Maïwenn Humbert Diplôme National des Métiers d’Art et de Design de Lattes Spécialité Espace et Contextes
Mémoire de fin d’étude , soutenu le jeudi 28 Janvier 2020
Membres du jury : Christine Esparbes, professeure de design Sébastien Soulez, architecte Anne-Sophie Garnier, professeure de design
Remerciements : Merci aux enseignants principaux de la filière DNMADe espace et contextes, M. Taillefer, M. Dacher, Mme Garnier et merci à M. Zarzov pour qui j’adresse une pensée spéciale Merci à toute l’équipe pédagogique du lycée Champollion et aux enseignants remplaçants Merci à mes parents et ma famille pour leur soutien sans faille et leur relecture attentive de mon mémoire Encore merci à M. Garnier, M. Nectoux, M. Dacher et M. Loprieno pour leurs améliorations apportées à mon travail Merci à mes très chères amies Eva et Louise pour leurs conseils et leur écoute à toutes épreuves
SOMMAIRE Introduction
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I- Cas du Fenouillet : la réalité de l’ Ode à la mer I. 1 Le projet Ode à la mer I. 2 Le campus Pérols
p.8 p.10
II- Le modèle : les grands ensembles et les ZAC II. 1 L’application Française de la Charte d’Athènes
p.16
II. 2 L’ère des zones
p.18
III- Habiter durablement : l’ importance du lien III. 1 L’adaptation et la résilience
p.20
III. 2 Les espaces de partage co-construits
p.22
Conclusion
p.24
Mots clefs et liste des abrév iations
p.26
Bibliographie et sources
p.27
Liste des annexes
p.28
Annexes 1
p.29
Annexes 2
p.32
Annexes 3
p.35
INTRODUCTION Il y a tout juste deux ans, j’emménageais dans un tout nouveau campus, situé à moins de cinq kilomètres de Montpellier. Je découvrais mes nouveaux voisins avec stupeur, autour de mon lieu de vie, Gémo, Easy Cash, Lapeyre, autant d’enseignes que de grands magasins. Pas un seul petit commerce, pas d’école ni même de parc ou de trottoir, seulement des parkings, de grands hangars et un défilé de voitures. Il me semble pertinent de m’intéresser à ce cas d’implantation d’un lieu d’habitation au cœur d’une zone commerciale, et ainsi analyser la relation entre espace et contexte, spécialité de ma formation en DNMADe. L’étalement urbain est une réalité qui grignote les campagnes françaises depuis déjà plusieurs dizaines d’années. Les villes s’agrandissent et inévitablement, se retrouvent confrontées aux différents aménagements périurbains. Politique des années 60, la création de zones industrielles et commerciales a permis à de nombreuses activités, autrefois situées en ville, de se développer dans un ensemble plus vaste. Ces lieux, décrits comme cause de la « France moche » dans un article de Télérama en 2010, se sont étalés, provoquant au passage, la désertification des centres-villes. Ces zones offrent des hangars et des magasins de grandes surfaces, dont la facilité d’accessibilité a été conçue pour le consommateur motorisé. Alors que certaines politiques de la ville préfèrent contourner le problème, d’autres comme à Montpellier, le traversent et construisent des habitations en plein milieu de zones commerciales. L’envahisseur des campagnes est désormais envahi par la résidence. Deux lieux qui étaient distincts jusqu’au début du siècle actuel, se réunissent à des échelles différentes provoquant des situations inédites. Ce mémoire a permis de voir plus clair sur la réalité de ce phénomène et de comprendre comment s’est développée une vie résidentielle. Le campus faisant également l’objet d’une interrogation face à son statut d’ensemble et d’espaces collectifs. Alors comment, face au cas d’une implantation résidentielle au cœur d’une zone commerciale, peut-on favoriser le développement d’une vie durable ? Afin de traiter le sujet et de répondre au questionnement émis, un plan de recherche a été effectué. Tout d’abord, l’immersion depuis la construction du cas précis de la résidence a permis d’analyser les usages fréquents du lieu, et de véritablement les vivre. Un questionnaire d’enquête en ligne a été adressé aux habitants. Une recherche approfondie du contexte et de potentielles solutions, ont été complétées par de nombreuses lectures. Dans un premier temps, nous verrons les différentes causes à effet qui ont rendu le projet du campus Pérols incohérent face à l’idée initiale d’un plus vaste projet. Nous allons également établir une chronologie des décisions qui ont conduit à ce cas avant de finalement tenter de solutionner l’avenir du campus, à l’aide d’exemples se rapprochant de fonctionnement dit durable.
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I- CAS DU FENOUILLET : LA RÉALITÉ DE L’ ODE À LA MER I. 1 Le projet Ode à la mer I. 2 Le campus Pérols
I. 1 Le projet Ode à la mer La ville de Montpellier débute, fin 2011, la concertation d’un nouvel aménagement d’ensemble urbain. Le projet veut rattacher Montpellier à la mer par un développement vers le Sud. Cette politique de continuité, avec l’ambition de l’ancien maire Georges Frêche, regroupe les communes de Lattes, Pérols et Montpellier. En 2013, il est question d’un projet s’étalant sur plus de 250 hectares sur l’avenue Georges-Frêche, aussi appelée route de la mer. Le premier aménagement, intitulé Ode Acte 1, sur le site Ecopôle Frey, occupe 13 hectares, avec 111 000 m² de commerce dont un centre commercial de 61 000 m² et 2 500 places de parking. Avec ses deux étages, le complexe est situé à moins de 10 km du centre commercial Odysseum de 45 000 m², inauguré en 2009. Il doit également compléter deux autres zones commerciales, Grand Sud Lattes et Plein Sud Pérols (fig.1). L’idée est de transférer les boutiques du Fenouillet, situées à proximité en zone rouge inondable, dans le centre commercial. La ligne 3 de tramway, mise en service en 2012, est prévue afin de desservir le pôle commercial, reliant ainsi Montpellier centre et sa nouvelle entrée de ville. Le 12 juin 2020, le président de la Métropole de Montpellier, Phillipe Saurel, annule le projet de requalification de la zone Fenouillet. L’aménagement d’Ode Acte 1 et de son centre commercial est par conséquent mis à l’arrêt. Les raisons de cet abandon : de vives critiques sur les plans écologique et économique. À l’approche des municipales fin 2020, Europe Écologie Les Verts, avait demandé l’arrêt du projet Ode à la mer. En cause, une importante perte de terres agricoles, la désertification des sols et une biodiversité très impactée par la réduction de ses espaces, ainsi que la création de friches commerciales dont la destruction était favorisée à la reconversion. De plus, le nouveau centre commercial aurait mis à mal l’objectif de redynamisation des centres-villes de Montpellier, Lattes et Pérols. L’offre commerciale étant déjà très concurrentielle sur les pôles Odysseum, Grand Sud et Plein Sud. Les travaux ayant été engagés, on peut se demander ce qu’il va advenir du site : un projet de remplacement ou un abandon total des lieux laissant place à de nombreuses friches commerciales neuves sont envisageables. Le nouveau maire de Montpellier, Michaël Delafosse propose l’installation d’un futur stade, à financement privé, sur la zone (fig.2). Ce dernier comprendrait 25 000 places pour les spectateurs et un parking adapté. L’argumentation écologique destinée à l’annulation d’Ode Acte 1, est balayée, cette fois-ci, par la dimension économique et l’amour du sport. L’ensemble du territoire doit également accueillir un deuxième projet, intitulé Ode Acte 2, s’étalant sur 100 hectares. Ce dernier n’est pas annulé, mais il offre une continuité et un ensemble avec l’Ode Acte 1, son avenir semble incertain. La création de nouveaux quartiers résidentiels, de bureaux et de nombreux petits commerces repose sur la destruction des zones de commerce censées s’implanter dans le centre commercial Ode Acte 1. Le projet à long terme, s’étale sur trente ans, et a pour promesse de « créer le territoire d’un nouvel art de vivre-ensemble, où tout nous rapproche. Paysages naturels et agricoles retrouvés, transports interconnectés, logements bien intégrés, pôles d’affaires et de commerces réinventés, équipements partagés, cadre de vie apaisé. » 1. C’est un modèle de Smart City qui est mis en place dans ce projet, avec une technologie d’anticipation, de surveillance et d’information, notamment due au risque d’inondation dans la zone. Le but est de faciliter la vie des citoyens grâce aux avancées technologiques et d’offrir une expérience plus attrayante aux usagers. L’intérêt du projet s’organise également autour d’un hub de déplacement, avec l’aéroport, l’autoroute A9 et de toutes récentes infrastructures telles qu’une seconde gare et une ligne de tramway. Le projet a démarré en 2015 avec la construction de quelques bureaux, commerces et résidences. Parmi eux, le premier bâtiment résidentiel sur la zone Fenouillet livré en 2018 : le campus Pérols.
1 Source : Plaquette Ode à la mer «Nature urbaine», 2013 p. 3, http://garetgv.fr/oz/2013_ODE_a_la_mer_Nature_ urbaine.pdf
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Figure 1 : images KCAP, Reichen & Robert associés, CCI Montpellier / Marc Ginot, document présentation - Montpellier Agglomération - ODE à la mer Montpellier, nature urbaine, publié en avril 2013
Figure 2 : exemple d’insertion avec un photomontage à l’échelle en prenant l’exemple du stade Allianz Riviera de Nice sur une cartographie Google Maps - site internet Delafosse 2020, éléction municipale Montpellier Unie
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I. 2 Le campus Pérols La résidence où la vie devient plus facile, voici ce qu’avançait les architectes de l’atelier A. Garcia-Diaz et de l’agence Pierre Tourre Sanchis ainsi que les promoteurs M&A Promotion et Les Villages d’Or. Sur papier, le campus est destiné aux étudiants et jeunes actifs, grâce aux prix attractifs de la location. Il existe de multiples lieux de rencontre et de détente, tels que des espaces de multisports, de co-working, une laverie, un restaurant et des jardins. Elle « est pensée pour votre confort au quotidien : une implantation centrale au cœur d’un quartier dynamique, le tramway devant la résidence, des centres commerciaux et de loisirs à proximité immédiate et le campus Richter à moins de 5 minutes. Les espaces collectifs sont soignés et pensés pour favoriser les échanges et le co-working. » 2 (fig.3). Le campus a été livré il y a un peu plus de deux ans. La réalisation d’une analyse de l’écosystème (annexe 1 et 2) ainsi qu’un questionnaire fournit aux habitants du campus (annexe 3), a permis d’y voir plus clair sur la réalité de la résidence. Le campus est au cœur de la zone commerciale Fenouillet, qui comporte plus d’une cinquantaine de grands magasins (fig.4). Voici donc le quartier dynamique promis dans les premières lignes de description du campus. En plus d’avoir une vue peu avantageuse sur les grandes enseignes (fig.5), c’est avant tout le manque d’infrastructures pour les piétons qui est problématique (fig.6). La plupart de ces zones sont conçues pour des déplacements exclusivement faits en voiture, les trottoirs n’étant pas adaptés pour un usage résidentiel. Il a fallu attendre un an avant la sécurisation du passage du campus à la station de tramway. Il y a peu de passages piétons et les trottoirs sont étroits. Les espaces verts à l’extérieur de la résidence sont inexistants, à l’exception d’un rondpoint. Ce qui donne une image singulière d’habitants promenant leurs animaux de compagnie sur les parkings de Gifi, Kiabi et EasyCash. Autre problème, et non des moindres, le bruit. Les effets néfastes des décibels engendrés par le trafic routier sur la santé étant avéré, il semble inévitable, en habitant dans une telle zone, d’être incommodé par le bruit incessant des voitures. Sans oublier l’aéroport situé à moins de 3 km et son trafic aérien causant également une pollution sonore. Pourtant, à 500 m, derrière la résidence, se trouve un tout autre décor, des champs à perte de vue. Un contraste frappant dont le calme, les vignes et les chevaux feraient presque oublier le spectacle paradoxal du bruit, des voitures et des grands magasins. Cet endroit, caché de tous, est dangereux d’accès et très apprécié des chasseurs, ce qui peut décourager quelques promeneurs.
2 Source : Site internet du campus Pérols et ses brochures, https://campus-pérols.fr/
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Figure 3 : rendu entré Campus Pérols façade nord-est
Figure 4 : ZAC du Fenouillet à Pérols, 15 mai 2020 pérolsblog.com
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La résidence comporte une population de jeunes actifs et d’étudiants, dont le périmètre d’activité se situe pour 75 % d’entre eux à moins de 10 km du lieu d’habitation. Cette proximité permet à la plupart des personnes interrogées de se déplacer en mobilité douce, même si la voiture est, pour beaucoup d’entre eux, tout aussi présente. Plus de 50 % des personnes interrogées vivent seules, et n’ont jamais rencontré leur voisin. Cependant, quasiment tous les habitants ont connaissance d’un ou plusieurs espaces partagés, « pensés pour favoriser les échanges et le co-working » selon les architectes et les promoteurs du campus. Les trois quarts des résidents les ont pourtant rarement, voire jamais utilisés. Il est vrai que la résidence est très récente, qu’il faut un temps pour que des liens se tissent et que près de 80 % des habitants interrogés pensent rester moins de trois ans dans la résidence. La crise sanitaire actuelle ne favorise pas d’avantage les interactions sociales. Toutefois, la jeune population, plus apte à vouloir faire des rencontres, a répondu majoritairement entre 0 et 5 sur une échelle de 10 sur leur bien-être dans la résidence (0 étant le chiffre d’un mal-être, et 10 d’un bien-être). De plus, la grande majorité des personnes interrogées a eu connaissance du questionnaire par le groupe Facebook dédié aux résidents du campus. On peut émettre l’hypothèse que ces inscrits envisagent de faire plus de rencontres et de créer des liens par ce réseau social. Avec cette enquête, l’efficacité des espaces partagés est remise en doute, ainsi que le bien-être dans la résidence. Pour 35% des habitants, la localisation du bâtiment plaît par la proximité des besoins de consommation et la praticité pour les personnes n’ayant pas de voiture. Pour le même pourcentage, l’avis est partagé ou négatif, car il y a trop de circulations aux abords de la résidence les weekends et des problèmes d’insalubrités. De plus, il est impossible, pour certains, de profiter de leur terrasse à cause du bruit. Le manque d’espaces verts et la vue sont aussi un problème selon eux. De nombreuses remarques ont été portées sur des problèmes liés aux eaux collectives, au réseau Internet, ainsi qu’à la moisissure due à l’humidité. Le manque de place de parking et des voisins trop bruyants font également parties de la grande majorité des retours. Certains proposent d’organiser plus de rencontres entre voisins. En bref, le campus promet un cadre de vie idéal dans un quartier dynamique, mais la réalité est tout autre. L’appellation campus connote un ensemble de vie et d’étude, seulement la plupart des espaces partagés sont inexploités. Le problème provient peut-être du choix de ces espaces qui n’est pas adapté ou du manque de communication. Le ressenti des habitants de ce campus n’est pas très positif. Le modèle de tour aux multiples espaces, aux services collectifs et connectés ainsi que l’écosystème particulier de la résidence sont sûrement un facteur de ce mal-être général. Il existe un lien entre les problèmes internes du bâtiment et l’extérieur n’engageant aucun type de rencontre et de lieux communautaires. Le cadre dans lequel s’inscrit le campus n’a pas été construit pour l’habitation. La résidence elle-même et la zone dans laquelle elle se trouve, sont indissociables dans l’argumentaire des problèmes rencontrés au sein de la résidence. Ainsi, l’habitation est influencée par son contexte, assez inédit et récent dans l’histoire de l’urbanisation française. Le modèle de résidence édifié et pensé comme une bulle hermétique ainsi que le modèle des zones de commerce découlent de décisions politiques prises quelques années plus tôt.
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Figure 5
Figure 6
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II- LE MODÈLE : LES GRANDS ENSEMBLES ET LES ZAC II. 1 L’application Française de la Charte d’Athènes II. 2 L’ère des zones
II. 1 L’application Française de la Charte d’Athènes En 1933, s’est déroulé le 4ème CIAM 3 sur un bateau naviguant de Marseille à Athènes. Le congrès est organisé par les architectes les plus plébicités de l’époque dont Le Corbusier. Le but est de se concerter pour diffuser des principes de modernisation dans l’architecture à travers des thèmes et des domaines précis. Cette 4ème organisation solutionne la ville fonctionnelle. Le Corbusier édite et publie en 1942 les propositions d’un nouvel urbanisme, basé sur ce 4ème congrès : la Charte d’Athènes. On y retrouve de multiples principes, dont la notion d’évolution engendrée par les nouvelles techniques et technologies telles que la voiture. La ville des piétons et des carrosses, crée le désordre dans les avenues ne correspondant plus aux besoins de la population. « Le chaos est entré dans les villes » selon la charte et la forte préoccupation liée à la circulation, en fait une des quatre fonctions de la ville décrite dans le texte. Les architectes découpent la ville dans les secteurs d’urbanisation suivants : l’habitation, le travail, les loisirs et la circulation. Cette théorie de l’urbanisme fonctionnel est dirigée par la rationalité qui s’oppose à la ville du passé. Le soleil prend une place importante dans la réflexion du logement. Ainsi, il ne faut plus construire dans l’alignement traditionnel, le long des voies de communication, mais fixer un nombre d’heures minimum pour chaque logis. Les rues doivent par ailleurs être différenciées selon leur fonction (rue d’habitation, de transit, de promenade... ), et le piéton doit suivre un chemin autre que celui de l’automobiliste. L’espace fonctionnel est aussi une notion importante du texte. L’habitation haute permet de libérer de la surface au sol, et d’implanter des espaces verts, eux-mêmes étant définis par des fonctions strictes (jardins d’enfants, écoles, lieux communautaires...). Tous ces espaces respectifs forment un ensemble. La France face à la crise du logement après la Seconde Guerre mondiale, reprend bon nombre des principes cités précédemment dans la charte d’Athènes. Le MRU 4, dont le mandat débute en 1944, souhaite reconstruire le parc immobilier détruit pendant la Seconde Guerre Mondiale. À l’époque, il faut faire face à l’essor démographique et selon les termes du MRU résorber l’habitat insalubre. La politique prend le parti de l’idéal-type du logement social évoqué lors du 4ème CIAM. La reconstruction et l’édification de cités modernes, qu’on appela en 1951 les grands ensembles, deviennent un emblème des Trente Glorieuses. La construction de ces logements sur les ZUP 5, fit polémique dès les années 1960. Les critiques se portent sur les excès de ces habitations de masse à l’image d’un « nouvel académisme architectural » 6. En 2012, l’ARAU 7, lors de la déclaration de Bruxelles, s’oppose à la Charte d’Athènes : « Toute intervention sur la ville européenne doit obligatoirement réaliser ce qui toujours fut la ville, à savoir : des rues, des places, des avenues, des îlots, des jardins... soit des «quartiers». Toute intervention sur la ville européenne doit par contre bannir les routes et les autoroutes urbaines, les zones monofonctionnelles, les espaces verts résiduels. Il ne peut y avoir ni zones «industrielles», ni zones «commerçantes», ni zones « piétonnières »... mais seulement des quartiers incluant toutes les fonctions de la vie urbaine [...] ». De nombreuses problématiques sociales apparaissent dues au manque d’équipements. Une série d’articles, de revues généralistes, dénonce le mal des grands ensembles et les compare à « des cages à lapins »8. Une certaine cité construite par Le Corbusier fait même son apparition dans Libération en 2012, sous le nom de la maison du fada.
3 CIAM : Congrès International d’Architecture Moderne 4 MRU : Ministère de la Reconstruction et de l’Urbanisme 5 ZUP : Zone à Urbaniser en Priorité, procédure d’urbanisme créée en 1959 6 Sources : A. Fourcaut, « Les grands ensembles ont-ils été conçus comme des villes nouvelles ? », art. cit, p21 7 ARAU : Atelier de Recherche et d’Action Urbaine, fondé en 1969 8 Sources : Françoise Choay, «Cités-jardin ou cages à lapins ?», France observateur, juin 1959
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La cité radieuse, conçue à Marseille entre 1947 et 1952 par Le Corbusier, incarne parfaitement ce type de bâtiment nouveau et moderne pour le XXe siècle (fig.7). Le laboratoire d’un nouvel habitat, fonctionne comme un ensemble de logements individuels introduit dans une structure collective. La nouveauté, au milieu du logis, un prolongement caractérisé par une rue commerçante interne au bâtiment, un bar-restaurant, un hôtel, une boulangerie, une école maternelle, un gymnase et d’autres. Le campus Pérols n’est qu’une caricature face à cette construction ambitieuse. Mais on y retrouve quelques ambitions jumelles telles que les espaces de vie collectifs, comme si le lieu résidentiel suffisait, à lui seul, pour rendre la vie épanouissante sans sortir de chez soi. Autant de villes à échelle d’un bâtiment. Pour le cas du Fenouillet cela aurait permis d’oublier la zone commerciale environnante, si l’ambition avait fonctionné. Cependant, dans la Charte d’Athènes, il est bien question d’imaginer les extérieurs du lieu de vie, comme des espaces de verdure par exemple. Dans le cas du campus Pérols, c’est peut-être ce facteur non évalué qui pose une problématique.
Figure 7 : La cité radieuse de Marseille, Maxppp
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II. 2 L’ère des zones Les années 1960 marquent la lente destruction des campagnes provoquée par l’étalement urbain. Les modes de vie ont radicalement changés et la voiture est placée au cœur de beaucoup de décision urbanistique. Selon ASFA 9, par exemple, 1 010 km de réseau autoroutier concédé est compté en 1960, contre 9 167 km en 2016. La loi du 4 février 1995, d’aménagement et de développement du territoire prévoyait qu’« en 2015, aucune partie du territoire français métropolitain continental ne sera située à plus de 50 kilomètres ou de 45 minutes d’automobile d’une autoroute ou d’une route express à deux fois deux voies en continuité sur le réseau national.». Ceux qui en profitent, ce sont les supermarchés. Grâce ou à cause de la loi Deferre de 1983, ces puissantes enseignes ont pu négocier leurs emplacements auprès des propriétaires privés, des élus, des aménageurs de ZAC et des directions départementales de l’équipement. La loi transfère les compétences de l’État vers les collectivités territoriales dans différents domaines tels que l’urbanisme, les actions sociales, etc. Cela a permis aux hypermarchés de subventionner des infrastructures pour les villes, en échange de leurs implantations sur des terrains agricoles. L’apparition des ZAC 10 vendues aux organismes privés des grands groupes de supermarchés, s’effectue en périphérie des villes. L’objectif pour les hypermarchés est d’attirer les consommateurs de centre-ville et des lotissements alentours, en formant ce que l’on appelle une zone de chalandise. Un trio vient de se mettre en place, des infrastructures routières puis des zones commerciales et enfin des lotissements (immeuble ou pavillon). L’une des conséquences de ce modèle est la désertification des commerces en centre-ville. De plus, avant la loi de modernisation de l’économie votée en 2008, les grandes surfaces ne sont pas soumises au droit de l’urbanisme, mais au droit commercial. La surface importait, mais pas la forme ou l’aspect des bâtiments. Ce qui a valu au pays le nom de « France moche » dans un article de Télérama en 2010. La bétonisation de ces espaces est de rigueur, notamment due au principe, à l’Américaine, du no parking, no business 11. Très vite, les supermarchés deviennent de grands groupes comprenants différentes autres enseignes, des MSS 12 qui agrandissent les ZAC. Pour exemple, le groupe Mulliez, détient : Auchan, Kiabi, Leroy Merlin, Boulanger, Flunch, Decathlon, Norauto, preuve que ce fonctionnement est très lucratif pour ces entreprises. Nous avons donc pris des attributs citadins, avec lesquels les gens se retrouvent et se rencontrent, puis les avons placés à l’extérieur des villes. Des lieux à vocation sociale comme peuvent l’être les cinémas et les commerces se sont retrouvés situés en périphérie des villes. C’est un étalement de l’ensemble des activités de la ville dans un ensemble beaucoup plus vaste. Cela pose des questions environnementales et sociales car les personnes se rencontrent moins. Mais aussi des questions de perspectives de notre société : fait-on une ville pour l’être humain ou juste pour le consommateur motorisé ? Avec le campus Pérols, nous découvrons une nouvelle hybridation de ces deux phénomènes de grands ensembles et de zonage. Une chimère qui regroupe un bâtiment, structuré comme un ensemble, sans lien avec son extérieur, conçu comme un lieu de consommation à grande échelle. C’est le manque de liens entre espace, contexte et habitants qui rend la résidence peu conviviale et sujette à de nombreux problèmes.
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9 ASFA : Association des Sociétés Françaises d’Autoroutes 10 ZAC : Zone d’Aménagement Concerté, s’est substituée à la ZUP en 1967 pour faciliter la concertation entre collectivités publiques et promoteurs privés 11 Précepte de Bernardo Trujillo, homme d’affaire qui a formalisé dans les années 1950 aux États-Unis, les principes théoriques et pratiques qui ont porté vers le succès la grande distribution moderne, traduction : pas de parking, pas d’affaire 12 MSS : Moyennes Surfaces Spécialisées
III- HABITER DURABLEMENT : L’ IMPORTANCE DU LIEN III. 1 L’adaptation et la résilience III. 2 Les espaces de partage co-construit
III. 1 L’adaptation et la résilience Le campus Pérols ne s’inscrit que dans une transition, en attente de la construction d’un quartier entier, si la suite du projet Ode à la mer n’est pas annulée. Cependant, les habitants ne doivent pas être condamnés à l’attente, de trente longues années, d’une promesse de vie au cœur d’un quartier dynamique. Les notions de friche et de lieu temporaire sont intéressantes à analyser dans ce cas. En 2010 dans Paris intra-muros, l’hôpital Saint-Vincent-de-Paul déménage progressivement, laissant un espace désaffecté. Les associations Aurore, Plateau Urbain et Yes We Camp, se réunissent pour rendre utile ce lieu temporairement vacant (fig.8). L’objectif du projet appelé Les Grands Voisins est de favoriser la mixité sociale, de créer du commun, d’insuffler de la résilience au lieu et surtout de s’adapter. Un pari réussit qui occupa le site de 2015 à 2020 avec des besoins des fondamentaux tels que : le logement, la nourriture, les espaces partagés, la réalisation individuelle et collective, le temps et l’humain. Sur 3,4 hectares 2 000 personnes travaillent et vivent, 1 000 personnes sont en hébergement d’urgence, 5 000 bénévoles contribuent au bon fonctionnement et à l’amélioration du lieu. Des ateliers et des bureaux sont proposés à la location à des prix imbattables et de nombreux événements culturels, éducatifs et artistiques sont proposés gratuitement aux visiteurs. La dimension solidaire de faire place à des personnes en situation de précarité est un enjeu primordial pour le lieu. Offrir les cadres d’implications citoyennes, a permis de créer, pendant les cinq années, un quartier à part entière. Des personnes très différentes en apparence, ce sont retrouvées mêlées dans un seul et même lieu de vie, pratiquant des activités diverses. Ce projet exprime l’importance de la diversité des personnes, des cultures, des actions, et des loisirs pour créer du lien. Les solutions locales et spontanées qu’ont apportées les trois associations, ont permis de démontrer la possibilité de remédier aux crises globales. C’est un ensemble, réfléchi pour fonctionner les uns avec les autres qui rend le lieu convivial et pertinent lorsque qu’on parle de durabilité, même si l’on peut croire que cela est paradoxal, puisque ce lieu fut temporaire. La notion de durabilité n’est pas figée, elle assure la pérennité d’un espace sans pour autant qu’il soit immuable, apportant une seule et même fonction. Il est donc important de créer des espaces polyvalents et modulables en fonction des besoins et des désirs des citadins. Des lieux malléables, qui s’adaptent aux évolutions de l’urbain. La réutilisation de certains lieux et matières fait aussi sens lorsque l’on parle de durabilité et de lien. Quand la destruction des lieux est privilégiée, certaines villes ont décidé de réemployer ou de recycler les ressources habituellement inexploitées. Par exemple, Nantes a décidé de redonner vie à son île autrefois richesse industrielle. C’est un aménagement entier de l’île qui est pensé depuis 1990. Ce qui est intéressant dans ce projet, pour notre propos, c’est la réutilisation des matériaux issus de la déconstruction de la zone pour reconstruire une partie de l’aménagement d’un des quartiers. La ville réemploie des bâtiments existants et réutilise des ressources de l’île. Cette gestion a permis d’économiser un million d’euros selon la métropole de Nantes. Une très grande partie des matériaux (bois, bétons, ferrailles, sables...) de l’ancien marché d’intérêt national de l’île et des friches ferroviaires, est recyclée auprès de filières spécialisées ou réutilisée dans son aménagement. Les bancs, les éclairages et les appuis vélos d’un des nouveaux quartiers de l’île proviennent tous de ce démantèlement. Certains aménagements des voies, et chemins proviennent du réemploi des bordures en granit et des pavés nantais. Cette stratégie permet de garder un lien avec le passé du site et surtout de se rapprocher d’une notion de durabilité dans la requalification d’un lieu.
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Avec ces deux exemples, il semble intéressant d’imaginer solutionner la zone du Fenouillet, comme un lieu dont les bâtiments commerciaux pourraient dans un premier temps, avoir un usage communautaire temporaire. Dans une notion plus forte de durabilité, il faudrait requalifier les magasins et les aménagements sans pour autant devoir les détruire sur le long terme. Seulement si la destruction est privilégiée, la réutilisation et le recyclage des matériaux seraient une stratégie économique cohérente et s’inscriraient dans une notion de durabilité certaine. L’un des principaux problèmes du campus Pérols est qu’il y a peu d’espaces libres à disposition des habitants. La résidence est encerclée par des terrains occupés comprenant magasins et parkings bétonnés. Toutes les fonctions sont à repenser autour et dans ce campus, où la place aux rencontres et à l’imaginaire semble inexistante. Dans la résidence chaque lieu est défini, et à l’extérieur également. Les lieux et les villes n’ont pas tous les mêmes enjeux, les mêmes besoins et le même vécu, c’est pourquoi, la notion de schéma figé et recopié n’est pas envisageable. Autrefois champs, puis zone commerciale le lieu est devenu austère presque sans vie. Pourtant une dimension de renouveau est apparue avec les habitants du campus Pérols. A plus petite échelle, qu’adviendrait-il si ces résidents pouvaient prendre en main le lieu et ainsi lui insuffler une transition qui répond à leurs besoins ?
Figure 8 : Terrasse des Comptoirs aux Grands Voisins – source : Yes we Camp
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III. 2 Les espaces de partage co-construit Pour rappel, le prochain quartier du Fenouillet est conçu sur ce que l’on appelle le modèle Smart City. Ce dernier fait son apparition dans les années 1980, poussé par la révolution numérique. La ville intelligente est contestable par son contrôle et l’hyper-numérisation de la gestion urbaine. Ce qui laisse peu de place à la spontanéité des habitants dans la construction et l’appropriation de la ville. L’utilisation des innovations technologiques dans une démarche de contrôle ne semble pas être appropriée pour une vie durable, qui comprend la sensibilité et la créativité de ses usagers. C’est en tout cas ce que l’exemple du campus Pérols nous laisse croire. Car même si le quartier n’existe pas encore, il est pensé comme une finalité et non une continuité. La première résidence étant construite dans un écosystème censé évoluer en une trentaine d’années. La notion du présent n’ayant pas été pensée, on laisse un lieu en transition au milieu d’une vie idéale pensée pour commencer plusieurs années plus tard. De plus, les espaces connectés et contrôlés du campus ont permis de faciliter la vie de certains habitants, mais pas de favoriser les rencontres ni même le bien-être des résidents. Il existe une alternative à la Smart City, le concept de la Wise City. Il faut traduire « Wise » par raisonnable, sobriété, cette idée aide à l’amélioration de la ville par des solutions nécessitant moins d’énergie et de ressources que dans la Smart City. Face aux problèmes quotidiens la Wise City s’appuie sur l’intelligence collaborative. Elle crée une union de la participation de l’habitant, du commerçant, de l’association, de l’architecte, du designer, du sociologue, etc. Ainsi, ensemble, ils servent à l’amélioration des lieux. Car quoi de mieux pour analyser et comprendre un lieu que l’union de ceux qui l’utilisent ou l’utiliseront, ceux qui le conçoivent et l’étudient ? La démarche de solutionner, de manière participative les problèmes du campus Pérols semble intéressante. Prenons l’exemple du projet diventare giardino 13 (fig.9). En Italie, à Palerme, dans un quartier du nom de ZEN 2 se sont produits le collectif COLOCO et le paysagiste Gilles Clément. La construction de l’ensemble des logements sociaux n’est jamais arrivée à sa fin, laissant place à des vides urbains. Ces espaces devaient accueillir des lieux destinés à la société. La conséquence pour ce quartier fut des conditions de grave incurie, et un cruel manque de lieu à vivre-ensemble. Une action collective a été engagée avec les citoyens du quartier, qui a permis de remédier à cette négligence publique. L’élaboration d’un jardin au cœur de ce quartier et de la ville cultiva le sens de la communauté. Le jardin est un lieu privilégié donnant à un espace abandonné, un espace vert, et de nouveau vivant. C’est toute cette dimension qui rend ce projet intéressant. Car pour pouvoir vivre, le jardin ne demande que la volonté de prendre soin, ensemble, d’un espace commun. Le projet ne pouvant être réalisé qu’avec l’envie de changement, l’enthousiasme et le soutien de tous. Cet espace collectif a donné lieu à un bien commun. De plus le jardin a continuellement besoin de transformations et de partage, c’est ce qui le rend stimulant pour le quartier. Sous le prétexte de création d’un jardin, un espace positif s’est construit et avec lui, le sentiment de communauté. Le tout donne l’exemple d’une culture de la nature en milieu urbain. C’est l’intelligence collaborative et les ressources mises à disposition des habitants et de COLOCO qui rendit le projet réalisable. Le lien qui peut exister entre l’habitant et la construction de son lieu de vie donne une dimension et un attachement plus fort entre eux. Il est important qu’un individu s’approprie le lieu où il vit. Dans le cas du campus Pérols la solution peut être l’appropriation d’un endroit dédié à la communauté et l’esprit de partage. Quand tout semble être opposé et problématique, il faut pouvoir rassembler et donner lieu à un nouvel espace d’expression. C’est avec la volonté des habitants du campus de changer leur lieu de vie qu’une démarche durable pourra se faire.
13 Traduction : devenir jardin
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Figure 9 : Projet diventare giardino, les habitants créent le jardin, source journal la repubblica
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CONCLUSION Face au cas du campus Pérols, une résidence placée au sein d’une zone commerciale, nous nous sommes interrogés sur la possibilité d’un développement d’une vie plus durable en ce lieu. Ainsi, le mémoire avait pour ambition d’analyser le contexte et l’espace de ce cas précis pour proposer des solutions d’amélioration de la vie des habitants. Le campus Pérols est une caricature face à la théorisation de la ville fonctionnelle des grands penseurs du XXème siècle. Elle résulte d’une politique d’après-guerre, qui ont produit des grands ensembles. Les espaces de vie collectifs sont pensés comme si le lieu résidentiel pouvait se suffire à lui seul. Ainsi, la vie pourrait être épanouissante sans pour autant sortir de chez soi. Cela aurait permis d’oublier la zone commerciale environnante, si l’ambition avait fonctionné. La résidence promet un cadre de vie idéale dans un quartier dynamique, mais la réalité est tout autre. La plupart des espaces partagés sont inexploités et le bien-être des habitants de ce campus n’est pas positif. La résidence elle-même et la zone dans laquelle elle se trouve, sont indissociables dans l’argumentaire des problèmes rencontrés au sein de la résidence. L’insalubrité, les voitures, le bruit, la vue, le non-respect des parties communes mènent à un mal-être général. La zone commerciale résulte du mitage des attributs citadins, avec lesquels les gens se retrouvent et se rencontrent. Des lieux à vocation sociale comme peuvent l’être les cinémas et les commerces se sont retrouvés situés en périphérie des villes. C’est un étalement de l’ensemble des activités de la ville dans un ensemble beaucoup plus vaste. Cela pose des questions environnementales et sociales, car les personnes se rencontrent moins. Mais aussi des questions de perspectives de notre société, qui façonne une ville pour le consommateur motorisé. Avec le campus Pérols, nous découvrons une nouvelle hybridation de ces deux phénomènes de grands ensembles et de zonage. Une chimère qui regroupe un bâtiment, conçu comme un ensemble de vie, sans lien avec son extérieur, conçu comme un lieu de consommation à grande échelle. C’est le manque de liens entre espace, contexte et habitants qui rend la résidence peu conviviale et sujette à de nombreux problèmes. La résidence ne s’inscrit que dans une transition, en attente de la construction d’un quartier entier. Le quartier du Fenouillet conçu sur ce que l’on appelle le modèle Smart City. Avec une technologie d’anticipation, de surveillance et d’information, la ville intelligente est contestable par son contrôle et l’hyper-numérisation de la gestion urbaine. Les espaces connectés et contrôlés ont permis de faciliter la vie de certains habitants, mais pas de favoriser les rencontres ou bien même d’améliorer le bien-être des résidents. Le quartier est pensé comme une finalité et non une continuité. La première résidence étant construite dans un écosystème censé évoluer en une trentaine d’années. La notion du présent n’ayant pas été pensée, on laisse un lieu en transition au milieu d’une vie idéalisée et pensée pour commencer plusieurs années plus tard. Les habitants ne doivent pas être condamnés à l’attente, de trente longues années, d’une promesse de vie au cœur d’un quartier dynamique. La zone du Fenouillet pourrait être solutionnée, comme un lieu, dont les bâtiments commerciaux auraient dans un premier temps, un usage communautaire temporaire. Ainsi, la réutilisation des lieux de friche deviendrait utile aux besoins de rencontre et de partage des habitants, le temps de la construction du quartier. Dans une notion plus forte de durabilité, si l’on devait repenser le futur quartier du Fenouillet, il faudrait requalifier les magasins et les aménagements sans pour autant devoir les détruire sur le long terme. Cependant, si la destruction est privilégiée, la réutilisation et le recyclage des matériaux dans le futur quartier, seraient une stratégie cohérente économiquement et s’inscriraient dans une notion de durabilité certaine.
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L’un des principaux problèmes du campus Pérols est qu’il y a peu d’espaces libres à disposition des habitants. La résidence est encerclée par des terrains occupés comprenant magasins et parking bétonnés. Dans la résidence, chaque lieu est défini, et à l’extérieur également. Toutes fonctions sont à repenser autour et dans ce campus, où la place aux rencontres et à l’imaginaire semble inexistante. Les lieux et les villes n’ont pas tous les mêmes enjeux, les mêmes besoins et le même vécu, c’est pourquoi, la notion de schéma figé et recopié n’est pas envisageable. Autrefois champs, puis zone commerciale, le lieu est devenu austère presque sans vie. Pourtant, une dimension de renouveau est apparue avec les habitants du campus Pérols. Solutionner, de manière participative les problèmes de la résidence semble inintéressant. Il faut améliorer la vie par des solutions nécessitant moins d’énergie et de ressources que dans la Smart City. Le lien qui peut exister entre l’habitant et la construction de son lieu de vie donne une dimension et un attachement plus fort entre eux. Il est important qu’un individu s’approprie le lieu où il vit. En s’appuyant sur l’intelligence collaborative, de la participation entre habitants, commerçants, associations, architectes, designers, sociologues, on peut, ensemble, résoudre des problèmes quotidiens. Ainsi, dans le cas du campus Pérols la solution peut être l’appropriation d’un endroit dédié à la communauté et l’esprit de partage. Quand tout semble être opposé et problématique, il faut pouvoir rassembler et donner lieu à un nouvel espace d’expression. C’est avec la volonté des habitants du campus de changer leur lieu de vie qu’une démarche durable pourra se faire.
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MOTS CLEFS ET LISTE DES ABRÉVIATIONS campus, vie résidentielle, espaces collectifs, aménagements, ensemble urbain, quartiers, urbanisme fonctionel, Trente Glorieuse, grands ensembles, cités, mitage, zones, zones commerciales, ZAC, zonage, bétonisation, transition, adaptation, résilience, durable, polyvalants, réutilisation, liens, participation, intelligence collaborative, espaces partagés. CIAM : Congrès International d’Architecture Moderne MRU : Ministère de la Reconstruction et de l’Urbanisme ZUP : Zone à Urbaniser en Priorité, procédure d’urbanisme créée en 1959 , qui a permis la construction des grands ensembles ARAU : Atelier de Recherche et d’Action Urbaine, fondé en 1969 ASFA : Association des Sociétés Françaises d’Autoroutes ZAC : Zone d’Aménagement Concerté, s’est substituée à la ZUP en 1967 pour faciliter la concertation entre collectivités publiques et promoteurs privés MSS : Moyennes Surfaces Spécialisées
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BIBLIOGRAPHIE ET SOURCES Ouvrage : Charte d’Athènes, Le Corbusier, 1942 (extrait sans numérotation de page) Article : Comment la France est devenue moche, Télérama, Xavier de Jarcy et Vincent Remy, 2010 Étude : Les grands ensembles, Cinquante ans d’une politique-fiction française, Raphaële Bertho, 2014 Plaquette : Dossier Ode à la mer, Montpellier Agglomération, 2013, http://garetgv.fr/oz/2013_ODE_a_la_ mer_Nature_urbaine.pdf Dossier : Dossier de cloture de l’expérience des grands voisins, septembre 2020, https://lesgrandsvoisins. org/wp-content/uploads/2020/09/Les-Grands-Voisins-Dossier-de-cloture-de-l-experience.pdf Site internet : Actu, Occitanie, https://actu.fr/occitanie/montpellier_34172/montpellier-perols-le-projet-ecopole-sur-le-site-ode-a-la-mer-englouti-par-philippe-saurel_34267213.html Institut montaigne, municipales 2020, https://www.institutmontaigne.org/municipales-2020/ montpellier/michael-delafosse/stopper-le-projet-ode-a-la-mer-et-y-construire-un-nouveaustade-a-financement-prive Site Michaël Delafosse, https://www.delafosse-2020.fr/nouveau-stade Site cours, https://www.maxicours.com/se/cours/les-ciam-et-la-charte-d-athenes/ Site office de tourisme et des congès de Marseille, https://www.marseille-tourisme.com/decouvrez-marseille/culture-et-patrimoine/sites-et-monuments/cite-radieuse-le-corbusier/ Site no planet B, punto.sud, https://it.noplanetb.net/video-conteste/non-solo-un-giardino/ Baseland, https://www.baseland.fr/recherches/wise-city/ https://www.baseland.fr/recherches/smart-city/ Site île de Nantes, Samoa, https://www.iledenantes.com Radio : A quoi ressemble la France moche ? (émission France Inter jeudi 15 août 2019 par Nadia Daam) https://www.franceinter.fr/emissions/le-debat-de-midi/le-debat-de-midi-15-aout-2019
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LISTE DES ANNEXES Annexe 1 : Photos du campus Pérols (infrastructures intérieur extérieur) Annexe 2 : Photos de la zone commerciale Fenouillet Annexe 3 : Questionnaire complet du campus Pérols
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Annexes 1
Photos prises lors du confinement, un samedi à 16h
Vue du 5ème étage
Vue du 5ème étage
Vue du 5ème étage
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Cour intérieur
Espace partagé 1
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Espace partagé 2
Espace partagé 3
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Annexes 2
Photos prises lors du confinement, un samedi à 16h
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Annexes 3
Réponse de 65 habitants du campus Pérols
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Maïwenn Humbert Jeudi 28 Janvier 2020 Diplôme National des Métiers d’Art et de Design de Lattes Spécialité Espace et Contextes
L’étalement urbain est une réalité qui grignote les campagnes françaises depuis déjà plusieurs dizaines d’années. La création de zones industrielles et commerciales, conséquence de la politique des années 60, a permis à de nombreuses activités, autrefois situées en ville, de se développer dans un ensemble plus vaste. Les villes s’agrandissent et inévitablement, se retrouvent confrontées aux différents aménagements périurbains. Alors que certaines politiques de la ville préfèrent contourner le problème, d’autres comme à Montpellier, le traversent et construisent des habitations en plein milieu de zones commerciales. L’envahisseur des campagnes est désormais envahi par la résidence. La réalité de ce phénomène fait également l’objet d’une interrogation face au statut d’ensemble et d’espaces collectifs de la résidence elle-même. Ce mémoire oppose la ville pensée du XXème siècle avec la ville partagée ou bien encore la ville expérimental du XXIème siècle.
The last fifty years have seen the french countryside being transformed and submerged by urban sprawl. The 1960’s politics have created a new kind of industrial and commercial areas widely attracting many activities previously set in city centers. When cities are now expanding they face with a variety of suburban construction obstacles. Some cities might make the choice to bypass this very issue when others, following the example of Montpellier, would rather enhance density inside these suburban areas. In consequence, it’s not rare to find few apartment blocks isolated in between larger commercial areas. Ironically the countryside invader has now been invaded by residences. This phenomenon directly questions the notion of collective spaces surrounding dwellings. This short dissertation deals with the conceptual city of the twentieth century opposed to the shared and experimented city of the twenty first century.