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ISSN 1291-2441

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A LETTRE LETTRE DE DE LA LA A BIBLIOTHÈQUE IBLIOTHÈQUE N° N° 18 18 -- Hiver Hiver 2004 2004 Maison de la culture du Japon à Paris

Le Kawaii au Japon ou la culture de la mignardise Christine Condominas, Maître de conférences à l'Université de Provence

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’est avec les années 90 qu’est née au Japon une mode juvénile du travestissement (kosu-pure de l’anglais costume play), la mode kawaii. Le phénomène apparaît dans le quartier de Harajuku à Tokyo et plus précisément dans la rue Takeshita qui, durant le weekend, est envahie par une foule de jeunes, principalement féminine, affluant de toute la région. Prêtes à parader, elles sont « figées » dans des personnages de poupées inspirées par les bandes dessinées (manga) ou les dessins animés. Kawaii est un adjectif du langage courant pour désigner un enfant, une jeune fille ou un petit animal attendrissant, au charme juvénile, gracieux et vulnérable. Littéralement il signifie « aimable », et on le traduit en français par «mignon», «charmant», «joli» ou «gentil». Ce terme, qui s’emploie souvent pour qualifier de petites choses, des miniatures, est l’un des plus utilisés par les Japonaises, quel que soit leur âge. Actuellement, ce mot équivaut dans la langue des jeunes japonaises à exprimer leur adhésion à telle ou telle chose qui est du goût des autres membres du groupe. Il est souvent prononcé sur un ton suraigu et en chœur. De marginal, le phénomène de la mode kawaii s’amplifie à la fin des années 90 pour devenir excessivement visible, notamment dans les quartiers de Tokyo prisés par la jeunesse. L’objectif

est d’être habillé et paré avec outrance en jouant sur un ou plusieurs thèmes à la fois. La poupée française avec ses dentelles qui ornait le salon des foyers japonais aisés est, par exemple, aux côtés des manga et des dessins animés, une des sources d’inspiration du mouvement kawaii. Cette mode très ostentatoire, provocante par son esthétique agressive, kitch et grotesque, fait appel à la fois à des couleurs vives et des tons pastel en un mélange «détonnant». Le rouge et le rose, les couleurs qui symbolisent le féminin en particulier la petite fille, y sont largement représentées. Les accessoires y jouent un rôle très important par leur nombre excessif et significatif, car c’est par le biais du détail que l’on se distingue tout en affichant son appartenance au groupe adepte d’un héros imaginaire (kyarakutâ, de l’anglais character). Le « monde kawaii » est ainsi peuplé d’être réifiés auxquels les jeunes s’identifient. Ce sont les nouveaux jouets, sortes d’amulettes, de la jeunesse nippone qui semble vivre dans un monde irréel et virtuel, avec le téléphone mobile et Internet. Le manga ou les films d’animation tels que Mon voisin Tottoro ou Princesse Mononoke, de Miyazaki Hayao, sont les contes de fées de cette jeunesse. Leurs univers fantastiques sont un imaginaire érigé

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en réalité par ces jeunes qui refusent le passage à l’âge adulte. Une des figures symboliques de cette mode de la mignardise est la chatte blanche au nœud rouge à l’oreille gauche, Kittychan, que l’on connaît en Occident sous le nom de Hello Kitty. Les produits à son effigie vont du simple crayon au linge de maison et à l’électroménager en passant par la breloque que l’on attache au cartable, au portemonnaie ou au téléphone mobile. La déferlante kawaii est à la fois économique et internationale. La multiplication des «produits kawaii », la floraison de nouvelles mascottes (qui deviennent autant d’accessoires et de colifichets), soutiennent de belles réussites économiques. Pour la société Sanrio, qui commercialise Hello Kitty, cette mode est à la source de bénéfices importants à l’échelle mondiale, cette figure s’exportant en Asie comme en Occident. Des sites Internet et une radio kawaii ont également vu le jour. Le succès international des manga a joué, quant à lui, un rôle fondamental dans la diffusion du phénomène à l’échelle mondiale. Cette culture influence, par exemple, de plus en plus de jeunes Français, et renforce le sentiment d’appartenance à une génération sans frontières, au point de les inciter à étudier le japonais pour mieux apprécier cet univers plein de fantaisie.

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REGARDS SUR LE FONDS PENSÉE - NARA, Hiroshi The structure of detachment – The aesthetic vision of Kuki Shûzô. Honolulu : University of Hawaii Press, 2004. 426p. - KUKI Shûzô La structure de l’iki, trad. par Camille Loivier. Paris : Presses universitaires de France, 2004. 134p. Comment saisir l’iki, ce phénomène si propre au Japon ? C’est la question sur l’esthétique à laquelle Kuki Shûzô (1888-1941) a tenté de répondre dans ces ouvrages après de longues études de philosophie en Europe. A l’époque où le Japon s’ouvre à la modernité occidentale, il s’interroge sur ce qu’est la culture japonaise. Portant une vision nostalgique sur le monde d’Edo (16151868), Kuki retrouve le sens de l’iki dans la relation hommefemme des quartiers de plaisirs, pleins de raffinement et d’esprit urbain. C’est par exemple, dans la façon de porter le kimono en dégageant la nuque que se manifeste l’iki : contrairement à la vulgarité du décolleté occidentale, le kimono suggère discrètement à l’autre sexe un passage vers la chair... L’édition anglaise de son ouvrage intitulé The structure of atachment de l’iki) comporte trois essais qui expliquent la théorie et donnent un éclairage particulier sur l’esthétique japonaise, qui s’inscrit à la fois dans l’idéalisme de la « voie des samouraïs » et dans l’irréalisme propre au bouddhisme.

NATIONALISME - Starrs, Roy Japanese cultural nationalism – At home and in the Asia Pacific. Folkestone : Global Oriental, 2004. 295 p. Cet ouvrage est le rapport de la conférence qui s’est déroulée en août 2002 à l’Université d’Otago en Nouvelle-Zélande, et qui s’est focalisée sur le thème du nationalisme et ses modes d’expression dans la culture japonaise. Cette conférence invitait des chercheurs d’Australasie, du Japon et de Chine à prendre la parole sur ce thème en fonction de

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leurs domaines de compétances spécifiques. Le présent ouvrage rassemble dix-sept contributions, toutes aussi remarquables, étudiant les manifestations du nationalisme dans des domaines aussi variés que la littérature, la philosophie, la politique, l’éducation ou la musique ; il se divise en deux parties : le nationalisme culturel japonais tel qu’il s’exprime au Japon et le nationalisme culturel japonais de la zone AsiePacifique.

- TSCHUDIN, Jean-Jacques et HAMON, Claude (dir.) La modernité à l’horizon – La culture populaire dans le Japon des années vingt. Arles : Philippe Picquier, 2004. 244p.

CULTURE POPULAIRE - TANIGUCHI & UTSUMI L’orme du caucase, trad. par Marie-Françoise Monhiers et Frédéric Boilet. Paris : Casterman, 2004. 218p. Un Manga ? ! Oui, mais pas n’importe lequel. Celui-ci, c’est le dernier album dessiné par Taniguchi Jirô, l’auteur d’Au temps de Botchan et de Quartier lointain notamment. Adaptant huit nouvelles de Utsumi Ryûichirô, Taniguchi nous fait partager dans cet ouvrage le quotidien de gens ordinaires. Il n’y a ni super-héros ni éléments fantastiques, mais plutôt des tranches de vie et un monde intimiste d’une grande sensibilité qui se dévoile au fil de chaque récit. Les relations humaines sont au centre de cet univers où la communication entre les générations est rythmée par de grands silences, où les retraités sont relégués au rang des oubliés et où les souvenirs du passé aident à mieux s’adapter au présent... le tout décrit avec justesse et grande tendresse.

Après un premier ouvrage, La nation en marche: études sur le Japon impérial de Meiji, voici le second volet de cet ambitieux projet consacré à l’étude de la société japonaise moderne, de Meiji (1868) à la veille de la Guerre du Pacifique. Ce volume, qui rassemble les contributions présentées en 2002 lors du dernier colloque du GREJA, s’intéresse à la culture dite de masse pendant une période de grands changements dans le paysage culturel japonais : essor du cinéma, du disque et de la radio, apparition des livres de poches et des revues féminines et policières... Autant de facteurs qui ont transformé en profondeur la société japonaise durant ces années d’effervescence intellectuelle, avant que la machine répressive de l’impérialisme montant n’y mette fin.

RELATIONS INTERNATIONALES - GODEMENT, François (dir.) Asie : Chine, Indonésie, Japon, Malaisie, Pakistan, Viêt-nam... Paris : Documentation française / IFRI, 2004. 188p. En présentant la situation de six pays asiatiques, cet ouvrage rassemble les travaux de spécialistes de la région illustrant la place de La Lettre de la Bibliothèque - N° 18 - HIVER 2004


l’Asie orientale dans les relations internationales en tant que pôle majeur du monde contemporain. L’importance de l’Asie orientale se résume à quelques traits nouveaux: l’ascension économique de la Chine, une croissance forte dans le reste de la région, et la reprise économique d’un Japon restructuré. Or ces facteurs confirment un effort d’intégration économique régionale, fondé sur la libéralisation des échanges plutôt que sur une réelle coopération économique ou sur la création d’institutions et de règles communes, à l’instar de ce qui se passe en Europe. Ce livre, en donnant un aperçu de la situation économique et politique actuelle, essaie d’ouvrir sur de nouvelles perspectives dans cette partie du monde.

ART - LE GARS, Georges Imari – Faïences et porcelaines du Japon, de Chine et d’Europe. Paris : Massin. 2004. 173p. Faisant à point nommé écho à l’exposition Imari organisée par la Maison de la culture du Japon, cet ouvrage est entièrement dédié aux célèbres porcelaines nées, en 1610, à Arita dans l’île de Kyûshû, non loin du petit port d’Imari qui finira par leur donner son nom. En l’espace de quelques dizaines d’années, ces porcelaines, les premières fabriquées au Japon, vont connaître un succès sans précédent tant dans leur pays d’origine que dans le monde : le clan Nabeshima réserve l’intégralité de sa production au shôgun, tandis que les cours européennes s’arrachent des pièces plus proches du goût occidental, à l’instar des kakiemon. Au XVIIIe siècle, de prestigieuses manufactures européennes se mettent à leur tour à produire leurs propres imari... - FEUSTEL, Marc (dir.) Japon: un autoportrait – Photographies 1945-1964. Paris : Flammarion. 2004. 214p. « Le temps ajoute un élément que le photographe n’avait nullement prévu : l’histoire » nous enseigne le photographe Hayashi Tadahiko. Les 150 photographies réunies dans cet ouvrage offrent en effet un panorama exceptionnel de l’histoire du Japon sur une période de vingt ans, entre la fin de la guerre du Pacifique et les Jeux Olympiques de 1964 organisés à

Tokyo : le pays ravagé par les destructions de la guerre accède, en deux décennies, à une étonnante prospérité économique. Cette période de grands changements insuffle une énergie nouvelle à la photographie japonaise ainsi qu’en témoignent ces fragments de vie fascinants, immortalisés par les plus grands maîtres japonais.

Une vague inquiétude, c’est le titre de ce recueil de trois nouvelles, mais ce sont aussi les derniers mots qu’a laissés Akutagawa Ryûnosuke avant de se donner la mort. Ce grand écrivain, qui a donné son nom au plus prestigieux prix littéraire au Japon, est l’auteur du fameux Rashômon et autres contes, qui a inspiré le film de Kurosawa Akira.

ARCHITECTURE - JODIDIO, Philip Ando : complete works. Köln, London, Los Angeles [etc.] : Taschen, 2004. 491p. Ex-rédacteur en chef de la revue Connaissance des arts et auteur de plusieurs ouvrages sur l’architecture contemporaine, Philip Jodidio nous présente ici les réalisations du plus célèbre des architectes japonais dans le monde : Andô Tadao. Ce grand et volumineux livre est rédigé en trois langues : anglais, français et allemand. Les textes laissent d’ailleurs souvent la place au regard : en feuilletant les photographies et plans d’architecture de prestigieux bâtiments et musées, tels que la future Fondation Pinault sur l’île Seguin en France, on est agréablement ravi de cette petite promenade dans l’univers à la fois dépouillé et raffiné de ce grand architecte. - NEPILLY, Ellen Tokyo – Architecture & design. Düsseldorf, London : Te Neues, 2004. 192p. Cette série de petits guides urbains nous conduit cette fois-ci au cœur du Tokyo d’aujourd’hui : la plus grande ville au monde qui n’a de cesse de s’enrichir de constructions à l’architecture intéressante. On découvre grâce à cet album des immeubles et des espaces intérieurs, œuvres d’architectes contemporains renommés ou de jeunes talents fleurissants de la capitale. Rédigé en anglais, français, allemand et espagnol, ce livre propose des lieux divers (maisons, bureaux, musées, hôtels, restaurants, magasins, etc.) Un guide utile pour une visite moderne de la grande mégalopole.

LITTÉRATURE - AKUTAGAWA, Ryûnosuke Une vague inquiétude, trad. par Silvain Chupin, Monaco: Le Rocher, 2005.

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Trois contes étranges et torturés pour découvrir l’univers de cet écrivain majeur, préfacés par René de Ceccatty. - KATÔ, Haruhisa (dir.) La modernité française dans l’Asie littéraire (Chine, Corée, Japon). Paris : PUF, 2004. 403p. « Être Japonais ou Coréen affecte-t-il la manière de traduire les textes étrangers ? Peut-on voir émerger un Baudelaire japonais ou un Baudelaire coréen ? » C’est de là qu’est née l’idée d’organiser un colloque d’études comparatives sur la manière dont les intellectuels de trois pays d’Asie lisent et comprennent la littérature française, selon Katô Harushisa, directeur de cet ouvrage. Sont donc réunis ici, les actes du colloque international intitulé « La France et l’Asie de l’Est. La modernité en Asie dans le système culturel mondial» qui s’est déroulé à Tokyo en décembre 2001. Ce colloque confrontait les points de vues d’intervenants Chinois, Coréens et Japonais, spécialistes de littérature française, à ceux d’intervenants Français spécialisés dans les littératures de ces trois pays. Quoi qu’il en soit, loin d’arriver à des conclusions définitives, le colloque a réussi à mettre en évidence les problèmes que posent les traductions littéraires et la multiplicité des références culturelles.

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Heures d’ouverture

Du mardi au samedi 13h00-18h00 Nocturne le jeudi jusqu’à 20h00 Fermeture

Les dimanches, lundis et jours fériés

JEU DE PORTRAITS Hirano Keiichirô, écrivain Né en 1975, Hirano Keiichiro est un jeune auteur certes, mais il est avant tout doté d’un talent et d’une érudition hors pairs. En 1999, il obtient le Prix Akutagawa (équivalent du Goncourt) pour L’Eclipse, alors qu’il a à peine 23 ans. Son style poétique et la richesse de son langage n’ont cessé de dérouter les critiques qui, dès son premier roman, ont vu en lui le nouveau Mishima Yukio, dont il se réclame lui-même volontiers. Deux de ses romans ont déjà fait l’objet de traductions françaises aux éditions Philippe Picquier: L’Eclipse et Conte de la première lune (traduits par Corinne Atlan). Ces deux récits de facture très différente nous conduisent, pour l’un, dans le sud de la France du XVe siècle, sur les pas d’un clerc dominicain à la recherche d’un manuscrit ; quant au second, il retrace le voyage d’un jeune poète malade qui sera finalement recueilli par un moine bouddhiste dans un temple près de Kyoto. Résidant actuellement en France, M. Hirano a récemment donné une conférence fort enrichissante sur Mishima à la Maison de la culture du Japon à Paris. Il nous fait cette fois-ci l’honneur de se prêter à notre petit «jeu de portraits» en répondant à 12 questions choisies dans le questionnaire que Marcel Proust a établi en 1886 : Le principal trait de mon caractère : Ce que j’apprécie le plus chez mes amis : Quel serait mon plus grand malheur : La couleur que je préfère : Mon auteur favori en prose : Mon poète préféré : Mon héros de fiction préféré : Mon compositeur préféré : Mon peintre favori : Ce que je déteste par-dessus tout : Le fait militaire que j’admire le plus : Comment j’aimerais mourir :

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La prudence. La délicatesse. Le décès d’un proche. Le bleu. Mori Ôgai. Baudelaire. Thomas Buddenbrooks (le frère de Christian) *. Miles Davis. Delacroix. La lâcheté. Le désarmement. J’aimerais que ma vie se prolonge jusqu’à ce que les gens se lassent de moi et que ma mort n’ennuie personne.

Les Buddenbrooks, de Thomas Mann.

BLOC-NOTES • La bibliothèque organise une lecture-conférence de Nuages flottants, œuvre de la romancière Hayashi Fumiko, qui sera présentée par Madame Anne Bayard-Sakai dans le courant du mois de mai prochain. Date exacte à préciser.

MAISON DE LA CULTURE DU JAPON À PARIS BIBLIOTHÈQUE 101 bis, quai Branly 75740 Paris cedex 15 Maison

Tél : 01.44.37.95.50 - Fax : 01.44.37.95.58 - internet : http ://www.mcjp.asso.fr

de la Culture du Japon à Paris

Directeur de la publication : Hisanori ISOMURA Rédaction : Etsuko MORIMURA - Florence PASCHAL - Pascale TAKAHASHI - Racha ABAZIED Kazuo LEE - Taka OKAZAKI - Cyrille ROBERT Composition : Texto! Roubaix - Impression : Imprimerie Artésienne Liévin Dépôt légal : 1e trimestre 2005

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