Édito Michel DEBOUT - Président du CESC EXASPÉRÉS ! Exaspérés, les agriculteurs, les enseignants les médecins, les magistrats, les sans-emplois ; exaspérés les jeunes, les séniors ; exaspérants le prix de l’essence, des loyers, les propos de M. TRICHET qui déclare que l’augmentation des salaires serait « la pire des bêtises » ; exaspérantes les plateformes téléphoniques délocalisées alors que chacun attend une réponse de proximité. « Je vais craquer » voilà ce que beaucoup de nos concitoyens ressentent aujourd’hui comme en écho aux révoltes venues de l’autre côté de la Méditerranée, car eux aussi, là-bas, ont craqué avant de s’immoler et enfin de se révolter. Soyons attentifs à cet état d’exaspération à ce qu’il traduit de désespérance et à ce qu’il peut produire comme violence (multiplication des crimes suivis de suicides, des attaques contre les personnes) ; exaspération qui se traduit en politique par la montée du Front national dans les sondages et sur le terrain. Analysons bien dans quel état se trouve le citoyen aujourd’hui avant de construire notre projet pour les français. Je me souviens du printemps 68 et du titre célèbre d’un journal du soir « La France s’ennuie ». On sait ce qui a suivi, la révolte de mai 68. Elle fût justement une réponse à l’ennui. L’ennui de la jeunesse qui n’avait pas connu (à la différence de ses ainés et de ceux qui la dirigeaient) la guerre et qui aspirait à l’affirmation de soi, de sa liberté. Ce fût une révolte, ludique et libertaire face à une société, celle d’un gaullisme finissant qui ressemblait à un carcan. C’est à ce moment-là que s’est affirmé l’individualisme comme référent idéologique qui n’a fait que croître au cours des décennies post soixante-huitardes et a fait tomber au passage le collectivisme insupportable des pays de l’Est. Le sarkozisme n’est jamais que la phase ultime de cette évolution. C’est cette dérive idéologique politique et sociale qui a provoqué la crise financière puis sociale et humaine que nous connaissons aujourd’hui. Les recettes d’hier ne fonctionnent plus et Sarkozy ne peut être crédible en se parant des habits de la régulation. C’est à la gauche de porter ces valeurs nouvelles en les hissant à la hauteur des défis nationaux et mondiaux : il nous reste à définir le solidarisme du XXIe siècle qui se tiendra à égal distance de l’individualisme et du collectivisme. Alors que nous ne sommes pas encore arrivé à la présidentielle, même si de bonnes âmes médiatiques veulent en permanence nous amener sur ce terrain, nous devons nous adresser aux Français, à ceux qui souffrent dans leur vie dans leur travail parce qu’ils sont au chômage ou surendettés en comprenant bien que s’ils peuvent être tentés par la préférence nationale c’est qu’ils ressentent que leurs difficultés, leur détresse n’ont provoqué que de l’indifférence nationale. Ne surenchérissons pas à tous les dérapages de Marine Le Pen qui en fait profession et appuie là ou cela fait mal, ne nous comportons pas en simple donneurs de leçons. Appliquons comme le souhaitent Martine Aubry et les dirigeants du PS dans les mois qui viennent à tracer notre route, à rassembler et à proposer. C’est pour contribuer à cette construction commune que nous publions cette 2e lettre électronique du CESC consacrée au rapport intitulé « Pour une société de l’Être et non de l’Avoir » élaborée par la section Europe et Mondialisation fin 2009 dont les animateurs sont Jacques Gérard et Charles Napoléon, qui s’efforcent de mettre à jour les enjeux politiques et sociétaux de notre monde plus que jamais en devenir. N.B : Cette lettre a été écrite avant que ne survienne la tragédie du Japon
Sommaire
N°2 MARS – AVRIL 2011
P. 2 : Trois questions à… André-Jean GUERIN, Membre du Conseil économique, social et environnemental P. 2 : L’invité du mois Charles NAPOLEON, membre du bureau et co-animateur de la section Europe Mondialisation du CESC P. 3 : Éclairage sur une publication Pour une société de l’Être et non de l’Avoir. P. 6 : Un livre /une analyse Rapport sur le développement humain 2010 publié par le PNUD.
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Trois questions à André-Jean GUERIN, membre du CESE Sans réelles mesures internationales contre les spéculations et les dumpings monétaires, fiscaux, sociaux, écologiques... l'Europe ne risque-t-elle pas une crise majeure qui résultera de la mise à l'écart de l'emploi et de l'utilité sociale de millions de concitoyens ? Avec votre cahier « Pour une société de l’Être et non de l’Avoir », vous appelez une véritable « métamorphose » dans le sens que lui donne Edgar Morin. Vous visez en particulier une profonde évolution des modes de consommation et de production. La spécialisation géographique et l’importance des échanges de biens et services donnent à cette ambition une dimension globale. Aujourd’hui, l’opinion s’étend que l’Europe et la France en son sein doivent œuvrer, sans naïveté, pour réduire les distorsions de concurrence de toute nature qui remettent en cause la justification des accords d’échanges commerciaux. Mais, au-delà, les évolutions que vous prônez demanderaient une modification dans la priorité des ordres juridiques internationaux, ceux dérivant des droits de l’homme, des conventions de l’OIT ou des textes de Rio et ceux résultants de l’OMC. Y a-t-il des progrès théoriques en cours en matière d'indicateurs relatifs au bonheur individuel et collectif ? Les critiques adressées au PIB et à sa croissance comme mesure du bien-être des individus et de la société sont anciennes. Elles prennent aujourd’hui une nouvelle acuité. Il est grossièrement insuffisant sur l’objet même qu’il est sensé mesurer pour des raisons de méthode et d’évaluation des activités qui ne sont pas monétaristes. Plusieurs travaux comparatifs au plan mondial documentent à présent le découplage entre le niveau de PIB par habitant, audelà d’un certain seuil, et le bien être ressenti par les habitant de différents pays. Diverses initiatives contribuent actuellement à faire évoluer les esprits. « Beyond the GDP » a été lancé par la Commission européenne en 2007. Les indicateurs de développement durable font l’objet de travaux nombreux pour diversifier les objets de mesure. L’empreinte écologique est une tentative pour fournir un indicateur parlant de la charge de l’activité humaine sur les ressources naturelles renouvelables. La Commission Stiglitz a éclairé plusieurs pistes dans ce sens. En France, il convient d’écouter les propositions d’un réseau comme FAIR (forum pour d’autres indicateurs de richesse). Il insiste sur les procédures à respecter pour véritablement associer la société civile à la détermination des indicateurs de mesure du bien être individuel et collectif. Le monde ne gagnerait-il pas à ce que l'Organisation mondiale du commerce se transforme en une Organisation mondiale du développement durable, pour tous ? Dans votre question, je retiens particulièrement les deux derniers mots. La formulation la plus connue pour cerner la notion de développement durable est celle donnée dans le rapport Brundtland. Trop souvent cette référence omet la seconde phrase qui précise notamment le concept de « besoins, et particulièrement des besoins essentiels des plus démunis, à qui il convient d’accorder la plus grande priorité, … ». Quand on prend la mesure du nombre d’individus déjà dans l’exclusion par la pauvreté, plus de 1 milliard, et du nombre d’emplois (si possible décents) qu’il conviendrait de créer d’ici 2050 pour, non seulement résorber ces situations mais surtout éviter qu’elles ne touchent plus d’individus, de 1,5 à 3 milliards d’emploi (selon le taux d’activité), il est aisé d’imaginer que la première priorité n’est plus d’optimiser les règles du commerce international. Vous appelez une démocratie mondiale de vos vœux. Elle doit s’appuyer sur une expression des sociétés civiles dans les différents pays. Des consultations réalisées conjointement dans 28 pays et auprès de 4.000 individus dans le monde sur la base des questions qui étaient sur la table de négociation à Copenhague, montre que cette expression peut se manifester dans des délais, et à des coûts compatible avec le gouvernement du monde. L’une des voies ne serait-elle pas de favoriser ce type de participation des citoyens dans un cadre approprié ? En France, cela ne pourrait-il pas être l’une des missions enthousiasmante que le CESE réformé pourrait assumer ?
L’invité du mois : Charles NAPOLEON, membre du bureau, co-animateur de la section Europe Mondialisation du CESC. Il nous dit ce qui la mobilise actuellement… « Ce sont les migrations comme mode de
régulation de la mondialisation, ou visage mondialisé de l’immigration. Au moment d’une recrudescence de la xénophobie dans les scrutins en France et en Europe et de la progression des idées de Marine Le Pen, les mouvements de population à la recherche de travail accompagnent les échanges de marchandises, de capitaux et de cultures. Avec 214 millions d’immigrés dans le monde, l’immigration a changé d’échelle et de nature. Elle devient apport structurel de richesse pour un nombre croissant de pays. Ceci n’épargne pas la France et l’UE est attendue pour une définition et une véritable politique européenne de l’immigration. Nous ferons des propositions. Au niveau national, à force de ne relever que les difficultés, on oublie que l’intégration des populations venues du Maghreb ne se réalise pas si mal dans le contexte de chômage qui sévit depuis 1975. On n’ose pas affirmer clairement : que l’essentiel de l’immigration est légale et qu’elle obéit à une loi humaine, celle du regroupement familial ; que la concentration du logement dans les quartiers périphériques et le refus d’une grande politique de mixité sociale dans beaucoup de villes créent un terreau des plus favorables au refuge dans l’extrémisme religieux ! Ce rapport prendra la suite de « Migrations et Développement » que nous avons publié en 2009. Ce sujet reste l’un des plus brûlants dans la perspective de l’élection présidentielle de 2012. » Charles Napoléon
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Éclairage sur une publication du CESC « Pour une société de l’Être et non, de l’Avoir » Tirant les enseignements de la crise de 2008 plus connue sous le nom de « tsunami financier », ce Rapport démontre la nécessité : • d’un développement favorisant le sentiment d’Être et non le rêve d’une accumulation infinie d’Avoirs, • d’une économie taxant les spéculations financières au même titre que les jeux ; • d’une croissance plus économe en ressources et en biens publics mondiaux rares, s’appuyant sur une fiscalité totalement réorientée ; • de nouveaux instruments de mesure s’attachant au sentiment de bien-être plutôt qu’au capital possédé et prenant en compte l’avis des citoyens sur leur propre vie par rapport à celles de leurs parents ou de leurs enfants ; • d’une démocratie mondiale impliquant de rénover les organisations internationales actuelles et d’inventer une monnaie universelle. Un petit abécédaire suit ainsi qu’un bref florilège qui donne la définition ou commente certains des termes utilisés pour décrire les maux de notre société.
1. Les maux de notre société de l’Avoir… Avec 3.200 milliards de dollars de flux financiers quotidiens dont seulement 2,7 % portent sur des échanges réels de biens et de services - le reste alimentant une économie virtuelle et spéculative -, le monde marche sur la tête ! La force qu’exerce le capitalisme sur la vie quotidienne des humains est devenue insoutenable avec désormais des salariés qui règlent les folies des spéculateurs et un nombre de chômeurs croissant aussi vite que les profits spéculatifs. 1.1 – Le tsunami financier de 2008, une crise de toutes les régulations Soulignant que le tsunami financier a eu pour origine un appât du gain sans limites et sans causes réelles dans un système de régulation n’intégrant aucun des nouveaux éléments de l’évolution du monde, ce Rapport pointe le risque très réel de nouvelles crises plus graves se rattachant toutes sans exception au rôle excessif de l’argent : crise des valeurs, sentiment d’isolement des personnes, épuisement des ressources de la planète, réchauffement climatique… Comment ne pas faire le lien entre la spéculation financière, les surprimes et les bonus, l’épuisement des ressources de la planète, les émissions incontrôlées de polluants, la misère persistante dans beaucoup de pays, l’immigration clandestine, la montée des périls sanitaires, l’exploitation de l’homme toujours plus forte dans les entreprises pour des pouvoirs d’achat en baisse ?
1.2 – Une crise écologique majeure devant nous ? Avec la disparition désormais programmée de nombreuses ressources de notre planète, c’est l’eau et la mer, l’air, les forêts, la terre, le vivant qui sont mis en danger par un commerce effréné pour l’accroissement des profits de quelques-uns. Cette évolution pourrait générer dans les 40 années à venir un flux de réfugiés climatiques de 200 à 250 millions de personnes sans compter 50 millions de victimes de la faim ainsi qu’une diminution dramatique des ressources en eau non polluée qui pourrait toucher prochainement 1,8 milliard d’êtres humains et engendrer de nouvelles spéculations. 1.3 – Une question sociale à reformuler La question sociale devra désormais être pensée fondamentalement dans son nouvel espace, celui du monde entier. De nouveaux modes de production et de consommation devront être conçus sauf à vouloir que l’ascenseur social continue à être bloqué, que la part des salaires dans le PIB continue à baisser au profit de revenus spéculatifs du capital, que la crise touche de plus en plus de couches nouvelles : jeunes, salariés pauvres, retraités. La crise économique détruit non seulement les emplois mais aussi le sentiment d’utilité sociale tout comme le lien social lui-même. C’est pourquoi nous devons être très attentifs à ce que la formation en cours d’une nouvelle bulle issue de spéculations sur les ressources naturelles, les biens et les services durables ne conduise à une prochaine crise cyclique sur les valeurs financières qui viendrait se superposer à la crise écologique et énergétique.
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2. Propositions pour une société de l’Être 2.1 – Comment sortir de la crise sans en préparer d'autres ? Le Rapport émet de sérieux doutes sur la reprise de l’emploi et la manière la plus juste de rembourser l’immense dette de notre pays. Il note que la spéculation reprend déjà son cours et s’oriente désormais vers de nouveaux eldorados : le développement durable, l’énergie propre et bon marché, la lutte contre les pollutions. Il annonce une nouvelle crise financière d’origine spéculative sur les biens et les services dits durables, une nouvelle flambée des cours des matières premières et une crise majeure de l’environnement. Face à ces perspectives, il propose 14 mesures immédiates. Les propositions du CESC • Mettre réellement sous contrôle la spéculation. • Imposer des réserves plus importantes aux banques. • Séparer les activités des banques d’investissement de celles de banques des particuliers et des entreprises ; séparer les activités de financement de l’économie réelle de celles purement spéculatives conduites avec l’épargne des autres. • Traiter les transactions financières virtuelles comme les jeux au casino et leur imposer la même fiscalité que celle des jeux. Leur imposer une traçabilité obligatoire et prélever une taxe conséquente susceptible de remboursement au-delà d’un délai raisonnable garantissant qu’il ne s’agit pas d’une spéculation à court terme pour un enrichissement sans cause. • Revoir la composition et le rôle de l’International Accounting Standards Board en matière de production de normes et mettre en place une structure publique chargée de son contrôle et de celui des banques centrales. • Réviser les normes comptables IASB et ne plus comptabiliser à leur valeur de marché les actifs devenus non liquides en raison d’une crise. • Interdire toute spéculation sur les marchés à terme des matières premières. • Imposer aux fonds vautours des rapports aux banques centrales ; limiter leur accès aux produits dérivés ; limiter leur endettement par rapport à leurs fonds propres. • Interdire en Europe toute relation bancaire avec les paradis fiscaux. • Créer une agence publique européenne de notation des produits financiers comme des entreprises.
• Limiter la taille maximale des établissements financiers ou de crédit ainsi que des entreprises gérant les médias. • Réviser la hiérarchie des normes internationales pour qu’enfin, le commerce ne soit pas un but en soi, mais un moyen de permettre aux hommes, à tous les hommes de s’épanouir. • Promouvoir des projets internationaux de coopération scientifique et technique de long terme pour réduire les déséquilibres entre pays riches et pays pauvres, lutter contre le réchauffement climatique et se préparer dès maintenant à en maîtriser les conséquences. • Créer une taxe sur les transactions financières non accompagnées d’échanges de biens et de service pour les financer. 2.2 – Des emplois, une fiscalité au service de la société de l’être L’opulence obtenue par une division du travail poussée et par une production intensive n’apportant au plus grand nombre ni le progrès ni l’accès à une société libre et démocratique, il convient de s’interroger sur le concept même de consommation supplémentaire. Il nous faut resituer le travail et l’emploi qui en découle dans le monde d’aujourd’hui et le projeter dans le monde de demain. Le Rapport pense nécessaire de remettre en cause l’idée du travail salarial comme seul et unique moyen d’existence économique et de réalisation humaine mais aussi, de renouveler celui, pour tout Homme, d’un droit à un revenu décent et régulier. Il souligne une nouvelle convergence entre les objectifs de plein emploi et ceux du développement durable car, produire des biens ou des services de manière écologiquement durable exige plus de travail que de fabriquer les mêmes biens en détruisant les ressources naturelles et le climat. Pour ce faire, la stratégie de la nouvelle croissance devra s’appuyer sur une fiscalité qui permette des ajustements progressifs des comportements. Les propositions du CESC • Remplacer la TVA - aujourd’hui adossée à la consommation de manière indifférenciée - vers la production et la consommation de biens et services durables : l’alléger sur la production de biens et services durables et l’augmenter sur la consommation de produits générant du carbone. • Revenir sur les baisses d’impôts passées qui n’ont pas bénéficié à l’économie alors que la dette doit bien être résorbée. • Elargir les bases imposables - revenu et patrimoine - et instaurer des taxes modérées et progressives ; supprimer les niches fiscales et le bouclier fiscal.
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• Procéder avec méthode. Coordonner les politiques publiques ce qui plaide pour un Etat fort, capable d’imposer des arbitrages et pour le retour de lieux de dialogue et d’arbitrage comme l’ancien Commissariat au Plan permettant de tenir à distance les groupes de pression du capitalisme financier qui ont si bien su capter le processus législatif et réglementaire pour servir leurs intérêts particuliers au détriment de l’intérêt général. • Créer un revenu maximal acceptable indexé sur les minima sociaux. • Replacée la question d’un développement respectueux des Hommes et de la Planète au centre des préoccupations des dirigeants. Créer un Conseil de sécurité environnemental, social et économique – dans cet ordre -, au sein de l’ONU, coiffant l’ensemble de ses organisations spécialisées et arbitrant en dernier ressort les conflits d’intérêts. 2.3 - Pour de nouveaux indicateurs développement et du bien-être
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Passer d’une économie de l’Avoir à une économie de l’Être suppose une refonte de ce que l’on peut appréhender par la mesure. Une partie importante des activités entrant dans le calcul du Produit Intérieur Brut consiste à réparer des dommages produits par d’autres activités. La part excessive accordée aux indicateurs monétarisés, le monopole de la réflexion sur le sujet accordé aux seuls économistes, masculins de surcroît sans appel à l’expertise citoyenne justifie une réforme rapide. Il faut établir le contenu d’un « bonheur national brut » et bouleverser la machinerie statistique mondiale pour parvenir à un nombre limité d’indicateurs. Incluant la mesure d’une « empreinte écologique » retravaillée et d’une épargne nette ajustée prenant en compte des valeurs ajoutées négatives en cas de destruction de la planète ou du stock de matières premières, ou encore de réduction de la quantité ou de la qualité des « biens publics mondiaux », il devrait utiliser des valeurs unitaires universelles pour en évaluer les composants. Les citoyens doivent être associés à la réflexion sur ces nouveaux critères.
citoyen du pays le plus pauvre ou de celui du pays le plus riche. 2.5 – Vers une monnaie mondiale ? Les propositions du CESC • Reprendre à notre compte l’objectif de création d’une monnaie mondiale unique. • Faire émettre par le FMI un montant important de droits de tirage spéciaux à souscrire par toutes les banques centrales. • Coupler cette proposition avec celles de Jacques Duboin et du banquier belge Bernard Lietar constatant qu’une part infime des mouvements sur les marchés financiers correspond à des échanges réels de biens et de services – qui préconisent la création d’une monnaie qui perdrait peu à peu sa valeur lorsqu’elle ne serait pas utilisée en contrepartie de l’achat de biens et de services. • Combinée cette idée avec la proposition de la CNUCED d’un impôt mondial sur les revenus du capital et/ou sur la fortune, alimentant un Fonds pour le développement mondial finançant les projets internationaux de long terme.
Annexe 1 – Petit abécédaire (deux extraits) Paradis fiscaux Un paradis fiscal est une juridiction où une personne morale peut se créer, réaliser des achats puis les revendre à d’autres personnes morales dans des conditions de prix lui permettant de domicilier les plus-values dans ce paradis fiscal ou un autre, pour les soustraire en partie ou totalement à la fiscalité. Aujourd’hui au nombre de 91 dans le monde, ils abriteraient des sommes s’élevant à 11 billions de dollars US, soit presque l’équivalent du PIB des USA, un cinquième du PIB mondial, 5 fois celui de la France ou encore celui du Japon, de l’Allemagne, de la Chine et de la France réunis !
2.4 – Vers une démocratie mondiale
Spéculation
Est-il démocratique que des décisions aussi lourdes de conséquences soient prises par des chefs d’Etat qui n’ont pas été élus pour cela ?
Fait de personnes qui achètent à des vendeurs qui n’en ont pas et avec de l’argent qu’elles n’ont pas non plus, des produits - virtuels à 98 % - dont elles ne veulent pas et ne prendront jamais livraison, pour les revendre avec un profit sans cause à d’autres personnes qui n’en veulent pas plus et n’ont pas plus d’argent mais qui comptent bien faire la même chose qu’eux : s’enrichir sans raisons.
Le principe « un gouvernement de tous » et d’une « représentation de tous » doit prendre forme afin d’accompagner la prise de conscience de la globalité des problèmes de l’humanité. Tous les hommes sur la planète sont égaux et chaque voix est équivalente, qu’elle soit celle du
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Un livre / Une Analyse Rapport sur le développement humain 2010 Publié par le Programme des Nations-Unies pour le Développement. 260 pages. Gratuit.
Un avant-propos signé par Helen Clark, administratrice du PNUD, souligne les avancées de la réflexion théorique et pratique sur les indices publiés depuis 1990, année d’édition par le PNUD de son premier Rapport sur le Développement Humain (RDH). Amartya Sen – qui travaillait 20 ans plus tôt avec Mahbub ul Haq sur ce premier Rapport - signe l’introduction et conte brièvement l’évolution des indices publiés, du premier « IDH » à ceux qui se sont ajoutés jusqu’à aujourd’hui. Jeni Klugman, directrice du RDH, remercie ensuite les très nombreux contributeurs à ce Rapport du vingtième anniversaire. Après quoi, 6 chapitres en 158 pages précèdent les 95 pages de l’annexe statistique : (i) La réaffirmation du développement humain (ii) L’avancée des populations (iii) Les multiples chemins du progrès (iv) Les bonnes nouvelles n’arrivent pas toutes en même temps (v) Les mesures de l’inégalité et de la pauvreté : innovations (vi) La feuille de route au-delà de 2010. Si l’analyse sur 20 années des indices publiés montre que les « progrès ne se sont pas limités à la santé, à l’éducation et à l’élévation des revenus mais ont aussi concerné la faculté des gens à choisir leurs dirigeants, à influencer les décisions publiques et à partager le savoir », le Rapport insiste fort justement sur le fait que « Tout n’a pas été positif. Ces années ont aussi été marquées par un accroissement des inégalités entre pays comme en leur sein ainsi que par l’émergence de modèles de production et de consommation qui, de manière croissante, sont apparus insoutenables ». Il relève que « de nouvelles vulnérabilités requièrent des politiques publiques innovantes pour faire face aux risques et aux inégalités tout en exploitant les forces dynamiques du marché pour le bénéfice de tous ». Il conclue que « Ces problèmes appellent de nouveaux outils » et en présente trois qui sont du plus grand intérêt : * l’indice de développement humain ajusté aux inégalités, * l’indice d’inégalité de genre et, * l’indice de pauvreté multidimensionnelle. La grande question de la destruction des ressources de la planète n’est toutefois pas vraiment prise en compte, non plus que celle d'une valorisation des indices par d'autres voies que les valeurs du marché. Ce que nous regrettons vivement !
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