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Jo'M, à fleur de métal
PORTRAIT D'ARTISTE .2
Texte et portrait de l’artiste : Corine Tellier Photos des œuvres : remerciements à Opus Art Réunion
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À FLEUR DE MÉTAL
Jo’M travaille uniquement des matériaux de récupération, il se plaît à sculpter un métal ou un objet qui a déjà une forme, une histoire, une âme…Rencontre avec un artiste sensible qui s’efface derrière ses créatures surprenantes et oniriques.
C’est un moment rare que de pouvoir s’entretenir avec Jo’M, tant il cultive la discrétion et la liberté comme art de vivre. Les sculptures en métal parlent de lui et cela lui suffit. L’étiquette de « sculpteur » est réductrice. Il est vrai qu’il se sert activement ces derniers temps de ce support qu’est la sculpture, mais son art est multiple : il lui arrive de peindre et, en parallèle à ses commandes, il est « parcouru en permanence de multiples idées pour d’autres domaines comme de la décoration, de la stylisation de meubles… ». La peinture (à l’huile), c’était d’ailleurs le mode d’expression de sa mère qu’il prenait plaisir à observer à l’œuvre dans sa Bretagne natale : être tout entier absorbé par ce que l’on est en train de créer, c’est surtout cette impression qui l’aura marqué, une liberté prodigieuse. Ses sources d’inspiration, le ressenti du moment ou encore l’actualité politique, sociale. C’est un véritable bestiaire que Jo’M fait surgir de son imagination : un poisson, un âne, un lapin… ou plutôt un « lapigourou : un mélange entre un lapin et un kangourou », nous précise-t-il. « Je n’ai pas envie de copier ce qui existe déjà, de reproduire à l’identique, difficile de mettre des mots sur mes réalisations. Je préfère m’inspirer des formes existantes du matériau. Pour ma série d’insectes, aucun ne correspond à une espèce en particulier ; c’est plutôt un assemblage de plusieurs éléments qui révèle les animaux. De même pour les êtres humains que je vais me contenter de symboliser par l’image d’un corps sans visage, souvent avec un seul bras, moitié homme, moitié rêve, dans un état d’incomplétude et d’inachevé. Je veux cultiver cette part d'imagination pour ne rien figer. » Nul besoin non plus de travail préparatoire au dessin, c’est la forme que Jo’M a en tête qui va guider son façonnage des pièces de récupération, souvent imposantes et qu’il transporte sur remorque quand il doit les amener chez un client. Outre les plaques de métal, boulons et clous, en quantité, fournissent la matière première. Ses outils : deux marteaux (dont l’un créé par l’artiste lui-même), un découpeur plasma, une scie circulaire, un poste à souder, ainsi qu’une petite bouteille de gaz pour faire chauffer le métal.
« J’ai eu une véritable révélation pour le métal
« J’ai eu une véritable révélation pour le métal que je trouvais froid et rigide auparavant, ce matériau est en réalité très fin, très doux, il se laisse apprivoiser et prend même des teintes joyeuses avec de la couleur ou plus d’intensité avec de la patine. » Un matériau qui laisse surtout une grande liberté à celui qui n’aime pas les contraintes trop rigides : « parfois je commence mes œuvres à l'envers : il n’existe aucune règle prédéfinie, tout se met en place de manière cohérente. Chaque sculpture a sa place dans l'atelier, posée sur roulette. » Des sculptures qui atteignent peu ou prou la taille d'un être humain, y compris les animaux et les insectes, ainsi redimensionnés pour un impact plus fort. Des œuvres uniques, donc rares, comme des présents à destination des commanditaires avec qui l’artiste va lier « un lien d'amitié fort, comme un pacte. Je suis dans une dynamique de faire plaisir aux autres. Mes créations sont libres, elles existent, elles ne s’appellent pas… cela serait peut-être égoïste de ma part de les nommer. » Une sensibilité à fleur de métal que le grand public peut croiser dans quelques lieux publics ou dans les jardins de propriétaires qui ont fait appel au talent brut, mais ô combien raffiné, de Jo’M.