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découvrir Se mettre au vert pour rafraichir nos villes
Les épisodes de fortes chaleurs vont se multiplier à l’avenir. Rafraichir les villes pour éviter les phénomènes de surchauffe dans les centres urbains devient essentiel. Les pistes de solution sont connues. Reste à les appliquer sur le terrain.
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Texte : Xavier Attout – Photo : D.R.
Les fortes chaleurs qui sont apparues
cet été ont rappelé l’impact de la bétonisation des villes sur la qualité de vie des habitants. Ceux du Brabant wallon n’y ont bien évidemment pas été épargnés, même si ce phénomène est moins marqué du fait de la taille plus réduite des grandes villes brabançonnes. « La bétonisation augmente la température en ville, a expliqué Sébastien Hendrickx, chargé de recherche au Lepur à l’ULiège, lors d’un Midi de l’urbanisme consacré à cette thématique et organisé mi-septembre à Louvain-la-Neuve. Et ceux qui vivent en appartement ressentent d’une manière encore plus forte le phénomène des ilots de chaleur. On définit ces derniers par la différence de température observée entre les milieux urbains et les zones rurales environnantes. L’îlot de chaleur urbain est plus élevé la nuit vu que l’inertie thermique est plus élevée en ville. Et il est aussi plus élevé en été vu que le rayonnement solaire est plus important. » Le différentiel de température est en moyenne de 2,5 degrés entre la ville et la périphérie. Mais il peut aisément grimper à plus de 10 degrés. Même chose entre l’intérieur et l’extérieur d’un parc, où le différentiel de chaleur peut être aisément de 5 degrés. « Si le phénomène des inondations frappe les esprits, il faut bien se rendre que ces épisodes seront bien moins répétitifs que les vagues de chaleur que nous allons connaitre dans le futur, lance Guillaume van der Vaeren, administrateur délégué de JNC International, un bureau d’études spécialisé dans l’étude du paysage, de l’environnement, de l’urbanisme et de l’aménagement de l’espace. Il faut donc s’y préparer. »
Le manque de sources de fraîcheur
En fait, s’il fait plus chaud en ville, c’est surtout car la chaleur accumulée le jour est restituée la nuit. « Il y a aujourd’hui en ville une multiplication des surfaces, qu’elles soient verticales ou horizontales, qui collectent l’énergie du rayonnement solaire et la restituent sous forme de chaleur », lance Sébastien Hendrickx. L’impact des rayons du soleil dépend bien évidemment du type de surface sur lesquelles ils vont réfléchir. Il peut par exemple y avoir une différence de 30 degrés entre un caoutchouc EPDM aux teintes claires plutôt qu’un revêtement noir. Même chose pour les graviers ou si le bitume est lisse plutôt qu’en granulé. « Le vrai problème, c’est qu’il y a moins de sources de fraîcheur en ville, regrette Sébastien Hendrickx. Or, elles sont essentielles. L'eau et la végétation constituent des moyens de rafraîchissement. Par évaporation et évapotranspiration, elles rafraîchissent l'air dans la journée. Cependant, l'eau ruisselle tellement rapidement vers les égouts à cause de l'imperméabilité du sol qu'elle n'a pratiquement pas le temps de s'évaporer. Or, l'évaporation entraîne un rafraîchissement de l'air car le passage de l'état liquide à l'état gazeux consomme des calories. »
Des solutions pour l’espace public
Les solutions pour éviter la surchauffe dans l’espace public sont multiples. De plus en plus de communes établissent un Plan Climat ou un Plan d'action énergie durable et climat pour lutter contre ce phénomène d’ilots de chaleur. Wavre, Jodoigne, Rixensart, Genappe, Lasne, Grez-Doiceau, Perwez, Braine-l’Alleud, Waterloo ou encore Ittre ont notamment embrayé dans cette direction. Une des idées principales est de créer des ilots de fraîcheur. Cela passe par la création de parcs, la plantation d’arbres ou encore l’aménagement de plans d’eau. « Il faut avant tout déminéraliser la ville et la végétaliser, précise Sébastien Hendrickx. Les cours de récréation dans les écoles sont un bon exemple. Améliorer la mobilité et l’efficacité énergétique des bâtiments, en réduisant les besoins de climatisation l’été, sont d’autres points d’attention. »
De son côté, Guillaume van der Vaeren évoque également des stratégies d’aménagement du territoire : « Souvent, dans les réflexions urbanistiques, on oublie l’importance du cheminement de l’eau. Or, c’est un facteur majeur pour rafraichir les villes. Il faut
© Lepur
Souvent, dans les réflexions urbanistiques, on oublie l’importance du cheminement de l’eau. Or, c’est un facteur majeur pour rafraichir les villes. Il faut renforcer la présence de l’eau dans les espaces publics.
Guillaume Van der Vaeren, JNC International renforcer la présence de l’eau dans les espaces publics. Cela peut se faire en combinant la présence de l’eau et de la végétation urbaine pour rafraichir la ville par effet d’évapotranspiration. Il faut sortir l’eau des canalisations. C’est essentiel. Il faut aussi renforcer la présence de la végétation en ville ou en périphérie. Cela passe notamment par la réintégration des habitats naturels en milieu urbain. »
JNC International relève également que le réaménagement urbain est essentiel pour l’avenir des villes, d’autant plus que la concentration de l’habitat ne va faire que s’accentuer. « Les ilots de chaleur sont un vrai problème de territoire puisqu’ils favorisent l’étalement urbain, lance Guillaume van der Vaeren, qui travaille actuellement sur la vision urbanistique de Wavre. Des habitants préfèrent aller habiter en périphérie puisqu’ils suffoquent en ville. Gérer les eaux et la chaleur doit devenir incontournable lors de la conception de projets. Les arbres, et plus généralement la végétation, peuvent en ce sens jouer un rôle essentiel. »
UN PLAN D’ACTION À TUBIZE
Tubize vient de dévoiler son plan d’action en faveur de l’énergie durable et du climat. Parmi les 84 propositions, une série vise à aménager le territoire de manière à atténuer les dérèglements climatiques. « Nous recevons peu de plaintes d’habitants par rapport aux ilots de chaleur, explique Sabine Desmedt, échevine de l’Aménagement du territoire et de l’Environnement de Tubize. C’est peut être lié au fait que nous disposons d’un grand parc à proximité du centre de la commune. Dans les demandes de permis que nous recevons, nous exigeons dorénavant que des arbres soient replantés si d’autres doivent être abattus. On relève aussi une prise de conscience des promoteurs sur ces questions. Nous demandons des aménagements et des arbres qui n’exigent pas trop de temps d’entretien pour nos services. Les promoteurs sont compréhensifs. »