EREBUS 1974
Pour mon hĂŠros, mon Papy-Jo
Expedition erebus 1974
Du 8 au 14 octobre 1974 Les Deux Alpes PrĂŠparation pour mission Erebus aux 2 Alpes.
Jeudi 21 novembre 1974 Départ mission Erebus Le départ s’est effectué à 9h15comme tout vol en jet à 10000m d’altitude, le voyage a été assez morne. Pour meubler le temps, journaux, livres. Au cours du vol2 repas nous ont été servis. A 17h l’avion se posait à Montréal. Une tempête de neige sévissait sur la région. Le pilote de l’armée de l’air posa le DC8 d’une façon parfaite malgré la mauvaise visibilité inférieure à 20m. Malgré les voitures de radioguidage, l’avion mit une heure pour rejoindre l’escale. Les passagers ne manifestèrent aucun signe d’impatience. A l’arrivée à l’aéroport, l’accueil des canadiens s’avéra plutôt froid. Cela me laissa indifférent. Sachant que nous devions passer la nuit avec Kurt, nous trouvâmes un coin tranquille pour dormir. 10H00 de sommeil et hop parés au départ ; nous avons été un peu déphasés par rapport au décalage horaire (+6h).
Vendredi 22 novembre 1974 Montréal -> Los Angeles 5h45 Réveillé après 10h de sommeil avec le décalage horaire, nous étions très matinaux. 4H00 pour la province de Montréal. Quel spectacle dans la salle : d’un dessous de table dépassaient 2 pieds, une tête, c’était comique. De plus pour accompagner une certaine musique de bons ronflements sonores se faisaient entendre. Pour meubler l’attente d’un éventuel départ, je fis ma toilette et ensuite sorti mon bouquin. A la tempête de la veille succédait un temps très froid mais très beau. Que dire de la région de Montréal : « rien ! » Nous n’avons connu que les murs de l’aérogare, chose peu intéressante mais comparable à une prison» passez par ici n’ouvrez pas cette porte, etc... » bref le départ qui s’effectua à 11h de Montréal était le bienvenu. Arrivée à Los Angeles 16h45 heure de Montréal soit 12h45 heure de Los Angeles. Décollage de Los Angeles 14h30 heure locale. Arrivée à Papeete 23h (heure de Los Angeles) entre Los Angeles et Papeete, il y a 2h de décalage. L ‘arrivée à l’aéroport de Papeete s’est passée tranquillement. Après la mise en consigne des bagages, un p’tit car nous a conduit à l’hôtel Maeva. Quelle différence avec la veille ou pour dormir nous devions nous contenter du parquet de la salle de restaurant de Montréal. Ici c’est le super luxe. Rien ne manque dans cet hôtel sur la table de lecture dans la chambre d’hôtel, un plateau de fruits nous tend les bras, une piscine à la disposition des clients, la mer à deux pas, bref dans tout ce décor, il n’y a qu’une chose qui dénote : « les vieilles rombières pleines de fric en robe longues » quel dommage d’avoir perdu une journée à Montréal, l’île a l’air d’être si belle.
Décollage Papeete : 7h30 -> atterrissage Auckland : 13h00 Décollage Auckland : 15h30 -> atterrissage Christchurch : 17h00 A notre arrivée à Christchurch, une petite déception attendait l’équipe car les néo zélandais brillaient par leur absence. Après une attente plus ou moins prolongée, suivant la patience de chacun, Tazieff prit la décision de louer 3 chambres à l’hôtel Commodore et de là, téléphoner et décider de la suite à donner à l’expédition. L’hôtel était distant d’environs 2km de l’aéroport. Chacun prit son sac sur le dos et à la queue leu-leu, l’équipe se dirigea vers cet hôtel avec une seule idée : se laver et se restaurer. Que penser d’un tel voyage : « un peu décevant, car se retrouver aux antipodes après 40h de voyage, avoir passé tout son temps dans l’avion les aérogares avoir survolé des pays magnifiques, cela revient un peu à prendre le train le soir à la gare de Lyon et se retrouver le lendemain matin à Monaco.
Lundi 25 novembre 1974 Christchurch A Christchurch nous avons passé une excellente journée. Après avoir quitté l’hôtel Commodore et avoir été réceptionnes par les néo-zélandais toute l’équipe loge dans un appartement composé de trois chambres salle à manger cuisine magnifique etc... J’ai joué le rôle de cuistot. Midi : bœuf, soir : gigot d’agneau. Incroyable mais vrai le prix de revient du gigot : 18.00. C’est vraiment un plaisir de manger de la si bonne viande à si bon marché.
Mardi 26 Novembre 1974 Départ pour le Mont Cook Toute l’équipe est prête. Le petit déjeuner a été pris à 6h30. Vaisselle faite, dans l’attente du véhicule qui doit nous conduire à l’aéroport à 8h00. La majeure partie des gars écrivent cartes et lettres. Nous avons décollé de Christchurch pour le Mt Cook à 9h30. 40 minutes plus tard, l’avion se posait sur l’aérodrome au pied du Mt Cook. Là, un car conduisit l’équipe au relais du Mt Cook où Haroun prit contact avec les guides: «explications de l’emplacement des huttes, de la configuration du terrain etc...». Pendant ce temps, certains membres de l’équipe mitraillaient le coin de leur appareil photo. 11h45 : départ vers le glacier. Pour descendre au fond de la moraine : une corde pendant le long de la paroi. Sac au dos, à tour de rôle, l’équipe descendait vers le glacier. Les sacs à dos chargés de vêtements et de nourriture tiraient sur les épaules. après une heure de marche, ayant franchi x nombre de moraines, l’on mit enfin le pied sur le glacier. Tout au long de la marche, sous un soleil splendide, le glacier nous offrit un spectacle grandiose : grotte, ruisseau tout cela baignait dans de magnifiques couleurs. Après 7h00 de marche les membres gour, l’équipe n’aspirait plus qu’à une chose : établir le bivouac, manger et dormir.
Mercredi 27 novembre 1974 Camp de base Départ pour le deuxième parcours. après 4h00 de marche, arrivée à la Hutte du Malte brun. Repas, repos, sieste et entrainement paroi. Les muscles étaient douloureux, la peau du visage brûlée.
Jeudi 28 novembre 1974 Camp de base Petit à petit, la forme prend le dessus. Nous évoluons dans une bonne température. La nourriture est bonne. Vers les 9h00, l’équipe harnachée repart pour l’entrainement. Une nouvelle paroi est choisie. fanfan et Kurt installent les cordes et chacun son tour s’entraine soit à la descente, soit aux jumars pour la montée, etc...
Vendredi 29 novembre 1974 Mont de Malte brun Une course est organisée vers le Mont de Malte brun. L’équipe, après avoir atteint 2600 m s’arrête au sommet d’un col et là s’entraine à nouveau. La descente vers la hutte sera très rapide : des belles pentes de neige me permettent de descendre parfois sur les fesses.
Samedi 30 novembre 1974 Hutte du Malte brun Retour vers la plaine. Si l’aller a été pénible, le retour s’effectue en 4h30 pour certains, 5h pour d’autres, sous la pluie. Repos à la hutte du Malte brun, bien chauffée et où la nourriture ne manque pas.
Dimanche 1er décembre 1974 Retour à Christchurch Retour de la hutte vers l’aéroport en car. Ce parcours fut marqué de plusieurs haltes au cours desquelles l’on put admirer le paysage qui était magnifique. 11h50 : décollage pour Christchurch 12h30 : atterrissage à Christchurch Retour dans notre appartement, course pour la douche et enfin casse-croûte. Nous étions bien contents de retrouver un peu de confort.
Lundi 2 novembre 1974 Christchurh Repos, courses en ville, le soir petite réception à Christchurch
Mardi 3 novembre1974 Christchurch Préparation du départ, quelques courses et surtout : repos.
Mercredi 4 décembre 1974 Scott Base Enfin le départ pour Scott base 9h00 : décollage 16h30 : atterrissage sur la banquise, paysage grandiose
Jeudi 5 décembre 1974 Scott Base Vérification du matériel. Le «barnes» après avoir fonctionné une demi heure ne veut plus donner aucun signal. a la mise sous tension : rien. Les batteries de la lunette de vitesse étaient déchargées. après une recharge de 5h00, un essai de visée fut effectué sur la petite cheminée de l’incinérateur d’ordure qui fonctionnait. Résultat : OK. Reconstitution des charges pour le transfert par hélicoptère prévu pour demain 10h00. Fin du boulot : minuit.
Vendredi 6 décembre 1974 Scott Base Héliportage du matériel au sommet de l’Erebus en matinée. L’après-midi : courrier, puis projection photo le soir.
Samedi 7 décembre 1974 Scott Base Matinée consacrée à faire nos sacs car l’héliportage de l’équipe doit avoir lieu en fin d’après-midi. Le temps est toujours beau. 16h00 : les hélicos sont là. En quatre rotations, toute l’équipe se trouve à 2700 m au camps intermédiaire où elle doit passer 5 jours pour s’acclimater à l’altitude et au froid. Pour l’arrivée au camp, le temps est splendide mais le froid se fait sentir, le thermomètre accuse -25°C. le soir il descend encore un peu et marque -32°C. Une fois la tente servant de cuisine installée, les réchauds à kérosène allumés, les théières remplis de glace prennent place sur le feu. Pendant ce temps l’équipe monte quatre petites tentes qui serviront de dortoir : deux tentes de trois et deux tentes de deux. Répartition des gars : - 1ère tente : Fanfan, Gavrouck et Jo - 2ème tente : Kurt et Daniel - 3ème tente : Shawn, Jean-Christophe et un néo-zélandais - 4ème tente : un américain et un néo-zélandais Vers les 22h00, le vent se lève. Toute l’équipe est toujours réunie autour des feux. vers minuit, chacun rejoint sa tente et peu après le blizzard s’annonce. Sa force s’amplifie de plus en plus et vers les 4h00 du matin, Fanfan et Gavrouk se lèvent pour consolider l’arrimage de la tente servant de cuisine.
Dimanche 8 décembre 1974 Camp intermédiaire La tempête fait toujours rage. Je pense que le vent souffle par moment à plus de 100 km/h soulevant un nuage de poussière de neige. La visibilité est nulle. Vers les 9h00, je me lève et je rejoins la cuisine dans la tornade. La neige me pince le visage et me gèle le bout du nez, mais le corps ne souffre pas du froid. Les vêtements sont excellents. Toute l’équipe française supporte bien le choc. Hier au soir, Jean-Christophe et Daniel ont eu un peu mal à la tête, mais aujourd’hui rien à signaler. L’appétit est bon. Par contre deux néo-zélandais est l’américain sont malades, surtout l’américain qui la veille a failli tourner de l’œil. Après avoir passé ma journée dans la cuisine préparant thé, riz, bacon, le soir je me couche à 18h00. La tempête fait toujours rage et par moments s’amplifie. Légère inquiétude : les tentes résisteront-elles ? La tempête souffle toute la nuit et puis...
Lundi 9 décembre 1974 Camp intermédiaire A la tempête à fait place un beau ciel avec un léger vent. Lever 10h00 et hop, les réchauds se rallument, je prépare la soupe de midi. Les copains protègent la tente par un mur de neige. dans l’après-midi : promenade. la vue est splendide, la mer de Ross est magnifique, une bonne partie de la glace a été chassée par le vent et la couleur de l’eau est d’un bleu somptueux. A l’horizon, on aperçoit l’ile Franklin et au pied de l’Erebus, la paroi verticale d’une hauteur de 40 m environ où Shackelton avait essayé sans succès d’accoster. La caméra, figée par le froid ne veut pas fonctionner. La soirée se prépare. Peut-être y aura-t-il une petite fiesta ce soir...
Mardi 10 décembre 1974 Camp intermédiaire De nouveau, la tempête qui s’est levée dans la nuit. Le froid du matin invite l’équipe à rester au lit. Pour ma part, vers les 10h00, j’en ai raz le bol de la tente. Aussi je me lève, prépare une soupe, du thé et du chocolat que je distribue dans les tentes. Une envie subite m’oblige à affronter le vent le froid et la neige. Quels problèmes de se déculotter avec tout l’attirail que l’on a sur le dos. Les fesses à l’air, je me sens figé par le froid. Bien vite, je relève tout mon attirail et file à l’aveuglette me rééquiper dans la tente servant de cuisine. Peu après la réaction au froid se fait sentir. La peau du fessier me brûle. Dans l’aprèsmidi, une petite sieste de 2h00. Petit à petit, la tempête se calme et le soir, vers 18h00, le beau temps revient. Aussitôt, les tentes se vident, une soupe est vite absorbée et enfin, on peut aller faire une belle promenade qui en fait dure 3h00. le paysage est magnifique. Les yeux ne sauraient se lasser d’admirer ce décor grandiose. X nombre de photos sont prises dans l’espoir de pouvoir revivre au retour ces moments fabuleux. Coucher 23h00 enfin dans le calme et non plus au son hurlant du vent.
Mercredi 11 décembre 1974 Camp intermédiaire Enfin le beau temps. 9h00 : je me lève. Comme par hasard, ce beau temps fait sortir les membres de l’équipe des tentes plus tôt que d’habitude. L’on sent une certaine détente au milieu de l’équipe, car le vent ayant cessé de souffler, un calme impressionnant entoure le camp. Après une légère collation, l’équipe se prépare à subir un petit entrainement. Jumar, Shunt, harnais sortent des sacs. Chacun s’équipe à sa façon. Fanfan toujours en point choisit une paroi de neige bien verticale comme lieu d’entrainement. La hâte de participer à l’action se dessine sur les visages. Il est vrai que depuis trois jours, par suite du mauvais temps, l’équipe est au repos forcé. Après l’entrainement, casse-croûte : pour ma part, je leur mijote une petite omelette au bacon avec des œufs en poudre. Elle plait et est bien vite absorbée. Shawn prépare à son tour une ratatouille anglaise. Bonne également. le tout est arrosé de thé, café et pour finir de vin chaud et thé au rhum. Vers les minuit, l’équipe Française se dirige chercher le repos vers les tentes après avoir chanté quelques chansons. demain il faudra se lever plus tôt que d’habitude car les hélicos doivent être là vers les 9h30 environ. aussi les bagages devront ils être prêts.
Jeudi 12 décembre 1974 Camp intermédiaire Lever : 7h00; j’emballe mes affaires bien rapidement et me dirige vers la tente de cuisine. Fait exceptionnel, le thé est prêt. Les anglais se sont levés très tôt en prévision du départ qui sera retardé car un léger brouillard s’étend sur le camp interdisant aux hélicos d’atterrir. J’espère que ce brouillard se dissipera assez vite car j’ai hâte de rejoindre le sommet. Surtout qu’en ce moment la forme est excellente. Pour passer le temps, l’hélico ne devant venir qu’à 16h, l’équipe entreprend la construction d’un igloo que façonne de façon remarquable notre ami Cavillon. un temps splendide nous permet d’admirer le mer de Ross en pleine débâcle. 16h00 : enfin l’hélico se fait entendre à l’horizon. Le moment est proche où enfin l’équipe va atteindre le sommet. J’attend ce moment avec impatience. au cours de la journée, j’ai plus ou moins lézardé, j’en ai profité pour mettre mon courrier à jour. 17h30 : l’hélico me pose au sommet de l’Erebus en compagnie de Fanfan et Jean Christophe. Nous avons pris la seconde rotation, à la première, il y avait Tazieff, Cavillon et Kurt. L’installation du nouveau camp nous prend environ deux heures. cette fois je fais équipe avec Kurt dans la tente.
Vendredi 13 décembre 1974 Camp intermédiaire Le mauvais temps s’installe dans le coin et nous oblige à jouer les marmottes. Il fait froid, le vent souffle assez fort, la température est basse : -33°C. devant de telles conditions climatiques, le travail n’avance pas beaucoup.
Samedi 14 décembre 1974 Cratère de l’Erebus Le temps s’améliore. Avec Jean-Christophe, nous tentons notre première descente sur la 1ère plateforme du cratère et approchons le puits. Nous apercevons par courts instants le fond et une question saute à l’esprit : est-ce prudent de tenter le diable ?
Dimanche 15 décembre 1974 Cratère de l’Erebus Condamnés à attendre l’hélico qui doit venir demain transporter les charges sur une plateforme toute proche de la descente dans le cratère, j’effectue dans ma journée deux descentes au bord du puits du cratère dont une avec Jean-Christophe et Haroun. Une paroi de 100 m nous oblige à l’escalade. A la montée de la deuxième, Haroun a toutes les peines du monde à rejoindre le sommet et doit avoir recours à l’aide des copains de l’équipe. Cette remontée s’effectue dans un froid glacial. Le soir au repas, devant la peine du chef, le moral est bas. J’ai eu les orteils du pied gauche légèrement gelés. Un bon bain d’eau chaude remet le tout en place après bien des souffrances.
Lundi 16 décembre 1974 Camp intermédiaire A nouveau le mauvais temps. Une fois de plus, nous faisons le va et vient entre la tente dortoir et la tente cuisine. Que faire dans un tel climat lorsqu’on a froid et et que le corps doit dépenser une grande énergie pour survivre ? Heureusement la nourriture ne fait pas défaut et chacun se restaure à sa façon.
Mardi 17 décembre 1974 Camp de base Enfin le beau temps. Dans la matinée nous préparons les charges pour l’hélico et prenons une légère collation. 15h00 : Le bruit caractéristique de cette machine volante se fait entendre et avec un certain soulagement, car les 100 m entre le camp de base et le sommet sont raides et dur à parcourir lorsque l’on a une charge de 20 kg sur le dos. Tout se passe très bien et en quelques rotations le matériel est là haut. Le moral est bon mais notre patron n’a pas la forme. Les décisions sont prises un peu à la sauvette.
Mercredi 18 décembre 1974 Camp de base L’équipe est sur le pied de guerre. Kurt ne tient plus en place et file là haut. Il lui tarde de mettre en place son téléphérique. Travail réussi en 6h00. L’installation est testée et une première charge descendue. Pour ma part, je me suis bien amusé dans la paroi tractant le câble du téléphérique attaché à mon dressler. Dans ma journée, j’ai effectué trois montées et trois descentes, la forme est bonne. Le soir au retour, une bonne soupe nous attend car Fanfan est resté ce jour installer correctement la cuisine afin de la rendre plus agréable.
Jeudi 19 décembre 1974 Sommet du cratère Pas de chance, au sommet un vent assez fort venant du Nord souffle. Tous les gaz restent à l’intérieur du cratère. Que faire ? Finit-on de descendre les charges ? Un essai est tenté. Pour ma part, je tente une descente. A michemin de la paroi, je rebrousse chemin car je suffoque un peu. effet dû aux gaz. je suis un peu sonné. devant ce contre temps, nous faisons le tour du cratère. Il fait froid, je n’ai qu’une envie, descendre au camp pour boire quelque chose de chaud et dormir pour récupérer.
Vendredi 20 décembre 1974 Sommet du cratère Le temps est beau. Aussi en compagnie de Kurt, je monte au sommet. Nous avons l’intention de descendre tout le matériel sur la 1ère plateforme du cratère. Daniel nous rejoint. Je descend à la plateforme pour réceptionner les charges, accompagné de Daniel. Tout se passe bien pour les deux premières charges. Pendant ce temps, Fanfan et Jean-Christophe rangent la cuisine. Ce travail fini, ils rejoignent le sommet. quel dommage qu’ils ne soient pas arrivés une demi heure plus tard. Un léger incident met aux prises Fanfan et Kurt : une hélico vient nous rendre visite. La photo prime sur le travail. Kurt s’énerve et s’en va. Fanfan amarre sa charge à la galette, ampoules pour prélèvement. Que se passe-t-il au moment de la descente ? Quatre caisses thermodymes se détachent et dévalent la paroi. Les quatre caisses contenaient les ampoules de Fanfan et Warner. C’est la consternation au sein de l’équipe car la manip parait compromise. Fanfan est abattu car il est indéniable que c’est sa responsabilité seule qui est en cause. En compagnie de Daniel, je vais constater les dégâts. Tout est cassé, aussi bien les boites que les ampoules. Après une attente de deux heures, le travail reprend et tout le matériel se retrouve au fond du cratère. Ce travail fini, les patrons décident d’observer le puits du cratère. Ils veulent observer une explosion. Je passe pour ma part 11h sur la plateforme. Inutile de dire que j’en ai marre car le froid se fait sentir. 22h15 : Je remonte au camp de base où je rejoins Daniel qui a préparé une soupe chaude. A minuit, Shawn, leader néo-zélandais nous annonce que nous devons prendre le quart de surveillance du cratère à 6h00. au cours de cette journée aucune explosion n’a eu lieu...
Samedi 21 décembre 1974 Camp de base Je n’ai pas pu me réveiller à 6h00 pour prendre le quart. Cela peut se comprendre car sans réveil, la fatigue jouant, je me trouvais bien dans les bras de Morphée, oubliant le mal que j’éprouve à l’orteil du pied gauche et au bout des doigts. La peau et la chair du gros orteil du pied gauche a éclaté par suite de la gelure du dimanche 15. De plus, sur le côté du même orteil, j’ai une belle ampoule. ma chaussure me fait mal, je soigne le tout avec des pansements urgo. On verra bien. Levé à 9h30, j’apprend qu’une explosion a eu lieu à 6h45. Je suis déçu, car normalement j’aurais du me trouver au poste de veille. Enfin tant pis, les patrons décident de continuer la veille. Phillip et Max au moment de l’explosion se sont retrouvés projetés au sol à 5 m de leur point d’observation. Un peu effrayés, ils n’attendent pas leur reste et prennent le chemin du camp. 10h30, en compagnie de Daniel, je prends la direction du sommet où nous devons choisir un point d’observation pour éviter le danger du fond. Pour ma part, je dois aller récupérer appareil photo et autres bricoles sur la plateforme du cratère. Une petite descente en rappel ne peut que me faire plaisir histoire d’entretenir la forme. Arrivé à l’emplacement du treuil, nouvelle déception : le câble du téléphérique est coupé. en compagnie de Kurt qui vient d’arriver, nous décidons de réparer les dégâts par son remplacement. Auparavant, nous cherchons la cause et je la trouve. Au moment de l’explosion de 6h45, une bombe est tombée sur le câble, le sectionnant à la base et au sommet. De plus, chose incroyable, cette bombe de 30 kg environ s’est soudée sur le câble. bref, constatation faire, le nouveau câble est en place. Quelques photos sont prises et vers les 18h00 nous reprenons le chemin du camp de base pour la soupe. Après la soupe, toute l’équipe se retrouve dans la tente de nos amis néo-zélandais où vin chaud et digestif sont servis. L’ambiance est bonne. Chants français et anglais agrémentent cette veillée.
Dimanche 22 décembre 1974 Camp de base Couché à 1h00, je me lève à 13h00. Je prend un léger déjeuner. Il neige. Un brouillard interdit toute promenade. Nous voilà à nouveau condamnés à rester au camp. Dire qu’avec un peu plus d’organisation la manip aurait pu être finie... Hélas, nous voila condamnés à attendre la bonne volonté du temps et le retour de Werner parti en compagnie de Jean-Christophe à McMurdo, réparer la casse des ampoules. J’espère qu’en fin de semaine tout sera terminé.
Lundi 23 décembre 1974 Camp de base Petit à petit, l’énergie de l’équipe diminue. L’attente se prolonge. Une pensée mine les esprits : le patron prendra-t-il le risque de faire descendre les gens dans le puits du cratère. Ce serait une folie car en cas d’explosion, il y aurait des morts. Enfin, si cela doit se faire, j’irai jusqu’au bout. Tel est mon désir. Ne pas céder à la panique. L’aprèsmidi, en compagnie de Kurt, nous sommes à nouveau montés au sommet. Nous avons réparé et tendu le câble du téléphérique. Pour visser les boulons, nous étions obligés d’enlever les gants. La peau collait à la ferraille car le froid devenait de plus en plus vif. La température baissait jusqu’à -29°C. Combien de temps résisteronsnous encore ? Le soir, épuisé l’un l’autre, nous avons rejoins nos couchage vers 22h00. Qu’il étaient froids ! Après s’être plus ou moins réchauffés au contact du duvet, le sommeil est venu nous libérer de tout soucis.
Mardi 24 décembre 1974 Camp de base Lever 9h30. En arrivant dans la tente de cuisine, enfin une bonne nouvelle : dans une assiette un mot de Garouk que je garde. Au cours de la nuit il a assuré la surveillance du cratère en compagnie de Fanfan et de Shawn. Ce dernier a été particulièrement virulent, les explosions succédaient aux explosion. Tout cela a impressionné Garouk qui a décidé d’abandonner la descente dans le puits. Je pense que prendre une telle décision a du lui faire mal au cœur. J’ai oublié de mentionner qu’hier au cours de la nuit de dimanche à lundi, une bombe d’environ 50 g est tombée à 100 m du camp de base, alors que dans le cratère notre matériel était encadré par les bombes. Cela ressemblait à un tir d’artillerie mal réglé. A présent, notre travail consistera à récupérer le matériel. Le retour vers Mac Murdo s’effectuera entre le 27 et le 30 de ce mois. A 11h00, arrivée de l’hélico de Mac Murdo transportant Jean-Christophe et Warner. Le thermomètre au cours de la nuit passée a indiqué -37°C. Dans l’après-midi, en compagnie de Kurt, nous avons tous deux réparé le téléphérique et remonté le matériel du CEA. Le soir nous préparons le repas de Noël. Le menu : concombre vinaigrette, canard à l’orange, salade de fruits, glace, café, pousse café, vin chaud. Une chaude ambiance régnait dans la tente cuisine où malgré e peu de superficie 14 personnes réussissaient à s’y caser. Malgré les -31°C du dehors, et une forte bise, sous la tente la température était douce. Fin de soirée : 2h00 du matin.
Mercredi 25 décembre 1974 Camp de base Toute l’équipe se retrouvera ce soir sous la tente néozélandaise car eux ne fêtent Noël que le 25. a 14h00, le camp était bien calme, les gens préféraient rester au chaud dans leur duvet que d’affronter la bise et le brouillard. Température : -27°C. Jean-Christophe et Fanfan doivent mesurer la teneur en radon de la grotte, mais une mise en scène doit être faite pour le film. En ce moment, Daniel s’escrime avec le groupe américain qui refuse tout service. enfin, vers 18h00, tout est prêt pour la séance du film concernant le prélèvement radon dans la grotte avec comme opérateur Fanfan et Jean-Christophe. 19h45 : Retour au camp. 20h00 : chacun prend place dans la tente née-zélandaise pour le repas. Soirée bien calme; La soupe était bonne. 22h30 : Kurt et moi rejoignons notre tente avec l’espoir de finir de déséquiper le cratère le lendemain.
Jeudi 26 décembre 1974 Sommet du cratère Lever 7h30. Après un petit déjeuner sommaire, départ vers le sommet du cratère. La haut, nous décidons de nous servir de la barquette pour descendre notre matériel au camp. Cette descente de matériel est pour nous deux un véritable plaisir. Je parcours au moins 100 m sur le derrière avant de pouvoir freiner la charge et cela sans dommages. Un jus de fruit et hop, nous revoilà grimpant vers le sommet avec la barquette. En arrivant au sommet, le temps se couvre. En l’espace de deux minutes, nous nous retrouvons dans le brouillard de neige. Le blizzard nous pince le visage, bien vite, nous descendons nous réfugier au camp. A notre arrivée, une mauvaise nouvelle nous attend : Shawn, le néo-zélandais a décidé de retarder le départ de 8 jours, car il aimerait que la descente dans le puits du cratère soit à nouveau tentée. Garouk entre dans une colère froide car la décision d’abandonner toute tentative de descente avait été prise d’un commun accord. Pourquoi cette volte-face ? Sans doute une initiative de Warner. Un discussion âpre s’engage entre l’équipe française et l’équipe néo-zélandaise. Finalement ils décident que Fanfan et Jean-Christophe resteront aider les néo-zélandais dans leurs tentatives. Seulement Garouk interdit à Fanfan et Jean-Christophe de participer à cette tentative. L’ambiance n’est pas des plus gaie au camp, surtout que le blizzard souffle de plus en plus fort.
Samedi 28 décembre 1974 Camp de base Enfin le vent décroit. La température remonte : -24°C. La nuit passée, les rafales de vent ont été très fortes. Par moment, la vitesse du vent devait avoisiner les 90 km/h; Même enfoui dans le duvet, je sentais l’air frais courant le long du corps, la toile de la tente claquait. Pas moyen de dormir. Condamné à végéter sur ce cratère, sans travail, j’aimerais bien prendre le chemin du retour. seulement, une fois de plus, je devrai attendre. J’espère que l’équipe prendra cette fois l’avion du 7 janvier pour Christchurch. Vendredi 27 décembre 1974 Camp de base Le blizzard souffle toujours. Pas d’hélico pour descendre Garouk, Daniel, Kurt et moi à Scott Base, car j’ai omis de dire que nous devons prendre l’avion pour Christchurch le 28... Ce contre temps permettra peut-être à toute l’équipe de prendre le chemin du retour en semble. Seulement nous ne pouvons prendre l’avion que le 7 janvier prochain. Il fait très froid : -30°C ce matin. Dans le courant de la journée, la température repasse les -26°C. Le vent a soufflé toute la journée. Toute l’équipe s’est cantonnée dans la tente cuisine cherchant un peu de chaleur. Dans les tentes, le froid est très vif. Pas moyen de lire ni écrire, les doigts se gèlent très vite.
13h30 : Nous allons monter au sommet du cratère plus ou moins englouti dans les nuages histoire de se dégourdir les jambes. Dans une barquette, nous remontons des échantillons de lave. La sortie de la barquette au sommet pose des problèmes car le trépied chavire et cette maudite barquette reste en suspend dans la paroi. A l’aide de corde et avec beaucoup de peine, l’équipe réussit à la hisser sur la plate forme sommitale. Au retour, une soupe, purée, ris de mouton, fruits au sirop callent l’estomac des bons petits français bien fatigués. Repas pris, je file au lit, il est 22h30. Le vent souffle un peu mais il est supportable. Le sommet se couvre un peu. Pendant notre séjour, au fond du cratère plusieurs explosions eurent lieu. La dernière fut splendide. Jean-Christophe en était tout émerveillé. Son baptême sous les bombes volcaniques.
Dimanche 29 décembre 1974 Camp de base Levé 9h00. Pour une fois je ne suis pas le premier à la tente cuisine. Toute l’équipe 1 est là et ça discute ferme. Shawn accepte de démonter le camp et de mettre un terme à cette expédition au sommet de l’Erebus. Quelle bonne nouvelle ! de plus, à 15h00, un hélico doit venir prendre Tazieff Kurt et moi-même pour nous descendre à Scott Base. Entre temps, avec Kurt, nous montons au sommet remettre sur pied le trépied du treuil, car au fond du cratère, il reste environ deux charges à remonter. pour nous, notre travail prendra fin avec la remise en état du treuil. Dommage de quitter le camp plus tôt que les copains. 15h20 : L’hélico se fait entendre, peu de temps après, il est là. Notre barda est vite chargé et enfin on plonge vers la vallée après 22 jours passés à 4000 m. Après avoir débarqué et rangé notre matériel, enfin on déguste une bière qu’il n’est pas nécessaire de dégeler sur un réchaud. Quelle différence avec la température de là haut; le thermomètre affiche +5°C. Les doigts me brûlent, les pieds transpirent. J’ai l’impression d’être un peu sonné. 18h30 : La soupe sonne. Inutile de dire que le repas est bien apprécié. Fatigué, à 20h00, je me couche sans avoir besoin de me calfeutrer pour éviter le froid. A présent je ne pense qu’au retour. Le plus tôt possible je prendrai l’avion pour la France sans envie de tourisme.
Lundi 30 décembre 1974 Scott Base L’attente d’un avion pour Christchurch commence. Aux dernières nouvelles, il serait possible que nous puissions partir le 1er au soir ou le 2 au matin. Levé à 7h00, un bon petit déjeuner nous cale l’estomac. en compagnie de Kurt, je pars à la chasse photographique avec comme objectif les phoques. Après plusieurs kilomètres sur la banquise qui craque de partout, nous réussissons à les voir et les photographier. La présence humaine ne les gène pas. Pour les faire bouger, il faut leur botter le train arrière et encore lèvent-ils a peine la tête. L’après-midi, récupération du barnes à McMurdo. Nous en profitons pour visiter la cabane à Scott Base telle qu’elle a été laissée à la dernière expédition de 1917. A l’intérieur, il y a encore de la viande de phoque datant de 1902 et deux carcasses de mouton. Le soir, j’ai tenté quelques descentes à ski. Quelques chutes assez spectaculaires m’ont fait faire connaissance avec le sol.
Mardi 31 décembre 1974 Scott Base Lever à 10h30, pas de déjeuner, par contre une bonne douche nous a bien ragaillardi. Rester 22 jours sans se laver et connaitre à nouveau le délice de l’eau qui ruisselle sur le corps... quel plaisir ! Le temps est assez froid. Après le repas du midi, toute l’équipe est en alerte. Les rotations pour la descente du matériel de l’expédition doivent commencer à 15h00. 15h30 : le premier hélico dépose sa charge sur le drop zone de Scott Base. La dernière charge est récupérée à 19h00. Aussitôt l’emballage commence car tout doit être prêt pour le lendemain matin 9h30. Cela nous oblige à travailler jusqu’à 23h00. Une fois fini. toute l’équipe se réunit pour fêter la nouvelle année. Cela se passe dans le garage et dans une chaude ambiance.
Mercredi 1er janvier 1975 Scott Base Notre départ est prévu pour 16h00 et l’atterrissage à Christchurch à minuit. enfin le chemin du retour ! Dommage qu’il n’y ait qu’un avion par semaine pour Nouméa au départ d’Auckland. Le vol pour Christchurch s’est déroulé calmement. Le C130 était bien bruyant, mais il fallait bien s’y habituer. Nous avons atterri à minuit après 8h00 de vol.
Jeudi 2 janvier 1975 Christchurch Couché à 2h30, le réveil du matin a été plutôt pénible. La journée s’est passée à flemmarder car la fatigue se faisait sentir. De plus les doigts des pieds et des mains étaient très sensibles et parfois faisaient mal.
Vendredi 3 janvier 1975 A nouveau bousculade. Matinée aéroport à s’occuper des caisses, après-midi pour modifier les billets prévus au retour par Nouméa. Daniel et moi, pour abréger notre séjour repassons par Papeete, Los Angeles. Le vol pour Nouméa n’ayant lieu que le mercredi 8 janvier. Sortie du bureau à 17h00, nous avons 2h00 pour boucler nos valises, pas le temps de faire des achats. Hélas, une fois de plus, les cadeaux resteront chez le marchand. Décollage Christchurch : 19h20 -> Atterrissage Wellington : 20h00 Décollage Wellington : 20h35 -> Atterrissage Auckland : 21h30 Décollage Auckland : 24h00 -> Atterrissage Papeete 5h00 Décollage Papeete : 9h00 -> Atterrissage Los Angeles : 16h30 (+3h) Décollage Los Angeles : 21h00 Arrivée à Paris le samedi 4 janvier 1975 après 24h10 de voyage.
Extraits originaux
Parutions presse
Carte de l’Ile de Ross
Equipe française : Haroun Tazieff, Francois Le Guern, Jean-Christophe Sabroux, Jo Le Bronec, Kurt Stauffer, Daniel Cavillon Equipe néo-zélandaise : Shaun Norman, Werner Giggenbach, Philip Kyle, Dibble, Lambert
Erebus 1974, Joseph Le Bronec raconte l’expédition scientifique menée par Haroun Tazieff sur le volcan Erebus au Pôle Sud telle qu’il l’a vécue. On rit avec lui, on a froid, on est fatigué, on s’imagine des paysages incroyables, bref un beau témoignage d’une aventure aussi folle et extraordinaire que mon Papy-Jo.