(Page reste vierge image seulement pour finaliser le choix de la couverture)
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LA JUBILATION DU CHACAL [Sous-titre]
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Du même auteur Aux éditions Polymnie [La cave des Exclus]
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MEL ESPELLE
LA JUBILATION DU CHACAL
Polymnie
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© 2014 – Mel Espelle. Tous droits réservés – Reproduction interdite sans autorisation de l’auteur.
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[Dédicace]
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[PrĂŠface]
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Chapitre 1
D’après les médecins de l’hôpital public de Cincinnati, on m’aurait violé. Mon vagin ne porte aucune lésion mais vraisemblablement on m’aurait sodomisé. La peau de mon anus est déchirée….je ne pouvais croire cela. C’est dans la forêt qu’on m’a retrouvée. Je ne portais rien sur moi. Un jogger a pensé voir une morte enfouie sous les feuilles. Merde ! Les larmes coulaient de mes yeux tout comme ma morve. Cela fait depuis un petit moment que je suis ici dans cet hôpital à suivre toute une série d’examen : tests salivaires, test urinaires, prises de sang, etc. Impossible de me souvenir de quoique se soit. On m’a collé sous sédatifs comme pour mieux m’humilier. Les flics sont venus pour prendre ma déposition. Lui, le grand noir et sa collègue, une latino au regard étrangement compatissant. Ma pauvre, je suis de tout cœur avec toi ! On va retrouver bien vite, celui qui t’a fait ça ! A la place de quoi ils sont là à se tailler le bout de gras, l’arme posée sur le flanc, roulant des hanches comme tous ces flics jouant les héros. C’est le bordel ici ! Ma tête va éclater. J’ai besoin de gerber. L’infirmière, celle qui croit possible de changer la face du monde avec quelques
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pilules et narcotiques me tapota l’entre omoplate pour m’encourager à me vide de toutes ces cochonneries de médocs qu’on vient de me faire avaler contre ma volonté, c’est certain. La tête sur l’oreiller, je vis partir les deux flics. Pas un salut de mon côté. C’est la procédure que voulez-vous ! « Mettez la patiente dans le couloir pour le Dr Norris, c’est lui qui prend le relais ! » Le Dr Olivia Jones a déjà vérifié mon vagin en introduisant sa main recouverte de latex dans mon orifice. Je veux pouvoir rentrer chez moi et prendre une bonne douche ! S’il vous plait ! Plus personne ne semble s’occuper de moi et une énième infirmière me déplace poliment. Je suis devenue gênante et dans peu de temps on me jettera face contre terre sur le trottoir : Oust ! Dehors, plus de place pour toi ! Il ne s’agit que d’un viol et nous manquons cruellement de lit pour des cas plus graves. Désolé ! La nausée me gagna de nouveau les lèvres. Que s’était-il passé ? Comment avais-je pu me retrouver dans cette situation ? Le Dr Norris Helen arriva, les lèvres serrées et le visage hermétiquement clos. « Nous vous avons trouvé une chambre ! » Lors de son internat, ne l’avait-on pas formée à sourire à ses patients ? L’’infirmière, Indra Palmer poussa mon lit jusqu’à une espèce de compartiment séparé par un vulgaire rideau pour soidisant un peu d’intimité. Deux inspecteurs entrèrent dans ce périmètre d’intimité : un type tout en muscle, crâne rasé et bouc qui glissa quelques mots à son collègue, un rouquin à la fossette d’ange ; pas compris qui ils étaient. « Elle dit ne plus se souvenir de
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rien. Pas de proche famille à contacter et elle est actuellement sous sédatif, murmura Norris à la porte de la chambre. Je ne pense pas que vous puissiez lui être d’une quelconque aide et je ne veux pas que vous la brusquiez avec vos questions ! Pour le moment elle reste très vulnérable. » Les deux flics s’approchèrent de mon lit et le grand chauve parla le premier. « La police nous a remis votre déposition et notre bureau prend le relais. L’Agent spécial Hauser et moi-même l’agent spécial Johnson prenons l’affaire en main ! Nous vous demanderons de répondre le plus simplement possible. Pour le moment il ne s’agit pas de dresser le portrait-robot de votre ravisseurs mais il s’agit pour nous de savoir qui vous êtes et les raisons qui vous ai conduites à vous retrouver dans cette forêt. Peut-on commencer ? Nous sommes aujourd’hui le mardi 15 novembre et…d’où remontent vos plus lointains souvenirs ? Vous êtes selon les employés de cet hôpital restée plus de six heures dans le froid dans un état second et d’après les analyses sanguines avec une forte concentration de GHB. Nous savons que les effets devraient se dissoudre dans les heures qui suivent mais il se puisse que vous ayez été confronté à un autre cocktail plus puissant encore. Avez-vous dans votre relation des personnes qui aient cherchées à vous nuire ? Quelle est votre profession ? » Comme je ne répondis pas, Johnson se retourna vers son collègue, collé contre le chambranle de la porte, les bras croisés sur sa poitrine. Les poings serrés je refusais de répondre. « Nous savons que c’est difficile pour voir de rassembler vos idées. On peut imaginer une sorte de puzzle dans votre
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esprit mais c’est n’est pas impossible de remettre les morceaux dans l’ordre et parvenir à nous donner un maximum de précision sur…. —J’ai dit ne plus me souvenir de rien ! » Le ton que je pris pour mettre un terme à cette pseudo enquête les dérouta. « Vous avez dit ne pas avoir quiconque à prévenir ! Peut-être que maintenant vous vous souvenez de quelque chose ? Une adresse, un lieu de résidence….un nom ? Votre nom ! —Honor Gleeson, répondis-je à contrecœur. Me laisseraient-ils en paix après cette réponse. « C’est un bon début Honor, déclara Johnson, la jubilation peinte sur son visage hâlé, légèrement cuivré. Derrière ce visage doux pouvait se cacher un tueur en série, un violeur….devais-je lui faire confiance ? Viendra-t-il chez moi pour….je ne peux imaginer le reste. La gorge nouée, je serrai les poings ; ma main prit une teinte grise et un goût métallique traina sur ma langue énorme et toute à la fois pâteuse comme après une anesthésie buccale. Et ensuite ? « Nous en savons déjà un peu plus sur vous Honor et cela nous permettra de parcourir un large rayon de suspects de votre entourage ! Quel âge avez-vous Honor ? —Vingt-deux ans. Quand pourrais-je rentrer chez moi ? » Je connaissais la réponse. Les médecins me gardent en observation pour le cas où l’idée de me fiche en l’air traverserait mon esprit. « Ok ! On va pouvoir travailler sur cette matière ! Déclara l’autre qui jusqu’à maintenant n’avait pas parlé. Johnson ? » Cette voix….ma vessie se répandit sur le lit en un torrent d’urine. On avait ouvert
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les valves et ce liquide chaud glissait partout entre mes jambes. Je suffoquais incapable d’hurler : Au secours ! Laissezmoi sortir ! Que quelqu’un me sorte de là ! Johnson se leva et me tendit une carte de visite. « N’hésitez pas à nous contacter si la mémoire venait à ressurgir ! Nous restons à votre écoute quelque soit le jour et l’heure ! » Ils partirent. De la merde chaude et liquide s’échappa de mes entrailles. Je devais partir ! M’en aller pour me cacher ! L’infirmière arriva en courant me retint sur le lit et d’autres infirmiers arrivèrent alertés par les cris. Je sens l’aiguille s’enfoncer dans la veine de mon bras. Quelle horreur ! La lumière du jour me réveilla. Il était sept heures et le va-et-vient du personnel de l’hôpital dans le couloir me sortir de la torpeur dans laquelle je me trouvais être. Encore un peu de patience ma chérie, et tu sortiras ! L’infirmière en charge de mes soins finit de me réveiller par son débit de paroles décousues. Pourquoi me parlaitelle ? Savait-elle quelque chose sur moi ignoré de moi-même ? « Vous sortez aujourd’hui ! Vos résultats sont bons, argua Norris les mains enfoncées dans ses poches, tout ira bien à l’extérieur et…Le FB coincera ce salaud ! (je rêvais ou bien pleurait-elle vraiment ?) C’est vraiment moche. Le laboratoire nous a remis les diverses analyses et ce type est un dangereux malades. Le cocktail médicamenteux aurait pu vous achever s’il avait été administré pur. Il a su dosé ce dont il avait besoin pour vous maintenir dans un état second proche de l’euphorie et la soumission. Une fois qu’on retrouvera cet enfoiré j’assisterai à son procès et en
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aucun cas, les jurés devront fermés les yeux sur pareils actes de barbarie ! » Je sortais ? La panique devait se lire sur mon visage. Ce type me retrouverait, je pouvais en être certaine. Si le FBI n’avait aucune piste, alors pourquoi me faire sortir si vite ? Ma tête menaçait d’exploser. Le Dr Nora Hill tonna dans le couloir, criant en scandale disant qu’on n’avait aucune raison de me ficher dehors ! Elle se démena pendant une heure, pestant comme une damnée, appelant tous ses contacts les plus influents pour rallier à ma cause. « On ne peut pas te laisser partir maintenant, tu comprends ? » Ne cessait-elle de dire entre deux coups de téléphone. Elle repoussait ensuite ses lunettes carrées sur son nez avant de partir dans de longues descriptions de la situation. « Vous devez comprendre (untel) ma patiente souffre de lésions cérébrales dues à une forte administration de sédatifs susceptibles d’abattre un éléphant et cet Hôpital de….non, bien-sûr je ne raccroche pas (la main sur le combiné) On va y arriver Honor, fais-moi confiance ! Oui, je suis toujours là….non, vous ne m’avez pas bien compris je crois ! (elle ôta ses lunettes) Ma patiente e besoin d’être suivie par une équipe de cliniciens et….je ne raccrocherais pas avant d’avoir discuté avec votre supérieur ! » Tout comme Nora je finissais par penser que mon cas se voulait être un cas clinique. « Elle devra repasser nous voir dans deux jours pour une nouvelle prise de sang, déclara le Dr Jones chargé de signer ma feuille de sortie, et revenir à la moindre complication. Pour vous rassurer, il ne sera pas complètement livré à elle-même…. »
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Je n’avais jamais trouvé les médecins sympathiques. Autant me séparer d’eux bien vite ! Par ici Honor ! Veuillez signer ces feuilles et qu’on en finisse avec vous ! Adieu et bon rétablissement ! Les jambes aussi flasques que ceux d’un céphalopode je montais à bord d’un taxi chargé de me ramener à mes quartiers. L’’angoisse s’invita au rendez-vous sitôt qu’un homme venait à croiser mon regard. il pouvait être n’importe où, tapis dans l’ombre et prêt à passer à l’acte. Une fois rentrée, je me barricadais, ferma les rideaux et calfeutra les fenêtres. A treize heures, on sonna à la porte de mon appartement ; mon cœur battit si fort que je manquais défaillir. « Honor, c’est moi, Beck ! J’ai appris ce qu’il c’est passé ! Je peux rentrer ? » Les larmes bordèrent mes yeux. Devraisje le laisser entrer et m’exposer au risque de finir violer ? Armée de mon couteau de cuisine, j’ouvris la porte, dissimulant l’arme dans mon dos. Au moindre mouvement suspect, je frapperai de bas en haut. Beck étudia la pièce. « Qu’est-ce qu’il fait sombre ici ! Comment te sens-tu Honor ? On peut discuter un peu ? Déclara-t-il en avançant vers moi. La police est venue interroger les résidants de l’immeuble et… ensuite le FBI. Cet inspecteur. Comment s’appelle-t-il ? Hauser. Il m’a demandé quel rapport j’entretenais avec toi et si j’avais eu idée de tes plans. Je lui ai dit qu’on était de bons amis, que je t’avais pistonné pour ton boulot et… que je n’ai aucune idée de l’identité du salaud qui t’a fait ça. » De nouveau je m’assis dans le canapé, le souffle coupé et lui, debout devant moi me fixait sans sourciller.
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« Il m’a demandé si tu te droguais. Il croit que tu es l’une de ces junkies en phase de réémission et je lui ai alors dit d’aller se faire foutre. Alors il a commencé à balancer tes obscénités sur mes droits, la justice et la peine de prison que j’encourrai si je ne collaborais pas. C’est… vraiment moche. Et une fois à l’hosto, (il s’alluma une cigarette) on ne m’a pas laissé te voir. Crois-bien que j’ai fait ce que j’ai pu pour venir au plus vite. Tu devrais aérer un peu, ça sent vraiment le rat crevé ici. Tu veux manger quelque chose ? —Non, je n’avalerai rien. Demain je reprends le boulot et… j’ignore si j’y arriverais. —Ne te pose pas toutes ces questions. Le FBI finira par coincer ce fumier. Accepteras-tu que je fasse venir ma sœur ici ? Elle saura te tenir compagnie. Elle cuisinera pour toi et s’occupera de ton linge. Et tu n’as pas à t’en faire pour le boulot, j’ai prévenu Dawson quant à ton indisposition passagère. Prends le temps qu’il faut pour te recentrer. » Soudain des brides de mémoires flashèrent et je le sentis lui, ce monstre accroché à mes hanches. Cette douleur physique lancinante me coupait le souffle. Il me forçait, là, sur cette bâche en plastique. Sa main retenait mes cheveux en une puissante poigne et de son autre main gantée recouvrait ma bouche. C’était douloureux. A croire qu’un gourdin cherchait à se frayait un chemin par une voie impénétrable. « La labo m’a remis la liste des drogues qu’il m’a fait absorber. Il aurait pu me tuer mais il ne l’a pas fait. Cela aurait été préférable. Comment pourrais-je continuer à vivre après ce qu’il m’a fait subir ? Je
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ressens dans mon corps souillé toute la violence qu’il a exercé pour me détruire et…. » Beck quitta sa chaise pour s’assoir près de moi sur le vieux canapé. Ses belles boucles brunes tombaient en vrille le long de son visage ovale au menton étroit. «Tu as le soutien de la communauté, Honor. Saches que personne ne te laissera tomber. Il y a en ce moment un groupe de prière formée par Antoinette Sams et je dis qu’elles se bagarrent toutes pour faire entendre leurs prières au Tout-Puissant. Dans cette épreuve tu n’es pas seule. Tu es anxieuse, rien de plus normal et…. Je m’en veux de ne pas avoir été là. » Mon regard plongea dans le sien. « Tu veux qu’on prie un peu ? Cela pourrait te faire du bien. » Il revint avec son bréviaire et son étole qu’il embrassa. « Je ne crois pas en être capable. C’est trop difficile —Dieu nous inflige de nombreuses épreuves et renoncer à lui, c’est accepter le Mal qui frappe et nous avilit. Tout cela ne doit pas te déstabiliser. Honor…. On va s’en sortir ensemble pour Lui prouver que nous arriverons et….quo que tu entendes, quoi qu’on te dise dieu habite toujours en toi. Il ne t’a pas abandonné. Cependant je comprends que tu ne puisses le faire maintenant. Je te tombe dessus, j’arrive sans crier gare et toi tu te demande encore ce qu’il se passe. Tu n’es pas folle, tu es seulement la victime d’un homme qui a besoin de se faire soigner. Ce genre de paumés, on en croire tous les jours dans notre communauté ou ailleurs et dis-toi que le FBI le coincera. —Sans empreintes digitales, ni indices ? Je doute sérieusement qu’ils y arrivent. Ils
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mènent cette enquête comme d’autres iraient au bowling et moi je me tiens seule, ici, dans ce quartier d’ex-taulards, de putes à crack et de dealers quand je devrais être ailleurs ! Cet enfoiré m’a laissé pour morte dans la forêt après m’avoir droguées pendant trois jours et….il y a dans mon organisme assez de drogues pour fournir les junkies de cet immeuble ! Alors moi je refuse de croire que c’est un amateur. Il a masqué sa fuite et c’est un fantôme que le FBI traque. —Oui, il est méthodique. Il ne laisse rien au hasard et il doit avoir des relations ici et là pour passer entre les mailles du filet. S’il n’est pas du quartier, il sait observer et prendre des repères. Il pourrait t’avoir suivi, épier des heures durant pour connaitre tes habitudes. Il ne laisse rien au hasard. Mais tu ne t’aies pas demandé pour quelles raisons il t’a laissé en vie ? Et pourquoi cette forêt alors que la ville est suffisamment grande pour s’y perdre ? Et pourquoi toi Honor ? Cette personne ne t’ait pas étrangère…. —Tu veux dire, qu’il est près de moi ? —Absence d’empreintes. Donc le type a pris d’importantes mesures de protection ; ensuite il te drogue afin que tu ne puisses identifier son visage et tout le reste. Cela veut dire qu’il est de ton entourage et puis, il te laisse dans cette forêt pour brouiller les pistes et faire croire à un kidnappeur désorienté, pris de panique et qui ne sait où abandonner sa victime. Alors tu te pose la question de savoir pourquoi il t’a relâchée ? Il n’agit pas par pulsions, lui tout ce qu’il veut c’est toi et toi seule….. —C’est bon ! J’ai compris !
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Il a de l’avance sur toi. Il sait qui tu es et où tu résides. Il connait tous tes moindres faits et gestes, probablement et c’est exercice n’est pas sans péril. Tu devrais venir le jeudi soir au sein de notre Église. On organise toutes sortes de rassemblement pour les victimes de notre société. Il y a des familles endeuillées et….pas seulement. On dénombre également des femmes battues, des anciens toxicos, des victimes de pédophilie et de viols. —Beck, j’apprécie tout ce que tu fais pour moi depuis que je suis ici mais…je ne me sens pas encore prête à….le monde me parait être si hostile. C’est mon âme qu’on m’a volé et (nouveau torrent de larmes) cela ne m’apportera rien de constructif. J’ai besoin de faire le chemin seul. —Mais tu n’es pas seule. Il y a avec toi toute la communauté de Saint Matthew. Je peux faire surveiller notre immeuble nuit et jour. Des tas de mômes le feraient gratuitement et comme je te l’ai dit ma sœur pourrait se charger de veiller à ta sécurité de l’intérieur. » Il avait une cicatrice sur le poignet. Alors qu’il me brutalisait je remarquai le relief d’une profonde cicatrice sur ce poignet, causé par l’impact d’une balle ou celle qu’une lame de couteau. Alors qu’il me besognait avec brutalité, s’enfonçant très profondément en moi, j’avais remarqué ce détail. Je le mentionnais à beck, perdu dans ses pensées. Son regard disait : Que diable ferais-je de cette information ? Désolé mais je ne peux rien pour toi. As-tu autre chose à me soumettre ? « Euh….tu
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devrais appeler ces agents chargés de l’enquête. Eux pourront toujours classer cette information. Appelle-les ! » Pourtant je fus incapable de le faire. Ce que j’avais découvert était absurde comme après une nuit de sommeil agité ; on essaye de recoller les morceaux de ce puzzle, en vain. La tête dans les mains je frissonnais de dégoût, de colère et de peur. Comment cela avait-il pu arriver ? Beck n’insista pas, lui non plus. Il aurait pu rester, mais par pudeur il ne le fit pas et au fond de ses yeux on pouvait y lire de la pitié. Toute la nuit durant je veillais. Le moindre bruit me faisait sursauter et le cœur battant à vive allure, il me fallait rester calme ; comment pouvais-je cependant l’être ? On m’avait violée. La nausée me gagna et paralysée par la peur, je craignais à tout instant de voir surgir mon agresseur. Il n’aurait évidemment pas de visage et il assouvirait toutes ses pulsions dans l’indifférence collective. A dix heures, LE Dr Helen Norris devait me recevoir. Il me fut difficile de rester dans la salle d’attente sans éprouver un sentiment d’oppression. .Il me semblait que tous me jugeait : voilà celle qui ne se souvient plus de son amant ! Et fixant mes pieds. Un type m’avait violée et laissée pour morte dans une forêt. Cet enfoiré pouvait être près de moi, juste près de moi à respirer mon odeur et prendre son pied en songeant à ce qu’il m’avait infligé. La sueur ruissela le long de mon dos. Mon cœur battait fort. Il me fallait partir. « Honor ! Nous allons pouvoir y aller. » On se retrouva bien vite dans une chambre qui lui servait de cabinet de consultation et
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elle m’invita à m’assoir d’un rapide signe de tête. « Comment vous sentez-vous Honor ? Prenez-vous toujours vos médicaments ? —Non. J’essaye d’être lucide. Ces médicaments ne feront que modifier ma perception du monde et…j’ai besoin de savoir ce qui s’est passé. Le dr Hill pense que…. Certains détails sont enfouis dans mon subconscient et…. C’est un travail comme un autre. » Helen plongea son regard dans le mien sans sembler y croire ; elle aussi devait me prendre pour une folle et après vingt minutes, elle me libéra. La psychologue Nora Hill prit le relias. Je la voyais maintenant depuis onze jours. Contrairement à l’autre, elle paraissait heureuse de me revoir. « Avez-vous réfléchi à ce que je vous ai dit ? Vous ne devez pas vous laisser submerger par vos émotions, or je sais qu’en ce moment vous ressentez de la colère et de l’incompréhension mais ditesvous que vous êtes en vie et que vous avez eu beaucoup de chance. La drogue dans votre organisme aurait suffi à vous tuer C’est ce que je fis à quinze heures. Johnson prit l’appel et fut soulagé d’apprendre qu’une partie de ma mémoire me revenait. « Ecoutes, Honor, pourquoi ne pas passer au bureau ? On discutera de tout cela le plus sérieusement possible car il est important que tout soit consigné par écrit ! Passes quand tu peux d’accord ? » Alors avec Beck je m’y rendis. Etrange sentiment que celui d’avoir l’impression
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que chaque visage vous étudie dans le moindre détail. Des plus nerveuses je ne parvenais à me concentrer sur un détail précis de cette vaste salle dans laquelle se tenaient tous ces agents du FBI. Je ne pourrais pas y arriver. Beck ne perdait rien de ce qu’il se passait autour de nous ; il observait tout et son regard se durcit en apercevant Hauser au fond de la pièce, penché au-dessus d’une collaboratrice et ce dernier lorgnait de notre côté. « Honor, tu vas pouvoir venir avec moi ? Questionna Johnson en m’invitant à le suivre dans un bureau fermé sur quatre murs. Cela aurait du me rassurer mais l’effet fut inverse. Il me semblait qu’on allait me ligoter les membres pour ensuite m’allonger sur une bâche en plastique et me sodomiser jusqu’à n’en plus pouvoir. « Je t’écoute Honor, tu as toute mon attention ! Tu disais que ce type avait une cicatrice sur le poignet ? Etait-ce le gauche ou le droit ? Honor, es-tu avec moi ? Tu veux peut-être un verre d’eau ? Ou du café ? Nous avons du café à te proposer et il n’est pas trop dégueu celui-ci ! Veux-tu bien m’excuser ! » Et il sortit, juste pour m’apercevoir que son coéquipier Hauser approchait de cet espace. Il poussa la porte après que Johnson en fut sorti et afficha un large sourire sur sa gueule d’ange. « Acceptes-tu que je prenne le relais ? Johnson ne devrait pas tarder mais on ne sait jamais avec lui, juste pour le cas où il se rendrait au Paraguay pour récupérer les grains de café, ironisa ce dernier en rapprochant la chaise le plus près possible de la mienne. D’après ce qu’il m’a dit la mémoire te serait revenue…. »
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Il me fut impossible de lever les yeux pour le regarder. Cette voix claire presque rauque….la vessie se décompressa et deux gouttes souillèrent ma culotte. « Je sais que ce n’est pas simple pour toi Honor, toute cette pression sur de si frêles épaules. Tu dois certainement te dire que si l’on ne parvient à arrêter ce criminel d’autres femmes en feront les frais et ça, tu ne peux le concevoir. Ce Beck il est qui pour toi ? La question va te paraitre insensée mais aucune piste ne doit-être écartée. C’était un ancien tox, tu le savais ça ? Et il revendait dans certains quartiers populaires de notre grande cité. Pas assez pour se faire coincer mais il a revendu. Et maintenant c’est un enfant de chœur. Il semble avoir de bons alibis concernant les trois derniers jours équivalents à ta captivité mais je préfère le garder comme potentiel suspect. Aucune piste ne doit être écartée Honor. » Je ne parvenais plus à respirer. Ma poitrine se comprimait et bientôt j’allais défaillir. Hauser se pencha davantage vers moi. « Tant que ton esprit est embrouille par les toxiques. On parle malheureusement d’hallucination Honor, de vertige et de palpitations cardiaques. Johnson est prêt à écouter ta déposition mais je crains que le reste de l’équipe ne prenne pas tes déclarations au sérieux. Retournes à l’hôpital et fais-toi suivre làbas. Ils ont de bons psychologues qui t’aideront à traverser cette mauvaise passe. » Une larme ruissela sur ma joue. A présent ma gorge devint sèche et éprouvant des difficultés à déglutir je tentais de recouvrir la raison. « Voici mon numéro (en glissant une carte sur la table) Appelle-
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moi quelques soient la véracité de tes souvenirs, je ne l’laisserais passer aucun indice. » Il sortit et force de constater que je mettais faite dessus. Beck me ramena chez moi et sur le chemin du retour je fus saisie par le sentiment de duperie. Il savait tout de moi, il venait me voir presque tous les jours et là, derrière son volant il devait prendre beaucoup de plaisir à me voir souffrir. Sale pute ! Tu ne m’as pas laissé l’occasion de finir mon travail mais cette fois-ci je ne te laisserais pas filer ! A hauteur d’un feu tricolore, il me fixa. « Que t’a-t-il dit cet agent ? » Voilà qu’il voulait tout savoir à présent. Je fixai l’accotement, la gorge nouée. Sitôt que je le pourrais je ferai mes valises pour partir le plus rapidement possible. Une larme s’accrocha à mes longs cils. « Pourquoi veux-tu savoir ? » Il fronça les sourcils sans plus insister. Je n’étais pas bien. Je voulais rentrer et prendre un bain. Il gara sa voiture sur le parking de notre immeuble. « Ecoute Honor, je sais que tu reviens de loin, tout cela ce n’est pas évident et tu dois te demander s’il est juste de te faire confiance et ma réponse est : A ta place j’agirais de la même façon. Il y a ce type à l’extérieur que les fédéraux n’ont pas arrêté et qu’ils n’arrêteront peut-être faute de preuves et puis il y a toi : une jeune femme de 22 ans sans démêlés avec la justice qui a servi de jeux pervers à un psychopathe. Et Honor… je sais parfaitement ce que c’est que de toucher le fond. Je sais seulement que tu vas t’en sortir. Cela va prendre du temps mais tu vas t’en sortir parce que tu es une battante.
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—Je veux être seule. Tu comprends ? » De nouveau je me barricadais ; toute agression sonore et toute luminosité se devait d’être atténuée et après un long bain je restais assise de longues minutes sur mon canapé. La télévision tournait mais je ne la regardais pas. Ce monstre connaissait mes habitudes. Les deux jours qui suivirent furent aussi mornes. Au matin du troisième on toqua à ma porte. « Honor ? C’est l’inspecteur Hauser ! Honor ? » Que faisait-il ici ? « J’ai essayé de te joindre, mais sans succès. Tout va bien pour toi ? Tu devrais ouvrir tes fenêtres, ça sent le rat crevé ici ! Nous avons du nouveau. Un témoin qui dit t’avoir vu en compagnie de ce beck avant ton enlèvement. Ce qui fait de lui notre suspect n°1 et actuellement nous l’interroge. On vient de découvrir que son alibi présumé ne tient pas la route. Le témoin en question dit que vous êtes resté au bar jusqu’à très tard et qu’il t’aurait ensuite ramené chez toi dans un état d’ivresse bien avancé ». Le contenu de ma vessie se répandit entre mes cuisses. Cela coulait sans pouvoir s’arrêter. Mais quelle merde ! Je me réfugiais dans la salle de bain afin de changer de culotte et de jean. Dans l’encorbellement de la porte je le vis toucher à un objet de ma petite bibliothèque : un petit ange offert par un jeune membre de la communauté Saint Matthew. Il reposa l’objet où il l’avait pris. « Tu ne retournes pas travailler ? —Je vais démissionner. Cette ville n’a plus rien de bon à m’offrir…..je vis dans la terreur et…. —Où est-ce que tu iras ?
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—Je ne sais pas encore. Loin d’ici, c’est sûr ! » Hauser tenta de sourire mais il n’y parvint. Il resta là à me fixer avec intensité. De nouveau ma vessie se contracta. L’enfoiré m’avait dégagé les cheveux de mon visage. Il caressa mes épaules. Empalée sur son sexe j’étais comme une poupée inerte et pourtant consciente de ce qu’il m’arrivait. Les bras pendant de chaque côté de son buste, je le laissais me pilonner avec douceur. Il souleva ma cuisse pour mieux descendre et monter en moi. Il hoquetait de plaisir et moi de rage. La nausée gagna mes lèvres. Je me souvins qu’il avait glissé son index dans ma bouche. Je partis vomir dans la salle de bain. A mon retour il se tenait, là, assis dans mon canapé recouvert d’un plaid écossais. Il se leva en me voyant arriver. Elle n’est pas dans son assiette, autant la laisser tranquille ! C’est cool, vraiment cool ! Je chie, je vomis et je me pisse dessus. Mon quotidien ressemble à cela ponctué par le va-et-vient des autres résidents et l’eau se déversant à grands flots dans les canalisations de ce petit immeuble de périphérie. « Ecoute Honor. Tu m’écoutes là ? Tu devrais essayer de maintenir de la distance entre beck et toi. Même s’il n’est pas ton ravisseur il se puisse qu’il est à voir avec tout ça. J’aimerai que tu m’appelle au moins une fois par jour pour que je sache où tu es et si tout va pour le mieux de ton côté. Je ne veux pas t’embarrasser avec ça mais je serai vraiment soulagé si tu restais un peu plus longtemps dans cette ville. Il serait dommage que tu dépendes d’une autre jurisprudence et d’un autre état fédéral. Tu piges ? Tôt ou tard ce fumier commettra une autre bourde et il nous sera
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plus facile de l’appréhender si tu es dans le secteur. » Il s’en alla et c’est à ce moment que je m’aperçus de l’absence de mon petit ange posé près de mes vieux livres. Peut-être était-il tout simplement tombé ? Je fouillais partout mais sans succès. Le Dr Norris Helen m’examina. Elle ne trouva rien à signaler puis me tendit un bout de papier sur lequel elle avait griffonné un numéro de téléphone et un nom. Perdue dans ses pensées, elle le fixa devant certainement se poser des questions d’ordre déontologique. Dois-je lui remettre ceci ? Ou bien prendre le risque de me taire ? Elle resta un moment à ne pas savoir que faire. « Il y a un type qui a appelé pour toi, déclara-t-elle sans chercher à se montrer aimable. Il m’a dit que si tu passais il fallait que je te remette ses coordonnées. Il travaille à son compte. Une sorte de détective privée d’après ce que j’ai compris. Il m’a dit que ses services pourraient t’intéresser. Il l’aide qui le sollicite à retrouver un membre de sa famille disparue….et il est consultant pour le FBI. Il faut le voir comme une sorte de profiler. Cela ne te coutera rien de le rencontrer. » Je lui donnai rendez-vous à la cafétéria de l’hôpital. « C’est toujours aussi immonde la bouffe ici ! » Il me dévisagea avant de me tendre une poignée de main des plus virils. « Je vous sers un café ? » Je refusais, le laissant finir son muffin et sucrer son café noir. Ce cow-boy portait une cravate à rayures sur une chemise bleue-nuit et il semblait être assez cordial pour ne pas dire très à l’aise avec son
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entourage, vu la façon à laquelle le personnel le regardait. « Mon nom est Abraham jacobs, mais vous m’appellerez Abby comme tout le monde ! Mes clients sont pour la plupart d’authentiques gens-foutre qui me paient grassement pour retrouver la trace d’un type que ces foutus fédéraux n’étaient pas capable de sortir du pieu ! Je privilège avant tout la familiarité ; on ne se ménage pas, on ne se raconte pas de salade et tout devrait rouler entre toi et moi. Je vais t’aider si toi tu es disposée à ma faire confiance ! Alors Honor parle-moi de cet homme à la cicatrice ! » Il se fichait de moi là ? Ce salaud, mon agresseur courrait toujours les rues et j’étais à ce jour incapable de l’identifier. « D’accord, je reformule ma question ! As-tu fait quelque chose qui sorte de l’ordinaire ? Comme aller au restaurant ? Ou au ciné ? —Oui je suis partie prendre un verre avec mon voisin, Beck. On a pris un verre et ensuite il m’a ramené à la porte de mon appartement. —Ce n’est pas Beck d’accord ? Il n’a pas de cicatrice sur le poignet et (Il posa son café fumant dans sa soucoupe) Ok, Honor ! Tu ne crois quand même pas que je viendrais les mains vides ! J’ai potassé un peu le sujet avant de contacter le Dr Norris. Tout ça c’est exploitable et on va l’utiliser jusqu’à ce qu’il ne reste plus à extraire. Pour revenir à ton ami Beck il m’a contacté depuis le bureau du FBI, le fameux appel à un avocat ! Il se fait du mouron pour toi. Alors on va reprendre et cette fois-ci se concentrer. Tu es donc sortie à ce café et ensuite ? —Je ne me souviens plus.
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—Oh, si tu t’en souviens très bien, Honor ! Que s’est-il passé ensuite ? As-tu appelé quelqu’un ? Regarder la télé ? As-tu pris une douche ? Regarde-moi. Je veux voir ton regard….tu sais ce qu’il s’est passé ensuite ! Ne le nie pas. Ce type t’a fait monter dans sa voiture. Et tu étais consentante. Le FBI ne sait pas de quel côté regarder avec toi, mais moi je sais voir et en ce moment je vois que….tu es sur le point de ternir un fusil chargé droit entre mon entrejambe et qu’à la moindre occasion tu feras feu. Je suis là pour t’aider, Honor et je ne te laisserais pas tomber avant qu’on ait retrouvé ce fils de pute ! A quoi penses-tu là tout-de suite ! » Le ravisseur était sur moi. Il tentait de m’étrangler et je me débattais furieusement. « Il avait une sorte de masque…quelque chose qui déformait ses traits. —T’a-t-il parlé ? Tenait-il des propos obscènes ? Etait-il là plutôt à te flatter ? —Oui. Il me caressait les cheveux et….le visage. Il m’a embrassé. (Les larmes inondèrent mes yeux) Il se tenait fort contre moi et… (Je ne pus retenir mes larmes) Il n’arrêtait pas de me caresser….Plus je le repoussais et plus il se montrait calme et affectueux. —Et toi ? Lui as-tu parlé ? —Non. Je ne pensais qu’à m’enfuir. » Abby hocha la tête. Je te crois petite, alors cesse de pleurer autant tu vas rameuter tout le monde ! Et déjà je me calmais de moi-même. Oui j’avais fui ! En même temps je ne me sentais pas soulagée pour autant. Et si tout cela faisait partie de son plan ? « Il va revenir te chercher Honor. —Non, murmurai-je des plus paniquées.
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—Il faut que tu te mettes à l’évidence qu’il essayera de t’enlever de nouveau. —Non ! Entonnai-je mes membres tremblant sans que je parvienne à maitriser leurs mouvements. —Tu fais partie de son univers et il ne te laissera pas d’hésiter de l’issue de ta propre existence. Et tu sais pourquoi ? Parce qu’il a fait une fixation sur toi, il t’a depuis longtemps idéalisée et quoique tu fasses il a un œil sur toi. Il t’observe sans que tu le sache et….il va se manifester s’il sent que tu lui échappes. Maintenant Honor, donne-moi le nom de toutes les personnes qui depuis une semaine sont venues te saluer dans la rue, au travail et chez toi. » La liste ne tenait qu’à trois noms. Lui notait tout : le nom de mes collègues, de mes voisins de palier et d’immeubles ; leur nombre et leur situation professionnelle, etc. « Et qui est venu chez toi dernièrement ? Honor ? —Il n’y a que Beck et l’agent spécial Hauser. —Hauser ? Et venait-il fiche chez toi ? Et il était seul ? Ok, Honor ! On ne se connait pas et je n’ai jamais existé à tes yeux. A partir de maintenant je travaille seul et le moment venu je te contacterais. Ne fais rien de différent que d’ordinaire, d’accord ? Quant à ton ami Beck, il n’a rien à se reprocher. »
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qu’on vous fait subir ne sont que des formalités. Vous saisissez ? » Ai-je l’air de ne pas comprendre ? Je ne suis pas idiote ! « Qu’est-ce que vous regardez à la télé ? Oh ! J’adore cette série ! Vous la connaissiez avant ? Vous savez votre amnésie n’est pas générale mais seulement partielle à en juger vos divers tests. Des éléments de votre vie vont vous revenir progressivement, par brides et mon travail sera de vous aider à les restituer dans le bon contexte : distinguer la part de réel, du fantasme et de l’imaginaire. » Son téléphone se mit à sonner. « Veuillez m’excuser…je dois prendre l’appel. » Elle quitta la chambre, laissant tous ses documents sur mon lit et j’y jetai un rapide coup d’œil. Patient : X surnommé Haley. Taille : 1m78. Poids : 52 kilos. Adresse : Inconnue. Et j’ouvris le dossier. Trouble de la parole, propos hasardeux, aucune cohérence. Sensibilité aigue à la détresse d’autrui, désordre psychique dû à grande émotivité. Demande de placement à un CRS…Mon cœur s’emballa et des plus nerveuses je refermais le dossier pour me consacrer à l’écran. « Me revoilà…Avez-vous des questions ? —Ils choisissent toujours la solution 3 quand on leur soumet à la question suivante : Qui choisiraient-ils si leur bateau faisait naufrage. Les autres, personne ou eux-mêmes. Ils choisissent toujours la solution 3. Pourquoi ? —Je suppose que face à une agression notre réaction la plus légitime est de se replier dans les méandres de son esprit.
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—C’est ce que vous feriez, vous ? » Le sens de ma question la surprit à moins que ce ne fut le ton froid que je venais d’emprunter ; elle se crispa sur sa chaise. « Oui possible que j’agisse ainsi. Pas vous ? —Cet homme m’a violé et privé de mon identité ! Il m’a volé ma vie ! Je ferais tout ce qu’il m’est possible de faire pour le retrouver et le voir mort ! »
L’enfoiré est revenu. Cette fois avec de la nourriture. « La cuisine du Chef ! Avec ses compliments ! » Il a voulu me caresser la joue. J’ai détourné la tête pour fixer un détail de la plomberie. Il s’assit près de moi. Mon cœur battait si fort dans ma poitrine qu’il menaçait d’exploser. « Hey, tu dois manger d’accord ? Manges un peu, nous avons encore un peu de route demain. » il suivait un itinéraire précis, des étapes séparés des centaines de kilomètres environ d’après les peu informations que je tenais sur la clarté. On roule de jours. Moi dans le coffre. Il me fait avaler des sédatifs assez puissants pour me faire dormir dix heures d’affilé. Il met des sédatifs dans mes repas. Alors je refuse de m’alimenter depuis 24 heures, possible ; il fait nuit. Une barbe de trois jours recouvrait son menton.
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Et je l’ai frappé de toutes mes forces. Il n’a pas pu riposter. Alors j’ai grimpé l’escalier de bois mais sa main a saisi ma cheville. Il allait me saisir par le coup quand je lui portais un violent coup entre les jambes. « Non ! Non ! » Criai-je en me ruant en haut de l’escalier. Le loquet mit sur la porte, je me précipitais vers la porte nu-pied et en sous-vêtements. Comme une dératée je courus à travers les bois pour déboucher sur une route serpentant dans l’obscurité. Il me fallait fuir. Au loin je distinguais les phares d’une voiture. Sauvée ! Alors je courrais vers la source lumineuse en agitant les bras. Le chauffeur a ralentit en me voyant. Dieu soit loué j’étais sauvée ! « A l’aide ! Au secours ! » Le type sortit de son véhicule. « Mon Dieu que s’est-il passé ? —J’ai été kidnappée ! Je…je m’appelle Jill et… —Doucement. Tu vas d’abord te calmer. Tout va bien maintenant. Tu n’as plus rien à craindre. Ok ? —Il faut s’en aller ! Il va revenir. » Il m’aida à monter dans sa voiture et recouvrit mes épaules de son manteau. « Alors on va reprendre depuis le début. Tu dis qu’on t’a kidnappé ? Peux-tu identifier ce type ? —Oui ! Il est grand et…il a des yeux verts…il est roux et…il faut nous en aller. —Attends, tu es entrain de dire que le type est toujours en vie ? —Je l’ai enfermé il est enfermé…je me suis enfuie. » Il ouvrit sa boite à gant pour en sortir un flingue. « Qu’est-ce que tu fais ? —on va aller lui rendre visite. —Quoi ? Non ! Non !
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—le shérif est à 30 miles d’ici et faismoi confiance ils ne sont jamais pressés d’intervenir tant que les Fédéraux ne leur donnent pas le feu vert. Tu veux voir cet homme derrière les verrous ? Alors laissesmoi faire : indiques-moi la route. —C’est une petite cabane avec un auvent et…un perron. —Oui c’est un relais de garde forestier. » Il n’allait pas faire cela ? Il a roulé. Je crevais de froisse. Je tremblais comme une feuille, des plus fébriles. Il stationna devant la cabane et verrouilla la porte. Pourquoi faisait-il cela ? Il rentra, le flingue à la main ; il me fallait un objet pour me défendre pour le cas où l’autre malade serait incontrôlable. J’ai ouvert la boite à gants pour tomber sur des avis de disparition. « Oh, mon Dieu ! Mon Dieu ! » C’est moi qu’on voyait sur les avis avec mon nom de famille, prénom, date de naissance, mensurations, lieu de résidence, signes particuliers et la date de ma disparition. Et il y avait une insigne sous les papiers. Ce type était un flic du Michigan. Chicago précisément. J’étais sauvée et je pouvais peut-être me détendre. Impossible, tant qu’il n’était pas revenu avec ce salopard. Le temps sembla durer une éternité. Aucun coup de feu. Et puis…comment savait-il pour le relais de garde forestier ? Il n’était pas du coin et pourtant il savait. Et pourquoi m’avoir enfermé ? Je tentais de déverrouillé la porte de l’intérieur mais sans clef c’est mission impossible ; la peur me revint et je fouillais dans les poches du flic. Un ticket de caisse, un numéro de téléphone et rien d’autres, ni dans la doublure, ni ailleurs. Je fouillais sous le siège pour trouver une trousse de secours.
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Puis je glissai vers la banquette arrière. Je savais que certaine banquette pouvait s’escamoter pour permettre d’accéder au coffre. Ce que je fis. Mes doigts entrèrent en contact avec une bâche et un métal que je discernais être une pelle. Je poussais un cri d’effroi. Il me fallait en avoir la certitude. On toqua au carreau. Le flic me surprit à fouiller dans sa voiture et désactiva le verrouillage de sa Toyota. « L’endroit est sécurisé tu vas pouvoir descendre, déclara-t-il en ouvrant la portière passager. —Non, je…je suis mieux ici. Je veux rentrer…faites-moi rentrer s’il vous plait. Je dois rentrer. —Je viens d’appréhender le suspect et la cavalerie ne va pas tarder mais si tu préfères attendre ici, tu es libre de le faire. Cependant le mieux serait que tu sortes de ce véhicule pour éviter que ton angoisse n’augmente dans cet endroit. » En rentrant dans la cabane précédée du flic et là je poussai un cri de terreur en voyant mon ravisseur debout appuyé contre le chambranle de la porte, tenant un flingue à la main. D’un revers de main il me gifla. La suite, je ne me souviens plus. D’un bond je me levai. « Haley, tout va bien ? Encore l’un de tes cauchemar L’inspecteur Russel Crowley. frappa à la porte de la psychiatre Jen Connelly résidant au 23 street de la ville de N. à une heure de Londres via le train de banlieue. Notre inspecteur aux longs cheveux blonds
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sortit le carnet de sa poche dans lequel il avait souligné l’expression : déposition. Suspect N°1 par Murray. Elle l’attendait, les bras croisés sur la poitrine. Une jolie femme pensa-t-il en tentant un sourire de circonstances ; il venait pour l’interroger sur la disparition troublante de la petite Hannah Lynn Cott. « S’il vous plait, asseyez-vous ! » Elle paraissait toutefois nerveuse malgré ce calme apparent. « Vous savez pour quelles raisons je suis ici ? Lynn Cott est votre patiente. —Oui je le suis depuis….un an déjà. Elle venait régulièrement. Soit deux fois par semaine. Hannah n’est pas ce qu’on pourrait dire une fille à problèmes, seulement elle était volontaire pour ce genre de thérapie. Nous étions toutes deux en de bons termes. Je n’ai jamais rien eu à redire sur son comportement. Ponctuelle, participative et….adorable. C’est tout ce que je peux dire sur elle. » Il griffonna quelques mots sur son carnet. « Simple procédure vous savez. Comme on a du vous le dire….elle est portée disparue depuis deux jours, poursuivit l’inspecteur en cherchant une position plus confortable sur la chaise. Vous avez des enfants Docteur ? » Elle prit un air abasourdi. « Non. Mon époux et moi essayons. Cette question a-telle un rapport avec tout le reste ? » Il se leva d’un bond pour se rapprocher d’un tableau qu’il désigna ensuite du doigt. « Oui c’est…mon époux. Il peint à ses heures perdues et m’honore de ces toiles. S’il y a autre chose que je puisse faire, je reste à votre entière disposition Inspecteur ! » Peu convaincu il tapota sur son carnet à l’aide de son crayon de bois. Il fronça les
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sourcils, perdu dans ses pensées. « Vous aurait-elle fait part d’un souci particulier ? —Non. A part ses difficultés scolaires, nous n’abordions que des problèmes de fond. Ses relations conflictuelles et tout à fait saines avec son père et…. —Vous pensez à la thèse d’une fugue ? —C’est une adolescente ; rien de plus normal d’y songer. Si Hannah avait été ma fille je n’aurai pas exclue cette hypothèse. Mais Hannah n’es pas assez déraisonnable pour se risquer à pareille expérience. Elle n’en aurait tiré aucun profit. »
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[Epilogue]
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Dépôt légal : [octobre 2015] Imprimé en France
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