IMAGE LATENTE, 2011 "En ces heures où le paysage est une auréole de vie, et où rêver n'est que se rêver soi même, j'ai élevé, mon amour, dans le silence de mon intranquillité ce livre étrange où s'ouvrent, tout au bout d'une allée d'arbres, les portes d'une maison abandonnée. J'ai cueilli pour l'écrire l'âme de toutes les fleurs et, des instants éphémères de tous les chants de tous les oiseaux, j'ai tissé un réseau d'éternité et de stagnation. Telle la tisseuse, je me suis assis à la fenêtre de mavie et oubliant que j'habitais la et que j'existais, j'ai tissé des linceuls pour un tiède ensevelissement, dans de chastes toiles de lin destinées aux autels de mon silence.. Et je t'offre ce livre, car je le sais beau autant qu'inutile. Il n'enseigne rien, ne fait croire à rien, ne fait rien sentir. Simple ruisseau coulant vers un abîme cendreux que le vent disperse, et qui n'est ni fertile ni nuisible." Le Livre de l'intranquillité
Fernando Pessoa
CENTAURE “SURGISSEMENT”, 2011
NOIRS DÉSIRS, 2011 Livre d'artiste. Représentation du poême n° 5 par la Compagnie du Théâtre du Centaure.
BIODIVERSITY, 2010
L’utilisation de figurines animales permet à l’auteur de nous interroger sur l’état de tolérance de la diversité humaine (différences de couleur de peau, de cultures) dans le monde actuel ainsi que sur le positionnement de l’homme vis à vis de la nature. Les animaux mis en scène dans des contextes géopolitiques sont de races, de couleurs, de tailles et d’origines différentes. Ils semblent cependant former un ensemble, un groupe homogène face à la violence et à la perversité qui se déploient autour d’eux. Il y a deux aspects essentiels dans ce travail: - un message de tolérance, une volonté de rappeler la nécessité de prendre en compte l’ensemble des populations, quelles que soient leurs origines et leurs statuts. - un constat d’opposition entre la nature et les hommes, présenté comme le résultat d’un mépris total de l’homme vis à vis de son milieu naturel. La course à la présidence, la politique comme une partie de billes, la mort qui frappe les populations les plus faibles, la barbarie humaine pire que la sauvagerie animale, dans ce monde chaotique chacun peine à s’en sortir, et l’indifférence - quand ce n’est pas de l’arrogance - de la classe politique ne semble pas laisser penser que la tendance puisse changer. L’espèce humaine est montrée comme violente, destructrice, revendicatrice, dominatrice. Avec une nuance homme/femme: Les hommes posent, sont
statiques, les femmes revendiquent, sont dans l’action. Face à eux les animaux ne peuvent que subir ou fuir. Le parti-pris de l’utilisation d’animaux en plastique souligne à quel point la nature a disparu du monde des hommes. La photographe les réintroduit dans un monde hostile, violent, inadapté. Ils apparaissent le plus souvent au premier plan des clichés, comme une tentative de les sauver de leur condition, et l’accent est mis sur leurs expressions: Curiosité (tigre et bébé, guépard et panthère), fragilité (mouton), frayeur (singe et bébé) ou passivité (chèvre). Même lorsqu’ils montrent de la force, ils sont décalés (gorille aux femmes). Aucun regard humain sur les animaux dans ces photos (le regard passe au dessus ou se porte ailleurs). L’autre parti-pris est celui du paysage violent (bombe, manifestation, mort…) ou très fortement symbolique (drapeau, président, pape, soldat): Un monde où le symbole est prévalent sur les actes qui, de fait, s’expriment dans la violence. Il s’agit d’un monde scindé, en marche vers la destruction, où l’espèce humaine bafoue la nature mais aussi ses propres spécificités. La réflexion et l’action politiques sont remises en cause avec vigueur. C’est une tentative de la part de l’auteur de montrer l’urgence qu’il y a à prendre l’ensemble du monde vivant en compte et de cesser de le nier en l’annihilant. Corinne Levrier
AQUABON, 2010
La démarche consistait à photographier des clichés choisis plongés dans des contenants en verre transparents remplis d’eau: tentative de «mise en conserve» de personnages ou de moments chers à l’auteur? Dans ce travail, beaucoup de rondeur, de reflets, de noirceur, de regards et omniprésence de l’élément liquide. L’orange et le bleu comme ponctuation. C’est une plongée dans un univers intime qui est donné à voir par des jeux de reflets et de transparences. Les réceptacles et leurs courbes offrent une sorte de protection aux sujets, en même temps qu’ils les exposent. Le parti-pris du contenant rond et de l’eau apportent deux caractéristiques essentielles: - une grande intimité; les personnages sont en quelque sorte lovés sur eux-mêmes, pris dans leur propre atmosphère. Ils ne semblent pas pouvoir échapper à ce qu’ils sont. - La notion du temps qui passe (le cercle, la rotation de la terre, l’eau et l’écoulement) et qui laisse sa trace sur l’homme. Les personnages semblent pris dans un tourbillon à l’issue inéluctable. L’on peut se demander par exemple si cette femme aux mains jointes, au regard lourd de tristesse et qui semble remuée par la présence d’une forme ovoïde blanche au premier plan, n’est pas tout entière prise dans un rapport ambigu à la maternité.
Les jeux de reflets, l’accent porté sur les regards participent au caractère dramatique du travail; Les personnages sont pris à leur propre piège, la tragédie humaine l’emporte sur la vie quotidienne. Il s’agit bien à l’origine de moments fugaces, quasi anodins, mais ils semblent ici résumer l’essence des individus. L’on peut voir dans ce travail une référence au cinéma muet, ou aux débuts du cinéma parlant des années 30. Corinne Levrier
REFLEJO DE SI, 2002 “ Et l'aventure, la grande aventure, c'est de voir surgir quelque chose d'inconnue, chaque jour, dans le même visage, c'est plus grand que tous les voyages autour du monde”. A. Giacometti
PORT-FOLIO, 1998 “L'objet de ce projet était de profiter de l'univers singulier, contrasté, riche en formes diverses et variées d'un port industriel, en l'occurence celui de Marseille, pour m'adonner à un jeu formel de mise en perspectives, de déformations geométriques, de variation d'échelle. Il me permet d'apporter, grâce notamment à l'utilisation de plusieurs images en trompe l'oeil, une vision personnalisée du port et de ses activités, une approche détournée ou controlée de la réalité. Ce travail a été présenté à Arles pendant le festival annuel de la photo dans le cadre des projections nocturnes du Festival OFF. ”
GITANS-DOUCHY LES MINES, 1998 “Avant cette rencontre avec la communauté de Douchy, je n'avais, comme beaucoup de monde je crois, qu'une image réductrice et basée sur des clichés des gens du voyage. Au fil de mes déambulations dans Douchy et ses alentours, j'eus l'occasion d'approcher ces gens, de discuter avec eux, et passé la première rencontre, et les premiers échanges, je fus intéressée par l'idée de les photographier, de me constituer mes propes “clichés”, mes propes références. J'entrais alors plus à l'intérieur du campement, où une relation de confiance s'établissait peu à peu. Les familles m'ouvraient l a porte de leur caravane, et acceptent que je les prenne en photo. Cependant, ce travail photographique reste inachevé. En effet, même si ma connaissance de ces gens s'était développée, les photos que je prenais reproduisaient d'une certaine manière des images que l'on a déjà l'habitude de voir. Le temps limité, leur réserve ou l'idée qu'ils se faisaient de la photographie, ont souvent conduit à prendre des photos posées. Depuis, je poursuis ce travail au fil des rencontres et des opportunités, tentant d'aller plus loin que ce premier contact. Dans le sud de la France, les gitans que j'ai rencontrés sont différents, confirmant qu'il ne peut y avoir une vision globale de ce peuple constitué de gens de diverses origines, et parlant des langues différentes. Autant ceux que j'avais rencontrés au Nord de la France, et qui venaient de l'Est s'étaient montrés ouverts et accueillants, autant ceux que j'ai approchés au Sud ont eu à mon égard une attitude plus méfiante, du fait de notre langue commune et d'une certaine ressemblance physique.”
BOSTON, 1996 Dans le cadre de l'exposition: LA RUE EST À NOUS... TOUS! (2007)
TRENTE PHOTOGRAPHES “Trente photographes proposent 30 contes visuels qui s’articulent autour de la rue, des chemins qui se croisent, des instants oniriques qui se déploient à travers ces différentes visions. Le monde entier se déroule sous nous yeux, l’Italie et ses lieux de passage, Berlin et son histoire, Paris et son architecture, Marseille et ses quartiers emprunt d’une histoire sociale forte, L’Afrique et ses lumières diaphanes, Cuba et ses couleurs tendres, Le Vietnam dans la nuit de ses villes. Mais aussi, la rue comme lieu insolite où le corps se déplace, disparaît, se fond dans l’espace, surgit dans la foule, s’accouple avec la ville, s’improvise, s’équilibre, s’exprime. Et encore, la rue comme lieu de trouvaille, d’abandon, d’écriture, de pièces à conviction, de signe. Et enfin la rue comme espace scénique où se joue la grande pièce de la vie. La rue, c’est tout ces bouts rêves qui s’ajoutent, se compilent pour nous donner en image, un visage inédit.” Photosapiens.com
AU PAYS DES MERVEILLEUSES CERTITUDES, 1996
Eso es cierto. Les certitudes, plus qu'ailleurs, sont tenaces en Colombie. Elles viennent de l'idée, basée sur l'expérience quotidienne, que la violence et la mort peuvent frappper n'importe qui, n'importe où. Tout ne tient qu'à un fil, et tout peut basculer d'un côté ou de l'autre en fonction des rencontres et des hasards de la vie. Bien sûr les pauvres sont plus exposés au malheur que les autres. Cependant les gens s'y sont résignés, s'y sont habitués, et la religion les aide à surmonter leurs douleurs en proposant une mise en scène théâtralisée de la mort des proches. Un monde imaginaire, où des éléments merveilleux cotoient la dure réalité, permet d'en atténuer les effets pour garder l'espoir et croire au miracle. Les animaux sont souvent de la partie, et il n'est pas rare de croiser un coq, une poule, un lapin, des chiens amenés par leurs maîtres pour recevoir la bénédiction et se retrouver protégés...