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HISTOIRE

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BIENVENUE

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L’initiative de la réorganisation des collections zoologiques en un Musée de Zoologie tel que nous le connaissons aujourd’hui depuis novembre 1962 appartient à Marcel Dubuisson, alors titulaire de la chaire de Zoologie et Recteur de l’Université, et s’intègre dans les travaux de modernisation de l’Institut de Zoologie qu’il entreprit de 1950 à 1960.

Les premières collections

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L’idée de récolter et de conserver des pièces de collections zoologiques en vue d’illustrer les enseignements et de servir la recherche scientifique date de la fondation même de l’Université par Guillaume 1er d’Orange en 1817. Dans son décret du 26 septembre 1816, il impose la création de collections pour illustrer les cours. Parmi elles, il prévoit la disposition d’un « cabinet de zoologie et d’anatomie comparée des animaux ».

Dès 1863, l’achat de collections zoologiques rassemblées, entre autres, par le comte Castelnau notamment au Brésil, en Afrique centrale et aux Indes occidentales, enrichit les collections de centaines de pièces d’oiseaux, de mammifères, de poissons et de crustacés.

L’évolution

Le professeur Edouard Van Beneden (1846-1910), nommé à la chaire de Zoologie en 1870, fut à l’origine de l’édification, de 1885 à 1888, de l’Institut qui porte aujourd’hui son nom. L’Institut zoologique est construit par la Ville de Liège entre 1886 et 1888, pour l’Université.

L’architecte Lambert Noppius se conforme au cahier des charges établi par l’éminent savant. Il y prévoit une infrastructure muséologique importante pour abriter les collections de zoologie et d’anatomie comparée accumulées dans les étroits locaux de l’Université alors établie sur l’actuelle place du 20-Août dans les anciens bâtiments du collège des Jésuites et où le public n’avait que rarement accès. Son ambitieux projet ne put cependant pas atteindre le niveau de présentation projeté, faute de crédit suffisant. C’est à son initiative qu’une section spécialement consacrée à la faune belge fut développée.

La mutation

Le bâtiment et les collections subissent de graves dommages pendant les deux guerres du 21° siècle. Peu après la seconde guerre mondiale, en 1947, Marcel Dubuisson (1903-1974), futur Recteur de l’Université (1954), fixe de nouveaux objectifs et une triple mission : servir la recherche scientifique, illustrer les enseignements universitaires et, enfin, valoriser et rendre accessibles à tous les riches collections zoologiques.

Dans la foulée des travaux de réaménagement intégral de l’Institut, entrepris de 1947 à 1957, il fit procéder, dans les combles du bâtiment, à la réorganisation complète des collections en un Musée de Zoologie attrayant et didactique : près de 20’000 pièces de collections y sont présentées sur une superficie de 1.000 m²

C’est Fritz Carpentier (1890-1978), Conservateur du Musée depuis 1924, qui fut chargé d’assurer cette mutation, assisté dans sa tâche par Fernande Kraentzel, alors son assistante et qui sera nommée Conservateur dès 1951. Ensemble, pendant près de 10 ans, ils mirent sur pied ce Musée de Zoologie modèle dont bénéficient encore aujourd’hui les étudiants, les chercheurs et le public.

Dubuisson commandera aussi deux œuvres d’art pour l’Institut : le vitrail de J.C. Lismonde

(1959) et la grande fresque murale intitulée La Genèse, de Paul Delvaux (1960). Dans la foulée de ces travaux, Marcel Dubuisson décide de la création d’un aquarium, véritable musée aquatique vivant et auxiliaire de l’enseignement et de la recherche, qui devra, comme le musée de zoologie, être accessible au public et aux enfants des écoles. La conception est confiée à Jean Godeaux, spécialiste de biologie marine, assisté du Pr René Spronck, chargé des installations hydrauliques et des équipements électromécaniques. La reconstitution dans les 27 bassins de véritables biotopes naturels est confiée aux professeurs Michel Chardon et Jean-Claude Ruwet. C‘est à eux que l’on doit aussi les premières collections. Des expéditions de récoltes sont alors organisées en Mer du Nord, en Méditerranée, dans l’océan Atlantique, etc.

On procéda à l’inauguration officielle du Muséum ouvert au public le 12 novembre 1962 en même temps que celle de l’Aquarium. L’ensemble reçut d’emblée une triple mission : le soutien de la recherche scientifique, l’illustration des enseignements et la vulgarisation des sciences naturelles par l’ouverture au public.

« (...) Musée et Aquarium seront de remarquables auxiliaires de l’enseignement et de la recherche, mais je considère qu’ils doivent être ouverts au public et surtout aux enfants des écoles (...) »

Marcel Dubuisson

La Ville verse alors une subvention annuelle non négligeable à l’Université pour participer aux frais de fonctionnement et d’accueil du public.

L’expédition belge à la Grande Barrière en Australie en 1966-68, organisée par le recteur de l’Université de Liège Marcel Dubuisson pour la Belgique, ramène plus de 300 coraux pour lesquels on créera la salle des Madrépores, avec des vitrines dessinées par l’architecte Claude Strebelle. Cette collection unique est toujours exposée à l’AquariumMuséum.

La réalisation d’un documentaire en 1969 unique en son genre remportera plusieurs prix peu de temps après l’ouverture de cette salle. L’Aquarium-Muséum aura l’honneur, en 1973, de recevoir la visite officielle de Leurs Majestés le Roi Baudouin et la Reine Fabiola.

La création d’ASBL : la relance

Au cours des années 80, les difficultés financières de la Ville et de l’Université sont telles que le musée doit se séparer de bon nombre de membres de son personnel, malgré une subvention nouvelle de la Communauté française. On envisage même un temps la fermeture… Cependant, plusieurs solutions sont trouvées : créer des ASBL. La FERN – Faune Education Ressources

Naturelles – d’abord (1981), l’Association pour la Promotion de l’Aquarium et du Musée de Zoologie de l’Université de Liège (APAM Lg) –ensuite (1991), aujourd’hui « AquariumMuséum Universitaire de Liège ». Cette dernière structure stable constituée de représentants des deux partenaires (Université et Ville de Liège) permettra la relance.

En 1993 et 1994, de nouveaux bassins complètent la salle publique. Deux ans plus tard, on rénove la salle des madrépores, tandis qu’on agrandit le grand bassin où vivait Caroline, la tortue fétiche, désormais installée

à La Rochelle.

Une évolution importante aura lieu en 2001 : avec l’aide du FEDER et de la Région Wallonne, l’Université réalise des travaux d’extension et inaugure le grand aquarium des requins (66’000 litres) et celui destiné aux récifs coralliens (10’000 litres).

En 2006, le réseau Embarcadère du Savoir est fondé par l’Université de Liège et trois partenaires culturels de l’Université, dont l’Aquarium-Muséum. L’Institut zoologique devient le siège de l’association dont le but est de valoriser la culture scientifique au même titre que les arts ou la musique. Fédérant initialement trois musées de sciences et techniques (l’Aquarium-Muséum de l’Université, la Maison de la Science et la Maison de la Métallurgie et de l’Industrie), ce réseau s’est petit à petit élargi et compte aujourd'hui sept institutions, avec les Espaces Botaniques universitaires, l'Insectarium JeanLeclercq – Hexapoda, Haute Ardenne et la Société astronomique de Liège.

En 2014, la salle requin et récifs coralliens accueille une nouvelle scénographie permanente de la prestigieuse collection de coraux ramenés lors de l’expédition scientifique belge à la Grande barrière de Corail. Enfin, en 2015 un nouveau bassin « lagon tropical » finalise cette salle fort appréciée des visiteurs. Sans compter les rénovations permanentes des bassins existants, l’attribution de nouvelles thématiques – poissons cryptiques, poissons électriques, …

Aujourd’hui

Considéré par le Conseil des Musées comme l’institution phare de la Fédération Wallonie-

Bruxelles dans le domaine de la muséologie des Sciences naturelles et reconnu depuis 2010 comme musée de catégorie A, l’Aquarium-Muséum ne cesse de voir augmenter sa fréquentation. Sans compter ni les étudiants, ni les visiteurs de prestige, ni les congressistes invités, on enregistre environ 30’000 entrées par an dans les années 70, autour de 70’000 dans les années 90, et en moyenne 90 à 95’000 désormais.

L’Aquarium-Muséum est également reconnu Attraction touristique par le Service Publique de wallonie - CGT – et classé 4 soleils.

Les importantes collections comptent quelque 2’500 poissons vivants, représentant plus de 250 espèces des océans, des mers, des lacs et des rivières du monde entier, et plus de 20'000 spécimens conservés, naturalisés ou à l’état de squelettes illustrant la diversité animale, du plus petit insecte jusqu’à la baleine ou l’éléphant, en passant par des espèces disparues, comme le dodo ou le loup de Tasmanie, ainsi que des moulages et des modèles didactiques en cire, et d’autres en verre issus des ateliers Blaschka.

Le Bicentenaire de l’Université : la nouvelle salle TéZOOr, juin 2017

L’Aquarium-Muséum Universitaire de Liège est, a priori, une Institution où l’on va découvrir à la fois des spécimens d’animaux vivants et des spécimens d’animaux préservés – naturalisés, conservés en fluide ou sous forme de squelettes. À juste titre d’ailleurs.

Mais les collections universitaires du Muséum renferment également des objets patrimoniaux remarquables, des témoins d’une grande valeur scientifique, historique ou artistique, et qui illustrent l’histoire des sciences naturelles. Ces objets patrimoniaux sont dignes d’être, tous ensemble, désignés comme « Trésors du Patrimoine zoologique » et exposés dans une nouvelle salle permanente complètement réaménagée. Trois grandes thématiques y sont abordées : l’histoire des collections depuis 1817, les rôles d’un musée universitaire et les collections pédagogiques.

On y découvre la prestigieuse collection Blaschka, une vaste collection de modèles anatomiques et embryologiques en cire du 19° siècle – embryons humains, larves de plancton, acariens, écrevisse… – , des spécimens, des carnets de voyage et des aquarelles du naturaliste explorateur Comte de Castelnau (1812-1880), des spécimens naturalisés d’espèces éteintes tels le Thylacine, le Loup de Tasmanie, ou le Drontele « Dodo d’Alice au pays des merveilles - , des spécimens-types comme la Sotalie – un petit dauphin – découverte par Édouard Van Beneden, etc…

La collection Blaschka

À la fin du 19e siècle, les techniques de conservation des invertébrés sont encore rudimentaires. Conservés dans l’alcool ou le formol, ils perdent rapidement leurs couleurs, leur transparence et leur forme. Édouard Van Beneden, tout comme d’autres professeurs et directeurs de musées de par le monde, s’intéresse alors au travail des artistes allemands de Dresde, Léopold Blaschka (1822-1895) et son fils Rudolph (1857-1939), qui réalisent en verre des reproductions méticuleusement fidèles aux animaux vivants ou conservés qui leur servent de modèles, ou aux illustrations d’ouvrages scientifiques. Les premières créations de Léopold Balschka, dans les années 1850, lui valent une certaine notoriété. Il s’agit d’une centaine de modèles d’orchidées réalisées à la demande du Prince Camille de Rohan, pour décorer son palais. Puis des anémones de mer et autres invertébrés marins, qu’il reproduit en verre toujours à des fins décoratives. Dans les années 1860, son travail prend une tournure différente : il cherche désormais à reproduire la réalité de manière rigoureuse et précise et met au point des techniques de transformation du verre pour obtenir toutes les apparences recherchées. En 1876, son fils Rudolf, âgé de 19 ans, rejoint l’atelier. Ensemble, ils obtiendront rapidement une notoriété mondiale. En 1878, ils publient un catalogue de 630 modèles et détails anatomiques d’animaux invertébrés.

Chaque objet est un exemplaire unique. La précision de leur échelle, de leur forme, de leurs couleurs, de leur transparence traduit la qualité du sens de l’observation des Blaschka ainsi que leur remarquable talent dans le travail du verre, reconnu par les plus grandes universités et institutions muséales. En 1886, l’université de Harvard leur passe un contrat

(qui deviendra rapidement contrat d’exclusivité) pour la création de modèles floraux et végétaux.

La même année, Édouard Van Beneden leur commande 77 modèles pour l’Université de Liège. Mais le verre est très fragile et le registre de 1926 ne mentionne plus que 58 pièces. D’autres techniques de conservation et d’imagerie ou l’utilisation d’autres matériaux comme le plastique mettront fin à l’utilisation des modèles de verre, qu’on relèguera dans des armoires. En 1990, le registre fait état de 52 pièces restantes, la plupart en très mauvais état.

Ces petits chefs-d'œuvre extrêmement fragiles, alliant qualité artistique et rigueur scientifique, viennent d’être entièrement restaurés par Isabelle Pirotte. Ou plus exactement 39 d’entre eux, les autres ayant subi des dégâts irréparables. Ces 39 pièces étaient fortement empoussiérées, fêlées, voire brisées, les couches picturales avaient subi des décolorations et des dégradations, certaines parties métalliques étaient corrodées. Avant toute intervention, Helena Wouters et Marina Van Bos, de l’Institut Royal du Patrimoine artistique ont analysé, avec des méthodes et matériels sophistiqués, la composition des verres, les colles et pigments utilisés par les Blaschka. C’est grâce à ce travail que la restauratrice a pu rétablir l’état originel de chaque pièce.

Le 13 juin 2017, la fédération Wallonie Bruxelles classe la collection Blaschka comme Trésor du Patrimoine Culturel mobilier, le premier objet classé Trésor dans le domaine des sciences naturelles.

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