Les dépenses pour l’accouchement médicalisé sont-elles égalitairement réparties au Burkina Faso ?

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DIALOGUES DE POLITIQUES PUBLIQUES Les dépenses pour l’accouchement médicalisé sont-elles égalitairement réparties au Burkina Faso ? Éléments de réponse d'une étude quasi-longitudinale Février 2021 – n° 22 | Facilité de recherche UE-AFD sur les inégalités

MESSAGE Des nouvelles recherches s’intéressent à la manière dont les dépenses publiques et globales de santé pour l’accouchement médicalisé sont devenues plus égalitaires lors du déploiement de politiques ciblant les soins de santé maternels universels au Burkina Faso. Au fil du temps, on observe une plus grande égalité dans ces dépenses, même si la répartition reste favorable aux moins pauvres, même en 2017, en particulier dans les hôpitaux. Des différences régionales persistent, mais s’atténuent avec le temps, en particulier pour les dépenses globales.

CONTEXTE & MOTIVATION La mortalité maternelle et néonatale au Burkina Faso est estimée respectivement à 341 décès pour 100 000 et 24,7 décès pour 1 000 naissances vivantes. Étant donné que plus de 80 % de ces décès sont attribuables à des causes évitables, le pays a mis en œuvre des politiques favorisant l'accès équitable aux soins maternels pour réduire la mortalité maternelle et néonatale. En 2002, le paiement des frais de soins prénataux a été supprimé. En 2007, une réduction de 80 % des frais d'utilisation a été appliqué

pour les soins obstétricaux et néonataux d’urgence (SONU) pour toutes les femmes et une exonération totale pour les plus pauvres. En 2016, s'appuyant sur l'expérience positive de plusieurs initiatives pilotes, le gouvernement a instauré la gratuité, supprimant les frais d'utilisation pour les

outil économique, l’analyse d'incidence des bénéfices (AIB), pour évaluer la répartition des dépenses pour l’accouchement médicalisé au fil du temps au Burkina Faso.

MÉTHODES Notre travail prend en compte les

femmes enceintes et allaitantes, dont ceux pour l'accouchement. En outre, entre 2014 et 2018, 12 districts ont testé un programme de financement basé sur

dépenses publiques (incluant uniquement les dépenses récurrentes pour l’accouchement) et les dépenses globales de santé (privées ou provenant

les résultats (FBR), axé sur les soins maternels et infantiles. Ces différentes politiques ont entraîné une augmentation remarquable du recours

de donateurs). Dans les deux cas, nous calculons la proportion consacrée aux femmes de tous les groupes socioéconomiques. Les estimations sont pour

à l’accouchement médicalisé.

trois années afin de saisir les changements au cours de la période pré-SONU, post-SONU, post-Gratuité et post-FBR.

Aujourd'hui, 70 à 95 % de toutes les femmes accouchent dans un centre de santé. Grâce à ces mesures, les dépenses personnelles consacrées aux soins maternels ont considérablement diminué, même si elles n'ont pas complètement disparu. Elles ont aussi

Nous avons calculé le taux d'utilisation de l’accouchement médicalisé par l'Enquête Démographique et de Santé 2003 et 2010 et l’Enquête Finale pour

donné des avantages pour tous les groupes socio-économiques, sans augmenter ni réduire les inégalités en matière d’utilisation. Néanmoins, on ne

l'Évaluation d'Impact du FBR 2017 (en l'absence d’autre source de données récentes au niveau national). Une analyse spatiale descriptive permet de

sait pas si ces politiques ont modifié la répartition des dépenses de santé entre les groupes socio-économiques. Nous présentons notre analyse basée sur un

cartographier les disparités régionales dans les dépenses de santé publiques et globales en matière d’accouchement médicalisé.

Auteurs Martin RUDASINGWA, Edmund YEBOAH, Emmanuel

Mots-clefs Santé, maternelle, dépenses, inégalités, répartition

BONNET, Valéry RIDDE, Paul André SOMÉ, Manuela DE ALLEGRI Géographie Burkina Faso

Thèmes Financement de la Santé, inégalités, dépenses de santé, accouchement médicalisé

Pour en savoir plus sur ce projet : https://www.afd.fr/en/carte-des-projets/assessing-equity-health-spending-sub-saharanafrica


RÉSULTATS

Graphique 1. Impact distributif des dépenses publiques et globales pour

Égalité accrue des dépenses publiques

l’accouchement médicalisé par niveau de soin et au fil du temps

distributif

des

dépenses

publiques consacrées à l’accouchement médicalisé s’améliore considérablement de 2003 à 2017. Une

plus

grande

proportion

des

dépenses est consacrée aux femmes les plus pauvres, même si la répartition reste légèrement en faveur des moins pauvres, même en 2017. Les inégalités distributives sont plus importantes à l'hôpital que dans les centres de santé, où en 2017, les dépenses publiques sont presque égalitaires (graphique 1).

(a) Dépenses publiques pour l’accouchement médicalisé

Indice de concentration

L'impact

1 0,8

Une plus grande proportion des dépenses globales est consacrée aux femmes les plus pauvres, même si la répartition est plus favorable aux moins pauvres que les seules dépenses publiques. Les inégalités distributives sont plus importantes à l'hôpital que dans les centres de santé, où en 2017, les dépenses sont presque égalitaires (graphique 1). Les

disparités

géographiques

persistent, mais diminuent Les différences régionales dans l'impact distributif des dépenses publiques et globales persistent, mais s’atténuent considérablement avec le

Indice de concentration

considérablement de 2003 à 2017.

p<0.01

0,4 0,2 0

p<0.01 p<0.01 p<0.01

p<0.05

Dépenses publiques totales

Égalité accrue des dépenses globales L'impact distributif des dépenses globales consacrées à l’accouchement médicalisé s'améliore

p<0.01

0,6

Hôpitaux publics

p<0.01 p<0.01 p<0.01 Centres de santé publics

(b) Dépenses globales pour l’accouchement médicalisé 1 0,8 0,6 0,4 0,2

p<0.01 p<0.01

p<0.… p<0.…

p<0.… p<0.…

0 Dépenses totales de santé

Hôpitaux publics

2003

2010

p<0.01 p<0.01 p<0.01 Centres de santé publics

2017

temps. Cela s’explique sans doute par la réduction généralisée des inégalités

et privées dans le secteur de la santé. La région du Sud-Ouest est l'exemple le

distributives constatée à la suite de la mise en œuvre des politiques nationales. Les disparités entre les régions restent plus grandes pour les

plus frappant. L'impact distributif des dépenses publiques est le plus favorable aux populations pauvres, mais celui des dépenses globales l’est

dépenses globales, ce qui est peut-être lié au rôle des dépenses des donateurs

plus aux moins pauvres.

RECOMMANDATIONS 

Il est crucial de continuer leurs réformes du financement de la santé, en supprimant notamment les frais d'utilisation pour l’accouchement médicalisé afin de garantir que les investissements profitent aux femmes pauvres

Il faut étudier l'origine des différences régionales observées et chercher des solutions adéquates pour combler les lacunes existantes

Le gouvernement et ses partenaires doivent cibler les régions aux inégalités les plus importantes dans les dépenses de santé et, spécifiquement, les causes des inégalités dans l'utilisation des soins parmi les femmes les plus pauvres.

Directeur de la publication Rémy Rioux Directeur de la rédaction Thomas Melonio

Agence française de développement (AFD) 5, rue Roland Barthes | 75012 PARIS | France

Dépôt légal 1e trimestre 2021 ISSN encours | © AFD

Pour consulter les autres publications de la collection Dialogues de politiques publiques : https://www.afd.fr/collection/dialogues-de-politiques-publiques


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