p r o g r a m m e du
mardi
2
au
samedi
grande salle (niveau -3)
Mardi 2 octobre (petite salle)
27
octobre
2007
sauf mention contraire
Samedi 13 octobre (petite salle)
14h00 Tange Sazen de Sadao Yamanaka 16h30 Duel à Takada-no-baba de Masahiro Makino + Kôchiyama Sôshun de Sadao Yamanaka 19h30 Cochons et cuirassés* de Shôhei Imamura
14h00 Love Hotel* de Shinji Sômai 16h30 La femme-insecte* de Shôhei Imamura 19h30 Cochons et cuirassés* de Shôhei Imamura
Mardi 16 octobre
Mercredi 3 octobre (petite salle)
14h00 Impossible retour de Buichi Saitô inédit 16h30 Le mouchoir rouge de Toshio Masuda 19h30 Tange Sazen de Sadao Yamanaka
14h00 La ville des coupoles* de Kirio Urayama inédit 16h30 La marque du tueur de Seijun Suzuki 19h30 Terre et soldats de Tomotaka Tasaka
Mercredi 17 octobre
Jeudi 4 octobre (petite salle)
14h00 Terre et soldats de Tomotaka Tasaka 16h30 Le journal d’un flingueur de Hiroshi Noguchi inédit 19h30 Matasaburô, l’enfant du vent* de Kôji Shima inédit
14h00 Passions juvéniles de Kô Nakahira 16h30 La lanterne rouge* de Toshiya Fujita inédit 19h30 Maternité éternelle* de Kinuyo Tanaka inédit
Jeudi 18 octobre
Vendredi 5 octobre (petite salle)
14h00 La femme-insecte* de Shôhei Imamura 16h30 Le paradis de Suzaki* de Yûzô Kawashima 19h30 Derrière le rideau de fusuma de Tatsumi Kumashiro
14h00 Boulevard des chattes sauvages de Yasuharu Hasebe inédit 16h30 Dévotion ardente* de Koreyoshi Kurahara inédit 19h30 Un type méprisable de Koreyoshi Kurahara
Samedi 6 octobre (petite salle)
Vendredi 19 octobre
Mardi 9 octobre
Samedi 20 octobre
14h00 L’homme de la tempête de Umetsugu Inoue inédit 16h30 La saison du soleil de Takumi Furukawa 19h30 Terre natale de Kenji Mizoguchi inédit
14h00 La saison du soleil de Takumi Furukawa 16h30 Fleurs et serpents de Masaru Konuma 19h30 Le joueur en noir de Kô Nakahira inédit
14h00 Matasaburô, l’enfant du vent* de Kôji Shima inédit 16h30 Duel à Takada-no-baba de Masahiro Makino + Kôchiyama Sôshun de Sadao Yamanaka 19h30 Rouge vertige de Takashi Ishii inédit
14h00 L’extase de la rose noire de Tatsumi Kumashiro inédit 16h30 Le jardin secret des ménagères perverses de Shôgorô Nishimura inédit 19h30 La vie secrète de Madame Yoshino de Masaru Konuma
Mercredi 10 octobre
14h00 La lanterne rouge* de Toshiya Fujita inédit 16h30 L’homme de la tempête de Umetsugu Inoue inédit 19h30 Terre natale de Kenji Mizoguchi inédit
Jeudi 25 octobre
14h00 Le journal d’un flingueur de Hiroshi Noguchi inédit 16h30 Le sable mouillé d’août de Toshiya Fujita inédit 19h30 Profession vaurien de Buichi Saitô inédit
Jeudi 11 octobre
14h00 Un type méprisable de Koreyoshi Kurahara 16h30 La maison des perversités de Noboru Tanaka 19h30 Le sable mouillé d’août de Toshiya Fujita inédit
Vendredi 26 octobre
14h00 Le joueur en noir de Kô Nakahira inédit 16h30 Impossible retour de Buichi Saitô inédit 19h30 Fleurs et serpents de Masaru Konuma
Vendredi 12 octobre
14h00 Maternité éternelle* de Kinuyo Tanaka inédit 16h30 Derrière le rideau de fusuma de Tatsumi Kumashiro 19h30 Boulevard des chattes sauvages de Yasuharu Hasebe inédit
Samedi 27 octobre
14h00 Le jardin secret des ménagères perverses de Shôgorô Nishimura inédit 16h30 Profession vaurien de Buichi Saitô inédit 19h30 L’extase de la rose noire de Tatsumi Kumashiro inédit
Programme donné sous réserve. (Confirmation au 01 44 37 95 01) • Films présentés en version originale sous-titrée français (VOSTF) et version originale sous-titrée anglais (VOSTA). *Films en entrée libre dans la limite des places disponibles. Provenance des copies : Japan Foundation Film Library, Nikkatsu, Zootrope Films. • Remerciements : Shinako Matsuda (Nikkatsu), Zootrope Films (Gilles Boulenger et Emmanuel Atlan), Pascal Hurth et la Bibliothèque Interuniversitaire des Langues Orientales, Stéphane Derdérian (Liliom Audiovisuel), Multithématiques.
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Installée en 1912 à Mukôjima, la Nikkatsu est la plus ancienne des cinq grandes sociétés de production qui ont fait l’histoire du cinéma japonais : les années 20 et la première star du cinéma japonais, Matsunosuke Onoe, les premiers chefs-d’œuvre de Kenji Mizoguchi… L’époque 1930-1940 avec ses films de sabre modernes, ses comédies musicales en costumes, ses drames et ses films de guerre humanistes : Makino Masahiro, Sadao Yamanaka, Tomu Uchida, Mansaku Itami, Tomataka Tasaka… Son âge d’or des années 50 et 60 avec l’inoubliable “génération du soleil”, ses films de jeunesse esprit Nouvelle vague, ses films d’actions “sans frontières” réalisés par une pléthore de “faiseurs” rendant gloire aux jeunes stars de la Nikkatsu (Yûjirô Ishihara, Akira Kobayashi, Ruriko Asaoka…) et qui n’en furent pas moins d’extraordinaires inventeurs de formes, à l’exemple de Seijun Suzuki : Kô Nakahira, Toshio Masuda, Koreyoshi Kurahara, Hiroshi Noguchi… Nous n’oublions pas non plus ses incontournables francs-tireurs Shôhei Imamura, Yûzô Kawashima, Toshiya Fujita… Enfin, les années 70 avec sa production foisonnante de films érotiques : Tatsumi Kumashiro, Noboru Tanaka, Masaru Konuma, Shôgorô Nishimura.
NIKKATSU : L’HISTOIRE D’UNE MAJOR COMPANY JAPONAISE U n e c o m pa g n i e p i o n n i è r e Fondée en 1912, la Nikkatsu est la plus ancienne des major companies japonaises. Avec ses investissements en production, son circuit de salles et ses studios à Tôkyô (Mukôjima) et à Kyôto (Daishôgun), l’entreprise participe activement à la consolidation du cinéma en tant qu’art de divertissement de masse. Au cours de ses premières décennies d’existence, la Nikkatsu contribue notamment à la consécration populaire du comédien Matsunosuke Onoe, première star du cinéma japonais, dans le film de sabre (chanbara), sous-genre majoritaire des films historiques (jidaigeki). Après le séisme du Kantô de 1923 qui détruit studios et salles de cinéma dans la capitale et ses environs, la Nikkatsu décide de transférer la production de ses films à thématique contemporaine (gendaigeki) dans ses studios de Kyôto. Ces films connaissent alors un engouement sans précédent et la Nikkatsu insiste tout particulièrement sur la production de « drames des petites gens » (shomingeki), sous-genre dans lequel Kenji Mizoguchi, arrivé à la Nikkatsu en 1923, effectue ses premiers pas. C’est dans les studios Uzumasa inaugurés à Kyôto en 1927 que ce dernier s’essaie aux techniques du parlant dans le film Terre natale (1930). En 1934, Tôkyô accueille de nouveau le tournage des gendaigeki dans les studios flambant neufs de Tamagawa.
G e n d a i g e k i e t j i d a i g e k i à l’ h e u r e d u c h a n g e m e n t Dans la deuxième moitié des années 20, les films chanbara connaissent de nombreuses transformations. Les caméras abandonnent leur statisme d’antan et épousent progressivement le dynamisme virevoltant des combats. De jeunes cinéastes comme Daisuke Itô (surnommé par ses collègues Idô Daisuki : « J’adore le mouvement ») parviennent ainsi à affirmer leur style tout en composant avec les impératifs du star system et les prérogatives de ses vedettes. A la Nikkatsu, celles-ci se nomment : Tsumasaburô Bandô, Kanjûrô Arashi ou Chiezô Kataoka. Toujours au sein des jidaigeki, un courant satirique se fait jour dès 1930. Les modèles de personnages et de héros y font l’objet d’inversions comiques dans des récits aux accents fortement parodiques. Usant tout d’abord d’un registre de gags propres à la slapstick comedy, ces films satiriques trouvent ensuite dans le cinéma parlant (à partir de 1934-1935) des moyens d’expression qui leur assurent renouveau et sophistication. Dans Akanishi Kakita (film produit par la compagnie de Chiezô Kataoka mais distribué par la Nikkatsu en 1936), Mansaku Itami met en scène un guerrier qui se révèle être un gaffeur invétéré. Dans Tange Sazen, le pot d’un million de ryôs (1935), Sadao Yamanaka présente quant à lui une version irrévérencieuse mais drôle, intimiste et attachante du guerrier borgne et manchot Tange Sazen.
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S a d a o Ya m a n a k a e t l a “ b a n d e d e N a r u ta k i ”
La masculinité juvénile à la rescousse
Cette vague comique qui touche une partie de la production des jidaigeki au début des années 30 est à l’origine de la formation d’une association libre de réalisateurs et de scénaristes dite « la bande de Narutaki » (Narutaki-gumi, constituée de : Sadao Yamanaka, Hiroshi Inagaki, Eisuke Takizawa, Ryôhei Arai, Masamiki Doi, Shintarô Mimura, Fuji Yahiro et Shigeshi Fujii). De 1934 à la mort prématurée de Sadao Yamanaka en 1938, ce groupe basé à Kyôto signe une vingtaine de scénarios collectifs sous le pseudonyme de « Kachiwara Kinpachi ». Animés par un esprit de solidarité générationnelle qui ignore les clivages d’appartenance aux différentes compagnies de production, ses membres partagent tous cinéphilie et fièvre créatrice. C’est au sein de cette « première Nouvelle vague japonaise », majoritairement soutenue par le public et par la critique avertie, que Sadao Yamanaka trouve un contexte propice à l’expression décomplexée de son talent. Avec des débuts précoces à la réalisation dans le cinéma muet (1931) auprès des stars passées à la production, Kanjûrô Arashi et Chiezô Kataoka, Yamanaka s’impose d’emblée avec un style pétri de réalisme et de retenue dans les moyens employés. Arrivé à la Nikkatsu en 1933, le cinéaste conserve les sujets (globalement antérieurs à 1868) et les formes (costumes, coiffures et décors) propres au jidaigeki, mais il confère néanmoins aux récits et aux personnages de ses films une contemporanéité et un réalisme jusqu’alors inédits. Les critiques de l’époque évoquent de véritables « drames contemporains avec personnages à chignons ». Des personnages qui sont par ailleurs insérés dans des trames oscillant avec intelligence et mesure entre humour et tragédie et qui, sitôt le cinéma devenu parlant, utilisent une langue libre de tout archaïsme. Kôchiyama Sôshun est le troisième film signé par Yamanaka en collaboration avec la Zenshin-za. Poussé dans ses retranchements par le contexte de guerre et soutenu dans son entreprise par le volontarisme de cette troupe de comédiens issus du kabuki mais ouverts aux expérimentations, Yamanaka parvient à réaffirmer sa vision du monde avec une noirceur qui deviendra par la suite implacable dans ses trois derniers films (dont n’a été conservé que Pauvres humains et ballons de papier, tourné avec la Zenshin-za à la P.C.L. (future Tôhô) en 1937).
L’engouement populaire remporté par les prestations du jeune Ishihara amorce l’adoption d’une ligne de production de films estampillés Nikkatsu action, fictions dont le fonds de commerce repose sur la violence et la sexualité débridées de héros typés « jeunes rebelles ». Dans la foulée de Ishihara, les jeunes comédiens Akira Kobayashi (Impossible retour, 1959), Keiichirô Akagi (Le journal d’un flingueur, 1960) et Kôji Wada sont élevés au rang de stars et adoptés par toute une génération de jeunes spectateurs qui les préfère aux vedettes vieillissantes des jidaigeki de la Tôei. Ils deviennent les piliers d’un système commercial et monopolisent les écrans pendant les quelques années où la production tourne à plein régime : à titre d’exemple, ils font le haut de l’affiche de 41 films sur les 101 produits par la Nikkatsu en 1960. Parallèlement à ce cinéma de genre qui génère un public fidèle, la Nikkatsu produit sans relâche de nombreux films « littéraires » aux marques d’auteur affirmées, œuvres de réalisateurs tels que Yûzô Kawashima (Le paradis de Suzaki, 1956) ou Shôhei Imamura (La femme-insecte, 1963). L’actrice Kinuyo Tanaka continue elle aussi de s’exercer à la mise en scène : Maternité éternelle, (1955), qui retrace avec force la vie de la poétesse Fumiko Nakajo, est son troisième film.
Une production hétérogène Le rayonnement de ce courant de rénovation à l’œuvre au sein des jidaigeki ne saurait faire oublier la diversité de la production menée à bien par la Nikkatsu. Dans Duel à Takada-no-baba, jidaigeki classique réalisé en 1937 par Masahiro Makino, le comédien Tsumasaburô Bandô campe l’un des nombreux personnages tirés de l’inépuisable récit historique : Les 47 rônins – Le trésor des loyaux samouraïs (Chûshingura). Sont également au rendez-vous des films de guerre imposés par l’air du temps (Terre et Soldats de Tomotaka Tasaka, 1939) ou bien encore des gendaigeki sociaux tel que le « film d’enfant » (kodomo eiga) Matasaburô, l’enfant du vent de Kôji Shima (1941). En proie à des difficultés financières et soumise aux pressions de sa rivale Shôchiku, la Nikkatsu se sépare de sa section de production qui est absorbée en 1942 par une nouvelle compagnie baptisée Daiei. Celle-ci est alors dirigée par Masaichi Nagata, producteur à poigne et futur promoteur actif du cinéma japonais dans les festivals internationaux pendant les années 50 (Rashômon, Contes de la lune vague, etc.).
L’ a r r i v é e d e l a t é l é v i s i o n e t l a f i n d ’ u n e é p o q u e Après avoir connu un pic de production et de succès d’exploitation des films Nikkatsu action entre 1958 et 1962, la compagnie s’efforce par la suite de rester au coude à coude avec ses rivales, et tout particulièrement de contrecarrer les films yakuza de la Tôei et les stars charismatiques de la Daei (Raizô Ichikawa et Shintarô Katsu). La situation est d’autant plus difficile que la pénétration massive de la télévision dans les foyers pendant la deuxième moitié des années 60 plonge l’ensemble de l’industrie cinématographique dans une crise sans précédent. Afin de redynamiser le genre du film d’action, la Nikkatsu multiplie les jeunes premiers promus au rang de nouvelles stars. Le genre évolue et passe successivement par la case mood action, avec ses jeunes rebelles blasés et ses atmosphères feutrées (Le foulard rouge (1964) de Toshio Masuda), avant de renouer avec les cascades et l’action pure d’un courant tardif baptisé new action (Boulevard des chattes sauvages (1970) de Yasuharu Hasebe). Mais dès 1971, la compagnie est contrainte de limiter sa production à des films érotiques à budget et à temps de tournage réduits (150 000 euros, une semaine). Jusqu’à la fin des années 80, des réalisateurs de talent tels que Shôgorô Nishimura (Le jardin secret des ménagères perverses, 1971), Tatsumi Kumashiro (Derrière le rideau de fusuma, 1973), Masaru Konuma (La vie secrète de Madame Yoshino, 1976) ou Noboru Tanaka (La maison des perversités, 1976) donnent au genre baptisé Nikkatsu roman-porno ses lettres de noblesse et le déclinent en plusieurs sous-genres. Avant l’arrêt définitif de la production en 1994, de jeunes réalisateurs tels que Shinji Sômai (Love Hotel, 1985), Takashi Ishii (Rouge vertige, 1988) ou Kiyoshi Kurosawa, tournent leurs premiers films auprès d’équipes de techniciens aguerris, détenteurs du savoir-faire de la grande époque passée des studios. De nos jours, la Nikkatsu ne s’engage plus que ponctuellement dans des projets de coproduction. La société conserve en revanche un réseau d’exploitation en salles considérable et gère un patrimoine culturel dont la richesse et l’hétérogénéité n’ont pas fini de nourrir les imaginaires.
La renaissance après la tourmente Antoine de Mena Dans l’immédiat après-guerre, la Nikkatsu se concentre exclusivement sur l’exploitation de son réseau de salles. Mais en 1954, encouragée par la conjoncture favorable du marché, la compagnie revient sur les devants de la scène de la production et multiplie les projets de films après avoir recruté à tour de bras acteurs, réalisateurs et équipes techniques, pour la plupart venus de la compagnie Shintôhô. Contrairement à la période d’avant-guerre, les jidaigeki sont absents de cette nouvelle donne décidée par la compagnie. Résolument en phase avec le présent, la Nikkatsu concentre en effet ses efforts sur un public jeune avide de modernité. Pour ce faire, elle mise notamment sur l’adaptation de romans de la « génération du soleil » (taiyôzoku). Tirés de deux ouvrages de Shintarô Ishihara, les films La Saison du soleil (Takumi Furukawa, 1956) et Passions juvéniles (Kô Nakahira, 1956) constituent l’acte de naissance de la star emblématique Yûjirô Ishihara .
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Diplômé de l’INALCO, spécialiste du cinéma japonais.
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T e r r e n ata l e F uji wara yoshie no furusato
藤原義江のふるさと
1930 – 86’ – copie 35mm – N&B – VOSTA Réalisation Kenji Mizoguchi. Avec Yoshie Fujiwara, Shizue Natsukawa, Fujiko Hamaguchi. Pianistes : Tomaki Maeda et Constantine Shapiro.
Fujimura est un chanteur débutant à la recherche de reconnaissance. Il est remarqué un jour par une riche mécène, Natsue Omura, qui a plus qu’un intérêt artistique pour le jeune homme. Grâce à ses subsides, Fujimura enregistre son premier disque intitulé « Terre natale » qui est un succès. Mais la suite de sa carrière va dépendre du bon vouloir de sa bienfaitrice qui l’oblige à quitter sa fiancée Ayako. Premier film sonore japonais grâce à un système connu sous le nom de « MinaTalkie » créé par Yoshizô Minakawa. Comme beaucoup de productions s’initiant aux techniques sonores, Terre natale traite d’un sujet mettant en scène des personnages du monde de la musique. Il précède d’un an Mon amie et mon épouse (Madamu to nyôbô) le premier film complètement parlant réalisé par Heinosuke Gosho. Mais le film n’eut pas le même succès que la comédie de Gosho, en raison des problèmes techniques rencontrés pour la mise au point du son. C’est aussi le plus ancien film entièrement conservé de Mizoguchi (trois avant le Fil blanc de la cascade). En 1930, Mizoguchi a déjà réalisé près de cinquante films à la Nikkatsu depuis 1923.
Ta n g e S a z e n e t l e p o t d ’ u n m i ll i o n d e r y ô s Tan g e sa z en yo wa hyakuman ry ô no tsu b o
丹下左膳余話 百万両の壺
1935 – 84’- 35mm – N&B – VOSTF Réalisation Sadao Yamanaka. Avec Denjirô Ôkôchi, Kiyozô, Harutarô Mune.
succès du film confima la justesse de vue du cinéaste, réaffirma la popularité de l’acteur principal et révéla au public les talents d’actrice de la superstar de la chanson Kiozô, qui signa là son premier rôle au cinéma.
K ô c h i ya m a S ô s h u n K ô chiyama S ô shun
河内山宗俊
1936 - 82’- 16mm – N&B – VOSTF Réalisation Sadao Yamanaka. Avec Chôjûrô Kawarasaki, Kan’emon Nakamura, Setsuko Hara, Senshô Ichikawa.
Dans un bas-quartier d’Edo, Kôchiyama Sôshun régente avec sa femme une auberge où les jeux d’argent sont quotidiens. Onami, une jeune femme qui tient un stand de saké, cherche désespérément son frère cadet Hirokô. Ce dernier commet forfait sur forfait et entraîne même une apprentie geisha à fuir l’établissement dans lequel elle exerce. Pour racheter les fautes de son frère poursuivi, Onami décide de se vendre à une maison de prostitution. Kôchiyama Sôshun et le samouraï errant Kaneko Ichinojô décident alors de protéger les deux jeunes gens au sacrifice de leur propre vie. La trame et les personnages du film sont tirés d’une pièce de kabuki du XIXe siècle écrite par Kawatake Mokuami. En collaboration avec son scénariste attitré Shintarô Mimura, Sadao Yamanaka en transforme cependant la nature de façon profonde. Les deux personnages principaux acquièrent notamment une dimension humaine magnifiquement rendue par les interprétations de Chôjûrô Kawarasaki et de Kan.emon Nakamura. Fils rebelles de familles d’acteurs de kabuki et membres fondateurs de la troupe de théâtre de la Zenshin-za qui signe là sa deuxième collaboration avec Yamanaka, les deux acteurs transmettent admirablement la complicité et l’amour à l’œuvre dans l’entreprise de protection de la jeune Onami. Notons que cette dernière est interprétée par une toute jeune Setsuko Hara (elle a 16 ans).
Un seigneur offre en cadeau de mariage à son frère, suzerain d’un fief peu fortuné, un vase apparemment sans valeur. Vexé, ce dernier se débarrasse de l’objet avant d’apprendre qu’il renferme un plan indiquant l’emplacement d’un trésor d’un million de pièces d’or. Il va tout tenter pour le récupérer, aidé dans sa quête par le samouraï errant borgne et manchot Tange Sazen. Les histoires de Tange Sazen, super héros handicapé mais virevoltant, avaient déjà été adaptées à l’écran à l’époque du muet dans une trilogie dirigée par Daisuke Itô qui fit la gloire de l’acteur Denjirô Ôkôchi. Avec l’avènement du parlant, trois nouveaux épisodes furent confiés à Itô, mais démissionnaire de la Nikkatsu en 1934, il ne put réaliser que les deux premiers. C’est Sadao Yamanaka qui fut chargé du troisième, mais il fit de Sazen un personnage paresseux, cynique mais attendrissant, vivant aux crochets d’une foraine tenancière d’un stand de tir à l’arc. L’écrivain Fubô Hayashi n’apprécia guère le traitement drolatique que l’on fit subir à son héros, mais le
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D u e l à Ta k a d a - n o - b a b a
M ata s a b u r ô , l’ e n fa n t d u v e n t
kett ô takadano b a b a
決闘高田馬場
ka z e no matasa b ur ô
風の又三郎
1937 - 50’ - 35mm - N&B - VOSTF Réalisation Masahiro Makino. Avec Tsumasaburô Bandô, Ryôsuke Kagawa, Momonosuke Ichikawa.
1941 – 81’ – 16mm – N&B – VOSTA Réalisation Kôji Shima. Avec Akihiko Katayama, Kazumasa Hoshino, Akira Oizumi.
Le rônin (samouraï sans maître) Yasubei vit de ses rixes et s’entoure de vauriens. Son oncle lui demande de ne pas perdre l’esprit des samouraïs et de ne pas ruiner sa santé par l’alcool. Yasubei est ivre mort le jour où on lui apprend que son oncle a été défié en duel. Il court sur place pour assister aux derniers instants de son oncle mourant, seul sous les coups de dizaines d’adversaires. Il le venge alors dans un mémorable combat, qui lui vaudra de gagner la main de la ravissante jeune fille qui rêvait de lui… Film de sabre spectaculaire typique de l’avant-guerre par un des maîtres du genre et fils d’un des fondateurs du cinéma japonais Shôzô Makino.
T e r r e e t s o l d at s tsuchi to heitai
土と兵隊
1939 - 119’ - 35mm - N&B - VOSTA Réalisation Tomotaka Tasaka. Avec Isamu Kosugi, Izome Shirô, Bontarô Miake et des acteurs non-professionnels.
Film de guerre composé d’une série de petits épisodes relatant la vie quotidienne sur le front : enterrement d’un soldat tué après l’attaque d’un village ; les dernières volontés d’un autre à l’agonie ; le sauvetage périlleux d’un bébé chinois abandonné, etc. Adaptation des carnets d’Ashihei Hino (1907-1960), un écrivain progressiste proche de la condition ouvrière qui devint correspondant de guerre pour l’armée pendant le conflit sino-japonais. La publication en trois parties de ses reportages entre 1939 et 1941 (Blé et soldats, Fleurs et soldats et Terre et soldats) connu un succès de librairie phénoménal, Blé et soldats s’étant vendu notamment à 1.2 millions d’exemplaires. Pour l’adaptation à l’écran de Terre et soldats, le réalisateur Tomotaka Tasaka ne se contentera pas du reportage de Hino mais partira observer le front en Chine. Le film s’attache à montrer le quotidien des soldats dans leur lente et difficile progression sur le continent. Il avait pour but de sensibiliser les Japonais à l’abri loin du front aux dures réalités du front. Films de guerre humaniste dans la veine des Cinq éclaireurs, un des chefs-d’œuvre de l’avant-guerre réalisé l’année précédente par Tasaka.
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Dans l’école d’un petit village de montagne qui ne compte qu’une classe, les élèves font la connaissance d’un nouveau venu, Saburô Takada. Ils croient, du fait de la similarité phonétique des deux prénoms, que Saburô est Matasaburô, un enfant auquel une vieille légende attribue le pouvoir de voler, dans cette région souvent frappée par les typhons. Les écoliers enjoignent Saburô à réaliser un prodige devant eux. D’abord acteur (une centaine de films entre 1925 et 1938) à la Nikkatsu dans des rôles de personnages romantiques, Kôji Shima se tourne vers la mise en scène pour les mêmes studios à partir de 1939. Il commence par s’attacher à la description réaliste de l’enfance. Il dirige les enfants avec une simplicité et un naturel qui rappellent la manière de Hiroshi Shimizu, spécialise du genre après la guerre. Ils feront d’ailleurs chacun de leur côté une adaptation du chef-d’œuvre sur l’enfance : L’histoire de Jirô. Shima contribue à faire une star de l’enfant acteur Akihiko Katayama (Matasaburô dans le film) qui a 11 ans à l’époque, comme le fit Yasujirô Ozu avec le petit Tokkan Kozô (de son vrai nom Tomio Aoki) quelques années auparavant à la Shôchiku.
M at e r n i t é é t e r n e ll e C hi b usa yo eien nare
乳房よ永遠なれ
1955 – 110’ – 35mm – N&B - VOSTA Réalisation Kinuyo Tanaka. Avec Yumeji Tsukioka, Ryôji Hayama, Junkichi Orimoto, Hiroko Kawasaki.
Fumiko est en instance de divorce et retourne vivre dans le village de ses parents avec ses deux enfants. Elle y fait la connaissance de Takashi, journaliste littéraire et mari de son amie d’enfance. Takashi a appris par sa femme les prédispositions pour la littérature de Fumiko et l’encourage dans la voie de la poésie. Takashi devient son mentor et va l’aider à publier ses écrits. Tout semble aller pour le mieux dans la nouvelle vie de Fumiko quand elle reçoit le jugement du tribunal qui l’oblige à rendre son fils aîné à son ex-mari… Tirée d’une histoire vraie, la vie de la poétesse Fumiko Nakajo, Maternité éternelle est un film de l’actrice mondialement connue Kinuyo Tanaka (Mizoguchi, Ozu, Naruse) qui fut aussi la première femme japonaise à se faire un nom dans la réalisation. La scénariste du film, Sumie Tanaka, est célèbre pour ses adaptations à l’écran de portraits de femmes volontaires et révoltées. Elle a écrit notamment les scénarios de Le repas, L’éclair et Chrysanthèmes tardifs mis en scène par Mikio Naruse.
La saison du soleil
L e pa r a d i s d e S u z a k i
taiy ô no kisetsu
S u z aki paradai z u - A ka shin g ô
1956 – 89’ – copie 35mm - N&B – VOSTF Réalisation de Takumi Furukawa. Avec Hiroyuki Nagato, Yôko Minamida, Yûjirô Ishihara, Kô Mishima.
1956 – 81’ – 16mm – N&B – VOSTF Réalisation Yûzô Kawashima. Avec Aratama Michiyo, Mihashi Tatsuya, Yukiko Todoroki.
太陽の季節
Des jeunes de bonne famille s’adonnent délibérément à la recherche du plaisir physique. Adaptation du roman de Shintarô Ishihara, le frère aîné de Yûjirô qui fait des débuts fracassants dans le cinéma. La mode de la « génération du soleil » - ces jeunes qui revendiquent l’hédonisme total - est lancée avec un esprit de désinvolture qui marquera la production de la Nikkatsu à tous les niveaux dans la décennie suivante.
洲崎パラダイス 赤信号
Un jeune couple décide de fuguer après que leur mariage eut été empêché. Ils errent dans Tôkyô à la recherche d’un travail et d’un toit. Ils finissent par élire domicile dans un bar situé aux portes de Suzaki, un quartier de prostitution de Tôkyô. Cette histoire de jeunes en mal de repères et happés par la fulgurante reconstruction de l’après-guerre est une des plus belles réussites artistiques de la Nikkatsu depuis sa reprise d’activité en 1954, autant pour sa finesse psychologique que pour sa richesse picturale. Formé à la Shôchiku, Kawashima fait partie de tous ces réalisateurs, comme Seijun Suzuki, que la Nikkatsu arrivera à récupérer en proposant de meilleures conditions, notamment financières.
Pa s s i o n s j u v é n i l e s kurutta kajitsu
狂った果実
1956 – 86’ – copie 35mm – N&B - VOSTA Réalisation Kô Nakahira. Avec Yûjirô Ishihara, Masahiko Tsugawa, Taizô Fukami, Mie Kitahara.
Natsuhisa, un des jeunes débauchés de la bande des « enfants du soleil », séduit Eri, le premier amour de son frère cadet, Harutsugu. Celle-ci est attirée de plus en plus par le caractère farouche de Natsuhisa. Sorti deux mois après La saison du soleil, ce nouvel opus de la « génération du soleil » confirme l’ascension fulgurante de Yûjirô Ishihara au rang de star.
L’ h o m m e d e l a t e m p ê t e A rashi w o yo b u otoko
嵐を呼ぶ男
1957 – 100’ – couleurs – VOSTA Réalisation Umetsugu Inoue – Avec Yûjirô Ishihara, Kyôji Aoyama, Fukuko Sayo, Mie Kitahara
Eiji a un frère musicien, Shôichi, qu’il tente de promouvoir auprès des clubs de jazz des quartiers nocturnes de Tôkyô. Il réussit à convaincre Miyako, patronne d’un club, malgré sa méfiance à l’égard de son frère qui est un ancien repris de justice. Elle découvre bientôt en Shôichi un rare talent qui pourrait faire de lui le meilleur percussionniste du Japon. Mais c’est sans compter sans Charlie, l’ancien batteur du club évincé par Miyako, jaloux du succès de Shôichi… Formé aux studios de la Shintôhô où il réalisa des comédies musicales, Inoue Umetsugu rejoint la Nikkatsu en 1955. Avec ses films de divertissement de qualité, il contribuera pour beaucoup à la renaissance du studio et sera vite associé à la gloire montante Yûjirô Ishihara. Il fut un des piliers du film d’action maison, avant de devenir indépendant en 1960. Apprécié des studios pour son sens artistique et sa « main sûre de l’artisan », il travaillera même pour la Shaw Brothers à Hong Kong pendant cinq ans. Il y réalisera une vingtaine de films.
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Impossible retour
Le journal d’un fl i n g u e u r
N an g oku tosa w o ato ni shite
南国土佐を後にして
U n t yp e m é p r i s a b l e N ikui anchikush ô
憎いあンちくしょう
kenj û b uraich ô nukiuchi no ry û
拳銃無頼帖 抜き射ちの竜
1959 - 79’ – copie 35mm – couleurs - VOSTF Réalisation Buichi Saitô. Avec Akira Kobayashi, Ruriko Asaoka, Sanae Nakahara, Yôko Minamida.
1962 – 105 ‘ – copie 35mm – couleurs - VOSTA Réalisation Koreyoshi Kurahara. Avec : Yûjirô Ishihara, Ruriko Asaoka, Izumi Ashikawa, Asao Koike
1960 - 86’ - copie 35mm - VOSTF Couleurs - VOSTF Réalisation Hiroshi Noguchi. Avec Keiichirô Akagi, Ruriko Asaoka, Jô Shishido.
A sa sortie de prison, Kôji décide de se ressaisir. Il retourne au pays pour épouser sa fiancée et mener une vie d’homme respectable. Mais entre-temps, celle-ci s’est endettée auprès de l’ancien patron gangster de Kôji, et est devenue sa maîtresse par la force des choses. Dégoûté, Kôji décide de partir à Tôkyô pour commencer une nouvelle vie. Mais son passé carcéral lui colle à la peau et ses anciens collègues yakuzas font barrage à sa reconversion. C’est en voyant la deuxième version de Hiroshi Inagaki du Pousse-pousse (avec Toshirô Mifune, 1958) que Buichi Saitô décida de faire du cinéma. Après une période d’assistanat à la Shôchiku où il travaillera dans les équipes de Yasujirô Ozu et de Kôzaburô Yoshimura, Saitô rejoint la Nikkatsu en 1954. Il se fait vite un nom dans les studios grâce au succès de Impossible retour qui est l’adaptation à l’écran des couplets d’une chanson éponyme à succès. Il se voit alors confier pour neuf films la série Wataridori (Le vagabond) avec Akira Kobayashi en vedette. Saitô devient alors le chef de file du genre new action, mélange d’action et de chansons populaires, avant de choisir l’indépendance en 1970. Cette valeur sûre du cinéma de divertissement sera remarquée par Shintarô Katsu, le producteur des Baby Cart, qui lui confiera la mise en scène du quatrième épisode de la saga, L’âme d’un père, le cœur d’un fils.
Ryûji est un tireur d’élite surnommé « le flingueur ». Un principe guide son action : ne jamais tuer son adversaire, se contenter de le neutraliser en le blessant seulement à la main. Mais Ryûji a un point faible : la drogue. Un jour, il est pris d’un malaise au cours d’une mission. Par chance, un autre tueur répondant au nom de Colt d’argent lui vient en aide in extremis. Cette dette morale l’obligera à travailler pour le chef de Colt d’argent, un yakuza dont il n’apprécie guère les pratiques. Premier opus de la série la plus westernienne produite par la Nikkatsu. Keiichirô Akagi, surnommé le « James Dean japonais », meurt au cours d’un accident de voiture en 1961. Coup dur pour la Nikkatsu qui perd un de ses « quatre diamants » (avec Ishihara, Kobayashi, Wada). Pire, Ishihara victime d’un accident de ski la même année, restera à l’écart des studios pendant six mois. L’usine à films bat un moment de l’aile…
Cochons et cuirassés Buta to g unkan
豚と軍艦
1961 – 108’ – copie 16mm – N&B – VOSTA Réalisation Shôhei Imamura. Avec Hiroyuki Nagato, Jitsuko Yoshimura, Yôko Minamida, Shirô Osaka.
Après la guerre, l’armée américaine s’installe dans la base navale de Yokosuka, au sud de Tôkyô. Alors que les maisons closes prospèrent grâce aux G.I., deux gangs locaux se livrent une lutte acharnée dans l’élevage des porcs, grassement nourris avec les déchets de la base. Kinta, un jeune désoeuvré, se mêle à l’un des gangs, dans l’espoir de tirer profit de cette nouvelle économie. Haruko, sa petite amie, tente de le convaincre de quitter Yokosuka devenue un véritable enfer. Le film le plus anti-américain d’Imamura.
L a v i ll e d e s c o u p o l e s ky û pora no aru machi
P r o f e s s i o n va u r i e n R oku de nashi ka g y ô
ろくでなし稼業
1961 – 83’ – copie 35mm – couleurs – VOSTF Réalisation : Saitô Buichi. Avec Jô Shishido, Hideaki Nitani, Nobuo Kaneko, Eitarô Ozawa .
Yano et Kuroda sont d’anciens pêcheurs devenus vagabonds. Ils débarquent un jour dans un port et cherchent à se faire embaucher comme hommes de main. Seul Katsumata, un armateur, leur proposera un travail : détruire des bâteaux. Les deux hommes comprennent vite que Katsuma est un homme d’affaires véreux qui détruit ses propres bâteaux pour empocher l’argent des assurances. Les deux hommes vont dévoiler la fraude. Depuis son arrivée à la Nikkatsu en 1955, Jô Shishido avait dû se contenter de jouer dans l’ombre des stars pendant 70 films. C’est suite à la mort accidentelle de Keiichirô Akagi qu’il se voit confier un premier rôle. Seijun Suzuki en fit un acteur de premier plan, spécialisé dans l’interprétation de personnages survoltés.
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Daisaku Kita, vedette très médiatique, est débordé par un emploi du temps trop chargé. Même son amour pour sa femme Noriko s’est éteint. Pour fuir ses problèmes, il se rend dans le Kyûshû où un couple d’amis possède une maison. Mais il sera poursuivi par sa destinée tragique. Film de genre mood action devenu culte au Japon, avec le couple mythique Ishihara / Asaoka.
キューポラのある街
1962 – 100’ – copie 16mm – N&B – VOSTA Réalisation Kirio Urayama. Avec Eijirô Tôno, Tokuko Sugiyama, Sayuri Yoshinaga.
Ishiguro Tatsugorô est ouvrier dans l’une des nombreuses fonderies artisanales de Kawachi, ville industrielle du nord de Tôkyô. Mais Tatsugorô est licencié après le rachat de sa petite société par un grand groupe, dans un contexte de modernisation fulgurante du Japon. Il plonge dans l’alcool et dépense son indemnité de départ dans le jeu. Sa famille réduite à la pauvreté tente désespérément de le raisonner. D’abord employé à la Shôchiku, Urayama rejoint la Nikkatsu avec Seijun Suzuki. Il y sera assistant de Yûzô Kawashima puis de Shôhei Imamura (coscénariste du film). Ce dernier aura une grande influence sur Urayama : La ville des coupoles rappelle beaucoup Les enfants des charbonnages (Nian chan, 1961) d’Imamura. Il quittera la Nikkatsu quand celle-ci lancera la production des films érotiques.
La femme-insecte N ippon konch û ki
にっぽん昆虫記
1963 – 123’ – copie 16mm - N&B - VOSTA Réalisation Shôhei Imamura. Avec Sachiko Hidari, Sumie Sasaki, Kazuo Kitamura, Jitsuko Yoshimura.
Tomé naît en 1918 dans une famille de paysans. A l’âge de 23 ans, en 1941, elle part travailler dans une usine à Singapour puis revient travailler au Japon dans une ferme d’un grand propriétaire. Elle est violée par le fils de son patron et met au monde une fille, Nobuko. Après la guerre, elle devient tour à tour domestique, prostituée près d’une base américaine puis tenancière d’une maison close. Ses affaires prospèrent mais ses ennuis n’en finissent pas… A travers la vie de Tomé, victime des hommes mais capable de survivre dans les bas-fonds de la société grâce à une énergie vitale comparable à celle d’un insecte, le film reflète les événements qui ont marqué le Japon du XXe siècle. L’œuvre la plus « entomologiste » d’Imamura.
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Dévotion ardente
jeu est truqué et Kôji perd. Ce dernier se promet alors de défier à nouveau le Chinois pour révéler la tricherie. Par le chef de file de la « génération du soleil » qui continua sa carrière dans le film d’action. Le film fait partie d’une série en trois épisodes avec pour héros un joueur de cartes aux allures de James Bond. L’histoire est émaillée de scènes de jeu qui sont l’élément moteur de l’intrigue. Le tapis vert remplace les pistolets et les sabres des films d’action traditionnels.
S h û en
執炎
1964 – 120’ – copie 35mm – N&B - VOTSA Réalisation Koreyoshi Kurahara. Avec Ruriko Asaoka, Ichizô Itami, Izumi Ashikawa.
Japon, années trente : Takuji, pêcheur sur les côtes de la mer du Japon, doit se marier avec la délicieuse Kiyono, la fille d’un village de montagne proche. Mais la guerre met fin à leur idylle qui avait déjà été durement contrariée par les mœurs rétrogrades de leurs parents. Takuji est mobilisé sur le front. Il en revient avec de graves blessures et Kinoyo se dévoue corps et âme à la guérison de son mari. Mais à peine remis sur pied, Takuji apprend qu’il est à nouveau mobilisé… Film spécialement produit en l’honneur de Ruriko Asaoka, une des stars féminines de la Nikkatsu, pour fêter son centième film (en neuf ans !) avec ces studios. Stylistiquement marqué par la Nouvelle vague française, ce film d’amour pur et indestructible est un des plus remarqués de Kurahara, avec Un type méprisable. A noter qu’Ichizô Itami n’est autre que le futur Jûzô Itami, l’auteur de Tampopo.
Le mouchoir rouge
La marque du tueur
A kai H ankachi
K oroshi no rakuin
赤いハンカチ
殺しの烙印
1964 – 98’ – copie 35mm – couleurs - VOSTF Réalisation Toshio Masuda. Avec Yûjirô Ishihara, Ruriko Asaoka, Hideaki Nitani, Tomio Kawachi.
1967 – 91’ – copie 35mm – N&B – VOSTA Réalisation Seijun Suzuki. Avec Jô Shishido, Annu Mari, Kôji Nambara.
A la suite d’une bavure policière, Mikami, détective à Yokohama, disparaît pendant trois ans. Son collègue le retrouve à Hokkaidô, et le convainc de rentrer pour éclaircir le mystère de la mort du gangster qu’il a tué lors de l’incident qui a mis fin à sa carrière. Mikami devient chanteur à Yokohama, et chante « Le mouchoir rouge ». Mais il est passé à tabac par des voyous et se retrouve à l’hôpital. Après Un type méprisable, nouvel exemple classique de film « mood action » avec le couple Ishihara / Asaoka.
Un gang charge le tueur N°3 du Japon d’escorter un cadre de son organisation. Mais suite à une faute professionnelle, il va avoir maille à partir avec les tueurs N°2 et 4. Le manifeste esthétique de Seijun Suzuki qui provoquera son renvoi de la Nikkatsu. Mais ce ne sont pas les audaces formelles de Seijun qualifiées « d’incompréhensibles » par la direction qui provoquèrent ce renvoi mais un salaire jugé trop élevé à une époque où la Nikkatsu connaît des difficultés financières inquiétantes…
B o u l e va r d d e s c h at t e s s a u va g e s noraneko rokku - sekkusu hant â
野良猫ロック セックスハンター
1970 – 86’ – copie 35mm – couleurs - VOSTF Réalisation Yasuharu Hasebe. Avec Meiko Kaji, Rikiya Yasuoka, Tatsuya Fuji, Jirô Okazaki.
Tachikawa est devenue une ville anarchique : guerre des gangs, marché noir, alcool, drogue, toute l’économie locale repose sur la base américaine installée depuis la fin de la guerre. Des bandes rivales s’entraident ou s’entredéchirent selon les circonstances, dont la fameuse bande des chattes sauvages menée par la séduisante Mako. A l’école de Seijun Suzuki dont il a retenu l’usage atypique des couleurs, Yasuharu Hasebe débute en 1966 avec Les tueuses en collants noirs. Pour son premier film, il a déjà le privilège de servir la star Akira Kobayashi avant de devenir le chef de file du genre New Action. Réalisateur passionné et survolté qui étudiait minutieusement chacun de ses plans, il reste un des cinéastes les plus intéressants de cette époque fébrile de la Nikkatsu. Ce premier épisode de la série des « Chattes sauvages rockeuses », avec la féline Meiko Kaji fait partie de ces films japonais dont le ton et l’esthétique ont profondément marqué le style de Quentin Tarentino. Le film est distribué par la Dainichi Eihai, une nouvelle structure de distribution mise en place conjointement par la Nikkatsu et la Daiei, les deux compagnies les plus touchées par la crise de l’industrie du cinéma. Mais cette collaboration prendra fin dès l’année suivante avec la faillite de la Daiei.
L e s a b l e m o u i ll é d ’ a o û t Le joueur en
noir
H achi g atsu no nureta suna
八月の濡れた砂
K uroi T o b akushi
黒い賭博師
Film culte au Japon, avec La lanterne rouge, mettant en scène des adolescents désabusés et révoltés contre l’hypocrisie des adultes, entre Nouvelle vague et génération du soleil. Le film le plus marquant du genre seishun eiga (film sur la jeunesse), une spécialité de la Nikkatsu.
Le jardin secret des ménagères perverses D anchi z uma : hirusa g ari no j ô ji
団地妻・昼下りの情事
1971 – 64’ – copie 35mm – couleurs – VOSTF Interdit aux moins de 18 ans Réalisation Shôgorô Nishimura. Avec Kazuko Shirakawa, Tatsuya Hamaguchi, Maki Nanjô.
Une matinée comme les autres commence pour Ritsuko qui habite une résidence de banlieue : elle revient de la gare où elle a accompagné son mari et s’attelle aux tâches ménagères habituelles. Frustrée sexuellement depuis plusieurs années par un mari qui la délaisse pour son travail, elle aimerait demander conseil à sa voisine Yôko, elle-même oubliée par un époux expatrié et qui organise des rencontres galantes pour toutes les ménagères de la cité. Mais Yôko est loin d’être une philantrope ; Ritsuko va l’apprendre à ses dépens. Chaque matin, quand tous les hommes sont partis travailler, des cités entières du Japon se transforment en véritables gynécées. C’est l’occasion pour les ménagères esseulées de lâcher la bride à leurs fantasmes et de vivre des aventures sexuelles en tous genres. Cette série atypique intitulée Danchizuma où le tragique et le comique se mêlent est devenue un sous-genre à part entière du romanporno et une véritable poule aux œufs d’or pour la Nikkatsu. Premier épisode d’une série qui en comptera une trentaine.
1971 – 91’ - copie 35mm – couleurs - VOSTF Interdit aux moins de 12 ans Réalisation Toshiya Fujita. Avec Murano Takenori, Teresa Noda, Takeo Chii, Yoshio Harada.
1965 - 86’ – copie 35mm – couleurs - VOSTF Réalisation Kô Nakahira. Avec Akira Kobayashi, Asao Koike, Minami Fuji, Kiiton Masuda.
Kôji, un joueur de cartes hors pair, vient en aide à une joueuse poursuivie par un gang chinois auprès duquel elle s’est lourdement endettée. Pour racheter les dettes de la malheureuse, Kôji propose une partie au chef chinois. S’il gagne, il pourra repartir avec la fille. Mais le
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Une fin d’été à Shônan, station balnéaire au sud de Tôkyô. Kenichirô a été renvoyé du lycée pour avoir frappé le directeur de l’établissement. Il se met à boire, à faire des avances aux filles de sa classe et à avoir un comportement de plus en plus violent envers son beau-père qu’il déteste.
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Derrière le rideau de fusuma
Fleurs et serpents H ana to he b i
花と蛇
Y oj ô han fusuma no ura b ari
四畳半襖の裏張り
1974 – 73’ – copie 35mm – Couleurs – VOSTF Interdit aux moins de 16 ans Réalisation Masaru Konuma. Avec Naomi Tani, Chôri Sakamoto, Yasuhiko Ishizu, Hiroko Fuji.
1973 - 72’ – copie 35mm – couleurs - VOSTF Interdit aux moins de 16 ans Réalisation Tatsumi Kumashiro. Junko Miyashita, Hideaki Esumi, Hatsuo Yamaya.
L’action de ce film, dont le scénario est tiré d’un roman attribué à Nagai Kafû, se situe en 1918 dans une maison de geishas que les crises sociales affectent à peine. C’est au milieu de cette vie de plaisirs et de perversions que se tisse la relation de la jeune geisha Sodeko avec son nouveau client Shinsuke qui lui fait découvrir des sommets de jouissance. Filmées dans la pénombre, derrière les moustiquaires, les scènes érotiques font état de tout l’art de Kumashiro. Un des chefsd’œuvre du genre roman-porno.
Un PDG frustré assouvit ses fantasmes sur sa domestique, tandis que sa femme s’initie aux pratiques sado-masochistes pour se libérer. Par l’auteur de La vie secrète de Madame Yoshino, qui fut le spécialiste du film SM, sous-genre à succès du roman-porno dont Fleurs et serpents est le premier opus. Présenté à l’Etrange Festival en 2002 sous le titre Vices et supplices.
La vie secrète de madame Yoshino U reta tsu b o
濡れた壺
1976 – 69’ – copie 35mm - couleurs – VOSTF Interdit aux moins de 16 ans Réalisation Masaru Konuma. Avec Naomi Tani, Makiko Mizuno, Rie Tachibana.
Madame Yoshino, fille d’un accessoiriste du théâtre kabuki, est passée maîtresse dans l’art de faire des poupées de papier traditionnelles représentant des personnages célèbres du kabuki. Veuve, elle vit avec sa fille, adolescente en mal d’amour jalouse de la beauté de sa mère. Un jour, madame Yoshino et sa fille rencontrent Hideo, le fils d’un acteur qui a violé madame Yoshino dans son adolescence. Une rivalité naît entre la mère et la fille, toutes deux désormais amoureuses de Hideo. Mais pour des raisons bien différentes.
Love Hotel R a b u hoteru
ラブホテル
1985 – 88’ – copie 16mm – couleurs – VOSTA Interdit aux moins de 16 ans Réalisation : Sômai Shinji. Avec Hayami Noriko, Terada Minori, Shimizu Kiriko.
Muraki est un éditeur au bord de la faillite. Pour survivre, il s’endette auprès d’un yakuza usurier. Ne pouvant honorer ses créances, le gangster se venge en violant sa femme. Désespéré de la vie, Muraki décide de mettre fin à ses jours. Mais avant de passer à l’acte, il décide de s’offrir une nuit érotique torride en se payant une prostituée. Cette rencontre va bouleverser son existence. Comme Kiyoshi Kurosawa et beaucoup d’autres auteurs japonais reconnus, Shinji Sômai a été formé au cinéma grâce aux productions érotiques. Mais Sômai ne se contente pas d’un rôle de simple faiseur : avec lui, le cahier des charges « sexuel » s’efface rapidement au profit d’une intrigue dont le mouvement s’étend jusqu’à la composition d’une véritable vision du monde. Une démarche d’auteur qu’il partage pleinement avec Tatsumi Kumashiro.
Rouge vertige T enshi no harawata - akai memai
天使のはらわた 赤い眩暈
1988 - 74 ‘ – copie 35mm – couleurs – VOSTA Interdit aux moins de 18 ans Réalisation Takashi Ishii. Avec Katsuragi Mayako, Naoto Takenaka, Jun Izumi, Akira Emoto.
La lanterne rouge A ka ch ô chin
赤ちょうちん
L’ e x ta s e d e l a r o s e n o i r e K uro b ara sh ô ten
1974 – 93’ – copie 16mm – couleurs - VOSTA Réalisation Toshiya Fujita. Avec Kenji Takaoka, Kumiko Akiyoshi, Hiroyuki Nagato, Chôichirô Kawarasaki.
黒薔薇昇天
La maison des perversités Yaneura no sanposha
Masayuki et Sachie sont amoureux et décident de s’installer sous le même toit. Un soir, ils retrouvent dans leur appartement un inconnu qui leur explique s’être réfugié chez eux suite à un malaise. Mais l’homme finit par s’incruster et une étrange vie à trois commence. Le couple déménage pour fuir cet étrange parasite quand Masayuki apprend que Sachie est enceinte… Toshiya Fujita a été un des peintres les plus sensibles de la nouvelle génération qui, à partir des années soixante-dix, remplaça celle plus violente qui s’était impliquée dans les mouvements politiques étudiants. Le titre du film est tiré d’une chanson d’un groupe à succès de l’époque Kaguya-hime (La princesse de la lune) qui reflétait les nouvelles aspirations de la jeunesse - sérénité et stabilité - après la période agitée de la décennie précédente.
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1975 – 72’ - copie 35mm – couleurs – VOSTA Interdit aux moins de 16 ans Réalisation Tatsumi Kumashiro. Avec Shin Kishida, Naomi Tani, Meika Seri, Hajime Tanimoto.
Jûzô est un ingénieur du son spécialisé dans les bruitages pour films érotiques. Il en est aussi réalisateur et rêve de faire des chefs-d’œuvre à la manière de Shôhei Imamura et de Nagisa Oshima qu’il admire. Alors qu’il s’apprête à tourner un nouveau film, son actrice attitrée lui annonce qu’elle est enceinte de son partenaire au cinéma, et qu’elle veut mettre fin à sa carrière. Jûzô tente de la convaincre des bienfaits du film érotique, notamment de son rôle éducatif dans un pays aux mœurs qu’il juge rétrogrades… Le maître du roman-porno offre ici une réflexion sur un genre dont il est devenu le chef de file, dans une comédie drolatique chargée d’autodérision.
屋根裏の散歩者
1976 – 76’ – copie 35mm – couleurs – VOSTA Interdit aux moins de 16 ans Réalisation Noburu Tanaka. Avec Renji Ishibashi, Junko Miyashita, Hiroshi Chô, Tokuko Watanabe.
Les résidents d’une pension bourgeoise se livrent à toutes sortes de jeux sexuels. Voyeur solitaire caché dans le grenier, Goda les observe attentivement. Un jour, il en empoisonne un en versant de la morphine dans sa tasse à travers le trou du grenier… Après le succès l’année précédente de La véritable histoire d’Abe Sada, Noboru Tanaka signe une adaptation d’un roman d’Edogawa Rampo. Cet écrivain du mystère, de l’horreur et de la perversion fut naturellement une source d’inspiration féconde pour les productions érotiques.
Un accident de voiture est à l’origine de la rencontre entre Nami, une infirmière victime d’un viol au cours d’une nuit de garde, et Kimura, le chauffeur qui l’a renversée. Mais la relation entre Kimura et Nami sera de courte durée et finira tragiquement. D’après le manga Angels Guts créé par Takashi Ishii qui fut d’abord dessinateur à succès. Il est vite remarqué par la Nikkatsu où il se fait d’abord embaucher comme scénariste. Il adaptera à l’écran son propre manga en cinq épisodes. Les trois premiers seront réalisés par Chûsei Sone, Noboru Tanaka et Toshiharu Ikeda. Il réalisera lui-même le quatrième, Rouge vertige, qui marque aussi ses débuts dans la mise en scène grâce à la Nikkatsu. Cette série sombre et violente symbolise la fin de la production des roman-porno de la Nikkatsu. Le cinquième épisode sera produit par la télévision. Ishii continuera de développer sa thématique de l’héroïne tragique perdue dans les recoins d’une urbanité cruelle et blafarde avec son film le plus connu : A Night in Nude (1992).
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Tat s u m i K u m a s h i r o e t l e s r o m a n – p o r n o par Shiguéhiko Hasumi Philosophe, essayiste, enseignant, ancien président de l’Université de Tokyo
En 1972, Tatsumi Kumashiro (1927-1995) qui n’avait jusqu’alors réalisé qu’un seul film quatre ans auparavant se voit confier par la société qui l’emploie la réalisation de deux nouveaux films. Ce réalisateur débutant, déjà âgé de 45 ans, reprend alors l’un de ses anciens scénarios et tourne en 10 jours Lèvres humides , un drôle de road movie dans lequel un homme et une femme se trouvent déchirés entre leur amour et le crime qu’ils doivent commettre. Ce film de série B, d’une durée de 75 minutes et réalisé avec un petit budget, était destiné à être projeté dans des salles où passaient deux films d’affilée. Il est difficile de l’ignorer dans la mesure où à travers le comportement curieusement détaché de ses personnages confrontés au danger, se dessine déjà l’originalité d’un style que Tatsumi Kumashiro développera par la suite. Mais c’est son film suivant, Sayuri stripteaseuse – Désirs humides (1972), qui lui vaudra la reconnaissance du public. Ce film met en scène des stripteaseuses et décrit leurs disputes sur la conception de leur art dans les coulisses d’un petit théâtre. Pour le rôle principal, Tatsumi Kumashiro a eu l’audace d’engager une vraie stripteaseuse réputée pour son caractère provocateur, ce qui vaudra au film à la fois le soutien enthousiaste du public, l’appréciation de la critique et l’attention de la préfecture de police. Devant le succès du film, la Nikkatsu confie aussitôt à ce nouveau talent la réalisation de plusieurs projets. Ce studio vénérable qui figurait autrefois parmi les cinq grandes compagnies de production était en proie à des difficultés qui le contraignaient à des mesures de réorganisation. Pour s’en sortir, il avait opté pour la fabrication en série de films à petits budgets, tournés en très peu de temps, sur le thème des mœurs amoureuses. Ce nouveau système de production qu’on a appelé Nikkatsu roman-porno donna l’occasion à des réalisateurs encore inexpérimentés de tourner leur premier film. Cependant, aucun de ces réalisateurs sous contrat ne savait comment s’y prendre car il n’existait pas encore de stratégie bien définie. En fait, c’est Sayuri stripteaseuse – Désirs humides qui, d’une manière très inattendue, a posé des jalons avec sa mise en scène débridée et son parti pris affiché pour ces jeunes femmes obligées de monnayer leur nudité pour survivre. Il faut dire que Tatsumi Kumashiro n’était pas particulièrement amateur de scènes érotiques avec des couples enlacés et des gros plans sur la peau, comme aurait aimé le voir filmer la Nikkatsu. De par sa longue expérience d’assistant réalisateur et de scénariste, il savait que si la construction du film est solide, il pourrait facilement y introduire des scènes de sexe comme il le faisait des scènes d’action lorsque cette tendance était la ligne directrice de la compagnie. Après le succès de Lèvres humides et surtout de Sayuri stripteaseuse – désirs humides , le service publicitaire de la Nikkatsu insista pour que le mot nureta (humide, mouillé), dont le sens caché n’échappe à personne, figure dans tous les titres de films de Tatsumi Kumashiro. D’où le choix du titre suivant, Les amants mouillés. Il s’agit là aussi d’un film de 75 minutes, du même genre dans un petit village de pêcheurs perdu, un homme à l’identité mal définie entretient des relations cyniques avec la propriétaire du cinéma dans lequel il travaille. Ce film est un chef-d’œuvre, où le talent du réalisateur est merveilleusement servi par le travail remarquable du chef opérateur Masaku Himeda. Aussitôt après, Tatsumi Kumashiro enchaîne avec L’enfer des femmes – forêt humide (1973), une audacieuse adaptation de la Justine du marquis de Sade, transposée dans le Japon des années vingt. Ce film ambitieux, au titre encore une fois évocateur, ne reste à l’affiche qu’une semaine avant d’être interdit par la préfecture de police. Mais cela n’entamera pas la confiance que voue la Nikkatsu à son réalisateur. C’est grâce à l’activité débordante de Tatsumi Kumashiro que la nouvelle ligne de cinéma romantique et pornographique adoptée par la Nikkatsu va connaître le succès. Ainsi, ce « jeune » réalisateur tourne quatre films en 1973, aussitôt suivis de six autres en 1974, soit un total de douze films en l’espace de trois ans, ce que n’aurait sans doute pas pu imaginer Tatsumi Kumashiro du temps où il était assistant réalisateur. Une entrée en scène aussi brillante aurait pu se comprendre à l’âge d’or des studios dans les années cinquante, mais à cette époque de crise des grandes compagnies, on peut dire qu’il s’agit d’un cas exceptionnel. C’est grâce à l’activité débordante de Tatsumi Kumashiro que la nouvelle
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ligne de cinéma romantique et pornographique adoptée par la Nikkatsu va connaître le succès. Inutile de dire qu’il a entraîné dans son sillage toute une pléiade de brillants réalisateurs. C’est ainsi que le nom d’un réalisateur pratiquement inconnu auparavant s’est inscrit dans l’histoire du cinéma japonais tandis que le Nikkatsu roman-porno , qui avait fait son apparition sur une image d’échec, devenait le réservoir de nouveaux talents. Parmi les douze films de ce réalisateur mythique, il en est deux qui dépassent largement le cadre commercial dans lequel il évoluait à cette époque. Il s’agit du Monde des geisha 1 : derrière le rideau de fusuma (1973) et la suite que constitue Le monde des geishas 2 : la peau pudique, qui ont suffi, en moins de trois ans, à établir sa réputation au Japon. Avec Désirs humides – vingt et une ouvreuses en scène (1974) et Désirs humides – la tulipe ouverte (1975) se termine la série de films aux titres contenant le mot « humide » qui a contribué à faire connaître le nom de Tatsumi Kumashiro. A partir de cette date, Tatsumi Kumashiro est un réalisateur reconnu à qui d’autres maisons de productions proposent des projets. Par la suite, malgré une santé fragile, il continuera à réaliser de nombreux films pour différentes sociétés de production, devenant au fur et à mesure que sa notoriété s’accroît le chef de file du cinéma japonais qui traverse alors une période difficile. Mais à partir de la fin des années quatre-vingt, sa santé s’altère et le rythme de sortie de ses films s’en ressent. En 1995, alors qu’il commence tout juste à attirer l’attention internationale avec son trente-cinquième film, La tristesse d’un idiot, il disparaît à l’âge de soixante-huit ans. Aujourd’hui, il est difficile de voir tous les films qu’il a réalisés dans les années soixante-dix à un rythme effréné car la plupart des négatifs ont disparu en raison de la mauvaise gestion de la Nikkatsu alors au bord de la faillite. A l’époque où Tatsumi Kumashiro devient l’enfant chéri du cinéma japonais, Akira Kurosawa, qui a réalisé Dodes’kaden en 1970, ne trouvant pas les moyens de faire un film au Japon, s’apprête à tourner Dersou Ouzala avec un financement soviétique. Quant à Nagisa Oshima, qui n’avait rien tourné depuis Une petite sœur pour l’été en 1972, c’est un financement français qui va lui permettre de réaliser l’Empire des sens en 1976. A cette époque, le cinéma japonais traverse indubitablement une période d’hibernation. La mode des « films de yakuzas » qui a permis de prolonger la vie des studios de la Toei à la fin des années soixante, approche elle aussi de sa fin. La plupart des studios sont alors contraints de réduire leurs activités, obligeant leurs équipes techniques à choisir entre une retraite anticipée ou des postes administratifs au sein de la société. Si l’on observe d’un autre point de vue le cinéma à cette époque, on s’aperçoit que c’est le moment où les auteurs « post-Godard » qui se sont essayés au cinéma indépendant commencent à être reconnus sur le plan international. C’est entre 1972 et 1974 que les films de réalisateurs tels que Theo Angelopoulos, Victor Erice, Rainer Werner Fassbinder, Nagisa Oshima, Andrei Tarkovski, Kiju Yoshida ou Wim Wenders sont remarqués dans les festivals internationaux. Leur apparition groupée est la preuve que l’évolution, lente mais inéluctable, du système de production et des critères d’évaluation est en train de progresser à travers le monde. L’étonnante apparition de Tatsumi Kumashiro va peut-être de pair avec une telle évolution même si ses films de l’époque, mis à part La rue de la joie (1974), ne furent pratiquement pas présents sur la scène internationale. C’est ainsi que dans les années soixante-dix où le système des studios est moribond, la Nikkatsu apparaît comme une utopie. Mais il existe une différence essentielle entre Tatsumi Kumashiro et les réalisateurs « Post-Godard ». Si ce jeune réalisateur pratiquement inconnu a pu soutenir le cinéma japonais tant sur le plan qualitatif que quantitatif, c’est parce qu’il avait été engagé par la Nikkatsu au moment où le studio était au bord de la faillite. A cet égard, son parcours est relativement classique à l’intérieur du système typiquement japonais des studios : né en 1927 (cinq ans avant Nagisa Oshima), il effectue son apprentissage comme assistant réalisateur à la Shôchiku, se fait engager à la Nikkatsu lorsqu’elle reprend ses activités peu après la fin de la guerre, et attend de devenir réalisateur en écrivant des scénarios. De ce point de vue, on peut dire que le Tatsumi Kumashiro de 1972 à 1974 est plus proche des réalisateurs commerciaux des années cinquante tels que Yasujirô Ozu ou Mikio Naruse encore en activité, que de Nagisa Oshima qui avait déjà quitté la Shôchiku pour jeter les bases d’une production indépendante. A l’école des studios, Tatsumi Kumashiro a assimilé les techniques permettant de faire des films à moindre coût, tournés en un nombre limité de jours et d’une durée qui n’excède pas quatre-vingts minutes. D’autres réalisateurs de talent, comme Chûsei Sone, Masaru Konuma ou Noboru Tanaka, qui ont fait leurs débuts à la Nikkatsu à peu près à la même époque, étaient eux aussi rompus au
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système des studios. Ils avaient en plus la chance d’avoir à leur disposition d’excellents directeurs artistiques et chefs-opérateurs. C’est grâce à la collaboration de véritables professionnels que les films du Nikkatsu roman-porno atteignent à cette époque un haut niveau artistique qui ne correspond pas à l’image que l’on a habituellement des films de série B. C’est ainsi que dans les années soixante-dix où le système des studios est moribond, la Nikkatsu apparaît comme une utopie, où ce qu’il y a de meilleur dans la tradition est miraculeusement préservé. Là, jour après jour, les techniques se transmettent sur les lieux de tournage et de nouvelles expériences sont réalisées. De nombreux chefs opérateurs et producteurs compétents qui soutiendront par la suite le cinéma japonais ont fait leurs classes dans ces studios. En ce sens, on peut sans doute dire que Tatsumi Kumashiro est le dernier réalisateur produit par le système des studios. La plupart des films qu’il a réalisés dans les années soixante-dix, y compris son chef-d’œuvre Derrière le rideau de fusuma, seront tous distribués comme des films de divertissement, sortis à grands frais. C’est pourquoi quand il tournait sans arrêt en tant que réalisateur sous contrat commercial, il éprouvait sans doute un sentiment de plénitude à intégrer des détails significatifs pour lui, mais je crois qu’il n’avait tout simplement pas le temps de construire une œuvre en ayant conscience d’en être l’auteur à part entière, à la manière d’un Nagisa Oshima par exemple. Est-ce qu’il faut en conclure que seule la technique traditionnelle a soutenu les premiers films de Tatsumi Kumashiro en tant que réalisateur du système des studios ? Bien sûr que non, car ses films, comme ceux de nombreux réalisateurs qui ont fait leur apparition entre 1972 et 1974, sont traversés par un souffle novateur. Ce jamais vu dans le cinéma japonais concerne notamment la direction d’acteurs. Tatsumi Kumashiro a su créer une relation de complicité avec le nouveau type d’actrices exigé par la ligne de production Nikkatsu roman-porno. Ensuite tout son art a été de jouer de cette relation de complicité avec ses actrices principales. En réalité, les actrices choisies par Tatsumi Kumashiro à l’époque – Moeko Ezawa dans Lèvres humides, Rie Nakagawa dans Les amants mouillés, Hiroko Isayama dans L’enfer des femmes – forêt humide, ou Junko Miyashita dans Le rideau de fusuma - occupent magnifiquement l’écran. Ces actrices représentatives des débuts du roman-porno, d’origine et d’âge différents, ont signé avec la production un contrat dans lequel elles acceptent de se livrer nues au regard de la caméra et de jouer des scènes d’amour. En ce sens, leur caractère est légèrement différent de celui des actrices employées jusqu’alors par les studios. Mais malgré leur image de femme vénale, elles ne se réduisent pas à cette seule expérience mercantile de corps qui se dénude à l’écran. En fait, fières de jouer dans un film de la Nikkatsu, une vieille maison du monde du cinéma, elles ne se seraient pas permises de refuser un rôle principal pour la seule raison qu’elles n’appréciaient pas le scénario. Sur ce point, les actrices du roman-porno sont incontestablement des « stars de cinéma » de haut niveau. Lors du tournage de l’inoubliable plan-séquence, à la fin des Amants mouillés, quand un homme et une femme nus jouent à saute-mouton sur une dune, l’héroïne, Rie Nakagawa, s’est soudain interrompue en murmurant : « pourquoi dois-je faire cela ? » . Ne comprenant sans doute pas bien l’idée du réalisateur, elle a dû se trouver brusquement désemparée d’avoir uniquement à s’exposer nue aux yeux de tous. L’aprèsmidi touchant à sa fin, le tournage a repris tant bien que mal. Par la suite, la scripte du film, Akane Hakuchô, a écrit dans ses mémoires que ce soir-là, Tatsumi Kumashiro avait eu la délicatesse d’improviser sur le champ une nouvelle séquence susceptible de redonner à l’actrice sa fierté de premier rôle, et de mieux lui faire comprendre le fil de l’histoire. Cette anecdote montre à quel point ce réalisateur particulièrement attaché à la structure du temps et de l’espace cinématographiques filme uniquement en fonction du jeu des actrices, afin de suivre non seulement le mouvement de leur corps mais aussi leur continuité intérieure. Bien sûr, une telle attention au niveau de la direction d’acteurs s’était déjà produite. Mais dans le contexte du Nikkatsu roman-porno où les réalisateurs se préoccupaient plus du corps et de la peau des actrices que de leur jeu, Tatsumi Kumashiro apparaît comme un réalisateur particulièrement à l’écoute de ses interprètes. Plutôt que de filmer en dénudant encore plus une actrice déjà nue, il filmait la nudité comme un vêtement magnifique. Une telle sollicitude donne à ses films une sensualité de nature différente du dévoilement métaphorique du sexe. Tatsumi Kumashiro semble attendre patiemment à travers l’œil de la caméra l’instant voluptueux où le flou de la peau féminine imprègne la pellicule d’une caresse avec un naturel qui ressemble à un mensonge. Junko Miyashita qui a travaillé pour la première fois avec Tatsumi Kumashiro dans le Rideau de fusuma a confié que cette mise en scène basée sur de longs plans-séquences, même pour les scènes d’intérieur, lui avait fait peur, mais qu’en même temps l’éloignement de la caméra l’avait soulagée et lui avait permis d’avoir une certaine liberté de mouvement. Il paraît que Tatsumi Kumashiro lui donnait des indications détaillées jusque
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dans certaines attitudes qui n’étaient pas notées dans le scénario et acceptait facilement qu’elle y apporte sa participation. Pour Junko Miyashita, qui trouvait « intéressante » sa mise en scène délicate et minutieuse, ces indications précises étaient souvent proches d’une sensibilité féminine : « Il devait bien observer les femmes. Je sentais qu’il les connaissait bien. » Elle se souvient aussi que lorsqu’il n’était pas satisfait de son jeu après plusieurs répétitions, il lui arrivait souvent de modifier le scénario pour l’adapter à son interprétation. Si l’on distingue au cinéma la mise en scène de la prise de vue, le travail de Tatsumi Kumashiro relève sans aucun doute plus de cette dernière catégorie. Bien sûr, cela ne signifie pas que la mise en scène ne soit pas minutieusement pensée et qu’il ne soit pas prêt à prendre des risques pour la réaliser. Mais il ne forcera jamais une actrice à se couler dans un moule déterminé à l’avance aux dépens de la continuité intérieure du personnage. Grâce à une prise de vue qui fait penser à une respiration libérant le mouvement et le corps de la femme – thème prégnant de tous ses films, comme en témoigne la longue scène d’amour sous la moustiquaire du Rideau de fusuma, Tatsumi Kumashiro semble attendre patiemment à travers l’œil de la caméra l’instant voluptueux où le flou de la peau féminine imprègne la pellicule d’une caresse avec un naturel qui ressemble à un mensonge. Ses films ne sont pas pour autant statiques au point de manquer cruellement de mouvement. Dans le Rideau de fusuma, la geisha et son amant s’étreignent à bord d’un pousse-pousse, tandis qu’une autre femme, elle aussi en pousse-pousse s’acharne à les poursuivre. Dans L’enfer des femmes – Forêt humide, où Tatsumi Kumashiro décrit la débauche et le carnage, il va encore plus loin que le marquis de Sade dans l’œuvre originale. Par ailleurs, s’il y a un cambriolage de banque dans Les fleurs en attente de la nuit (1974), on y trouve aussi une évasion en ballon, tandis que dans La femme aux cheveux rouges (1979), un énorme camionbenne abritant les ébats d’un couple traverse l’écran. Et comme dans la scène de saute-mouton des Amants mouillés, il n’est pas rare que les femmes se livrent à des actions d’une incroyable audace. Les films de Tatsumi Kumashiro célèbrent constamment la beauté des femmes, même s’ils décrivent de pauvres prostituées comme dans La rue de la joie. Comme je l’ai déjà dit, pour lui, la peau nue est le plus beau vêtement qu’une femme puisse porter. En revanche, les rares personnages masculins, interprétés par des acteurs peu connus qu’on pourrait prendre pour des vedettes, sont souvent décrits comme des êtres pitoyables et ridicules. En réalité, la plupart d’entre eux ne sont pas libres parce que gouvernés par des puissances invisibles. Pour autant, la révolte ne fait pas partie des principes qui les poussent à agir, parce qu’ils ont une distance suffisante pour envisager avec sang-froid une situation grave. Ce sont souvent des êtres anarchiques qui se livrent, impassibles, à un jeu qui dépasse les limites du bien et du mal – ce qui explique pourquoi beaucoup de films de Tatsumi Kumashiro se déroulent dans les années vingt. Alors que 1973 est l’année où le cinéma japonais s’effondre en même temps que les mouvements politiques de gauche, on peut supposer que dans le déséquilibre intentionnel de l’image de l’homme et de la femme qu’il décrit, Tatsumi Kumashiro tente de montrer ses propres contradictions, lui qui, d’une manière inattendue a été adulé. Non seulement il a eu la possibilité de tourner douze films en trois ans, mais avec le rapide succès de la série Nikkatsu roman-porno, un vent nouveau se met à souffler autour de lui. Cette énergie qu’il reçoit de plein fouet lui fait même croire que plus rien ne lui est impossible. Il dira plus tard qu’il ne s’est jamais senti aussi libre qu’à cette époque, où il a même pu réaliser une adaptation de Sade. Mais cette liberté d’action n’est rien d’autre qu’une illusion de liberté pour laquelle le prix à payer est une absence de liberté encore plus grande. C’est pourquoi il était persuadé que cela ne durerait pas. De fait, moins de dix ans plus tard, les studios de la Nikkatsu vont s’effondrer. L’impossibilité de toute chose est déjà là quand tout semble possible. Là se côtoient toute la beauté et la laideur d’une illusion qui éclôt fugitivement à la frontière du possible et de l’impossible. Ce destin concerne non seulement le Nikkatsu roman-porno, mais peut-être aussi le cinéma lui-même. Tatsumi Kumashiro a quitté ce monde après lui avoir offert trente-cinq films assumant telles quelles la beauté comme la laideur. C’est cette beauté et cette laideur que nous nous devons de partager, maintenant qu’il est mort, grâce à tous ceux qui s’emploient à sauvegarder les films qu’il nous a laissés. Traduction de Rose-Marie Makino-Fayolle
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AMICA L E AU J A P ON P OUR L A MAISON DE L A CU LTURE DU J A P ON A PARIS
パリ日本文化会館・日本友の会
Ce groupe d’entreprises privées apporte son soutien aux activités de la MCJP. à ce jour, les sociétés membres sont les suivantes (par ordre alphabétique) : 本会は、 日仏官民連携という基本理念のもとに運営されるパリ日本文化会館において、 日仏および日欧間の文化交流活動が幅広く展開されていくことを目的に、民間支援を推進しています。 AD-A CO., LTD. • AJINOMOTO CO., INC. • AKEBONO BRAKE INDUSTRY CO., LTD. • ALL NIPPON AIRWAYS CO., LTD. • ASAHI BREWERIES, LTD. • ASATSU-DK INC. • BUNGEISHUNJU LTD. • CANON INC. • CASIO COMPUTER CO., LTD. • CHUBU ELECTRIC POWER CO.,INC • DAIKIN INDUSTRIES,LTD. • DAI NIPPON PRINTING CO.,LTD. • DENTSU INC. • EAST JAPAN RAILWAY COMPANY • FUJI TELEVISION NETWORK, INC. • FUJI XEROX CO.,LTD. • HACHETTE FUJINGAHO • HAKUHODO INC. • HAYASHIBARA FOUNDATION • HITACHI,LTD • I&S BBDO INC. • JAPAN AIRLINES INTERNATIONAL CO.,LTD. • JAPAN PUBLICATIONS TRADING CO.,LTD. • JAPAN TOBACCO INC. • JTB CORP. • KAJIMA CORPORATION • KIKKOMAN CORPORATION • KODANSHA LTD. • KOITO MANUFACTURING CO., LTD. • MAGAZINE HOUSE LTD. • MERCIAN CORPORATION • MITSUBHISHI CORPORATION • MITSUBISHI UFJ NICOS CO., LTD. • MITSUI & CO., LTD. • MORABITO • NEC CORPORATION • NGK INSULATORS, LTD. • NIHON KEIZAI SHIMBUN, INC. • NIPPON KOHKOKU-SHA CO., LTD. • NIPPON STEEL CORPORATION • NIPPON TELEVISION NETWORK CORPORATION • NIPPON YUSEN KABUSHIKI KAISHA • NISSAN MOTOR CO., LTD. • NOF CORPORATION • OHTE ADVERTISING, INC. • ONWARD KASHIYAMA CO., LTD. • ORIX CORPORATION • PARIS MIKI INC. • RICOH COMPANY, LTD. • RYOHIN KEIKAKU CO.,LTD. • SHIMIZU CORPORATION • SHINCHOSHA PUBLISHING CO. • SHISEIDO CO.,LTD. • SHOGAKUKAN INC. • SHOWA DENKO K.K. • SHUEISHA INC. • SHUFUNOTOMO CO.,LTD. • SONY CORPORATION • SUMITOMO LIFE INSURANCE COMPANY • SUNTORY LIMITED • TAISEI CORPORATION • THE ASAHI SHIMBUN • THE KANSAI ELECTRIC POWER CO., LTD. • THE MAINICHI NEWSPAPERS CO.,LTD. • THE SANKEI SHIMBUN • THE YOMIURI SHIMBUN • TOKYO BROADCASTING SYSTEM, INCORPORATED • TOKYO ELECTRIC POWER COMPANY • TOKYO GAS CO.,LTD. • TOPPAN PRINTING CO.,LTD. • TORAYA CONFECTIONERY CO., LTD. • TORAY INDUSTRIES,INC. • TOSHIBA CORPORATION • TOYOTA MOTOR CORPORATION • TOYOTA TSUSHO CORPORATION • TV ASAHI CORPORATION • TV TOKYO CORPORATION • WACOAL HOLDINGS CORP. • YOMIKO ADVERTISING INC. et deux autres sociétés anonymes. Au 1er juillet 2007. 2007年、 「 パリ日本文化会館」は、開館10周年を迎えるにあたり、多数の日本の経済団体・民間企業の皆様から、 特別募金にご賛同いただきました。多大なるご高配に感謝するとともに、厚く御礼申し上げます。
L ES PARTENAIRES DU 1 0 e ANNI V ERSAIRE DE L A MC J P パリ日本文化会館10周年記念事業特別募金 Dans le cadre des activités de son dixième anniversaire, la MCJP a bénéficié d’un soutien particulier de la part des associations et sociétés suivantes : パリ日本文化会館10周年記念事業のために、下記の団体・企業より特別支援いただきました (アルファベット順)。 Associations 特別支援団体 JAPAN AUTOMOBILE MANUFACTURERS ASSOCIATION, INC.• JAPAN DEPARTMENT STORES ASSOCIATION •JAPAN ELECTRONICS AND INFORMATION TECHNOLOGY INDUSTRIES ASSOCIATION • JAPAN FEDERATION OF CONSTRUCTION CONTRACTORS • JAPAN FOREIGN TRADE COUNCIL, INC. • JAPAN SECURITIES DEALERS ASSOCIATION • THE FEDERATION OF ELECTRIC POWER COMPANIES OF JAPAN • THE FEDERATION OF PHARMACEUTICAL MANUFACTURERS’ ASSOCIATIONS OF JAPAN • THE JAPAN ELECTRICAL MANUFACTURERS’ ASSOCIATION • THE JAPAN GAS ASSOCIATION • THE JAPAN IRON AND STEEL FEDERATION • THE REAL ESTATE COMPANIES ASSOCIATION OF JAPAN • TOKYO BANKERS ASSOCIATION • TRUST COMPANIES ASSOCIATION OF JAPAN Entreprises 特別支援企業 AD-A CO., LTD. • AJINOMOTO CO., INC. • AKEBONO BRAKE INDUSTRY CO., LTD. • ALL NIPPON AIRWAYS CO., LTD. • ASAHI BREWERIES, LTD. • ASATSU-DK INC. • BRIDGESTONE CORPORATION • BUNGEISHUNJU LTD. • CANON INC. • DAIKIN INDUSTRIES, LTD. • DAI NIPPON PRINTING CO., LTD. • DENTSU INC. • EBARA CORPORATION • FUJI TELEVISION NETWORK, INC. • FUJI XEROX CO., LTD. • HAKUHODO INCORPORATED • I&S BBDO INC. • JAPAN AIRLINES INTERNATIONAL CO., LTD. • JAPAN PUBLICATIONS TRADING CO., LTD. • JTB CORP. • KAO CORPORATION • KIKKOMAN CORPORATION • KODANSHA LTD. • LION CORPORATION • MAGAZINE HOUSE LTD. • NGK INSULATORS, LTD. • NIHONKEIZAI SHIMBUN, INC. • NIPPON KOHKOKU-SHA CO., LTD. • NIPPON TELEVISION NETWORK CORPORATION • NOF CORPORATION • OHTE ADVERTISING, INC. • ONWARD KASHIYAMA CO., LTD. • ORIX CORPORATION • PARIS MIKI INC. • RYOHIN KEIKAKU CO., LTD. • SHISEIDO CO., LTD. • SHOGAKUKAN INC. • SHUEISHA INC. • SHUFUNOTOMO CO., LTD. • SUMITOMO LIFE INSURANCE COMPANY • SUNTORY LIMITED • THE YOMIURI SHIMBUN • TOKYO BROADCASTING SYSTEM, INC. • TORAYA CONFECTIONERY CO., LTD. • TV ASAHI CORPORATION • TV TOKYO CORPORATION • YOMIKO ADVERTISING INC. Au 1er septembre 2007
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