du Centre de recherches en histoire internationale et atlantique (CRHIA) de l'Université de Nantes et du Laboratoire d’excellence Écrire une nouvelle histoire de l’Europe (Labex EHNE). Ce projet a été monté avec le soutien d'Alliance Europa, de La fabrique des idées européennes et du ministère des Affaires étrangères et du développement international. ›› Coordination générale du projet : Ulrich Huygevelde - Expozao, Mettez votre histoire en scène (Expozao.com) ›› Réalisation des textes : Ulrich Huygevelde et Michel Catala ›› Réalisation graphique : Sébastien Vellut (lautobus.be) ›› Validation orthographique : Béatrice Piel ›› Comité scientifique : Michel Catala, Virginie Chaillou-Atrous, Stanislas Jeannesson, Thierry Piel (CRHIA - Université de Nantes), Carole Reux (Espace Cosmopolis-Ville de Nantes) ›› Remerciements : Céline Hélion, Laetitia Perrin, Eric Lechevallier, Thomas Burel, Myriam Goinard, Yvon Crusson, Gwénaëlle Le Dreff, Danièle Catala

SOURCES ET RÉFÉRENCES ›› ›› ›› ›› ›› ›› ›› ›› ››

Simon G., sous la direction de., Dictionnaire des migrations internationales, Paris, Armand Colin, 2015. Bribosia E., Réa A., Les nouvelles migrations, Bruxelles, Éditions complexes, 2002. Cortes G., Faret L., Les circulations transnationales, Paris, Armand Colin, 2009. Withol de Wenden C., Atlas des migrations, un équilibre mondial à inventer, Paris, Éditions Autrement, 2016 Se souvenir des Arméniens, 1915-2015 Centenaire d'un génocide, Revue d'histoire de la Shoah, n° 202, mars 2015. Mémorial de la Shoah (publications en ligne) Musée national de l’histoire de l’immigration (Publications en ligne) Ministère français des Affaires étrangères, Centre des archives diplomatiques de Nantes Archives du journal Le Monde

Janvier 2016 - Réfugiés syriens dans un camp provisoire en Grèce. [CAFOD - CC]

UNIVERSITÉ PERMANENTE


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