Multiprise #28

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Courants artistiques en Midi-Pyrénées

28 - Mars 2014 - Gratuit



Toutes premières fois

28 Directeur de publication Thomas Deudé & William Gourdin Rédacteurs en chef Didier Marinesque & Fabien Ruzafa Rédacteurs intervenants FCR, Gabriel Delon, Jeremy Calixte, Amandine Doche, Julie Biesuz, Manuel Pomar, Mathilde Formosa et Sara Lamothe Graphiste Thomas Deudé www.donoteat.fr Communication Mélissa Kieny contact@revue-multiprise.com www.facebook.com/RevueMultiprise Remerciements Thierry Talard, Jean Marc Lacabe, Paul de Sorbier, Bérengère Brecqueville, Capucine Moreau, le collectif IPN, Cyril et Fabien, Boris et Bertrand, Guillaume Laisné, Gilles Ecomard

La revue Multiprise est soutenue par

« De la détresse de la création dite artistique (avec dead line) », tel est l’intitulé plein d’humour du journal graphique de notre invitée Amélie Marchandot, qui clôt ainsi brillamment sa participation à Multiprise. Et qu’en est-il des étudiants des Beaux-arts ? Le dossier « Eaux précieuses » traduit peut-être les doutes de tous ces Lars en puissance, ces questionnements qui avant tout façonnent des désirs, un parcours, des idéaux forcément contrariés, et sa place dans le monde. Vous trouverez aussi dans ce numéro 28 des petits mandarins, oiseaux colorés qui se sont posés au Parvis de Tarbes le temps d’une exposition, leurs pépiements se mêlant aux sons de guitares rock’n’roll, avec comme chef d’orchestre un Céleste plasticien, qui fait déjà valser des pianos au musée des Abattoirs. Ces rencontres sonores, incongrues et aériennes, peuvent avoir la force de nous faire évader des contingences triviales de notre société où l’on avance désormais casqués, pour éviter le tir à vue. Nous préférons les snipers de l’art, comme Emmanuel Moralès qui instille dans ses œuvres un air de « déjà vu » empreint d’ironie : un talent indéniable, revisitant des bouilles familières faisant souvent office de décoration murale dans de nombreux foyers d’amateurs éclairés (ou pas) d’art. En parlant de culture pop, Mademoiselle Kat rend brillamment les armes à qui de droit : réinterprétant une culture populaire de B movies et autres pin-up bien roulées au charme aguicheur de Pulp magazines par son travail plastique, ces fausses affiches de films s’exposent dans la rue, clamant haut et fort cet héritage illustratif puissant, et souvent dénigré par les Mandarins de l’art, qui eux ne virevoltent pas sur des guitares au gré de leurs envies : ils classent, hiérarchisent, provoquent des habitus de classes, comme pourrait énoncer Pierre Bourdieu. Une liberté revendiquée qui, nous l’espérons, se retrouve dans ce numéro. Bonnes lectures,

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La rédaction www.iecevents.eu

radio-fmr.net

I.S.S.N. : 1778-9451 Toute reproduction du titre, des textes et des photos sans autorisation écrite est interdite. Les documents présents dans la revue ont été reproduits avec l’accord préalable du photographe ou de l’envoyeur. Photos non contractuelles. 3



En couverture : Emmanuel Moralès Sans titre, 2012, acrylique sur toile, 116 x 89 cm

Dossier Eaux précieuses

21 Court-jus Emmanuel Moralès

7 « Va ranger ta chambre ! » Exposition Town-Ho ! à IPN et Lieu-commun

av

Boris Geoffroy, The wild one, 2014 © Photo : Olivier Schaffart

12 Lars apprend-il ? Portrait Inculte de Connaissance de Lars / Traité Occulte d’Apprentissage de L’Art

14 Entretiens 18 Les nouvelles voies de l’édition toulousaine Collectif Les Machines Collectif des Métiers de l’édition

Sans titre, 2009, acrylique sur toile, 116 x 89 cm

25 Petite revue choisie des expositions en cours

28 Bis Repetita 32 Le Parvis, Ibos 36 Amélie Marchandot 38 Branchement en série Charley Case

40 Flash


zoom sur la jeune création toulousaine

Cyril Clément, From a side to the other, 2014, récupération de bois divers, Vénus en béton, sangle


« Va ranger ta chambre ! »

Retour sur l’Exposition des diplômés de l’Institut Supérieur des Arts de Toulouse qui a eu lieu du 13 février au 15 mars 2014 à IPN et lieu-commun. Artistes : Junie Briffaz, Julie-Marie Cazard, Cyril Clément, Thomas Correa, Sergey Epifanov, Laura Freeth, Boris Geoffroy, Coralie Gourguechon, Léa Hodencq, Emmanuel Jaudard, Cécile Kiefer, Hugo Lemaire, Liis Lillo, Amy Maga, Mélanie Muratet-Campos, Eloisa Paz, Romain Ruiz, Loïc Vanelle, Marie Zawieja

Nous ne l’avons pas vu grandir... Et aujourd’hui, il nous pose l’argumentation de ses velléités d’indépendance. Oh Dieu, j’ai beau m’y être préparée, qu’il est dur pour une mère de voir son enfant s’envoler ! Je me rappelle avec émotion de son arrivée à la maison. Nous l’avons laissé, son père et moi, déambuler d’un pas maladroit dans les nombreuses pièces de notre cocon désormais familial. L’amour et l’attention que nous lui avons tous deux portés, appuyés par ses facultés d’adaptation ont très vite révélé ses compétences dans de nombreuses disciplines. Il passait, je m’en souviens, des heures dans sa chambre, assis à son petit bureau en bois que son père lui avait confectionné. Nous lui fournissions de vieilles feuilles A4 à entête données par quelques amis entrepreneurs. Et, afin d’assouvir son appétit pour le dessin, nous avons rajouté une ligne « feutre à l’eau » sur la comptabilité familiale. J’ai bien entendu gardé amoureusement les résultats colorés de ses songes manuels, classés par ordre chronologique dans de nombreux cartons. Voici comment le grenier se retrouve rempli de centaines de châteaux forts à deux ou quatre tours au

sommet desquelles princes et princesses donnent des concerts de guitare électrique pour quelques dinosaures chaussés de patins à roulettes dansant dans les douves. Entre autres... Étant moi même amatrice de peinture à l’aquarelle, je voyais d’un bon œil cet engouement pour le dessin. Grandissant, nous l’avons accompagné dans son parcours scolaire. Son père est avocat d’affaire, ce qui a facilité l’accès aux meilleures écoles... Je suis quant à moi professeur en chirurgie orthopédique dans une grande clinique. Nos activités respectives sont bien entendu extrêmement chronophages mais nous avons mis un point d’honneur à consacrer un maximum de temps à l’éducation de notre précieux enfant. C’est pourquoi nous avons toujours engagé les meilleurs précepteurs pour son soutien scolaire... Et ne manquions aucune réunion parents-professeurs... Nous placions de grands espoirs en lui et il nous le rendait bien. Ses notes étaient excellentes et il éprouvait toujours énormément de plaisir à la pratique artistique. 7


Liis Lillo, Mur des plis, 2014, installation avec des vĂŞtements


Il en était maintenant à l’acrylique et s’essayait même à la terre glaise. Nous l’encouragions dans la poursuite de ce sain divertissement mais ne cessions de lui rappeler l’importance supérieure des sciences et des lettres. Il était évident que ses capacités intellectuelles le mèneraient à une grande carrière. J’espérais secrètement qu’il se prépare à prêter le serment d’Hippocrate pendant que son père n’avait de cesse de lui rappeler par divers moyens que nul n’est censé ignorer la loi... Tout était au mieux dans le meilleur des mondes. Nous avions tous les deux une carrière exemplaire et un enfant qui l’était tout autant. C’est du moins ce que nous croyions... Un jeudi soir, je m’en rappelle parfaitement, nous recevions deux couples d’amis pour le dîner. Après avoir informé les hommes qui prenaient l’apéritif dans le bureau de mon mari que le repas était prêt à être servi, je priai l’assemblée de bien vouloir prendre place autour de la table. Les plats se succédaient dans la bonne humeur, chacun ne tarissant point d’éloge sur mes talents culinaires. Éloges que je m’empressais de transmettre à notre vieille cuisinière qui s’affairait aux fourneaux. Nous nous apprêtions à servir le fromage quand la discussion s’orienta sur l’avenir de notre enfant qui était en pleine révision. En effet, la semaine suivante allait voir le coup d’envoi des épreuves du baccalauréat. Chacun y allait bon train sur les sujets potentiels de l’examen de philosophie. Bien entendu, personne ici ne doutait de l’obtention avec mention de ce qui n’était pour notre progéniture que simple formalité. Conscient d’être entouré d’adultes extrêmement cultivés, il écoutait ces échanges concernant son avenir sans piper mot et avec un sourire de circonstance. Cependant, au moment où son père mélangeait dans sa bouche une part de cantal jeune arrosée d’un excellent cépage, il demanda poliment à prendre la parole : « Permettez-moi, cher papa, chère maman, et vous aussi, chers amis de mes chers parents, de profiter de ce joyeux moment pour vous faire une annonce ». Son père mastiquait en souriant fièrement. Il poursuivit ainsi : « Je vous remercie de la confiance que vous tous me portez et je dois avouer, en toute modestie, que je ne doute point de ma réussite à l’examen. Mais voici ce que j’ai décidé pour la suite de mon parcours d’apprentissage. Je l’ai jusque là gardé secret et je trouve à propos de vous l’annoncer ici... J’ai été reçu au concours d’admission à l’école supérieure des Beaux-Arts de Toulouse ! » PFFFRRT BOUWAH !!!! Voici comment je retranscrirais le son que produisit le mélange myco-lacto-vignifié en sortant brusquement de la bouche de mon mari. Ses yeux sortaient légèrement de leur orbite lui donnant un regard un peu fou. Nos amis étaient choqués, La scène ressemblait à un match de tennis. Mais ici, par une habile manipulation sur un logiciel de post-production, les spectateurs

suivent de la nuque et du regard une balle rendue invisible que se renvoient violemment deux joueurs parfaitement immobiles. C’est un jeu au tie-break ou tout est figé jusqu’à l’instant ou le perdant en vienne à laisser éclater sa raquette. « Mais putain je savais bien que c’était une sacrée foutue idée à la con ! Avec tout le pognon qu’il nous a coûté ce merdeux qu’on sait même pô d’où qu’c’est qui vient ! Et toi vieille peau ! Comment j’ai pu me laisser convaincre d’adopter c’con là ! Regarde ce qu’il nous rend c’t’enfoiré !... » Notre enfant se leva sans rien dire, et doucement se retira dans sa chambre, et empruntant un chemin plus long, nos invités s’activaient pour regagner les leurs. J’ai parlé à mon mari. Voici bientôt 6 mois qu’il a obtenu son DNSEP. Bien entendu, son père et moi sommes très fiers. Pour fêter ça il nous a demandé s’il pouvait inviter ses petits camarades à venir passer un weekend à la maison pour organiser ce qu’il nous a décrit comme une sorte de boom. La résidence, malgré un léger manque d’espace extérieur était somme toute très spacieuse. C’est donc tout naturellement que nous accédions à sa requête. Je passai tout le samedi après-midi à préparer des crêpes pendant qu’ils étaient tous à jouer bruyamment dans la grande salle de jeu. En début de soirée, je me rendis sur place pour faire baisser un peu le volume sonore avant que mon mari ne rentre du golf. En ouvrant la porte, horreur. Je dus enjamber la voûte céleste où ne subsistait que la trace étrangement géométrique des trajectoires stellaires pour finalement me faire gracieusement bousculer par un danseur fantomatique. J’étais déjà dans un léger déséquilibre lorsqu’une énorme bourrasque chargée d’écume renversa le plateau de citronnade que j’avais préparé pour les jeunes. « Cachalot » s’écria la vigie en me voyant surnager dans les eaux troubles de citron. Il était alors trop tard. Le chalutier se dirigeait droit sur moi. à droite, la falaise. N’ayant que des nageoires, cette perspective de fuite m’était intrinsèquement interdite. Je m’orientai alors vers la gauche sans même me demander ce que je risquais d’y trouver... Après les chutes, deux portes. Une improbable patte d’oie. J’avais le choix. Mais quel côté emprunter ? « Le sauvage ! » criaient-ils. Je m’affairais. Lorsque je les ouvris, elles bloquèrent toute tentative d’avancée. Ce n’est qu’en les fermant qu’il fût possible d’entrer. Dans une arène grillagée, deux lutteurs en roue-libre se couraient l’un après l’autre. Leur course amplifiée s’inscrivait dans un cercle presque parfait. On aurait pu croire une orange mécanique sur fond de casserole harmonique. Mais j’explosai vraiment quand je m’aperçus qu’ils avaient pratiqué un trou dans le faux plafond. Aidés d’un 9


En haut : Vues d’exposition à IPN. En bas : Vues d’exposition à Lieu-commun

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escalier de facture précaire, ils avaient ouvert un passage vers le comble de l’exploration. Je m’accrochai à mon fauteuil rouge, prise dans le vertige du défilement des diapositives qui telles des flashs de lucidité, me menaient à douter de la véracité de ce qui s’offrait à mes yeux. Je ressentais de fortes envies de hauteur ! Telle Queen Kong, j’entrepris l’ascension d’un gratte-ciel particulièrement bien bâti. Une fois le sommet atteint, je criai fa dièse. Allo ? Allo pizza ? Je voudrais une bœuf carotte pour le soixante-douzième sans ascenceur s’il vous plaît. Comment ça vous ne livrez pas ? Mais ma cuisine a été entièrement vidée ! Je vis le cauchemar de toutes les ménagères ! Pas un légume, pas un couteau. Pas un avion ni la moindre boulette de viande. Disparus les fours et lave-vaisselle. Restent sûrement quelques ustenciles, mais dans quelle étagère ? Elles sont toutes dessertes inutiles ! Je n’en peux plus. Je prends le risque du grand sot sans parachute. Où est il ? Où qu’il est ce petit con ! Viens ici ! Il se dirigeait vers moi comme tombé de la dernière des mezzanines. Je voulus le gifler mais il m’arrêta pour me déclarer dans une rigoureuse décontraction : « Maman, j’annonce comme proche le moment où, par un processus de caractère paranoïaque et actif de la pensée, il sera possible de systématiser la confusion et de contribuer au discrédit total du monde de la réalité. C’est alors que la valeur inestimable de l’actuelle configuration accidentée du terrain apparaîtra dans toute sa netteté et que son opportunité sera plus complètement reconnue. Il semble donc souhaitable de contrarier le moins possible ses lignes doucement ondulées, son paysage rocailleux et pittoresque, tout en s’efforçant par ailleurs, et par tous les moyens appropriés, de multiplier et de mettre en valeur ces possibilités particulièrement originales et typiques d’effets de paysage. ». « Kequoi ? Non mais tu vas me parler

différemment jeune insolent ! ». « Attention maman. Ne soufflez pas tous les vents de l’apocalypse !... Au sujet de ce tempétueux vent d’Est j’ai constaté qu’il était à la fois bon et mauvais, soit qu’on l’observe à travers une fenêtre fermée ou par une fenêtre ouverte. Tu vois c’que je veux dire ? » C’est bien vrai, pensaisje, me souvenant de ça. Oui, mes yeux sont les fenêtres et mon corps est la maison. Dommage qu’on n’en ait pas bouché les fentes et les crevasses et qu’on n’y ait pas fourré de la filasse par-ci par-là. Trop tard à présent pour rien modifier ! L’univers est achevé, le couronnement placé, les débris balayés depuis des millions d’années. Des fils arachnéens et dorés tremblent dans l’air, s’entrelaçant en motifs d’une flamboyante transparence, qui volètent et s’évanouissent, séduits par le reflet de leur propre beauté dans les flots. Contre la paroi de la cabine, vissée à un axe, une lampe oscille. A cause du poids des derniers ballots embarqués, le bateau donne de la bande du côté du quai et, bien que sans cesse agitée, cette lampe, avec sa flamme, demeure oblique par rapport au reste de la cabine ; oblique et infailliblement verticale et ainsi elle souligne le mensonge des lignes horizontales parmi lesquelles elle se trouve pendue. De plus en plus cette contradiction de la lampe impressionne le triomphant fugitif. « Suffit ! Cesse donc de me fourrer la tête avec de telles pensées vilaines ! ». « Mais maman, chaque soir les gratte-ciel de NewYork prennent les allures anthropomorphiques d’innombrables Angélus de Millet géants. Immobiles, prêts à accomplir l’acte sexuel et à s’entre-dévorer. Alors pourquoi pas nous ? ». Son père est rentré. Je lui ai parlé. Nous l’avons déshérité. Fabienne C. Ruzafa

Emmanuel Jaudard, car living, 2014, installation

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Lars apprend-il ?

Portrait Inculte de Connaissance de Lars / Traité Occulte d'Apprentissage de L'Art Ou comment prendre, apprendre et suspendre Lars. Lars, comme la personnification de l'Art. Il est à priori plutôt sympa vu qu'on n’a de cesse d'en parler. Il ne sourit pas mais ouvre grand ses bras. Il est peutêtre mort me dit-on ? Avant même d'avoir goûté au succès. Son cœur aurait lâché pour ne pas voir sa famille s'entretuer par avidité pour une histoire de succès...sion. Il est peut-être une femme au fond, une justicière tatouée aussi mystérieuse que maligne. Lars n'a sûrement pas de « genre en théorie » ou plusieurs, ce qui le rend fragile, volatile, éphémère, fulgurant, hors sujet, hors du monde, renaissant, évanescent, infantile, animal, aliénant, sublimé, suspendu, détaché, excitant, inquiétant, affligeant, polémique, politique, médiatique, idiot, idoine, idéal... Apprend-on l'Art ? Lars apprend-il ? Qu'apprendre de Lars ? Que nous apprend l'Art ? Passage en revue et questions en suspend...

Question de Genre Sujet sensible s'il en est, Lars est transgenre, hermaphrodite car il réunit les caractéristiques des deux sexes. Lointain descendant d'Hermès, « blingbling-croco » et d'Aphrodite « prolo-bootyshake », il n'a que faire des convenances. Si l'on s'en réfère à la signification-prénom.com, Lars serait « un homme viril, actif et entreprenant qui apparaît souvent distant et réservé ». Étymologiquement, le Dictionnaire Historique de la langue française nous précise que l'art est l'un des mots les plus importants de notre culture, il vient de l'accusatif (à croire que ça ne rigole vraiment pas) du latin « ars, artis », et se trouve être un nom féminin. Notre penchant phallocrate ancestral l'a fait glisser de sexe au fil des âges. Le beau Lars, Lars la belle, son sexe n'a finalement pas d'importance tant qu'il y a Lars, il y a la manière. Question de Gentrification Arty mais aussi « gentry » (petite noblesse) il est à la fois victime et vecteur de ce phénomène par lequel des gens plus aisés s'approprient un espace initialement occupé par des habitants ou usagers moins favorisés, transformant ainsi le profil économique et social du quartier au profit exclusif d'une couche sociale supérieure. Parfois amer Lars préfère la gentification de son quartier trendy. Question d'Âge Sans âge me dit-on, il peut avoir la plasticité cérébrale juvénile, la maturité adulte et la sagesse des anciens, la naïveté et le sadisme d'un enfant, la méchanceté et la lâcheté adultérine, le mauvais goût et la dégénérescence du vieillissement. Au fil du temps, il a changé de sexe disait-on et a subi plusieurs opérations sémantiques. Au départ, du latin « ars, artis » c'est un nom à valeur très générale, signifiant « façon d'être » et « façon d'agir ». Cela rappelle aujourd'hui l'idée même du « Do It Yourself » (que nous développerons dans un prochain Multiprise) et se définit 12

comme l'être qui fait. Le latin « Ars » toujours, réunit des idées essentielles, toutes liées à l'activité humaine tendue vers un ordre (vraiment ?), que cet ordre soit dicté par les dieux ou imposé par les lois logiques. Sa racine commune « armus » (> arme) qui désigne le haut du bras et l'épaule nous indique qu'il peut toujours servir pour partir au combat. « Ars » a pris petit à petit en latin le sens d' « habileté acquise par l'étude ou la pratique » et celui de « talent » opposé à natura, à ingénium, à scientia puis est passé au sens de métier, profession de l'artisan (artifex) et même à la valeur péjorative de « ruse » d'où « artificium », l'artifice. À croire que Lars est éternel et éternellement voué à muter. Question d'Apparat Lars est polymorphe, aussi bien négligé que propré, des hautes sphères aux marges de la société, il est de toutes les apparences selon les circonstances. Au pied levé et tout crotté dans son atelier. Maladroitement chic au vernissage. Total look pour se faire remarquer, il se fout d'être pris pour un clown car son intérêt c'est ce qu'il a à montrer. Il incarne l'idée du beau. Intrinsèquement subjective, elle lui offre la gamme complète de « hideux » à « sublime ». Question de Caractère Lars est méfiant et inquiet, à savoir si ça plaît. Il ne se livre pas au premier venu et accorde tout son crédit au dernier paru. Ses sentiments sont aussi solides que son égo. La liberté est chère à ses yeux bien qu'il s'enferme dans des courants parfois stagnants, pas toujours aériens ni marins. Indépendant, rétif aux contraintes extérieures, il est pourtant lié aux faits de société, aux époques qu'il embrasse. Son besoin de sécurité et de stabilité est paradoxalement lié à l'accueil qu'il reçoit et se montre parfois partagé entre son désir de continuer à plaire, qui le pousse à conserver ses acquis, et sa tendance à se renouveler pour la


reconquête de l'Ouest... Ses facultés d'adaptation lui permettent de se lancer sans trop d'angoisse tout en risquant le dérapage ou le chef-d'œuvre. Il est nerveux avant l'acte, le trac avant spectacle. Cela se manifeste souvent par une grande mobilité et adaptabilité, soit par l'exercice d'un sport ou pas (souvent), soit par de nombreux voyages, ou par une capacité de travail importante. Si Lars est une personne d'action, il est aussi capable de refréner ses engouements et ses impulsions. Enfin, charisme, il l'est, dans ce qu'il fait. Enfant, il est déjà ambitieux et fournit beaucoup d'efforts pour être le premier. Vif, bouillonnant, curieux, excitable, il est parfois instable et ne tient pas en place (surtout s'il est né en mai ou possède un chemin de vie 5 en astrologie). Enfin, il serait bon de développer chez lui le sens du partage, car il tend à être égocentrique et capricieux. Bon ou mauvais Lars a du caractère, un vrai caraque sur ses terres, à déguster qu'il soit suisse au chocolat ou à saupoudrer quand il est colombien.

fréquenté. Eponge de son époque, il illustre, accompagne et modèle son objet pour qu'il devienne sujet d'art. Il aime appartenir à une tendance, un courant, parler de ses influences, influencer ses partisans, être artisan de son parcours.

Question de Cœur Sentimentalement, il n'est pas dépourvu d'un certain charme. Son côté attractif est indéniable. Il recherche la sécurité d'un foyer mais a aussi besoin d'une certaine fantaisie... Au sein du couple, il accepte difficilement que sa position de maître soit discutée. Lars a besoin d'impressionner ou d'être admiré, voire d'être le point de mire forcément. Pour cela, il est prêt à fournir beaucoup d'efforts, parfois en vain quand s'abat le syndrome de l'artiste raté. Il aime ce qui est beau, ce qui est grand, ce qui élève et cultive des désirs de grandeur. En amour comme dans son activité Lars est souvent sujet au mythe d'Orphée : après avoir charmé Hadès par sa musique, Orphée est autorisé à regagner le monde des vivants avec sa bien-aimée à condition qu’il ne se retourne ni ne lui parle pendant le voyage, il se cache donc les yeux pour ne pas regarder sa femme Eurydice qu’il est descendu sauver du royaume des Enfers. Presque arrivé au but, Orphée ne pourra pourtant résister à la tentation de contempler l’être aimé et Eurydice disparaîtra à jamais. Dommage.

Question d'Hobbies Il écoute toutes sortes de musique « À Ostende, à Oslo, à Agadir, à Java, en Ukraine il aime le fado ». Il aime tirer au stand. Il aime chanter le karaoké. Il aime jogger sans trop savoir pourquoi. Il va voir des films au cinéma. Des expos même quand il fait beau. Il est gourmet et junkie de la rue. Il regarde pousser les fleurs et cherche des jeux pour les longs trajets. Cruciverbiste, polyglotte, naturiste, taxidermiste, se déplace en VTC (Véhicules de tourisme avec chauffeur), se nourrit de/au vernissage...

Question de Profession Lars est sur le papier plutôt indemnisé chômeur que salarié travailleur. Plus pour longtemps à l'écoute des médias ou du Medef qui, s'il on en croit cet acronyme est aussi en Mouvement. Bouffon du roi, c'est ta chance ou le trépas. Il a besoin de trouver une profession qui le motive. Problème : il n'y en a pas vraiment. Il doit l'inventer. Ou se réorienter vers les activités de vente, la publicité, le marketing, une profession mobile en liaison, de près ou de loin, avec les voyages et les déplacements, une profession en rapport avec les sciences exactes, la précision, la nature, une profession indépendante, créative, en rapport avec l'art, ça tombe bien mais se mord la queue.

Question sans fin Dessine le portrait de Lars et pars en www.eekend dare-dare

Question de Parcours Sur son CV Lars est un peu flou. Ce flou artistique concerne sa formation. Il a beau avoir fait une école d'Art, il ne se souvient plus lesquels, les beaux, les appliqués, les plastiques. Ce qu'il sait c'est qu'il y a rencontré ses semblables, certains qu'il adule, d'autres qu'il abhorre. Lars n'est pas énarque et s'en félicite. Heureusement que l'on n'en juge pas Lars à la GRANDE ou petite école qu'il a 13


Bonella Holloway

(mais tout le monde l’appelle Bonnie) Étudiante en 5ème année à l’Institut Supérieur Des Arts de Toulouse Ce qui la motive aujourd’hui dans la création artistique : l’humour du réel et détourner le quotidien - Son temps libre, elle le partage entre la vidéo, l’ISDAT et les bars avec ses amis. Des moments fugaces, qu’elle retranscrit en vidéo - Attention vous êtes filmé...

Quelle est votre actualité en ce moment ? En pleine préparation d’examen, je travaille sur la présentation de mon diplôme de fin d’année. La particularité de votre pratique artistique ? La vidéo et la performance. Que recherchez-vous quand vous réalisez une vidéo ? Je travaille en continu sur un projet vidéo, une sorte de journal. J’ai une caméra qui me suit dans mon quotidien, j’essaie de saisir la beauté, le sarcasme, le dynamisme, la tristesse, l’humour et le banal de la vie. J'éveille un frottement entre le cinéma comme barrière au réel et le caractère cinématographique de la réalité. Je veux pointer la splendeur de l'insignifiance dans le quotidien, autant qu'en détourner son ironie et sa dimension répétitive. Ce que vous avez retenu de votre formation à l’ISDAT ? Avancer avec les autres étudiants m'a apporté autant qu'avec le corps enseignant. Quels conseils donneriez-vous à un(e) lycéen(ne)qui veut s’inscrire aux beaux-Arts ? Il faut expérimenter le plus possible afin de trouver sa place, son identité et sa personnalité. L’art en trois mots ? Création, dynamisme et malheureusement élitisme. Une exposition qui vous a marqué dernièrement ? L’installation Butterfly de Jaime Pitarch. En tant que future jeune diplômée est-il important pour vous d’être un(e) artiste qui sort du lot ? Le travail de chaque artiste est différent. De ce fait, on sort tous du lot, chacun peut produire ce qu’il veut. En ce qui me concerne je ne cherche pas la concurrence Avec quel(le) artiste aimeriez-vous travailler ? Le vidéaste Francis Alÿs pour sa précision et sa clarté. Mise en situation : « Je déteste cette expo de merde sans fond ni forme, aucun intérêt, je me demande encore pourquoi je suis venue à ce vernissage. Ah oui c’est un(e) ami(e) qui expose ! ». Que dites-vous quand on vous demande votre avis ? Je saurai trouver les mots pour me faire comprendre. Le Président de la République vous nomme ministre de la Culture, quelle serait votre première action ? Gratuité des 14

centres d’art pour tous. La gratuité ne devrait pas seulement être réservée pour les étudiants en Art. Que faites-vous au quotidien pour protéger la planète ? Je trie, je recycle et je fais du covoiturage. Pensez-vous qu’il y ait une vie après la mort ? Non. Comment voudriez-vous mourir ? Très vieille mais avec toutes mes capacités physiques et mentales. Une phrase sur votre épitaphe? I don’t know why they say less is more, because more is definitely more. Un livre qui vous a fait aimer la littérature ? Autoportrait d’Édouard Levé. Un film qui vous a fait rêver au cinéma ? Mon nom est personne de Tonino Valerii. Enfant vous rêviez d’être ? Un chien, une dresseuse de chien, une actrice. Si aujourd’hui on vous donne l’occasion de tout recommencer à zéro, que feriez-vous ? Tout pareil. Que faites-vous de vos week-ends ? J’essaie de découvrir d’autres villes. Votre plus grande peur ? Le vide. Votre mot d’amour préféré ? Écureuil. Votre juron, gros mot ou blasphème favori ? Saloperie. Votre drogue favorite ? La danse. Une ville où vous souhaiteriez vivre ? Je ne sais pas. Comment vous voyez-vous dans cinq ans ? En pleine réussite artistique. À choisir entre un sac Chanel, une bouteille de Romanée Conti et la paix dans le monde ? La bouteille de Romanée Conti.

Vous pouvez poursuivre cette discussion autour de l’art, la vidéo et la performance avec Bonnie accompagnée d’un verre de Romanée Conti tous les jours à l’ISDAT ou dans un bar.


Sylvie Corroler-Talairach

Directrice artistique de la Fondation d’Entreprise Espace Écureuil Elle a choisi d’afficher une phrase de Georges Perec tirée de l’Infraordinaire qui reflète l’état d’esprit de ses choix artistiques. Cet ouvrage parle de notre vie de tous les jours, de notre quotidien, et nous interroge sur l’habituel. Selon elle un lieu d’art doit se rapprocher de ces valeurs : « Comment faire pour percevoir de manière vraie et nouvelle en permanence pour ne pas s’endormir sur soi-même » résume-t-elle.

Que recherchez-vous quand vous exposez un(e) artiste ? Une réflexion qui va interroger notre regard sur le monde et sur nousmême. Qu’est-ce qui vous motive aujourd’hui dans la création artistique ? La complicité. Quelle est votre actualité en ce moment ? Nous sommes en montage du projet pédagogique « Dessine-moi un mot », qui s’appuie sur l’exposition Les cadavres sont exquis. Votre formation ? Histoire de l’art à Paris-Sorbonne. Ce que vous avez retenu de cette formation ? Un savoir et un manque : celui du rapport physique et concret à l’œuvre... Je voulais toucher les œuvres et faire des expositions. Quels conseils donneriez-vous à un(e) artiste qui débute ? Artiste c’est un métier, il faut se rapprocher de la réalité du terrain, il faut se professionnaliser et savoir montrer intelligemment ses œuvres. L’Art en trois mots ? Création et ouverture d’esprit. Une exposition qui vous a marqué dernièrement ? L’installation Shadow 3 de Shilpa Gupta. C’est important pour vous de travailler avec un(e) artiste qui sort du lot ? Je ne travaille pas l’exceptionnel ni avec des artistes ou des œuvres qui sortent du lot. Je recherche avant tout à rencontrer une œuvre créée par un(e) artiste qui l’a bien pensée. Avec quel(le) artiste aimeriez-vous travailler ? Il y a un(e) artiste avec qui j’aimerais travailler et la programmation est en cours... Mise en situation : « Je déteste cette expo de merde sans fond ni forme, aucun intérêt, je me demande encore pourquoi je suis venue à ce vernissage. Ah oui c’est un(e) ami(e) qui expose ! ». Que dites-vous quand on vous demande votre avis ? J’ai beaucoup d’ami(e)s artistes et ils savent tous plus ou moins ce que je pense de leurs travaux. Le Président de la République vous nomme ministre de la Culture, quelle serait votre première action ? Je n’accepte qu’à deux conditions, qu’il double le budget de la culture et que ce président soit Christiane Taubira. Que faites-vous au quotidien pour protéger la planète ? Je trie les ordures et même à la fondation après chaque vernissage nous

faisons attention à ne pas tout mettre dans le tout-venant. Pensez-vous qu’il y ait une vie après la mort ? Je crois à l’impermanence des choses. Comment voudriez-vous mourir ? Ça dépend des jours, peut être en douceur dans mon sommeil. Une phrase sur votre épitaphe ? Je ne la connais pas par cœur, mais ça serait surement un haïku qui va parler de cette impermanence des choses. Un livre qui vous a fait aimer la littérature ? Adolescente je lisais vraiment beaucoup, Colette a été un déclencheur qui m’a fait découvrir toutes les possibilités de la lecture. Un film qui vous a fait rêver au cinéma ? Manhattan de Woody Allen. Enfant vous rêviez d’être ? Danseuse japonaise contemporaine. Si aujourd’hui on vous donne l’occasion de tout recommencer à zéro, quel autre métier aimeriez-vous exercer ? Danseuse. À quoi ressemble votre quotidien ? Partagée entre le travail, ma famille et du temps pour moi. Et à ces différents moments j’essaie de rester moi-même. Et que faites-vous de vos week-ends ? Je reste chez moi, je lis, je pars en week-end chez des amis et j’essaie de ne pas lire mes mails. Votre plus grande peur ? Les araignées. Votre mot d’amour préféré ? Peu importe le mot, ce qui compte c’est que ce soit mon chéri qui me le dise. Votre juron, gros mot ou blasphème favori ? Putain bordel de merde fait chier ! Il faut que ça soit très long. Votre drogue favorite ? Thé vert. Une ville où vous souhaiteriez vivre ? Amsterdam. Comment vous voyez-vous dans cinq ans ? Sereine. À choisir entre un sac Chanel, une bouteille de Romanée Conti et la paix dans le monde ? Romanée Conti.

Vous pouvez apprendre à Sylvie quelques pas de danse contemporaine japonaise du mardi au samedi de 11h à 19 h 30 à la Fondation d’Entreprise Espace Écureuil au 3 place du Capitole. Et n’oubliez pas le thé vert pour l’effort ! 15


Nicolas Jaoul Plasticien

« Dessiner, dessiner et dessiner » tel est le leitmotiv de ce plasticien toulousain - Après avoir terminé sa série Dessin du Jour, il n’a pas abandonné pour autant ses crayons. Le dessin l’accompagne toujours dans sa démarche artistique pour prendre d’autres formes d’expressions.

Que recherchez-vous quand vous réalisez une œuvre ? Me surprendre, une forme d’ivresse et capter le regardeur. Qu’est-ce qui vous motive aujourd’hui dans la création artistique ? Ma contribution à un changement possible des relations humaines. Quelle est votre actualité en ce moment ? Je dessine, travaille et me cultive. Votre formation ? L’école des Beaux-Arts de Toulouse. Ce que vous avez retenu de cette formation ? Mettre en place un processus de réflexion. Quels conseils donneriez-vous à un(e) jeune diplômé(e) des beaux-Arts ? Il faut prendre du plaisir et se faire du mal. L’art en trois mots ? L’art montée, le plat, la descente... Un(e) artiste qui vous a marqué dernièrement ? Marc Lombardi, il a révélé des relations étonnantes entre des personnalités puissantes aussi bien politiques, économiques que criminelles. C’est important pour vous d’être un(e) artiste qui sort du lot ? Ce n’est pas une question que je me pose. Avec quel(le) artiste aimeriez-vous travailler ? Marc Lombardi. Quelle est votre actualité en ce moment ? Je prépare une exposition à la Yam Gallery au Mexique. Mise en situation : « Je déteste cette expo de merde sans fond ni forme, aucun intérêt, je me demande encore pourquoi je suis venue à ce vernissage. Ah oui c’est un(e) ami(e) qui expose ! ». Que dites-vous quand on vous demande votre avis ? Je ne suis pas critique d’art. Le Président de la République vous nomme ministre de la Culture, quelle serait votre première action ? Je mettrai l’enseignement des arts au même niveau que les autres matières enseignées dans le système scolaire français. Que faites-vous au quotidien pour protéger la planète ? Je maîtrise mes pulsions, cultive la séduction, la sublimation et l’idéalisation. J’ai aussi supprimé mon compte Facebook. Pensez-vous qu’il y ait une vie après la mort ? Oui. Comment voudriez-vous mourir ? Aimé. Une phrase sur votre épitaphe ? Nicolas Jaoul 1981/3081. 16

En quoi aimeriez-vous être réincarné ? En femme. Un livre qui vous a fait aimer la littérature ? Le Baron perché d’Italo Calvino. Un film qui vous a fait rêver au cinéma ? Fando et Lis d’Alejandro Jodorowsky. Enfant vous rêviez d’être ? Mon père. Si aujourd’hui on vous donne l’occasion de tout recommencer à zéro, quel autre métier auriez-vous aimé exercer ? Je ne change rien. À quoi ressemble votre quotidien ? Un jour sans fin. Et que faites-vous de vos week-ends ? Je profite de la fin. Votre plus grande peur ? Ne pas être aimé. Votre mot d’amour préféré ? Fouette-moi. Votre juron, gros mot ou blasphème favori ? Bouffon. Votre drogue favorite ? Mes enfants. Une ville où vous souhaiteriez vivre ? J’aime vivre à Toulouse. Comment vous voyez-vous dans 5 ans ? Dégarni. À choisir entre une Rolex, une bouteille de Romanée Conti et la paix dans le monde ? La bouteille de rouge.

Tu peux prendre tes crayons de couleur et partager des idées avec Nicolas quand tu veux dans son atelier. Mais choisis bien tes couleurs. En attendant de savoir si tu as envie de te faire fouetter, tu peux jeter un œil sur ce qu’il produit, histoire de voir si tu as le coup de crayon tueur ! Tu trouveras toutes les infos sur son site : nicolasjaoul.com


Stéphane Redon

Photographe et enseignant à l'ETPA Quitte l’école le jour de ses 16 ans, reprend les études à 20, travaille chez AZF en tant que chimiste pendant plus de 10 ans jusqu’à l’explosion en 2001 - Changement d’activité - S’inscrit à l’ETPA ( École Technique de Photographie et d’Audiovisuel ) à Toulouse, diplômé, intervenant à l’école, intègre par la suite l’équipe pédagogique - Aujourd’hui, il enseigne aux élèves de première année la mise en pratique de la photographie : construction de l’image, lumière, distance photographique, toutes les bases de la prise de vue - Être photographe, c’est aussi maitriser la technique.

Que recherchez-vous quand vous préparez vos cours ? J’essaie d’intéresser les élèves. Pour les étudiants qui arrivent en première année, la photo représente un loisir, une passion. J’essaie de leur donner tous les outils nécessaires pour que la technique ne soit pas un frein à leurs créations. Qu’est-ce qui vous motive aujourd’hui dans la création artistique ? La naissance de mon fils est une nouvelle source d’inspiration, qui me pousse à créer de nouvelles images. Quelle est votre actualité en ce moment ? Les cours à l’ETPA et animer les ateliers photo au centre culturel de Saint-Cyprien. Ce que vous avez retenu de votre parcours ? Il n’est jamais trop tard pour se remettre en question. Quels conseils donneriez-vous à un(e) artiste-photographe qui débute ? S’accrocher, démarcher et se construire un réseau. La photo (l’art) en trois mots ? Rigueur, créativité, persévérance. Une exposition qui vous a marqué dernièrement ? La rétrospective de Richard Avedon au Jeu de Paume. Très bonne qualité du tirage et de la scénographie. C’est important pour vous d’être un(e) photographe qui sort du lot ? Fatalement oui, sinon on reste dans le ventre mou. Il faut avoir sa touche personnelle. Avec quel(le) artiste aimeriez-vous travailler ? Le portraitiste Richard Dumas que je trouve très simple et humain dans son rapport à l’autre. Mise en situation : « Je déteste cette expo de merde sans fond ni forme, aucun intérêt, je me demande encore pourquoi je suis venue à ce vernissage. Ah oui c’est un(e) ami(e) qui expose ! ». Que dites-vous quand on vous demande votre avis ? Je vais être franc et je prendrais du temps pour comprendre pourquoi je n’aime pas cette exposition. Le Président de la République vous nomme ministre de la Culture, quelle serait votre première action ? Même si c’est assez inconcevable qu’il m’appelle, je serai très content et je prendrai le temps pour réfléchir à mes décisions. Que faites-vous au quotidien pour protéger la planète ? J’éduque mes enfants à ne pas gaspiller.

Pensez-vous qu’il y ait une vie après la mort ? Non, j’y crois pas. Comment voudriez-vous mourir ? Bien entouré et que ce soit doux et rapide. Une phrase sur votre épitaphe ? Toujours essayer, aller jusqu’au bout de ses convictions. Un livre qui vous a fait aimer la littérature ? J’ai beaucoup lu et regardé des livres de photos, mais il n’y a pas un livre que je garde particulièrement en tête. Un film qui vous a fait rêver au cinéma ? La cité des enfants perdus de Jean-Pierre Jeunet et Marc Caro. Enfant vous rêviez d’être ? Garde forestier. Si aujourd’hui on vous donne l’occasion de tout recommencer à zéro, quel autre métier aimeriez-vous exercer ? Tout pareil. Je suis content de faire ce métier qui est aussi ma passion. À quoi ressemble votre quotidien ? Je suis partagé entre mon travail et ma vie de famille. Et que faites-vous de vos week-ends ? Je bricole. Votre plus grande peur ? J’en ai pas. Votre mot d’amour préféré ? Je t’aime. Votre juron, gros mot ou blasphème favori ? Oh la vache. Votre drogue favorite ? Expresso et cigarette. Une ville où vous souhaiteriez vivre ? Je me plais bien à Toulouse. Comment vous voyez-vous dans cinq ans ? Avec moins de cheveux et plus de cheveux blancs. À choisir entre une Rolex, une bouteille de Romanée Conti et la paix dans le monde ? J'espère qu’on va tendre vers la paix dans le monde avec un verre de Romanée Conti.

Pour tous ceux et toutes celles qui ne sont pas étudiant(e)s à l’ETPA, Stéphane et toute l’équipe d’animateur de l’espace culturel de Saint-Cyprien peuvent vous apprendre les techniques de prise de vue ainsi que tout ce que vous rêviez de savoir sur l’univers de la photo.

Propos recueillis par Jeremy Calixte Illustrations : Nicolas Jaoul 17


Les nouvelles voies de l’édition toulousaine Cher Multiprise, Je t’écris ces quelques lignes depuis l’autre bout du monde, en short et tee-shirt (veinarde que je suis), en plein cœur de la bouillonnante métropole d’Hô Chi Minh. Le bruit des klaxons conjugué aux odeurs des fruits exotiques me laisse dans un état quasiméditatif, et l’atelier du quartier Bonnefoy me semble bien loin. Mais ce n’est pas pour autant que je t’oublie, et, après avoir parlé des festivals BD de la région ou encore des expositions liées au 9ème art, je me suis dit qu’il était temps de faire découvrir à nos lecteurs deux petites structures éditoriales installées sur Toulouse et encore assez méconnues. Car tu le sais bien, en bande dessinée, ce sont avant tout les livres qui comptent, et de fait, les personnes qui les font. Deux petites structures donc, pour voir se dessiner un nouveau paysage éditorial au cœur de Toulouse, déjà bien revigoré par la présence du collectif Indélébile, mais encore un peu sonné par le départ des Requins Marteaux. Je te laisse donc en compagnie des Machines, fraîchement installées à Toulouse et qui, à l’heure où j’écris ces mots, sont à la recherche d’un atelier pour poser leurs imprimantes, et du Collectif des Métiers de l’édition, qui ne publie pas uniquement de la bande dessinée, mais pousse un peu plus loin la réflexion sur l’édition, à l’heure du numérique. J’espère que ces deux entretiens éveilleront la curiosité de nos lecteurs, et je ne doute pas qu’ils se précipiteront pour découvrir les ouvrages de ces maisons d’édition. Je t’embrasse bien fort, A.

Quelques questions à Léo Louis-Honoré, membre du collectif Les Machines Comment sont nées Les Machines ? Les Machines sont nées en 2010, dans une salle de l’EESI d’Angoulême. Nous étions pour la majorité en Master BD, et à l’initiative de Robin Cousin, notre cher président, nous avons décidé de créer une association qui nous permettrait de fabriquer nos propres livres, pour pouvoir rester soudés après l’école et ne pas avoir à démarcher des éditeurs et attendre des réponses pour sortir des BD. Au final, nous nous sommes retrouvés à onze dans cette salle, nous avons tous posé 50€ sur une table, et nous sommes partis à Dourgne (81) en voiture pour acheter une imprimante que nous avions déniché sur internet. Nous avons alors édité nos premiers livres, et avons continué à acheter du matériel d’impression et de façonnage, grâce à des subventions. Pourquoi ce nom ? À la base, nous avions opté pour «L’Imprimante», mais le nom était déjà pris, et «Les Machines» s’est imposé comme une suite logique à notre premier choix, étant donné qu’entre-temps nous avions acheté une agrafeuse et un massicot. 18

Catapulte 5.6.7.8

Qu’est ce qui a motivé votre installation sur Toulouse ? Après avoir terminé notre cursus à l’EESI, nous avons décidé de quitter Angoulême et nous installer dans une nouvelle ville. À la base, nous sommes partis à trois (le président, le secrétaire et le trésorier), et nous voulions vivre dans une ville qui ne soit pas loin de la mer, pas loin des montagnes, et avec des collectifs de BD que nous connaissions. Toulouse était la solution. Comment est-ce que vous fonctionnez ? Chaque membre de l’association est auteur, maquettiste, imprimeur et façonneur. Nous nous entraidons et fabriquons les


livres des membres et les revues collectives tous ensemble, et nous les vendons ensuite dans les festivals ou sur Internet. Nous en plaçons aussi occasionnellement en librairies. Les recettes nous permettent de racheter du papier et de l’encre, et dans l’idéal d’acheter de nouvelles machines.

mettre en avant cette diversité plutôt que de faire des séparations entre les préoccupations de chaque auteur. En plus de ça, comme nous avons une grande liberté de format et de reliure étant donné que nous faisons tout nous-mêmes, nous aimons changer et innover à chaque livre.

Quelle est la particularité de votre maison d’édition ? Comme nos livres sont conçus artisanalement, nous faisons des petits tirages, et quand le livre est épuisé, nous le retirons pour le prochain festival à venir. C’est de l’édition à la demande, ça ne coûte pas plus cher d’en éditer 10 ou 100, contrairement à l’édition en offset, et cela nous permet d’éviter de faire du gâchis et d’avoir à stocker des gros cartons de livres.

Votre prochaine parution ? Il y a plusieurs fanzines et revues collectives sur le feu, on ne sait pas encore laquelle sortira en premier, mais les paris sont lancés !

Avez-vous une ligne éditoriale bien définie ou vous marchez plutôt au coup par coup ? À la base, nous ne nous sommes pas réunis autour d’une vision commune de la bande dessinée ou du dessin. Nous sommes actuellement treize membres et nos productions vont de la bande dessinée franco-belge au dessin contemporain, et nous aimons

Si vous pouviez publier n’importe qui (chanteur, acteur, auteur hyper connu…) ce serait qui ? Il faudrait demander aux treize membres, mais je pense qu’on serait tous d’accord pour publier Akira Toriyama. Un livre d’une autre maison d’édition que vous avez adoré récemment ? Yékini, de Lisa Lugrin et Clément Xavier, qui vient tout juste de paraître aux éditions FLBLB. http://editionslesmachines.blogspot.com/

Roméo Julien, Mister Uppercut in Africa - intérieur 19


Quelques questions à Aurélien Lambert, membre du Collectif des Métiers de l’édition

Comment est né le Collectif des Métiers de l’Édition? Notre collectif a été impulsé par trois personnes qui avaient chacune des projets dans l’édition. Ces trois personnes se connaissaient aussi à travers les luttes sociales, notamment celles dites des banlieues puis du CPE. Depuis nous sommes une petite dizaine à être actif dans la structure, sans compter les auteurs/ illustrateurs qui nous filent des coups de main ponctuellement. Pourquoi ce nom ? Nous voulions un nom qui mette en avant la « face cachée » de l’édition, à savoir que la mise en livre d’une œuvre est un processus de création à part entière, rendu possible par l’intervention de métiers complémentaires. C’est aussi la réalité de nombre de petites maisons que de fonctionner ainsi, d’agréger des compétences autour d’un projet, nous avons décidé de le mettre en avant, d’en faire une identité. Ce nom interpelle, et cela nous permet aussi de parler de la segmentation du travail, du livre qui échappe à l’auteur, ou au contraire de l’auteur qui pense qu’il a à son service « des petites mains ». Des fois on nous prend aussi pour un syndicat... Un des objectifs de notre maison est de créer un milieu favorable pour l’épanouissement des auteurs / illustrateurs / traducteurs / graphistes etc..., et que chacune et chacun puisse participer à des tâches qui ne sont pas à priori les siennes. C’est un savoir-faire collectif qui se construit au fur et à mesure des titres et que nous sommes en mesure de proposer à d’autres maisons d’éditions ou à des structures qui ont à faire avec le support imprimé. Comment est-ce que vous fonctionnez ? Chaque membre de notre collectif participe à l’élaboration des livres, et prend en charge une activité connexe comme l’administratif, la communication, la sur-diffusion etc... L’équipe toulousaine s’occupe du quotidien du collectif. Nous nous réunissons deux fois dans l’année pour décider des orientations 20

de notre structure (réflexion autour de l’emploi, de l’organisation, des choses à améliorer ou créer) et des publications à venir lors de notre comité de lecture qui est ouvert à nos sympathisants. Nous essayons aussi de penser et d’achever les livres en collectif, lors d’ateliers graphiques en présence des auteurs, notamment. Quelle est la particularité de votre maison d’édition ? Avezvous une ligne éditoriale bien définie ou marchez-vous plutôt au coup de cœur ? Outre qu’elle soit collective, la particularité de notre maison d’édition est de s’être construite avec trois collections, chacune ayant une identité forte (logo, nom…). Les réveilleurs de la nuit est dédiée à la critique sociale actuelle ou passée, À l’ombre du Maguey traite de la résistance en Amérique Latine, c’est une collection qui a la particularité de proposer des ouvrages très différents (Livre-DVD, BD, traduction) et Dans le ventre de la baleine est une collection de contes qui explore la narration graphique de l’oralité. Ce qui est intéressant, c’est que les collections s’alimentent les unes les autres. Nous essayons que chaque livre soit le plus abouti possible, qu’en fin de compte le lecteur ne s’aperçoive pas que des choix ont été faits, que ça lui semble le plus naturel possible. Pour nous, c’est une réponse à tout le délire autour du numérique (délire cependant construit et subventionné), et nous posons la question : puisque le numérique est incapable d’apporter autre chose que du stockage, qu’il est en dessous du livre (ce qui est normal, car le livre a des connaissances accumulées de plusieurs siècles), et qu’il est incapable de créer une nouvelle narration adaptée à son support, à quoi sert-il à part singer le livre et le dématérialiser ? Puisque notre édition est née en plein cœur de la crise du livre, de la perspective du numérique, et comme nous avions l’expérience des déficits des projets « fanzine », nous avons réfléchi à ce que nous pourrions apporter en plus, comment rendre nos livres accessibles et directement. Nous avons opté pour l’organisation d’événements autour de nos livres, des fêtes de sortie dans les bars, des projections vidéo, des expositions, des ateliers avec des illustrateurs jusqu’à la création d’un festival autour de l’oralité qui en est à sa troisième édition ! Nous ne chômons pas ! Si vous pouviez publier n’importe qui (chanteur, acteur, auteur hyper connu…) ce serait qui ? Nous devions faire un livre avec Marc-Antoine Mathieu à partir d’un spectacle jeune public, PP et les petits cailloux, et à notre grand regret ça n’a pas pu se concrétiser. Alors voilà, si nous avions le choix de faire un livre avec une sommité de la BD francophone, ce serait avec lui. http://www.editionscmde.org


EmmanueldeMoralès Charlotte Sédouy Série Cover

Sans titre, 2011, acrylique sur toile, 100 x 100 cm


Sans titre, 2009, acrylique sur toile, 116 x 89 cm


Sans titre, 2009, acrylique sur toile, 116 x 89 cm


Sans titre, 2011, acrylique sur toile, 100 x 100 cm


Petite revue choisie des expositions en cours...

...où l’actualité des arts plastiques de cette fin de mois de mars privilégie le dessin contemporain d’une jeune artiste londonienne, ainsi que les affiches de cinéma aux espaces saturés de couleurs vives du toulousain André Azaïs. Je suis un arbre Les formes douces du bâtiment du Pavillon Blanc abritent en ce moment quatre artistes déroulant le thème de la nature. Kate Atkin, née en 1981, propose un travail illustrant des arbres ployant sous leur propre poids, des bouts d’écorce ayant subi les ravages environnementaux, isolant tout d’abord dans le détail ces perversions naturelles par la photographie, pour ensuite les traduire en de vigoureux dessins grand format exécutés à la mine de plomb. Fascinée par les arbres depuis son enfance passée dans la verte campagne anglaise, c’est un cliché de châtaigner pris avec son Polaroid qui va déclencher en 2005 le travail plastique de cette photographe de formation, avec une œuvre intitulée Study : Horse Chestnut (Aesculus Hippocastanum). Les troncs torturés se transforment en créatures fantasmagoriques, et le fantastique prend le pas sur la description du détail botanique, fût-il lui-même porteur d’une étrangeté naturelle. L’organique se dévoile dans ces dessins qui laissent entrevoir dans leurs entrelacs torturés des bouts de corps, intestins ou membres scarifiés, visages ou seins composant ainsi une violence sourde où « L’Etrange nature », thème annoncé de l’exposition, prend tout son sens dans cette vision aux accents gothiques so british. À l’inverse, à côté de ces travestissements graphiques à la rigueur débridée, les Micro-

mousse d’Emilie Benoit fonctionnent comme des miniatures foisonnantes et délicates arrachées à l’espace naturel pour atterrir au Pavillon Blanc, le polystyrène imitant la nature sans toutefois l’inquiéter véritablement. Poltergeist Des arbres prennent vie à Colomiers pendant que dans la salle Picasso du musée des Abattoirs des pianos à queue orchestrés par le poétique Céleste Boursier-Mougenot forment un étrange ballet mécanique laissa nt là un aléatoire diriger des objets mus par une vitalité contre-nature, une révolte douce des machines valsant maladroitement. L’artiste nous a habitués à plonger dans ses rêveries subtiles faites souvent d’environnements sonores impromptus composant des partitions disharmoniques : oiseaux et guitares électriques (cf p.34), aspirateurs et harmonicas, ou encore vidéos comateuses et sofas limaceux (sic).Il faut monter à l’étage supérieur du musée pour ensuite prendre un cours d’histoire d’art contemporain avec une exposition regroupant l’intégralité des éditions et multiples du génial artiste-sorcier silésien Sigmar Polke. Intitulé Die Vervielfältigung des Humors (la reproduction de l’humour), ce panorama exhaustif et quelque peu roboratif ravira spécialistes et passionnés du célèbre peintre allemand, sans les peintures.

Céleste Boursier-Mougenot, Offroad © Cedrick Eymenier

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Kate Atkin, Starling, 2012

Courtesy Trinity Contemporary, Londres

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« T’as de beaux yeux, tu sais » Mais partons de la projection d’images mentales mises en scène par un Céleste chorégraphe flottant toujours entre deux mondes vers le dessin figuratif d’André Azaïs, peintre et illustrateur qui a réalisé de nombreuses affiches de cinéma pour la devanture du Royal, établissement toulousain défunt à l’élégance Belle Époque, avec balcons, orchestre et salle de 1200 places. La Cinémathèque de Toulouse propose à l’Espace EDF Bazacle une sélection de ses œuvres king size (en moyenne cinq mètres par deux), réalisées entre 1960 et 1970. Ces années à la fréquentation des salles en berne vont obliger l’aristocrate Royal à projeter de nombreux films de genre, du western grande classe comme Rio Bravo (Howard Hawks, 1958) en passant par le film d’aventure (Typhon sur Hambourg, Alfonso Balcázar, 1967), ou l’érotique (Suède, enfer et paradis, Luigi Scattini, 1967), ce dernier genre surfant sur le fantasme des Nordiques au sang chaud. L’artiste toulousain travaillait à partir de matériaux fournis par les distributeurs des films : affiches de petite taille imprimées, photos d’exploitation du film… Véritable stakhanoviste de l’illustration, il n’enchaînait pas moins de six affiches par semaine, en fonction des sorties du mardi soir. Respectant toujours la typographie originale, son lettrage souvent fait de couleurs primaires s’accordait avec les collages des photos de stars à l’affiche ou des corps peints sur ces toiles à fantasmes, réinterprétant de façon unique un produit commercial standardisé. Sauvés des poubelles par le créateur de la Cinémathèque Raymond Borde lors de la fermeture du Royal en 1977 ces témoignages d’un passé cinéphilique révolu participent désormais de la grande histoire du cinéma. DM

André Azaïs : Affiches de façade de cinéma peintes, collections La Cinémathèque de Toulouse Rio Bravo, Howard Hawks, 1958. Le Masque de Fu Manchu, Don Sharp,1965. 2001 l’Odyssée de l’espace, Stanley Kubrick, 1968

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Bis Repetita Texte écrit à l’occasion de l’exposition Talons aiguilles et frissons de Mademoiselle Kat au centre de l’Affiche de Toulouse, du 25 novembre 2013 au 14 mars 2014. Présent dans le catalogue de l’exposition édité par le Centre de l’Affiche.

Mademoiselle Kat, Picture this

Ce n’est pas sérieux lorsque l’on est une jeune fille de vingt ans de peindre toutes les nuits sur les murs de sa ville. Nous sommes en 1990 et Mademoiselle Kat, en compagnie de sa camarade de jeu Miss Van, peint ses premières héroïnes colorées dans la ville rose. Elles sont toutes deux pionnières d’un nouveau style d’art dans la rue. Si Miss Tic1 a féminisé l’art du pochoir dès le milieu des années 80, elles, proposent des interventions décalées, qui sans slogans affirment un féminisme kawaï2 qui surprend et égaye la cité. Les personnages, autoportraits à peine voilés s’affineront stylistiquement avec le temps mais garderont toujours ce caractère mutin et cette apostrophe en direction du passant, une invite à voir le monde autrement et à considérer un renouveau de la place de la femme. Leur élan artistique, féministe et libertaire suit le mouvement de l’évolution culturelle en ce début des années 90. 28

Paradoxalement, c’est juste avant l’essor d’Internet, au milieu de cette décennie, qu’apparaissent les deux grands derniers mouvements culturels de la jeunesse, techno3 et grunge4 qui encore plus vite que leurs prédécesseurs seront récupérés et dénaturés par l’industrie. Mais il semblerait qu’avant la bascule vers le tout numérique (miroir aux alouettes d’une liberté individuelle esclave de la cool dictature de la Silicon valley5) des soubresauts puissants d’indépendances forcenées se soient manifestés. Les raves, et toutes ces zones autonomes temporaires6 ont permis à des artistes spontanés de faire leurs armes et d’explorer des territoires jusqu’alors éloignés de toute diffusion artistique. En quelques années les villes terminent leur transition du XXème au XXIème siècle, et abandonnent leurs défroques industrielles au tertiaire et à la culture. Ces espaces, un temps en friche, deviennent le terrain de jeu d’une jeunesse qui s’est plu à danser


et à grapher sur les ruines d’un siècle achevé dans l’horreur des charniers de Bosnie, réitérant les drames de 1910 aux années 1940. L’histoire toujours se répète. C’est cette mutation violente qui a engendré la génération X, celle qui, à force de s’entendre rabâcher qu’elle n’avait aucun avenir a préféré s’autocentrer et créer son propre rayon d’action, inventant pendant une petite dizaine d’années le contexte de ses rêves, avant de se faire récupérer par l’appétit sans fin du système culturel libéral qui transforme toute œuvre en produit. Je vous parle d’un temps où le Street art n’existait pas ! Pas d’effets de mode, ni blogs, ni magazines, ni aucun livre à ce sujet. Il fallait une bonne dose d’audace et un sens aigu de la liberté pour aller peindre dehors. Pour Mademoiselle Kat, l’inspiration vient d’artistes comme Ernest Pignon Ernest7, ou de l’early graffiti américain, mais aussi des peintures des femmes Ndébélés8. Mais son style se détache de tous ces codes. Pas de gros lettrages, juste des personnages peints au pinceau dans des couleurs vives et pastel. Un univers ludique qui impose une imagerie sexy et naïve. Cette nouvelle présence colorée et fantasque sur les murs de la cité va contribuer en moins de vingt ans à alimenter l’engouement pour ces pratiques artistiques de rue. Aujourd’hui Banksy9 passe au « 20 heures » de TF1, les ados rêvent de devenir « Street artiste » sans que l’on sache si c’est par esprit d’aventure ou pour l’argent ... Dans ces pratiques marginales et en dehors des cadres classiques, la question des moyens se pose très vite. Comment gagner sa vie quand son travail consiste à peindre là où c’est interdit ? Même si c’est la rue qui donne tout son sens à son œuvre, il faut évoluer, recycler son imagerie sur d’autres supports ou augmenter son univers grâce à de nouveaux territoires. Avec l’affiche, Mademoiselle Kat propose un compromis intelligent. Une pratique d’atelier pour une monstration en espace d’exposition ou en extérieur. Rester proche du public, produire un art populaire, semble être le credo qui a motivé cette nouvelle façon d’investir l’espace privé et public. La rue et le cinéma sont deux mondes parallèles, s’alimentant l’un l’autre. Que Mademoiselle Kat investisse le second après avoir exploré le premier semble logique. Donc après la rue, les terrains vagues et les friches direction le Cinéma bis, celui des salles de quartier et leur double programme où se bousculent westerns, péplums, films érotiques et d’épouvante. Ces genres animaient la surface des toiles avant que la télévision n’envahisse les foyers et fixe les gens chez eux. Le cinéma est le champ d’un imaginaire collectif, ensemble on tremble, on rit, on pleure et on désire. Art de la modernité, le cinéma n’en est pas moins une vieille histoire, empruntant dans sa construction narrative les ressorts antiques

Mademoiselle Kat, wave eye

de la tragédie. L’histoire qui était racontée autour du feu est soudainement projetée dans des salles de mille personnes et les héros incarnés par acteurs très vite adulés. C’est ainsi que naît l’industrie du cinéma avec ses studios, ses stars, ses moguls et ses milliards. Pour la promotion de ses kilomètres de pellicules, l’industrie cinématographique a recours à de petits artisans qui à l’aide de leurs pinceaux figent le mouvement, accentuent les expressions et jettent sur le papier des couleurs vives qui attirent l’œil et rendent expressifs les slogans racoleurs qui aguichent le passant. L’art de l’affiche de cinéma est un art du leurre. Surtout dans le Bis, ses productions désargentées mentent sans vergogne sur des affiches où les figurants sont des milliers et les explosions colossales. L’affiche excelle dans cet art de l’exagération. Pour Mademoiselle Kat, cet entre-deux est un terrain d’exploration idéal. En suggérant seulement par l’affiche une ébauche de scénario, elle bâtit des mondes en une image. Des sushis dévoreurs de chair humaine envahissent le métro tokyoïte. Les vagues géantes d’un tsunami affamé déferlent sur les plages de Palavas. Un monstre velu à la langue bien pendue fait se pâmer des pin-up innocentes et néanmoins séductrices jusqu’au bout des ongles. Voici quelques ingrédients parmi d’autres d’un univers extravagant et sucré, hommage à un cinéma d’exploitation où ont excellé nos voisins espagnols et italiens, les Mario Bava10, les Lucio Fulci11, les Jess Franco12, sans oublier en France l’inénarrable Jean Rollin13. Mais il ne faut pas réduire ce Cinéma bis aux extrêmes des genres, ces pellicules dépassent souvent les frontières au sein desquelles on veut bien les cantonner. Ces réalisateurs, dont les productions d’exploitations ne sont pas vouées à une légitimation culturelle ont une véritable posture d’auteur, qui fait parfois de leurs films de véritables œuvres d’art. Cette reconnaissance peut aussi s’appliquer aux artisans qui confectionnent les affiches de ces films, véritables chefs-d‘œuvres expressionnistes à la 29


puissance picturale rare. Les œuvres de Constantin Belinsky, qui a autant œuvré pour Les enchaînés d’Alfred Hitchcock ou La soif du mal d’Orson Welles sans rechigner pour autant à peindre pour des titres un peu moins prestigieux comme Le manoir de la terreur ou un obscur Superman le diabolique, sont de véritables odes à la couleur et au mouvement, une énergie picturale au service du cinéma. Dans un registre moins classique, durant les années soixante et soixante-dix, l’italien Tino Avelli pratique une déstructuration, certes éloignée du cubisme, mais qui joue de la promesse fixe de l’art séquentiel ou comment recréer le mouvement dans le format figé et limité du poster. Je pourrais citer des dizaines d’auteurs extraordinaires aux univers complètement différents mais revenons au Bis et à ses univers sombres, extrêmes et jubilatoires. Ces films n’ont pas toujours l’aspect candide des affiches de Mademoiselle Kat, et explorent assidûment notre part d’ombre en convoquant un bestiaire démoniaque des plus variés. S’ils n’hésitent pas à flatter nos désirs les plus obscurs, leurs images sont néanmoins teintées d’une poésie singulière due à une inventivité cinématographique transcendée par le manque de moyens. Ces cinéastes renouent ainsi avec la magie du cinéma archaïque d’un Méliès14, quand le carton-pâte et les effets visuels les plus simples provoquaient chez le spectateur des voyages oniriques et fantasmagoriques. Cette attirance pour la transgression fait aussi partie du travail d’affiches de mademoiselle Kat lorsqu’elle introduit dans l’espace urbain cette imagerie populaire surannée mais au pouvoir évocateur toujours aussi efficace. Ces univers fantasques engendrent un glissement de sens et d’époque sur les murs de la ville. Il est certain qu’en ce moment le vintage fait recette... Les jeunes artistes contemporains se repaissent du travail de leurs aînés, sans en avoir toujours conscience... Les grands anciens, minimalistes et conceptuels sont convoqués pour leurs formes en oubliant leur fond (éminemment politique). La Renaissance, elle, se retrouve résumée à ses inventions plastiques et voit ignorée sa dimension, là aussi, politique. Ce devenir apolitique de la forme ne fait justement pas partie du programme de Mademoiselle Kat, elle qui tout au long de son parcours s’est préoccupé de la destination de son travail et c’est bien à cet endroit que réside l’enjeu politique d’une œuvre. N’oublions pas la dimension érotique de son travail. Même si les femmes sont toute en jambes et poitrine, les ongles maquillés et le regard aiguisé, leur sourire franc annule toute vulgarité tapageuse. Impossible de ne pas évoquer Bettie Page, l’impératrice des pin-up et Bunny Yeager sa photographe et amie qui dans les années cinquante ont participé à élaborer les canons d’un style, 30

à l’aide de costumes et poses qui font toujours fureur aujourd’hui. Il faut se souvenir que l’érotisme était aussi une nécessité politique, un rempart libertaire et féministe (lorsqu’il était le fruit du travail des femmes) à l’assaut incessant des Moralès religieuses et de leurs censures rétrogrades qui depuis une dizaine d’années ont repris leurs attaques contre les libertés individuelles. Alors oui afficher dans la rue des pin-up qui n’ont rien à vendre que leurs courbes et leurs sourires est un acte politique. Ici, pas de lutte des classes, mais remarquons le, peut-être une lutte des genres ? Les hommes sont absents de ces affiches, ou si présence masculine il y a, c’est celle de monstres débonnaires. Si homme il doit y avoir, alors il sera hirsute et monstrueux, caracolant à rebrousse poils des codes et des conventions de la représentation testostéronée. Et la Scream queen de l’affiche hurle moins d’effroi que pour nous proclamer son désir de changement d’aire. Une aire où la morale serait moins frileuse et le repli sur soi ne serait plus le signe d’une crispation due à une crise qui n’a que trop duré. Verrou d’une domination libérale patriarcale qui sait son temps révolu. Alors comme le disait Simone de Beauvoir15, n’oublions pas que les droits des femmes ne sont jamais acquis et pour cela chaque femme doit rester vigilante toute sa vie. Cela fait déjà vingt ans que Mademoiselle Kat manifeste un engagement tout en douceur et en finesse à l’aide d’un art qui surtout n’oublie pas l’essentiel : le plaisir des yeux ! Manuel Pomar

Directeur artistique de Lieu-Commun

1 Miss Tic, artiste qui démarre dans les années quatre-vingt en usant des murs comme des pages blanche d’un journal intime. Sa poésie brute s’écrit à la bombe et au pochoir.

Kawaï, en japonais mignon, devenue une expression qui désigne une certaine frivolité appliqué à toute les situations. Ou comment voir la vie en rose et en produits dérivés.

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3 Techno, même si ce mouvement issu de la musique électronique est né dans les années quatre-vingt aux États-Unis c’est au tout début des années quatre-vingtdix qu’il explose en Europe avec les raves party, rassemblements spontanés et underground qui défient les cadres classiques et marchands de la fête. Ce son brut issu des villes industrielles et prolétaires comme Detroit ou Manchester en mutant en Electro deviendra l’apanage des classes moyennes jusqu’à dégénérer vers la French touch, avatar bourgeois du mouvement.

Grunge, dernier soubresaut rock « authentique », qui voit la quasi-totalité de la scène de Seattle, biberonnée par les labels indie et les fanzines, signés par les majors pour vendre à la planète entière le mal être des petits blancs de la génération X, mauvaises herbes des banlieues pavillonnaires qui n’envisagent leur avenir que sur quatre accords saturés.

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5 Silicon valley, repère californien de petits génies de l’informatique qui font fortune en créant des besoins et en rendant cool leurs entreprises par des campagnes de communication jeunes et décalées. Ces entreprises nous facilitent accessoirement et techniquement la vie mais participent à faire de notre un monde un cauchemar totalitaire soft façon 1984 d’Orwel.

Zone autonomie temporaire ou TAZ (Temporary Autonomous Zone), lieu éphémère et non balisé visible par ceux qui le pratiquent. La TAZ ne se définit pas elle s’expérimente. C’est une démarche pratique visant à vivre les utopies pirates. L’anarchie non pas à l’épreuve du réel mais par la preuve du réel !

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Ernest Pignon Ernest est un des pionniers de l’art urbain en France, véritable artiste contextuel et éphémère, la grâce classique de son trait est parfois mal comprise par certains esprits réactionnaires tenants du «bien fait» rassurant, qui limitent son travail à une seule de ses caractéristiques qui ne serait rien sans ses autres dimensions comme la précarité et la multiplicité des œuvres. 7

Ndébélés, peuple d’Afrique du Sud, où les femmes ont pour attribution d’orner les façades des maisons de motifs géométriques multicolores. Avec beaucoup d’imagination nous sommes à deux doigts d’une tribu d’amazones muralistes. 8

9 Banksy, star adulé du Street art, qui comme beaucoup de ses contemporains joue à l’anonymat, adepte du pochoir à l’aide duquel il pratique une poésie naïve affreusement politiquement correcte. Adoré des médias pour ses performances grossières ou à l’instar d’un Damien Hirst pour l’art contemporain il se « joue » du marché pour mieux faire grimper sa cote. Les nouveaux pompiers viendraient-ils de la rue, plus de notre époque, tu meurs !

Mario Bava, cinéaste italien actif des années quarante jusqu’aux années soixantedix. Véritable stakhanoviste (réalisateur, opérateur, scénariste) du 7ème art, a œuvré 10

aussi bien dans le péplum que le western pour finalement jeter les bases du fameux genre transalpin, le Giallo, savant mélange de thriller, horreur et érotisme. Qui dit mieux ? 11 Lucio Fulci a beaucoup en commun avec Bava. Il est tout aussi productif même s’il verse un peu plus vers le sanglant en se faisant spécialiste d’un cinéma d’exploitation surfant sur les succès du cinéma de genre américain tout en les teintant un peu plus de couleur rouge sang. Sa marque de fabrique est un cinéma gore aux excès qui frisent parfois le génie surréaliste. Ne manque que la moustache ? 12 Jésus Franco, artisan cinématographique ibère qui n’hésite pas à tourner plusieurs films en même temps, tout en maintenant dans l’ignorance une grande partie de l’équipe (surtout les producteurs et les acteurs). Sa filmographie varie au gré de ses amours. Grand amoureux devant l’éternel il affectionne les univers Sadien comme le genre très singulier des WIP (non pas work in progress mais women in prison !). 13 Jean Rollin, tout comme Franco il est un des piliers d’Eurociné, boite de production surtout connue pour ses budgets ridicules. Notre français œuvre dans le fantastique et l’érotisme et affectionne particulièrement les jolis vampires sous cape. Il en mettra même en scène dans la carrière qu’il mène en parallèle dans des films à caractère pornographique sous le pseudonyme très à propos de Michel Gentil ! 14 Georges Méliès, pionnier français du cinéma et inventeur de nombreux procédés cinématographiques de trucage. Il introduit le merveilleux et le fantastique au cinéma, créant un univers poétique et magique. Ses films plus que centenaires provoquent toujours chez le spectateur un choc esthétique et émotionnel. 15 Simone de Beauvoir, philosophe, athée, féministe et romancière, son œuvre engagée est capitale dans l’évolution du rôle de la femme dans notre société. Non, elle n’était pas uniquement la compagne de Sartre.

Mademoiselle Kat, contro il fantasma

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Le Parvis, Ibos

Entretien avec Magali Gentet

Fondé en 1973 dans le centre commercial d’Ibos, le Parvis est un des plus vieux centre d’art contemporain de France. Il se singularise des autres centres d’art français par sa configuration atypique. Suite à sa réouverture après une année de travaux, l’espace d’exposition a été totalement repensé et rénové. Magali Gentet, responsable déléguée du lieu, nous a accordé un entretien. Pour nous, elle revient sur les actions menées par le Parvis et les nouveaux enjeux de cette réouverture.

Multiprise : En quoi le choix de s'implanter dans un centre commercial peut-il favoriser le dialogue avec le public ? Magali Gentet : Cette situation est unique en France. Le Parvis a été conçu dès l'origine comme un lieu comportant un espace d'exposition, un théâtre et un cinéma s'inscrivant dans un supermarché. C'est à la base une démarche privée, celle du fondateur du Parvis qui avait une troupe de théâtre dans les années 1960 et aucun lieu fixe pour se produire. L'initiative d'installer le Parvis au cœur du supermarché souligne cette volonté d'inscrire la culture dans le champ des pratiques populaires et de la démocratiser. Le vrai intérêt du lieu c'est cette proximité avec les flux de population. Ce sont des milliers de personnes qui passent ici chaque jour, venant de milieux extrêmement différents. On se rend bien compte que ce centre commercial est un vrai lieu de rencontre ; beaucoup de personnes viennent ici pour se retrouver, prendre un café, profiter de cette vue imprenable sur 32

les Pyrénées... On est dans un flux des convergences qui sont sociales, économiques et culturelles. Et l’intérêt pour nous est de se mettre sur le trajet de ces pratiques-là. C’est aussi ce qui intéresse les artistes : ce rapport au monde réel, et la possibilité pour eux d’être directement confrontés au public. M : Quelles relations entretenez vous avec les autres centres d’arts de Midi-Pyrénées ou avec les structures locales ? MG : Nous souhaitons bien sûr développer des collaborations. Même si les expositions restent compliquées à mettre en place, nous travaillons par exemple sur des coéditions. Des rencontres professionnelles se créent également entre les différentes structures. Localement, le Parvis s’investit dans des actions horsles-murs sur le département. La dernière, achevée mi-janvier, s’est déroulée au Haras national de Tarbes. L’exposition Au-delà du miroir réunissait plusieurs artistes autour de la thématique


du conte et des croyances. Au sein de cette ancienne demeure bourgeoise aux allures de château, l’idée était de ramener des natures fantastiques à l’intérieur comme La meute, des loups en poussière créées par Lionel Sabatté ou bien l’installation de Pierre Malphettes Un arbre, un rocher, une souche qui propose une imitation artificielle de la nature. Dans le cadre du centenaire de la première guerre mondiale, nous travaillerons également en collaboration avec le musée international des Hussards à Tarbes. M : En parallèle à votre programmation, proposez-vous des résidences d'artistes ? MG : Nous n'avons pas de lieu de résidence à proprement parler faute d'un espace de travail suffisamment qualifié pour qu'un artiste puisse rester plusieurs mois, et nous n'avons pas non plus d'espace de vie. Nous faisons donc en sorte de trouver d'autres lieux pour ces résidences. L'année dernière nous avons accueilli Laurent Lacotte (membre de Studio 21bis) durant neuf mois qui été invité à réaliser des projets avec les habitants où dans l'espace public. C'est aussi en 2013 qu'ont été accueillis Évariste Richet et Laurent Tixador au pic du midi, le plus haut observatoire astronomique d'Europe. Cette année, nous avons fait une résidence de Pierre Malphettes dans un lycée technique, qui était lié au milieu du design industriel et à l'aéronautique. L'idée était de créer une œuvre avec les lycéens sur une courte période. L'enjeu est aussi de s'immerger dans un espace très particulier, c'est pour cela que l'on choisit des lieux atypiques, où en tout cas où il y a des compétences et des univers auxquels on ne peut pas avoir forcément accès. C'est le cas avec les lycées techniques : ils ont des ateliers énormes, ils sont liés à des métiers réels, et ont des savoir-faire qui sont difficiles à trouver. J'essaie de mettre en lien un artiste avec un univers ; le travail de Pierre Malphettes est véritablement lié à la machine, à la mécanique, à l'univers industriel et ce lycée paraissait tout à fait adapté. Cela permet pour l'artiste de tester des hypothèses de travail mais ça permet également aux étudiants d'aller plus loin que ce qu’ils savent faire habituellement : c’est à dire de développer un imaginaire et ça c’est assez intéressant.

Flore intestinale de Michel Blazy, un cuisinier a proposé une intervention en dialogue avec l’exposition. Par rapport à l’exposition From here to ear, il y a énormément de choses à faire sur les liens entre arts plastiques et son. Nous allons inviter un artiste qui travaille aussi avec l’art contemporain et le son à faire des ateliers avec des enfants. Le but sera d’apprendre à exploiter le potentiel sonore et acoustique des objets du quotidien. Nous allons aussi probablement faire appel à un musicien de musique improvisée pour qu’il réagisse en direct dans l’espace d’exposition. M : Après l'exposition de Céleste Boursier-Mougenot*, parleznous des autres temps forts de l'année 2014 MG : Durant l'été nous exposerons les travaux d'étudiants de l'école des Beaux-Arts de Tarbes. Puis à l'automne le dessinateur Jérôme Zonder réalisera une exposition in situ. Il s'intéresse à l'univers de l'enfance et de l'adolescence mais avec une vision cataclysmique. Pour lui ce n'est pas un monde joyeux et serein, tout au contraire, c'est le départ des pulsions les plus morbides, les plus macabres et les plus autodestructrices. Nous sommes allés ensemble faire des repérages à Lourdes ; ce lieu de pèlerinage l'a beaucoup inspiré, il a été amusé et y a aussi perçu des images très fortes. Je pense qu'il travaillera autour de cette question. Cette exposition, fruit une collaboration avec le lieu unique à Nantes, donnera aussi lieu à une coédition.

*Lire Les Mandarins célestes, de Boursier-Mougenot, en double page suivante

Michel blazy Vue de l’exposition Flore intestinale présentée du 17 janvier au 15 mars 2014

M : Chaque exposition est une occasion de fixer des rendezvous avec le public. Quelles actions culturelles sont proposées? MG : Nous avons instauré pour les scolaires des ateliers de visites ; pour les familles et les jeunes un café artistique en présence d’un artiste plasticien ; et pour les adultes des conférences et des visites à deux voix entre un commissaire d’exposition et un invité appartenant à un autre domaine. Dans le cas de l’exposition 33


Les Mandarins célestes, de Boursier-Mougenot

À Ibos, le Parvis présente en partenariat avec les Abattoirs de Toulouse, une réédition de l'œuvre From here to ear de Céleste Boursier-Mougenot. D'abord musicien, cet artiste a ensuite choisi d'évoluer dans le champ de l'art contemporain en questionnant les rapports entre son et objet à travers le prisme de la technologie. Chacune de ses installations est à considérer en tant qu'œuvre unique, vivante et éphémère, déterminée par l'espace d'exposition. Durant deux mois, le centre d'art du Parvis va se transformer en une volière géante puisque soixante-dix mandarins diamant vont investir la salle d'exposition. Devenues perchoirs, des guitares électriques amplifiées vont être disposées dans la pièce. Évoluant dans cet environnement, les oiseaux vont par leurs actions et leurs mouvements générer une musicalité toute particulière. Invité à entrer au sein de cet espace, le public côtoiera ces oiseaux musiciens et participera en direct à la création d’une pièce musicale inédite.

« Like a bird on the wire, Like a drunk in a midnight choir I have tried in my way to be free. » Leonard Cohen, Bird on the Wire, 1968

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Dispositif / Aléatoire Après que l’artiste a déterminé une situation de départ, l’œuvre se fait en quelque sorte toute seule. Les oiseaux créent une composition sonore inouïe qui se fait en fonction des mouvements de leur vol mais aussi en fonction du passage des spectateurs quand ils occupent l’espace de la volière. Dans sa rencontre avec l’œuvre, le spectateur ne se contente pas d’éprouver ou d’interpréter, il est invité à devenir « inter-acteur ». Lorsqu’il circule dans les allées, il peut, par des stratagèmes divers ou involontairement impulser les mouvements des oiseaux en faisant varier leur rythme, leur vitesse, leur déplacement, leur permettant ainsi de composer une musique aléatoire résultant de ces rencontres imprévisibles entre spectateurs et oiseaux, oiseaux et guitares, guitares et technologies du son.


Animal / Machine Si on se décentre de l’installation elle-même, l'image d'une rencontre s'impose à nos yeux. L'artiste donne vie à un espace où peuvent cohabiter des éléments rarement juxtaposés : les oiseaux et les instruments de musique. L'interaction entre le son dit naturel -le chant des oiseaux, le bruit des ailes- et le son technologique -la guitare électrique amplifiéeplonge le public auditeur et spectateur dans un nouvel environnement, l’incitant à prendre part à ce jeu tant esthétique que musical. Musique / Bruit Expérience d'écoute hors norme, cette œuvre témoigne du fait qu'au-delà des apparences, une cacophonie déstructurée peut se révéler une authentique œuvre musicale contemporaine. La valeur pédagogique de l'œuvre est évidente tant elle cherche à plonger le spectateur dans une écoute active, incitant à discerner les différents plans sonores qui cohabitent dans notre environnement quotidien. Ce dispositif original offre un cadre propice à une expérience d'écoute et à une réflexion sur le processus de création musical aléatoire. Julie Biesuz

Ci-dessus et page précédente : Céleste Boursier-Mougenot, From here to ear (v.15)(détails), 2011, technique mixte, dimensions variables. 8 guitares électriques Gibson Les Paul sur supports chromés, 4 basses électriques Gibson SG sur supports chromés, 8 amplificateurs Fender Mustang III, 4 amplificateurs Roland CB-60XL,7 cymbales Paiste, 3 pieds de micro chromés, 75 pinsons d’Australie mandarins diamant, nids, graines, sol en MDF, sable, herbes, eau. Vue d’installation, Hangar Bicocca, Milan, Italie. Photo : Agostino Osio. © Céleste Boursier-Mougenot. Courtesy galerie Xippas 35




Charley Case, Diplomondus, 2014. Douze lithographies originales de Format 28 x 38 cm sur papier Rives BFK 280 g Imprimeur et ĂŠditeur Bruno Robbe. Avec le soutien de MAlbodium Museum

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Soia ! Il aura fallu attendre dix ans pour lire en français les mémoires du cinéaste italien Dino Risi, disparu en 2008. Des classiques comme Pauvres mais beaux (1956), Le Fanfaron (1962), Au nom du peuple italien (1971), le savoureux film à sketches Les Monstres (1963), ou encore le sombre Parfum de femme (1975) jalonnent une vie passée à faire plus de cinquante films, autant dire l’excellence de la comédie populaire des années 50/70, dont la simple évocation d’acteurs comme Vittorio Gassman, Ugo Tognazzi et Alberto Sordi suffit à nous plonger dans les plus beaux moments du cinéma italien. Ce recueil de souvenirs au ton désinvolte se construit par de courts récits aux titres évocateurs : Mon premier orgasme et la mort de papa, Alida Valli et le cigare de Mario Soldati, Le néoréalisme et le frigo des Broggi, Le soleil, les étoiles, la mer, le vin, les femmes, tout cela n’existe pas, et ça, ce n’est pas possible…, autant de contes que l’on pourrait voir figurer dans ses films à sketches, genre qu’il affectionnait tant. Risi fixe des instantanés de vie de façon désordonnée, en fonction des sursauts de sa mémoire, et nous plonge dans ses rêves, tout aussi foisonnants que ses souvenirs. Des aphorismes et extraits de son journal ponctuent également ces chroniques italiennes : « Un jour, Tognazzi me dit : « la différence entre nous et les acteurs américains, c’est qu’eux, ils cassent les œufs d’une seule main. ». Classes populaires et riches bourgeois, destin familial et évocation de l’Italie fasciste, le livre fourmille d’anecdotes loin d’une autobiographie complaisante et hagiographique. Les femmes tiennent évidemment une place importante dans Mes Monstres, vedettes (Anna Magnani, Sophia Loren, Alida Valli, Romy Schneider…) ou simple beauté sirotant une limonade au Caffé Ranaldi de Milan, sa ville natale. À propos d’Anita Ekberg, Risi nous raconte une virée avec la célèbre actrice blonde à bord de son bateau, elle conduisant à toute berzingue complètement nue, fière d’affoler un équipage de marins suédois la scrutant du pont de leur navire (« Pauvres petits, eux contents me voir toute nue ! »), pour ensuite se faire humilier par son mari de l’époque qui rafle toute l’argenterie de sa villa dans un grand sac avant de disparaître après l’avoir embrassée sur les deux joues. La « morale » de cette histoire implique Risi, l’événement signant l’arrêt de leur « histoire » : après le départ du mari américain, Anita Ekberg, les larmes aux yeux, fixe le cinéaste et lui lance « Toi est pas héros ». Après avoir hésité Risi lui répond « non ». Si paradoxalement le livre traite peu de sa carrière cinématographique, tout son cinéma est là, dans sa force et sa vitalité tragicomiques, se composant comme un bréviaire dispendieux mais vital ; le cœur de la vie, raconté par ce fils de médecin de la Scala de Milan que rien ne prédestinait au cinéma (il aurait dû devenir médecin lui-même), et qui filmera avec génie tout au long de son œuvre « des histoires sérieuses, mais avec une certaine ironie ». Une ironie sans complaisance face à la réalité, cachant un pessimisme profond sous un masque de fanfaron. DM Dino Risi, Mes Monstres, mémoires. Éditions de Fallois /l’Âge d’homme, 2014. 252 pages

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Exposition Vertigo

La Fabrique, université de Toulouse le Mirail et musée Henri Martin (Cahors). Jusqu’au 24 avril Il était impossible dans ce numéro qui fait la part belle aux premières expériences de ne pas se tourner vers les nouveaux diffuseurs de l’art qui trouvent au sein de multiples formations les contours d’un futur métier : Commissaire d’exposition, curateur pour les plus anglophones… Car c’est vrai, il est toujours important de faire ses premières armes quand on se destine à travailler dans le monde de l’art. La première exposition est un moment dont on se souviendra pendant longtemps. Choix des œuvres, invitation d’artistes sont autant de moments qui amènent à créer une histoire onirique et sensible, unique et inoubliable. C’est ainsi que les étudiants du master « Métiers de l’art » (Cahors - Université Toulouse II Le Mirail), à partir © Nicolas Jargić, Pass out, Installation magique, 436 x 568 cm, Velours noir des collections des Abattoirs / FRAC Midi-Pyrénées en partenariat avec le CIAM (Centre d’Initiatives Artistiques du Mirail) et le musée de Cahors Henri-Martin nous proposent sur ces deux lieux une réflexion sur différentes notions concernant « la frontière » sous le titre générique de Vertigo. L’exercice semble facile mais il n’est pas aussi évident de sous-tendre un propos, une idée, un désir et de le proposer au regard d’autrui et donc au regard de la critique et du public. Nous vous proposons donc de parcourir ces deux expositions qui mêlent œuvres d’une collection et productions de deux artistes invités au CIAM, Nicolas Jargic et Laurent Valéra. Les deux plasticiens se partagent à Toulouse l’espace du « Tube », vaste lieu d’une quarantaine de mètres de long - dans l’idée commune de plonger le lieu dans la pénombre. Frontières et vertige sont alors abordés de manière très différente. À vous de voir si ce vertige vous conduit vers le syndrome que Stendhal décrivit à sa sortie de l’église Santa Croce à Florence. Nicolas Jargić interroge notre perception du réel et crée des installations perturbant l’œil et l’esprit au travers d’œuvres inspirées de la prestidigitation et de sa capacité à produire un « effet de réel ». Il joue avec la frontière entre réalité et illusion, parfois difficile à appréhender, afin de créer un état de trouble, « un mouvement cérébral perpétuel vibrant » qu’il rapproche de la sensation de vertige. Avec son œuvre Pass out, rideau de velours noir occultant, il souhaite exprimer l’idée du lieu d’exposition comme dispositif illusionniste. Le rideau créé une « black box » qui soulève la question de la distanciation : le velours noir absorbe la lumière, fait disparaître le réel et nous plonge dans un univers d’illusions. Cela nous renvoie aux débuts du cinéma lorsque le velours était utilisé pour réaliser des effets spéciaux, à la manière de Georges Méliès. Ce matériau, cher à l’artiste, acquiert alors un pouvoir « magique ». Ici, la mise en scène se trouve devant le rideau fermé sur le monde réel : la situation est inversée. Y’a-t-il alors une frontière entre art et illusion ? Les œuvres de Laurent Valera sont marquées par des jeux optiques, des jeux de mots, de formes et de lumières. L’artiste a choisi de matérialiser le parcours chaotique des immigrés, guidés par l’espoir d’atteindre une vie meilleure : la traversée de la Méditerranée, les disparus en mer, les rescapés et enfin, l’arrivée sur une plage, symbole de libération. Laurent développe une réflexion sur le reflet en utilisant l’eau et le miroir. Il place des gobelets remplis d’eau au sol suivant la forme d’un mot ou d’un territoire afin d’en refléter sur le mur, par anamorphose, d’autres mots ou images. Ici, l’Afrique se transforme en Europe. Le visiteur est donc invité à suivre ce cheminement et joue un rôle important : son passage anime les œuvres, les fait vibrer et en change donc parfois l’aspect. Empreintes de poésie, ses œuvres font appel aux souvenirs, éveillent notre sensibilité, notre imagination ainsi que nos convictions humaines et géopolitiques. Mathilde Formosa et Sara Lamothe

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IPN collectif-ipn.net Lieu commun www.lieu-commun.fr Fondation d’Entreprise Espace Écureuil www.caisseepargne-art-contemporain.fr Nicolas Jaoul nicolasjaoul.com ETPA www.etpa.com/index.html Collectif Les machines http://editionslesmachines.blogspot.com Collectif des métiers de l’édition www.editionscmde.org Emmanuel Moralès emmanuelMorales.net/

Pavillon Blanc www.pavillonblanc-colomiers.fr les Abattoirs www.lesabattoirs.org/frac La cinémathèque de Toulouse www.lacinemathequedetoulouse.com Mademoiselle Kat www.mademoisellekat.com Centre de l’affiche www.centreaffiche.toulouse.fr Le Parvis www.parvis.net Amélie Marchandot legrenierdamelie.blogspot.fr Charley Case www.charleycase.be

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