Contes de ma mère l’Oye
que la sorcière est son contraire. L’ogre quant à lui « nous renvoie à notre propre intempérance et à nos appétits : il n’est que plus largement et plus fortement nousmême » 402. Les personnages secondaires, eux, n’ont pas d’histoire.
Moralités Concernant les moralités, qui renferment à la fois l’ironie et le scepticisme de l’auteur, elles permettent de divertir et d’instruire. En effet, « Pour Perrault, les contes expriment le bon sens populaire et deviennent une sorte de catalogue de méchants tours à jouer au seigneur, de brutalités masculines envers les femmes et de malice féminine pour se défendre des hommes. Ils proposent surtout une marge d’action nécessaire et suffisante, qui permette de ruser avec les impératifs sociaux contraignants pour en finir, en fin de compte, par les consolider d’autant mieux ; nos aïeux […] « ont toujours eu grand soin que leurs contes renfermassent une moralité louable et instructive. Ils tendent tous à faire voir l’avantage qu’il y a d’être honnête, patient, avisé, laborieux, obéissant et ce qui arrive à ceux qui ne le sont pas. » » 403 Les morales sont donc très présentes chez Perrault et mises en valeur. Elles se situent à la fin de chaque conte, au nombre de deux dans certains cas. Elles peuvent être tournées en ridicule, comme dans La Belle au bois dormant, où le second degré utilisé pour signifier l’attente bafoue le récit et ses péripéties. Néanmoins, « Perrault présente souvent la moralité comme un des ingrédients préalables du conte, indépendant de sa prise en charge par le conteur. Il fait partie d’un héritage ; Peau d’Âne ne se conclut pas par la mention d’une primitive intention d’éducation : « Il n’est pas malaisé de voir / Que le but de ce conte est qu’un enfant apprenne ». Le but : ce qui a motivé sa production d’autrefois et sa transmission. Que le sens moral précède et informe le conte, correspond, dans la conscience lettrée de l’époque, au phénomène de l’allégorie, alors décriée. » 404 Elles sont le fait d’un narrateur, ou d’une voix commune, et actualisent le récit. Les contes de fées, dont Perrault est érigé comme le grand classique du genre, rappellent l’enfance par l’innocence, la peur et la naïveté contenues dans ces histoires. Les personnages principaux correspondent à une certaine mythologie personnelle, et permettent l’identification psychologique du lecteur. Le transfert se fait aisément grâce au langage et au style de l’auteur. Les destinataires veulent ressembler aux héros décrits sommairement. Les princes et les princesses sont admirés en ce qu’ils reflètent la cour, mais également moqués par l’auteur, très présent dans l’œuvre. Les protagonistes sont immortels, car ils sont toujours jeunes. Selon Jacques Barchilon, « Le conte de fées est un art d’imagination, un art dont le secret est a une profonde résonnance psychologique : les personnages de Perrault ne cesseront jamais de faire rêver. Il suffit d’énumérer la liste prestigieuse des
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Idem, p. 65.
JAN, Isabelle, La Littérature enfantine, op. cit., p. 41 – 42.
SERMAIN, Jean-Paul, Le conte de fées, du classicisme aux lumières, op. cit., p. 126.
BERCEGEAY Marie-Sophie | Diplôme national de master | Mémoire de M1 | juin 2015 Droits d’auteur réservés.
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