Marie Herber_Memoire HMONP_Et si l'architecte était responsable de la santé publique

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Mémoire d’Habilitation a la Maitrise d’Oeuvre en son Nom Propre // 2018 // ENSAPL // Marie Herber


Un Grand Merci

Chris Cockrell et Laurence Oborn qui m’ont engagé dans l’agence et ont su m’accorder leur confiance Ilaria, Voicu, Ben, Emily, Steve et Stephan pour les discussions que j’ai pu avoir et l’expérience que j’ai acquis auprès d’eux Jean-Luc Collet pour avoir éveiller ma conscience en Master ainsi qu’à son équipe pour m’avoir ouvert grand les portes de leur agence et montrer leur pratique Alain Bornarel pour m’avoir accordé de son temps et partagé sa riche expérience Amélie Fontaine ma tutrice pour ses conseils avisés et les remises en question Ma famille, pour leur encouragement et leur soutien depuis le début Mes amis, pour leur grande énergie et leur conseils avisés


Introduction

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I . L’architecte devrait-il partager sa responsabilité pour une qualité de l’air intérieur en phase de conception ? A/ L’architecte est-il devenu passif concernant la qualité de l’air avec l’arrivée des système de ventilation mécanique ?

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B/ Un travail en coupe, vers un langage commun entre l’architecte et les BET ? La subdivision des tâches, le poids des habitudes, incompréhension dans le langage

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C/ Comment l’architecte cache-t-il ou met-il en scène les machines créées pour la qualité de l’air intérieur ?

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D/ Le choix des matériaux, comment bien se renseigner ?

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L’architecte du passé intègre la ventilation à l’échelle du bâtiment L’architecte de déresponsabilise de la question de la ventilation L’architecte peut-il réapproprier les toitures à des espaces publics ?

Un architecte engagé, un langage commun, une collaboration fructueuse

L’architecte, conscient de la laideur des machines, crée des masques architecturaux L’architecte dessine la forme architecturale en fonction du système de ventilation Quand l’architecte dessinait des ouvrage, des ouvriers-artistes perdus En Angleterre, l’architecte dessine l’ouvrage, une culture du faire L’architecte met en scène le savoir-faire local à saint Nazaire

Architecte, devrions-nous comprendre le concept général afin de développer une culture de la qualité de l’air intérieur? Construire en bois, pas si bon pour notre qualité d’air intérieur Peut-on se fier aux étiquetages, aux labels, quelles limites ?

II – La responsabilité de l’architecte pour une qualité de l’air intérieur se fragilise-t-elle en phase de chantier et après-livraison ? A/ Entre l’architecte et les entreprises de construction Faudrait-il demander des test d’étanchéité des réseaux aérauliques ?

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B/ Entre l’architecte et les occupants

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Conclusion

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La bonne mise en œuvre de la ventilation, une conscience de plusieurs corps d’état L’architecte devrait-il investir de son temps dans la formation de équipes sur chantier ? Le rattrapage des retards de chantier sur le temps de séchage des dalles, une pratique à bannir, mais comment ?

Le choix du système de ventilation en conception dictera à l’usager une certaine conduite L’architecte devrait-il concevoir des systèmes de ventilation sans filtre pour une pérennité de la qualité de l’air intérieur? Changer les comportements à l’aide d’un système de ventilation ?


Preambule

Master Plan dessiné par Chrishtopher Wren pour la reconstruction de Londres après le Grand Feu de 1666, The Architectural Review 1. Entretien de Peter Rees, responsable de l’aménagement urbain de la City de 1985 à 2014. TAYLOR, Craig. Londoners. Londres : Granta Books, 2011. p143-148. Traduction : « plannifier demande de donner une réponse définitive, […] tandis que gérer signifie regarder jour après jour et juste la pousser et l’aider » 2. « Secteur de location privée ». Cette nouvelle façon de traiter la question du logement consiste en la construction de bâtiment résidentiel concevant de plus petits logements au profit de la mise en commun des services comme une piscine, une grande salle de réception au dernier étage profitant d’une vue. Le bâtiment appartient à un groupe immobilier et les logements sont tous à but locatif.

Paris a connu Haussmann et sa grande planification de 1850. Londres n’a pas connu de planification malgré le grand feu de 1666 qui l’a réduite en cendres. Argumentant le peu d’argent dans les caisses du royaume, Charles II n’a pas autorisé Christopher Wren à planifier Londres. L’actuel responsable de l’aménagement urbain de la City, Peter Rees s’en réjouit. Pour Peter, « planning does require you to come to definitive answer, […] whereas managing means watching on a day-by-day basis and just nudging it and helping it »1. Cette philosophie anglaise se retrouve dans la réglementation souple donnant du pouvoir aux autorités locales afin d’accompagner le développement urbain de la capitale. Grâce à cette non planification, Londres nous offre un contraste, un dialogue entre architecture victorienne et contemporaine suivant un tracé moyenâgeux. Elle donne à l’architecte une responsabilité dans l’évolution constante de la ville aussi bien à sa périphérie qu’en son centre. C’est dans cette ville dynamique que je travaille depuis maintenant plus de deux ans au sein d’une agence qui se positionne en leader dans le monde du Private Rented Sector2 (PRS). Cette nouvelle façon d’habiter à Londres pourrait faire face à la crise du logement. Mon agence prend une part de responsabilité dans le logement des londoniens et dans quelques bâtiments tertiaires et commerciaux. L’architecte exerce une responsabilité sur le paysage construit, sur la bonne mise en œuvre d’un ouvrage et vise à satisfaire les clients en créant un lieu 5


de qualité en un temps donné tout en respectant le budget. Dans ce trépied qualité, temps, économie mettant en scène le maître d’ouvrage, la maîtrise d’œuvre et les entreprises autour du projet, comment sont pris en compte la santé et le bien être des occupants ? Cette question de responsabilité que peut avoir l’architecte sur la santé et le bien être des occupants m’anime depuis mon Master d’Architecture. Certes, les questions de contexte, d’esthétique, d’économie sont primordiales pour mener à bien un projet, mais repositionner l’individu au cœur de la question architecturale reste ma préoccupation majeure. A quoi bon concevoir la plus élégante, la plus efficace, la plus grandiose architecture si elle ne prend pas en compte les besoins fondamentaux de l’occupant ? Ne l’oublions pas, au delà de l’orgueil de l’architecte de marquer son passage sur terre, l’architecte se doit, en toute humilité, d’agir pour l’intérêt général, le bien être et la santé des occupants en étant la clé. Motivée par cette question, j’ai approfondi ce sujet au travers différents entretiens et rencontres. Ma mise en situation professionnelle, mes expériences passées et les rencontres enrichissantes sont venues nourrir mon projet personnel. J’ai pu discerner, au cours de ces dernières années, les leviers et la responsabilité que peut, ou doit, avoir l’architecte autour de cette question essentielle de la prise en compte de la santé des occupants qui me paraît primordiale dans l’exercice de ma future pratique professionnelle. La formation française HMONP m’a permis d’aborder, au travers de multiples réflexions et en prenant du recul, la question de la place de l’architecte dans un contexte passé, actuel et futur. Son équivalent britannique, la Part III, approfondit le droit et les contrats britanniques sans cette prise de recul sur le rôle de l’architecte. La formation HMONP m’a permis de faire des rencontres avec de jeunes architectes, qui, comme moi se questionnent sur le rôle de l’architecte d’aujourd’hui, de demain et veulent s’inscrire dans l’évolution de la pratique. Au-delà de rencontres enrichissantes, la formation m’a doté d’outils utiles au façonnage de mon projet professionnel.

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Introduction

Permettez-moi de vous conter un bref épisode de vie quotidienne

«

Par une belle matinée estivale, Amandine s’apprête à quitter son domicile en oubliant son gilet. Du bas de l’escalier, elle interpelle son compagnon: – François, tu peux me descendre mon gilet s’il te plaît ? Sinon, je vais encore tomber malade comme la semaine dernière. – Dis leur de régler la clim’ ! – Impossible, c’est un bâtiment intelligent qui s’auto-régle ! En passant déposer les enfants au centre de loisirs, Amandine croise Suzanne, une amie médecin. Elle lui fait part de ses inquiétudes quant à la multiplication par deux du nombre d’enfants atteints d’asthme au cours de ces 20 dernières années.

»

Et vous, quel air respirez-vous ? Manger, boire, respirer, s’abriter et dormir sont des besoins physiologiques nécessaires à satisfaire pour assurer la survie humaine. L’architecte, depuis des siècles participe au besoin de s’abriter. Nous respirons 15 kg d’air par jour. La surface de contact air – sang dans notre organisme est d’environ 70 m2. Vous le comprenez, respirer un air sain est un besoin vital pour nous tous qui, au-delà d’un effet de mode, doit être une préoccupation majeure pour la santé de l’Homme. Nous passons entre 80% et 90% de notre vie dans des espaces clos : nos lieux de travail, d’habitat, de sport et de loisirs. L’air intérieur est souvent plus pollué que l’air extérieur comme le montre l’Observatoire de la Qualité de l’Air Intérieur (OQAI). L’air que nous respirons est composé d’azote (78%), d’oxygène indispensable à la vie (21%), et d’autres gaz (1%) dont certains sont toxiques voire mortels à forte dose. Ce 1% nous intéresse ici particulièrement. Dans l’air intérieur, un

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composé organique volatile (COV) se démarque des autres : le formaldéhyde. Cet élément chimique, utilisé dans beaucoup de liants, colles et produits dérivés de bois est 10 fois plus présent dans l’air intérieur qu’extérieur. Il a été reconnu comme « cancérigène avéré » par le Centre de Recherche sur le Cancer (CIRC) en 2004 et est à l’origine de l’augmentation du nombre de personnes asthmatiques. L’air est aussi constitué de composants microbiologiques comme les virus, bactéries, spores de moisissure. Ils se développent à l’intérieur de nos édifices, conséquence d’une imperméabilité croissante de nos bâtiments et un mauvais renouvellement d’air. Leur présence est à la cause de troubles respiratoires. Les études gouvernementales mettent en lumière années après années une mauvaise qualité de l’air intérieur dans les écoles et les logements français sans pour autant réajuster les réglementations en vigueur. Il existe un déséquilibre entre les normes françaises concernant cette question centrale de la qualité de l’air intérieur et la réglementation thermique. Auparavant, les bâtiments respiraient naturellement. La porosité des matériaux permettait des échanges d’air « parasites » entre l’intérieur et l’extérieur. La réglementation thermique évolue rapidement : la dernière date de 2012 et la prochaine verra le jour en 2020. Elle impose aux bâtiments une imperméabilité à l’air afin de réduire la consommation énergétique liée au chauffage. Nos bâtiments deviennent de plus en plus imperméables à l’air frais, non pollué, de s’infiltrer dans le bâtiment mais aussi à l’air chaud, pollué par l’activité humaine, de sortir. D’autre part, l’Arrêté du 24 mars 1982 visant à la qualité de l’air intérieur dans les logements en stipulant les débits de renouvellement d’air à respecter n’a pas été mis à jour depuis maintenant plus de 35 ans. Nous continuons d’appliquer un texte qui a calculé les débits de renouvellement d’air en se basant sur une perméabilité « parasite » de l’enveloppe extérieure. Ce défaut d’étanchéité calculé en 1982 à hauteur de 0,2 volume par heure3 devrait être revu en adéquation avec la RT2012. Aujourd’hui, avec les bâtiments plus imperméables à l’air, le volume d’air à renouveler devrait être plus important. De plus, une étude de 2014 effectuée par l’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie (ADEME) montre que 68% des logements en France sont sous-ventilés . Selon l’Observatoire de la Qualité de l’Air Intérieur (OQAI), 60% des VMC ne sont pas conformes à l’arrêté de 1982 qui, comme énoncé auparavant, est en décalage avec la RT2012. La réglementation, imposant un certain renouvellement d’air, ne prend en compte que l’air vicié lié à la respiration et à l’activité domestique. La pollution liée au bâti trouvant son origine dans les colles, les liants, les solvants n’est pas prise en compte. Dans un cadre réglementaire faisant de la qualité de l’air intérieur une question 8

3. Le taux de renouvellement d’air indique le nombre de fois pas heure que l’air total d’une pièce doit être renouvelé


secondaire, l’architecte devrait-il se rendre responsable en matière de santé publique ? Je développerai dans un premier temps comment l’architecte peut faire de la ventilation une question centrale dans sa pratique tout en aboutissant à une qualité architecturale. Dès la phase conception, quels outils l’architecte pourrait privilégier. Mais aussi, jusqu’où l’architecte peut prendre une part de responsabilité face ou avec les BET et industriels. La responsabilité de l’architecte est aussi engagée sur le choix des matériaux. Cette question, primordiale dans la question de la qualité de l’air intérieur, demande une clairvoyance de l’architecte dans les informations dont il dispose. Nous verrons comment l’architecte peut s’armer face à cette question. Par la suite, la bonne qualité de l’air intérieur conçue en phase d’étude peut faire défaut à la réception. Je vous révélerai la responsabilité partagée qu’a l’architecte avec le constructeur. Dans un contexte où l’architecte est de plus en plus évincé du chantier, comment peut-il prendre une part de responsabilité dans la bonne qualité de l’air intérieur à la réception ? Finalement, je vous présenterai comment l’architecte pourrait faire preuve d’ingéniosité créatrice pour anticiper les besoins des occupants ou l’éduquer afin d’œuvrer pour une qualité de l’air intérieur pérenne.

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I . L’architecte devrait-il partager sa responsabilité pour une qualité de l’air intérieur en phase de conception ?

Introduction : Comprendre les facteurs ayant un impact sur la qualité de l’air intérieur L’air intérieur est souvent de moins bonne qualité que l’air extérieur comme le soulève l’Observatoire de la Qualité de l’Air Intérieur (OQAI). Les sources d’une mauvaise qualité de l’air intérieur sont liées à l’activité humaine et au bâti.

4. Suzanne Déoux, professeur à l’Université d’Angers, spécialiste en ingénierie des stratégies de santé dans les bâtiments

La qualité de l’air intérieur se détériore par l’activité humaine : • L’humidité causée par notre respiration, la cuisine, les douches entraîne la formation de spores de moisissure causant des troubles respiratoires. • Le CO2 (rejeté par nos poumons) peut être nocif pour notre santé si il se trouve en trop grande concentration. • La présence de COV dont le formaldéhyde est due à la combustion, notamment provenant d’une gazinière, bougie, encens. Il est à l’origine de l’augmentation importante du nombre de personnes d’asthmatiques en France au cours de ces 20 dernières années comme le souligne Suzanne Déoux4 La pollution de la qualité de l’air intérieur est aussi liée au bâtiment en luimême. Nous retrouvons ce formaldéhyde dans les produits et matériaux utilisés dans la construction. Cet élément chimique, utilisé dans beaucoup de liants, colles et produits dérivés de bois est 10 fois plus présent dans l’air intérieur qu’extérieur. Il a été reconnu comme « cancérigène avéré » par le Centre de Recherche sur le Cancer (CIRC) en 2004 et est à l’origine de l’augmentation du nombre de personnes asthmatiques. 11


Qu’ils soient nos lieux d’habitat, de travail, de loisirs, tous sont affectés par ces facteurs dégradant la qualité de l’air intérieur. A quelques exceptions près, la ventilation fait partie, du 11éme lot de consultation des entreprises met en lumière la prise en compte tardive de cette question pourtant cruciale. Et si l’architecte renversait cette pratique et se posait la question de la qualité de l’air depuis le début du projet ? Je mettrai en résonance un projet développé dans ma mise en situation professionnelle avec différents exemples internationaux et historiques. Nous allons voir dans ce chapitre comment l’architecte, par son esprit de synthèse, a le pouvoir d’actionner les bons leviers afin de traiter cette question de santé publique depuis la source. Grâce à une prise de conscience et par un ajustement de la pratique actuelle, l’architecte peut se questionner sur la place de la ventilation et le choix des matériaux dans le projet depuis l’esquisse.

Introduction au projet du Bentall Centre Le Bentall Centre est un bâtiment situé à Kingston Upon Thames, dans le grand Londres, dont la façade est classée Grade II5. Le bâtiment accueillant actuellement un centre commercial a subit plusieurs transformations. Depuis sa construction en 1932 jusqu’à aujourd’hui, il s’est agrandi accueillant de nouveaux magasins au fil du temps. Le centre commercial prend place à l’endroit même où se dressait historiquement le marché qui a fait de ce lieu sa renommée. En 1992 , le Bentall Centre a subi sa plus grosse intervention : il a été reconstruit en conservant la façade et la verrière d’origine. Il est composé de 3 étages organisés autour d’un espace central vertical accueillant les circulations. Cet espace jouit d’une lumière zénithale grâce à la verrière.

5. Les bâtiments sont listés en trois catégories en Grande Bretagne : Grade I pour les bâtiments d’ « intérêt exceptionnel », Grade II* pour les bâtiments « particulièrement important... plus que d’intérêt spécial » et Grade II pour les bâtiments d’ « intérêt spécial, garantissant tous les efforts pour les préserver »

Photographie du Bentall Centre. Auteur inconnu, Kingston Upon Thames, Bentalls Corner 1960 [Photographie] www. francisfrith.com, consulté le 18/08/2018

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Le client est venu vers nous afin de construire un cinéma de 3 salles sur le toit du bâtiment existant. Les contraintes : Le toit du bâtiment existant est complètement occupé par des générateurs et caissons double flux contrôlant la qualité de l’air intérieur du centre commercial. Afin de construire le cinéma sur le toit, tout le système d’air a dû être repensé afin de libérer de la surface. De plus, la façade est classée Grade II. Même si notre intervention ne changeait pas la façade du bâtiment, elle avait un impact sur la hauteur totale de celui-ci pouvant dégrader la qualité visuelle de la façade. Afin de limiter l’impact visuel, deux niveaux de références ont été établis. Nous disposons de 7,5 mètres entre la dalle du toit plat existant et la hauteur maximum du toit pastiche afin d’installer le cinéma et relocaliser le technique. Le renouvellement d’air existant du Bentall Centre est un système double flux dont l’air entrant est injecté à chaque niveau du bâtiment et extrait en partie inférieure de la verrière.

Coupe transerversale mettant en lumiere l’existant (en jaune) et le nouveau cinema (en bleu) Image de synthèse réalisée pour la demande de permis de construire

Le projet : Le programme est composé d’une zone d’accueil, de trois salles de cinéma intérieures, une salle de cinéma en plein air avec un bar attenant. Alors que la zone d’accueil se trouvera au 2éme étage du Bentall Centre, les trois salles intérieurs de cinéma seront disposées sur le toit existant. La salle extérieure et le bar prendront place sur le toit des nouvelles salles de cinéma. Grâce à la hauteur disponible entre la dalle du toit plat et la faîtière du toit pastiche, nous avons agencé les 3 salles de cinéma. Après plusieurs « pré-permis » et discussions avec les autorités locales, il a été approuvé que le bar puisse dépasser légèrement de la façade classée. Afin de ne pas détériorer la qualité visuelle de la façade classée Grade II, le bar ne sera pas visible depuis les rues adjacentes mais le devient en s’éloignant du bâtiment. L’enveloppe du bar a été conçue comme une réinterprétation moderne de la verrière existante.

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A/ L’architecte est-il devenu passif concernant la qualité de l’air avec l’arrivée des système de ventilation mécanique ? L’architecte du passé intègre la question de la ventilation à l’échelle du bâtiment Lors de sa construction en 1932, Le Bentall Centre disposait d’une ventilation naturelle. Ce projet s’inscrit dans la continuité des galeries couvertes construites au XIXème siècle apportant ainsi lumière et ventilation naturelle à l’espace des boutiques. L’exception est que le Bentall Centre est d’une échelle plus proche du centre commercial que de la Burlington Arcade. Le déplacement naturel de l’air, maitrisé par les architectes de l’époque leur permettait de concevoir la ventilation à l’échelle du bâtiment. L’air entrait par les diverses fenêtres et les portes d’entrées pour ressortir naturellement par les bouches d’aérations situées à la base de la verrière. La différence de hauteur entre les fenêtres (du premier, second, troisième étage) et la verrière, permettait la circulation naturelle de l’air grâce à la différence de pression. Cette approche n’est pas sans nous rappeler l’ingéniosité de Godin dans son familistère mobilisant innovation sociale et technique remarquable. La verrière qui protège la cours centrale des intempéries permet aussi sa ventilation naturelle. Les ouvertures en partie supérieure et inférieure de la verrière permettent une bonne ventilation naturelle. De plus, la porosité des matériaux et l’absence d’étanchéité permettait l’infiltration « parasitaire » de l’air, au détriment de la consommation énergétique. Le Bentall Centre est typique des constructions avant le premier choc pétrolier de 1973. Ce premier choc pétrolier a tiré la sonnette d’alarme sur notre consommation énergétique. Il a marqué le début des réglementations thermiques qui rendront nos bâtiments plus économes en terme d’énergie et de plus en plus étanches à l’air extérieur. Cette étanchéité à l’air agit dans les deux sens : elle empêche l’air extérieur de pénétrer dans le bâti mais empêche aussi l’air vicié de sortir du bâtiment. Afin d’évacuer l’air vicié de l’intérieur du bâtiment, des normes d’extraction d’air ont été instaurées, c’est le début des ventilations mécaniques. Même si aucun document ne reflète la qualité de l’air intérieur du Bentall Centre à l’époque, on peut tout de même soulever la compréhension qu’avaient les architectes pour intégrer la notion de ventilation à l’échelle de l’architecture. En l’absence de système mécanique que l’on connaît aujourd’hui, cette question de ventilation n’était pas vue comme un ajout final mais comme partie intégrante de l’architecture. Avons-nous perdu cette sensibilité avec la mécanisation de la ventilation ? 14

Photographie du Familistère de Godin. Auteur : Fabien, 29/09/2015


L’architecte de déresponsabilise de la question de la ventilation Le Bentall Centre a subit un changement radical en 1992 puisque seule la façade est restée intacte. Elle fut classée après la rénovation. A l’arrière de la façade, tout a été reconstruit. Un système de ventilation mécanique est mis en place. L’air est insufflé au premier et deuxième étage tandis que l’air vicié est extrait au travers des bouches d’aération, déjà existantes, situées à la base de la verrière. L’ensemble des conduits d’aérations se retrouvent sur le toit afin de permettre l’échange thermique entre l’air vicié et l’air neuf au travers de caissons double flux. Au cours d’une discussion avec l’architecte en charge de l’évolution du Bentall Centre, il m’a fait part des difficultés pour contenter les exigences en ventilation dues au changement des magasins. Depuis 1992, le toit n’a cessé de se remplir de techniques liés à la ventilation des magasins. Par exemple, quand un magasin est transformé en lieu de restauration, la quantité d’air à extraire est démultipliée, ayant une répercussion sur le nombre de techniques sur le toit. En 2018, le toit et complètement recouvert de techniques s’organisant dans un réseau complexe. L’arrivée de la norme imposant des débits d’extraction d’air, a engendré la mise en place de systèmes de ventilation. Ces systèmes mécaniques se sont appuyés sur un système naturel déjà préexistant. Puisque le toit n’avait d’autre fonction que d’accueillir des techniques, ils ont progressivement pris possession de l’ensemble de l’espace disponible rendant toute intervention très complexe.

Photographie du toit existant Auteur : Marie, 20/07/2017

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L’architecte peut-il réapproprier les toitures à des espaces publics ? Dans le projet du Bentall Centre, cette question nous intéresse tout particulièrement. Libérer de l’espace sur le toit est indispensable pour concevoir le cinéma. Devant la complexité des réseaux de ventilation, le client a engagé un Bureau d’Études Technique fluide (BET) avec lequel il avait l’habitude de travailler mais pas avec nous. Dans un premier temps, le BET nous a indiqué de façon précise quels générateurs et caissons double flux étaient obsolètes et devaient être remplacés. Un gain de place est d’abord possible grâce a la taille plus compacte des techniques a remplacer en toiture. Prenons l’exemple du système de ventilation de l’atrium central. Il avait été dimensionné en 1992 pour un renouvellement d’air en continu. Cependant, il ne fonctionne que deux à trois fois par an. Le surdimensionnement du système de ventilation calculé en 1992 conduit à la présence de machines surdimensionnées en toiture. Suivant les indications du BET, nous pouvions prédire que les techniques liés à la ventilation de l’atrium allaient réduire en taille grâce à l’évolution de la technologie et un redimensionnement adéquat en fonction des besoins réels. Même si le système de ventilation mis en service en 1992 était le plus performant de l’époque, il était obsolète en 2017, pas le bâtiment. Le simple remplacement de l’ancien système de ventilation devenu obsolète a permis un gain de place. Cependant, même si le remplacement des techniques permettait un gain de place grâce à l’évolution de la technologie, la place libérée n’était pas suffisante. Une réorganisation complète des générateurs et caissons double flux a été nécessaire pour concevoir le cinéma. Nous verrons par la suite comment nous avons travaillé avec le BET pour la réorganisation des réseaux. Ce qui est important de souligner est que le remplacement des techniques et leur réorganisation nous a permis de redonner l’espace du toit auparavant occupé par le technique à un espace public. Même si ce travail est fastidieux, il est rendu possible grâce à l’indépendance entre la technique et l’architecture étant ici la clé pour l’évolution des usages. Le BET fut missionné pour la réorganisation et le redimensionnement des réseaux. La mission de redimensionnement fut bien menée, qu’en est-il de la réorganisation des réseaux?

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Dans ce sous chapitre nous avons vu comment l’architecte au fur et à mesure du temps s’est emparé de la question de la ventilation. Avant la mécanisation de la ventilation, l’architecte intégrait cette question à l’échelle de l’architecture. L’air entrait par les parties basses, naturellement en se réchauffant, montait le long des parois . Il était extrait en partie haute du bâtiment. La mécanisation de la ventilation arrivant de pair avec les réglementations thermiques devient l’affaire du bureau des études techniques fluides. L’architecte s’est déresponsabilisé de cette question technique amenant à une densification incontrôlée des réseaux, comme l’illustre le toit du Bentall Centre. Dans l’exemple du Bentall Centre, l’architecte et la maîtrise d’ouvrage veulent aujourd’hui rendre l’usage du toit au public. La désolidarisation et l’accessibilité des techniques sont ici primordiaux pour un redimensionnement et une réorganisation de ceux-ci dans le but de libérer de l’espace en toiture. Dans ma pratique professionnelle, je veillerai à désolidariser les techniques et l’architecture, en phase de conception. Ceci afin de permettre l’évolution des usages. Particulièrement, j’éviterai de faire du toit un espace exclusivement réservé aux techniques.

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B/ Un travail en coupe, vers un langage commun entre l’architecte et les BET ? La subdivision des tâches, le poids des habitudes, une incompréhension dans le langage Alors que le redimensionnement de la ventilation a été géré avec succès par le BET, le dessin des réseaux fut plus laborieux. La seconde mission du BET était de dessiner les réseaux. Cependant le BET a réagi à ce projet comme n’importe quel autre projet commercial. Ils ont travaillé en plan, révélateur du poids de leur pratique habituelle : ils jouissent habituellement d’un toit libre de technique où ils peuvent implanter la machine où bon leur semble. Cette méthode est révélatrice de la ventilation mécanique : les réseaux sont dessinés en plan pour rejoindre les colonnes techniques pour finir en toiture. L’architecte, laisse habituellement un volume dans les sous-plafonds et colonnes dédiés aux techniques. Par la suite, le BET intervient, positionne ses réseaux horizontaux dans les faux-plafonds et verticaux dans les colonnes techniques. Cette succession de tâches indépendantes ne requiert, la plupart du temps, pas de collaboration entre BET et architecte : le BET vient ajouter une machine à une architecture finie, fixée, déterminée. Leur méthode de travail est adaptée pour les bâtiments neufs mais se trouve inadéquate pour ce projet plus complexe. La hauteur et la surface restreintes dont nous disposions, pour concevoir le cinéma et repositionner le technique, présentait un vrai challenge. Dans ce projet, l’architecture et les réseaux de ventilations dépendaient étroitement l’un de l’autre tant les contraintes étaient complexes. Une collaboration plus étroite qu’habituellement entre le BET et l’architecte était alors indispensable. 4 No. Condensers in the lower deck

Atrium

G

1700mm x 1250mm Condenser

1500mm x 1000mm extract duct

Waterstones plants

2300mm x 1250mm Condenser

Proposed F12A YO sushi Kitchen Extract Fan

Proposed Cinema Scheme Area EX S9 S/R

1800

(Area - APP. 1490m2)

Combined AHU 7&8 on screen 2 roof

New Prop Position for S9 S/R

H&M

F

Usable Plant Zone at Roof Level and Mezzanine Over Area: 3rd FL - 25m2 Mezz Lv - 42m2

F12 S/R

1500mm x 1000mm supply duct

5942mm L x 2380mm W x 1695mm H

Existing control Panels to be relocated.

Generator

E

L8 Supply Air Duct

L8 S/R

Sub Station

Ex. SVP

WH Smith Plants

S6 S/R Mall Supply Air Duct

Smoke Vent Duct

F11 S/R

S8 S/R

S7 S/R

Walkway Removed

SMOKE EXTRACT FANS 4A, 4B, 4C TO BE RELOCATED TO UPPER DECK

ROAD SIDE EXTRACT FANS 68A, 68B, 68C TO BE RELOCATED TO UPPER DECK Sub Level 22.925

1200mm Dia. smoke extract duct

Smoke Vent Duct

Ridge Level 27.700

Smoke Vent Duct

Deck Level APP. 23.100

Service Road Extract Duct

DT08

EF/ 68B

EF/ 68C

1200mm Dia. smoke extract duct

Service Riser

Service Riser

SEF/4A

SEF/4B

Service Riser

SEF/4C

Make Up Air for L8

Service Road Supply

lift lif ft motor mo ottor rroom oom

Make Up Air for S9

mcd 2500mm x 2000mm road side extract duct at upper deck Apple

Apple

New Columns supporting Mezzanine

New Mezzanine Plant Deck Level 27.000

Swag

Centre

Millie

Usable Plant Zone at Roof Level and Mezzanine Over Area: 3rd FL - 260m2 APP. 130m2 usable space Mezz Lv - 260m2

LOWER DECK: ZONE FOR TENANT'S CONDENSORS

Millie

2500mm x 2000mm road side extract duct

Repositioned Walkway Rep R ep posi po osiitio itio one on ned ed Wa W a

NOTE: All measurements to be checked on site. Do not scale. All drawings copyright Crane & Associates

B

West Boiler

Water Tanks

TX 83

C

WC Extract Duct (7X)

EF/ 68A

Fat face

HMV

REV.

7A

Ridge Level 29.750

A

7B

DATE

INIT.

18.11 .16

JWC Mezzanine area adjusted

REVISION

CRANE&ASSOCIATES architecture • interiors • graphics 1 Dawes Court High Street Esher Surrey KT10 9QD Tel: 01372 470524 Fax: 01372 470525 email admin@craneassociates .com website www.craneassociates .com

Proposed McDonalds Kitchen Extract Duct

JOB

Bentall Centre Kingston Upon Thames Cinema Proposal

A

New concrete upstand

WH Smith AHU

Smoke Vent Duct

D

Ex. SVP

Repositioned Walkway

600x600 supply, 600x600 extract under

Usable Plant Zone at Roof Level Area: 3rd FL - 55m2

DRAWING

3rd Floor Mezzanine Plant Deck Proposal

18

DATE

SCALE

Nov 2016 DRAWING NO

10

9

8

7

6

5

4

3

2

1821.2-SK-10

1

1:200 @A3

DRAWN

JWC REVISION

A

Plan reçu du BET fluide. Malgré les plans envoyés incluant le cinéma, le BET revenait vers moi avec des annotations faites sur Adobe PDF faisant abstraction complète du cinéma.


Dans un contexte de subdivision des tâches, la collaboration entre BET et architecte est-elle possible ? Dans l’exemple du Bentall Centre, le BET n’a pas su se saisir de la question dans son ensemble et entretenir une collaboration étroite avec l’architecte. Il dessinait les réseaux en plan amenant à des hérésies : des mètres de conduits étaient dessinés afin de contourner un obstacle. Un travail en coupe était nécessaire pour palier à ce problème en déplaçant les générateurs sur le toit des nouvelles salles de cinéma. Ils n’ont pas apprécié le projet en volume mais en plan de distribution, de réseaux. Ils se sont emprisonnés dans le poids de leurs habitudes. Il s’est avéré que l’architecte reste la meilleure personne, grâce à sa perception en volume du projet, pour traiter la question de la ventilation. Le BET ne dessine que ses machines et n’a pas de regard d’ensemble, qui revient à l’architecte. J’ai donc pris l’initiative de dessiner les réseaux. Au lieu de me conformer à leur dessin et d’entretenir fastidieuse avec le BET, j’ai redessiné les réseaux en les intégrant à l’échelle du bâtiment. Je laisse au BET la seule mission de dimensionnement des générateurs et des caissons double flux. Le repositionnement en plan n’étant pas suffisant, j’ai travaillé cette question de ventilation en coupe en positionnant un des générateurs sur le toit d’une des nouvelles salles de cinéma. Au-delà de l’implication architecturale, cette décision a nécessité une coordination avec le BET structure, consultants cinéma, BET acoustique, consultants incendie.

Nouvel emplacement des générateurs et des caissons double flux de l’atrium

Travail en coupe pour réorganiser efficacement l’emplacement des techniques en toiture

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Pour une explication plus en détail : Une fois que la décision de positionner le caisson double flux sur le toit fut prise, il a fallu le relier aux bouches d’extraction. J’ai fait passer la canalisation verticalement à l’intérieur de la nouvelle salle de cinéma afin d’accéder au toit en évitant de le faire passer à l’extérieur. La complexité technique engendrée par le passage du conduit à l’extérieur, puis transféré verticalement à l’intérieur pour aboutir au branchement avec le caisson en extérieur fut nécessaire. Sans cette solution, le conduit aurait dû passer au-dessus du parapet, ce qui aurait ajouté de la hauteur au projet, qui n’était pas envisageable. Ne voulant pas que les caissons double flux soient visibles depuis la rue et la hauteur du parapet étant fixée, il a fallu baisser considérablement le toit de la salle de cinéma afin de cacher le technique. Je développerai cette question de camouflage des techniques plus tard. Cette décision a demandé une coordination avec un grand nombre de bureaux d’études. L’ajout du poids a demandé une coordination avec le BET structure qui a réduit la salle en hauteur. La réduction de la hauteur de la salle conditionnant la hauteur de l’écran a demandé une coordination avec les consultants cinéma. Le passage des conduits à l’intérieur de la salle de cinéma a demandé une coordination avec les acousticiens, épaississant la gaine technique. L’épaississement de cette dernière réduisant l’accès aux sièges a demandé une coordination avec le BET incendie.

Ce seul exemple, et il en existe bien d’autres, représente la relation que j’ai entretenue avec le BET. Le travail avec notre BET fluide fut fastidieux à cause de leur manque de recul vis à vis du projet. Malgré mon insistance envers eux pour collaborer, travailler en workshop, nous ne parlions pas le même langage: l’architecte en volume, le BET en plan passant à côté des enjeux du projet. Par la complexité du projet, le dessin des réseaux de ventilation est étroitement lié à l’architecture. Pour mener à bien la conception architecturale, je me suis saisie du dessin de l’ensemble des réseaux de ventilation. De plus, le poids des habitudes de ce BET n’a pas aidé la cause. Dans l’exemple du Bentall Centre, le BET fut engagé par le client. Le BET aurait-il été plus enclin à la collaboration si il avait été engagé par l’architecte ? Est ce qu’une collaboration fructueuse entre l’architecte et le BET aboutis à une meilleure qualité de l’air intérieur ?

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Un architecte engagé, un langage commun, une collaboration fructueuse BedZED, le résultat d’une collaboration fructueuse entre l’architecte Dunster et les ingénieurs d’Arup dans un manifeste pour une architecture écologique, regroupant une communauté partageant les valeurs communes du développement durable. 6. RIBA : Royal Institute of British Architects, équivalent de l’ordre des architectes en Angleterre. Traduction : “BedZED va bien au-delà de la liste environnementale standard en défiant notre façon de vivre et de travailler... Jusqu’à maintenant, les pionniers du domaine ont souvent été rattrapés par le coût de l’ambition architecturale mais à BedZED, les architectes ont été hautement innovateur” 7. FROMONOT Françoise, « Le système Z », Criticat, n°11, printemps 2013, p33-47

Le projet Beddington Zero Carbon Energy Development (BedZED) voit le jour à Sutton, dans le sud de Londres en Angleterre en 2002. Il fut primé par le Royal Institute of British Architets6 (RIBA) :« BedZED goes way beyond the standard environmental checklist by challenging both the way we live and work... Until now, pioneering communities have often been attained at the expense of architectural ambition but at BedZED the architects have been highly innovative » Ce projet commence par la rencontre de Dunster et de BioRegional Development Group qui est une ONG fondée en 1992 par un couple d’activistes environnementaux, Pooran Desai et Sue Riddlestone7. L’architecte pense déjà le projet avant même d’obtenir le terrain. Sa réflexion sur l’habitat écologique et par extension la ventilation fait partie du savoir de l’architecte avant l’intervention de bureaux d’études techniques. Il a acquis, par son travail dans l’agence d’architecture Michael Hopkins & Partners, une connaissance de pointe dans ce domaine. Il participe à de nombreux projets intégrant une ventilation naturelle dont la Portcullis House, un bâtiment de bureaux pour le parlement britannique, se reposant sur le déplacement naturel de l’air par tirage. Il est aussi en charge du campus Jubilee à Nottingham, exemplaire par sa frugalité basée sur l’effet venturi. Ces années passées chez Hopkins, ont permis à l’architecte de développer son savoir dans la réalisation de bâtiments à très basse consommation énergétique en intégrant une ventilation adéquat pour la santé des occupants. De plus, la relation entre Dunster et Chris Twinn, chef du développement durable aux bureaux Arup de Londres, s’est développée au fur et à mesure des projets précédemment cités.

Système de ventilation naturelle pour le Jubilee Campus de l’Université de Nottingham. Photographie de Hopkins Architects

C’est dans ce contexte d’expérience acquise chez Hopkins et de collaborations précédentes avec les ingénieurs d’Arup que le projet BedZED voit le jour, lorsque Dunster quitte l’agence Hopkins. BedZED est un ensemble de 82 maisons, 17 appartements et 1500m2 d’espace de travail répartis dans les habitats. Le projet remplit toutes cases de la basses consommation énergétique : doubles murs séparés par un minimum de 30cm de laine de roche, étanchéité à l’air plus forte que les standards de l’époque, triple vitrage, panneaux solaires.... L’idée d’une ventilation naturelle fut vite choisie puisqu’elle a la particularité d’allier basse consommation énergétique et 21


une bonne qualité de l’air intérieur. Cet exemple permettrait-il de réconcilier les exigences de la RT2012 et la bonne qualité de l’air intérieur ? Comme énoncé précédemment, Dunster a accumulé un savoir au fil des années dans le déplacement naturel de l’air. La compréhension simple que l’air chaud, étant plus léger, se déplace verticalement est un point de départ suffisant et facile à maîtriser. Par le travail en coupe, l’architecte se munit de l’outil nécessaire afin d’offrir une ventilation adéquate, indispensable à la bonne qualité de l’air intérieur. Voyons comment Dunster et les ingénieurs d’Arup, ont traité la qualité de l’air intérieur dès la phase programmatique, au travers du travail en coupe. Coupe de ARUP publié dans Arup Journal, Vol.38 No.1 (1/2003), Editor : David J.Brown p10-16

L’architecte utilise l’énergie des éléments naturels, ici, le vent et le déplacement naturel de l’air. Comme nous l’explique l’Arup Journal8, l’architecte Dunster et l’équipe d’Arup avaient pour but d’enlever toute ventilation mécanique. Ils ont travaillés sur les « Building physics » afin de tirer le maximum de potentiel de l’architecture pour aboutir à une bonne ventilation : • L’espace de travail se développe en partie nord. Une différence de hauteur est nécessaire pour un tirage naturel de l’air vicié en partie supérieure de la mezzanine. • L’habitat se développe en partie sud. L’espace vertical de l’escalier permet le déplacement naturel de l’air depuis les pièces de vie jusqu’aux girouettes placées sur le toit. Par cette dépression naturelle du bâtiment, l’air pur entre dans les pièces de vie par la façade sud, une double paroi composée d’un jardin d’hiver jouant le rôle de serre pour chauffer l’air entrant. 22

8. Arup Journal, Vol.38 No.1 (1/2003), Editor : David J.Brown p10-16


Par le travail en coupe dès le début du processus de conception, l’architecte met à profit un outil de conception banal pour une réflexion autour de la qualité de l’air intérieur. Certes, la connaissance du déplacement naturel de l’air est indispensable. L’architecte, par son apprentissage chez Hopkins et sa relation étroite avec Chris Twinn, a intégré un savoir en terme de déplacement naturel de l’air. Le travail en coupe depuis le début du projet est indispensable afin de travailler avec les éléments naturels comme le soleil, le vent... Un même langage, au travers de la coupe, parlé par l’architecte et le bureau d’étude, a permis d’échanger efficacement et faire évoluer le projet pour intégrer la question de la ventilation depuis le début. Cette collaboration est-elle possible en France? Cet exemple de BedZED, révélateur de la coordination entre un architecte et un bureau d’étude reconnu a été repris dans bon nombre de revus et primé par RIBA. Ce projet peut nous paraître déconnecté de notre pratique. En me renseignant sur des projets de ventilation naturelle en France, je fus surprise de n’en trouver qu’un seul: des logements collectifs à Saint-Nazaire. J’ai contacté le BET fluide afin d’en savoir plus sur leur relation avec l’architecte et leur méthode de travail. Alain Bornarel, fondateur du BET TRIBU a eu la gentillesse de partager son expérience et son point de vue. Il participa à la conception de l’ensemble de logements collectifs à Saint Nazaire. Le projet comprend 90 logements collectifs. Il est le seul bâtiment de logements collectifs à ventilation naturelle en France et a eu recours à plusieurs ATEX.

Photographie des logements collectifs de Saint Nazaire en ventilation naturelle. Architecte : Atelier Philippe Madec BET : TRIBU Source : site internet TRIBU, 95 logements collectifs Square Delzieux à Saint-Nazaire (44)

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Alain Bornarel m’a confié qu’ils ont travaillés en workshop avec les architectes pour les décisions importantes à prendre, depuis la programmation. Loin des réflexes programmatiques d’aujourd’hui, les salles d’eau disposent toutes d’une fenêtre vers l’extérieur pour une ventilation naturelle. Épaissir les bâtiments fut une réponse pour faire face à la demande croissante de logements en ville et obtenir une plus grande concentration d’habitations. Cependant, cela a amené à concevoir les pièces de services à l’arrière, devenant aveugles. Au delà de revoir nos systèmes de ventilation, pourrionsnous, en tant qu’architecte traiter le problème à la cause ? Ayant un pouvoir de décision dans l’organisation programmatique, l’architecte devrait-il intervenir en amont? Éviter de dessiner des pièces aveugles pourrait esquisser une réponse mais il est difficile d’avoir une conclusion tranchée sur la question puisque cela dépend de chaque projet, la pression immobilière demeurant.

Devrions-nous, en école d’architecture aborder ces notions de déplacement naturel de l’air ? Ancienne étudiante de Saint-Luc à Tournai, je suis diplômée d’un Master d’architecture et d’ingénierie architecturale. J’ai abordé, par le biais de l’option développement durable dispensé par Monsieur Jean-Luc Collet, la compréhension du déplacement naturel de l’air. Comment, en tant qu’architecte, nous devions intégrer des connaissances de base liées à l’ingénierie pour une intégration très tôt dans le processus de conception. Pour lui, l’architecte est le seul acteur dans la maîtrise d’œuvre capable d’intégrer ces questions de santé publique. Il a la responsabilité et le pouvoir de modeler l’architecture pour une qualité de l’air intérieur. Monsieur Collet, lui-même architecte, a cependant un parcours bien différent de la majorité des architectes en France. Il commença ces études en math sup/math spé et continua sa formation à l’École Supérieure Nationale des Arts et Industries de Strasbourg. Basée sur une structure qui émane de l’école allemande, il a intégré le savoir de la thermodynamique et des fluides et de l’architecture. Grâce à cette compréhension poussée de la mécanique des fluides, il est capable d’intégrer cette question de la qualité de l’air intérieur dans le processus de conception. Nous verrons au cours de ce mémoire quelques-unes de ses réalisations.

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Dans ce sous- chapitre, nous avons vu plusieurs types de relations entre l’architecte et le bureau d’études techniques. La mission du BET, dans l’exemple du Bentall Centre, était de nous assister dans le redimensionnement et la réorganisation des réseaux. La complexité du projet était telle qu’ils furent incapables de se représenter le projet en trois dimensions. Le poids de leurs habitudes dans le travail en plan les a empêchés de collaborer étroitement avec l’architecte. Pour la bonne conception de l’architecture, j’ai travaillé au-delà de ma mission en dessinant l’ensemble des réseaux. Nous avons remarqué dans le projet BedZED la collaboration étroite fructueuse entre l’architecte et les ingénieurs autour du travail de la coupe. Cette volonté de traiter la ventilation vient tout d’abord de l’architecte Dunster grâce à son expérience acquise chez Hopkins. Dans ma pratique, je dessinerai la ventilation et intégrerai cette question depuis l’étude programmatique. Le travail en coupe traversera les phases et les acteurs. Je laisserai au BET, que j’aurai choisi avec soin, le dimensionnement des réseaux.

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C/ Comment l’architecte cache-t-il ou met-il en scène les machines créés pour la qualité d’air intérieur ? L’architecte, conscient de la laideur des machines, crée des masques architecturaux Lors de la rénovation de 1992 du Bentall Centre, l’installation de ventilation mécanique sur le toit a eu un impact architectural. Conscient de la laideur des machines, les architectes ont construits un toit pastiche, en retrait de la façade classée pour les cacher. Masquer les techniques, c’est l’attitude que reproduira l’architecte 15 ans plus tard. Un conduit de ventilation devait être repris d’un magasin au 2nd étage et rejoindre le toit des nouvelles salles de cinéma. Ce conduit était visible en façade d’une des nouvelles salles de cinéma et devenait visible depuis le bar et l’espace public. L’architecte dessine une enveloppe angulaire dialoguant avec la verrière pour cacher le conduit anesthétique. Cette nouvelle peau permet non seulement de couvrir les conduits mais aussi de créer un espace supplémentaire afin d’en accueillir de nouveaux conduits si le bar venait à changer de fonction. Dans cet exemple, on voit que la question de la ventilation amène une réflexion architecturale afin de cacher les réseaux depuis l’espace public de la rue. En revanche, les logements surplombant le Bentall Centre ont toujours une vue sur une densité de réseaux techniques. Et si l’architecte, au lieu de camoufler les réseaux de ventilation les mettait en scène ?

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Toit pastiche

Camouflage par une haie végétale

A gauche : Élévation de la façade existante du Bentall Centre montrant le camouflage construit en 1992 A droite : Image de synthèse montrant le camouflage des techniques en 2017

Camouflage par une paroi angulaire


L’architecte dessine la forme architecturale en fonction du système de ventilation Le projet du Grand Large à Dunkerque, comprenant 1000 logements a vu le jour d’une volonté forte de la maîtrise d’ouvrage dans la conception d’un écoquartier. Comme le souligne justement l’architecte Nicolas Michelin, « dans des immeubles très bien isolés, la ventilation est la première source de dépense énergétique » ce qui l’amènera rapidement au choix de la ventilation naturelle assistée mécaniquement pour l’ensemble des logements. Le choix de ce système de ventilation depuis le début du projet participe à la justification du geste architectural. L’architecte, pour optimiser le système de ventilation, dessine des toits en pente afin d’accélérer la vitesse du vent pour un tirage efficace des extracteurs d’air situées à la faîtière du toit. Cette intégration forte de la ventilation dicte la forme architecturale.

Quartier du Grand Large à Dunkerque Architecte : ANMA

Cependant, au fur et à mesure du projet, et à cause de la réticence des bureaux de contrôle, le système de ventilation naturelle assistée a été abandonné en faveur d’une ventilation totalement mécanique. Même lorsque la ventilation naturelle est intégrée dans la forme architecturale et détient un ATEX, l’innovation trouve une limite dans les normes françaises.

A gauche : Photo : Stéphane Chalmeau A droite : Schema expliquant la circulation naturelle de l’air Source : Cite de l’Architecture et du Patrimoine, Vers de nouveaux logements sociaux, vol n�2.

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Quand l’architecte dessinait des ouvrages La façon dont Gaudi dessinait ses extractions d’air comme partie intégrante de son architecture a attiré mon attention lors d’une de mes visites à Barcelone. Les extractions d’air sont dessinées comme des œuvres d’art sur le toit des différentes villas. Les toits accessibles, deviennent une vrai balade imaginaire où chacun se prête au jeu de l’interprétation des sculptures remplissant les fonctions de cheminées et d’extractions d’air. Conduits techniques et architecture se confondent, ne faisant qu’un. Même si cet exemple prend sa place dans ce mémoire grâce à l’attention particulière avec laquelle l’architecte a dessiné ces sculptures à échelle humaine, il est difficile de retranscrire littéralement cet exemple dans notre pratique actuelle. Ces ouvrages, tous différents demandent une mise en œuvre sur mesure. Plus qu’un savoir faire, ces ouvrages ont été mis en œuvre par des ouvriers-artistes. L’architecte peut-il dessiner des ouvrages dans notre pratique actuelle ? Photographie des toits de la Casa Mila Architecte : Gaudi Photo : Marie Herber

En Angleterre, l’architecte dessine l’ouvrage Lors de ma visite à Sutton, la façon dont Dunster met en avant les girouettes multicolores m’a fait penser au travail de Gaudi, dans une réinterprétation plus contemporaine des extractions d’air. Dans le projet BedZED au sud de Londres, les girouettes, sont de véritables ouvrages qui célèbrent ces extractions d’air naturelles : « Comme ils sont impossibles à dissimuler, nous en avons fait un parc de sculpture en plein ciel » commente l’architecte Dunster9. Ces girouettes s’orientent en cœur dans la direction du vent donnant à voir une architecture mouvante. Même si ce projet n’a pas été beaucoup publié en France, il a le mérite de nous montrer que les techniques sur le toit peuvent devenir des ouvrages dessinés 28

9. Le site youtube propose un grand choix de film consacrés à BedZED avec des interviews de Bill Dunster


par l’architecte en collaboration avec les ingénieurs d’Arup. Malheureusement, l’entreprise qui a fabriqué ces girouettes a fermé peu de temps après la réalisation de BedZED rendant hasardeux leur entretien. Quelle est la réponse française dans le dessin des ouvrages ?

Photographie des toits du projet BedZED, Sutton, Angleterre Architecte : Dunster Source : Site internet Bioregional, BedZED

L’architecte met en scène le savoir-faire local à Saint Nazaire Comme le dit Alain Bornarel, fondateur du BET TRIBU, la ventilation naturelle, « c’est pas compliqué ». Au cours d’un entretien téléphonique, il m’a expliqué le fonctionnement et la mise en œuvre du système de ventilation naturelle à tirage thermique conçu pour le projet de logements à SaintNazaire. Vous pouvez vous reporter à l’annexe pour un résumé de l’entretien téléphonique. Les cheminées multicolores prônant sur les toits des logements comme pour faire hommage au projet Bed Zed de Londres, ont été fabriquées par un chaudronnier local. Ces extracteurs d’air atypiques sont en fait des produits marins. Ils mettent en scène le savoir-faire local.

Photographie des logements collectifs de Saint Nazaire en ventilation naturelle. Architecte : Atelier Philippe Madec BET : TRIBU Source : site internet TRIBU, 95 logements collectifs Square Delzieux à Saint-Nazaire (44)

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Comme nous l’avons vu dans le premier sous-chapitre, la question de la ventilation est étroitement liée à la responsabilité de l’architecte sur le dessin de la cinquième façade. Dans ce sous chapitre, nous avons vu comment l’architecte peut prendre une part de responsabilité dans le dessin de cette cinquième façade. Dans un premier degré, l’architecte peut camoufler les réseaux et les techniques en construisant des toits pastiches comme c’est le cas pour le Bentall Centre. Dans un second degré, l’architecte peut faire du toit une démonstration du savoir-faire local ou dessiner des ouvrages demandant aux industriels une mise en œuvre sur mesure. Dans degré ultime, le toit est une balade où Gaudi dessine des extractions d’air comme des œuvres sculpturales dont la construction totalement sur-mesure est assurée par des ouvriers -artistes. Le dessin des extracteurs par l’architecte, l’utilisation d’un savoir-faire local, dessiner la forme architecturale en fonction d’un système de ventilation dépendent du contexte économique, géographique, social. Dans ma pratique professionnelle je trouverai le levier adéquat au projet en cours pour faire de la cinquième façade un dessin à part entière.

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D/ Choix conscient des matériaux, vers une matériautèque choisie? Le travail en phase de conception pour la bonne ventilation de nos bâtiments s’accompagne par le choix de matériaux non polluants pour la qualité de l’air intérieur. Introduction : La dangerosité sanitaire des matériaux, une histoire qui se répète? Nous avons tous en tête, le scandale qui a éclaté dans les années 1997 concernant l’amiante. Ce matériau, utilisé pendant de nombreuses années pour sa résistance au feu, à la chaleur, a été classé comme « cancérigène avéré » de Groupe 1 par le Centre International de Recherche sur le Cancer (CIRC) en 1976. L’amiante est un cancérogène connu pour provoquer des mésothéliomes et des cancers du poumon chez l’homme comme le rappelle le communiqué de presse no 137 du CIRC. Malgré des preuves irréfutables de la responsabilité de l’amiante dans les cancers, prouvé par le CIRC en 1976 et appuyé par le parlement européen en 1978, il aura fallu 30 ans au gouvernement français pour interdire la vente de ce produit, en 1997. Le scandale de l’amiante a explosé dans les années 1990 à cause du manque de réaction des autorités face à cette menace sanitaire pourtant connue depuis de nombreuses années. Selon une estimation de l’Institut National de veille Sanitaire (INvS) publié en 2015, près de 2200 nouveaux cas de cancers et 1700 décès chaque année trouvent leur cause dans l’exposition des personnes à l’amiante. En 1950, un des frères Blandin était directement rattaché à la direction d’une des trois entreprises de projection d’amiante française. Il a pu constater que les dirigeants connaissaient les risques, comme nous l’explique le fils d’un des frères dans un entretien donné à l’Association Nationale de Défense des Victimes de l’Amiante (Andeva) en 2009. Conscient de la dangerosité sanitaire de l’amiante bien avant son interdiction, les frères Blandin ont créé en 1951 un nouveau système d’isolation par projection de fibres de roches et des fibres minérales en remplacement de l’amiante. Les frères ont agi en amont de l’évolution de la réglementation offrant une autre solution de matériaux à la maîtrise d’œuvre et d’ouvrage. Comme cet exemple le prouve, attendre la mise en place de réglementations concernant la toxicité des matériaux ne parait pas être la bonne attitude à adopter. L’architecte a le devoir de conseil envers la maîtrise d’ouvrage sur le choix des 31


matériaux non cancérigènes, à condition qu’il connaisse la dangerosité de ces derniers. Devant la multitude de composés organiques volatiles (COV), des particules cancérigènes, l’architecte peut se retrouver désarmé. L’architecte n’est pas chercheur en médecine et ne peut tout connaître. Cependant, il dispose d’outils lui permettant de reconnaître si un matériau peut être toxique à la santé. Quels sont-ils? Ce chapitre développera les outils dont l’architecte peut se munir afin d’exercer son devoir de conseil envers la maîtrise d’ouvrage dans les matériaux participant à la qualité de l’air intérieur. Architecte, devrions-nous retenir les COV les plus nocifs et comprendre le concept général afin de développer une culture de la qualité de l’air intérieur? Je vais commencer ce sous-chapitre avec la description d’un composé organique volatile omniprésent dans les espaces clos. Le formaldéhyde est la « grande star » des COV comme le souligne Sézanne Deoux, docteur et professeur à l’université d’Angers et spécialiste en ingénierie des stratégies de santé dans les bâtiments. « Grande star » est certainement une expression pour atténuer la dangerosité de ce COV aux yeux du public puisqu’il a été classé « cancérigène avéré » de Groupe 1 par le Centre International de Recherche sur le Cancer (CIRC) en 2004, au même titre que l’amiante. Même si les cancers sont provoqués par une exposition intensive au formaldéhyde et touche pour la grande majorité les métiers liés à l’application de peinture, ce COV est en grande partie à l’origine de la multiplication par deux des asthmatiques en France au cours de ces 20 dernières années. Le formaldéhyde trouve sa source : • Dans les matériaux mis en œuvre dans le bâtiment puisqu’il est présent dans les colles, vernis, tissu, produits d’entretiens, peintures, plastiques. • Dans la combustion, quelle qu’elle soit, comme les bougies, la combustion d’encens, la cuisine au gaz. Vous l’avez compris, la présence de formaldéhyde est omniprésente dans nos intérieurs expliquant sa concentration 10 fois plus supérieure à l’intérieur qu’à l’extérieur comme le rapport l’Observatoire de la Qualité de l’Air Intérieur (OQAI)10 Comme traitée dans le chapitre précédent, une ventilation prenant en compte ce rejet de composés organiques volatiles par le bâti est indispensable. Cependant, pour traiter ce problème à la source, le choix des matériaux à faible concentration en formaldéhyde voire sans formaldéhyde est primordial.

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10. Rapport final de la campagne nationale Logements, Etude de la qualité de l’air dans les logements français, 2006. Cette étude montre une concentration médiane de 19,6 μg.m-3 mesuré en intérieur et une concentration médiane de 1,9 μg.m-3 mesuré en extérieur


Dans ma pratique, bannir les matériaux contenant du formaldéhyde serait une réponse, est-elle envisageable ? Pourrai-je bannir le formaldéhyde dans mes constructions ? Le but ici n’est pas de dicter une façon de construire mais bien de comprendre comment l’architecte, en intégrant ce questionnement de la composition des matériaux depuis le début du processus de conception pourrait fondamentalement contribuer à la qualité d’air intérieur. Construire en bois, pas si bon pour notre qualité d’air intérieur Le bois qui, a priori, est un matériau bon pour la qualité de l’air intérieur peut se révéler être un vrai pollueur pour les occupants. Cela dépend directement de la manière dont il a été modifié. Prenons l’exemple du bois lamellé collé : il est utilisé entre autre pour sa capacité à traverser des longues portées. Même si la vue d’une structure en lamellé collé peut nous faire penser à un matériau écologique, respectueux de son environnement, il émet du formaldéhyde, à cause la colle utilisée. Le lamellé collé est nocif pour la qualité de l’air intérieur. L’utilisation du bois pleine masse, n’utilisant pas de colle est meilleur pour la qualité de l’air intérieur. Une recherche doit cependant être menée afin de connaître le traitement que le bois a reçu. Le choix de construire la structure d’un bâtiment en bois massif plutôt qu’en lamellé collé aura une conséquence sur le bâtiment. En effet, les poutres de lamellé collé peuvent franchir des portées allant jusque 30 mètres alors qu’une poutre faite en bois pleine masse pour soutenir un plancher ou une toiture ne peut dépasser une portée d’environ 6 à 10 mètres. Cela dépend bien sûr de l’épaisseur de la poutre, du type d’assemblage et de l’espacement entre les poutres. Travailler avec de petites sections de bois local en peuplier privilégiant l’assemblage au collage, c’est le choix qu’a fait Monsieur Lacoste dans la maison de l’écologie à Lille ou encore dans la salle des fêtes de Lezenne. Ce choix, fait au début du processus de conception, amène une façon de travailler particulière notamment dans la recherche de l’assemblage adéquat pour permettre de longues portées. Intérieur de la Maison de l’Écologie Régionale de Lille Architecte : François Lacoste Photo : Marie Herber

Je ne m’attarderai pas plus longtemps sur cet exemple puisque la construction en bois n’est pas l’objet de ce mémoire. Il nous montre cependant que l’architecte, en intégrant la question de la qualité d’air intérieur depuis le début de la conception pourrait avoir une influence sur le choix structurel.

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Dans le second œuvre, l’utilisation de dérivés du bois tels que le bois aggloméré, MDF pour les revêtements plancher, les meubles de cuisines peuvent être une source de polluant pour notre air intérieur. Ces dérivés du bois contiennent du formaldéhyde dans le liant indispensable à leur fabrication. Cet exemple sur le matériau bois révèle l’importance de ne pas se fier à ce qui, à priori, est bon pour la qualité de l’air intérieur. L’utilisation du bois ne veut pas automatiquement dire bonne qualité de l’air intérieur à cause des solvants et liants utilisés dans les produits dérivés. Les industriels commencent à proposer des matériaux dérivés du bois ne contenant pas de formaldéhyde. Afin d’éclaircir ces questions, je pourrai demander aux commerciaux venant me rendre visite de me donner le taux d’émission de COV des matériaux qu’ils proposent. De quels outils dispose l’architecte afin de ne pas se perdre dans la multitude des matériaux proposés et éviter de tomber dans les à priori ? L’architecte peut, dans un premier temps, se fier aux étiquetages des matériaux qui a été rendu obligatoire en 2013 en France. Peut-on se fier aux étiquetages, aux labels, quelles limites ? Pour bien comprendre l’étiquetage des matériaux concernant les COV, il est important d’expliquer plusieurs points. L’étiquetage réglementaire11 est obligatoire depuis 2013 sur les produits et matériaux de revêtements de sol, mur, plafond, les cloisons légères et faux-plafonds, les isolants, les fenêtres, les portes, les colles, les adhésifs... Il a été rendu obligatoire par le ministère de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement. Cet étiquetage classe en 4 catégories A+/A/B/C les émissions de 11 COV sélectionnés dont le formaldéhyde. Il donne une information sur le risque de toxicité par inhalation allant de A+, étant la catégorie la moins nocive pour la qualité de l’air intérieur, à C, la plus nocive. Même si cet étiquetage est un premier pas dans l’information pour la maîtrise d’ouvrage et la maîtrise d’œuvre, elle comporte des lacunes. D’une part, cet étiquetage découle des résultats réalisés par l’entreprise de fabrication ellemême, sans l’intervention ou la vérification par un tiers, le conflit d’intérêt se pose. La méthode de test est cependant réglementée par la famille des normes ISO 16000, référence européenne qui est aussi utilisée en Belgique et en Allemagne. La détermination de la classe d’émission de COV est sous la responsabilité du fabricant et du distributeur mais rien n’assure à 100% la fiabilité du test. 34

11. Décret du 23 mars 2011, arrêtés du 19 avril 2011 et du 20 février 2012 relatifs à l’étiquetage des produits de construction ou de revêtement de mur ou de sol et des peintures et vernis sur leurs émissions de polluants volatils


De plus, la classification du produit donnée sur l’étiquetage révèle le taux d’émission de COV 28 jours après la pose. Cet étiquetage ne donne aucune information quand aux COV émis pendant la pose du produit ou du matériau. Prenons l’exemple d’une peinture A+. Cette peinture émettra très peu de formaldéhyde à partir de 28 jours après la pose de celle-ci mais rien n’indique la quantité d’émission dans ces premiers 28 jours. Connaître cette notion est indispensable afin de ne permettre l’occupation des locaux qu’à partir de 28 jours après la pose de la peinture. Finalement, l’étiquetage obligatoire en France est à titre d’information et n’empêche pas la vente de produits toxiques contenant du formaldéhyde, même si il a été classé comme « cancérigène avéré » de Groupe 1 par le Centre International de Recherche sur le Cancer (CIRC) en 2004. Cette observation fait référence à l’amiante. En Autriche, le gouvernement a opté pour une réglementation plus radicale : la vente de matériaux contenant du formaldéhyde est strictement interdite. De plus, l’index IBO (Institut autrichien de bâtiments sains et écologiques) sert de référence pour aider la maîtrise d’œuvre et la maîtrise d’ouvrage à choisir des matériaux qui pourront être sujets à des subventions de la part des régions autrichiennes. On voit dans cet exemple que des actions gouvernementales fortes, comme l’interdiction de la vente de matériaux contenant du formaldéhyde, pourraient êtres mises en place afin d’inciter les acteurs du bâtiment à faire les bons choix et préserver la santé des occupants. En France, les lobby exercent-ils trop de pression sur le gouvernement, l’empêchant de prendre de telles décisions ? Même si la question serait intéressante à approfondir, elle échappe à la responsabilité de l’architecte qui est le sujet de ce mémoire. En plus de l’étiquetage obligatoire, certains labels se sont développés pour certifier le faible rejet de COV. Certains industriels proposent des matériaux avec très peu d’émission de formaldéhyde, appuyé par des tests effectués au troisième jour après la pose. Ces produits labellisés peuvent constituer un outil supplémentaire pour l’architecte dans le choix des matériaux. Encore faudraitil avoir une vue d’ensemble sur les labels et connaître leur spécificité.

12. Fédération Française du Bâtiment. Qualité de l’air intérieur, Enjeux et bonnes pratiques pour les métiers du bâtiment. Avril 2018

Pour ne pas se perdre dans la multitude des labels, la Fédération Française du Bâtiment a mis en place un guide pour la maîtrise d’œuvre et recense, par lot de construction les différents labels autour de la qualité de l’air intérieur12. Afin de faire le tri dans les matériaux, une organisation particulière de la materiauthèque de mon agence pourrait faciliter la recherche de matériaux n’émettant pas de formaldéhyde pour un projet. Les matériaux n’émettant pas de formaldéhyde seraient regroupés ensemble. 35


Lorsque l’utilisation d’un matériau sans émission de COV est impossible, les matériaux en émettant seraient classés en fonction de leur concentration d’émission. La mise à jour régulière d’un fichier recensant les labels en fonction de leurs exigences sur les émissions de COV permettrait de ne pas se perdre dans leur multiplicité.

Au cours de ce paragraphe, nous venons de voir que l’étiquetage est un premier outil permettant à l’architecte de guider son choix, mais qui comporte des limites. Ces limites vont certainement évoluer avec le temps et devenir de plus en plus strictes envers les industriels concernant le formaldéhyde. En attendant de grandes réformes gouvernementales, l’architecte peut acquérir une connaissance de base. Toutes colles ou liants utilisés dans les matériaux de construction, de second œuvre et de finition peuvent contenir du formaldéhyde, nocif pour la santé des occupants. Dans mon agence, la matériauthèque aura deux grandes classifications. D’un côté les matériaux n’émettant pas de formaldéhyde et d’un autre côté les matériaux seront classés en fonction de leur degré d’ émission de formaldéhyde. Certes, le formaldéhyde n’est pas le seul COV polluant la qualité de l’air intérieur mais c’est le plus important. La classification de la matériauthèque pourra évoluer en fonction de la découverte d’autres COV nocifs à la santé. Les labels seront classifiés en fonction de leur niveau d’exigence sur l’émission de formaldéhyde. Une liste sera mise à jour régulièrement dans la base de données de l’agence. Plutôt que d’attendre l’innovation des fabricants pour des matériaux non polluants, devrai-je être à la source de l’innovation?

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CONCLUSION En phase de conception, l’architecte a une grande responsabilité à prendre pour la qualité de l’air intérieur. Cette prise de conscience m’amène à ajuster ma pratique dans le choix du moment pour intégrer la question de la ventilation dans le projet, la méthode de travail à adopter, ma relation au BET et l’organisation de l’agence dans le choix des matériaux. J’ajusterai la pratique en faisant de la ventilation non pas le 11eme lot de consultation des entreprises mais en l’intégrant depuis le début du processus de conception. Je dispose déjà d’un outil nécessaire pour la conception du déplacement d’air : la coupe. Je laisserai le soin au BET, qui sera en adéquation avec ma pratique, de m’assister pour le dimensionnement des réseaux. L’architecte a la responsabilité de masquer ou de mettre en scène à la face du monde les systèmes œuvrant pour une bonne qualité de l’air intérieur par la cinquième façade. Dans ma pratique, je trouverai les leviers adéquats, propre au projet pour dessiner la cinquième façade. En plus de la conception de la ventilation, le choix des matériaux est tout aussi important. L’architecte peut intégrer la question du choix des matériaux en se questionnant depuis la structure. Dans mon agence la matériauthèque classifiera les matériaux en fonction de leurs émissions de COV. Une fiche regroupera les labels en fonction de leur niveau d’exigence sur les émissions de COV des matériaux testés. Malgré une responsabilité importante de l’architecte en phase de conception pour une qualité de l’air intérieur, qu’en est-il de sa responsabilité sur le chantier et après la livraison du bâtiment ? Est-ce que la limite de la responsabilité de l’architecte se dessine dans le temps de chantier et dans le comportement des occupants dans les bâtiments ? 37


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II – La responsabilité de l’architecte pour une qualité de l’air intérieur se fragilise-t-elle en phase de chantier et après-livraison ?

A/ Entre les architectes et les entreprises de construction Après avoir développé la gamme d’outils dont l’architecte pourrait se munir et la méthode de travail qu’il pourrait adopter, portons notre attention sur la réalisation, le passage à la réalité du projet : le chantier. Comme Suzanne Déoux le souligne, même si les systèmes de ventilation ont bien été dimensionnés, les matériaux bien choisis, on peut avoir de mauvaises surprises lors d’un relevé des COV à la réception du bâtiment. Cette observation met en avant des malfaçons qui peuvent survenir lors du temps de chantier. Ces malfaçons causant une mauvaise qualité d’air intérieur ne se voient pas tout de suite et pourraient ne jamais se voir. Il est donc difficile pour l’architecte d’œuvrer pour une bonne qualité d’air intérieur sur chantier. Nous allons voir dans ce chapitre comment l’architecte peut jouer un rôle déterminant à certaines phases sensibles du chantier et nous aborderons ses limites. Comment l’architecte peut-il identifier les moments critiques du chantier ? Même si nous ne sommes pas experts, jusqu’où la compréhension de certains concepts de base nous permettrait d’œuvrer pour une bonne qualité d’air intérieur ?

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Faudrait-il demander des test d’étanchéité des réseaux aérauliques ? La mise en œuvre du système de ventilation qu’il soit naturel ou mécanique est un élément principal pour la qualité de l’air intérieur, sa bonne mise en œuvre est donc essentielle. Dans la ventilation mécanique, comme naturelle, la mauvaise étanchéité des réseaux par le percement de conduits ou la mauvaise mise en œuvre amène à une sous-ventilation des espaces pouvant nuire à la santé des occupants. Cela malgré le bon dimensionnement des réseaux et du système en phase d’étude. Je tiens à attirer votre attention sur l’importance de la bonne mise en œuvre du système de ventilation, quel qu’il soit. Même si une solution a été étudiée et approuvée par l’ensemble de la maîtrise d’œuvre en phase d’étude, le passage à la réalité par la mise en œuvre peut être à la cause d’une mauvaise qualité d’air intérieur. Palier au défaut d’étanchéité des réseaux de ventilation est une priorité. En tertiaire, ce défaut de mise en œuvre connu des bureaux d’étude, les amène à surdimensionner les réseaux comme le souligne Oscar Hernandez, docteur spécialisé en amélioration de la qualité des environnements intérieurs et en diminution de la démarche énergétique chez EnairFlow13. De plus, la surévaluation du système de ventilation dégrade la performance énergétique par une surconsommation de 25%. Est-ce dans le pouvoir des architectes de palier à ce problème récurrent sur chantier ? La vérification visuelle du système de ventilation peut mettre en évidence certaines malfaçons. Les trous dans les conduits causés par des inattentions des ouvriers ou un mauvais transport peuvent en être la cause. Dans un premier temps, la vérification consciencieuse de l’architecte des réseaux pourrait déceler certaines malfaçons. Au-delà de cette vérification visuelle, l’imperméabilité à l’air des réseaux aérauliques dépend aussi de la qualité des jointures entre les conduits. Il est difficile de penser que l’architecte puisse avoir un rôle sur le chantier concernant cette malfaçon puisqu’elle est invisible à l’œil nu. Faudrait-il mettre en place des tests de perméabilité à l’air des réseaux de ventilation en fin de chantier ? Le test de la porte soufflante effectué en fin de chantier est un passage obligé pour la livraison de bâtiments neufs. Il motive les entreprises de construction à la bonne mise en œuvre de l’étanchéité à l’air de l’enveloppe du bâtiment. Si ce test final était de même appliqué aux réseaux de ventilation, il motiverait certainement les équipes sur chantier à leur bonne mise en œuvre. 40

13. Dans une conférence tenue à Dijon le 19 janvier 2016 dans le cadre de la 8éme journée de la construction durable en bourgogne Franche-Comte. Source : Youtube


L’apparition du test de la porte soufflante vient de pair avec la RT2012 pour lutter contre les déperditions thermiques. La bonne mise en œuvre des réseaux de ventilation serait profitable non seulement pour la qualité intérieur des bâtiments mais aussi pour la consommation énergétique. Faudrait-il que ce test soit inclus dans la RT2020 ? Cela reste au bon vouloir de la maîtrise d’ouvrage de le réaliser. Nous, architectes, avons un devoir de conseil et pouvons faire prendre conscience au maître d’ouvrage que ce test peut être décisif pour une bonne qualité de l’air intérieur et une réduction de la consommation énergétique. Cependant, ce test engendre un surcoût pour la maîtrise d’ouvrage. Si elle est prête à investir dans un test pour, in fine, consommer moins d’énergie tant mieux, sinon, pouvons-nous agir auprès des entreprises de construction ? Ajouter un test de plus en fin de chantier pourrait être perçu comme rébarbatif pour les entreprises de constructions qui n’en verraient peut-être pas l’utilité. Notre responsabilité est-elle dans la formation et la prise de conscience des entreprises de construction en amont de l’installation du système de ventilation ? La bonne mise en œuvre de la ventilation, une conscience de plusieurs corps d’état J’ai pris contact avec un ancien professeur de l’option développement durable pendant mon Mater d’Architecture : Monsieur Jean-Luc Collet. Ses bâtiments à très faible consommation énergétique avec une qualité d’air remarquable ont piqués ma curiosité et il me tardait d’en savoir plus sur sa pratique. Il m’a emmené visiter un de ses bâtiments alliant basse consommation énergétique et qualité de l’air intérieur. Comme me l’explique l’architecte monsieur Collet, lors de la visite de l’Université Régionale des Métiers et de l’Artisanat (URMA) de Valenciennes, doté d’un système de ventilation naturelle activée, une variable s’ajoute, liée au choix du système de ventilation.

Piston utilisé pour l’activation de la ventilation naturelle Photo : Victor François

Quelques mots sur ce système de ventilation spécifique : la ventilation naturelle est basée sur le déplacement naturel de l’air (vertical, comme vu dans le chapitre précédent). La différence de hauteur entre les salles de classe et les extracteurs statiques sur les toits permet un tirage naturel de l’air. Afin d’activer la ventilation naturelle, des pistons sont placés à chaque extraction d’air des pièces. Ces pistons, basés sur l’effet venturi permettent un rendement de 30 entre la quantité d’air pulsée nécessaire et la quantité d’air extraite.

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Schéma de principe du déplacement naturel de l’air depuis le puits thermique jusqu’à l’extracteur statique Auteur : Agence Collet

Ce système fonctionne très bien à en croire les relevés de qualité d’air intérieur effectués par l’institut pasteur de Lille dans une de leur réalisation précédente : l’EHPAD de Valenciennes. La qualité de l’air intérieur était supérieur à la qualité de l’air extérieur. Ce résultat est lié au choix des systèmes utilisés, comme les vitrages pariéto-dynamiques et un passage de l’air extérieur sous rayons UV, mais aussi à la bonne mise en œuvre du système de ventilation. Ils ont respecté une organisation des extractions verticales. A l’inverse de la ventilation mécanique qui permet un transfert des flux d’air horizontal et donc une flexibilité dans le traitement des réseaux, cette ventilation naturelle assistée n’est efficace qu’avec des colonnes d’air vertical et ne permet pas de transfert horizontal. Une rigueur dans le positionnement des réserves dans les dalles de béton est indispensable. Cela a amené à des aléas de chantier lorsque les réserves dans le béton n’étaient pas positionnées au bon endroit, il a fallu casser le béton à plusieurs endroits afin de respecter strictement la verticalité nécessaire à ce système. Sur le chantier de l’URMA, les ouvriers qui ont coulé la dalle n’ont pas positionné les réserves parfaitement en concordance avec les plans. Les ouvriers s’occupant de la mise en œuvre de la ventilation auraient pu ajouter des coudes afin de rectifier la malfaçon mais cela aurait été au détriment de la bonne ventilation des espaces. Il a donc fallu repercer les dalles au bon endroit afin de permettre aux ouvriers d’aboutir à la mise en œuvre d’un réseau de ventilation vertical efficace. Cette malfaçon fut une des principales cause des 8 mois de retard de la livraison. Si l’architecte n’était pas intervenu à ce moment précis du chantier, l’entreprise de construction aurait trouvé une solution à ce problème, certes, mais au détriment de la qualité de l’air intérieur. 42

Schéma de principe du vitrage pariétodynamique. Source : EnR, Fenêtre Energie Renouvelable


Avec la fragmentation des tâches sur chantier, est-ce possible de faire prendre conscience aux ouvriers qui coulent la dalle de leur implication dans l’installation de la ventilation, et par extension dans la qualité d’air intérieur ? Dans cet exemple précis, l’entreprise de construction a été imposée par le conseil général. L’entreprise n’a pas été aussi conciliante que celle avec laquelle ils avaient l’habitude de travailler. Sur d’autres chantiers, monsieur Collet a tissé une relation de confiance et de savoir-faire commun avec l’entreprise. Celle-ci connaît les bons gestes acquis au fil des années de collaboration avec l’architecte et a intégré ce savoir-faire. Même si des ajustements sont toujours de rigueur, l’entreprise de construction pose moins de résistance à la rectification des malfaçons. L’intégration d’un savoir-faire, voilà peut-être une force que les entreprises de construction vont développer pour se démarquer de leurs concurrents ? L’architecte devrait-il s’investir dans la formation des équipes sur chantier? Faire prendre conscience aux ouvriers que leur rôle sur chantier depuis le coulage du béton jusqu’à la pose de menuiserie en passant par l’installation de la ventilation est primordial. Comment l’architecte peut-il leur en faire prendre conscience de façon pérenne ?

14. Dans un colloque régional à Rennes le 13 octobre 2015 sur la Qualité de l’Air Intérieur organisé par la FFB Bretagne.

En amont du chantier, l’architecte pourrait insister sur les erreurs à éviter en leur expliquant le concept général de la qualité d’air intérieur. Comme le souligne Monsieur Fabien Hosteins, gérant de l’entreprise Loy & Cie14, la prise de conscience de la qualité d’air intérieur ne devrait pas prendre le statut de « la nouvelle norme inutile à appliquer » ou « une nouvelle lubie de l’architecte ». L’exigence de l’architecte sur ce point de la qualité d’air intérieur pourrait être vue de la part des entreprises de construction comme une question futile. Cependant, les ouvriers ne sont pas dupes sur cette question de la qualité d’air intérieur et ont une certaine intuition. Avec l’arrivée de la RT 2012 et l’étanchéité à l’air requise, ils ont été les premiers à envelopper les bâtiments d’un film imperméable « empêchant le bâtiment de respirer » comme le souligne Monsieur Chapon, chef d’équipe de maçons construisant des maisons individuelles. Propos recueillis lors d’un de mes stages sur chantier. Peut-être pourrions-nous appuyer sur cette intuition déjà présente afin de leur faire prendre conscience de l’importance de l’étanchéité à l’air de nos bâtiments, certes, mais aussi de se focaliser encore plus sur la bonne mise en œuvre des matériaux et système de ventilation. Ces deux points sont indispensables pour construire des bâtiments à basse consommation énergétique tout en préservant une bonne qualité d’air intérieur.

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On peut voir dans ce paragraphe que l’architecte pourrait être à l’origine d’une prise de conscience de la part des ouvriers mais cela reste encore un processus difficile par manque de motivation finale. L’architecte pourrait sensibiliser les ouvriers comme le pratique Monsieur Collet pendant les réunions de chantier, en insistant particulièrement sur les moments sensibles liés à la qualité d’air (l’importance des temps de séchage, la bonne mise en œuvre des systèmes de ventilation). Cependant, Monsieur Collet témoigne que cette idée n’est pas si simple à instaurer. Cette pratique demande un investissement de temps de la part de l’architecte. Monsieur Collet, par l’utilisation d’un système de ventilation spécifique suit le chantier trois à quatre fois plus régulièrement que les chantiers mettant en place une ventilation dite « classique ». La qualité d’air intérieur est au rendezvous. Ce sous-chapitre montre que l’architecte, pourrait, en investissant de son temps, former les entreprises de construction au fil des années en passant plus de temps sur chantier. Cependant, le temps accru passé sur chantier est au détriment du temps passé pour la conception d’autres projets. Malgré un volontarisme de l’architecte dans cette pratique, notre responsabilité peut trouver une limite dans un projet de plus grande échelle : quand l’entreprise est imposée par la maîtrise d’ouvrage. Le rattrapage des retards de chantier sur le temps de séchage des dalles, une pratique à bannir, mais comment ? Même si la bonne mise en œuvre de la ventilation reste un des lots les plus importants pour une bonne qualité de l’air, elle n’est pas la seule. Comme le démontre Suzanne Déoux, le bon temps de séchage des dalles est d’une grande importance. Elle fut confrontée à ce problème à de multiples reprises dans plusieurs écoles où les élèves se plaignaient d’irritations oculaires. Les matériaux utilisés étaient tous de catégorie A+, la ventilation avait été dimensionnée et mise en œuvre correctement. Pourtant, le relevé de la qualité de l’air intérieur a révélé une concentration de COV anormalement élevée. Il s’est avéré que l’émission de COV provenait d’une réaction chimique entre l’eau piégée dans la dalle et la colle (de catégorie A+) permettant la fixation du revêtement de sol. Cet aléa pourtant inodore n’est pas un cas isolé et pourrait être évité en s’assurant du bon séchage des dalles et chapes. En effet, la mise en œuvre d’une dalle demande beaucoup d’eau et il faut s’assurer de son évaporation totale avant d’appliquer des colles. Si l’eau reste piégée dans la dalle, elle entre en réaction avec les colles et peut émettre des COV pendant des années après la livraison du bâtiment. Le taux d’humidité trop élevé dans les dalles peut trouver une explication par 44


deux facteurs. L’un est lié au non respect du temps de séchage prescrit par les industriels et l’autre est lié à l’hygrométrie importante pendant la phase chantier en général augmentant le temps de séchage des dalles. L’étape hors air du chantier marque la fin du gros œuvre avant la construction du second œuvre. La mise en place du second œuvre avec les chapes, isolation, plâtre, amène dans le bâtiment énormément d’humidité. Nos bâtiments sont conçus, comme je l’ai mentionné précédemment, très étanches à l’air en respect de la RT2012. Même si le temps de séchage de la chape est respecté mais le chantier n’est pas ventilé correctement, alors cette dernière, peut en réalité ne pas être sèche. La ventilation du chantier est donc primordiale. Si la fermeture des fenêtres est préférable pour des questions de sécurité ou une température extérieure trop basse, la mise en place d’un déshumidificateur est alors nécessaire. L’architecte peut s’assurer par des visites de chantier du respect de la bonne ventilation du chantier. Même si cela peut paraît anodin, la mauvaise ventilation du chantier peut avoir une conséquence non seulement sur la moisissure des plaques de plâtre mais aussi sur le temps de séchage des dalles, amenant tous deux à une mauvaise qualité de l’air intérieur.

Photo prise sur chantier Photo : Marie Herber

Cependant, même lorsque la bonne ventilation du chantier est respectée, le retard accumulé des phases précédentes se rattrape sur le temps qui peut être « compressible » comme le temps de séchage des dalles et chapes. Sur un des chantiers de mon agence, le respect du temps de séchage n’était pas respecté. A cause d’un retard accumulé tout au long du chantier par un défaut d’étanchéité à l’eau, l’entreprise de construction n’a pas attendu le temps nécessaire de séchage des dalles et des chapes requis avant de poser le revêtement de sol. Ce chantier s’inscrit dans un contexte particulier puisque l’architecte, engagé par le client a le statut d’un consultant au même titre que le BET incendie. Voici le contexte contractuel :

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ARCHITECT

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CLIENT

Communication

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Contract TRADE CONTRACTOR

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AGENCY CONSTRUCTION MANAGER

Contact Co

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TRADE CONTRACTOR

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Engagé par le maître d’ouvrage, le directeur des travaux a un rôle depuis la phase ACT jusqu’à la fin du chantier. Il supervise et dirige les différentes opérations et entreprises sur le chantier dans le respect du budget qu’il a contribué à évaluer. L’architecte est engagé comme un consultant, s’assurant que le bâtiment est mis en œuvre en respect des « intent-drawings »15. Les visites de l’architecte sur chantier se font rares. Nous ne sommes intervenus que pour résoudre les problèmes d’infiltration d’eau par la façade, de mauvaise position de conduit engendrant des rectifications de plan ou pour valider certaines étapes comme l’appartement témoin par exemple. Ces problèmes sont identifiés par le directeur de travaux qui fait ensuite appel à l’architecte afin d’avoir son avis sur ces problèmes rencontrés. Le directeur des travaux incarne dans ce projet l’entité du pouvoir de décision pendant le temps du chantier. L’architecte a le statut d’un consultant ayant un pouvoir et une responsabilité restreints. L’eau s’infiltre par les murs rideaux de part et d’autre du bâtiment depuis un an. La fuite est de l’ordre de quelques gouttes lors des tests effectués. Alors que le bâtiment n’est pas complètement hors d’eau, le chantier a continué d’avancer sous la pression financière engagée par la maîtrise d’ouvrage. Sous la supervision du directeur de travaux, afin de limiter l’accumulation du retard, le second œuvre dont les plaques de plâtre, l’isolation, les chapes, revêtement de sol sont mis en œuvre. Malgré le bras de fer engagé entre l’architecte et le directeur de travaux, l’architecte n’a pu ralentir la progression du chantier et faire respecter l’étape hors d’eau avant de commencer le second œuvre. Alors que cette «bonne» pratique est basique et connue de tous, les enjeux financiers engendrés par ce retard sont trop grands. Les conséquences étaient à prévoir : les plaques de plâtres moisissent : le temps de séchage de la chape n’a pas été respecté avant la pose du revêtement de sol. La bonne mise en œuvre du bâtiment s’en trouve bouleversée, la qualité de l’air intérieur du bâtiment sera détériorée. Dans cet exemple, on voit que l’architecte, par manque de responsabilité sur chantier n’a pu faire entendre raison au directeur de travaux. Le directeur de travaux a essayé de rattraper le retard accumulé dû à la fuite de la façade en démarrant le second œuvre trop tôt et en ne respectant pas le temps de séchage prescrit par les fabricants. Faudrait-il étendre le temps de chantier afin d’éviter un rattrapage du retard accumulé sur les temps de séchage, primordial pour la qualité de l’air intérieur ? La planification du chantier devrait-elle être plus méticuleuse, plus réaliste ? La réponse à cette question est difficile puisque les aléas causant les retards sur chantier peuvent être multiples et inhérents à chaque chantier. Le non respect des temps de séchage peut trouver sa cause dans une multitude d’aléas de 46

15. Je reprends ici le terme anglais qui, dans la traduction même, désigne des dessins d’intention de détails.

Photo prise sur chantier montrant la fuite d’eau. Photo : Marie Herber


chantier. Cependant, dans mon devoir de conseil envers la maitrise d’ouvrage, je leur conseillerai des temps de chantier plus réalistes en argumentant la qualité de l’air intérieur. Le temps de chantier se voit raccourci puisqu’il est coûteux. Des logiques de préfabrications sont mises en place rendant le temps de chantier plus court. Est-il possible d’aboutir à une bonne qualité de l’air intérieur dans un contexte où les temps de chantier se raccourcissent ? La mise en place d’un test de qualité d’air intérieur à la réception des bâtiments serait-elle judicieuse ? Ces tests réalisés par Suzanne Déoux, fondatrice de MEDIECO révèlent les moisissures, les COV provenant des réactions chimiques énoncées auparavant. Ils ne sont pas obligatoires et sont à la demande de la maîtrise d’ouvrage. Ils pourraient motiver les entreprises à porter une attention particulière à la bonne mise en œuvre du bâtiment. En plus des tests de qualité d’air intérieur à la réception, Suzanne Déoux propose d’agir en amont du problème. De par ses 30 années d’expérience dans la qualité d’air intérieur, elle a su déceler les points faibles et les malfaçons récurrentes à l’origine d’une mauvaise qualité de l’air intérieur. Suzanne Déoux propose une formation des entreprises de construction en amont du chantier et pendant le suivi de chantier. Elle intervient pendant les réunions de chantier, aux moments-clés de la construction afin de prévenir des aléas possibles. Subventionnée par l’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie (ADEME), l’intervention de Suzanne Déoux coûte 900 euros pour la maîtrise d’ouvrage. Ce qui représente une infime partie du budget de l’ensemble du bâtiment. L’intégration d’un « nouveau type de bureau d’étude », comme Suzanne Déoux nomme sa société MEDIECO, dans le processus de construction est-il judicieux ? La question de la qualité de l’air intérieur devrait-t-elle être intégrée par l’architecte ?

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La bonne mise en œuvre de chacun des lots importe. Nous avons mis l’accent dans ce chapitre sur la bonne mise en œuvre du système de ventilation qui est un lot important pour une bonne qualité d’air intérieur. Sa bonne mise en œuvre peut-être vérifiée visuellement par l’architecte mais il a ses limites quant à la vérification de l’étanchéité parfaite des réseaux. Devrait-il se faire assister par un test de ventilation aéraulique ? En complément d’une bonne mise en œuvre du lot ventilation, le respect de la bonne mise en œuvre des autres lots ainsi que leurs enchaînement et tout aussi primordial. Le respect du temps de séchage, qui peut être plus long que celui prescrit à cause d’une mauvaise ventilation du chantier, du phasage dans l’enchaînement logique des corps de métier respectant les étapes hors d’eau/ d’air sont autant de clés indispensables pour une bonne qualité d’air intérieur. Chacun a sa responsabilité pour une bonne qualité de l’air intérieur. Comment faire prendre conscience aux entreprises qu’elles ont leur propre part de responsabilité à jouer dans la qualité d’air intérieur des bâtiments ? L’architecte devrait-il endosser le rôle de formateur envers des entreprises de construction ? Devrait-il faire appel à un type de BET émergeant afin de l’assister en phase de chantier ? Nous avons vu dans ce chapitre que cette pratique pouvait être possible grâce à une collaboration fructueuse entre l’entreprise de construction et l’architecte au bout de longues années de collaboration. Cette observation, vraie à petite échelle, trouve ses limites dans des projets où l’entreprise de construction est imposée par le maître d’ouvrage, l’architecte n’ayant qu’un rôle de consultant. Devrais-je insister envers la maîtrise d’ouvrage pour mettre en place des tests en cours de chantier ou à la livraison ? Ces tests permettraient-t-ils d’exercer une pression suffisante sur les entreprises, pour une bonne mise en œuvre des différents lots ? Plutôt que d’être abordée sur chantier, cette question de bonne mise en œuvre pour atteindre une qualité d’air intérieur devrait-t-elle être enseignée dans les écoles du bâtiment? 48


B/ Entre l’architecte et les occupants À la réception du bâtiment, on relève la qualité de l’air intérieur par la concentration de COV. Tout est bon. Feu vert. On peut laisser les occupants prendre place. Cependant quelques années après l’installation des occupants, une mauvaise qualité de l’air peut-être relevée, pourquoi ? L’architecte a-t-il une part de responsabilité dans la qualité d’air intérieur comme il pourrait avoir dans la garantie décennale? A première vue, la question de la qualité d’air intérieur après réception dépend directement de l’usager. Par son comportement, l’usager a un impact sur sa qualité d’air intérieur : en cachant les entrées d’air ou en aérant pas assez son logement par exemple. Par l’ameublement, la décoration de son logement, l’usager peut polluer sa qualité d’air intérieur. Les meubles en bois aggloméré, la peinture fraîche sont autant de facteurs nocifs pour la qualité d’air intérieur. L’architecte a-t-il un rôle à jouer ? Devrait-il concevoir des systèmes adaptés à l’usager ou l’usager devrait-il s’adapter à la technologie mise en œuvre dans le bâtiment? Nous allons voir dans ce chapitre la responsabilité de l’architecte dans le choix du type de ventilation qui demande à l’usager de s’adapter ou pas. Nous verrons aussi comment l’architecte peut mettre en place un système qui suggère à l’usager de redevenir acteur de sa qualité d’air intérieur. Finalement, la qualité d’air intérieur est-elle une responsabilité partagée de tous ? Le choix du système de ventilation en conception dictera à l’usager une certaine conduite. La ventilation double flux, par la présence de filtre, demande une maintenance régulière. Les filtres sont à changer plusieurs fois par an. Si ils ne sont pas changés régulièrement, la ventilation aura un résultat inverse du but recherché. Les particules provenant de l’extérieur sont piégées dans les filtres créant un tapis plus dense et empêchant l’air neuf de passer facilement. Les filtres bouchés sont à l’origine d’une pièce sous ventilée. De plus la machine, pour compenser le manque d’air à la sortie, enverra plus d’air ce qui aboutira à une surconsommation du système de ventilation. Malgré les indicateurs placés en évidence pour conseiller les usagers de changer les filtres, cette action est rarement menée. Est-ce par un désintérêt de l’usager ou par manque de prise de conscience ? Pour pallier à ce manque de maintenance, nos voisins Suédois ont mis en place une réglementation qui oblige les usagers à changer leurs filtres. Une 49


inspection de l’ensemble du réseau de ventilation est obligatoire une fois tous les trois ans. Cette mesure a vu le jour puisque la ventilation double flux a été rendue obligatoire, à cause de son climat rude. Ce système se prête à ce climat car il permet un renouvellement d’air adéquat en évitant la perte d’énergie grâce a un échangeur d’air thermique entre l’air chaud vicié et l’air neuf frais. Devrions-nous en France avoir une réglementation dans la maintenance de l’ensemble de nos systèmes de ventilation afin d’assurer une bonne qualité de l’air intérieur ? L’architecte devrait-il concevoir des systèmes de ventilation sans filtre pour une pérennité de la qualité de l’air intérieur? Jean-Luc Collet propose une réponse sans filtre dans son bâtiment URMA que j’ai eu l’occasion de visiter. Il a mis en place une série de systèmes afin de traiter l’air entrant dans le bâtiment. L’air extérieur passe dans un premier temps dans un puits thermique en soussol. Il présente un double avantage. L’air est d’abord traité grâce à des lampes UV qui tuent les bactéries, virus et champignons présents dans l’air. Grâce à l’enfouissement en sous-sol du puits, l’air extérieur et naturellement préchauffé à 12 °C de façon constante tout au long de l’année. Les fenêtres sont dotées de vitrage pariéto-dynamique. Ce système rempli aussi ce double avantage. L’air extérieur circule entre les trois lames de vitrage avant d’entrer à l’intérieur du bâtiment. Cela permet aux UV du soleil de traiter naturellement l’air (de la même façon que les lampes à UV dans la gaine souterraine) et de préchauffer l’air grâce à l’effet de serre dans l’épaisseur même du vitrage.

Mise en place du puits thermique

A gauche : Photo prise d’un filtre encrasse de la ventilation de mon bureau, la lumière ne passe pas à travers. A droite : Photo prise du même filtre, après nettoyage. Photo : Marie Herber

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L’air neuf entrant dans les salles de classe est donc traité et préchauffé naturellement en amont. Cet air, d’une qualité supérieure à l’air l’extérieur, entre dans les salles de classe par une bouche d’aération situé sous les chauffages muraux. En hiver, l’air entrant et donc préchauffé dans un premier temps à 12 °C et dans un second temps par les radiateurs intérieurs. Ce système allie une qualité d’air intérieur tout en préservant le confort de l’occupant. Ce système a été également utilisé à l’EHPAD, dont les relevés par l’hôpital Pasteur sont sans équivoque : la qualité d’air intérieur est supérieure à la qualité d’air extérieur, grâce à l’utilisation de ces systèmes. Ces projets sans filtres prennent place dans des zones à faible densité urbaine où la pollution aux fines particules est faible. Ce système sans filtre serait-il aussi efficace en zone urbaine dense? Même si la qualité de l’air intérieure est bonne, un inconfort de l’occupant en été réside : pendant les journées trop chaudes et voulant jouir d’un air frais, l’occupant ouvre la fenêtre pour profiter d’une légère brise. Ouvrir la fenêtre fait entrer plus de chaleur. L’occupant ne comprend pas la « physique du bâtiment ». Ce bâtiment se rafraîchit naturellement la nuit.

16. Dans une conférence tenue le 14 mars 2018 : Construction durable : Agir Frugal dans un monde High Tech? Source : Youtube

Face à l’élaboration de systèmes de ventilation plus complexe et à la course d’une consommation énergétique toujours moindre, il devient difficile à l’usager de se réapproprier sa qualité d’air intérieur. La chercheuse Delphine Labouzz, docteur en psychologie sociale de l’environnement, a fait une audit au sein d’un bâtiment de bureau afin de comprendre comment l’usager pouvait être actif ou passif de sa qualité d’air intérieur. Sa conclusion est la suivante16 : les personnes se sentent déresponsabilisées puisqu’elles n’ont pas de contrôle sur leur qualité d’air intérieur. Les occupants n’ont plus rien à faire, ils ne peuvent pas ouvrir la fenêtre quand ils le veulent. Elle soulève le problème de la technologie qui ne devrait pas tout faire à la place des personnes. Cette observation vient en résonance avec l’idée top-down où l’architecte décide de ce qui sera bon pour l’occupant et c’est à l’occupant de s’adapter au système conçu. Pourrions-nous aussi envisager un système bottom-up où c’est l’habiliter qui s’adapte aux occupants ? Au travers de ces brefs exemples, nous avons pu voir que chaque système de ventilation avec ou sans filtre, présente une limite. La limite réside dans le comportement de l’usager. L’usager ne comprend peut-être pas assez le concept général et l’implication de son rôle dans la qualité de l’air intérieur. Appartient-il à l’architecte d’éveiller la conscience les usagers afin de leur faire comprendre que la qualité de leur air intérieur dépend aussi de leur collaboration à long terme ? Pour Delphine Labbouzz, il ne suffit pas d’informer pour changer mais c’est changer des comportements qui prend du temps. 51


Changer les comportements à l’aide d’un système de ventilation ? Monsieur Bornarel, fondateur du BET TRIBU, lors d’un entretien qu’il m’a accordé, m’a fait part de son projet le plus abouti jusque maintenant. Ce projet développé avec les architectes Madec est encore en phase d’étude et n’a pas encore vu le jour. C’est un ensemble de logements collectifs à Bordeaux. Par le système de ventilation qu’ils conçoivent, ils veulent revenir à une idée simple remettant en scène l’usager. Ouvrir la fenêtre. Une idée qui paraît si évidente mais difficile à mettre en place à cause des réglementations. Une partie de la ventilation fonctionnerait en continu et à faible débit pour évacuer la pollution liée au bâti (formaldéhyde présent dans les colles, liants, peintures). La pollution liée aux occupants (cuisine, douche, combustion, CO2) serait évacuée par la simple ouverture de fenêtre. Une sonde CO2 serait placée dans l’habitat et indiquerait par une led le taux de CO2 dans les pièces de vie : vert pour une basse concentration en CO2 jusqu’au rouge pour une forte concentration en CO2. Le voyant rouge indiquant une concentration trop forte en CO2, suggérant à l’usager d’ouvrir sa fenêtre pour renouveler l’air intérieur. Ce système suggère à l’occupant de prendre une responsabilité pour sa qualité d’air intérieur. Bien sûr, cela reste une suggestion et la décision d’ouvrir la fenêtre lui appartient. Est-il prêt à reprendre une place une responsabilité dans sa qualité d’air intérieur ? Alain Bornarel espère mettre en place une demande de dérogation à la loi pour ce projet dans le but d’éviter les lourdes démarches de l’ATEX. C’est aussi la méthode qu’a choisi Monsieur Collet pour mettre en place les systèmes de traitement d’air à l’échelle architectural énoncés précédemment. Est-ce en incitant l’usager à prendre le contrôle de sa qualité d’air intérieur que l’architecte peut inciter l’occupant à prendre une responsabilité dans sa qualité de l’air intérieur ? Est-ce suffisant ? On peut se demander si cette idée, qui n’a pas encore vu le jour, pourrait être suffisante car cela ne concernerait que les habitants investissant ces lieux. Là où se dessine la vraie limite de l’architecte serait dans le choix des meubles et des travaux entrepris par les usagers. En effet si l’usager décide de repeindre une pièce et continue à vivre dans le logement dans les 28 jours après la pose, il s’expose à des COV toxiques pour sa santé. Il en est de même pour l’achat de nouveaux meubles composés en bois aggloméré, pour ne citer qu’un exemple, rejetant du formaldéhyde.

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Changer les comportements par le biais des moyens de communications actuels, vers une nouvelle pratique architecturale ? Nous avons vu dans ce chapitre comment le comportement des occupants pouvait influer sur leur qualité de l’air intérieur en bouchant les entrées d’air, en n’ aérant insuffisamment ou en meublant avec des matériaux émettant des COV. L’architecte, dès la phase de conception induit un système qui dictera un comportement à adopter ou incitera un changement de comportement. En tant qu’architecte, pourrai-je trouver un système de ventilation efficace qui ne demande aucune action de la part des occupants ? À l’heure d’aujourd’hui, la recette miracle n’existe pas. La prise de conscience des occupants de leurs responsabilités dans leur qualité d’air intérieur vaudrait-il mieux qu’un système de ventilation révolutionnaire ? En alternative à se reposer complètement sur la machine, nous pouvons chacun œuvrer pour notre qualité d’air intérieur. Cela demande une prise de conscience, un changement de comportement. Changer le comportement de l’ensemble des citoyens prend du temps et demande une prise de conscience en amont. Les réseaux sociaux, YouTube et le site internet de l’agence sont des moyens de communication touchant toutes les générations. Ce sont des plates-formes gratuites qui permettent la circulation rapide des informations. L’utilisation à bon escient de ces outils permettraient-ils au grand public de prendre conscience de leurs responsabilités dans leur qualité d’air intérieur et, au fur et à mesure, changer les comportements des occupants, maçons, décideurs, maîtres d’ouvrages?

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CONCLUSION

En phase de conception, l’architecte a une grande responsabilité quant à la qualité de l’air intérieur en s’attardant sur la question de la ventilation et des matériaux. J’intégrerai la question de la ventilation non pas comme un ajout final à l’architecture mais depuis le début du processus de conception grâce à l’outil de la coupe. Je chercherai a travailler avec des BET en adéquation avec ma philosophie d’agence. L’architecte étant le seul acteur ayant le pouvoir d’intégrer la ventilation a l’échelle du bâtiment, je laisserai au BET la mission du dimensionnement des réseaux. Dans un contexte où la cinquième façade est induite par le rejet des techniques en toiture, je trouverai les leviers économiques et géographiques propres à chaque projet afin de la dessiner. Le choix conscient des matériaux, depuis la structure jusqu’aux finitions permet de limiter la pollution intérieure. La matériauthèque de mon agence classifiera les matériaux en fonction de leurs émissions de COV. Une fiche classifiera les labels en fonction de leur niveau d’exigence sur les émissions des COV des matériaux testés. La responsabilité de l’architecte s’affaiblit au moment du chantier et par le comportement des occupants. Devrais-je insister envers la maîtrise d’ouvrage pour mettre en place des tests, en cours de chantier ou à la livraison ? Ces tests permettraient-t-ils d’exercer une pression suffisante sur les entreprises de 55


construction, pour une bonne mise en œuvre des différents lots ? De plus, la pratique de l’architecte pour une bonne qualité de l’air intérieur, doit-elle aller au-delà des murs de son agence ? Le comportement des occupants est décisif pour leur qualité d’air intérieur. À cause d’un mauvais comportement, les occupants polluent leur air intérieur. Faudrait-il que l’architecte continue de chercher de nouveaux systèmes de ventilation ? A l’inverse, l’architecte devrait-il faire prendre conscience aux citoyens de leur responsabilité dans leur qualité de l’air intérieur pour un changement de comportement progressif ? Les réseaux sociaux, YouTube et le site Internet de l’agence peuvent être des outils clés de communication. La qualité de l’air intérieur dépend de l’air extérieur. Le combat de la qualité de l’air intérieur devrait-il être mené de front avec la qualité de l’air extérieur regroupant urbanistes, médecins et pouvoir publics?

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Bibliographie

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Respirer, Manger, Boire, S’abriter, Dormir. Tels sont les besoins physiologiques fondamentaux à la survie humaine. L’architecte depuis des siècles assouvie le besoin de s’abriter. Nous passons 90% de notre vie dans des espaces clos dont la qualité de l’air est souvent inférieure à la qualité de l’air extérieur. En plus d’une question de confort, la qualité de l’air est une question de santé publique comme le montre l’alarmant rapport spécial de la cour des comptes européenne de 2018. Et si l’architecte avait une responsabilité à prendre dans cette question de santé publique ? « Le gouvernement crée des chambres à gaz » selon Alain Bornarel, faisant des réglementations thermiques une priorité au détriment de la qualité de l’air intérieur, comment l’architecte peut-il, dans sa pratique intégrer cette question de santé publique? Ce mémoire requestionne la pratique de l’architecte au travers des outils, méthode de travail pour traiter cette qualité d’air intérieur depuis la conception, la réalisation et après la livraison, pour une pérennité de la qualité de l’air intérieur. En conception, quels outils et quelle collaboration l’architecte peut trouver afin de ventiler, traiter la qualité de l’air intérieur. Le choix des matériaux est clé dans cette question de la qualité de l’air intérieur, comment l’architecte peut s’armer dans cette question déterminante? Certaines étapes du chantier sont décisives pour une bonne qualité de l’air intérieur. Comment l’architecte peut agir sur le chantier avec les entreprises de construction, vers une responsabilité partagée. Le comportement de l’usager est un facteur de poids pour une qualité de l’air intérieur pérenne. Nous verrons comment l’architecte peut, dans une attitude de top-down ou bottom-up induire un changement de comportement de l’usager.


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