l’architecture et la pâtisserie
r+1 r.d.c
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A
INTRODUCTION
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COMMUNIQUER L’ARCHITECTURE PAR LA GOURMANDISE
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a) La denrée alimentaire comme matériau de construction
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b) La pâtisserie : un moyen de sculpter l’architecture
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c) Habiter la pâtisserie
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L’ÉVEIL DES SENS
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a) Alimenter le fantasme par l’architecture
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b) La création d’un monde utopique par la pâtisserie
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c) Des espaces olfactifs et visuels
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CONCLUSION
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INTRODUCTION Pour commencer, l’architecture est un volume organisé et structuré à échelle humaine et donc pensé pour l’Homme. L’architecture peut se voir sous la forme d’une construction pure tel un refuge, sol, murs et toit, ou encore sous la forme d’architecture d’intérieur, un aménagement spatial de l’architecture pure. L’architecture est acteur de confort pour l’Homme, confort intérieur, confort acoustique, confort visuel, etc. La pâtisserie est un domaine composé de trois autres branches : le sucre, le chocolat et la glace. La pâtisserie est aussi pensée pour l’Homme mais plutôt comme objet de gourmandise et de plaisir gustatif. Ce plaisir gustatif consiste à mixer, mélanger, plusieurs éléments dans le but de créer un volume comestible et plaisant autant esthétiquement que gustativement. L’architecture et la pâtisserie sont deux domaines totalement contraires, l’un touche tout ce qui est construction pour l‘Homme, l’autre le domaine de la nourriture, cependant il semblerait qu’ils soit liés sur quelques points. Premièrement les deux domaines se raccordent sur la notion de structure. Une structure est définit par le dictionnaire Larousse comme étant une disposition, agencement des différents éléments d’un ensemble, l’agencement des parties (d’un ensemble), tel qu’il apparaît lorsqu’on l’étudie ou encore comme un système complexe formé de phénomènes solidaires, conçu en fonction des relations réciproques entre ses parties. En d’autres termes, une structure est un ensemble organisé impliquant plusieurs éléments et parties différents.es. L’architecture est composée de plusieurs éléments structuraux assemblés, tout comme la pâtisserie, résultant d’une structure soit habitable, soit mangeable. Antonin Carême, dit comme «le chef des rois et le roi des chefs» fut le premier à lier concrètement l’architecture et la pâtisserie au XVIème siècle. Le chef-pâtissier fut le premier à exposer des pâtisseries en s’inspirant de ses recherches architecturales résultant à des pièces montées plutôt pittoresques. Plus globalement les pâtisserie et les constructions architecturales sont des surfaces et textures superposées créant une composition bien pensée pour l’Homme. Tout deux assouvissent les besoins de l’Homme ou encore ses désirs et plaisirs, et tout deux mettent en place un processus créatif presque semblable (croquis, fabrication des matières ou matériaux, assemblage ou construction). Et si toute fois l’architecture s’habite et s’utilise et la pâtisserie se mange, depuis longtemps le rêve d’habiter une construction mangeable existe culturellement. De ce fait, la pâtisserie peutelle permettre une nouvelle vision commune de l’architecture ? Et comment la pâtisserie permet de créer des architectures de rêveries et attractives ? Nous y répondrons dans un premier temps à travers la communication de l’architecture par la pâtisserie, puis dans un second temps à travers l’éveil des sens.
Petite ruine dans une île, Le pâtissier national parisien, ou Traité élémentaire et pratique de la pâtisserie ancienne et moderne Tome 2 / par M. A. Carême
Esquisse préparatoir pour le «baba infiniment citron» Pierre Hermé, 2012
Esquisses de l’église de Ronchamp Le Corbusier, XXème
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I. COMMUNIQUER L’ARCHITECTURE PAR LA GOURMANDISE a) la denrée alimentaire comme matériau de construction Hargreaves & Levin reproduisent les musées et galeries les plus renommées en créations architecturales de pain d’épice, de sucre et de bonbons. Leurs créations sont des représentations d’architectures renommées et pâtissées à une échelle réduite, on a donc un résultat semblable à une maquette, un outils de communication pour les architectes. Les outils utilisés par les artistes et les architectes sont d’ailleurs les mêmes, à savoir, règles, équerres, cutteurs, etc. De ce fait, en utilisant des denrées alimentaires pour la réalisation d’une maquette, Hargreaves & levin repoussent les limites et les usages du matériel et des matériaux utilisés par l’architecte afin de réinventent et/ou élargir les techniques normalement utilisées à la construction de maquette en architecture. De ce fait, cela nous amènent à penser l’architecture de façon plus ludique et peut-être plus respectueuse de l’environnement en terme de matériaux utilisés puisque la colle se voit remplacée par du sucre, le carton et le papier par du pain d’épice. Au lieu de se séparer de la maquette lorsqu’on n’en fait plus usage, pourquoi ne pas la manger, la partager ou en faire le don. Nous pourrions aussi penser l’architecture pâtissière comme une construction sociale et sociable car elle peut être, montrée, admirée ou expliquée, donc utilisée comme outil de communication d’un projet de construction mais aussi, dévorée, appréciée, engloutie ou déguster par et avec un groupe. Cette comparaison laisse supposer que cette nouvelle forme de construction, rend l’architecture plus accessible à ceux qui n’en n’ont pas la connaissance. Alors, grâce à Hargreaves & Levin, et à la pâtisserie, on peut manger la Pyramide du Louvre, le Tate Modern, le Guggenheim et d’autres ! De ce fait la pâtisserie devient un acteur social, les personnes se réunissent autour de la pâtisserie en question et par la même occasion, découvrent ou redécouvrent l’architecture sous un autre oeil et une nouvelle forme. L’image de l’architecture est modernisée, redorée, grâce à la technique de la pâtisserie qui la remet en avant. Malgré le fait que l’architecture nous entoure, cela reste un domaine accessible à un certain public, tout le monde ne peut pas la comprendre. Alors, en la reproduisant en pâtisserie, donc par la nourriture qui est un élément commun à tous, l’architecture devient plus simple, accessible et facile pour tous. Toujours d’un point de vue communicatif, les prises de vue photographique en extérieur ainsi que le noir et blanc, font paraître les maquettes en sucre à une échelle réelle et se confondent presque à la vraie architecture. Les photos créées une illusion du réel, un rendu proche de la réalité.
Représentation musée Solomon R.Guggenheim Hargreaves & Levin, XXIe pain d’épice, sucre et bonbons
Musée Solomon R.Guggenheim, New-York Frank Lloyd Wright, 1959
Représentation Tate Modern Hargreaves & Levin, XXIe pain d’épice, sucre et bonbons
Tate Modern, Londres Herzog & de Meuron, 2000
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Ainsi, nous pourrions conclure que ces reproductions rendent un hommage certain aux architectures en question et à l’architecture en elle-même afin d’en souligner leur valeur.
B) LA PÂTISSERIE : UN MOYEN DE SCULPTER L’ARCHITECTURE Si la pâtisserie ajoute une valeur à l’architecture, il est ici question du contraire. L’artiste utilise l’architecture afin de donner une autre valeur à la pâtisserie. Dans cet exemple, l’architecture est simplifier, évoquée de façon figurative et naïve. En effet, les bâtiments et buildings sont dessinés d’une façon plus enfantine. L’architecture, notamment la capital, est alors retranscrite et restreinte à celle d’une vision commune et parlante pour tous. Par exemple des grattes-ciels, reflet de la métropole. Plus en détail, la couleur choisie pour représenter la ville de New York peut être questionnée. Pourrait-elle être la vision d’une ville polluée par la noirceur, un reflet d’une certaine autorité, austérité ou à une rigueur ou bien plus luxueuse et mystérieuse par sa sobriété car servit sur un plateau et soigneusement réalisée. En comparaison, Moscow paraît peut être plus primaire, accessible avec une couleur rouge très représentative du pays et qui de plus peut évoquer le pouvoir, la révolte ou bien la puissance, d’un état ou d’un sentiment. Dans ces exemples, la pâtisserie raconte, décrit et met en évidence une ville et ses formes iconiques, elle peut être utilisée comme une image de promotion, une publicité à la ville, ou encore un moyen de séduction. Mais si la pâtisserie devient objet sculptural, l’esthétique pourrait-il prendre une place importante, au détriment du goût ? Une pâtisserie esthétique s’apparenterait à la réalisation d’un objet, d’une image esthétique, précieux.se tel un bijoux d’une beauté à regarder. En architecture nous pouvons évoquer Le Palais idéal du facteur cheval, il imagine un palais extrêmement esthétique, mais inhabitable pour l’Homme, la fonction première de l’architecture qui est d’être habitée s’efface pour laisser place au visuel, c’est une architecture purement esthétique, sculpturale. À contrario des architectures sculpturales il y a le principe du fonctionnalisme selon lequel la forme des bâtiments découle exclusivement de leur usage, la fonction première d’un bâtiment est alors plus que respectée, au détriment de l’esthétique cependant. Cette idée de contraire se retrouve aussi dans la pâtisserie. En effet, on peut appeler une pâtisserie qui met en premier lieu le goût, une pâtisserie fonctionnelle, prenons l’exemple d’un mille-feuille réalisé de façon standard(1), le visuel montre sa construction puisque nous remarquons bien les couches, si le visuel ne sort pas de l’habituel on peut alors imaginer que le goût est l’élément mis en avant. Cependant, sur la photo du millefeuille retravaillé esthétiquement(2), le visuel impressionne et est donc l’élément premier, celui avant le goût. Pour approfondir, nous pourrions admettre que le terme
Moscow cake Patisserie Tortik Annuska, XXIe
New York cake Patisserie Tortik Annuska, XXIe
Le Palais idéal du Facteur Cheval, France Ferdinand Cheval, 1879-1912
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“architecture” deviendrait, dans les gâteaux de la Pâtisserie Tortik Annuska, une représentation architecturale imaginaire car une représentation grossière et simplifiée d’une vision commune de la ville. La pâtisserie deviendrait alors sculpture culinaire réalisée dans un but esthétique et non pour la gourmandise, ou comme dessert gourmand. Ces deux domaines, pâtisserie et architecture, se rejoignent sur le plan esthétique, mais aussi sur l’artistique. La pâtisserie devient une œuvre, un objet architectural et l’architecture devient une œuvre comestible. Finalement la pâtisserie sculpte l’architecture pour devenir un monument culinaire. De plus, leurs gâteaux présentent souvent des jeux, challenges de hauteur qui défient les lois de la gravité, tout comme les tours et monuments formant une métropole et évoqués sur ces gâteaux. L’utilisation de gâteau à étages permet d’ajouter cette grandiosité synonyme de ces villes. En conclusion, on retrouve un aspect transdisciplinaire dans lequel les limites du commun sont repoussées entre les domaines et savoir-faire, pouvant amener à une confusion. La pâtisserie se voit outil expérimental ouvrant les possibles et offrant une plus grande facilité d’expérimentation, notamment avec des matériaux plus malléables (pâte, crème, caramel, sucre fondu, etc) et par une plus petite échelle, plus facile à gérer. Ré-imaginer son environnement est alors plus simple avec la pâtisserie qu’avec l’architecture, de plus, réaliser des pièces, images gourmandes afin de manger ses plus folles idées crée un rapport plus personnel et intime avec son environnement.
(1) Mille-feuille type standard
(2) Mille-feuille retravaillé
C) HABITER LA PÂTISSERIE Ici, les mondes pâtissier de Carl Warner sont une représentation formelle de l’architecture, ils ne sont pas conçus par un mode de pensée constructif et conceptuel, mais plus par imagination. Est-ce un monde rêvé? Habiter l’architecture est un droit que l’on possède, c’est quelque chose que l’on fait tous en tant qu’Homme, par le simple fait de vivre dans sa maison, une ville, un environnement. Mais pourrait-on penser qu’habiter l’architecture, donc d’en faire sienne, ne pourrait-il pas aussi s’agir de la consommer au sens propre du terme? C’est ce que nous propose Warner : un monde mangeable. De ce fait, il permet à l’Homme de réapprendre/redécouvrir son environnement, les architectures qu’il côtoie tout les jours, et de les réinventer, réinterpréter de façons totalement irréelles. Un nouveau monde plus doux semble se crée et de façon à devenir un échappatoire à la réalité. L’Homme à besoin de se créer des échappatoires pour vivre et survivre. L’imaginaire fait avancer. Nous pouvons ajouter à cela que se nourrir est un rituel quotidien qui premièrement, permet de survivre, mais c’est aussi et surtout un rituel qui assouvie un besoin de satisfaction. L’Homme va rechercher en la nourriture et en l’acte de manger, des émotions, de nouvelles sensations, des souvenirs ou encore du réconfort. Au final, ce
Carl Warner dans son studio, devant une de ses réalisations
Candy Cottage Carl Warner Foodscape, XXIe
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sont des notions de goûts et de textures dont certaines lui procurerons un état de bien-être. Les adjectifs précédemment cités sont reconnaissables à travers les environnements crées par Carl Warner. Notamment grâce aux codes visuels et formels associés à la gourmandise qui sont des couleurs pastels ou sucrées construisant des mondes joyeux, enfantins et naïfs qui pourraient être tout droit sortit d’un dessin animé. Cependant, toute les bonnes choses ont une fin. Ces mondes sont éphémères car les denrées périssables, tout comme le désir de gourmandise qui une fois réalisé, s’en va. Ces plaisirs visuels et alléchants sont des mondes inspirés d’architectures réelles qui sont faciles à comprendre et pour lesquelles il est facile pour l’Homme de s’y identifier car fait d’élément bien connus pour lui, ce qui nous amène à penser que c’est une façon de rendre le domaine architectural accessible et surtout attirant ou gourmand. L’idée de vivre dans un monde comestible fait partie de l’imaginaire commun. La maison qui se mange est un souvenir commun, un rêve. Mais ce fantasme reste imaginaire et symbolique. En revanche, pouvoir manger une représentation architecturale est bel est bien présent et possible dans notre culture commune, lors de célébrations notamment avec les pièces montées ou encore les maisons en pain d’épice. Depuis des siècles, ce fantasme est alimenté et représenté couramment, il a notamment inspiré un grand nombre d’artistes, de contes, chef-d’œuvre littéraire ou encore cinématographique, et fut retranscrit sous plusieurs formes. Nous pouvons par exemple citer le conte d’Hansel et Gretel de Frère Grimm, 1812, ou encore Charlie et la Chocolaterie de Roald Dahl et adapté au cinéma par Tim Burton en 2005. Ces deux histoires mettent en scène des lieux fait entièrement de sucrerie et denrée alimentaire dans lequel des enfants viennent assouvir leur gourmandise, par conséquent la représentation comestible de l’architecture représente le vice. Car en effet, la pâtisserie va de paire avec la gourmandise, et la gourmandise est associée au pêché, notamment dans la Bible, plus récemment dans les sept péchés capitaux. L’architecture serait-elle appétissante? Pourquoi les formes architecturales sont-elles rapidement associées à la pâtisserie ? Pourquoi avons-nous envie de réaliser des monuments en denrée alimentaire? Sans doute par l’accessibilité, le commun à tous de la nourriture. Puisque l’architecture et le monde urbain qui nous entoure, sont généralement, plus grands ou monumentales pour l’Homme, pour sa taille et sa vision, alors nous pouvons supposer que l’acte de pâtisser un ou son environnement (réel ou pas) est pour lui le moyen d’en prendre le contrôle, la possession totale. En effet, l’instinct dominant de l’humain le pousse dans ce besoin d’adapter à sa taille ou même de réduire ce qu’il ne peut pas contrôler dans son entier, ce qui est plus imposant que lui. De ce fait, l’acte de pâtisser influencerait et alimenterait la gourmandise de l’Homme, mais avant tout son fantasme et son besoin de possession et de contrôle. Cependant, une notion liée à la
White Chocolate Castle Carl Warner Foodscape, XXIe
Crockerville Carl Warner Foodscape, XXIe
Hansel et Gretel Isabella Kung Illustration, 2012 Aquarelle sur papier
Atelier de chocolat, Charlie et la Chocolaterie Tim Burton, 2005
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pâtisserie n’est pas à négliger. Celle de l’amusement et du plaisir que cette activité procure.
II. L’EVEIL DES SENS a) alimenter le fantasme par l’architecture Ce mobilier en mousse de polyuréthane s’inspire de pâtisseries et l’espace se voit rempli et aménagé de gros choux, de chocolat et autres friandises. Le moelleux et le gourmand qui définissent une pâtisserie est reproduit par le matériaux et l’espace devient un moment de gourmandise et de plaisir visuel. Le designer associe le plaisir et le confort d’une posture, d’une assise à un confort gustatif. Gugliermetto à réalisé un fantasme personnel mais aussi commun : on s’assoit dans un choux, dans une crème, sur du chocolat. L’architecture est transformée en un monde joyeux et gourmand et notre intérieur devient un lieu de satisfaction et de fantasme friand. La gourmandise est définie par Wikipédia comme étant « un désir d’aliments jugés particulièrement agréables, que certains moralistes et certaines doctrines religieuse peuvent considérer comme un défaut ou une faute », en aménageant notre espace avec du mobilier représentant la gourmandise, on assume le désir et le fantasme qu’elle entraine car en effet, la tentation est à chaque coin de la pièce, nous acceptons alors que la pâtisserie prenne le dessus sur nous. L’échelle est importante car la pâtisserie est mise à la taille humaine, soit une multiplication des dimensions conventionnelles de la nourriture, et l’Homme n’engloutit plus la friandise, mais se voit engloutit par cette dernière lorsqu’il s’assoit dessus. La friandise prend le dessus sur l’Homme et prend presque possession de ce dernier, la taille de l’aliment à augmentée mais pas celle de l’Homme. En provoquant ce contraste inhabituel dans l’espace, les codes sont rompus et l’Homme désorienté. Cependant, ce sentiment se rééquilibre grâce à la sensation d’apaisement qui découle des gourmandises. Par cette rupture de code et d’échelle, l’espace aménagé par ce mobilier devient un espace utopique dans lequel l’amusement prime.
Diego Maria Gugliermetto et une de ses productions
Poof Gugliermetto Experience, 2012 Mousse polyuréthane
Poof Gugliermetto Experience, 2012 Mousse polyuréthane
B) LA CRÉATION D’UN MONDE UTOPIQUE PAR LA PÂTISSERIE Tanya Schultz avec Pip & Pop, traite d’ensemble d’îlots architecturaux sortit de l’imagination gourmande de l’artiste Australienne. Ces îlots de bonbons psychédéliques sont à la fois ludiques et méticuleusement conçus. Toute abondance reflète la gourmandise. Toutefois, nous ne pouvons pas oublier que des bonbons parlent d’idées de nostalgie rêveuse, de jeunesse festive et joyeuse. En ayant combiné des centaines de kilos de sucre coloré, de flore artificielle, de matériaux
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de bricolage et d’objets trouvés, l’artiste créer un tout autre monde, un imaginaire et lieu de rêverie qui nous fait retomber en enfance. Tant l’abondance est visible, le résultat pourrait paraître utopique. Une utopie cependant visible, odorante et dans un lieu présentant un caractère illusoire. Nous pouvons lier Pip & Pop avec Le Pays de Cocagne, un compte ou mythologie qui est dans l’imaginaire de certaines cultures européennes, une sorte de paradis terrestre, une contrée miraculeuse dont la nature déborde de générosité pour ses habitants et ses hôtes. Loin des famines et des guerres, Cocagne est une terre de fêtes et de bombances perpétuelles, où l’on prône le jeu et la paresse, et où le travail est proscrit. Le mythe et l’œuvre sont tous deux des terres d’abondance. Les deux sont entièrement faits de nourriture sont des lieux de satisfaction éternelle, où les habitants espèrent voir leurs désirs réalisés et où les couleurs, les odeurs et les textures font rêver. De plus, le fait que ces îlots soit installés dans un espace à échelle humaine et qui donne une sensation de second espace, on obtient alors un espace dans un deuxième puisque ces œuvres sont à elles seules des espaces de taille réduite. Ici, l’architecture est une source d’inspiration évidente pour l’artiste, mais nous pourrions admettre que le caractère régressif est l’enveloppe de son œuvre. Grâce aux éléments alimentaires utilisés, il est ici proposé une forte expérience olfactive donnant aux visiteurs une toute autre interprétation des ces îlots architecturaux. C’est un contraste aussi présent visuellement par des formes informelles, des amas de couleurs non définissables, semblables à des cratères, ou des bouilli de couleurs, une abondance de couleurs criardes mais aussi par une générosité d’odeurs douces, qui vont changer l’expérience du visiteur. En effet, au delà de la surprenante et curieuse réalisation, les odeurs sucrées font appels aux souvenirs d’enfances des plus nostalgiques mais aussi ouvrent l’appétit des usagers, jusqu’à, peut-être, leur en faire oublier ce qu’ils voient, remplacé par ce qu’ils sentent. C’est ce contraste qui séduit et ajoute une valeur sociale et humaine à la forme car elle rassemble sous de mêmes valeurs, celle du goût et de l’envie. A tel point qu’elle donne la possibilité d’une île, où beaucoup d’entre nous aimeraient s’y perdre afin d’assouvir la curiosité et la gourmandise humaine. Finalement l’architecture de cette œuvre est à vivre comme une expérience qui fait rêver et où l’on a envie d’y plonger. Mais est-ce que l’architecture doit toujours être habitée et pensée a long terme si la denrée alimentaire peut être un matériaux de séduction et proposer une expérience différente d’un bâtiment. Dans ce cas, l’architecture et la pâtisserie/le matériaux alimentaire vont de paire, et fonctionnent ensembles. Et si les caractéristiques de la pâtisserie inspiraient l’architecture afin d’en faire un élément visuel, olfactif ou encore goûteux ?
Treasure mountain Splendour in the Grass, Australie 2015
Journey in a dream (day) Shinsegae Gallery, Busan 2015
Supernatural tasks and magic objects Come Out Festival, Adelaide 2013
I love that you love what I love AEAF, Adelaide 2010
Illustration du mythe Le Pays de Cocagne
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C) DES ESPACES OLFACTIFS ET VISUELS La pâtisserie est un domaine dans lequel le visuel et l’odeur se doivent d’être au point afin d’attiser la gourmandise de l’Homme et de le séduire. En architecture, le visuel prime mais l’odeur n’est pas un acteur à la séduction. Alors quand est-il lorsque l’architecture devient un espace visuel et olfactif en même temps ? Dans cette boutique, la teinte omniprésente est le blanc, une teinte symbolique de pureté, de perfection, de lumière mais aussi de neutre. Ce neutre permet la mise en avant des pâtisseries exposées qui par leur couleur, se dénotent dans l’espace tout en s’harmonisant avec ce dernier. Le sol est recouvert de résine brillante permettant un effet miroir qui apporte une texture s’apparentant à une matière liquide (comme l’eau ou encore le chocolat fondu), un rappel évident à des ingrédients pâtissiers. Le mobilier présent est orné d’éléments représentatifs de chocolat qui fond, indiquant premièrement ce qui est vendu dans la boutique et en seconde qui sert d’écho au nom de celle-ci : « cioccolato » signifiant chocolat en italien. De plus, ces élément apporte une note de fantaisie au lieu et paraît agréable aux clients. Mais avant tout, ils rendent l’espace appétissant et par conséquent les pâtisseries qui s’y trouvent. Les tâches de chocolats qui dégoulinent du mobilier laisse aussi penser que la pâtisserie est faite sur place et maison, on gagne un peu plus la confiance du client et l’architecture y est actrice. L’architecture met alors en avant les pâtisseries proposées, elle les rend plus nobles et uniques, l’espace joue un rôle ultime à la vente des gourmandises et à la notoriété de la boutique. Grâce aux éléments indiqués précédemment, l’espace tout entier devient visuellement très fort et singulier à cette boutique, de la même façon qu’il met en action la vue et l’odorat du client. La boutique de macarons Theurel & Thomas Pâtisserie propose elle aussi une expérience sensorielle très forte. Comme pour la boutique Cioccolato le blanc est la couleur dominante voir ici omniprésente. Synthèse de toutes les couleurs mais aussi non couleur par excellence, le blanc rend soudain l’espace plus grand. Ce grand classique constitue la base idéale pour y adjoindre ensuite d’autres couleurs par touches, le macaron remplissant ce rôle à merveille. La couleur des macarons ressort alors dans leur milieu blanc, il est essentiel, vital même de mettre en valeur ce dessert qui avant de se croquer doit être croqué avec les yeux. Dans un intérieur d’une telle sérénité du à sa blancheur immaculée, la palette arc-en-ciel de ce gâteau à base de pâte d’amandes, de blanc d’œuf et de sucre devient l’objet de tous les regards, et éveil alors la vue. En entrant dans un espace totalement blanc, ce dernier se rapproche d’un univers nuageux, rêveur et imaginaire, entraînant l’usager à adapter un certain bien-être et peut-être un état d’esprit plus naïf, joyeux. La puissance colorée qui dégage des macarons active premièrement la vue, mais aussi l’appétit des clients et leur gourmandise. La
Cioccolato Pastry Boutique, Mexique Savvy studio, 2012
Cioccolato Pastry Boutique, Mexique Savvy studio, 2012
Theurel & Thomas Pâtisserie, Mexique Agency Anagrama, 2010
Theurel & Thomas Pâtisserie, Mexique Agency Anagrama, 2010
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pâtisserie se regarde, se sent, puis se mange. En entrant dans une boutique comme celles-ci, l’usager voit un lieu agrémenté de taches de chocolat fondu à taille humaine, se voit entouré de petits gâteaux, alors son appétit et sa gourmandise sont attisés. Par la suite, c’est au tour de l’odorat de prendre place. L’odeur alléchante (et connue de tous) que dégagent tout les petits gâteaux remplit l’espace entier jusqu’à enfermer le client dans une bulle de douceur. Puis pour finir, le client finira par manger les gourmandises présentes. En éveillant les sens, la boutique s’apprécie tout autant qu’un de ses produits. L’architecture est ici actrice de l’éveil des sens.
POUR CONCLURE... Si cette problématique reste assez nouvelle, car mise en place au XVIs par Antonin Carême mais pas énormément développée par la suite, elle est à partir du XXème siècle traitée de façons multiples et plus développé. L’architecture et la pâtisserie s’influencent l’un et l’autre puisqu’ils se crées, se construisent de façon similaire. En effet, de nombreuses représentations de l’architecture et de l’environnement qui entoure l’Homme quotidiennement sont faite en pâtisserie, et inversement. Mais outre ce fait, la représentation mangeable de l’architecture permet à cette dernière d’être plus accessible pour l’Homme car à une échelle plus petite, à une représentation plus simple mais aussi en rendant l’architecture comestible donnant à l’Homme le pouvoir de manger son environnement et de prendre le pouvoir sur ce dernier qui, à échelle une, paraît immense pour lui et difficilement contrôlable. Ensuite, la pâtisserie qui est un domaine de douceur, de gourmandise et presque de rêverie, en représentant ou évoquant notre architecture commune, par ses caractéristiques devient une échappatoire à l’Homme visà-vis de son environnement ou quotidien. Alors finalement, un domaine met en avant l’autre, en le sculptant, en l’abordant d’une manière différente que celle habituelle, tout en mettant l’Homme au centre de la réalisation.
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Mylène TARRADE ts2de 2018-2019 Dossier d’Arts Visuels