L'organisation des espaces urbains d'inegalité - des favelas au Brésil et des bidonvilles en France

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L’ORGANISATION DES ESPACES URBAINS D’INÉGALITÉ des favelas au Brésil et des bidonvilles en France


CONTESSOTTO DA SILVA Maria Claudia Mémoire suivi par: DELLINGER, Frederic E.N.S.A.G. - 2018


SOMMAIRE INTRODUCTION 1 – La dynamique des espaces urbains d’inégalité: analyse des différenciations et des transformations 1.1 - Les favelas : sa définition 1.2 - Tous les favelas sont égales ? 1.3 - Contexte historique 2 – La construction des villes : logiques d’urbanisation différenciées 2.1 – Favela Rocinha, au Rio de Janeiro, RJ A - La Rocinha, du point de vue de la forme B - Une analyse de la morphologie urbaine C - La topographie comme facteur d’analyse D - Conditions de logement E - En comprenant le lotissement et les tracées des voies 2.2 – Favela Paraisópolis, à São Paulo, SP A – Une analyse des marges de Paraisópolis, SP B – Construction d’une morphologie au fil du temps C – Problèmes de marges conflictuels D – Les conditions d’habitation

2.3 - Qui sont les habitants des ces favelas ?


3 – Pourtant, les favelas n’existent-elles qu’au Brésil ?

3.1 – Les bidonvilles, des favelas à la française ?

terre

3.2 – Étude de cas en France : « Le bidonville de la folie », à NanA – un regarde sur son tissu et les habitations B – situation actuelle

3.3 – La resurgence des bidonvilles en France A – Qui y habitent? B - Typologie des logements et conditions de vie C - Un essaye de localisation des endroits

4 – Considerations finales : vers une ville metissée À RETENIR BIBLIOGRAPHIE


INTRODUCTION

Comprendre la ville dans sa pluralité, c’est reconnaître la spécificité de chaque territoire et de ses habitants, les considérer comme des citoyens qui doivent avoir leurs droits sociaux garantis sous la forme de politiques publiques attachées à leurs territoires. C’est un principe de validation complète de la vie sociale, orienté démocratiquement et configuré dans les usages légitimes du territoire par des groupes sociaux marqués par de profondes inégalités sociales. Il y a une utopie citadine qui tente de rompre avec les processus de particularisation des rapports sociaux, reconnaissant la différence de l’autre. Et en ce sens, le bidonville ou la favela, qui sont les éléments principaux à ignorer, deviennent le principal problème, deviennent l’étranger. Qu’ils soient nommés bidonvilles (France), slums (pays anglophones), favelas (Brésil)… partout le constat est identique : la ville à trouvée son contraste en ces villes parallèles, et le phénomène ne fait que multiplier. Même si, aujourd’hui, le problème n’est considéré comme « enjeu majeur » que dans les pays émergents (pauvres, dont les situations économique, éducationnelle et sanitaire sont mauvaises), il est également présent dans des pays développés comme les pays Européens. Ainsi, malgré les politiques et projets de disparation de bidonvilles en Europe, mis en place dans les années 70, et après avoir pensé le problème comme déjà résolu, le phénomène est un fact lequel réapparaît sans que l’on ne s’en préoccupe vraiment. Les bidonvilles européens suportent d’une discrimination urbaine, ainsi comme les favelas brésiliénnes. Là, la problématique tourne alors des questions suivantes : est-ce que les espaces urbains d’inégalité au Brésil et en France sont similaires ? Comment ces espaces sont traduits dans la ville par rapport à ses morphologies et différents aspects? Quelle est l’importance de ces espaces pour la compréhension de la conception de ville contemporaine, ville de contrainte ? L’objectif principal de cette recherche était d’étudier les facteurs qui conduisent à la configuration urbaine formelle apparemment aléatoire (ce qui nous amène à la considérer comme un tissu informel sans logique) que l’on trouve dans certaines favelas de Rio de Janeiro et aussi à São Paulo. En prenant comme méthode l’investigation des éléments de la forme urbaine, s’est posé la question de comment se caracterisent les marques des facteurs générateurs de chaque configuration. La favela de Rocinha et la favela de Paraisópolis ont été prises en compte pour l’application de cette méthode d’analyse. 3


Les facteurs qui génèrent la configuration de la favela incluent des caractéristiques naturelles du site, aux utilisations et valeurs culturelles spécifiques de chaque occupation, jusqu’aux interventions institutionnelles de l’urbanisation. La forme de la favela est étudiée en tant que «structure révélée», c’està-dire en fonction des modes d’organisation, de la fonction prévue et des actions dans le temps, afin de rechercher des éléments de la forme de favela pouvant révéler son évolution et sa configuration présent. En suite, c’est fait un point de recule en se posant la question si les favelas (son concept) existent-elles aussi dans le monde, particulièrment en France, avec le développement du terme bidonville et son origine. Pour mieux comprendre les bidonvilles en France et son apparition, un étude de cas est fait sur le bidonville de la Folie, à Nanterre-Paris, et qu’aujourd’hui est complètement résorbé et remplacé par des logements sociaux. Après, il est montré les bidonvilles d’aujourd’hui et comment ils se trouvent dans le tissu urbain des villes. En conclusion, une vision optimiste mise en place pour l’avenir des villes avec l’aceptation des espaces urbains « d’inégalité », ménées vers une ville de contraste, métissée. Que les espaces urbains considérés aujourd’hui comme d’inégalités, et donc des renégats, ne soient plus un « problème » à masquer. Mais que sa visibilité soit mise en valeur pour que l’on comprenne que les coutures du tissu urbain sont importantes pour une meilleure performance de la ville dans son ensemble.

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1.1 - Les favelas : sa définition

« Je suis favela... Parce que les pauvres n’ont pas d’autre moyen Ils ont seulement le droit à un salaire faim Et une vie normale La favela est un problème social » – chanteur Bezerra DA SILVA, chanson « Eu sou favela »

Figure 1 - Image des favelas au Brésil. Source: rothbardbrasil.com/wp-content/uploads/2015/10/1rd_ROCINHA_by_Alex.jpg

Si on fait une réflexion, l’axe paradigmatique de la représentation des favelas est l’absence. Dans cette perspective, la favela est définie par ce qu’elle ne serait pas ou ce qu’elle n’aurait pas. Dans ce cas, généralement il est saisi comme un espace privé d’infrastructures urbaines - eau, lumière, égouts, collecte des échets; sans rues; globalement misérable; sans ordre; sans loi; sans règles; sans morale. Enfin, l’expression du chaos. Un autre élément particulier de la représentation habituelle des favelas est leur homogénéisation. Présent dans différents sites géographiques - dans les plaines, les collines, les rivières et les lagunes - et réunissant quelques centaines de résidents à quelques milliers. Aussi, avec des caractéristiques sociales et environnementales variées, les favelas constituent des territoires qui s’expriment dans des paysages considérablement diversifiés. L’homogénéité, cependant, est le tonique quand il s’agit d’identifier cet espace populaire. 5

La dynamique des espaces urbains d’inégalité

1 – La dynamique des espaces urbains d’inégalité: analyse des différenciations et des transformations


Selon l’Observatório de Favelas, il est considéré que la favela est un territoire composant de la ville, caractérisée par les références suivantes: •

En considérant le profil sociopolitique, la favela est un territoire où l’inachèvement des politiques et des actions de l’État est devenu historiquement récurrent;

Considérant le profil socio-économique, la favela est un territoire où les investissements formels sur les marchés sont précaires, en particulier l’immobilier, la finance et les services;

Considérant le profil socio-urbanistique, la favela est un territoire de bâtiments principalement caractérisé par l’auto-construction, sans pour autant obéir aux normes urbaines normatives de l’État (représentation de l’inégalité);

Considérant le profil socioculturel, la favela est un territoire de présence expressive des noirs (pardos et noirs) et des descendants des autochtones, selon les régions brésiliennes, configurant des identités plurielles sur le plan de l’existence humaine et symbolique.

Cependant, pour débattre du concept de la favela dans son approche plus historique, la question doit être posée dans deux sens: qu’est-ce qui rendrait la favela historiquement particulière à la ville? Et, d’autre part, qu’est-ce qui aurait historiquement ressemblé à la ville? Est-il possible de généraliser de ce point de vue ? Un premier indicateur pourrait être dans l’aspect lié à la morphologie, la forme urbaine, à l’irrégularité provoquée par une croissance «organique» en dehors de la réglementation urbaine. Ainsi, il est posé la question de savoir s’il est possible de faire une généralisation complète, notamment du point de vue de l’origine historique des noyaux des favelas. On observe que beaucoup de favelas ont surgi des secteurs relativement réguliers, soit parce qu’ils étaient des subdivisions initiales (Bairro Barcellos, dans Rocinha), ou parce qu’ils étaient des occupations dirigées et prévues en total ou en parties. Deuxièmement, il s’agit d’observer «ce qui serait le plus différent» dans la favela par rapport à la ville. Dans ce cas, on observe que, comme cela arrive avec les quartiers, surtout les plus anciens, ou d’urbanisation plus ancienne, la favela présente aussi des particularités. En résumé, ces particularités peuvent être traduites par des acteurs tels que l’association des résidents, des agents immobiliers spécifiques, des formes particulières de définition de l’intrigue, entre autres, et qui semblent exprimer la diversité de la favela.

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« La favela n’est pas une réalité compacte et homogène - le favelado, n’existe pas. Il existe plusieurs catégories de favelados. Au-délà de les différenciations internes, il existe de grandes variations entre une favela et les autres. Les paramètres à être adoptés dans le jugement de la favela doivent être adaptés au niveau et au mode de développement de l’environnement urbain dans lequel la favela est insérée. » (Auteur Machado da Silva, au milieu des années 1960, soulignant l’existence d’une diversité interne de la favela. - Dans: «Cadernos Brasileiros», numéro 3, 1967.)

Qu’est-ce qui différencie les favelas? La morphologie est-elle la forme urbaine? Il n’est pas possible de faire une généralisation complète, principalement du point de vue historique, car de nombreuses favelas sont issues de tracés réguliers, soit parce qu’ils étaient des subdivisions régulières, soit parce qu’ils étaient dirigés, des occupations organisées. En plus de ces questions, il existe encore certaines particularités liées aux formes de sociabilité et aux ordres en matière d’espace public. Ensuite, il y a une approche qui traite du particulier, du divers et de la relation avec les processus plus généraux de la ville.

1.3 – Contexte historique Historiquement, jusqu’à 1930 la favela est considerée comme une solution habitationale provisoire et illégal, raison laquelle il n’y fasait pas du sens de la décrire, la étudier, la mésurer. Pour les pouvoir publics, les favelas simplement n’existaient pas. Son origine est liée à la crise habitationelle et aussi à les crises politiques qui sont venues avec la Republique. Une de ces crises a été le problème de logement de soldats au Rio de Janeiro. Pour resoudre cette situation, le gouvernement brésilien a libéré l’occupation de militaires dans la colline de Santo Antonio. Comme n’y avait pas assez de logements, la construction de divers baraques en bois, dans la pente de cette colline, a été permis. Il n’y a pas beaucoup de documents qui parlent sur le début du processus de «favelização» de la ville. Il a été nécessaire, en 1901, que le média dénonciait l’aparition d’un «nouveau quartier», construit sans la permission de les autorités municipales et dans les terrains de l’État. Après la reforme urbaine et la disparition de beaucoup de résidences, la population avait besoin de résoudre le problème de logement, soit en allant aux banlieues, soit en continuant dans le centre-ville (la meilleure option à l’époque). Dans un court délais de dix ans, il apparaît alors divers favelas dans le paysage carioca. En commun, elles avait la localisation dans les pentes des collines et aussi la proximité avec des importantes sources d’emploi. 7

La dynamique des espaces urbains d’inégalité

1.2 – Toutes les favelas sont égales ?


Figure 2 - L’image d’inégalité brésilienne traduite par la première favela du Bresil. Source: photo prise par A. Malta en 1916, au Rio de Janeiro.

Les baraques à l’époque étaient si concentrés et nombreux, que l’État voulait les enlever completement. Pourtant, les habitants de la colline Providence ont affronté le système politique et ont réçu une mauvaise image. Selon Mauricio de Almeida Abreu «En 1902, la colline Providence était vue comme «une honte pour une capitale civilisée», comme «le dangereux endroit, lequel la voix populaire y a denominé colline de la Favela». Ainsi, tout de suite, le terme «Favela» a gagné une association aux images de «dangeur» et «crime». (Source : Reconstruindo uma história esquecida: origem e expansão inicial das favelas do Rio de Janeiro, page 39, 3ème paragraphe)

Figure 3 - Premières favelas du Brésil, à Rio, en localisant la favela Rocinha. Source: photo (retouchée) prise dans la publication «Reconstruindo uma história esquecida», ABREU Mauricio de Almeida, p. 39

Du coup, pendant toute la décennie de 1910, les médias utilisait le mot favela toujours avec F majuscule, comme un nom propre, d’un endroit especifique de la ville. Seulement à partir de la décennie de 1920, et aussi en fonction de la grande diffusion dans l’espace urbain, le terme favela a été géneralisé. À ce moment, et en adoptant une nouvelle forme, avec f minuscule, la favela désigne toutes les agglomerations d’habitations rudimentaires qui surgissaient dans la ville, dans les collines, en terrains de tiers et sans l’approbation du pouvoir publique. 8


2 – Construction des villes : logiques d’urbanisation différenciées Aujourd’hui les États de São Paulo et Rio de Janeiro sont, ensemble, plus de la moitié des favelas du Brésil et représentent 41,5% de la population vivant dans des « établissements de qualité inférieure », selon les donnés du IBGE de 2010.

Dans la ville de Rio de Janeiro, les plus grandes communautés des favelas prédominent et ils se trouvent au milieu de la ville, proche de la concentration d’emplois et d’infrastructures. Déjà à São Paulo, ces communautés se situent principalement dans la périphérie, à des kilomètres du centre-ville, et sont plus petites. Contrairement à Rio, les habitants des bidonvilles n’ont pas facilement accès aux transports en commun.

2.1 – Favela Rocinha, au Rio de Janeiro, RJ

Figure 4 - Localisation de la favela Rocinha à l’échelle du pays, d’État et de la ville de Rio. Source: MCCS (sur google photos)

La première occupation de Rocinha, comme son nom l’indique, était pour une utilisation rurale avec la culture de légumes pour approvisionner les quartiers de Gávea et Jardim Botânico, où depuis la fin du 19ème siècle l’utilisation industrielle augmentait. Avec l’expansion de la ville à la Zone Sud et l’augmentation de la demande de logements près du lieu de travail, la favela Rocinha avec des caractéristiques encore rurales a commencé à être recherché comme lieu de résidence, en résultant de l’occupation désordonnée des parcelles de la subdivision. Rocinha est considéré aujourd’hui la plus grande favela de Rio de Janeiro, avec une population de 98.319 habitants (selon les données du recensement menées par le travail social PAC Rocinha entre 2008 et 2009). Pour mieux visualiser, la densité de population est si grande, soit trois fois plus dense que quartier de Copacabana, qui est équivalent à la population d’une ville de taille moyenne.

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La construction des villes

São Paulo compte 2087 favelas, soit 33% des favelas nationales, et Rio en compte 1332 (21%), mais les caractéristiques de ces lieux de résidence sont très différentes entre les deux États.


QUARTIER MARACANÃ

PARC NATIONAL DE LA TIJUCA

QUARTIER COPACABANA

QUARTIER BARRA OCÉAN ATLANTIQUE

Figure 5 - Localisation de la favela Rocinha. Source: MCCS (sur google earth)

Comme on voit dans l’image précedente, situé au sud de la ville, parmis la région entre les quartiers Copacabana et Barra, qui sont des régions à fort pouvoir d’achat, et qui prédomine les classes sociales supérieures, la favela est située dans la vallée entre les collines Morro Dois Irmãos et Cocharne, près de la limite Parc National de Floresta da Tijuca.

A - La Rocinha, du point de vue de la forme Rocinha est une favela qui a été transformée en quartier par la loi de 1995 du 18 juin 1993, date à laquelle ses limites ont été définies et la région administrative spécifique. Ses principaux accès sont l’autoroute Gávea et l’autoroute Lagoa-Barra, principal lien entre la zone sud et Barra da Tijuca, et elle est située à environ 15 km du centre-ville. La favela est répartie par les pentes et vegas (zones plus humides tout au long des cours d’eau) des collines Morro Dois Irmãos et Cocharne. Une partie d’entre eux se trouve dans le parc national de Tijuca, une zone de protection de l’environnement qui définit les limites nord et sud de Rocinha (voir Figure 6).

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GÁVEA

FAVELA PARQUE DA CIDADE

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MORRO DO COCHARNE

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FAVELA VIDIGAL

MORRO DOIS IRMÃOS

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Légende Favela selon limite de la source du IPP 0

Domaine de Protection de l'Environnement plus intense

750 m

Domaine de Protection de l'Environnement moins intense

Figure 6 - Analyse territoriale du espace urbain de la favela. Source: MCCS (sur IPP Armazem de Dados)

Il y a une subdivision interne de Rocinha en secteurs internes progressivement définis au cours de la croissance de la favela. Ce sont des domaines définis à la fois par des stratégies de mise en œuvre de systèmes d’assainissement et d’éclairage, ainsi que par des processus de parcelisation et d’occupation. Ces secteurs sont illustrés dans la figure 7.

Vila Laboriaux

Vila Cruzado Vila União

Dignéia

Portão Vermelho

Cachopa Cachopinha Vila Verde

Vila Vermelha

Setor 199

Rua 1

Faz Drepressa

Almir

Curva do “S”

Cidade Nova

Rua 4

Campo Esperança

Bairro Barcelos

Terreirão Capado

Rua 3 Rua 2

Macega

Figure 7 - Carte de la Favela da Rocinha, Zone Sud. Sectorisation interne. Source: MCCS (sur Fundação Bento Rubião, 2006)

Morro da Roupa Suja 0

100m

200m

500m

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La construction des villes

VILA CANOAS/ PEDRA BONITA


B - Une analyse de la morphologie urbaine

En étudiant la morphologie de Rocinha et des quartiers voisins, on peut observer la superposition des modèles constitués par la texture de la forêt, les formations rocheuses du massif de la Tijuca et la construction dense des maisons des favelas. « La route Gávea traverse la Rocinha reliant São Conrado à Gávea dans un parcours de courbes fermées, sans changements majeurs depuis son ouverture comme l’accès au-delà du pavage en 1938 » (Oliveira, 1977). La Rocinha est structurée par cette route, en distribuant tout au long de celle-ci à droite et à gauche irriguée par de petites rues, ruelles et escaliers. Ainsi, en considérant toutes ces caractéristiques, quatre modèles de configuration différents sont identifiés dans la Rocinha résultant de la combinaison des éléments de façon marquée. La délimitation des zones de chaque modèle ne correspond pas exactement à la délimitation entre secteurs. Dans les figures suivantes il sera décrit les caractéristiques de chaque configuration. Sa localisation est représentée sur la figure 8, renforcée par la figure 9 du « schéma-fonds » et la figure 10, qui répresente le réseau routier de Rocinha.

Figure 8 – Carte d’identification de différents modèles. Source: MCCS (sur Fundação Bento Rubião, 2006)

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Figure 10 – Carte de l’infrastructure des voies. Source: Fundação Bento Rubião, 2006

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La construction des villes

Figure 9 – Carte de la configuration de la Rocinha dans son ensemble. Source: Fundação Bento Rubião, 2006


Figure 11 – Carte des gabarits. Source: MCCS (sur Fundação Bento Rubião, 2006)

Modèle maillé Dans le secteur Bairro Barcelos, on le localise sur l’image 7, il y existe un modèle qui fait référence à l’organisation urbaine en maillage observée dans les quartiers Copacabana ou Ipanema. Une série de ruelles parallèles relie les routes qui y se trouvent et forme 12 places étroites densément occupées par des bâtiments résidentiels de 9 étages au maximum. Implanté dans une zone de faible pente, on regarde dans l’image à côté que ce secteur/quartier a une bonne perméabilité et une intégration avec les services de commerce et d’approvisionnement de l’environnement.

Figure 12 - Source: http://www.rocinha.org/ blog/wp-content/uploads/2010/12/historia3.jpg

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Modèle axe principal « La configuration à l’axe principal est perçue le long de l’Estrada da Gávea, le site des premières occupations de la région » (Sengala, 1991). Les bâtiments de cette région ont quatre étages ou plus (voir la figure 11) et la plupart ont un revêtement de façade. Les lignes de bus et le trafic intense des habitants des autres régions de Rocinha font de l’Estrada da Gávea une zone d’accès facile et un bon potentiel immobilier, en prenant en considération que la plupart des bâtiments ont été construits avec un peu de planification.

Cela correspond à la plupart des Rocinha. Son réseau routier est délimité par les bâtiments environnants et est composé presque entièrement de ruelles étroites et tortueuses. La plupart des bâtiments sont exclusivement résidentiels. Les principales caractéristiques de ce modèle sont la densité élevée et l’indice bas de la surface non construite. Les routes sont réduites au minimum nécessaire pour le mouvement piéton, avec quelques cases ou larges. Modèle périphérique Les zones avec ce modèle sont à la périphérie de Rocinha en contact avec les pentes des collines Cocharne et Dois Irmãos. Ces secteurs sont en terrain incliné avec des affleurements rocheux aux plus hauts niveaux. Ils sont difficiles à atteindre les régions avec des ruelles étroites et des sentiers non pavés. La construction dans ces zones est toujours en expansion. À certains endroits, il y a des maisons construites sur des terrains entaillés en pente, ce qui augmente le risque d’un accident géologique. Les bâtiments sont dispersés et faible, avec des maisons en bois et un autre matériau improvisé résultant dans des zones de faible densité et le degré élevé de logements pauvres. Alors, en plus de ces quatre modèles principaux, il est possible de voir quelques spécificités insérées dans certains d’entre eux, plus liés à l’implantation. Les secteurs situés à proximité de la colline Dois Irmãos, de partage des eaux ont un milieu urbain quelque peu différent, comme un système de bâtiments juxtaposés plutôt complexes, comme on le voit sur la figure 13.

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La construction des villes

Modèle haute densité


Dans ce système de pente, les maisons sont partiellement superposées. La dalle de toit d’une maison est le niveau d’accès de la pente voisine, qui accompagne la pente de la terre. Il y a des allées partiellement couvertes par des étages supérieurs et des escaliers d’accès, tels que de petits tunnels. Figure 13 - Schèma de pente dans une zone dense et fortement inclinée. Source: MCCS

En conclusion, les quatre modèles coexistent chez Rocinha avec des différences dans la morphologie et l’expérience de ces espaces. Analysés côte à côte représentent la diversité sociale existant dans la favela de Rocinha reflétée dans l’ensemble construit.

C - La topographie comme facteur d’analyse

La topographie joue un rôle clé dans l’arrangement formel des diverses parties de Rocinha. Dès la conception de sa route principale jusqu’à l’implatation de chaque bâtiment, ses éléments sont ajustés en fonction de la forte pente des ces collines. Dans les zones où la pente est plus prononcée, les bâtiments sont occupés par plus d’un logement avec des accès distincts à différents niveaux (voir la figure 14). Dans cette configuration, certaines parties des routes sont couvertes par la conception d’un deuxième ou troisième étage indépendant, formant de petits tunnels qui apparaissent également dans des zones plates densément construites.

Figure 14 - Schèma d’accès sur les pentes. Source: MCCS

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On comprend que la topographie est également un facteur qui aggrave la précarité des conditions de vie de Rocinha. Le manque de logements, avec la manque du savoir-faire dans le sens technique, conduit à l’exposition aux glissements de terrain et aux difficultés d’élimination des déchets, ainsi qu’à la restriction des conditions de circulation et d’accès.

La construction des villes

vers la ville

Favela Rocinha

UTE

ORO AUT

Océan Atlantique

Route Oscar Niemeyer

Figure 15 - Schèma du plan topographique de la région, avec la route principale en noir foncé et l’indication du coupe suivant. Source: MCCS (retouchée sur https://favelaissues.files. wordpress.com/2010/04/plan-coupe-rocinha.jpg)

Le plan précedent et le coupe suivant (voir les figures 15 et 16) représentent le relief, les routes, les limites entre les secteurs et la configuration des bâtiments le long d’une section estimée de Rocinha. Dans ces images, c’est possible d’appercevoir la relation entre la structure des bâtiments et la pente du terrain.

favela autoroute

zone résidentielle

Figure 16 - Schèma du coupe topographique de la région, avec l’autoroute principale et la zone résidentielle à côté. Source: MCCS (retouchée sur https://favelaissues.files.wordpress. com/2010/04/plan-coupe-rocinha.jpg)

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Un élément intéressant à souligner là, c’est que la topographie de Rocinha a également un impact significatif sur le coût de construction des maisons. Selon la thèse de l’étudiante d’UFRJ, Jacira Saavedra Farias, « dans la construction de magasins de matériaux, le prix d’expédition pour les livraisons dans les endroits localisés plus en haut est jusqu’à deux fois plus chargé que par les grands magasins de la ville, ce qui à son tour, ne livrent pas dans les favelas. Ainsi, les maisons construites dans les zones d’accès plus difficile présentent un plus grand degré de précarité. »

D - Conditions de logement La complexité sociale et spatiale des favelas de Rio de Janeiro s’accompagne d’un habitat très diversifié allant d’un abri temporaire (avec un espace constitué de matériaux récupérés, essentiellement comme des planches de bois, des canettes et des draps) à des cabanes à deux niveaux. Ici, la partie plus ancienne (le rez-de-chaussée) est dur, tandis que le premier étage est de planches; et entre les deux, il y a beaucoup de formes intermédiaires. Les bâtiments sont construits les uns sur les autres, même avec des pièces entièrement enterrées où l’éclairage solaire et la ventilation n’atteignent jamais. L’amélioration des conditions de vie n’aboutit pas seulement aux matériaux de construction achetés et non récupérés mais aussi à l’agrandissement du logement, au traitement des détails (joints, accès, ouvertures) et souvent à la construction d’une seconde maison. Cependent, comme de nombreuses maisons se sont installées sur ces cours d’eau et que la favela est très dense, le problème de l’assainissement est très sérieux car le drainage et les égouts passent par des caniveaux et des réseaux obstrués par la construction des maisons et par le dépôt irrégulier des ordures ménagères.

E - En comprenant le lotissement et les tracées des voies Le processus de morcellement des terres à la Rocinha, discontinu et sans régularisation officielle, définissait certaines caractéristiques qui étaient mélangées aux occupations ultérieures. Selon la Fondation Bento Rubião (2006), « le territoire de Rocinha se compose de cinq terres: quatre propriétés privées et une appartenant à l’autorité publique municipale » (voir la figure suivante).

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Vila Laboriaux

Vila Cruzado

Portão Vermelho

Cachopa Cachopinha Vila Verde

Vila Vermelha

Rua 1

Almir

Curva do “S”

Cidade Nova

Rua 3

Rua 4

Rua 2

Campo Esperança

Bairro Barcelos

Setor 199 Faz Drepressa

Terreirão

Capado

Macega

Morro da Roupa Suja 0

Glèbe Pastor Almir - superposée

Parcelle de terrain Cia Cristo Rendentor

Glèbes conflictuelles

Pal nº 38535

Pal 12061 - Terme de Cession - Municipal

Parcelle de terrain Cia Castro Guidon

100m

200m

500m

Pal nº 12385

Figure 17 - Glebas de la composition de la terre de la Rocinha. Source : MCCS (retouchée sur Fundação Bento Rubião, 2006)

Le lotissement promu par les entreprises Cristo Redentor (en orange) et Castro Guidon (en bleu), tracent les principales routes locales au-delà de l’Estrada da Gávea (en noir) dans le cadre de la ferme préexistante. Il est remarquable la régularité physique-formelle du secteur, maintenant densément construit et avec le réseau routier avec des rues parallèles correspondant à la disposition de la subdivision originale. Les limites sans le murs des lots sont restées, cependant que le périmètre à côté de la forêt est constamment modifié et agrandi. En ce sens, la délimitation fragile des parcs qui forment la forêt du massif de Tijuca représente un vecteur d’expansion de la zone bâtie de Rocinha. Un autre aspect du morcellement à Rocinha est le taux élevé d’occupation des terres. Si on retourne sur la figure 9, il est possible de voir, au bas de la figure, qu’il y a peu de zones non construites, et même celles-ci font l’objet d’occupations temporaires. Par conséquent, les vides qui existent encore, ou les zones non construites, sont des signes d’une sorte de contrôle de l’utilisation des terres. Ainsi, on peut conclure que l’infrastructure urbaine peut indiquer la capacité de l’organisation collective. 19

La construction des villes

Vila União

Dignéia


2.2 – Favela Paraisópolis, à São Paulo, SP A – Une analyse des marges de Paraisópolis, SP Jardim Colombo

São Paulo

Paraisópolis

Figure 18 - localisation de la favela Paraisópolis dans la comté de São Paulo. Source: MCCS

Paraisópolis, qui a déjà « gagné le statut de communauté, mais n’a pas perdu la stigmatisation de la favela » est, selon l’IBGE, la plus grande ville de São Paulo et la huitième plus grande du pays. Cependant, il est important de noter que ces données sont peut-être incorrectes, puisque, selon le président et directeur de la communication de l’Union des résidents et du commerce de Paraisópolis, Joíldo Snatos, dans l’enquête réalisée par l’IBGE, trois les microrégions qui abritent environ la moitié de la population de Paraisópolis.

Figure 19 - Image aérienne des blocs surélevés, incomplètement, pour le Censo 2010 do IBGE. Source: Paraisópolis.org.

Paraisópolis est situé dans la sous-préfecture de Campo Limpo, avec plus de favelas dans la ville de São Paulo, et l’un des exemples les plus complexes au Brésil de la frontière urbaine. La favela est située dans le quartier de Vila Andrade, qui abrite également des quartiers tels que Real Parque et Morumbi, qui ont été définis comme des zones résidentielles de haute qualité. 20


La construction des villes

Pour comprendre l’émergence de Paraisopolis, il est nécessaire de se référer à une brève histoire qui remonte à la première moitié du XXe siècle. La région est récente, elle héberge certains des derniers quartiers à être occupés dans la métropole, car ils se sont situés sur la côté opposée de la rivière Pinheiros, par rapport au centre de São Paulo, son origine.

Figure 20 - Analyse de Paraisópolis, en base bleu, avec la répresentation, en bleu foncé, de l’autoroute principale qui présente une marge conflictuelle entre le tissu de la favela et la façade verticale des grands bâtiments. Source: MCCS (sur Google Earth)

Le tracé des rues de la zone qui est maintenant Paraisópolis origine en 1921 d’une distribution faite par l’Union Mutual Construction Company et Crédit Populaire SA, une partie de l’ancien « Morumby Trésor » en 2200 lots avec réseau routier orthogonale, qu’on voit en noir sur la carte au dessus. Cependant, les propriétaires des lots les ont pour la plupart abandonnés en raison de la difficulté d’occupation en raison de la topographie et du manque d’infrastructures dans les rues et les environs. Selon le Département municipal du logement de São Paulo, « ce processus d’occupation informelle de la région a commencé dans les années 1950, avec la transformation des lots en petites fermes, principalement par des familles japonaises agissant comme grileiros. » Dans les années 1970, les premières baraques en bois sont apparues à Jardim Colombo et Porto Seguro, bidonvilles près de Paraisópolis. En 1980, la migration a été accélérée dans la région, principalement en raison de la facilité d’emploi dans le secteur de la construction, qui était en croissance dans la région, en raison de la grande spéculation immobilière à Morumbi. Cependant, il n’y avait aucune planification visant à desservir la population la plus nécessiteuse de la région qui est maintenant Paraisopolis, ce qui a entraîné une urbanisa tion médiocre et des conditions minimales d’infrastructure et de services publics. 21


B – Construction d’une morphologie au fil du temps

1948

Figure 21 - Année 1948. Source: Google Earth.

Photo aérienne de la région de Fazenda do Morumbi qui deviendrait Paraisópolis, en commençant à implanter son occupation. On peut remarquer la présence de routes non pavées, un peu d’occupation urbaine et une végétation dense, une caractéristique frappante à ce jour.

1977

Figure 22 - Année de 1977. Source: Google Earth.

Photo aérienne de Paraisópolis déjà beaucoup plus occupée par l’informalité, par l’absence de politiques publiques que réglemente l’occupation de la région. Le réseau routier est encore plus réticulé et plus proche de la situation actuelle.

1987

Figure 23 - année 1987. Source: Google Earth

Photo aérienne dans la décennie où l’occupation informelle de la région est devenue plus présente en raison de l’augmentation de la migration vers la région en raison de l’élimination des favelas dans les régions voisines.

22


2005

Figure 24 - année 2005. Source: Google Earth

Photo aérienne de la région de Paraisópolis. L’occupation a commencé l’année précédente, avec des travaux d’urbanisation. On observe que le quartier se développe de plus en plus.

La construction des villes

2017

Figure 25 - année 2017. Source: Google Earth

Comme il est possible de voir, malgré son caractère informel, la favela de Paraisópolis présente des travaux de projet d’urbanisation, pour améliorer et réintégrer la communauté dans le tissu urbain de la ville au milieu d’un scénario de grande inégalité sociale. 23


C – Problèmes de marges conflictuels

Figure 26 - Espace d’inégalité de la favela en visible contraste avec les habitations de haut niveau. Source: photo prise par Tuca Vieira

Ce scénario s’accompagne du problème que le quartier de Morumbi, qui est à côté de la favela de Paraisópolis, séparé par un mur, est consolidé comme l’un des «quartiers riches» de la ville de Rio. Dans ce quartier, ils sont présentés des bâtiments de luxe et des condominiums fermés, entourés de murs et de clôtures, ainsi que des systèmes de surveillance et de sécurité privée. La distance est vaste. Des deux côtés. Les préjugés persistent et la volonté de céder n’est pas géneralisé. Le contexte de Morumbi ressemble à la réalité de Rio de Janeiro, où les habitations de luxe et les favelas sont voisines. Selon Jan Ghel, « l’inégalité sociale et économique contribue à des taux de criminalité élevés, mais de simples solutions individuelles sous la forme de tentatives privées de protection de la vie et de la propriété ne fonctionnent pas dans les endroits où le sentiment d’insécurité conditions sociales. » “L’un n’existe pas sans l’autre, encore moins contre l’autre.” - JUNG, Milton.

D – Les conditions d’habitation Les cabanes paulistas sont construites dans leur grande majorité de bois récupéré. En fait, leur but était de servir de plate-forme, de lieu transitoire pour les migrants nouvellement arrivés, avant qu’ils puissent acheter un terrain et construire une maison modeste, solide et définie en périphérie, de plus en plus éloignée. 24


Les conditions de vie sont très précaires dans les favelas où les infrastructures sont pratiquement inexistantes et les cabanes sont très petites: la plupart des cabanes Paulista ont moins de 20 m² et en moyenne moins de 2 m² par personne.

2.3 - Qui sont les habitants des ces favelas ? « Sur le plan démographique, la population des favelas, en particulier à São Paulo, se caractérise par leur jeunesse: en 1974, l’âge moyen était de 18 ans (25 pour l’ensemble de la municipalité), contre 34 ans à Rio », selon Janice Perlman. Une différence qui s’explique par la permanence de nombreux habitants dans les favelas de Rio de Janeiro, alors que la favela de São Paulo a longtemps été un lieu de passage, bien que beaucoup moins aujourd’hui. En termes d’activités, la majorité de la population « favelada », dont le taux d’activité est comparable à celui de la population en général, est employée dans le secteur tertiaire: les services et le commerce. La répartition de la main-d’œuvre par sexe révèle que les hommes travaillent principalement comme travailleurs de la construction ou du commerce ou sont autonomes. La participation du secteur informel semble être très importante, en particulier pour les enfants et les femmes. Comme le souligne Lucio Kowarick à São Paulo, « la favela abrite principalement l’ouvrier manufacturier, non qualifié, qui vend sa force de travail sur le marché à un prix dérisoire ou qui se consacre à l’auto-emploi, avec des revenus très bas ». La grande majorité des habitants des bidonvilles s’entraîne, mais une favela comme Rocinha offre des opportunités d’emploi à sa population, notamment dans le commerce très diversifié (supermarchés, boulangeries, magasins de disques, meubles et plusieurs petits magasins disséminés dans la colline) et en tant que fournisseurs de services pour les habitants dont le pouvoir d’achat est supérieur. Comme le souligne Janice Perlman, la marginalité des favelados est un mythe. Ils ne sont pas marginaux. S’ils vivent dans la favela, c’est parce que c’est la seule « formule de survie » et la seule alternative pour survivre et rester dans la ville. « En réalité, tous les gens ou famille qui ne peut pas se permettre les prix gonflés par la spéculation immobilière devient la favela, la favela est « les pauvres parmi les pauvres » ». 25

La construction des villes

Figure 27 - Exemples d’habitation précaires, avec des cabanes en bois. Source: http://f.i.uol.com.br/fotografia/2017/03/10/674073-970x600-1.jpeg


3 – Pourtant, les favelas n’existent-elles qu’au Brésil ?

L’émergence des favelas, ou de tels espaces d’inégalité, est un fait social mondial. La preuve de cela réside dans la diversité des appels que l’on trouve dans plusieurs autres langues: favelas au Brésil, bidonvilles en Europe, slums dans les pays anglophones, kijiji au Kenya, iskwaters aux Philippines, kampung en Indonésie, shammasa au Soudan, barrios au Vénézuela, barriadas ou pueblos jovenes au Pérou, villas miserias en Argentine, colonias populares au Mexique, etc. [in « La vile au risque du ghetto » , Hervé Marchal et Jean-Marc Stébé, page 22, dernier paragraphe]. Amérique du Nord Europe Japon Corée du Sud Australie Nouvelle-Zélande

Asie orientale

Océanie

Europe orientale CEI

Amérique Latine Caribe

Population urbaine totale

Afrique subsaharienne

Afrique du Nord

Population urbaine (millions) 5

77

Population urbaine des bidonvilles

Asie du Sud-Est

0

30

0

50 10 2

Asie occidentale

Asie du Sud

10

Source: ONU-HABITAT. Observatoire urbain mondial 2005

Figure 28 - Avec le rapport ONU-Habitat, aujourd’hui, près de 900 millions de personnes vivent dans des bidonvilles, soit environ un tiers de la population urbaine mondiale.

3.1 – Les bidonvilles, des favelas à la française ?

À l’origine, le mot « bidonville » est apparu pour la première fois vers la fin des années 1930 pour désigner des quartiers d’habitat précaire, fait de matériaux de récupération, au Maroc, à Casablanca plus précisément. Selon le sociologue américain Davis (2006), « « bidonville » est un lieu d’habitat humain qui se caractérise par un surpeuplement, des logements informels ou de piètre qualité, un accès insuffisant ou inexistant à l’eau potable, un manque d’hygiène et une insécurité quant à la conservation de la jouissance de son domicile. » - P. 21, 2eme paragraphe La France, depuis 1950 et pendant de nombreuses années, a favorisé la venue de nombreux habitants du Maghreb afin de permettre une main d’œuvre bon marché pour les secteurs du bâtiment et de l’automobile. Ils venaient des anciennes colonies françaises. Comme c’était dans le moment d’après guerre, ils se sont installés à proximité de leurs lieux de travail pour se construire des abris, une fois qu’ils n’avaient pas des logements où aller. 26


Figures 29 et 30. L’image à gauche, c’était le bidonville de Nanterre en 1950, dans la périphérie de Paris, avec les baraquements. À droit, des baraques dans le bidonville de Villeurbanne, dans la périphérie de Lyon.. Source : 1er photo, prise par Jean Pottier. 2ème photo : http:// www.viva-interactif.com

Du coup, les abris étaient des baraquements en périphérie des grandes villes, l’unique option pour eux. Nanterre, à l’époque commune industrielle riche de terrains libres, a été l’une des villes les plus concernées par ce phénomène.

À ce moment là, l’idée est de détruire ces espaces d’inégalité et construire une ville moderne et salubre, qui apporte le bon logement. Comme solution d’une action politique, et pour résoudre la crise du logement, le gouvernement construit des Grands Ensembles HLM (Habitations à Loyer Modéré) aux banlieues des grandes villes, comme Paris l’image suivante.

Figure 31 - Construction des Grands Ensembles dans les banlieues de Grand Paris, dans les années 1950 à 1965. Source : http://e-cours.univ-paris1.fr/modules/uoh/paris-banlieues

27

Pourtant, les favelas n’existent-elles qu’au Brésil ?

Au milieu des années 1960, les pouvoirs publics estiment à environ 100 000 la population habitant dans des bidonvilles.


Figure 32 - Modèle des Grands Ensembles à Marseille, région des Quartiers Nord. Source : MCCS ( image rétouchée sur https://cdn-s-www.ledauphine.com/images )

Ces modèles sont typiquement des ensembles de logements collectifs, souvent en nombre important et marqués par un urbanisme de barres et tours inspiré dans l’architecture moderne.

terre

3.2 – Étude de cas en France : « Le bidonville de la folie », à Nan-

Figure 33 et 34 - Cartes schèmatiques de localisation du bidonville à l’échelle du pays et de la ville de Paris. Source : MCCS ( sur Google Photos )

Le bidonville de Nanterre, dans la péripherie de Paris, s’est développé dans un de ces quartiers occupés par des familles de chiffonniers parisiens. Cet endroit comptait dix-sept bidonvilles. La Folie était le plus vaste d’entre eux : il s’étendait sur 23 hectares. En effet, l’existence du bidonville fut longtemps niée. Peu de rapports ou documents officiels, peu de données existent jusqu’alors sur la structure de ces îlots urbains et leur population. Dans la même manière qu’à l’histoire des favelas 28


au Brésil, l’état était indifférent et a délaissé ces espaces sur lesquels il ne possède pas d’informations. Il comptait environ 14000 personnes, selon l’article publié dans l’Obs par Aurélie Champagne, dont une majorité d’Algériens qui ont fui la guerre et les camps de regroupement, dits « zones interdites » d’Algérie. Les premiers abris apparurent en 1953. Par rapport à la crise du logement en France, le gouvernement est amèné à construire en masse des logements sociaux, construits en grande partie par la population active des bidonvilles. 7

NANTERRE (1960-1970) na

Se

9 10

2

BIDONVILLE

1

8

Quartier Petit Nanterre 1 - Pâquerettes 2 - Rue Déquéant

Université

6

Quartier La Folie 3 - La Garenne 4 - Rue de Valenciennes 5 - Rue de Bizis 6 - Rue Édouard Colonne

3 5 Vieux Nanterre

4

90300 habitants

Autres quartiers 7 - Pont de Bezons 8 - Pont de Rouen/ Avenue de la République 9 - Rue des Prés 10 - Rue Hoche

LA DEFENSE

Figure 35 - Carte schèmatique d’analyse du bidonville de Nanterre aux années 1960 à 1970. Source : MCCS ( sur la carte page 45 du mémoire de Bernard Bret, Sorbonne, 1968 )

NANTERRE (2010-2016)

5

Avec la loi du 12 juillet 1966, il est permet à l’état et à ses établissements publics de procéder, par procédure accélérée, à l’expropriation des bidonvilles BIDONVILLE 2010 pour y construire des logements sociaux et de l’habitat provisoire. 1 - Avenue de la République na

Se

re

viè

Ri

Université

3

BIDONVILLE 2014 2 - Avenue de la Répulbique/

4

1 fut démoli et remplacé Bords Seine barres Le bidonville de Nanterre, quand à2lui, pardedes 3 - Rue Anatole France de logements sociaux en 1972. Mais au même temps les logements de transition BIDONVILLE 2014 à 2016 4 - Rue Édouard Colonne auront la vie dure et certains ont perduré pendant de nombreuses années. 5 - Rue de Sartrouville La Folie

Axe Nan Tunnel terr d e-L e aD éfen

se

Centre

Pourtant, les favelas n’existent-elles qu’au Brésil ?

e èr

vi Ri

LA DEFENSE

A – un regarde sur son tissu et les habitations

En regardant le plan du terrain vague de 23 hectares, il est constaté que malgré la perçue d’un lieu aléatoire où le chaos domine, le bidonville est un espace spatialement et politiquement organisé, qui tente avec ses propres moyens de répondre à ses besoins et de reproduire une structure connue, comme dans les deux cas au Brésil. 29


Le maillage du trait dans son ensemble tend à suivre un ordre très irrégulier, sortant presque du plan orthogonal. Il est structuré par une vaste rue au sud de Bidonville, suivie de deux autres grandes rues relativement perpendiculaires à la première.

Figure 36 - Plan schèmatique d’analyse du bidonville de la Folie, et sa morphologie irrégulier, pourtant orthogonal. Source : MCCS ( sur Google Photos )

Mais au fil du temps, les cabanes sont structurées (en plusieurs morceaux), si revendues, les ruelles deviennent plus lumineuses, ainsi que plus de commerce. De telles activités ont permis à la bidonville de promouvoir le développement d’une véritable solidarité entre les habitants. Les maisons sont organisées en groupes compacts, ce qui permet d’avoir toujours le même motif intérieur autour d’une sorte de patio. En août 1959, Monique Hervo, alors militante et installée dans le bidonville de La Folie, le décrit : «Terrains vagues abandonnés. [...] Et, comme posé sur un plateau, surgit un monstrueux amas de cabanes. Des milliers de tôles enchevêtrées se mêlent à des briques cassées ». Figure 37 - Plan de la typologie des maisons des ces espaces. Source : MCCS ( sur Google Photos )

30


re

viè

Ri

x Nanterre

Aujourd’hui, le bidonville n’existe plus et a été remplacé par des logements 7 sociaux. La plupart des habitants ont pu être relogés, après de nombreuses années passées en cités de transits, dans les logements sociaux reconstruits à la NANTERRE (1960-1970) place 2du 1bidonville. BIDONVILLE 8

Quartier Petit Nanterre 1 - Pâquerettes

- Rue Déquéantpar l’AITEC : «Les bidonvilles de Nanterre : Difficile D’après l’étude 2réalise 6 Quartier La Folie réhabilitation des logements précaires construits pour les immigrés maghrébins 3 - La Garenne 4 - Rue de Valenciennes dans 3les années 50-70», 5 - Rueles de Bizispersonnes trop pauvres pour pouvoir s’assurer de 90300 habitants 6 - Rue Édouard Colonne 5 4 payer la location de ces appartements se retrouvent contraintes de retourner vivre Autres quartiers 7 - Pont de Bezons dans d’autres bidonvilles. 8 - Pont de Rouen/ Avenue de Université

LA DEFENSE

la République 9 - Rue des Prés 10 - Rue Hoche

Ainsi, aujourd’hui encore, on remarque de nombreux phénomènes de résurgences de bidonvilles. Le constat est le même, mais par principe, l’appellation change.

NANTERRE (2010-2016)

5

na

Se

re

viè

Ri

BIDONVILLE 2010 1 - Avenue de la République Université

2

1

3

BIDONVILLE 2014 2 - Avenue de la Répulbique/ Bords de Seine 3 - Rue Anatole France

4 La Folie

Axe Nan Tunnel terr d e-L e aD éfen

se

Centre

LA DEFENSE

BIDONVILLE 2014 à 2016 4 - Rue Édouard Colonne 5 - Rue de Sartrouville

91114 habitants

Figure 38 - Carte schèmatique d’analyse du bidonville de Nanterre aux années 2010 à 2016. En fait, on trouve qu’il y a plus de bidonvilles construits, et oui des espaces en vestige. Source : MCCS ( sur la carte page 45 du mémoire de Bernard Bret, Sorbonne, 1968 )

3.3 – La resurgence des bidonvilles en France

Pour mieux comprendre la situation actuelle, il est important de retenir que:

« La forme « bidonville », faite d’habitations de fortune, n’est pas à confondre avec le terme « bidonville » défini par les institutions internationales (cf. p. 26) : traduit du terme slum, qui signifie « habitat irrégulier ou précaire ». Ce dernier peut revêtir des morphologies très variées, y compris en dur et de qualité. Il diffère largement de la forme extrême du baraquement que désigne, en France ou au Maroc, le bidonville. » [in A. Deboulet et M. Jolé (dir.), Les mondes urbains le

parcours engagé de Françoise Navez-Bouchanine, L’Harmattan, 2013, pp. 327-342.]

31

Pourtant, les favelas n’existent-elles qu’au Brésil ?

na

B – situation actuelle


Cependant, selon Mike Davis dans son ouvrage « Le Pire des mondes possibles », tous les espaces urbains pauvres ne vivent pas dans des bidonvilles, au même temps que tous les habitants des bidonvilles ne sont pas nécessairement pauvres.

Actuellement, en France, il y a près de 20000 habitants en bidonvilles (DIHAL, 2016). Mais différemment de ceux des années 1960, on les retrouve aussi dans les interstices des centres-villes, pas seulement en périphérie. En Île-de-France, les bidonvilles sont réapparus plus ou moins sur les mêmes territoires (comme en Nanterre, par exemple). Si le nombre d’habitants en bidonvilles est bien moindre que dans les années 1960 (75 000), selon le Ministère de l’Équipement et du Logement, le bidonville reste très similaire en termes de conditions de vie, de forme d’habitat et de localisation géographique.

Figure 39. Source : DIHAL, avril 2017 ; Association trajectoires, «Habitants des bidonvilles en France», mai 2017

A – Différentes définitions Les pouvoirs publics qui souhaitent éradiquer ces espaces d’inégalité parlent de « campements illicites ». Les ONG y intervenant les nomment « terrains». Les savants qui tentent d’en comprendre l’apparition ou l’organisation préfèrent parler de « bidonvilles » ou de « squats ». Enfin, ceux qui y habitent emploient le terme platz. (selon Hélène Hatzfeld et Antoine Loubière, Actualité du bidonville, revue Urbanisme, nº406) Le platz est un lieu de regroupement contraint par la migration et provisoire, dont les habitants ne souhaitent qu’une chose : en sortir à un moment ou à un autre. Là, différement du Brésil, les bidonvilles ne sont pas (ou pas encore) un mode de vie, ou une culture spécifique aux «roms». Ils sont construits à cause de 32


la crise de logement et de l’hebérgement d’urgence. En effet, selon l’Association Trajectoires « il n’existe pas de définition universelle du bidonville, le terme pouvant se rapporter à des situations extrêmement différentes selon les pays et les contextes.» La définition utilisée par l’UN-Habitat est « une zone urbaine très densément peuplée, caractérisée par un habitat inférieur aux normes et misérable». Plus précisément, lors du sommet des Nations Unies à Nairobi en 2002, furent retenus cinq critères permettant de caractériser les bidonvilles : •

l’accès inadéquat à l’eau potable ;

l’accès inadéquat à l’assainissement et aux autres infrastructures ;

la mauvaise qualité des logements ;

le surpeuplement;

le statut précaire de la résidence.

« Je travaille, je m’occupe demes enfants. Je paie mon loyer, les charges, des impôts… Une fois par année, quoi, pour la télé, tout ça… Le gaz, l’électricité, je vis ma vie, comme les Français (…). De temps en temps je sors avec mes copines au restaurant. La vie normale, comme en France, quoi… » Mme C, Grenoble. Source: L’Association Trajectoires

Par rapport aux habitants des ces endroits, aujourd’hui ils sont dans leur très grande majorité des ressortisants des pays de l’Est (de population «Roms», donc, des Roumains et des Bulgares), soit des immigrants, des réfugiés. Selon le sociologue Olivier Peyroux, au Jornaux Le Monde « 571 bidonvilles ignorés de tous», il est très rare de trouver des français d’origine qui vivent dans des types d’habitat comme les campements. Il dit « Parce qu’on ne s’installe pas comme ça dans un bidonville. En général, il y a un droit d’entrée à payer et on y rejoint des membres de sa famille au sens large ». L’association Trajectoires, dans son demarche de recherche qui s’appelle «Habitants des bidonvilles en France», page 16, affirme que le profil des personnes qui décident de migrer est variable en fonction des périodes. Il est conditionné 33

Pourtant, les favelas n’existent-elles qu’au Brésil ?

B - Qui y habitent ?


par des facteurs locaux propres. Ils peuvent être des migrants pour des raisons économiques, pour avoir être exilés, ostracisés, ou simplement ils sont des autonomes. Comme on peut voir dans les donnés de la figure 39, il y a une majorité de familles avec enfants (66,5%) et au même temps il y a un faible niveau d’études cette population quand elle arrive en France (plus d’un tiers sont analphabètes). Par rapport à leur conditions de vie, une personne sur deux n’a pas de couverture maladie, ils ont de conditions d’hygiène très précaires et ils détient de la ferraille et mendicité pour activité principale.

B - Typologie des logements et conditions de vie Ces bidonvilles, ou les interstices dans la ville, peuvent être délaissés urbains, bretelles autoroutières, voie de chemin de fer, avec différents types d’habitat (cabanes auto-construites, campements, caravanes récupérées, bâtiment abandonné ou mélange de tout cela). En raison de la rareté des terrains dans les grandes métropoles permettant la construction d’un bidonville, des personnes aux origines géographiques différentes sont régulièrement amenées à cohabiter. Le bidonville est un choix par défaut. La conception des ces espaces a eu un effet de «boule de neige», parce que les solutions de l’État, dans le premier moment, sont toujours d’enlèvement, d’évacuation. À l’annonce d’une future expulsion, des habitants de ces endroits, se mettent à la recherche d’un autre terrain, et comme ça des autres barraques sont faits encore. Ces formes d’habitats particulièrement indignes et souvent dangereuses, installées sans droit ni titre sur des espaces publics ou privés, soulèvent des questions liées à l’ordre public, à la sécurité des personnes et à l’accès aux droits fondamentaux.

Alors, pour être précis, on a quelques types de lieux, comme :

1. des friches sur lesquelles ont été construites des cabanes, installées des caravanes, ou des tentes (bidonvilles). Selon la recherche de l’Association Trajectoire, « ces lieux sont s’appellés des camps, des campements illicites, des terrains, des squats, des installations, des friches, des jungles, des platz, des bidonvilles, etc. »; 2. des sites bâtis (squats) qui sont investis par les personnes, et parfois complétés par des installations telles que des cabanes ou caravanes; dur. 34

3. des recoins de l’espace public (rue, parcs, ponts) sans installation en


Une même personne peut avoir vécu uniquement dans un type de lieu, ou avoir connu plusieurs situations durant son parcours. Il faut noter par ailleurs que le type d’habitat peut dépendre du territoire. Donc, pour mieux visualiser et comprendre sur quoi on se parle là, les photos suivantes font une analyse de comment sont les favelas «à la française» et pourquoi aujourd’hui il est difficile de trouver des espaces urbains définis par cette forme d’inégalité. Ces sont des endroits informels, qui ne suivent pas le maillage urbain déjà existent dans les villes.

Figure 40 - Source: MCCS L’image au dessus répresente de manière genérique comment est la

Pourtant, les favelas n’existent-elles qu’au Brésil ?

typologie des baraques des endroits d’inégalité en France.

Figure 41 - Source: http://www.lemonde.fr/societe/portfolio/2017/10/19/en-france-les-bidonvilles-n-ont-pas-disparu

Répresentation d’une baraque dans un campement rom, à Champs-sur-Marne : murs en moquette, toits en contreplaqué, structure en bois.

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C - Un essaye de localisation des endroits

Figure 42 - Source: photo Stéphane Lagoutte/M.Y.O.P pour Les Inrockuptibles

Bidonville au long du boulevard Ney, qui relie la porte de Saint-Ouen et la porte d’Aubervilliers, dans le nord de Paris. Ici, près de quatre cents personnes se sont installées durant neuf mois dans des abris de fortune sur les voies de la petite ceinture, au dessus d’une voie ferrée inutilisée.

Figure 43 - Source: http://www.bfmtv.com/societe/gennevilliers-le-long-de-la-nationale-315-un-bidonville-peuple-de-familles-a-quelques-metres-des-voitures-1152565.html

Campement de Roms installé, depuis 2016, au long de la Nationale 315 à Gennevilliers, dans le banlieu de Paris. Dans ce bidonville, plusieurs dizaines de personnes dont de nombreux enfants vivent dans des conditions précaires sans électricité, à quelques mètres des voitures. 36


Figure 44 - Source: https://img.bfmtv.com/i/0/0/824/332bf9e6a1e404a1abe152503b617. jpeg

Face aux lotissements cul-de-sac, la forme territoriale de ce bidonville rappelle la forme urbaine des centres historiques.

Figure 45 - Source: https://www.placegrenet.fr/2015/03/29/grenoble-une-journee-avec-les-roms-au-coeur-du-bidonville/53339

Cabanes de brics et de brocs sont apparues à Grenoble, dans l’année de 2015, à côté de l’Avenue Edmond-Esmonin, proche de la friche entre la ville d’Échirolles. Majorité de population était «des Roms», en comptant plus de 300 habitants, organisée dans la précarité. Quelques mois plus tard, elles sont évacuées. 37

Pourtant, les favelas n’existent-elles qu’au Brésil ?

Campement du « Jungle de Calais », au Pas-de-Calais, au Nord de la France. Jusqu’à 2016, il comptait entre 8000 et 10000 migrants et un an d’après, il a été démantelé, tandis qu’ils sont encore nombreaux à y aller. Le cas ici c’est différent, car ce sont des migrants réfugiés, qui essayent toujours d’aller à l’Anglaterre pour tenter la vie.



4 – Considerations finales : vers une ville metissée « Le revers de la ville était la campagne, mais dans le point de vue Lefebvrian la campagne n’existe plus. Le revers d’un tissu est celui qui montre les coutures, les imperfections. C’est ce qui maintient les vêtements dans leur intégrité, mais qui ne devrait pas être montré pour des raisons esthétiques (et répressives). » (COUTINHO MARQUES Rachel)

Les trois différentes échelles territoriales analysées, Rio de Janeiro, São Paulo/Brésil et banlieues de Paris/ France, nous montrent la diversité que les espaces urbains d’inégalité pouvent avoir et au même temps, des grands similitudes. Soit dans les topographies de pentes ou plats, soit localisés au centreville, aux banlieues ou dans la périphérie urbaine, soit par différentes contextes d’origine, les favelas ou bidonvilles sont toujours en transformation sociale, territoriale et surtout politique. Ils sont là, encore aujourd’hui mélangés avec le tissu de la ville contemporaine. Les cas de la Rocinha au Rio et de Paraisópolis à São Paulo sont des lieux définis dans le tissu urbain, même irrégulièrement. Déjà les nouveaux bidonvilles en France, sont pris par le nomadisme, toujours en altération, mais toujours existant dans un interstitium urbain. Il ne faut pas les niés.

Considérations finales

L’idée ici c’est de considérer la ville comme une somme de différentes parties, en changements constants, à plusieurs échelles. Les villes et villages contemporains ne manquent pas de centres ou de périphéries. Ils ont le manque de banlieue, avec ce qu’ils ont toujours représenté de vitalité, de renouveau, d’initiative individuelle. Figure 46 - Schèmas comparatifs, de

même proportion territoriale des villes analysées, par rapport à la conception de morphologie et maillage d’agrandissements. Le première Rio de Janeiro, deuxième São Paulo et troisième, Paris. Source: MCCS

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En effet, les tissus suburbains ont une complémentarité territoriale d’espaces publics bordés de paysages hybrides dont la mosaïque visuelle et fonctionnelle est progressivement domestiquée par nos yeux. Léonard de Vinci, dit que «la chose la plus excellente est celle qui contient en soi une plus grande universalité et une plus grande variété». Une société organisée, travaillant avec des institutions publiques et privées, dans une dimension sociale sans différences mais dans leurs différences, dans leurs significations et leurs sens. « La ville génère de nouveaux comportements. L’existance des bidonvilles et l’observation fine de ce qui s’y passe montre à quel point leurs habitants sont dans l’incapacité de faire surgir un projet commun en raison de leur forte hetérogéneité tant culturelle que religieuse, ethnique et même économique. » (MARCHAL Hervé et STÉBÉ Jean-Marc, La ville au risque du ghetto, p.27, 2eme paragraphe.) « Les villes sont de plus en plus préoccupées par leur image, ce qui les pousse à s’engager dans des opérations d’embellissement urbain qui consistent bien souvent à chasser les pauvres de leur quartier insalubre et à les pousser encore plus loin des centres-villes où ils vivent de petits “boulots” ». (MARCHAL Hervé et STÉBÉ Jean-Marc, La ville au risque du ghetto, P.29, 3eme paragraphe, ligne 2.) Pour finaliser, une réflexion avec des questions faites par Rem Koolhaas : « La ville contemporaine est-elle « toujours pareille? » ? Cette convergence, peut-on la théoriser ? Et dans l’affirmative, vers quelle configuration tendrait-elle ? Celle-ci n’est possible qu’à condition d’évacuer la notion d’identité, ce qui est généralement perçu comme une perte. Étant donné l’ampleur de ce phénomène, il a forcément une signification. Quels sont les inconvénients de l’identité et, à l’inverse, les avantages de l’impersonnalité ? Et si cette homogénéisation apparemment fortuite (et habituellement déplorée) venait d’une intention, de l’abandon délibéré de la différence au profit de la similarité ? Peut-être assistons-nous à un mouvement de libération mondial: « À bas le singulier ! » Et que reste-t-il, une fois éliminée l’identité ? le générique ? » (KOOLHAAS Rem, Mutations, s.l., ACTAR, p. 722 )

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À RETENIR

Bidonville : Par l’UN-Habitat, bidonville est « une zone urbaine très densément peuplée, caractérisée par un habitat inférieur aux normes et misérable».

Favela : « La favela désigne toutes les agglomerations d’habitations rudimentaires qui surgissaient dans la ville, dans les collines, en terrains de tiers et sans l’approbation du pouvoir publique.» - ABREU Mauricio de Almeida, dans son oeuvre Reconstruindo uma história esquecida: origem e expansão inicial das favelas do Rio de Janeiro, 1994, p. 40.

Favelado :

Qui habite às favelas.

Inégalité : À l’Observatoire des inégalités, « une inégalité est ce qui n’est pas égal dans le domaine de « revenus », « éducation », « emploi », « lien social et politique » et « conditions de vie », à la population ».

Roms :

Les roms ce sont les nouveaux habitants de bidonvilles d’aujourd’hui en France. Sont des migrants ou réfugiés qui viennent du l’Est de l’Europe, surtout de Roumanie et Bulgarie.

Squats : Squatters, tel que défini par le dictionnaire brésilien en ligne Michaelis (consulté le 16 Avril 2018, disponible à <http://michaelis.uol.com.br>) sont « les personnes qui, par des actes de faux biens, chercher à saisir les terres des autres. « Alors que les squatters sont «ceux qui sont dans la possession clandestine ou illégitime d’une certaine zone de terrain particulier, ou vacant, avec l’intention du propriétaire.»

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BIBLIOGRAPHIE

ARTICLES PERIODIQUES, JORNAL ET REVUES : ABREU, M. A. Reconstruindo uma história esquecida: origem e expansão inicial das favelas do Rio de janeiro. Revue Espaço & Debates, Rio de Janeiro, n 37, p.34-46, 1994. BOURGOIS L., LE CLEVE A., MASSON DIEZ E., PEYROUX O., “Du bidonville à la ville : vers la “vie “normale”? Parcours d’insertion des personnes migrantes ayant vécu en bidonvilles en France”, novembre 2015. ONU-Habitat, « Le défi des bidonvilles, Rapport mondial sur les établissements humains », {«The challenge of slums, global repport on human settlements»}, Earthscan Publications Ltd, 2003. SACHS, Céline. Croissance urbaine et fávelisation des métropoles: São Paulo et Rio de Janeiro. Economie et Humanisme, nº 260, juil-août, 1981 SOUZA E SILVA, Jailson (dir.). O que é favela afinal? Rio de Janeiroº: Observatório de favelas do Rio de Janeiro, 2010.

BASE DE DONNÉES ET CARTHOGRAPHIQUES : http://maps.google.com/ http://portalgeo.rio.rj.gov.br/armazenzinho/web http://data.rio/ http://geosampa.prefeitura.sp.gov.br

CHANSON : DA SILVA, Bezerra. Chanson «Eu sou favela»

LIVRES : ABREU, Maurício de. Origem e expansão das favelas. Rio de Janeiro°: IPLANRIO, 3ª edição, 1997 DAVIS Mike, Le pire des mondes possibles, Paris, La découverte, 2006, 250 p, trad. Fr. Jacques Mailhos DRUMMOND, Didier. Architectes des favelas. Parisº: Dunod, 1981. 42


KOOLHAAS, Rem, Mutations, s.l., Actar, s.d, 800 p. MARCHAL Hervé et STÉBÉ Jean-Marc, La ville au risque du ghetto, Éditions TEC & DOC, 2010.

MÉMOIRES : BRAGANÇA RIZZO, Marcelo, As bordas em Paraisópolis, TFG FAU USP, São Paulo, 2014 SOUCHE, Marilyne, Integrer la ville informelle - exemples de Rio de Janeiro et Medellin, Mémoire de recherche, ENSAG, 2013 TAVARES OURIQUES, Francine, Favelas, Contraintes et Ressources - L’appropriation du tissu informel par le renouvellement urbain, Mémoire de recherche, ENSAG, 2012

SITES : Bidonvilles en France . Source : https://fr.wikipedia.org/wiki/Bidonvilles_en_France Oui, il y a encore des bidonvilles en France en 2017 . Source : https://www.franceculture.fr/emissions/la-revue-de-presse-des-matins-du-samedi/oui-il-y-a-encore-des-bidonvilles-en-france-en-2017 En France, les bidonvilles n’ont pas disparu . Source : http://www.lemonde.fr/ societe/portfolio/2017/10/19/en-france-les-bidonvilles-n-ont-pas-disparu_5203397_3224.html#Zuq5ELwvaFZ7eFfu.99 Rio de Janeiro x São Paulo: conheça as principais diferenças das favelas. Source : http://ultimosegundo.ig.com.br/brasil/rio-de-janeiro-x-sao-paulo-conheca-as-principais-diferencas-das/n1597418137849.html

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