n° 37
décembre 2010
Série Evaluation et capitalisation
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La coopération française dans le secteur forestier du Bassin du Congo sur la période 1990-2010 Note de cadrage
Pauline Larat, AFD (larap@afd.fr) Jean-Pierre Lemelle, AFD
Département de la Recherche Division Évaluation et capitalisation
Agence Française de Développement Evaluation prospective • Projet Urban IV • 5, rue Roland Barthes 75012 Paris - France www.afd.fr
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1
Avertissement Ce travail a été piloté conjointement par la division du Pilotage stratégique et par la division de l’Évaluation et de la capitalisation de l’Agence Française de Développement (AFD). Les analyses et conclusions de ce document sont formulées sous la responsabilité de ses auteurs. Elles ne reflètent pas nécessairement le point de vue de l’AFD ou de ses institutions partenaires.
Directeur de la publication : Dov ZERAH Directeur de la rédaction : Jean-David NAUDET ISSN : 1962-9761 Dépôt légal : 4e trimestre 2010 Mise en page : Eric THAUVIN
La coopération française dans le secteur forestier du Bassin du Congo
Sommaire
Introduction et objectifs de l’étude
5
1 Présentation de la stratégie française sur la période 1990-2010
7
1.1 Un contexte international en évolution : inscription dans une succession de paradigmes 1.2 Une stratégie d’intervention française axée sur des plans d’aménagement forestiers 1.3 Moyens et instruments mis en œuvre par l’aide française
8 12 15
2 Analyse rétrospective des interventions 1990-2005
18
2.1 Résultats de l’approche PAF en 2005 2.2 Analyse rétrospective des interventions AFD selon la grille CAD 2.3 Analyse de quelques thèmes spécifiques
18 19 28
3 Quelles perspectives pour l’approche PAF en 2010 ?
31
Annexes
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Liste des sigles et abréviations
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3
La coopération française dans le secteur forestier du Bassin du Congo
Introduction et objectifs de l’étude
Contexte et objectifs Le
service
Evaluation
Méthode de
l’Agence
Française
de
Développement (AFD) a lancé en mai 2010 une étude de capi-
talisation sur l’intervention de l’Agence dans le secteur forestier du Bassin du Congo sur la période 1990-2010. Réalisée par des consultants extérieurs, l’étude est programmée pour
une durée d’un an.
Cette note de cadrage a été jointe aux termes de référence
de l’étude pour inscrire le travail des consultants dans la
logique de capitalisation de l’AFD en y proposant des axes
d’analyse et de réflexion qui reflètent les questionnements et hypothèses de travail de l’Agence.
La publication de cette note poursuit les objectifs suivants : - rassembler et consolider dans un document unique un
ensemble de connaissances acquises depuis les années 1990 mais diffuses au sein de l’agence ;
- nourrir la réflexion sur le renouvellement de la stratégie d’in-
tervention de l’AFD dans le secteur forestier, non seulement
au niveau du Bassin du Congo mais aussi d’autres espaces géographiques (bassin amazonien, indonésien, etc.) ; et
- initier à un débat ouvert en proposant un point de vue
interne original sur cette thématique
Cette note de cadrage se divise en deux grandes parties : - une présentation de (i) la stratégie de l’aide française pen-
dant la période 1990-2010 en l’inscrivant dans le contexte
international de l’époque et (ii) les premiers résultats observés
pour la période 1990-2005 ;
- une appréciation de cette stratégie sur la base des premiers
éléments d’information disponibles.
La première partie a été réalisée principalement à partir de
l’abondante bibliographie disponible sur le sujet, de la lecture
de documents stratégiques et de projets internes à l’AFD et
d’entretiens avec les chefs de projets en charge du portefeuille
évalué.
La seconde partie est guidée par le canevas prescrit par le
Comité d’aide au développement (CAD) en termes d’évalua-
tion ex-post, i.e. une analyse selon les critères de pertinence,
cohérence, efficacité, efficience, durabilité et effets/impacts.
Cette analyse s’est nourrie d’évaluations rétrospectives déjà
conduites sur certains projets et d’entretiens avec différentes
parties prenantes (ministère des Affaires étrangères et européennes – MAEE, organisations non-gouvernementales ONG et forestiers).
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La coopération française dans le secteur forestier du Bassin du Congo
1 Présentation de la stratégie française sur la période 1990-2010
Deuxième massif de forêts tropicales de la planète (220 mil-
lions d’ha.), les forêts du Bassin du Congo constituent des
enjeux environnementaux et socioéconomiques considérables :
d’une part, ces écosystèmes uniques fournissent des services environnementaux indispensables aux échelles mondiale
négative sur le niveau de pauvreté des pays. Dès lors, quel
mode de gestion des forêts tropicales peut réconcilier ces
enjeux en apparence antinomiques ?
Cette question a donné lieu à une succession de paradigmes
(régulation du climat, habitat d’une biodiversité remarquable)
sur la gestion des forêts tropicales oscillant entre exploitation
constituent (i) des filets de sécurité pour des millions de per-
systèmes. Ce débat en constant repositionnement se nourrit
ce important pour les pays grâce à l’exploitation ligneuse. Ces
bailleurs, des Etats, des investisseurs privés, de la recherche
et locale (hydrologie, maintien des sols) ; d’autre part, ils
sonnes en situation de pauvreté1 et (ii) un relais de croissan-
enjeux socioéconomiques peuvent donc entraîner à court et moyen termes une importante dégradation des écosystèmes
qui, non seulement ne répond pas à l’enjeu de protection environnementale mais contribue, in fine, à une rétroaction
Carte 1. Aménagement durable des concessions forestières du Bassin du Congo
industrielle durable de la ressource et conservation des éco-
depuis trente ans de la confrontation des expériences des
et des ONG. En parallèle, un processus de gouvernance aux
échelles internationale, régionale et nationale du Bassin du
Congo s’est articulé à ces paradigmes.
Concessions forestières sous processus d’aménagement durable Aires protégées
Types de végétation Forêt dense humide Forêt secondaire Forêt et savane Espace boisé
Espace boisé et savane Prairies
Mangroves
Prairies humides
Savanes arborées Lacs
Principaux court d’eau Source : Forest Ressources Management
Limite de pays
1 Via la collecte de bois de feu, la pratique d’agriculture vivrière ou la chasse du gibier de brousse.
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1.1 Un contexte international en évolution : inscription dans une succession de paradigmes
Dans les années 1980, les ONG et les mouvements écolo-
nationaux et l'obtention de nouvelles sources de financement,
surexploitation des forêts tropicales en Amazonie et Asie du
dership de la FAO et l'absence de planification multisectorielle
gistes ont sensibilisé l’opinion publique sur les dangers de la
Sud Est. L’exploitation de la ressource ligneuse se base sur
son bilan est jugé avec sévérité. En effet, le manque de lea-
ont limité les synergies nécessaires entre les différents acteurs
des pratiques minières (bas prix, important gaspillage, hypo-
concernés. Dès lors, cette démobilisation internationale n’a
les populations locales sont particulièrement néfastes. En
dédiée à la lutte contre la déforestation lors de la Conférence
thèque du renouvellement) dont les effets sur la biodiversité et
réaction, l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation
et l’agriculture (FAO) - entre autres - a lancé en 1985, conjoin-
tement avec le Programme des Nations unies pour le dévelop-
pas créé un contexte favorable pour aboutir à une convention
des Nations unies sur l'environnement et le développement (CNUED) de Rio en 1992. La gestion forestière durable
demeure donc écartelée entre la Convention climat et la
pement (PNUD), la Banque mondiale et le World Resources
Convention biodiversité, même si elle fait l'objet d'un chapitre
à l'amélioration des techniques sylvicoles et l'aménagement
d'appui de l'Organisation internationale des bois tropicaux
Institute (WRI), le Plan d'action forestier tropical (PAFT) visant des forêts. Ce premier programme représente la fondation ins-
titutionnelle du paradigme d’exploitation durable des forêts qui
va prédominer sur les stratégies des bailleurs puis des Etats
spécifique dans l'Agenda 21 et est au cœur des programmes (OIBT).
En parallèle, se développe une nouvelle approche de
au cours de la décennie suivante. A ce paradigme s’oppose
conservation portée par les ONG, qui se fonde sur la participa-
ONG. Celle-ci consiste en la création de zones naturelles pro-
comme moyens fondamentaux permettant d’atteindre des
l’approche de « conservation » portée majoritairement par les tégées exclusives où les populations locales sont considérées
comme directement menaçantes pour le maintien de la biodi-
versité (« fortress conservation »).
Les taux de déforestation restent relativement faibles dans le
Bassin du Congo. Néanmoins, jusqu’à une période récente, il
n’existait ni codes forestiers au niveau des pays ni gouvernan-
tion et le renforcement des capacités des populations locales
objectifs élevés de conservation. Cette approche va prendre
une importance croissante sur la scène internationale et va
conditionner le paradigme dominant de la décennie suivante, tandis que celui de l'exploitation durable est maintenu, mais
avec un faible soutien de la communauté internationale.
Dans le Bassin du Congo, une gouvernance régionale sur la
ce à l’échelle régionale qui permettaient de garantir un usage
gestion des forêts tropicales s’établit progressivement en
région. Ainsi, alors que, sur les bassins amazoniens et asia-
conservation
durable de la ressource lors du réveil économique de cette
tiques, l’enjeu est de freiner - voire arrêter - le processus de
déforestation, sur le Bassin du Congo, il est de prévenir cette tendance en lien direct avec l’essor économique des pays.
1.1.1 1990-1999 : promotion d’une exploitation durable
de la ressource forestière
Si le PAFT a permis la mise en place de plans d'action
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•
s’appropriant le concept de gestion durable puis l’approche de intégrée.
En
1990,
la
Conférence
interministérielle de Libreville pose ainsi les bases d’une stra-
tégie régionale pour une mise en valeur durable des forêts
d’Afrique centrale. En 1999, la Conférence des ministres des
Forêts d’Afrique centrale (COMIFAC) est créée suite à la
volonté des chefs d'État, exprimée lors de la Déclaration de
Yaoundé. Les décisions prises lors de ce sommet ont permis l'adoption de trois types de mesures : un durcissement des législations afin d'introduire plus de transparence dans
La coopération française dans le secteur forestier du Bassin du Congo
l'attribution des concessions et la généralisation des conces-
en validant le Livre blanc sur les forêts tropicales humides
d’aménagement, l'instauration de normes permettant la régé-
groupe de travail multi-acteurs.
sions d’exploitation à long terme (de 25 à 40 ans) avec plan
nération de la forêt et la mise en place d'un dispositif fiscal spécifique.
En écho à cette gouvernance institutionnelle, le secteur privé
s’inscrit également dans le paradigme d’exploitation durable
de la ressource ligneuse en soutenant les mécanismes d’écocertification2. Associés
à une chaîne de traçabilité, ces méca-
nismes garantissent au consommateur final une origine durable de la ressource ligneuse. 1.1.2
2000-2006 : montée en puissance des approches
de conservation
Au début des années 2000, les objectifs du Millénaire pour le
développement (OMD) viennent nourrir et complexifier ce
débat en y ajoutant la « lutte contre la pauvreté ». En effet, certaines critiques dénoncent l’exclusion des populations locales
dans l’aménagement forestier. Le nouveau paradigme pose
les populations forestières comme acteurs politiques majeurs
des régions tropicales et, à ce titre, comme des composantes essentielles des politiques de conservation à long terme des
forêts tropicales. En complément d’une exploitation durable
des forêts, les approches de conservation/développement durable, mises en œuvre sur un mode participatif, sont de
plus en plus encouragées. De nouvelles sources de revenu,
compatibles avec les activités de conservation, sont proposées. Parmi celles-ci : le développement de filières d’éco-tou-
risme ou de produits forestiers non ligneux (PFNL)3. Enfin les frontières entre exploitants forestiers et ONG deviennent plus
floues, permettant des partenariats dans lesquels les ONG assurent le volet biodiversité de l’exploitation ligneuse.
La France s’approprie également cette approche intégrée de
conservation et gestion durable des forêts tropicales humides
Création du Forest Stewardship Council (FSC) en 1994 par des ONG (WWF, Greenpeace, etc.) et des représentants du secteur privé.
2 3
Par exemple : viande de brousse ou plantes.
(2003), synthèse des débats et des recommandations du
En termes de gouvernance, le Sommet mondial du dévelop-
pement durable qui se tient en 2002 à Johannesburg conduit à la création du Partenariat pour les forêts du Bassin du Congo
(PFBC). Cette association de gouvernements (dont ceux de la
COMIFAC), d’entreprises privées et d’organisations de la
société civile compte aujourd’hui 37 membres. Elle vise une
démarche collective pour coordonner les interventions et amé-
liorer l'efficacité de l'aide sur la conservation et la gestion durable des forêts tropicales humides. Cette volonté politique
est confirmée en 2003, à l’occasion du Sommet des chefs d’Etat de Kinshasa, où la COMIFAC - rebaptisée Commission des forêts d’Afrique centrale - adopte le plan de convergence
sous-régional de l’organisation. Articulé autour de 9 axes stratégiques, celui-ci constitue la colonne vertébrale de la politique
sectorielle sous-régionale en cohérence avec les programmes sectoriels nationaux.
Cette initiative est relayée au niveau européen en 2003, via
la directive FLEGT (Forest Law Enforcement Governance and
Trade) qui propose des mesures visant à accroître la capacité
des pays forestiers à contrôler l’exploitation illégale des forêts
et à réduire le commerce illégal du bois entre ces pays et l’Union européenne (UE). 1.1.3
Depuis 2007 : émergence d’un nouveau cadre
fondé sur le principe des paiements pour service environ-
nementaux et l’inscription dans les politiques sur le climat Cette démarche de conservation fait l’objet de critiques por-
tant notamment sur la faiblesse des bénéfices apportés aux populations locales en comparaison de ceux provenant des
activités d’exploitation ligneuse moins durable. Dès lors s’affir-
me une vison plus pragmatique de la conservation, basée sur
une valorisation économique des services environnementaux
des écosystèmes devant au moins compenser le coût • AFD 2010
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Série Évaluation et capitalisation n°37
d’opportunité de déforestation et/ou de dégradation.
l’échelle internationale vise à rétribuer financièrement la
durable et conservation, ce nouveau paradigme propose des
forestière ainsi que la gestion forestière durable, la conserva-
S'attachant à dépasser l’opposition entre aménagement
approches complémentaires afin de diversifier les revenus et de participer à la même finalité.
réduction des émissions dues à la déforestation/dégradation tion et le renforcement des stocks de carbone forestier dans
les pays en développement. Enfin, signe d’une inflexion vers une vision marchande des services environnementaux, les
C’est dans cette logique que s’intègre le futur mécanisme
frontières entre les positions des parties prenantes deviennent
Degradation + (REDD+), discuté dans le cadre des négocia-
nouent des partenariats avec des entreprises privées tandis
Reducing
Emissions
from
Deforestation
and
Forest
tions internationales sur le climat (Bali en 2007, Copenhague
en 2009). Ce « paiement pour service environnemental » à
de plus en plus floues : de grandes ONG conservationnistes
que des sponsors privés abondent les financements des ONG.
Encadré 1. REDD+ Le Programme de collaboration des Nations Unies sur la réduction des émissions liées à la déforestation et à la dégra-
dation des forêts dans les pays en développement (Programme ONU-REDD) a été créé en septembre 2008 afin d’aider
les pays en développement à renforcer leurs capacités en vue de réduire les émissions et de participer à un futur méca-
nisme REDD+. Au sens de la présente stratégie, REDD+ désigne la réduction des émissions liées à la déforestation et
la dégradation des forêts dans les pays en développement ; et le rôle de la préservation, de la gestion durable des forêts et du renforcement des stocks de carbone forestier dans les pays en développement
Source : Stratégie du Programme ONU-REDD pour la période 2010-20154
4
Document consultable à l’adresse suivante : http://www.unredd.net/index.php?option=com_docman&task=doc_details&gid=3508&Itemid=53
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•
La coopération française dans le secteur forestier du Bassin du Congo
Source : auteurs.
Tableau 1. Succession de paradigmes « forestiers » sur la période 1980-2010
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Série Évaluation et capitalisation n°37
1.2
Une stratégie d’intervention française axée sur des plans d’aménagement forestiers
contractuel entre le concessionnaire et l’Etat pour l’exploitation
Figure 1. Une stratégie axée sur le PAF
de la ressource ligneuse sur trente ans. Cette exploitation doit
prendre en compte la double exigence du maintien de l'éco-
système forestier, de sa diversité, du renouvellement de la res-
source ligneuse, ainsi que la satisfaction des aspirations
socioéconomiques de l'Etat, des populations locales et du
concessionnaire. Le résultat est donc une planification de l’ex-
ploitation forestière sur plusieurs décennies et un outil d’aide à
la décision sur le projet industriel rattaché à la forêt aménagée. Pour promouvoir cet outil, la coopération française a adopté
une démarche pragmatique basée sur des étapes d’expérimentation/validation :
Source : auteurs.
C’est dans ce contexte d’évolution de paradigmes et de ren-
forcement de gouvernance que la coopération française a
défini son intervention depuis le début des années 1990 dans
les pays du Bassin du Congo (République centrafricaine -
RCA, Gabon, Congo et Cameroun). Les objectifs poursuivis
sur la période d’intervention sont concentriques avec la promotion de l’outil Plan d’aménagement forestier (PAF) au cœur
du dispositif. Cette intervention française, définie et initiée par
- sur la période 1990-2000, une approche expérimentale via
le financement des projets pilote d’appui à la conception de
PAF sur des grandes concessions. Cet appui économique
s’est associé à une intervention dans le domaine institutionnel
pour aider les Etats à formaliser les codes forestiers néces-
saires et à renforcer les capacités locales et dans le domaine de la recherche pour améliorer les techniques forestières ;
- au début des années 2000, une fois l’outil validé et les nou-
le Ministère des affaires étrangères (MAEE) puis relayée par
veaux codes forestiers adoptés (intégrant la concession fores-
d’acteurs français (institutionnels, scientifiques et opérateurs).
ché à diffuser le PAF auprès de grandes concessions via des
le groupe AFD (AFD et Proparco), a mobilisé un grand nombre
tière à long terme et les plans d’aménagement), l’AFD a cher-
Du point de vue des partenaires, elle s’est également inscrite
lignes de crédit et à l’adapter aux petites concessions. Les
patif rassemblant les grands interlocuteurs (Etat, forestiers et
l’appui du Fonds français pour l’environnement mondial
dans un cadre de concertation et de pilotage ouvert et particiONG). 1.2.1
1990-2010 : le Plan d’aménagement forestier
L’objectif constant de l’intervention française est de promou-
voir la gestion durable des forêts tropicales en articulant sa
stratégie autour de l’outil PAF des concessions forestières.
Semblable à un partenariat public-privé, il s’agit d’un accord
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•
composantes liées à la biodiversité ont été renforcées grâce à
(FFEM) et aux partenariats noués avec de grandes ONG environnementales ;
- à partir de 2005, afin de promouvoir une commercialisation
transparente et garante de développement durable, l’AFD a
également financé les coûts d’investissements des entreprises liés à l’éco-certification.
La coopération française dans le secteur forestier du Bassin du Congo
1.2.2. 2003-2010 : émergence de la conservation intégrée Les recommandations du Livre blanc en 2003-2005 ont élar-
gi l’aide à des objectifs plus spécifiques de préservation de
biodiversité et de lutte contre la pauvreté. Ces objectifs ont été soutenus via le développement de réseaux d’aires protégées
dans une logique de conservation intégrée et participative, avec les PAF déjà élaborés. Cet élargissement a permis la
mise en œuvre d’approches innovantes de conservation,
telles les concessions de conservation, et le développement de nouvelles filières (éco-tourisme, produits forestiers non ligneux) à des échelles locales, nationales et régionales.
1.2.3
2007-2010 : un nouveau cadre déterminé par la
lutte contre le changement climatique
Ces trois dernières années, l’objectif général de lutte contre
le changement climatique s’est combiné aux objectifs précé-
dents et a donc amené l’aide française à participer à l’effort international sur la construction du mécanisme REDD+. Ce
soutien s’est traduit par un abondement aux fonds multilatéral
dédiés et un appui aux pays du Bassin du Congo sur la pre-
mière phase du mécanisme REDD+ (élaboration de stratégies
et mise en œuvre d’un dispositif de monitoring du couvert
forestier).
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Tableau 2. Esquisse de cadre logique de la stratégie d’intervention française sur le secteur forestier dans le Bassin du Congo
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Source : auteurs.
Série Évaluation et capitalisation n°37
•
La coopération française dans le secteur forestier du Bassin du Congo
1.3
Moyens et instruments mis en œuvre par l’aide française
Le graphique 1 illustre la répartition de projets centrés autour
des PAF sur toute la période d’intervention. Les engagements
versité complémentaire porté par le FFEM -, l’approche PAF
est également déclinée sur les petits permis forestiers. L’AFD
s’élèvent à 137 millions (M) EUR et concernent une quarantai-
intervient parallèlement sur les projets de conservation inté-
ticule autour de trois projets pilotes d’appui à la conception de
collectivités locales) notamment via des subventions du
(1991) puis au Gabon (1996). Portés par le MAEE puis relayés
années 2000 en finançant à la fois des projets PAF accompa-
ne de projets. La phase expérimentale des années 1990 s’arplans d’aménagement forestier au Cameroun
et en RCA
par l’AFD, ces projets pilotes présentent une forte composan-
te recherche/formation et institutionnelle pour l’aménagement forestier du Bassin du Congo. Cette intervention centrale s’accompagne d’un financement important de la filière aval. Dans
grée en mobilisant de nouveaux types de partenaires (ONG,
FFEM. Depuis 2007, l’AFD conserve le cap du début des
gnés d’un objectif d’éco-certification et des aires protégées.
L’AFD se positionne également sur le terrain institutionnel de
la REDD+ en prenant des participations dans le fonds FCPF
et en renforçant les capacités technologiques de suivi du cou-
les années 2000, l’intervention de la coopération française
vert forestier. (Ces derniers n’apparaissent pas sur le gra-
de la stratégie - notamment sur le Gabon avec un volet biodi-
moment de la rédaction de cette synthèse.)
s’élargit. Si l’intervention sur les projets PAF demeure au cœur
phique 1 car les financements n’ont pas été octroyés au
Graphique 1. Typologie des projets octroyés
Source : auteurs.
Graphique 2. Typologie des bailleurs
Source : auteurs.
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Série Évaluation et capitalisation n°37
La stratégie a d’abord été portée par le MAEE avant d’être
relayée par l’AFD. Le FFEM est très actif au cours des années
2000 en lien avec le paradigme de conservation qui
prédomine. Proparco6 qui finance exclusivement la filière aval,
se mobilise jusqu’au début des années 2000 et n’intervient plus sur ce secteur depuis. Cette tendance est en partie liée
aux importantes annulations de crédits (cf. 2.3.1).
Graphique 3. Typologie des pays
Source : auteurs.
Les pays d’intervention sont historiquement le Gabon, le
manque de consensus entre les acteurs (Banque mondiale et
un second temps en raison de l’instabilité politique qui prédo-
niveau de la gestion forestière (aide sectorielle versus aide
Cameroun et la RCA. L’intervention au Congo intervient dans
minait durant les années 1990. Le Gabon prend une importance croissante dans les années 2000, notamment en raison de
son statut de pays à revenu intermédiaire (PRI) qui permet
l’octroi de lignes de crédits (à l’inverse des pays les moins avancés - PMA).
Le Cameroun est surtout privilégié par
Proparco pour le financement de la filière aval. En effet, le
AFD en particulier) sur les modes d’interventions à adopter au
projet PAF) limite l’action de l’AFD sur ce pays. Plus récem-
ment, les financements de l’Agence n’ont pas été destinés à
un niveau national mais régional : projet de conservation du tri-
national de la Sangha ou encore fonds pour le Forest Carbon
Partnership Facility.
Graphique 4. Typologie des instruments mobilisés
Source : auteurs.
6 Acronyme de : Promotion et participation pour la coopération économique ; Proparco est une filiale de l’AFD spécialisée dans le capital-investissement, les prêts et les garanties. Cette institution financière de développement est détenue conjointement par l’AFD et des actionnaires privés du Nord et du Sud.
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•
La coopération française dans le secteur forestier du Bassin du Congo
Le type d’instruments évolue également sur cette période et
est conditionné à la nature des pays (PRI vs. PMA) : subvention à l’Etat (Cameroun, RCA, Congo), prêt concessionnel au secteur privé (Gabon, Congo) et prêt à l’Etat (Gabon), prêt non
concessionnel au secteur privé (Cameroun). A partir des
années 2000, le schéma de financement se complexifie avec
l’introduction de lignes de crédits pour des contreparties du
secteur privé (Gabon).
Graphique 5. Typologie des bénéficiaires de l’aide
Source : auteurs.
Enfin, le type de contreparties évolue également sur la pério-
Les décaissements sur la période confirment globalement
de d’intervention. Si l’aide s’est clairement appuyée sur le sec-
l’engagement soutenu et régulier de l’aide française, tous ins-
récemment ouverte à de nouveaux « acteurs » de l’aide tels
mise en place de politiques d’aménagement forestier.
teur privé et l’Etat comme partenaires de sa stratégie, elle s’est les collectivités locales ou les fonds multilatéraux. Tableau 3. Suivi des décaissements du Congo Taux de décaissement Engagés (M EUR) Engagement brut (décaissés/engagés) Annulation (annulés/engagés) Engagement net (décaissés/(engagés-annulés))
N/A : non applicable
1990 – 1999 40 80 % 15 % 94 %
truments confondus, sur l’objectif central de sa stratégie : la
2000 – 2006 80 30 % 53 % 71 %
2007– 2010 17 N/A N/A N/A
Source : auteurs.
On constate néanmoins l’annulation d’un certain nombre de
stratégie d’intervention. Pour Proparco, les annulations portent
tion, importants, montrent combien ce secteur est difficile,
transformation, dont trois dossiers de montant significatif au
projets tant pour l’AFD que pour Proparco. Ces taux d’annulanotamment dans la recherche de mécanismes de finance-
ment.
Pour l’AFD, ces annulations ont porté essentiellement sur
des lignes de crédit au Cameroun limitant ainsi la portée de la
sur des projets de modernisation et d’amélioration d’unités de
Cameroun. Ces annulations ont confirmé que ce créneau était restreint et qu’il était difficile de développer une activité soute-
nue par l’octroi de prêt de montant significatif.
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Série Évaluation et capitalisation n°37
2 Analyse rétrospective des interventions 1990-2005
Les éléments d’analyse présentés ci-dessous proviennent
permis forestiers (PPF) ; et
- des évaluations réalisées sur les projets AFD de la « géné-
Bassin du Congo en 2005/ 2006 sur l’état des mises en PAF
de deux sources :
ration 1990 » qui se sont achevés vers 2004/ 2005 pour les
grandes concessions et sont encore en cours pour les petits
2.1
- des estimations réalisées par les institutions régionales du
dans les pays du Bassin, hors RDC.
Résultats de l’approche PAF en 2005
Les résultats sont présentés à l’aune du suivi des surfaces
engagées dans l’élaboration d’un plan d’aménagement fores-
tier, des surfaces engagées dans l’éco-certification, du renfor-
cement de gouvernance et de la consolidation de la formation.
2.1.1 Situation des PAF en 2008 pour le Bassin du Congo Tableau 4. Suivi de l'élaboration de plans d'aménagement forestier durables dans le Bassin du Congo (en 2005) Concessions allouées
Inclues dans le processus d’élaboration de plans d’aménagement forestier dont : - préparation - en cours de réalisation - réalisé - agréé
Surface (M ha) 40 31 9 6 5 11
Source : auteurs.
Les informations disponibles en 2008 sur les plans agréés
2.1.2 Convergences des démarches PAF et éco-certification
les plans des concessions directement financés par l’AFD
L’agrément d’un PAF constitue une étape nécessaire pour
(état des forêts du Bassin du Congo 2008) ne concernent pas
mais la totalité des plans du Bassin du Congo. Il apparaît que
l’obtention de l’éco-certification. Il existe plusieurs standards
agréé et que 77 % sont dans le processus. Ces chiffres indi-
tères de durabilité portent non seulement sur l’exploitation
27 % des concessions du Bassin ont un plan d’aménagement
quent bien que le processus PAF requiert des pas de temps
longs pour parvenir à des performances significatives par rapport aux réalités.
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• AFD 2010
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•
de qualité allant de la simple légalité à la durabilité. Les cri-
forestière mais également sur la prise en compte des populations locales et du suivi de la biodiversité.
La coopération française dans le secteur forestier du Bassin du Congo
La certification forestière s’est construite sur un socle com-
mun (la reconnaissance d’application de critères et de prin-
cipes) mais avec des cadres et des « sponsors » différents :
approche ISO, approche technique régionale Bassin Congo
(PAFC), sponsor néerlandais (Keurhout), sponsor ONG envi-
ronnementalistes (FSC).
Le plus reconnu des standards est le FSC. En 2009, le
Bassin du Congo compte huit concessions forestières certi-
nariat public-privé, ce contrat se réfère à un droit public résumé dans des codes forestiers.
L’approche PAF a conduit à la réécriture des codes forestiers
des Etats, dont l’élaboration remontait aux périodes coloniales.
Les différentes parties (administrations, forestiers, etc.) doi-
vent donc se les approprier. Ils doivent aussi être la traduction des nouvelles politiques forestières. De plus, des points de
divergences entre les approches PAF/code forestier de l’aide
fiées FSC pour une surface totale de 4,2 millions d’ha. Ce
française et les approches politiques sectorielles forestières -
tropical en matière de certification de forêt naturelle. On
buer à limiter le renforcement de gouvernance des PAF. In
forestier bénéficiant parmi les premières d’un PAF agréé qui
pour les principaux acteurs incertitude, interrogation et
résultat fait du Bassin du Congo le premier massif forestier
constate aujourd’hui que ce sont les unités d’aménagement
ont pour la plupart obtenu un label FSC. Par ailleurs, l’Association interafricaine des industries forestières (IFIA) s’est engagée à atteindre dix millions d’ha certifiés en 2012. Il
reste à voir à quelles conditions les concessionnaires consentiront les efforts nécessaires pour obtenir cette certification.
Comme explicité plus haut, l’AFD s’est attachée, dans une
soutenues notamment par la Banque mondiale - ont pu contri-
fine, cette situation a handicapé la gouvernance, en suscitant manque de visibilité.
2.1.4 Constitution d’une connaissance, de savoir-faire et
de capacités de formation
L’approche PAF est à l’origine de la création de nouvelles
première étape, à promouvoir la mise en place des PAF.
connaissances et compétences au niveau du Bassin du
des années 2000 lorsque les entreprises ont commencé à
vés
L’Agence a officiellement apporté son appui au FSC au début vouloir valoriser leurs investissements dans les PAF à travers
la démarche FSC. 2.1.3
Gouvernance des approches PAF
L’outil PAF est un contrat sur trente ans, généralement
Congo. Celles-ci se sont constituées à travers les acteurs prilors de l’élaboration des PAF (forestiers, bureaux
d’études, prestataires) et à travers les institutions régionales
(organismes de recherche) appuyées par les aides publiques.
Les parents pauvres de cette « capitalisation » semblent être
les institutions nationales chargées de la maîtrise d’ouvrage et de la gestion de ces approches, pouvant aussi être à l’origine d’une gouvernance insuffisante du secteur.
renouvelable, entre un concessionnaire et l’Etat. Tel un parte-
2.2
Analyse rétrospective des interventions de l’AFD selon la grille CAD
Plusieurs constats peuvent être formulés à partir des évalua-
tions existantes dont la dernière date de 2006 et qui portent sur les projets de la « génération 1990 ». Ceux-ci seront expo-
sés selon une appréciation des critères du CAD (pertinence/cohérence,
efficacité/efficience,
impacts
et
viabili-
té/durabilité). La grille d’analyse est présentée en annexe 1. • AFD 2010
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19
Série Évaluation et capitalisation n°37
2.2.1
Pertinence des interventions et des projets
En termes de stratégie et d’orientation générale, l’approche
En termes de pertinence, la situation peut paraître paradoxa-
le. Autant sur la période 1990-2006, l’approche PAF a pu
apparaître sur la défensive et dans l’obligation parfois de se
PAF a été questionnée - voire même contestée - par certaines
justifier par rapport au courant dominant sur la problématique
Cette contestation s’explique par trois raisons principales : (i)
des PAF était reconnue et admise, grâce à l'implication
ONG environnementales de plaidoyer durant cette période.
du Bassin du Congo ; autant à partir de 2006, la finalité même
le changement périodique de paradigmes, (ii) la prudence des
croissante du processus FLEGT et des démarches d'’éco-cer-
vait interférer dans des pratiques de gestion et d’arbitrage de
progressive de ces principes par les Etats et à l’éligibilité de la
Etats du Bassin du Congo par rapport à une approche qui pou-
partage de rente, (iii) la difficulté théorique et pratique de l’ap-
proche PAF à répondre à des questionnements conceptuels posés par ces ONG.
Malgré ces critiques, le cap de l’approche PAF a été tenu,
grâce à plusieurs facteurs :
- la permanence des finalités de l’aide française tout au long
de la période et la diversité des approches et moyens mis en
œuvre pour développer cette approche PAF ;
- un consensus actif entre différents acteurs clé du secteur
forestier, convaincus que des innovations et des avancées
étaient possibles à partir de cette approche ;
- la constitution progressive d’un capital de connaissances et
de savoir faire qui a permis, sur une longue période, d’expérimenter cette approche, d’en valider et d’en appliquer les
acquis, mais aussi d’animer un débat de fond sur les questions
en suspens qui servaient de base à la contestation.
20
• AFD 2010
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•
tification dans la gestion du secteur forestier, à l’internalisation
gestion durable au mécanisme REDD+.
La matrice d’analyse suivante (tableau 5) tente d'illustrer de
façon synthétique le positionnement contrasté des principaux
acteurs par rapport à l'approche PAF (Etats, concessionnaires
forestiers, bailleurs dont l’AFD et ONG). Il faut préciser que les
ONG ne constituent pas un ensemble homogène; on peut dis-
tinguer les Business and Industry NGOs (BINGOs), ces
grandes ONG conservationnistes (Conservation International,
CI, World Wildlife Fund - WWF, Wildlife Conservation Society - WCS, etc.) avec lesquelles l'AFD a pu engager un dialogue
constructif (parfois même un partenariat sur le terrain), des
ONG "de plaidoyer" qui, elles, ont maintenu une position réser-
vée de principe à l'encontre de la démarche d'appui aux PAF promue par l'AFD. Elle met en évidence les difficultés que l’ai-
de française a dû rencontrer dans la mise en œuvre d'une approche PAF qui soit durable.
Source : auteurs.
Tableau 5. Positionnement des principaux acteurs par rapport aux finalités et aux orientations générales de l'approche PAF
Affrontement de courants conservationnistes Intérêts divergents par rapport au PAF
La coopération française dans le secteur forestier du Bassin du Congo
• AFD 2010
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21
Série Évaluation et capitalisation n°37
2.2.2
Cohérence des interventions et projets
L’architecture « objectifs opérationnels – actions/moyens » a
été très déséquilibrée durant la période considérée, faisant apparaitre un nombre important d’objectifs opérationnels dont
la répartition du produit des taxes de la filière bois entre le
niveau national et le niveau local. Cette répartition est, en général, prévue par la loi mais elle n’est soit pas mise en œuvre, soit captée localement par des responsables non organisés dans un cadre insuffisamment transparent et
certains restent très abstraits et sans contenu précis. En terme
démocratique. Ainsi, l’AFD n’a à ce jour pas apporté d’appui
était capable de répondre à toutes les préoccupations et exi-
la redistribution de la valeur ajouté des taxes pour le dévelop-
de communication, elle a pu faire croire que l’approche PAF
gences. Néanmoins, cette architecture a eu l’inconvénient d’éparpiller et de disperser les ressources et les moyens alloués par l’aide française
Sur les trois objectifs opérationnels majeurs (« le cœur des
PAF »), à savoir (i) valorisation et maintien des activités fores-
tières, (ii) préservation et valorisation de la biodiversité, (iii)
institutionnel conséquent pour un meilleur fonctionnement de pement local.
Le financement de l’élaboration des PAF a été traité « de
façon pragmatique » (selon la formule AFD consacrée), sans
une stratégie explicite quant aux différents produits financiers. Il s’est fait tantôt via l’octroi de crédits aux concessionnaires
forestiers - directement ou par un intermédiaire bancaire - tan-
amélioration des conditions de vie des populations, seul le
tôt via des subventions accordées à l’Etat. Cette diversité
autres en étaient à un stade de diagnostic de base difficile-
en matière de financement, à savoir (sauf exception) « pas de
premier en était à une phase de développement. Les deux ment exploitable ou valorisable à grande échelle.
Dans le domaine de la biodiversité, les travaux de recherche
découle de deux logiques : (i) les principes AFD de l’époque
prêt pour les PMA et pas de subvention pour les PRI » ; (ii) une appréciation de la capacité des deux parties contractantes des
PAF - les Etats et les concessionnaires - à être le moteur de
menés grâce aux projets du FFEM ont contribué significative-
l’élaboration des PAF sur la base des responsabilités définies
tèmes forestiers. Il reste beaucoup à faire, en fin de période
de la RCA est lié au rôle spécifique indiqué dans le code fores-
ceptibles de passer à une réelle phase de valorisation.
Gabon où c’est l’entreprise concessionnaire qui est respon-
ment à une première connaissance de base de ces écosys2006-2010 pour disposer de référentiels opérationnels susLe développement économique local provient notamment de
22
• AFD 2010
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•
dans les codes forestiers. Ainsi, le choix de l’Etat dans le cas
tier de l’Etat dans la réalisation des PAF, contrairement au
sable de la réalisation du plan d’aménagement.
Source : auteurs.
Tableau 6 : Cohérence de l'approche d'un point de vue opérationnel : adéquation entre objectifs opérationnels/actions et moyens
La coopération française dans le secteur forestier du Bassin du Congo
• AFD 2010
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23
Série Évaluation et capitalisation n°37
2.2.3
Efficacité des interventions et des projets
En 2006, le périmètre d’analyse en termes d’efficaci-
- la mise en place de cadres contractuels « Etat – conces-
sionnaire » pour les « domaines PAF » n’a guère avancé. Les hésitations des deux parties sur ce type d’engagement, le
té/efficience se limite à (i) la réalisation des PAF en tant que
refus de renoncer à des pratiques bien ancrées (prises de
sionnelle du domaine forestier pour les trente années à venir
relations ont limité les contractualisations.
schéma directeur et système d’information et de gestion prévi-
et à (ii) la contractualisation du mode de concession de ces domaines forestiers dotés d’un PAF.
A cette période, il n’est pas possible de mener un début
d’analyse sur la mise en œuvre effective des PAF dans la ges-
décisions arbitraires), l’incertitude sur ce type de nouvelles En termes d’efficience, il existe peu d’enseignements dispo-
nibles à ce stade, à l'exception des entreprises ayant mis en
œuvre des PAF qu'il faudrait interroger pour compléter l'analyse :
tion de leurs trois composantes. Les projets initiés à partir des
- coût - les estimations moyennes sont les suivantes :
des approches PAF adaptées aux petits périmètres forestiers
2 à 3 000 FCFA/ ha pour le diagnostic et les prévisions de
années 2000 (Gabon et Congo) visant à définir et concrétiser
sont également exclus. Les résultats de ce type d’analyse doivent donc être considérés avec prudence et modestie.
En termes d’efficacité, deux constats peuvent être faits en
2006 :
- les systèmes d’information caractérisant la ressource
exploitable, la biodiversité et les aspects socioéconomiques se
sont développés et améliorés, favorisant des modes de gestion et de valorisation de la ressource forestière sur le long
terme (trente ans), même si la qualité de l'information et de sa déclinaison opérationnelle demeure inégale selon les trois composantes7
;
Les composantes biodiversité et développement humain ont été marquées par des avancées réelles en termes de connaissances scientifiques et techniques. Ces composantes n’ont en revanche pas donné lieu à de fortes innovations en termes opérationnels.
• AFD 2010
5 à 6 000 FCFA/ ha si engagement d’un inventaire annuel
durant la phase d’exploitation
- financement - la réalisation des PAF sur subvention (RCA)
semble avoir posé moins de problèmes que celle sur prêt
(Gabon).
En termes qualitatifs, les PAF répondent largement aux
normes et standards établis par ailleurs (OAB, Center for
International Forestry Research - CIFOR). Cette qualité, large-
ment reconnue, a permis aux concessions forestières sous
PAF de se lancer dans les processus de certification et d’ob-
tenir leur agrément.
7
24
gestion
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•
La coopération française dans le secteur forestier du Bassin du Congo
Tableau 7 : Exemple d'une analyse d’efficacité dans le cas de l'approche menée au Gabon
Source : auteurs.
Tableau 8 : Exemple d'une analyse d’efficience dans le cas de l'approche menée au Gabon
Source : auteurs.
• AFD 2010
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25
Série Évaluation et capitalisation n°37
2.2.4
Effets / impacts des interventions et des projets
Les effets/impacts des approches PAF sont nombreux et
2.2.5 Viabilité / durabilité des interventions et des projets Les perspectives de viabilité/durabilité des PAF doivent être
diversifiés pour différentes raisons : la durée et la continuité
examinées sous les angles institutionnel, technique, financier
les autres approches et paradigmes et la dynamique d’acteurs
en compte à chaque niveau pour essayer d’identifier les fac-
dans leur mise en œuvre, l’incontournable confrontation avec
qui a accompagnée ces approches.
Quatre objectifs ont été fréquemment inscrits dans les
cadres logiques des PAF : le renforcement des capacités de
et social. Des points forts et des points faibles sont à prendre
teurs susceptibles de faire évoluer et consolider ces perspectives. 1.
Institutionnel
Deux variables apparaissent nettement : la faiblesse dans la
négociation, la connaissance de l’origine des produits pour
mise en œuvre des politiques/gouvernances nationales par
valorisation de la ressource et la contribution à l’équilibre cli-
manque de moyens humains et matériels, ainsi que le nombre
une meilleure transparence des filières, l’amélioration de la
matique. Si des acquis sont tangibles pour les deux premiers (avec beaucoup de nuances), ils ne sont pas réellement perceptibles pour les deux derniers.
Le changement de comportement et de pratiques de certains
acteurs du secteur forestier est notoire et reconnu dans au
moins quatre domaines :
- le développement des partenariats ONG – forestiers à l’oc-
casion de l’élaboration des PAF ;
- l’innovation dans les pratiques de gestion et de manage-
ment des entreprises forestières ;
- la constitution d’un capital de connaissances et d’expertise,
en priorité au niveau d’opérateurs et de prestataires privés et dans une moindre mesure auprès des instances publiques ;
- l’apparition d’une nouvelle gouvernance des secteurs fores-
tiers au travers d’instances régionales s’articulant avec les instances nationales.
rapport à ces nouvelles approches, due notamment au
limité et sélectif des concessions aménagées en 2005. 2.
Technique
Par rapport aux nombreux acquis et points positifs, une
question reste en suspens, sur la traduction du capital
« connaissance biodiversité » en actions opérationnelles en
termes de conservation et de valorisation susceptibles d’em-
porter l’adhésion réelle des forestiers. 3.
Financier
Les mécanismes de financement des PAF, tant pour leur éla-
boration que leur exécution, restent à consolider à partir de
considérations souvent contradictoires sur le niveau de rentabi-
lité pour le concessionnaire, de rémunération pour les services
rendus notamment dans le domaine de la conservation, etc. 4.
Social
Le modèle de développement local susceptible d’encourager
le développement humain reste problématique. Les expé-
riences disponibles sont peu convaincantes et il reste aux trois
acteurs
concernés
• AFD 2010
forestier
et
collectivi-
tés/communautés) un grand chemin à parcourir pour disposer d’un modèle durable.
26
(Etat,
exPost exPost
•
Source : auteurs.
Tableau 10 Analyse de viabilité/durabilité de l'approche PAF
Tableau 9. Analyse d'effets/impacts de l'approche PAF
La coopération française dans le secteur forestier du Bassin du Congo
• AFD 2010
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27
Série Évaluation et capitalisation n°37
2.3
Analyse de quelques thèmes spécifiques
Pour restituer et compléter les analyses rétrospectives,
quelques thèmes, déjà abordés, méritent d’être repris.
2.3.1 Articulation de l’approche PAF avec les autres poli-
tiques
Tout comme l’approche PAF a été constamment interpellée
par l’apparition des nouveaux paradigmes, elle l’a aussi été par deux types d’approche : (i) les politiques nationales dans les domaines forestier/environnemental et dans le domaine
des finances (fiscalité, barrières tarifaires, etc..) et (ii) les approches plus larges comme la certification, la lutte contre le
commerce de bois illicite et la gestion type Biens publics mondiaux.
Il est difficile de caractériser et « démêler » les interférences
entre toutes ces conceptions. Trois niveaux d’analyse peuvent
cependant être retenus :
3. articulation avec les politiques régionales : centrées sur les
politiques et la gestion durable des massifs forestiers du
Bassin du Congo, elles ont pris un poids croissant dans le
temps selon les différents domaines d’intervention et leur arti-
culation avec les politiques nationales.
Enfin, pour compléter ces considérations sur l’articulation
approche PAF – autres politiques, il y a lieu d’essayer de voir
comment se positionnent dans les différents cas les principaux
bailleurs de fonds (multi/ bilatéraux). 2.3.2
Modalités et mécanismes de financement des
PAF durant leur phase d’élaboration et de mise en œuvre
L’analyse des mécanismes de financement des PAF n’ap-
porte pas de conclusions opérationnelles et conceptuelles
claires. Elle montre plutôt que les modèles de financement retenus par l’AFD reposent sur des logiques institutionnelles AFD et des considérations pragmatiques permettant, dans un
1. articulation avec les politiques nationales - quelques situa-
contexte donné, de voir comment assurer le financement des
pos : le Cameroun avec une prédominance des approches
du jour et mérite d’être instruite à partir d’un double question-
tions types méritent d’être mentionnées pour illustrer ce pro-
politiques nationales par rapport aux approches PAF; la RCA,
avec une approche PAF et forestière intimement associées et
le Gabon avec une relation fluctuante dans le temps. En termes d’évaluation, la préoccupation serait de savoir quel
coûts de la démarche PAF. Cette question reste donc à l’ordre nement :
- que recouvre le coût d’un PAF ? (i.e. : des gains de produc-
tivité, une meilleure valorisation forestière, des garanties d’ac-
contexte a été le plus propice à la mise en place des PAF et
cès à certains services environnementaux comme la préserva-
point de vue institutionnel), ce type d’analyse fait défaut;
tions de développement humain, etc.);
dans quelles conditions. Parce qu’il est difficile (surtout d’un 2. articulation avec les approches extra nationales : l’éco-
tion de la biodiversité et le stockage de carbone, des condi- qui et comment peut (ou doit) prendre en charge ce coût ?
certification et l’approche FLEGT sont des exemples ayant
(i.e. : les forestiers au nom de la rentabilité des PAF et d’une
mettre les acteurs (dont les Etats) « devant le fait accompli »,
entre les Etats/les forestiers/l’aide internationale, à travers diffé-
démontré une certaine efficacité. Originales par leur façon de elles ont fortement contribué à la légitimité - voire la pérennité
- de l’approche PAF;
28
• AFD 2010
mise en concession sur longue durée, le partage des coûts rents mécanismes de financement (autofinancement direct ou
par prêt, subvention totale ou partielle, fiscalité directe ou indi-
recte, mécanismes de type biens publics mondiaux - BPM, etc.).
exPost exPost
•
La coopération française dans le secteur forestier du Bassin du Congo
2.3.3 Impacts des grands chocs externes sur l’approche PAF Compte tenu des ambitions de pérennité affectées aux PAF,
il y a lieu de savoir comment cette approche s’adapte et évolue selon des chocs externes. Pour cela, en complément des
analyses de viabilité/pérennité faite par rapport aux résultats
projets (cf. 2-2-5), il serait instructif de dresser un constat par rapport à certains chocs que les secteurs forestiers ont subi
sur la période et d’en déduire des enseignements. Ce constat pourrait être établi comme suit :
- prendre deux événements majeurs survenus au cours de la
décennie 2000 : l’arrivée des nouveaux investisseurs dans le
secteur forestier du Bassin du Congo ; la crise mondiale qui affecte profondément certains marchés ;
- appréhender comment l’approche et toute l’ingénierie PAF
qui l’accompagne (dans les phases d’élaboration et d’exécu-
tion) s’en trouvent affectées notamment à travers les changements de comportements d’acteurs et d’opérateurs ;
- analyser si ces chocs remettent profondément en cause la
démarche PAF (au point de menacer sa légitimité) ou si les turbulences provoquées peuvent être gérées et de quelle
façon.
• AFD 2010
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Série Évaluation et capitalisation n°37
30
• AFD 2010
exPost exPost
•
La coopération française dans le secteur forestier du Bassin du Congo
3 Quelles perspectives pour l’approche PAF en 2010 ?
L’analyse rétrospective tend à reconnaître la légitimité et le
bien fondé de l’outil PAF tant par son intégration dans les poli-
Le deuxième défi consiste à voir comment cet investisse-
ment PAF va pouvoir être repris et valorisé dans le nouveau
tiques publiques (sectorielles, globales), dans les approches
cadre « gestion et valorisation du stockage de carbone » en
condition nécessaire pour l’obtention de la certification fores-
Copenhague. L’accord de Copenhague, à travers le mécanis-
de type BPM (inclusion dans le futur mécanisme REDD+,
cours d’élaboration suite aux négociations de Bali et de
tière), que comme instrument de gestion concrète des
me REDD+, valide l’éligibilité de la gestion forestière durable à
reste néanmoins confrontée à plusieurs défis.
sa mise en œuvre effective au niveau national, l’existence de
domaines forestiers du Bassin du Congo. L’approche PAF Le premier défi est de poursuivre son application et d’assu-
rer sa généralisation à grande échelle. Ceci passe à court
terme par :
- son adoption dans les grands domaines forestiers par les
grands concessionnaires et notamment les investisseurs arrivés récemment (malais, chinois, etc.) ;
- son application effective dans les zones forestières immé-
diates, à densité démographique et à diversité économique
plus fortes. En ce sens, les résultats des projets « Petits per-
mis forestiers » du Gabon et aménagement des forêts du
Congo Sud sont importants et doivent donc faire l’objet d’une
analyse approfondie sur la période 2007-2010.
un financement carbone. Le mécanisme REDD+ exige, pour
codes réglementaires et de politiques forestières crédibles et efficaces. Il reste donc à vérifier que le mécanisme REDD+ va pouvoir s’adosser sur les acquis PAF (et par quels moyens) ou si des ajustements devront être faits.
Enfin, le troisième défi est de voir comment cette approche
PAF, expérimentée et développée exclusivement sur les forêts
tropicales du Bassin du Congo peut être valorisée dans les
régions où les problématiques forestières sont des enjeux
majeurs (bassin amazonien, problématique indonésienne,
etc.).
Dans le cadre de l’élargissement géographique de ses acti-
vités, l’AFD doit s’efforcer de mettre à la disposition de ses nouveaux partenaires ce capital de connaissances et de savoir faire sur la base du mécanisme REDD+ en particulier.
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Annexes
Liste des évaluations réalisées pour l'AFD jusqu’en 2005
Evaluation rétrospective de deux projets du secteur forestier ivoirien, février 1992. Evaluation rétrospective d’un projet forestier en faveur de la SODEFOR dans la région du Sud Est, janvier 2003 Bilan du projet d’aménagement pilote d’aménagement intégré de Dimako au Cameroun, 1998 Bilan du projet Forêts et Terroirs Dimako au Cameroun, 2001 Evaluation rétrospective du projet d’aménagement forestier des concessions attribuées à la Société Thanry-CEG au
Gabon, 1999
Investissements de l’AFD dans l’aménagement forestier durable des entreprises forestières privées au Gabon, cas de la
CEB, 1999
Evaluation du Projet d’appui à la réalisation des plans d’aménagements forestiers (PARPAF 1 et PARPAF 1bis), 2005 Evaluation des opérations financées par l’AFD dans le domaine forestier au Gabon : - note intermédiaire, 2004
- rapport de synthèse, 2005 Etude bilan-évaluation du projet FFEM d’appui à l’aménagement forestier durable au Gabon, 2006
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Série Évaluation et capitalisation n°37
Liste des sigles et abréviations
AFD
Agence Française de Développement
BICIG
Banque internationale pour le commerce et l’industrie du Gabon
BGD
Banque gabonaise de développement
BINGO
Business and Industry NGOs
BIRD
Banque internationale pour la reconstruction et le développement (groupe Banque mondiale)
BPM
Biens publics mondiaux
CAD
Comité d'aide au développement
CIFOR
Center for International Forestry Research
CI
Conservation International
CNUED
COMIFAC
COP
EFI
Conférence des Nations unies sur l'environnement et le développement
Commission des forêts d’Afrique centrale
Conference of the Parties
European Forest Institute
FAO
Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture
FFEM
Fonds Français pour l’Environnement Mondial
FLEGT
Forest Law Enforcement Governance and Trade
FSC
Forest Stewardship Council
Ha
Hectare
MAEE
Ministère des Affaires étrangères et européennes
IFIA
Association interafricaine des industries forestières
MEEDDM OAB
OIBT
Ministère de l’Écologie, de l’Énergie, du Développement durable et de la Mer Organisation africaine du bois
Organisation internationale des bois tropicaux
OMD
Objectifs du Millénaire pour le développement
ONG
Organisation non gouvernementale
PAF
Plan d’aménagement forestier
PAFT
Plan d'action forestier tropical
PFBC
Partenariat pour les forêts du Bassin du Congo
PARPAF
PFNL
34
Projet d’appui à la réalisation des plans d’aménagements forestiers
Produits forestiers non ligneux
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•
Annexes
PMA
Pays les moins avancés
PPF
Petits permis forestiers
PNUD PPP PRI
PSE
RCA
REDD+
Programme des Nations unies pour le développement Partenariat public privé
Pays à revenu intermédiaire
Paiements pour services environnementaux République centrafricaine
Reduction of Emissions from Deforestation and Forest Degradation
UE
Union européenne
WRI
World Resources Institute
WCS
WWF
Wildlife Conservation Society
World Wildlife Fund
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