Mémoire de master en architecture - L'arrivée du BIM Meghane FRIGELLI

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BIM

L’arrivée du dans les agences d’architecture en France de nouvelles méthodes de production et d’échange au service de la maîtrise d’œuvre.

Méghane FRIGELLI - MEMOIRE encadré par Nader BOUTROS Seminaire Atelier de recherche hypermédia - Soutenance : 2 Mars 2017


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Remerciements


La réalisation de ce mémoire a été possible grâce aux témoignages de six professionnels, qui ont pris le temps de me donner leur point de vue sur le sujet du BIM. C’est vers ces spécialistes du bâtiment : Monsieur Olivier Celnik, Monsieur Emmanuel Di Giacomo, Monsieur Jacques Dubois, Madame Chloé Edler, Monsieur Bertrand Pagnoncelli, Monsieur Fabrice Theis que s’orientent mes premiers remerciements.

Je remercie Monsieur Olivier Bouet et Monsieur Tayeb Sehad, enseignants du séminaire « Atelier de Recherche Hypermédia » que j’ai suivi pendant mon master, pour m’avoir soutenue dans mon travail préparatoire et aussi pour m’avoir conseillée dans l’écriture du mémoire. Je tiens également à remercier Monsieur Kévin Atzori pour m’avoir confié son matériel vidéo afin que je puisse mener à bien mes interviews.

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REMERCIEMENTS

Je remercie également mon enseignant tuteur Monsieur Nader Boutros, enseignant chercheur EVCAU (Espace Virtuel de Conception Architecturale et Urbaine) à l’Ecole Nationale Supérieure d’Architecture Paris Val de Seine, pour m’avoir orientée dans mes recherches et m’avoir guidée dans ma rédaction.


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Avant-propos


J’ai choisi de travailler sur le thème du BIM pour mon mémoire car c’est un sujet qui m’a interpelée en début de master. En effet, j’ai décidé de suivre plusieurs cours en lien avec l’informatique car selon moi, c’est un sujet primordial, trop peu abordé en école d’architecture. C’est en participant à ces conférences que j’ai entendu parler pour la première fois du BIM. Les différents intervenants1 ont su insister sur l’importance et les enjeux de ce processus. Ne connaissant rien à l’époque à ce sujet, j’ai réalisé quelques recherches et me suis rendue au BIM World 2016 à la Défense pour en savoir plus. C’est en parlant avec les professionnels du bâtiment, que j’ai compris qu’il fallait absolument que je me tienne informée de ce qui se passe dans la profession par rapport au BIM. En effet, étant à l’école, nous sommes totalement coupés de cette réalité. En choisissant ce sujet, j’ai donc décidé de me tenir informée tout au long de mon master et ainsi de pouvoir comprendre les enjeux de ce processus et appréhender plus facilement mon arrivée dans le monde du travail.

1 Cours

« Outils numérique » proposé par Nader BOUTROS à l’Ecole Nationale Supérieure d’Architecture Paris Val de Seine avec plusieurs intervenants comme Thierry SAMPOL pour Allplan, Olivier BOUET pour la photogrammétrie, Julien LEROY pour ArchiCAD ou encore Emmanuel Di Giacomo pour Revit.

AVANT-PROPOS

Mon souhait n’était pas simplement d’écrire un mémoire sur ce qu’est le BIM, mais réellement de m’imprégner du ressenti des professionnels. C’est pourquoi, en plus de nombreuses lectures, j’ai décidé d’étoffer mon travail en interviewant des architectes. C’est notamment grâce à ces différents points de vue que j’ai pu élargir ma façon de penser sur le sujet. De plus, j’ai fait le choix de filmer ces interviews afin de proposer un travail de montage vidéo.

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Sommaire


Introduction ........................................................................................................

8

Partie 1 : Qu’est-ce que le BIM ? ................................................................... 14 1.1.

Une méthode de travail à apprivoiser ................................................ 15

1.2.

Une organisation à mettre en place par un BIM manager ................. 22

1.3.

Une méthode de travail qui s’étend bien au-delà de l’agence ........... 29

Partie 2 : Le développement du BIM dans les agences d’architecture en France ............................................................. 36 2.1.

Les différentes étapes de mise en place du BIM dans une agence ................................................................................................ 38

2.2.

Les erreurs qu’il faut éviter ................................................................ 44

2.3.

Des agences françaises en retrait ....................................................... 48

Partie 3 : Un processus qui pose encore des questions chez les architectes ........................................................................................... 54

3.1.

La dynamique du BIM chez les anglo-saxons ..................................... 55

3.2.

Un processus qui pourrait nuire au métier d’architecte .................... 61

3.3.

Une pression importante pour les petites agences (TPE/PME) ......... 67

Conclusion .......................................................................................................... 72 Annexe ................................................................................................................. 76 Glossaire .............................................................................................................. 130 Bibliographie ...................................................................................................... 134 Table des illustrations ...................................................................................... 138 Table des matières ............................................................................................ 142

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SOMMAIRE


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Introduction


[Fig. 0.1] - Ecole des Beaux-Arts

« L’architecte se doit d’être à la pointe sur l’utilisation de tout nouveau processus révolutionnaire. Il ne peut pas être à la traine. C’est un devoir »2.

Historiquement, l’architecte a suivi initialement une formation à l’Ecole des Beaux-Arts [Fig. 0.1] à la suite de la scission entre architecture et génie civil au XIXe siècle. Il y a appris l’architecture, la gravure, la sculpture ainsi que la peinture. C’est en 1968 que les étudiants ont réclamé leur indépendance et qu’ils ont obtenu la création d’une douzaine d’Unités Pédagogiques d’Architecture (UPA) dans lesquelles leur a été enseigné le dessin à la main, premièrement au tire-ligne puis au rotring. Le travail était très minutieux et demandait beaucoup de précision, de propreté ainsi qu’un temps de travail important. Dès les années 1980, l’architecte a pu adapter et améliorer son processus de conception grâce aux avancées technologiques. En effet, l’apparition de l’ordinateur et des premiers logiciels de dessin technique vectoriel leur a permis de pouvoir gagner en efficacité, en précision et en temps.

2 Interview d’Emmanuel Di Giacomo, Juillet 2016. En annexe p.82.

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INTRODUCTION

Depuis toujours, l’architecte est à l’affût de nouveaux processus de conception plus rapides et mieux adaptés à la demande afin de concevoir des bâtiments. En effet, ce métier nécessite une grande créativité, mais aussi de la précision et de la rigueur ; c’est pourquoi il est important d’être le plus efficace possible. Cette recherche de nouveauté dans la manière de produire est sans cesse poussée par les avancées techniques et plus particulièrement de nos jours par l’informatique.


[Fig. 0.2] - PTNB

INTRODUCTION

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[Fig. 0.3] - Bertrand Delcambre

Ces logiciels de CAO3 (Conception Assistée par Ordinateur) et de DAO3 (Dessin Assisté par Ordinateur) comme AutoCad par exemple, avaient en commun de produire des dessins techniques sous forme de traits. Ce processus de conception permettait de reprendre la même organisation que le dessin à la main. En effet, il était toujours nécessaire d’utiliser des outils (à la main : trait au crayon, gomme, règle ; à l’ordinateur : ligne, effacer, repère orthonormé…) afin de dessiner la forme souhaitée. Les outils ont changé mais la manière de penser la conception est restée la même. C’est pourquoi, le changement s’est opéré assez naturellement et sans remise en cause profonde. Ces processus ont permis aux architectes d’être plus compétitifs. De nombreuses agences utilisent encore ces outils. Aujourd’hui, le secteur du bâtiment connaît une crise importante. Depuis 2008, le nombre de constructions n’a cessé de diminuer avec en 2013, une diminution de 13% par rapport à 20074. De plus, les architectes ont vu s’ajouter de nombreuses contraintes législatives et réglementaires (Réglementation Thermique 2012, réglementation incendie etc.). Pour remédier à ces différents problèmes, l’Etat Français propose au secteur de la construction un plan de relance visant à mettre en place une nouvelle méthode de travail et de nouveaux outils : le BIM. Ce dernier s’inscrit plus particulièrement dans le PTNB3 (Plan Transition de Relance Numérique dans le Bâtiment)[Fig. 0.2] qui vise à accélérer le déploiement du numérique dans le secteur du bâtiment afin de pouvoir maîtriser de nouveaux facteurs tels que la qualité, l’environnement ou encore les coûts avec l’idée de la ville « intelligente et connectée ». Mr Bertrand Delcambre4 [Fig. 0.3] en fut le président à sa création et il mis en place des objectifs dès Janvier 2015. Les idées principales qui structurent ce plan sont

3 Voir glossaire p.130. 4 Bertrand DELCAMBRE, Décembre 2014. La Mission Numérique du Bâtiment.

Paris, 54p.


[Fig. 0.4] - Recherches de Charles M. Eastman

orientées selon quatre axes : Il s’agit tout d’abord de convaincre et donner envie à tous les acteurs du bâtiment ; de répondre aux besoins d’équipements et de formations des entreprises. Il propose également des outils adaptés à la taille des projets. Enfin, il s’agit d’installer une confiance dans l’écosystème du numérique français avec l’interopérabilité entre logiciels.

BIM6 est l’acronyme anglais de « Building Information Modeling » qui correspond à des méthodes de travail misent en place afin de concevoir grâce au numérique et de manière collaborative. Deux autres significations viennent compléter cette première définition :

5 Charles M. Eastman, mars 1975. The use of computers instead of drawings in

building design, AIA Journal. 6 Voir glossaire p.130.

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INTRODUCTION

C’est en 1975 que Charles M. Eastman5, professeur d’architecture et de science informatique aux Etats-Unis (Géorgie) évoque pour la première fois une complémentarité entre le dessin et la maquette, le tout en lien avec l’informatique. Il propose ainsi une première définition de ce qui deviendra ArchiCad en 1984. De plus, il sera également le premier à évoquer l’expression « Building Information Model » et rajoutera que le BIM est une technologie en lien avec une méthode de travail qui permet de produire, de communiquer et d’analyser des modèles de construction5 [Fig. 0.4]. Le BIM est déjà bien ancré dans les techniques de conception anglo-saxonnes. Ce processus est arrivé en France il y a une vingtaine d’années mais c’est seulement depuis peu qu’une certaine effervescence pour cette méthode de travail commence à se faire sentir. Il a été traduit en français par « Bâtiment et Informations Modélisées ». Cependant, la définition anglaise est plus explicite et complète.


Modeling

Méthodes de travail

Model

Maquette numérique

Management [Fig. 0.5] - Définition BIM

Interopérabilité

BIM signifie également « Building Information Model » qui correspond à la maquette numérique d’un bâtiment dans laquelle chaque acteur renseigne et tire des informations sur les objets. Médiaconstruct, chapitre français de buildingSmart International (bSI), parle même « d’objet virtuel renseigné »7. Et « Building Information Management » met en avant la gestion des échanges et des données du bâtiment modélisé. Le BIM n’est pas seulement une 3D, c’est

INTRODUCTION

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avant tout une méthode de travail. En effet, il ne s’agit plus de travailler sous forme de trait ou de ligne mais de manipuler des composants (murs, portes, fenêtres …) qui vont avoir une représentation en plan mais également en élévation, en coupe, en 3D… On parle d’objets intelligents qui vont chacun posséder des données propres [Fig. 0.5]. Tous les éléments présents dans la bibliographie expliquent parfaitement ce qu’est le BIM, ce que ce processus va permettre pour le secteur de la construction. Cependant, en aucun cas il est expliqué comment les agences françaises doivent procéder afin de modifier leurs méthodes de travail. C’est pourquoi, il est intéressant de se demander : Comment les agences d’architecture françaises s’organisent-elles afin de mettre en place le BIM ? Pour répondre à cette question, nous verrons dans une première partie ce qu’est le BIM en examinant la méthode de travail que ce dernier propose, le rôle du BIM manager dans l’équipe et également le lien qui peut se créer entre l’architecte et les différents intervenants du secteur de la construction. Dans une deuxième partie, nous nous intéresserons à la mise en place du BIM dans les agences d’architecture en France. Cette partie est écrite grâce aux différentes interviews de professionnels réalisées dans le cadre du mémoire. Elle se composera des différentes étapes de l’installation du BIM dans une

7 « Guide méthodologique pour des conventions de projets en BIM », avril

2016. Médiaconstruct, 50p.


agence d’architecture, des erreurs à éviter ainsi qu’une explication au scepticisme des architectes français. Pour finir, dans une troisième partie, nous verrons en quoi la méthode de travail en BIM pose encore des interrogations.

INTRODUCTION

13


Partie 1 : Qu’est-ce que le BIM ?

QU’EST CE QUE LE BIM

14

Les outils numériques sont aujourd’hui très présents dans le secteur de la construction. Le BIM a fait son apparition en 1987 avec l’architecte Phil Bernstein8, conseillé chez Autodesk. Il a été le premier à utiliser le terme BIM avec la définition de « Building Information Modeling ». C’est à cet instant que le processus a été reconnu et est apparu dans les revues en lien avec le BTP, sur les forums ou encore dans les agences. Mais c’est aujourd’hui que cette notion est citée de manière massive en France à la suite de la mise en œuvre du PTNB. Nous avons énoncé ses nombreuses significations dans l’introduction avec les notions de « model », « modeling » et « management » qui représentent des notions très vastes. De plus, nous entendons de plus en plus parler du BIM en architecture. En effet, certains architectes ont été les premiers intervenants du BTP à utiliser et à croire au BIM. Ce nouveau processus leur permet entre autres de voir évoluer leur projet simultanément en plan, en coupe, en élévation ainsi qu’en 3D afin de maîtriser au mieux la forme de la conception, complété par les informations nécessaire à la collaboration interne avec les autres intervenants de la maîtrise d’oeuvre. Cette première partie va permettre de faire le lien entre la définition du BIM et le métier d’architecte.

8 Building Information Modeling [en ligne]

Disponible sur : https://fr.wikipedia.org/wiki/Building_Information_Modeling [Consulté le 11 novembre 2016].


[Fig. 1.1] - Exemple de maquette numérique Autodesk -

1.1.

Une méthode de travail à apprivoiser

La méthode de travail est essentielle dans tout métier. De plus, celle-ci évolue au fil des années dans l’objectif d’être toujours plus efficace. Le BIM propose une méthode de travail bien spécifique et innovante mêlant maquette numérique9 et travail collaboratif9 basés sur l’interopérabilité9.

1.1.1. La maquette numérique

Cette maquette numérique [Fig. 1.1] est généralement réalisée grâce à un logiciel spécifique qui permet de s’insérer dans un processus BIM. La maquette numérique ne doit pas être confondue avec le processus BIM9 en lui-même. Même si celle-ci fait partie du processus, elle n’est pas la seule composante. En effet, nous pouvons retrouver la notion de maquette numérique dans la définition du BIM : « Building Information Model ». Cette dernière est avant tout une base de données structurée dans laquelle des composants, sous la forme d’objets, sont renseignés. Ceux-ci représentent tous des éléments de la construction tels que des murs, des dalles, des escaliers, des poteaux, des poutres ou encore des menuiseries etc. Chaque objet peut ainsi être modifié et/ou renseigné en fonction du projet souhaité grâce à ses propriétés. Une représentation de l’objet choisi peut se faire en plan, en élévation, en coupe, en 3D ou encore sous forme de tableaux, nomenclature d’objets… Ces objets sont localisés dans une arborescence spatiale organisée du site, au bâtiment, jusqu’aux niveaux pour finir par les locaux, ce qui permet une structuration précise et proche des habitudes de production de l’architecte.

9 Voir glossaire p.130.

15

QU’EST CE QUE LE BIM


Esquisse

APS

APD-PRO/DCE

EXE

DOE

[Fig. 1.2] - Illustration des niveaux de développements (LOD)

Ces objets peuvent être plus ou moins détaillés en fonction de la phase du projet. Nous pouvons parler d’objets intelligents. Les informations qui leur seront liées ainsi que le niveau de représentation graphique varient en fonction du LOD (Level Of Definition)10 souhaité. Ce dernier contient aussi bien des détails géométriques que des informations sur l’objet. On parle de « granulométrie de

QU’EST CE QUE LE BIM

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l’information ». Comme nous pouvons le voir sur la figure ci-dessus, il existe cinq niveaux de LOD. Chaque niveau est à choisir en fonction de l’échelle graphique à laquelle correspond le tracé [Fig. 1.2]. Le premier LOD, le LOD 100, est à utiliser pour les esquisses dans lesquelles un simple trait ou une forme simplifiée permet de représenter l’objet souhaité. Nous pouvons remarquer que plus nous avançons dans les phases du projet, et plus le niveau de détail se complexifie. Le LOD 200 représente l’objet graphiquement de manière générique et approximative. Quant au LOD 300, l’objet ou l’assemblage est représenté d’une manière plus détaillée. Il en est de même pour le LOD 350 qui permet en plus l’interaction avec les autres éléments. Le LOD 400 possède plus de détails sur l’assemblage et la représentation. Pour arriver à la phase d’exécution au LOD 500 avec une représentation de la réalité du chantier. La maquette numérique permet de générer tous les documents graphiques d’un projet. Celle-ci évite la ressaisie de données puisque le dessin d’un plan avec toutes ses caractéristiques techniques permet d’obtenir une représentation en temps réel de ce projet en plan, coupe, en élévation, en 3 Dimensions (3D) ou encore en détails sur une partie de la maquette. Des modifications peuvent se faire à chaque phase du projet sur les plans ou les coupes sans pour autant influer sur la cohérence de la maquette. De plus, la 3D permet une vision

10 Voir glossaire p.130.


Capacité à agir sur la maîtrise des coûts

Processus BIM

Coût associé aux changement

Processus traditionnelle

[Fig. 1.3] - Capacité à agir sur les coûts et les changements en fonction du processus choisi

[Fig. 1.4] - Dimensions du BIM

très réaliste du futur bâtiment et permet de mettre en avant plus facilement des conflits. La revue Manifeste évoque même la notion de « construire avant de construire »11. Jusqu’à présent, les architectes rencontraient ce genre de problème sur le chantier. Chaque modification entrainait alors des coûts et des retards importants pendant la réalisation. Avec le BIM, la maquette numérique permet de solutionner de nombreux problèmes pendant la phase de conception ce qui réduit les pertes d’argent et ainsi augmente les bénéfices [Fig. 1.3].

Pour finir, la maquette numérique peut aussi servir d’outil de communication aussi bien avec un client, qu’entre les acteurs du projet. Elle permet une meilleure compréhension et invite à la discussion. En effet, le BIM complète l’idée de maquette numérique avec la notion de travail collaboratif.

11 « Conduire la transformation digitale », Avril 2016. Manifeste, 33p. 12 Voir glossaire p.130.

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QU’EST CE QUE LE BIM

La maquette numérique vient donc s’intégrer dans le processus BIM en proposant de travailler en 3D. A cela vient s’ajouter la notion de « temps » : la 4D dans laquelle l’avancement des phases du projet est tenu par un planning. Mais également, nous pouvons parler de la notion de coûts : la 5D liée à l’estimation financière de la construction. La notion de « durabilité » avec les données utiles sur le cycle de vie du bâtiment : la 6D se traduit par la gestion énergétique et environnementale permise par l’Analyse du Cycle de Vie (ACV)12. Et pour finir, la notion d’exploitation : la 7D qui permet de prendre en compte les futurs coûts d’entretien du bâtiment après sa réalisation en lien direct avec la notion de gestion du patrimoine [Fig. 1.4]. Le BIM permet donc la gestion de nombreuses informations, structurées et organisées dans une maquette 3D.


Processus traditionnel :

Processus BIM :

Architecte Ingénieur calcul

Architecte Ingénieur calcul

Ingénieur Bâtiment

Ingénieur CVC

Client

Ingénieur électrique

Gestion de patrimoine Gestion de projet

Ingénieur Bâtiment

Ingénieur CVC

Client

Ingénieur électrique

Gestion de patrimoine Gestion de projet

[Fig. 1.5] - Echanges entre les intervenants du BTP

1.1.2. Le travail collaboratif au sein d’une agence

Dans les agences utilisant des logiciels de CAO (Conception Assistée par Ordinateur) et DAO (Dessin Assisté par Ordinateur), la collaboration entre les acteurs du projet est très restreinte. En effet, ces logiciels ne permettent pas

QU’EST CE QUE LE BIM

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de travailler à plusieurs sur une base de projet intégrée. Le processus BIM propose quant à lui un travail collaboratif. Ainsi, depuis une maquette numérique mise en réseau, il est possible que n’importe quel acteur du projet puisse y apporter des modifications. Ces changements peuvent se faire alors qu’un autre collègue travaille sur ce même fichier et les modifications vont apparaître en « temps réel » sur son ordinateur. Cette avancée technologique permet un grain de temps considérable puisque cela permet à de nombreux acteurs de faire évoluer un seul et même projet voire même un seul et même plan ou coupe etc [Fig. 1.5]. Le travail collaboratif offre plusieurs échelons qu’il faut gravir un à un. En effet, lorsqu’une agence se lance dans un processus BIM, il ne faut pas qu’elle se précipite. Une méthodologie spécifique est nécessaire. Cependant, chaque agence va pouvoir évaluer son niveau dans le processus grâce à sa maturité dans le BIM. Ces niveaux de maturité13 ont été théorisées au Royaume-Uni, pays dans lequel, le BIM est installé depuis plusieurs années14. Le niveau 3 est l’objectif à atteindre [Fig. 1.6]. Le niveau 0 du BIM correspond à l’utilisation d’un logiciel CAO en 2D dans lequel les informations ne sont ni gérées, ni structurées. C’est le niveau dans

13 Voir glossaire p.130. 14 Les niveaux du BIM [en ligne]

Disponible sur : http://abcdblog.typepad.com/abcd/2015/10/les-niveaux-dubim-ou-bim-levels-expliquespar-nbs.html [Consulté le 11 novembre 2016].


[Fig. 1.6] - Niveau de maturité BIM

lequel se trouvent de nombreuses agences aujourd’hui. La collaboration au sein d’une même agence est très limitée puisque ces logiciels reprennent le principe d’une planche à dessin numérique sur laquelle tous les documents sont indépendants et la modification de l’un, entraine systématiquement la modification du reste. Le niveau 0 ne correspond pas réellement à un process BIM.

Le niveau 2 du BIM ou BIM collaboratif introduit la notion d’échange et de partage des modèles au sein d’une agence mais surtout avec des intervenants extérieurs. Chacun d’entre eux produit une maquette numérique avec des informations structurées en fonction de leur métier (architecte, ingénieur, acousticien…). Puis, il est nécessaire de créer un modèle qui regroupe toutes les informations de chaque spécialiste du bâtiment. Cependant, chacun d’entre eux travaille généralement sur des logiciels différents. C’est à cet instant qu’intervient un format de fichier standardisé, l’IFC. Ce dernier va permettre de récupérer les données créées par chaque logiciel mais aussi de créer un modèle composé des maquettes numériques des différents intervenants qui va rendre possible la détection d’éventuels conflits entre les installations des différents

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QU’EST CE QUE LE BIM

Le niveau 1 du BIM ou BIM isolé (lonely BIM), fait référence à une phase d’apprentissage des outils, aussi bien 2D que 3D. La notion de données structurées est primordiale à cette étape. Celles-ci doivent répondre à des normes prédéfinies. La structure est essentielle dans le processus afin de pouvoir échanger des données. C’est la base du BIM. A ce niveau, il n’y a pas encore réellement de collaboration. Chacun met son travail à jour et en réseau. La maquette numérique est intègre et cohérente.


Projet

Gestion de projet

Service Cloud

Ingénieurs

Architecte - Accès pour la totalité de l’équipe - Accès à distance - Vues et recherches sur le projet - Tout type de fichier

[Fig. 1.7] - Cloud 360 proposé par Autodesk

corps de métier. Cette étape impose bien évidemment un environnement de données commun, une rigueur dans la structuration des données ainsi que dans le partage des tâches de tous les intervenants. L’utilisation d’un même logiciel facilite les grandes opérations.

QU’EST CE QUE LE BIM

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Le dernier niveau du BIM, le BIM niveau 3 ou IBIM, BIM intégré propose un modèle unique stocké sur un serveur centralisé, accessible par tous et durant toute la vie de l’ouvrage. C’est le niveau le plus évolué du BIM et c’est l’objectif à atteindre car ce dernier évite la ressaisie de données par chaque intervenant. Cependant, aujourd’hui en France il n’est pas possible d’atteindre ce niveau. En effet, ce dernier pose encore de nombreuses questions de propriété intellectuelle, de responsabilité ainsi que de réglementation sur l’accès à la maquette, et les changements de la maquette numérique. Il est nécessaire dans ce cas précis d’avoir un contrat spécifique qui organise ces nouvelles collaborations entre les différents corps de métier du BTP. De plus, des solutions efficaces doivent être proposées afin de pouvoir échanger facilement et rapidement des maquettes numériques entre professionnels. Différents prototypes sont actuellement réalisés afin de proposer un « nuage » (cloud) assez volumineux et capable de remplir cette mission15 [Fig. 1.7].

1.1.3. L’interopérabilité

L’interopérabilité est une notion clé dans le processus BIM. Même si la plupart des agences utilisent encore le format DXF/DWG en lien avec le logiciel

15 Autodesk propose Cloud 360 dans lequel il est possible de collaborer avec

son équipe en mettant à jour sa maquette numérique mais aussi effectuer des tâches de calculs ou de rendus.


Formats

Versions

Année

IFC 1.0 IFC 1.5 IFC 1.5.1 IFC 2.0 IFC 2x IFC 2x - Add 1 IFC 2x2 IFC 2x2 - Add 1 IFC 2x3 IFC 2x3-TC1 IFC 4 IFC 4 - Add 1 IFC 4 - Add 2 IFC 5

Janvier 1997 .ifc : C’est le format d’échange le plus utilisé, utilisant la structure Décembre 1997 STEP conformément à la norme Juillet 1998 ISO10303-21 Avril 1999 Octobre 2000 .ifcXML : utilise la structure XML, Octobre 2001 peut être généré par l’application ou à partir d’un fichier .ifc. Mai 2003 Ce format est en moyenne 300 à Juillet 2004 400% plus gros que le fichier .ifc Février 2006 Juillet 2007 .ifcZIP : utilise l’algorithme de Mars 2013 compression Ce format compresse de 60 à Juillet 2015 80% un fichier .ifc Juillet 2016 A venir [Fig. 1.8] - Evolution de l’IFC et ses différents formats

AutoCAD, le développement de l’utilisation des logiciels BIM est en constante évolution. En effet, la capacité d’échanger entre tous les acteurs, un fichier issu d’un logiciel spécifique était très restreinte jusqu’à présent. Le BIM solutionne ce problème par l’export d’un fichier standard neutre et ouvert, lisible par tous : l’IFC (Industry Foundation Classes)16. Le format IFC a été créé par bSI (buil-

16 Voir glossaire p.130.

21

QU’EST CE QUE LE BIM

dingSMART International) regroupant des éditeurs de logiciels ainsi que des entreprises du secteur de la construction. Médiaconstruct en est le chapitre français. Les IFC progressent très vite. En janvier 1997 est lancé l’IFC 1.0. Puis a suivi l’IFC 1.5 et 1.5.1. Il a fallu attendre avril 1999 pour voir apparaître l’IFC 2.0 qui a évolué vers l’IFC 2X, 2X2 et 2X3. L’IFC 3 n’a jamais existé. Nous en sommes aujourd’hui à la version IFC4 depuis mars 2013 [Fig. 1.8]. Ce format a pour but d’assurer l’interopérabilité entre les logiciels BIM et ainsi permettre la transversalité entre les différents corps de métier. Ce format permet de regrouper la description de chaque objet présent dans un modèle (murs, fenêtre, poteaux…) ainsi que leurs caractéristiques et leurs relations. Au sein d’une équipe lors d’un projet de construction, si tous les intervenants travaillent sur le même logiciel, ils échangeront donc leurs fichiers en format natif. Au contraire, si les intervenants travaillent sur des logiciels différents, ils échangeront leurs fichiers dans des formats standardisés qui permettent l’interopérabilité entre logiciels métiers du BIM. La notion d’interopérabilité des logiciels est aussi désignée par openBIM® 16 et provient d’une initiative de bSI.


1.2.

QU’EST CE QUE LE BIM

22

Une organisation à mettre en place par un BIM manager

Les objectifs du BIM sont clairement énoncés dans toutes les revues d’archi-

tecture ou encore par les vendeurs de logiciels. Cependant, nous entendons parler d’un nouveau métier en lien avec cette nouvelle méthode de travail, indispensable pour gérer la maquette numérique : le BIM manager17. Ce terme est souvent énoncé mais très peu développé.

1.2.1. Les missions et responsabilités du BIM manager

Le BIM manager d’une agence d’architecture est le chef d’orchestre du BIM. C’est à lui de proposer une stratégie et de mettre en place une méthode de travail pour développer au mieux la méthode de travail dans l’entreprise. Le BIM manager reste tout de même un employé de la société et doit prendre toutes les décisions avec le chef d’agence (à moins que le BIM manager soit également le chef d’agence). Il doit tout d’abord structurer une équipe dont il sera un membre actif à part entière. Dans les grandes structures, il est nécessaire de rajouter un maillon dans la chaine de production. Le BIM manager doit être secondé par des coordinateurs BIM qui vont être des référents BIM au sein de leur équipe. Il va permettre de créer un lien entre les producteurs BIM et le BIM manager [Fig. 1.9]. Il est important que le BIM manager s’assure du fait que tous ses co-équipiers ont bien été formés et sensibilisés sur ce que représente ce nouveau processus de conception. Il doit également prévoir et s’assurer

17 Voir glossaire p.130.


MOA

Coordinateur BIM

Coordinateur BIM

Coordinateur BIM

Producteur BIM

Producteur BIM

Producteur BIM

MOE

Entreprises

Autre contributeur

[Fig. 1.9] - Exemple d’une équipe BIM

23

QU’EST CE QUE LE BIM

Production BIM

Coordination BIM

Convention BIM BIM Management


[Fig. 1.10] - Schéma du processus de management d’après Serge K. Levan

de la bonne collaboration autour de la maquette numérique au sein de son équipe. C’est à lui de leur donner les droits d’accès tout en résolvant les éventuels conflits présents dans la maquette. Par la suite, avant tout projet, le BIM manager doit organiser et optimiser

QU’EST CE QUE LE BIM

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le logiciel participant au processus BIM afin de mettre en place une base de travail ordonnée. Il est question de gabarits de projet, d’arborescence (DCE, avant projet, PRO…), de chartes graphiques ou encore de bibliothèque d’objets pour la maquette numérique qui s’enrichira au cours des projets. Cette étape est primordiale et indispensable. Elle va permettre à l’ensemble des membres d’une même équipe de pouvoir travailler de façon similaire et homogène, avec les mêmes modes de représentation qui seront propres à l’entreprise. C’est également à lui de contrôler les ressources financières du projet, le planning, la gestion des droits sur le modèle … Il a la main sur la maquette numérique [Fig. 1.10]. Tout au long du projet, le BIM manager doit s’assurer de la cohérence de la maquette en terme de dessin et de représentation (plans, coupes, élévations…) afin de faciliter les phases de rendu du projet. C’est également à lui, à la fin du projet, de vérifier la bonne transmission du fichier à la maîtrise d’ouvrage.

1.2.2. Les compétences du BIM manager

Le BIM manager doit être polyvalent. Il doit posséder des compétences théoriques et techniques en lien avec le monde de la construction comme l’a


« Le BIM manager doit maîtriser les domaines suivants : le monde de la construction et du processus d’exécution du projet » Anis NAROURA, Mars 2014

souligné Anis Naroura, architecte Français, dans un dossier consacré au BIM dans le Moniteur : « Le BIM manager doit maîtriser les domaines suivants : le monde de la construction et du processus d’exécution du projet »18. Il est également important pour un BIM manager de prendre en compte l’aspect collaboratif du processus qui va introduire, en plus du savoir-faire, un « savoir-être

»19. Généralement, ces différents atouts s’apprennent et se développent avec l’expérience au fil des années.

Pour ce qui est des compétentes techniques, il doit maîtriser les outils BIM (représentation, gestion des coûts, du temps …) au sein de l’agence afin d’être le plus compétitif possible tout en étant capable de répondre aux problèmes que peut rencontrer son équipe. Il existe plusieurs logiciels participant au processus BIM permettant la mise en place de cette méthode de travail. C’est au BIM manager de conseiller au mieux sur le choix du logiciel mais également sur les plugins20 (modules d’extensions) à utiliser. Il doit également maîtriser les 18 NAROURA, Anis, 21 Mars 2014. Le point sur … BIM (Building Information

Modeling), Le Moniteur, N°5756, cahier détachable. 19 BROSSETTE, Matthieu, 2014. BIM management, mémoire d’étudiant sous la direction de J-A CUBA-SEGURA, Lyon, ENSA Lyon. 20 Voir glossaire p.130.

25

QU’EST CE QUE LE BIM

Au niveau théorique, grâce à ses connaissances, le BIM manager doit permettre de réduire les coûts en résolvant les erreurs avant le chantier. Des connaissances en économie ainsi qu’en organisation de chantier vont lui permettre d’exploiter au mieux les outils proposés par le logiciel participant au processus BIM. Bien évidemment, le BIM manager doit posséder une certaine maturité sur les cas d’usages du BIM, ainsi que les dernières nouveautés et avancées. Il doit être capable de mener un projet BIM de manière organisée et d’accompagner son équipe. Ils ont pour objectif final de livrer la maquette numérique au maître d’ouvrage dans les temps.


M.A.N.A.G.E.R ? Une liste (non-exhaustive) ENCOURAGER, RECONNAITRE, RECOMPENSER ORGANISER, PLANIFIER, DELEGUER, INSPIRER ECOUTER, ARGUMENTER FORMER, AIDER, CONSEILLER PILOTER, RESOUDRE, DECIDER MESURER, APPRECIER, COMPARER INFORMER, ECHANGER, PARTAGER, FEDERER

[Fig. 1.11] - Liste des missions qui relèvent de la fonction de manager d’après Serge K. Levan

notions d’interopérabilité afin de pouvoir transmettre son travail aux bureaux d’études et à la maîtrise d’ouvrage. Le relationnel est un point primordial dans le process. En effet, le travail collaboratif est au cœur de cette méthodologie. Le BIM manager doit savoir

QU’EST CE QUE LE BIM

26

communiquer et faire preuve de pédagogie envers son équipe. Il a un rôle d’accompagnateur. En effet, il doit rassurer et guider son équipe qui vient de changer de méthode de travail. De plus, le BIM manager doit savoir contrôler et donner des informations claires à son équipe afin de mener à bien ses objectifs. Les contrôles réalisés sur la maquette numérique sont très importants et permettent d’éviter des pertes de temps en lien avec une éventuelle mauvaise méthode de travail [Fig. 1.11].

1.2.3. Le BIM manager et l’architecte

Depuis quelques années en France, le BIM connaît un réel essor chez les architectes. Les agences commencent progressivement à former leurs collaborateurs sur le BIM, à investir de l’argent dans le matériel et également dans un BIM management. Plusieurs solutions s’offrent aux agences en quête d’un BIM manager [Fig. 1.12]. La première solution consiste au fait que le chef d’agence devienne également le BIM manager. Cela implique des formations de plusieurs semaines. Au final, le chef d’agence a vraiment la main mise sur le projet et la maquette numérique. Nous pouvons donner l’exemple de l’agence Z.Studio dirigée par


[Fig. 1.12] - Qui est le BIM manager ?

Olivier CELNIK et Pierre VINCENT21. En effet, ils sont chefs d’agence mais également BIM manager. Leur particularité est qu’ils n’ont jamais travaillé sur des logiciels DAO. Depuis la création de l’agence en 1996, ils ont compris l’importance de la maquette numérique et se sont ainsi formés sur le logiciel ArchiCad. Ils ont été visionnaire de se lancer dedans car quand ils ont commencé, ArchiCad

La seconde solution est d’employer un BIM manager au sein de l’agence. Ce dernier a le rôle de référent BIM. Cette solution est très coûteuse et demande d’augmenter la taille de l’agence. Dans le meilleur des cas, l’agence possède déjà un collaborateur expérimenté sur le sujet. Ainsi, de simples formations suffisent afin qu’il puisse endosser le rôle de BIM manager. Nous pouvons donner l’exemple de l’agence Ameller et Dubois22 dirigée par Philippe AMELLER et Jacques DUBOIS, dans laquelle le BIM manager actuel est employé depuis une dizaine d’année et vient d’accepter le rôle de chef d’orchestre du BIM. Il a développé le processus dans l’agence avec la mise en place d’une stratégie et d’une méthode de travail développées avec les chefs d’agence. Il a également préparé un environnement de travail spécifique avec des bibliothèques d’objets ainsi que des arborescences comme nous avons pu le voir précédemment23. Il encadre également des projets pour lesquels le BIM est requis mais il est aussi présent dans l’agence pour donner des conseils, orienter ou résoudre des problèmes en lien avec le logiciel.

21 Agence Z Studio [en ligne] : disponible sur http://www.zstudio.fr/ [consulté

le 3 Décembre 2016]. 22 Agence Ameller et Dubois [en ligne] : disponible sur http://www.amellerdubois.fr/fr/ [consulté le 3 Décembre 2016]. 23 1.2.1 Les missions et responsabilités du BIM manager p.22.

27

QU’EST CE QUE LE BIM

n’était pas encore un logiciel participant au processus BIM. Aujourd’hui, ils produisent et échangent leurs maquettes mais ils proposent également d’être BIM manager pour leurs confrères.


[Fig. 1.13] - BIM World 2016

La dernière solution est de faire intervenir un service de BIM manager proposé par une entreprise extérieure. Lors du BIM World 2016 [Fig. 1.13] qui s’est tenu à la Défense, nous avions pu remarquer un grand nombre d’exposants proposant des BIM managers en freelance24 avec une stratégie clairement énoncée. Ces derniers proposent une mise en place du BIM au sein de l’agence

QU’EST CE QUE LE BIM

28

ainsi que la gestion de la maquette numérique. Ce système permet aux petites et moyennes agences d’architecture d’être aussi compétitives que ses concurrentes. Proposer la mission de BIM manager à une entreprise extérieure est une solution si les chefs d’agence ne se sentent pas capables de développer euxmêmes les processus BIM au sein de leur agence. Cependant, l’architecte se voit retirer de plus en plus de missions. En effet, la complexité du métier qui ne cesse de s’accroitre avec l’apparition de nombreuses normes et contraintes, pousse les architectes à abandonner leur place centrale dans le processus de conception. Le risque est qu’ils deviennent assez rapidement de simples acteurs. C’est pourquoi, il est nécessaire que les agences s’emparent du BIM avec tout ce que cela implique. Certes le rôle de BIM manager impose de grandes responsabilités, mais d’après les compétences nécessaire pour le poste de BIM manager vues précédemment, l’architecte possède un grand nombre de ces notions qu’il maîtrise depuis la fin de ses études.

24 Voir glossaire p.130.


1.3.

Une méthode de travail qui s’étend bien au- delà de l’agence

Comme nous venons de le voir, il est important que les architectes s’emparent de ces nouvelles méthode de travail. Le message que prône le BIM commence à se diffuser au sein des agences d’architecture et un grand nombre d’entre elles commencent à se former. Cependant, les objectifs du BIM vont bien au-delà du fonctionnement au sein d’un cabinet.

1.3.1. Un travail collaboratif avec tous les intervenants du BTP facilité

29

Nous avons pu voir que le BIM prône un travail collaboratif. Ce dernier se développe de manière structuré au sein d’une agence d’architecture et permet à plusieurs collaborateurs de faire évoluer la maquette numérique. Nous avons également définit la notion d’IFC et d’échange de maquette numérique entre les différents intervenants du projet. Mais à quoi cela sert d’échanger une maquette numérique en dehors d’une agence d’architecture ? L’échange peut se réaliser entre l’architecte en charge de la maquette numérique et les bureaux d’étude. En effet, jusqu’à présent les bureaux d’étude utilisaient le travail réalisé en amont par les agences d’architecture afin de pouvoir proposer ou non des solutions techniques aussi bien sur des questions acoustiques, thermiques, ou encore sur les passages de fluides. Leur travail était alors de la ressaisi sur leurs logiciels. Ce processus imposait des pertes de temps importantes.

QU’EST CE QUE LE BIM


Architecte

Superposition

Bureaux d’études

Détection de conflits

[Fig. 1.14] - Travail collaboratif entre l’architecte et les bureaux d’études

Aujourd’hui grâce aux différents atouts du BIM, il est souhaitable que les bureaux d’études travaillent également avec une maquette numérique. L’IFC est un moyen d’échange à un instant t entre l’architecte et l’ingénieur. A la suite de cet échange, l’architecte va continuer à faire évoluer sa maquette numérique. L’ingénieur va quant à lui pouvoir exploiter les données renseignées par l’ar-

QU’EST CE QUE LE BIM

30

chitecte sur son propre logiciel participant au processus BIM et ainsi proposer avec toujours autant d’organisation, la représentation de ses fluides ou autres représentations techniques comme la structure. Une fois ce travail réalisé, il est nécessaire de localiser d’éventuels conflits entre la maquette numérique de l’architecte et la maquette numérique du bureau d’étude. Pour cela, il faut superposer la maquette architecturale avec la maquette du bureau d’étude. Les logiciels de détections de conflit vont permettre cette localisation. Il est donc possible d’appréhender et de limiter des conflits qui auraient sans doute causés une perte d’argent et de temps au moment du chantier. Le processus propose et met en avant une seule et même équipe pluridisciplinaire travaillant autour d’une base commune : la maquette numérique [Fig. 1.14]. Il est également nécessaire d’échanger la maquette numérique avec le maître d’ouvrage à la fin des phases du projet si elle fait bien partie de la commande de départ. C’est grâce à ce Dossier des Ouvrages Exécutés (DOE) numérique25 que la phase de gestion du patrimoine va pouvoir commencer. Une fois l’échange réalisé, c’est au maître d’ouvrage qu’appartient la maquette numérique. Il peut par la suite prévoir des opérations de maintenance ciblées ou encore mettre à jour la maquette en cas d’évolution du projet. Cette maquette est un réel atout pour eux car ils détiennent la carte d’identité complète

25 Voir glossaire p.130.


Remise du Dossier des Ouvrages Executés (DOE)

Gestion du patrimoine

[Fig. 1.15] - Atouts de la maquette numérique pour la maîtrise d’ouvrage

du bâtiment. De plus, par l’utilisation de la méthode de travail BIM, ils s’assurent que le bâtiment est « mieux conçu, mieux construit et plus facile à maintenir et exploiter, sans parler des gains potentiels à terme sur les délais et les coûts »26. Pour aller plus loin, de nombreux avantages sont exposés aux maîtres d’ouvrage afin qu’ils s’orientent eux aussi vers le choix d’un process

1.3.2. La question environnementale

Le BIM permet d’aller beaucoup plus loin qu’une simple représentation graphique d’un projet. Il permet pour un architecte de pouvoir maîtriser les questions environnementales. En effet, cette notion est primordiale aujourd’hui et d’autant plus dans le secteur résidentiel et tertiaire qui consomme à lui seul 43,2% de l’énergie Française [Fig. 1.16]. La Réglementation Thermique de 2012 (RT 2012) ainsi que les engagements pris pour une ville moins polluée lors de la COP 21 sont des contraintes supplémentaires qui orientent fortement le projet et qu’il faut savoir maîtriser. Ce sujet sensible arrive en première ligne dans les

26 LAMOUR Gérard, ROMON Christian, Juillet 2016. BIM et maquette numé-

rique : guide de recommandation à la maîtrise d’ouvrage, Plan Transition du Numérique dans le Bâtiment.

31

QU’EST CE QUE LE BIM

BIM. Le gain de temps et d’argent permis grâce à la détection de conflits dans la maquette numérique ou encore grâce à la saisie unique des données est un des points les plus importants. De plus, il est très intéressant pour la maîtrise d’ouvrage de pouvoir mieux gérer les quantités et les coûts nécessaire au projet qui sont, grâce au BIM, directement intégrés dans les données de la maquette. Ce qui les intéresse également c’est le fait de pouvoir prévoir l’exploitation et la maintenance du bâtiment en amont car ce n’est pas la construction qui coûte le plus cher, mais bel et bien sa maintenance sur la durée de vie du bâtiment [Fig. 1.15].


[Fig. 1.16] - Consommation finale d’énergie par secteur en 2010 en France [Fig. 1.17] - Energie grise non renouvelable en kg de quelques matériaux (enkWh)

volontés et les attentes des maîtres d’ouvrage. Grâce à la maquette numérique, il est à présent possible d’évaluer les compétences thermiques d’un bâtiment à court, moyen et long terme. Ce travail peut être réalisé assez tôt dans le processus de conception du projet afin de réduire au mieux son impact environnemental.

QU’EST CE QUE LE BIM

32

Un bâtiment ne pollue pas seulement lorsqu’il consomme de l’énergie nécessaire à son fonctionnement, il pollue tout au long de son cycle de vie : de sa construction à sa démolition. L’architecte doit être vigilant dès le choix de ses matériaux car ceux-ci consomment des quantités différentes d’énergie au cours de leur cycle de vie : c’est ce que l’on appelle l’énergie grise27. Cela correspond à l’énergie nécessaire à la production du matériau, à son extraction, à son transport, à sa mise en œuvre, à son entretien ainsi qu’à son recyclage. Ainsi, l’impact environnemental peut être réduit par l’utilisation d’un matériau faiblement demandeur en énergie [Fig. 1.17]. Il faut également prendre en compte une éventuelle démolition de la construction ainsi que sa reconversion. Le BIM permet de réaliser ces différents calculs en fonction du choix du matériau et ainsi d’intégrer la meilleure solution dans des phases très avancées du projet. Des efforts peuvent également être réalisés lors du chantier avec un chantier dit «vert » dans lequel les nuisances environnementales, telles que les nuisances auprès des habitants (bruit, saletés, circulations et stationnements) et les nuisances envers l’environnement (déchets et pollutions), soient limitées. La maquette numérique peut également permettre de prévoir et organiser des espaces dédiés à la propreté ou à la circulation pour les phases de chantier.

27

Voir glossaire p.130.


Fabrication Acquisition des ressources Transport

Fin de vie Recyclage

Mise en oeuvre Vie en oeuvre Entretien

- Acquisition des ressources et matières premières - Fabrication des composants et produits de construction - Transport depuis le site de production vers l’entreprise - Mise en oeuvre et transport vers le chantier, assemblage - Vie en oeuvre, entretien, remplacement - Fin de vie, réutilisation, recyclage, enfouissement

[Fig. 1.18] - Cycle de vie d’un bâtiment

Ces différents efforts environnementaux peuvent aujourd’hui être facilement intégrés dans le projet bien avant la construction et tout au long de son cycle de vie [Fig. 1.18]. En effet, la maquette numérique, en plus de pouvoir envisager les prochaines consommations du bâtiment, peut prendre en compte de nombreux facteur afin de choisir la solution la plus efficace pour l’environnement.

1.3.3. Le BIM et le patrimoine

Le BIM a comme principal objectif la gestion du patrimoine28. Cependant, cette notion est souvent mise à l’écart alors que c’est un point clé. Sur un bâtiment neuf construit avec le BIM, une fois sa réalisation terminée, il est toujours intéressant de posséder toutes les informations concernant le fonctionnement de ce dernier. En cas d’éventuel souhait de la part de la maîtrise d’ouvrage de procéder à une amélioration ou à une requalification plusieurs dizaines d’années plus tard, la maquette numérique BIM sera présente pour justifier et orienter rapidement le déroulement des futurs travaux. Ceci est un réel atout puisque aujourd’hui les professionnels rencontrent des difficultés lors de modifications, même mineures, sur un bâtiment ancien pour lequel aucun document graphique ou technique n’a été retrouvé. Il est également possible de retrouver des documents qui ne correspondent pas à la réalité. La notion de patrimoine en lien avec le processus BIM ne concerne pas seulement la volonté d’informatiser les nouvelles constructions. Le but final est bel est bien de numériser les données géométriques de chaque construction

28 Voir glossaire p.130.

33

QU’EST CE QUE LE BIM


AutoCAD Microstation

Ordinateur Topométrie Bâtiment

Scanner

Données Brutes

Logiciel de traitement

Rhino 3D

Scan 3D consolidé Nuage de points 3D

Recollement et entrée de points de contrôle

Revit Plug-in XYZ, LAS ...

Logiciels maquette numérique (modélisation)

Ex : IMS 3D

[Fig. 1.19] - Processus d’exploitation d’un scanner bâtiment 3D

afin d’avoir une visibilité sur l’ensemble du parc français. Il est également nécessaire de compléter les données graphiques de ces objets par des données non graphiques. Pour cela, les dernières technologies sont associées avec cette volonté de constituer un état des lieux complet plus ou moins précis. C’est pourquoi, lors du BIM World 2016, de nombreuses solutions étaient proposées

QU’EST CE QUE LE BIM

34

par les intervenants afin de pouvoir recueillir simplement les données d’un bâtiment existant. Un des exemples le plus performant est le scanner laser. Ce dernier permet de retranscrire à l’identique un environnement par un nuage de point sur ordinateur. Il est ensuite nécessaire de regrouper ces données sur une seule et unique maquette numérique, de les saisir et d’en exploiter ses données. Cette documentation technique doit être conservée et mise à jour en cas de transformation. Prenons l’exemple de l’un de ces outils. Le scanner bâtiment 3D continu proposé par VIAmetris, l’IMS 3D29[Fig. 1.19], est capable de réaliser des scans continus dans des volumes denses. Sa caméra panoramique permet de prendre des photos sphériques du parcours. Sa précision est au centimètre près et permet de scanner 5000m² par heure selon la documentation fournie. Il peut être utilisé aussi bien pour un simple relevé classique d’un bâtiment que pour une modélisation 3D sous la forme de nuage de point ou encore d’un rendu en plan. Aujourd’hui, les dernières technologies permettent également d’obtenir le modèle en 3D d’un bâtiment grâce aux drones équipés d’appareils photographiques (photogrammétrie30)[Fig. 1.20] [Fig. 1.21]. Ces derniers, accompagnés d’une caméra adaptée, peuvent être commandée à distance afin de survoler un lieu difficile d’accès. Cependant, des améliorations dans ce domaine sont

29 IMS 3D [en ligne] : Disponible sur http://viametris.info/iMS3D/EN/ [consul-

té le 2 Décembre 2016]. 30 Voir glossaire p.130.


[Fig. 1.20] - Exemple de drone adapté pour la photogrammétrie DJI Phantom 3 professionnel

[Fig. 1.21] - Exemple de nuage de point possible grâce à la photogrammétrie

encore nécessaires. La batterie des drones est encore faible (10 à 15 minutes de vol) mais aussi ils sont très sensibles au vent. De nombreuses villes ont pour ambition de mettre à jour les informations concernant les anciens bâtiments présents dans la ville. C’est le cas de Paris qui met progressivement en place une maquette numérique31.

QU’EST CE QUE LE BIM

35

31

HOVORKA Frank, MIT Pierre, mars 2014. Un avatar numérique de l’ouvrage et du patrimoine au service du bâtiment durable : le « Bâtiment et Informations Modélisés » (BIM) Tome 1 : rapport et proposition, Plan Bâtiment durable.


Partie 2 : Le

développement du BIM dans les agences d’architecture en France

LE DEVELOPPEMENT DU BIM DANS LES AGENCES D’ARCHITECTURE EN FRANCE

36

A la suite de cette définition du BIM, il est important de se rapprocher de différents architectes français afin de connaître leurs motivations ainsi que leurs craintes sur le sujet. En effet, le développement du processus BIM progresse en France, l’avis des professionnels français a très peu été sollicité jusqu’à présent afin de laisser l’exclusivité aux « BIMer » convaincus et convaincants. Cette seconde partie se base sur les interviews réalisées dans le cadre de ce mémoire. Les questions posées aux professionnels s’orientent vers leurs connaissances sur le sujet du BIM, leur souhait de développer le processus dans leur agence ou encore vers leur avis personnel sur le sujet. Nous avons également abordé des thématiques en lien avec le processus BIM chez nos voisins anglo-saxons ou encore le sujet de l’investissement pour les petites agences. Le panel de professionnels a été choisi afin de confronter des visions opposées sur le processus qui amènent à une réflexion et à une prise de position sur le sujet. Nous allons retrouver dans les parties suivantes le point de vue d’Emmanuel Di Giacomo, architecte Diplômé Par Le Gouvernement (DPLG) et également développeur des écosystèmes BIM chez Autodesk qui a vu le processus évoluer depuis au moins dix ans maintenant et qui maîtrise parfaitement le sujet.


PROVINCE Bertrand Pagnoncelli

Olivier Celnik

Chloé Edler Fabrice Theis Jeune architecte

Emmanuel Di Giacomo

[Fig. 2.1] - Panel d’interviewé

Nous allons également retrouver les paroles d’Olivier Celnik, architecte de l’agence Z Studio à Paris regroupant une dizaine d’architectes travaillant avec ArchiCad depuis 1996, co-directeur du mastère spécialisé BIM32, élu au Conseil Régional de l’Ordre des Architectes d’Ile de France (CROAIF) et co-auteur du livre « BIM et maquette numérique pour l’architecture, le bâtiment et la construction »33. Ce dernier permet d’apporter son point de vue en tant qu’enseignant sur le sujet mais aussi en tant que professionnel issu d’une agence parisienne travaillant avec le processus BIM. Jacques Dubois fait également parti des architectes interrogés. Il dirige l’agence Ameller et Dubois à Paris, accompagné de Philippe Ameller. Leur équipe se compose d’une cinquantaine d’architectes dont une vingtaine d’architectes sont formés au BIM aujourd’hui. Son interview permet d’apporter un vécu professionnel de la part d’un architecte ayant passé son agence au BIM. Les trois derniers architectes sont de province ce qui permet ainsi d’élargir notre champ d’investigation sur le ressenti du processus au-delà de la capitale. Chloé Edler est une jeune diplômée qui a pour ambition d’ouvrir sa propre agence et qui travaille actuellement dans un cabinet Thionvillois qui propose un travail collaboratif autour du processus BIM (Nord-Est de la France, région Grand Est, Moselle). Nous retrouverons également le point de vue de Bertrand Pagnoncelli et de Fabrice Theis, tous deux architectes indépendants en Lorraine (Région Grand-Est, Moselle). Ils n’utilisent pas encore la nouvelle méthode de travail que propose le BIM. Tous ces architectes possèdent un parcours différents vis-à-vis du BIM ce qui permet d’appréhender plusieurs types de profils allant du praticien indépendant au chef d’agence d’une moyenne ou d’une grande entreprise afin d’observer leurs positionnements et partager leurs réflexions [Fig. 2.1].

32 Voir glossaire p.130. 33 CELNIK, Olivier ; LEBEGUE Eric, Octobre 2015. BIM & maquette numérique :

pour l’architecture, le bâtiment et la construction. Eyrolles, 763p.

37

LE DEVELOPPEMENT DU BIM DANS LES AGENCES D’ARCHITECTURE EN FRANCE

Jacques Dubois

Grande agence

Conseillé chez Autodesk

Petite agence

PARIS


ETAPE 01 :

ETAPE 02 :

La volonté de l’architcte

Les logiciels BIM

ETAPE 03 : La formation

[Fig. 2.2] - Les différentes étapes de mise en place du BIM

2.1.

LE DEVELOPPEMENT DU BIM DANS LES AGENCES D’ARCHITECTURE EN FRANCE

38

Les différentes étapes de mise en place du BIM dans une agence

Les différents documents que nous pouvons actuellement trouver sur le BIM expliquent en détail la méthode de travail que propose ce dernier. Cependant, les entreprises qui ont franchi le pas donnent rarement des conseils à leurs confrères afin de les rassurer sur les étapes de mise en place du BIM. Cette première sous-partie résume le parcours réalisé par les agences étant passées au BIM dans notre panel. Nous pouvons proposer ses étapes à tout type d’agence voulant mettre en place le BIM. Chaque étape est très importante et doit être réalisée dans l’ordre suivant [Fig. 2.2].

2.1.1. La volonté de l’architecte

La première étape afin de mettre en place une méthode de travail BIM dans une agence d’architecture est la motivation du dirigeant. En effet, bien avant toute démarche, il est nécessaire que l’architecte soit convaincu des atouts que propose le processus BIM et la maquette numérique. Sans cela, les étapes suivantes sont inutiles. Lors de l’interview de Jacques Dubois, ce dernier nous a fait part de son premier ressenti lorsque le sujet du BIM est arrivé dans son agence : « Il y a cinq ans, un collaborateur est arrivé et nous a dit qu’AutoCAD c’était terminé ; qu’il fallait, si on voulait survivre, passer au BIM. On l’a accueilli avec quelques sourires narquois […]. Nous, notre ambition et notre vocation, c’est


« Il faut être conscient du fait que pendant six mois, on risque d’avoir une perte de productivité. Mais par contre, une fois qu’on a dépassé ces six mois, il faut savoir qu’on va être beaucoup plus efficace […] » Emmanuel Di Giacomo, Juillet 2016

l’architecture, que ce soit du BIM, du crayon, du tire-ligne ou du rotring, pour nous c’est la même chose » 34. Dans ses paroles, nous comprenons bien que l’arrivée du BIM a questionné la profession. Mais après quelques recherches sur les bénéfices que pouvait apporter le BIM et son caractère inéluctable, les dirigeants ont fait le choix de s’engager dans le processus.

2.1.2. Les logiciels contribuant au processus BIM

Une fois la décision prise de mettre en place un processus BIM, il faut acheter le logiciel permettant de s’y lancer. Cette étape dépend principalement des ressources financières de l’agence. En effet, le logiciel représente un coût important dans le développement de la méthode de travail BIM puisque celui– ci, en plus d’être coûteux, nécessite des postes de travail puissants comme nous l’explique Jacques Dubois dans son interview : « Ca commence évidemment par […] dépenser beaucoup d’argent, acheter les licences, équiper les postes de travail avec ce logiciel, c’est-à-dire des postes de travail très performants […], donc il faut évidemment changer et le matériel et le logiciel »34.

34 Interview de Jacques Dubois, Septembre 2016. En annexe p.107. 35 Interview d’Emmanuel Di Giacomo, Juillet 2016. En annexe p.82.

39

LE DEVELOPPEMENT DU BIM DANS LES AGENCES D’ARCHITECTURE EN FRANCE

C’est aussi aux dirigeants de penser aux éventuelles répercussions du processus sur son équipe. Très vite, il doit prendre en compte le fait que le rythme de production de sa société va stagner voire légèrement diminuer pendant une certaine période, le temps pour ses collaborateurs de se familiariser avec le logiciel. Emmanuel Di Giacomo nous l’explique dans son interview : « Il faut être conscient du fait que pendant six mois, on risque d’avoir une perte de productivité. Mais par contre, une fois qu’on a dépassé ces six mois, il faut savoir qu’on va être beaucoup plus efficace […] »35.


[Fig. 2.3] - Les différentes interfaces des sites internet dédiés aux logiciels BIM

Pour aller un peu plus loin, l’achat d’une licence pour un logiciel participant au processus BIM revient environ entre 5000 et 6000 euros par poste. Une souscription annuelle de 1200 euros est à rajouter pour les mises à jour et la maintenance du logiciel. Tout plugin rajouté impose des frais supplémentaires. Emmanuel Di Giacomo nous parle dans son interview36 de solutions proposées

LE DEVELOPPEMENT DU BIM DANS LES AGENCES D’ARCHITECTURE EN FRANCE

40

par Autodesk afin de diminuer les dépenses. Autodesk a mis en place des systèmes de location de licence, avec par exemple Revit LT. Ce dernier revient à 72 euros par mois, soit 588 euros pour une année et comprend les mises à jour ainsi qu’une assistance37. Cette solution permet de réelles économies. Le dirigeant de l’agence a tout de même le choix entre plusieurs logiciels. Aujourd’hui, trois solutions dominent le marché : le logiciel ArchiCAD proposé par Graphisoft38, Allplan par Nemetschek39 et pour finir Revit chez Autodesk40 [Fig. 2.3]. Ces trois logiciels mettent en place les outils nécessaires au développement d’un processus BIM. Mais comment choisir son logiciel ? Nous pouvons penser que chaque éditeur propose des solutions différentes. Pourtant, ces trois logiciels proposent la même méthode de travail sous trois interfaces différentes [Fig. 2.4]. Ainsi le choix du logiciel est personnel. Même si certains peuvent dire qu’un logiciel se manipule plus simplement qu’un autre ou qu’il est plus automatisé, ce sont des avis personnels. Comme nous l’a confié Olivier Celnik lors de notre rencontre : « le choix du logiciel est très important »41.

36 Interview d’Emmanuel Di Giacomo, Juillet 2016. En annexe p.82. 37 Autodesk [en ligne] : Disponible sur : http://www.autodesk.fr/store/pro-

ducts/revit-lt?term=1month&support=advanced [consulté le 24 janvier 2017] 38 ArchiCad [en ligne] : Disponible sur : https://archicad.fr/ [consulté le 24 janvier 2017]. 39 AllPlan [en ligne] : Disponible sur : https://www.allplan.com/fr.html [consulté le 24 janvier 2017]. 40 Revit [en ligne] : Disponible sur : http://www.autodesk.fr/products/revit-family/overview [consulté le 24 janvier 2017]. 41 Interview d’Olivier Celnik, Juillet 2016. En annexe p.97.


Interface ArchiCad

Interface AllPlan

Interface Revit [Fig. 2.4] - Les différentes interfaces des logiciels de maquette numérique

LE DEVELOPPEMENT DU BIM DANS LES AGENCES D’ARCHITECTURE EN FRANCE

41


[Fig. 2.5] - Inferface du site de formation Elephorm

2.1.3. La formation

L’achat du logiciel n’est pas la seule contrainte financière. En effet, il est nécessaire de former les collaborateurs présents dans l’agence afin de maîtriser cette méthode de travail ce qui va alourdir l’investissement financier de l’agence.

LE DEVELOPPEMENT DU BIM DANS LES AGENCES D’ARCHITECTURE EN FRANCE

42

Il est conseillé de faire une première formation standard de cinq jours afin d’apprendre les bases du logiciel choisi. Celle-ci coûte environ 1500 euros par personne formée. Il existe également « des formations beaucoup plus conceptuelles qui durent deux jours »42 pour 800 euros mais qui ne permettent pas de pouvoir réaliser un projet en BIM. Il peut être nécessaire de faire des formations complémentaires sur des sujets bien spécifiques. Il est également possible de se former seul grâce à des tutoriels sur internet. Emmanuel Di Giacomo, nous a donné l’exemple d’Elephorm43, site de formation en ligne payant (environ entre 50 et 200 euros) dans lequel il est possible de se former au BIM [Fig. 2.5]. De plus en plus, le BIM est identifié sur les sites internet à la formation continue. Cela correspond au fait qu’un architecte doit être formé sur le long terme afin de maîtriser le processus BIM mais aussi, cela fait référence à la formation que propose l’ESTP Paris (L’École spéciale des travaux publics, du bâtiment et de l’industrie) en lien avec l’ENPC (Ecole Nationale des Ponts et Chaussées)[Fig. 2.6]. C’est la première école en France à proposer un mastère BIM dont l’objectif est de former des professionnels dans le but qu’ils managent des projets réalisés en BIM.

42 Interview d’Emmanuel Di Giacomo, Juillet 2016. En annexe p.82. 43 Elephorm [en ligne] : Disponible sur : http://www.elephorm.com/ [consulté

le 24 janvier 2017].


[Fig. 2.6] - Plaquette Mastère BIM

Le sujet du BIM est également de plus en plus abordé en école d’architecture. D’après Emmanuel Di Giacomo : « il faut absolument que les jeunes architectes ou les futurs architectes soient formés dans les écoles d’architecture […]. Je pense que les jeunes générations qui sortent de l’école […] seront un vecteur d’accélération de cette « bimisation » des agences d’architecture »44.

44 Interview d’Emmanuel Di Giacomo, Juillet 2016. En annexe p.82.

43

LE DEVELOPPEMENT DU BIM DANS LES AGENCES D’ARCHITECTURE EN FRANCE

Une fois la formation faite, il s’agit de choisir un projet pilote sur lequel l’équipe formée va travailler. L’objectif est de pouvoir être accompagné une journée par semaine par le partenaire revendeur afin de pouvoir lui poser des questions sur les difficultés rencontrées. Pendant ce premier projet, l’équipe doit beaucoup échanger afin que les collaborateurs puissent évoluer les uns par rapport aux autres. « Et ensuite, c’est le principe viral »44. Chacun de ces collaborateurs va pouvoir piloter un autre projet et apprendre aux autres ce qui va permettre de déployer le BIM au sein de l’agence.


ERREUR 01 :

ERREUR 02 :

ERREUR 03 :

Isolement, abandon

La précipitation

Ne pas structurer son travail

[Fig. 2.7] - Les erreurs qu’il faut éviter lors du passage au BIM

2.2.

Les erreurs qu’il faut éviter

Même si les différentes étapes vues dans le paragraphe précédent semblent simples et rapides, il existe tout de même des obstacles qu’il faut absolument éviter sous peine de perdre du temps, voire de l’argent. Ce point de vue provient toujours de notre panel et de leur expérience lors du développement du BIM dans leur agence [Fig. 2.7].

LE DEVELOPPEMENT DU BIM DANS LES AGENCES D’ARCHITECTURE EN FRANCE

44

2.2.1. L’isolement, l’abandon

L’isolement est le premier point que nous allons développer dans cette sous-partie. En effet, lors du passage au BIM pour une agence, il est nécessaire d’avoir de l’aide de la part du revendeur de logiciel ou d’un formateur si ces derniers proposent un suivi. D’après les conseils d’Emmanuel Di Giacomo : « […] il faut absolument se faire aider. Il ne faut pas rester dans son coin à végéter, essayer de trouver seul la réponse […] On risque de se décourager »45. C’est pourquoi, il faut également bien choisir son revendeur ou son formateur. Ce n’est pas sur cette étape qu’il faut essayer de réduire les coûts. De plus, il n’est pas envisageable qu’un architecte, travaillant au sein d’une agence, puisse y passer de son propre chef et seul. L’un des objectifs du BIM est de mettre en place un travail collaboratif, or faire du BIM seul dans son coin n’est pas productif. Pour finir, l’abandon dans le développement de la méthode de travail en BIM est un risque. En effet, il est possible de se laisser décourager par la

45 Interview d’Emmanuel Di Giacomo, Juillet 2016. En annexe p.82.


« Je fais un projet ou alors je fais une formation et je n’ai pas de projet à traiter en BIM alors du coup, je laisse tomber et je me dis que je vais attendre le prochain projet […]. C’est l’erreur à ne pas faire […] » Emmanuel Di Giacomo, Juillet 2016

complexité du process BIM, aussi bien lors de l’apprentissage du logiciel que lors de la mise en place de la collaboration. Il est important là aussi de pouvoir être encadré par des conseillés ou des formateurs BIM qui vont permettre à l’agence de rester dans l’objectif de développer des projets en BIM. Le second risque est de réaliser toutes les formations nécessaires pour suivre cette mé-

2.2.2. La précipitation

La précipitation est également à éviter. Vouloir passer d’un seul coup une agence au BIM est une erreur car cela risque de faire perdre toute compétitivité à l’agence. Il est important de procéder avec un principe viral exposé dans le paragraphe précédent qui va permettre au petit groupe de pionniers de maitriser le processus BIM et de l’apprendre aux autres. Quand nous parlons de précipitation, nous faisons également référence au fait de vouloir en faire trop dès le début. Olivier Celnik nous a confié avoir déjà vu des agences qui : « veulent saisir trop de choses dans la maquette à des stades trop préalables du projet, perdant du temps, perdant de l’énergie, allant trop loin, faisant des maquettes trop lourdes et pas pertinentes. […] le processus s’avère contre-productif»47. Plus précisément, la maquette numérique qui est composée d’objets plus ou

46 Interview d’Emmanuel Di Giacomo, Juillet 2016. En annexe p.82. 47 Interview d’Olivier Celnik, Juillet 2016. En annexe p.97.

45

LE DEVELOPPEMENT DU BIM DANS LES AGENCES D’ARCHITECTURE EN FRANCE

thode de travail et de continuer à réaliser des projets avec ses anciens acquis par manque d’appel à projets BIM. Une fois le process lancé, il est fondamental de le poursuivre comme nous l’explique Emmanuel Di Giacomo : « je fais un projet ou alors je fais une formation et je n’ai pas de projet à traiter en BIM alors du coup, je laisse tomber et je me dis que je vais attendre le prochain projet […]. C’est l’erreur à ne pas faire […] »46.


Objet non-graphique

Objet non-renseigné

Maquette très faible en qualité

Maquette avec peu de données graphiques Mise en avant des informations liées aux objets [Fig. 2.8] - Informations liées à la maquette numérique

Objet renseigné

Objet graphique

Maquette sans objets informés Mise en avant du graphisme Maquette très renseignée mais lourde Logiciel ralenti

moins informés, ce que l’on a défini par LOD dans la première partie48, ne doit ni être trop renseigné, ni trop peu. Plus un objet sera détaillé, plus le logiciel participant au processus BIM va être ralenti. Moins l’objet sera renseigné, moins bonne sera la qualité de la maquette. C’est pourquoi, la quantité d’informations que l’architecte choisi de donner est très importante [Fig. 2.8].

LE DEVELOPPEMENT DU BIM DANS LES AGENCES D’ARCHITECTURE EN FRANCE

46

De plus, le choix du projet pilote doit rester dans les projets les plus maîtrisés de l’agence. Jacques Dubois nous a confié que le premier projet de l’agence en BIM « a été une véritable catastrophe »49. En effet, le projet pilote choisi était très complexe pour une première expérience BIM et afin de maîtriser l’architecture du bâtiment, ils ont fait le choix entre la phase PRO (Etude de projet) et le DCE (Dossier de Consultation des Entreprise) de repasser la totalité de leur travail sur AutoCAD.

2.2.3. Ne pas structurer son travail

Le BIM nécessite une certaine rigueur qui va permettre de s’organiser et échanger. Structurer son travail est très important et doit suivre parfaitement la méthode de travail BIM exposé dans la première partie50. Cependant, même si le processus semble clair, il est nécessaire d’insister sur quelques erreurs dans la structuration de son travail. Premièrement, pour revenir sur le format IFC, Emmanuel Di Giacomo nous a rappelé que : « le format IFC c’est un format d’échange et non pas un format

48 1.1.1. La maquette numérique p.15. 49 Interview de Jacques Dubois, Septembre 2016. En annexe p.107. 50 1.1. Une méthode de travail à apprivoiser p.15.


« Le format IFC c’est un format d’échange et non pas un format de travail. […] c’est un vecteur d’échange à l’instant T » Emmanuel Di Giacomo, Juillet 2016

de travail. […] c’est un vecteur d’échange à l’instant T »51. A l’origine, ce format était un noyau commun à tous les logiciels buildingSmart permettant, au-delà du format, une des formes possibles d’organisation de données BIM. Il est donc important de ne pas chercher à faire vivre un fichier IFC, mais plutôt faire évoluer sa maquette numérique sur un logiciel participant au processus BIM.

Si l’on revient sur le niveau de détail donné aux objets, nous pouvons rajouter qu’une maquette numérique trop détaillée va engendrer un ralentissement du fonctionnement du logiciel mais pas seulement. Le poids du fichier sera alors très lourd ce qui va poser des problèmes au cours des échanges et de la collaboration.

51 Interview d’Emmanuel Di Giacomo, Juillet 2016. En annexe p.82. 52 3.2.3. La responsabilité de la maquette numérique p.64.

47

LE DEVELOPPEMENT DU BIM DANS LES AGENCES D’ARCHITECTURE EN FRANCE

Dans l’organisation de son travail, il est aussi important d’établir dans une convention écrite52, la manière dont l’équipe va collaborer. Soit celle-ci va utiliser des logiciels contribuant au processus BIM différents et va ainsi utiliser le format IFC pour collaborer. Soit ce logiciel est le même au sein de l’équipe et donc il va suffir de choisir une version du logiciel pour réaliser le projet. Cette version du logiciel, participant au processus BIM, devra être utilisée par tous les partenaires du projet. Travailler sur des logiciels avec des versions différentes est un risque et peut poser de très gros problèmes lors de la collaboration.


00

PERSPECTIV après l'uitilisation de celui-ci par les

50

RESSENTI DES UTILISATEURS DE LA MAQUETTE NUMERIQUE 00

50

0

DE L'AUDIENCE DE L'AUDIENCE

RESSENTI DES UTILISATEURS DE LA MAQUETTE NUMERIQUE

00%

70 60

Le panel est 60 représenté à 50 20

t la maquette 3D

seulement

50 40 40 30 30 20

45%

80% LE PASSAGE DE LA 2D/3D AU BIM VOUS SEMBLE T-IL 80% Le passage de la 2D/3D au ONEREUX ? 10 0

des utilisent la maquette 3D Près deinterrogés LE PASSAGE DE LA 2D/3D BIM est-il onereux ? LE PASSAGE DE LA 2D/3D AU BIM EST-IL ONEREUX ? des 100 interrogés utilisent la maquette 3D AU BIM EST-IL ONEREUX ? 100 80 80 60

80 60

Mais seulement

+ 250 de 250 + de

+ 100 de 100 + de

45% 45%

OUI NON OUI NON

40 20 20

COMPLIQUE ?

40 60

Je m'y mets juste Je m'y mets juste

20 40

ans Entre 5 et 10 48 ans

40 60 l'audience Mais seulement 40 de utilisent la maquette numérique

0 20

47

0

LE PASSAGE DE LA 2D/3D

Le passage de la 2D/3D au AU BIM VOUS SEMBLE T-IL 46 Entre 2 et 5 Depuis 1 an LE PASSAGE DE LA 2D/3D BIM vous sembre ONEREUX ? ans Entre 2 et 5 Depuis t-il 1 an onereux ? 45 ans

44

100 80

AU BIM VOUS SEMBLE T-IL ONEREUX ?

79% 79% 100 60 80 40 60 20

52 53 51 52 50 51 49 50 48 49 47 48 46 47 45 46 44 45

LES 12 PROCHAINS MOIS ? 9% Autre 9%

Marketing 8% Marketing 8%

Méthodes de travail de Méthodes 20% travail 20%

du panel global considèrent 44 du panel global considèrent l'investissement trop important OUI l'investissement trop important

REVIT

Gain financier 6% Gain financier 6%

Gain de temp AU

NON 40 20 14% 0 l'audience de utilisent la maquette numérique 0 Gain de temp 0 L'avis sur la20complexitude du BIM change 14% 0 [Fig. 2.9] - Ressenti des architectes sur le BIM après L'avis sur la 0complexitude du BIM change l'uitilisation de celui-ci par les acteurs après l'uitilisation de celui-ci par les acteurs UTILISATEUR RESSENTI DU PANEL N'UTILISANT PAS LA MAQUETTE NUMERI

2.3.

EUR

50

60 10 ans et + 10 ans et +

par des T.P.E. et des P.M.E. 49 Entre 5 et 10

0

20 10

100

51

par des T.P.E. et des P.M.E.

Près de 0

t la maquette numérique

nnes onnes

100% 100%

RESSENTI DU PANEL N’UTILISANT PAS LA MAQETTE NUMERIQUE

0 LE PASSAGE DE LA 2D/3D RESSENTI DES UTILISATEURS DE LA MAQUETTE NUMERIQUE PERSPECTIV personnes L'avis sur la complexitude du BIM ENVISAGEZ-VOUS DE PASSER AU BIM DANS QUEL(S) LOGICIE AU BIM VOUS SEMBLE T-IL après l'uitilisation de celui-ci par les LES 12 PROCHAINS MOIS ? COMPLIQUE ? LE PASSAGE DE LA 2D/3D DE VOTRE ENTREPRISE ? ENVISAGEZ-VOUS DE PASSER AU BIM LE PASSAGE DE LA 2D/3D AU DEPUIS COMBIEN DE TEMPS UTILISEZ53 POUR QUELLE(S) RAISON(S) AU BIM VOUS SEMBLE T-IL DE VOTRE ENTREPRISE ? LES 12 PROCHAINS MOIS ? 60LE PASSAGE DE LA 2D/3D AU DEPUIS COMBIEN DE TEMPS UTILISEZBIM EST-IL COMPLIQUE ? SKETCHUP POUR QUELLE(S) RAISON(S) VOUS LE BIM ? Le passage de la 2D/3D au LE PASSAGE DE LA 2D/3D VOUS LE BIM DANS VOTRE Le passage de la 2D/3D au COMPLIQUE ? 52 ENVISAGEZ-VOUS DE PASSER AU BIM BIM EST-IL COMPLIQUE ? Le panel est représenté à ar des T.P.E. et des P.M.E. VOUS LE BIM ? Autre VOUS LE BIM DANS VOTR 70 BIM est-il compliqué ? AU BIM VOUS SEMBLE T-IL BIM vous semble t-il compliqué ? 53 40

RESSENTI DU PANEL N'UTILISANT PAS LA MAQUETTE NUMERIQUE Des agences françaises en retrait RESSENTI DU PANEL N'UTILISANT PAS LA MAQUETTE NUMER ENVISAGEZ-VOUS DE PASSER AU BIM DANS QUEL(S) LOGICIEL(S) DE D.A.O. / C

LE PASSAGE DE LA 2D/3D UTILISATEUR LE PASSAGE DE LA 2D/3D AU BIM VOUS SEMBLE T-IL AU BIM VOUS SEMBLE T-IL COMPLIQUE ? COMPLIQUE ?

100% 100%

53

ENVISAGEZ-VOUS DE PASSER AU BIM DANS QUEL(S) LOGICIEL(S) DE D.A.O. / C LES 12 PROCHAINS MOIS ? TEKLA ALLPLAN Sondage réalisé sur un panel de 177 professionnels LES 12 PROCHAINS MOIS ? TEKLA ALLPLAN Avril - Juin 2016

Sondage réalisé sur un panel de 177 professionnels 60 53 les différentes informations envoyées A. TRANCHANTSKETCHUP Malgré les nombreuses revues ou par Sondage réalisé sur un panel de 177 professionnels 52 Avril - Juin 2016 60 SKETCHUP par des T.P.E. et des P.M.E. Avril - Juin 2016 40 52 A. TRANCHANT par des T.P.E. et des P.M.E. 51 A. TRANCHANT l’Ordre 40des Architectes, le BIM ne fait pas l’unanimité dans toutes les agences. 51 20 50 20 50 Grâce aux points de vue recueillis lors des interviews, nous avons pu extraire 0 49 0

48 professionnels interrogés. différentes craintes énoncées par les

ent la maquette 3D ent la maquette 3D

48

45% 45%

LE DEVELOPPEMENT DU BIM DANS LES AGENCES D’ARCHITECTURE EN FRANCE

ais seulement ais seulement ent la maquette numérique sent la maquette numérique

ATEUR ATEUR

100

49

LE PASSAGE DE LA 2D/3D LE PASSAGE DE LA 2D/3D AU BIM VOUS SEMBLE T-IL AU BIM VOUS SEMBLE T-IL ONEREUX ? ONEREUX ?

48 47 47 46

2.3.1. Un manque de connaissance du processus 46 45

100 80

45 44

80 60

44

REVIT REVIT

60 40

Sur les six agences interviewées, deux des professionnels OUI étaient scep40 20 NON OUI 20 0 tiques sur le sujet. Lors de l’interview de Fabrice Theis, il nousNON a confié que 0 le BIM est pour lui : « Quelque chose de très compliqué qui [l]’effraie un peu RESSENTI DU PANEL N'UTILISANT PAS LA MAQUETTE NUMERIQUE RESSENTI PANEL N'UTILISANT PAS LA MAQUETTE NUMERIQUE »53. La complexité du DU processus est le principal frein à son passage au BIM puisqu’il affirme quelques lignes plus loin : « Si un jour je n’ai plus le choix, Sondage réalisé sur un panel de 177 professionnels Juin 2016 Sondage réalisé sur un- panel de 177 professionnels oui je serai obligé de le faire. AlorsA.Avril je serai peut-être un BIM convaincu par TRANCHANT Avril - Juin 2016 A. TRANCHANT la suite mais au jour d’aujourd’hui ça m’effraie un peu »53. Cependant, il n’est pas le seul à avoir les idées confuses sur le sujet. Bertrand Pagnoncelli, affirme dans son interview qu’ « il y a un peu de confusion »54. Le point de vue de ces deux architectes n’est pas isolé puisque d’après un sondage réalisé par l’Ordre des architectes55, environ 60% des architectes n’utilisant pas le process BIM, trouvent que le passage de la 2D/3D au BIM est compliqué. Par contre, nous pouvons remarquer dans ce même sondage que les agences ayant déjà franchi le pas, seulement 40% d’entre elles trouvent que le passage de la 2D/3D au BIM a été compliqué [Fig. 2.9]. Nous pouvons en déduire que les architectes redoutent ce passage, peut-être par manque de connaissance

53 Interview de Fabrice Theis, Juillet 2016. En annexe p.121. 54 Interview de Bertrand Pagnoncelli, Juillet 2016. En annexe p.115. 55 Sondage « le BIM dans le secteur du BTP, ressenti des architectes » réalisé

entre avril et juin 2016 et publié par l’Ordre des Architectes.

AUTRES AUTRES

TENDANCE TENDANCE


PARIS

PROVINCE

BIM ?

[Fig. 2.10] - Diffusion du processus BIM à travers la France

sur la méthode à adopter ou encore par manque de soutien de la part d’un revendeur. Nous pouvons également rajouter que ces deux architectes ont en commun le fait qu’ils exercent tous les deux leur métier en province. Nous pouvons

Nous pouvons aussi nous demander si ces architectes exerçant en province seront aussi bien épaulé et guidé qu’à Paris ? La réponse est bien évidemment non. Ces architectes vont devoir développer une certaine autonomie s’ils veulent développer le BIM dans leur agence ou bien faire appel à un BIM manager 56. Le dernier point que nous pouvons rajouter est qu’en province, très peu de commande publique est exigé en réalisation BIM. En effet, d’après les différents points de vue recueillis, nous pouvons nous rendre compte que le sujet du BIM est mieux maîtrisé dans la capitale et qu’il faudra sûrement un certain temps pour que la France entière suive ce mouvement [Fig. 2.10].

2.3.2. Un changement qui demande de l’investissement

Les agences peuvent être sceptiques sur ce passage au BIM du fait de l’investissement aussi bien financier, qu’humain. Comme nous l’avons développé

56 1.2.1. Les missions et responsabilités du BIM manager p.22.

49

LE DEVELOPPEMENT DU BIM DANS LES AGENCES D’ARCHITECTURE EN FRANCE

alors nous demander si l’information circule bien jusque dans les villes les plus retirées de France ? Nous savons pourtant que l’Ordre envoi régulièrement des lettres d’informations aux architectes sur ce sujet. Est-ce suffisant ?


« La frilosité est liée aussi aux coûts et aux spécificités des agences d’architecture en France. On est très peu à dépasser une vingtaine de personnes en France […]. Et l’investissement que représente le passage au BIM explique un peu cette frilosité pour les petites agences » Jacques Dubois, Septembre 2016

précédemment57, il est nécessaire d’investir pour l’achat du logiciel participant au processus BIM ainsi que pour la formation. Si l’on estime le coût total du développement de la méthode de travail BIM au sein d’une agence d’architecture, en prenant en compte le coût du matériel (logiciel + ordinateur) et des formations, le passage au BIM revient à environ : « 15 000 euros par poste

LE DEVELOPPEMENT DU BIM DANS LES AGENCES D’ARCHITECTURE EN FRANCE

50

de travail la première année »58 [Fig. 2.11]. En plus de cet investissement en argent, il faut également investir du temps nécessaire à la formation et à la maîtrise du logiciel. De plus, il faut pouvoir assumer une perte de productivité pendant six mois.

Aujourd’hui en France, 80% des agences d’architecture sont des Petites et Moyennes Entreprises (PME). Le chiffre d’affaire moyen d’un architecte exerçant en libéral avec un salarié était de 154 000 euros en 201259 (en baisse depuis 2008 où le chiffre d’affaire s’élevait à 180 000 euros). Le passage au BIM pour deux personnes (nombre moyen d’architecte par agence) imposerait une diminution importante de ce chiffre d’affaire (154 000-(2x15 000) = 124 000 euros dont il faut encore soustraire la diminution des profits engendrés par la perte de productivité). Il est donc évident que l’investissement à fournir lors du passage au BIM est un frein important pour une agence de petite taille. Jacques Dubois partage ce point de vue : « La frilosité est liée aussi aux coûts et aux spécificités des agences d’architecture en France. On est très peu à dépasser une vingtaine de personnes en France […]. Et l’investissement que représente le passage au BIM explique un peu cette frilosité pour les petites agences »60. Les agences de plus grandes tailles peuvent plus facilement s’adapter lors de la mise en place du BIM. 57 2.1 Les différentes étapes de mise en place du BIM dans une agence p.38. 58 Interview d’Emmanuel Di Giacomo, Juillet 2016. En annexe p.82. 59 La profession en chiffre [en ligne] : Disponible sur : http://www.architectes.

org/la-profession-en-chiffres-0 [consulté le 24 janvier 2017]. 60 Interview de Jacques Dubois, Septembre 2016. En annexe p.107.


Moderniser leur parc informatique

Développer les process collaboratifs BIM en interne

Se former

49% 45%

38%

43%

51

41%

Développer des échanges BIM avec d’autres intervenants Moderniser leur équipement informatique mobile

[Fig. 2.11] - Catégories d’investissements prévus dans les deux ans

Acquérir les logiciels BIM

LE DEVELOPPEMENT DU BIM DANS LES AGENCES D’ARCHITECTURE EN FRANCE

34%


« Je pense que je me lancerai là-dedans à condition d’être accompagné d’un plus jeune […] ça sera le moteur qui va me permettre de me lancer dans le BIM » Bertrand Pagnoncelli, Juillet 2016

2.3.3.

Une demande de soutien

Tous les architectes interviewés sont unanimes pour dire que le virage est en train de s’opérer dans les agences mais c’est sur les jeunes que repose la véritable attente. Par jeune, nous voulons parler d’étudiants encore à l’école ou

LE DEVELOPPEMENT DU BIM DANS LES AGENCES D’ARCHITECTURE EN FRANCE

52

jeunes architectes fraichement diplômés. En effet, Bertrand Pagnoncelli nous a confié : « Je pense que je me lancerai là-dedans à condition d’être accompagné d’un plus jeune […] ça sera le moteur qui va me permettre de me lancer dans le BIM »61. De nombreux architectes ne se voient pas aborder cette nouvelle méthode de travail seul et partagent le point de vue de Bertrand Pagnoncelli : « […] comme un tandem, qui se lance dedans avec l’expérience de l’un et avec la maîtrise de l’outil informatique de l’autre »61. Les plus jeunes sont aujourd’hui formés lors de leur cursus en école d’architecture et commencent à ressortir diplômés de ces écoles avec la maîtrise de l’outil informatique et formés sur les logiciels participant au processus BIM. Les agences encore en retrait par rapport au BIM attendent ces futurs architectes déjà formés avec impatience afin qu’ils puissent les guider dans la démarche. Cette recherche de jeunes architectes déjà formés ne concerne pas seulement les agences qui ont pour objectif de développer le BIM en leur sein. En effet, les agences qui viennent de passer au BIM recherchent principalement des architectes déjà formés sur le logiciel choisi comme nous l’explique Jacques Dubois dans son interview : « […] on embauche en priorité de nouveaux collaborateurs qui sont déjà formés »62. Cela devient un critère d’embauche qui

61 Interview de Bertrand Pagnoncelli, Juillet 2016. En annexe p.115. 62 Interview de Jacques Dubois, Septembre 2016. En annexe p.107.


Recherche d’emplois CAO DAO

Agence en pleine expension

BIM MANAGER

Agence vieillissante

Recherche d’emplois

CAO DAO

[Fig. 2.12] - Arrivée d’un étudiant sur le marché du travail

laisse une grande place pour l’insertion de la jeunesse dans le monde du travail [Fig. 2.12]. Parallèlement à cette demande de soutien de la part des architectes, les jeunes vont permettre de mettre en place progressivement cette nouvelle mé-

63 Interview d’Emmanuel Di Giacomo, Juillet 2016. En annexe p.82.

53

LE DEVELOPPEMENT DU BIM DANS LES AGENCES D’ARCHITECTURE EN FRANCE

thode de travail dans les agences dans lesquelles ils vont travailler. Etant formés aux logiciels ainsi qu’à la méthode de travail, ils sont considérés par Emmanuel Di Giacomo comme « un accélérateur de « bimisation » dans les agences d’architecture »63.


Partie 3 : Un processus qui pose encore des questions chez les architectes

UN PROCESSUS QUI POSE ENCORE DES QUESTIONS CHEZ LES ARCHITECTES

54

La méthode de travail BIM est utilisée dans de nombreux pays tels que la

Finlande, pays dans lequel le BIM (IFC) est obligatoire depuis le 1er octobre 2007 ; la Norvège, dont la maquette numérique y est obligatoire depuis 2010 ou encore plus largement l’Asie, Singapour, la Corée du Sud et Hong Kong considérés aujourd’hui comme des précurseurs64. Comme la France, l’Allemagne en est aussi à ses débuts mais possède tout de même comme objectif « la création d’une structure dédiée au BIM, développée sur fonds privés »64. Plus proche géographiquement, nous retrouvons nos voisins anglais qui pour eux, le BIM est déjà bien installé. Le BIM niveau 2 y est obligatoire depuis Janvier 2016 pour tout marché public avec un investissement supérieur à 5 millions de GBP (livre sterling). Ce processus collaboratif se développe parfaitement dans les pays voisins, devrait-il en être de même pour la France ? Le scepticisme de certaines agences d’architecture n’est pas anodin. Malgré le fait que le BIM soit parfaitement installé dans d’autres pays, les Français s’interrogent encore sur l’adaptation de la totalité du processus à notre manière de faire traditionnelle.

64 DELCAMBRE Bertrand, Décembre 2014. Mission Numérique Bâtiment. Paris,

54p.


Objectifs

Solution

20% coûts BIM NIVEAU 2 OBLIGATOIRE CO2

20% émissions de carbone

Bâtiments publics > 5 millions GBP

[Fig. 3.1] - Objectifs et solution proposés par l’Angleterre pour résoudre les difficultés rencontrées dans le domaine du bâtiment

3.1. La dynamique du BIM chez les anglo-saxons Nos voisins anglo-saxons sont en perpétuelle recherche de progrès dans le domaine du BIM. Ceci découle d’une dynamique lancée par le gouvernement en 2011. Depuis, les nombreux acteurs du bâtiment sont en quête d’améliora-

3.1.1. Quelques chiffres

En Angleterre, l’obligation d’utiliser la méthode de travail BIM en 2016 provient d’un vaste chantier BIM proposé en Mai 2011 lors d’un rapport sur la stratégie du secteur de la construction65. L’objectif de ce dernier était de réduire de 20% les coûts liés aux constructions neuves ainsi que les émissions de carbone de ces dernieres. L’obligation du BIM niveau 266 en 2016 pour les bâtiments publics dont l’investissement est supérieur à 5 millions de livres sterling est la solution proposée par le gouvernement afin d’atteindre les objectifs fixés [Fig. 3.1]. En 2012, à la suite d’une enquête annuelle réalisée sur le BIM, nous avons constaté que déjà 43% des personnes interrogées utilisaient la méthode de travail BIM. Sur les 57% restant, ils étaient tout de même 93% à vouloir l’utiliser dans les cinq ans67. Aujourd’hui, Jon Kerbey, responsable de la maquette 65 « Rapport national NBS BIM 2014 ». NBS [en ligne] : Disponible sur :

https://www.thenbs.com/knowledge/nbs-national-bim-report-2014 [consulté le 20 décembre 2016]. 66 1.1.2 Le travail collaboratif au sein de l’agence p.18. 67 HOVORKA Frank, MIT Pierre, mars 2014. Un avatar numérique de l’ouvrage et du patrimoine au service du bâtiment durable : le « Bâtiment et Informations Modélisés » (BIM) Tome 1 : rapport et proposition, Plan Bâtiment durable. Paris, 64p.

55

UN PROCESSUS QUI POSE ENCORE DES QUESTIONS CHEZ LES ARCHITECTES

tion du processus afin de se placer comme pays leader du BIM. Des enquêtes en Angleterre, nous permettent également de pouvoir évaluer les avantages qu’offre la méthode de travail en termes de temps et de coûts. Ainsi nous pourrions en déduire que le processus ne peut qu’être bénéfique pour la France ? Cependant, le modèle français de la construction n’est pas similaire au système anglais.


« Au Royaume-Uni, tous les acteurs ont désormais une très bonne connaissance du BIM » Julie Guérineau, Janvier 2015

numérique pour le projet de la ligne britannique à grande vitesse qui reliera Londres à Birmingham, Manchester et Leeds nous explique qu’ : « Au RoyaumeUni, tous les acteurs ont désormais une très bonne connaissance du BIM »68. Les professionnels britanniques ont réagi très vite face à ce processus collaboratif. Depuis 2012, le gouvernement britannique estime qu’il a économisé plus d’1,7 milliards de livres sterling. Egalement, plus de 66% des projets réalisés en BIM sont livrés à temps ainsi qu’en respectant le budget contre seulement 33% en 201069. En 2013, le gouvernement a rajouté comme objectifs de réduire les coûts de construction de 33% et les délais de livraison de 50% d’ici à 202568.

UN PROCESSUS QUI POSE ENCORE DES QUESTIONS CHEZ LES ARCHITECTES

56

En 2014, NBS a publié un rapport70 qui montre comment les professionnels anglais ont réagi face au déploiement du BIM. Quelques chiffres clés nous permettent d’observer ce dernier. En 2014, 54% des personnes interrogées utilisent le BIM (contre 43% en 2012) avec seulement 5% de professionnels qui n’ont toujours pas entendu parler du BIM. Ce rapport conclu sur le fait que la conscience BIM devient universelle et que les professionnels sont de plus en plus à l’aise avec le BIM (46% en 2013 contre 35% en 2012 sur leur panel interviewé)[Fig. 3.2]. Aujourd’hui encore, le Royaume-Uni réfléchit à de nouvelles solutions pour simplifier le processus collaboratif. Comme nous l’annonce le Moniteur : « le Royaume-Uni travaille sur une extension de l’usage de la maquette numérique aux phases de financement et d’opération des bâtiments et infrastructures, en impliquant les banques et organismes financiers dans le processus. Le pays planche également sur la mise en place d’un nouveau système d’appels d’offres en BIM en temps réel pour favoriser la transparence de l’attribution des marchés »68. 68

GUERINEAU, Julie, Janvier 2015. BIM : les anglais ont tiré les premiers. Le moniteur [en ligne]. Disponible sur : http://www.lemoniteur.fr/articles/bimles-anglais-ont-tire-les-premiers-26830882 [consulté le 20 décembre 2016]. 69 d’après Construction news. 70 « Rapport national NBS BIM 2014 ». NBS [en ligne] : Disponible sur : https://www.thenbs.com/knowledge/nbs-national-bim-report-2014 [consulté le 20 décembre 2016].


We use BIM In 1 year

we will use BIM

2010 2011 2012 2013

In 3 years

we will use BIM

Not aware

Aware

Using

« For the design team, there are cleat benefits of collaboration, visualisation, coordination and information retrieval. This readily translates into increased cost efficiencies and profitability.»

« In spite of its expense, the benefits we have gained through its use have more than paid for this initial investment. Smalll practices should invest in BIM or risk being left behind. »

« The Government will require fully collaborative 3D BIM as a minimum by 2016 » Government construction strategy 2011

Do you use IFC ?

Do you generate COBie ?

« IFC, as a platformneutral, open file format, allows models to be shared among the design team, irrespective of software choices.»

« Although as a company we have adopted BIM and are slowly understanding IFC and COBie, there is still a long way to go. »

Attitudes towards BIM : Comparing those who use it, and those who don’t BIM brings cost efficiencies

BIM increases co-ordination

BIM requires workflow change

I’d rather not adopt/ wish we hadn’t adopted BIM

21% nonBIM

Confidence How confident are you in your BIM knowledge and skills ?

[Fig. 3.2] - Sondage sur le BIM en Angleterre proposé par NBS

4% BIM

UN PROCESSUS QUI POSE ENCORE DES QUESTIONS CHEZ LES ARCHITECTES

57


[Fig. 3.3] - Page d’accueil du site internet du BIM Task Group

3.1.2. Une mise en place du BIM différente de la nôtre

Dans la théorie, la mise en place du BIM devrait se développer de la même manière en Angleterre et en France ce qui nous assurerait d’obtenir des résultats intéressants et de manière rapide. Cependant, nous allons voir quelques points divergents entre les deux pays au niveau du processus en lui-même qui pourraient justifier le scepticisme de certains professionnels français.

UN PROCESSUS QUI POSE ENCORE DES QUESTIONS CHEZ LES ARCHITECTES

58

Dans la pratique, le gouvernement britannique est vraiment très présent et soutien les avancées dans le domaine de la recherche sur le BIM. Ce dernier insiste très largement sur la collaboration entre les métiers d’où la mise en place du « BIM Task Group » par le cabinet du premier ministre qui réunit tous les acteurs du BTP comprenant aussi bien les ministères concernés que les architectes, les ingénieurs etc [Fig. 3.3]. Ils travaillent ensemble afin de proposer une méthode de travail efficace. En France, le BIM n’est pas obligatoire contrairement à l’Angleterre. C’est le rapport Delcambre qui nous guide vers le BIM avec la mise en avant de quatre axes structurants concernant la motivation des différents acteurs ; le besoin de s’équiper, et plus particulièrement pour les TPE/PME qui risquent de rencontrer des problèmes de financement71 ; le développement des outils ainsi que l’installation d’une confiance dans l’écosystème. La France cible donc également l’aspect collaboratif avec l’Etat qui doit : « jouer un rôle pilote »72, soutenu par l’industrie du logiciel. Cependant, l’Etat français ne donne que les principales directions à suivre dans un rapport comportant encore de nombreuses incertitudes.

En plus de ce soutien de la part du gouvernement, réel moteur du BIM

71 3.3 Une pression importante pour les petites agences (TPE/PME) p.67. 72 DELCAMBRE Bertrand, Décembre 2014. Mission Numérique Bâtiment. Paris,

54p.


[Fig. 3.4] - Organisation d’un fichier COBie

pour les agences, les anglo-saxons utilisent des fichiers COBie73 (Construction Operations Building information exchange)[Fig. 3.4]. Ce sont des fichiers d’échanges destinés soit aux bureaux d’étude, soit à la maîtrise d’ouvrage basés sur les définitions de l’IFC 74. Ce format a la spécificité de concentrer essentiellement des informations non graphiques pouvant ressembler à une

3.1.3. Un tissu différent entre le monde de la construction anglo-saxon et français

Lors des interviews réalisées, les nombreux professionnels mettent en avant un tissu différent entre le monde de la construction français et celui des anglo-saxons [Fig. 3.5]. Olivier Celnik nous explique que : « On sait que dans les pays anglo-saxons, on a de grosses structures de maîtrise d’œuvre, des agences d’architecture de 50 ou 200 personnes […]. Le schéma n’est pas du tout le même en France »75. Comme nous l’avons cité dans le paragraphe précédent, les britanniques travaillent de manière collaborative pour le développement

73 Voir glossaire p.130. 74 1.1.3. L’interopérabilité p.20. 75 Interview d’Olivier Celnik, Juillet 2016. En annexe p.97.

59

UN PROCESSUS QUI POSE ENCORE DES QUESTIONS CHEZ LES ARCHITECTES

feuille Excel. D’ailleurs, le fichier peut être échangé aux formats Excel ou XML. Ce format d’échange ne fait pas l’unanimité au Royaume-Uni car il met totalement de côté l’idée de maquette 3D contenant des informations clés. Le format COBie vulgarise des données structurées sous la forme d’un simple tableau. Un projet modeste peut facilement atteindre 600 000 lignes d’informations ce qui pose également des problèmes de lecture du fichier à cause de son poids. La France, quant à elle, échange ses documents au format IFC, permettant de conserver aussi bien une maquette 3D que les nombreuses informations qui s’y rattachent 74.


- BIM task Group - COBie - Structures composées d’architectes et d’ingénieurs

BIM NIVEAU 2 OBLIGATOIRE

- PTNB - IFC - 80% de petites structures

= PROCESS BIM EN COURS

Bâtiments publics >5 millions GBP

[Fig. 3.5] - Différences de mise en place du BIM entre l’Angleterre et la France

du BIM mais également au sein de grandes structures mêlant architectes et ingénieurs ce qui facilite aussi bien l’échange des fichiers que l’amortissement des coûts induits par le passage au BIM. Parallèlement à cela, en France, 80% des agences sont des Très Petites Entreprises (TPE)(inférieur à 10 personnes) et des Petites et Moyennes Entreprises (PME)(10 à 20 personnes). Ce profil

UN PROCESSUS QUI POSE ENCORE DES QUESTIONS CHEZ LES ARCHITECTES

60

complique considérablement les échanges avec les bureaux d’étude qui ne font pas partie de la même structure et possèdent alors un niveau de maturité différent76. Cela complique également l’amortissement des frais du passage au BIM.

76 1.1.2. Le travail collaboratif au sein de l’agence p.18.


BIM

?

PROBLEME 01 :

PROBLEME 02 :

PROBLEME 03 :

Ne pas s’emparer du BIM

Risque standardisation

Responsabilité de la maquette

[Fig. 3.6] - Un processus qui pourrait nuire aux architectes

3.2.

Un processus qui pourrait nuire au métier d’architecte

Dans les interviews réalisées, nous pouvons comprendre que le BIM effraie la profession. Certaines agences se sont emparées de cette nouvelle méthode de travail malgré leur craintes tandis que d’autres attendent d’être guidées et soutenues dans la démarche. Ils sont cependant unanimes pour dire que le BIM peut, dans certains cas, nuire au métier d’architecte [Fig. 3.6].

3.2.1. Ne pas s’emparer du processus

L’un des risques récurrent cité lors des interviews est le fait de ne pas s’emparer du processus BIM. De nombreux architectes ne prennent pas conscience des avantages que propose cette nouvelle méthode de travail et restent figés sur leurs habitudes sans même évaluer les risques pour leur profession. Si les architectes ne s’emparent pas du processus, quelqu’un d’autre le fera à leur place. Ainsi la profession aura de moins en moins de pouvoir sur la réalisation des bâtiments et devra abandonner la qualité artistique de ce dernier par manque de maîtrise du projet. Comme nous l’a confié Emmanuel Di Giacomo dans son interview : « Les entreprises de construction et les ingénieurs, petit à petit, auront de plus en plus de pouvoir et l’architecte n’aura plus qu’à acquiescer les propositions qu’on va lui faire »77. Jacques Dubois partage ce point de vue malgré un avis plutôt mitigé sur le BIM : « […] si on veut garder la maîtrise du projet, si on ne veut pas lâcher la propriété intellectuelle de ce projet sur le côté auteur, qui fait partie aussi de nos attributions, ça veut dire qu’on est obligé de passer par le BIM, on est obligé de maîtriser le BIM »78.

77 Interview d’Emmanuel Di Giacomo, Juillet 2016. En annexe p.82. 78 Interview de Jacques Dubois, Septembre 2016. En annexe p.107.

UN PROCESSUS QUI POSE ENCORE DES QUESTIONS CHEZ LES ARCHITECTES

61


« Quand on est capable de dire à un économiste : « il y a pas 30 % de matériaux en plus comme tu me l’annonces mais il y en a 20 en moins » quand on est capable d’estimer le coût d’un projet, [...] on est en position de force » Emmanuel Di Giacomo, Juillet 2016

Certains architectes pensent cependant que la gestion de la maquette numérique ne doit pas être rajoutée à l’architecte. Chloé Edler, nous a fait part de son point de vue sur le sujet : « L’architecte doit garder son rôle d’architecte et il ne doit pas être un BIM manager et regrouper toutes les fonctions de maquettiste numérique, gérer les bureaux d’études, s’ils ont bien modélisé leur travail

UN PROCESSUS QUI POSE ENCORE DES QUESTIONS CHEZ LES ARCHITECTES

62

[…] »79. Dans son point de vue, nous comprenons qu’un architecte a déjà de nombreuses responsabilités et très peu de temps et que la maquette numérique ne serait qu’un poids supplémentaire.

Cependant, en s’emparant de cette nouvelle méthode de travail BIM, en faisant l’effort de gérer la maquette numérique, l’architecte va ainsi se replacer au centre du projet. Grâce à la maquette numérique, il va pouvoir maîtriser la totalité du projet avec une gestion des quantités et des coûts qui vont lui permettre d’anticiper et se placer en « position de force »80 lors de la réalisation d’un ouvrage. C’est un effort à faire de la part des agences pour que l’architecte ne soit pas relayé au second plan.

3.2.2. Le risque d’une standardisation

La formation des architectes provient initialement de la formation des Beaux-Arts durant laquelle étaient enseignée des travaux manuels aux futurs architectes81. Tout était réalisé à la main ce qui apportait une grande liberté aux créateurs. Avant l’arrivée de l’ordinateur dans les agences en 1980, chaque architecte possédait une identité personnelle lors de la réalisation des documents techniques (plans, coupes, perspectives …). Aujourd’hui, certains d’entre

79 Interview de Chloé Edler, Juillet 2016. En annexe p.124. 80 Interview d’Emmanuel Di Giacomo, Juillet 2016. En annexe p.82. 81 Voir introduction p.8.


[Fig. 3.7] - Dessin à la main avant l’arrivée de l’ordinateur

eux pensent que l’arrivée de l’informatique est la cause d’une perte de créativité. De plus, ils craignent une standardisation dans le métier d’architecte avec l’arrivée du BIM comme nous l’explique Fabrice Theis dans son interview : « Avoir une liberté d’expression, de création, le flou artistique qui fait quand même partie de notre mentalité au départ […]. On a un petit côté créatif qui

Toujours d’après le panel d’architecte interviewé, le BIM pourrait nuire au métier si par manque de maîtrise du logiciel, l’architecture créée est simplifiée à l’extrême par de simples « copier-coller » du projet précédent. Comme nous l’explique Jacques Dubois : « Le projet doit évidemment être prioritaire sur toute autre considération […] la complexité du logiciel que nous utilisons en BIM, fait qu’on pourrait être tenté de prendre les raccourcis les plus usuels par rapport à l’utilisation de ce logiciel […] »85.

De plus, les sites internet « bim object » 86 ou « Polantis »87 proposent une

82 Interview de Fabrice Theis, Juillet 2016. En annexe p.121. 83 Interview de Bertrand Pagnoncelli, Juillet 2016. En annexe p.115. 84 Interview de Chloé Edler, Juillet 2016. En annexe p.124. 85 Interview de Jacques Dubois, Septembre 2016. En annexe p.107. 86 BIM Object [en ligne] : Disponible sur : http://bimobject.com/fr [consulté le

3 Janvier 2017]. 87 Polantis [en ligne] : Disponible sur : https://www.polantis.com/fr/ [consulté le 3 Janvier 2017].

63

UN PROCESSUS QUI POSE ENCORE DES QUESTIONS CHEZ LES ARCHITECTES

peut aussi s’exprimer par le coup de crayon. Et là, j’ai l’impression que le coup de crayon s’est un peu robotisé et matérialisé de façon mécanique ou artificielle »82 [Fig. 3.7]. Bertrand Pagnoncelli partage ce point de vue et rajoute que « la main est la manière la plus rapide et efficace pour retranscrire une idée »83. Chloé Edler pense même que le BIM « formate la pensée »84. Il est vrai que dans la formation actuelle, le dessin à la main est totalement mis de côté dans certains ateliers car les professeurs privilégient l’ordinateur. Cependant, certains d’entre eux se battent afin que le dessin puisse rester dans notre savoir-faire et être utilisé lors de la partie créative d’un projet même si au final la totalité des documents graphiques sont faits à l’ordinateur.


[Fig. 3.8] - Pages d’accueil des sites internet Bimobject et Polantis, bibliothèques BIM

bibliothèque d’objet BIM en ligne. Ces dernières contiennent des milliers de familles de produits, et d’objets BIM paramétriques issus de catalogues des fabricants et mis à disposition des professionnels du bâtiment [Fig. 3.8]. Les téléchargements y sont gratuits et permettent ainsi de compléter la bibliothèque présente dans le logiciel participant au processus BIM. Cependant, seuls les

UN PROCESSUS QUI POSE ENCORE DES QUESTIONS CHEZ LES ARCHITECTES

64

produits phares des fabricants les plus connus sont répertoriés sur ce site pour l’instant. Ainsi tous les utilisateurs BIM vont utiliser les mêmes objets pour les phases de conceptions ce qui risque de standardiser les chantiers réalisés par les professionnels. Nous pouvons même aller plus loin en disant que les petites entreprises qui ne seraient pas présentes sur le site, risquent de perdre une part de marché considérable.

3.2.3. La responsabilité de la maquette numérique

Grâce à la méthode de travail BIM, l’ensemble d’une équipe est acteur de la création de la maquette numérique. Emmanuel Di Giacomo parle même d’une « modification totale des équilibres et notamment du pouvoir »88. Avec l’utilisation des logiciels CAO/DAO, nous retrouvions un chef de projet guidant un ou plusieurs dessinateurs. Le BIM efface cette hiérarchie et permet à l’ensemble d’une équipe d’intervenir sur les maquettes numériques. Se posent alors des questions de traçabilité, de responsabilité ou encore de droit d’auteur. La traçabilité est nécessaire en cas d’erreur de l’un des membres de l’équipe sur la maquette numérique et qui pourrait provoquer un sinistre dans la future construction. La traçabilité permettrait d’établir des responsabilités. Les droits de propriété intellectuels de la maquette font référence aux nombreux échanges

88 Interview d’Emmanuel Di Giacomo, Juillet 2016. En annexe p.82.


Définir le contexte du projet Identifier les objectifs généraux du donneur d’ordre Convertir en objectif BIM Transcrire les objectifs BIM en usages BIM Définir l’équipe BIM Définition du périmètre du BIM Management Règles de modélisation Etablissement du processus BIM Définition des Infrastructures numériques

[Fig. 3.9] - Démarche générale de rédaction d’une convention BIM

de données entre les bureaux d’étude mais aussi avec la maîtrise d’ouvrage, qui permettrait facilement de reproduire des données sur le court et le long terme. L’architecte doit donc porter la plus grande attention à la confidentialité de son travail au début de chaque projet.

La convention fait également référence aux usages BIM [Fig. 3.10] qui correspondent à une description du processus en lien avec des pratiques BIM mises en place pendant un projet. Cela permet d’avoir une description des usages souhaités pour la maquette numérique ou encore des interactions entre les acteurs du projet et la base de données. Ces usages peuvent évoluer d’un

89 Voir glossaire p.130. 90 « Guide méthodologique pour des conventions de projets en BIM », avril

2016. Médiaconstruct, 50p.

65

UN PROCESSUS QUI POSE ENCORE DES QUESTIONS CHEZ LES ARCHITECTES

C’est pourquoi, il est préférable d’établir un Plan d’exécution du projet ou convention BIM89 nommé PxP aux Etats-Unis. Celui-ci a pour objectif de définir les priorités, les politiques et les procédures à respecter lors d’une collaboration BIM. Ce plan permet une plus grande compréhension du rôle de chaque intervenant et favorise la réussite du projet par la mise en place de bases solides nécessaires à la collaboration. Médiaconstruct, chapitre français de Building Smart, met à disposition un guide méthodologique afin de rédiger une convention BIM90 sur un projet. Ce dernier propose une démarche composée de neuf étapes [Fig. 3.9]. Celles-ci s’orientent vers la présentation du projet avec le planning de son avancement, de sa localisation ou encore des intervenants ; mais également vers la définition des objectifs BIM pour le projet, ainsi que l’équipe BIM avec le rôle et le niveau de maturité de chacun. La convention permet aussi de mettre en place des règles de collaboration au sein du processus BIM ou encore la définition des infrastructures numériques utilisées.


Définitions des objectifs BIM

Choix des usages BIM génériques :

Usage BIM 01 : Programmation

Description du PROJET

Objectif BIM 1

Usage BIM XXX Usage BIM 07 :

Objectif BIM 2

Etudes analytiques (structure...)

Objectif BIM 3

Gestion de conflits à partir de maquettes numériques

Objectif BIM ...

Usages BIM non choisi

Usage BIM 10 :

Rédaction des processus projet : Processus de contrôle du programme en maquette numérique Processus d’analyse Réglementation Thermique en maquette numérique Processus d’analyse de comportement structurel en maquette numérique Processus coordination technique en maquette numérique

Usage BIM XXX Usage BIM 05 : Revue de projet

Processus à intégrer à la convention BIM

Processus de réservations GC en maquette numérique Processus de contrôle de qualité chantier

[Fig. 3.10] - Exemple de démarche pour le choix et la rédaction de vos processus à intégrer à la convention BIM

projet à l’autre en fonction du retour d’expérience. La convention permet aussi de mettre en place des règles de modélisation avec des classifications et des codifications de données précises. Cette standardisation est nécessaire lors de la collecte et du traitement de données ou de documents sur le long terme. En effet, le fait de structurer ses données de la

UN PROCESSUS QUI POSE ENCORE DES QUESTIONS CHEZ LES ARCHITECTES

66

même manière au sein d’une équipe permet une meilleure organisation et ainsi un gain de temps. De plus, pour chaque modèle, il est recommandé de ne pas dépasser une taille maximale de fichier. Si c’est le cas, une segmentation du découpage doit être précisée dans la convention BIM. Pour finir, c’est également au sein de cette convention BIM que va être précisé le système commun de coordonnées, l’orientation, les unités de mesure ou encore le niveau de détail et d’informations choisi pour le projet. Pour chaque projet, une nouvelle convention doit être rédigée. Ce guide méthodologique est propre à la manière de faire française qui s’inspire du « National BIM Standard » (NBIMS) ou Plan d’exécution de projet BIM standard version 2.1, élaboré à Penn State University 2 en Pennsylvanie91 et approuvé par l’« Institute for BIM » au Canada (IBC) et buildingSMART Alliance (bSa).

91 DICKINSON John, Septembre 2014. BIM PxP: Knowing the execution plan

essentials. Construction Canada [en ligne]. Disponible sur : http://www. constructioncanada.net/bim-pxp-knowing-the-execution-plan-essentials/ [consulté le 21 décembre 2016].


« Les TPE/PME sont moins avancées que les grands groupes dans la pratique de la maquette numérique. Elles se heurtent à deux difficultés principales : les compétences et l’équipement (matériel et logiciel). » Bertrand Delcambre, Décembre 2014

3.3.

Une pression importante pour les petites agences (TPE/PME)

Comme l’ont démontrés les paragraphes précédents, les plus impactés par le BIM sont les plus petites agences qui ont du mal à supporter l’investissement

3.3.1. Une attention particulière dans le rapport Delcambre

L’Etat français était conscient dès le début que la démarche allait être plus compliquée pour les petites agences. C’est pourquoi, dans son rapport Mission Numérique du Bâtiment92, Bertrand Delcambre s’adresse également aux plus petites structures qui sont « moins avancées que les grands groupes dans la pratique de la maquette numérique »92 et qui « se heurtent à deux difficultés principales : les compétences et l’équipement (matériel et logiciel) »92. Ce dernier précise bien que les petites structures doivent bénéficier de conditions adaptées. Nous pouvons comprendre par là que les vendeurs de logiciels doivent être en mesure de proposer des accompagnements adaptés.

92 DELCAMBRE Bertrand, Décembre 2014. Mission Numérique Bâtiment. Paris,

54p.

67

UN PROCESSUS QUI POSE ENCORE DES QUESTIONS CHEZ LES ARCHITECTES

imposé par le processus. De nombreuses agences se trouvent même dans des situations périlleuses sans même avoir mis en place le BIM comme nous l’a expliqué Bertrand Pagnoncelli qui était, en juillet 2016, proche du dépôt de bilan. Cependant, Emmanuel Di Giacomo nous a clairement expliqué que les agences qui ne passeraient pas au BIM sont vouées à disparaître. Comment conjuguer conjoncture actuelle difficile avec le développement d’une nouvelle méthode de travail qui demande de l’investissement ?


« Encourager et démultiplier les formules de formation continue » « Développer toute une panoplie d’outils de formation en ligne » « Promouvoir les programmes d’apprentissage de ces outils dans une formation initiales du monde du bâtiment » [Fig. 3.11] - Les différentes pistes de l’Etat pour les TPE/PME

« Soutenir les initiatives de plateformes collectives »

Différentes actions sont mises en places afin d’inciter les petites agences à franchir le pas. Mr Delcambre souhaite « encourager et démultiplier les formules de formation continue »92 afin de se laisser le temps de maîtriser les méthodes de travail BIM de manière encadrée avec d’autres apprenants ; « développer toute une panoplie d’outils de formation en ligne » 92 permettant

UN PROCESSUS QUI POSE ENCORE DES QUESTIONS CHEZ LES ARCHITECTES

68

de se former sur son temps libre chez soi, à son rythme et ainsi acquérir des notions importantes ; « promouvoir les programmes d’apprentissage de ces outils dans une formation initiales du monde du bâtiment » 92 dans le but de sensibiliser au BIM au début de chaque formation d’un métier du Bâtiment et Travaux Publics (BTP) ; et « soutenir les initiatives de plateformes collectives »92 afin de pouvoir mutualiser ses ressources avec un confrère et ainsi investir plus aisément dans le processus BIM [Fig. 3.11]. Ces étapes sont pour l’instant de simples pistes pour l’Etat qui n’ont pas encore été mises en place. Aujourd’hui, nous pouvons tout de même fait le lien avec l’ENPC (Ecole Nationale des Ponts et Chaussées) et l’ESTP (Ecole Spéciale des Travaux Publics) qui proposent une formation continue dans le cadre de son mastère spécialisé BIM. De plus, des plateformes internet comme « Elephorm » proposent des formations en ligne payantes.

3.3.2. De petites agences qui se démarquent

Les difficultés financières ne concernent heureusement pas la totalité des petites agences françaises. Grâce aux nombreuses rencontres de professionnels, nous pouvons nous rendre compte que la taille de l’agence n’est pas forcément

92 DELCAMBRE Bertrand, Décembre 2014. Mission Numérique Bâtiment. Paris,

54p.


[Fig. 3.12] - Projet de logements à Levallois-Perret réalisé sur ArchiCad par l’agence Z.Studio

[Fig. 3.13] - Modélisation BIM du Louvre des Antiquaires à Paris sur Revit par l’agence Sona

synonyme de facilité dans la mise en place du processus. Tout d’abord, il semblerait que les agences interviewées sur Paris sont toutes très attentives à ce que propose cette nouvelle méthode de travail. Prenons l’exemple de l’agence d’Olivier Celnik. Celle-ci nous montre l’exemple avec le développement du BIM dans son agence Z. Studio avec l’utilisation d’ArchiCad dès sa création en 1996.

Emmanuel Di Giacomo a également parlé de petites agences qui se sont parfaitement épanouies avec le BIM. Reprenons son exemple de l’agence SONA, créée en 2014 à Nantes composée de Pierre Navara, Emmanuel Sorin. Ils travaillent actuellement sur le logiciel Revit ce qui leur permet d’être rapide et efficace [Fig. 3.13]. Emmanuel Di Giacomo rajoute même qu’: « ils ont été suffisamment intelligents et visionnaires pour passer sur des processus BIM et passer sur des outils comme Revit qui leur apporte une véritable compétitivité […] »94. Les deux exemples prouvent qu’il est tout de même possible pour une petite agence de supporter le coût de l’investissement imposé par le BIM. Cependant, nous devons nuancer nos propos. Il est important de remarquer que ces petites agences évoluent en milieu urbain. Reprenons le discours de

93 Interview d’Olivier Celnik, Juillet 2016. En annexe p.97. 94 Interview d’Emmanuel Di Giacomo, Juillet 2016. En annexe p.82.

69

UN PROCESSUS QUI POSE ENCORE DES QUESTIONS CHEZ LES ARCHITECTES

L’agence a tout de suite développé son travail autour de la maquette numérique93 [Fig. 3.12]. Aujourd’hui, en plus de développer leurs projets avec la méthode de travail BIM, ils proposent d’accompagner leurs confrères dans la mise en place de la maquette et du processus. De plus, Olivier Celnik est très engagé dans la démarche puisqu’il est lui-même co-directeur du mastère spécialisé BIM proposé par l’ENPC et l’ESTP.


SOLUTION 01 :

SOLUTION 02 :

SOLUTION 03 :

Fusionner des agences

Révision des lois françaises

Reconversion professionnel

[Fig. 3.14] - Solutions de replis pour les TPE/PME

Bertrand Pagnoncelli, agence présente dans une petite ville de l’Est de la France : « Aujourd’hui, on est plus qu’à deux pour des raisons toutes bêtes. C’est que localement, la commande s’est raréfiée et surtout on subit la conséquence des cabinets parisiens et des cabinets strasbourgeois »95. Nous pouvons donc

70

en déduire que les plus petites agences d’architecture issus de province vont devoir user d’ingéniosité pour survivre. Un véritable clivage existe entre les agences d’architecture en ville et celles présentes en province.

3.3.3. Des solutions de replis pour les agences en situation fragile

UN PROCESSUS QUI POSE ENCORE DES QUESTIONS CHEZ LES ARCHITECTES

Cette révolution dans le monde de la construction ne doit pas être un échec. Il est possible d’envisager différentes solutions afin de franchir les étapes qu’impose le processus BIM [Fig. 3.14]. La première direction envisageable par les agences d’architecture françaises seraient de s’agrandir afin d’être plus compétitives sur le marché et ainsi de se rapprocher du modèle anglo-saxon. Comme nous l’explique Olivier Celnik : « On sent que les agences doivent grossir un petit peu, doivent se fédérer […] »96. Ce regroupement permettrait de supporter plus facilement l’investissement imposé par le passage au BIM. Jacques Dubois amène quant à lui un questionnement complémentaire : « […] le BIM est un instrument parfaitement adapté à une méthodologie anglo-saxonne. Notre méthodologie est calquée sur la loi MOP [Maîtrise d’Ouvrage Publique]. Cette loi devrait être toilettée, voire remaniée, totalement

95 Interview de Bertrand Pagnoncelli, Juillet 2016. En annexe p.115. 96 Interview d’Olivier Celnik, Juillet 2016. En annexe p.97.


« […] le BIM est un instrument parfaitement adapté à une méthodologie anglo-saxonne. Notre méthodologie est calquée sur la loi MOP. Cette loi devrait être toilettée, voire remaniée, totalement restructurée pour que l’utilisation du BIM soit réellement efficace et intéressante » Jacques Dubois, Septembre 2016

restructurée pour que l’utilisation du BIM soit réellement efficace et intéressante »97. L’intervention de l’Etat est alors nécessaire afin de proposer une base solide pouvant accueillir des méthodes BIM.

Dans ces différents cas, nous comprenons bien que le modèle français n’est pas totalement en adéquation avec la méthode de travail BIM. Un réaménagements de nos manières de faire actuelles est nécessaire sous peine de voir fermer un grand nombre de petites agences d’architecture.

97 Interview de Jacques Dubois, Septembre 2016. En annexe p.107. 98 1.3.3. Le BIM et le patrimoine p.33.

71

UN PROCESSUS QUI POSE ENCORE DES QUESTIONS CHEZ LES ARCHITECTES

L’une des dernières solutions pour les architectes proches du dépôt de bilan est de s’orienter vers le patrimoine en lien avec la notion de BIM. En effet, avec la volonté de l’Etat de numériser la totalité des constructions du patrimoine français, une réelle opportunité s’ouvre sur la modélisation 3D réalisée par drone ou par scanner 3D98. Cette reconversion permettrait aux architectes de faire un premier pas vers le BIM.


72

Conclusion


L’ensemble des interviews réalisées avec les professionnels de la construction ont profondément nourris ce mémoire. Nous avons pu voir, grâce à leurs témoignages, les différentes approches mises en place par les agences afin

On le constate, la France est en retard sur le développement du processus BIM. Ceci est dû à des agences françaises encore sceptiques par ce qu’impose cette révolution. L’investissement nécessaire, le manque de connaissance sur le processus ainsi que la peur de la complexité de l’outil informatique sont des freins au déploiement du BIM dans l’hexagone. De plus, le BIM pose encore de nombreuses questions d’adaptation au tissu de la construction français qui

73

CONCLUSION

d’utiliser le BIM. Nous avons pu comprendre que de simples connaissances sur le fonctionnement du processus ne suffisent pas à le maîtriser. La mise en place du BIM dans leur agence a nécessité, pour chacun d’eux, un accompagnement de la part de spécialistes. Il faut également prendre en compte différentes étapes à suivre lors de son installation. Elles permettent d’éviter des erreurs qui font perdre du temps ainsi que de l’argent et facilite le passage du CAO/DAO au BIM. Il est primordial de comprendre que cette nouvelle méthode de travail repose avant tout sur l’humain ainsi que sur des notions de collaboration et d’échange. La maquette numérique est quant à elle un outil à la collaboration. Le processus BIM étant encore nouveau, il n’existe que peu de témoignages de la part de professionnels sur le passage d’une agence au BIM. Ces interviews permettent d’appréhender plus sereinement ce changement de méthode de travail grâce aux différents points de vue des profesionnels.


est différent du tissu anglo-saxon, dans lequel le processus permet déjà d’atteindre des objectifs fixés par le gouvernement. Il est donc nécessaire que le système français s’adapte à cette nouvelle méthode de travail. Différentes solutions se présentent alors comme l’évolution des lois régissant la construction française ou encore le regroupement d’agences. En effet, 80% des agences

CONCLUSION

74

d’architectures françaises sont aujourd’hui des PME qui peuvent difficilement supporter le coût de l’investissement nécessaire au développement du BIM. Nous pouvons également ajouter, d’après les différentes interviews, que le clivage s’accroit entre les agences d’architecture présentes en milieu urbain et les agences de province. Ces dernières se sentent nettement moins concernées par le BIM et sont aujourd’hui trop petites pour pouvoir faire partie du mouvement qui est en marche. Les grandes structures ne rencontrent pas de grandes difficultés à passer au BIM. Cependant, de véritables interrogations se posent pour les nombreuses petites agences françaises. Il serait intéressant de poursuivre ce travail dans le cadre d’une HMONP (l’Habilitation à exercer la Maîtrise d’Ouvre en son Nom Propre) en intégrant une agence d’un ou deux architectes qui souhaite passer au BIM. L’objectif de cette intervention serait de se rendre compte de la quantité de marchés public proposés par les villes en dehors de Paris, s’ils sont demandés en BIM, mais aussi d’évaluer les chances d’investissements de l’agence dans un processus BIM. Le but final serait alors d’accompagner l’agence dans son passage au BIM.


CONCLUSION

75


76

Annexe


Les interviews : ●

Pourquoi ?

Dans le cadre de ce mémoire, il m’a semblé important de me tourner vers les professionnels du bâtiment et plus particulièrement les architectes. Selon moi, ils sont les seuls à pouvoir aborder le sujet de manière réaliste et honnête. Les différentes revues déjà lues ainsi que BIM World 2016 me semblait trop utopistes pour pouvoir y fonder un point de vue. De plus, mon objectif premier était de pouvoir écrire un mémoire qui puisse servir à sensibiliser les futures agences souhaitant passer au BIM. Ainsi, il m’a semblé intéressant de constituer un panel de professionnels regroupant principalement des architectes. Celui-ci se composerait d’au moins deux agences ayant franchi le pas du passage au BIM mais également de deux autres agences très peu au courant, voire réfractaires à cette méthode de travail. Ce panel permettrait ainsi d’évaluer l’importance et la diffusion du processus au sein de la profession et surtout connaître les différents avis des professionnels.

Choix des interviewés :

Pour ce qui est du choix des interviewés, il était important pour moi d’échanger avec des professionnels issus de grandes agences d’architectures (plus de 30 salariés), mais également avec des agences de plus petites tailles (1 à 15 salariés) afin de pouvoir également ajouter le critère de la taille dans ma réflexion. De plus, j’ai souhaité ajouter un troisième critère à ma recherche en distinguant les agences installées dans des grandes villes et des agences présentes

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ANNEXE


en province. J’ai ainsi pu interviewer trois architectes issus de petites agences : - Olivier Celnik, architecte parisien travaillant avec le processus BIM - Bertrand Pagnoncelli, architecte nilvangeois (Lorraine), n’utilisant pas le BIM - Fabrice Theis, architecte thionvillois (Lorraine), n’ayant pas développé le BIM Ainsi qu’un architecte à la tête d’une grande agence d’architecture : - Jacques Dubois, architecte parisien travaillant avec le processus BIM

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J’ai également eu la chance d’interviewer une jeune architecte, fraichement diplômée qui a pour objectif d’ouvrir son agence. Son point de vue sur le BIM est important puisqu’elle fait partie de la jeune génération : - Chloé Edler, architecte thionvilloise (Lorraine), travaillant avec le BIM Je souhaitais également avoir l’avis d’un professionnel expert sur le sujet c’est pourquoi je me suis orienté vers un architecte qui travaille en tant que conseillé BIM : - Emmanuel Di Giacomo, architecte et developpeur BIM chez Autodesk

Trame des questions : choix, ordre, indicateurs

Pour ce qui est des questions, il m’a tout d’abord semblé important de savoir si le professionnel interviewé était informé de ce que représente le BIM. Puis, la suite des questions s’axent autour de leur parcours professionnel, de leur point de vue, et de leur manière de penser. Les questions se divisent alors en deux groupes afin de différencier les agences étant passées au BIM des autres, avec des questions sur leur parcours personnel lors du développement du processus.


Les dernières questions sont orientées vers des sujets qui me semblent assez flous, pour lesquelles je n’avais pas réellement de réponse et c’est pourquoi j’ai souhaité échanger sur ces sujets avec les professionnels.

Question 1 : Ce que les professionnels savent - Nous entendons de plus en plus parler de BIM dans le BTP et plus précisément dans les agences d’architecture. Qu’est-ce que le BIM pour vous ?

- Quels sont, selon vous, les avantages et les inconvénients de ce processus ? (pour vous en tant qu’architecte mais aussi pour votre agence) - A ce jour, avez-vous décidé de vous lancer dans le processus BIM ? OUI

NON

Agences étant passées au BIM

Agences encore en retrait

- Comment avez vous procédé afin de mettre - Est-ce un non définitif et pouren place le BIM ? Seul ou accompagné d’un quoi ? Attendez-vous que le BIM fasse ses preuves en France ? BIM manager ? - Pouvez- vous me donner les grandes étapes de son installation dans votre agence ? - Avez-vous décelé des erreurs à éviter ?

Question 3 : Point de vue des professionnels - En matière de BIM, la France est en retard par rapport à ses voisins anglosaxons notamment à cause d’un manque d’intérêt pour ce processus. Selon vous, pourquoi de nombreux professionnels français restent sceptiques devant les améliorations que propose le BIM ? - Pensez-vous que le processus BIM peut aussi bien se développer en France que dans les pays anglo-saxons ?

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Question 2 : Le parcours professionnel en lien avec le BIM


Question 4 : Point de vue des professionnels - Le processus BIM bouleverse totalement les méthodes de travail actuelles. Pensez-vous que ce dernier puisse nuire au métier d’architecte ?

Question 5 : Point de vue des professionnels - Dans le Plan Transition du Numérique dans le Bâtiment (PTNB), une attention particulière est portée au TPE/PME. Pensez-vous que le BIM risque d’être fatal pour les petites agences ?

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Comment ?

Plusieurs solutions se sont offertes à moi : réaliser de simples interviews et les retranscrire dans mon mémoire ou alors proposer un réel montage vidéo comprenant les interviews des professionnels. La vidéo étant un sujet qui m’intéresse et n’ayant pas pu le découvrir pendant mes études d’architecture, j’ai donc décidé de réaliser l’ensemble de ces interviews en format vidéo. Mon objectif a donc était d’apprendre à utiliser du matériel vidéo, son ainsi que les codes à respecter lors de la réalisation d’interviews. Pour cela, j’ai dû investir dans du matériel pour le son et la lumière et emprunter un appareil photo canon EOS 700D. J’ai également regardé quelques tutoriels sur internet afin de filmer les interviews. J’ai ainsi choisi de filmer avec une caméra fixe et un plan serré sur l’interviewé qui ne regarde pas directement la caméra mais le journaliste qui est hors champs (référence : « le portrait de la semaine » dans Sept à Huit sur TF1). Le dernier travail consistait alors à me familiariser avec le logiciel Adobe Première Pro afin de proposer un montage satisfaisant.


Retranscriptions 1- Emmanuel Di Giacomo ......................................................................................... 82 2- Olivier Celnik ........................................................................................................ 97 3- Jacques Dubois ..................................................................................................... 107

5- Fabrice Theis ........................................................................................................ 121 6- Chloé Edler ........................................................................................................... 124

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4- Bertrand Pagnoncelli ............................................................................................ 115


Interview Emmanuel Di Giacomo

Emmanuel Di Giacomo

Architecte - Responsable Europe Développement des écosystèmes BIM - Autodesk

Bonjour, est-ce que vous pouvez vous présenter en quelques mots ? Oui, alors je m’appelle Emmanuel Di Giacomo. Je suis responsable du développement des écosystèmes BIM pour l’Europe chez Autodesk et je suis architecte de formation. Nous entendons de plus en plus parler de BIM dans le BTP et plus précisé-

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ment dans les agences d’architecture. Qu’est-ce que le BIM ? Le BIM, c’est un processus collaboratif qui permet à tous les acteurs du projet de travailler ensemble de manière beaucoup plus efficace afin de pouvoir produire des bâtiments de meilleure qualité, que l’on va construire plus rapidement, que l’on maîtrisera totalement, qui seront respectueux de l’environnement. C’est avant tout un processus. Ce n’est pas un logiciel, ce n’est pas une base de données. Même si derrière le processus, vous allez quand même avoir de l’utilisation de solutions logicielles. Quels sont selon vous, les avantages et les inconvénients de ce processus, en tant qu’architecte mais aussi pour une agence d’architecture ? Il y a beaucoup d’avantages à utiliser un processus collaboratif mais je dirais que le premier avantage pour une agence d’architecture c’est de pouvoir travailler ensemble sur le même projet. Cela permet de décupler les ressources autour d’un seul et même projet. De plus, on va mieux comprendre le projet puisqu’on va travailler en 3D mais en 3D intelligente avec plein d’informations associées. Pour certaines technologies du type Revit qui sont basées sur un moteur paramétrique, le gros intérêt est que ça va automatiser la production de la documentation de projet. A savoir qu’on n’a plus besoin de dessiner les plans, les coupes, les façades puisque ça se fait de manière automatique. Le gros intérêt aussi du paramétrique, c’est que vous avez un risque d’erreur qui est proche de zéro puisque c’est le moteur paramétrique du logiciel qui va « regarder » à l’intérieur de la maquette du projet pour produire les documents.


On aura toujours l’enrichissement des vues qui sera à effectuer, on aura toujours l’intelligence à rajouter. Par exemple, quand on dessine une coupe. Mais l’intérêt, c’est qu’on va augmenter la productivité de l’agence. Ensuite, l’un des gros intérêts au-delà de la collaboration et de l’augmentation de la production du projet, c’est que l’on va maîtriser un certain nombre de choses. On va maîtriser les quantités du projet, ce qui est très bien car pour un architecte, être capable de quantifier le nombre de fenêtres, le volume de béton nécessaire, c’est très bien parce que ça lui donne un argument supplé-

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mentaire pour discuter, face un économiste ou avec le maître d’ouvrage et d’appuyer le discours autour de son projet. Ensuite, avec le BIM ce qui est intéressant, vu qu’on a une composante tridimensionnelle, on n’est plus dans un processus asynchrone où on demande à un perspectiviste de faire des perspectives … On a tout qui est intégré. L’intérêt, c’est qu’on va mieux faire comprendre et plus rapidement son projet, déjà à ses équipes internes mais ensuite à ses clients. Donc, on va être capable de convaincre beaucoup plus rapidement. Vis-à-vis de l’extérieur, je pense qu’il est important pour les architectes de s’approprier ce processus puisque l’on voit que les entreprises de construction, les sociétés d’ingénierie ont clairement une longueur d’avance par rapport aux architectes qui pendant très longtemps ont dit « le BIM ce n’est pas pour nous, c’est cher, ce n’est pas à nous de fabriquer une maquette, ce n’est pas à nous d’investir du temps, de l’argent … ». Aussi le fait de se réapproprier le BIM permettrait aux architectes de se remettre au centre du projet et d’agir vraiment en tant qu’architecte, c’est-à-dire coordonner toutes les disciplines. C’est finalement eux qui devraient être à l’origine de la maquette initiale puisque c’est leur projet. C’est à eux de décider comment toute la partie technique, les systèmes à l’intérieur du bâtiment, la partie électrique CVC … ou même la structure, c’est à eux de définir comment ces éléments doivent être modifiés. Ce ne sont pas aux entreprises, aux ingénieurs d’imposer aux architectes les modifications. Le discours doit être à armes égales, je dirais. Donc, c’est en ce sens que le BIM est important.


Dernier point peut-être, c’est la compétitivité des entreprises d’architecture, si on peut parler d’entreprise. C’est vraiment un vecteur de compétitivité et de positionnement à l’international notamment au niveau européen puisque une agence d’architecture qui passerait au BIM, pourrait prétendre à répondre à des concours ou des appels d’offres, déjà en France, mais surtout au niveau des pays européens, où pour la plupart le BIM est obligatoire pour des projets publics ou financés par des fonds publics. C’est vraiment un vecteur de compétitivité, c’est une évolution dont les architectes doivent absolument se saisir.

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Comment procéder afin de mettre en place le BIM ? Peut-on être seul ou fautil absolument être accompagné ? Bonne question. Tout dépend de la taille de l’agence. Je dirais que si on est tout seul, on peut déjà avoir le logiciel, l’acheter auprès d’un spécialiste ou d’un partenaire revendeur spécialisé. On a un réseau de partenaires qui d’ailleurs sont des architectes de formation. Je pense que, honnêtement, un conseil de base à donner, suivre au minimum une formation de cinq jours, c’est le standard de durée de formation sur l’outil que l’on va choisir. Ensuite, c’est faire un projet pilote. La base à respecter aussi c’est, dès qu’on va avoir des soucis, dès qu’on ne va pas comprendre comment faire telle ou telle opération, il faut absolument se faire aider. Il ne faut pas rester dans son coin, à végéter, essayer de trouver tout seul la réponse, ça ne sert à rien. On risque de se décourager. Il faut absolument se référer au revendeur qui nous aurait formé, lui dire « voilà je n’arrive pas à faire telle ou telle chose » et il faut absolument se faire suivre. Sachant que le temps moyen de monter en puissance pour être efficace en BIM, ou en tout cas en BIM niveau 1, c’est-à-dire - je suis archi, je fais du BIM tout seul dans mon coin -, il faut compter entre trois et six mois de temps d’adaptation. Si on a une agence un peu plus conséquente, on va agir de manière un peu plus virale. C’est-à-dire, que l’on va choisir une équipe motivée pour passer au BIM. Imaginons qu’on soit dans une agence de quinze, vingt personnes. On va choisir une petite équipe de trois à cinq personnes. On va choisir un projet pilote. En général, il faut choisir un projet raisonnable, un


projet standard, qu’on a l’habitude de faire. On va former les trois à cinq personnes. On va passer par un partenaire certifié, encore une fois. Le projet pilote choisi, on va le faire sur 6 mois et on va se faire accompagner peut-être une journée par semaine, par le partenaire ou l’expert indépendant et faire des points réguliers. On va avoir des difficultés auxquelles on sera confrontés. Et, il y a un besoin de communication entre ces cinq personnes, pour que finalement, elles se nourrissent les unes les autres de ce qu’elles vont apprendre. Ensuite, c’est le principe viral. C’est-à-dire que sur ces cinq personnes, vous

99 GUEZO Julie ; NAVARRA Pierre, Avril 2016. Revit Architecture : développe-

ment de projet et bonne pratique. Eyrolles, 430p.

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allez forcément avoir deux ou trois personnes beaucoup plus motivées que les autres. Ces personnes, on peut les extraire, soit pendant la phase de transition sur le projet pilote et les réinjecter sur une autre petite équipe de deux ou trois personnes sur un autre projet. Soit, on le fera à la fin du projet, une fois qu’on aura fait un bilan de ce que cela aura apporté. On va pouvoir « dispatcher » les personnes un peu comme un virus de manière à faire des petits et pouvoir déployer le BIM au sein de l’agence. Mais ça nécessite effectivement une volonté de l’entreprise. Il faut que les dirigeants soient convaincus. Il faut qu’ils mettent les ressources, qu’ils laissent du temps aux gens qui vont passer au BIM parce que souvent dans l’agence, on est dans l’urgence on n’a pas le temps, on ne peut pas se former… Il faut en faire abstraction pendant six mois. Il faut être conscient du fait que pendant six mois, on risque d’avoir une perte de productivité. Mais par contre, une fois qu’on a dépassé ces six mois, il faut savoir qu’on va être beaucoup plus efficace puisque si je reprends les avantages du BIM, on sait que sur un projet standard, on va aller deux fois plus vite et on aura besoin de deux fois moins de personnes. On aurait eu cinq personnes sur un projet, ça laisse la possibilité d’en mettre trois sur un projet et deux sur un autre projet. Ou éventuellement leur faire faire d’autres choses. Il faut le faire de manière structurée. Il y a des gens qui arrivent à se former seul par le biais de tutoriaux que l’on trouve sur Internet. Les architectes regardent beaucoup «Eleform». Il y a des livres qui existent comme par exemple le livre de Julie Guézo et Pierre Navara99 qui permettent de s’auto-former. Mais la meilleure des approches, la plus efficace :


je fais mes cinq jours de formation, ça va me coûter 1500 €. Mais au bout de cinq jours, je sais que j’aurai appris les bonnes bases. Je serai parti sur de bonnes bases pour être efficace en BIM ou sur des outils comme Revit. Aujourd’hui le BIM, on l’associe généralement à formation continue. Vous pouvez dire quelques mots là-dessus ? Oui, effectivement, on l’associe à la formation continue. Quand on pense formation continue c’est vrai que le premier exemple qui nous vient à l’esprit c’est

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le mastère BIM de l’ESTP. Mais le type de formation continue dont je parle c’est une formation de cinq jours. On va chez un revendeur agréé. Il faut vraiment passer par quelqu’un qui est agréé ou un expert indépendant qui a des références. Mais il faut faire attention quand même parfois. Il faut être sûr de la personne à laquelle on s’adresse parce que le suivi « après-vente» est extrêmement important. Donc la formation continue, je dirais qu’elle est primordiale pour les architectes qui sont en agence. Ils doivent bien choisir leur organisme de formation et pour ça, il faut qu’ils se renseignent auprès des éditeurs qui vont leur donner des conseils. Bien évidemment, vous avez aussi des formations BIM beaucoup plus conceptuelles qui durent deux jours, qui sont données par les organisations professionnelles … Mais ça va juste vous donner une image, un vernis sur ce qu’est le BIM en tant que processus. On va être capable de visualiser des maquettes mais on ne va pas être capable d’en créer. Au-delà de la formation continue, la formation initiale est primordiale. Il faut absolument que les jeunes architectes ou les futurs architectes soient formés dans les écoles d’architecture. Cela commence à venir. Ce n’est pas forcément structuré comme dans l’éducation nationale ou dans les filières STI ou pro, mais ça commence à venir. Je pense que les jeunes générations qui sortent des écoles et qui sont formées sur les outils BIM du type Revit seront un vecteur d’accélération de cette « bimisation » des agences d’architecture. Je pense qu’il faut que les agences tablent sur ces jeunes qui sont déjà formés parce qu’ils vont les aider au sein de l’agence.


Pouvez-vous me donner les grandes étapes de son installation dans une agence d’architecture ? Il y a déjà la sensibilisation de l’agence : qu’est-ce que ça va représenter en termes de transformation, si je puis me permettre, du « business model » de l’agence. C’est-à-dire, comment cela va impacter l’agence en termes d’organisation car clairement, ça va l’impacter puisque c’est un processus collaboratif. On va travailler d’une manière différente autour des projets. On aura besoin d’organiser les équipes différemment, avoir des personnes qui seront en charge

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de la coordination, de la gestion, de la création des maquettes … Donc première étape, c’est la sensibilisation pour être sûre d’entraîner tout le monde. Il faut que ce soit une décision de la direction qui décide qu’il faut que l’agence passe à ce modèle d’organisation petit à petit. Donc, il faut une adhésion du plus grand nombre. Ensuite la deuxième étape, c’est la stratégie. Quelle stratégie adopte-t-on pour passer au BIM ? Combien de temps se donne-t-on pour passer l’agence au BIM ? En général, il faut éviter d’essayer de passer une agence complète en BIM d’un seul coup. Ça ne marche pas. C’est une erreur grossière que certaines agences ont fait et ça a été un vrai problème. Le timing nécessaire ? Quelles ressources sont mises à disposition ? Quelles personnes va-t-on choisir ? Qui va être le plus motivé ? Qui va être d’accord pour faire partie de ce premier petit groupe de pionniers ? Qui va se former au BIM et qui va travailler sur un premier projet ? Ensuite, les ressources. Quelles ressources l’agence souhaite et peu mettre à disposition pour passer au BIM ? Ressources financières, bien entendu, car qui dit BIM, dit forcément formation, machine peut-être plus puissante et bien entendu logiciel. Tout ça, ça représente un coût. Toutes les études qui sont faites sur le coût du passage au BIM parlent d’une fourchette 13 à 15000 € par poste de travail la première année. Nous, ce qu’on a essayé de faire depuis quelques années chez Autodesk, c’est de démocratiser l’accès à la technologie. Pour ça, on a mis en place des systèmes de location de licence qui permettent de réduire de manière drastique les coûts. Je vais prendre l’exemple le plus basique. Une toute petite agence, d’une personne ou deux personnes, qui voudrait passer au


BIM pourrait prendre Revit LT. Ça lui coûtera 50 € par mois, 600 € par an plus une formation de 1500 € en interentreprises, plus une nouvelle machine. Donc, on serait à peu près à 2100 € plus 1500 €, soit 3600 € grosso modo. On serait entre 4 et 5000 € la première année pour une toute petite agence. Les moyens c’est très important. C’est-à-dire quelles ressources va t-on mettre à disposition. Ensuite, je l’ai dit, être conscient du fait que pendant 6 mois on risque, pour les gens qui vont passer au BIM, d’avoir une petite perte de productivité. Donc, il faut laisser le temps aux gens de se former, de faire des erreurs aussi et de faire

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le bilan finalement au bout de six mois de ce que ça nous a apporté. Au bout de six mois on regarde où on a été efficace, où est-ce qu’on n’a pas été efficace. Et ensuite, on peut déployer le BIM à plus grande échelle au sein de l’agence. On peut tout à fait imaginer pour le BIM, des formations spécifiques sur des sujets particuliers : la collaboration, comment est-ce qu’on crée des familles, c’est-àdire des objets bibliothèque car il y a des stratégies à mettre en place. Ce sont de toutes petites formations de une à deux journées supplémentaires, qu’on doit prévoir aussi à l’avance. Ce n’est pas une obligation, mais il faut y penser. Et en général, au bout de six mois, on a quand même une visibilité sur ce que ça va nous apporter. Ce sont là les grandes étapes pour passer au BIM. Existe-t-il des erreurs à éviter ? Oui, il existe des erreurs à éviter. La première erreur à éviter, c’est d’essayer de faire du BIM dans son coin, c’est-à-dire : je suis un utilisateur dans l’agence, je suis un dessinateur, je vais demander à mon patron de m’acheter une licence Revit et je pense que je vais faire du BIM tout seul. Ça ne marche pas. Il faut que ça vienne du haut. Il faut que ça vienne des chefs d’agence. Il faut que ça vienne des associés. Il faut qu’ils soient convaincus de ce passage, de cette transition, de cette révolution technologique et au fait que l’agence doit y passer. La deuxième erreur à éviter, c’est penser que l’on peut se former tout seul. Ce n’est pas possible. C’est-à-dire qu’on arrivera à bricoler des choses mais ça restera de la bricole. Quand on sera amené à faire des projets collaboratifs avec des entreprises extérieures, on va très vite atteindre ses limites. Les erreurs à


ne pas faire aussi, c’est de penser que l’on va basculer toute une agence comme ça, du jour au lendemain. Ça c’est surtout la chose à ne pas faire. Et, il y a des agences qui le font parfois. Et surtout, il faut choisir le bon partenaire qui va nous accompagner dans cette transformation. Chercher, par exemple, le revendeur le moins cher ou l’expert le moins cher qui va former toute l’agence, plutôt que de prendre des gens avec de l’expertise qui vont nous former, ça va coûter un tout petit peu plus cher mais ils vont nous suivre et nous accompagner sur plusieurs années. Le prix

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n’est pas l’argument essentiel pour passer au BIM. Il faut faire très attention. Il ne faut pas tirer les choses vers le bas. L’une des erreurs à ne pas faire aussi c’est : je fais un projet ou alors je fais une formation et je n’ai pas de projet à traiter en BIM alors du coup, je laisse tomber et je me dis que je vais attendre le prochain projet. Il y en a un qui sera là dans trois mois ou six mois … alors ça c’est l’erreur à ne pas faire parce que ça veut dire qu’il faut recommencer à zéro. Il faut ensuite bien tout préparer et pas imaginer, qu’effectivement, on va pouvoir bricoler des choses, prendre un fichier standard, pouvoir se fabriquer son gabarit … Ça c’est des choses qui s’apprennent. Ça se fait de manière structurée. Ça prend du temps. Le BIM, ça prend un peu de temps pour être quand même efficace. Le BIM est un processus collaboratif. Qui dit processus collaboratif, dit besoins et parfois obligations. Ce qui est normal car on est dans un processus collaboratif c’est d’échanger avec des intervenants extérieurs : des bureaux d’études, des thermiciens, des bureaux d’études structures, des bureaux d’études environnement … Quand on va avoir besoin d’échanger, on va passer par des formats spécifiques. Donc, on parle beaucoup d’openBIM de buildingSmart qui est représenté en France par Mediaconstruct. Le format d’échange interopérable le plus répandu et qui a le plus d’avenir c’est le format IFC. Par contre, le format IFC c’est un format d’échange et non pas un format de travail. Donc ça, il faut toujours le garder à l’esprit et c’est des erreurs à ne pas faire. Il ne faut pas penser qu’on va travailler sur un fichier IFC, qu’on va continuer à faire vivre … C’est un vecteur d’échange à l’instant t pour échanger


avec les différents partenaires du projet. C’est quelque chose d’essentiel, il faut toujours le garder à l’esprit. Je dirais que l’une des erreurs à ne pas faire, notamment sur Revit, c’est de ne pas avoir son logiciel à jour. Ne pas avoir le moteur d’import-export open-source résident à jour parce qu’on risque d’être confronté à des problèmes. En matière de BIM, la France est en retard par rapport à ses voisins anglosaxons notamment à cause d’un manque d’intérêt pour ce processus. Selon

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vous, pourquoi de nombreux professionnels français restent sceptiques devant les améliorations que propose le BIM ? Alors, je pense qu’un certain nombre de professionnels restent sceptiques parce qu’ils ne savent pas forcément ce que ça va leur apporter, ou ils n’ont n’en pas consciences. C’est facile de dire : je n’en ai pas besoin, ça marche très bien comme je travaille actuellement … tant qu’on n’a pas vu, tant qu’on n’a pas utilisé. Si demain, on prouve à quelqu’un que pour produire de la documentation de projet, il va mettre deux fois moins de temps peut-être qu’il va réfléchir à deux fois. Parce que quand, par exemple, les architectes mettent en avant le fait qu’ils ont moins de marge sur les projets, et bien peut-être qu’une manière d’avoir beaucoup plus de marge serait de passer moins de temps sur des tâches qui n’ont pas de valeur ajoutée, des taches de dessin. Et passer beaucoup plus de temps sur la conception et des outils. Par exemple, Revit paramétrique leur permettrait de gagner du temps, de maîtriser leur conception beaucoup mieux que sur Autocad puisqu’on est dans un processus CAO qui n’a pas vraiment d’intelligence à proprement parlé. Et ce serait des gens qui seraient beaucoup plus efficaces. Souvent les gens qui sont passés par exemple d’AutoCAD à Revit me dises « plus jamais on retournera en arrière, ce n’est pas possible. Si on avait su, on y serait passé il y a plusieurs années ». Donc le scepticisme, il est lié, je pense, à un défaut d’information des professionnels. C’est peut-être très français d’être réticent au changement. Nous, on le constate parce que je vois beaucoup de gens, professionnel du bâtiment, des entreprises de construction, des ingénieries, des architectes … dès que vous parlez d’évolution, d’innovation...


C’est tout de suite « non non, ce n’est pas pour nous. Et puis en plus, on n’a pas le temps et on n’a pas d’argent … ». Je pense que c’est plutôt le français qui est sceptique. Tant qu’il ne sera pas dos au mur, obligé d’y passer, il ne pourra pas se rendre compte de ce que cela représente vraiment. En plus, les pouvoirs publics n’incitent pas forcément à l’obligation de l’utilisation du BIM contrairement aux autres pays. Donc, ça après c’est la liberté de chacun de penser si c’est bien ou ce n’est pas bien. Je pense personnellement que si on n’oblige à rien du tout, finalement les gens ne le feront jamais. Mais ils ne se rendent pas compte

Pensez-vous que le processus BIM peut aussi bien se développer en France que dans les pays anglo-saxons ? Bien sûr, puisque si l’on regarde certaines entreprises françaises, notamment les grands majors du BTP et leurs filiales, comme Bouygues, Vinci, Eiffage, je pense à Bouygues Bâtiment nord-est, Vinci Ouest par exemple ou SOGEA en Normandie, il me semble, ce sont des entreprises qui sont extrêmement efficaces et avancées en BIM. Et pourtant, elles ne sont pas anglo-saxonnes. Elles ne sont pas britanniques. Elles ne sont pas nordiques et pourtant elles ont développé une stratégie autour du BIM en interne qui est extrêmement efficace. Moi, je vois des choses extraordinaires qui se font dans ces entreprises. Dans les ingénieries, vous allez voir chez SETEC, SYSTRA, EGIS … il y a une véritable prise en main de la stratégie. Un véritable savoir-faire, très pointu. Donc la problématique n’est pas d’être anglo-saxon. C’est vraiment une problématique de volonté. Est-ce qu’on peut y aller ou pas ? Et, si on veut y aller, est-ce qu’on met les moyens ? Et comment et quand on met les moyens ? De toute façon, clairement, la problématique n’est plus de savoir : est-ce qu’on doit le faire ou pas. C’est quand et comment on le fait. Il faut absolument que ça se fasse le plus tôt possible parce que, effectivement, par rapport à nos voisins, n’en déplaise à beaucoup de professionnels, nous sommes en retard.

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qu’ils sont en train de perdre du terrain et de la compétitivité par rapport à leurs concurrents dans les pays voisins. Penser que l’on peut rester tout seul en France, continuer à travailler comme on travaillait avant, c’est une hérésie puisqu’en Europe ça avance très vite.


Le processus BIM bouleverse totalement les méthodes de travail actuelles. Pensez-vous que ce dernier puisse nuire au métier d’architecte ? Je pense qu’il pourrait nuire au métier d’architecte si l’architecte, comme je le disais en début d’interview, ne s’approprie pas le processus BIM. Parce que à force de dire « ce n’est pas à nous de le faire … », dans les entreprises vous commencez à voir des architectes qui vont être intégrés. Et finalement, les entreprises de construction et les ingénieries, petit à petit, auront de plus en plus de pouvoir. Et l’architecte n’aura plus qu’à acquiescer les propositions qu’on va lui

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faire. Si l’architecte se place au centre du processus de création et de construction d’un projet par sa maîtrise du BIM, il aura de nombreux arguments, et ce sont des arguments rationnels. Quand on est capable de dire à un économiste : « il n’y a pas 30 % de matériaux en plus comme tu me l’annonces mais il y en a 20 en moins » quand on est capable d’estimer le coût d’un projet, comme c’est le cas pour de nombreux architectes qui sont passés au BIM à quelques pourcents, en terme de précision, quand on est capable de dire à un bureau d’étude structure « non, mon bâtiment tient de cette manière parce que le BIM permet de le calculer et de l’anticiper », on est en position de force. Par contre, si on est encore sur un processus antédiluvien, à travailler seul, en 2D, sans aucune cohérence entre tous les documents du projet, que l’on n’est pas capable de fournir des maquettes numériques architecturales à ses partenaires de projet, on est en position de faiblesse et on est en position potentiellement de déclin. Vous avez de plus en plus d’entreprises de construction qui demandent aux architectes : « Est-ce que tu travailles en BIM ? ». Si les entreprises d’architecture ne travaillent pas en BIM, les entreprises de construction leur disent : « nous ne travaillerons pas ensemble », parce que eux ont fait cet effort. Ça leur a pris du temps, de l’argent, des ressources … des efforts considérables pour structurer leur équipe interne et ils n’ont pas à pâtir du fait que, effectivement, il y a des professionnels, des agences d’architecture, qui ne veulent pas évoluer. La problématique financière, c’est une autre problématique. Mais sur le fond, sur l’innovation et sur l’évolution du métier d’architecte, il doit absolument tenir compte de ces évolutions sociétales qui ne sont pas franco-françaises mais qui sont internationales !


Dans le Plan Transition du Numérique dans le Bâtiment, le PTNB, une attention particulière est portée au TPE/PME. Pensez-vous que le BIM risque d’être fatal pour les petites agences ? Non, je ne pense pas. Je pense que cela peut même être une opportunité. Je peux prendre des exemples de petites agences que je connais, et le terme petite agence à la limite peut être péjoratif. Mais, vous avez des petites agences qui font de grandes choses. Je me souviens, il y a à peu près une dizaine d’années, quand je suivais justement les agences au niveau méthodologique pour le pas-

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sage de la CAO au BIM, passer de Autocad à Revit. Je suis allé voir des agences qui avaient une quarantaine de personnes notamment en Italie comme Piero Lissoni & Associati. Je me suis occupé de Gae Aulenti, Lissoni. C’était quarante, cinquante architectes et designers. Gae Aulenti c’était à peu près six ou sept personnes. C’est effectivement ce qu’on peut qualifier de petites agences. Mais, il y avait eu cette volonté de changer leur processus de création et de conception. Je vais prendre un exemple d’une autre petite agence que je connais bien. C’est l’agence SONA à Nantes. Ils sont deux : Pierre Navara et Emmanuel Sorin. Ils sont extrêmement efficaces. Mais pourquoi aussi au-delà de leurs compétences et de leur créativité. C’est parce qu’ils ont été suffisamment intelligents et visionnaires pour passer sur des processus BIM et passer sur des outils comme Revit qui leur apportent une véritable compétitivité, un élément différenciateur que n’ont pas des agences un peu plus importantes. Et des agences un peu plus importantes, elles sont beaucoup moins efficaces si elles sont sur des processus classiques CAO où là, clairement, on peut mesurer les bénéfices qu’apportent le passage au BIM. Les anglo-saxons le font, c’est très simple. Au-delà de la maîtrise autour des coûts du projet, on sait que les Britanniques sont capables de construire des écoles élémentaires à moins 40 % grâce au BIM. Il y a à peu près une dizaine d’années, ils étaient capables de rendre uniquement 30 % des projets à temps. Depuis que le Royaume-Uni a rendu obligatoire le passage au BIM, c’est 60 % des projets qui sont rendus en temps et en heure. Ce sont des éléments concrets et tout ça ne dépend pas de la taille de l’agence. Les toutes petites agences, c’est aussi une opportunité pour elles. C’est aussi des métiers


nouveaux qui s’ouvrent peut-être pour les agences parce que l’architecte a ce côté gestion de projet que n’ont pas d’autres métiers. Cette vision globale du projet seul l’architecte l’a. Je ne vais pas dire du mal d’autres professions, mais ils n’ont pas cette capacité à synthétiser toutes les informations d’un projet. L’architecte l’a, c’est vraiment une opportunité. C’est aussi un potentiel énorme sur la partie rénovation. En France, c’est l’un des objectifs du gouvernement que de rénover 500 000 logements. C’est peut-être une opportunité pour les architectes qui n’ont pas beaucoup de missions actuellement, c’est de créer les

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maquettes numérique des bâtiments existants pour pouvoir les rénover. C’est aussi du business potentiel pour les agences. C’est de nouveaux métiers : BIM manager, coordinateur, expert en modélisation. Il y a vraiment énormément d’opportunités. Vous ne pensez pas que justement les petites agences vont être poussées à se regrouper pour pouvoir agrandir la taille de l’agence et pouvoir développer plus facilement le BIM par exemple ? C’est l’une des possibilités effectivement. On peut imaginer que de petites agences se regroupent pour être plus fortes, pour répondre à des appels d’offres … Je ne pense pas que c’est ce qui va se généraliser, mais je pense que c’est l’une des possibilités. [Donc, on est vraiment dans les attentes du BIM, c’est-à-dire ne plus travailler seul de son côté mais travailler ensemble] Oui, c’est ça le BIM. C’est travailler ensemble. Pierre Mit, le président de Médiaconstruct qui était aussi président de l’UNTEC, a une expression qu’il répète : « le BIM c’est 90 % d’humain et 10 % de technologie » et quelque part, il a raison. Pour conclure cette interview, avez-vous encore quelques mots à rajouter pour faire un bilan ? Le BIM c’est aussi réconcilier les acteurs du projet entre eux, c’est décloisonner les métiers. Ça permet et ça force les gens à travailler entre eux parce que là,


les problèmes on les a en frontal. Le BIM, on parlait d’organisation au sein de l’agence, c’est aussi une remise en question par rapport au pouvoir que l’on peut avoir. C’est-à-dire qu’autrefois, tous les métiers étaient vraiment structurés et cloisonnés. Il y avait le chef de projet, les personnes qui faisaient les plans, les autres qui faisaient les coupes, les autres qui faisaient les façades … Le chef de projet venait : « tu modifies ça … ». Le BIM a cela de différent. C’est qu’à partir du moment où quelqu’un va changer quelque chose quelque part, cela va avoir un impact sur tout le projet. Donc, il y a une modification totale

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des équilibres et notamment du pouvoir. Même le dessinateur, maintenant, a un pouvoir sur le projet. C’est-à-dire qu’on ne peut plus voir les organisations, les relations entre les personnes de la même manière. Déjà au sein d’un même métier : les architectes, et ensuite entre les métiers extérieurs. C’est pour ça que ça pose des problèmes éthiques de droit, de traçabilité, de responsabilité, de droits d’auteur … Et que ça pose énormément de questions parce que la modification est beaucoup plus directe. Quand les maquettes sont coordonnées, quand on est en BIM niveau 3, une modification que ferait un bureau d’étude va impacter le modèle de l’architecte potentiellement. Donc, il y a vraiment de nouvelles questions à se poser et c’est pour ça qu’il faut y aller. L’architecte ne peux pas rester à la traîne et dire « ça ne me regarde pas, c’est pour le technique … » Il doit être impliqué dans ces discussions. Il doit faire avancer les choses. Il doit faire entendre sa voix. Il doit être acteur de ce changement, c’est une révolution ! Comme à l’époque, Giotto avait inventé la perspective, on n’imaginerait pas actuellement se dire : « l’axonométrie de l’époque du Moyen-Âge, c’était très bien. Il ne fallait pas passer à la perspective. » C’était une évolution naturelle, obligatoire et ça a bouleversé la manière dont on construit un bâtiment. Ça a bouleversé les équilibres entre les constructeurs et architectes … Là, on vit la même chose d’une certaine façon. On ne peut pas aller contre le progrès. Ce que je dis souvent c’est, effectivement, on pourrait continuer à rouler avec une voiture des années trente, voire une carriole avec un cheval. Et puis dire « pour aller d’un point A à un point B, je vais prendre ma carte en papier. Je vais regarder. Je vais m’arrêter … » mais il y a des véhicules


modernes avec des GPS qui marchent avec des carburants propres, intelligents … avec des systèmes de sécurité. Oui, on peut totalement s’en passer. Mais dans ce cas-là, on décide de vivre dans une autre époque comme les Amish ou comme des communautés qui décident volontairement de s’isoler de l’évolution. Il ne faut pas que les architectes soient comme cela, en retrait par rapport au progrès. C’est un progrès inéluctable. Ceux qui n’y passeront pas, seront relayés en arrière-plan. C’est clair et net. Ce que je souhaiterais aussi rajouter, c’est que j’ai fait mes études à Tolbiac à

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UP7. Je suis un ancien élève de Paul Maymont qui est un utopiste des années 60 et un visionnaire qui avait compris depuis très longtemps les problématiques liées à l’environnement et qui avait compris que l’architecte devait être un acteur clé pour la préservation de notre planète et de l’environnement de manière générale. A cette époque-là, les technologies numériques n’étaient pas tellement développées. Il commençait à en avoir sur plateforme Macintosh. Il m’avait dit quelque chose qui est très vrai et qui a tout son sens actuellement. Il m’avait dit : « Vous savez Di Giacomo, je pense que d’ici quelques années, il y aura des technologies suffisamment innovantes et intelligentes qui permettront aux architectes de concevoir des bâtiments respectueux de leur environnement, qui permettront automatiquement de trouver l’orientation parfaite pour le bâtiment pour qu’il soit bien orienté par rapport au soleil, qu’il soit parfaitement intégré dans son environnement. ». Donc ça, c’était il y a plus de 26 ans et il avait tout à fait raison. Si Léonard de Vinci avait eu accès à ces technologies, je pense qu’il s’en serait emparé. C’est une évidence ! Il aurait continué à faire ses beaux croquis mais il se serait emparé de ses nouvelles technologies. L’architecte se doit d’être à la pointe sur l’utilisation de tout nouveau processus révolutionnaire, il ne peut pas être à la traîne. C’est un devoir ! Interview réalisée par Méghane FRIGELLI


Interview d’Olivier Celnik

Olivier Celnik

Architecte - Enseignant - co-directeur mastère BIM - élu à CROAIF

Bonjour, est-ce que vous pouvez vous présenter en quelques mots ? Olivier Celnik, architecte, praticien ici dans cette agence Z studio, enseignant à l’école d’architecture Val-de-Seine et à celle de Versailles, co-directeur du mastère spécialisé BIM et élu à l’Ordre des Architectes. Nous entendons de plus en plus parler de BIM dans le BTP et plus précisé-

Quels sont, selon vous, les avantages et les inconvénients de ce processus, pour vous en tant qu’architecte mais aussi pour votre agence ? L’avantage, c’est de mieux faire notre travail, si on schématise. Qu’il s’agisse du processus global, de conception, d’échanges avec les autres intervenants, avec les maîtres d’ouvrage ou simplement avec les outils, c’est un moyen de mieux faire notre boulot. Ce n’est pas quelque chose de fondamentalement nouveau ou extraordinaire comme on l’entend parfois. Il s’agit de choses assez naturelles ou d’un assemblage de choses qu’on pratique depuis longtemps. Nous travaillons ici en maquette 3D depuis toujours. Nous échangeons autant que possible avec nos partenaires. Nous communiquons avec nos maîtres d’ouvrage. Le BIM

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ment dans les agences d’architecture. Qu’est-ce que le BIM pour vous ? Pour moi, c’est beaucoup de choses. On entend beaucoup de choses très différentes. Le BIM c’est avant tout, non pas un outil, mais on dit parfois un processus de travail. Je préfère encore dire une démarche ou presque un état d’esprit de collaboration entre les différents acteurs du projet. On connaît les différentes significations du mot BIM, successives et emboîtées comme des poupées russes ; depuis le modèle qui se rapporte vraiment au fichier, à la maquette qu’il ne faut pas ignorer ; au modeling qui est lié au fait de travailler dans cette démarche et avec cet état d’esprit. Et surtout au management. Ainsi, si on doit dire quelque chose, c’est du management de projet, c’est de la gestion de projet à travers une maquette dans un processus collaboratif, avec les différents acteurs de projet.


apporte tout ça à la fois, là où les choses étaient avant un peu isolées les unes des autres. Donc à ce jour, vous avez décidé de vous lancer dans le processus BIM ? Nous y sommes déjà largement engagés, autant que les projets des intervenants nous le permettent. Donc de façon systématique, tous nos projets ici à l’agence, qui sont beaucoup de projets de restructuration de bâtiments industriels ou d’aménagement de locaux commerciaux, sont développés en maquette

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numérique. C’est le premier niveau. Cela permet de produire tous les documents usuels, cela permet de communiquer en 3D, même si c’est trivial, cela reste nécessaire avec tous nos interlocuteurs. Et autant que possible, lorsque les bureaux d’études ou par exemple les bureaux de contrôle sont capables d’échanger avec nous sur une base de maquette, là on essaie de mettre en œuvre un processus BIM. On a aussi une activité, non pas de maîtrise d’œuvre, mais d’accompagnement de confrères, dans lequel on fait, pour eux, du travail de mise en place de maquette et de processus. Comment avez-vous mis en place le BIM ? Seul ou accompagné d’un BIM manager ? Comme nous sommes nous-mêmes BIM manager pour d’autres, de la même façon que nous avons appris les outils 3D lorsqu’ils sont apparus et nous avons ensuite formé les autres. En tant qu’enseignant en école d’architecture ou en tant que formateur professionnel, de la même façon pour le BIM, nous faisons partie de ceux qui le découvrons et l’apprenons aux autres. Donc, nous sommes notre propre BIM manager avant de l’être également pour certains confrères. Pouvez-vous me donner les grandes étapes de son installation dans votre agence ? Oui, il y en a eu une : lorsque l’on a créé l’agence en 1996, elle s’installait en parallèle d’une société de service pour architectes qu’on avait créé initialement avec mon associé, qui travaillait en maquette numérique sur ArchiCAD. Donc,


on a poursuivi. On continue. D’une certaine façon, il n’y a pas d’autre évolution depuis celle-ci. Nous faisons partie des architectes qui n’ont absolument jamais travaillé avec AutoCAD en 2D. Nous ne faisons que poursuivre ce qui a été fait initialement. De différence, c’est que maintenant, on peut travailler avec les autres et qu’on ne reste pas tout seul dans notre coin. Si on prend la théorie, on faisait du BIM niveau 1 pendant longtemps, à faire notre maquette dans notre coin. Maintenant, on peut échanger avec d’autres.

En matière de BIM, la France est en retard par rapport à ses voisins anglosaxons notamment à cause d’un manque d’intérêt pour ce processus. Selon vous, pourquoi de nombreux professionnels français restent sceptiques devant les améliorations que propose le BIM ?

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Avez-vous décelé des erreurs à éviter ? Oui, c’est ce qu’on évoquait tout à l’heure. Les erreurs, c’est vouloir trop en faire, trop vite, trop loin. Ça c’est ce qu’on voit souvent chez les débutants qui, soit font du BIM et le font d’une façon erronée parce qu’ils veulent saisir trop de choses dans la maquette à des stades trop préalables du projet, perdent du temps, perdent de l’énergie, vont trop loin, font des maquettes trop lourdes et pas pertinentes. Finalement, le processus s’avère contre-productif. Il y a aussi l’erreur qu’on voit de ceux qui ne font pas de BIM parce qu’ils s’imaginent que c’est plus compliqué que ça ne l’est en réalité, et qu’il faut saisir plus d’informations que cela est utile. Donc, il y a vraiment les deux catégories et il faut trouver la bonne voie pour modéliser ses projets avec juste la bonne mesure, à un moment donné et d’amorcer un processus d’échanges avec ses partenaires. Là aussi, d’une façon assez pragmatique et assez efficace, avec des méthodes mais pas trop. Il y a aussi ce risque là. De passer son temps à se conformer à des chartes, à des process, à rendre les choses plus compliquées qu’elles ne le sont. Bien sûr ça dépend du type de projet. Sur des projets ambitieux, complexes, des centres hospitaliers, il faut énormément de rigueur. Sur des projets plus petits, avec moins d’intervenants, on peut davantage, non pas improviser, mais se sentir avec une certaine liberté et quand même mener efficacement son travail.


Je ne sais pas si on est si en retard que ça quand on parle de BIM dans les différents pays à travers le monde. Il y a des pays ou des régions dans lesquelles c’est très développé. C’est des endroits un petit peu particulier comme Singapour ou autres. Il y a certes en Angleterre, l’imposition du BIM sur un certain seuil de projets publics depuis cette année. Ça reste tout récent. Il y a des avancées dans les pays nordiques mais qui dans certains cas restent ponctuelles. Il y a des choses qui existent mais je ne sais pas si c’est totalement répandu chez tous les professionnels à ce point et si ici on est si en retard que cela. Ou du moins, ce

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petit retard à l’allumage commence à se rattraper. On sent une effervescence très nette depuis 2 ans, depuis début 2014. Tout le monde en parle, tout le monde y vient et on va arriver petit à petit à être dans le bain. Et avec des gens qui sont très en avance, d’autres qui sont très en retard. C’est très disparate. Et je pense que ça l’est aussi dans pas mal de pays. On le voit également dans les entreprises. Certaines sont présentées comme spécialistes du BIM et puis en fait, il n’y a que 3 personnes qui savent faire. Et sur le terrain et nos régions c’est loin d’être le cas partout. Il y a une expérience ancienne qui existe dans certains cas et puis juste à côté il ne se passe pas grand-chose d’intéressant. Cela dit, on en parle beaucoup ici depuis 2 ans avec la directive européenne de début 2014, avec la mise en place du Plan Transition Numérique dans le Bâtiment. On a vu le BIM d’or. Tout bêtement, parce qu’il y a un manque d’intérêt chronique qui existait déjà avant pour les évolutions technologiques notamment chez nos confrères architectes qui sont souvent très intéressés par des nouveaux produits pour le bâtiment mais qui sont peu intéressés malheureusement par les évolutions de la profession, les outils au service de la profession. Le fait d’être des entrepreneurs qui devront avoir des outils efficaces, qui sont venus tant bien que mal et plutôt par contrainte que par envie aux outils numérique il y a 10,20 ou 30 ans, qui ont mis du temps à abandonner leurs rotring et leurs lames de rasoir, qui ne se sont pas mis rapidement à Internet, qui sont toujours en retard d’une guerre sur ce terrain-là. Et le BIM, c’est comme le reste. Si ce n’est que le fait de ne pas y être va être plus cruel, et sans doute plus rapidement, que le fait, il y a 20 ans, de ne pas avoir d’ordinateur ou de ne pas savoir échanger un fichier DXF par e-mail.


Pensez-vous que le processus BIM peut aussi bien se développer en France que dans les pays anglo-saxons ? Il n’y a pas de raison pour qu’il ne se développe pas en France. Par contre, ce qui est certain, c’est que le tissu du monde de la construction français est différent de celui des pays anglo-saxons. On sait que dans les pays anglo-saxons, on a de grosses structures de maîtrise d’œuvre, des agences d’architecture de 50 ou 200 personnes qui intègrent architectes, ingénieurs, économistes qui ont un rôle très particulier de la maîtrise d’ œuvre, qui réalisent toutes les études

Le processus BIM bouleverse totalement les méthodes de travail actuelles. Pensez-vous que ce dernier puisse nuire au métier d’architecte ? Effectivement, je pense déjà que ça peut nuire au métier d’architecte pour ceux

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jusqu’aux plans d’exécution avec des entreprises qui se contentent d’exécuter les travaux sans faire de plans. Le schéma n’est pas du tout le même en France. Il y a des majors et des grandes entreprises qui revendiquent de faire des plans d’exécutions et des petits bureaux d’étude indépendants. Donc sans caricaturer, les anglo-saxons d’un côté, les pays latins d’un autre parce qu’on sent que l’Italie, l’Espagne sont plutôt dans la même logique que nous, voire même les Suisses francophones que j’ai rencontré il y a un an, qui cherchent à voir comment faire du BIM dans leur logique initiale, sans être inféodés aux logiques anglo-saxonnes ou allemandes par exemple. C’est vraiment la façon dont on travaille ici qui certes doit évoluer et le BIM n’en est qu’un des aspects. Rester des toutes petites structures, ça ne marche pas. Mais on ne va pas passer de 1.7 personnes en moyenne dans une agence à 50 ou à 100. Par contre, on sent que les agences doivent grossir un petit peu, doivent se fédérer et qu’un certain nombre d’acteurs habitués à travailler entre eux et qui pourront faire grâce à ses outils des plateformes collaboratives, pourront travailler ensemble et constituer des structures de tailles plus importantes tout en restant indépendantes. C’est plutôt cela qu’on voit se mettre en place et on sent que pas mal de gens ont plutôt envie de ça, plutôt que de changer totalement. C’est plus une évolution qu’une révolution complète.


qui ne viendraient pas au BIM. Donc ça c’est un peu facile. Mais on sent qu’il y a un mouvement global. Je posais, il y a pas longtemps, la question à des étudiants : « Est-ce que vous pourriez être architecte aujourd’hui sans ordinateur ? ». On peut être architecte mais est-ce qu’on peut faire un métier d’architecte, c’est évident non à mon sens. Le BIM, ça va être la même chose d’ici quelques mois, un an, deux ans ou quelques années au plus. On ne pourra pas faire un métier d’architecte et faire de l’architecture si on n’a pas ces outils, si on ne s’inscrit pas dans cette démarche qui est en train de s’installer partout. À côté, on

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voit certains architectes réfractaires qui considèrent que le BIM ne les concerne pas et que ce n’est qu’une sorte d’escroquerie intellectuelle. Que pour faire vite, c’est un complot d’éditeurs de logiciels associés à de grandes entreprises de construction, associés aux industriels du bâtiment et que les gens, dont je fais partie, qui l’utilisent et en disent du bien sont, au mieux des naïfs et au pire des complices objectifs de ces gens-là. En disant : à cause du BIM, on va faire de l’architecture standardisée, on va mettre en place les mêmes processus. Les grandes entreprises vont pouvoir s’immiscer plus tôt dans le projet, vont pouvoir, sous couvert d’aider à la conception avec leurs méthodes, agir plus rapidement, mettre la main sur le projet, évincer les architectes. Et en plus, on va alimenter des vendeurs de logiciels qui nous font acheter des choses qui ne sont pas utiles. Ils n’ont pas forcément tort, c’est ce qui pourrait se passer, si les architectes n’y vont pas. Ou effectivement, qu’ils soient de bonne foi ou qu’ils se laissent engager par la tentation et la facilité des outils, peut laisser penser que ce schéma cauchemardesque pourrait arriver. Et c’est bien pour cela qu’il faut y aller. Il ne faut pas refuser le BIM pour ces raisons-là. Il faut dire, il y a des tas d’atouts, des tas d’intérêts et des tas de risques pour les architectes ou pour l’idée que l’on se fait de l’architecture si on le laisse se déployer dans les mains de gens qui ne sont pas architecte. Donc, il faut bien que les architectes soient très présents et très engagés, le plus tôt possible pour avoir les outils et les moyens pour dialoguer avec les autres et faire passer mieux qu’avant leurs valeurs et leurs idées. Et on sent, c’est un peu naïf, mais on a l’impression que ça marche et que c’est vrai qu’à travers cette logique de BIM, les acteurs se parlent


davantage, s’écoutent davantage et que le discours que portent les architectes, commence à atteindre quelques oreilles qu’il n’atteignait pas avant. Parce qu’on raisonne en coût global, on raisonne en qualité, on raisonne sur le long terme, on raisonne en usage. Ce qu’on faisait peut-être moins avant. Y compris les acteurs que l’on pourrait juger cyniques ou intéressés, jouent le jeu jusqu’à présent en tout cas. Dans le Plan Transition du Numérique dans le Bâtiment, le PTNB, une atten-

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tion particulière est portée au TPE/PME. Pensez-vous que le BIM risque d’être fatal pour les petites agences ? Les agences françaises étant essentiellement des petites agences, ça peut leur être fatal si elles ne s’y intéressent pas. On revient un peu sur ce qu’on disait tout à l’heure. Des gens qui ne prendraient pas la mesure de ce que sont les outils, qui resteraient accrochés à des méthodes anciennes, seraient tout bêtement évincés de la commande. Parce qu’aujourd’hui, on commence à avoir un mouvement très nette, notamment chez les bailleurs sociaux, qui pour des opérations courantes, 80,50 voire 35 logements en banlieue de grandes villes, imposent aux candidats de faire du BIM. Des architectes qui ne sauraient pas y répondre, seraient évincés de la commande parce qu’aujourd’hui, il y a assez d’architectes de qualité qui savent répondre à ce genre de demande pour que les bailleurs sociaux ne considèrent pas que cela soit un frein, que la concurrence est bridée ou qu’ils ne peuvent pas avoir les architectes de qualité qu’ils souhaitent. Donc de petits agences qui ne prendraient pas conscience de ça, oui seraient évincées. Par contre, passer au BIM c’est choisir un outil, se former. C’est ni très long, ni très compliqué, ni très coûteux pour autant qu’on en prenne la peine. Ce n’est pas forcément être une agence de taille énorme. C’est trouver des partenaires avec qui travailler. Ça peut être, trouver des partenaires qui feront office de BIM manager pour compléter une équipe sur un concours. Donc, c’est se donner les moyens, là aussi plutôt que de rester seul dans son coin à pleurnicher, c’est saisir les opportunités, transformer un risque éventuel, en une vraie opportunité pour les architectes. Donc oui, il faut se saisir de ça


notamment pour les petites agences. D’une part, c’est indispensable pour résister et c’est aussi sans doute la meilleure arme pour contrer les plus gros, en disant que grâce aux outils, à cette maîtrise, des agences petites ou moyennes peuvent dans un certain nombre de cas de figures faire aussi bien que des agences plus importantes. Inspirer confiance, être productif, être efficace, faire un travail de qualité parce qu’elles ont mis en place des méthodes, parce qu’elles s’appuient sur des outils qui leur permettent de mener aussi bien que les gros et de ne plus être des artisans, peut-être vaillants, mais pas très efficaces.

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Et pour les petites agences qui ne réaliseraient que des maisons individuelles ou des petits projets, pensez-vous que le BIM peut leur apporter quelque chose ? Oui, parce que déjà, si on raisonne en termes simplement de maquette numérique, sans même parler du processus BIM, tout bêtement, on est plus efficace avec ces outils. On met en forme le projet qu’on a imaginé. On n’a pas des allers-retours perpétuels entre 2D et 3D, entre plans, coupes, façades. On a une seule base de données qui permet de développer le projet, qui permet de présenter des variantes au client, qu’ils comprennent le projet, de le donner aux entreprises, même sur une extension de maison individuelle. On peut voir plus facilement, bâtir de l’existant, bâtir des évolutions, différentes simulations, des chiffrés, produire plus efficacement un permis de construire et donner des documents plus fiables et plus précis à une entreprise qui pourra construire le projet, l’imaginer, le chiffrer et ensuite le construire sur le chantier. L’investissement n’est pas si élevé que ça pour dire « Je n’ai pas les moyens parce que je fais des petits projets. ». Si on ne se trompe pas d’outil, si on ne va pas trop loin, c’est un outil de travail au quotidien. Pour terminer cette interview, est-ce que vous avez encore quelques mots à rajouter sur le sujet du BIM ? Si on parle de BIM en tant que tel, en résumant, en disant que c’est un mode de travail collaboratif. De la même façon, c’est un peu paradoxal qu’il ait fallu


attendre la RT 2012, une obligation réglementaire, pour se rappeler que des logements devaient être ventilés autant que possible naturellement, bien implantés sur le terrain, construit avec des formes efficaces. Alors que ça devrait être le béaba de l’architecture. De la même façon, quand on parle du BIM, de ce que c’est, c’est une méthode de travail qui fait intervenir les différents acteurs du bâtiment comme avant : les architectes, les ingénieurs, des maîtres d’ouvrage… Il y a les mêmes acteurs. Ni plus, ni moins. Chacun aura son rôle autour du projet comme avant. Simplement, c’est le curseur qui va bouger dans ce que

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fait chacun d’entre eux. Même si le BIM manager n’est pas un métier en tant que tel, c’est un rôle que doit prendre, à mon sens, celui qui est le mandataire du projet donc bien souvent l’architecte, mais parfois l’ingénieur ou l’économiste. Et que différents acteurs du projet, y compris la maîtrise d’ouvrage, y compris au bon moment les entreprises, se réunissent pour travailler ensemble autour du projet, chacun avec ses apports. Cela paraît assez naturel que ce soit sur une feuille de papier, sur un écran, sur une plate-forme en ligne, c’est la même chose. Réunir un certain nombre de personnes qui vont collaborer autour d’un projet pour chacun apporter leur point de vue, leur éclairage, leurs compétences. C’est ça le BIM. Ce ne sont que des choses qu’on aurait déjà dû faire. Tant mieux si un effet de mode fait que les gens se parlent, se connaissent et qu’on a maintenant des outils efficaces. Et après, sur un second niveau, si on réfléchit, pour les architectes c’est vraiment une opportunité. On est beaucoup à le penser que les architectes quittent la position un peu misérabiliste qu’ils avaient, qu’on leur avait donné ou qu’ils s’étaient laissés infliger dans certains cas, reviennent au milieu de la scène en disant : « C’est une vraie opportunité de redire qui on est, ce qu’on fait, d’organiser ce processus ». C’est un processus de gestion de projet, de développement qui s’appuie sur des méthodes, il faut que les architectes soient capables de le faire et qu’ils se rendent compte, lorsque l’on dit que le BIM doit être animé par des acteurs qui connaissent le projet, qui connaissent la construction, qui travaillent en équipe, qui ont un esprit de synthèse. C’est assez synonyme « d’architecte ». Il y a une vraie opportunité pour les architectes de profiter de


l’engouement, même de l’effet de mode actuel du BIM, pour dire « Nous sommes parmi ceux et peut-être ceux qui vont le mieux répondre à ces questions là ». Et donc on veut conquérir une place sur le projet. On n’est pas tout seul. Bien sûr il y a plein de monde. Il ne s’agit pas d’être l’unique acteur du projet. Mais d’être celui qui s’impose comme étant l’auteur initiale du projet et celui qui va le mener à terme également. Donc c’est à la fois technique et c’est aussi stratégique pour le métier et tout bêtement pour faire son travail, construire des bâtiments, construire des espaces au service des usagers et du public. Merci d’avoir participé à cette interview. 106

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Interview réalisée par Méghane FRIGELLI


Interview de Jacques Dubois

Jacques Dubois

Architecte agence Ameller&Dubois PARIS 12

Bonjour Pouvez-vous présenter votre agence en quelques mots ? On est une agence d’une cinquantaine de personnes. C’est une agence que j’ai crée avec Philippe AMELLER en 1990, il y a 26 ans maintenant. On travaille dans beaucoup de domaines. Essentiellement dans les équipements publics par l’intermédiaire des concours, d’appels d’offres habituels. Et puis petit à pe-

Nous entendons de plus en plus parler de BIM dans le BTP et plus précisément dans les agences d’architecture. Qu’est-ce que le BIM pour vous ? Le BIM, c’est une opération marketing parfaitement bien orchestrée par les grands vendeurs de logiciel. En premier lieu Autodesk qui a réussi à faire croire à tous les maîtres d’ouvrage et à tous les donneurs d’ordre que c’était un passage obligé pour assurer la qualité architecturale. Cela dit, c’est un outil. J’ai, du fait de mon grand âge, subi quelques révolutions au sein de l’agence puisqu’on a commencé au tire-ligne, on est passé au rotring puis à l’informatique avec AutoCad et maintenant, on passe au BIM. Depuis deux ou trois ans, la bascule est opérante à l’agence. Plus sérieusement, au-delà de l’opération marketing, c’est un outil de travail très précis et très global. C’est quelque chose qui va remettre profondément en cause nos méthodes de travail. En bien et en mal. Il n’y a pas que du bien. Il n’y a pas que du mal. On a, nous architectes, à prendre en main ce qu’implique le BIM c’est-à-dire un élargissement de nos compétences, un élargissement de notre activité. Le BIM c’est une logique anglo-saxonne avec une pratique de l’architecture et du bâtiment qui est sensiblement différente de celle que l’on trouve en France. C’est une pratique qui va jusqu’à l’exécution et jusqu’à l’élaboration des détails et d’une synthèse globale du projet. Ce qui

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tit, on a étendu notre sphère d’influence et de pratique opérationnelle vers le logement, le logement social, le logement d’accession avec les promoteurs, les promoteurs institutionnels et vers l’aménagement urbain. Donc beaucoup de thèmes différents.


est rarement le cas en France puisque nous, on s’arrête en cours de chemin, l’exécution à proprement dite est laissée à la responsabilité des entreprises. Donc, le BIM pour nous, c’est quelque chose qui à terme, va nous amener à intégrer l’économie du projet puisque la base de données du BIM est quelque chose qui permet cette intégration relativement aisée dans les agences d’architecture. Et au-delà dans un deuxième temps, on peut envisager l’intégration au sein de nos agence d’une part de l’ingéniérie (la thermique, notamment), celle-ci pouvant y trouver facilement sa place. Ca n’est en aucun cas un logiciel

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dont la principale ambition, est de rendre compte d’images de synthèse, de 3D, de communication architecturale. On peut le faire aussi mais c’est avant tout une base de données et cette base de données c’est quelque chose de très technique. Le côté négatif du BIM, c’est qu’on met un peu la charrue avant les bœufs. C’est-à-dire qu’on définissait il y a encore quelques années un projet avec trois coups de crayon. Maintenant, avant de faire ces trois coups de crayon, il faut savoir ce que ça représente. Est-ce que c’est du béton ? Est-ce que c’est de l’isolant ? Quel type d’isolant ? Quelle épaisseur ? Et évidemment, c’est une manière de réfléchir qui est sensiblement différente de celle qu’ont les architectes en général. Quels sont, selon vous, les avantages et les inconvénients de ce processus, pour vous en tant qu’architecte mais aussi pour votre agence ? On va commencer par les inconvénients de façon à finir sur une note un peu positive et un peu optimiste. Les inconvénients, c’est que c’est un investissement considérable financièrement. On a évalué à l’agence l’investissement sur cinq ans de l’ordre de 600 000 €. Ce qui évidemment n’est pas anodin dans le processus et dans l’équilibre financier d’une agence comme la nôtre. 600 000 €, ça va de l’achat des logiciels et des licences qui nous permettent de travailler. Ça passe évidemment par la formation des collaborateurs, par le ralentissement de la production du fait de ces nouveautés et de l’apprentissage pour les collaborateurs de ce nouvel instrument. Et c’est évidemment assez lourd à supporter. Ça doit être intégré dans un plan de financement assez précis et assez rigoureux.


Le deuxième point, je dirais que par rapport au point que j’ai déjà abordé, c’est, est-ce qu’on va adapter le projet au logiciel ? Ce qui est une catastrophe. Le projet doit évidemment être prioritaire sur toute autre considération. Quel projet leur semble pertinent ? Quel projet a-t-on envie de mettre en œuvre ? Et la complexité du logiciel que nous utilisons en BIM, fait qu’on pourrait être tenté de prendre les raccourcis les plus usuels par rapport à l’utilisation de ce logiciel et par rapport à l’apprentissage qu’on peut avoir de ce logiciel. Donc, ça c’est un vrai danger, de se dire que c’est trop compliqué, on va simplifier le

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processus et on va partir sur ce que nous maîtrisons en termes d’utilisation du BIM, du logiciel Revit (pour le nommer puisqu’on est parti sur Revit, édité par Autodesk pour leur faire un petit coup de pub). Après les bons côtés, c’est la remise en cause de notre pratique qui est toujours nécessaire. On s’endort très vite dans tous les métiers. On a toujours tendance à partir sur des terrains, sur des chemins rodés, sur des chemins que l’on connaît, sur une manière de travailler que l’on maîtrise. Et je dirais que la pratique architecturale doit nous contraindre justement à remettre en cause nos présupposés, à remettre en cause nos habitudes qui sont toujours un petit peu pernicieuses en termes de production architecturale. Le bon côté, il est là. On se remet en cause. Enfin, ça fait 25 ans qu’on existe, ça fait 25 ans qu’on se remet en cause. Aussitôt qu’on a des doutes sur l’efficacité de nos procédures et bien on les remet en cause. Ce n’est donc pas nouveau pour nous. On le fait avec le BIM comme on le faisait avant avec AutoCAD quand on est passé sur les logiciels informatiques. Qu’est-ce qu’on peut dire de plus sur les bons côtés de la chose ? Et bien l’élargissement de nos compétences que j’ai abordé tout à l’heure. L’élargissement des compétences, ça veut dire que si on veut garder la maîtrise du projet, si on ne veut pas lâcher la propriété intellectuelle de ce projet sur le côté auteur qui fait partie aussi de nos attributions, cela veut dire qu’on est obligé de passer par le BIM, on est obligé de maîtriser le BIM. Je dirais de ce côté-là, au vu de mon expérience de ces derniers mois, je ne suis pas trop inquiet. Les grosses cavaleries d’ingénieries sont encore très loin de notre maîtrise de la chose. Je suis donc relativement optimiste.


Ainsi à ce jour, avez-vous décidé de passer votre agence au BIM ? Ça y est, depuis trois ans on a basculé nos projets sur le BIM. On a 60 % de collaborateurs qui sont formés et on embauche en priorité de nouveaux collaborateurs qui sont déjà formés. Nous-même à la direction, on se forme. C’est-à-dire qu’on a déjà une maîtrise de la structure générale du BIM. Comment avez-vous mis en place le BIM ? Seul ou accompagné ? On a été évidemment accompagné. La chose est trop complexe pour pouvoir l’aborder tout seul d’une façon pertinente. Il y a BIM et BIM. On peut être extrê-

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mement « light » dans la manière d’utiliser le logiciel ou au contraire de façon très approfondie dans la méthode. Nous, on a pris le parti de se faire former par des gens qui maîtrisent parfaitement l’instrument. Ainsi, la formation est une formation étalée sur plusieurs semaines avec des collaborateurs qui sont choisis et qui sont intéressés au processus. Et on a embauché quelqu’un qui maîtrise parfaitement le logiciel pour occuper la mission de BIM manager. Pouvez-vous me donner les grandes étapes de son installation dans votre agence ? Première étape : la décision. Il y a cinq ans un collaborateur est arrivé et nous a dit qu’AutoCAD c’était terminé ; qu’il fallait, si l’on voulait survivre, passer au BIM. On l’a accueilli avec quelques sourires narquois, en pensant « Cause toujours tu nous intéresses ». Nous, notre ambition et notre vocation c’est l’architecture, que ce soit du BIM, du crayon, du tire-ligne ou du rotring. Pour nous, c’est la même chose. Et puis on a vu les choses évoluer assez rapidement. Ça a été un processus d’un an ou deux pour comprendre que le passage obligé pour une agence de notre taille et nos ambitions, c’était d’y passer. Alors y passer, on était un peu la corde au cou au départ et puis on a sauté le pas. Cela commence évidemment par dépenser beaucoup d’argent, acheter des licences, équiper des postes de travail avec ce logiciel. C’est-à-dire des postes de travail très performants évidemment puisque tout ce beau monde se tenant les coudes, le logiciel est très lourd donc le poste de travail doit être très performant, donc il


faut évidemment changer et le matériel et le logiciel. C’est une méthodologie industrielle très bien rodée. Après la deuxième étape a été la formation. On a fait deux fois une semaine de formation avec les collaborateurs les plus intéressés à la chose et moi-même j’ai aussi suivi une formation de deux ou trois semaines sur l’utilisation du logiciel. Ensuite certains des collaborateurs étaient déjà formés sur des logiciels assez comparables comme ArchiCad et s’y sont mis d’une manière assez simple et assez naturelle. Pour aboutir trois ans après à 30, 40 % des projets qui sont traités maintenant avec le logiciel.

En matière de BIM, la France est en retard par rapport à ses voisins anglosaxons notamment à cause d’un manque d’intérêt pour ce processus. Selon vous, pourquoi de nombreux professionnels de français restent sceptiques devant les améliorations que propose le BIM ? Je crois que c’est lié au point abordé préalablement. C’est lié au fait que le BIM est un instrument parfaitement adapté à une méthodologie anglo-saxonne. Notre méthodologie est calquée sur la loi MOP. La loi MOP devrait être toilettée,

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Avez-vous déjà décelé des erreurs à éviter ? Le premier projet a été une véritable catastrophe. Heureusement, l’échelonnement des tâches et des phases du projet a subi beaucoup d’interruptions et on a été obligé, pour maîtriser l’architecture, ce qui est quand même l’essentiel de notre démarche, on a été obligé entre le PRO et le DCE (heureusement étalé sur trois ou quatre mois) de repasser tout le projet sur Autocad. C’était un projet qui n’était pas adapté, trop complexe, avec des espaces très particulier et pas adaptés à une première utilisation du BIM. On ne maîtrisait pas suffisamment le logiciel pour aboutir et ça a été un rodage extrêmement négatif sur le projet puisque ça nous a coûté cher. Ça fait partie de l’investissement, on savait qu’on allait perdre de l’argent sur les premières utilisations. Mais qui a été riche d’enseignements sur une méthodologie que nous avons adoptée après et adaptée d’un passage progressif à la chose, avec des projets particulièrement adaptés.


voire totalement remaniée, totalement restructurée pour que l’utilisation du BIM soit réellement efficace et intéressante. La frilosité est liée aussi au coût et aux spécificités des agences d’architecture en France. On est très peu à dépasser une vingtaine de personnes en France et au-delà de cent ou deux cent collaborateurs, les agences se comptent quasiment sûr les doigts d’une ou deux mains, donc c’est extrêmement limité. L’investissement que représente le passage au BIM explique un peu cette frilosité pour les petites agences. Pour autant, le processus est maintenant engagé mais il faut aussi que le législateur prenne acte de cette révolution, que le positionnement de l’architecte soit parfaite-

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ment clair par rapport à la maquette, par rapport à sa propriété et par rapport à sa maîtrise. Le maître d’œuvre reste l’architecte et l’architecte doit garder la main sur la maquette BIM, faute de quoi le terme d’auteur sur le projet architectural n’aura plus aucun sens. La maîtrise de la maquette c’est l’architecte et il faut que les architectes prennent ça en compte et y passent la fleur au fusil. Il ne s’agit pas d’être réticent et de traîner des pieds. Il s’agit de maîtriser le processus avant que le processus ne nous avale. Le processus BIM bouleverse totalement les méthodes de travail actuelles. Pensez-vous que ce dernier puisse nuire au métier d’architecte ? Oui, la difficulté d’utilisation de la maquette pousse à une simplification à l’extrême du processus de création. Evidemment, plus le processus aboutit à des formes complexes, à une méthodologie complexe et plus cela demande du temps. A chaque fois qu’on a un nouvel outil informatique, on nous dit qu’on va gagner beaucoup de temps. Ce qui est un leurre, c’est une arnaque complète des vendeurs de matériel et des vendeurs de logiciel. Non, on n’en gagne pas du tout. Le maître d’ouvrage gagne dans la richesse des documents qu’on va lui transmettre, ce qui est très différent. Quand je compare les projets que nous faisions il y a 25 ans à la main et les projets que nous faisons maintenant, l’Avant-Projet Détaillé ou le PRO que nous faisions il y a 20 ans, a valeur d’AvantProjet Sommaire maintenant. Et c’est lié au passage à l’informatique, à cette capacité à sortir pléthore de détails et cette capacité à rendre, à des échelles


extrêmement variées, tous les documents de travail. Donc le BIM s’inscrit dans ce même mouvement. Les exigences du maître d’ouvrage vont s’adapter aux capacités du BIM. C’est déjà le cas. La maquette numérique permet de faire en théorie pléthore d’images de synthèse, de film, d’animation … La capacité pour un maître d’ouvrage à regarder un projet sous toutes les coutures va faire que les exigences du maître d’ouvrage vont s’adapter. Il est d’ailleurs à craindre que cette capacité ne pose des problèmes en termes de hiérarchisation des problèmes, chacun d’eux étant perçu par le MO dans son existence propre quand il doit être remis en perspective au sein d’un ensemble. Ainsi la mission d’architecte doit être adaptée à ces nouvelles exigences qui ne manqueront pas d’arriver.

Pour conclure cette interview, avez-vous encore quelques mots à rajouter ? Je n’ai pas grand chose à rajouter. Je crois réellement que ce qui est important, ce que j’ai dis mais qu’il faut marteler, c’est que la maîtrise du BIM sera la maîtrise de notre profession. Si nous n’avons pas cette maîtrise du BIM, on va perdre les quelques plumes qui nous restent encore autour des ailes et ça devrait nous empêcher de voler. On doit prendre en main les choses. On doit prendre en

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Dans le Plan Transition du Numérique dans le Bâtiment, le PTNB, une attention particulière est portée au TPE/PME. Pensez-vous que le BIM risque d’être de fatal pour les petites agences ? Je ne pense pas que ce soit lié à la taille de l’agence. Je pense que c’est lié à la capacité ou à l’incapacité du dirigeant de l’agence à intégrer une nécessité qui de toute façon dépassera son ambition et ses capacités à choisir une autre voie. La voie ce sera dans le BIM dans les années qui viennent, par la force des choses. Donc, il faut pouvoir s’adapter. La licence sur un poste de travail ou deux postes de travail est assez comparable avec AutoCad (un petit peu plus cher évidemment). La formation pour un cerveau bien fait est tout à fait intégrable pour un architecte, quel que soit son âge, pour autant qu’il ait cette envie et cette capacité d’ouvrir son esprit.


compte l’élargissement de nos compétences au sein probablement de structures beaucoup plus importantes. Je crois donc que la révolution des agences d’architecte passe par un agrandissement des structures moyennes. Je crois réellement que les agences dans vingt ans qui pourront aborder les projets les plus intéressants, que ce soit en termes d’aménagement urbain ou en termes de construction de bâtiments emblématiques et importants dans la cité, seront des agences de tailles comparables aux agences anglo-saxonnes. Très bien, je vous remercie pour votre participation. Et bien je t’en prie, c’est un plaisir.

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Interview réalisée par Méghane FRIGELLI


Interview de Bertrand Pagnoncelli

Bertrand Pagnoncelli

Architecte - NILVANGE (57)

Bonjour, pouvez-vous vous présenter en quelques mots ? J’ai passé mon diplôme en 1983 me semble-t-il. Après être sorti de l’école d’architecture, je me suis associé assez vite avec deux autres confrères. L’association a duré une quinzaine d’années ce qui n’est pas si mal finalement. Au plus gros de notre activité, nous avons été quatorze personnes. On a eu la chance d’avoir un ou deux gros projets. Ça a été une chance ou une malchance mais ça nous a

Nous enttendons de plus en plus parler du BIM dans le BTP et plus précisément dans les agences d’architecture. Qu’est-ce que le BIM pour vous ? Pour le BIM, c’est vrai que je pense qu’au début il y a un peu de confusion. A savoir qu’il y a à la fois une histoire de maquette 3D. On a bien compris qu’il fallait des gens capables de constituer la maquette 3D. Si j’ai bien creusé ce que nous envoie l’Ordre, l’Ordre nous dit, à chaque fois qu’il y a une nouveauté

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permis à un moment de constituer un cabinet de quatorze personnes. Je pense que nous avons été un peu dépassé et après on a dû réduire la voilure. Cela a été peut-être un peu plus compliqué. Les associés se sont séparés. Aujourd’hui, je reste le seul qui garde le tablier tel qu’il a été créé il y a trente-trois ans. On a travaillé encore à cinq personnes et en ce moment, les temps étant un peu plus difficiles, un peu plus compliqués, on a dû réduire encore la voilure. De cinq, on est tombé au nombre presque bientôt ridicule de deux. Donc aujourd’hui, on est plus qu’à deux pour des raisons toutes bêtes. C’est que localement, la commande s’est raréfiée et surtout on a subit la conséquence des cabinets parisiens et des cabinets strasbourgeois… En Lorraine, on est coincé entre Paris qui vient nous « bouffer », entre Strasbourg qui vient nous « bouffer » parce que là-bas, il y a des cabinets de dix, douze, quinze, vingt personnes, qui ont les moyens de s’accrocher sur de grosses opérations. Et pour information, le moindre projet ici qui fait un million et demi, deux millions, deux millions et demi et bien il y a soixante-dix candidats.


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comme ça, les archis, ne laissez pas passer le virage et essayer de vous l’approprier, si possible assez tôt, parce que si par malheur vous négligez le virage… Comme l’informatique dans les années 80, le virage environnemental par exemple dans les années 2000… Tous les virages que vous allez louper et bien, c’est des bureaux d’étude ou c’est des gens plus débrouillards qui vont accaparer le marché. On a l’impression que ça se discute en termes de marché. Est-ce que les architectes, toute leur vie, vont se faire dépasser par les événements ou vont prendre les virages trop tard ? Je le sens un peu comme ça. Donc c’est un peu compliqué à appréhender parce qu’on a toujours l’impression qu’on a un appel du pied, du style « unissez-vous pour ramasser le travail parce qu’après vous allez venir pleurer que quelqu’un d’autre vient vous le prendre ». Alors à ce stade, il y a la fameuse maquette qu’on nous dit. Il faut la prendre en main, il faut la réaliser soi-même. Il n’y a que l’architecte qui part de la feuille blanche, qui est capable de faire cette maquette. Il ne faut surtout pas qu’il sous traite la maquette. Et puis après, il faut faire vivre la maquette. Et le BIM, c’est un peu toutes les interactions entres les gens qui vont intervenir de la conception jusqu’à la vie du bâtiment. Apparemment le BIM prétend même faire après, ce qu’on appelle la maintenance des bâtiments. J’ai un peu plus de mal à le croire mais bon pourquoi pas. Alors aujourd’hui, qu’est-ce que c’est le BIM pour moi, je dirais que (on va peut-être s’égarer cinq minutes mais ce n’est pas gênant) c’est surtout une espèce de modernisation de la façon d’exercer. C’est certainement un mal nécessaire parce qu’on voit bien que partout le numérique prend le dessus. On ne pourra bientôt plus rien faire sans une tablette, sans un téléphone. Quels sont selon vous les avantages et les inconvénients de ce processus, pour vous en tant qu’architecte mais aussi pour votre agence ? Les avantages et les inconvénients. Je dirais globalement, je pense qu’il y a énormément d’avantages. Et puis en théorie, il ne pourrait même y avoir que des avantages. Si demain, je suis vendeur de BIM, si je suis fabricant de logiciel et bien je pourrai le vendre avec énormément d’avantages et je pourrai


même ne pas trouver de défauts et d’inconvénients. Alors, les avantages ça va être quoi ? Une maquette virtuelle. C’est quand même plutôt intéressant pour le dialogue interactif avec les bureaux d’études. Même si on était habitué à dialoguer à l’occasion de réunion autour d’une table. Le seul inconvénient que je verrais, c’est qu’il faut faire l’effort intellectuel, l’effort quotidien et puis l’effort de s’y mettre. La difficulté pour moi à ce jour d’appréhender le BIM, c’est qu’une question de moyens. Alors dans moyens, je mets les moyens humains, les moyens économiques …

En matière de BIM, la France est en retard par rapport à ses voisins anglosaxons notamment à cause d’un manque d’intérêt pour ce processus. Selon vous, pourquoi de nombreux professionnels français restent sceptiques encore devant les améliorations que propose le BIM ? Je n’ai pas de réponse. La sensation que j’ai, qui est peut-être fausse, je crois

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À ce jour, avez-vous décidé de vous lancer dans le processus BIM ? Non, à ce jour je n’ai pas décidé. Je n’ai pas décidé pour les raisons que j’évoquais tout à l’heure. C’est qu’à deux personnes, je ne sais pas comment je vais pouvoir prendre la décision. Intellectuellement, je dirais que je serais globalement tenté mais au niveau moyen et surtout humain, comment me lancer là-dedans ? Je pense que je me lancerai à la condition d’être accompagné d’un plus jeune. Que je puisse avoir les moyens d’embaucher un jeune architecte, ou une jeune architecte peu importe, qui en sortant de l’école d’architecture, qui après quelques expériences, se dit, on fait une équipe. Et puis pour moi, ça sera le moteur qui va me permettre de me lancer dans le BIM. Pas pour me reposer sur le ou la jeune architecte en question, mais je pense qu’il en faut un, comme un tandem, qui se lance avec l’expérience de l’un et avec la maîtrise de l’outil informatique de l’autre. Alors je travaille quand même avec un confrère de temps en temps. On s’associe sur des projets pour être un peu plus gros. Si demain, on décroche deux, trois projets intéressants, je dirais que le passage au BIM peut-être qu’il se fera très naturellement.


savoir que les cabinets d’architecture notamment anglo-saxons sont gros. Ce sont de gros cabinets. J’ai toujours entendu dire, alors je ne m’y intéresse pas parce que je n’ai pas la velléité de m’y intéresser, mais les cabinets Anglais, j’ai l’impression qu’il y a cinquante, soixante, soixante-dix personnes et qu’ils sont généralistes. Ça veut dire qu’ils sont les architectes, les ingénieurs … ils sont pluridisciplinaires. C’est ce que j’ai cru comprendre. Donc la différence entre nous et les anglo-saxons, c’est que nous on a des petits cabinets, alors que par habitude, ils en ont des gros. Et je pense que leurs méthodes de travail va

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naturellement dans le sens de s’équiper du BIM pour gérer, même en interne, la façon de travailler. Est-ce que la France est en retard ? Je dirais que c’est un retard relatif parce que ça n’empêche pas à la France de produire des projets dignes d’intérêt même au niveau international. On n’est pas en retard. Alors on peut peut-être prendre un wagon de retard, si on n’est pas prêt. Parce que si le BIM devient le seul moyen de vendre le projet et de le faire accepter et bien il faudra y passer. Mais je pense que les gros cabinets y sont déjà. Le processus BIM bouleverse totalement les méthodes de travail actuelles. Pensez-vous que ce dernier puisse nuire au métier d’architecte ? C’est amusant parce que tu utilises les mots « bouleverse les méthodes de travail », moi je n’y vois pas forcément un bouleversement. Alors on n’utilise pas le BIM actuellement mais je dirais que dans la mesure où toutes les agences sont « déjà informatisées », toutes les agences bossent au minimum en 2D et on va dire en 3D. Je pense que l’outil lui-même, d’appréhender une maquette numérique, je ne sais pas si ça bouleverse. Je pense que ça bouleverse moins que le passage du crayon à l’ordinateur, non ? Le mot bouleverse me paraît peut-être un peu fort. Je dirais plus, il va amener les agences à probablement s’organiser. De là à bouleverser … Je pense que les gens qui savent déjà bosser, qui font régulièrement de la 3D, de la modélisation, des choses comme ça, devraient pouvoir passer au BIM. Alors peut-être que je ne me rends pas compte. Alors s’il y en a un qui ne devrait pas sous-estimer, c’est moi. Parce que j’ai déjà fait


le passage du crayon à l’informatique. Alors je me dis, à posteriori comme ça, le passage n’est pas si douloureux et puis comme l’ordinateur, il a été plutôt intéressant. J’ai l’impression que cette nouvelle étape à affronter n’est pas aussi bouleversante que ça, je ne sais pas. C’est peut-être d’ailleurs porteur pour les jeunes architectes, les étudiants et tout ça parce qu’ils ont peut-être l’opportunité de faire une belle entrée dans une agence puisqu’ils peuvent devenir un peu des maillons forts des futures agences. C’est tout ce qu’on va leur souhaiter en tout cas. Après le mode de pensée, est-ce qu’il va être influencé par le BIM

Dans le Plan Transition du Numérique dans le Bâtiment, le PTNB, une attention particulière est portée au TPE/PME. Pensez-vous que le BIM risque d’être fatal pour les petites agences ? Le BIM, j’ai envie de dire que c’est pas forcément le BIM en tant qu’outil qui pourrait être fatal, mais c’est toute la tendance du PTNB qui peut être fatal a beaucoup de monde. C’est peut-être les petites entreprises, peut-être les petites agences et peut-être toutes les petites structures en général qui risquent d’être rayées progressivement du paysage de partenaire possible de la construction. C’est certainement un danger. Mais bon, si ça fait progresser le métier … c’est peut-être ça l’essentiel. Par contre, ce n’est pas le BIM qui fera les chantiers, si on aborde un autre sujet. La qualité de boulot sur le chantier, ce n’est pas le BIM qui va le faire. Ca va rester quand même des gens qualifiés, des carreleurs, des poseurs de sols, des peintres, des maçons … Il n’y a pas encore le logiciel qui pose le carrelage, il n’y a pas encore le logiciel qui dresse le mur verticalement. Il n’y a pas encore le logiciel qui fait que le plafond ne va pas gondoler. Il y a le logiciel mais c’est les bras du bonhomme qui vont lever la plaque et la visser correctement.

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? Pour moi je pense que oui quand même. Comme le mode de produire de l’architecture a été influencé par l’informatique. Il y a des projets exceptionnels dessinés avec des gribouillis et puis après l’outil informatique a quand même permis à l’agence de tout concevoir, tout dessiner. Donc c’était de bons progrès.


Pour conclure, avez-vous encore quelques mots à rajouter ? Je dirais que le BIM, j’espère une chose, si je suis optimiste, j’espère être contraint à passer au BIM parce que ça voudrait dire qu’on redémarre une nouvelle une vie pour l’agence. Et là il s’agit de vie. Si on ne passe pas au BIM et bien on sera peut-être condamné à mourir, et donc se dire qu’on n’aura pas décroché de travail. Ça veut dire que la conjoncture ne va pas trop s’améliorer, ça veut dire tout ce que je t’ai raconté un peu avant, que la tendance qui consiste à dire « on écarte toutes les petites agences et on va prendre que des agences struc-

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turées à partir de tant de personnes » et bien cette tendance là sera confirmée. J’ai envie de dire que maintenant, si je suis pessimiste et que cette tendance se confirme, c’est que le BIM je n’y passerai jamais. C’est dommage intellectuellement de se dire que finalement, on va louper un virage parce qu’on n’aura pas réussi à avoir en main la voiture du futur qui permettra de prendre ce virage. En tout cas merci pour votre point de vue et on espère que vous passerez au BIM. Interview réalisée par Méghane FRIGELLI


Interview de Fabrice Theis

Fabrice Theis

Architecte - THIONVILLE (57)

Bonjour, pouvez-vous présenter votre agence en quelques mots ? Bonjour, je suis Fabrice Theis, architecte à Thionville en Moselle. Je suis installé depuis 2004. Je travaille seul, je n’ai pas de collaborateur. Mes projets sont divers et variés. Cela va du particulier à de la maison individuelle, jusqu’aux écoles et crèches. On va dire que c’est un peu ma spécialité. Un petit peu de logements … Je suis donc plutôt généraliste. Vous êtes aujourd’hui passé au BIM ou pas encore ? Non, pas du tout. Nous entendons de plus en plus parler du BIM dans le BTP et plus précisément dans les agences d’architecture. Qu’est-ce que le BIM pour vous ? Quelque chose de très compliqué qui m’effraie un peu. Pour en avoir entendu vaguement parlé, je pense que c’est un peu une révolution qui se prépare, notamment pour les petites agences. Après, rentrer plus dans les détails, ne maîtrisant pas assez le sujet, j’aurais peut-être du mal à vous donner plus de raisons que cela. Au jour d’aujourd’hui, c’est plus un ressenti général que des connaissances. Vous avez quand même des avantages et des inconvénients à dire sur le sujet ? Les avantages que je vois c’est effectivement peut-être une rapidité d’exécution, une meilleure coordination entre les corps d’état. Une meilleure gestion des coûts aussi peut-être. Je parle au conditionnel puisque c’est un domaine que je ne connais encore pas. Par contre, le principal inconvénient pour moi, risque peut-être d’être la création. Avoir une liberté d’expression, de création, le flou artistique qui fait quand même partie de notre mentalité au départ, il ne faut pas oublier que nous sommes des Latins. On a un petit côté créatif et artistique qui peut aussi s’exprimer par le coup de crayon. Et là, j’ai l’impression que le coup de crayon s’est un peu robotisé et matérialisé de façon mécanique ou artificielle.

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Est-ce que vous pensez peut-être passer au BIM ? Votre agence, si elle est contrainte à y passer, le ferez-vous ? Si un jour je n’ai plus le choix, oui je serai obligé de le faire. Alors je serai peutêtre un « BIM convaincu » par la suite mais au jour d’aujourd’hui cela m’effraie un peu. Vous n’êtes pas au courant surtout de ce qui se passe ? Non

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Le processus BIM bouleverse totalement les méthodes de travail actuelles. Pensez-vous que ce dernier puisse nuire au métier d’architecte ? Pour être honnête, je n’en sais rien. J’aurais tendance à dire oui mais je ne connais encore pas trop les tenants et les aboutissants, ni la méthode exacte donc j’ai du mal à me prononcer. Mais le premier ressenti que j’ai, c’est qu’on va mécaniser un système qui est quand même créatif à la base et je suis convaincu aussi que l’informatique peut être un outil d’aide à la conception, à la création. Mais de lier tout de suite le côté créatif aux détails d’exécution de façon assez rapide c’est là où j’ai un peu plus de mal parce que cela demande toujours quand même une réflexion. Il y a toujours des adaptations à faire ne serait-ce même qu’en cours de chantier. Donc c’est là où j’ai un peu de doute, mais bon. Vous êtes une petite agence et le Plan Transition du Numérique dans le Bâtiment, le PTNB, porte une attention particulière aux TPE/PME. Pensez-vous que le BIM risque d’être fatal pour les petites agences ? Ah oui, complètement. Oui, je pense par l’investissement en temps et en argent que la formation va nécessiter. Je pense qu’il y a beaucoup d’entreprises qui travaillent encore à l’ancienne et qui ne savent même pas utiliser un ordinateur. Même au jour d’aujourd’hui, les entreprises avec lesquelles je travaille sont encore pour beaucoup avec des plans à la main. Ce qui est très bien. Je suis complètement pour. Je trouve qu’un détail fait à la main est réfléchi et souvent plus parlant et plus explicite qu’un plan informatique qui a été fait à la va-vite et


qui n’a pas été réfléchi. Donc, oui effectivement je pense que ça peut les mettre en péril. Merci pour le temps que vous nous avez consacré. Je vous en prie Interview réalisée par Méghane FRIGELLI

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Interview de Chloé Edler

Chloé Edler

Architecte - THIONVILLE (57)

Bonjour Chloé Bonjour Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ? Oui, alors je m’appelle Chloé Edler. Je suis diplômée de l’École d’architecture de Nancy depuis 2011. Je travaille dans une grosse agence thionvilloise en Moselle. J’ai fait un passage de presque 3 ans dans une plus petite structure mosellane aussi. Actuellement, je travaille sur d’assez gros projets de logement, des marchés publics un petit peu aussi.

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Vous avez pour ambition d’ouvrir votre agence ? Oui, sur le plus long terme ou moyen terme. C’est mon objectif en tout cas de m’associer avec l’un de mes confrères, d’ouvrir mon agence et me mettre à mon compte. Nous entendons de plus en plus parler du BIM dans le BTP et plus précisément dans les agences d’architecture. Qu’est-ce que le BIM pour vous ? Le BIM c’est un outil numérique qui doit permettre une conception et une réalisation plus en adéquation. C’est assez complexe. C’est la révolution du numérique. Surtout, c’est une révolution. C’est un peu comme le passage du dessin à la main au dessin à l’ordinateur. Quels sont selon vous les avantages et les inconvénients de ce processus pour vous en tant qu’architecte travaillant dans une agence d’architecture, mais aussi pour votre future agence et pour l’agence actuelle pour laquelle vous travaillez ? Les avantages, c’est vrai que c’est quand même de concevoir une maquette numérique. Cette maquette numérique, c’est un gain de temps dans la méthode de dessiner, de générer des façades, des coupes, des plans le tout en même


Est-ce qu’aujourd’hui la 3D et la visualisation du projet, ce n’est pas ce qui permet de vendre et ce qui est important pour gagner, remporter un concours ? Si, je pense que maintenant de toute façon, il faut avoir tout de suite avoir une image. L’image est reine dans notre métier. C’est, on aime ou on n’aime pas. Il n’y a jamais d’avis « oui, peut-être ». C’est tout de suite « et bien le matériau là, il me plaît bien, ça me va ». En fait, dès le départ, dès l’esquisse, on arrive à rendre quelque chose, à montrer ce que cela pourrait être de façon assez réaliste. Donc, c’est un bien mais c’est aussi un mal. Je pense que ça ne laisse plus la place à la liberté et cela bloque un peu l’esprit. Ça peut jouer un peu contre l’architecture. Dire « vous aviez mis ça, moi je n’aime pas du tout. Je ne peux pas, ça me bloque ». Si dès l’esquisse, on impose des choses comme un matériaude façade, une couverture type, je crois que ça bloque. Je trouve qu’on

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temps … Mais en même temps, c’est aussi une perte de temps dans le sens où dès l’esquisse, on doit affiner le dessin, la méthode de construction, penser dès le départ à des épaisseurs de traits, des épaisseurs de mur, qu’est-ce que sera ça, qu’est-ce que sera si … En fait, c’est un travail vraiment poussé du détail avant la phase PRO. On commence vraiment à réfléchir à des choses auxquelles on n’aurait pas pensé tout de suite dès le départ sur d’autres logiciels. Après, je ne l’ai pas expérimenté, mais je pense que c’est un moyen d’échanger avec les bureaux d’études qui est assez intéressant. Mais encore une fois, estce que ce n’est pas un inconvénient aussi puisque l’architecte doit centraliser les données. Je ne sais pas. J’ai un avis plutôt mitigé. Je pense que ça formate la pensée. On a une manière de dessiner, de faire le projet qui n’est pas aussi libre que si on fait un projet à la main ou à l’ordinateur avec de simples traits. Rapidement, on rentre dans le détail et dans l’analyse. Tout de suite on a la 3D. Tout de suite, on est tenté de faire des axonométries, des perspectives, des choses assez travaillées pour présenter au client dès l’esquisse alors que c’est des choses qui viennent plus tard. Même en phase APD, c’est moins poussé sans le BIM. En théorie, l’esquisse c’est un volume, c’est une idée de ce que cela pourrait être mais c’est très vague.


impose trop de choses, enfin, on impose mais c’est l’outil qui fait qu’on a envie d’avancer vite dans le détail, dans l’esquisse et dans le projet. À ce jour, avez-vous décidé pour votre future agence, par exemple, de proposer un processus BIM ? Je pense que de toute façon on va devoir passer au BIM. C’est un outil qui va se généraliser, surtout si on veut accéder à la commande publique, si on veut accéder à des commandes même de logements avec des promoteurs. C’est un outil

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qui va être obligatoire, de plus en plus. Pour l’instant, c’est assez marginal mais je pense que cela va être comme le rendu informatique à mon époque. Maintenant, ça va être le rendu de la maquette 3D. Et du coup, l’interface un peu idéalisée entre l’ingénieur, l’architecte et de potentiels utilisateurs qui pourront regarder comment le bâtiment a été conçu, comment il a été fait, comment remédier à des désordres, quelque chose comme ça. Donc oui, je pense qu’il va falloir passer à cet outil. C’est certain. Surtout que cela fait quand même gagner un peu de temps sur certaines étapes et ça va être des logiciels standards de toute façon. Je pense que la 2D va devenir très marginale. En matière de BIM, la France est en retard par rapport à ses voisins anglosaxons notamment à cause d’un manque d’intérêt pour ce processus. Selon vous, pourquoi de nombreux professionnels français restent encore sceptiques devant les améliorations que propose le BIM ? Je pense qu’ils sont sceptiques parce qu’en France contrairement aux agences anglo-saxonnes, on a de très petites structures et le coût d’amortissement d’un logiciel BIM, ArchiCAD, Revit ou un autre, est important. Il faut réussir à rentabiliser un logiciel comme ça dans une petite agence. Quand on sait qu’en France les agences c’est un architecte ou deux, la majorité des agences au RoyaumeUni ce sont des agences de quarante à cinquante personnes. C’est sûr qu’en France, on n’a pas les mêmes moyens et les agences ont du mal à se mettre à ce genre de logiciel et se payer une formation. Et surtout la plupart des architectes acceptent les petites commandes. Ils vivent de la maison individuelle, ils vivent


de logements, d’un peu de commande publique. Mais je pense que pour l’instant, c’est dû à la taille des structures et aux moyens qu’on a. Moi, je pense que c’est réservé aux grosses agences et aux agences qui ont les moyens de payer les architectes qui savent utiliser ce logiciel parce que c’est un temps. Le temps qu’on est derrière l’ordinateur, on n’est pas ailleurs, quand on paramètre ses murs, quand on paramètre ses fenêtres. Un architecte qui travaille tout seul, n’a pas le temps de faire cela. Je pense que ce sont déjà des agences un peu structurées qui peuvent se permettre ce genre de choses.

127

ANNEXE

Le processus BIM bouleverse totalement les méthodes de travail actuelles. Pensez-vous que ce dernier puisse nuire au métier d’architecte ? Je pense que ça nuit à l’architecture parce que ça la standardise. Le « copiercoller » est facile. Se limiter aux méthodes de construction que l’on connaît, à la méthode de modélisation que l’on connaît, je pense que c’est facile de rester dans sa zone de confort. Je pense que ça nuit à l’architecture dans le sens où on passe plus de temps à modéliser. L’outil prend un peu le pas sur la pensée architecturale. C’est vrai que le temps de modélisation par rapport au temps de conception est gigantesque en fait. Je vois quand je modélise un bâtiment de logements, je passe plus de temps à me demander comment je vais faire ça, comment je vais le représenter, comment je vais le modéliser, plutôt que si j’étire ce module là, qu’est-ce que ça donne. Si je rajoute de la lumière là ou une fenêtre là, est-ce que j’ai la perception d’une diagonale. Enfin, des éléments architecturaux. Je pense que ça formate un peu la pensée. Au lieu de penser en volume, en espace, on pense en mur, en fenêtres, en éléments architecturaux, plus qu’en un ensemble. Je pense que comme avant, quand on dessinait sur AutoCad de manière classique au trait et qu’on détaillait de plus en plus le projet en fonction des phases, il y a toujours une phase où on était sur le calque d’étude. Mais on n’a plus le temps de réfléchir. C’est vrai que le BIM, a tendance à accélérer le temps de travail. Ça m’arrive d’avoir des opérations de logements à faire. On me dit le lundi matin, il faut que tu fasses 30 logements, tu as 2000m² de surface de plancher à créer. Il faut rendre ça vendredi. Tu as le terrain,


le parcellaire, le PLU, débrouille-toi. Et bien au final, le temps de penser de l’architecture et le temps de conception, c’est vrai que c’est une demi-journée à essayer de griffonner sur calque, comment je peux créer, comment organiser les volumes, comment organiser les circulations, comment répartir les surfaces, les espaces, les trames. Mais après, c’est tout de suite, comment je fais une coupe schématique, comment je fais un plan schématique, comment je fais ma 3D puisque tu as presque deux jours de boulot sur des perspectives qui vendent du rêve. Je pense que c’est un outil qui sert un peu l’utilisateur parce qu’il voit vite ce qu’il veut voir mais qui dessert notre profession parce qu’on va trop vite. On montre tout de suite trop de choses.

ANNEXE

128

Dans le Plan Transition du Numérique dans le Bâtiment, le PTNB, une attention particulière est portée au TPE/PME. Pensez-vous que le BIM risque d’être fatal pour les petites agences ? Je pense que ça va pousser de plus en plus d’agences, d’architectes à regrouper leurs moyens, à s’associer, monter des sociétés où ils regroupent leurs moyens avec des architectes salariés ou de jeunes diplômés. Je pense que cela va avoir tendance à réduire le nombre d’architectes installé tout seul dans leur coin, dans leur campagne. Je pense que ça va augmenter la taille des agences, de plus en plus aller vers des structures de taille moyenne plutôt que des structures de un ou deux architectes. Mais, je pense que les petites agences vont se tourner de plus en plus vers la maison individuelle, la petite commande publique que la moyenne, grosse commande publique, les concours tout ça. Cela va être réservé aux agences qui ont les moyens de faire du BIM. Parce qu’on voit de plus en plus d’appels d’offres, rendus sur maquette numérique. C’est une méthode de sélection dans une période où la crise frappe et où les agences, pour se démarquer, ont fait les formations ou ont pu se payer des logiciels qui permettent de modéliser en 3D. Je pense qu’en tout cas, ça va permettre à des agences de taille moyenne ou grosse d’accéder plus facilement à des marchés auxquels elles n’avaient pas accès avant. Et ça va sans doute nuire aux architectes qui travaillent un peu tout seul dans le coin.


Pour conclure cette interview, vous avez encore quelques mots à rajouter sur le BIM ? Je pense que le BIM c’est un outil et qu’il doit rester outil. Que l’architecte doit garder son rôle d’architecte et il ne doit pas être un BIM manager et regrouper toutes les fonctions de maquettiste numérique, gérer les bureaux d’études, s’ils ont bien modélisé leur travail, si le rendu est passable. Enfin, je pense que c’est un outil et que ça doit rester un outil et pas un moyen pour arriver à ses fins. Très bien merci. Interview réalisée par Méghane FRIGELLI

ANNEXE

129


130

Glossaire


A ACV (Analyse du Cycle de vie ou Life Cycle Analysis) : Evaluation des ressources nécessaires lors de la fabrication d’un produit, accompagné des effets directs ou indirects sur l’environnement.

B BIM : Acronyme de trois choses distinctes :

- Building Information Model désigne la base de données des objets BIM dont on tire notamment la maquette numérique, mais pas seulement. - Building Information Modeling désigne les processus de travail collabo- ratif autour de la base de données BIM. Autrement dit, il s’agit de modéli- sation collaborative. - Building Information Management désigne les processus de gestion pro- prement dite de la base de données BIM mais également les processus d’une collaboration impliquant toutes les parties prenantes, tout au long du cycle de vie du projet (conception et construction) et du bâtiment (ex ploitation et maintenance, déconstruction et recyclage).

131

BIM manager : Nouveau métier dans lequel le BIM manager développe et met en place le BIM, dans les dimensions humaines, technologiques et économiques.

C CAO (Conception Assistée par Ordinateur) : Ensemble de logiciels et de techniques de modélisation géométrique utilisés pour concevoir et réaliser des produits.

COBie (Construction Operations Building information exchange) : Format

d’échange utilisé en Angleterre, basé sur les définitions de l’IFC. Ce format contient principalement des informations non-graphiques.

Convention BIM : A pour objectif de définir les priorités, les politiques et les

procédures à respecter lors d’une collaboration BIM. La convention sert en cas de litige ou d’erreur au cours de la réalisation d’un projet.

D DAO (Dessin Assisté par Ordinateur) : Système composé de logiciels permettant de réaliser des dessins techniques généralement sous forme de vecteurs.

DOE (Dossier des Ouvrages Exécutés) numérique : Suite à la construction

de l’ouvrage, le maître d’œuvre doit transmettre au maître d’ouvrage le dossier des ouvrages exécutés composé de l’ensemble des documents concernant le bâtiment. Avec l’arrivée du BIM, ce DOE devient numérique.

GLOSSAIRE

LEVAN Serge. Management et collaboration BIM. Eyrolles, Septembre 2016. 179p.


E

Energie grise : Dépense énergétique totale consommée tout au long du cycle

F

Freelance : Prestataire indépendant qui exerce une activité professionnelle

G

Gestion du patrimoine : Une fois la construction réalisée, le processus BIM

I

IFC (Industry Foundation Classes) : langage orienté objet utilisé par l’indus-

132

de vie d’un matériau allant de la production, à la fabrication, au transport et à la mise en oeuvre du produit. Son usage et sa destruction sont également pris en compte. pour d’autres entreprises.

permet d’avoir la carte d’identité complète du bâtiment. Ainsi, pour ce qui est de l’entretien ou encore du souhait de modification du bâtiment, la maquette permet de justifier et d’orienter rapidement les futurs travaux. trie du bâtiment pour échanger et partager des informations entre logiciels. C’est un format ouvert de fichier, labellisé ISO 16739 depuis 2013. Il a pour but d’assurer l’interopérabilité des logiciels métiers BIM.

GLOSSAIRE

« Conduire la transformation digitale », Avril 2016. Manifeste, 33p.

Interopérabilité : Capacité d’échanger des données entre les logiciels des différents éditeurs grâce à un fichier standard neutre et ouvert lisible par tous : l’IFC

L

LOD (Level Of Definition) : Quantité d’informations et niveau de représenta-

M

Maquette numérique : (Building Information Model) : est constituée de mul-

tion graphique de la maquette numérique que l’on souhaite donner en fonction des stades de construction du projet.

tiples types de composants, qui sont organisés et décrits dans une base de données structurée et qui représentent des éléments réels de la construction. Elle contient des objets BIM portant l’ensemble des informations et des propriétés de projet. Cette maquette est réalisée à partir d’outils informatiques BIM. Cette base de données peut être exploitée de différentes façons : représentation géométrique 3D, tableaux, nomenclatures d’objets. « Conduire la transformation digitale », Avril 2016. Manifeste, 33p.

Mastère spécialisé BIM : Formation continue proposée par l’ENPC (Ecole Nationale des Ponts et Chaussées) et l’ESTP (Ecole Spéciale des Travaux Publics) sur la thématique : BIM, Conception intégrée et cycle de vie du bâtiment et des infrastructures. Ses objectifs sont de former des professionnels à manager un projet réalisé en BIM ainsi que d’aider les acteurs à mettre en place un travail collaboratif grâce à un système d’information interopérable.


N Niveau de maturité : Etapes à franchir afin de s’orienter vers le BIM colla-

boratif. L’objectif à atteindre est le niveau 3. Les niveaux 0,1 et 2 doivent être considérés comme des étapes et non pas une fin en soi.

O openBIM® : Désigne l’interopérabilité des logiciels dans le cadre de la maquette numérique « libre » normalisée. C’est une initiative de buildingSMART International (bSI), garant du modèle IFC, norme reconnue pour l’interopérabilité BIM.

Open BIM™ : Alliance d’éditeurs de logiciels sans Autodesk. L’Open BIM est un

programme de coopération universel reposant sur des standards et des processus de travail ouverts et destiné au domaine de la conception, de la construction et de l’utilisation de bâtiments. informations concernant un objet (forme, dimensions, positions...) grâce à des photographies.

Plugin (ou plug-in) : est un logiciel qui améliore un logiciel hôte afin de compléter ses fonctionnalités.

Processus BIM : ensemble d’actions mises en oeuvre afin d’atteindre des objectifs BIM.

PTNB (Plan Transition Numérique dans le Bâtiment) : Lors du conseil des mi-

nistres du 10 décembre 2014, Madame Sylvia Pinel, ministre du Logement, de l’Égalité des territoires et de la Ruralité, a présenté son plan de relance de la construction. Figurant parmi les trois plans d’intervention, le Plan Transition Numérique dans le Bâtiment (PTNB) vise à accélérer le déploiement des outils numériques à l’échelle de l’ensemble du secteur du bâtiment. http://www.batiment-numerique.fr/PTNB/presentation.htm

T Travail collaboratif : Désigne la coopération entre les membres d’une équipe afin d’atteindre des objectifs communs.

133

GLOSSAIRE

P Photogrammétrie : Ensemble de techniques qui permettent de relever les


134

Bibliographie


Dossiers :

« A l’aube du BIM », Mars-Avril 2016 (dossier). Géomatique expert, n°109, pp.641. « Architecture numérique : culture et stratégies opératoires », Février 2011 (dossier). D’A. D’Architectures, n°197, pp. 31-49. « BIM : ceux qui ont sauté le pas… », Mars-Avril 2016 (dossier). Cad-magazine, n°190, pp.46-52. «BIM : Building Information Modeling», Mars 2014 (dossier). Cahier pratique le moniteur des travaux publics et du bâtiment, n°5756, 35p. « Conduire la transformation digitale », Avril 2016. Manifeste, 33p.

« Guide méthodologique pour des conventions de projets en BIM », avril 2016. Médiaconstruct, 50p. « MOP et BIM », Juin 2015 (dossier). Passion architecture, n°53, 4p. « Transition numérique : une révolution qui fait BIM !», Avril 2016 (dossier). Le magazine de l’ingénierie territoriale, n°14, pp. 29-51.

Interviews :

CHENU, José-Michaël vice-président d’EGF-BTP, en charge du groupe de travail « Numérisation de la construction », Mars 2015. La loi MOP et le BIM ne sont pas incompatibles. Propos recueillis par Sophie d’Auzon et Julie Nicolas. Le moniteur des travaux publics et du bâtiment, n°5809, p.24.

Livres :

CELNIK, Olivier ; LEBEGUE Eric, Octobre 2015. BIM & maquette numérique : pour l’architecture, le bâtiment et la construction. Eyrolles, 763p. GUEZO, Julie ; NAVARRA, Pierre, Avril 2016. Revit Architecture : développement de projet et bonne pratique. Eyrolles, 430p. LEVAN, Serge, Septembre 2016. Management et collaboration BIM. Eyrolles, 179p.

Mémoires d’étudiants :

PREVOST, Augustin, 2016. Le BIM. Mémoire de master en architecture, sous la direction d’Olivier Bouet, Paris, Ecole d’architecture Paris-Val de Seine, 61p. TRAN, Caroline, 2015. La maquette numérique et la pratique du BIM en architecture. Mémoire de master en architecture, sous la direction de Alain Guiheux, Paris, Ecole d’architecture Paris-Val de Seine, 96p.

135

BIBLIOGRAPHIE

« Dossier nouvelles technologies », Avril-Mai 2009 (dossier). Archistorm, pp.6069.


Pages Web :

DICKINSON John, Septembre 2014. BIM PxP: Knowing the execution plan essentials. Construction Canada [en ligne]. Disponible sur : http://www.constructioncanada.net/bim-pxp-knowing-theexecution-plan-essentials/ [consulté le 21 décembre 2016] GUERINEAU, Julie, Janvier 2015. BIM : les anglais ont tiré les premiers. Le moniteur [en ligne]. Disponible sur : http://www.lemoniteur.fr/articles/bim-les-anglais-ont-tire-lespremiers-26830882 [consulté le 20 décembre 2016]. L’Ordre des architectes, Juillet 2015. Le BIM : un atout pour l’architecture [en ligne]. Disponible sur : http://www.architectes.org/le-bim-un-atout-pourl%E2%80%99architecture [consulté le 24 Juillet 2016] L’Ordre des architectes, Juillet 2016. Résultats du sondage « BIM : le ressenti des architectes [en ligne]. Disponible sur : http://www.architectes.org/actualites/resultats-du-sondagebim-le-ressenti-des-architectes [consulté le 24 Juillet 2016]

BIBLIOGRAPHIE

136

NBS, 2014. Rapport national NBS BIM 2014 [en ligne]. Disponible sur : https://www.thenbs.com/knowledge/nbs-national-bim-report-2014 [consulté le 20 décembre 2016] ROUSTAN, Guilhem, Mouvement des architectes, Juin 2015. BIM BAM BOUM [en ligne]. Disponible sur : http://www.mvta.eu/#!BIM-BAM-BOUM/ ckho/556dc2790cf24a1983768097 [consulté le 24 Juillet 2016]

Rapport :

DELCAMBRE Bertrand, Décembre 2014. Mission Numérique Bâtiment. Paris, 54p.

Revues :

Architecture et Commande Publique ; Centre de Formation des Architectes d’Aquitaine ; Conseil Régional de l’Ordre des Architectes d’Aquitaine ; Maison des architectes ; Pavillon de l’architecture, Novembre 2014. BIM 308, n° spécial BIM, 14p. COUSIN Jean-Pierre, Novembre 2015. BIM : et l’architecte ? L’Architecture d’aujourd’hui, n°409, pp.94-96. DESMOULINS Christine, Novembre 2014. La promesse et les menaces de la maquette numérique (BIM). D’A. D’Architectures, n°231, pp.23-23. DIDELON Valéry, 2014. L’empire du BIM. Criticat, n°13, pp.70-77. EASTMAN Charles, Janvier 1975. The use of computers instead of drawings in building design. AIA Journal, pp.46-50. EHRET Paul, Mai-Juin 2008. Vers le BIM (Building Information Model). Archistorm, n°31, pp.48-49.


HOVORKA Frank, MIT Pierre, mars 2014. Un avatar numérique de l’ouvrage et du patrimoine au service du bâtiment durable : le « Bâtiment et Informations Modélisés » (BIM) Tome 1 : rapport et proposition, Plan Bâtiment durable. Paris, 64p. HUDIN Antoine, Avril 2014. BIM : simple outil ou révolution dans l’organisation? Les cahiers techniques du bâtiment, n°332, pp.8-9. HUDIN Antoine, Octobre 2014. Les BIM d’Or récompensent des projets d’une grande diversité. Les cahiers techniques du bâtiment, n°336, pp.6-7. REYNE Bruno, Décembre 2014. Bim bang. Auvergne Architectures, n°64, p.3.

Webographie :

DI GIACOMO, Emmanuel. ABCD Blog : Architecture, BIM & Conceptual Design by Autodesk [en ligne] Disponible sur : http://abcdblog.typepad.com/ [consulté le 11 Novembre 2016] Allplan. Allplan [en ligne] Disponible sur : https://www.allplan.com/en.html [consulté le 20 Janvier 2017]

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Autodesk. Autodesk [en ligne] Disponible sur : http://www.autodesk.fr/ [consulté le 20 Janvier 2017] BIMobject. BIMobject [en ligne] Disponible sur : http://bimobject.com/fr [consulté le 11 Novembre 2016] Médiaconstruct. Médiaconstruct, buildingSmart France [en ligne] Disponible sur : http://www.mediaconstruct.fr/sinformer/le-blog-du-bim [consulté le 10 Février 2017] RIEDO, Patrick. Objectif BIM [en ligne] Disponible sur : http://www.objectif-bim.com/ [consulté le 11 Novembre 2016] Polantis. Polantis [en ligne] Disponible sur : https://www.polantis.com/fr/ [consulté le 20 Janvier 2017] République française. Plan Transition du Numérique dans le Bâtiment [en ligne] Disponible sur : http://www.batiment-numerique.fr/ [consulté le 11 Novembre 2016] Travaux. Travaux : revue technique des entreprises de travaux publics [en ligne] Disponible sur : http://www.revue-travaux.fr/917/ [consulté le 11 Novembre 2016]

BIBLIOGRAPHIE

ArchiCAD. ArchiCAD [en ligne] Disponible sur : https://archicad.fr/ [consulté le 20 Janvier 2017]


138

Table des illustrations


Page de couverture : Fondation Louis Vuitton - Frank Gehry

Introduction [Fig. 0.1] - Ecole des Beaux-Arts : http://www.beauxartsparis.fr/fr/ [Fig. 0.2] - PTNB : http://www.batiment-numerique.fr [Fig. 0.3] - Bertrand Delcambre : https://www.alliancy.fr/portraits [Fig. 0.4] - Recherches de Charles M. Eastman : Charles M. Eastman, mars 1975. The use of computers instead of drawings in building design, AIA Journal. [Fig. 0.5] - Définition BIM - Réalisation personnelle

Partie 1 : Qu’est ce que le BIM ?

139

TABLE DES ILLUSTRATIONS

[Fig. 1.1] - Exemple de maquette numérique Autodesk - « BIM : ceux qui ont sauté le pas… », Mars-Avril 2016 (dossier). Cad-magazine, n°190, pp.46-52. [Fig. 1.2] - Illustration des niveaux de développements (LOD) - Réalisation personnelle inspirée de https://bimbtp.com, http://www.prix-pose.com/ipn/ [Fig. 1.3] - Capacité à agir sur les coûts et les changements en fonction du processus choisi - Réalisation personnelle inspirée de la Courbe MacLeamy [Fig. 1.4] - Dimensions du BIM - Réalisation personnelle [Fig. 1.5] - Echanges entre les intervenants du BTP - Réalisation personnelle inspirée de la Plaquette All plan 2016 [Fig. 1.6] - Niveau de maturité BIM - Réalisation personnelle inspirée de « Conduire la transformation digitale », Avril 2016. Manifeste, 33p. [Fig. 1.7] - Cloud 360 proposé par Autodesk - Inspiré des schémas Autodesk [Fig. 1.8] - Evolution de l’IFC et ses différents formats - http://www.buildingsmart-tech.org [Fig. 1.9] - Exemple d’une équipe BIM - Réalisation personnelle inspirée de Médiaconstruct, guide méthodologique [Fig. 1.10] - Schéma du processus de management - Réalisation personnelle inspirée de Management et collaboration BIM - Serge K. Levan [Fig. 1.11] - Liste des missions qui relèvent de la fonction de manager - Inspiré de Management et collaboration BIM - Serge K. Levan [Fig. 1.12] - Qui est le BIM manager ? - Réalisation personnelle [Fig. 1.13] - BIM World 2016 - https://bim-w.com/ [Fig. 1.14] - Travail collaboratif entre l’architecte et les bureaux d’études - Réalisation personnelle inspirée d’une maquette Elithis avec Stabicad, Stabiplan [Fig. 1.15] - Atouts de la maquette numérique pour la maîtrise d’ouvrage Réalisation personnelle [Fig. 1.16] - Consommation finale d’énergie par secteur en 2010 en France MENGONI Jean-Claude. La construction écologique : matériaux et techniques. Terre vivante, 2011, 303p. [Fig. 1.17] - Energie grise non renouvelable en kg de quelques matériaux (enkWh) - MENGONI Jean-Claude. La construction écologique : matériaux et techniques. Terre vivante, 2011, 303p.


[Fig. 1.18] - Cycle de vie d’un bâtiment - Réalisation personnelle inspirée de bâtiment de demain, Décideurs : Guide - Annuaire [Fig. 1.19] - Processus d’exploitation IMS 3D - Réalisation personnelle inspirée de la plaquette Viametris IMS3D 2016 [Fig. 1.20] - Exemple de drone adapté pour la photogrammétrie DJI Phantom 3 professionnel - http://www.dji.com/fr/phantom-3-pro [Fig. 1.21] - Exemple de nuage de point possible grâce à la photogrammétrie http://www.techni-flight.com/

Partie 2 : Le développement du BIM dans les agences d’architecture en France

TABLE DES ILLUSTRATIONS

140

[Fig. 2.1] - Panel d’interviewé - Réalisation personnelle [Fig. 2.2] - Les différentes étapes de mise en place du BIM logo ArchiCad - Réalisation personnelle avec le logo ArchiCad : https://archicad.fr/ logo AllPlan : https://www.allplan.com/en.html logo Revit : http://www.autodesk.fr/products/revit-family/overview logo formation : http://www.webmarketingtourisme.com/creation-de-siteweb/logo-formation/ [Fig. 2.3] - Les différentes interfaces des sites internet dédiés aux logiciels BIM Interface ArchiCad : https://archicad.fr/ Interface AllPlan : https://www.allplan.com/en.html Interface Revit : http://www.autodesk.fr/products/revit-family/overview [Fig. 2.4] - Les différentes interfaces des logiciels de maquette numérique Interface ArchiCad : https://archicad.fr/ Interface AllPlan : https://www.allplan.com/en.html Interface Revit : http://www.autodesk.fr/products/revit-family/overview [Fig. 2.5] - Inferface du site de formation Elephorm - http://www.elephorm. com/recherche/BIM [Fig. 2.6] - Plaquette Mastère BIM - http://mastere-bim.enpc.fr [Fig. 2.7] - Les erreurs qu’il faut éviter lors du passage au BIM - Réalisation personnelle [Fig. 2.8] - Informations liées à la maquette numérique - Réalisation personnelle [Fig. 2.9] - Ressenti des architectes sur le BIM - Sondage « le BIM dans le secteur du BTP, ressenti des architectes » réalisé entre avril et juin 2016 et publié par l’Ordre des Architectes [Fig. 2.10] - Diffusion du processus BIM à travers la france - Réalisation personnelle image skyline : http://fr.freepik.com/ [Fig. 2.11] - Catégories d’investissements prévus dans les deux ans - Réalisation personnelle inspirée de « Conduire la transformation digitale », Avril 2016. Manifeste, 33p. - Catégories d’investissements prévus dans les deux ans, moyenne de l’ensemble des réponses p.13


[Fig. 2.12] - Arrivée d’un étudiant sur le marché du travail - Réalisation personnelle silhouette école : http://fr.freepik.com/icones-gratuites/ecole_700307.htm

Partie 3 : Un processus qui pose encore des questions chez les architectes

141

TABLE DES ILLUSTRATIONS

[Fig. 3.1] - Objectifs et solution proposés par l’Angleterre pour résoudre les difficultés rencontrées dans le domaine du bâtiment - Réalisation personnelle [Fig. 3.2] - Sondage sur le BIM en Angleterre proposé par NBS - « Rapport national NBS BIM 2014 ». NBS [en ligne]. NBS, 2014 [consulté le 20 décembre 2016] https://www.thenbs.com/knowledge/nbs-national-bim-report-2014 [Fig. 3.3] - Page d’accueil du site internet du BIM Task Group - capture d’écran : http://www.bimtaskgroup.org/ [Fig. 3.4] - Organisation d’un fichier COBie - http://www.bimblog.lu/cobie-interoperability-tests/ [Fig. 3.5] - Différences de mise en place du BIM entre l’Angleterre et la France Réalisation personnelle [Fig. 3.6] - Un processus qui pourrait nuire aux architectes - Réalisation personnelle [Fig. 3.7] - Dessin à la main avant l’arrivée de l’ordinateur - https://www.facebook.com/ARCFLY/ [Fig. 3.8] - Pages d’accueil des sites internet Bimobject et Polantis, bibliothèques BIM - http://bimobject.com/fr, https://www.polantis.com/fr/ [Fig. 3.9] - Démarche générale de rédaction d’une convention BIM - « Guide méthodologique pour des conventions de projets en BIM », avril 2016. Médiaconstruct, 50p. [Fig. 3.10] - Exemple de démarche pour le choix et la rédaction de vos processus à intégrer à la convention BIM - inspirée de « Guide méthodologique pour des conventions de projets en BIM », avril 2016. Médiaconstruct, 50p. [Fig. 3.11] - Les différentes pistes de l’Etat pour les TPE/PME - Réalisation personnelle d’après DELCAMBRE Bertrand, Décembre 2014. Mission Numérique Bâtiment. Paris, 54p. [Fig. 3.12] - Projet de logements à Levallois-Perret réalisé sur ArchiCad par l’agence Z.Studio - http://www.zstudio.fr/projets/habitat/immeuble-de-logements-a-levallois-perret-92[Fig. 3.13] - Modélisation BIM du Louvre des Antiquaires à Paris sur Revit par l’agence Sona - http://www.sona-architecture.com/articles/2016/6/7/modlisation-bim-du-louvre-des-antiquaires-paris-75 [Fig. 3.14] - Solutions de replis pour les TPE/PME - Réalisation personnelle


Table des matières

142

Remerciements ..................................................................................................................

2

Avant-propos ......................................................................................................................

4

Sommaire ...........................................................................................................................

6

Introduction ........................................................................................................................

8

TABLE DES MATIERES

Partie 1 :

Qu’est-ce que le BIM ? ..................................................................... 14

1.1. Une méthode de travail à apprivoiser ............................................................... 1.1.1. La maquette numérique ........................................................................ 1.1.2. Le travail collaboratif au sein d’une agence .......................................... 1.1.3. L’interopérabilité ...................................................................................

15 15 18 20

1.2. Une organisation à mettre en place par un BIM manager.............................. 1.2.1. Les missions et responsabilités du BIM manager .................................. 1.2.2. Les compétences du BIM manager ........................................................ 1.2.3. Le BIM manager et l’architecte ..............................................................

22 22 24 26

1.3. Une méthode de travail qui s’étend bien au-delà de l’agence ....................... 1.3.1. Un travail collaboratif avec tous les intervenants du BTP facilité .................................................................................................... 1.3.2. La question environnementale .............................................................. 1.3.3. Le BIM et le patrimoine .........................................................................

29

Partie 2 :

29 31 33

Le développement du BIM dans les agences d’architecture en France .................................................................. 36

2.1. Les différentes étapes de mise en place du BIM dans une agence ............... 2.1.1. La volonté de l’architecte ...................................................................... 2.1.2. Les logiciels contribuant au processus BIM ........................................... 2.1.3. La formation ...........................................................................................

38 38 39 42


2.2. Les erreurs qu’il faut éviter ....................................................................... 2.2.1. L’isolement, l’abandon ................................................................. 2.2.2. La précipitation ............................................................................ 2.2.3. Ne pas structurer son travail ........................................................

44 44 45 46

2.3. Des agences françaises en retrait ............................................................ 2.3.1. Un manque de connaissance du processus ................................. 2.3.2. Un changement qui demande de l’investissement ...................... 2.3.3. Une demande de soutien ............................................................

48 48 49 52

Partie 3 : Un processus qui pose encore des questions chez les architectes ................................................................. 54 55 143 55 58

3.2. Un processus qui pourrait nuire au métier d’architecte ....................... 3.2.1. Ne pas s’emparer du processus ..................................................... 3.2.2. Le risque d’une standardisation ..................................................... 3.2.3. La responsabilité de la maquette numérique ................................ 3.3. Une pression importante pour les petites agences (TPE/PME) ........... 3.3.1. Une attention particulière dans le rapport Delcambre .................. 3.3.2. Des petites agences qui se démarquent ........................................ 3.3.3. Des solutions de replis pour les agences en situation fragile ...........................................................................................

61 61 62 64

59

67 67 68 70

Conclusion ................................................................................................................... 72 Annexe ........................................................................................................................ 76 Glossaire ..................................................................................................................... 130 Bibliographie ............................................................................................................... 134 Table des illustrations .................................................................................................. 138 Table des matières ...................................................................................................... 142

TABLE DES MATIERES

3.1. La dynamique du BIM chez les anglo-saxons ......................................... 3.1.1. Quelques chiffres ........................................................................... 3.1.2. Une mise en place du BIM différente de la nôtre .......................... 3.1.3. Un tissu différent entre le monde de la construction anglo-saxon et français ................................................................




Le BIM est aujourd’hui au coeur de toutes les discussions des professionnels du bâtiment. En effet, du plan de relance de la construction a découlé le PTNB (Plan Transition du Numérique dans le Bâtiment) dans lequel le BIM est porteur d’espoir pour la profession. Il impose une réorganisation du travail par le biais de nouvelles méthodes de production et d’échange. Dans sa définition, le BIM se compose d’une maquette numérique, complétée par une méthode de travail numérique et collaborative, ainsi qu’une gestion des échanges et des données du bâtiment modélisé. Pour y arriver, il est nécessaire de suivre un certains nombres d’étapes. Aujourd’hui en France, le BIM n’est pas obligatoire. Ce n’est pas le cas des Anglo-Saxons, pour qui le BIM est déjà adopté depuis plusieurs années. Ils sont considérés comme des précurseurs. C’est également grâce à eux que l’on sait que le BIM est porteur d’améliorations et d’économies pour la profession. Cependant, certains professionnels français restent tout de même sceptiques face à ce processus. En plus de décrire ce qu’est le BIM, ce mémoire expose les différents points de vue et expériences de professionnels dans le but que ce dernier puisse orienter les futurs « bimeurs » dans leur démarche.

Le BIM est en marche !

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