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POINT DE VUE Pourra-t-on guérir la paralysie médullaire un jour ?

Sera-t-il un jour possible de guérir la paralysie médullaire ?

Où en est la recherche sur la paralysie médullaire ? Voici le point de vue de trois spécialistes.

La PhD Léonie Asboth (CHUV) est confiante

Un succès thérapeutique réalisé par l’EPFL et le CHUV a fait la une des journaux en début d’année, annonçant que les personnes ayant une paralysie médullaire pourraient à nouveau marcher, grâce à une stimulation électrique de la moelle épinière au-dessous de la lésion. Pour cela, plus de seize électrodes implantées déclenchent de façon ciblée le mouvement des muscles.

Depuis 2016, des études sur des personnes sont en cours à Lausanne. « Il s’agit en grande partie d’une question de temps », explique la chercheuse du CHUV Léonie Asboth. Il est réaliste de penser que la grande majorité des personnes touchées pourront à nouveau se lever et marcher. Toutefois, après l’euphorie médiatique que la première présentation en 2018 avait déclenchée sur le plan mondial, elle ne souhaite pas donner de faux espoirs : « Il n’y aura pas de retour à la normalité, c’est-à-dire à la capacité de marche telle qu’elle était avant la blessure. Le niveau lésionnel et la constitution du corps jouent également un rôle important. » Le but est de permettre aux personnes touchées de faire quelques pas de façon indépendante, ce qui améliorerait déjà grandement leur qualité de vie.

Le professeur Robert Riener (EPF) est optimiste

« Je crois au progrès », déclare le professeur de l’EPF de Zurich Robert Riener. « Des procédures biologiques ou médicales permettront une guérison ou une compensation des fonctions défaillantes par la technique. » Mais la patience est de mise. « Le corps humain est si complexe qu’on ne peut pas simplement le répliquer », explique Robert Riener. Ce sera le hasard, comme toujours dans la recherche, qui décidera si la solution sera apportée par la biologie ou la technique : « Je suppose toutefois

Deux participants de l’étude lausannoise que des méthodes biologiques seront disponibles plus rapidement. Elles sont plus compatibles avec le corps. La technique, en revanche, est toujours confrontée aux limites physiques. »

Le chercheur de l’EPF est spécialisé en systèmes intelligents et robots, qui sont bien plus performants que l’être humain sur certains plans. Mais il constate aussi : « Aucun système n’est aussi performant que nous dans tous les domaines. Les exosquelettes peuvent être debout et marcher, mais pas vraiment s’asseoir. Un fauteuil roulant est plus rapide que nos jambes, mais ne peut pas traverser le sable. » Il est donc clair pour Robert Riener : « Cela va prendre encore beaucoup de temps. »

Le Dr méd. Michael Baumberger (CSP) est pragmatique

Le médecin-chef du Centre suisse des paraplégiques (CSP) considère qu’une guérison dans un avenir proche est peu probable. « L’intégration de la robotique nous permettra de voir des améliorations fonctionnelles », explique-t-il. « Toutefois, le plus important n’est pas le mouvement des muscles, mais le système nerveux autonome, qui est touché par la paralysie médullaire. La qualité et l’espérance de vie dépendent de lui. » Or, celui-ci est hautement complexe. Il contrôle entre autres, sans intervention de notre part, les fonctions vésicale, intestinale et sexuelle ainsi que le système cardio-vasculaire et les hormones. Jusqu’à la découverte de ce lien au début du vingtième siècle, les personnes blessées médullaires décédaient quelques jours après la survenue de la lésion.

Le système nerveux autonome rend le traitement de la paralysie médullaire particulièrement difficile. « En tant que valide, il faut s’imaginer monter un escalier sans que la pression ni la fréquence cardiaque ne s’adaptent automatiquement », explique Michael Baumberger. Cet exemple montre que les personnes paralysées médullaires sont confrontées à un immense défi. (kste, pmb / màd)

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