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Man Sizan

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Tataki de thon

Tataki de thon

Man Sizan KAZKAMO .1 Man Sizan

Mais, les enfants, que se passe-t-il ? Arrêtez ce raffut sous mon chapeau de tôles ! Auriez-vous agi de la sorte de l'autre côté ? Les jours défilaient et se ressemblaient, surtout pour ceux qui se situaient du côté de l'éboulement. Malheureusement j'en faisais partie. Attention à ma robe de bois ! "Timoun ou ka mèt labou asi mwen !". Il y avait des jours où je me sentais sale et souillée ; des jours où mes planches de bois étaient lourdes et méconnaissables. Toute cette boue puante séchait sur mes planches de bois et finissait par me répugner. Il avait plu toute la nuit, et cette chose visqueuse et collante, ce mélange de terre et d'eau, cette étrange ennemie m'avait bizarrement transformée. Du côté de l'éboulement, tel était le lot de toutes les cases. Quant aux enfants…les pauvres ! Entre les glissades, les mikas perdus, le cartable plein de saleté, certains rigolaient. "Mwen, sé grigné an té ka grigné !" Malgré tout, j'avais cet ardent désir de rester digne, debout, même sous les éclaboussures de boue. Un peu comme ce papa qui faisait traverser ses filles tous les matins sur ses épaules. Ainsi, il leur évitait les traces de salissures sur leurs petits souliers. Pour ceux qui se trouvaient, de l'autre côté dans l'école principale, je n'étais qu'une simple école annexe. Une petite case en bois sans prestige. Tchiiiip ! Moi, je n'avais que faire du prestige. Faire partie de la vie de ces bambins me suffisait amplement. "Timoun arété kòché-mwen !" Celui-ci me prenait pour une ardoise. Et ceux-là badigeonnaient mon ossature de bois, d'une nouvelle couche de saleté. Que voulez-vous, ce n'était pas de leur faute si le chemin pour arriver jusqu'à moi, était un sentier boueux ! Parmi nous, le seul qui aimait cette ambiance, c'était Gaston, le gros cochon de la voisine. "Gadéy tibwen, i alèz kon blèz !" Après une bonne semaine d'un tapissage malodorant, je m'imaginais parfois être de l'autre côté, à la place de l'école principale. Elle avait toute l'attention des maîtres et maîtresses, des parents et aussi des enfants. Nous avions toutes deux le même rôle, mais qu'est-ce que notre quotidien était différent ! "Blo blo blo !" Le maître venait de frapper du poing sur mon ossature de bois pour mettre tout le monde au diapason. Mon triste et brutal retour à la réalité provoquait des douleurs à toutes mes planches. "Ou ké krazé planch an-mwen monchè !" Était-il trop fatigué ou peut-être trop vexé de faire la classe sous une vieille case en bois ? Certes, je suis une petite case ! Annexe ! Mais une école surtout ! Mon souhait était qu'un jour, tous ces enfants puissent dire que sous mon chapeau de tôles, ils avaient reçu une bonne instruction. Voilà mon histoire, celle d’une case, d'une école annexe qui a longtemps prêté ses planches, son chapeau de tôles, et sa robe de bois aux enfants voulant apprendre l'A,B,C,D. Je suis Man Sizan de Kazkamo.

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