(Page reste vierge image seulement pour finaliser le choix de la couverture)
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LE CARNET DU VEILLEUR [Sous-titre]
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Du même auteur Aux éditions Pollymnie’Script [La cave des Exclus]
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MEL ESPELLE
LE CARNET DU VEILLEUR
Polymnie ‘Script
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© 2014 – Mel Espelle. Tous droits réservés – Reproduction interdite sans autorisation de l’auteur.
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[Dédicace]
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[PrĂŠface]
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Chapitre 1 Premier jour à Marie Stuart. Ça pue. Je viens de recevoir mon emploi du temps par courrier ainsi que la liste de mes professeurs. Ils indiquent la salle 123. Le bahut est coincé entre York Way et Copenhagen Street et bien-sûr il me faut 35 minutes en métro pour m’y rendre. L’arrêt c’est King Cross Station et pour qui connait ce n’est pas loin de la British Library, un haut lieu de la culture londonienne en plein quartier de Bloomsbury ; dans ce même périmètre on trouve surtout University College et l’University Of London. Ce qui fut moins cool c’est de mettre son réveil à sonner pour 06 :30. Je partage l’appartement avec l’ex-coloc de mon frère, Irving Nash dit Dixi. Il a fait deux ans de taule pour braquage et six mois fermes pour avoir tabasser un flic. Il ne faut pas l’énerver c’est tout. Quant à mon frère il purge sa peine en prison. Il a pris pour six ans : braquage à main armée, violence aggravée sur représentants de l’ordre et j’en passe. Irving a un entretien ce matin pour travailler comme vigie dans une société dont le nom m’échappe et pour l’heure il squatte la salle de bain. « Putain Irving tu vas me mettre en retard ! » Ai-je dis en tambourinant à la porte. « C’est mon premier jour aujourd’hui, merde ! » On partage l’appartement de 56m² au deux ou parfois à trois, voire plus en fonction des pétasses que Irving ramènent ici. Ils sniffent de la coke et baisent comme des lapins. « Tu sais faire le nœud de cravate ? Vas-y ! » Irving c’est 1m79 de muscles, il est recouvert de tatouages et il a un
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regard dur, de ceux qui vivent dans la rue depuis toujours. Quand j’arrivai à Marie Stuart, la cloche avait sonné depuis un moment déjà, une demi-heure pour être honnête. Les couloirs étaient déserts. Pas âme qui vive. Salle 123. Au bout du couloir normal et on y accède par un long couloir avec du parquet à l’ancienne. Je frappais à la porte. C’est mon premier jour, alors j’essaye d’avoir un semblant d’éducation. « Vous devez être Haley McIntyre, c’est bien ça ? » Ca glousse dans la salle. McIntyre c’est le nom de jeune fille de ma mère, celui de mon père…je ne peux plus l’entendre, ni le voir écrit. « Vous savez l’heure qu’il est, McIntyre ? » S’il me vire de son cours, je suis mal. « Ca va pour cette fois-ci, allez vous assoir ». Tous les styles sont représentés ici, un échantillon de ce que l’on trouve à l’extérieur dans les rues de Londres ; des afro-anglaises, des blondes suédoises, des brunes latines, des hindous. Un très large panel et très représentatif de notre société. Pas un bruit dans la salle. On pourrait presque entendre les mouches voler. Le prof les a tous maté. C’est Anderton, Leslie Anderton, une grosse pointure à Marie Stuart et les vétérans le tiennent en haute estime. Sur le blog de la prépa, on peut voir sa fiche noter par les anciens élèves et il s’en sort plutôt pas mal. Il porte la barbe et des yeux bridés comme ceux des chinooks et il a quelque chose de très charismatique quand il s’adresse à l’assemblée. Il parle du programme de l’année qui est décisive pour notre entrée à l’université. Certains refont une deuxième année pour espérer décrocher des notes favorables pour des universités du pays parmi les plus cotées. Je vins à trouver une place derrière une Africaine et là je reçus un message de Nash. G le JOB. Il va falloir arroser cela ce soir car un vrai job avec des horaires fixes c’est inattendu pour Nash. La cloche sonna et la métisse devant moi se retourna. « Toi tu as fait fort ! Plus de trois quart
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d’heures de retard, wouah ! Tu viens de Sainte Cecil il parait, ce n’est pas à côté mais bienvenue au Club. On va en chimie maintenant tu nous suis ? » Les nouvelles vont vite. Sainte Cecile, oui c’est dans la banlieue nord, une école catholique avec deux vieilles religieuses sur le banc des enseignants. Le passage obligé pour marie Stuart et peut-être ensuite l’université. Où qu’on aille il y a toujours des petits malins qui flashent la liste des élèves pour regarder le profil facebook de certains et il est possible qu’un vétéran de Sainte cecile ait balancé quelques infos sur moi. Cela ne me surprendrait pas. « Euh….Miss McIntry ? J’ai un mot de le direction pour vous. Il faudrait que vous passiez les voir avant midi et essayez d’arriver à l’heure la prochaine fois, c’est mieux pour vous comme pour vos collègues. Le programme est chargé et on ne peut perdre du temps sur des retards. Alors je compte sur vous ? » Sans rien répondre je sortis. A l’administration ils font des histoires bien que Charlie ait payé la totalité du trimestre d’avance. Ils connaissent mon dossier et ils ont probablement peur que je fasse des histoires au cours de l’année ; le monde à l’envers, non ? « Sécher les cours n’est pas une option, Miss MacIntyre et après trois absences non justifiées, vous ne pourrez vous présenter à l’examen final, lança Mrs Norton, la secrétaire guère plus âgée que moi. Elle me prend de haut et je n’aime pas ça. Elle poursuivit la bouche du même ton, autoritaire et sec : C’est votre avenir que vous jouez et celui de vos camarades de classe car un fort taux d’absentéisme et nuisible à la bonne marche de nos cours ! » Le reste de la journée fut longue et pénible. Les matières choisies l’année dernière parmi les plus ardues avec un fort coefficient. Impossible pour mo de me présenter avec des notes insuffisantes et après un rapide calcul, si je ne parviens pas à avoir la matière dans trois de ces manières pour moi, cela sera la fin de cette aventure. Rien que dit penser j’en ai véritablement mal au ventre. Plus j’y pensais et plus ça me déprimait. Le directeur de Stuart disait qu’il
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fallait voir mon admission comme une seconde chance pour me réinsérer dans la société. Cela me révoltait d’entendre ça ; je n’étais pas non plus une reprise de justice ou en liberté conditionnelle, je ne deale pas non plus, j’avais seulement fugué et j’avais mendié, passé plusieurs nuits dehors et les services sociaux me connaissaient, ainsi que la protection de l’enfance et un tas d’autres services travaillant pour le bien-être des mineurs. Bien que ces histoires fussent anciennes je trainais derrière moi un nombre indéfinissables de casseroles dont des petits délits qui me valurent de brefs séjours en maison pour mineurs. Aux alentours de dix heures je rentrais à l’appartement. Devant la porte se trouvait être Jack, assis entre les mégots de cigarettes et les crachats. Les mains chargées de bouffe, je montais en trainant des pieds surprise de le trouver ici. « Qu’est-ce que tu fais là Buns ? —je veux seulement savoir s’il y a du nouveau, argua ce dernier en m’aida avec les courses. Nash est toujours réglo avec toi ? —Ben ouais, cela te surprend on dirait ! Tu veux rentrer ? Il ne devrait pas tarder. Il a dégoté un job pas très loin d’ici. C’est un bon début, tu ne crois pas, c’est toujours mieux que de rester squatter en bas de l’immeuble. Défais tes souliers s’il te plait ! » Il s’exécuta avant de se vautrer sur le canapé. Jack c’est une très vieille connaissance ; on a fait les quatre cents coups ensemble avant qu’on ne l’arrête pour possession de drogue. Il a été relaxé après huit mois passés au trou maintenant il vit sous les ponts et bouffe à la soupe populaire quand il n’est pas ici à pioncer au bas de mon plumard. « Et ça va l’université ? —ce n’est pas l’université, c’est une prépa ! En fait c’est une sorte de classe pour les gens qui n’ont pas le niveau pour aller sur les bancs de l’université. Pas le niveau et pas la thune non plus. J’appartiens à ces deux catégories et je pense que je vais assurer. Cela ne sera jamais aussi pire que l’année passée ! Tu as mangé ? »
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Il se caressa son bouc, le regard lointain. Parfois il m’était impossible de savoir où il était. Il lui arrivait de rester de longues minutes dans ses pensées les plus sombres et il en ressortait le plus naturellement comme si de rien n’était. Parfois son corps témoignait de la fureur de son existence et chacune de ses cicatrices racontaient quelque chose de tragique. « J’ai du taffe pour demain mais il reste de quoi manger pour toi. Tu pourras rester là ce soir si tu promets de partir demain matin. C’est Nash qui paye le loyer et il n’aime pas te savoir ici quand il n’y est pas, on ne peut pas lui en vouloir, il est comme ça. —Non, c’est cool t’inquiète. Je mange un morceau et je m’en vais. » » Ta gueule pétasse, ai-je envie de dire mais ma. « Alors tes cours ? Tu as gérer ? » Le nez dans mon manuel, j’écoutais une émission à la télé tout en bidouillant sur mon portable. Irving m’écrasa les épaules de ses mains puissantes et s’assit en face de moi, une bière à la main. « Tu veux savoir pour moi ? Le type m’a regardé comme je te regarde maintenant… droit dans les yeux comme ça et il m’a dit : Toi tu feras l’affaire mon garçon. On te prend à l’essai. J’ai discuté salaires, tu vois, parce que je n’ai pas envie qu’on m’entourloupe. Alors je l’ai regardé dans le blanc des yeux et je lui ai dit : D’accord, mais je vaux plus que ce qui est écrit dans l’annonce. Il n’a pas protesté et j’ai même eu droit à une avance. C’est cool, non ? Et toi ta journée ? Et bien racontes ! Tu t’es faite de nouveaux potes ? —Non. Pour le moment je…j’observe. Et puis je n’ai pas grand-chose à leur raconter et mon actualité risque de les effrayer. Je suis contente pour ton boulot…je voulais t’acheter quelque chose pour fêter ça mais j’ai utilisé la thune pour acheter mes ticketsrepas pour la semaine. Tu ne m’en voudras hein d’avoir eu à choisir ?
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—Qu’est-ce que tu lis là ? —Rien. Enfin si je consulte les offres d’emploi. Je vais avoir besoin d’argent pour payer les frais de ma scolarité et tous les à-côtés. On propose un emploi de serveuse : salaire à l’heure et aux pourboires, du mercredi soir au vendredi, voire possibilités de travailler certains week ends…débutant accepté. C’est pour moi ça. Là c’est une garde d’enfants sur du périscolaire à deux heures d’ici. C’est bien payé mais un peu loin. —Tu pourrais travailler dans la salle de boxe ? Frank cherche du personnel pour l’entretien des locaux, distribuer les serviettes et s’assurer qu’il y ait suffisamment d’eau dans la fontaine. Frank prendra soin de toi. Tu es comme une sœur pour lui. Qu’est-ce que tu en dis ? —Il ne m’aime pas. Il est de ceux qui ne veulent pas s’encombrer avec une adolescente suicidaire et il l’a dit lui-même, il ne s’entoure que des meilleurs. —Ben tu pourrais commencer par être la meilleure. C’est une idée non ? Qu’est-ce que tu en penses ? Tu pourrais toi aussi monter sur le ring et apprendre à rendre les coups. Je t’apprendrais à danser comme une championne de kick-boxing, mima-t-il en simulant la défense et l’attaque, la cigarette au bec bien entendu. Les filles se battent aussi et certaines n’ont rien à nous envier ». Chemise ouverte sur son poitrail sur lequel se distingue plusieurs tatouages. Irving et sa gueule d’ange : lèvres épaisse et regard de fin psychologue. Si n’étais pas là, j’aurais atterri dans un foyer pour jeune adulte. Il sait qu’il doit se ternir à carreau, sinon…possibilité pour moi de retourner à Stafford mais à l’idée de côtoyer des ruraux ne m’enchantent guère. « Et ton cours, ça parle de quoi ? —Le prof veut qu’on prépare une dissertation sur un sujet de notre choix. J’ai choisi l’incarcération. Il veut qu’on fasse un plan avec les idées directrices. Pour le moment je ne suis pas inspirée.
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—Et il te faudrait quoi pour l’être ? C’est toi le génie ici, alors fais fonctionner ta matière grise ». La cloche sonna et l’autre merdeux de prof arriva peu avant moi et tous les fayots se précipitèrent vers lui pour se rendre utiles. « Bon…je récupère les devoirs ! La dissertation numéro 1 intitulé : Je suis un jeune futur diplômé de Cambridge en quête d’un sujet pour mon mémoire. Henderson, récupérer les copies ! Allez ! Je n’ai que trop attendu pour lire vos chef d’œuvres, argua-t-il en se frottant les mains. Beaucoup doivent penser que les efforts de tous augmenteront leur moyenne et ainsi leur évaluation de fin d’année, alors pourquoi continuer à faire cavalier seul. Nous avons besoin d’une petite mise au point… » Monroe me tapa dans le dos. « Fais passer ma copie McIntyre ! » Cette pute ne connait pas mon prénom ou bien ? Elle et Jack sont comme deux doigts de la main mais lui convoite la petite Bimbo de Grant. Jack c’est le caïd de la classe, il en faut bien un pour diriger le groupe ; par son insolence et son effronterie il arrive à se faire respecter de tous. Il vient d’une banlieue voisine de la mienne et je l’ai entendu parler d’un endroit que je connais : Le Drump. Il est teigneux, sarcastique et il refile sa came dans les chiottes du bahut. J’aime son côté écorché vif, il pourrait jouer les victimes d’un père violent mais il a décidé de se battre pour exister. Toutes les cicatrices que l’on ne voit pas, je les perçois. Nous ne sommes pas si différent l’un de l’autre. « Hey McIntyre, je te cause… » Monroe n’a pas pigé un truc à mon sujet, mieux vaut pas me chercher, surtout quand j’ai d’autres préoccupations en tête. Mon entretien a foiré. J’ai les nerfs à vif. Alors je me suis retournée et je lui ai collé un coup de boule. « Putain ! Cette salope m’a frappé ! » Personne n’a vu venir le coup. Il va falloir que j’explique ce geste à mon thérapeute. Tout le monde s’agitait autour de nous après le remous que cela à causer, la petite Monroe ne s’en remettra pas avant longtemps. « McIntyre ! Qu’est-ce qui explique un tel comportement ? Faites des excuses à votre petite camarade de classe ou je vous vire de mon cours
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manu militari ! McIntyre? » Choix n°1: je lui fais des excuses publiques, ou choix n°2: je quitte la salle de Marcus Harland. Mauvais choix. Je me retrouve avec deux heures de colle pour mercredi. Mais mercredi ce n’est pas possible, je garde des gosses. Grand silence dans la salle. Moi je me taille bien vite. Je n’ai plus rien à faire ici. Mon frère est à Wormwood Scrubs et je m’arrange pour aller le voir une fois par semaine, voire deux en fonction de mon emploi du temps. C’est situé dans l’ouest de Londres dans le Shepherd’s Bush et pour s’y rendre, il me faut une bonne demi heure si l’on prend l’A5 ; la prison se tient au-dessus du tunnel sous la Manche et devant le chemin de fer. Une ballade de santé. Ross c’est le type aux longs cheveux blonds portant la barbiche. Il ne semble pas être heureux de me revoir. « Où est cette baltingue d’Irving ? —Il a trouvé du boulot. —Lui ? Je ne te crois pas. Il n’a jamais bossé de sa vie, alors ne me fais pas croire qu’il s’est rangé. Passons… Tu as un mec en ce moment ? Tu sais que je ne veux pas que tu ramènes des mecs chez moi et j’espère que l’autre s’occupe bien de toi. Il te dorlote n’est-ce pas ? Et tes rêves ? Tu dors bien en ce moment ? Il n’y a rien de particulier de ce côté-là ? —Non je dors bien, grâce aux pilules de mon Dr Freud. —On dirait que l’école te réussit bien. Cela change de ton Centre pour les tarés. Tes petits copains de classe savent que tu es complètement barrée ? Tu leur as caché cela Haley ? Ah, ah, ha ! C’est incroyable ça ! Je ne te donne pas une semaine avant d’être virée de ce bahut. Ah, ah, ah ! Moi ça m’amuse. Le gouvernement de sa Majesté t’octroie une bourse pour que tu ailles étudier en vue d’intégrer l’université l’année prochaine, à toi ! Pardon, Monsieur le Juge mais mon psy dit que je souffre d’un désordre psychologique, pardon, mais je ne comprends pas ce que l’on attend de moi (en tentant de m’imiter) Tu es barjo Haley, mais ce n’est pas un scoop pour personne. Moi je crois que tu as intérêt à suivre ton
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traitement…le plus longtemps possible. Ah, ah, ah ! Et tes cours cela donne quoi ? Tu arrives à suivre ? » On est lundi 18, soit une semaine après la rentrée pré-universitaire. Les options choisies me permettent d’avoir un peu de temps pour soi. Alors je quittais Londres pour ma banlieue et après quarante minutes poussa enfin les portes de notre miteuse résidence. J’ai toujours détesté cet immeuble rempli de détritus de tout genre. Les voisins sont irrespectueux de l’ordre ici ; ça pue la pisse, le pétard, la graille et les marches de l’escalier sont défoncées ; on y voit le béton en-dessous. On occupe le second étage et comme il n’y en a que quatre, on peut dire qu’on occupe l’étage de préférence. Condoms dans l’escalier, mégot jeté négligemment et la voisine d’en haut qui baise comme une furie sans qu’aucun homme ne soit là à se plaindre. J’enfonçai la clef pour jeter mon sac au loin. La porte d’entrée donne directement sur la salle de bain et les wc, puis on arrive directement sur la ridicule petite cuisine, le salon et son lino et pour finir l’unique chambre à coucher où s’entasse mes affaires et celle d’Irving. Au prix de nombreux efforts je parvins à mettre la main sur mon enveloppe. Soudain on tambourina à la porte. « HALEY ! HALEY ! Ouvres cette PUTAIN de porte ! » Pourquoi Irving rentre-t-il de si bonne heure ? Il est allé récupérer Target son dogue argentin chez Hemming notre voisin et son chien aussitôt monte sur le canapé-lit, la langue pendante et les oreilles qu’il a bien pointues dressées dans la direction de son maître. « Qu’est-ce que tu fais ici ? » Il est de très mauvaise humeur et me fusilla du regard. « Tu as oublié que je vis ici ? Et toi ? Tu n’étais pas censé être au travail ? —Je n’en ai plus. Je viens de me faire lourder. Il s’écroula sur le canapé, ayant ôté chemise et pantalon. J’ai collé un pain à un client et…on va se débrouiller autrement, j’ai d’autres propositions. —Tu plaisantes là? —Je vais faire des courses, tu veux quelque chose ? »
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Peu de temps après sa sortie, on frappa à sa porte. Derrière l’œil de la porte, je vis un type à la barbe de trois jours et longs cheveux. Target le fixait en grognant et lui de le fixer de ses grands yeux noisettes tirés en amande. « Haley ? Je viens de croiser Nash et je suis l’un de ses potes, Ivan. « Et tu es à l’université en ce moment ? —Non en prépa. —Où ça donc ? —Mary Stuart. —C’est cool…c’est un bon établissement, tu vas gagner en crédibilité. Ton père doit-être content ? —Mon père ? Je suppose oui. » Pourquoi me parlet-il de mon père ? Peut-être que des banalités d’usage histoire d’entretenir la conversation ? Il m’interrogea du regard ; un regard fixe et là il me ficha la trouille. « Ecoute je repasserais plus tard…dans la semaine qui sait. Prends soin de toi d’accord ? » Mon psy m’ouvrit la porte de son cabinet et afficha un grand sourire et quand il sourit ses pattes d’oie soulignent ses yeux enfoncés dans leur orbite. Comme d’habitude, je jetais mon sac sur la méridienne et m’installai devant lui, la chapka visé sur la tête. Il me suit depuis des années déjà et on forme une bonne équipe tous les deux, lui le thérapeute et moi la patiente bordelne. « Comment c’est passé ta rentrée ? —J’ai survécu si c’est ce que tu veux savoir. La classe est très variée, on y trouve de tout. Une sacrée unité qui prévoit de bons moments de franche rigolade en perspective. —C’est un bon début alors. Tu as bossé pendant les vacances et tu bosses sur ton temps libre n’est-ce pas pour aider Nash à payer le loyer. On pourra faire de toi une future étudiante modèle. Et le programme comment le vois-tu ?
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—Ardu. Intense. Les profs sont des vétérans et ils connaissent bien leur job. On n’a pas à plaindre. Ils savent tenir leur auditoire aussi disparate soit-il. —Tu t’es fait des amis ? —Des ennemis. J’ai du monter sur le ring après avoir enfilé mes gants de boxe. —Donc il y a eu des victimes ? —Oui. J’ai été contrainte de passer à l’attaque. Cela n’a rien d’exceptionnel. Je travaille mon émotivité mais cela comporte des failles comme dans tout système. Possible que je ne sois jamais l’élève modèle que tu attends à voir surgir dans ton cabinet. —As-tu revu ton père depuis ? —On doit diner ensemble ce soir. Il a insisté pour me régaler. Je crois qu’il n’a pas digéré le fait que je parte vivre chez Nash. C’était ma condition pour aller plancher à Mary Stuart, comme tu le sais. Pourquoi souris-tu ? Tu me croyais incapable d’accepter le deal ? —Non tu es capable du meilleur comme du pire. » Mon père me reçut donc chez lui dans sa banlieue bien propre et aseptisé. Sa grosse berline de marque allemande stationnée devant son coquet pavillon donnait la couleur. Il m’accueillit en t-shirt, lunettes posées sous le bout de son nez. Je n’apprécie guère revenir ici pour tailler le bout de gras avec lui parce qu’il va me cuisiner sur Nash, Mary Stuart et tout le reste dont le psy qui s’obstine à payer. « Tu as prévu quoi pour le diner ? —J’ai pensé qu’on pourrait commander quelque chose de sympa. Que dis-tu d’un thaïlandais ? Ou pakistanais ? —C’est toi qui vois. —Et la classe ça va ? —On pourrait parler d’autre chose, tu ne crois pas ? —Il est important que tu suives ta scolarité le plus correctement possible et je n’admettrais pas que tu sèches tes cours pour aller t’encanailler avec ton Nash. Si tes résultats ne suivent pas, tu rappliques ici dare-dare. Tu as été voir ton frère cette semaine ?
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—Tu sais bien que oui. Moi je ne l’oublie pas sous prétexte qu’il doit purger sa peine pour un petit moment ! —Hum. C’est bien que tu y ailles. Alors on commande Pakistanais. Je sais que tu raffoles du lait à la rose. Après je te ramènerai comme convenu. Tu peux essayer de te détendre qu’on ne soit pas là à se mater comme des chiens de faïence. Alors, dis-moi estu bien installé chez Nash ? Tu ne manques de rien ? —
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[Epilogue]
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Dépôt légal : [octobre 2015] Imprimé en France
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