La marche perceptive sur l’avenue Habib Bourguiba: Le pavillon du Lac

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É L ABOREP AR NABI L AZAMMAL I

DI RE CTRI CEDEMÉ MOI RE L E I L AGADDE S 2018/ 2019


MINISTÈRE DE L’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR ET DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE

ÉCOLE NATIONALE D’ARCHITECTURE ET D’URBANISME DE TUNIS UNIVERSITÉ DE CARTHAGE

MÉMOIRE D’ARCHITECTURE

La marche perceptive sur l’avenue Habib Bourguiba:

Le pavillon du Lac

Nabila ZAMMALI

DIRECTRICE DE MEMOIRE

Leila GADDES

JUIN 2019

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Remerciements

J’aimerais profiter de cette occasion pour remercier ceux qui étaient présents le long de mon parcours à l’école nationale d’architecture et d’urbanisme. Je tiens à remercier ma directrice de mémoire Madame Leila Gaddes pour son encadrement, ses conseils précieux et surtout pour sa patience. Je me considère chanceuse d’avoir trouvé une personne qui a consacré du temps et de l’énergie pour me guider dans l’élaboration de ce travail. Je tiens à remercier mes parents pour leur amour, encouragement, financement et aussi pour leur patience. Je remercie mon père d’être toujours fier de moi malgré mes imperfections, ma mère qui a toujours cru en moi et qui m’a appris à marcher sur les chemins les difficiles et enfin je remercie ma tante, ma deuxième mère pour son amour infini. Je remercie ma sœur, ma future avocate. Je remercie mon frère; the person I look up to. Sans oublier les personnes les plus importantes, je remercie mes ami(e)s; pour leur support et surtout leur patience. Last but not least, je remercie mon A. Je te dédie tout ce que je fais car tu as fait de moi une version meilleure de moi même.

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Table des matières Remerciements Préface Introduction Problématique

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Méthodologie et objectifs

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Chapitre I : La marche

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1-1- La marche et le bien-être 1-2- La marche et l’architecture 1-3- La marche urbaine et l’aménagement urbain Projet référentiel : La Rambla del Mar

1-4- La marche en ville 1-5- La marche expérientielle A-La vue / perception visuelle B-Les dimensions tactiles et kinesthésiques /

5 5 8

15 17 18 19 22 23 23 24

perception haptique C-L’odorat / perception olfactive

Synthèse

24 25 26

Chapitre II : La marchabilité

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D-L’ouïe / perception sonore

2-1-Le flâneur et le piéton A- Le flâneur

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B- Le passant

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2-2-La théorie de la marchabilité de Jeff Speck

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Synthèse partielle

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Un projet de marchabilité : Atlanta BeltLine

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2-3-L’avenue Habib Bourguiba et la marchabilité

Synthèse

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A- Aperçu historique

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B-La marchabilité

41 43

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Chapitre III : Le parcours 3-1- Le parcours architectural 3-2- Le parcours urbain 3-3- Le parcours imaginaire Intervention sur un parcours : l’installation Clara-Clara au jardin des Tuileries

45 46 47 48 49 53

Synthèse Chapitre IV : Le projet d’architecture 4-1- Contexte et analyse A- Lecture du parcours Médina, l’avenue Habib

54 55 55

Bourguiba et les berges du lac B- Présentation du site

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C- Analyse des tronçons A, B et C

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C-1- Tronçon A : de Bab Bhar jusqu’à la Place 14 Janvier C-2- Tronçon B : de la place 14 Janvier jusqu’à la station TGM C-3- Tronçon C : de la station TGM jusqu’aux rives du lac

4-2- Processus conceptuel - Intentions et objectifs du projet - Séquence B1 : au niveau de la place 14 Janvier - Séquence B2 : croisement entre l’avenue Habib Bourguiba et l’avenue de la République - Séquence B3 : de l’échangeur A1 jusqu’à la station TGM

- Séquence C : le secteur A du PAU projeté du Lac

62 64 66 68 68 70 71 72 74

Synthèse : Concepts adoptés pour l’émergence du projet

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Conclusion générale Bibliographie Table des figures Annexes

77 78 80 83

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Préface

Figure 1 : Scène du film Stalker d’Andrei Tarkovski

Le projet du mémoire d’architecture est un moment de transition entre la fin du parcours académique et le commencement du parcours professionnel de l’architecte. Pour moi, le projet du mémoire est un projet personnel qui reflète ma personnalité, mes choix et mes intérêts. J’ai toujours été impressionnée par la relation qui existe entre le premier art : l’architecture, et le septième art : le cinéma. Il y a ce dialogue qui s’établit entre ces deux arts. D’ailleurs, j’ai beaucoup appris sur l’architecture en regardant des films. En effet, c’est en regardant le film Stalker* d’Andrei Tarkovski** que cette aventure du projet de mémoire a commencé. En regardant le film, j’ai remarqué qu’il y a quelque chose de particulier dans le déroulement des séquences ; c’est le mouvement du corps des personnages, leur manière de se déplacer dans le territoire de « la zone ».

160 minutes plus tard, ce film m’a mené vers l’essai « Walkscapes, la marche comme une pratique esthétique » de Francesco Careri. Architecte et professeur italien, Careri a lancé un observatoire nomade appelé « Stalker » en hommage au film. Dans leur manifeste, les « stalkers » déclarent qu’il y a« Une façon particulière de marcher lorsque l’on perd tous ses repères » [1] ; tout comme la marche des personnages du film dans la « zone ». D’un film à un essai, j’ai commencé la marche à l’avenue Habib Bourguiba ; mon endroit préféré de Tunis. À travers ce travail, je cherche à concevoir un projet qui invite les marcheurs, tout comme « la chambre » d’Andrei Tarkovski.

*Stalker : (Сталкер) est un film ouest-germano-soviétique réalisé par Andreï Tarkovski, sorti en 1979. Il fait partie des meilleurs films jamais réalisés. ** Andrei Tarkovski : réalisateur sovéitique (1932-1986) 1- Collectif Stalker, Le manifeste Stalker, 2011

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Référence 1 : «Walkscapes, Walking as an aesthetic practice» qui se traduit «Paysages de la marche, la marche comme une pratique esthétique» est l’œuvre culte des nomades; qu’ils soient architectes ou urbanistes. L’œuvre de Francesco Careri a été publiée pour la première fois en 2002. La marche selon Careri est plus profonde que la promenade, elle est génératrice de l’espace et de l’architecture.

Figure 2 : Couverture de Walkscapes

À travers la marche, on découvre et redécouvre la ville, on expérimente avec l’espace, on s’ouvre sur les possibilités artistiques et esthétiques que nous offrent la marche.

Référence 2:

Figure 3 : Couverture de Walkable City

«Walkable city, How downtown can save America, one step at a time» est un essai plutôt politique et valable à l’échelle internationale. Jeff Speck, urbaniste américain, a publié son essai en 2012. à travers des exemples de son expérience personnelle et des expériences des villes américaines et européennes, Speck présente un texte qui est plutôt un «guideline» sur l’aménagement urbain des villes. «Les villes marchables» sont des villes où on peut marcher, se promener, se déplacer à son aise. Les 10 étapes de la théorie de marchabilité peuvent être élaborées dans toutes les villes du monde.

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Introduction « Ambulator nascitur, non fit »[1*] Marcher est un art ; c’est l’art de la découverte, de l’expérience, de l’existence et de la vie. En marchant, la ville se métamorphose, les séquences se succèdent et simultanément, la perception du marcheur s’alternent. En marchant, on devient un être conscient, qui appréhende le paysage, qui appartient au territoire; un être qui s’approprie la ville. Nous ne parcourons pas un chemin, nous créons notre chemin en marchant . Dans une éloge de la marche, le poète espagnol Antonio Machado écrit «le chemin c’est les traces de tes pas». à travers ces pas, le théâtre de la ville est joué et le marcheur devient le spectateur en mouvement. Soudain, la pièce s’arrête ; interrompue par une voiture, une deuxième, bref, un flux de véhicules roulant à une vitesse qu’on ne peut plus rêver, flâner. On s’arrête. Le fil de la flânerie est perdu. Aujourd’hui, marcher est devenu l’exception à la règle ; la règle de conduire. Le paysage de la ville est devenu un parking en plein air. Dans cet environnement désormais axé sur les déplacements en voiture, il n’y a plus de beaucoup de place pour le marcheur. Avec le développement des villes, la marche a perdu partiellement sa valeur. Historiquement, elle a changé de sens selon les besoins humains jusqu’à la renaissance où elle est devenue une pratique esthétique. La marche occupe une place essentielle dans l’histoire des civilisations.

Par le biais de ce projet, nous cherchons la résurrection de la pratique de la marche. En éveillant le corps et les sens du piéton dans son parcours quotidien et du flâneur ivre du paysage, la marche fait de la ville un espace de loisir, de découverte et d’apprentissage. Le choix d’éveiller la pratique de la marche dans le quotidien des Tunisiens découle du fait que l’avenue Habib Bourguiba représente la colonne vertébrale du centre de Tunis jusqu’au lac. Cette avenue est l’espace urbain majeur de Tunis que les marcheurs traversent quotidiennement. Mais leurs parcours s’interrompt brusquement. Cette discontinuité est due à l’absence de moments emblématiques au delà de la place du 14 Janvier. Le but de ce projet est d’abord de prolonger la promenade de l’avenue Habib Bourguiba vers le lac. Ensuite, on cherche à créer un lien entre cette avenue et le lac de Tunis; ces friches restent jusqu’à nos jours abandonnées. À travers des micros séjours qui ponctueront le prolongement de l’avenue Habib Bourguiba, le marcheur se trouvera dans un pavillon situé entre l’extension du terre plein de cette avenue et les rives du lac. Ainsi, il est invité à parcourir l’architecture pour se trouver sur l’esplanade des berges du lac.

1- Henry David Thoreau, De la Marche, Ed. Mille et une nuit, 2003 * «On nait marcheur, on ne le devient pas»

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Problématique En marchant dans la ville, le piéton s’immerge dans l’environnement architectural et urbain. La marche en ville est une expérience de (re)découverte qui a été bouleversée par l’avènement des moyens de transports. En effet, on a enfermé la pratique de la marche dans les trajets habituels, routiniers. Aujourd’hui, les villes sont transformées par la diffusion de l’usage de la voiture principalement et les moyens de transports publics. Ainsi, la rue est devenue un passage d’un point à un autre, où la marche à pieds n’a plus de place. Avec les Dadaïstes, les Lettristes et finalement les Situationnistes, la marche a été redécouverte en tant que pratique esthétique afin de redécouvrir l’inconscient de la ville et réapproprier l’espace urbain par l’imaginaire. Dans son ouvrage Walkscapes, l’architecte italien FRANCESCO CARERI souligne que «La construction de situations était donc la manière la plus directe de réaliser dans la ville de nouveaux comportements et d’expérimenter dans la réalité urbaine les moments de la vie qu’elle pourrait être dans une société plus libre».[2] En parcourant la ville à pieds, le marcheur crée un dialogue avec l’architecture, il redécouvre la ville et ses mutations. En traversant la médina de Tunis, le marcheur découvre au fur et à mesure de son chemin dans des séquences, face à des évènements créés par l’architecture qui l’entourent.

D’ailleurs, Le Corbusier souligne que «L’architecture arabe nous donne un enseignement précieux. Elle s’apprécie à la marche, avec le pied ; c’est en marchant, en se déplaçant que l’on voit se développer les ordonnances de l’architecture.»[3] En effet, la Médina qui est développée à l’échelle de l’Homme présente un tissu favorable à la marche, à la déambulation, et à la découverte. En arrivant à la place de la Victoire, le marcheur se trouve au départ de l’avenue Habib Bourguiba ornementée par des édifices coloniaux. Cette flânerie tout au long de l’axe de l’avenue est construite par des situations architecturales, urbaines et sociales. Néanmoins, en arrivant à la place du 14 Janvier, le marcheur se trouve dans une situation de rupture brutale de sa flânerie. L’encombrement des voitures dû à l’intersection des deux voies principales de Tunis -avenue Habib Bourguiba et avenue Mohamed V-, l’absence d’événements urbains au delà de cette intersection engendrent cette rupture sur le parcours des marcheurs. A quinze minutes à pieds de la place du 14 Janvier se trouve le Lac de Tunis. Ce dernier reste jusqu’à nos jours délaissé et écarté du centre ville de Tunis. - Comment inviter les usagers à poursuivre leur promenade tout le long de l’avenue Habib Bourguiba jusqu’au lac? - Quels types d’intervention peuvent créer cette continuité? -

Quel

projet

pourrait

constituer

l’articulation entre la promenade de l’avenue Habib Bourguiba et les berges du lac de Tunis? 2- Francesco Careri, Walkscapes, walking as an aesthetic practice, Culicidae Press, Iowa, USA, 2017, p110 3- Le Corbusier, Jeanneret P. 1952. OEuvres Complètes, vol.2, 1929-1934. Zurich : Girsberger, p52

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Méthodologie et objectifs

Pour répondre à la problématique de ce projet de mémoire d’architecture, on a réparti le travail sur quatre chapitres. Le premier chapitre intitulé « La marche » traite l’histoire de la marche comme une pratique humaine et esthétique. On présente aussi les bienfaits de la marche sur la santé physique et mentale sur le corps humain. Ensuite, on entame le sujet de la marche urbaine et son rapport avec l’architecture. Le projet La Rambla del Mar de Barcelone est l’exemple à retenir dans l’aménagement urbain favorable à la marche. La dernière partie de ce chapitre traite la marche en ville et l’expérience de la ville à travers cette pratique qui stimule les sens du piéton. Dans le deuxième chapitre, on entame la question de la marchabilité. On distingue aussi les deux profils de piétons à considérer dans la conception du projet. À travers l’essai de Jeff Speck «Walkable city », on étudie les différentes étapes de la théorie de marchabilité. Ensuite, on prend l’exemple de l’Atlanta BeltLine qui représente une expérience audacieuse de la marchabilité. Dans la fin du chapitre, on étudie la marchabilité dans l’avenue Habib Bourguiba. Le troisième chapitre est consacré au thème du parcours. On distingue le parcours architectural, le parcours urbain et le parcours imaginaire. On prend l’exemple de l’installation Clara-Clara de Richard Serra qui offre un nouveau parcours aux jardins des Tuileries à Paris. Le quatrième chapitre concerne l’analyse du site et la conception du projet d’architecture. Dans l’analyse du site, on divise l’avenue Habib Bourguiba en trois tronçons où on étudie les moments urbains qui sont propices à la marche sur cet axe majeure de la ville de Tunis. Ensuite, le processus conceptuel sera réparti sur des séquences qui invitent le piéton à marcher au-delà de la place 14 Janvier vers le Lac de Tunis.

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Chapitre I : La marche ÂŤ Les marches sont comme les nuages elles vont et viennent Âť

Hamish Fulton

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1-La marche C’est avec la civilisation égyptienne que la symbolique de l’errance s’est manifestée. Le ka (figure 4) est en effet le symbole de l’errance éternelle « un esprit divin symbolisant le mouvement, la vie, l’énergie ».[5] Mais, cette pratique humaine a perdu sa valeur graduellement jusqu’à sa redécouverte avec les Dadaïstes aux premières décennies du XX siècle. Les excursions et les déambulations des Dadaïstes (figure 5) est une forme d’anti-art qualifiant la marche comme une pratique esthétique.

Figure 4: Symbole du Ka

Marcher est la première action de l’être humain depuis le début de son histoire sur terre. D’ailleurs, l’une des premières évidences de son existence sont des empreintes de pas en Tanzanie.[4] Dans son ouvrage, La marche comme une pratique esthétique, Francesco Careri retrace l’origine de la marche jusqu’à l’existence du premier marcheur qu’a connu l’humanité; Abel, le nomade. Les civilisations antiques ont accordé une grande importance l’errance, en dédiant des constructions symboliques à l’errance, à la marche continue et infinie.

Les visites des endroits quotidiens et abandonnés est une manière de redécouvrir ces espaces de la ville, et donc une manière de redécouvrir la ville mais sans rien faire. Cette approche nihiliste est «une forme d’art qui s’inscrit directement dans l’espace et le temps réel et non sur des supports matériels».[6] Autrement dit, il s’agit de s’approprier l’espace en le parcourant sans le changer matériellement.

Figure 5: Affiche excursion Dada 4-Jean GUILAINE, La préhistoire d’un continent à l’autre, Librairie Larousse, Paris, 1989 5-Francesco Careri, Walkscapes, walking as an aesthetic practice, Culicidae Press, Iowa, USA, 2017, p 57 6-Ibid, P68

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La déambulation dans l’espace se concrétise par l’Internationale lettriste; avec ce dernier la dérive remplace la déambulation et donnant naissance à la «psychogéographie» définie comme « «l’étude des effets précis du milieu géographique, consciemment aménagé ou non, agissant sur le comportement affectif des individus».[7] Les cartes psychogéographiques (figure 6) délimitent les espaces vides et flottants à parcourir afin de créer des nouvelles situations. Dressées par l’imaginaire mental, ces cartes représentent la réappropriation de l’espace urbain. L’exploration de la marche en tant que médium pour les artistes continue à s’approfondir durant le XX siècle. Avec le Land Art, les artistes ont essayé de découvrir la marche comme l’«acte symbolisant la transformation du territoire […] sans laisser des traces permanentes ».[8] Les œuvres de Hamish Fulton (figure 8) et de Richard Long (figure 7) sont fondamentales dans la pratique esthétique de la marche. Fulton un artiste marcheur considère le corps comme « un instrument de perception » alors que pour Long, le corps est un outil de création.

1921 La première excursion du mouvement Dada à l’église Saint-Julien-le-Pauvre

1924 Le début de la déambulation surréaliste. Ce voyage est la matérialisation du poème «lâchez tout» de Breton

1957 La dérive lettriste : l’apparition des cartes psychogéographiques et l’apparition de la théorie de la Dérive

1967 Le «Land Art» et la marche comme un outil de conception des œuvres

7-Guy Debord, «Introduction à une critique de la géographie urbaine» in Les lèvres nues, n°6, Bruxelles, 1955. 8-Francesco Careri, Walkscapes, walking as an aesthetic practice, Culicidae Press, Iowa, USA, 2017

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Cette carte créée par Guy Debord en 1957 représentent les déplacements du dériveur guidé par l’action du milieu géographique sur son « affectivité », aboutissant à une reconstitution psychogéographique de l’espace urbain. (figure 6) Figure 6 : The Naked City, 1957

Sculpture éphémère du mouvement «Land Art» de Richard Long. Les sculptures paysagères (figure 7) de Richard Long qui utilise la marche à pieds changent temporairement le paysage naturel. Pour lui ce sont «des travaux de passages [...] qui vont disparaitre» [9] Figure 7 : Walking a line in Peru, 1972

Les œuvres de Fulton se basent sur la marche où ce mouvement du corps permet de percevoir l’espace et l’environnement. Son œuvre est la marche elle même . Entre 2009 et 2010, Fulton a réalisé trois expositions pour le musée britannique Turner Contemporary dans le cadre de l’ouverture de leur nouvelle galerie. (figure 8)

Figure 8 : Margate Marine Pool, 2010

9- Richard LONG, conférence de Presse au CAPC le Vendredi 19 septembre 2014

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La marche est devenue donc un médium, un outil créateur pour les artistes jusqu’à devenir un outil cinématographique pour plusieurs réalisateur. Les personnages de Gus Van Sant principalement dans Gerry (fig 9), Elephant (fig 10), et Last Day (fig 11) marchent continuellement créant des parcours séquentiels. Ainsi, la déambulation des personnages devient un outil narratif. Plusieurs réalisateurs ont eu recours à raconter des histoires à travers des scènes de marche. Ces dernières vont parfois au-delà du simple fait de raconter une histoire d’un personnage pour informer le spectateur de l’environnement naturel ou architectural tel que dans La Haine de Kassovitz où la déambulation de ses trois personnages ressemble à un parcours de découverte du paysage architectural de Paris et ses banlieues (fig 12). La marche est omniprésente dans l’histoire de l’humanité; dans les mythologies, dans l’art et dans le cinéma. Les artistes du XX siècle lui ont donné une valeur esthétique et révélatrice des espaces oubliés. Néanmoins, en architecture, la marche reste inexplorée en tant que médium de conception et de design. Pour Francesco Careri, elle est considérée «comme un outil critique, comme une manière obvie de regarder le paysage et comme une forme d’émergence d’un certain type d’art et d’architecture ».[10]

Figure 9 : Gerry, Gus Van Sant, 2002

Figure 10: Elephant, Gus Van Sant, 2003

Figure 11: Last Days, Gus Van Sant, 2005

Figure 12: La haine, Kassovitz, 1995 10-Francesco Careri, Walkscapes, walking as an aesthetic practice, Culicidae Press, Iowa, USA, 2017

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1-1- La marche et le bien-être Avant d’entamer notre problématique sur l’importance de la marche dans l’espace urbain et l’espace architectural, il faut, avant tout expliquer pourquoi choisir cet outil. La marche est un exercice physique accessible à tous; toutes générations et à toutes classes sociales confondues, parce que la marche ne coute rien. En outre, la sédentarité ruine la santé. L’inactivité physique favorise l’obésité, l’hypertension artérielle, les déséquilibres lipidiques et le diabète. Selon l’OMS*, la sédentarité provoque 6% de décès dans le monde, l’une des quatre causes de décès majeures. La marche peut en effet réduire le risque de certaines maladies de 20 à 50 %, telles que les maladies cardiaques, le diabète de type 2, le cancer du sein et du colon.

Selon une recherche du laboratoire nationale Lawrence Berkeley en Californie, la marche rapide réduit le risque des maladies cardiaques. Sur en période de 6 ans, les chercheurs ont observé des participants âgés entre 18 et 80 ans. Les résultats ont prouvé que le risque de maladie cardiaque était réduit de 9.3%. Le mouvement du corps en marchant sollicite non seulement les muscles des jambes mais aussi les bras et la sangle abdominale. Ceci favorise le maintient d’une bonne posture, la perte de poids et une meilleure oxygénation du corps.

Figure 13: Les bénéfices de la marche * OMS : Organisation Mondiale de la Santé

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Figure 14: L’école d’Athène, Raphael 1509-1510/ Platon et Aristote philosophaient en marchant

Cependant, les bienfaits de la marche ne sont pas uniquement physiques. La marche assure le bien être mental et psychologique. Elle minimise la dépression et l’anxiété et améliore le sommeil. Pratiquée à faible intensité, la marche permet la détente et la réduction du stress. La sécrétion de la sérotonine et des endorphines quand le corps est en mouvement permet de calmer la personne. La marche améliore la créativité et l’apprentissage. Steve Jobs, le fondateur de Apple, privilégiait les réunions en marchant. Charles Dickens marchait jusqu’à 20 kilomètres par jour. Enfin, Aristote enseignait ses étudiants en marchant. «Les seules pensées valables viennent en marchant » [11] écrivait Nietzsche.

Pour comprendre ce rapport entre la marche et l’apprentissage. Sabine Schäfer de l’Institut Max Planck de Berlin a mené une étude pour comprendre ce « phénomène ». Les participants ont passé des tests assis et en marchant à une vitesse de leur choix sur un tapis roulant ; « ils écoutaient des chiffres et indiquaient pour chaque chiffre, s’ils l’avaient déjà entendu quatre chiffres plus tôt. Dans ces conditions, les participants, quel que soit leur âge, ont commis moins d’erreurs en marchant, les enfants de neuf ans tirant le meilleur bénéfice de cet exercice, avec presque 40 pour cent d’erreurs en moins. »[11]

La marche assure donc le bien être de l’Homme. Elle le protège contre des maladies, prolonge son espérance de vie, diminue le risque de la dépression et stimule sa créativité.

Figure 15: Le mouvement du corps en marchant

11- Sébastien Bohler, «Les pensées viennent en marchant», Pour la science, Mars 2010

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1-2-La marche et l’architecture Dans sa définition basique, l’architecture est « l’art de concevoir et de bâtir un édifice»[12], ceci implique forcément le sédentarisme. La marche se définit par «l’action de marcher, un mode de locomotion propre à l’être humain»[12] ce qui implique le nomadisme. Toutefois, une relation s’établit entre ces deux actes propres à l’être humain. L’architecture modifie le paysage, et la marche tout de même modifie l’espace. Pour Careri, les Menhirs sont à l’origine du développement de l’architecture. Cette « architecture » symbolique qui fut construite par des bergers nomades de l’époque paléolithique, était « la seule action capable de modifier l’environnement, une action qui est simultanément un acte de perception et de création, de lire et d’écrire le territoire ». [13]Ainsi, ce rapport entre l’architecture et le nomadisme ou encore la marche est indéniable. Bien que la marche soit dans le cœur du développement de l’architecture, aujourd’hui, elle reste marginalisée en tant qu’outil de conception; alors qu’elle est un moyen de perception de la ville, de l’espace. En effet , flâner en ville entre les édifices, change progressivement la perception du marcheur. La lenteur du mouvement et l’union de l’âme et du corps créent une liaison entre le marcheur et l’espace. Selon Frédéric Gros «un espace que vous appréhendez par la marche, vous ne le dominez pas simplement par le regard en sortant de la voiture (une prise de vue), car

vous l’avez inscrit progressivement dans votre corps»[14]. En effet, la perception du paysage, de l’architecture change avec le mouvement du corps. D’abord, on voit l’édifice dans son environnement, et en avançant dans sa direction, on prend conscience des détails, les textures, les ouvertures, les décors et les fonctions qu’il abrite. Ce qui nous parait à distance comme une masse unique se divise progressivement jusqu’à devenir des fragments. À l’intérieur de chaque projet architectural, il existe des espaces dédiés à la marche. En effet, l’Homme se déplace d’un espace à un autre à travers ce mouvement de son corps. L’architecture offre un cadre au parcours et au mouvement de l’usager dans la ville. En analogie avec le cinéma, l’architecture est comme un film qui défile à travers notre mouvement dans les séquences qu’elle nous offre. Dans le cinéma, le réalisateur choisit les séquences. En architecture, l’usager est le maître de ses choix, il crée son propre parcours. Le rôle de l’architecte est de lui offrir plusieurs séquences pour qu’il puisse créer ce parcours séquentiel. En conclusion, la marche et l’architecture sont liées. Malgré cette relation entre ces deux pratiques, les espaces dédiés à la marche restent parfois négligés dans la conception alors que nous avons déjà établit qu’expérimenter l’architecture dépend de cette pratique.

12- Dictionnaire encyclopédique Auzou 13-Francesco Careri, Walkscapes, walking as an aesthetic practice, Culicidae Press, Iowa, USA, 2017, p57 14- Frédéric GROS, Marcher, une philosophie

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1-3-La marche urbaine et l’aménagement urbain

Figure 16: La dominance des voitures dans le design urbain

La ville est le spectacle mis en scène pour le marcheur dans son quotidien. La marche urbaine stimule les sens et provoque des émotions. Par conséquent, des interactions s’établissent entre le marcheur et son environnement. On prend conscience des autres marcheurs, des nouvelles constructions, des mobiliers urbains, des obstacles du terrain. Le marcheur est donc un être conscient de sa ville. Ainsi, La qualité de l’aménagement urbain dans la ville peut provoquer des sensations urbaines : le stress ou le bonheur. Sur ce sujet, plusieurs villes accordent une grande importance aux piétons dans leur aménagement. Depuis le XIXè siècle, la ville de Barcelone a mis le piéton au cœur de son développement urbain. Ceci est en fait le résultat d’un souci culturel propre à Barcelone. La culture du « paseo » est toujours présente dans le mode de vie du citadin Barcelonais. L’héritage de Ildefonso Cerdà réside dans son œuvre « La théorie générale de l’urbanisation » où il a réfléchit la place du piéton en proposant dans son plan d’agrandissement de la ville un équilibre entre les différents modes de déplacements.

Cet héritage influencera plus tard plusieurs architectes dans l’aménagement des villes et surtout dans l’aménagement de Barcelone. L’aménagement de cette ville en faveur des piétons est le précurseur dans l’aménagement des villes modernes. Le projet urbain «La Rambla del mar» constitue un prolongement de la déambulation vers la mer. Cet aménagement qui fait le lien entre la Rambla centrale et un nouveau secteur commercial, a mis en valeur ce front de mer autrefois délaissé.

Figure 17: Vue du ciel sur la Rambla del Mar

Aujourd’hui, la complexité du déplacement a poussé les architectes et les urbanistes à s’intéresser au piéton, actuellement oublié au profit de la voiture. Ainsi, la théorie de la marchabilité est apparue. A partir des années 2000, plusieurs villes ont commencé à réfléchir l’espace urbain en accordant une place importante aux piétons.

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Projet référentiel : La Rambla del Mar Architectes : Helio Piñón Albert Viaplana Durée des travaux : 1990 - 1994 Type de projet : Passerelle pour piétons Structure : Pont basculant / pont levant Lieu : Barcelone, Espagne Figure 18: Plan de situation

Ce projet urbain est dans le cadre de prolongement de Las Ramblas (figure 18) vers le bord de Mer et de lier la ville à un nouveau complexe de commerce et de loisir. Selon Ignasi de Lecea « Les gens se promenaient beaucoup pour se mettre en scène au XIXe siècle. «Las ramblas» correspondaient à un lieu de promenade et de mise en scène, où les attitudes étaient codées. De nos jours, la mise en scène est toujours présente, néanmoins le paseo est davantage lié à l’activité commerciale».[15] La continuité d’aménagement de Las Ramblas vers la mer offre aux usagers un espace de calme et de fraicheur. Figure 19: Matériaux utilisés

Les matériaux utilisés pour la construction de ce pont pédestre sont le bois (teck) et l’acier qui symbolisent «l’industrie navale, et les formes ondulées, la mer». Des espaces de repos et de contemplation sont conçus sur le pont mettant en valeur le bord de mer qui était autrefois délaissé. Figure 20: Vue sur le pont pédestre 15-Entretien réalisé avec Ignasi de Lecea, le 20 mars 2004.

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Rambla dell Mar Figure 21: Las Ramblas, le parcours pĂŠdestre de Barcelone

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Existant

Liaison et continuité

Nouveau projet

Figure 22 : Schéma de l’implantation du projet par rapport au site

À retenir - La Rambla del Mar est à l’origine de la liaison entre Las Ramblas et le front de mer de Barcelone et qui a permis de mettre en valeur le front de mer qui est devenu une destination des marcheurs. - L’architecte offre un espace de repos, de contemplation et de marche aux visiteurs. - Le bois et l’acier utilisés sont des matériaux symboliques par rapport au site. - Le prolongement des Las Ramblas à travers la Rambla del Mar offre une continuité de parcours vers une nouvelle expérience; traverser la mer. ==> Par analogie avec l’avenue Habib Bourguiba et le Figure 23 : Une perspective ouverte sur la ville

Lac de Tunis, la Rambla del Mar est un projet de référence pour créer un lien entre cette avenue et le lac.

Concepts : Ambiance, mouvement, espace, contemplation

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1-4- La marche en ville La marche en ville crée des rapports privilégiés entre le piéton et son environnement. D’abord, le marcheur s’engage dans l’environnement urbain avec son corps. La marche impose une immersion dans l’espace. Cette immersion implique le fait que le marcheur doit faire des choix durant son déplacement. Bien que ses itinéraires puissent être quantitatifs, autrement dit, le piéton choisit le plus court chemin, ils peuvent être aussi d’ordre qualitatif, c’està-dire que le piéton choisi son itinéraire en fonction du paysage urbain. En effet, c’est en marchant que le « citadin » crée sa carte mentale et qu’il développe une connaissance par rapport à la ville. Marcher en ville ne permet pas uniquement au citadin de connaitre sa ville; mais, cette activité lui permet aussi de s’adapter à la société. La marche urbaine impose une co-présence entre les piétons qui deviennent capables de vivre ensemble et de s’adapter aux informations perçues de l’environnement. La coprésence est une situation où les différents marcheurs doivent s’arranger selon la perception de chacun et selon les codes sociaux implicites de la ville; la vitesse du déplacement, le rythme, la pause, la direction, etc. Ces usages relatifs à la vie pédestre sont à l’origine de l’existence même de la ville. Cette dimension sociale dépend des codes de chaque ville ; chacune possède des caractéristiques auxquelles le marcheur doit s’adapter. Les différentes façons de marcher sont les résultats de ces caractéristiques partagées entre les piétons d’une même société.

Selon Mauss, « La position des bras, celle des mains pendant qu’on marche forme une idiosyncrasie* sociale, et non simplement un produit de je ne sais quel agencement et mécanismes purement individuels ». [12] Nous avons établit que la marche urbaine crée des rapports entre le piéton et son environnement d’une part, et entre le piéton et la société d’autre part. Mais, cet engagement du corps dans la ville sollicite la pensée du marcheur. C’est le « cheminement de la pensée» dont on parle et des « routes qui invitent à la réflexion ». [13] Nous pensons ici particulièrement à la promenade nocturne, où la marche est une pensée, une quête de soi ou une réflexion. C’est la liberté et la lenteur du mouvement du corps qui font de la marche urbaine et nocturne une manière d’appréhender le monde et la vie. Nietzsche écrit : « Je me répète intérieurement une vérité, toujours, parce que la répéter, c’est comme lui donner une seconde jambe : alors, elle peut se mettre en marche et suivre son chemin. » Le marcheur, spectateur de la scène urbaine, s’engage dans l’espace et dans la société par le mouvement de ses bras et le rythmes de ses pas et devient ainsi un vrai acteur urbain. Qu’il se cherche ou qu’il se déplace d’un point vers un autre, le marcheur devient un vrai acteur urbain parce que « la ville se compose et se recompose, à chaque instant, par les pas de ses habitants[...]». Néanmoins, cette marche en ville qui engage le corps et l’esprit du piéton, peut susciter l’angoisse et le mal être. Ces sensations sont dues aux difficultés relatives à la mobilité pédestre dans les villes où les voitures viennent de toutes les directions et où le piéton est un être marginalisé.

16-Marcel Mauss, Sociologie et anthropologie 17-Pierre Sansot, Poétique de la ville * Idiosyncrasie : Réaction, tempéramment, manière d’être de chaque individu.

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1-5-La marche expérientielle

L’espace s’appréhende à travers le déplacement, par l’infinité des chemins emprunté par l’Homme. Contrairement à la peinture, la sculpture et le cinéma, l’architecture est une œuvre qui inclut l’Homme, le corps humain dans toute sa complexité. Dans son essai Apprendre à voir l’architecture, Bruno Zevi compare l’architecture à « une grande sculpture évidée, à l’intérieur de laquelle l’homme pénètre, marche, vit ».[18] L’Homme marcheur est un usager de l’espace architectural et l’espace urbain. À travers son corps, il vit l’espace; consciemment dans le cas du flâneur et inconsciemment dans le cas du piéton. L’expérience spatiale de l’architecture ne se limite pas à l’espace intérieur d’un édifice, mais elle se prolonge en dehors. On marche et on expérimente l’architecture, entre deux édifices, dans les rues et les ruelles, dans les places, « partout où l’œuvre de l’Homme a limité des «vides»».[19]On parle de la marche expérientielle, c’est-àdire les expériences vécues, perçues par le marcheur dans tous les espaces, dans toutes les scènes où se déroule la vie. La marche expérientielle dépend de deux dimensions : le temps et les sens.

En effet, la marche malmène le corps humain, elle le pousse à continuer son chemin, changer d’itinéraire ou de s’arrêter. Ainsi elle entraine la temporalité ; des moments se succèdent et un temps s’écoule entre les différents choix du marcheur. La lenteur de la flânerie permet d’apprivoiser la ville, d’être plus conscient du paysage urbain, d’un tel ou tel édifice. En revanche, le passant vit l’espace de la ville autrement. La rapidité de son mouvement corporel implique forcément la rapidité de réaction de ses sens par rapport à l’espace. L’expérience de la ville à travers la marche stimulent les sens qui correspondent au chaque type de perception de l’espace.

A-La vue / la perception visuelle : C’est à travers la vue que le marcheur détecte les composantes de l’espace, s’oriente, choisit son chemin et construit sa carte mentale de la ville grâce aux informations reçues par l’œil. La perception visuelle se réalise à travers ces informations ; les textures, les couleurs, la lumière agissent sur la perception du marcheur par rapport à l’environnement urbain.

18-Bruno ZEVI, Apprendre à voir l’architecture, Les Éditions de Minuit, Paris, 1959, P 11 19- ibid, P16 * Haptique: Qui concerne le sens du toucher, tactile

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B-Les

dimensions tactiles et kinesthésiques / perception haptique* : La perception haptique inclut les informations cutanées, proprioceptives et motrices. Les réactions thermiques du corps impliquent un mouvement spécifique à chaque piéton qui peut alterner sa posture, s’arrêter, etc. Parfois, un rapport charnel peut se créer avec la ville ; « l’expérience de la pluie est une expérience du corps. Les gouttes frappent le visage, mouillent les cheveux, les chaussures. Elles font frissonner ou rafraîchissent, glacent parfois le passant surpris ». [16] La perception haptique sollicite des sensations chez le marcheur dans l’espace

Figure 24: Musée Felix-Nussbaum-Haus, Osnabrück, Allemagne

Figure 25: Exposition «The Art of Scent»*

C-L’odorat / perception olfactive : La particularité de l’odorat est qu’il stimule la mémoire. Nous gardons toujours un souvenir de l’odeur d’un bâtiment ce qui agit sur notre perception. En parcourant la ville, l’odorat, comme l’ouïe, nous pousse parfois à s’arrêter, pénétrer un bâtiment ou alors changer de chemin. L’odorat peut être un outil de création artistique. En 2012, l’exposition « The art of scent » au Museum of arts and Design à New York a réussi à expérimenter avec l’odorat. Dans une galerie, les visiteurs se trouvent entre des murs blancs ponctués d’une série de 12 alcôves sculptés sur les murs. Des textes et des sons accompagnent les visiteurs qui doivent se rapprocher des alcôves.

Conçu par Daniel Libeskind, la façade de ce musée se compose de plusieurs textures qu’on peut expérimenter à travers la vue et le toucher. *https://dsrny.com/project/art-of-scent 20-Le Breton, David. (2000). Marche urbaine in Eloge de la marche. Paris, Editions Métaillé, P142

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D-L’ouïe / perception sonore : L’expérience

de

l’ouïe

est essentielle

pour la perception sonore d’une ville ou d’un bâtiment. D’une part, elle participe à la construction de la carte mentale du piéton, d’autre part, elle peut le guider dans son choix d’itinéraire. Soumis aux contraintes de la ville, le marcheur peut être exposé aux nuisances sonores qui le poussent à changer de chemin. Selon Le Breton « L’homme qui marche en ville baigne dans une sonorité souvent vécue à la manière d’un désagrément».[21] Cependant, le marcheur développe des tactiques pour éviter ces nuisances, en changeant d’itinéraire ou en mettant en jeu « un imaginaire qui la désamorce. » [22] En conclusion, la marche expérientielle dépend de l’ensemble des choix du marcheur et des conditions de la ville. Il appréhende l’espace à travers l’expérience de son corps , le temps et sa perception à travers ses sens. Cette marche expérientielle est unique et personnelle. Elle est propre à chaque marcheur.

*https://dsrny.com/project/art-of-scent 21-Le Breton, David. (2000). Marche urbaine in Eloge de la marche. Paris, Editions Métaillé, P135 22-ibid, p 138

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Synthèse A travers son œuvre « Walkscapes, la marche comme une pratique esthétique », Francesco Careri affirme que la marche à pieds nous offre une infinité de possibilités d’appréhender la ville, de vivre l’espace et de créer l’architecture ; une architecture pleine de sens et non pas des objets. En effet, la dichotomie entre sédentarisme et nomadisme est bien distincte. Selon lui, « c’est probablement le nomadisme, et plus exactement l’errance qui a donné vie à l’architecture en faisant émerger la nécessité d’une construction symbolique de l’espace. » [23]Autrement, l’architecture est le fruit de l’errance des premiers nomades. Mais cette dichotomie ne concerne pas uniquement l’architecture, elle se manifeste aussi dans le type de citadins. Le citadin marcheur et le citadin sédentaire se distinguent par leur appartenance à la ville. Le piéton s’enracine dans la ville en construisant ses repères et en créant sa propre image de la ville. Ses déplacements à pieds lui permettent de s’immerger dans l’expérience physique de l’espace. Marcher en ville est une pratique ancestrale qui fait du citoyen un être qui appartient et appréhende l’espace à travers ses sens et sa perception de l’environnement. Malgré les bienfaits de la marche sur la santé physique et psychologique. Celle ci a perdu sa valeur. La conception des villes autour des voitures fait que la marche devient difficile. Vers la fin du 19ème siècle, une nouvelle théorie est apparue ; il s’agit de la théorie de la marchabilité. Ce concept vise à rendre les villes plus propices à la marche et d’autres moyens de déplacements urbains.

23-Francesco Careri, Walkscapes, walking as an aesthetic practice, Culicidae Press, Iowa, USA, 2017

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«Walkable cities, with their dense, vibrant, mixeduse neighborhoods, offer residents a lifestyle that combines superior economic and social opportunity with a transportation cost, in both time and money, that is not necessarily any higher than in Illich’s “countries deprived of transportation industry.» _Jeff Speck, Walkable Cities

Chapitre II : La marchabilité

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2- La marchabilité

La marchabilité ; un terme emprunté de l’anglais «Walkability», exprime «le potentiel piétonnier d’un environnement urbain»[24]. Glicksman souligne que «ce terme est souvent utilisé pour identifier et mesurer les caractéristiques de l’environnement bâti favorisant ou entravant la volonté et la capacité d’un individu à marcher vers des aménités locales, en particulier les aménités qui sont censées encourager les modes de vie sains». [25] La marchabilité ; qu’elle soit un outil, un concept ou bien une théorie, elle est le fondement d’une

Le New Urbanism ; « nouvel urbanisme », est un courant made in America aux débuts des années 90. Il se focalise sur la création des villes, villages et quartiers à l’échelle de l’Homme afin d’assurer le bien être. Ainsi, il défend la marche à pieds et l’intégration du végétal et du minéral

ville durable et écologique. Son apparition est une réponse à la disparition de l’expérience pédestre de la rue. Cette dernière a perdu ses piétons pour devenir une route de service dépourvue de sens. Elle étudie les caractéristiques de l’environnement qui sont associées avec la pratique de la marche telles que la morphologie des zones de marche, le mobilier urbain, la sécurité et le confort et le degré de facilité de la marche dans un lieu donné. Ces actions de retrouver une ville à l’échelle de l’Homme trouvent leurs origines dans le New Urbanism*.

dans le design urbain. Le principe fondamental de ce courant est que les rues doivent être conçues pour accueillir les piétons, les vélos, le transport public et les voitures d’une manière équitable.

Aujourd’hui, une nouvelle théorie est apparue ; le New Pedestrianism*. Selon cette théorie, l’espace urbain, qu’on appelle village pédestre doit être pensé et conçu pour la marche à pieds. Ces courants urbanistiques cherchent à instaurer une culture pédestre afin de promouvoir une vie urbaine saine et de résoudre des problèmes d’ordre économique, environnemental et social. C’est ainsi que la marchabilité s’est développé pour devenir aujourd’hui un outil de mesure, de mapping et d’aménagement.

Le New Pedestrianism ; «Nouveau piétonnisme», fondé vers la fin des années 90, est un courant qui s’inspire du Nouvel urbanisme mais qui est plus idéaliste que son précurseur. Ce mouvement cherche à résoudre des problèmes sociaux, environnementaux, économiques et esthétiques à travers la création des villages pédestres.

24- François Raulin, Sébastien Lord et Paula Negron-Poblete, Évaluation de la marchabilité de trois environnements urbains de la région métropolitaine montréalaise à partir de l’outil MAPPA, VertigO, Volume 16 numéro 2 | 2016 25- Allen Glicksman, Is “Walkability” A Useful Concept for Gerontology?, Journal of Housing For the Elderly Volume 27, 2013 - Issue 1-2, 2013

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2-1- Le flâneur et le passant Le flâneur et le passant sont deux figures importantes de l’espace urbain et architectural. Chacun possède des caractéristiques relatives à l’appropriation de l’espace et au comportement. Ces deux acteurs participent activement dans le déroulement de la vie urbaine contrairement à l’automobiliste qui reste passif par rapport à la ville.[26] De ce fait, la conception de l’espace « urbatectural »* dépend de chacun de ces deux acteurs urbains. Bien qu’il soit difficile de distinguer les différences entre le flâneur et le passant, il est toutefois important de les déchiffrer. Nous allons donc étudier les caractéristiques spécifiques à chaque acteur dans le but de comprendre les spécificités à retenir pour la conception du projet.

A- Le flâneur « La foule est son domaine, comme l’air est celui de l’oiseau, comme l’eau celui du poisson. Sa passion et sa profession, c’est d’épouser la foule. Pour le parfait flâneur pour l’observateur passionné, c’est une immense jouissance que d’élire domicile dans le nombre, dans l’ondoyant dans le mouvement, dans le fugitif et l’infini. Etre hors de chez soi, et pourtant se sentir partout chez soi ; voir le monde, être au centre du monde et rester caché au monde, tels sont quelques-uns des moindres plaisirs de ces esprits indépendants, passionnés, impartiaux, que la langue ne peut que maladroitement définir. L’observateur est un prince qui jouit partout de son incognito »[27] _Baudelaire

Le flâneur est une figure qui est apparue dans la littérature anglaise dans l’œuvre d’Edgar Poe. À travers l’œuvre de Baudelaire, le flâneur est devenu l’observateur de la ville. L’introduction du concept du flâneur en sciences sociales sera l’œuvre de Walter Benjamin. La flânerie se caractérise par une incertitude de déplacement, la fragmentation de l’espace et une lecture poétique et intellectuelle de la ville. Errant dans les rues de la ville, le flâneur se libère des choix imposés par le concepteur. Ce refus des parcours dictés par l’urbanité de l’espace lui permet d’habiter la ville à sa manière. La particularité du flâneur est de réconcilier ces trois activités : la marche, l’observation et l’interprétation. Homme solitaire, Homme de foule ; le flâneur est ouvert intellectuellement et corporellement à la ville et ses habitants. Marcher lentement et librement entre les espaces interstitiels de la ville lui permet d’observer et d’interpréter l’environnement. La foule est le domaine du flâneur, elle « fait naître en l’homme qui s’y abandonne une sorte d’ivresse». La lenteur de son mouvement et l’insouciance de son esprit lui permettent de se plonger dans la foule et de vivre la réalité urbaine tout en gardant son caractère solitaire. En conclusion, le flâneur est un acteur urbain qui préfère se perdre entre les murs ; guidé par son esprit attentif. La curiosité, la découverte et la liberté font sa particularité.

26- Lavadinho, Sonia. (2008) “Le marcheur urbain, actant de la ville” *Urbatecture : terme introduit par Bruno Zevi, le terme signifie que architecture et urbanisme ne sont pas deux disciplines séparées 27- Baudelaire Ch. (1885) Le Peintre de la vie moderne, Paris: Calmann Lévy, p 64

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Le passant Le passant est une figure majeure de l’espace urbain. Il se caractérise par son esprit « fonctionnel » et son mouvement accéléré. Cette figure de piéton cherche avant tout à subvenir à ses besoins en se déplaçant d’un point à un autre. Le passant est un acteur urbain fondamental pour le déroulement de la vie urbaine. C’est grâce à son déplacement que la ville fonctionne. Le paysage perçu par le piéton est kaléidoscopique* étant donné la rapidité de son déplacement et le mouvement de son corps. Aujourd’hui, le piéton est devenu un être « connecté » qui n’arrive plus à se débarrasser de son téléphone. Entre son imprudence et la vitesse des voitures, le passant n’est plus en sécurité. En effet, ce marcheur est devenu un acteur marginalisé auquel sont dédiés les passages piétons et les rues piétonnes. Georges Amar considère les rues piétonnes comme un « triomphe de l’automobile ». Cette marginalisation du piéton au profit de la voiture qui se traduit par « une ségrégation du marcheur. On bâtit des “réserves d’indiens” pour piétons, et partout ailleurs l’automobile est reine.»[28] Le passant est donc un Homme pressé qui cherche à se déplacer le plus rapidement possible afin d’accomplir ses fonctions et subvenir ses besoins. Il faut donc assurer sa sécurité et lui offrir un espace sans obstacles.

Figure 26 : Distance/ Temps

Distance = 500m Temps = 6 min En moyenne, le passant traverse une distance de 500 mètres en 6 minutes. Par exemple, la distance qui sépare la place du 14 Janvier et la station TGM est de 500 m. La distance entre la place 14 Janvier et le lac est de 1.5 Km que le passant traverse en + 15 minutes.

Figure 27 : Différence entre le parcours du passant et du flâneur

28- Alexis Magnaval , Le piéton perd-il la bataille de l’espace urbain?, Slate, En ligne, 2017 *Kaléidoscopique: qui change rapidement

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2-2- La théorie de la marchabilité selon Jeff Speck STEP 1: PUT CARS IN THEIR PLACE Etape 1: Les voitures sont des moyens qui servent les humains. Pendant plus que 60 ans, elles ont contrôlé l’aménagement des villes, et la vie des citadins. Les villes doivent être conçues pour accueillir les citadins (en transport, à vélo, à pieds) et non pas les automobiles. L’équité de l’usage de la rue est importante pour améliorer les villes.

Figure 29 : Hiérarchie des voies

STEP 2: MIX THE USES Etape 2 : Mixité d’usage Le concept de Zoning a tué la vie urbaine, le citadin doit se déplacer d’un bout vers un autre pour subvenir à ses besoins. La mixité d’usage permet aux citadins de se déplacer à pieds entre le travail, l’apprentissage et les loisirs.

Figure 28: Jeff Speck

Jeff Speck est un urbaniste américain qui a travaillé en tant que consultant pour des villes américaines. Dans cet ouvrage écrit en 2012, Jeff Speck, urbaniste américain, établit en 10 étapes la manière dont les planificateurs des villes peuvent rendre le streetscape utile, sécurisé, confortable et intéressant. Ces étapes sont importantes pour améliorer le design urbain des villes.

Figure 30 : Mixité d’usage

STEP 3: GET THE PARKING RIGHT Etape 3 : Résoudre le problème du Parking Les voitures prennent beaucoup d’importance dans l’aménagement des villes, la difficulté du déplacement à pieds et les problèmes de transport augmentent le besoin d’avoir une voiture. Ainsi, plus, le nombre de voiture augmente, plus on a besoin d’avoir des parkings. Ces derniers nécessitent beaucoup d’espace et d’argent. La solution du Parking est reliée à l’étape 1, 2 et 4. Plus, on accorde une importance aux besoins réels des citadins, moins on aura besoin des voitures et des parkings.

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Le concept du “Pensacola Parking Syndrome”, est un syndrome qui est spécifique aux villes qui ont remplacé leur héritage architectural au profit des parkings. Le theatre de Michigan n’est pas l’exception, ces transformations sont partout dans le monde, même au centre ville de Tunis. La transformation du café culturel «Ellouh» en 2017 en espace de Parking montre que Tunis fait partie de ces métropoles qui se composent autour de la voiture.

Figure 31: Le theatre de Détroit, Michigan construit en 1926 réaffecté en un espace de Parking

Figure 32 : Café Ellouh réaffecté en espace de Parking

STEP 4: LET TRANSIT WORK Etape 4: Un transport public qui fonctionne Le transport public est favorable à la marche à pieds. De plus, il est économique et écologique. Plus le transport public fonctionne correctement, moins les citadins ont besoin d’utiliser une automobile. Figure 33 : Bus / Tram

Chaque type de transport doit avoir son propre espace pour qu’il fonctionne. Chaque déplacement en transport commence et termine par une marche à pieds. L’usage du transport public incite les citadins à marcher. Figure 34 : Trajet à pieds / Transport

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STEP 6: WELCOME BIKES Etape 6: Bienvenue aux vélos L’aménagement d’une piste pour les vélos est important pour : -Protéger les piétons des cyclistes qui utilisent le trottoir -Protéger les cyclistes des automobiles -S’investir dans les vélos c’est s’investir dans une ville marchable Figure 35: Piste vélo à Washington DC

STEP 5: PROTECT THE PEDESTRIAN Etape 5: Protection des piétons

Plusieurs moyens peuvent protéger les piétons : -Le parking parallèle -Les barrières -Les arbres Figure 36 : Protection des piétons

STEP 7: SHAPE THE SPACES Etape 7: Configuration spatiale L’auteur de la théorie de la marchabilité évoque l’ouvrage de Jan Gehl «Pour des villes à échelle humaine». Jeff Speck argue que les villes qui sont développées à l’échelle de l’Homme incitent à la marche. Les bâtiments doivent être à l’échelle de l’Homme. L’aménagement des places publics doit être pensé selon les besoins de la société et les conditions météorlogiques spécifiques à la ville.

Figure 37: Activités dans les espaces publics de la ville / Collectif Transforming the [re]public

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STEP 8: PLANT TREES Etape 8: Implanter les arbres

Les avantages de l’implantation des arbres sont infinies, ce qui nous intéresse ici c’est que les arbres protègent les piétons des voitures, des intempéries et ornementent l’espace urbain.

Figure 39 : Corquis sur l’alignement des ficus sur l’avenue Habib Bourguiba

Figure 38 :Ambiance/Ombre, vue depuis Rue Essaada, La Marsa

STEP 9: MAKE FRIENDLY AND UNIQUE FACES Etape 9: Des façades agréables Cette étape concerne le paysage architecturale. En effet, il faut que la ville invite et incite les citadins à marcher. La répétition, les murs blancs et les parkings en plein centre ville sont les ennemis du piéton.

STEP 10: PICK YOUR WINNERS Etape 10: Faire le bon choix Les zones où introduire le concept de la marchabilité doivent être choisies minutieusement. Il faut choisir des zones qui sont favorables à attirer l’attention et l’intérêt des citadins.

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Synthèse partielle

Selon Jeff Speck, ces dix étapes présentées (qu’il appelle «design fixes») sont une solution pour donner au piétons une opportunité pour s’approprier la ville. Ces étapes peuvent être valables pour toutes les villes. Cette manière de concevoir la ville et de penser l’espace urbain est économique et durable. Pour que la ville soit considérée «marchable», il faut que la marche soit :

- Utile - Sécurisée - Agréable/Confortable - Intéressante Ces quatre conditions; qui sont indissociables, influencent la qualité du vie et la santé des citadins, la durabilité de la ville et son développement économique.

Utile

Agréable Confortable

Sécurisée

Intéressante Figure 40 : Les conditions de marchabilité

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Un projet de marchabilité : Atlanta Beltline Plusieurs investisseurs se sont intéressés à ce projet, d’ailleurs, le développement privé à proximité de la piste est (Eastside trail) s’élève jusqu’à 4.1 billion de dollars. In fine, ce modèle de développement urbain est une expérience transformatrice qui concrétise les concepts liés à la marchabilité.

Figure 41 : Carte Atlanta Beltline *

Atlanta, une métropole américaine située dans l’état de Georgia aux Etats Unis, est une ville qui se caractérise par un trafic routier hasardeux. A partir de 2006, la Atlanta BeltLine, Inc. gère ce projet de réaménagement urbain de la ville d’Atlanta s’étale sur un périmètre de 22 miles (35Km). L’idée de ce projet est de rendre la ville marchable; c’est-à-dire d’offrir d’autres alternatives de mobilité urbaine et une meilleure qualité de vie aux citadins. Conçu sur des anciens rails de train par Ryan Gravel lors de sa thèse à l’université Georgia Tech, est une expérience audacieuse de marchabilité. D’une part, le projet de «Atlanta Beltline» offre aux usagers une alternative de déplacement en aménageant des parcours piétons, des pistes cyclables et des moyens de transport public. D’autre part, les objectifs de cette expérience sont économiques, environnementaux et sociaux. Plusieurs parcs et places publiques sont conçues sur les différentes pistes offrant plusieurs activités. Figure 42: Schémas conceptuels du projet** * New York Times **www.beltline.org

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Figure 43 : Structure d’accueil du DH Stanton parc *

Une structure d’accueil pour les visiteurs et les usagers de l’entrée ouest du DH Stanton Park inauguré en 2012. Pour éviter les coûts élevés de l’électricité et pour assurer le développement durable du projet, des panneaux photovoltaïques ont été installés sur cette structure .

Le Beltline est aussi une structure qui offre aux artistes un espace d’expression. Le «street art» se trouve tout au long du parcours. Des artistes profitent des infrastructures pour faire des spectacles de rues. A partir de 2010, l’Atlanta Beltline est devenu la plus grande plateforme d’installation artistique temporaire du sud-est américain. Figure 44 :Artiste performant sous un pont décoré par un graffiti *

Une installation conçue par l’artiste Jac Coffrey spécialement pour le Beltline. Il s’agit d’une installation permanenante construite à partir des pièces des rails récupérées par l’artiste.

Figure 45 : Trois ouvriers de Jac Coffrey *

Les concepteurs plantent 700 à 800 arbres chaque année afin de remplacer les arbres enlevés durant la construction de l’infrastructure.

Figure 46 : Le parc de la piste Est du Beltline * * www.beltline.org

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Figure 47: Perspectives 3D Atlanta Beltline

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2-3- L’avenue Habib Bourguiba et la marchabilité A- Aperçu Historique 1855: Règne de Ahmed Bey 1881: Instauration du protectorat français de Tunisie 1900: L’avenue de la Marine dénommée avenue JulesFerry 1956: Indépendance de la Tunisie; l’avenue Jules Ferrydénommée avenue Habib Bourguiba 1999: Réaménagement de l’avenue Habib Bourguiba Figure 48 : Carte postale, fin XIX siècle

L’histoire de l’avenue Habib Bourguiba se prolonge jusqu’à 1855. Appelée auparavant Promenade de la Marine, cette avenue faisait le lien entre le centre de Tunis et son Lac. Après l’instauration du protectorat français en Tunisie, la ville neuve a vu le jour autour de cet axe fondateur dénommé alors l’avenue Jules Ferry. L’aménagement de cette avenue durant la période du protectorat s’est fondé sur l’alignement des Ficus tout au long de l’axe façonnant ainsi l’image de la ville. En effet, la création de cette promenade à partir de la limite de la Médina (Bab Bhar/Porte de France) jusqu’à la station du train TGM a été favorisée grâce à «cet alignement de Ficus, à l’harmonie de sa forme, de son volume et de sa couleur» [29].

Après l’indépendance, l’image de cette avenue, devenue alors l’avenue Habib Bourguiba, s’est dégradé, la rupture avec le Lac s’est renforcée. Sur la photo aérienne, on constate la dégradation des ficus à partir de la place du 14 Janvier (figure 49, figure 50, figure 51). Vers la fin des années 90, la promenade est limitée jusqu’à la place 14 Janvier (place 7 Novembre auparavant), l’allée centrale est réduite à un passage vers la gare TGM. Depuis l’aménagement de cet axe urbain majeur de la ville de Tunis, le lac est resté à l’abandon. En 1999, l’ancien président Ben Ali a lancé un projet de réaménagement de l’avenue Habib Bourguiba. Cette intervention a gardé le caractère de la promenade mais le lac reste toujours écarté de la promenade du centre ville. Grâce aux moments urbains et architecturaux de part et d’autre, l’avenue Habib Bourguiba a toujours été adaptée à la marchabilité

29- Rejeb H., Kalti-Nabli N. , Saidane, I. ; Meddeb S. et Vidal R., « L’arbre et sa contribution dans la valorisation de l’image de l’espace urbain », ESHE, ENSP

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Figure 50 : Alignement des ficus, vue depuis l’échangeur A1

Figure 51 : Alignement des ficus, vue depuis la place de l’indépendance

Figure 49 : Les ficus sur l’avenue Habib Bourguiba actuellement

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B- La marchabilité Cette promenade de Ficus constitue le premier espace urbain moderne de la Tunisie, le premier espace conçu pour se promener et marcher. Les Ficus ont joué un rôle important pour rendre cet espace urbain favorable à la marche par l’ombrage, l’esthétisme et l’attraction des visiteurs. De plus, les constructions culturelles ont favorisé la marche tout au long de cet axe par la création du théâtre municipal, le Colisée et l’hôtel Claridge.

Figure 52: Vue sur les ficus de l’avenue Jules Ferry

Ces attractions architecturales sont devenues des moments qui attirent les piétons. Autrefois, l’avenue Habib Boruguiba était bien desservie par les tramways, la proximité de la station TGM et la station de la place de Barcelone. Figure 53: Vue sur l’avenue Jules Ferry

Le caractère de la promenade instauré depuis la période du protectorat a été préservé dans le projet de réaménagement de 1999 (figure 54). Ce projet a respecté « la mémoire collective et a gardé l’effet du prestige historique » [30] de cette avenue.

Figure 54: Projet de réaménagement de l’avenue Habib Bourguiba 1999

30- Rejeb H., Kalti-Nabli N. , Saidane, I. ; Meddeb S. et Vidal R., « L’arbre et sa contribution dans la valorisation de l’image de l’espace urbain », ESHE, ENSP

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Tunis sur Walk Score*

En

conclusion,

l’avenue

Habib Bourguiba est un espace urbain monumental et unique où la marche devient

une

activité

culturelle et historique que plusieurs artistes et écrivains ont pratiqué tel que Paul Arène qui l’a décrite dans

Figure 55 : Centre ville de Tunis sur Walk Score

son ouvrage Vingt Jours en Tunisie « Le soir de six heures à sept heures, tout le monde se promène dans la marine, qui est une superbe et large allée filant droit de la porte de Bab–el-Bhar au lac et aux Docks. À l’entrée sont les constructions neuves de la colonie européenne, de grands hôtels et des cafés, la compagnie transatlantique, la poste, le consulat, le palais du résident français, une église[...]»[31]

Figure 56 : Calcul de marchabilité, Tunis

Walk Score est une entreprise privée qui offre des ‘services de marchabilité’ et des outils de recherche d’appartements. A travers un algorithme, l’application calcule le score de marchabilité d’un quartier ou d’une ville. En cherchant la ville de Tunis sur Walk Score, l’avenue Habib Bourguiba et l’avenue Mohamed V ont obtenu un score de 80/100; c’est à dire que cette zone est considérée comme une zone marchable. Ce score est calculé selon la proximité des différentes activités et besoins; équipements administratifs, culturels, commerciaux, etc...(figure 55, figure 56).

31- Paul Arène, Vingt jours en Tunisie, 1884 * www.walkscore.com

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Synthèse La problématique de mobilité urbaine se pose partout dans le monde. Plusieurs villes cherchent à résoudre les problèmes de circulation et à améliorer la qualité de vie des citadins. La marchabilité se présente comme une solution adaptée qui est en train de réussir dans plusieurs villes du monde. La marchabilité n’est pas seulement une solution pour le déplacement mais aussi pour les problèmes environnementaux, sociaux, et économiques. Pour concevoir un projet dédié à la marche, la marchabilité est la solution pratique qui dicte des règles transformatrices de l’espace urbain. En offrant aux usagers une variété des modes de déplacement, en créant des parcours qui les invitent à se promener, la ville devient un espace commercial et culturel où toutes les activités et tous les besoins de l’Homme se concrétisent. Dans la ville de Tunis, l’avenue Habib Bourguiba est un espace urbain qui offre un parcours ponctué de moments urbains et architecturaux relativement adaptés à la marchabilité. Néanmoins, le parcours menant au lac manque d’événements ce qui crée cette séparation entre l’avenue Habib Bourguiba et le plan d’eau. En effet, pour inciter le marcheur à continuer son chemin vers le lac de Tunis, il faut créer un parcours ponctué d’événements qui suscite la curiosité du passant et du flâneur également.

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Chapitre III : Le parcours

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3- Le parcours Le concept du parcours est un concept abstrait qui peut être défini de différentes manières. En architecture, le parcours peut être défini en tant que « fil perceptif qui met en relation les espaces; internes et externes, d’un bâtiment ».[32] En effet, ce mouvement permet aux usagers (d’un bâtiment, d’une rue) de percevoir et de vivre l’espace. Ce dernier n’est perçu ni vécu qu’à travers le parcours. Cette réciprocité entre le parcours et l’espace existe dans toutes les constructions architecturales et dans tous les espaces urbains. Ce concept se distingue par sa continuité dans l’ensemble de la ville et de l’architecture. Ceci implique forcément la perception de l’espace et le temps qui s’écoule dans « un parcours ». Ce dernier est donc un concept qui est personnel ; parcourir un espace définit l’expérience du marcheur. En parcourant la ville, un édifice peut nous interpeller et c’est ainsi que nous abordons un parcours depuis l’extérieur jusqu’à l’intérieur. Cette expérience ne peut être vécue qu’en marchant. Cette expérience peut être vécue à travers les trois manières différentes (figure 57). Ces types de rapprochement nous ramène à l’idée des séquences. En effet, dans chaque parcours il y a des séquences spatiales qui relient les entités du parcours. In fine, chaque type de rapprochement offre des séquences différentes relatives à chaque parcours.

Figure 57 : PERCEPTION/RAPPROCHEMENT

32- Alejandra Pumar Silveira, Le parcours en architecture, Mastère CTC, ENSCI

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3-1-Le parcours architectural « On dira alors que le mouvement en architecture est l’acte commun de l’édifice et du promeneur (de l’usager). Ce sont des gestes innombrables qui se répondent, qui se comprennent. » [33] Benoît Goetz Le parcours architectural se fait par le mouvement du corps et les sens ; et ceci impliquent les différents types de perception, ce qui permet à l’usager d’expérimenter l’espace. La marche à l’intérieur ou à l’extérieur d’un bâtiment traduit le mouvement du corps qui peut être de « s’approcher, s’éloigner, contourner, monter, descendre, pénétrer, échapper… »[34]. Ces actions permettent au marcheur de dialoguer avec l’espace et de vivre les sensations stimulées par celui-ci. Le parcours architectural est une succession d’épisodes, de séquences dont chacune possède des caractéristiques spécifiques. Ces dernières provoquent les sens de l’usager et c’est ainsi que son interaction avec l’espace se produit. Le travail de l’architecte réside dans le fait de donner un sens à ce parcours, soit en guidant l’usager, soit en lui donner la liberté de laisser faire son mouvement. Le parcours architectural fait référence au mouvement, aux sensations, à la curiosité et à la découverte. À travers ces concepts, le parcours architectural fait appel à l’imaginaire. En effet, le paysage intérieur stimule la mémoire du marcheur lui permettant d’être avec soi-même.

Figure 58 : Les différentes moments d’un parcours architectural

33- Benoit Goetz, Art et philosophie, ville et architecture, La découverte, 2003 34- Pierre Von Meiss, De la forme au lieu : une introduction à l’étude de l’architecture, Presses polytechniques et universitaires romandes, EPFL, 1993, p 27

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3-2-Le parcours urbain Le parcours urbain est une succession de séquences urbaines composées d’espaces publics et d’espaces privés. Ce parcours s’articule autour des limites des espaces privés et des nœuds créés par les espaces publics. En marchant de la ville, on prend conscience des rapports d’échelles et de proportions entre ces deux espaces (hauteur des constructions, largeur des rues, etc.) qui font que la séquence soit harmonieuse ou incohérente. Le fait de marcher nous permet d’une part de (re)connaitre la ville et de s’approprier l’espace, d’autre part, d’impliquer le facteur de temporalité. La variable du temps qui s’ajoute au parcours urbain dépend du marcheur. Des liens chronologiques s’ajoutent aux différentes séquences simultanément avec le déplacement de l’usager. Ainsi, la perception de la ville change à chaque moment et à chaque séquence ; le rapport charnel qui se crée la nuit peut être altérer le matin et vice versa. Les parcours en ville permettent de s’approprier l’espace, de s’attacher à la ville. « Une ville […] s’entend, se respire, se touche, car le timbre d’une ville ne se résume pas à l’ensemble des bruits qui nous atteignent»[35] et c’est à travers le parcours urbain du corps en mouvement qu’on arrive à vivre et à appartenir à la ville. Ainsi, « la marche dans la ville » évolue vers «marcher la ville ». En conclusion, le parcours urbain est une expérience de la ville où on (re)découvre les espaces urbains et où on s’identifie avec ces espaces. Cette intériorisation de l’espace dans la mémoire et l’imaginaire collectifs implique la notion du parcours imaginaire.

Figure 59 : Ce que voit le marcheur

Figure 60 : Ce que voit l’automobiliste à 50 km/h

35- Pierre Sansot, Chemins aux vents, Payot et Rivages, 2000

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3-3- Le parcours imaginaire L’imaginaire a intéressé plusieurs philosophes du XXème siècle, mais c’est l’apport de l’œuvre de Bachelard entre l’imaginaire et le parcours architectural qui nous intéresse. Bachelard affirme que l’image est omniprésente dans la vie mentale. Grâce à l’imaginaire, nous arrivons à alterner les images pour créer un vécu poétique. « L’image poétique n’est pas soumise à une poussée. Elle n’est pas l’écho d’un passé. C’est plutôt l’inverse: par l’éclat d’une image, le passé lointain résonne d’échos et l’on ne voit guère à quelle profondeur ces échos vont se répercuter et s’éteindre. Dans sa nouveauté, dans son activité, l’image poétique a un être propre, un dynamisme propre. » [36] Bachelard L’image est donc renouvelée à travers l’inconscient, le passé. Par conséquent, l’imaginaire du rêveur est lié à son inconscient personnel. Les images intimes du rêveur stimulent son imaginaire.

Pallasmaa a repris les idées de Bachelard de point de vue architectural dans son œuvre The Embodied Image: Imagination and Imagery in Architecture. « En effet, le plancher invite à être debout, la porte invite à entrer et à traverser, la fenêtre à regarder et voir, l’escalier à monter et descendre. Bref, les éléments mentaux et expérimentaux de l’architecture sont moins des images visuelles que des verbes, invitant à l’action.»[37] En conclusion, les images réelles et les images mentales produisent ensemble l’imaginaire en faisant appel à l’inconscient et à la mémoire. Le mouvement du corps dans un espace architectural stimule l’imaginaire de l’usager et l’invite à faire des actions. Le parcours architectural et le parcours urbain éveillent l’imaginaire. Par conséquent le parcours devient propice à l’imagination. À travers le mouvement du corps dans l’espace et la stimulation des sens, le parcours stimule l’imagination du marcheur.

L’expérience du corps à travers les mouvements et les rythmes stimule le dynamisme créateur des images qui à leurs tour nourrissent l’imaginaire. En architecture, ces images invitent les usagers à faire des actions et à expérimenter avec l’espace en enrichissant «le réel perçu ou conçu». [37] 36- Gaston Bachelard, La poétique de l’espace, Bibliothèque numérique «Les classiques des sciences sociales», Québec 1957, p8 37- Wunenburger, Jean-Jacques, L’imaginaire, Paris : Presses Universitaires de France. 2013, p10. 38- Juhani Pallasmaa, The Embodied Image: Imagination and Imagery in Architecture, John Wiley & Sons, 2011, p118-p124

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Intervention sur un parcours : L’installation Clara-Clara au jardin des Tuileries “Ce que je veux, c’est que mon œuvre ne soit pas perçue uniquement comme une production esthétique de plus. Si elle devient un lieu de référence pour les gens de toutes opinions et si c’est ma sculpture qui constitue l’expérience leur permettant de se rencontrer, génial. Je voudrais que cette installation soit un espace public, ouvert, où tout le monde peut venir, surtout les jeunes. Mais à moins que l’œuvre ne soit formellement novatrice, rien ne changera. Il faut qu’elle le soit, formellement novatrice, pour que se transforment les perceptions, les émotions et l’expérience.”[39]

Figure 61 : Vue sur Clara-Clara Figure 62 : Richard Serra

Exposée pour la première fois aux jardins des Tuileries à Paris en 1983, la sculpture monumentale de Richard Serra est formée de deux parenthèses inversées. Sur une longueur de 36 mètres et une hauteur de 3.40 mètres, l’artiste réinvente l’entrée du jardin des Tuileries. Serra offre un nouveau parcours aux promeneurs. Comme toutes les œuvres de l’artiste américain, ClaraClara stimule les sens des marcheurs ; chacun peut la percevoir à sa manière. Cette sculpture monumentale ne peut être appréhendée qu’à travers la marche, en la parcourant, au milieu, à l’intérieur et à l’extérieur. Dans les mots de Richard Serra : « La contraction et l’expansion de la sculpture résulte du mouvement. Pas à pas, la perception non seulement de la sculpture mais de l’environnement tout entier change. » [40]

Artiste sculpteur américain, Richard Serra est né aux Etats Unis le 2 Novembre 1939. Il a étudié les Beaux Arts à Yale University. Ses œuvres sont connues pour leurs effets sur l’espace public. Elles engagent le public dans un circuit, forçant les piétons à suivre un parcours précis.

39- Richard Serra, Maître de la tectonique de la sculpture, Ego Design, Susan Cross + Tracey Bashkoff, 2007 40- ibid.

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Figure 63 : Plan actuel sur l’entrée du jardin/ coté place de la Concorde

L’installation offre aux passants et aux flâneurs une nouvelle manière de parcourir l’espace.

-Cadrage de vue sur l’obélisque de la place de la Concorde. ==> Une nouvelle manière d’appréhender l’environnement qui l’entoure. ==> Mise en valeur du monument par une perspective accentuée grâce aux deux parenthèses serrées.

Figure 64 : Coupe schématique / Cadrage de vue sur l’obélisque

-Avant l’installation de la sculpture, le cadrage de vue de l’obélisque n’existait pas. Le monument était perçu parmi les autres composantes du paysage.

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Formellement, la sculpture géante ressemble à deux parenthèses inversées qui se tournent le dos et ne se touchent pas. Cette sculpture minimaliste qui offre plusieurs manières de parcourir et d’appréhender l’œuvre.

Figure 65 : Forme / Parcours

À retenir -La sculpture de Serra installée auparavant à l’entrée des jardins a créé une nouvelle ambiance dans le parcours des visiteurs. -L’œuvre peut être parcourue de plusieurs manières ce qui offre une nouvelle perception de tout l’environnement où elle était implantée. -La monumentalité de cette sculpture montre qu’une intervention d’art minimaliste à travers ces deux parenthèses agit sur le parcours des Figure 66 : Perspective sur la place de la Concorde

marcheurs en évoquant leurs sensations, stimulant leurs sens et agissant sur leur perceptions. -La forme de la sculpture offre un cadrage de vue sur l’obélisque de la place de la Concorde ce qui change la perception des visiteurs par rapport à ce monument.

Concepts : Ambiance, cadrage de vue, monumentalité, minimalisme

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Figure 67 : Clara-Clara par Yann Arthus- Bertrand

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Synthèse

Le parcours architectural, urbain et imaginaire permet au marcheur de vivre l’espace, de le percevoir et de stimuler son imagination. Il existe plusieurs façons de parcourir l’espace ce qui rend l’expérience du parcours personnelle à travers le vécu et l’imaginaire de chaque usager. Dans le projet de Richard Serra, on constate qu’il existe plusieurs façons de parcourir l’espace selon ce qu’offre la conception de l’artiste/architecte, et aussi selon les choix de l’usager. On peut pénétrer un espace et on peut le contourner ou le longer sans le traverser. Dans ce chapitre, nous avons étudié ces différents types de parcours afin de pouvoir entamer le projet d’architecture. Le parcours sur l’axe de l’avenue Habib Bourguiba est une expérience de marche qui doit être ‘personnelle’ et qui va dépendre du vécu et de l’imaginaire de chaque usager. Le projet d’architecture se présente comme un aboutissement de ce parcours sur les berges du lac de Tunis.

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Chapitre IV: Le projet d’architecture

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4-1- Contexte et analyse A- Lecture du parcours Médina, l’avenue Habib Bourguiba et les berges du lac : La marche dans les ruelles mystérieuses de la Médina est une expérience qui éveille l’esprit du marcheur. L’air qui garde sa fraicheur tout au long de la journée rend la promenade agréable.

Figure 68 : Vue sur la Place de Bab Bhar

La Médina est embellie par les couleurs : le vert des portes et des fenêtres, l’ocre de la pierre et la rougeur des Chéchias exposées dans les boutiques des artisans. Le soleil pénètre graduellement à l’intérieur. L’échelle des bâtiments permet au marcheur de contempler le ciel bleu grâce à ce tissu urbain intérieur découvert. La mosquée Zitouna ; qui marque la naissance de cette ville arabe au VIII siècle, est un nœud de croisement des marcheurs venant des différentes portes de la Médina. Ses escaliers sont devenus aujourd’hui un espace de repos et d’observation. Marcher sur les pas des grands voyageurs tels qu’Al Bakri et Philémon de la Motte entre les murs ou alors les boutiques des artisans fait naitre dans l’esprit une sérénité de l’urbanité qui entoure cette entité séparée du klaxon des voitures et l’odeur du carburant. En arrivant à la place Bab Bhar, on est frappé par une rupture totale : un encombrement véhiculaire et un paysage urbain totalement différent de l’arabité de la Médina.

Figure 69 : Vue entre la Médina et la ville coloniale

Figure 70 : Vue sur la Place de l’indépendance

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L’opposition entre la ville neuve et la ville traditionnelle ne se manifeste uniquement par le plan : un plan quadrillé dessiné et un plan organique spontané mais aussi par la diversité architecturale des bâtiments et leur variété stylistique mais « d’un éclectisme sage ». [41] De plus, la ville coloniale se caractérise par son aspect extraverti se manifestant par les balcons et les vérandas supportés par des consoles sculptés, contrairement à la médina où on a l’impression de marcher entre deux murs de clôture.

Figure 71 : Vue depuis la place du 14 Janvier

Continuer son chemin est interrompu par les voitures venant des trois cotés, le Brouhaha des artisans et des petits cafés de la médina est remplacé par le klaxon incessant. Néanmoins, on se trouve dans un quadrillage orthogonal des rues mais qui est séduisant selon Serge Santelli qui disait de la ville coloniale de Tunis « la sublime beauté de la banalité urbaine ».[42]

Figure 72 : Vue direction Lac

Entre la nouvelle cathédrale et la Maison de France, on trouve une place ; un mémorial de Ibn Khaldoun, avec un vide urbain, où il n y a rien, utilisé apparemment comme un Parking. Le terre plein piétonnier, implanté depuis 1900, est défini par le double alignement de ficus reste jusqu’à aujourd’hui l’espace urbain majeur du centre ville de Tunis.

Figure 73 : Vue sur l’avenue Habib Bourguiba (Nuit)

41- Serge Santelli, Tunis, le creuset méditerranéen, édition Demi-Cercle / CNRS, collection La Ville, Paris, 1995 42- ibid.

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Ce lieu de promenade laisse le marcheur contempler les édifices de part et d’autre : entre l’Art Nouveau, l’architecture moderne et l’architecture contemporaine. Mais, dans ce parcours la ligne d’horizon devient une autoroute. Le chemin est terminé à la Place du 14 Janvier, où les voitures dominent l’espace. Le nombre des piétons diminuent brutalement. En se trouvant sous l’autoroute A1 vers la station TGM, marcher est quasi impossible, on devient perturbé par tout ce qui entourent : le paysage urbain, les routes véhiculaires et les nuisances sonores qui ne cessent d’augmenter. L’obligation de s’adapter à l’automobile a engendré depuis la fin du XXème siècle la construction des voies véhiculaires destructrices du paysage urbain de Tunis. A partir de la station TGM, on se trouve seul entouré des véhicules, le Lac semble tellement loin qu’on peut s’arrêter et rebrousser son chemin.

En effet, les relations de la ville avec le lac n’ont rien de simple, aujourd’hui elle est séparée par une autoroute. Autrefois, la relation entre la ville et son lac se résumait dans une relation industrielle et fonctionnelle par l’aménagement d’un port en 1893. Les bords du lac étaient donc occupés par des entrepôts liés aux activités portuaires. En 1920, Victor Valensi dessinait un projet d’aménagement et d’embellissement de l’avenue Jules Ferry (actuellement avenue Habib Bourguiba) permettant une ouverture de la ville sur son lac vers le coté Nord (figure 64). Valensi proposait la prolongation de l’avenue par un môle ordonnancée autour d’un plan d’eau monumental. Néanmoins, aucun élément du projet d’aménagement ne fut réalisé.

Aujourd’hui, la flânerie dans la ville se termine à la place du 14 Janvier. Rien n’intrigue le marcheur à flâner aux bords du Lac et de découvrir ce bout de terre inexistant dans sa mémoire.

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Figure 74 : Perspectives d’aménagement de Tunis par Valensi en 1920 qui visait à créer une relation entre l’avenue Jule Ferry (Habib Bourguiba) et le lac.

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B- Présentation du site : Tunis est une ville qui se situe au Nord Est de la Tunisie. Elle est devenue la capitale du pays à partir de 1159. Aujourd’hui, elle compte 638 845 habitants. En 2017, Tunis a été classée la meilleure ville du Maghreb et la cinquième du monde Arabe «où il est bon de vivre».[43] Figure 75 : Carte géographique du Nord de la Tunisie

La zone d’étude s’étale sur le parcours de Bab Bhar jusqu’aux rives du lac de Tunis. Ce parcours sera étudié par tronçons. -Tronçon A : Depuis Bab Bhar jusqu’à la place 14 Janvier -Tronçon B : Depuis la place 14 Janvier jusqu’à la stationTGM -Tronçon C : Depuis la station TGM jusqu’aux rives du lac. Figure 76 : Carte géographique de Tunis

Tronçon A

Tronçon B

Tronçon C

Figure 77 : Plan schématique indiquant les tronçons par rapport aux repères 43- https://www.mercer.fr/ * Application Google Earth

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Les coupes sur l’axe allant de la Qasbah de Tunis en traversant l’avenue Habib Bourguiba vers le Lac de Tunis montrent un terrain en pente attenant 28 mètres à la Qasbah. La pente s’adoucit graduellement pour disparaitre lorsqu’on arrive à la place Bab Bhar.

Figure 78 : Coupe à partir de la Qasbah vers le Lac

Figure 79: Coupe de l’avenue de Carthage jusqu’au Lac

Figure 80 : Coupe sur le terrain du Lac 3

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Théâtre municipal

Tronçon B

Station TGM

Échangeur A1 Les fleuristes

Place du 14 Janvier

Tronçon C

Figure 81 : Plan indiquant les différentes séquences du processus conceptuel - Ech 1/10000 Figure 81 : Plan d’aménagement de l’avenue Habib Bourguiba et du secteur A du Lac 3 - Ech 1/10000

Tronçon A

Les arcades

Place de l’indépendance Statue Ibn Khaldoun

Bab Bhar

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N


C- Analyse des tronçons A, B et C C-1- Tronçon A : de Bab Bhar jusqu’à la Place 14 Janvier

Figure 82 : Schéma Tronçon A

Figure 83 : Vue sur Bab Bhar

La place de Bab Bhar est l’espace de transition entre la médina de Tunis et la ville coloniale

La marche sur l’avenue Habib Bourguiba est ponctuée d’événements urbains et architecturaux tels que la place Ibn Khaldoun, la cathédrale, les galeries, le théâtre municipal et les cafés. Ces moments urbains invitent le marcheur à parcourir l’avenue Habib Bourguiba, à s’arrêter ou à continuer son chemin. Les ficus qui sont bien entretenus ajoute de l’ombre et de l’esthétisme au parcours des piétons. La dimension du terre plein et des trottoirs facilitent la circulation piétonne. Ce tronçon est aménagé par le mobilier urbain nécessaire (bancs, poubelles, éclairage).

Figure 84 : Perspective sur l’avenue Habib Bourguiba depuis Bab Bhar

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L’installation de l’aménagement urbain ‘I love Tunis’ a animé le parcours des piétons. Depuis son inauguration en 2017, cette installation est devenue l’attraction des piétons. Située entre la statue Ibn Khaldoun et la cathédrale Saint Vincent de Paul, cet aménagement urbain a créé une nouvelle dynamique dans le parcours de l’avenue Habib Bourguiba.

Figure 85 : Vue sur l’installation ‘I love Tunis et la statue de Ibn Khaldoun

Figure 86 : Vue sur la cathédrale Saint Vincent de Paul

La cathédrale Saint Vincent de Paul est une œuvre architecturale qui constitue un élément emblématique de la promenade.

Figure 87 : Vue sur l’avenue Habib Bourguiba Présence du mobilier urbain sur le tronçon A de l’axe de l’avenue Habib Bourguiba

Figure 88: Coupe schématique

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C-2- Tronçon B : de la place 14 Janvier jusqu’à la station TGM

Figure 89 : Schématisation du flux véhiculaire au niveau de la place

La place du 14 Janvier est un nœud où se croisent les deux axes majeurs de la ville de Tunis; l’avenue Habib Bourguiba et l’avenue Mohamed V. Le nombre de piétons diminue fortement à cause de l’absence d’événements urbains qui animent le parcours.

Figure 90 : Vue sur «Monguéla» de la place 14 Janvier

L’échangeur autoroutier A1 est un point de transition sur l’avenue Habib Bourguiba. Le flux véhiculaire est important, les piétons sont majoritairement les usagers de la station TGM. La structure du pont est devenue un espace d’expression artistique des jeunes artistes tagueurs.

Figure 91 : Schématisation du flux véhiculaire / croisement avenue HB et avenue de la République

Figure 93 : Vue sur le rond point Figure 92 : Vue en dessous de l’échangeur A1

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Figure 94 : Flux véhiculaire , zone TGM

Malgré la présence des fleuristes, cette zone manque d’événements urbains propices à la flânerie. Le flux des piétons est réduit par rapport au tronçon A de l’avenue Habib Bourguiba.

Figure 95 : Vue sur l’avenue HB, direction TGM

Le trottoir est utilisé comme Parking du coté des fleuristes. (figure 96)

Figure 97 : Flux véhiculaire

Figure 96 : Vue sur le trottoir coté TGM

On constate aussi que cette zone manque d’entretien: -Les ficus ne sont pas entretenus d’où l’absence d’ombre tel qu’au tronçon A. -Cette partie manque de mobilier urbain (les bancs, les poubelles, etc...) -L’absence des moments urbains et d’éléments emblématiques.

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C-3- Tronçon C : de la station TGM jusqu’aux rives du lac

Figure 98 : PAU projeté Ech 1/1000

Le lac de Tunis est resté séparé de la ville depuis le début de l’Histoire de la Médina jusqu’à la construction de la ville coloniale. Ces friches sont devenues l’unique opportunité pour l’extension du centre de Tunis. Le plan d’aménagement urbain projeté est un plan orthogonal, avec des rues larges. Les concepteurs prévoient l’extension de l’avenue Habib Bourguiba, avec la même disposition des ficus. La zone est répartie en 4 secteurs ayant une morphologie et une programmation fonctionnelle similaires. Le tronçon qu’on va étudier est celui du secteur A où l’on constate immédiatement l’absence des équipements culturels et artistiques. Ceci se présente comme une opportunité de créer un parcours qui fait le lien entre le centre de Tunis et le lac à travers un parcours artistique.

Figure 99: Perspective sur l’extension de l’avenue Habib Bourguiba vers le lac de Tunis

Figure 100: Programmation fonctionnelle au secteur A

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Figure 101: Distribution des CUF au secteur A

La hauteur projetée des batiments qui donnent sur l’extension de l’avenue Habib Bourguiba est élevée.

Figure 102 : Coupe schématique sur la hauteur projetée

L’extension des ficus contribuent à la continuité du parcours des marcheurs. Figure 103 : Coupe schématique sur le prolongement des ficus

Figure 104 : Esplanade du lac

Le secteur A du PAU du lac offre une esplanade maritime grandiose. Cette esplanade peut être un espace d’observation et de contemplation qui met en valeur le lac de Tunis.

Le lac offre aussi une vue panoramique sur Djebel Boukornine. Figure 105 : Vue sur Djebel Boukornine

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4.2. Processus conceptuel - Intentions et objectifs du projet

«La construction de situations était donc la manière la plus directe de réaliser dans la ville de nouveaux comportements et d’expérimenter dans la réalité urbaine les moments de la vie qu’elle pourrait être dans une société plus libre». _Francesco Careri [40] Le projet cherche à concilier la dichotomie entre la ville de Tunis et son Lac. Il s’agit de transformer les rives du Lac en milieu expérientiel. La création de situations incitant le marcheur à continuer son chemin vers le lac, est essentielle dans ce projet. Cependant, il ne s’agit pas de densifier le parcours avec des évènements mais de créer des micro-séjours qui stimulent les sens, aiguisent la curiosité et engagent le corps du marcheur. Ce parcours se compose par des formes ouvertes et flexibles établissant un dialogue entre la ville, le lac et le marcheur. L’atmosphère créée par l’architecture est un catalyseur incitant le marcheur à redécouvrir la ville considérée comme un environnement quotidien, habituel. Ce projet architectural dans la perspective de l’avenue Habib Bourguiba cherche à donner un nouvel objectif au marcheur. Ce choix découle de l’idée d’une architecture que l’on découvre à travers l’expérience de la marche. En effet, le processus conceptuel consiste à séquencer le parcours pour injecter des moments urbains qui invitent les marcheurs à passer au delà de la place du 14 Janvier. Ces séquences mènent le marcheur vers le lac en lui proposant des moments d’observation et de découverte.

40-Francesco Careri, Walkscapes, walking as an aesthetic practice, Culicidae Press, Iowa, USA, 2017

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Tronçon A

Séquence B3

Tronçon B

Séquence B2

Séquence C

Figure 106 : Plan indiquant les différentes séquences du processus conceptuel - Ech 1/5000

Séquence B1

Tronçon A

Station TGM

Les fleuristes

Échangeur A1

Place du 14 Janvier

Tronçon C

Tronçon C

N


- Séquence B1 : au niveau de la place 14 Janvier

Figure 107 : Plan de situation Ech 1/500

Ce grand rond point se caractérise par un important flux de voitures constituant ainsi un point de rupture dans la fluidité du parcours piéton. L’idée est de fluidifier la circulation piétonne et de faciliter la traversée de grand giratoire pour aider les piétons à aller au delà et poursuivre leur marche déambulatoire le long de l’avenue Habib Bourguiba.

Billetterie automatique

N

Panneau événement

direction TGM

direction Bab Bhar

Figure 108 : Esquisse passage souterrain - Ech 1/100

Pour se faire, nous envisageons de: - Créer un passage piéton souterrain assurant ainsi une circulation sécurisée pour les marcheurs. Ce passage sera animé par une exposition, des affiches publicitaires des évènements culturels et des billetteries automatiques des salles de cinéma.

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- Séquence B2 : croisement entre l’avenue Habib Bourguiba et l’avenue de la république Cette zone est aussi une zone dont le flux véhiculaire est élevé. On doit offrir aux usagers un micro séjour afin de les inviter à poursuivre leur marche vers le lac. L’idée est de concevoir une place qui sert à:

Figure 109 : Plan de situation Ech 1/500

-animer le parcours des marcheurs N

-mettre en valeur les graffitis

Emplacement des graffitis. Nouveau traitement au sol invitant le piéton à traverser le rond point

Emplacement des graffitis.

Structure du pont où il y a les graffitis.

Figure 110 : Esquisse aménagement du rond point - Ech 1/100

Figure 111: Esquisse aménagement par rapport aux graffitis

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- Séquence B3 : de l’échangeur A1 jusqu’à la station TGM Cette séquence comprend trois interventions :

Figure 112 : Plan de situation Ech 1/500

Figure 113 : Mur musical : art interactif créant une nouvelle ambiance.

-Une première intervention du coté des fleuristes en créant une ambiance musicale. - Une deuxième intervention au niveau du terre plein en installant une sculpture qu’on peut traverser et longer. -Une troisième intervention qui consiste à l’installation d’une structure pour des vélos en libre service et l’aménagement d’une piste cyclables à partir de la station TGM . La sculpture au niveau du terre plein offre une nouvelle manière de vivre ce tronçon de l’avenue Habib Bourguiba. En parcourant la sculpture, les différents types de piétons arrivent à vivre une nouvelle expérience urbaine. L’installation offre aussi des

Figure 114 : sculpture au niveau du terre plein en s’inspirant du travail de Richard Serra

espaces de repos pour les différents types d’usagers.

La mise en place des vélos en libre service sert à fournir aux usagers une alternative de mobilité urbaine. Les vélos sont considérés comme un moyen de déplacement «convivial». Le cycliste est ouvert aux autres, il peut contempler l’environnement qui l’entoure, s’arrêter facilement et découvrir sa ville en changeant de parcours

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Station TGM

Piste cyclable proposée

Espace des vélos en libre service avec une billetterie

Espace de repos aménagé avec une vue sur les fleuristes

Les fleuristes

Mur émettant de la musique

Figure 115: Esquisse aménagement - Ech 1/100

Installation

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- Séquence C : le secteur A du PAU projeté du Lac N

Limite de la voie véhiculaire

Zone piétonne

Le pavillon

Figure 116 : Plan d’implantation - Ech 1/1000

Plateforme d’observation

Programme fonctionnel du pavillon Le pavillon est la destination des piétons. Il s’agit d’un espace où on peut s’arrêter, traverser et observer. La programmation fonctionnelle s’écoule de l’idée d’insérer des activités culturelles et artistiques qui invitent les usagers à marcher pour expérimenter avec l’espace. Les ‘concept stores’: ce nouveau type de commerce thématique attirent les usagers. Le choix de prévoir des concept stores s’est fondé sur le fait que ces boutiques peuvent avoir des ateliers et des espaces d’exposition qui proposent aux usagers la possibilité d’expérimenter avec leur produits. Le pavillon du Lac offre aux piétons 3 concepts store: Un concept store qui produit des chaussures de marche et de randonnée avec un espace où on peut tester les modèles.

Un concept store avec un atelier où on peut personnaliser les modèles chacun à sa guise. Un concept store qui met à la disposition des usagers une expérience artistique avec la vente des œuvres d’art et meubles exclusifs. On prévoit aussi une boutique restaurant. Cette nouvelle tendance expose d’un coté ses ingrédients et de l’autre coté le restaurant propose aux visiteurs les mêmes ingrédients à consommer sur place. Le pavillon propose aux marcheurs une galerie d’art avec une extension en plein air sur le lac ce qui animera le parcours des passants. Enfin, on prévoit un espace Wifi où on peut prendre un café et se connecter. Cet espace invitera les piétons à se diriger vers le pavillon et le traverser pour trouver cette zone Wifi.

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N Lac

Figure 117 : Esquisse de plan

Le pavillon s’implante de part et d’autre du terre plein afin de garder une perspective ouverte sur le Lac de Tunis

Figure 118 : Rampe / Avenue

La rampe offre aux piétons une nouvelle expérience de marche

Figure 119 : Rampe / Lac La rampe mène vers une destination finale: la plateforme d’observation

Piste cyclable Figure 120 : Croquis intérieur

Les fonctions sont visibles de l’extérieur, le piéton peut le traverser .

Aménagement urbain / Traitement au sol Figure 121 : Schéma traitement au sol

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Synthèse : Concepts adoptés pour l’émergence du projet

Séquence Créer des séquences sur le parcours de l’avenue Habib Bourguiba. Chaque séquence propose une nouvelle expérience de marche et de découverte à partir de la place du 14 Janvier jusqu’aux rives du lac, les séquences représentent des nouveaux moments dans la marche expérientielle des piétons.

Ambiance Offrir des ambiances qui animent le parcours du marcheur. Ces ambiances construisent des atmosphères dans l’environnement paysager des marcheurs le long de l’avenue Habib Bourguiba à travers la musique , la lumière interactive et la sculpture urbaine.

Contemplation / Observation Aménager des espaces de contemplation pour les piétons en les invitant à s’arrêter et à observer l’environnement architectural et urbain qui les entourent à différents endroits du parcours jusqu’à une plateforme d’observation sur le Lac de Tunis.

Transparence Garder une perspective ouverte sur le lac à travers la transparence. Le projet d’architecture est un moment sur l’avenue Habib Bourguiba qui invite les usagers à le traverser, à s’arrêter sans devenir un obstacle sur leurs parcours.

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Conclusion

Ce projet de mémoire d’architecture est d’abord né d’une idée lyrique ; l’idée de la marche. Mais c’est la dynamique de l’avenue Habib Bourguiba et son histoire qui ont fait évoluer cette idée pour se concrétiser en un projet d’architecture. Le thème de la marche est le point de départ d’un chemin ponctué par des recherches sur la marchabilité et le parcours. Les théories et les projets urbains et architecturaux ont affirmé la possibilité d’implanter un projet sur un site névralgique du centre de Tunis et qui fait partie de la mémoire collective des Tunisiens. L’avenue Habib Bourguiba est une promenade ponctuée de moments urbains et emblématiques qui font de ce parcours un espace urbain propice à la marche. Ce parcours ne demande qu’à être prolonger vers son lac pour que ses innombrables usagers puissent continuer leur flânerie. Le choix de séquencer le parcours à partir de la place du 14 Janvier s’écoule de l’idée de guider le marcheur pas à pas vers les berges du lac de Tunis et qui n’est qu’un prétexte qui cherche à relier l’avenue Habib Bourguiba et son lac. Par ailleurs, ce projet garde une perspective ouverte sur le lac offrant ainsi aux flâneurs la possibilité de rêver sur les rives du lac de Tunis.

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Bibliographie Essais - Bachelard, G.La poétique de l’espace, Bibliothèque numérique «Les classiques des sciences sociales», Québec 1957 - Careri, F. Walkscapes, walking as an aesthetic practice, Culicidae Press, Iowa, USA, 2017 - Debord, G. «Introduction à une critique de la géographie urbaine» in Les lèvres nues, n°6, Bruxelles, 1955. - GUILAINE, J. La préhistoire d’un continent à l’autre, Librairie Larousse, Paris, 1989 - GROS, F. Marcher, une philosophie - Thoreau,Henry D. De la Marche, Ed. Mille et une nuit, 2003 - Juhani Pallasmaa, The Embodied Image: Imagination and Imagery in Architecture, John Wiley & Sons, 2011 - Le Corbusier, Jeanneret P. OEuvres Complètes, vol.2, 1929-1934. Zurich : Girsberger, 1952 - Santelli S., 1995. Tunis, le creuset méditerranéen, édition Demi-Cercle / CNRS, collection La Ville, Paris. -Wunenburger, Jean-Jacques, L’imaginaire, Paris : Presses Universitaires de France. 2013 - ZEVI, B. Apprendre à voir l’architecture, Les Éditions de Minuit, Paris, 1959,

Articles Christy Anderson, David Karmon, On foot : Architecture and Movement, The architectural review, 12 October 2015 Héloïse Lhérété , Le sens de la marche, Sciences Humaines, Mensuel N° 240 - août - septembre 2012 Nic Ulmi, Marche urbaine: l’hypermodernité va à pied, Le Temps, 3 Avril 2017 Nicolas Truong, »La marche est un authentique exercice spirituel» ,LE MONDE | 24.06.2011 Sébastien Bohler, «Les pensées viennent en marchant», Pour la science, Mars 2010 Nic Ulmi, Marche urbaine: l’hypermodernité va à pied, Le Temps, 3 Avril 2017

Sites Internet www.cnu.org/resources/what-new-urbanism www.veoliatransdevlab.com www.walkshed.org www.mercer.fr/

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Articles scientifiques - Alejandra Pumar Silveira, Le parcours en architecture, Mastère CTC, ENSCI - Allen Glicksman, Is “Walkability” A Useful Concept for Gerontology?, Journal of Housing For the Elderly -Izzo Alice. Pas à pas avec Francesco Careri et son essai Walkscapes : la marche comme pratique esthétique. In: Le Globe. Revue genevoise de géographie, tome 154, 2014. Géographie, mythes, contes, archétypes. -Borisenkova A. Le flâneur comme lecteur de la ville contemporaine, RUSSIAN SOCIOLOGICAL REVIEW. VOL. 16. NO 2, 2017 - Forsyth, Ann. 2015. What is a walkable place? The walkability debate in urban design. Urban Design International 20, no.4: 274-292. - François Raulin, Sébastien Lord et Paula Negron-Poblete, Évaluation de la marchabilité de trois environnements urbains de la région métropolitaine montréalaise à partir de l’outil MAPPA, VertigO, Volume 16 numéro 2 | 2016 - Giampaolo Nuvolati, « Le flâneur dans l’espace urbain », Géographie et cultures [En ligne], 70 | 2009, mis en ligne le 25 avril 2013, consulté le 30 septembre 2016. - Héloïse Pagnac-Baudry. Ambiance et marchabilité dans les nouveaux écoquartiers. Les Berges du Lac – quartier Ginko (Bordeaux) et Les Berges de Saône – quartier Confluence (Lyon). Nicolas Rémy (dir.) ; Nicolas Tixier (dir.). Ambiances, tomorrow. Proceedings of 3rd International Congress on Ambiances. Septembre 2016, Volos, Greece, Sep 2016, Volos, Grèce. International Network Ambiances ; University of Thessaly, vol. 2, p. 823 - 828, 2016. -Jean-Paul Thibaud, Aurore Bonnet, Martine Leroux, Rachel Thomas. Les compositions de la marche en ville. Contribution de l’équipe Cresson au rapport de recherche final Winkin Yves et Lavadinho Sonia (éds.), 2008 ” Des villes qui marchent, tendances durables en urbanisme, mobilité et santé ”. [Rapport de recherche] 73, Cresson; ENS Lyon; Université de Lyon. 2007, pp.113. - Miaux, S. (2008). Le piéton : un acteur privilégié de l’espace public barcelonais. Cahiers de géographie du Québec, 52(146), 175–190. doi:10.7202/019587ar - Rachel Thomas. La marche en ville : Une histoire de sens. Espace Geographique, Éditions Belin, 2007, p. 15-26. - Rejeb H., Kalti-Nabli N. , Saidane, I. ; Meddeb S. et Vidal R., « L’arbre et sa contribution dans la valorisation de l’image de l’espace urbain », ESHE, ENSP

Thèses de doctorat Sonia Lavadinho. Le renouveau de la marche urbaine : Terrains, acteurs et politiques. Géographie. Ecole normale supérieure de lyon - ENS LYON, 2011.

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Table des figures

NB : les figures avec la mention (*) sont produites par l’auteur

Figure 1* : Scène du film Stalker d’Andrei Tarkovski Figure 2 : Couverture de Walkscapes / www.culicidaearchitecturalpress.com/careri-walkscapes/ Figure 3 : Couverture de Walkable City / www.macmillan.com Figure 4: Symbole du Ka / www.pinterest.dk/spoomatt Figure 5: Affiche excursion Dada / www.moma.org/collection/works/184056 Figure 6 : The Naked City, 1957 / http://www.frac-centre.fr/collection-art-architecture Figure 7 : Walking a line in Peru, 1972 / www.richardlong.org/Sculptures/2011sculptures/lineperu Figure 8 : Margate Marine Pool, 2010 /www.turnercontemporary.org/exhibitions Figure 9 *: Gerry, Gus Van Sant, 2002 Figure 10 *: Elephant, Gus Van Sant, 2003 Figure 11 *: Last Days, Gus Van Sant, 2005 Figure 12 *: La haine, Kassovitz, 1995 Figure 13: Les bénéfices de la marche / www.maman-et-futur-maman.over-blog.com Figure 14: L’école d’Athène, Raphael 1509-1510 / www.cndp.fr Figure 15: Le mouvement du corps en marchant / anonyme Figure 16: La dominance des voitures dans le design urbain / par Mikael Colville-Andersen Figure 17: Vue du ciel sur la Rambla del Mar / www.tripadvisor.fr Figure 18: Plan de situation / Google Earth Figure 19: Matériaux utilisés / www.tripadvisor.fr Figure 20: Vue sur le pont pédestre / www.tripadvisor.fr Figure 21: Las Ramblas, le parcours pédestre de Barcelone / www.wikipedia.com Figure 22 *: Schéma de l’implantation du projet par rapport au site Figure 23 *: Une perspective ouverte sur la ville Figure 24 *: Musée Felix-Nussbaum-Haus, Osnabrück, Allemagne Figure 25: Exposition «The Art of Scent»/ par Diller Scofidio + Renfro/ dsrny.com/project/art-of-scent Figure 26 * : Distance/ Temps Figure 27 *: Différence entre le parcours du passant et du flâneur Figure 28 : Jeff Speck / www.TED.com Figure 29 *: Hiérarchie des voies Figure 30 *: Mixité d’usage Figure 31: Le theatre de Détroit, Michigan construit en 1926 réaffecté en un espace de Parking / www.reddit.com Figure 32 : Café Ellouh réaffecté en espace de Parking / www.realites.com.tn Figure 33 *: Bus / Tram Figure 34 *: Trajet à pieds / Transport Figure 35: Piste vélo à Washington DC

5 6 6 11 11 13 13 13 14 14 14 14 15 16 16 18 18 19 19 19 20 21 21 24 24 30 30 31 31 31 32 32 32 32 32 33

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Figure 36 *: Protection des piétons Figure 37: Activités dans les espaces publics de la ville / Collectif Transforming the [re]public Figure 38 *:Ambiance/Ombre, vue depuis Rue Essaada, La Marsa Figure 39 *: Corquis sur l’alignement des ficus sur l’avenue Habib Bourguiba Figure 40 *: Les conditions de marchabilité Figure 41 : Carte Atlanta Beltline / New York Times Figure 42 : Schémas conceptuels du projet / Atlanta Beltline Inc. Site officiel Figure 43 : Structure d’accueil du DH Stanton parc / Atlanta Beltline Inc. Site officiel Figure 44 : Artiste performant sous un pont décoré par un graffiti / Atlanta Beltline Inc. Site officiel Figure 45 : Trois ouvriers de Jac Coffrey / Atlanta Beltline Inc. Site officiel Figure 46 : Le parc de la piste Est du Beltline / Atlanta Beltline Inc. Site officiel Figure 47: Perspectives 3D Atlanta Beltline / Atlanta Beltline Inc. Site officiel Figure 48 : Carte postale, fin XIX siècle Figure 49 *: Les ficus sur l’avenue Habib Bourguiba actuellement / Google Earth Figure 50 *: Alignement des ficus, vue depuis l’échangeur A1 Figure 51 *: Alignement des ficus, vue depuis la place de l’indépendance Figure 52: Vue sur les ficus de l’avenue Jules Ferry / www.harissa.com Figure 53: Vue sur l’avenue Jules Ferry / www.wikipedia.com Figure 54: Projet de réaménagement de l’avenue Habib Bourguiba 1999 / Rejeb H., Kalti-Nabli N. , Saidane, I. ; Meddeb S. et Vidal R.ESHE, ENSP Figure 55 : Centre ville de Tunis sur Walk Score / www.walkscore.com Figure 56 : Calcul de marchabilité, Tunis / www.walkscore.com Figure 57 : PERCEPTION/RAPPROCHEMENT

/ Alejandra Pumar Silveira,

Le parcours en architecture, Mastère CTC, ENSCI Figure 58 : Les différentes moments d’un parcours architectural / www.pinterest.com Figure 59 : Ce que voit le marcheur / www.pinterest.com Figure 60 : Ce que voit l’automobiliste à 50 km/h / www.pinterest.com Figure 61 : Vue sur Clara-Clara Figure 62 : Richard Serra / www.swissinfo.ch Figure 63 *: Plan actuel sur l’entrée du jardin/coté place de la Concorde /Google Earth Figure 64 *: Coupe schématique / Cadrage de vue sur l’obélisque Figure 65 *: Forme / Parcours Figure 66 *: Perspective sur la place de la Concorde Figure 67 : Clara-Clara par Yann Arthus- Bertrand / www.yannarthusbertrand.org Figure 68 *: Vue sur la Place de Bab Bhar Figure 69 *: Vue entre la Médina et la ville coloniale Figure 70 *: Vue sur la Place de l’indépendance Figure 71 *: Vue depuis la place du 14 Janvier Figure 72 *: Vue direction Lac Figure 73 *: Vue sur l’avenue Habib Bourguiba (Nuit) Figure 74 : Perspectives d’aménagement de Tunis par Valensi en 1920 / Serge Santelli, Tunis le creuset méditerranéen Figure 75 : Carte géographique du Nord de la Tunisie / Google earth Figure 76 : Carte géographique de Tunis / Google earth Figure 77 *: Plan schématique indiquant les tronçons par rapport aux repères Figure 78 : Coupe à partir de la Qasbah vers le Lac / Google earth Figure 79: Coupe de l’avenue de Carthage jusqu’au Lac/ Google earth

33 33 34 34 35 36 36 37 37 37 37 38 39 40 40 40 41 41 41 42 42 45 46 47 47 49 49 50 50 51 51 52 55 55 55 56 56 56 58 59 59 59 60 60

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Figure 80 : Coupe sur le terrain du Lac 3 / Google earth Figure 81 *: Plan indiquant les différentes séquences du processus conceptuel - Ech 1/500 Figure 82 *: Schéma Tronçon A Figure 83 *: Vue sur Bab Bhar Figure 84 *: Perspective sur l’avenue Habib Bourguiba depuis Bab Bhar Figure 85 *: Vue sur l’installation ‘I love Tunis et la statue de Ibn Khaldoun Figure 86 *: Vue sur la cathédrale Saint Vincent de Paul Figure 87 *: Vue sur l’avenue Habib Bourguiba Figure 88 *: Coupe schématique Figure 89 *: Schématisation du flux véhiculaire au niveau de la place Figure 90 *: Vue sur «Monguéla» de la place 14 Janvier Figure 91 *: Schématisation du flux véhiculaire / croisement avenue HB et avenue de la République Figure 92 *: Vue en dessous de l’échangeur A1 Figure 93 *: Vue sur le rond point Figure 94 *: Flux véhiculaire , zone TGM Figure 95* : Vue sur l’avenue HB, direction TGM Figure 96* : Vue sur le trottoir coté TGM Figure 97* : Flux véhiculaire Figure 98 : PAU projeté Ech 1/1000 / Atliers Lion Associés Figure 99 : Perspective sur l’extension de l’avenue Habib Bourguiba vers le lac de Tunis / Atliers Lion Associés Figure 100 : Distribution programmatique Secteur A / Atliers Lion Associés Figure 101: Distribution des CUF au secteur A / Atliers Lion Associés Figure 102* : Coupe schématique sur la hauteur projetée Figure 103* : Coupe schématique sur le prolongement des ficus Figure 104 *: Esplanade du lac Figure 105 *: Vue sur Djebel Boukornine Figure 106* : Plan indiquant les différentes séquences du processus conceptuel - Ech 1/500 Figure 107 *: Plan de situation Ech 1/500 Figure 108* : Esquisse passage souterrain - Ech 1/100 Figure 109 *: Plan de situation Ech 1/500 Figure 110 *: Esquisse aménagement du rond point - Ech 1/100 Figure 111*: Esquisse aménagement Figure 112* : Plan de situation Ech 1/500 Figure 113*: Mur musical : art interactif créant une nouvelle ambiance Figure 114 * : sculpture au niveau du terre plein Figure 115*: Esquisse aménagement - Ech 1/100

60 61 62 62 62 63 63 63 63 64 64 64 64 64 65 65 65 65 66 66 66 67 67 67 67 67 69

70 70 71 71 71 72 72 72 73 74 75 75 75 75 75

Figure 116 *: Plan d’implantation - Ech 1/1000 74 Figure 117 *: Esquisse de plan 75 Figure 118 *: Rampe / Avenue Figure 119 *: Rampe / Lac Figure 120 *: Croquis intérieur Figure 121* : Schéma traitement au sol

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Annexes

Plan de masse du plan d’aménagement projeté du Lac 3 / Ateliers Lion Associés

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84

Extension avenue Habib Bourguiba


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Extension avenue Habib Bourguiba


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