Rapport de licence maud delacroix

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TABLE DES MATIERES Introduction Mon parcours Découverte d’un cursus

Une approche professionnelle

Apprentissage de l’autonomie

Les problématiques de la présentation

Qu’est-ce que la durabilité en architecture ?

Les techniques alternatives

La valeur du temps

Le rôle de l’architecte et la concertation

Le bâtiment hybride

Comment aborder l’échelle du territoire urbain ?

Le flâneur : à la découverte de...

Avoir un regard d’ensemble

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INTRODUCTION

J’ai intégré l’École Nationale d’Architecture de Paris La Villette après un parcours en classe préparatoire (MPSI puis MP* à Rouen) et suite à mon acceptation dans le bicursus proposé par l’école des ingénieurs de la ville de Paris. Ce rapport d’études est un travail sur des questionnements menés à partir de travaux effectués au cours de ma Licence à l’ENSAPLV, d’enseignements reçus et de stages suivis. Il tente de formuler une présentation pertinente de mon parcours, de mes orientations et de mes perspectives futures. Après avoir fait la synthèse de mes apprentissages et de mes expériences que je me propose de vous présenter dans une première partie, je souhaite aborder le thème de la ville durable dont les problématiques ont piqué ma curiosité avant même mon arrivée dans ce cursus et sont restées au cœur de mes travaux tout le long de ma scolarité. Cette deuxième partie s’oriente, dans un premier temps, sur les ambiguïtés de la définition du terme « durabilité » aujourd’hui galvaudé puis développera, dans un deuxième temps, mes questionnements sur le rôle de l’architecte et de l’urbaniste à l’échelle d’un territoire urbain.

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MON PARCOURS Découverte d’un Cursus Il me semble que la première année de License est une année d’introduction, de découverte. J’en ai suivi pratiquement tous les enseignements. Ainsi la plastique était inscrite à notre programme de bicursus dans l’optique d’ouvrir nos horizons, d’élargir nos champs de compétence mais avant tout nos champs de réflexions. En effet, après deux années passées en classe préparatoire où tous les apprentissages sont scolaires, encadrés et rigoureusement scientifiques, l’administration de l’EIVP pressentait que notre débarquement vers le domaine artistique, conceptuel et réflexif de l’architecture allait être quelque peu périlleux. Et même si, dès mon arrivée dans ce cursus, je me suis sentie en phase avec cet aspect de l’architecture, je n’oublierai pas les conversations argumentées sur l’utilité ou non d’une matière où on « apprenait à gribouiller ». A l’époque, j’aimais dessiner et rêvasser ; aujourd’hui j’ai appris à laisser mon esprit s’enivrer d’idées en laissant le crayon courir sur la feuille pour ensuite utiliser ma raison et ordonner ces idées.

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Parmi les enseignements de première année, je regrette de ne pas avoir suivi la sociologie sur l’ensemble des deux semestres. En effet, dans le groupe de TD que j’ai intégré au deuxième semestre, M. Barmack avait décidé de poursuivre et d’approfondir leurs études du premier semestre. J’ai donc dû rattraper un retard conséquent ce qui m’a amenée à négliger certaines étapes. Or j’ai beaucoup apprécié ces premiers moments de recherches : trouver un document officiel ou bien une archive personnelle sur un bâtiment. Quand je me suis plongé dans la chronologie de la maison de mes parents, je me suis aperçue que je pouvais tisser des liens historiques et culturels vers des milliers d’informations ; j’ai découvert la richesse du bâti à travers son histoire et j’ai été frustrée de devoir rendre un travail non-abouti. 3 4


Aujourd’hui je laisse à disposition, dans ma famille, le carnet A3 que j’avais alors réalisé car je sais que ce travail de recherche, bien qu’incomplet, soulève la curiosité de mes proches qui connaissent bien la Ferme de Calais actuelle.

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L’atelier de projet que j’ai suivi, animé par Gerald Gribé et Laurent Sevestre, m’a énormément marqué pour la suite de mes études. Il m’a fait prendre conscience d’une part du plaisir et du goût que j’avais pour l’architecture et d’une autre part des difficultés que je pouvais rencontrer pour atteindre un niveau satisfaisant. Cet atelier m’a amenée à savourer la valeur des références architecturales qui me semblaient abstraites durant les cours de théorie et les cours d’histoire, à percevoir les ambiguïtés d’un site et d’une étude et m’a lancée sur mes questionnements quant aux usages, aux alternatives possibles dans des modes de vie aux habitudes ancrées. J’ai également appris à reconnaitre mes lacunes en dessin, en esprit de concision et en innovation. Ces lacunes m’ont amenée à travailler les mots, la clarté de mes raisonnements, le dessin par la pratique et l’utilisation de références comme point de départ et d’articulation de mes projets.

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égende : Exercices de Plastique et TD de Sociologie (L1)

1 - Modèle proposé par M. Godart 2 - Dessin avec contrainte sur format Raisin

3 & 4 - Extrait du Carnet A3 sur l’étude historique de la Ferme de Calais

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La deuxième année à l’EIVP introduit de premiers projets en groupe : le projet construction où dans une équipe de quatre étudiants, j’ai participé aux études techniques (thermique, acoustique, éclairage, structure, accessibilité etc…) d’un projet dont mes camarades avaient effectué la conception architectural. Le projet eau, nous étions un groupe de cinq et nous avons dimensionné et projeté un réseau d’eau potable, un réseau d’assainissement, de gestion des eaux de pluie et de gestion des déchets sur une Zone d’Aménagment Concertée de trente-deux hectares à Lille. J’ai pris du plaisir à faire ce projet car mes compétences en dimensionnement (calculs et techniques) étaient mises au service d’une réflexion sur l’espace créé : le bâtiment ou bien l’espace public et le parc. Cependant si ces projets ont orienté mes questionnements, ma réflexion durant cette seconde année; c’est principalement par les exercices proposés par Olivier Chaslun et Denis Gabbardo en atelier de projet que j’ai progressé. L’année s’est déroulée difficilement et c’est avec difficulté que je reviens dessus pour admettre tout ce que cela m’apporté alors que j’en garde un souvenir désagréable de pression et de stress. Chaque semaine avait en effet son lot d’angoisses entre la charge de travail demandé par les deux écoles, la peur de décevoir mes groupes de travail, mes professeurs et moimême face à l’engagement que j’avais pris en entrant dans cette formation

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Les exigences de l’atelier de projet étaient bien supérieures à toutes les autres matières, aussi quand je reviens sur cette année, ce sont ces heures passées à dessiner au crayon papier sur calque des plans parfaitement précis, avec un souci du détail méticuleux qui me reviennent à l’esprit. L’exercice du deuxième semestre, en nous proposant de commencer par analyser des logements de référence, m’a amenée à définir ce qu’est un logement générique. Il me semble aujourd’hui que c’était une base fondamentale. Je ne crois pas qu’il y ait une réponse formelle définitive mais cette question fondamentale de ce qui va faire un bon logement doit former l’étape initiale d’un projet de logement. Personnellement, j’ai proposé un immeuble de logement collectif où chaque appartement profite d’au moins deux orientations solaires différentes, d’un espace extérieur et d’une distribution intérieure sur deux niveaux. 6

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Ces problématiques sur le logement et son générique ont été complétées par la lecture de l’ouvrage Habitat de François Bellanger qui questionne les habitudes des usagers et leur vision non-professionnelle de l’espace. L’importance de l’usager et donc de la sociologie, que j’avais jusqu’ici abordé comme un travail personnel et historique, est alors passé au premier plan.

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égende : Exercices de l’Atelier de Projet avec M. Chaslun (L2) 1 - Perspective intérieure d’une bibliothèque privée 2 - Perspective extérieure d’une bibliothèque privée 3 - Schémas : du logement générique au logement collectif 4 - Plan d’un niveau d’immeuble à logements collectifs

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Une

approche professionnelle

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Une démarche que je n’avais jamais effectuée auparavant était celle de me rendre à la mairie, de consulter des permis de construire, d’obtenir des informations sur une parcelle, un quartier et des règlements d’urbanismes. Or il s’agit très certainement d’une démarche incontournable, administrative, du métier d’architecte. Il est curieux de voir que, à peu près au même moment, j’ai dû effectuer cette démarche pour le TD Construction et pour l’atelier de projet. En posant des questions à ce sujet, lors de mes rencontres avec des professionnels, j’ai donc enfin appris ses formalités, ses objectifs, ses contraintes et ses avantages. Parmi les professionnels que j’ai contactés lors de ce semestre, Laetitia Lesage de l’agence LEMEROU a accepté de nous donner une interview. J’ai ainsi aussi eu l’occasion d’entrer dans le bureau de travail d’une agence d’architecture ; pendant une après-midi j’en ai aperçu le fonctionnement. Mais l’important dans toutes ces prises de contact, c’est que je commence à me faire un répertoire de relations dans le monde de l’architecture… Que ce soit l’agence Méandre (du propriétaire de la maison étudiée en projet), l’agence LEMEROU, ou les différents architectes présents et rencontrés lors de la présentation publique qui était l’exercice final proposé par M. Bourdier, je pense que dans tous les cas il est à mon avantage d’avoir discuté avec eux : j’ai à la fois appris de leur point de vue et me suis fait connaître dans l’optique d’un stage… Grâce à cette rencontre avec Laetitia Lesage, nous avons eu l’opportunité de pouvoir assister à des réunions de chantier. Nous étions en effet invités au suivi des travaux Sentier de la Ferme. De par mon stage d’encadrement à la mairie de Paris (dans le cadre de l’EIVP), j’avais déjà pu faire du suivi de chantier pendant 2 mois mais je pense que dans un cursus exclusivement archi, ce genre de rencontre, sur le terrain, sont la clé d’une expérience riche et variée.

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Apprentissage

de l’Autonomie:

Une critique, prise avec le recul d’une conversation après rendu avec nos professeurs, m’a fait remarque que nous avions abordé notre projet de façon beaucoup trop scolaire, répétant les méthodes apprises les années précédentes en atelier de projet alors que M. Bourdier attendait plus d’autonomie, d’initiative. Nous n’étions pas partis sur les bons axes : nous cherchions des solutions « convenables » au lieu de nous poser des questions pertinentes. En suivant leurs conseils, nous avons commencé à nous poser une multitude de questions qui nous ont rapidement perdus ; j’ai alors effectué, à plusieurs reprises, un document de synthèse : l’objectif était de mettre en relation nos questions et nos idées sur des axes de références. De là est né notre projet final. Nous nous sommes aperçus que certain sujets nous tenaient plus à cœur que d’autres mais que cela pouvait aussi varier d’une semaine à l’autre, selon nos expériences personnelles, nos méthodologies et les remarques des professeurs ou de notre entourage sur notre travail. En particulier, j’ai eu envie de me pencher sur la durabilité sociale d’un projet qui passait par la connaissance d’un lieu (histoire et influences) et le respect de ses habitants (futurs ou actuels).

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égende : TD Construction (L3) et stage EIVP

1 - Comparaison d’un projet et de son permi de construire 2 - Etude technique et observation de réalisation d’un détail technique

3 - Couverture de mon rapport de stage encadrement

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Les

problématiques du rendu et de la présentation

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Sur cette dernière année de Licence, la question de la présentation est devenue relativement centrale. Je peux l’identifier clairement dans les exercices proposés en Atelier de projet mais également en cours de formes urbaines. M. Bourdier nous a contraints à réfléchir aux enjeux d’une présentation publique. M. Njoo nous entraîne à clarifier nos propos sous forme de diagrammes, de schémas qui améliorent la lisibilité du projet, de ses principes et du processus d’idées qui l’accompagne. Les consignes du devoir de formes urbaines nous invitaient à valoriser notre lecture d’un essai d’architecture en en rendant comptant sous la forme d’une quatrième de couverture. Il ne s’agit plus, selon moi, de faire un simple résumé mais d’extraire les problématiques et enjeux essentiels et de les formuler pour donner envie de lire le livre. En plus de véhiculer de l’information, le document réalisé soulève une question de séduction qui, finalement, touche l’architecture quotidiennement. Un architecte conçoit des espaces qui seront habités mais il doit dans un premier temps les vendre. A travers ces exercices, j’ai pu expérimenter la difficulté de prendre la parole, d’expliciter son avis avec des propos clairs. En particulier j’ai éprouvé des difficultés à partager la parole au sujet d’un travail réalisé en binôme : laisser du temps de parole à son camarade, ne pas le contredire ou reformuler toutes ses phrases ; il était également délicat d’exprimer mes reproches face à aux qualités de restitution de mon partenaire. Enfin j’ai dû prendre sur moi face aux critiques parfois négatives et déclarées sans pincette de la part du jury car je prenais très à cœur mes projets. Il est très facile de se vexer dès le début d’une critique mais je sais aujourd’hui que c’est ainsi qu’on passe à côté de corrections pertinentes. J’ai également pu remarquer et dû accepter les injustices, les inégalités entre deux corrections. Le déroulement d’une présentation dépend en effet toujours d’un nombre élevé de facteurs : l’heure de passage, la fatigue du jury, l’humeur du candidat etc… J’apprécie les corrections avec des intervenants extérieurs à l’école voire extérieur à l’architecture, qui amènent des questions enrichissantes et parfois surprenantes. Je trouve qu’ils mettent parfois plus en avant les lacunes sur la présentation graphique car des non-professionnels ne peuvent pas toujours deviner là où on veut en venir. 10

L égende :

Fiche de lecture en Formes Urbaines


Toutes ces questions sur la place de la représentation dans l’architecture ont connues un aboutissement dans la dissertation de philosophie rendue ce semestre. A partir d’une citation d’Adolf Loos dans « Architecture » et des théories de la dépiction, j’en ai conclu qu’un architecte doit avoir une double compétence : il doit à la fois concevoir des espaces physiques réussis et des représentations non fidèles attirantes ; sa production est à la fois physique et picturale.

La

part du travail collectif

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Pour la présentation publique à Montreuil, nous étions invités à organiser l’ensemble de l’événement en tant que groupe autonome. Je me suis alors investie dans ces activités collectives (tournage d’un film de présentation, réalisation et distribution d’un flyer), j’ai principalement été marquée par les débats houleux sur la position d’une ou deux tables, sur la taille d’une police ou la couleur d’un scotch qui m’ont semblés futiles mais m’ont appris la sensibilité et l’importance du compromis lors d’un travail collectif.

Les

thématiques imposées

:

Comme l’EIVP où les semestres sont thématisés : environnement puis construction, eau et enfin espace public, l’ENSAPLV tente d’orienter les formations des ateliers de projet chaque année afin d’aborder les différentes domaines de l’architecture. Malheureusement j’ai pu observer une certaine redondance de thème et l’absence ou le manque d’approfondissement d’autres problématiques. Ceci est probablement dû à un manque de communication administrative entre les professeurs. Ainsi j’ai fait du logement dès ma première année (premier semestre) pour en refaire en deuxième année et encore en troisième année. Je regrette ainsi que l’exercice proposé par M. Bourdier se soit concentré sur l’exemple d’un logement et pas sur une solution à l’échelle du territoire urbain. Ce n’est que lors du dernier semestre que j’ai pu choisir des ateliers abordant ces problématiques qui me tiennent à cœur : celle de la ville et de son territoire. J’ai donc volontairement fait le vœu d’étudier avec Mme Rouvillois sur le territoire de la Plaine Saint-Denis et d’intégrer l’atelier de Jim Njoo sur les questions de la gare de Banlieue. 11


Faire le point chronologiquement m’a permis de prendre du recul sur mes acquis mais également sur les méthodes d’enseignements que j’ai rencontrées lors de mon parcours. Et c’est à partir de cette synthèse que j’ai également relevé à chaque étape les thématiques qui me tenaient à cœur et qui m’ont confortée dans l’envie de développer la problématique de « La Ville Durable ».

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LA VILLE DURABLE Aborder le thème de la ville durable avec le regard enrichi que m’apporte la double formation de l’EIVP et l’ENSAPLV constitue en quelque sorte un aboutissement vis-à-vis de mes attentes lors de mon entrée dans ces écoles. Après avoir passé les concours pour les écoles d’ingénieurs, j’étais perdue. Je n’avais jamais envisagé de faire des études scientifiques mais j’avais plutôt rêvé d’avoir le talent pour écrire si ce n’était pas des romans, des articles ou des mémoires en faisant de la recherche en philosophie, en littérature ou en sociologie mais mes résultats scolaires avaient amené à penser mes professeurs que je pourrais faire tout ce que je veux après une prépa. Aussi quand j’ai dû choisir une école, je n’étais pas préparée et leurs plaquettes de présentation, toute plus vendeuses les unes que les autres, ne me convainquaient. Jusqu’à ce que je sois invitée à l’université d’été organisée par l’EIVP. Le thème était cette année-là : « le développement durable et le génie urbain ». J’ai donc participé à cette université d’été où j’ai eu l’occasion d’assister à des conférences tenues par des professionnels allant de l’origine de la nourriture en île de France jusqu’à la fervente critique des éoliennes urbaines. C’est ainsi que j’ai décidé d’entrer à l’EIVP.

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Je ne sais pas si on peut expliquer mon penchant pour l’échelle de la ville et son territoire plutôt que celle du bâtiment ou du logement par mon caractère mais j’ai le sentiment de m’y refléter. En effet, j’ai une certaine facilité à être à l’aise en groupe, à percevoir des tendances collectives et à vouloir m’engager dans des associations variées; j’aime avoir une vision globale des choses et comprendre comment fonctionne un système complexe. En revanche j’éprouve des difficultés dans des relations sociales plus individuelles où la peur de l’échec ou de la déception et la singularité d’une personne m’impressionnent, je ne pense pas avoir l’autorité pour juger un individu.

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Plus particulièrement, je pense aussi avoir l’ambition de vouloir changer la société, d’évaluer ses dysfonctionnements et d’y remédier, pour une vie équilibrée et heureuse et je crois que cela ne passe pas par l’individu mais pas des choix collectifs, une éducation progressive et partagée. C’est donc cette analyse de moi-même et ma tendance naturelle à choisir des projets à l’échelle du territoire urbain qui m’amènent ici à discuter des problématiques de la ville.

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égende : 1 - Vue projectuelle de la ZAC du Faubaurg d’Arras, Lille 2 - Carte des Bassins Versants en projet Eau (L2) 3 - Photomontage/perspective pour l’Atelier de Projet avec M. Bourdier (L3) 4 - Axonométrie éclatée de la gare pour l’Atelier de Projet avec M. Njoo (L3) 5 - Photo de Paysage pour le cours de Plastique avec Mme Rouvillois (L3) 6 - Extrait du carnet de voyage à Londres (L1) 7 - Croquis pour l’étude paysagère du secteur des murs-à-pêches (L3) 8 - Coupe sur une rue parisienne pour l’Atelier de Projet avec M. Gribé (L1)

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Qu’est-ce que la durabilité en architecture ? Je viens d’une famille nombreuse où les choix de mes parents m’ont sensibilisée à une gestion intelligente de mes ressources. J’ai été amenée à faire des choix équilibrant mes désirs, mes compétences et mes besoins. J’ai également suivi une formation germanophone et j’ai pu observer lors de mes séjours linguistiques les modes de vie adoptés par de nombreuses familles allemandes. Toutes ces expériences m’ont invitée à me pencher plus avant sur cette tendance actuelle qu’est le développement durable. Cependant, je souhaite développer ce sujet à un niveau différent de la vague de mode qui l’entoure ces dernières années. Je voudrais revenir à sa racine « durable » qui ne veut pas dire écologique mais qui désigne un objet possédant des qualités avec une certaine continuité dans le temps.

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Et j’aimerais soulever ainsi les questions de flexibilité, solidité, d’adaptation, de réutilisation ; les questions du traitement des « restes » du passé, des déchets, que ce soit l’eau de pluie, les déchets ménagers, industriels, les ruines, les échecs etc...

La Gestion

des

Eaux Pluviales

Lorsque le projet «eau» m’a été présenté à l’EIVP, j’ai tout de suite eu envie de dépasser les consignes. Nous étions invités à faire du dimensionnement de réseau tout en ayant à l’esprit les nouvelles techniques alternatives. Mais j’ai proposé à mes camarades d’en faire notre axe d’étude : comment repenser l’aménagement d’une ZAC à partir de son système de gestion des eaux pluviales ?

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L’idée était de proposer un parcours de l’eau rendu visible et ludique au moyen de noues, de bassins de rétention minéral intégrés à des places publiques ou bien végétal intégrés dans des parcs. De cette manière, la population pouvait être sensibilisée aux problématiques des inondations et du cycle de l’eau et nous pouvions proposer d’utiliser les surfaces habituellement réservées pour les installations comme des espaces multi-fonctionnels. C’est ainsi qu’est née l’idée de la rivière verte et de la rivière bleue, un ensemble d’espace vert aménagé traversait la ZAC du Nord au Sud et un large réseau de noues, petites et grandes, se développait sur l’ensemble du terrain transformant l’apparence du secteur en période de pluie. L’impact financier, esthétique, de confort et encore de sensibilisation de notre projet m’a permi de percevoir les conséquences que mes études pouvaient avoir sur la vie d’une population et l’évolution d’un environnement.

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L égende : Projet EAU (L2 - EIVP) (De gauche à droite)

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1 - Coupe sur une place minérale en gradin inondable 2 - Plan d’une place minérale en gradin inondable 3 - Croquis d’un jardin d’habitation inondable 4 - Coupe transversale sur une noue 5 - Coupe longitudinale sur une noue 6 - Carte des Aménagements de Gestion des Eaux Pluviales 7 - Plan d’implantation d’une noue 8 - Coupe d’implantation d’une noue

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La Valeur Temporelle Par ailleurs, l’avantage du terme « durable », c’est qu’il englobe tout à la fois l’architecture et l’urbanisme du passé, d’aujourd’hui et du futur et les connecte dans une relation temporelle intelligente, logique et respectueuse. L’échelle du temps est donc une donnée majeure quand je veux essayer donner une valeur durable à mes projets. Sur le modèle des générations qui m’ont précédée, j’ai l’ambition de « vouloir changer le monde », mais je reproche à la tendance contemporaine de ne pointer du doigt que les erreurs du passé alors que les enseignements de la Villette m’ont amenée à poser un regard critique sur le passé. J’essaie de faire la part des choses entre les qualités d’un savoir-faire, les idées variées des doctrines et le danger des dogmes. A ce stade de ma réflexion, j’aimerais parler de l’exposé que j’ai eu l’occasion de faire en 2ème année sur l’essai d’Aloïs Riegl : Le Culte Moderne des Monuments. En effet, cet ouvrage s’attache à définir les valeurs que nous portons aux éléments du passé avec pour objectif une définition moderne et pratique de « monument ». A travers la définition de ces valeurs (les valeurs de mémoire : valeur de culte, valeur historique, valeur d’ancienneté, les valeurs actuelles : valeur d’art, valeur utilitaire etc…), Aloïs Riegl analyse également nos comportements face aux traces du passé : la restauration, la conservation, la dégradation…

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2 Classes de monument :

XXème siècle Renaissance/ XVème siècle Antiquité/Moyen-äge


L égende : Exposé en Atelier de Projet avec M. Chaslun (L2) 1 - Tableau des classes de monument 2 - Schéma des inclusions entre classes de monument

L égende des pages 18 et 19 : Atelier de Projet avec M. Gribé (L1) 1 - Maquette volumétrique du projet de maison 2 - Axonométrie de la partie supérieure du projet 3 - Schéma régulateur fourni pour la première étape du projet 4 - Maquette au 1/50ème du projet de maison 5 - Plans du projet de maison 6 - Coupe longitudinale du projet de maison

Je trouve que cette hésitation dans l’histoire de la protection des Monuments entre « restauration » (retour à un état identique et parfait à sa création) et dégradation (conservation en l’état et en laissant subir les dégradations naturelles) reflète le balancement actuel entre ceux qui prônent un retour à un stade du progrès passé où les compétences et les activités de l’homme s’équilibraient avec celle de la nature (être capable de vivre sans technologies avec des ressources naturelles) et ceux qui prônent l’hyper technicité comme solution aux dégradations causées par l’activité humaine sur l’environnement (inventions de nouvelles techniques permettant à l’homme de continuer d’améliorer son confort dans un environnement sain). D’un côté, c’est le cycle de la vie : ses bas et ses hauts, qui l’emporte et l’homme doit admettre qu’il a n’a pas besoin d’aller au-delà du progrès technique qu’il a atteint mais se soumettre au rythme de la nature et de l’autre c’est l’idéal de la perfection : la croissance infinie vers une domination complète de ses besoins et de son environnement Je ne souhaite pas prendre position entre ces deux doctrines décrites ici de façon caricaturales mais j’aimerais critiquer la rupture que toutes deux imposent à l’état actuel des choses. Les premiers se retournent vers un état des choses passé et connu où l’on renonce aux conforts actuels et les autres se tournent vers un avenir brillant mais incertain qui dans l’imaginaire des gens ressemble à des objets froids et impersonnels. Et j’ai appris en ces trois années de licence qu’un projet réussi passe aussi par sa continuité d’intégration au tissu existant et aux tendances d’évolution du site dans lequel il s’inscrit.

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Le Rôle

de l’Architecte

La société évolue et ses changements intrinsèques doivent amener les architectes à repenser leur façon de concevoir. En particulier je ne suis pas certaine que la rupture ou la révolution fasse évoluer les mentalités mais je crois que c’est un des rôles de l’architecte d’amener des solutions à la problématique écologique en expérimentant des projets en concertation avec la population. En effet, le phénomène d’individualisation qui touche notre société amène la prise de décision à un niveau collectif et non plus entre les mains d’un pouvoir concentré. L’architecte n’est plus le roi dans le domaine de l’espace. J’ai pu observer qu’il était difficile pour des architectes d’admettre que des personnes n’ayant jamais étudié l’architecture aient une réflexion suffisamment développée pour comprendre et même commenter un projet. Or je tiens à souligner qu’une plus grande partie de la population fait des études, même élémentaires, et tourne un regard critique vers tout ce qui touche son environnement. C’est donc aujourd’hui un de rôles majeurs de l’architecte : dialoguer avec son client. Dès la première année, j’ai été sensibilisée à cette difficulté du métier d’architecte. Ainsi, en atelier de projet, nous avons été invités à décrire ce qui serait pour nous une maison classique pour une famille de 4 personnes. Nous devions préciser sur un A4 comment nous nous l’imaginions, avec quelles qualités, quelles spécificités etc… Nous avons ensuite échangé nos feuilles et les documents sont devenus une commande d’architecture. Nous étions à la fois client (de celui qui avait reçu notre feuille) et maître d’œuvre. Awa était ma cliente. Elle voulait une maison de plein pied, en construction massive, avec un jardin clôturé (en deux partie : devant/derrière) accessible depuis chaque pièce, une cheminée et un garage discret. Ces volontés étaient exprimées sans connaissance du contexte. Je lui ai proposé de travailler sur le principe d’une maison à patio sur un seul niveau afin d’obtenir l’autonomie qu’elle souhaitait pour chacune des pièces vis-à-vis du jardin. Cependant elle ne voulait pas d’un jardin central unique, l’importance qu’avait pour elle le foyer central symbole familial, m’a amenée à un projet composé d’un plan en étoile autour d’une pièce centrale commune. Sur ce principe, nous avons donc trouvé un accord. 20

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Par la suite, les contraintes du terrain imposé m’ont amenée à changer considérablement la forme du projet : en effet d’une disposition carré et à plat. J’ai dû m’adapter à une parcelle toute en longueur avec un dénivelé naturel de pratiquement 7m. Afin de satisfaire l’idéal de maison de ma cliente, je me suis imposée des contraintes fixes : pas de superposition de niveau pour les pièces intimes, autonomie vis-à-vis du jardin et position dominante des pièces de vies communes.

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Ce fut certainement la partie la plus étrange pour moi, dans la relation client/maître d’œuvre. En effet, je m’attachais très fortement à ce qu’Awa m’avait demandé alors que finalement elle était parfaitement prête à faire des concessions, à entendre de nouvelles idées, à accepter une conception qu’elle m’avait précédemment critiquée si je l’argumentais correctement. La relation n’était pas à sens unique et pourtant nous l’avons cru. Je me sentais obligée de la respecter car en tant que cliente et propriétaire du résultat final, elle avait selon moi le droit de m’imposer ses contraintes; et j’ai compris qu’au contraire Awa pensait que l’architecte devait décider car connaissant le projet de A à Z, et ayant des compétences spécialisées c’était à lui de trouver la meilleure solution. Après ce quiproquo qui nous empêchait de prendre des décisions car aucune de nous deux ne s’en sentait le pouvoir, je pense mieux cerner le rôle de l’architecte : c’est lui qui conçoit des solutions (plusieurs) en fonction de l’analyse qu’il fait du site, des besoins du client et de ses connaissances sur l’espace et c’est le client qui choisit selon ses goûts en connaissance des arguments apportés par l’architecte sur chacune des solutions. Mais je dois admettre aussi qu’à la fin du semestre, je considérais plus le résultat de ce projet comme le mien, un projet dont j’étais fière. Et que , aujourd’hui, je ne me souviens plus qui réalisait la maison que j’avais décrite lors de la première séance. Dans une auto-critique, je relève donc mon penchant naturel à m’approprier un projet ce qui est un défaut de l’architecte. Pour qu’un projet durable puisse naître, il faut que tous ses acteurs (celui qui finance, celui qui conçoit, celui qui exploite) aient la même balance de pouvoir.

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La Durabilité Sociale Je viens d’interroger le rôle de l’architecte : son rapport à l’usager ; sa qualité d’écoute (il réalise le besoin/désir d’un autre) contre balancé par sa qualité de conseiller et d’inventeur (il peut proposer de nouveaux modes de vie) ainsi que le programme de l’ENSAPLV nous amène à faire. Cependant, si la relation entre l’architecte et son client doit être questionnée, la relation entre les usagers imposée par l’espace créé par l’architecte doit aussi être questionné. C’est suite au premier semestre de 3ème année, que j’ai appris à reconnaître que la notion de durabilité ne s’appliquait pas seulement/simplement à l’espace et à ses techniques de réalisation mais aussi aux populations, aux usagers et à leurs interactions : c’est la durabilité sociale.

La Concertation Le projet nous proposait de nous interroger sur les questions de densification sur un territoire particulier : les abords des murs-à-pêches à Montreuil. L’exercice nous amenait à choisir une parcelle et à proposer un aménagement sous contraintes : « densifier sans s’étaler ». C’était la première fois qu’une telle problématique politique et polémique m’était présentée dans son contexte réel et, en tant que bicursus en génie urbain, je trouve essentiel d’être confronté dès ses études aux contraintes du terrain. La mise en place d’un projet urbain fait toujours intervenir l’histoire du lieu, ses habitants, ses élus face aux techniciens (architectes, paysagistes, ingénieurs…). A l’EIVP, la concertation s’insère (en tant que matière à part entière) seulement à la fin des études et je la trouve pratiquement inexistante à l’ENSAPLV. La richesse de cet atelier était en effet dans les rencontres organisées avec des personnalités spécialisées sur ce territoire : des membres d’associations, des architectes, des urbanistes, des personnalités politiques etc… et dans les débats que nous organisions autour des questions qui ciblaient ce territoire.

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L égende : Débat public en Atelier de Projet avec M. Bourdier (L3) A droite > Propositions de flyers A gauche > Extraits du carnet A3 contenant le processus du projet


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des

Espaces

de

Vie

Avec Felix, en binôme, nous avions choisi une parcelle où un couple d’architecte avec trois enfants avait transformé un ancien hangar en grande maison familiale en découpant l’immense espace intérieur par de grands plateaux d’espace de vie. Nous sommes partis de nos connaissances pour essayer de proposer un projet de densification : comment augmenter le nombre d’habitants sur cette parcelle ? Nous avons choisi cette maison car elle nous plaisait ; nous souhaitions donc la transformer en mettant en pratique les concepts d’habiter qui nous tiennent à cœur et que nous avions déjà repérés en germe dans cette habitation. Nous avons cherché à exploiter le caractère ouvert et circulant des espaces et leurs interactions visuelles. Par ailleurs, il s’agit d’une maison d’architectes et d’artistes qui possède un atelier. Nous proposions donc d’imaginer un habitat collectif où des espaces de travail seraient envisagés, pensés, articulés en connexion avec l’espace public. Nous avons dégagé des priorités de travail, des objectifs à travers un programme. Nous devions établir un scénario clair pour orienter nos choix à travers nos enjeux. Nous avons abouti à la conclusion que le volume de la maison existante est insuffisant pour densifier avec qualité. Nous avons alors travaillé sur une densification qui augmentait nécessairement le volume existant sur la parcelle. Après nos observations sur l’évolution de la société actuelle, nous avons décidé de proposer un nouveau modèle pour essayer de changer les modes d’habiter où le partage non conventionnel d’espaces modifiera et améliorera les rapports humains. Nous avions également l’idée que les activités au sein de la parcelle et du logement peuvent changer, évoluer, interagir entre elles : les espaces doivent donc être adaptables et communiqués entre eux. Nous avons pris en compte les nuisances sonores, olfactives et visuelles générées par l’activité humaine (que ce soit du domaine du public ou du privé) et par la nature. Les nouveaux espaces conçus devaient proposer un environnement sain à ses occupants.

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Pour ce qui est des nouvelles technologies, supporsant leurs évolutions rapides, notre parti pris fut qu’il n’était pas dans le rôle de l’architecte de les prévoir spatialement. A l’instar du mobilier, c’est au consommateur de les choisir et les placer ; nous proposions, nous, des espaces avec peu de contraintes spatiales (idée de plateaux libres) où les habitants peuvent s’approprier les lieux au travers des aménagements mobiliers. Les observations tirées du PLU et du PADD nous ont amenés à nous conforter dans l’idée que notre parcelle devait être capable d’accueillir des activités de différentes natures : travail, logement etc… Par ailleurs la transformation du quartier résidentiel en centre-ville nous a incités à requalifier le rapport de la parcelle à la rue : nous proposions donc que l’agrandissement interagisse avec la rue par le biais d’un espace de travail professionnel qui jouerait également le rôle d’un espace tampon entre l’espace public et l’habitation privé. Nous souhaitions proposer une conception de l’habitat durable à travers l’utilisation d’espaces aux usages évolutifs, avec des changements de destination possibles. Nous densifions en proposant un partage des espaces où s’effectuent les repas qui sont le lieu de rencontre et un agrandissement de la maison existante par des plateaux pour les espaces considérés privés. L’agrandissement se construit donc en coupe alors que l’existant se lit en plan. Nous proposons une vie sociable durable ; en effet le partage d’espaces clés d’une habitation favorise une discussion/relation, un dialogue permanent entre les habitants. Ces plateaux s’accrochent sur une façade de la maison existante (la moins exposée). A chaque plateau correspond un usage différent. En conséquence le nombre de plateaux ajoutés est calculé selon le nombre d’usages différenciés et nécessaires pour les nouveaux habitants. Le degré d’intimité du plateau, son usage et ses relations aux autres plateaux définissent son niveau. Notre objectif était de proposer des espaces nouveaux entièrement connectés entre eux et avec la maison existante par une circulation continue, fluide qui fait varier les situations/ambiances dans l’habitation. L’enjeu était d’assurer les différents degrés d’intimité pour les activités d’une vie de famille tout en assurant une parfaite liberté de communication d’un espace à l’autre. 24

L égende : Panneau A0 pour la présentation public en Atelier de Projet avec M. Bourdier (L3)


Le Bâtiment Hybride Lorsque naît en 1980 les premières préoccupations sur l’étalement urbain (en Grande-Bretagne), des projets faisant intervenir « la mixité » commencent à apparaître. Cependant le terme mixité est difficile à définir. Aussi, dans l’atelier de Jim NJOO, c’est le bâtiment hybride que nous allons interroger. Face à la critique des grands ensembles où les projets collectifs ont amené la société vers un rejet de la vie collective et un repliement sur la vie privée, nous avons été invités à penser comment pouvait fonctionner un bâtiment/espace à la fois dense (en concentrant différentes activités et intense (traduisant une volonté forte d’intention et d’intensité urbaine).

L égende : Etudes en Atelier de Projet avec M. Njoo (L3) En haut > Documents d’étude du Grand Paris En bas > Proposition d’un plan de programmation

Dans la continuité de mes interrogations sur la durabilité sociale, j’ai pu ici approfondir mes recherches sur les possibilités d’interactions entre les usagers d’un espace, entre les activités. En effet un bâtiment hybride doit être capable d’accueillir une multitude de programmes divers et complexes et mêlés, dans ses acteurs, la sphère privé et public afin de permettre des interactions. Il s’agit non plus seulement d’un mélange d’usages (correspondant au bâtiment mixed-use) mais également d’un mélange d’initiatives. Et si tous les actes d’une vie quotidienne peuvent avoir lieu dans un même bâtiment, le plan doit aussi respecter la rue et sa diversité : l’influence du projet hybride doit s’étendre sur le reste de la ville. Et dans ce sens, le projet se doit de ne pas être autonome ; le bâtiment hybride n’est pas une nouvelle société à part entière (ce qui était l’objectif des Social Condenser voué à l’échec) mais une structure intégrée à la ville et traversée par les flux urbains. La conception d’un programme hybride s’appuie donc sur une conception durable du tissu urbain : elle répond à des besoins de densification des activités urbaines (habiter, consommer, se déplacer ou se cultiver etc…), elle s’enrichit d’un partage des décisions entre les acteurs publics et privés et elle s’articule autour d’une analyse fine des usages. Et comme j’ai beaucoup aimé l’entendre dire en tutorat : « le bâtiment hybride, c’est un mec extraverti » : c’est quelque chose de complexe, qui attire et avec qui on a envie d’échanger. 25


Comment aborder l’échelle du territoire urbain ? De l’analyse précédente de mes travaux et acquis, j’en conclus que la durabilité en architecture est une contrainte complexe qui s’articule autour de différentes notions : l’écologie, le temps, la sociologie. Je vais maintenant montrer comment cet aspect m’a plus passionnée quand cela touchait le domaine de la ville. Dans un premier temps, j’aimerais évoquer le plaisir que j’ai pris à découvrir et faire découvrir un territoire et ses qualités : histoire, architecture, populations (cultures), paysages… Dans un second temps, j’approfondirai mon envie de superviser la conception d’un projet dans sa globalité.

Apprendre

à

1

Flâner

Dès la première année, nous avons dû faire des exercices de reconnaissance de site sur le terrain : étude topographique, du bâti, du programme existant et de ses usages. Ainsi, en atelier de projet, je me suis penchée, en binôme, sur l’étude d’un ilot parisien. Choisi au hasard sur une carte de Paris, nous sommes allés arpenter un îlot du 2ème arrondissement bordé par la rue Tiquetonne et la rue Saint-Denis. Nous avons fait nos premiers relevés en prenant la mesure avec nos corps (1 pas = 70cm, 1 hauteur bras levé = 2m10 etc…), prenant des informations parfois trop précises et négligeant des données architecturales majeures car notre regard n’était pas encore exercé. J’ai apprécié cet exercice car nous étions sur le terrain, en contact avec une architecture utilisée quotidiennement. Nous pouvions la percevoir dans ses conditions réelles à la différence d’une photographie ou des autres moyens de représentation utilisés en architecture. A ce propos, cette expérience m’a permis de donner du sens à certains modes de représentation, à des raccourcis graphiques qui jusqu’alors restaient abstraits 2 26


Mais la partie la plus stimulante, c’est quand nous avons osé frapper à toutes les portes ! Nous essayions d’effectuer un relevé des aménagements intérieurs pour les comparer à nos déductions d’après une lecture des façades. Certaines nous sont restées fermées, des propriétaires ou des locataires nous ont ouvert : certains nous faisaient visiter, d’autres nous laissaient libres. Parfois nous nous glissions derrière un habitant ou profitions d’une porte ouverte : la découverte en était encore plus touchante. C’est de cette manière que nous avons découvert un hôtel très ancien, dont nous avons remis en cause la salubrité et pour lequel nous avons chacun fait une proposition d’aménagement. Mon questionnement s’est alors appuyé sur notre étude précédente en réfléchissant sur les portées esthétiques du projet sur l’homogénéité des façades parisiennes. Le travail sur le terrain s’est donc révélé un moteur de motivation pour mes études et m’a sensibilisée aux problématiques d’insertion urbaine, car de flâner (partir à la découverte d’un territoire sans avoir d’attentes et en mettant en pratique son talent d’observation) dans les rues de Paris m’a laissée réceptive à l’identité formelle et vivante de ces façades caractéristiques de la capitale française.

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L égende : Etudes sur un îlot parisien en Atelier de Projet avec M. Gribé (L1) 1 - Croquis et relevé de la façade de la rue Dussoubs 2 - Relevé en plan de l’occupation programmatique de l’îlot 3 - Panneau A0 sur les relevés à la main dans le périmètre d’étude

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Redécouvrir

un

Territoire

Ce dernier semestre, ayant pris conscience de mon intérêt pour le territoire urbain, j’ai pris soin de choisir les ateliers qui s’y rapportait. C’est ainsi que j’ai obtenu mon premier vœu en plastique où Mme Rouvillois nous invitait à découvrir le territoire de la Plaine-Saint-Denis en suivant l’axe du bus 139. En connaissance de cause, elle avait choisi un terrain en pleine mutation : historiquement le lieu du développement industriel d’île de France avec ses cités ouvrières immigrées et ses usines, il a connu un abandon économique après les crises financières et aujourd’hui la population défavorisée est confrontée aux volontés politiques d’extension de Paris : l’implantation du stade de France a fait l’effet d’un accélérateur et désormais les communes, tout autant que les grands groupes immobiliers construisent sur ce territoire dont la valeur foncière explose. J’habite actuellement à Pantin et je suis quotidiennement face à ces bouleversements urbains qui apportent à la fois un renouveau sain mais créent aussi des fractures dans le tissu existant et des incompréhensions de la part de la population. Pour cette raison, je me suis sentie concernée par les problématiques soulevées dans ce cours. Mais ce que j’ai apprécié, c’est l’angle nouveau avec lequel Mme Rouvillois nous a amenés à découvrir le territoire. A travers le viseur de l’appareil photo et le long d’un parcours déterminé, j’ai appris à observer que la ville pouvait être à l’origine de la composition d’un paysage. Grâce à une méthodologie qui mélange débats et références artistiques, nous avons ensemble essayé de définir la notion de paysage pour l’appliquer individuellement à notre manière de capturer l’espace urbain. Ainsi avant de prendre mes photos, je prenais le temps d’ajuster un cadrage qui mettait en valeur la composition de la ville, un paysage étant formé d’une variété de plans différents observés avec un certain recul sans qu’aucun élément ne prédomine.

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1

2


Durant ce cours, j’ai également abordé la photographie comme un outil narratif ou révélateur : j’ai par exemple pris la photo en bas à gauche lors d’une dérive dans la ville. En effet, à l’instant où je passais dans la rue et où ce cantinier téléphonait, je me suis imaginée une histoire que j’ai eu envie de partager. Ces photos sont également un témoignage aux changements brutaux qui, telle une opération chirurgicale, transforment le visage de la ville : ainsi là où se dressait une maison blanche sur un terrain vague, la semaine suivante, je n’ai trouvé que des tas de gravats. En conclusion de ce parcours de la ville, l’exercice final est la réalisation d’une vidéo. A l’image de mon ressenti et à la manière du film Les ailes du Désir, j’ai décidé de montrer l’évolution de mon rapport à la ville : en passant de simple observateur capable, par l’analyse et l’observation, de connaître jusqu’aux pensées des gens, au statut de membre actif et intégré d’un territoire complexe et diversifié. 3

4

L

égende : Cours «ligne 139» de Plastique avec Mme Rouvillois (L3) 1 - Photographie sur le thème du paysage et dans la zone du canal 2 - Photographie sur le thème «scène de rue» 3 - Photographie sur le thème du paysage et dans la zone des friches 4 - Photographie sur le thème du cliché : la petite ceinture comme limite

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En entrant à l’EIVP, je me suis décidée pour devenir ingénieur-architecte en génie urbain, c’est-à-dire une personne qualifiée pour faire des études et mettre en pratique des projets urbains à vocation de gérer les besoins d’une ville et d’envisager son futur. Mes années d’étude ont confirmé ma motivation pour ce domaine, comme je l’ai évoquée auparavant, et aujourd’hui je souhaite faire le bilan sur mes compétences acquises quant à la maîtrise des outils amenant à la conduite de tels projets. Suite à mes stages et aux conversations que j’ai pu avoir avec des professionnels dans le domaine de l’urbanisme, j’ai pu constater que la valeur ajoutée de mes études était particulièrement appréciable dans ma capacité à saisir un projet dans sa globalité. Je me propose donc d’analyser ici certains projets que j’ai menés durant mon cycle de licence et qui sont la preuve de ce regard d’ensemble.

Des Projets

dans un

Projet

Dans le redécoupage compliqué des trois années traditionnelles d’étude de l’EIVP en cinq années de bicursus, j’ai eu la chance de pouvoir faire les cours sur la conduite d’un projet urbain au cinquième semestre. A l’occasion d’un projet collectif d’aménagement d’espace public, l’EIVP nous impose de faire des études techniques et sensibles sur un large éventail de facettes du projet. J’ai ainsi été amenée à apprendre à dimensionner la signalisation lumineuse tricolore d’un carrefour à travers un exercice d’application sur la rue Louis Blanc. L’aménagement de la voie entraînant des conséquences sur l’espace public, le réseau de transport en commun, l’esthétique de la rue ; cet exercice était également connecté à des matières comme l’éclairage public, la conception d’un réseau de transport, la composition de la voirie, le paysage etc…

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1

2


Dans l’optique de relier nos études en ingénierie et en architecture, mes camarades en bicursus et moi-même avons proposé de mener ces études également sur nos projets conçus en atelier avec M. Bourdier. Malheureusement, cela n’a été accepté que pour le cours de paysage. La notice paysagère que nous avons alors réalisée à partir d’une analyse poussée du territoire des murs-à-pêches tenait compte du patrimoine du site (la production de pêche qui a déterminé le découpage parcellaire et la composition des murs), des activités actuelles, de la densité de végétation, des circulations et des expositions qui influaient sur les vues et les ambiances. En développant une interprétation personnelle de cette analyse, j’ai pu ensuite m’appuyer dessus pour justifier des choix architecturaux lors du projet en atelier.

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L

égende : Notice paysagère (L2 - EIVP) 1 - Etude collective sur le patrimoine des Murs-à-Pêches à Montreuil 2 - Etude collective sur les vues intérieures et extérieures 3 - Synthèse individuelle sur l’ambiance paysagère

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Un

dialogue itératif entre analyse et conception

Lorsque les ateliers de projet du 2ème semestre de troisième nous ont été présentés, j’ai été déçue que seuls deux proposent des problématiques urbaines. Cependant je dois reconnaître la qualité et la quantité impressionnantes de notions urbaines que l’atelier de Jim Njoo m’a permises d’aborder. Dans un premier temps, l’ensemble du groupe s’est penché sur des analyses diverses et variées du site : la morphologie de la ville et architecturale, les flux (circulations, accès, transports), les programmes, les usages et les espaces publics et enfin l’ambiance et l’environnement. Les résultats obtenus ont été partagés et sont devenus des outils pour déterminer et maîtriser l’ensemble des enjeux du site. Dans un second temps, j’ai étudié les méthodes de conception de Rem Koohlaas sur le projet du Tribune Campus Center à l’IIT de Chicago. C’est en particulier en m’inspirant de sa façon de tenir compte des flux et de leurs trajectoires que j’ai travaillé lors la séquence de « transposition » où j’ai été amenée à émettre des principes architecturaux pour le projet d’une gare du Grand Paris Express à Saint-Maur. Encore une fois l’ensemble des références analysées ont été partagées et nous avons ainsi pu tous profiter du travail des autres. Ces deux séquences de travail m’ont permis d’envisager un projet complexe, répondant aux critères d’un bâtiment hybride, en ayant l’ambition de gérer et même d’anticiper les besoins et l’évolution de la ville dans laquelle il s’inscrit. Les séquences suivantes se sont déclinées à différentes échelles afin d’aborder tous les enjeux du site. Le premier objectif était l’insertion urbaine, sa réussite passait par une intégration morphologique (je propose un ouvrage dont les hauteurs respectent le tissu existant), par une connexion articulée aux flux d’usagers (je propose ainsi que les trajectoires des futurs usagers soient lisibles en plan et en anticipant leurs parcours, je peux optimiser leurs trajets). 1 32


Parallèlement l’établissement d’un programme permettait de justifier politiquement la conception d’une gare hybride : j’envisage donc d’installer un pôle culturel (médiathèque, salles d’expositions, de conférences, ateliers d’artistes, conservatoire de danse etc..) combiné à des services publics et à des commerces qui, en formant un ensemble, permettront de revaloriser ce quartier de Saint-Maur-des-fossés en le connectant au Grand Paris et en rendant le site même plus attractif.

2

C’est ainsi qu’au 1/1000ème, mon travail portait plus particulièrement sur les médiations complexes et itératives entre forme, programme et contexte. Et après cette initialisation du projet, je sais que je vais poursuivre en alternant analyse et conception qui ne sont pas des étapes séparées dans la conduite du projet, mais le noyau d’un dialogue itératif permanent dans lequel des échelles d’intervention et des outils de conception différents devront être sans cesse articulés. Les étapes suivantes ont donc été le fruit de ce dialogue et ont approfondi des questions de structure, d’enveloppe, de matériaux, d’ambiance à des échelles variées et par le moyen tout à la fois de plans, coupes, maquettes et/ou photomontage. A chaque fin de séquence, nous étions invités à faire un retour critique sur notre travail, à clarifier nos principales orientations et intentions ce qui m’a permis de ne pas perdre une vue d’ensemble cohérente de mon projet.

3

L

égende : Projet d’un bâtiment hybride en Atelier de Projet avec M. Njoo (L3) 1 - Panneau A0 sur la transposition de principes de références à l’analyse d’un site 2 - Diagramme sur l’insertion urbaine du projet 3 - Photomontage montrant une perspective extérieure du projet insérée dans son environnement

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CONCLUSION A partir des questionnements soulevés dans ce rapport, j’ai pu établir ce qui me plaisait et ce qui me semble de plus en plus devoir être les questions au cœur de ma vie professionnelle future. J’ai ainsi mis de côté le bâtiment, les réseaux, les gestions de techniques spécialisées, ou de besoins individuels et je souhaite travailler sur l’espace urbain, sur les flux, les populations, je veux avoir un regard global sur un projet et sensible. C’est ce souci de globalité dans mes compétences qui valorise mon choix d’un bicursus et ma sensibilité qui m’amène à réfléchir chaque projet comme un enjeu pour une société durable. Aujourd’hui, il me reste des techniques et des connaissances à acquérir dans le domaine du management, de l’économie et du droit à l’EIVP et la possibilité de me spécialiser et d’approfondir mes connaissances en choisissant un séminaire à l’ENSAPLV. Afin de diversifier mon expérience, j’ai également fait le choix de partir en Erasmus, ainsi au semestre prochain, j’étudierai à l’institut technologique de Karlsruhe en Allemagne. Cette destination est à la fois une contrainte et une perspective d’excellence : en effet à cause des difficultés administratives pour former un partenariat entre écoles les destinations possibles sont limitées (Allemagne, Belgique, Italie et Espagne) mais en m’appuyant sur ma maîtrise de l’allemand (langue pour laquelle j’ai obtenu une certification équivalente au baccalauréat), je vais pouvoir bénéficier sans lacunes de l’enseignement renommé de l’université de Karlsruhe. De cette façon, j’espère pouvoir diversifier les méthodologies de travail et les références en matière d’urbanisme afin d’être capable d’aborder les problématiques qui me tiennent à cœur avec un bagage exhaustif.

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BIBLIOGRAPHIE Panerai, Philippe, Formes urbaines de l’ilot a la barre, Parenthèses (coll. Eupalinos), 1997, 196p. Vacchini, Livio, Capolavori, Editions du Linteau, 2006, 70p. Riegl, Aloïs,

Le culte moderne des monuments, L’harmattan, 2003, 124p.

Bellanger, François, Habitat(s) , Edition de l’Aube, 2000, 228p. Cauquelin, Anne,

L’invention du paysage,

PUF, 2004, 182p.

Koolhaas, Rem, New York Delire, Parenthèses (coll. Architecture), 2002, 320 Weber, Patrick,

Histoire de l’architecture. De l’antiquité à nos jours J’ai lu (coll. Librio Memo), 2008, 77p.

Hamman, Philippe, La négociation dans les projets urbains de tramway. Blanc, Christine, Eléments pour une sociologie de la « ville durable », Frank, Cécile, Peter Lang (coll. Eco Polis), 2011, 246p. Perec, Georges,

Tentative d’épuisement d’un lieu parisien, Christian Bourgeois (coll. Titres), 2008, 49p.

Sloterdijk, Peter, Ecumes, Hachette Littérature (coll. Pluriel Philosophie), 2006, 790p. 36


CAUE (Conseil d’Architecture, d’Urbanisme et d’Environnement) de la Seine-Maritime, Clos-Masures et paysage cauchois, Points de Vue, 2008, 256p.

ARPE (Agence Régionale pour l’Environnement) de PACA (Provence Alpes Côte d’Azur)

Plan local d’urbanisme & developpement durable

Imprim’Vert, 2012, 80p.

FILMOGRAPHIE Godard, Jean-Luc, Alphaville, 1965, 1h39min Godard, Jean-Luc, Extraits de Pierrot le Fou, 1965, 1h55min Benguigui, Yamina, 9-3 Mémoire d’un territoire, 2008, 1h30min Daubas, Charles, et Marandin, Naël, Pas de quartier, 2007, 53 min Wenders, Wim, Les Ailes du désir, 1987, 2h08min Copans, Richard et Neumann, Stan, La maison de Verre, 2004, 25min

MUSIQUES Lafontaine, Dominique, Des nuits en bleus, 2006, Musique de la pièce de Jean Pierre Levaray dans sa version mise en scène par Marie Hélène Garnie 37


REMERCIEMENTS J’aimerais ici rendre hommage à tous ceux qui ont apporté leur temps, leurs talents et leur soutien à la rédaction de ce rapport. En premier lieu, il me faut remercier mes proches dont la relecture m’a permis de prendre du recul sur mes propos et de clarifier mes idées. Ma mère qui a su me guider lors de mes hésitations quant à la langue française, mon père pour ses remarques pertinentes qui m’ont amenée à relativiser mes opinions et Arnaud dont les commentaires sur mes «envolées lyriques» m’ont redonné l’envie d’écrire. Elles ont traversé avec moi ces trois premières années de bicursus, tous les hauts et les bas, et elles sont toujours là : Annabelle Pasquier, Delphine Tordjmann, Emmanuelle Viaud et Lucie Villais. Tour à tour confidentes, supporters et critiques, elles ont beaucoup contribuées à la maturation de mes questionnements, enrichissant le débat de leurs points de vue, de leurs expériences. Merci à l’équipe administrative de l’EIVP toujours disponible pour traiter rapidement les complications qui se présentent en permanence pour notre première promotion de bicursus; c’est ainsi que j’ai pu porter un maximum de mon attention sur mes études. A l’équipe pédagogique de la Villette, toute ma gratitude pour leurs enseignements, leurs conseils et leur patience.

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