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HENRI MICHAUX Un certain Plume

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I UN HOMME PAISIBLE Etendant les mains hors du lit, Plume fut étonné de ne pas rencontrer le mur. « Tiens, pensa-t-il, les fourmis l’auront mangé... » et il se rendormit. Peu après, sa femme l’attrapa et le secoua : « Regarde, ditelle, fainéant ! Pendant que tu étais occupé à dormir, on nous a volé notre maison. » En effet, un ciel intact s’étendait de tous côtés. « Bah, la chose est faite », pensa-t-il. Peu après, un bruit se fit entendre. C’était un train qui arrivait sur eux à toute allure. « De l’air pressé qu’il a, pensat-il, il arrivera sûrement avant nous » et il se rendormit. Ensuite, le froid le réveilla. Il était tout trempé de sang. Quelques morceaux de sa femme gisaient près de lui. « Avec le sang, pensa-t-il, surgissent toujours quantité de désagréments ; si ce train pouvait n’être pas passé, j’en serais fort heureux. Mais puisqu’il est déjà passé... » et il se rendormit. - Voyons, disait le juge, comment expliquez-vous que votre femme se soit blessée au point qu’on l’ait trouvée partagée en huit morceaux, sans que vous, qui étiez à côté, ayez pu faire un geste pour l’en empêcher, sans même vous en être aperçu. Voilà le mystère. Toute l’affaire est là-dedans. - Sur ce chemin, je ne peux pas l’aider, pensa Plume, et il se rendormit. - L’exécution aura lieu demain. Accusé, avez-vous quelque chose à ajouter ? - Excusez-moi, dit-il, je n’ai pas suivi l’affaire. Et il se rendormit.


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II PLUME AU RESTAURANT Plume déjeunait au restaurant, quand le maître d’hôtel s’approcha, le regarda sévèrement et lui dit d’une voix basse et mystérieuse : « Ce que vous avez là dans votre assiette ne figure pas sur la carte. » Plume s’excusa aussitôt. - Voilà, dit-il, étant pressé, je n’ai pas pris la peine de consulter la carte. J’ai demandé à tout hasard une côtelette, pensant que peut-être il y en avait, ou que sinon on en trouverait aisément dans le voisinage, mais prêt à demander tout autre chose si les côtelettes faisaient défaut. Le garçon, sans se montrer particulièrement étonné, s’éloigna et me l’apporta peu après et voilà… Naturellement, je la paierai le prix qu’il faudra. C’est un beau morceau, je ne le nie pas. Je le paierai son prix sans hésiter. Si j’avais su, j’aurais volontiers choisi une autre viande ou simplement un œuf, de toute façon maintenant je n’ai plus très faim. Je vais vous régler immédiatement. Cependant, le maître d’hôtel ne bouge pas. Plume se trouve atrocement gêné. Après quelque temps relevant les yeux... hum ! c’est maintenant le chef de l’établissement qui se trouve devant lui. Plume s’excusa aussitôt. - J’ignorais, dit-il, que les côtelettes ne figuraient pas sur la carte. Je ne l’ai pas regardée, parce que j’ai la vue fort basse, et que je n’avais pas mon pince-nez sur moi, et puis, lire me fait toujours un mal atroce. J’ai demandé la première chose qui m’est venue à l’esprit, et plutôt pour amorcer d’autres propositions que par goût personnel. Le garçon sans doute préoccupé n’a pas cherché plus loin, il m’a apporté ça, et moi-même d’ailleurs tout à fait distrait je me suis mis à manger, enfin... je vais vous payer à vous-même puisque vous êtes là. Cependant, le chef de l’établissement ne bouge pas. Plume se sent de plus en plus gêné. Comme il lui tend un billet, il


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voit tout à coup la manche d’un uniforme ; c’était un agent de police qui était devant lui. Plume s’excusa aussitôt. - Voilà, il était entré là pour se reposer un peu. Tout à coup, on lui crie à brûle-pourpoint : « Et pour Monsieur ? Ce sera... ? » - « Oh... un bock », dit-il. « Et après ?... » cria le garçon fâché ; alors plutôt pour s’en débarrasser que pour autre chose : « Eh bien, une côtelette ! ». Il n’y songeait déjà plus, quand on la lui apporta dans une assiette ; alors, ma foi, comme c’était là devant lui... - Ecoutez, si vous vouliez essayer d’arranger cette affaire, vous seriez bien gentil. Voici pour vous. Et il lui tend un billet de cent francs. Ayant entendu des pas s’éloigner, il se croyait déjà libre. Mais c’est maintenant le commissaire de police qui se trouve devant lui. Plume s’excusa aussitôt. - Il avait pris un rendez-vous avec un ami. Il l’avait vainement cherché toute la matinée. Alors comme il savait que son ami en revenant du bureau passait par cette rue, il était entré ici, avait pris une table près de la fenêtre et comme d’autre part l’attente pouvait être longue et qu’il ne voulait pas avoir l’air de reculer devant la dépense, il avait commandé une côtelette ; pour avoir quelque chose devant lui. Pas un instant il ne songeait à consommer. Mais l’ayant devant lui, machinalement, sans se rendre compte le moins du monde de ce qu’il faisait, il s’était mis à manger. Il faut savoir que pour rien au monde il n’irait au restaurant. Il ne déjeune que chez lui. C’est un principe. Il s’agit ici d’une pure distraction, comme il peut en arriver à tout homme énervé, une inconscience passagère ; rien d’autre. Mais le commissaire, ayant appelé au téléphone le chef de la sûreté : « Allons, dit-il à Plume en lui tendant l’appareil. Expliquez-vous une bonne fois. C’est votre seule chance de salut. » Et un agent le poussant brutalement lui dit : « Il s’agira maintenant de marcher droit, hein ? » Et comme les pompiers faisaient leur entrée dans le restaurant, le chef de


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l’établissement lui dit : « Voyez quelle perte pour mon établissement. Une vraie catastrophe ! » Et il montrait la salle que tous les consommateurs avaient quittée en hâte. Ceux de la Secrète lui disaient : « Ça va chauffer, nous vous prévenons. Il vaudra mieux confesser toute la vérité. Ce n’est pas notre première affaire, croyez-le. Quand ça commence à prendre cette tournure, c’est que c’est grave. » Cependant, un grand rustre d’agent par-dessus son épaule lui disait : « Ecoutez, je n’y peux rien. C’est l’ordre. Si vous ne parlez pas dans l’appareil, je cogne. C’est entendu ? Avouez ! Vous êtes prévenu. Si je ne vous entends pas, je cogne. »


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III PLUME VOYAGE Plume ne peut pas dire qu’on ait excessivement d’égards pour lui en voyage. Les uns lui passent dessus sans crier gare, les autres s’essuient tranquillement les mains à son veston. Il a fini par s’habituer. Il aime mieux voyager avec modestie. Tant que ce sera possible, il le fera. Si on lui sert, hargneux, une racine dans son assiette, une grosse racine : « Allons, mangez. Qu’est-ce que vous attendez ? » « Oh, bien, tout de suite, voilà. » Il ne veut pas s’attirer des histoires inutilement. Et si, la nuit, on lui refuse un lit : « Quoi ! Vous n’êtes pas venu de si loin pour dormir, non ? Allons, prenez votre malle et vos affaires, c’est le moment de la journée où l’on marche le plus facilement. » « Bien, bien, oui... certainement. C’était pour rire, naturellement. Oh oui, par... plaisanterie. » Et il repart dans la nuit obscure. Et si on le jette hors du train : « Ah ! Alors vous pensez qu’on a chauffé depuis trois heures cette locomotive et attelé huit voitures pour transporter un jeune homme de votre âge, en parfaite santé, qui peut parfaitement être utile ici, qui n’a nul besoin de s’en aller là-bas, et que c’est pour ça qu’on aurait creusé des tunnels, fait sauter des tonnes de rochers à la dynamite et posé des centaines de kilomètres de rails par tous les temps, sans compter qu’il faut encore surveiller la ligne continuellement par crainte des sabotages, et tout cela pour... » « Bien, bien. Je comprends parfaitement. J’étais monté, oh, pour jeter un coup d’œil ! Maintenant, c’est tout. Simple curiosité, n’est-ce pas. Et merci mille fois. » Et il s’en retourne sur les chemins avec ses bagages. Et si, à Rome, il demande à voir le Colisée : « Ah ! Non. Ecoutez, il est déjà assez mal arrangé. Et puis après Monsieur voudra le toucher, s’appuyer dessus, ou s’y


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asseoir... c’est comme ça qu’il ne reste que des ruines partout. Ce fut une leçon pour nous, une dure leçon, mais à l’avenir, non, c’est fini, n’est-ce pas. » « Bien ! Bien ! C’était... Je voulais seulement vous demander une carte postale, une photo, peut-être... si des fois... » Et il quitte la ville sans avoir rien vu. Et si sur le paquebot, tout à coup le Commissaire du bord le désigne du doigt et dit : « Qu’est-ce qu’il fait ici, celuilà ? Allons, on manque bien de discipline là, en bas, il me semble. Qu’on aille vite me le redescendre dans la soute. Le deuxième quart vient de sonner. » Et il repart en sifflotant, et Plume, lui, s’éreinte pendant toute la traversée. Mais il ne dit rien, il ne se plaint pas. Il songe aux malheureux qui ne peuvent pas voyager du tout, tandis que lui, il voyage, il voyage continuellement.


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IV DANS LES APPARTEMENTS DE LA REINE Comme Plume arrivait au palais, avec ses lettres de créance, la Reine lui dit : - Voilà. Le Roi en ce moment est fort occupé. Vous le verrez plus tard. Nous irons le chercher ensemble si vous voulez bien, vers cinq heures. Sa Majesté aime beaucoup les Danois, Sa Majesté vous recevra bien volontiers, vous pourriez peut-être un peu vous promener avec moi en attendant. Comme le palais est très grand, j’ai toujours peur de m’y perdre et de me trouver tout à coup devant les cuisines, alors, vous comprenez, pour une Reine, ce serait tellement ridicule. Nous allons aller par ici. Je connais bien le chemin. Voici ma chambre à coucher. Et ils entrent dans la chambre à coucher. - Comme nous avons deux bonnes heures devant nous, vous pourriez peut-être me faire un peu la lecture, mais ici je n’ai pas grand-chose d’intéressant. Peut-être jouez-vous aux cartes. Mais je vous avouerai que moi je perds tout de suite. De toute façon ne restez pas debout, c’est fatigant ; assis on s’ennuie bientôt, alors on pourrait peut-être s’étendre sur ce divan. Mais elle se relève bientôt. - Dans cette chambre il règne toujours une chaleur insupportable. Si vous vouliez m’aider à me déshabiller, vous me feriez plaisir. Après on pourra parler comme il faut. Je voudrais tant avoir quelques renseignements sur le Danemark. Cette robe, du reste, s’enlève si facilement, je me demande comment je reste habillée toute la journée. Cette robe s’enlève sans qu’on s’en rende compte. Voyez, je lève les bras, et maintenant un enfant la tirerait à lui. Naturellement, je ne le laisserais pas faire. Je les aime beaucoup, mais on jase tellement dans un palais, et puis les enfants ça égare tout. Et Plume la déshabille. - Mais vous, écoutez, ne restez pas comme ça. Se tenir tout


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IV ²¶àôÐàô вðβ´²ÄÆÜܺðàôØ ºñµ äÉÛáõÙÁ áïù ¹ñ»ó å³É³ïª Çñ ѳí³ï³ñÙ³·ñ»ñáí, ³·áõÑÇÝ Ýñ³Ý ³ë³ó. - ²Ñ³ û ÇÝã. ³ñù³Ý ã³÷³½³Ýó ½µ³Õí³Í ¿ ÑÇÙ³: ¸áõù Ýñ³Ý Ïï»ëÝ»ù ³í»ÉÇ áõß: ºÃ» ϳٻݳù, Ù»Ýù ÙdzëÇÝ Ï·Ý³Ýù Ýñ³ Ùáï, Ùáï³íáñ³å»ë ųÙÁ ÑÇÝ·ÇÝ: ÜáñÇÝ Ø»ÍáõÃÛáõÝÁ ß³ï ¿ ëÇñáõÙ ¹³ÝdzóÇÝ»ñÇÝ*, ÜáñÇÝ Ø»ÍáõÃÛáõÝÁ Ó»½ ÏÁݹáõÝÇ Ù»Í Ñ³×áõÛùáí, ÇëÏ ÙÇÝã ³Û¹ ·áõó» ÙÇ ùÇã ׻ٻDZù ÇÝÓ Ñ»ï: ø³ÝÇ áñ å³É³ïÁ ³Ýë³ÑÙ³Ý Ù»Í ¿, »ë ÙÇßï í³Ë»ÝáõÙ »Ù ÙáÉáñí»É ¨ ѳÝϳñÍ Ñ³ÛïÝí»É ³ñù³Û³Ï³Ý ËáѳÝáóÝ»ñÇ ³é³ç, ѳëϳÝáõ±Ù »ù, ¹³ ³ÛÝù³Ý ÍÇͳջÉÇ ÏÉÇÝ»ñ ³·áõÑáõ ѳٳñ: Ø»Ýù ³Ûëï»Õáí ϳÝóÝ»Ýù: ºë ß³ï É³í ·Çï»Ù ׳ݳå³ñÑÁ: ²Ñ³ ÇÙ ÝÝç³ë»ÝÛ³ÏÁ: ºí Ýñ³Ýù ÙïÝáõÙ »Ý ÝÝç³ë»ÝÛ³Ï: - ø³ÝÇ áñ Ù»Ýù ³ÙµáÕç »ñÏáõ ų٠áõÝ»Ýù Ù»ñ ³éç¨, ·áõó» ÇÝÓ Ñ³Ù³ñ ÁÝûñó³ÝáõÃÛáõÝ ³Ý»Çù, µ³Ûó ³Ûëï»Õ ³é³ÝÓݳå»ë áã ÙÇ Ñ»ï³ùñùÇñ µ³Ý ãáõÝ»Ù: ÆëÏ ÃÕÃ³Ë³Õ ·Çï»±ù: ´³Ûó Ëáëïáí³Ý»Ù, áñ »ë Ùdzݷ³ÙÇó ï³ÝáõÉ »Ù ï³ÉÇë: ²Ù»Ý ¹»åùáõÙ áïùÇ íñ³ ÙÇ° Ùݳó»ù, Ñá·Ý»óáõóÇã ¿, Ýëï³Í ¿É ß³ï ³ñ³· ëÏëáõÙ »ë Ó³ÝÓñ³Ý³É, ·áõó» µ³½ÙáóÇ±Ý ÃÇÏÝ»ÇÝù: ´³Ûó ßáõïáí í»ñ ¿ Ï»ÝáõÙ ï»ÕÇó: - ²Ûë ë»ÝÛ³ÏáõÙ Ùßï³å»ë ³Ýï³Ý»ÉÇ ßá· ¿ ïÇñáõÙ: ºÃ» ѳ׻Çù ÇÝÓ û·Ý»É ³½³ïí»É Ç٠ѳݹ»ñÓÝ»ñÇó, ÇÝÓ Ù»Í Ñ³×áõÛù å³ï׳é³Í ÏÉÇÝ»Çù: лïá ³ñ¹»Ý ϳñáÕ »Ýù ½ñáõó»É ÇÝãå»ë ѳñÏÝ ¿: ºë ³ÛÝù³Ý Ïáõ½»Ç áñáß ï»Õ»ÏáõÃÛáõÝÝ»ñ ù³Õ»É ¸³ÝdzÛÇ Ù³ëÇÝ: Æ ¹»å, ³Ûë ½·»ëïÁ ³ÛÝù³Ý Ñ»ßï ¿ ѳݻÉ, áñ ÇÝùë ÇÝÓ Ñ³ñó »Ù ï³ÉÇëª ÇÝãå»ë »Ù ³ÙµáÕç ûñÁ ѳ·Ýí³Í ÙÝáõÙ: ²Ûë ½·»ëïÁ áõÕÕ³ÏÇ Çñ»Ý-Çñ»Ý ¹áõñë ¿ ·³ÉÇë: î»ë»ùª Ó»éù»ñë µ³ñÓñ³óÝáõÙ »Ù, ¨ ÑÇÙ³ »ñ»Ë³Ý ³Ý·³Ù ϳñáÕ ¿ñ í»ñ ù³ß»É: ´Ý³Ï³Ý³µ³ñ, »ë ¹³ ÃáõÛÉ ã¿Ç ï³: ºë


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habillé dans une chambre, ça fait très guindé, et puis je ne peux vous voir ainsi, il me semble que vous allez sortir et me laisser seule dans ce palais qui est tellement vaste. Et Plume se déshabille. Ensuite, il se couche en chemise. - Il n’est encore que trois heures et quart, dit-elle. En savezvous vraiment autant sur le Danemark que vous puissiez m’en parler pendant une heure trois quarts ? Je ne serai pas si exigeante. Je comprends que cela serait très difficile. Je vous accorde encore quelque temps pour la réflexion. Et, tenez, en attendant, comme vous êtes ici, je vais vous montrer quelque chose qui m’intrigue beaucoup. Je serais curieuse de savoir ce qu’un Danois en pensera. J’ai ici, voyez, sous le sein droit, trois petits signes. Non pas trois, deux petits et un grand. Voyez le grand, il a presque l’air de... Cela est bizarre en vérité, n’est-ce pas, et voyez le sein gauche, rien ! tout blanc ! Ecoutez, dites-moi quelque chose, mais examinez bien, d’abord, bien à votre aise... Et voilà Plume qui examine. Il touche, il tâte avec des doigts peu sûrs, et la recherche des réalités le fait trembler, et ils font et refont leur trajet incurvé. Et Plume réfléchit. - Vous vous demandez, je vois, dit la Reine, après quelques instants (je vois maintenant que vous vous y connaissez). Vous voudriez savoir si je n’en ai pas un autre. Non, ditelle, et elle devient toute confuse, toute rouge. Et maintenant parlez-moi du Danemark, mais tenez-vous tout contre moi, pour que je vous écoute plus attentivement. Plume s’avance ; il se couche près d’elle et il ne pourra plus rien dissimuler maintenant. Et, en effet : - Ecoutez, dit-elle, je vous croyais plus de respect pour la Reine, mais enfin puisque vous en êtes là, je ne voudrais pas que cela nous empêchât dans la suite de nous entretenir du Danemark. Et la Reine l’attire à elle.


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- Et caressez-moi surtout les jambes, disait-elle, sinon je risque tout de suite d’être distraite, et je ne sais plus pourquoi je me suis couchée... C’est alors que le Roi entra ! ……………………………………………………………. Aventures terribles, quels que soient vos trames et vos débuts, aventures douloureuses et guidées par un ennemi implacable.


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V LA NUIT DES BULGARES - Voilà, on était sur le chemin du retour. On s’est trompé de train. Alors, comme on était là avec un tas de Bulgares, qui murmuraient entre eux on ne sait pas quoi, qui remuaient tout le temps, on a préféré en finir d’un coup. On a sorti nos revolvers et on a tiré. On a tiré précipitamment, parce qu’on ne se fiait pas à eux. Il était préférable de les mettre avant tout hors de combat. Eux, dans l’ensemble, parurent étonnés, mais les Bulgares, il ne faut pas s’y fier. - A la station prochaine montent quantité de voyageurs, dit le chef du convoi. Arrangez-vous avec ceux d’à côté (et il désigne les morts) pour n’occuper qu’un compartiment. Il n’y a plus aucun motif maintenant pour que vous et eux occupiez des compartiments distincts. Et il les regarde d’un air sévère. - Oui, oui, on s’arrangera ! Comment donc ! Bien sûr ! Tout de suite ! Et vivement ils se placent auprès des morts et les soutiennent. Ce n’est pas tellement facile. Sept morts et trois vivants. On se cale entre des corps froids et les têtes de ces « dormeurs » penchent tout le temps. Elles tombent dans le cou des trois jeunes hommes. Comme des urnes qu’on porte sur l’épaule, ces têtes froides. Comme des urnes grenues, contre les joues, ces barbes dures, qui se mettent à croître tout à coup à une vitesse redoublée. La nuit à passer. Puis on tâchera de déguerpir au petit matin. Peut-être le chef du convoi aura-t-il oublié. Ce qu’il faut, c’est rester bien tranquille. Tâcher de ne pas réveiller son attention. Rester serrés comme il a dit. Montrer de la bonne volonté. Le matin, on s’en ira en douce. Avant d’arriver à la frontière, le train ralentit ordinairement. La fuite sera plus facile, on passera un peu plus loin par la forêt avec un guide. Et ils s’exhortent ainsi à la patience.


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Dans le train, les morts sont bien plus secoués que les vivants. La vitesse les inquiète. Ils ne peuvent rester tranquilles un instant, ils se penchent de plus en plus, ils viennent vous parler à l’estomac, ils n’en peuvent plus. Il faut les mener durement et ne pas les lâcher un instant ; il faut les aplatir contre les dossiers, l’un à sa gauche, l’autre à sa droite, s’écraser dessus mais c’est leur tête alors qui cogne. Il faut les tenir fermement, ça c’est le plus important. - Un de ces Messieurs ne pourrait-il pas faire place à cette vieille dame que voici ? Impossible de refuser. Plume prend sur ses genoux un mort (il en a encore un autre à sa droite) et la dame vient s’asseoir à sa gauche. Maintenant, la vieille dame s’est endormie et sa tête penche. Et sa tête et celle du mort se sont rencontrées. Mais seule la tête de la dame se réveille, et elle dit que l’autre est bien froide et elle a peur. Mais ils disent vivement qu’il règne un grand froid. Elle n’a qu’à toucher. Et des mains se tendent vers elle, des mains toutes froides. Peut-être ferait-elle mieux d’aller dans un compartiment plus chaud. Elle se lève. Elle revient ensuite avec le contrôleur. Le contrôleur veut vérifier si le chauffage fonctionne normalement. La dame lui dit : « Touchez donc ces mains. » Mais tous crient : « Non, non, c’est l’immobilité, ce sont des doigts endormis par l’immobilité, ce n’est rien. Nous avons tous assez chaud, ici. On transpire, tâtez ce front. A un endroit du corps, il y a transpiration, sur l’autre règne le froid, c’est l’immobilité qui veut ça, ce n’est rien d’autre que l’immobilité. » - Ceux qui ont froid, dit Plume, qu’ils s’abritent la tête dans un journal. Ça tient chaud. Les autres comprennent. Bientôt tous les morts sont encapuchonnés dans des journaux, encapuchonnés dans du blanc, encapuchonnés bruissants. C’est plus commode, on les reconnaît tout de suite malgré l’obscurité. Et puis la dame ne risquera plus de toucher une tête froide. Cependant monte une jeune fille. On a installé ses bagages


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dans le couloir. Elle ne cherche pas à s’asseoir, une jeune fille très réservée, la modestie et la fatigue pèsent sur ses paupières. Elle ne demande rien. Mais il faudra lui faire place. Ils le veulent absolument, alors ils songent à écouler leurs morts, les écouler petit à petit. Mais tout bien considéré, il vaudrait mieux essayer de les sortir immédiatement l’un après l’autre, car à la vieille dame on pourra peut-être cacher la chose, mais s’il y avait deux ou trois personnes étrangères cela deviendrait plutôt difficile. Ils baissent la grande vitre avec précaution et l’opération commence. On les sort jusqu’à la ceinture, une fois là on les fait basculer. Mais il faut bien plier les genoux pour qu’ils n’accrochent pas - car pendant qu’ils restent suspendus, leur tête donne des coups sourds sur la portière, tout à fait comme si elle voulait rentrer. Allons ! Du courage ! Bientôt on pourra respirer à nouveau convenablement. Encore un mort, et ce sera fini. Mais le froid de l’air qui est entré a réveillé la vieille dame. Et entendant remuer, le contrôleur vient encore vérifier par acquit de conscience et affectation de galanterie, s’il n’y aurait pas à l’intérieur, quoiqu’il sache pertinemment le contraire, une place pour la jeune fille qui est dans le couloir. - Mais certainement ! Mais certainement ! s’écrient-ils tous. - C’est bien extraordinaire, fait le contrôleur..., j’aurais juré... - C’est bien extraordinaire, dit aussi le regard de la vieille dame, mais le sommeil remet les questions à plus tard. Pourvu que dorme maintenant la jeune fille ! Un mort, il est vrai, ça s’expliquerait déjà plus aisément que cinq morts. Mais il vaut mieux éviter toutes les questions. Car, quand on est questionné, on s’embrouille facilement. La contradiction et les méfaits apparaissent de tous côtés. Il est toujours préférable de ne pas voyager avec un mort. Surtout quand il a été victime d’une balle de revolver, car le sang qui a coulé lui donne mauvaise mine.


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Mais puisque la jeune fille dans sa grande prudence ne veut pas s’endormir avant eux, et qu’après tout la nuit est encore longue, et qu’avant 4 h 1/2, il n’y a pas de station, ils ne s’inquiètent pas outre mesure, et cédant à la fatigue, ils s’endorment. Et brusquement Plume s’aperçoit qu’il est quatre heures et quart, il réveille Pon… et ils sont d’accord pour s’affoler. Et sans s’occuper d’autre chose que du prochain arrêt et du jour implacable qui va tout révéler, ils jettent vivement le mort par la portière. Mais comme déjà ils s’épongent le front, ils sentent le mort à leurs pieds. Ce n’était donc pas lui qu’ils ont jeté. Comment est-ce possible ? Il avait pourtant la tête dans un journal. Enfin, à plus tard les interrogations ! Ils empoignent le mort et le jettent dans la nuit. Ouf ! Que la vie est bonne aux vivants. Que ce compartiment est gai ! Ils réveillent leur compagnon. Tiens, c’est D... Ils réveillent les deux femmes. - Réveillez-vous, nous approchons. Nous y serons bientôt. Tout s’est bien passé ? Un train excellent, n’est-ce pas ? Avez-vous bien dormi au moins ? Et ils aident la dame à descendre, et la jeune fille. La jeune fille qui les regarde sans rien dire. Eux restent. Ils ne savent plus que faire. C’est comme s’ils avaient tout terminé. Le chef du convoi apparaît et dit : - Allons, faites vite. Descendez avec vos témoins ! - Mais nous n’avons pas de témoins, disent-ils. - Eh bien, dit le chef du convoi, puisque vous voulez un témoin, comptez sur moi. Attendez un instant de l’autre côté de la gare, en face des guichets. Je reviens tout de suite, n’est-ce pas. Voici un laissez-passer. Je reviens dans un instant. Attendez-moi. Ils arrivent, et une fois là, ils s’enfuient, ils s’enfuient. Oh ! vivre maintenant, oh ! vivre enfin !


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VI LA VISION DE PLUME Un fromage lent, jaune, à pas de chevaux de catafalque, un fromage lent, jaune, à pas de chevaux de catafalque circulait en lui-même comme un pied du monde. C’était plutôt une énorme mamelle, une vieille meule de chair et, accroupie se tenait sur une région immense qui devait être terriblement moite. Sur la gauche descendait la cavalerie. Il fallait voir les chevaux freiner sur leurs sabots de derrière. Ces cavaliers si fiers ne remonteraient donc jamais ? Non, jamais. Et le chef faisait force gestes de protestations, mais sa voix était devenue si petite qu’on se demandait qui aurait accepté de tenir compte de ce qu’il disait, comme si un grain de riz s’était mis à parler. Enfin, ils parurent s’embourber et on ne les revit plus. Puis, tout à coup, comme un déclic, comme un débrayage se fit dans l’énorme chose molle et des débris rejetés de tous côtés se forma après un certain temps un ruban si long, si long et cependant si ferme que toute la cavalerie y aurait pu passer à grande allure. Mais ses éléments avaient disparu. Seule la silhouette du chef se distinguait. On aurait même été tenté de lui voir encore son attitude de protestation, si sa tête orgueilleuse ne s’était affaissée. Alors, comme si elle seule jusqu’à ce moment l’avait tenu debout, il tomba de tout son long. Ce fut un cylindre si léger qui roula sur le ruban, qui descendait avec un bruit clair, et qui semblait parfaitement creux et gai. Quant à Plume, assis au pied de son lit, il regardait ce spectacle en réfléchissant silencieusement...


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VII PLUME AVAIT MAL AU DOIGT Plume avait un peu mal au doigt. - Il vaudrait peut-être mieux consulter un médecin, lui dit sa femme. Il suffit souvent d’une pommade... Et Plume y alla. - Un doigt à couper, dit le chirurgien, c’est parfait. Avec l’anesthésie, vous en avez pour six minutes tout au plus. Comme vous êtes riche, vous n’avez pas besoin de tant de doigts. Je serai ravi de vous faire cette petite opération. Je vous montrerai ensuite quelques modèles de doigts artificiels. Il y en a d’extrêmement gracieux. Un peu chers sans doute. Mais il n’est pas question naturellement de regarder à la dépense. Nous vous ferons ce qu’il y a de mieux. Plume regarda mélancoliquement son doigt et s’excusa. - Docteur, c’est l’index, vous savez, un doigt bien utile. Justement, je devais écrire encore à ma mère. Je me sers toujours de l’index pour écrire. Ma mère serait inquiète si je tardais davantage à lui écrire, je reviendrai dans quelques jours. C’est une femme très sensible, elle s’émeut si facilement. - Qu’à cela ne tienne, lui dit le chirurgien, voici du papier, du papier blanc, sans en-tête naturellement. Quelques mots bien sentis de votre part lui rendront la joie. Je vais téléphoner pendant ce temps à la clinique pour qu’on prépare tout, qu’il n’y ait plus qu’à retirer les instruments tout aseptisés. Je reviens dans un instant... Et le voilà déjà revenu. - Tout est pour le mieux, on nous attend. - Excusez, docteur, fit Plume, vous voyez, ma main tremble, c’est plus fort que moi... eh... - Eh bien, lui dit le chirurgien, vous avez raison, mieux vaut ne pas écrire. Les femmes sont terriblement fines, les mères surtout. Elles voient partout des réticences quand il s’agit de leur fils, et d’un rien, font un monde. Pour elles, nous ne


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sommes que de petits enfants. Voici votre canne et votre chapeau. L’auto nous attend. Et ils arrivent dans la salle d’opération. - Docteur, écoutez. Vraiment... - Oh ! fit le chirurgien, ne vous inquiétez pas, vous avez trop de scrupules. Nous écrirons cette lettre ensemble. Je vais y réfléchir tout en vous opérant. Et approchant le masque, il endort Plume. - Tu aurais quand même pu me demander mon avis, dit la femme de Plume à son mari. Ne va pas t’imaginer qu’un doigt perdu se retrouve si facilement. Un homme avec des moignons, je n’aime pas beaucoup ça. Dès que ta main sera un peu trop dégarnie, ne compte plus sur moi. Les infirmes c’est méchant, ça devient promptement sadique. Mais moi je n’ai pas été élevée comme j’ai été élevée pour vivre avec un sadique. Tu t’es figuré sans doute que je t’aiderais bénévolement dans ces choses-là. Eh bien, tu t’es trompé, tu aurais mieux fait d’y réfléchir avant... - Ecoute, dit Plume, ne te tracasse pas pour l’avenir. J’ai encore neuf doigts et puis ton caractère peut changer.


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VIII L’ARRACHAGE DES TETES Ils tenaient seulement à le tirer par les cheveux. Ils ne voulaient pas lui faire de mal. Ils lui ont arraché la tête d’un coup. Sûrement elle tenait mal. Ça ne vient pas comme ça. Sûrement il lui manquait quelque chose. Quand elle n’est plus sur les épaules, elle embarrasse. Il faut la donner. Mais il faut la laver, car elle tache la main de celui à qui on la donne. Il fallait la laver. Car celui qui l’a reçue, les mains déjà baignées de sang, commence à avoir des soupçons et il commence à regarder comme quelqu’un qui attend des renseignements. - Bah ! On l’a trouvée en jardinant... On l’a trouvée au milieu d’autres... On l’a choisie parce qu’elle paraissait plus fraîche. S’il en préfère une autre... on pourrait aller voir. Qu’il garde toujours celle-là en attendant... Et ils s’en vont suivis d’un regard qui ne dit ni oui ni non, un regard fixe. Si on allait voir du côté de l’étang. Dans un étang on trouve quantité de choses. Peut-être un noyé ferait-il l’affaire. Dans un étang, on s’imagine qu’on trouvera ce qu’on voudra. On en revient vite et l’on en revient bredouille. Où trouver des têtes toutes prêtes à offrir ? Où trouver ça sans trop d’histoires ? - Moi, j’ai bien mon cousin germain. Mais, nous avons autant dire la même tête. Jamais on ne croira que je l’ai trouvée par hasard. - Moi... il y a mon ami Pierre. Mais il est d’une force à ne pas se la laisser enlever comme ça. - Bah, on verra. L’autre est venue si facilement. C’est ainsi qu’ils s’en vont en proie à leur idée et ils arrivent chez Pierre. Ils laissent tomber un mouchoir. Pierre se baisse. Comme pour le relever, en riant, on le tire en arrière par les cheveux. La tête est venue, arrachée. La femme de Pierre entre, furieuse... « Soulaud, voilà qu’il a encore renversé le vin. Il n’arrive même plus à le boire. Il


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faut encore qu’il le renverse à terre. Et ça ne sait même plus se relever... » Et elle s’en va pour chercher de quoi nettoyer. Ils la retiennent donc par les cheveux. Le corps tombe en avant. La tête leur reste dans la main. Une tête furieuse qui se balance aux longs cheveux. Un grand chien surgit, qui aboie fortement. On lui donne un coup de pied et la tête tombe. Maintenant ils en ont trois. Trois, c’est un bon chiffre. Et puis il y a du choix. Ce ne sont vraiment pas des têtes pareilles. Non, un homme, une femme, un chien. Et ils repartent vers celui qui a déjà une tête, et ils le retrouvent qui attend. Ils lui mettent sur les genoux le bouquet de têtes. Lui, met à gauche la tête de l’homme, près de la première tête, et la tête de chien et la tête de femme et ses longs cheveux de l’autre côté. Puis il attend. Et il les regarde d’un regard fixe, d’un regard qui ne dit ni oui ni non. Oh ! celles-là, on les a trouvées chez un ami. Elles étaient là dans la maison... N’importe qui aurait pu les emporter. Il n’y en avait pas d’autres. On a pris celles qu’il y avait. Une autre fois on sera plus heureux. Après tout ça a été de la chance. Ce ne sont pas les têtes qui manquent heureusement. Tout de même, il est déjà tard. Les trouver dans l’obscurité. Le temps de les nettoyer, surtout celles qui seraient dans la boue. Enfin, on essaiera... Mais, à nous deux, on ne peut quand même pas en rapporter des tombereaux. C’est entendu... On y va... Peut-être qu’il en est tombé quelquesunes depuis tout à l’heure. On verra... Et ils s’en vont, suivis d’un regard qui ne dit ni oui ni non, suivis d’un regard fixe. - Oh moi, tu sais. Non ! Tiens ! Prends ma tête. Retourne avec, il ne la reconnaîtra pas. Il ne les regarde même pas. Tu lui diras... : « Tenez, en sortant, j’ai buté là-dessus. C’est une tête, il me semble. Je vous l’apporte. Et


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ce sera suffisant pour aujourd’hui, n’est-ce pas ?... » - Mais, mon vieux, je n’ai que toi. - Allons, allons, pas de sensibilité. Prends-la. Allons, tire, tire fort, mais plus fort, voyons. - Non. Tu vois, ça ne va pas. C’est notre châtiment. Allez, essaie la mienne, tire, tire. Mais les têtes ne partent pas. De bonnes têtes d’assassins. Ils ne savent plus que faire, ils reviennent, ils retournent, ils reviennent, ils repartent, ils repartent, suivis du regard qui attend, un regard fixe. Enfin ils se perdent dans la nuit, et ça leur est d’un grand soulagement ; pour eux, pour leur conscience. Demain, ils repartiront au hasard, dans une direction qu’ils suivront tant qu’ils pourront. Ils essaieront de se faire une vie. C’est bien difficile. On essaiera. On essaiera de ne plus songer à rien de tout ça, à vivre comme avant, comme tout le monde...


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IX UNE MERE DE NEUF ENFANTS ! Plume venait à peine d’arriver à Berlin, il allait entrer au Terminus, quand une femme l’aborda, et lui proposa de passer la nuit avec elle. - Ne partez pas, je vous en supplie. Je suis mère de neuf enfants. Et appelant ses amies à la rescousse, elle ameuta le quartier, on l’entoura, il y eut un rassemblement et un agent s’approcha. Après avoir écouté : « Ne soyez pas si dur, dit-il à Plume, une mère de neuf enfants ! » Alors, en le bousculant elles l’entraînèrent dans un hôtel infect, que les punaises mangeaient depuis des années. Quand il y en a pour une, il y en a pour deux. Elles étaient cinq. Elles le dépouillèrent aussitôt de tout ce qu’il avait dans ses poches et se le partagèrent. - Tiens, se disait Plume, ceci s’appelle être volé, c’est la première fois que cela m’arrive. Voilà ce que c’est que d’écouter les agents de police. Ayant repris son veston, il s’apprêtait à sortir. Mais elles s’indignèrent violemment : « Comment ! On n’est pas des voleuses ! On s’est payées d’abord par précaution, mais tu en auras pour ton argent, mon petit. » Et elles se déshabillèrent. La mère de neuf enfants était pleine de boutons et pareillement deux autres. Plume pensait : « Pas exactement mon genre, ces femmes-là. Mais comment le leur faire comprendre sans les froisser ? » Et il réfléchissait. Alors, la mère de neuf enfants : « Eh bien, ce petit-là, mes amies, vous me croirez si vous voulez, mais je parie que c’est encore un de ces m’as-tu-vu qui a peur de la syphilis. Question de chance, la syphilis ! » Et, de force, elles le prirent, l’une après l’autre. Il essaya de se lever, mais la mère aux neuf enfants : « Non, ne sois pas si pressé, mon petit. Tant qu’il n’y a pas eu de sang, il n’y a pas eu de véritable satisfaction. » Et elles recommencèrent.


²ÜðÆ ØÆÞà àÙÝ äÉÛáõÙ

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IX ÆÜÀ ºðºÊ²ÚÆ Ø²ÚðÀ äÉÛáõÙÁ Ñ»Ýó Ýáñ ¿ñ Å³Ù³Ý»É ´»éÉÇÝ ¨ ÙïÝ»Éáõ ¿ñ ì»ñçÇÝ Ï³Û³ñ³Ý, »ñµ Ýñ³Ý Ùáï»ó³í ÙÇ ÏÇÝ ¨ ³é³ç³ñÏ»ó ·Çß»ñÝ Çñ Ñ»ï ³ÝóϳóÝ»É: - ØÇ° Ù»ÏÝ»ù, ËݹñáõÙ »Ù, »ë ÇÝÁ »ñ»Ë³ÛÇ Ù³Ûñ »Ù: ºí ÁÝÏ»ñÝ»ñÇÝ Ï³Ýã»Éáíª Ý³ áïùÇ Ñ³Ý»ó ³ÙµáÕç óճٳëÁ, Ýñ³Ý ãáñë ÏáÕÙÇó ßñç³å³ï»óÇÝ, ³ÙµáË Ïáõï³Ïí»ó, ¨ Ýñ³Ýó Ùáï»ó³í áëïÇϳÝÁ: Èë»Éáõó Ñ»ïá ¹ÇÙ»ó äÉÛáõÙÇÝ. §²Û¹ù³Ý ³ÝëÇñï ÙÇ° »Õ»ù, ÇÝÁ »ñ»Ë³ÛÇ Ù³Ûñ ¿¦: ÐñÙßï»Éáíª Ýñ³Ý ù³ñß ïí»óÇÝ ·çÉáï ÙÇ ÑÛáõñ³Ýáó, áñ ï³ñÇÝ»ñ Ç í»ñ ÷³ÛïáçÇÉÝ»ñÇ Ï»ñ ¿ñ: àñï»Õ Ù»ÏÁ, ³ÛÝï»Õ ¿É »ñÏáõëÁ: ÐÇÝ·Ý ¿ÇÝ: Üñ³Ýù ³ÝÙÇç³å»ë äÉÛáõÙÇó í»ñóñÇÝ ·ñå³ÝÝ»ñÇ å³ñáõݳÏáõÃÛáõÝÁ ¨ µ³Å³Ý»óÇÝ Çñ³ñ Ù»ç: - ¸», - Ùï³ÍáõÙ ¿ñ äÉÛáõÙÁ, - ë³ ÏáãíáõÙ ¿ ÏáÕáåïí³Í ÉÇÝ»É, ³é³çÇÝ ³Ý·³ÙÝ ¿ ÇÝÓ Ñ»ï ÝÙ³Ý µ³Ý ϳï³ñíáõÙ: ²Ñ³ û ÇÝã ¿ Ý߳ݳÏáõÙ Éë»É áëïÇϳÝÝ»ñÇÝ: î³µ³ïÁ í»ñóñ³Íª å³ïñ³ëïíáõÙ ¿ñ ³ñ¹»Ý ¹áõñë ·³É: ´³Ûó ϳݳÛù ë³ëïÇÏ íñ¹áíí»óÇÝ. §ÆÝã廯ë: Ø»Ýù ·áÕ ã»Ýù: Ø»Ýù ³å³Ñáí ÉÇÝ»Éáõ ѳٳñ Ý³Ë Ñ³ñÙ³ñ ·ï³Ýù ·áõÙ³ñÁ ëï³Ý³É, µ³Ûó ¹áõ ÷áÕǹ ¹ÇÙ³ó áõ½³Íǹ å»ë Ïëï³Ý³ë, ×ëïÇ°Ïë¦: ºí Ýñ³Ýù ëÏë»óÇÝ ßáñ»ñÁ ѳݻÉ: ÆÝÁ Ùáñ »ñ»Ë³ÛÇ Ù³ßÏÁ ͳÍÏí³Í ¿ñ å½áõÏÝ»ñáí, ÝáõÛÝÝ ¿É ÙÛáõëÝ»ñÇÝÁ: äÉÛáõÙÁ ÙÇïù ¿ñ ³ÝáõÙ. â¿Ç ³ëÇ, û Çëϳå»ë Ç٠׳߳Ïáí »Ý ³Ûë ϳݳÛù: ´³Ûó ÇÝãå»±ë ѳëϳóݻ٪ ³é³Ýó íÇñ³íáñ»Éáõ : àõ ÙÇÝã ݳ ÙÇïù ¿ñ ³ÝáõÙ, ÇÝÁ »ñ»Ë³ÛÇ Ù³ÛñÁ. §¸» ÇÝã, ³ÕçÇÏÝ»°ñ, Ïáõ½»ùª ѳí³ï³ù, Ïáõ½»ùª áã, µ³Ûó ·ñ³½ ·³Ù, áñ Ù»ñ ¿ë ×ëïÇÏÁ Ù»ÏÝ ¿ ¿Ý å³ñÍ»ÝÏáï §ÙÇ ï»ëÝ»¯Çñ¦-Ý»ñÇó*, áñ ë³ñë³÷áõÙ »Ý ëÇýÇÉÇëÇó: ´³ËïÇ µ³Ý ¿, ëÇýÇÉÇëÁ¦: ºí ϳݳÛù Ñ»ñÃáí ïÇñ³ó³Ý Ýñ³Ý: ܳ ÷áñÓ»ó áïùÇ Ï³Ý·Ý»É, µ³Ûó ÇÝÁ »ñ»Ë³ÛÇ Ù³ÛñÁ.


HENRI MICHAUX Un certain Plume

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Il était rompu de fatigue, quand elles se rhabillèrent. - Allons, dirent-elles, dépêche-toi, il est minuit un quart, et la chambre n’est payée que jusqu’à minuit. - Mais enfin, disait-il en songeant à ses 300 marks confisqués, vous pourriez peut-être avec l’argent que vous avez reçu, payer le supplément jusqu’au matin. - Ah ça, il est extraordinaire, le petit. Alors, ça serait nous qui régalerions, quoi ! Dis-le donc! Et, l’arrachant de son lit, elles le jetèrent sur l’escalier. Tiens, pensa Plume, ça fera un fameux souvenir de voyage plus tard.


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§â¿°, ÙÇ ßï³åÇñ ×ëïÇ°Ï, ù³ÝÇ ¹»é ³ñÛáõÝ ãϳ, ÇëÏ³Ï³Ý Ñ³×áõÛù ãÇ »Õ»É¦: ºí ëÏë»óÇÝ ÝáñÇó: ºñµ ϳݳÛù ëÏë»óÇÝ Ñ³·Ýí»É, Ýñ³ Ù³ñÙÇÝÁ ç³ñ¹íáõÙ ¿ñ Ñá·ÝáõÃÛáõÝÇó: - ¸», ¹» ßï³åÇ°ñ, ³ñ¹»Ý Ï»ë·Çß»ñÝ ³Ýó ¿ ù³éáñ¹ ųÙ, ÇëÏ ë»ÝÛ³ÏÇ Ñ³Ù³ñ í׳ñí³Í ¿ ÙÇÝ㨠ϻë·Çß»ñ: - ´³Ûó ·áõó»,- ³ëáõÙ ¿ñ ݳª Ùï³Í»Éáí µéݳ·ñ³íí³Í Çñ »ñ»ù ѳñÛáõñ Ù³ñÏÇ Ù³ëÇÝ, - Ó»ñ ëï³ó³Í ¹ñ³Ùáí ѳí»É³í׳ñ ï³ÛDZù ÙÇÝ㨠³é³íáï: - ¸» ÇÝã, Çëϳå»ë ³ÝÏñÏÝ»ÉÇ, ³ñï³Ï³ñ· ¿ ×ëïÇÏÁ: àõñ»ÙÝ, ¹áõñë ¿ ·³ÉÇëª ÙÇ µ³Ý ¿É Ù»±Ýù å»ïù ¿ í׳ñ»Ýù: ¸»±, ³ë³°: ºí Ýñ³Ý ³ÝÏáÕÝáõ íñ³ÛÇó ù³ß»Éáíª Ý»ï»óÇÝ ³ëïÇ׳ݳí³Ý¹³ÏÇÝ: ²Ûá, Ùï³Í»ó äÉÛáõÙÁ, ë³ ³ÝϳëÏ³Í Ù»ÏÝ ¿ ׳ݳå³ñÑáñ¹³Ï³Ý ³ÛÝ ³ÝÙáé³Ý³ÉÇ Ñáõß»ñÇó:


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X PLUME À CASABLANCA Une fois arrivé à Casablanca, Plume se rappela qu’il avait quantité de courses à faire. C’est pourquoi il laissa sa valise sur le car ; il reviendrait la prendre, ses affaires les plus urgentes terminées. Et il se rendit à l’Hôtel Atlantic. Mais au lieu de demander une chambre, songeant qu’il avait encore beaucoup de courses à faire, il trouva préférable de demander l’adresse de la Société Générale. Il se rendit à la Société Générale, fit passer sa carte au sousdirecteur, mais ayant été introduit, plutôt que de montrer sa lettre de crédit, il jugea à propos de s’informer des principales curiosités de la ville arabe, de Bousbir, et des cafés mauresques, car on ne peut quitter Casa sans avoir vu la danse du ventre, quoique les femmes qui dansent soient juives et non musulmanes. Il s’informa donc de l’endroit, se fit conduire au café mauresque, et il avait déjà une danseuse installée à sa table commandant une bouteille de porto, quand il se rendit compte que tout ça, ce sont des bêtises ; en voyage, avec ces fatigues inaccoutumées, il faut premièrement se restaurer. Il s’en alla donc et se dirigea vers le restaurant du Roi de la Bière, dans la ville nouvelle ; il allait s’attabler quand il réfléchit que ce n’était pas tout, quand on voyage, de boire et de manger, qu’il faut soigneusement s’assurer si tout est en règle pour l’étape du lendemain ; c’est ainsi qu’il convenait, plutôt que de faire le pacha à une table, de rechercher le plus tôt possible l’emplacement du bateau qu’il devait prendre le lendemain. Ce serait du temps bien employé. Ce qu’il était déjà occupé à faire, quand il lui vint à l’esprit d’aller faire un tour du côté des douanes. Il y a des jours où ils ne laisseraient pas passer une boîte de dix allumettes, et celui qu’on trouverait porteur d‘une pareille boîte, soit qu’on la trouvât sur lui, soit au sein de ses bagages, s’exposerait aux pires mésaventures. Mais en chemin, songeant combien souvent le service de la Santé est confié à des médecins ignorants qui pour-


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X äÈÚàôØÀ β겴ȲÜβÚàôØ Î³ë³µÉ³Ýϳ ѳëÝ»Éáíª äÉÛáõÙÁ ÑÇß»ó, áñ ÙÇ ß³ñù ·ÝáõÙÝ»ñ áõÝ»ñ ³Ý»Éáõ: ²Û¹ ÇëÏ å³ï׳éáí ݳ Çñ ׳ÙåñáõÏÁ ÃáÕ»ó ³íïáµáõëáõÙ. Ññ³ï³å ·áñÍ»ñÁ ϳñ·³íáñ»Éáõó Ñ»ïá Ï·³ñ ׳ÙåñáõÏÇ Ñ»ï¨Çó: ºí ·Ý³ó ²ïɳÝïÇÏ ÑÛáõñ³Ýáó: ´³Ûó ë»ÝÛ³Ï í»ñóÝ»Éáõ ÷á˳ñ»Ý, Ùï³Í»Éáí, áñ ³ÛÝáõ³Ù»Ý³ÛÝÇí ß³ï ·ÝáõÙÝ»ñ áõÝ»ñ ³Ý»Éáõ, ·»ñ³¹³ë»ó ѳñóÝ»É êáëÇ»ï» Ä»Ý»ñ³ÉÇ* ѳëó»Ý: ܳ ·Ý³ó êáëÇ»ï» Ä»Ý»ñ³É, Ëݹñ»ó ³Ûó»ù³ñïÁ ÷á˳Ýó»É ÷áËïÝûñ»ÝÇÝ, µ³Ûó »ñµ Ý»ñë Ññ³íÇñ»óÇÝ Ýñ³Ý, Çñ å³ñï³íáñ³·ÇñÁ óáõÛó ï³Éáõ ÷á˳ñ»Ý, ѳñÙ³ñ ·ï³í ï»Õ»Ï³Ý³É ³ñ³µ³Ï³Ý ù³Õ³ùǪ ´áõëµÇñÇ, ·É˳íáñ ï»ë³ñÅ³Ý í³Ûñ»ñÇ Ù³ëÇÝ, ѳñó áõ ÷áñÓ ³ñ»ó Ù³íñ»ñÇ ëñ׳ñ³ÝÝ»ñÇó, áñáíÑ»ï¨ ãÇ Ï³ñ»ÉÇ Î³ë³µÉ³ÝϳÛÇó Ù»Ïݻɪ åáñï³å³ñ ãï»ë³Í, û¨ å³ñáõÑÇÝ»ñÁ ³í»ÉÇ ßáõï Ññ»³Ý»ñ »Ý, ù³Ý ÙáõëáõÉÙ³ÝÝ»ñ: ºí áõñ»ÙÝ ï»Õ»Ï³ó³í í³ÛñÇ Ù³ëÇÝ, ¨ Ëݹñ»ó Çñ»Ý áõÕ»Ïó»É Ù³íñ»ñÇ ëñ׳ñ³Ý, áñï»Õ ³ñ¹»Ý ë»Õ³ÝÝ»ñÇó Ù»ÏÇ Ùáï ÙÇ å³ñáõÑÇ Ï³Ý·Ý³Í Çñ ѳٳñ åáñïá ¿ñ å³ïíÇñáõÙ, »ñµ ѳÝϳñÍ Ñ³ëϳó³í, ³Û¹ ³Ù»ÝÁ áõÕÕ³ÏÇ ÑÇÙ³ñáõÃÛáõÝ ¿: ֳݳå³ñÑáñ¹»ÉÇë µáÉáñ ³ÛÝ ³Ýëáíáñ ç³Ýù»ñÇ Ñ»ï, áñ ëïÇåí³Í »ë ³Ý»É, ³é³çÇÝ Ñ»ñÃÇÝ å»ïù ¿ ÙÇ µ³Ý áõï»É: ܳ ¹áõñë »Ï³í ¨ ù³ÛÉ»ñÝ áõÕÕ»ó ¹»åÇ §¶³ñ»çñÇ ³ñù³¦ é»ëïáñ³ÝÁª Üáñ ù³Õ³ùáõÙ: ºí ³ñ¹»Ý å³ïñ³ëïíáõÙ ¿ñ ë»Õ³Ý Ýëï»É, »ñµ Ùï³Í»ó, áñ ¹³ ¹»é µ³í³Ï³Ý ã¿ñ ׳Ù÷áñ¹»ÉÇë, áõï»É-ËÙ»Éáí ·áñÍÁ ãÇ í»ñç³ÝáõÙ, áñ Ý³Ë å»ïù ¿ ï»Õ»Ï³Ý³É ³Ù»Ý³ÛÝ Ù³Ýñ³Ù³ëÝáõÃÛ³Ùµª ³ñ¹Ûáù ³Ù»Ý ÇÝã ϳñ·ÇÝ ¿ ѳçáñ¹ ûñí³ Ñ³Ù³ñ, Ñ»Ýó ³Û¹ å³ï׳éáí, ë»Õ³ÝÇ ßáõñç §÷³ß³-÷³ß³¦ ˳ճÉáõ ÷á˳ñ»Ýª Ý³Ë å»ïù ¿ñ Ñݳñ³íáñÇÝ ã³÷ ßáõï ï»Õ»Ï³Ý³É, û áñï»Õ ¿ ˳ñÇëË ·ó»É ݳíÁ, áñ Ýëï»Éáõ ¿ñ ѳçáñ¹ ûñÁ: ¸³ ûñ¨ë ųٳݳÏÇ ×Çßï û·ï³·áñÍáõÙ ÏÉÇÝ»ñ: ºí


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raient bien empêcher de monter à bord une personne en parfaite santé, il dut reconnaître qu’il serait fort avisé de se montrer, en bras de chemise, tirant de l’aviron, exubérant de vigueur malgré la fraîcheur de la nuit. Et ainsi faisait-il quand la police toujours inquiète, le questionna, entendit sa réponse et dès lors ne le lâcha plus.


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XI L’HOTE D’HONNEUR DU BREN CLUB L’hôte d’honneur mangeait lentement, méthodiquement, ne faisant aucun commentaire. La dinde était farcie à l’asticot, la salade avait été nettoyée au cambouis, les pommes de terre avaient été recrachées. L’arbre à grape-fruit avait dû croître en terrain de naphtaline, les champignons sentaient l’acier, le pâté sentait l’aisselle. Le vin était vin comme le permanganate. Plume, sans lever la tête, mangeait patiemment. Un serpent tombé d’un régime de bananes rampa vers lui ; il l’avala par politesse, puis il se replongea dans son assiette. Pour attirer son attention, la maîtresse de maison se mit un sein à nu. Ensuite, détournant les yeux, elle rit gauchement. Plume, sans lever la tête, mangeait toujours. « Savez-vous comment on nourrit un enfant ? » demandat-elle tout d’un coup agitée, et elle le renifla. Par honnêteté, il la renifla aussi, doucement. Peu après, sanglotant, sa voisine de droite se trouva à demi étouffée, d’une langue de mouton, que sottement elle s’était mis dans la tête d’avaler. On l’entoura de soins vigilants. Sans en avoir l’air, l’un lui tenait les narines presque bouchées, tandis que d’autres, sous couleur de l’aider, lui comprimaient la glotte. Et jamais elle ne rendit la langue à laquelle elle avait tant envie de renoncer. Ainsi la vie, toujours prête à tirer son épingle du jeu, la quitta silencieusement. « Ne le prenez pas en mauvaise part », dit alors à Plume la maîtresse de maison, les yeux brillants et larges. « Dans l’avalement des langues, toujours quelqu’un échoue. Ça aurait pu être vous. Ça aurait pu être moi. Félicitons-nous. Divertissons-nous. Je voudrais que des enfants nous voient en ce moment. Ils aiment tant la vue du bonheur. » Et elle le battait en l’embrassant.


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XI ´ðºÜ ²ÎàôØ´Æ ä²îìà ÐÚàôðÀ ä³ïíá ÑÛáõñÝ áõïáõÙ ¿ñ ¹³Ý¹³Õ, Ñ»ï¨áճϳÝáñ»Ý, ³é³Ýó Ù»Ïݳµ³ÝáõÃÛáõÝÝ»ñÇ: ÐݹϳѳíÁ ³åËï³Í ¿ñ áñ¹»ñáí, ë³É³ÃÁ Éí³ó»É ¿ÇÝ Ùñáí, ϳñïáýÇÉÁ ͳٳÍ-Ãù³Í ¿ñ: ܳñÝçÇ Í³éÁ ³Ù»Ý³ÛÝ Ñ³í³Ý³Ï³ÝáõÃÛ³Ùµ ݳíóÉÇÝáï ÑáÕÇ íñ³ ¿ñ ³×»É, ëÝÏÇó åÕÝÓÇ Ñáï ¿ñ ·³ÉÇë, å³ßï»ïÇóª è³ï³ÏÇ: ¶ÇÝÇÝ ÑÇß»óÝáõÙ ¿ñ å»ñٳݷ³Ý³ï: äÉÛáõÙÁ, ³é³Ýó ·ÉáõËÁ µ³ñÓñ³óÝ»Éáõ, ѳٵ»ñ³ï³ñ áõïáõÙ ¿ñ: ØÇ ûÓ, áñ ·³ÉÇë ¿ñ µ³Ý³ÝÛ³Ý é»ÅÇÙÇó, ëáÕ³Éáí Ùáï»ó³í Ýñ³Ý: ø³Õ³ù³í³ñáõÃÛáõÝÇó ¹ñ¹í³Íª ݳ ÏáõÉ ïí»ó ûÓÇÝ, Ñ»ïá ÏñÏÇÝ Ëáñ³ëáõ½í»ó Çñ ³Ù³ÝÇ Ù»ç: Üñ³ áõß³¹ñáõÃÛáõÝÁ Çñ íñ³ µ¨»é»Éáõ ѳٳñ, ï³ÝïÇñáõÑÇÝ Ù»ñϳóñ»ó ÏñÍù»ñÇó Ù»ÏÁ: лïá ѳ۳óùÁ ûù»Éáí, ëÏë»ó ³ÝßÝáñÑù ÍÇͳջÉ: äÉÛáõÙÁ, ³é³Ýó ѳ۳óùÁ µ³ñÓñ³óÝ»Éáõ, ß³ñáõݳÏáõÙ ¿ñ áõï»É: - ¶Çï»±ù ÇÝãå»ë »Ý Ï»ñ³ÏñáõÙ »ñ»Ë³ÛÇÝ, - ѳñóñ»ó ÏÇÝÁ ѳÝϳñÍ ³ßËáõųó³Í, ¨ Ñ»ïá Ñáï ù³ß»ó Ýñ³ÝÇó: øÇã ³Ýó ³ç ÏáÕÙáõÙ Ýëï³Í ѳñ¨³ÝáõÑÇÝ, ÏÇëáí ã³÷ ˻չíáõÙ ¿ñ ѻϻϳÉáíª ·³é³Ý É»½íÇ å³ï׳éáí, áñ ÑÇÙ³ñ³µ³ñ áñáᯐ ¿ñ ÏáõÉ ï³É: Üñ³Ý ³ÝÙÇç³å»ë ßñç³å³ï»óÇÝ Ñá·³ï³ñ ËݳÙùáí: ²ñï³ùáõëï áãÇÝã óáõÛó ãï³Éáíª Ù»ÏÁ Ýñ³ ùóÝóùÝ»ñÝ ¿ñ ë»Õٻɪ ·ñ»Ã» Ëó³Ý»Éáí, ÙÇÝã¹»é ÙÛáõëÝ»ñÁ û·Ý»Éáõ ѳٳñ ßÝã³÷áÕÝ ¿ÇÝ ë»ÕÙáõÙ: ´³Ûó ³Û¹å»ë ¿É Ñ»ï ãïí»ó É»½áõÝ, áñÇó ³ÛÝù³Ý áõ½áõÙ ¿ñ Ññ³Å³ñí»É: ºí ÏÛ³ÝùÁ, áñ ³Ù»Ý å³ÑÇ å³ïñ³ëï ¿ ˳ÕÁ ÃáÕÝ»É, Ýñ³Ý Éù»ó Éé»ÉÛ³ÛÝ: - ̳Ýñ ÙÇ° ï³ñ»ù, - ³ë³ó Ýñ³Ý ï³ÝïÇñáõÑÇݪ ßáÕßáÕ³óáÕ ¨ ɳÛÝ ³ãù»ñáí, - É»½áõ ÏáõÉ ï³ÉáõÙ ÙÇßï ¿É Ù»ÏÁ Ó³ËáÕíáõÙ ¿: ¸³ ϳñáÕ ¿Çù ¹áõù ÉÇÝ»É: γñáÕ ¿Ç »ë ÉÇÝ»É: àõñ³Ë³Ý³°Ýù: ¼í³ñ׳ݳ°Ýù: Îáõ½»Ç, áñ »ñ»Ë³Ý»ñÁ Ù»½ ï»ëÝ»ÇÝ ³Ûë å³ÑÇÝ: ºñç³ÝÏáõÃÛ³Ý ï»ë³ñ³ÝÁ Ýñ³Ýó ëÇñ»ÉÇ ¿ ³ÛÝù³Ý: ºí ÏÇÝÁ Ë÷áõÙ ¿ñ Ýñ³Ýª ѳٵáõñ»Éáí:


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XII PLUME AU PLAFOND Dans un stupide moment de distraction, Plume marcha les pieds au plafond, au lieu de les garder à terre. Hélas, quand il s’en aperçut, il était trop tard. Déjà paralysé par le sang aussitôt amassé, entassé dans sa tête, comme le fer dans un marteau, il ne savait plus quoi. Il était perdu. Avec épouvante, il voyait le lointain plancher, le fauteuil autrefois si accueillant, la pièce entière, étonnant abîme. Comme il aurait voulu être dans une cuve pleine d’eau, dans un piège à loups, dans un coffre, dans un chauffe-bain en cuivre, plutôt que là, seul, sur ce plafond ridiculement désert et sans ressources d’où redescendre eût été, autant dire, se tuer. Malheur ! Malheur toujours attaché au même... tandis que tant d’autres dans le monde entier continuaient à marcher tranquillement à terre, qui sûrement ne valaient pas beaucoup plus cher que lui. Si encore il avait pu entrer dans le plafond, y terminer en paix, quoique rapidement, sa triste vie... Mais les plafonds sont durs, et ne peuvent que vous « renvoyer », c’est le mot. Pas de choix dans le malheur, on vous offre ce qui reste. Comme désespérément, il s’obstinait, taupe de plafond, une délégation du Bren Club partie à sa recherche, le trouva en levant la tête. On le descendit alors, sans mot dire, par le moyen d’une échelle dressée. On était gêné. On s’excusait auprès de lui. On accusait à tout hasard un organisateur absent. On flattait l’orgueil de Plume qui n’avait pas perdu courage, alors que tant d’autres, démoralisés, se fussent jetés dans le vide, et se fussent cassé bras et jambes et, davantage, car les plafonds dans ce pays sont hauts, datant presque tous de l’époque de la conquête espagnole. Plume, sans répondre, se brossait les manches avec embarras.


²ÜðÆ ØÆÞà àÙÝ äÉÛáõÙ

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XII äÈÚàôØÀ ²è²êî²ÔÆ ìð² ÐÇÙ³ñ ³Ýáõß³¹ñáõÃÛ³Ý ÙÇ å³ÑÇ äÉÛáõÙÁ, áïù»ñÁ ·»ïÝÇÝ ¹Ý»Éáõ ÷á˳ñ»Ý, ù³ÛÉ»ó áïù»ñÝ ³é³ëï³ÕÇÝ: ²í³Õ, »ñµ áõßùÇ »Ï³í, ß³ï áõß ¿ñ: ÆÝãå»ë »ñϳÃÁ Ùáõñ×Ç Ù»ç, ³ÛÝå»ë ¿É Ýñ³ ·ÉËáõÙ Ïáõï³Ïí³Í ³ñÛáõÝÁ Ýñ³Ý Ù»Ë»É ¿ñ ï»ÕáõÙ: â·Çï»ñª ÇÝ㠳ݻÉ: ²Ûɨë Ïáñ³Í ¿ñ: ê³ñë³÷áí ï»ëÝáõÙ ¿ñ Ñ»é³íáñ ѳï³ÏÁ, ųٳݳÏÇÝ ³ÛÝù³Ý ÑÛáõñÁÝÏ³É µ³½Ï³ÃáéÁ, ¨ ³ÙµáÕç ë»ÝÛ³ÏÁ, áñ ÑÇÙ³ ½³ñٳݳÉÇáñ»Ý ÝÙ³Ý ¿ñ ³Ý¹áõݹÇ: àñù³¯Ý Ïáõ½»ñ ÑÇÙ³ ÉÇÝ»É çñáí ÉÇùÁ ï³ñ³ÛÇ Ù»ç, ·³ÛÉ»ñÇ í³Ý¹³ÏáõÙ, ëݹáõÏÇ Ù»ç, áñ¨¿ å³Ñáóáõ٠ϳ٠¿É åÕÝÓ» ç»éáõóÇãÇ Ù»ç, µ³Ûó ÙdzÛÝ á°ã ³Ûëï»Õª ÍÇͳջÉÇáñ»Ý ¹³ï³ñÏ ³é³ëï³ÕÇ íñ³, ½áõñÏ ³Ù»Ý ÙÇ ÙÇçáóÇó, ¨ áñï»ÕÇó Ççݻɪ ÏÝ߳ݳϻñ áõÕÕ³ÏÇ Ù³Ñ: ¸Åµ³ËïáõÃÛáõ¯Ý: ¸Åµ³ËïáõÃÛáõݪ ³Ýí»ñç Ïå³Í ÙǨÝáõÛÝ... ÙÇÝã¹»é ù³¯ÝÇ-ù³ÝÇëÁ ß³ñáõݳÏáõÙ ¿ÇÝ Ñ³Ý·Çëï ù³ÛÉ»É ·»ïÝÇÝ ¨ ѳëï³ï Çñ»ÝóÇó ³í»ÉÇ Ù»Í µ³Ý ã¿ÇÝ Ý»ñϳ۳óÝáõÙ, ù³Ý ÇÝùÁ: ¶áÝ» »Ã» ϳñáճݳñ ÙïÝ»É ³é³ëï³Õ, ˳ճÕáõÃÛ³Ùµ, µ³Ûó¨ ³ñ³· ³í³ñïÁ ÏÝù»É Çñ ïËáõñ ·áÛáõÃÛ³Ý... ´³Ûó ³é³ëï³ÕÝ»ñÁ åÇݹ »Ý, ¨ Ýñ³Ýó ÙÇ³Ï ·áñÍÝ ¿, ³Ûëï»Õ »Ý ³ë»É, §Ñ»ï í³Ý»É¦: ¸Åµ³ËïáõÃÛ³Ý Ù»ç ÁÝïñáõÃÛáõÝ ãϳ. ³Û¹å»ë ¿, ÇÝã ϳ, ³ÛÝ ¿É ï³ÉÇë »Ý: ºí ù³ÝÇ ¹»é ݳ Ñáõë³Ñ³ï Ù³ù³éáõÙ ¿ñª ³é³ëï³ÕÇ ËÉáõñ¹ ¹³ñÓ³Í, ´ñ»Ý ³ÏáõÙµÇ å³ïíÇñ³ÏáõÃÛ³Ý ³Ý¹³ÙÝ»ñÁ, áñ Ù»ÏÝ»É ¿ÇÝ Ýñ³ Ñ»ïù»ñáí, Ýñ³Ý ·ï³Ýª å³ï³Ñ³µ³ñ ·ÉáõËÝ»ñÁ í»ñ µ³ñÓñ³óÝ»Éáí: Üñ³Ý Çç»óñÇݪ ³é³Ýó áñ¨¿ ËáëùÇ, í»ñ¨ ïÝÏí³Í »ñϳñ ³ëïÇ׳ÝÇ û·ÝáõÃÛ³Ùµ: ²ÝѳñÙ³ñ ¿ÇÝ ½·áõÙ: Ü»ñáõÙ ¿ÇÝ Ñ³ÛóáõÙ: Ø»ÕùÁ µ³ñ¹áõÙ ÉñÇí å³ï³Ñ³Ï³Ý, µ³ó³Ï³ ϳ½Ù³Ï»ñåÇãÝ»ñÇó Ù»ÏÇ íñ³: ¸ñí³ïáõÙ ¿ÇÝ äÉÛáõÙÇ Ñå³ñïáõÃÛáõÝÁ, áñ ù³çáõÃÛáõÝÁ ã¿ñ Ïáñóñ»É, ÙÇÝã¹»é ù³ÝÇ-ù³ÝÇëÁ Ýñ³ ÷á˳ñ»Ý, Ñáõë³Éùí³Í, Çñ»Ýó ¹³ï³ñÏáõÃÛ³Ý


HENRI MICHAUX Un certain Plume

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²ÜðÆ ØÆÞà àÙÝ äÉÛáõÙ

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·ÇñÏÁ ÏÝ»ï»ÇÝ, Ó»éù áõ áïù Ïç³ñ¹»ÇÝ ¨ ¹»é ÙÇ µ³Ý ¿É ³í»ÉÇÝ, áñáíÑ»ï¨ µ³ñÓñ »Ý ³Û¹ »ñÏñáõÙ ³é³ëï³ÕÝ»ñÁ ¨ ·³ÉÇë »Ý, ·ñ»Ã» ³ÝËïÇñ, Çëå³Ý³Ï³Ý Ýí³×Ù³Ý Å³Ù³Ý³ÏÝ»ñÇó: äÉÛáõÙÝ ³é³Ýó å³ï³ë˳ÝÇ Ã¨ù»ñÝ ¿ñ ó÷ ï³ÉÇë ß÷áÃí³Í:


HENRI MICHAUX Un certain Plume

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XIII PLUME ET LES CULS-DE-JATTE … Il y avait un homme en face de Plume, et dès qu’il cessait de le regarder, le visage de cet homme se défaisait, se décomposait en grimaçant, et sa mâchoire tombait sans force. Ah ! Ah ! pensait Plume. Ah ! Ah ! Comme elle est encore tendre ici la création ! Mais quelle responsabilité pour chacun de nous ! Il faudra que j’aille dans un pays où les visages soient plus définitivement fixés, où l’on puisse fixer et détacher ses regards sans catastrophe. Je me demande même comment les gens d’ici peuvent vivre ; sûrement j’y contracterais bientôt une maladie de cœur. Et il se jeta dans une chaise à porteurs. Il arriva à une réunion de culs-de-jatte qui se tenait dans un arbre. Continuellement, il fallait aider de nouveaux culs-de-jatte à monter dans l’arbre, qui en était déjà tout noir. Ça leur fait tellement plaisir ! Ils contemplent le ciel à travers les branches, ils ne sentent plus le poids de la terre. C’est la grande réconciliation. Mais Plume, des culs-de-jatte plein les bras, se plaignait intérieurement. Non, il n’est pas travailleur. Il ne sent pas le besoin ardent du travail. « Pour la tombe de votre père, achetez un petit chien. » Ils insistent, lugubres, comme des infirmes. Fatigue ! Fatigue ! On ne nous lâchera donc jamais ?


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XIII äÈÚàôØÀ ºì вÞزܸ²ØܺðÀ ... äÉÛáõÙÇ ³éç¨ ÙÇ Ù³ñ¹ ¿ñ ϳݷݳÍ, ¨ µ³í³Ï³Ý ¿ñ ÇÝùÁ ѳ۳óùÁ ßñç»ñ, ¨ Ù³ñ¹áõ ¹»ÙùÁ ëÏëáõÙ ¿ñ ³Õ³í³Õí»É, óÝóíáõ٠ͳٳÍéáõÃÛáõÝÝ»ñÇó, áõ ¹áõÝãÁ ³ÝáõŠϳËíáõÙ ¿ñ ó³Í: ¾¯Ñ, ¿¯Ñ, Ùï³ÍáõÙ ¿ñ äÉÛáõÙÁ, ¿¯Ñ, ¿¯Ñ, ¹»é áñù³Ý ÃáõÛÉ ¿ ³Ûëï»Õ ³ñ³ñã³·áñÍáõÃÛáõÝÁ: ºí ÇÝãåÇëÇ å³ï³ë˳ݳïíáõÃÛáõÝ ¿ ¹ñí³Í Ù»½³ÝÇó Ûáõñ³ù³ÝãÛáõñÇ íñ³: ȳí ÏÉÇÝ»ñª ·Ý³ÛÇ ³ÛÝåÇëÇ »ñÏÇñ, áñï»Õ ¹»Ùù»ñÁ ³í»ÉÇ í»ñçݳϳÝ, áñáß³ÏÇ »Ý, áñï»Õ ³½³ï ϳñ»ÉÇ ¿ Ý³Û»É ¨ ѳ۳óùÁ ߻ջɪ ³é³Ýó ï³ñ»ñ³ÛÇÝ ³Õ»ïÇ: лï³ùñùÇñ ¿ª ÇÝãå»ë »Ý ³Ûëï»Õ ³åñáõÙ Ù³ñ¹ÇÏ, ѳëï³ï »ë ßáõïáí ëñï³ÛÇÝ ÇÝã-áñ ÑÇí³Ý¹áõÃÛáõÝ »Ù Ó»éù µ»ñ»Éáõ: ºí ݳ Çñ»Ý ·ó»ó ÙÇ å³ï·³ñ³ÏÇ íñ³, áñ Ù³ñ¹ÇÏ ÏñáõÙ ¿ÇÝ Çñ»Ýó áõë»ñÇÝ: ܳ ·Ý³ó ѳßٳݹ³ÙÝ»ñÇ ÅáÕáíÇÝ, áñ ï»ÕÇ ¿ñ áõÝ»ÝáõÙ ÙÇ Í³éÇ Ù»ç: ²ÝÁݹѳï Ýáñ³Ýáñ ųٳÝáÕ Ñ³ßٳݹ³ÙÝ»ñÇÝ å»ïù ¿ñ û·Ý»É ͳéÁ µ³ñÓñ³Ý³É, áñ ÉñÇí ë¨ ¿ñ Ù³ñ¹Ï³ÛÇÝ ·ÉáõËÝ»ñÇó: ¸³ ³ÛÝåÇëǯ ѳ×áõÛù ¿ Ýñ³Ýó ѳٳñ: Üñ³Ýù »ñÏÝùÇÝ »Ý ݳÛáõÙ ×ÛáõÕ»ñÇ ³ñ³ÝùÇó, ¨ ã»Ý ½·áõÙ »ñÏñÇ Í³ÝñáõÃÛáõÝÁ: ¸³ í»ñÇÝ Ñ³ßïáõÃÛ³Ý Å³ÙÝ ¿: ´³Ûó äÉÛáõÙÁ, ѳßٳݹ³ÙÝ»ñÇÝ Ó»éù»ñÇó ϳ˳Í, ·³Ý·³ïíáõÙ ¿ñ ÙïùáõÙ: à°ã, ÇÝùÁ ³ß˳ï³íáñ ãÇ: à°ã, ÇÝùÁ ãÇ° ½·áõÙ ³ß˳ï»Éáõ ³ÛñáÕ å³Ñ³Ýç: §Ò»ñ Ñáñ ßÇñÇÙÇ Ñ³Ù³ñ ÷áùñÇÏ ÙÇ ßÝÇÏ Ï·Ý»ù¦*, ¨ Ýñ³Ýù åݹáõÙ »Ýª ã³ñ³·áõß³Ï ÇÝãå»ë ѳßٳݹ³ÙÝ»ñÝ ³éѳë³ñ³Ï: Ðá·ÝáõÃÛáõ¯Ý: Ðá·ÝáõÃÛáõ¯Ý: ºí ³Ûɨë Ù»Ýù ãáõÝ»±Ýù ѳݷÇëï:




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PERSONNAGES J. F. : LA JEUNE FILLE (Damidia) J. H. : LE JEUNE HOMME PERE : LE PERE DU JEUNE HOMME UN VOISIN LA MERE DE LA JEUNE FILLE VOIX

La scène représente à gauche la maison de la jeune fille, porte et fenêtre au rez-de-chaussée, fenêtre et balcon au 1er étage. A droite, vis-à-vis, la maison du jeune homme, même disposition. La rue est entre les deux. Le jeune homme se trouve attaché dans la pièce du rez-de-chaussée de sa maison.

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´»ÙÇ íñ³ª Ó³Ë ÏáÕÙáõÙ, »ñ¨áõÙ ¿ »ñÇï³ë³ñ¹ ³Õçϳ ïáõÝÁ, ¹áõé ¨ å³ïáõѳݪ ³é³çÇÝ Ñ³ñÏáõÙ, å³ïáõÑ³Ý ¨ å³ïß·³Ùµª »ñÏñáñ¹ ѳñÏáõÙ: ²ç ÏáÕÙáõÙª ¹»Ù-¹ÇÙ³ó, »ñÇï³ë³ñ¹ ïÕ³ÛÇ ïáõÝÁª ×Çßï ÝáõÛÝ ¹³ë³íáñáõÃÛ³Ùµ: ºñÏáõëÇ ÙÇç¨ ÷áÕáó ¿ ÁÝϳÍ: ºñÇï³ë³ñ¹ ïÕ³Ý Ï³åí³Í ¿ Çñ ï³Ý ³é³çÇÝ Ñ³ñÏÇ ë»ÝÛ³ÏáõÙ:


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SCENE I (Un jeune homme dans une pièce. Il est attaché par une grosse corde à chaque bras.)

J. H. - C’est peut-être insensé. C’est peut-être de l’orgueil. C’est peut-être une sotte honte, mais cela m’affecte d’être attaché indéfiniment. (Il aperçoit la jeune fille. Elle le regarde distraitement.)

J. H. - Oh ! La belle créature ! Oh ! Comme je l’aimerais ! Je l’aime tellement. Hélas, je suis attaché. (Elle le regarde encore une fois, distraitement.)

J. H. - Je prévois de grandes complications. Avant ce regard ma vie était bien plus simple. Je sens que je ferais tout pour elle. Hélas, je suis attaché. (Il rentre.) (Jeune fille à un grand balcon très bas. Elle joue sans conviction avec un tout petit xylophone.)

J. F. - Je suis malheureuse. Je suis très malheureuse. Vous comprenez ? Très malheureuse. (Elle pleure, tournée vers le public, et lui parlant.)

Est-ce que vous comprenez ? Je n’ai pas dit très satisfaite, j’ai dit « malheureuse ». Si l’on confond dans la suite, ce ne sera pas de ma faute. J’ai dit très malheureuse, n’est-ce pas... (Elle a un accès de rire à travers ses larmes ; puis se reprend à pleurer de plus belle.)

Maintenant, Dieu veuille que ça aille mieux pour moi. (Sa mère, dont on ne voit guère que le bras, l’attrape et l’attire à l’intérieur, derrière la tenture. La jeune fille résiste et avant de disparaître se retourne, désespérée.)


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îºê²ð²Ü I (ØÇ »ñÇï³ë³ñ¹ª ë»ÝÛ³ÏáõÙ: Üñ³ ³Ù»Ý Ó»éùÇÝ ÙÇ Ñ³ëï å³ñ³Ý ¿ ѳ·óñ³Í)

º.î. - ¶áõó» ³Ýѻûà ¿: ¶áõó» ·áéá½áõÃÛáõÝ ¿: ¶áõó»¨ ÑÇÙ³ñ ÙÇ ³ÙáÃ, µ³Ûó ÇÝÓ ïËñ»óÝáõÙ ¿ ³Ûëå»ë ³Ýáñáß Ï³åí³Í ÉÇÝ»ÉÁ: (ܳ ÝϳïáõÙ ¿ »ñÇï³ë³ñ¹ ³ÕçϳÝ: ì»ñçÇÝë ݳÛáõÙ ¿ ïÕ³ÛÇÝ óñí³Í ѳ۳óùáí) º.î. - ²¯Ñ, ãùݳ¯Õ ¿³Ï: ²¯Ñ, ÇÝã廯ë ÏëÇñ»Ç Ýñ³Ý: ºë ³ÛÝù³Ý »Ù Ýñ³Ý ëÇñáõÙ: ²í³Õ, ϳåí³Í »Ù: (²ÕçÇÏÁ ÝáñÇó ݳÛáõÙ ¿ Ýñ³Ý óñí³Í ѳ۳óùáí) º.î. - ºë Ù»Í µ³ñ¹áõÃÛáõÝÝ»ñ »Ù ϳÝ˳½·áõÙ: ²Ûë ѳ۳óùÇó ³é³ç ÏÛ³Ýùë ß³ï ³í»ÉÇ å³ñ½ ¿ñ: ¼·áõÙ »Ù, áñ ³Ù»Ý ÇÝãÇ ÁݹáõÝ³Ï »Ù ѳÝáõÝ Ýñ³: ²í³Õ, ϳåí³Í »Ù: (ܳ Ý»ñë ¿ ÙïÝáõÙ) (ºñÇï³ë³ñ¹ ³ÕçÇÏÁª Ù»Í, ß³ï ó³Íñ å³ïß·³ÙµáõÙ: ܳ Ýí³·áõÙ ¿ ã³÷³½³Ýó ÷áùñÇÏ ÙÇ ùëÇÉáýáÝÇ íñ³ª áã ³ÛÝù³Ý ѳÙá½Çã ï»ëùáí) º.². - ºë ¹Åµ³Ëï »Ù: ºë ß³ï ¹Åµ³Ëï »Ù: гëϳÝáõ±Ù »ù, ß³ï ¹Åµ³Ëï: (ܳ É³ó ¿ ÉÇÝáõÙ, ßñçí³Í ¹»åÇ Ñ³Ý¹Çë³ï»ëÁ, Ýñ³Ý ¹ÇÙ»Éáí) гëϳÝáõ±Ù »ù, ûª áã: ºë ã³ë³óǪ ß³ï µ³í³ñ³ñí³Í, »ë ³ë³óǪ §¹Åµ³Ëï¦: ºÃ» Ñ»ïá ß÷áûÝ, »ë Ù»Õù ãáõÝ»Ù: ºë ³ë³óǪ ß³ï ¹Åµ³Ëï, 㿱... (ܳ ëÏëáõÙ ¿ ÍÇÍ³Õ»É ³ñóáõÝùÝ»ñÇ ÙÇçÇó: лïá ÝáñÇó ëÏëáõÙ ¿ ѻϻϳɪ ³í»ÉÇ áõÅ»Õ) ÐÇÙ³ ÃáÕ ²ëïÍá ϳÙùáí ³Ù»Ý ÇÝã ³í»ÉÇ É³í ÉÇÝÇ ÇÝÓ Ñ³Ù³ñ... (²Õçϳ Ù³ÛñÁ, áñÇ Ã¨Ý ¿ ÙdzÛÝ »ñ¨áõÙ, µéÝáõÙ ¿ Ýñ³Ý ¨ Ý»ñë ù³ßáõÙª ÙïóÝ»Éáí ͳÍÏÇ ï³Ï: ºñÇ-


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J. F. - On ne va pas me laisser parler. J’en étais sûre. (Elle disparaît, revient un instant après et très calme.)

J. F. - Je suis « très malheureuse », n’oubliez pas. Très.

J. H.

(On entend le bruit de gifles qui se donnent à l’intérieur de la maison de la jeune fille. La jeune fille va voir un instant puis ressort tranquillement.) (inquiet).- On se bat chez toi ? Qu’y a-t-il ?

Est-ce ton père ? J. F. (calme). - Non (elle fait non de la tête). J. H. - Ta mère ? J. F. (Elle fait oui de la tête.) J. H. - Ta mère bat ton père ? J. F. - Non (de la tête). J. H. - Ta mère bat ton grand-père ? J. F. - Non. J. H. - Ta mère bat ? J. F. - Oui (de la tête). J. H. - Ta mère bat ton grand-oncle ? J. F. - Oui (de la tête). J. H. (scandalisé). - Oh ! C’est scanda... (Il se reprend.)

Je crois que c’est scandaleux. Mais, tant pis. Je t’aime. (Parfaite indifférence de la J. F., comme s’il lui disait qu’il a plu hier.) J. H. - (craintif). - Je peux le dire. J’ai assez mal.

Je t’aime. C’est quand je te regarde. Et c’est après t’avoir regardée. (Elle lui prête toujours aussi peu d’attention que s’il se mouchait.)

J. F. - Ne parle pas à tort et à travers. Viens et montre-moi la route du puits de l’arbre. J. H. - Je ne puis. Je suis retenu.


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J. F. - Par quoi ? J. H. - Par ça. J. F. - Quoi ça ? J. H. - C’est la volonté de mon père. Il m’attache par deux cordes. J. F. (calme). - Il faut le battre, ton père. J. H. - Le battre ! dis-tu. C’est scandaleux. (Se reprenant.)

Ne te fâche pas. Ce n’est pas dans l’usage de ma famille. Veux-tu plutôt que je batte mon frère ? J. F. - Euh, ne parlais-tu pas d’amour tout à l’heure ? Tu mentais ? Tu dis que tu m’aimes et quand on te demande quelque chose, tu marchandes. (Elle se détourne.)

J. H. - Je te supplie. C’est vrai que je t’aime. Tu ne peux savoir à quel point, tu me... J. F. (le coupant). - Tu battras ton frère quand j’en aurai envie. (Réflexion.)

J. H. J. F. J. H. J. F. -

Comment se fait-il que je ne te voie jamais ? C’est mon père. Encore ! Il me tient attaché en bas dans l’échoppe. Quoi ! (Silence.)

Alors ? Tu le battras, hein, ton père ? Ce sera le premier cadeau que tu me feras. Dis, ne vas-tu pas me donner tout de suite quelque chose ? Une petite chose, tu sais, pour songer. Allons, lève-toi. Apporte vite à Damidia. J. H. - Damidia ? J. F. (parfaitement indignée). - Comment ! Tu ne savais pas que je m’appelais Damidia et tu me parlais ! Comment pouvais-tu ?


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(Affolement du jeune homme.)

Tu me feras signe, quand tu battras ton père, hein, c’est promis ? Sinon, ça ne compterait pas pour le cadeau. Maintenant je vais mettre de l’ordre dans la maison. (Les gifles redoublent à son arrivée, puis s’atténuent.) (La jeune fille revient, de son air calme et décidé. Tout à coup, tournée vers la salle.)

« Comme je suis malheureuse ! » (Se tournant vers lui, le visage impassible.)

Je ne le dis pas à toi. Qu’est-ce que tu y comprendrais ?

J. F.

(On entend encore le bruit de gifles. La jeune-fille rentre chez elle. Peu après, de formidables gifles éclatent. Elle revient comme quelqu’un qui a administré une correction.) (reprenant son calme). - Je suis extrêmement mal-

heureuse. Je m’ennuie tellement. (On entend un râle d’agonie et le cri « Je meurs ». La jeune fille rentre posément, va voir, revient un peu après, même air, et ne dit rien.) (inquiet). - Qu’y a-t-il ? Qui est-ce ?

J. H. J. F. - C’est mon oncle. J. H. - Il meurt ? J. F. (calme). - Je ne crois pas. Il fait bien l’agonie. Mais, en général, il ne meurt pas. J. H. - Vraiment ? Est-ce possible ? Alors, ta mère l’aurait trop battu ? J. F. (impatientée). - Oh ! I1 y a des gens qui sont des boîtes à questions. (Cependant on entend des cris : « Non, non, ne m’achevez pas, je vous en supplie, pas ainsi, de sang-froid. ») (Elle va voir, mais revient au bout d’un instant.)

J. H. - Mais qu’est-ce ? Dis-moi, qu’est-ce qui arrive ?


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Comment une mère peut-elle frapper ainsi un vieillard, (prudemment) ... même si c’est l’usage de la famille ? J. F. (simplement). - Ce n’est pas ma mère. J. H.- Mais qui alors ? Qui se permet ? J. F. - C’est l’assassin attaché à notre famille. (Réfléchissant)

Je me demande qui a été le chercher. Il est vrai qu’il a peut-être entendu. Grand-oncle fait vraiment trop de bruit parfois. J. H. - Un assassin attaché à la famille ! J. F. - C’est un pauvre homme qu’on a ramassé dans la rue ; il se trouvait sans emploi. Alors on lui a donné un emploi... surtout honorifique. Mais il aime son travail. On doit plutôt le retenir que le pousser. C’est étonnant, après tant de déceptions dans sa vie, il a gardé sa fraîcheur. Oui, il en est encore là. Ça l’intéresse toujours de tuer. J.H. - Mais... mais, c’est scandaleux ! Quelle journée ! Qu’est-ce que je n’entends pas aujourd’hui ? Jamais, dans ma famille, il n’y eut d’assassins attachés, (doucement) ... pas que je sache, non, pas que je sache du moins... J. F. - Ta famille ! Ton seul propos ; on dirait que tu l’as mise au monde, ta famille, que tu 1’as eue dans le ventre tout entière, ta famille, jusqu’à ton bisaïeul et sa barbiche. Tu es un petit homme. Sois modeste. Comme tu n’as pas eu la peau de ton ventre tendue par un enfant, tais-toi. J. H. - Une jeune fille parler de la sorte ! Et tu sais des choses... et tu dis des choses... J. F. - Comment veux-tu que je ne sache pas. Une renarde d’un an, d’un seul an, sait cela. Elle en sait plus que toi. Et pourtant elle est sans jactance. Elle ne dit pas : « C’est scandaleux. » Elle


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ëå³Ý»ù, ³Õ³ãáõÙ »Ù, á°ã ³Ûëå»ë, ³Ûëù³Ý ë³éݳëñïáñ»Ý) (ºñÇï³ë³ñ¹ ³ÕçÇÏÁ ·ÝáõÙ ¿ ï»ëÝ»Éáõ ¨ í»ñ³¹³éÝáõÙ ÙÇ í³ÛñÏÛ³ÝÇó) º.î. - ´³Ûó DZÝã ¿ ¹³: ²ë³° ÇÝÓ, DZÝã ¿ ϳï³ñíáõÙ: ÆÝãå»±ë ϳñáÕ ¿ Ù³Ûñ¹ ³Û¹å»ë Ë÷»É ÙÇ Í»ñáõÝáõ (³í»ÉÇ ½·áõß³íáñáõÃÛ³Ùµ) ... ³Ý·³Ù »Ã» ¹³ ÁݹáõÝí³Í ¿ Ó»ñ ÁÝï³ÝÇùáõÙ: º.². (å³ñ½ ïáÝáí) - سÛñë ãÇ: º.î. - àõñ»ÙÝ á±í: à±í ¿ Çñ»Ý ÃáõÛÉ ï³ÉÇë: º.² - Ø»ñ ÁÝï³ÝÇùÇÝ Ïóí³Í Ù³ñ¹³ëå³ÝÝ ¿: (Ùï³Í»Éáí) î»ëÝ»ëª áí ¿ ·Ý³ó»É Ýñ³Ý ϳÝã»É: Æëϳå»ë, ϳñáÕ ¿ ³ÕÙáõÏÝ ¿ Éë»É ¨ íñ³ ѳë»É: Ðáñ»Õµ³ÛñÁ Çëϳå»ë ã³÷Çó ¹áõñë ³ÕÙáõÏ ¿ µ³ñÓñ³óÝáõÙ »ñµ»ÙÝ: º.î. - ÀÝï³ÝÇùÇÝ Ïóí³Í Ù³ñ¹³ëå³±Ý: º.². - ²Ûá, ÙÇ »ñÇï³ë³ñ¹, áñÇÝ ÷áÕáóÇó »Ýù ·ï»É: ܳ ·áñͳ½áõñÏ ¿ñ: ¸» Ù»Ýù ¿É Ýñ³Ý ³ß˳ï³Ýù ïí»óÇÝù... å³ïí³µ»ñ ³ß˳ï³Ýù: ´³Ûó ݳ ëÇñáõÙ ¿ Çñ ³ß˳ï³ÝùÁ: ²í»ÉÇ ßáõï å»ïù ¿ ÉÇÝáõÙ Ýñ³Ý ½ëå»É, ù³Ý Ëñ³Ëáõë»É: î³ñûñÇÝ³Ï ¿, ³Û¹ù³Ý Ñdzëó÷áõÃÛáõÝÝ»ñÇó Ñ»ï᪠Çñ ÏÛ³ÝùáõÙ, ݳ ¿ÉÇ ãÇ Ïáñóñ»É óñÙáõÃÛáõÝÁ: ²Ûá, ¹»é¨ë ³Û¹ ٳϳñ¹³ÏÇÝ ¿: Üñ³ ѳٳñ ¹»é¨ë Ñ»ï³ùñùñ³Ï³Ý ¿ Ù³ñ¹ ëå³Ý»ÉÁ: º.î. - ´³Ûó... µ³Ûó... ¹³ ³ÝÃáõÛɳïñ»Éǯ ¿: ƯÝã ûñ ¿ñ: ÆÝ㻯ñ ³ë»ë ãÉë»óÇ Ù»Ï ûñí³ Ù»ç: ºñµ»ù ÇÙ ÁÝï³ÝÇùáõÙ Ïóí³Í Ù³ñ¹³ëå³ÝÝ»ñ ã»Ý »Õ»É, (Ù»ÕÙáñ»Ý) ѳٻݳÛÝ ¹»åë, á°ã ÇÙ ·ÇïáõÃÛ³Ùµ: à°ã ÇÙ ·ÇïáõÃÛ³Ùµ... º.². - øá ÁÝï³ÝǯùÁ: ¸³ ¿ ÙdzÛÝ µ»ñ³Ýǹ: γñ»ÉÇ ¿ ϳñÍ»É, áñ ¹áõ »ë ÍÝáõݹ ïí»É ùá ÁÝï³ÝÇùÇÝ, Ïñ»É »ë ùá ³ñ·³Ý¹áõÙ ùá ÁÝï³ÝǯùÁª ÙÇÝ㨠ݳ˳å³å¹ áõ Ýñ³ ó³Ýó³é ÙáñáõùÁ: ¸áõ ÙÇ ÷áùñÇÏ ïÕ³Ù³ñ¹ »ë: àõñ»ÙÝ ëáíáñÇ°ñ ѳٻëï ÉÇÝ»É:


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ne dit pas : « Dans ma famille... » (vivement)

Et d’ailleurs, tais-toi, tais-toi. Si tu n’es pas en âge de battre ton père, ne me parle plus. Tu ferais rire un mur avec ta famille, ta famille ! (Elle sort.)

J. H.

(à part). - Oh ! Je l’aime. Elle est terrible ! Comme elle est belle ! (décidé)

Je l’aime. Je me débarrasserai de mes liens... Avec une jeune fille pareille, la vie est une tout autre chose... Je battrai. Je battrai mon père dix fois, s’il le faut... même je battrai mon grand-père ! (scandalisé) Oh ! Qu’ai-je dit ? Qu’ai-je dit ? Pourvu qu’elle m’aime un peu, après. C’est une jeune fille merveilleuse, oh ! merveilleuse. Pauvre de qualités, parlerait-elle de la sorte. Mais je me demande que va penser ma famille. En attendant, je suis attaché : bien mauvais début. Allons, je crois qu’avec du courage, je pourrais me lever maintenant et aller battre mon père. Ces liens sont pourtant solides encore. (On entend des pas, des pas d’homme.)

Ah ! Si ce pouvait être lui. Il me délierait pour me mener en bas et (les pas se rapprochent) maintenant que j’ai du courage... Hélas ! Comme ses pas sont d’un homme vigoureux ! Avec quelle autorité il marche, mon père. Ah ! Quelle, quelle mauvaise, mauvaise conjoncture... Si j’étais sûr, au moins, qu’elle m’aimerait !... J’ai peur, j’ai peur ! Je sens que je vais être lâche. J. H.

(Un homme apparaît.) (tremblant, décomposé). - Oui, Père.

… Oui, Père.


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… Bien, Père. (En silence ils descendent les marches.)

SCENE II (Au rez-de-chaussée) (Passant en bas devant l’échoppe.)

J. F.

(sévère). - Qu’as-tu fait de tes résolutions ? - J’ai vu

ton père tout à l’heure et n’ai rien remarqué en lui qui pût faire supposer qu’il venait d’être battu. Peutêtre ne l’ai-je pas bien observé... J. H. - Je... J. F. - Tais-toi. Tu n’as pas le droit de parler. D’ailleurs, quand je songe que tu ne savais même pas mon nom. (Elle passe.) (Il la rappelle.)

J. H. - Dis-moi, et ton oncle ? J. F. - Mon oncle va bien. L’assassin de la famille est en congé jusqu’à la fin de la semaine. Pauvret, va. Tu ne t’intéresses qu’aux faibles. Je crois que je ferais mieux de ne plus t’adresser la parole : tu m’affaiblis... J. H. - Mais... J. F. - Assez ! Dommage que je ne puisse en ce moment t’envoyer notre assassin de famille. Il y aurait du travail pour lui dans ta maison, il me semble... Mais pourquoi irai-je m’occuper de tes intérêts ? Je suis bien bonne, vraiment. (Elle se dispose à partir.)

J. H. - Oh ! Je t’en prie, je t’en prie. Ne t’en va pas. Je veux ce que tu veux. Envoie-moi l’assassin de famille.


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J. F. - Pourquoi irai-je m’occuper de toi ? Je ne te connais pas. D’ailleurs, il est en congé. Depuis que tu me connais tu ne m’as même pas offert un cadeau. (Il se fouille, confus, et tire de sa poche une grosse bague, ornée d’une pierre précieuse, qu’il lui offre.)

J. F. - Ainsi ! Tu prétends que je mendie ! Hein, je suis une mendiante, dis-le donc... J. H. - Ne te fâche pas. Ne te fâche pas. Regarde, c’est une belle pierre. Je te donnerais d’ailleurs n’importe quoi, si tu le voulais. J. F. (tenant la pierre dans ses doigts). - Elle n’est pas insignifiante. Mais tu ne me l’offrais pas, tout à l’heure. J. H. - Je ne l’avais pas. Je viens de la prendre à père. J. F. (joyeuse). - Est-ce vrai ? Tu la lui as prise ? Prise de force, en lui tordant le poignet ? (Il baisse la tête et fait « non ».)

J. F. - Tu n’as donc aucune dignité ? J’avais cru que tu lui avais au moins tordu le poignet. J’avais cru. J’étais folle sans doute. Tiens, voici ta pierre. Elle est trouble. J. H. - Ne parle pas, ne sois pas contrariée. Je n’ai fait que la reprendre. Cette pierre était à moi. Elle m’avait été donnée. (A la J. F. qui s’éloigne). Je t’en prie, je t’en supplie, reste. Tu vois, je mets tout mon orgueil dans ma poche. Tu es tout pour moi. Tu me tues aussi par moments. Si tu savais... Mais tu ne veux pas voir. J. F. - Eh bien, il est vrai que je ne suis pas tellement pressée cet après-midi. Mais fais bien attention à ce que tu diras. C’est peut-être la dernière fois que je suis là à t’écouter.


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J. H. J. F. -

J. H. J. F. J. H. -

J. F. J. H. J. F. -

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Tu décourages l’attention, tu sais, la plupart du temps tu la décourages. Mais je vais donc encore t’écouter une fois... Eh bien, parle. Oui, oui, mais ne te fâche pas tout de suite, si je dis une chose qui te déplaise (long silence). Est-ce là parler ? Dis, à part te laisser attacher tous les jours, que saistu faire au juste ? Toi qui dois avoir sans doute près de dix-sept ans, tu sais bien faire quelque chose ? Même un cancrelat sait faire quelque chose, allons, dis la chose que tu sais faire. Dégourdis-toi. Encore il y a un an, j’allais avec mon père à la pêche au Dopu, sur le lac... Est-ce lui qui pêchait ? Moi, je pêchais, je plongeais cinq fois la hauteur d’un homme de bonne taille, et j’en ramenais des poissons sur le rivage, oh oui ! un tas comme ça, dans un linge, gros, et lourd. Lourd comme quoi ? Lourd, deux fois lourd comme toi, au moins (il rit). Ce poids t’est inconnu. - Sois plus réservé. Soulève-moi d’abord et puis tu parleras, et puis tu feras des comparaisons s’il y a lieu. Eh bien, approche. Tu n’as pas de bras non plus ? (Hésitant, presque défaillant, il la prend dans ses bras, et la soulève. Il est possédé d’une joie extrême, qui pourtant le tient comme paralysé d’abord.)

J. H. - Tu vas me délivrer ! Damidia, tu vas me délivrer. Je sens que tu vas me délivrer. Damidia, tu ne pèses qu’une plume, je prenais un ensemble de poissons qui pesait douze fois comme toi, petite plume, tu ne te rends pas compte, Damidia et ton air farouche et grave, tu pèses comme l’air, tu pèses comme la joie. Oh, j’ai tout de suite compris que... j’ai compris, (il lui baise les cheveux, il est joyeux.)


²ÜðÆ ØÆÞà ÞÕóݻñ

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J. F. - (Se trouvant dans ses bras, elle tourne la tête vers lui, gravement lui prend une oreille pour qu’il tourne sa tête vers elle.)

Est-ce que tu te réveillerais ? Ou sont-ce des gestes dans le sommeil ? Des lambeaux d’un tissu qui flotte au vent ? (Elle se dégage ensuite d’un mouvement nerveux. Il la regarde d’un air illuminé.) J. F. - (tout à coup comme s’il lui manquait quelque chose.)

Pèse-moi encore une fois, veux-tu. Je songe à quelque chose d’étrange. (Il la reprend et cette fois la serre fortement ; après quelques secondes, elle se rejette prestement à terre.)

J. F. - Il faut que je parte... Je suis restée trop longtemps. Et toi aussi, peut-être, tu auras de quoi réfléchir... A plus tard. J. H. - A bientôt. J’arracherai mes liens, je les arracherai. Je te le promets solennellement cette fois. (Il a un cri

J. H.

joyeux, et se libère violemment d’un de ses deux liens. La jeune fille se retire.) (se voyant seul retombe dans le découragement et reste attaché par un lien. Il se repose).

- Serait-elle fâchée ? Non. Elle va revenir comme elle est venue, légère et vive. Pourquoi n’a-t-elle pas attendu ? (Il essaie de rompre le lien qui reste.)

Oh ! C’est encore solide. L’autre pourtant, je l’ai arraché d’un coup. Peut-être était-il usé. J. F.

(Temps. La jeune fille repasse.) (lui parlant sans tourner la tête.) -Viens, Libéré,

qu’attends-tu pour sortir ? J. H. - Hélas, je dois te le dire. Il reste un lien que je ne suis pas arrivé à rompre. J. F. (à part). - Ah !……… (Etonnée, déçue)


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º.². - Æ٠ͳÝñáõÃÛáõÝÁ ù»½ ѳÛïÝÇ ãÇ: ²í»ÉÇ ½áõëå »ÕÇñ: Ü³Ë µ³ñÓñ³óñáõ ÇÝÓ, Ñ»ïá Ýáñ ÏËáë»ë, ¨ ѳٻٳïáõÃÛáõÝÝ»ñ ¿É ϳݻë, »Ã» ϳñáճݳë: ¸», Ùáï»óÇ°ñ, Ó»éù»ñ ãáõÝ»±ë: (ì³ñ³Ý»Éáí, ·ñ»Ã» ³Ý½áñ ݳ ³ÕçÏ³Ý Ó»éù»ñÇ Ù»ç ¿ ³éÝáõÙ ¨ µ³ñÓñ³óÝáõÙ: ²Ýë³ÑÙ³Ý ÙÇ ËݹáõÃÛáõÝ ¿ Ýñ³Ý ѳٳÏáõÙ, áñ ë³Ï³ÛÝ ëϽµáõÙ Ýñ³Ý ·³ÙáõÙ ¿ ï»ÕáõÙ) º.î. - ¸áõ ³½³ï³·ñ»Éáõ »ë ÇÝÓ, ¸³ÙÇ°¹Ç³: ¸³ÙÇ°¹Ç³, ¹áõ ³½³ï³·ñ»Éáõ »ë ÇÝÓ: ¼·áõÙ »Ù, áñ ³½³ï³·ñ»Éáõ »ë ÇÝÓ: ¸³ÙÇ°¹Ç³, ¹áõ ÝáõÛÝù³Ý ͳÝñ »ë, áñù³Ý ÷»ïáõñ, »ë ÓÏÝ»ñÇ ÙÇ ËáõñÓ ¿Ç í»ñóÝáõÙ, áñ ï³ëÝ»ñÏáõ ³Ý·³Ù ùá ͳÝñáõÃÛáõÝÝ áõÝ»ñ, ¸³ÙÇ°¹Ç³, ÷áùñÇ°Ï ÷»ïáõñ: ¸áõ ù»½ ѳßÇí ã»ë ï³ÉÇë, ¸³ÙÇ°¹Ç³, ùá í³ÛñÇ ¨ ã³÷³½³Ýó ËÇëï ï»ëùáí, ¹áõ ÝáõÛù³Ý ͳÝñ »ë, áñù³Ý û¹Á, áñù³Ý ËݹáõÃÛáõÝÁ: ²¯Ë, »ë Ùdzݷ³ÙÇó ѳëϳó³, »ë ѳëϳó³, áñ... »ë ѳëϳó³ (ݳ ѳٵáõñáõÙ ¿ ³Õçϳ Ù³½»ñÁ. áõñ³Ë ¿) º.². (îÕ³ÛÇ Ó»éù»ñáõÙª ³ÕçÇÏÁ ßñçáõÙ ¿ ·ÉáõËÁ Ýñ³ ÏáÕÙÁ, ¨ Éáõñç ï»ëùáí ù³ßáõÙ ³Ï³ÝçÇó, áñå»ë½Ç ïÕ³Ý ·ÉáõËÁ Çñ ÏáÕÙÁ ßñçÇ) º.². - γñÃݳݳÛDZñ, í»ñç³å»ë: » ëñ³Ýù ¿É ß³ñÅáõÙÝ»ñ »Ý ùÝÇ Ù»ç: ø³ÙáõÝ ÷é÷é³óáÕ ·áñÍí³ÍùÇ Íí»ÝÝ»ñ: (Ñ»ïá ݳ ÝÛ³ñ¹³ÛÇÝ ß³ñÅáõÙáí ³½³ïíáõÙ ¿ ïÕ³ÛÇ ·ñÏÇó: ïÕ³Ý, ϳñÍ»ë å³Ûͳé³óÙ³Ý Ù»ç, ݳÛáõÙ ¿ Ýñ³Ý) º.². - (³Ýëå³ë»ÉÇáñ»Ý, ϳñÍ»ë ÇÝã-áñ µ³Ý ¿ å³Ï³ëáõÙ) - ØÇ ³Ý·³Ù ¿É ÇÝÓ ÏßéÇñ, áõ½áõ±Ù »ë: ºë ³Ýëáíáñ ÙÇ µ³Ý »Ù Ùï³Í»É: (ºñÇï³ë³ñ¹Á ÝáñÇó ·ñÏáõÙ ¿ ³ÕçÏ³Ý ¨ ³Ûë ³Ý·³Ù ³Ùáõñ ë»ÕÙáõÙ, ÙÇ ù³ÝÇ í³ÛñÏÛ³ÝÇó ݳ ׳ñåÏáñ»Ý ó³ïÏáõÙ ¿ ·»ïÝÇÝ) º.². - ºë åÇïÇ ·Ý³Ù... Þ³ï »ñϳñ ÙݳóÇ: ¸áõ ¿É ·áõó» Ùï³Í»Éáõ µ³Ý Ïáõݻݳë... ²é³ÛÅÙ:


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Et pourtant l’autre a été rompu si aisément. (Réfléchissant.) Peut-être était-il usé. (Haut)

Est-ce là toute ta force ? Est-ce là tout ton désir de sortir avec moi ? Faudra-t-il aussi que je te demande de m’accompagner ? (Elle s’éloigne.) (Long silence.) VOIX (venant de l’étage). - Tu te libères, mon fils. (Lent, avec reproches)

Est-ce aussi toi qui m’as envoyé un assassin ? Tu te libères, mon fils. Est-ce aussi toi qui m’envoies un assassin ? Tu te libères, mon fils. Est-ce aussi toi qui... J. H. - C’en est trop. Je ne peux plus supporter d’entendre cette voix. Elle me rend fou. (Furieux, il rompt le lien, se détache et s’enfuit. Long silence. D’un air satisfait, revenu sur le pas de la porte, le jeune homme, les mains libres, mange une orange. La jeune fille le regarde avec humeur.)

J. H. - Tu sais, cette fois, je l’ai battu. Oui, battu et mes liens sont rompus. J. F. - Ah ! Tout de même ! J. H. - Est-ce tout ce que tu dis ? Et pourtant il m’en coûtait, tu peux le croire ; si ce n’avait été pour toi... J. F. - As-tu songé à lui tenir quelques instants la tête sous l’eau ? Non ? Alors, ce n’est pas complet. J. H. - Oh si ! C’est suffisant. Je n’aurais jamais cru. Il était complètement retourné. Il s’accusait. Je n’ai pas écouté. Il était ému, ça se comprend. (Il rit en mangeant une orange.)

Mais qu’as-tu ? Tu boudes ? Tu es fâchée.


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Comprends-moi, le pauvre homme, après toutes ces vilaines émotions, je ne pouvais pas le jeter à l’eau. Dans le fond, il est timide, il est comme moi. Mais dis, il y a autre chose. Qu’y a-t-il ? Parle, parle. J. F. (absolument scandalisée). - Est-ce ainsi que tu manges une orange ! Tu n’as donc aucune délicatesse ? LE PERE (qui les observe) : Déjà repris ! Pauvre petit ! C’est étrange. Il est mon fils et je ne le hais pas. Même, je ressens de l’affection pour lui. Oh ! Il faut que je dissimule ces sentiments à cause du ridicule. Je me demande parfois si nos usages ne sont pas insensés. D’autres feraient aussi bien l’affaire, peut-être. Il suffirait d’essayer. Qu’est-ce que j’ai ? Ce sont de folles pensées. Il faut de la discipline. (Un temps.)

Il aurait pu me pousser la tête sous l’eau... Il ne l’a pas fait. Il est fort. Seule la confiance lui manque. Il me semble qu’il était ému, lui aussi. Un timide, en somme ; comme moi. Je tâcherai de m’occuper de lui, sans en avoir l’air. (Distraitement, rêveusement aussi, il tient dans ses mains un habit vert.)

VOISIN. - Ah ! Ah ! Enfin ! La main sur la tenue verte ! Tu as donc été battu par ton fils. L’ignorance où tu le laissais des usages devait avoir une fin. Hum ! Hum ! La main sur la tenue verte. Mais mal décidé encore... Je vois... (Silence du Père.)

VOISIN (distrait). - Allons, ne sois pas chagrin.


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Tu as battu ton fils longtemps, tu battais ton père jusqu’à la fin ; que veux-tu de plus ? PERE (à part). - Il ne comprend pas. Il ne peut comprendre. Un homme comme tout le monde. VOISIN. - Il en est de plus à plaindre. Va, tu as encore un oncle à battre. Ah ! Bien sûr, ce n’est pas comme un fils, jeune, plein de fraîcheur et d’élan. Mais il faut se faire une raison. PERE. (haut, mais distrait et comme se parlant aussi à luimême.)

- Oui, c’est vrai. J’ai tort de songer. Il serait fou de vouloir changer les mœurs. VOISIN. - Rester en suspens est mauvais. Endosse la tenue verte. D’autres pensées sont sûrement malsaines. Allons. Adieu. PERE. (resté seul, il voit passer, non enlacés, mais appuyés, épaule contre épaule, doucement tournés l’un vers l’autre, les mains unies, son fils et la jeune fille. A part.)

- Il faut que je me tienne à l’écart. Mais je suis content. Je crois qu’il sera heureux. Nette, belle et farouche comme elle est, comment at-elle pu se laisser émouvoir par un jeune homme si timide ? Mystère ! Les dernières duretés de la jeune fille déjà ne sont plus. Bientôt elle ne les comprendra plus elle-même. En quelques jours, en un jour, ils entrent dans un autre âge. (Il jette la veste verte sur ses épaules) ... et moi... On ne la reconnaît pas, cette petite Damidia ; ses yeux, comme ils ont changé. Même ma femme ne les avait pas si clairs. Et mon fils, comme il a changé aussi.


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Ýñ³Ý: ÜáõÛÝÇëÏ ùÝùß³Ýù »Ù ½·áõÙ: ²¯Ñ, åÇïÇ Ã³ùóݻ٠³Û¹ ½·³óÙáõÝùÝ»ñÁ, áñ ÍÇͳջÉÇ ã¹³éݳÙ: ºñµ»ÙÝ Ñ³ñó »Ù ï³ÉÇë ÇÝùë ÇÝÓª ³ñ¹Ûá±ù Ù»ñ ëáíáñáõÛÃÝ»ñÁ ³Ýѻûà ã»Ý: ²ÛÉ ëáíáñáõÛÃÝ»ñÇ ¹»åùáõÙ ·áõó»¨ ·áñÍÁ ·ÉáõË ·³ñ ÝáõÛÝ Ñ³çáÕáõÃÛ³Ùµ: ´³í³Ï³Ý ¿ñ ÷áñÓ»±É: ´³Ûó DZÝã ¿ ÇÝÓ Ñ»ï ϳï³ñíáõÙ: Ê»Ýà Ùïù»ñ »Ý ¹ñ³Ýù: γñ·³å³ÑáõÃÛáõÝ ¿ ѳñϳíáñ: (áñáß ¹³¹³ñÇó Ñ»ïá) ܳ ϳñáÕ ¿ñ ·ÉáõËë ÙïóÝ»É çñÇ ï³Ï...â³ñ»ó: ܳ áõÅ»Õ ¿: ØdzÛÝ íëï³ÑáõÃÛáõÝÝ ¿ Ýñ³Ý å³Ï³ëáõÙ: ÆÝÓ ÃíáõÙ ¿, áñ ݳ ¿É ¿ñ Ñáõ½í³Í: ºñÏãáï ¿, ÙÇ Ëáëùáí, ÇÝÓ ¿ ÝÙ³Ý: ºë Ï÷áñÓ»Ù Ñá· ï³Ý»É Ýñ³ Ù³ëÇݪ ³ñï³ùáõëï áãÇÝã óáõÛó ãï³Éáí: (óñí³Í, Ùïù»ñÇ Ù»ç, ݳ Ó»éùÇÝ Ï³Ý³ã ÙÇ Ñ³·áõëï ¿ å³ÑáõÙ) вðºì²Ü - ²¯Ñ, í»ñç³å»¯ë: Ò»éùÁ ϳݳã ѳݹ»ñÓÇÝ ¹ñ³¯Í: àõñ»ÙÝ ïÕ³¹ ù»½ ͻͻ±ó: ÀݹáõÝí³Í ϳñ·»ñÇ ³Ý·ÇïáõÃÛáõÝÁ, áñÇ Ù»ç å³ÑáõÙ ¿Çñ Ýñ³Ý, í»ñç³ó³±í: ÐÁ¯ÙÙ: Ò»éùÁª ϳݳã ѳݹ»ñÓÇÝ: ´³Ûó ¹»é í×Çé ãÇ Ï³Û³óñ»É, ï»ëÝáõÙ »Ù... (Ñáñ ÉéáõÃÛáõÝÁ) вðºì²Ü (óñí³Í) - ¸», ÙÇ° íßï³óÇñ: ¸áõ »ñϳñ »ë Í»Í»É ïÕ³Ûǹ: Ðáñ¹ ͻͻóÇñ ÙÇÝ㨠í»ñç: ƱÝã »ë áõ½áõÙ ¹ñ³ÝÇó ³í»É: вÚðÀ (Ù»ÏáõëÇ) - ܳ ãÇ Ñ³ëϳÝáõÙ: âÇ Ï³ñáÕ Ñ³ëϳݳÉ: êáíáñ³Ï³Ý Ù³ñ¹ ¿: вðºì²Ü - ²í»ÉÇ ËÕ׳ÉÇ ¹»åù»ñ ¿É »Ý ÉÇÝáõÙ: ƱÝã »ë Ùé³ÛÉí»É. ͻͻÉáõ ѳٳñ ¹»é Ñáñ»Õµ³Ûñ ϳ: ¸» ÇѳñÏ», ¹³ ÝáõÛÝÁ ãÇ Ã» áñ¹Çݪ »ñÇï³ë³ñ¹, óñÙ, ³íÛáõÝáí ÉÇ: ´³Ûó å»ïù ¿ ѳßïí»É:


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Je m’occuperai d’eux plus tard. Allons, il faut que je me retire. L’émotion dans ce cas est ridicule. (RIDEAU)


²ÜðÆ ØÆÞà ÞÕóݻñ

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вÚðÀ (µ³ñÓñ³Ó³ÛÝ, µ³Ûó óñí³Í ¨ ϳñÍ»ë Ëáë»Éáí ÇÝùÝ Çñ Ñ»ï) - ²Ûá, ×Çßï ¿, Ùï³Í»ÉÝ ³ÝÇÙ³ëï ¿: Ê»ÝÃáõÃÛáõÝ ÏÉÇÝ»ñª ó³ÝÏ³Ý³É ÷áË»É µ³ñù»ñÁ: вðºì²Ü - ¸³¹³ñÇ íÇ׳ÏáõÙ ÙݳÉÁ ɳí ã¿: г·Çñ ϳݳã ѳݹ»ñÓ¹: ´áÉáñ ÙÛáõë Ùïù»ñÁ ³Ý³éáÕç »Ý Ñ³ëï³ï: ¸», ÙÝ³ë µ³ñáí: вÚðÀ (ØdzÛÝ³Ï ÙݳÉáíª Ñ»ï¨áõÙ ¿ª ÇÝãå»ë »Ý ³ÝóÝáõÙ ³ÕçÇÏÝ áõ ïÕ³Ý: Ýñ³Ýù ·ñϳ˳éÝí³Í ã»Ý, µ³Ûó Ñ»Ýí³Í »Ý Çñ³ñ, áõë-áõëÇ, ѳ½Çí Ýϳï»ÉÇ ßñçí³Í Ù»ÏÁ ÙÛáõëÇ ÏáÕÙÁ, Çñ³ñ Ó»éù µéݳÍ: Ù»ÏáõëÇ) - ä»ïù ¿ Ñ»éáõ ÙݳÙ: ´³Ûó ·áÑ »Ù: γñÍáõÙ »Ùª »ñç³ÝÇÏ ÏÉÇÝÇ: ÎïñáõÏ, ·»Õ»óÇÏ ¨ ³Û¹ù³Ý í³ÛñÇ... ÇÝãå»±ë ¿ ÝÙ³Ý ³ÕçÏ³Ý Ï³ñáÕ³ó»É Ñáõ½»É ³Û¹ù³Ý »ñÏãáï ïÕ³Ý: ²é»ÕÍí³¯Í: ºñÇï³ë³ñ¹ ³Õçϳ í»ñçÇÝ ËëïáõÃÛáõÝÝ»ñÝ ³ñ¹»Ý ï»ÕÇ »Ý ï³ÉÇë: Þáõïáí ÝáõÛÝÇëÏ Çñ»Ý ÏÃí³Ý ûï³ñ: ØÇ ù³ÝÇ ûñáõÙ, ÙÇ ûñáõÙ Ýñ³Ýù ÙïÝáõÙ »Ý Ýáñ ¹³ñ: (ϳݳ㠵³×ÏáÝÁ ·óáõÙ ¿ áõë»ñÇÝ)... ¨ »ë... ²Ý׳ݳã»ÉÇ ¿ ³Û¹ ÷áùñÇÏ ¸³ÙǹdzÝ, ³ÛÝù³¯Ý ÷áËí»É »Ý Ýñ³ ³ãù»ñÁ: ÜáõÛÝÇëÏ ÏÝáçë ³ãù»ñÝ ³Ûëù³Ý å³Ûͳé ã¿ÇÝ: ºë ³í»ÉÇ áõß Ýñ³Ýóáí Ͻµ³Õí»Ù: ¸», å»ïù ¿ Ñ»é³Ý³Ù: Ðáõ½ÙáõÝùÝ ³Ûë ¹»åùáõÙ ÍÇͳջÉÇ ¿: (ì²ð²¶àôÚð)




HENRI MICHAUX Le drame des constructeurs

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SCENE I

Cet acte se passe à la promenade des constructeurs, dans les allées du jardin entourant l’asile. Ils parlent en partie pour eux-mêmes, en partie pour l’Univers. Leur apparence extérieure : adultes, penseurs, persécutés. On voit les gardiens dans le lointain. Chaque fois qu’ils approchent, les constructeurs se dispersent.

A. (orgueilleusement). - Souvent, jouant aux dés, tout à coup, je me dis : « Avec ce dé, je ferais une ville » et je ne termine pas la partie, tant que je n’ai pas construit une ville. Et pourtant, c’est bien difficile... et quand il faut loger des Anglais dans un dé, avec le square qu’ils veulent à tout prix et leur terrain de golf, eh bien, celui qui dit que c’est facile, qu’il le fasse. Et que ne l’a-t-il déjà fait ? Ce n’est pas les dés qui manquent, je suppose. B. (avec bonté). - Ecoutez-moi. Faites-vous d’abord la main sur des puces. Non seulement petite, délicate, mais par-dessus tout, sauteuse, la puce. (S’adressant à tous.) Avouez-le, voyons. Ne faites pas la mauvaise tête, vous savez bien tous qu’une puce vit de sauts. A. (véhément). - Vous avez logé des Anglais dans une puce ? (Coupant). On peut les voir ? Et intacts, hein ? B. - Intacts... pourquoi pas ? Ils ne sont pas plus fragiles que d’autres ; tenez, Manchester, c’est pourri d’Anglais... C. (avec douceur, rêvant). - Moi, je construisis une ville où on pouvait... où on aurait pu espérer vivre tranquille... et pourtant !... Enfin, je la construisis..., avec des rues tellement étroites que même un chat n’y pouvait passer que difficilement... Les voleurs n’essayaient même pas de s’échapper. D’avance, ils étaient pris, c’était fatal. Ils


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E

C.

B. C.

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restaient là, figés, avec le regard de l’angoisse... (en passant). - ... Vous avez dû avoir des ennuis, hein, avec votre ville. (Il s’est arrêté un instant pour écouter.) Oh ! Elles sont mauvaises... (Il repart.) (poursuivant son rêve). - Dans mes théâtres, pas de public. Au balcon, j’asseyais des télescopes. Ils restaient là, pendant des heures, aux écoutes... furetant le drame..., et les petites lunettes aux galeries, penchées les unes sur les autres avec sympathie... et regardant... regardant... (réfléchissant). - Oui, un télescope, on doit pouvoir compter là-dessus. (vivement). - Oh ! Les petites lunettes aussi... (Puis, de nouveau, lentement et rêveur.)

… Mes maisons exténuées, les soirs de septembre, qui s’affaissaient tout à coup, ouvrant leurs portes et fenêtres, tandis que leur cheminée s’allongeait, émanant comme un pistil... comme un clocher... … Et ma ville d’icebergs ! Des icebergs à garde-fou et plantés où le dernier des morses a son champ, et le laboure lui-même, avec la masse de son corps pour tracer le sillon... Les baleines pochées, qui échouent au petit matin dans les rues, obstruant tout, répandant une odeur de... A. (furieux). - Des baleines ! Des baleines ! Je n’en veux pas. On est déjà assez à l’étroit. Il n’a qu’à s’occuper à du plus petit. Je travaille dans les dés, je me force, je me rends myope et voilà qu’on veut nous amener des baleines. Il n’a qu’à les réduire. Qu’il en fasse des têtards ! (D’une voix terrible.) Des têtards ! B. (à C., conciliant). - C’est juste, tu comprends, on est trop surveillé ici. On est enlevé pour un rien. Tu partirais. Et puis tu nous vois restant avec des baleines. Nous ne les connaissons pas. Ça profite d’un rien d’eau ces bêtes-là, pour bousculer, culbuter, épouvanter. Ce ne serait pas pittoresque, hein, grand frère, grand constructeur. (Paternel, après une


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courte réflexion.) - Tu pourrais peut-être faire de fausses

baleines, et quand arrivent les espions, tu les piques, tes baleines, et elles leur pètent au nez. Si lui t’embête (désignant A.), même chose... pètent au nez. Baleine ? Pas vu ! Pas de baleine ! (Riant). Elle a plongé, la baleine ! (On voit approcher les gardiens.) (A., B. et C. font pst... pst... Ils se taisent, font quelques pas vers l’extrémité de la scène.) D. (qui est resté assis, larmoyant). - Fainéants ! Fainéants !

Usurpateurs ! (Sanglotant). Moi qui ai tellement construit dans mon œil que je vais bientôt perdre la vue ! (Silence.) … Il ne faudrait pas, qu’après avoir souffert ce que j’ai souffert, on vienne encore m’enlever mon bien.

SCENE II PERSONNAGES : F., G., B., D.

F. (assis, réfléchissant profondément, scandant les mots). - Une ville... le plus benêt peut construire une ville. Moi, je veux construire « courir », et puisque ça court... toujours... courir, quoi ! Et ne serait-ce que courir vingt-cinq ans d’affilée, ce n’est pas commode. Cela conduit à un épuisement certain. Mais je vais stabiliser tout ça. Courir, vous verrez comme ça deviendra facile et... enchaîné. G. - Il y a erreur, je ne fais pas de ville. Je suis le constructeur de l’obus pour aller à la lune. Et non seulement il y alla, mais il la traversa de part en part. Ce n’est rien, ça ? DIEU LE PERE. - Non, courir vingt ans de suite, nous ne voulons pas de ça. Ce n’est pas bon pour l’homme, il fait assez d’excès sans cela. B. (s’adressant à Dieu le Père). - Vous n’auriez pas dû permettre non plus qu’un obus atteignît la lune. DIEU LE PERE - La lune n’a rien senti, mon ami, je la tenais. D. (accourt, affolé, en pleurant). - Dieu le Père, je vous en


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supplie, enlevez-moi la ville qu’ils m’ont mise dans le ventre ! Dieu le Père, je vous en supplie ! (Mais les gardiens arrivent. Les constructeurs se dispersent pour se regrouper dès que les gardiens s’en vont.)

SCENE III PERSONNAGES : DIEU LE PÈRE ET H.

H. (avec suffisance). - Mon ami, Œil de Cade, construisit une mouche de la taille d’un cheval. Avec cette monture il pouvait aller loin. Bien ! Mais qu’est-ce qu’une mouche-cheval comparée aux cent mille choses que j’ai construites, qui peuplent l’univers et en bien des endroits le constituent uniquement. DIEU LE PERE . - Qu’on aille me chercher Œil de Cade. Il y a assez longtemps qu’il empeste ma création. H. - Oh, il n’avait pas tellement de talent. DIEU LE PERE. - Suffit ! Je vous ai reconnu. Il n’y a pas deux barbes comme ça sur le Globe. Un exemple tout de suite ! Qu’on prépare la marmite de l’enfer ! Allons ! Mais comment diable avez-vous pu gaspiller ainsi des mouches ? N’avez-vous donc pas senti des remords en voyant tous ces chevaux affolés ? Des chevaux que, moi, j’étais ensuite obligé de nourrir et d’instruire ? Car ils ne savaient rien, incapables même de poser leurs sabots convenablement. Et qui devait leur fournir des juments ? Moi, toujours moi. Qui me donnera un instant de repos ? (Les gardes apparaissent. Les constructeurs se dispersent.)

SCENE IV D. (revenu sur scène ; se laissant aller à un souvenir heureux). - Autrefois, je bâtissais sur Jupiter... un sol excel-


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lent ; un sous-sol parfait, mais les femmes n’arrivent pas à se plaire à l’étranger. La mienne... vous saisissez, mais cela va prendre fin. J’ai retrouvé un peu de poudre HDZ. (Il roule du sable dans sa main.) Avec ça on part tout seul. (Désignant les gardiens.) Ils auront beau regarder, pft... adieu. (S’adressant aux autres.) Venez sur Jupiter, venez, il y a du travail pour tous. On partira cet après-midi. (Quelques-uns répètent avec égarement : On partira cet après-midi ! On partira cet après-midi ! Les gardes approchent et les constructeurs se dispersent.) F. (reste seul assis, pensant gravement en regardant les gardes, comme s’il allait les envoûter, et, hochant la tête d’un air de conviction définitive). - Il n’y a pas d’erreur,

ce qu’il faut, c’est les changer en statues... tout simplement.

SCENE V C. se lève brusquement, exécute une série de passes pour hypnotiser les gardiens qui ont le dos tourné et prend les constructeurs à témoin.

C. - Là ! Là ! Ce sera bientôt fini, là, bien lisses... bien durs... (Brusquement les gardiens se déplacent.) Les malins ! Juste à temps ! B. (riant). - Et si on les changeait en cheminées, pfi... pfi, en cheminées de locomotives, pfi pfi... pfi pfi pfi... pfi pfi pfi pfi pfi pfi pfi (imitant le bruit d’un train qui s’éloigne et faisant de la main le geste des adieux).

Adios ! Adios ! D. (doucement à B.). - Laisse-les, c’est moi qui veux partir. A. (qui jusqu’ici marchait nerveusement de long en large, se campant au milieu d’eux).

Ne vous inquiétez plus. Mes Tartares sont là, de l’autre


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׳Ý×-ÓÇݪ ³ÛÝ Ñ³ñÛáõñ-ѳ½³ñ³íáñ µ³Ý»ñÇ ¹ÇÙ³ó, áñ »ë »Ù ϳéáõó»É, áñáÝù ÉóÝáõÙ »Ý îÇ»½»ñùÁ, ÇëÏ áñáß ¹»åù»ñáõÙª áõÕÕ³ÏÇ ÑÇÙùÝ »Ý Ýñ³: вÚð ²êîì²Ì - ¶Ý³ó»°ù ¨ ÇÝÓ Ùáï µ»ñ»ù ¶ÇÑÇ ²ãùÇÝ: ì³Õáõó ³ñ¹»Ý ݳ ³å³Ï³ÝáõÙ ¿ ÇÙ ³ñ³ñã³·áñÍáõÃÛáõÝÁ: Ð. - ¸» ݳ ³é³ÝÓݳå»ë ï³Õ³Ý¹ ãáõÝ»ñ: вÚð ²êîì²Ì - ´³í³Ï³°Ý ¿: ºë ׳ݳã»óÇ Ó»½: ØáÉáñ³ÏÇ íñ³ ÝÙ³Ý »ñÏñáñ¹ Ùáñáõù ã»ë ·ïÝÇ: ¸», Ùdzݷ³ÙÇó ÙÇ ûñÇݳÏ: ä³ïñ³ëï»ó»°ù ¹ÅáËùÇ Ï³Ãë³Ý: ²ñ³°·: ´³Ûó ³Ëñ, ë³ï³Ý³Ý ï³ÝÇ, ÇÝãå»±ë »ù ѳçáÕ³óñ»É ³Û¹å»ë ÷ã³óÝ»É ×³Ý×»ñÁ: ºí áã ÙÇ ËÕ×Ç Ë³±ÛÃ, »ñµ ï»ë³ù µáÉáñ ³Û¹ ÓÇ»ñÇݪ Ëáõ׳å³Ñ³ñ: ÒÇ»ñ, áñáÝó Ñ»ïá »ë ëïÇåí³Í ¿Ç Ï»ñ³Ïñ»É ¨ ¹³ëïdzñ³Ï»É: àñáíÑ»ï¨ áãÇÝã ã·Çï»ÇÝ, ³ÝÁݹáõÝ³Ï ÙÇÝã¨ÇëÏ ëÙµ³ÏÝ»ñÁ Ù»ÏÁ ÙÛáõëÇ Ñ»ï¨Çó ¹Ý»É: ºí á±í ¿ñ Ýñ³Ýó ѳٳñ ½³ÙµÇÏ ×³ñ»Éáõ: º°ë, ¿ÉÇ »°ë: ì»ñç³å»ë ѳݷÇëï Ïï³±ù ÇÝÓ ÙÇ í³ÛñÏÛ³Ý, û áã: (ѳÛïÝíáõÙ »Ý í»ñ³Ï³óáõÝ»ñÁ, ϳéáõóáÕÝ»ñÁ óñíáõÙ »Ý)

îºê²ð²Ü IV ¸. (í»ñ³¹³ñÓ»É ¿ µ»Ù, ïñí³Í ѳ׻ÉÇ ÙÇ í»ñÑáõßÇ) - ØÇ Å³Ù³Ý³Ï »ë ϳéáõóáõÙ ¿Ç ÚáõåÇï»ñÇ íñ³, Ññ³ß³ÉÇ Ñ³ï³Ï, ϳï³ñÛ³É ÝÏáõÕ, µ³Ûó ϳݳÛù ã»Ý ϳñáÕ³ÝáõÙ Çñ»Ýó É³í ½·³É ûï³ñ »ñÏñáõÙ... Æ°Ù ÏÇÝÁ... ѳëϳó³ù, ÇѳñÏ», µ³Ûó ßáõïáí ë³ Ï³í³ñïíÇ: ºë ÙÇ ùÇã ÷áßÇ »Ù ·ï»É (ݳ ³÷Ç Ù»ç ³í³½ ¿ ïñáñáõÙ) êñ³Ýáí ϳñáÕ »ë ׳Ù÷³ ÁÝÏÝ»É ÉñÇí ٻݳÏ: ÂáÕ Ý³Û»Ý, ÇÝãù³Ý Ïáõ½»Ý, ãÁ°ñà ¨ Ùݳù µ³ñáí: (¹ÇÙ»Éáí ÙÛáõëÝ»ñÇÝ) ºÏ»°ù ÚáõåÇï»ñÇ íñ³, ¹» »Ï»°ù, µáÉáñÇ Ñ³Ù³ñ ¿É ³ß˳ï³Ýù ϳ: Ø»Ýù ÏÙ»ÏÝ»Ýù ³Ûëûñ Ï»ëûñÇÝ: (ØÇ ù³ÝÇëÁ ÏñÏÝáõÙ »Ý ÙáÉáñáõÃÛ³Ý Ù»ç. §ÎÙ»ÏÝ»Ýù


HENRI MICHAUX Le drame des constructeurs

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côté. A deux heures tapant, cet après-midi, je vous le promets. A deux heures tapant... (Gesticulant comme pour indiquer qu’ils vont détruire tout, il s’en va brusquement). Exterminés, nos petits mouchards ! DIEU LE PERE (s’énervant aussi et se tournant vers les gardiens). Pêcheurs enracinés dans votre mauvaise conduite à mon égard, vous l’aurez voulu. (S’adressant aux constructeurs.) Je vous les livre. (Il s’en va, d’un air de juge.)

SCENE VI C. (regardant au loin.) - Tous ceux que j’ai changés en plaines ! Voyez cette étendue. Tout ça c’était des gardiens, autrefois. Cet arbre-là c’était un gardien. Un vieux malin. Je l’ai saisi pendant qu’il dormait. Je n’ai eu qu’à le relever... Ça consomme des gardiens, allez, un horizon comme cela. Je vais faire encore quelques collines par là (désignant un point éloigné de l’horizon) avec ceux qui restent. Cet après-midi... je vous montrerai mon pays dans le détail. Un pays uniquement construit avec des gardiens !

SCENE VII A. (revenant en scène, l’air mauvais, balançant la tête de gauche à droite aborde E. lui prenant une oreille puis l’autre, les examinant rapidement). - Bien ! Donne-m’en

une. Celle-ci ou celle-là, comme tu veux. Je te la rendrai. Je rendrai l’ouïe à tous les sourds, (E. s’enfuit en criant. Prenant l’oreille de C.). Viens, toi. Donne voir. Donne. Je te la rends tout de suite, et aménagée royalement. Je construirai une ville dans ton oreille. Une


²ÜðÆ ØÆÞà γéáõóáÕÝ»ñÇ ¹ñ³Ù³Ý

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³Ûëûñ Ï»ëûñÇÝ: ÎÙ»ÏÝ»Ýù ³Ûëûñ Ï»ëûñÇݦ: ì»ñ³Ï³óáõÝ»ñÁ Ùáï»ÝáõÙ »Ý, ¨ ϳéáõóáÕÝ»ñÁ óñíáõÙ »Ý) ¾. (ØÝáõÙ ¿ ÙdzÛݳÏ, Ùïù»ñÇ Ù»ç Ëáñ³ëáõ½í³Í. ݳۻÉáí å³Ñ³ÏÝ»ñÇÝ, ϳñÍ»ë å³ïñ³ëïí»Éáí Ýñ³Ýó ϳ˳ñ¹»É, ·ÉáõËÁ ï³ñáõµ»ñáõÙ ¿ª í»ñçݳϳݳå»ë ѳÙá½í³Í ï»ëùáí) - àã ÙÇ Ï³ëÏ³Í ÉÇÝ»É ãÇ Ï³ñáÕ. Áݹ³Ù»ÝÁ å»ïù ¿ Ýñ³Ýó ³ñÓ³Ý ¹³ñÓÝ»É:

îºê²ð²Ü V ¶. (Àݹáëï áïùÇ ¿ ϳݷÝáõÙ ¨ ëÏëáõÙ Ùdzɳñ ß³ñÅáõÙÝ»ñ, áñ Ïáãí³Í »Ý ÑÇåÝáë³óÝ»É í»ñ³Ï³óáõÝ»ñÇÝ. ¹ÇÙ»Éáí ϳéáõóáÕÝ»ñÇݪ áñå»ë íϳݻñÇ) - ²ÛÝï»°Õ: ²ÛÝï»°Õ: Þáõïáí ϳí³ñïíÇ, ³ÛÝï»°Õ, ɳí ѳñÃ, É³í ³Ùáõñ: (³Ýëå³ë»ÉÇáñ»Ý í»ñ³Ï³óáõÝ»ñÁ ÷áËáõÙ »Ý ï»ÕÁ) Êáñ³Ù³ÝÏÝ»¯ñ: ÖÇßï ųٳݳÏÇÝ: ´. (ÍÇͳջÉáí) - ÆëÏ »Ã» Ýñ³Ýó ÍËÝ»Éáõ±Û½ ¹³ñÓÝ»Ýù, ãÁ°ù, ãÁ°ù-ãÁù, ·Ý³óùÇ ÍËÝ»ÉáõÛ½...ãÁù-ãÁù... ãÁù-ãÁùãÁù... ãÁù-ãÁù ãÁù-ãÁù ãÁù-ãÁù ãÁù... (ÝٳݳϻÉáí Ñ»é³óáÕ ·Ý³óùÇ Ó³ÛÝÁ ¨ Ó»éùáí Ññ³Å»ßïÇ ß³ñÅáõÙ ³Ý»Éáí) Adios! Adios! ¸. (Ù»ÕÙáñ»Ýª ´.-ÇÝ) - Âá°Õ Ýñ³Ýó, »°ë ÏÙ»ÏÝ»Ù: ². (áñÁ ÙÇÝã ³Û¹ ÝÛ³ñ¹³ÛÇÝ Ñ»ï áõ ³é³ç ¿ñ ³ÝáõÙ, ·³ÉÇë ϳݷÝáõÙ ¿ Ýñ³Ýó ÙÇç¨) - ²ÛÉ¨ë ³ÝÑá· »Õ»ù: Æ٠óóñÝ»ñÁ ³ÛÝï»Õ »Ýª ÙÛáõë ÏáÕÙáõÙ: Êáëï³ÝáõÙ »Ù, Ñ»Ýó ųÙÁ »ñÏáõëÁ Ë÷Ǫ Ï»ëûñÇÝ... àõÕÇ°Õ Å³ÙÁ »ñÏáõëÇÝ... (Ó»éù»ñÁ ß³ñÅ»Éáí ϳñÍ»ë áõ½áõÙ ¿ óáõÛó ï³Éª ÇÝãå»ë »Ý ³Ù»Ý ÇÝã ³íÇñ»Éáõ, ݳ ³Ýëå³ë»ÉÇáñ»Ý Ñ»é³ÝáõÙ ¿) àãÝã³óí³¯Í... Ù»ñ ÷áùñÇÏ Éñï»ëÝ»ñÁ: вÚð ²êîì²Ì (Çñ Ñ»ñÃÇÝ ÝÛ³ñ¹³Ûݳó³Í ßñçí»Éáí ¹»åÇ í»ñ³Ï³óáõÝ»ñÁ) - ػճíáñÝ»°ñ, áñ ÙÇÝ㨠í»ñç Ëñí³Í »ù Ç٠ѳݹ»å Ó»ñ ïË»ÕÍ í³ñÙáõÝùÇ Ù»ç, ¹áõ°ù ÇÝÓ ¹ñ³Ý ѳëóñ»óÇù: (¹ÇÙ»Éáí ϳéáõóáÕÝ»-


HENRI MICHAUX Le drame des constructeurs

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sacrée ville, va. Une ville à moi, avec des trains, des trains, des métropolitains, des baleines aussi, puisque tu en voulais. Des baleines. Des baleines à détente. (S’exaltant). Des baleines en l’air, plonger, filer, voler ; partez, dirigeables. (Pendant que C. crie à cause de son oreille que A. ne lâche pas.) Quel remous ça va faire. Plus rien que des baleines. Plus de refuge. Les voilà. Qui parle de reculer ? (Les gardiens arrivent.) (Déclamant.) Alors, résolument, il se jeta dans la baleine. (Il fonce sur les gardiens ; on le maintient ; cependant, il fonce dessus rythmiquement après chacune de ses phrases.) Alors, la mort dans l’âme, il plongea dans la baleine. (Il se retire un peu, puis se précipite encore contre eux, grâce à la force de sa rage.)

Alors, éperdu, il se jeta dans la baleine ! ……………………………………………………….. Alors, fermant les yeux, il plongea dans la baleine ! ……………………………………………………….. Alors, écartant les montagnes de corps arides... (Mais on l’emporte.)

C. (qui n’a pas bougé et qui a compté les gardiens, réfléchissant posément). - Sept saules encore à planter ! Ce sera pour demain après-midi... Ou sept bosquets… ou sept… collines ; décidément, oui, des collines, c’est encore le plus sûr.

(RIDEAU)


²ÜðÆ ØÆÞà γéáõóáÕÝ»ñÇ ¹ñ³Ù³Ý

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ñÇÝ) ºë Ó»°½ »Ù ѳÝÓÝáõÙ Ýñ³Ýó: (ݳ Ñ»é³ÝáõÙ ¿ ¹³ï³íáñÇ ï»ëùáí)

îºê²ð²Ü VI ¶. (Ñ»éáõÝ Ý³Û»Éáí) - ø³¯ÝÇ ù³ÝÇëÇÝ »Ù ¹³ßï ¹³ñÓñ»É: ܳۻù, ï»ëÝáõ±Ù »ù ³Ûë ѳñóí³ÛñÁ: ijٳݳÏÇÝ ³Ûë ³Ù»ÝÁ í»ñ³Ï³óáõÝ»ñ ¿ÇÝ: ²Ûë ͳéÝ ¿É í»ñ³Ï³óáõ ¿ñ: Êáñ³Ù³ÝÏ ÙÇ Í»ñáõÏ: ºë Ýñ³Ý µéÝ»óÇ ùÝ³Í Å³Ù³Ý³Ï: Àݹ³Ù»ÝÁ µ³ñÓñ³óñÇ ¨... ¸» ݳۻù, ëñ³ ÝÙ³Ý ÙÇ ÑáñǽáÝ Ñ³ëï³ï í»ñ³Ï³óáõÝ»ñáí åÇïÇ ëÝíÇ: ØÇ ù³ÝÇ Å³Ûé ¿É Ïë³ñù»Ù ³Ûëï»Õ: (óáõÛó ¿ ï³ÉÇë Ñ»é³íáñ ÙÇ Ï»ïª ÑáñǽáÝáõÙ) ÆëÏ Ï»ëûñÇÝ »ë Ó»½ µáÉáñ Ù³Ýñ³Ù³ëÝ»ñáí óáõÛó Ïï³Ù Ç٠ϳéáõó³Í »ñÏÇñÁ: ºñÏÇñª µ³ó³é³å»ë ϳéáõóí³Í í»ñ³Ï³óáõÝ»ñÇó:

îºê²ð²Ü VII ². (´»Ù ¿ í»ñ³¹³éÝáõÙ, ³ÛɳÛÉí³Í, ·ÉáõËÁ Ó³ËÇó ³ç ·ó»Éáí, Ùáï»ÝáõÙ ¿ º.-ÇÝ: ´éÝáõÙ ¿ Ýñ³ ³Ï³ÝçÝ»ñÇó Ù»ÏÁ, Ñ»ïá ÙÛáõëÁ, ëÏëáõÙ ³ñ³· ½ÝÝ»É) - ȳí, Ù»ÏÁ ÇÝÓ ïáõñ, ϳ٠ë³, ϳ٠¹³, ÇÝãå»ë Ïáõ½»ë: ì»ñ³¹³ñÓÝ»Éáõ »Ù: äÇïÇ í»ñ³¹³ñÓݻ٠µáÉáñ ËáõÉ»ñÇÝ Çñ»Ýó ÉëáÕáõÃÛáõÝÁ: (º-Ý Ý³Ñ³ÝçáõÙ ¿ª ×ã³Éáí: ´éÝ»Éáí ¶-Ç ³Ï³ÝçÁ) ¸»°, ¹áõ° ³ñÇ: Ð³å³ ï»ëÝ»Ù: îáõ°ñ: Ødzݷ³ÙÇó Ïí»ñ³¹³ñÓÝ»Ù, ¨ ³ÛÝ ¿Éª ó·³íáñ³Ï³Ý ѳñÙ³ñáõÃÛáõÝÝ»ñáí: ø³Õ³ù Ïϳéáõó»Ù ³Ï³Ýçǹ Ù»ç: ¶Åí»Éáõ ÙÇ ù³Õ³ù, ÑÁ±: ÆÙ ù³Õ³ùÁª ·Ý³óùÝ»ñáí, ·Ý³óùÝ»ñáí, Ù»ïñáÝ»ñáí, Ï»ï»ñáí, áñáíÑ»ï¨ Ï»ï ¿Çñ áõ½áõÙ: λï»ñª ½í³ñ׳ÉÇùÇ Ñ³Ù³ñ: (á·¨áñí»Éáí) λï»ñª û¹áõÙ, ëáõ½í»É, ÷³Ëã»É, Ãéã»É, Ù»ÏÝ»°ù, ջϳí³ñ»ÉÇÝ»°ñ (¶-Ý ·áéáõÙ ¿ ³Ï³ÝçÇ ó³íÇó, áñÁ ´.Ý ¹»é µ³ó ãÇ ÃáÕ»É) ºí ǯÝã ß³ñÅáõÙ ÏëÏëíÇ: ØdzÛÝ


HENRI MICHAUX Le drame des constructeurs

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²ÜðÆ ØÆÞà γéáõóáÕÝ»ñÇ ¹ñ³Ù³Ý

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Ï»ï»ñÁ ¨ áõñÇß áãÇÝã: àã ÙÇ ³å³ëï³ñ³Ý: ²Ñ³° Ýñ³Ýù: à±í ¿ Ëáëáõ٠ݳѳÝç»Éáõ Ù³ëÇÝ: (·³ÉÇë »Ý í»ñ³Ï³óáõÝ»ñÁ) (³ñï³ë³Ý»Éáí ѳïáõÏ ³éá·³ÝáõÃÛ³Ùµ) ²Û¹Å³Ù í×é³Ï³Ýáñ»Ý ݳ Çñ»Ý Ý»ï»ó Ï»ïÇ Ù»ç: (гñÓ³ÏíáõÙ ¿ í»ñ³Ï³óáõÝ»ñÇ íñ³, Ýñ³Ý Ñ»ï »Ý å³ÑáõÙ, µ³Ûó ݳ ß³ñáõݳÏáõÙ ¿, Ûáõñ³ù³ÝãÛáõñ ݳ˳¹³ëáõÃÛáõÝÇó Ñ»ïá ѳٳã³÷ éÇÃÙáí, Ý»ïíáõÙ ¿ í»ñ³Ï³óáõÝ»ñÇ íñ³) ²Û¹Å³Ù, Ù³ÑÁ ëñïáõÙ, ݳ ëáõ½í»ó Ï»ïÇ Ù»ç: (÷áùñ-ÇÝã Ñ»é³ÝáõÙ ¿, Ñ»ïá ÏñÏÇÝ Ñ³ñÓ³ÏíáõÙ í»ñ³Ï³óáõÝ»ñÇ íñ³ª Çñ ϳï³ÕáõÃÛ³Ý áÕç áõÅáí) ²Û¹Å³Ù, ÇÝùݳÙáé³ó, ݳ Ý»ïí»ó Ï»ïÇ Ù»ç: ........................................................................................ ²Û¹Å³Ù, ³ãù»ñÁ ÷³Ï, ݳ ëáõ½í»ó Ï»ïÇ Ù»ç.... ........................................................................................ ²Û¹Å³Ù ÙÇ ÏáÕÙ Ññ»Éáí ϳñÍñ³ó³Í Ù³ñÙÇÝÝ»ñÇ Å³Ûé»ñÁ... (µ³Ûó Ýñ³Ý ï³ÝáõÙ »Ý) ¶. (àñÁ ï»ÕÇó ãÇ ß³ñÅí»Éª ½µ³Õí³Í í»ñ³Ï³óáõÝ»ñÇÝ Ñ³ßí»Éáí, ѳݷÇëï Ùï³Í»Éáí) - ºíë Ûáà áõé»ÝÇ ¿ ÙÝáõÙ ïÝÏ»É: ¸³ í³ÕÁª Ï»ëûñÇ Ñ³Ù³ñ... ϳ٠¿É Ûáà åáõñ³Ï... ϳ٠ÛáÃ... ųÛé... ³Ûá°, ÇÝã áõ½áõÙ »ë ³ë³ª ųÛé»ñÝ ¿ÉÇ ³Ù»Ý³íëï³Ñ»ÉÇÝ »Ý ÙÝáõÙ: (ì²ð²¶àôÚð)




HENRI MICHAUX Postface

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J’ai, plus d’une fois, senti en moi des « passages » de mon père. Aussitôt, je me cabrais. J’ai vécu contre mon père (et contre ma mère et contre mon grand-père, ma grand-mère, mes arrière-grands-parents) ; faute de les connaître, je n’ai pu lutter contre de plus lointains aïeux. Faisant cela, quel ancêtre inconnu ai-je laissé vivre en moi ? En général, je ne suivais pas la pente. En ne suivant pas la pente, de quel ancêtre inconnu ai-je suivi la pente ? De quel groupe, de quelle moyenne d’ancêtres ? Je variais constamment, je les faisais courir, ou eux, moi. Certains avaient à peine le temps de clignoter, puis disparaissaient. L’un n’apparaissait que dans tel climat, dans tel lieu, jamais dans un autre, dans telle position. Leur grand nombre, leur lutte, leur vitesse d’apparition - autre gêne - et je ne savais sur qui m’appuyer. On est né de trop de Mères. - (Ancêtres : simples chromosomes porteurs de tendances morales, qu’importe ?) Et puis les idées des autres, des contemporains, partout téléphonées dans l’espace, et les amis, les tentatives à imiter ou à « être contre ». J’aurais pourtant voulu être un bon chef de laboratoire, et passer pour avoir bien géré mon « moi ». En lambeaux, dispersé, je me défendais et toujours il n’y avait pas de chef de tendances ou je le destituais aussitôt. Il m’agace tout de suite. Etait-ce lui qui m’abandonnait ? Etait-ce moi qui le laissais ? Etait-ce moi qui me retenais ? Le jeune puma naît tacheté. Ensuite, il surmonte les tachetures. C’est la force du puma contre l’ancêtre, mais il ne surmonte pas son goût de carnivore, son plaisir à jouer, sa cruauté. Depuis trop de milliers d’années, il est occupé par les vainqueurs. MOI se fait de tout. Une flexion dans une phrase, est-ce un autre moi qui tente d’apparaître ? Si le OUI est mien, le NON est-il un deuxième moi ? Moi n’est jamais que provisoire (changeant face à un tel, moi ad hominem changeant dans une autre langue, dans un


²ÜðÆ ØÆÞà ì»ñç³µ³Ý

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ºë µ³½ÙÇóë ½·³ó»É »Ùª ÇÝãå»ë ¿ ѳÛñë §³ÝóÝáõÙ¦ ÇÙ ÙÇçáí: ºí ³ÝÙÇç³å»ë ÁÝ¹í½»É: ºë ³åñ»É »Ù Ñáñë ¹»Ù, (áõ ݳ¨ Ùáñë ¹»Ù áõ ݳ¨ å³åÇë ¹»Ù áõ ݳ¨ ï³ïÇë ¹»Ù áõ ݳ¨ ݳ˳å³åÇë áõ ݳ¨ ݳ˳ï³ïÇë ¹»Ù). ã׳ݳã»Éáí ³í»ÉÇ Ñ»é³íáñ ݳËÝÇÝ»ñÇëª ã¿Ç ϳñáÕ Ýñ³Ýó ¹»Ù ¿É å³Ûù³ñ»É: ºí ³Û¹ å³Ûù³ñáõÙ á±ñ ³ÝͳÝáà ݳ˳ÑáñÝ »Ù »ë ÏÛ³Ýù µ³ßË»É ÇÙ Ù»ç: ²éѳë³ñ³Ï ·Íí³Í áõÕáí ã¿Ç ÁÝóÝáõÙ: ºí áõÕáõÝ ãѻ層Éáíª á±ñ ³ÝͳÝáà ݳ˳Ñáñ áõÕáõÝ »Ù ѻ層É: à±ñ ËÙµÇ, ݳËÝÇÝ»ñÇ á±ñ Ãí³µ³Ý³Ï³Ý ÙÇçÇÝÇ: ºë ³ÝÁݹѳï ÷á÷áËíáõÙ ¿Ç. ëïÇåáõÙ ¿Ç Ýñ³Ýó í³½»É ÇÙ Ñ»ï¨Çó, ϳ٠¿É Ýñ³Ýù ¿ÇÝ ÇÝÓ í³½»óÝáõÙ: ØÇ ù³ÝÇëÁ ѳ½Çí ѳëóÝáõÙ ¿ÇÝ ³ãù óñÃ»É ¨ ³ÝÑ»ï³ÝáõÙ: Ø»ÏÁ ѳÛïÝíáõÙ ¿ñ ÙdzÛÝ áñáß³ÏÇ ÏÉÇÙ³Û³Ï³Ý å³ÛÙ³ÝÝ»ñáõÙ, áñáß³ÏÇ í³ÛñáõÙ, ¨ áãª Ù»Ï áõñÇß, áñáß³ÏÇ ¹ÇñùáõÙ: Üñ³Ýó ëïí³ñ µ³Ý³ÏÁ, Ýñ³Ýó å³Ûù³ñÁ, ëñÁÝóó ѳÛïÝáõÃÛáõÝÝ»ñÁ - Ù»Ï ³ÛÉ ·É˳ó³í³Ýù - ¨ »ë ã·Çï»Çª áõÙ ³å³íÇÝ»É: Ø»Ýù ÍÝáõÝ¹Ý »Ýù ã³÷Çó ¹áõñë ß³ï سÛñ»ñÇ - (ܳËÝÇÝ»±ñÁª Áݹ³Ù»ÝÁ µ³ñáÛ³Ï³Ý Ëñ³ïÝ»ñ ÏñáÕ ùñáÙáëáÙÝ»±ñ, ϳñ¨áñ ã¿): лïá ³ÛÉáóª ųٳݳϳÏÇóÝ»ñÇ ·³Õ³÷³ñÝ»ñÁ, áñ Ñ»é³Ó³ÛÝíáõÙ »Ý ï³ñ³ÍáõÃÛ³Ý Ù»ç, ¨ ÁÝÏ»ñÝ»ñÁ, áñáÝó ÷áñÓáõÙ »Ýù ÝÙ³Ý³Ï»É Ï³Ù §Ñ³Ï³¹ñí»É¦: »¨ ó³ÝÏáõÃÛáõÝë Çñ³Ï³Ýáõ٠ɳµáñ³ïáñdzÛÇ É³í ջϳí³ñ ÉÇÝ»ÉÝ ¿ñ, ѳٳñí»É Ù»ÏÁ, áñÇÝ Ñ³çáÕí»É ¿ Çñ §»ëÁ¦ ѳëï³ï»É: ä³ï³é-å³ï³é ¨ ó³ùáõóñÇíª ÇÝÓ Ñ³çáÕíáõÙ ¿ñ ·ÉáõËë å³Ñ»É, ¨ ãϳñ ³Û¹å»ë ¿É ÙÇïáõÙÝ»ñÇ å³ñ³·ÉáõË, ϳ٠¿É ÇëÏáõÛÝ í»ñ³óÝáõÙ ¿Ç Ýñ³Ý: ²ÝÙÇç³å»ë ëÏëáõÙ ¿ñ ³½¹»É ÝÛ³ñ¹»ñÇë íñ³: ¸Åí³ñ ¿ ³ë»Éª ݳ± ¿ñ ÇÝÓ ÉùáõÙ: º±ë ¿Ç Ýñ³Ý ÃáÕÝáõÙ: »±ª áõÕÕ³ÏÇ »ë ã¿Ç ÃáÕÝáõÙ ÇÝÓ: سï³Õ ϳïí³éÛáõÍÁ ÍÝíáõÙ ¿ µÍ»ñáí: ػͳݳÉáíª Ý³ ϳñáÕ³ÝáõÙ ¿ ѳÕóѳñ»É ³Û¹ µÍ»ñÁ: ¸³ ϳïí³éÛáõÍÇ Ñ³ÕóݳÏÝ ¿ª ݳËÝÇÝ»ñÇ ¹»Ù, µ³Ûó Ýñ³Ý ãÇ Ñ³çáÕíáõ٠ѳÕóѳñ»É ·Çß³ïãÇ Çñ ³ËáñųÏÁ, ˳ճÉáõ ѳ×áõÛùÁ, ¹³Å³ÝáõÃÛáõÝÁ:


HENRI MICHAUX Postface

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autre art) et gros d’un nouveau personnage, qu’un accident, une émotion, un coup sur le crâne libérera à l’exclusion du précédent et, à l’étonnement général, souvent instantanément formé. Il était donc déjà tout constitué. On n’est peut-être pas fait pour un seul moi. On a tort de s’y tenir. Préjugé de l’unité. (Là comme ailleurs la volonté, appauvrissante et sacrificatrice.) Dans une double, triple, quintuple vie, on serait plus à l’aise, moins rongé et paralysé de subconscient hostile au conscient (hostilité des autres « moi » spoliés). La plus grande fatigue de la journée et d’une vie serait due à l’effort, à la tension nécessaire pour garder un même moi à travers les tentations continuelles de le changer. On veut trop être quelqu’un. Il n’est pas un moi. Il n’est pas dix moi. Il n’est pas de moi. MOI n’est qu’une position d’équilibre. (Une entre mille autres continuellement possibles et toujours prêtes.) Une moyenne de « moi », un mouvement de foule. Au nom de beaucoup je signe ce livre. Mais l’ai-je voulu ? Le voulions-nous ? Il y avait de la pression (vis a tergo). Et puis ? J’en fis le placement. J’en fus assez embarrassé. Chaque tendance en moi avait sa volonté, comme chaque pensée dès qu’elle se présente et s’organise a sa volonté. Etait-ce la mienne ? Un tel a en moi sa volonté, tel autre, un ami, un grand homme du passé, le Gautama Bouddha, bien d’autres, de moindres, Pascal, Hello ? Qui sait ? Volonté du plus grand nombre ? Volonté du groupe le plus cohérent ? Je ne voulais pas vouloir. Je voulais, il me semble, contre moi, puisque je ne tenais pas à vouloir et que néanmoins je voulais. … Foule, je me débrouillais dans ma foule en mouvement. Comme toute chose est foule, toute pensée, tout instant. Tout passé, tout ininterrompu, tout transformé, toute chose est autre chose. Rien jamais définitivement circonscrit, ni


²ÜðÆ ØÆÞà ì»ñç³µ³Ý

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´Ûáõñ³íáñ ѳ½³ñ³ÙÛ³ÏÝ»ñ Ç í»ñª ݳ ½µ³Õí³Í ¿ ѳÕÃáÕÝ»ñáí: ÆÝãÇó ³ë»ë ãÇ ëï³óíáõÙ »ëÁ: ²ÝÝß³Ý ÙÇ ÑáÉáí ݳ˳¹³ëáõÃÛ³Ý Ù»ç, ¨ ϳñÍ»ë ÙÇ ³ÛÉ »ë ¿ ѳÛïÝíáõÙ: ºÃ» ²Úà-Ý ÇÙÝ ¿, ·áõó» àâ-Ý ÇÙ »ñÏñá±ñ¹ »ëÝ ¿: ºëÁ µ³ó³é³å»ë ųٳݳϳíáñ »ñ¨áõÛà ¿ (÷á÷áËí»Éáí áõñÇß »ëÇ ³éϳÛáõÃÛ³Ùµ, ¹³éݳÉáí áõñÇß ûï³ñ É»½íÇ Ï³Ù ³ñí»ëïÇ Ù»ç) ¨ Ùßï³å»ë ÑÕÇ Ýáñ å»ñëáݳÅáí. áñ¨¿ å³ï³Ñ³ñ, ÑáõÛ½ ϳ٠Áݹ³Ù»ÝÁ ·ÉËÇÝ Ñ³ëóí³Í ѳñí³Í ϳñáÕ »Ý ÏÛ³ÝùÇ Ïáã»É Ýñ³Ýª Ç íݳë ݳËáñ¹ »ëÇ, ¹³éݳÉáí ѳÙÁݹѳÝáõñ ½³ñÙ³ÝùÇ ³é³ñϳª ݳ Ù³ñÙÇÝ ¿ ³éÝáõÙ í³Ûñϻݳå»ë: Ü߳ݳÏáõÙ ¿ª ݳ í³Õáõó ³ñ¹»Ý ϳ½Ù³íáñí³±Í ¿ñ: ¶áõó» Ù»Ýù Áݹ³Ù»ÝÁ ÙÇ »ë ÉÇÝ»Éáõ ѳٳ±ñ ã»Ýù ëï»ÕÍí³Í: ºí Ù»ñ ë˳ÉÝ ¿ª ϳéã»É Ýñ³ÝÇó: ØdzëÝáõÃÛ³Ý ³Û¹ ϳÝË³Ï³É ·³Õ³÷³ñÁ: (²Ûëï»Õ ¿É, ÇÝãå»ë ³Ù»Ýáõñ, ·áñÍáõÙ ¿ ϳÙùÁª ³Õù³ï³óÝáÕ ¨ ½áÑ»ñÇ å³ïñ³ëï): ºÃ» »ñÏáõ, »ñ»ù, ãáñë ÏÛ³Ýù áõݻݳÛÇÝù, ß³ï ³í»ÉÇ ³½³ï ÏÉÇÝ»ÇÝù, Ý»ñëÇó ã¿ñ ÏñÍÇ ¨ ϳßÏ³Ý¹Ç »Ýó·Çï³ÏóáõÃÛáõÝÁª ·Çï³ÏóáõÃÛ³Ý »ñ¹íÛ³É ÃßݳÙÇÝ (ÃßݳٳÝù, áñ ëÏǽµ ¿ ³éÝáõÙ µáÉáñ ³Û¹ ÏáÕáåïí³Í »ë»ñÇó): ػͳ·áõÛÝ ·áñÍÁ Ù»ñª ûñí³ ¨ áÕç ÏÛ³ÝùÇ, ³ÛÝ ç³ÝùÝ ¿, ³ÛÝ É³ñáõÙÁ, áñáí ÷áñÓáõÙ »Ýù å³Ñå³Ý»É ÙǨÝáõÛÝ »ëÁª ãÝ³Û³Í ÷áËí»Éáõ Ùßï³Ýáñá· ·³ÛóÏÕáõÃÛáõÝÝ»ñÇÝ: Ø»Ýù ã³÷Çó ¹áõñë áõ½áõÙ »Ýù ÇÝã-áñ Ù»ÏÁ ÉÇÝ»É: âϳ ÙÇ »ë: âϳ ï³ëÁ »ë: ºë ãϳ: ºëÝ Áݹ³Ù»ÝÁ »ñ»ñáõÝ Ñ³í³ë³ñ³ÏßéáõÃÛáõÝÝ»ñÇ áñáß³ÏÇ ¹ÇñùÝ ¿, (Ù»ÏÁ ѳ½³ñ³íáñ ³ÛÉ ¹Çñù»ñÇóª ÙÇßï Ñݳñ³íáñ ¨ Ù»ÏݳñÏÇ å³ïñ³ëï): ºëÇ ÙÇçÇÝ Ãí³µ³Ý³Ï³Ý, ÇÝãå»ë ³ÙµáËÇ ï³ñ»ñ³ÛÇÝ ß³ñÅáõÙÁ: Þ³ï»ñÇ ³ÝáõÝÇóª »ë ³Ûë ·ñùÇÝ Ï¹Ý»Ù ëïáñ³·ñáõÃÛáõÝë: ´³Ûó ϳٻó»±É »Ù »ë ¹³: γٻó»±É »Ýù Ù»Ýù ¹³: ÆÝã-áñ µ³Ý ×ÝßáõÙ ¿ñ ·áñͳ¹ñáõÙ. vis a tergo: ºí Ñ»ïá±: лïá »ë ³ÛÝ ï»Õ³íáñ»óÇ: ºí ¹³ ÇÝÓ µ³í³Ï³Ý Ý»ÕáõÃÛáõÝ å³ï׳é»ó: Úáõñ³ù³ÝãÛáõñ ÙÇïáõÙ ÇÙ Ù»ç Çñ ϳÙùÝ áõÝ»ñ, ÇÝãå»ë


HENRI MICHAUX Postface

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susceptible de l’être, tout : rapport, mathématiques, symboles, ou musique. Rien de fixe. Rien qui soit propriété. Mes images ? Des rapports. Mes pensées ? Mais les pensées ne sont justement peut-être que contrariétés du « moi », pertes d’équilibre (phase 2), ou recouvrements d’équilibre (phase 3) du mouvement du « pensant ». Mais la phase 1 (l’équilibre) reste inconnue, inconsciente. Le véritable et profond flux pensant se fait sans doute sans pensée consciente, comme sans image. L’équilibre aperçu (phase 3) est le plus mauvais, celui qui après quelque temps paraît détestable à tout le monde. L’histoire de la Philosophie est l’histoire des fausses positions d’équilibre conscient adoptées successivement. Et puis... est-ce par le bout «flammes» qu’il faut comprendre le feu ? Gardons-nous de suivre la pensée d’un auteur1 (fût-il du type Aristote), regardons plutôt ce qu’il a derrière la tête, où il veut en venir, l’empreinte que son désir de domination et d’influence, quoique bien caché, essaie de nous imposer. D’ailleurs, QU’EN SAIT-IL DE SA PENSEE ? Il en est bien mal informé. (Comme l’œil ne sait pas de quoi est composé le vert d’une feuille qu’il voit pourtant admirablement.) Les composantes de sa pensée, il ne les connaît pas ; à peine parfois les premières ; mais les deuxièmes ? les troisièmes ? les dixièmes ? Non, ni les lointaines, ni ce qui l’entoure, ni les déterminants, ni le « Ah ! » de son époque (que le plus misérable pion de collège dans trois cents ans apercevra). Ses intentions, ses passions, sa libido dominandi, sa mythomanie, sa nervosité, son désir d’avoir raison, de triompher, de séduire, d’étonner, de croire et de faire croire à ce qui lui plaît, de tromper, de se cacher, ses appétits et ses dégoûts, ses complexes, et toute sa vie harmonisée sans qu’il le


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Ûáõñ³ù³ÝãÛáõñ ÙÇïù, áñ ÍÝíáõ٠ϳ½Ù³íáñíáõÙ ¿, áõÝÇ Çñ ϳÙùÁ: ´³Ûó ³ñ¹Ûáù ¹³ DZ٠ϳÙùÝ ¿ñ: ÆÝã-áñ Ù»ÏÝ ÇÙ Ù»ç Ç°ñ ϳÙùÁ áõÝÇ, Ù»Ï áõñÇßÁª áñ¨¿ ÁÝÏ»ñ, ³ÝóÛ³ÉÇ ÷³é³Ñ»Õ ÙÇ ¹»Ùù ϳ٠¶³áõï³Ù³ ´áõ¹¹³Ý` Çñ»ÝÁ ¨ ¹»é áõñÇßÝ»ñ, ³í»ÉÇ Ñ³Ù»ëï` ä³ëϳÉÁ, лÉÉáÝ.... àí ·ÇïÇ: Î³Ù»Ý³É ³í»ÉÇ Ù»Í ÃDZí: Î³Ù»Ý³É ³é³í»É Ý»ñ¹³ßÝ³Ï Ëáõ±Ùµ: ºë ã¿Ç ϳٻÝáõ٠ϳٻݳÉ:ºë ϳٻÝáõÙ ¿Çª ѳϳé³Ï ϳÙùÇë, áñáíÑ»ï¨ ãϳٻݳÉáíª ß³ñáõݳÏáõÙ ¿Ç ϳٻݳÉ: ...²ÙµáËÁ. ÷áñÓáõÙ ¿Ç ·ÉáõË Ñ³Ý»É Ñ³ñ³ß³ñÅ ÇÙ ³ÙµáËÇó: àñáíÑ»ï¨ ³Ù»Ý ÇÝã ³ÙµáË ¿, ³Ù»Ý ÙÇïù, ³Ù»Ý ³ÏÝóñÃ: ²Ù»Ý ÙÇ ³ÝóÛ³É, ³Ù»Ý ß³ñáõݳϳϳÝ, ³Ù»Ý ÷á÷áËí³Í, ³Ù»Ý µ³Ý áõñÇß µ³Ý ¿: ºñµ»ù áãÇÝã ãáõÝÇ ¨ áã ¿É Ó·ïáõÙ ¿ Ñëï³Ï ë³Ñٳݳ½³ïÙ³Ý, áãÇÝ㪠ѳñ³µ»ñáõÃÛáõÝÝ»ñ, ٳûٳïÇÏ³Ï³Ý ·ÇïáõÃÛáõÝÝ»ñ, ËáñÑñ¹³ÝÇßÝ»ñ û »ñ³ÅßïáõÃÛáõÝ: âϳ ϳÛáõÝ áãÇÝã: àãÇÝã, áñ ¹³ñÓÝ»Ýù ë»÷³Ï³ÝáõÃÛáõÝ: ÆÙ å³ïÏ»ñÝ»±ñÁ: гñ³µ»ñáõÃÛáõÝÝ»ñ: ÆÙ Ùïù»±ñÁ: ´³Ûó Ùïù»ñÁ ·áõó»¨ »ëÇ íÇ׳ÏÝ»ñÝ »Ý ëáëϪ ³ÛÝù³Ý ï³ñµ»ñ ¨ Çñ³ñ³Ù»ñÅ. ѳí³ë³ñ³ÏßéáõÃÛ³Ý ÏáñáõëïÁ (÷áõÉ »ñÏñáñ¹) ϳ٠§Ùï³ÍáÕǦ ß³ñÅÙ³Ý Ù»ç ѳí³ë³ñ³ÏßéáõÃÛáõÝÁ í»ñ³·ïÝ»Éáõ ÷áñÓ»ñ (÷áõÉ »ññáñ¹), µ³Ûó ³é³çÇÝ ÷áõÉÁ (ѳí³ë³ñ³ÏßéáõÃÛáõÝÁ), ÙÝáõÙ ¿ ³ÝѳÛï, ã·Çï³Ïóí³Í: ØïùÇ ×ßÙ³ñÇï, Ý»ñÑ³Ï ß³ñÅáõÙÁ ÁÝóÝáõÙ ¿ ·Çï³ÏÇó ÙïùÇó ³ÝϳË, ½»ñÍ ¿ ³ë»ë å³ïÏ»ñÝ»ñÇó: ÜßÙ³ñí³Í, ·Çï³Ïóí³Í ѳí³ë³ñ³ÏßéáõÃÛáõÝÁ (÷áõÉ »ññáñ¹) ³Ù»Ý³í³ïóñÝ ¿ ¨ ß³ï ϳñ× Å³Ù³Ý³ÏáõÙ ¹³éÝáõÙ ¿ µáÉáñÇÝ ³ï»ÉÇ: öÇÉÇëá÷³ÛáõÃÛ³Ý å³ïÙáõÃÛáõÝÁ ·Çï³Ïóí³Í ѳí³ë³ñ³ÏßéáõÃ۳ݪ Çñ³ñ ѳçáñ¹áÕ ëË³É ¹Çñù»ñÇ å³ïÙáõÃÛáõÝÝ ¿: ºí Ñ»ïá... ÙDZû Ïñ³ÏÁ ѳëϳݳÉáõ ѳٳñ Ù»Ýù ëïÇåí³Í »Ýù ËÕ׳ÉÇáñ»Ý µéÝ»É §µáó»ñǦ ͳÛñÇó: Êáõë³÷»Ýù áñ¨¿ Ñ»ÕÇݳÏÇ1 ÙïùÇÝ Ñ»ï³Ùáõï ÉÇÝ»Éáõó


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sache, aux organes, aux glandes, à la vie cachée de son corps, à ses déficiences physiques, tout lui est inconnu. Sa pensée « logique » ? Mais elle circule dans un manchon d’idées paralogiques et analogiques, sentier avançant droit en coupant des chemins circulaires, saisissant (on ne saisit qu’en coupant) des tronçons saignants de ce monde si richement vascularisé. (Tout jardin est dur pour les arbres.) Fausse simplicité des vérités premières (en métaphysique) qu’une extrême multiplicité suit, qu’il s’agissait de faire passer. En un point aussi, volonté et pensée confluent, inséparables, et se faussent. Pensée-volonté. En un point aussi, l’examen de la pensée fausse la pensée comme, en microphysique, l’observation de la lumière (du trajet du photon) la fausse. Tout progrès, toute nouvelle observation, toute pensée, toute création, semble créer (avec une lumière) une zone d’ombre. Toute science crée une nouvelle ignorance. Tout conscient, un nouvel inconscient. Tout apport nouveau crée un nouveau néant. Lecteur, tu tiens donc ici, comme il arrive souvent, un livre que n’a pas fait l’auteur, quoiqu’un monde y ait participé. Et qu’importe ? Signes, symboles, élans, chutes, départs, rapports, discordances, tout y est pour rebondir, pour chercher, pour plus loin, pour autre chose. Entre eux, sans s’y fixer, l’auteur poussa sa vie. Tu pourrais essayer, peut-être, toi aussi ? HENRI MICHAUX


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(³Ý·³Ù »Ã» ËáëùÁ ²ñÇëïáï»ÉÇ Ù³ëÇÝ ¿) ÷áñÓ»Ýù ³í»ÉÇ ßáõï ѳëϳݳɪ ÇÝã ¿ ³ÛÝ Ã³ùóÝáõÙ, áñï»Õ ¿ ï³ÝáõÙ, ÷áñÓ»Ýù áñë³É ³ÛÝ Ã»Ïáõ½¨ ëùáÕí³Í ÏÝÇùÁ, áñ å³ñï³¹ñáõÙ ¿ Ù»½ ÇßË»Éáõ ¨ Ý»ñ·áñÍ»Éáõ Ýñ³ ϳÙùÁ: Æ ¹»å, ƱÜâ ¾ вÚîÜÆ ÐºÜò Üð²Ü Æð ØîøÆ Ø²êÆÜ: ²ë»Ýù, áñ ݳ µ³í³Ï³Ý ³Ýï»ÕÛ³Ï ¿: (ÆÝãå»ë ³ãùÁ ã·ÇïǪ ÇÝãÇó ¿ µ³Õϳó³Í ï»ñ¨Ç ϳݳãÁ, û¨ ³ÛÝ ï»ëÝáõÙ ¿ Ññ³ß³ÉÇáñ»Ý) Üñ³ ÙïùÇ µ³Õ³¹ñÇãÝ»±ñÁ... ϳñÍáõÙ »ùª ݳ ׳ݳãáõ±Ù ¿. ³é³çÇÝÝ»ñÁ »ñµ»ÙÝ, ¨ ³ÛÝ ¿É Ù»Í ¹Åí³ñáõÃÛ³Ùµ, µ³Ûó »ñÏñáñ¹Ý»±ñÁ, »ññáñ¹Ý»±ñÁ, ï³ëÝ»ñáñ¹Ý»±ñÁ: à°ã, ë»÷³Ï³Ý ÙïùÇ Ù³ëÝÇÏÝ»ñÁª Ñ»é³íáñ ϳ٠ÙáïÇÏ Ï³Ù í×éáñáß, ÙÝáõÙ »Ý Ýñ³Ý ³ÝͳÝáÃ, ÇÝãå»ë ¨ ³ÛÝ §²¯ÑÁ¦, áñ óÝóáõÙ ¿ Çñ ųٳݳÏÇ Áݹ»ñùÁ (¨ áñ »ñ»ù ѳñÛáõñ ï³ñÇ ³Ýó ³ÏÝѳÛï ÏÉÇÝÇ í³ñųñ³ÝÇ ³Ù»Ý³ËÕ×áõÏ í»ñ³Ï³óáõÇÝ): ²Ù»ÝÁª Çñ Ùï³¹ñáõÃÛáõÝÝ»ñÁ, Ïñù»ñÁ, ÇßËáÕ ÉǵǹáÝ, Çñ ÙÇÃáÙ³ÝdzÝ, Çñ ÝÛ³ñ¹³ÛÝáõÃÛáõÝÁ, Çñ³í³óÇ ÉÇÝ»Éáõ, ѳÕûÉáõ, ·³ÛóÏÕ»Éáõ, ½³ñÙ³óÝ»Éáõ ó³ÝÏáõÃÛáõÝÁ, ó³ÝÏáõÃÛáõÝÁª ѳí³ï³Éáõ ¨ Çñ áõ½³ÍÁ ѳí³ï³óÝ»Éáõ, ˳µ»Éáõ ¨ óùÝí»Éáõ, Çñ ³ËáñųÏÝ»ñÝ áõ ÝáÕϳÝùÝ»ñÁ, Çñ µ³ñ¹áõÛÃÝ»ñÁ... Çñ áÕç ÏÛ³ÝùÁ, áñ ³é³Ýó Çñ ·ÇïáõÃÛ³Ý, Ý»ñ¹³ßݳÏí³Í ¿ Çñ ûñ·³ÝÝ»ñÇÝ, ·»ÕÓ»ñÇÝ, Çñ Ù³ñÙÝÇ ëùáÕí³Í ÏÛ³ÝùÇÝ, ýǽÇÏ³Ï³Ý ³ñ³ïÝ»ñÇݪ ³Ù»ÝÁ ³ÝѳÛï ¿ ÙÝáõÙ Ýñ³Ý: §îñ³Ù³µ³Ý³Ï³Ý¦ ÙDZïù: ´³Ûó ³ÛÝ í»ñáõí³ñáõÙ ¿ ³Ý³Éá·ÇÏ ¨ å³ñ³Éá·ÇÏ ·³Õ³÷³ñÝ»ñÇ ÙÇ ËáÕáí³ÏáõÙ, áñå»ë áõÕÇÕ ÁÝóóáÕ ÙÇ ³ñ³Ñ»ï, áñ ÙÇ ß³ñù áÉáñ-ÙáÉáñ ׳Ù÷³Ý»ñ ѳï»Éáíª µéÝáõÙ ¿ (ÙdzÛÝ Ñ³ï»Éáí ϳñ»ÉÇ ¿ µéÝ»É) ³ñÛáõÝáï Ïïáñï³ÝùÝ»ñÁ »ñÏñǪ Çñ Ë××áõÝ ³ÝáÃÝ»ñáí: ²Û·ÇÝ ¹Åí³ñ ¿ ͳé»ñÇ Ñ³Ù³ñ: ܳ˳ëϽµÝ³Ï³Ý ×ßÙ³ñïáõÃÛáõÝÝ»ñÇ ëáõï å³ñ½áõÃÛáõÝÁ (Ù»ï³ýǽÇϳÛÇ Ù»ç)ª Çñ»Ý Ñ»ï¨áÕ Í³Ûñ³Ñ»Õ µ³½Ù³½³ÝáõÃÛ³Ùµ, ¨ áñ ѳñÏ ¿ñ ï»Õ ѳëóÝ»É: ÆÝã-áñ ÙÇ Ï»ïáõÙ Ùdz˳éÝíáõÙ »Ý ϳÙù ¨ ÙÇïù, ³ÛÉ¨ë ³Ýµ³Å³Ý, ¨ ¹³éÝáõÙ ë˳É: ØÇïù-ϳÙù:


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ÆÝã-áñ ÙÇ Ï»ïáõÙ ÙïùÇ ùÝÝáõÃÛáõÝÁ ³Õ³í³ÕáõÙ ¿ ÙÇïùÁ, ÇÝãå»ë ÙÇÏñáýǽÇϳÛÇ Ù»ç, ÉáõÛëÇ ùÝÝáõÃÛáõÝÁ (ýáïáÝÇ áõÕ»·ÇÍÁ) ³Õ³í³ÕáõÙ ¿ ÉáõÛëÁ: ò³Ýϳó³Í ³é³çÁÝóó, ó³Ýϳó³Í Ýáñ áõëáõÙݳëÇñáõÃÛáõÝ, ó³Ýϳó³Í ÙÇïù, ó³Ýϳó³Í ³ñ³ñã³·áñÍáõÃÛáõÝ Ï³ñÍ»ë (ÉáõÛëÇ Ñ»ï Ù»Ïï»Õ) ÍÝáõÙ ¿ ëïí»ñÝ»ñÇ ·áïÇ: ò³Ýϳó³Í ·ÇïáõÃÛáõÝ ÍÝáõÙ ¿ Ýáñ ³Ý·ÇïáõÃÛáõÝ: ò³Ýϳó³Í ·Çï³ÏóáõÃÛáõݪ Ýáñ »Ýó·Çï³ÏóáõÃÛáõÝ: ò³Ýϳó³Í Ýáñ ³í³Ý¹ª ÍÝáõÙ ¿ Ýáñ ³Ý¿áõÃÛáõÝ: ÀÝûñóáÕ, ùá Ó»éùÇÝ ¿ ³ñ¹, ÇÝãå»ë Ñ³×³Ë ¿ ¹³ å³ï³ÑáõÙ, ÙÇ ·Çñù, áñ Ñ»ÕÇݳÏÁ ãÇ ëï»ÕÍ»É, û¨ ¹ñ³Ý Ù³ëݳÏó»É ¿ áÕç ÙÇ ³ß˳ñÑ: γñ¨áñ ã¿: Üß³ÝÝ»ñ, ËáñÑñ¹³ÝÇßÝ»ñ, ½»ÕáõÙÝ»ñ, ³ÝÏáõÙÝ»ñ, Ù»ÏÝáõÙÝ»ñ, ѳñ³µ»ñáõÃÛáõÝÝ»ñ, ³ÝѳٳӳÛÝáõÃÛáõÝÝ»ñ, ³Ù»ÝÁª áõÕÕí³Í ó³ïÏÇ, áñáÝÙ³Ý, ³í»ÉÇ Ñ»éáõÝ, ³í»ÉÇ áõñÇß: ºí ëñ³ Ù»ç, ϳݷ ã³éÝ»Éáí, ãѳëï³ïí»Éáí, Ñ»ÕÇݳÏÁ ÝÛáõûó Çñ ÏÛ³ÝùÁ: ¸áõ ÝáõÛÝå»ë ϳñáÕ »ë ÙÇ·áõó» ÷áñÓ»É: ²ÜðÆ ØÆÞà










{2uT UTx4 (1899-1984) ²ÝñÇ ØÇßáÝ ÍÝí»É ¿ 1899 Ãí³Ï³ÝÇÝ Ü³ÙÛáõñáõÙª ´»É·Ç³ÛÇ Ñ³ñ³íáõÙ: سÝÏáõÃÛáõÝÁ ³Ýó ¿ Ï³óñ»É ´ñÛáõë»ÉáõÙ: àõë³Ý»É ¿ ê»Ý-ØÇᯐ í³ñųñ³ÝáõÙ: ²ÝѳݷÇëï, ÝÛ³ñ¹³ÛÇÝ Ë³éÝí³ÍùÇ ï»ñ ¿ñ, ¨ ß³ï í³Õ ѳë³ÏÇó ³Ýëáíáñ Ñ»ï³ùñùñáõÃÛáõÝ ¿ ëÏëáõÙ óáõó³µ»ñ»É ·ñù»ñÇ Ýϳïٳٵ: ²é³çÇÝ ß÷áõÙÁ ·ñ³Ï³ÝáõÃÛ³Ý Ñ»ï éáõë ¹³ë³Ï³ÝÝ»ñÝ ¿ÇÝ, Ù³ëݳíáñ³å»ë îáÉëïáÛÁ ¨ ¸áëïá¨ëÏÇÝ: ê³Ï³ÛÝ ÙáõïùÁ ·ñ³Ï³ÝáõÃÛáõÝ Ùdzݷ³ÙÇó ãÇ ÉÇÝáõÙ: ØÇßáÝ Ý³Ë µÅßÏ³Ï³Ý ÏñÃáõÃÛáõÝ ¿ ëï³ÝáõÙ: ´³Ûó ßáõïáí ÃáÕÝáõÙ ¿ ³ÛÝ ¨ ͳé³ÛáõÃÛ³Ý ³ÝóÝáõ٠ݳí³ïáñÙáõÙª áñå»ë ݳí³ëïÇ: §²-Ç ¹ÇÙ³ÝϳñÁ¦, áñï»Õ Ñ»ßï ¿ ׳ݳã»É µ³Ý³ëï»ÕÍÇ ëùáÕí³Í ÇÝùݳÝϳñÁ, Ù»Í Ñ»·Ý³Ýùáí ¿ ³Ý¹ñ³¹³éÝáõÙ Ýñ³ Ï»Ýë³·ñáõÃÛ³Ý ³Ûë ï³ñÇÝ»ñÇÝ: 1921 Ãí³Ï³ÝÇÝ` »ñÏáõ ï³ñí³ Íáí³ÛÇÝ ÏÛ³ÝùÇó Ñ»ïá, ØÇßáÝ ÉùáõÙ ¿ ݳí³ïáñÙÁ: лÝó ³Ûë ßñç³ÝáõÙ »Ý ·ñíáõÙ ³é³çÇÝ ëï»Õͳ·áñÍáõÃÛáõÝÝ»ñÁ. ³éÇÃÁ Èáïñ»³ÙáÝÇ åỽdzÛÇ µ³ó³Ñ³ÛïáõÙÝ ¿ñ, áñ Ù»Í óÝóáõÙ ¿ñ »ñÇï³ë³ñ¹ ØÇßáÛÇ Ñ³Ù³ñ: §ÞñçÇÏ Ë»É³·³ñáõÃÛ³Ý ¹»åùÁ¦ª 1922 Ãí³Ï³ÝÇÝ, ³Ûë Ý»ñùÇÝ áñáÝáõÙÝ»ñÇ ÍÝáõÝ¹Ý ¿ñ, ³Ûë ï»ùëïáõÙ ³ñ¹»Ý ³éϳ ¿ ØÇßáÛÇ µ³ó³éÇÏ Ó»é³·ÇñÁ: лﳷ³ ï³ñÇÝ»ñÇÝ Ýñ³ ·ñãÇ ï³Ï ųÝñ»ñÁ ѳçáñ¹»Éáõ ¿ÇÝ Çñ³ñª ëï»ÕÍ»Éáí Ó³ÛÝ»ñÇ Ñ³ñ³÷á÷áË ½·³ÛáõÝ ÙÇ ßÕó, áñÝ Çñ µ³½Ù³½³ÝáõÃÛ³Ùµ ¨ ë³ÑáõÝ ³ÝóáõÙÝ»ñáí ¹³éÝáõÙ ¿ ØÇßáÛÇ ³ÛÝù³Ý ÇÝùݳïÇå ï»ùëï»ñÇ Ù³ñÙÇÝÁ: øë³Ý³Ï³Ý Ãí³Ï³ÝÝ»ñÇÝ Ý³ µ³í³Ï³Ý ³ÏïÇí Ï»ñåáí ѳٳ·áñͳÏóáõÙ ¿ Le Disque vert (γݳã ëϳí³é³Ï) ³í³Ý·³ñ¹ ³ñí»ëïÇ ³Ùë³·ñÇÝ, áñÇ ÑÇÙݳ¹ÇñÝ ¿ñ üñ³Ýó лɻÝëÁ: øë³Ý³Ï³Ý Ãí³Ï³ÝÝ»ñÇ í»ñçÇÝ Ý³ ·ÝáõÙ ¿ ö³ñǽ ¨ Ç í»ñçá áñáßáõÙ µÝ³ÏáõÃÛáõÝ Ñ³ëï³ï»É ³ÛÝï»Õ: лﳷ³ Çñ áÕç Ï»Ýë³·ñáõÃÛ³Ý ÁÝóóùáõÙ ØÇßáÝ ÏÉé»ñ µ»É·Ç³-


Ï³Ý Çñ ³ñÙ³ïÝ»ñÇ Ù³ëÇݪ Çñ áÕç ëï»Õͳ·áñÍáõÃÛáõÝÁ ϳñÍ»ë ϳéáõó»Éáí Çñ ͳ·Ù³Ý, ÇÝãå»ë¨ ³ÛÝ ³Ù»ÝÇ ¹»Ù, áñ ϳåáõÙ ¿ñ Ýñ³Ý Çñ ÍÝݹ³í³ÛñÇÝ: ØÇßáÝ ³ÛÝ Ñ»ÕÇݳÏÝ»ñÇó ¿, áñáÝó ¹»åùáõÙ ã³÷³½³Ýó ¹Åí³ñ ¿ Ëáë»É ųÝñ³ÛÇÝ ï³ñµ»ñ³ÏáõÙÝ»ñÇ Ù³ëÇÝ: àñï»±Õ »Ý ëÏëíáõÙ ¨ ³í³ñïíáõÙ µ³Ý³ëï»ÕÍáõÃÛ³Ý ë³ÑÙ³ÝÝ»ñÁ, DZÝã Ó¨³Ï»ñåáõÙ ï³É óï»ñ³Ï³ÝáõÃÛ³Ý ³ÛÝ ³Ý³ÝáõÝ §½ñá ٳϳñ¹³ÏÇݦ, áñ µÝ³Ï»óÝáõÙ ¿ ³Ûë ï»ùëï»ñÁ Ó³ÛÝ»ñÇ ã¹³¹³ñáÕ µ³½Ù³½³ÝáõÃÛ³Ùµ ¨ ùݳñ³Ï³Ý Ñ»ñáëÇ ÷á˳ϻñåáõÙÝ»ñáí: ØÇßáÝ Ï³ñÍ»ë ³Ûë ϳ٠³ÛÝ Å³ÝñÇÝ ¿ ¹ÇÙáõÙ ³í»ÉÇ ßáõï ųÝñ³ÛÇÝ ó³Ýϳó³Í ÙdzíáñÇ ë³ÑÙ³ÝÝ»ñÁ Ù³ïݳóáõÛó ³Ý»Éáõ ѳٳñ, ù³Ý »ÉÝ»Éáí ųÝñ³ÛÇÝ ÇÝã-áñ ݳ˳ëÇñáõÃÛáõÝÇó: лÝó ÇÝùÁ µ³í³Ï³Ý Ñ»·Ýáñ»Ý ¿ ³ñï³Ñ³Ûïí»É ³Ûë Ù³ëÇÝ. §ºÃ» ¹áõù ÙÇ ³Ý·³Ù Ó»éùÇó µ³ó »ù ÃáÕ»É ·ñ³Ï³Ý ųÝñ»ñÁ, Ýñ³Ýù áñ ѳëï³ï Ó»½ Ó»éùÇó µ³ó ã»Ý ÃáÕÝǦ: Üñ³ ëï»Õͳ·áñÍáõÃÛ³Ý Ù»ç µ³Ý³ëï»ÕÍáõÃÛáõÝÝ»ñÇó µ³óÇ Ï³ñ»ÉÇ ¿ ³é³ÝÓݳóÝ»É ÙÇ Å³Ýñ, áñ ã³÷³½³Ýó ѳñáõëï ³í³Ý¹áõÛà áõÝÇ ³ñ¨ÙïÛ³Ý ³ñÓ³ÏÇ ¨ åỽdzÛÇ Ù»çª ×³Ý³å³ñÑáñ¹³Ï³Ý å³ïáõÙÝ»ñÁ. ³ÛÝåÇëÇ ÅáÕáí³ÍáõÝ»ñÇ ÑÇÙùáõÙ, ÇÝãåÇëÇù »Ý ¾Ïí³¹áñÁª (1929Ã.), ϳ٠´³ñµ³ñáëÁª ²ëdzÛáõÙ (1933Ã.), ²ÝñÇ ØÇßáÛÇ Çñ³Ï³Ý ׳ݳå³ñÑáñ¹áõÃÛáõÝÝ»ñÝ »Ý ɳïÇÝ³Ï³Ý ²Ù»ñÇϳÛÇ ¨ ²ëdzÛÇ ÙÇ ß³ñù »ñÏñÝ»ñ: ֳݳå³ñÑáñ¹áõÃÛáõÝÁª Çñ³Ï³Ý ¨ Ùï³ó³ÍÇÝ áã ÙdzÛÝ ØÇßáÛÇ ëÇñ»ÉÇ Ñ»ñáëǪ äÉÛáõÙÇ ³Ù»Ý³µÝ³Ï³Ý íÇ׳ÏÝ ¿. ÇÝùÁª Ñ»ÕÇݳÏÁ ׳ݳå³ñÑáñ¹áõÃÛáõÝÁ ³åñáõÙ ¿ñ áñå»ë »ë-Ç Ï³ñ¨áñ³·áõÛÝ ³ñϳÍÝ»ñÇó Ù»ÏÁ: ²ÛÉáõñ ÅáÕáí³ÍáõÝ, áñ ÉáõÛë ¿ ï»ëÝáõÙ 1948 Ãí³Ï³ÝÇÝ, Ý»ñùÇÝ áõÕ¨áñáõÃÛáõÝÝ»ñÇ å³ïÙáõÃÛáõÝ ¿: ÆÙ³óáõÃÛáõÝÁ ³Ý¹áõݹݻñÇó` 1961 ÃíÇÝ, ÃÙñ³ÝÛáõÃÇ, Ù³ëݳíáñ³å»ë` Ù»ëϳÉÇÝÇ ÙÇçáóáí ³ñí³Í Ý»ñùÇÝ ×³Ý³å³ñÑáñ¹áõÃÛ³Ý Ýϳñ³·ñáõÃÛáõÝÝ ¿: Î³Ý Ý³¨ ³ýáñǽÙÝ»ñÇ ¨ ËáñÑñ¹³ÍáõÃÛáõÝÝ»ñÇ ÅáÕáí³ÍáõÝ»ñ, ¨ ³ÛÝáõѳݹ»ñÓ, Ûáõñ³ù³ÝãÛáõñ ¹»åùáõ٠ųÝñ³ÛÇÝ ³Ûë µÝáñáßáõÙÝ»ñÁ ÙÝáõÙ »Ý ³í»ÉÇ ù³Ý å³ÛٳݳϳÝ: »¨ ØÇßáÛÇ áÕç ëï»Õͳ·áñÍáõÃÛ³Ý Ù»çª Ó³ÛݳÛÇÝ Çñ ѳٳÝí³·áí, Ù³ñÙÝÇ ¨ µ³éÇ ãï³ñ³Ýç³ïíáÕ ÁÝϳÉٳٵ, ã³÷³½³Ýó ½·³ÉÇ ¿ óï»ñ³Ï³ÝÁ, µáõÝ åÇ»ëÝ»ñÁ Áݹ³Ù»ÝÁ »ñÏáõëÝ »Ýª ÞÕóݻñÁ ¨Î³éáõóáÕÝ»ñÇ ¹ñ³Ù³Ý, áñ 1938 Ãí³Ï³ÝÇÝ Ñ»ÕÇݳÏÁ ½»ï»ÕáõÙ ¿ äÉÛáõÙ ÅáÕáí³ÍáõÇ Ù»ç: ¸³ñÇ Ù»ç µ³ó³éÇÏ ³Ûë ëï»Õͳ·áñÍáõÃÛáõÝÁ ³ÙµáÕç³óÝáõÙ ¿ ØÇßáÛÇ Ù»Í Ñ»ï³ùñùñáõÃÛáõÝÁ Ï»ñå³ñí»ëïÇ ¨ ³é-


ѳë³ñ³Ï ·ñ³ýÇÏ³Ï³Ý ³ñí»ëïÝ»ñÇ Ýϳïٳٵ, áñ Ýñ³ ѳٳñ ÇÝùݳ½³ï³·ñÙ³Ý ³Ù»Ý³³ñ¹Ûáõݳí»ï áõÕÇÝ ¿Çݪ ï³Ý»Éáí ¹ñëÇ ¨ Ý»ñëÇ ³ÛÝù³Ý »ñ»ñáõÝ Ñ³í³ë³ñ³ÏßéáõÃÛ³ÝÁ: §Î»ñå³ñí»ëïÁ ϳñÍ»ë ÉÇáíÇÝ ³½³ï³·ñ»É ¿ ÇÝÓ¦, - ·ñáõÙ ¿ ݳ Çñ ÏÛ³ÝùÇ Ï³Ý³ÝóÇó Ù»ÏÇݪ ³Ù»ñÇÏáõÑÇ ²ÉÇÝ Ø³ÛñÇßÇÝ áõÕÕí³Í ݳٳÏáõÙ: 1925 Ãí³Ï³ÝÇó Ýñ³ Ù»Í Ñ³÷ßï³ÏáõÃÛáõÝÁ í»ñ³÷áËíáõÙ ¿ Ñ»ï¨áճϳÝ, ß³ï ³í»ÉÇ Éáõñç ³ß˳ï³ÝùÇ. ëï»ÕÍíáõÙ »Ý ³é³çÇÝ Ïï³íÝ»ñÁ: ²é³çÇÝ ³Ý·³Ù óáõó³¹ñíáõÙ ¿ 1937 Ãí³Ï³ÝÇÝ: ²Ûëï»Õ ÝáõÛÝå»ë Ýñ³Ý µÝáñáß ¿ ëï»Õͳ·áñÍ³Ï³Ý Ù»Í µ³½Ù³½³ÝáõÃÛáõÝÁ. çñ³Ýϳñ, ·Í³Ýϳñ, ³ß˳ïáõÙ ¿ñ ݳ¨ ·áõ³ßáí ¨ óݳùáí: ØÇßáÛÇ ëï»Õͳ·áñÍáõÃÛáõÝÁ ¹ÇÙ³¹ñáõÙ ¿ ÁݹáõÝí³Í µáÉáñ µÝáñáßáõÙÝ»ñÇÝ: Ø»ñÅ»Éáí ³ñ¨ÙïÛ³Ý ³ñí»ëïÇ Ï³ñ¨áñ³·áõÛÝ ³í³Ý¹áõÛÃÝ»ñÇó Ù»ÏÁª ¹³ïáÕáõÃÛ³Ý, ÙïùÇ ·»ñ³Ï³ÛáõÃÛáõÝÁ, ³ÛÝ ßñç³ÝóáõÙ ¿ ݳ¨ üñáÛ¹Ç ï»ëáõÃÛ³Ý ¨ Ñá·»í»ñÉáõÍáõÃÛ³Ý Ã³Ýϳ·ÇÝ §³í³Ý¹Ý»ñÁ¦, áñáÝóáí ³ÛÝù³Ý ³é³ïáñ»Ý ëÝí»É »Ý ³Û¹ ï³ñÇÝ»ñÇ µ³Ý³ëï»ÕÍ³Ï³Ý ¹åñáóÝ»ñÝ áõ áõÕÕáõÃÛáõÝÝ»ñÁ. ³é³ÝÓݳå»ë ѳñÏ ¿ ÑÇß³ï³Ï»É ëÛáõñ黳ÉÇëïÝ»ñÇÝ: ØÇßáÛÇ ëï»Õͳ·áñÍáõÃÛáõÝÁ ³Ûëûñ ¿É ÙÝáõÙ ¿ »ëÇ ¨ ùݳñ³Ï³ÝáõÃÛ³Ý ³Ù»Ý³³é»ÕÍí³Í³ÛÇÝ ³ñï³Ñ³ÛïáõÃÛáõÝÝ»ñÇó Ù»ÏÁ ýñ³ÝëÇ³Ï³Ý Å³Ù³Ý³Ï³ÏÇó åỽdzÛÇ Ù»ç: ³÷³ÝóÇÏáõÃÛ³Ý ³ëïÇ׳ÝÇ ³ÏÝѳÛï ³Ûë åỽdzÝ, áñï»Õ µ³é»ñÝ áõ Ù³ñÙÇÝÝ»ñÁ ͳÛñ »Ý ³éÝáõ٠ٳϻñ¨áõÛÃÇÝ, ¨ ٻͳ·áõÛÝ ²ñ³ñÁ ÝÛáõÃÝ ¿, Ù³ñÙÝÇ Ñ³Ý¹ÇåáõÙÁª ÝÛáõÃÇÝ, Ó³ÛÝÇ µ³ËáõÙÁª ï³ñ³ÍáõÃÛ³ÝÁ, ÇëÏ³Ï³Ý ùÝÝáõÃÛáõÝ ¿ Ûáõñ³ù³ÝãÛáõñ ·ñ³ùÝݳ¹³ïÇ, µ³Ûó¨ óñ·Ù³ÝãÇ Ñ³Ù³ñ: ºÃ» µ³é»ñÁ Ù³ñÙÇÝ »Ý, ³å³ ØÇßáÛÇ µ³é»½»ñùÇ Ñ»ï ß÷í»ÉÇë Ï»Ýë³Ï³Ý ³ÝÑñ³Å»ßïáõÃÛáõÝ ¿ ¹³éÝáõÙ å³Ñå³Ý»É ³Û¹ Ù³ñÙÇÝÝ»ñÇ Ýí³½³·áõÛÝ ù³ÛÉ»ñÝ áõ ͳٳÍéáõÃÛáõÝÝ»ñÁ: àñáíÑ»ï¨ ÇÙ³ëïÁ, »Ã» ³ÛÝ ·áÛáõÃÛáõÝ áõÝÇ, ë»ñï³×³Í ¿ Ñ»Ýó ³Û¹ ù³ÛÉ»ñÇÝ, éÇÃÙ»ñÇÝ, µ³éÇ ÑÝãÛáõݳÛÇÝ, µ³Ûó¨ ·ñ³ýÇÏ³Ï³Ý å³ïÏ»ñÇÝ: ºí ³ÛÝáõѳݹ»ñÓ, ³ÛÝù³Ý ï³ñµ»ñíáõÙ »Ý ³Ûë ïáÕ»ñÁª ³Ù»ÝÁ å³ï³Ñ³Ï³Ý ˳ã³ë»ñáõÙÝ»ñÇÝ ÃáÕÝáÕ ËáëùÇ ³ÛÝ Ë³Õ»ñÇó, áñáÝù ã³÷³½³Ýó Ù»Í ï³ñ³ÍáõÙ áõÝ»Ý ÝáñûñÛ³ ýñ³ÝëÇ³Ï³Ý åỽdzÛÇ Ù»ç: ØÇßáÛÇ ïáÕÁ ³í»ÉÇ ù³Ý ×ß·ñÇï ¿, ¨ ë³ ¿ ûñ¨ë ëÛáõñ黳ÉÇëï³Ï³Ý åỽdzÛÇó Ýñ³Ý ³é³ÝÓݳóÝáÕ ³Ù»Ý³Ï³ñ¨áñ ·Í»ñÇó Ù»ÏÁ: üñ³½Á ÝáõÛù³Ý ×ß·ñÇï ¿, áñù³Ý »ñ³Åßï³Ï³Ý áñ¨¿ Ý»ñ¹³ßݳÏáõÃÛáõÝ, áñù³Ý ·Çï³ÏóáõÃÛáõÝÁ Ù³ñÙÝÇ, áñù³Ý


ù³ÛÉÇ ³ÝÑñ³Å»ßïáõÃÛáõÝÁ: àñù³Ý ³é»ÕÍí³Í³ÛÇÝ ³ÛÝ ·ÇïáõÃÛáõÝÁ, áñáí å³ñáÕÇ Ù³ñÙÇÝÁ ×»ÕùáõÙ ¿ ¹³ï³ñÏáõÃÛáõÝÁ áñáß³ÏÇ ÙÇ å³ÑÇ. Áݹ³Ù»ÝÁ ÙÇ ù³ÛÉ Ï³Ù ÙÇ ³ÏÝóñà ³ÛÝÏáÕÙ, ¨ ²ñ³ñÁ ãÇ Ï³Û³Ý³, ¨ Ëáëù»ñÁ ÏÉé»Ý: ØÇßáÛÇ µ³éÁ ²ñ³ñ ¿: ºí óñ·Ù³ÝÇãÁ, ³í»ÉÇ ù³Ý áñ¨¿ Ù»ÏÁ, ³éÇà áõÝÇ Ñ³Ùá½í»É ¹ñ³ÝáõÙª å³ñ½³å»ë µ³Ëí»Éáí ³Û¹ µ³é»ñÇÝ, ³ëïÇ׳ݳµ³ñ í³ñÅí»Éáí ËáëùÇ ³ÛÝ óñïÇÝ, ¹ÇÙ³¹ñáõÃÛ³Ý ³ÛÝ áõÅÇÝ, áñï»Õ ßÝãáõÙ ¿ ØÇßáÛÇ ýñ³½Á. §²Û·ÇÝ ¹Åí³ñ ¿ ͳé»ñÇ Ñ³Ù³ñ¦, - ѳÝϳñÍ Í³·»Éáí ì»ñç³µ³ÝáõÙª µ³ó³ïñ³Ï³Ý-ï»ë³Ï³Ý µÝáõÛÃÇ ÙÇ »ñϳñ å³ñµ»ñáõÃÛ³Ý Ù»ç, ë³ ØÇßáÛÇ ³ÛÝ ïÇå³Ï³Ý, ¹ÇÙ³¹ñáÕ ýñ³½Ý»ñÇó Ù»ÏÝ ¿, áñáÝóáõ٠ϳñÍ»ë ³Ù»Ý ³Ý·³Ù Ëï³ÝáõÙ ¨ í»ñ³ÇÙ³ëï³íáñíáõÙ ¿ åỽdzݪ ³ÛÝù³Ý µ³ó³ñÓ³Ïáñ»Ý ³ÏÝѳÛï ¨ ³ÛÝù³Ý µ³ó³ñÓ³Ïáñ»Ý ³é»ÕÍí³Í³ÛÇÝ: »° å³ïÏ»ñ³ÛÇÝ Ñ³Ù³Ï³ñ·Ç, û° µ³é³ù»ñ³Ï³Ý³Ï³Ý ϳ٠߳ñ³ÑÛáõë³Ï³Ý ï»ë³ÝÏÛáõÝÇó ØÇßáÛÇ Ùáï áãÇÝã »ñµ»ù ãÇ Ù³ïáõóíáõÙ ëå³ëí³Í ϳ٠å³ïß³× å³ÑÇÝ: äÉÛáõÙÁ §½µ³ÕíáõÙ ¿ ùÝ»Éáí¦, ÙÇÝã¹»é Ýñ³ ÏáÕùÇÝ ÏÝáç §å³ï³éÝ»ñݦ »Ý ÉáÕáõÙ, äÉÛáõÙÁ Ùïù»ñÇ Ù»ç ¿ ÁÝÏÝáõÙª §Ñ³ßٳݹ³ÙÝ»ñÇÝ Ó»éù»ñÇó ϳ˳ͦ, §µ³Ý³ÝÛ³Ý é»ÅÇÙÇó¦ ëáÕ³Éáí ·³ÉÇë ¿ ³ÝͳÝáà ÙÇ ûÓ. å³ïÏ»ñÝ»ñ, áñ ³é³çÇÝ Ñ³Û³óùÇó Ëáñà ϳñáÕ »Ý Ãí³É Ñ³Û ÁÝûñóáÕÇÝ: ´³Ûó ã½ÇçáÕ ³Ûë ¹ÇÙ³¹ñáõÃÛ³Ý Ù»ç ¿ ³Ù÷á÷í³Í µ³éÇ ÏÛ³ÝùÁ: Þáõß³ÝÇÏ Â³Ùñ³½Û³Ý




LA COLLECTION La création de cette collection de littérature francophone contemporaine en édition bilingue français-arménien est le prolongement d’un travail éditorial engagé par les éditions Actual Art depuis plusieurs années. Les activités multiples de cette structure de création et de diffusion culturelle l’ont placée au carrefour de différentes disciplines: arts visuels, critique d’art, essais, poésie, patrimoine… Au coup par coup, au fil des rencontres et des opportunités, des ouvrages ont vu le jour, nombre d’entre eux dans le domaine de la littérature et publiés pour la plupart en éditions bilingues. Pour Actual Art, il s’agit aujourd’hui de proposer un travail raisonné et prospectif qui vise à combler en partie les lacunes de jour en jour plus flagrantes en Arménie quant à la connaissance et à la diffusion de la littérature francophone contemporaine. La collection «Littérature francophone contemporaine» est portée par un comité éditorial franco-arménien chargé d’établir un corpus prioritaire et un ordre de publication. Déjà paru: Jean Giono, L’Homme que plantait des arbres et autres nouvelles, traduit par Nevart Vardanian, Actual Art, Erevan, 2007.


t{?{Z{k4 E2 üñ³ÝëdzϳÝ, ÇÝãå»ë ݳ¨ ³ÛÉ ýñ³Ýë³Ëáë »ñÏñÝ»ñÇ Å³Ù³Ý³Ï³ÏÇó ·ñ³Ï³ÝáõÃÛ³Ý »ñÏÉ»½íÛ³Ý (ýñ³Ýë»ñ»Ý ¨ ѳۻñ»Ý) ѳí³ù³ÍáõÇ ëï»ÕÍáõÙÁ »ñϳñ ï³ñÇÝ»ñÇ Ññ³ï³ñ³Ïã³Ï³Ý ³ß˳ï³ÝùÇ ³ñ¹ÛáõÝù ¿, áñ ݳ˳ӻéÝ»É ¿ ²Ïïáõ³É ²ñí»ëïÇ Ññ³ï³ñ³ÏãáõÃÛáõÝÁ£ Øß³ÏáõÛÃÇ ëï»ÕÍÙ³Ý ¨ ï³ñ³ÍÙ³Ý µ³½áõÙ ·áñÍáõÝ»áõÃÛáõÝÝ»ñÁ, ï³ñµ»ñ µÝ³·³í³éÝ»ñ »Ý Áݹ·ñÏáõÙ© ï»ëáÕ³Ï³Ý ³ñí»ëï, ³ñí»ëïÇ ùÝݳ¹³ïáõÃÛáõÝ, ¿ëë», åỽdz, ųé³Ý·áõÃÛáõÝ©©© Ø»ÏÁ ÙÛáõëÇ »ï¨Çó, ѳݹÇåáõÙÝ»ñÇ Å³Ù³Ý³Ï ¨ å³ï»Ñ ³éÇÃÝ»ñáí ÉáõÛë ï»ë³Ý µ³í³Ï³Ý Ãíáí ·áñÍ»ñ, áñáÝó Ãíáõ٠ݳ¨ª ·ñ³Ï³Ý ëï»Õͳ·áñÍáõÃÛáõÝÝ»ñ, Ù»Í Ù³ëÁ »ñÏÉ»½íÛ³Ý Ññ³ï³ñ³ÏáõÃÛ³Ùµ£ ²Ûëûñ ²Ïïáõ³É ³ñí»ëïÇ ³éç¨ ËݹÇñ ¿ ¹ñíáõÙ ïñ³Ù³µ³Ý³Ï³Ý ¨ Ñ»é³Ýϳñ³ÛÇÝ ³ß˳ï³Ýù Çñ³Ï³Ý³óÝ»É, áñÇ Ýå³ï³ÏÝ ¿ ÉÇÝ»Éáõ Ù³ë³Ùµ Éñ³óÝ»É ³ÛÝ µ³ó»ñÁ, áñáÝù ûñ»óûñ ³í»ÉÇ »Ý Ëáñ³Ýáõ٠г۳ëï³ÝáõÙ ýñ³ÝëÇ³Ï³Ý Å³Ù³Ý³Ï³ÏÇó ·ñ³Ï³ÝáõÃÛ³Ý ×³Ý³ãÙ³Ý ¨ ï³ñ³ÍÙ³Ý áÉáñïáõÙ£ §üñ³ÝëÇ³Ï³Ý Å³Ù³Ý³Ï³ÏÇó ·ñ³Ï³ÝáõÃ۳ݦ ѳí³ù³Íáõ ëï»ÕÍ»Éáõ ·áñÍáõÙ Ý»óáõÏ ¿ ϳݷÝáõÙ ýñ³Ýë¬Ñ³ÛÏ³Ï³Ý Ññ³ï³ñ³Ïã³Ï³Ý ÙÇ Ù³ëݳÅáÕáí, áñ ѳÝÓÝ ¿ ³éÝáõ٠ѳëï³ï»É ³é³çݳϳñ· ѳí³ù³Íáõ ¨ Ññ³ï³ñ³ÏáõÃÛ³Ý Ï³½Ù³Ï»ñåã³Ï³Ý ѳñó»ñÁ£ ²ñ¹»Ý Ññ³ï³ñ³Ïí³Í` Ä³Ý ÄÇáÝá سñ¹Á, áñ ͳé»ñ ¿ñ ïÝÏáõÙ »õ ³ÛÉ Ýáí»ÉÝ»ñ, óñ·Ù³ÝáõÃÛáõÝÁ Üí³ñ¹ ì³ñ¹³ÝÛ³ÝÇ, ²Ïïáõ³É ²ñí»ëï, 2007:


COmITE EdITOrIAL Collection Littérature francophone contemporaine Président: Patrick Bazin Coordination: Annie Monnerie Bruno Vencendeau Karine Bec Léon Azatkhanian Comité éditorial: Amalia Chahoumian, Laurent Gremaud, Anelka Krikorian, Violette Krikorian, Naïra Manoukian, Mkrtich Matevosyan, Gérard Meudal, Rouzan Mirzoyan, Mariné Petrossian, Chouchanig Tamrazian, Nevart Vartanian, Ina Yeritzian, Lilith Zakarian Avec le soutien de l’Ambassade de France en Arménie En partenariat avec la Bibliothèque Municipale de Lyon (France), et la Bibliothèque Nationale pour la jeunesse Khenko - Aper Remerciements à: Laurence Mundler, Alice Azathkhanian, Festival Est-Ouest (Die, France)

ACTuAL ArT Créé en 1995, Actual Art est une organisation culturelle (NGO) dont la vocation est de développer un espace d’expression et d’échanges culturels, en particulier dans l’art contemporain. Actual Art édite la revue «a» qui tente d’énoncer les principales problématiques de ce secteur, en accompagnant l’actualité de la création et en comparant les grandes tendances artistiques observables dans différentes régions du monde. Actual Art a également publié en éditions bilingues des œuvres littéraires et poétiques, arméniennes et étrangères, appartenant au patrimoine classique aussi bien qu’à la production contemporaine. Parmi les auteurs qui figurent au catalogue: Baudelaire, Picasso, Pouchkine, Mandelstam...


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{i@4E{g {u?X<@ ²Ïïáõ³É ³ñí»ëïÁª ëï»ÕÍí³Í 1995 ÃíÇÝ, Ùß³ÏáõóÛÇÝ Ï³½Ù³Ï»ñåáõÃÛáõÝ ¿ (NGO), áñÇ ÏáãáõÙÝ ¿ ½³ñ·³óÝ»É Ñ³ïϳå»ë ųٳݳϳÏÇó ³ñí»ëïÇ ³ñï³Ñ³ÛïÙ³Ý áÉáñïÁ ¨ Ùß³ÏáõÃÛ³ÛÇÝ ÷á˳ݳÏáõÙÝ»ñÁ£ ²Ïïáõ³É ³ñí»ëïÁ Ññ³ï³ñ³ÏáõÙ ¿ ³ ѳݹ»ëÁ, áñÁ Ó·ïáõÙ ¿ µ³ó³Ñ³Ûï»É ³Ûë µ³ÅÝÇ ÑÇÙÝ³Ï³Ý ËݹÇñÝ»ñÁ, áõÕ»Ïó»Éáí ³ñ³ñÙ³Ý ³ñ¹Ç³Ï³ÝáõÃÛáõÝÁ ¨ ѳٻٳï»Éáí ³ñí»ëïÇ ¹Çï³ñÏíáÕ Ù»Í Ñ³ÏáõÙÝ»ñÁ ³ß˳ñÑÇ ï³ñµ»ñ ßñç³ÝÝ»ñáõÙ£ ²Ïïáõ³É ³ñí»ëïÁ Ññ³ï³ñ³Ï»É ¿ ݳ¨ »ñÏÉ»½í۳ݪ ѳۻñ»Ý ¨ ûï³ñ É»½íáí, ·ñ³Ï³Ý ³ñÓ³Ï ¨ ã³÷³Íá ëï»Õͳ·áñÍáõÃÛáõÝÝ»ñ, áñáÝù áã ÙdzÛÝ ¹³ë³Ï³Ý ·ñ³Ï³ÝáõÃÛ³Ý Å³é³Ý·áõÃÛáõÝÝ»ñ »Ý, ³ÛÉ Ý³¨ª ųٳݳϳÏÇó ·áñÍ»ñ£ лÕÇݳÏÝ»ñÁ, áñáÝù Ý»ñϳ۳óí³Í »Ý óáõó³ÏáõÙ© ´á¹É»ñ, äÇϳëëá, äáõßÏÇÝ, سݹ»Éßï³Ù©©©






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