Rentrée littéraire automne 2019

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RENTREE LITTERAIRE AUTOMNE 2019 LES COUPS DE COEUR DE JACQUES LINDECKER « Girl », Edna O’Brien, Ed. Sabine Wespieser Destin tragique de Maryam, jeune nigériane enlevée par des djihadistes en écho à l’enlèvement des 276 écolières de Chibok en 2014 par les hommes de Boko Haram. L’autrice de 88 ans s’est rendue au Nigeria pour recueillir les témoignages de rescapées et les fondre dans la voix déchirante de Maryam. 250 pages comme des pierres lancées contre la femme adultère condamnée à la mort par lapidation. Insoutenables violence et asservissement décrits jusqu’à la fuite de l’adolescente avec Babby, l’enfant né de son mariage forcé. On les croit sauvées…. C’est oublier la peur que la survivante ait basculé dans le djihad, le rejet de Babby, du « sang impur » à faire disparaître... Le bout du tunnel finira par poindre.

« Ici n’est plus ici », Tommy Orange, Ed. Albin Michel D’ascendance cheyenne, Tommy Orange a imaginé les chemins croisés de douze personnages autour d’un pow-wow (traditionnellement d'un événement religieux (chamanisme) ou de la célébration d'exploits guerriers. Aujourd'hui, il existe un véritable « circuit » des powwow qui sont devenus des manifestations festives) qui doit être le théâtre d’un braquage. Les Indiens qu’il raconte ne sont ni ceux des légendes de l’Ouest tels qu’on les voit dans de bons vieux westerns, ni ceux du cirque ou des carnavals. Ils vivent dans des villes d’aujourd’hui. Comme ils le peuvent. Sans repères. De guerres en massacres, on leur a tout volé : identité, culture, croyances, espoir… Et pourtant ils ont survécu avec leur héritage fait de traditions et de violences. Avec « Ici n’est plus ici », Tommy Orange raconte comment l’on passe de la sagesse à la folie. Le roman choc de la rentrée.


« Les Mangeurs d’argile », Peter Farris, Ed. Gallmeister Une chasse à l’homme. Loin d’être irréprochable, le « gibier » est l’auteur d’attentats meurtriers. Vétéran traumatisé par la guerre, il échappe depuis des années aux fédéraux et finit pas croiser un jeune adolescent qui vient de perdre son père victime d’une « accident ». Seulement voilà… Prédicateur trop beau pour être honnête, femme fatale, flics véreux et autres mafieux sans foi ni loi (forcément) tournent tels des vautours autour du gamin esseulé au cœur d’une vaste et inquiétante forêt. Efficace, Peter Farris nous plonge dans ce qui ressemble vivement à un cycle infernal. Style solide, intrigue oppressante et cette sempiternelle quête de rédemption qui hante le rêve américain lorsqu’il tourne au cauchemar. Le livre noir de l’Amérique profonde

« Pourquoi les hommes fuient ? », Erwan Larher, Ed. Quidam Le Bataclan, 13 novembre 2015, il y était. S'est pris une balle dans les fesses. “Le livre que je ne voulais pas écrire.” L’héroïne se prénomme Jane, 21 ans, adepte des réseaux sociaux, libre dans sa tête, un brin effrontée… Jane n’a pas spécialement de tabou, ni de véritable boulot. Une vie comme elle vient. Suite à diverses rencontres qu’elle croyait sans lendemain, Jane se met en tête de retrouver un père qui l’a abandonnée. Un musicien. La piste conduit au désert rural de racines provinciales sur fond de mouvement punk. Jane cherche et en même temps, la France gronde, se révolte, casseurs contre flics… Un air d’actualité ? Entre la folle envie de vivre libre, le tourbillon des contradictions, la peur du vide et de l’ennui. Fuir ?


« Un dimanche à Ville-d’Avray », Dominique Barbéris, Ed. Arléa La narratrice, habite à Paris. Paris centre. Parisienne bobo. Luc, son mari, opinions tranchées. Claire Marie, la sœur de la narratrice, qui habite en banlieue plutôt chic, un pavillon confortable à Villed’Avray avec Christian, son médecin de mari, qu’elle seconde à temps partiel, et Mélanie, leur adolescente de fille. Elle mène une existence tranquille, routinière, apaisée peut-être. Alors, ce dimanche-là, Luc et Christian absents, la narratrice a décidé de rendre visite à sa sœur. Ça n’arrive pas souvent, elles ont beaucoup perdu de la complicité de leur enfance. Les journées chez elle « commencent bien mais finissent avec le même sentiment de malaise, de légère étrangeté. » Et, surtout, ce qu’il y a d’énervant avec Claire Marie, c’est qu’elle lâche sans prévenir des remarques d’une innocence redoutable, de quoi vous ébranler. Comme le jour où elle a demandé à sa sœur si sa vie la satisfaisait. « Oui. Pourquoi ? Tout va bien » avait répondu cette dernière. Non, tout n’allait pas bien, ça avait mis son cerveau en pelote. Claire Marie a rencontré un inconnu, l’a revu, n’a plus voulu y penser, a voulu l’effacer de sa mémoire, il y avait là la possibilité d’une folie, et la terreur qu’elle engendre, et l’envie/le besoin qu’elle fait naître au creux du ventre. Dominique Barbéris déploie une palette pastel d’une exquise dysharmonie pour dire les élans et reculs d’une femme « ordinaire », qui ne demandait rien et attendait tant. C’est désarmant et violent

« L’éternel printemps », Marc Pautrel, Gallimard Au printemps, un homme rencontre une femme. Banal. Elle est bien plus âgée que lui, et jamais elle ne se donnera entièrement à lui, conservant obstinément sa part de mystère, ce qui, de fait rend l’amoureux encore davantage transi. C’est à Paris, dans les meilleurs quartiers, elle vend des livres anciens, elle a été mariée, a divorcé, n’a pas d’enfants, lui est séparé également. Leur lien, c’est d’arpenter et d’arpenter les rues de la capitale dans une lumineuse complicité, et de finir au restaurant, toujours. Ils parlent et parlent, c’est sans fin,intense et léger. Lui, il sait ce qu’il cherche : il veut l’amour d’une vie. Mais elle ? Impossible à savoir, jamais il ne le saura. « Après des mois de conversation à la française, après que je lui ai fait une cour incessante, elle pourrait se laisser aller et tout oublier, son âge, le mien, l’inquiétude de la mort et le souvenir de sa mère, les choses pourraient évoluer, tout pourrait changer. Mais elle sourit encore, elle sourit et elle ne fera rien, elle attendra, elle appréciera, elle me dégustera en pensée. »


« Bleuets », Maggie Nelson, Ed. du sous-sol Ce n’est ni un essai, ni un roman, ni un poème. Mais 240 fragments qui composent cette divagation et cette obsession pour le bleu, « je suis tombée amoureuse d’une couleur comme on tombe dans les rets d’un sortilège, et je me suis battue pour rester sous son influence et m’en libérer, alternativement », confesse l’auteur, l’Américaine Maggie Nelson. Elle convoque les grands auteurs (« Nous regardons volontiers le bleu, non parce qu’il se hâte vers nous, mais parce qu’il nous attire », écrivait Goethe), se libère d’un deuil, ose être crue (« la baise laisse les choses comme elles sont ») ou évanescente, c’est une surprise et un enchantement à chaque brindille de texte. Il ne faut pas opposer la raison ou la logique à ce flot libre, mélancolique et enchanteur, préférer les questions aux réponses, dont celle-ci : « Si une couleur ne peut pas nous guérir, peut-elle au moins donner de l’espoir ? »

« Civilizations », Laurent Binet, Grasset Freydis Eiriksdottir est la fille d'Erik le Rouge, explorateur norvégien qui, aux alentours de l'an Mil, a découvert le Groenland. Elle a notamment hérité de son père la couleur de ses cheveux – roux, évidemment - et elle a fort caractère. Si après son expédition au Vinland (l'actuelle Islande), elle avait continué son périple avec ses guerriers, avait mis résolument cap au sud, elle aurait sans doute atteint Cuba. Si… Quelques siècles plus tard, c’est un nom célèbre qui aborde Cuba : Christophe Colomb. Le 28 octobre, après avoir cru mourir de faim et de soif, après un premier arrêt à San Salvador, une île des Bahamas, il jette l’ancre dans la baie de Bariay à Cuba, qu'il nomme alors Juana, en l'honneur du prince Don Juan, le fils des Rois catholiques d’Espagne. Il fait alors le malin, persuadé d’être au Japon, et de s’emparer des richesses locales. Mais c’est là que ça coince, en tout cas dans « Civilizations », le nouveau roman de Laurent Binet. Dans cette formidable uchronie, Colomb ne repart pas de Cuba pour revenir au Portugal, puis en Espagne et devenir, avec Pinzon, le découvreur de l’Amérique. Non : chez Laurent Binet, Freydis Eiriksdottir a réellement débarqué au Cuba, et Colomb est réellement mort sur cette même île, oublié de tous, tout son équipage ayant été décimé par les locaux. Place alors à la troisième fantaisie historique : et si les Indiens avaient résisté aux conquistadors ? Et si la colonisation s’était faite dans l’autre sens, si Atahualpa avait pris le chemin de l’Europe ? Vous avez dit, Atahualpa ? Trente ans après le premier voyage de Colomb, deux frères se battent pour le trône Inca. Dans les faits historiques, Atahualpa prendra le meilleur sur Huascar, pour monter sur le trône et devenir le dernier empereur… indépendant (il sera en effet liquidé par les Espagnols, qui mettront sur le trône un empereur fantoche). Dans l’imagination de Laurent Binet, Atahualpa, obligé de fuir, se sauve en prenant place, avec ses hommes, femmes et animaux, sur l’une des caravelles de Christophe Colomb. Avec grand peine, tout ce petit monde parvient au Portugal. Là, le « Dieu » inca provoque non seulement la curiosité mais aussi admiration et crainte. Il se verrait bien imposer la religion du soleil, dont il serait le fils, la voix. Et comme, en outre, il découvre un Vieux Continent exténué par des guerres sans fin, déchiré par les querelles religieuses et dynastiques, bordé d’une mer infestée de pirates, il va enchaîner les victoires, aidé par un sens aigu de la guerre et sa science de la diplomatie. Sans oublier le soutien de peuples affamés et opprimés… qui se tournent vers lui tel le sauveur. Petit à petit, l’Inca fait son nid (Atahualpa signifie « l’oiseau de la fortune » en quechua), s'impose sur la scène européenne, grimpe sur le trône d'Espagne, avant de défaire Charles Quint et de régner aussi sur le Saint Empire Romain Germanique. Laurent Binet tire avec bonheur les fils de ce jeu de marionnettes, nous plonge au cœur d’une époque passionnante, le début de la Renaissance, l’Inquisition espagnole, la Réforme de Luther, le Capitalisme naissant, le prodige de l'imprimerie. * voir visuel dernière page


« Baïkonour », Odile d'Oultremont, Ed. de l'Observatoire Depuis l'enfance, la jolie coiffeuse Anka rêve de tenir la barre du Baïkonour, le bateau familial. Seulement, la mer lui prend son père et l'océan meurtrier anéantit sa passion. Marcus, lui, n'a pas écouté son paternel, authentique original qui érige la fainéantise en art de vivre. Marcus préfère s'élever en devenant grutier. Il voit ainsi le monde d'en haut avant de zoomer sur la silhouette endeuillée d'Anka. Comme dans "Les Déraisons", son premier roman. Les personnages sont attachants, extraordinaires dans leur simplicité, et débordent de ressources dans l'addition des petits bonheurs. On partage leurs chagrins et l'on savoure leurs espoirs jusqu'à prendre le large avec eux. Un livre qui rend heureux.

« Les Nouveaux héritiers », Kent Wascom, Ed. Gallmeister Un héros venu de nulle part, Isaac Patterson. Enfant adopté et libéré des enfers par une famille aimante, Isaac devient artiste peintre. Il s'éprend de la belle Kemper, jeune femme issue d'une riche lignée de Biloxi, Mississippi. Leur bonheur semble incassable et irradie le Golfe du Mexique, mais la menace de la Première guerre mondiale arrive d'Europe. Tout comme une maudite épidémie de grippe espagnole. Et puis, les familles se déchirent au fil des générations, entre ouragans meurtriers, trahisons et tourments de la jalousie. L'histoire est "classique" rehaussée d’une écriture stylée. Lumineuse. Épique. Brillant. La saga.


« Les grands cerfs », Claudie Hunzinger, Grasset Bambois. Un bout du monde au-dessus de Lapoutroie. Un corps de ferme, un abreuvoir, un étang, des ânes, du linge qui sèche sur l’herbe, une boîte aux lettres (oui, le facteur vient chaque jour jusqu’ici). Et la pente, partout. Les plasticiens Claudie et Francis Hunzinger apprivoisent ce lieu frontière entre la nature et les hommes depuis un demi-siècle. Les cerfs et le couple Pamina/Nils sont, écrit-elle, comme des frères, « pareillement efflanqués, osseux, têtus, téméraires face aux éléments – et prudents. » Une aventure que Pamina va vivre en grande partie grâce à Léo, « crâne rasé, la trentaine, vêtu sport aventure, jumelles au cou, et comme hanté. » Hanté par les cerfs, l’obsession d’une vie, semble-t-il. Claudie sait que les cerfs sont là, autour de sa maison. Elle habite ici depuis si longtemps ; eux depuis toujours. Léo va l’amener à s’avancer au plus près d’eux. Il faut de la chance pour les voir et, pour les revoir, ça devient une autre paire de manches, « une véritable ascèse, y donner tout son temps, y consumer son être. » L’affût = Les heures, les temps de chien, les années d’apprentissage et de patience pour les approcher, les comprendre, jamais les apprivoiser. Comprendre le fonctionnement du clan (et de ceux restés solitaires). Se nourrir des saisons de ces animaux fiers et orgueilleux, visibles et invisibles, des « figures de légende », la saison où ça tambourine dans le noir, comme pour intimider, celle des galops de fureur, ou de triomphe, on ne sait pas ; celle de la perte des bois, celle de la repousse, celle de la perte des velours, celle du brame évidemment. Pas conte de fées. Chasseurs, ONF, gestion de la forêt contre empereurs romantiques.

« Sale gosse », Mathieu Palain, éd. de L'Iconoclaste Wilfried n'a pas eu de chance dans son enfance. “Sa mère, vingt-et-un ans, vivait avec un débile qui lui tapait dessus ». À l’âge de huit mois, le petit est placé en famille d'accueil et en changera une kyrielle de fois, car bientôt classé comme « difficile ». Ado, une porte s’ouvre à lui, celle du centre de formation de l'AJ Auxerre... mais il s'en fait renvoyer, il est alors intenable. Sa famille d'accueil demande à l'adopter. Nouvelle tuile : la mère de Wilfried refuse, et le voici arraché à ceux qui l'aiment, qui lui veulent vraiment du bien. La colère reprend ses droits : Wilfried fugue, puis est placé en foyer. Mais que faire de ce jeune sans diplôme, sans projet, sans désir d’école… dont le seul souhait est de devenir footballeur professionnel ? Premier roman... et vraie réussite, une véritable claque. Une plongée au cœur d’un « monde oublié », le quotidien des éducateurs de la Protection Judiciaire de la Jeunesse (PJJ). Et de ces enfants, souvent terriblement attachants, qu’on aimerait voir s'intégrer à la vie « normale » alors que leurs existences sont un vertigineux manège.


« Jolis jolis monstres », Julien DufresneLamy, Ed. Belfond James, né en 1960 dans une ferme, aura grandi « au milieu du bordel. Les mains violentes et baladeuses du père. Une mère junkie. » À neuf ans, sa tante Mae l'emmène vivre avec elle à Atlanta. Une femme libre, sans idées préconçues... qui accepte que James s’habille et se maquille en fille. Mais Mae meurt et l’adolescent, errant dans les rues, fait la connaissance des « cinq L », cinq drag-queens. « Elles » le prennent sous son aile et c’est l’envolée vers un monde de libertés, de fraternité, de drogues, de fêtes - voguing-, mais aussi de violence et de peur. James = Lady Prudence… et déménage à New-York, la cité qui ne dort jamais. C’est la ville emblématique de la reconnaissance des homosexuels : en 1969, les policiers ont investi de manière brutale un bar gay, le Stonewall, et les hommes présents se sont révoltés : « Vous avez beau nous battre, nous humilier, nous terroriser, nous enfermer, nous ne nous tairons jamais. […] Certains répètent inlassablement qu'on est des monstres. Des fous à électrocuter. Alors que d'autres pensent qu'on est les plus belles choses du monde. » Las, les années sida feront de ces rêves un cimetière… Trente ans plus tard... Pour son quatrième roman, Julien Dufresne-Lamy déroule avec finesse et fantaisie un demi-siècle de ce mouvement d’émancipation. C’est enjoué et cruel, corrosif et léger, cocktail détonnant de beauté (magie du transformisme) et de laideur (de l’intolérance). « La Petite Conformiste », Ingrid Seyman, Ed. Philippe Rey Dans sa vie de petite fille qui devrait être « comme les autres », Esther est mal tombée. Née « de droite » chez des parents « de gauche ». On ne choisit pas sa famille… L’erreur de casting ne s’arrête pas là : croyances religieuses, héritage compliqué entre racines juives et pied-noir… Au mépris des convictions soixante-huitardes de ses géniteurs, Esther est finalement scolarisée dans une école privée catholique. Touchée par la grâce, élève brillante, la petite fille analyse ainsi sa folle famille d’un esprit critique non dénué d’humour noir. Sauf que papa est parfois bizarre avec ses tocs de maniaque et ses crises violentes. Premier roman à la fois très drôle et très dur dans ce qui finit par être un choc permanent de contraires qui s’attirent : enfants/adultes, riches/pauvres, blonds/bruns, fachos/démocrates… Tout notre petit monde défile devant les yeux d’Esther, la môme qui avait choisi de ne pas grandir.


« Le guérisseur des Lumières », Frédéric Gros, Albin Michel Franz-Anton Mesmer est un médecin badois au tournant des XVIIIème et XIXème siècle. Il fréquente Mozart, qui fera une référence à lui dans Cosi fan tutte, Haydn, Glück, Marie-Antoinette, etc... Il est le fondateur de la théorie du magnétisme animal qu'il exerce d'abord avec des aimants, puis juste avec ses mains. Il utilise alors les fluides de la nature (soleil, arbres) pour guérir des patients et tente de faire reconnaître cette nouveauté mais va se heurter au scepticisme et à la peur des docteurs et savants = mystification. Ce livre expose des lettres que Mesmer a écrit à un jeune confrère, Wolfart, en ce début de 1815. La correspondance s’arrête net car Mesmer meurt d'un arrêt cardiaque. Il y expose son histoire, ses revers, ses espoirs, ses progrès, ses découvertes.

Eden, de Monica Sabolo ; Gallimard Une contrée mystérieuse. Un lieu coincé entre une forêt menacée et une autoroute ; un lieu où se côtoient « ceux de la réserve » et les autres ; un lieu aussi où se multiplient d’étranges disparitions ou agressions. L’auteure confie s’être inspirée de la Colombie-Britannique, dans le sud-ouest du Canada. Dans ce décor, elle a placé une adolescente Nita, fascinée par la jolie Lucy, « une fille qui paraît vivre à l’intérieur d’elle-même » qu’on retrouve un matin recroquevillée, nue, ensanglantée mais vivante sous un arbre « comme un fruit tombé à ses pieds ». Il est question de la nature et de ses esprits ; de créatures enragées mi-hommes, mianimales ; de l’éveil à la sexualité… Question aussi de domination, celle des hommes sur les femmes, celle des blancs sur les “natives”, et de justice. A la fin, « il ne reste rien, rien que de la nuit sur la nuit ». Le récit est puissant, habité, porté par une écriture à la fois poétique et percutante.


« L’âge de la lumière » de Whitney Scharer, Ed. de l’observatoire Lumineux ce récit romancé sur la liaison passionnée et tumultueuse entre Lee Miller et Man Ray. En 1929, la mannequin vedette de Vogue quitte l'Amérique pour Paris et fait la connaissance de Man Ray, dont elle devient à la fois la muse, la maîtresse et l'assistante. Durant deux ans, Lee Miller va découvrir l’amour, la photographie et la difficulté pour une femme d’exister en dehors de son travail de modèle, même au cœur du cercle très libre des surréalistes. Les fissures de cette femme qui fit rêver tant d’hommes, qui termina sa vie dans le Sussex une bouteille (souvent) à la main, jamais vraiment remise de la découverte des camps de concentration durant sa période de correspondante de guerre.


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