AFD : Plan d'action 2013-2016 Agriculture, sécurité alimentaire et nutrition

Page 1

Agriculture

sécurité alimentaire et nutrition

2013 2016 Agence Française de Développement

Plan d’actions



SOMMAIRE

À retenir 04 I.

Le développement agricole et rural au cœur de la sécurité alimentaire

07

Fournir des marchés en croissance Concilier augmentation de la production agricole et préservation des ressources naturelles Faire des zones rurales des espaces de solutions aux grandes crises Soutenir les transformations des agricultures familiales et des filières agricoles du Sud

08 12 13 14

II. L’engagement français en faveur de la sécurité alimentaire dans le monde

15

16 17

Contribution de la France à la mobilisation internationale Engagements financiers et production de connaissances de l’AFD

III. 2013-2016 : promouvoir les politiques agricoles, les territoires ruraux et les filières agricoles 21

Des politiques publiques agricoles, rurales et alimentaires concertées Un développement partagé et durable des territoires ruraux Des filières agricoles compétitives, équitables, durables et riches en emplois Les orientations transversales prioritaires

23 27 29 36


À retenir

La forte hausse soudaine des prix agricoles et des matières premières sur les marchés mondiaux en 2009 a déclenché des mouvements sociaux dans une quarantaine de pays en développement. Ces évènements remirent la sécurité alimentaire et l’agriculture au cœur des stratégies de lutte contre la pauvreté, et, plus généralement, en haut de l’agenda international du développement. Forte croissance démographique, inégalités et pauvreté, rapide urbanisation, ralentissement de la productivité agricole, saturation des terres cultivables, dépendance accrue des pays aux importations des produits alimentaires de base, impacts macroéconomiques et sociaux de la variabilité des prix sur les marchés agricoles mondiaux, à l’exportation comme à l’importation, sont autant de défis pour la sécurité alimentaire et l’économie de nombreux pays d’intervention de l’AFD. En outre, le bouleversement climatique accroît la vulnérabilité des agricultures dans l’ensemble des zones géographiques alors que les besoins croissants en produits agricoles — alimentaires ou non — exercent une forte pression sur les ressources naturelles, engendrant des impacts environnementaux dramatiques. Enfin, les déséquilibres de développement entre campagnes et villes génèrent des flux migratoires intenses, des tensions sociales, voire des conflits politiques. Dans ce contexte, développer les filières agricoles nationales permet d’approvisionner les marchés en croissance et de réduire la dépendance des pays aux marchés agricoles mondiaux. En outre, cela permet de tirer avantage des perspectives de demande accrue en produits agricoles sur les marchés domestiques, régionaux et mondiaux, en termes d’emplois et d’équilibre entre villes et territoires ruraux. Par ailleurs, une transition rapide des agricultures et des filières vers des modes de production écologiquement intensifs, à la fois plus productifs, plus économes en capital naturel et plus résilients, est indispensable. L’agriculture doit contribuer à stopper les évolutions catastrophiques que sont le bouleversement climatique et l’extinction des espèces. Faire de l’agriculture un des secteurs moteurs d’une croissance durable et inclusive (c’està-dire profitable pour tous) impose aux pays d’intervention de l’AFD d’accélérer et d’amplifier les transformations de leurs agricultures. À ce titre, les exploitants familiaux sont les acteurs premiers du progrès agricole de la plupart des agricultures du monde. C’est en accompagnant leur évolution que l’on atteindra le plus facilement, le plus rapidement et à moindres coûts économiques, sociaux, politiques et environnementaux, l’objectif de sécurité alimentaire. C’est pourquoi la transformation des exploitations agricoles familiales, dans leur extraordinaire diversité, est au cœur des interventions de l’AFD dans toutes les zones géographiques.

4


Les interventions de l’AFD doivent améliorer durablement la sécurité alimentaire des ménages ruraux et urbains par un soutien aux politiques agricoles, alimentaires et nutritionnelles, aux territoires ruraux et aux filières, en intégrant les enjeux de développement durable. Ces interventions portent sur trois dimensions complémentaires : • Les politiques publiques agricoles, rurales et nutritionnelles : améliorer et accompagner ces politiques et, ainsi, créer un environnement institutionnel favorable aux investissements des exploitations agricoles et des entreprises et aux transitions agro-écologiques. • La gouvernance, l’équipement et la conservation du capital naturel des territoires ruraux : soutenir leur développement économique et social équilibré et la conservation de leurs ressources naturelles en améliorant la gouvernance des collectivités rurales, l’équipement et leur désenclavement, de façon à dynamiser l’économie rurale, à améliorer la qualité de vie dans ces territoires. • La structuration des filières agricoles, agroalimentaires et agroindustrielles : appuyer les investissements durables et l’organisation professionnelle et interprofessionnelle de ces filières de façon à ce que les marchés domestiques et internationaux permettent un juste partage de la valeur ajoutée et offrent de meilleures opportunités pour les exploitants ainsi que des incitations croissantes pour des produits ayant toutes les qualités sanitaires, nutritionnelles et environnementales. Les engagements de l’AFD sur ces trois axes sur la période 2000-2014 sont estimés à 6 milliards d’euros, soit environ 8 % des engagements du Groupe. Cet effort est maintenu sur la période 2013-2016. Ces engagements sont portés à 15 % pour l’Afrique subsaharienne, région qui est la principale bénéficiaire des engagements de l’AFD.

5



1

LE DÉVELOPPEMENT AGRICOLE ET RURAL

AU CŒUR DE LA SÉCURITÉ ALIMENTAIRE


1 LE DÉVELOPPEMENT AGRICOLE ET RURAL

AU CŒUR DE LA SÉCURITÉ ALIMENTAIRE La croissance des filières agricoles permet de réduire l’extrême pauvreté rurale et les inégalités entre territoires, elle est la composante principale de la sécurité alimentaire et elle est au cœur des enjeux de biens publics, locaux ou globaux : eau, climat, biodiversité et santé.

Fournir des marchés en croissance La forte hausse soudaine des prix agricoles et des matières premières sur les marchés mondiaux en 2009 a déclenché des mouvements sociaux dans une quarantaine de pays en développement (PED). Ces évènements remirent la sécurité alimentaire et l’agriculture au cœur des stratégies de lutte contre la pauvreté, et, plus généralement, de l’agenda international du développement. Nourrir une population croissante est un impératif planétaire. En 2050, la Terre comptera 9 milliards d’habitants. Cependant, la production agricole progresse moins vite, voire stagne, dans plusieurs régions du monde. En effet : • Les espaces cultivables ne peuvent être étendus sauf au détriment d’espaces naturels ou en cultivant des terres peu propices. Des terres agricoles sont perdues pour l’agriculture du fait de l’extension des villes et des infrastructures. • L’intensification agricole est désormais confrontée à des limites écologiques — disponibilité et qualité des eaux, dégradation des sols, réchauffement climatique — ou techniques — ralentissement de la croissance des rendements dans les pays développés. • Enfin, le bouleversement climatique se traduit d’ores et déjà par des baisses de rendement et pourrait conduire à la submersion des zones parmi les plus productives. Plus de la moitié de la population mondiale vivra en ville en 2050, notamment dans les PED. Cette urbanisation, qui ira de pair avec un meilleur pouvoir d’achat et un changement des habitudes alimentaires — plus de protéines animales, de fruits et légumes et de produits transformés —, engendrera une demande croissante en produits agricoles — alimentaires ou non (caoutchouc, fibres, bioénergie, bois d’œuvre, chimie). La satisfaction de ces besoins nouveaux donnera un rôle accru aux marchés agricoles régionaux et mondiaux.

8


A g r i c u lt u r e , S é c u r i t é a l i m e n t a i r e e t N u t r i t i o n

En 2014,

une personne sur neuf dans le monde n’avait toujours pas accès à une alimentation

suffisante.

En 2014, une personne sur neuf dans le monde n’avait toujours pas accès à une alimentation suffisante. La volatilité des prix agricoles accroit la vulnérabilité des populations les plus pauvres qui doivent consacrer une grande part de leurs revenus à leur alimentation et qui vivent de l’agriculture. Au-delà de la nécessité d’une croissance en volume et d’une amélioration de la qualité des productions agricoles, l’objectif d’éradication de la faim est aussi et d’abord une question de justice sociale. Si la croissance économique s’accompagne de plus d’inégalités, ce que l’on observe dans de nombreux pays, cet objectif ne sera pas atteint. Or la majorité des pauvres vivent dans les zones rurales. Dans ce contexte, développer les filières agricoles locales ou nationales durables permet à la fois d’assurer la sécurité alimentaire, d’approvisionner des marchés en croissance, de réduire la dépendance à des marchés agricoles mondiaux incertains et de créer des emplois et des revenus dans les zones rurales.

« La sécurité alimentaire et nutritionnelle existe lorsque tous les êtres humains ont, à tout moment, un accès physique, social et économique à une nourriture saine dont la quantité consommée et la qualité sont suffisantes pour satisfaire les besoins nutritionnels et les références alimentaires des personnes, et dont les bienfaits sont renforcés par un environnement dans lequel l’assainissement, les services de santé et les pratiques de soins sont adéquats, le tout permettant une vie saine et active. » Comité de la sécurité alimentaire mondiale

9


La sous-alimentation dans le monde, 2012-2014 (millions et pourcentage) Amérique latine et Caraïbes Océanie 37 M 1,4 M 4,6% 0,2% Afrique 226,7 M 28,2%

Régions en développement

Régions développées

14,6 M 1,8%

790,7 M 98,2%

Asie 525,6 M 65,3%

Asie du Sud-Est 63,5 M 7,9%

Caucase et Asie centrale 6M 0,7%

Asie

Caraïbes 7,5 M 0,9%

Amérique latine 29,5 M 3,7%

Amérique latine et Caraïbes

Afrique du Nord 12,6 M 1,6%

Afrique

Asie du Sud 276,4 M 34,3%

Afrique subsaharienne 214,1 M 26,6%

Asie de l’Ouest 18,5 M 2,3%

Océanie 1,4 M 0,2%

Source : Projections de la FAO, 2014. http://www.fao.org/3/a-i4030f.pdf

10

Asie de l’Est 161,2 M 20%


A g r i c u lt u r e , S é c u r i t é a l i m e n t a i r e e t N u t r i t i o n

Carte de la faim, 2012-2014

Prévalence de la sous-alimentation (pourcentage) en 2012-2014 Dans le monde, quelque 805 millions de personnes, soit une personne sur neuf, ont souffert de sous-alimentation chronique pendant la période 2012-2014 et ne peuvent pas se procurer une nourriture suffisante pour mener une vie saine et active. Ce nombre a diminué de 100 millions au cours de la dernière décennie, et de 209 millions depuis la période 1990-1992. La grande majorité des personnes souffrant de la faim vivent dans les pays en développement, où la proportion de personnes sous-alimentées a diminué de 42 % entre1990-1992 et 2012-2014. Malgré ces progrès, 13,5 pour cent de la population totale, soit à peu près une personne sur huit, souffre de sous-alimentation chronique dans ces pays, contre 23,4 pour cent en 1990-1992. À ce jour, 63 pays en développement ont déjà réalisé le premier objectif du Millénaire pour le développement (OMD 1) consacré à la réduction de la faim, tandis que 25 ont atteint l’objectif plus ambitieux fixé au Sommet mondial de l’alimentation de 1996, à savoir réduire de moitié le nombre de personnes sous-alimentées d’ici à 2015. La cible C de l’OMD 1, qui est de réduire de moitié, d’ici à 2015, la proportion de personnes sous-alimentées dans le monde en développement, est à portée de main, à la seule condition que des progrès plus rapides soient réalisés. De grandes différences subsistent entre les régions. L’Amérique latine et l’Asie du Sud-Est ont été les sous-régions les plus efficaces, tandis que l’Asie de l’Ouest est la seule qui régresse. L’Afrique subsaharienne compte près d’une personne sur quatre qui souffre de faim chronique, soit plus d’un quart des personnes sous-alimentées dans le monde. C’est en Asie du Sud que le nombre de personnes souffrant de faim chronique est le plus élevé puisqu’il atteint plus d’un demi-milliard de personnes.

< 5 % Très faible 5 % 14,9 % Modérément faible 15 % 24,9 % Modérément élevée 25 % Élevée

34,9 %

55 % et plus Très élevée Données absentes ou insuffisantes Notes La carte montre la prévalence de la sous-alimentation dans la population des pays en développement pour 20122014. L’indicateur mesure la probabilité qu’une personne choisie au hasard dans la population consomme une quantité d’énergie alimentaire qui n’est pas suffisante pour couvrir ses besoins énergétiques et pour qu’elle mène une vie saine et active. Les données concernant le Soudan du Sud et le Soudan pour les années 20122014 n’étant pas fiables, elles ne sont pas communiquées.

Source : Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), 2014. Division des statistiques, carte de la faim, www.fao.org/hunger/fr. Reproduced with permission.

11


Concilier augmentation de la production agricole et préservation des ressources naturelles Il faut gaspiller moins, produire plus mais il faut aussi produire mieux. Le développement de la production peut se traduire par une dégradation des ressources naturelles (ressources génétiques végétales et animales, forêts, zones humides, cours d’eau et nappes, sols) : • L’expansion des terres cultivées peut se faire au détriment des forêts et des zones humides. • L’intensification agricole peut induire la dégradation des sols, l’érosion et la surexploitation des ressources en eau ainsi que la contamination des milieux. • L’exploitation des forêts pour le bois d’œuvre ou le bois énergie peut également engendrer dégradation des forêts et déforestation. Au total, selon le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), l’agriculture et l’élevage sont responsables de 34 % des émissions de gaz à effet de serre (GES) du fait des émissions de C02, de N2O et de CH4 et du changement d’usage des terres (conversion de forêts et de savanes en terres agricoles) qu’ils peuvent induire. Les agricultures peuvent engendrer des impacts environnementaux irréversibles sur l’environnement. Simultanément, le dérèglement climatique aggrave la vulnérabilité des agricultures des PED. L’Afrique subsaharienne est à cet égard particulièrement vulnérable car l’agriculture y est d’abord pluviale. L’Afrique du Nord et le Moyen-Orient où il n’existe plus guère de marge pour une augmentation des surfaces en culture pluviale et où le potentiel d’irrigation est pleinement exploité, sont également très exposés. L’Asie est d’ores et déjà le continent le plus affecté par les catastrophes naturelles et le réchauffement climatique y aura des impacts dramatiques — submersion de vastes surfaces dans les deltas et sur les côtes, fonte des glaciers himalayens, etc. Les solutions existent. Elles permettront aux agriculteurs des PED de s’engager sur des trajectoires réconciliant productivité, revenu, réduction des émissions de GES et stockage du carbone, adaptation aux effets du changement climatique et conservation, voire restauration, des ressources naturelles. En mettant en œuvre les meilleures options agro-écologiques et en faisant les meilleurs choix d’organisation économique, il est possible de répondre à l’ensemble des défis auxquels les agriculteurs des PED sont confrontés.

12


A g r i c u lt u r e , S é c u r i t é a l i m e n t a i r e e t N u t r i t i o n

Interactions entre agriculture et biens publics mondiaux Biens publics mondiaux

Enjeux agricoles

Biodiversité

Compétition entre espaces agricoles et naturels Diversité des paysages agricoles et des bassins versants Biodiversité dans les espaces cultivés Biodiversité des auxiliaires de l’agriculture (macrofaune du sol, pollinisateurs, prédateurs des ravageurs)

Climat

Extension des espaces cultivés au détriment des zones forestières et des savanes Émission de GES dans les exploitations Émission de GES en aval de la production

Eau

Qualité des eaux en aval (aquifères et cours d’eau) de l’agriculture (nitrates et pesticides) Gaspillage de l’eau prélevée, inégalité dans le bassin versant

Santé

Pathologies d’origine chimique : pesticides Maladies humaines d’origine animale : alimentation et maladies émergentes Malnutritions : styles et régimes alimentaires non diversifiés et non équilibrés

Faire des zones rurales des espaces de solutions aux grandes crises Les écarts de développement au sein de nombreux PED — entre territoires ruraux eux-mêmes et entre territoires ruraux et villes — engendrent des migrations (des zones rurales pauvres vers d’autres zones plus propices à l’agriculture et les villes) qui peuvent être, elles-mêmes, à l’origine de tensions communautaires, voire de conflits. À ce titre, les politiques agricoles et de développement rural jouent un rôle de régulation de ces évolutions démographiques et de prévention des tensions. En effet, elles permettent aux territoires ruraux de mettre en valeur leur capital naturel de manière durable. En outre, elles facilitent la création d’emplois et de revenus pour les ruraux, à travers l’établissement ou l’expansion des exploitations agricoles et des entreprises de transformation de leurs produits, mais aussi par l’amélioration des conditions de vie. Dans les 30 ans à venir, les politiques agricoles et de développement rural des PED devront faire en sorte que les campagnes nourrissent les villes et que les revenus et les conditions de vie des ruraux et des urbains convergent de façon à réguler l’urbanisation. Durant cette période, l’agriculture sera un moteur de développement. L’agriculture et l’ensemble des activités des secteurs secondaires et tertiaires qui lui sont nécessaires en amont et en aval de la production, offriront des opportunités de croissance, d’emplois et de revenus du fait de la croissance des produits agricoles sur les marchés domestiques, régionaux et mondiaux. Pour que cette perspective se traduise par un recul de la pauvreté et de la faim dans les zones rurales, il faut faire les bons choix stratégiques. 13


Soutenir les transformations des agricultures familiales et des filières agricoles du Sud Les exploitations agricoles familiales, dans leur grande diversité, assurent l’essentiel de la production agricole dans le monde, quel que soit le niveau de développement des pays. En raison de leur importance sociale, politique et économique et de leurs capacités d’adaptation aux évolutions et évènements de diverses natures (demande, prix, climat, maladie), c’est par la transformation de ces exploitations familiales agricoles qu’il sera possible de relever les défis agricoles. Les exploitations familiales des PED sont plus ou moins connectées aux marchés agricoles. Pour améliorer la qualité de vie des ruraux, c’est-à-dire l’accès aux services de base (santé, éducation, information, eau potable, énergie, etc.) après réserve des produits nécessaires à l’alimentation de la famille, la part des produits commercialisés à un juste prix doit augmenter. Cela implique que ces exploitations aient un accès aisé aux marchés locaux et nationaux, qu’elles ne soient pas confrontées à une concurrence déloyale de produits importés (dumping). Cela implique aussi qu’elles aient elles-mêmes accès aux marchés internationaux dans des conditions satisfaisantes. À cet égard, les groupements de producteurs et les entreprises de transformation et de commercialisation jouent un rôle clé. Dès lors que leur approvisionnement est assuré par des exploitations familiales, une contractualisation permet de pallier les défaillances des marchés du crédit, des intrants, du conseil agricole. Encore faut-il que les relations entre les exploitations et les entreprises soient équilibrées. La structuration des filières agricoles multi-acteurs par des organisations professionnelles et interprofessionnelles, sous le regard de la puissance publique, peut permettre à des exploitations familiales d’être présentes sur des marchés nationaux et régionaux, voire mondiaux. Ces filières peuvent être limitées à un territoire de proximité (les produits alimentaires pour la ville voisine) ou internationalisées (le cacao, l’hévéa, le coton pour l’exportation). L’équité dans le partage des risques et de la valeur est le premier critère de durabilité d’une filière, le second étant la réalité des prix de marché.

Les agricultures familiales sont définies par le fait que les prises de décision, l’apport de capital et le recours à la main d’œuvre sont quasiexclusivement d’origine familiale. La taille de ces exploitations est souvent modeste (95 % cultivent moins de 5 ha en Afrique subsaharienne). Elles assurent différentes fonctions : production, emploi, gestion des ressources naturelles, permanence des cultures rurales, entretien des paysages ruraux. Cette définition recouvre une grande diversité de situations socioéconomiques et de systèmes de production imposant de parler des agricultures familiales au pluriel.

14


2

L’ENGAGEMENT FRANÇAIS EN FAVEUR

DE LA SÉCURITÉ ALIMENTAIRE DANS LE MONDE


2 L’ENGAGEMENT FRANÇAIS EN FAVEUR

DE LA SÉCURITÉ ALIMENTAIRE DANS LE MONDE Entre 2000 et 2014, les projets contribuant au développement de l’agriculture et des campagnes et, finalement, à la sécurité alimentaire des zones rurales, ont représenté 6 milliards d’euros, soit environ 8 % des engagements de l’AFD.

Contribution de la France à la mobilisation internationale Depuis 2008, la mobilisation contre la faim dans le monde a conduit à des initiatives visant à améliorer la gouvernance mondiale : réforme du Comité de la sécurité alimentaire mondiale, création d’un Panel d’experts de haut niveau sur la sécurité alimentaire pour éclairer les décisions politiques, système d’information sur les marchés agricoles, etc. À l’échelle régionale, les dirigeants africains (Sommet de l’Union Africaine de Maputo en 2003 confirmé par le Sommet de Malabo en 2014) ont adopté un programme détaillé de développement de l’agriculture africaine (PDDAA) dans le cadre du Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD). Ils se sont donnés pour objectif de relever la productivité agricole de 6 % par an et de consacrer 10 % de leur budget à l’agriculture. La France, conformément aux décisions prises dans le cadre du G8, du G20 et de l’Union européenne, contribue à cette mobilisation internationale. Les positions qu’elle défend dans les organisations et instances internationales font d’ailleurs l’objet d’un dialogue permanent entre les parties prenantes françaises dans le cadre du Groupe interministériel pour la sécurité alimentaire.

16


A g r i c u lt u r e , S é c u r i t é a l i m e n t a i r e e t N u t r i t i o n

Engagements financiers et production de connaissances de l’AFD Dans le cadre de mandats différenciés qui lui sont donnés par les autorités françaises en fonction du niveau de développement des pays où elle est autorisée à intervenir, l’AFD finance des projets contribuant (i) au développement de filières agricoles durables et inclusives, (ii) à l’amélioration du cadre de vie et de l’équipement des territoires ruraux ainsi que (iii) à la préservation, la valorisation voire la restauration, des ressources naturelles qui jouent un rôle souvent déterminant pour l’économie des zones rurales. En Afrique, Asie, Méditerranée et Moyen-Orient ainsi qu’en Amérique latine, l’AFD finance les politiques des États, les projets des établissements publics et des organisations de la société civile ainsi que tous les acteurs économiques privés directement, entreprises, banques et institutions de microfinance et, à travers elles, les exploitants agricoles et les petites entreprises de service ou de transformation agricole. Elle dispose, pour cela, d’une large palette d’outils financiers : subventions, prêts souverains aux États et aux acteurs publics et prêts non souverains (sans garantie de l’État) aux acteurs privés, pouvant être bonifiés. La filiale de l’AFD dédiée au secteur privé intervient par des prêts aux conditions du marché et des prises de participation.

Évolution des engagements de l’AFD sur la période 2000 à 2014 1200

Engagements en millions d’euros

1000 800 600 400 200 0

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

Compte tenu de la priorité politique donnée par la France à l’Afrique subsaharienne, cette région reste le principal bénéficiaire des engagements de l’AFD dédiés à la sécurité alimentaire entre 2000 et 2014 (46 %).

17


Répartition des engagements par région, total cumulé sur la période 2000-2014 Multipays 1% Méditerranée et Moyen-Orient

23% 46% Afrique subsaharienne

Asie

20% 10% Amérique latine et Caraïbes

15 % des financements de l’AFD pour l’Afrique subsaharienne sont consacrés

à la sécurité alimentaire et au développement rural, soit environ

400 millions d’euros

chaque année.

Conformément aux engagements pris par la France en 2008 au Sommet du G8 de L’Aquila, l’AFD a octroyé un milliard d’euros pour le développement rural et la sécurité alimentaire en Afrique subsaharienne entre 2009 et 2012. Ceci a représenté, sur l’ensemble de cette période, environ 8 % des engagements du groupe AFD en Afrique subsaharienne. L’ensemble des outils financiers du groupe a été mobilisé pour soutenir les efforts des différents acteurs publics et privés, dans la mise en œuvre de leurs stratégies nationales d’investissement agricole et de sécurité alimentaire, conformément à l’impulsion donnée par le NEPAD. Cette priorité accordée à l’Afrique subsaharienne a été confirmée en 2013 avec un engagement de consacrer 15 % des financements de l’AFD pour l’Afrique subsaharienne à la sécurité alimentaire et au développement rural, soit environ 400 millions d’euros chaque année. Les pays d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique centrale, notamment les pays sahéliens, sont les premiers destinataires de ces concours. Outre ses financements, l’AFD partage son expérience et celle de ses partenaires au travers de la production de connaissances en appui aux opérations, au moyen d’évaluations de projets, de recherches, d’études et expertises collectives. La production de connaissances est réalisée en partenariat avec des experts issus de bureaux d’études ou de la recherche, mais aussi en s’appuyant sur les organisations de la société civile et le secteur privé, en France et au Sud.

18


A g r i c u lt u r e , S é c u r i t é a l i m e n t a i r e e t N u t r i t i o n

Des exemples de valorisation d’expériences et d’expertises…

19



3

2013-2016Â : promouvoirÂ

les politiques agricoles, les territoires ruraux et les filières agricoles


3 2013-2016 : promouvoir

les politiques agricoles, les territoires ruraux et les filières agricoles La nature des transformations que connaissent les exploitations agricoles, les filières agricoles, agroalimentaires et agroindustrielles ainsi que les paysages ruraux, est déterminante d’un avenir durable. Des politiques publiques agricoles permettent de faire les bons choix. Sur la période 2013-2016, les interventions de l’AFD concernent trois dimensions : • les politiques agricoles pour rendre l’environnement institutionnel favorable aux agriculteurs et aux entreprises, petites et grandes ; • la gouvernance foncière et l’équipement des collectivités rurales en infrastructures de base pour les services essentiels, pour le désenclavement et la gestion de l’eau agricole, pour partager, valoriser, conserver et restaurer les espaces naturels communs ; • les filières agricoles, agroalimentaires et agroindustrielles, grâce auxquelles les exploitations agricoles sont connectées aux consommateurs locaux et nationaux d’abord, et lointains ensuite. Les interventions de l’AFD sont adaptées aux spécificités des sociétés, des économies, des territoires et des agricultures de ses pays partenaires. Les dynamiques et trajectoires y sont nécessairement très différentes. Les engagements prévus pour cette période s’élèvent à 400 millions d’euros par an pour l’Afrique subsaharienne et 300 millions d’euros par an dans l’ensemble des autres régions soit un total de 2,8 milliards d’euros sur la période de 4 ans.

22


A g r i c u lt u r e , S é c u r i t é a l i m e n t a i r e e t N u t r i t i o n

des politiques publiques agricoles, rurales et alimentaires concertées Pour être efficace, une politique publique agricole doit faire l’objet d’un dialogue entre les acteurs et être fondée sur une vision partagée des objectifs et une allocation optimale des ressources. Elle doit être garante des objectifs d’équité et de durabilité à long terme. Disposer de données sur l’économie et le capital naturel pour construire une vision partagée sur l’agriculture Le dialogue, dans la durée, sur la gouvernance politique, économique et sociale du secteur agricole doit impliquer les différents acteurs du territoire national concerné, États, organisations professionnelles agricoles (OP), entreprises et société civile. Ce dialogue doit reposer sur des données économiques de qualité et sur une vision partagée de l’impact du développement agricole du territoire national. L’AFD soutient les institutions publiques et les organisations de producteurs nationales et régionales sur différents aspects : systèmes d’informations économiques sectorielles, observatoires des exploitations agricoles et des filières, système d’information géographique sur l’usage des sols.

Prévenir et atténuer les risques agricoles L’activité agricole est exposée à trois types de risques interdépendants : • Les risques de marchés sont liés à la volatilité des prix agricoles : les outils mobilisables pour assurer à la fois stabilité des prix et rémunération suffisante des producteurs, varient selon le produit, la filière et le pays. L’AFD accompagne les États et filières souhaitant mettre en place de tels outils : fonds de lissage, contractualisation, crédit, grenier villageois… • Les risques climatiques : à court terme, l’agriculteur doit surmonter une sécheresse ou une inondation. À long terme, les pays doivent s’adapter aux effets du changement climatique. L’AFD appuie la mise au point et la diffusion de pratiques agronomiques, de la parcelle au paysage, permettant de limiter les effets des aléas climatiques et de tirer le meilleur parti de l’eau. L’AFD accompagne aussi des initiatives de couverture financière des risques climatiques : crédits, assurances indicielles, fonds de solidarité et de calamité. • Les risques zoo et phytosanitaires : la prévention et la gestion des crises sanitaires sont réalisées par des services de l’État (quarantaines, laboratoires, répression des fraudes…), des professionnels privés. Leurs capacités doivent être renforcées et leurs relations formalisées. L’AFD apporte son appui via les organisations sous-régionales (CEDEAO1 pour les questions phytosanitaires, Commission ad hoc contre le criquet pèlerin via la FAO, Organisation mondiale de la santé animale pour les risques vétérinaires).

1 Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest

23


Risques agricoles et partenariat avec les bailleurs de fonds internationaux L’AFD soutient les organisations internationales compétentes en matière de prévention et gestion des risques agricoles : • Avec l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) : lutte préventive contre le criquet pèlerin en Afrique de l’Ouest et du Nord-Ouest grâce à des unités nationales de lutte antiacridienne, une commission régionale renforcée et des mécanismes de gestion durable adéquats et lutte contre le criquet migrateur à Madagascar. • Avec l’Organisation mondiale de la Santé Animale (OIE) : renforcement des capacités dans le domaine de la santé animale et de la sécurité sanitaire des aliments avec les pays d’intervention de l’AFD. • Avec le Fonds international de développement agricole, l’Union européenne, la Banque africaine de Développement, l’Italie et le NEPAD : constitution d’une plateforme pour la gestion des risques agricoles (PARM)2 qui appuie neuf pays d’Afrique subsaharienne dans l’intégration de la gestion des risques dans les politiques agricoles nationales en Afrique subsaharienne.

2 Plus d’informations sur PARM : http://www.ifad.org/english/parm/index.htm

24


A g r i c u lt u r e , S é c u r i t é a l i m e n t a i r e e t N u t r i t i o n

Formuler et mettre en œuvre des stratégies de prévention et de prise en charge des personnes malnutries Dans les pays les plus pauvres, la malnutrition concerne un enfant sur deux. Revenus et conditions de vie des populations déterminent en partie leur situation nutritionnelle ― surtout celle des jeunes enfants et des femmes. Des mesures de réduction de l’impact des chocs (climat, hausse des prix, etc.) sur la nutrition des plus pauvres doivent alors être considérées ainsi que la prise en charge des malnutritions chronique et aigüe. Les interventions de l’AFD s’appuient sur les recommandations formulées par le document d’orientation stratégique pour la nutrition dans les PED adopté par la France en 2011. L’AFD appuie notamment la connaissance de l’état nutritionnel de populations, la diversification et la qualité de l’alimentation, les bonnes gestion et utilisation des stocks de produits alimentaires, la production locale et la commercialisation d’aliments fortifiés, l’éducation nutritionnelle et sanitaire notamment en milieu scolaire ainsi que les aides ciblées aux familles vulnérables.

Sécuriser les droits fonciers et améliorer leur gestion Dès lors que certaines spéculations agricoles sont considérées comme rentables, des investisseurs, nationaux et internationaux, recherchent des terres. Pour les ayants droits historiques — qui disposent rarement de documents formels opposables — la sécurisation de leurs droits fonciers devient un enjeu vital (risque de spoliation par des décisions « administratives »). Pour les investisseurs, cette situation présente des risques de contestation des droits accordés par des autorités formelles ou coutumières non légitimes. Enfin, pour les autorités politiques, il existe des risques de conflits ou d’absence de mise en valeur de ces terres. Au travers des travaux du Comité technique « Foncier et développement », les acteurs français produisent des positions sur ces questions depuis 19963. L’AFD soutient les travaux de ce Comité dont le contexte a confirmé l’utilité. En outre, elle appuie de nombreux États dans l’élaboration de nouvelles législations du foncier agricole et leur mise en œuvre par les collectivités locales. Ces programmes sont l’occasion d’innovations institutionnelles (guichets fonciers communaux, commission locale de reconnaissance des droits et d’arbitrage) et techniques (systèmes d’information géographique et administrative), et nécessitent la formation à de nouveaux métiers du foncier rural et à la mise en place d’observatoires sur l’impact des réformes.

3 Plus d’informations sur le Comité : www.foncier-developpement.fr

25


POLITIQUES Des interventions de l’AFD adaptées aux priorités régionales

Méditerranée • Optimisation de l’usage de l’eau agricole et gestion des ressources par la demande. • Conseil agricole et conseil de gestion • Services financiers aux agriculteurs et à leurs groupements • Options d’adaptation au changement climatique

Asie du Sud-Est • Intégration économique et sociale des zones de montagne • Politique d’investissement et maintenance de l’hydraulique agricole • Indications géographiques protégées

Afrique subsaharienne • Foncier agricole et pastoral • Formation professionnelle et conseil agricole • Structuration des organisations professionnelles agricoles • Politique de développement de l’irrigation et du stockage de l’eau agricole • Gestion durable et partage des terres, des forêts et des pâturages

26


A g r i c u lt u r e , S é c u r i t é a l i m e n t a i r e e t N u t r i t i o n

un développement partagé et durable des territoires ruraux Dans les territoires ruraux des pays d’intervention de l’AFD, les activités agricoles sont le moteur économique principal. Les emplois non agricoles y sont induits par l’agriculture. Des emplois disparaissent si l’agriculture régresse et inversement. En retour, les performances des filières agricoles, et donc des exploitations, sont dépendantes de la « qualité » des territoires ruraux, en termes d’infrastructures (pistes, énergie), de gouvernance (foncier, sécurité, justice) et de services essentiels (santé, éducation, eau potable). Renforcer les capacités des collectivités locales rurales à exercer les compétences nécessaires à un développement durable de leurs territoires La plupart des pays d’intervention de l’AFD se sont engagés dans des processus de décentralisation qui transfèrent de nombreuses compétences aux collectivités locales rurales (services essentiels, petites infrastructures et ressources naturelles) auxquelles il faut désormais ajouter la gestion du foncier et de leur territoire. L’AFD accompagne cette dynamique de décentralisation depuis ses origines. Elle continue d’accompagner ce processus de décentralisation à travers l’appui technique et financier des collectivités locales rurales dans les domaines suivants : équipements collectifs et infrastructures, protection et gestion de leurs ressources naturelles, sécurisation foncière des exploitants agricoles, soutien aux acteurs économiques locaux (PME et TPE, y compris coopératives) et mise en place de mécanismes de financement permettant aux collectivités rurales d’accroître leurs capacités d’action. Ces interventions ont par ailleurs une forte dimension de renforcement de capacités des acteurs locaux — élus, autorités traditionnelles, responsables professionnels, cadres administratifs — au travers de démarches de formation par l’action.

Désenclaver et équiper les zones rurales Les routes et les pistes rurales sont les infrastructures les plus déterminantes de l’économie locale rurale. Lorsqu’elles sont insuffisantes, les agriculteurs sont pénalisés doublement : accès coûteux aux intrants et aux services et prix inférieurs pour leurs produits. Leur réhabilitation ainsi que l’ouverture de nouvelles pistes de desserte des zones agricoles sont dès lors très rentables. En appui d’une politique sectorielle nationale, du développement de filières agricoles ou de projets de développement local, l’AFD soutient les investissements nécessaires (souvent considérables pour les PED), les mécanismes financiers de maintenance des infrastructures et le développement d’entreprises d’entretien. L’énergie est un autre facteur de transformation de l’économie rurale. L’AFD soutient l’accès amélioré des ménages et des entreprises à une énergie de qualité et à moindre coût, dans le cadre de programmes nationaux d’accès à l’énergie ou d’investissements privés : connexion au réseau électrique, quand cela est possible, des unités de transformation des produits agricoles et des agglomérations rurales, équipement des unités de transformation, développement des énergies renouvelables hors réseaux (solaire photovoltaïque, petite hydraulique, biomasse).

27


Améliorer l’accès aux services de base dans les zones rurales La lutte contre la pauvreté et la malnutrition nécessite une amélioration de l’accès des ruraux aux services essentiels selon des modalités spécifiques aux zones rurales concernées (dispersion des bénéficiaires, rareté des personnels spécialisés…) et selon des techniques appropriées. L’AFD intervient sur cinq services de base, à savoir : eau potable, soins de santé primaire, protection maternelle et infantile, éducation de base, télécommunication mobile et microfinances rurales.

TERRITOIRES RURAUX Des interventions de l’AFD adaptées aux priorités régionales Méditerranée En raison de leur histoire administrative, l’AFD ne finance pas les collectivités territoriales rurales des pays méditerranéens. Elle finance cependant l’équipement des territoires ruraux (routes, pistes, énergie, eau) et l’aménagement des bassins versants.

Asie du Sud-Est L’intégration des territoires « périphériques » (hautes terres au Laos, terrasses non irrigables au Cambodge) fait l’objet de programmes de développement rural et d’investissements de désenclavement.

Afrique subsaharienne et Madagascar L’AFD finance les fonds de financement des collectivités rurales pour l’équipement, l’accès aux services essentiels et le renforcement du tissu économique. Ces projets appuient les collectivités locales dans la formulation des plans communaux de développement économique, d’usage des leurs ressources naturelles, de mise en place d’une fiscalité locale (Guinée, Cameroun, Mauritanie, Bénin, Burkina Faso, Mali).

28


A g r i c u lt u r e , S é c u r i t é a l i m e n t a i r e e t N u t r i t i o n

des filières agricoles compétitives, équitables, durables et riches en emplois La valeur qui est ajoutée tout au long d’une filière doit être partagée équitablement entre tous les acteurs qui y contribuent. Les accords interprofessionnels sur un produit et les contrats qui en découlent, dans les pays d’intervention de l’AFD, corrigent et compensent les défaillances de marché et réduisent les asymétries d’information et de négociation entre de nombreuses exploitations agricoles et quelques entreprises de transformation. Les organisations de producteurs sont dès lors les maillons clés d’une filière. Soutenir les exploitations familiales agricoles, structurer les filières agricoles au bénéfice des producteurs Les exploitations familiales agricoles (EFA) sont les bénéficiaires finaux de toutes les interventions de l’AFD dans toutes les zones géographiques. Elles assurent aujourd’hui la quasi-totalité de la production agricole dans la plupart des filières. Dans un environnement propice, les EFA permettent des progrès rapide et à large échelle en termes de productivité, de flexibilité, d’emploi et de répartition des fruits de la croissance. À ce titre, leur connexion aux marchés, locaux ou internationaux, est fondamentale. Les projets que finance l’AFD traitent des quatre dimensions principales suivantes : • La structuration des organisations professionnelles agricoles (OPA) qui réunissent les agriculteurs. Les OPA peuvent, selon les filières, assurer de nombreuses fonctions : représentation syndicale vis-à-vis des pouvoirs publics sur les politiques agricoles (formation, foncier, crédit…) et représentation dans les accords de filière vis-à-vis des entreprises (formule de partage de valeur, cogestion des fonds de lissage), formation et conseil à leurs membres, fourniture des intrants agricoles à leur membres, stockage et commercialisation des produits (greniers), transformation et commercialisation des produits (lait). • La structuration des organisations interprofessionnelles (OI) de filières qui réunissent entreprises et OPA. Les OI peuvent assurer la représentation des intérêts de la filière vis-à-vis des pouvoirs publics (fiscalité, allocation des aides), établir des consensus entre acteurs de la filière (qualité des produits, partage de la valeur, discipline vis-à-vis des accords), collecter et allouer des ressources sur des points critiques (recherche, conseil, promotion de l’origine, acquisition des bonnes variétés, pistes), gérer des mécanismes d’amortissement de la volatilité des prix. • La contractualisation entre les producteurs et les entreprises. Des accords entre producteurs et entreprises de l’aval de la filière doivent être « gagnant-gagnant ». Pour l’entreprise, il s’agit de pouvoir compter sur un volume de produit conforme à sa capacité, sur une qualité de produit, sur un calendrier de livraison et sur un prix compatible avec ses coûts de marché. Pour le producteur, il s’agit d’avoir un débouché prévisible, à un prix prévisible (voire annoncé en début de campagne) et intéressant compte tenu des arbitrages qu’il doit faire sur la meilleure allocation de son temps et de sa terre. Ces arrangements facilitent l’engagement des banques. Des tiers indépendants peuvent être mobilisés pour assurer l’équité de la relation contractuelle. • La labellisation et la certification des filières. Les exigences environnementales (déforestation, surpêche), sociales (partage de valeur, travail des enfants, groupe de producteurs) et qualitative (biologique, identité géographique) des consommateurs citoyens des pays du Nord, offrent non seulement des opportunités aux agriculteurs mais elles ont en outre des effets en tache d’huile sur la structuration des filières. 29


Accompagner la mise en œuvre du Plan Maroc Vert Pilier II, agriculture des piémonts de l’Atlas au Nord L’AFD soutient la stratégie du Maroc en faveur de petites exploitations familiales agricoles, à travers le financement du Programme d’appui au Pilier II du Plan Maroc Vert (prêt de 50 millions euros, subvention de 300 000 euros). Ce programme concerne 5 000 agriculteurs de la région de Tanger Tétouan. Il contribue à la réduction de la pauvreté rurale et de la vulnérabilité des agriculteurs aux aléas économiques et environnementaux. Il appuie le développement des filières agricoles pour l’approvisionnement des marchés nationaux et internationaux et la préservation des ressources naturelles. Des projets de développement agricole, proposés par les groupements d’agriculteurs, sont subventionnés (plantation d’oliviers, d’amandiers, de figuiers, unité de trituration des olives ou de séchage des figues administrées par des groupements de producteurs). Ils permettent d’améliorer la commercialisation de produits agricoles, de développer des produits de terroirs. L’accès des agriculteurs et de leurs groupements est facilité.

Pour en savoir plus : http://carte.afd.fr/afd/fr/projet/contribuer-au-developpement-du-credit-aux-petites-exploitations-agricoles

30


A g r i c u lt u r e , S é c u r i t é a l i m e n t a i r e e t N u t r i t i o n

Soutenir une transition agro-écologique des exploitations et des paysages cultivées L’agriculture tropicale est particulièrement vulnérable aux effets du changement climatique, températures et aléas pluviométriques. Les sols tropicaux sont fragiles du fait d’une minéralisation rapide de la matière organique. Les systèmes agraires à l’équilibre le sont grâce à une gestion active de la teneur en humus des sols. Pour des raisons de productivité (la fertilité des sols et l’efficacité des engrais minéraux dépendent de la teneur en matière organique), d’atténuation et de résilience des effets du changement climatique (un sol riche garde l’eau) et d’atténuation des émissions (l’humus est un stock de carbone), il est indispensable de maintenir, de restaurer, d’amplifier les techniques agronomiques permettant de produire de l’humus. En outre, il faut redonner ou accroître la place des arbres dans de nombreux paysages cultivés. À ce titre, l’AFD soutient la mise en œuvre, de la parcelle au bassin versant, de la ferme au paysage, des meilleures options agro-écologiques et agroforestières et de préservation du couvert forestier. Elle finance des recherches appliquées en partenariat avec les agriculteurs sur les itinéraires agro-écologiques, la facilitation d’accords entre acteurs d’un bassin versant, des incitations à innover et à investir dans les plantations et la régénération des arbres utiles.

Appui à la sécurité alimentaire en Haïti Haïti fait face à une insécurité alimentaire grave et chronique. Le projet SECAL, mis en œuvre par le ministère haïtien de l’Agriculture, des Ressources naturelles et du Développement rural, vise l’accroissement de la production agricole et la réduction de la pauvreté en milieu rural dans les départements du Sud, de l’Ouest et de l’Artibonite. Plusieurs filières vivrières sont ciblées (maïs, haricot, banane plantain, avicole) au travers de l’amélioration de la production, la conservation, la transformation, la commercialisation de ces produits, une meilleure gestion des ressources en eau, le développement du financement rural ainsi que la meilleure redistribution de la valeur ajoutée. À ce jour, 200  000 personnes bénéficient de ce projet, plus de 800 producteurs sont appuyés et 1 500 ha supplémentaires de terres sont irrigués (subvention 16,2 millions d’euros).

Pour en savoir plus : http://carte.afd.fr/afd/fr/projet/ameliorer-la-securite-alimentaire-haiti

31


Développer et améliorer l’agriculture irriguée L’agriculture irriguée, avec toute la diversité des systèmes d’irrigation imaginée par les agriculteurs du monde à travers les âges, offre des perspectives considérables d’amélioration de la productivité et d’adaptation au changement climatique dans beaucoup de pays d’intervention de l’AFD. Dans tous les cas, une gestion durable de la ressource en eau, son partage équitable entre les usagers, le partage des terres irriguées, l’efficacité économique des réseaux d’irrigation, la cogestion et le cofinancement de la maintenance avec les associations d’usagers, structurent les projets financés par l’AFD.

Appui à la politique sectorielle de gestion des ressources en eau et des aménagements hydro-agricoles au Cambodge Le ministère cambodgien des Ressources en Eau et de la Météorologie a élaboré une politique sectorielle d’irrigation qui repose sur des principes de gestion intégrée des ressources en eau par bassin versant, de transfert de responsabilités aux associations d’usagers de l’eau et de partage des coûts entre l’État central, les collectivités locales et les usagers pour la gestion et la maintenance des infrastructures. Ce projet soutient la mise en œuvre de cette politique (prêt de 20 millions d’euros, subvention de 4 millions d’euros) au travers de : • l’appui du ministère dans la réhabilitation de 16 000 ha de surfaces irriguées et la pérennisation du dispositif de maintenance et de gestion partagée des périmètres irrigués (via la mise en œuvre d’outils de gestion et le dialogue entre État, sociétés rurales et autres acteurs impliqués) ; • l’appui des acteurs non-étatiques engagés dans le processus de gestion et de mise en valeur des aménagements réhabilités (associations d’usagers de l’eau, centres de service aux irrigants…) : organisation interne, formation, renforcement des compétences, gestion de l’eau, des infrastructures, suivi des flux financiers relevant des organisations paysannes (fonds de maintenance notamment). Le projet contribuera entre autres à accroître les revenus agricoles de 27 000 ménages grâce à l’augmentation des rendements de riz, le développement de cultures de contre-saison, l’extension des parcelles cultivées et la diversification des productions agricoles, et à réduire de 30 % le taux de pauvreté dans la zone concernée d’ici 2018.

Pour en savoir plus : http://carte.afd.fr/afd/fr/projet/ameliorer-les-rendements-agricoles-dans-les-zones-rurales 32


A g r i c u lt u r e , S é c u r i t é a l i m e n t a i r e e t N u t r i t i o n

Financer les acteurs des filières agricoles, agroalimentaires et agroindustrielles Le groupe de l’AFD finance les acteurs des filières agricoles selon deux modalités. L’AFD finance directement des entreprises agro-industrielles qui ont besoin de ressources de long terme, le plus souvent pour une extension ou une modernisation des usines de transformation (y compris efficacité énergétique). Des diligences environnementales et sociales sont réalisées sur ces entreprises qui, généralement, s’approvisionnent auprès de petits agriculteurs. Le cas échéant, des diligences spécifiques sont appliquées sur les acquisitions de terres. L’AFD finance indirectement, via les institutions financières locales, les agriculteurs et les PME. L’agriculture est généralement considérée comme risquée par des institutions financières (risque climatique, de marché, maladies, garanties peu réalisables). Il en résulte une faible bancarisation des agriculteurs. L’AFD accompagne les institutions financières locales (institutions de microfinance, banques locales, fonds de garantie, fonds d’investissement) en mettant à leurs dispositions des ressources financières à moyen-long terme et en renforçant leur connaissance des filières. Simultanément, elle accompagne le développement du conseil de gestion qui appuie les agriculteurs, leurs groupements et les PME dans la présentation de comptes utiles aux institutions financières.

33


Programme d’appui aux petites et moyennes entreprises agricoles et agroalimentaires (PMEAA) au Cameroun Ce programme vise le développement des activités de production, de transformation et de commercialisation de produits agricoles à travers l’accompagnement financier et non financier des PMEAA des zones rurales (subvention C2D de 5 millions d’euros). À cette fin : • L’accès des acteurs privés et institutionnels à l’information technicoéconomique sur les filières dans les bassins de production ciblés est amélioré pour aider les prises de décision organisationnelles et opérationnelles et pour une meilleure communication entre acteurs. • L’accès au crédit des PMEAA est amélioré par une meilleure adéquation des produits financiers à leurs besoins et à travers l’appui aux établissements de microfinance. • Les capacités de gestion des PMEAA et des OP sont développées par la mise en place d’une offre locale de formation et de services non financiers adaptés à leurs besoins.. Trois outils de politiques publiques sont institutionnalisés : 1 un fonds de refinancement pour des crédits moyens termes ; 2 un fonds de « chèque conseil-formation-services » pour accompagner les porteurs de projets ; 3 un dispositif de collecte et d’échanges d’informations technicoéconomiques entre les acteurs.

34


A g r i c u lt u r e , S é c u r i t é a l i m e n t a i r e e t N u t r i t i o n

FILIÈRES Des interventions de l’AFD adaptées aux priorités régionales

Méditerranée • Filières de qualité permettant de mieux rémunérer les petits exploitants des zones de montagne • Indications géographiques protégées • Transformation agroalimentaire

Asie • Différentes formes de riziculture • Contractualisation entre exploitants et entreprises sur toutes les productions • Indications géographiques protégées • Agriculture de conservation

Afrique subsaharienne et Madagascar • Développement de l’irrigation dans les pays sahéliens (grands périmètres et bas-fonds) • Structuration des organisations professionnelles agricoles • Filières contractuelles (coton, hévéa, palmier) • Inclusion financière via les institutions de microfinance et les banques

35


les orientations transversales prioritaires À ces trois axes d’intervention de l’AFD s’ajoutent des orientations transversales : • améliorer la structure et la sécurité foncière des EFA ; • améliorer et sécuriser le partage des territoires entre communautés d’ayant droit (cultures, pâturages, forêts, zones humides) ainsi que les usages et, ainsi, optimiser l’ensemble des fonctions de ces espaces (alimentation, diversification des revenus, services écosystémiques, patrimoine culturel, etc.) ; • accroître la diffusion des pratiques agricoles écologiquement intensives qui permettent, en plus de diversifier les productions, l’adaptation des systèmes agricoles au changement climatique (fixation du carbone et de l’azote atmosphériques), le contrôle des ravageurs, la conservation des eaux et de la fertilité des sols ; • renforcer la participation des organisations de la société civile à la définition et au pilotage des politiques agricoles, rurales et alimentaires, à l’échelle des terroirs et collectivités locales comme à celle des politiques nationales et sous-régionales ; • renforcer les capacités des femmes à prendre des responsabilités économiques, sociales, professionnelles, syndicales et politiques, aux niveaux local et national ; • accroître la production de connaissances adaptées et utiles aux acteurs et consolider les capacités locales de recherche et développement et de diffusion. L’AFD ne finance pas la recherche, l’achat, la promotion ou la multiplication de semences génétiquement modifiées et veille à ce qu’aucun projet, quel qu’en soit le porteur, ne contribue à la déforestation ni à la dégradation des forêts naturelles et des espaces humides. Au contraire, les projets doivent promouvoir la conservation et la restauration des zones forestières et des corridors écologiques et appliquer une politique de « zéro déforestation », impliquant l’absence de perte de forêt primaire comme de biodiversité et des actions de compensation pour toute perte de forêt secondaire. Tous les projets font l’objet d’une analyse ex ante des risques et des avantages environnementaux, sociaux et sanitaires, avant la décision d’octroi des financements, de façon à inclure les dispositifs correctifs adéquats dès la faisabilité du projet.

36


A g r i c u lt u r e , S é c u r i t é a l i m e n t a i r e e t N u t r i t i o n

Agroécologie : quinze ans d’accompagnement La technique du semis sur couverture végétale permanente (SCV), développée au Brésil à partir des années 1950, a été reprise et promue par une équipe du Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad) dans les années 1990. À partir de 2000, la coopération française (financement de 88,7 millions d’euros de l’AFD, 5,8 millions d’euros du FFEM, 2 millions d’euros du ministère des Affaires étrangères) a lancé, en juin 2000, le Plan d’action pour l’agroécologie (PAA) qui s’appuyait sur deux composantes : • Un ensemble d’actions d’adaptation et de diffusion des SCV dans différents pays représentatifs d’une diversité agroclimatique (Tunisie, Madagascar, Cameroun, Laos, Vietnam, Cambodge, etc.). • Le Programme transversal d’accompagnement (PTA), lancé en 2000, puis le Programme d’actions multi-pays en agroécologie (PAMPA), mis en place en 2007, qui avaient pour objet d’assurer la cohérence des différentes actions du PAA, les appuis techniques complémentaires, la communication et l’échange entre les différentes expériences, la capitalisation et la transmission des connaissances. Une évaluation externe menée en 2013-2014 par le Groupe de recherches et d’échanges technologiques (Gret) a permis de mesurer et d’apprécier les 15 ans d’actions d’accompagnement de l’AFD, les démarches d’apprentissage au niveau de chaque projet et du dispositif dans son ensemble, et à caractériser les facteurs de succès et d’échec des interventions pour en tirer des enseignements et formuler des recommandations pour les futures interventions de l’AFD dans le secteur agricole.

Pour en savoir plus : http://bit.ly/1ty2J4z

37




L’Agence Française de Développement (AFD), institution financière publique qui met en œuvre la politique définie par le gouvernement français, agit pour combattre la pauvreté et favoriser le développement durable. Présente sur quatre continents à travers un réseau de 72 bureaux, l’AFD finance et accompagne des projets qui améliorent les conditions de vie des populations, soutiennent la croissance économique et protègent la planète. En 2014, l’AFD a consacré 8,1 milliards d’euros au financement de projets dans les pays en développement et en faveur des Outre-mer.

Agence Française de Développement (AFD) 5, rue Roland Barthes - 75598 Paris cedex 12 France Tél. : + 33 1 53 44 31 31

www.afd.fr Création : Arc en Ciel - Mai 2015


Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.