1
Préface de Philippe Bélaval p. 1
Préface de Gérard Audinet p. 3
LES CHEMINS DE LA PANTHÉONISATION
Sous la direction d’Alexandrine Achille
1 Les années décisives 1820-1851 Nicole Savy
Victor Hugo. La liberté d’une vie Alexandrine Achille p. 5
p. 14
2 L’exil de la liberté 1851-1870 Édouard Launet p. 42
3 La liberté retrouvée Victor Hugo et la Troisième République 1870-1885 Franck Laurent p. 76
DES FUNÉRAILLES NATIONALES CHRONIQUE D’UNE APOTHÉOSE 4 « Le jour où je cesserai de combattre, c’est que j’aurai cessé de vivre » Alexandrine Achille et Judith Perrignon p. 101
5 La nation aux côtés du poète 23 au 21 mai 1885 Alexandrine Achille et Judith Perrignon p. 131
6 Le sacre républicain et l’apothéose. De l’Arc de triomphe au Panthéon 1er juin 1885 Alexandrine Achille p. 147
PARCOURS DU CORTÈGE FUNÈBRE p. 172 2
Liste des illustrations
p. 175
Bibliographie sélective
p. 178
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Préface de Philippe Bélaval p. 1
Préface de Gérard Audinet p. 3
LES CHEMINS DE LA PANTHÉONISATION
Sous la direction d’Alexandrine Achille
1 Les années décisives 1820-1851 Nicole Savy
Victor Hugo. La liberté d’une vie Alexandrine Achille p. 5
p. 14
2 L’exil de la liberté 1851-1870 Édouard Launet p. 42
3 La liberté retrouvée Victor Hugo et la Troisième République 1870-1885 Franck Laurent p. 76
DES FUNÉRAILLES NATIONALES CHRONIQUE D’UNE APOTHÉOSE 4 « Le jour où je cesserai de combattre, c’est que j’aurai cessé de vivre » Alexandrine Achille et Judith Perrignon p. 101
5 La nation aux côtés du poète 23 au 21 mai 1885 Alexandrine Achille et Judith Perrignon p. 131
6 Le sacre républicain et l’apothéose. De l’Arc de triomphe au Panthéon 1er juin 1885 Alexandrine Achille p. 147
PARCOURS DU CORTÈGE FUNÈBRE p. 172 2
Liste des illustrations
p. 175
Bibliographie sélective
p. 178
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Les années décisives 1820-1851
1
Nicole Savy
Les hugophobes accusent Victor Hugo d’apostasie, affirmant qu’il aurait épousé les partis politiques les plus divers au gré de ses intérêts. Il est exact qu’il est passé de l’ultraroyalisme, dans son extrême jeunesse, au libéralisme, à la République et à une gauche radicale dans ses – longues – trente-cinq dernières années. Mais ce cheminement continûment progressiste fut aussi progressif#; il se fit, pour l’essentiel, entre la fin de la Restauration et la prise de pouvoir de Louis-Napoléon Bonaparte. Et l’exil qui s’ensuivit suffit à démontrer la nullité de l’argument de l’intérêt. «#J’étais en porteà-faux, je me suis redressé#», explique-t-il en 1846#: «#J’ai grandi#» (Les Contemplations). Son enfance, entre des parents qui se déchiraient et défendaient l’une les Bourbons, l’autre l’Empereur, ne lui offrit pas un programme social et politique cohérent auquel s’identifier ou se confronter. Il assista, tout petit, à des atrocités lors des guerres en Italie et en Espagne#; le spectacle des exécutions devait hanter le poète qui associa à jamais les berceaux et les tombeaux, l’enfance et la mort. À partir de ce traumatisme initial se fit progressivement un travail intérieur autour de la peine de mort, de la justice, de la pénalité, de la liberté, toute une réflexion autour de la question du droit et des droits qui entraîna peu à peu son évolution politique, accomplie au moment du coup d’État de Louis-Napoléon Bonaparte et du départ pour l’exil, en décembre 1851. Le poète ne sépara jamais la politique de la poésie. Ce travail du droit dans la pensée de Victor Hugo, c’est d’abord dans son œuvre littéraire qu’on le lit#: c’est ce que disent sa poésie, son théâtre et ses romans,
de sa jeunesse à sa maturité. C’est ainsi qu’il dépassa les déplorations troubadour et les élégies sentimentales du jeune romantisme français, dont il devint très vite le chef incontesté, définissant le romantisme comme la liberté dans l’art. Ce qui suppose non seulement innovation et invention, mais encore liberté entière de l’art, de l’édition, des théâtres, des journaux#; liberté tout court, dans une société façonnée par l’héritage de la Révolution française qui avait mis à bas des pans entiers de l’ordre ancien. Il en fit autant pour son propre compte, accumulant dans son œuvre des prises de position qui firent scandale#: condamnation radicale de la peine de mort, critiques de la monarchie, rédemption pour les prostituées et droit d’être un «#ver de terre amoureux d’une étoile#» (Ruy Blas, acte II, scène 2, 1838). Marion de Lorme la courtisane et Ruy Blas le valet aiment passionnément, ce qui fait d’eux des êtres humains égaux aux autres, à l’intérieur d’un monde qui entend les confiner au plus bas de l’échelle sociale. «#Je hais l’oppression d’une haine profonde#», écrivait-il en 1831 (Feuilles d’automne, poème XL). Le royaliste était devenu libéral.
8 David d’Angers, Buste de Victor Hugo, 1837. 9 Attribué à Barray, Les Romantiques chassés du temple, 1838.
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Les années décisives 1820-1851
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Nicole Savy
Les hugophobes accusent Victor Hugo d’apostasie, affirmant qu’il aurait épousé les partis politiques les plus divers au gré de ses intérêts. Il est exact qu’il est passé de l’ultraroyalisme, dans son extrême jeunesse, au libéralisme, à la République et à une gauche radicale dans ses – longues – trente-cinq dernières années. Mais ce cheminement continûment progressiste fut aussi progressif#; il se fit, pour l’essentiel, entre la fin de la Restauration et la prise de pouvoir de Louis-Napoléon Bonaparte. Et l’exil qui s’ensuivit suffit à démontrer la nullité de l’argument de l’intérêt. «#J’étais en porteà-faux, je me suis redressé#», explique-t-il en 1846#: «#J’ai grandi#» (Les Contemplations). Son enfance, entre des parents qui se déchiraient et défendaient l’une les Bourbons, l’autre l’Empereur, ne lui offrit pas un programme social et politique cohérent auquel s’identifier ou se confronter. Il assista, tout petit, à des atrocités lors des guerres en Italie et en Espagne#; le spectacle des exécutions devait hanter le poète qui associa à jamais les berceaux et les tombeaux, l’enfance et la mort. À partir de ce traumatisme initial se fit progressivement un travail intérieur autour de la peine de mort, de la justice, de la pénalité, de la liberté, toute une réflexion autour de la question du droit et des droits qui entraîna peu à peu son évolution politique, accomplie au moment du coup d’État de Louis-Napoléon Bonaparte et du départ pour l’exil, en décembre 1851. Le poète ne sépara jamais la politique de la poésie. Ce travail du droit dans la pensée de Victor Hugo, c’est d’abord dans son œuvre littéraire qu’on le lit#: c’est ce que disent sa poésie, son théâtre et ses romans,
de sa jeunesse à sa maturité. C’est ainsi qu’il dépassa les déplorations troubadour et les élégies sentimentales du jeune romantisme français, dont il devint très vite le chef incontesté, définissant le romantisme comme la liberté dans l’art. Ce qui suppose non seulement innovation et invention, mais encore liberté entière de l’art, de l’édition, des théâtres, des journaux#; liberté tout court, dans une société façonnée par l’héritage de la Révolution française qui avait mis à bas des pans entiers de l’ordre ancien. Il en fit autant pour son propre compte, accumulant dans son œuvre des prises de position qui firent scandale#: condamnation radicale de la peine de mort, critiques de la monarchie, rédemption pour les prostituées et droit d’être un «#ver de terre amoureux d’une étoile#» (Ruy Blas, acte II, scène 2, 1838). Marion de Lorme la courtisane et Ruy Blas le valet aiment passionnément, ce qui fait d’eux des êtres humains égaux aux autres, à l’intérieur d’un monde qui entend les confiner au plus bas de l’échelle sociale. «#Je hais l’oppression d’une haine profonde#», écrivait-il en 1831 (Feuilles d’automne, poème XL). Le royaliste était devenu libéral.
8 David d’Angers, Buste de Victor Hugo, 1837. 9 Attribué à Barray, Les Romantiques chassés du temple, 1838.
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L’ÉVEIL CONSCIENCE D’UNE Trois questions principales ont occupé très tôt Victor Hugo et sont apparues dans son œuvre poétique, romanesque et théâtrale, puis dans ses interventions publiques et politiques. La première, c’est le refus viscéral de la peine de mort, qui fut la matrice de sa construction idéologique et qu’il argumenta ensuite moralement et politiquement. En cela, il précédait ou accompagnait son temps, qui vit le nombre d’exécutions capitales, après la guillotine révolutionnaire, divisé par dix entre 1816 et les années 1850!; mais leur spectacle, réputé exemplaire et réellement effroyable, demeurait public. L’abolition de la peine de mort, arrachée en 1848 par la République, ne dura que quelques mois. Sa deuxième préoccupation, induite par la première, porta sur le droit et la justice. Il observa minutieusement l’univers judiciaire, depuis les lois jusqu’aux magistrats et aux policiers, et aux lieux les plus sombres de leur application. L’État napoléonien avait placé la justice sous son contrôle et réorganisé durablement les institutions, avec une propension marquée pour un système de plus en plus répressif, en particulier s’agissant du maintien de l’ordre public. On songeait à éloigner les bagnes des arsenaux du territoire français – Napoléon III mit la chose en œuvre –, aggravation très lourde de peines qui étaient déjà subies dans des conditions sanitaires et morales inhumaines. La troisième question était sociale!: la délinquance avait directement partie liée avec la misère. L’ancien étudiant pauvre, le promeneur parisien, observait avec acuité une société très inégalitaire, traversée par la haine des pauvres pour une bourgeoisie qui ne cessait de s’enrichir à leurs dépens. Le vol, le crime et la prostitution étaient, surtout dans des quartiers urbains populaires, les conséquences directes de la pauvreté, du chômage et de la promiscuité. Or, le souvenir encore proche de la Révolution française avait gardé vivante l’idée de justice dans les consciences. Deux révolutions, en 1830 et en 1848, plus des émeutes républicaines réprimées dans le sang, en rappelèrent et en réactivèrent le désir, en attendant l’explosion révolutionnaire et sociale de la Commune.
18 Louis-Édouard Rioult, Claude Gueux rapportant à sa famille le pain volé, 1834. « La tête de l’homme du peuple, voilà la question. […] Cette tête de l’homme du peuple, cultivez-la, défrichez-la, arrosez-la, fécondez-la, éclairez-la, moralisez-la, utilisez-la ; vous n’aurez pas besoin de la couper. » Victor Hugo, Claude Gueux, 1834. 19 Bisson-Cottard, Abolition de la peine de mort ! Abolition de l’Esclavage !, vers 1862.
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20 Victor Hugo, Le Dernier Jour d’un condamné, Claude Gueux, 1829, Paris, Eugène Hugues éditeur, nouvelle édition illustrée (1883). 21 Fortuné Méaulle, Le Dernier jour d’un condamné, 1829, frontispice. Paris, Eugène Hugues éditeur (1883).
La peine de mort En matière de droit, on peut dire que Victor Hugo aura commencé par le plus grave. Le spectacle des assassinats punitifs dans l’Italie et l’Espagne de son enfance, entre 1808 et 1812, puis celui d’une exécution capitale en 1820 furent un traumatisme tel que la première cause qu’il défendit fut celle de l’abolition de la peine de mort. En 1829, les
bien-pensants furent horrifiés à la lecture du Dernier Jour d’un condamné, roman du jeune poète royaliste et plaidoyer publié d’abord sans nom d’auteur. Il ne défendait pas un homme en particulier, puisque de son personnage et de son crime le lecteur n’apprenait pratiquement rien ; il défendait tous les condamnés, dans une
opposition de principe absolue à une peine qu’il jugeait barbare. Il récidiva cinq ans plus tard avec un bref roman, Claude Gueux. Sa dénonciation était complète : l’échafaud était un monstre, le bourreau commettait froidement le même crime dont il punissait le condamné ; le plus grave était, contre le principe d’inviolabilité de la vie humaine, le caractère
irrémédiable de la peine, du reste parfaitement inutile. Le 15 septembre 1848, le député Hugo déclara à l’Assemblée constituante : « Je vote l’abolition pure, simple et définitive de la peine de mort. » Combat qu’il poursuivit durant toute sa vie, dans les faits comme dans son œuvre littéraire.
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L’ÉVEIL CONSCIENCE D’UNE Trois questions principales ont occupé très tôt Victor Hugo et sont apparues dans son œuvre poétique, romanesque et théâtrale, puis dans ses interventions publiques et politiques. La première, c’est le refus viscéral de la peine de mort, qui fut la matrice de sa construction idéologique et qu’il argumenta ensuite moralement et politiquement. En cela, il précédait ou accompagnait son temps, qui vit le nombre d’exécutions capitales, après la guillotine révolutionnaire, divisé par dix entre 1816 et les années 1850!; mais leur spectacle, réputé exemplaire et réellement effroyable, demeurait public. L’abolition de la peine de mort, arrachée en 1848 par la République, ne dura que quelques mois. Sa deuxième préoccupation, induite par la première, porta sur le droit et la justice. Il observa minutieusement l’univers judiciaire, depuis les lois jusqu’aux magistrats et aux policiers, et aux lieux les plus sombres de leur application. L’État napoléonien avait placé la justice sous son contrôle et réorganisé durablement les institutions, avec une propension marquée pour un système de plus en plus répressif, en particulier s’agissant du maintien de l’ordre public. On songeait à éloigner les bagnes des arsenaux du territoire français – Napoléon III mit la chose en œuvre –, aggravation très lourde de peines qui étaient déjà subies dans des conditions sanitaires et morales inhumaines. La troisième question était sociale!: la délinquance avait directement partie liée avec la misère. L’ancien étudiant pauvre, le promeneur parisien, observait avec acuité une société très inégalitaire, traversée par la haine des pauvres pour une bourgeoisie qui ne cessait de s’enrichir à leurs dépens. Le vol, le crime et la prostitution étaient, surtout dans des quartiers urbains populaires, les conséquences directes de la pauvreté, du chômage et de la promiscuité. Or, le souvenir encore proche de la Révolution française avait gardé vivante l’idée de justice dans les consciences. Deux révolutions, en 1830 et en 1848, plus des émeutes républicaines réprimées dans le sang, en rappelèrent et en réactivèrent le désir, en attendant l’explosion révolutionnaire et sociale de la Commune.
18 Louis-Édouard Rioult, Claude Gueux rapportant à sa famille le pain volé, 1834. « La tête de l’homme du peuple, voilà la question. […] Cette tête de l’homme du peuple, cultivez-la, défrichez-la, arrosez-la, fécondez-la, éclairez-la, moralisez-la, utilisez-la ; vous n’aurez pas besoin de la couper. » Victor Hugo, Claude Gueux, 1834. 19 Bisson-Cottard, Abolition de la peine de mort ! Abolition de l’Esclavage !, vers 1862.
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20 Victor Hugo, Le Dernier Jour d’un condamné, Claude Gueux, 1829, Paris, Eugène Hugues éditeur, nouvelle édition illustrée (1883). 21 Fortuné Méaulle, Le Dernier jour d’un condamné, 1829, frontispice. Paris, Eugène Hugues éditeur (1883).
La peine de mort En matière de droit, on peut dire que Victor Hugo aura commencé par le plus grave. Le spectacle des assassinats punitifs dans l’Italie et l’Espagne de son enfance, entre 1808 et 1812, puis celui d’une exécution capitale en 1820 furent un traumatisme tel que la première cause qu’il défendit fut celle de l’abolition de la peine de mort. En 1829, les
bien-pensants furent horrifiés à la lecture du Dernier Jour d’un condamné, roman du jeune poète royaliste et plaidoyer publié d’abord sans nom d’auteur. Il ne défendait pas un homme en particulier, puisque de son personnage et de son crime le lecteur n’apprenait pratiquement rien ; il défendait tous les condamnés, dans une
opposition de principe absolue à une peine qu’il jugeait barbare. Il récidiva cinq ans plus tard avec un bref roman, Claude Gueux. Sa dénonciation était complète : l’échafaud était un monstre, le bourreau commettait froidement le même crime dont il punissait le condamné ; le plus grave était, contre le principe d’inviolabilité de la vie humaine, le caractère
irrémédiable de la peine, du reste parfaitement inutile. Le 15 septembre 1848, le député Hugo déclara à l’Assemblée constituante : « Je vote l’abolition pure, simple et définitive de la peine de mort. » Combat qu’il poursuivit durant toute sa vie, dans les faits comme dans son œuvre littéraire.
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L’exil de la liberté 1851-1870 Édouard Launet
Quand, le 11 décembre 1851, Victor Hugo quitte précipitamment Paris sous une identité d’emprunt (celle d’un ouvrier typographe nommé Lanvin) pour rejoindre Bruxelles, il n’imagine pas qu’il s’engage sur la voie d’une renaissance. Il ne se doute pas non plus que son exil va durer près de vingt ans#: six mois à Bruxelles, trois ans à Jersey et quinze ans à Guernesey. Au fil du temps, Hugo se fera pourtant à l’idée qu’il ne reverra vraisemblablement jamais la France, que Guernesey sera son «#tombeau probable#». Son combat contre l’«#imposteur#» LouisNapoléon Bonaparte, sa lutte pour la liberté et la république, il était décidé à les mener jusqu’au bout, quoi qu’il lui en coûte. En 1848, Hugo a quarante-six ans, c’est un homme arrivé, pair du royaume, reçu aux Tuileries par Louis-Philippe, académicien, officier de la Légion d’honneur, auréolé de la gloire de ses jeunes années romantiques et architecte d’une œuvre solide, novatrice#: Les Orientales, Hernani, Notre-Dame de Paris, Lucrèce Borgia, Ruy Blas, Les Rayons et les Ombres et le début de la rédaction des Misères qui deviendront Les Misérables quatorze ans plus tard... Il pourrait s’assoupir comme tant d’autres à l’approche de la cinquantaine, or non#: les événements de 1848 le secouent, il devient républicain, s’enflamme pour la question sociale. Le coup d’État de décembre 1851 le fait basculer dans la clandestinité, tandis que son indignation fait naître en lui une volonté farouche. C’est le départ. Son combat contre l’«#usurpateur#» lui impose un recul salvateur, une nouvelle vie commence qui prendra la forme d’une ascèse et de l’accomplissement. Une énergie nouvelle l’emplit qui fera éclore de singulières fleurs dans l’archipel anglo-normand. À Bruxelles (décembre 1851-juillet 1852), cela se passe mal. Il arrive sans argent et est contraint d’en repartir six mois plus tard#: la publication de son pamphlet Napoléon le Petit le rend indésirable en Belgique. Avec la fidèle Juliette Drouet et son fils Charles, il rejoint Anvers puis Londres le 2 août. Il trouve un nouveau point de chute à Jersey (août 1852-octobre 1855), où le reste de sa famille l’attend. Il s’installe à Marine
Terrace, découvre la douceur de l’archipel de la Manche, la photographie et le spiritisme. «#Suis-je poète ou prophète#?#», se demandet-il alors que la table tournante lui semble dicter la Bible d’une religion nouvelle englobant le christianisme «#comme le christianisme avait englobé le paganisme#». Ce bref moment de vertige ne le détourne pas de son combat, il écrit un recueil de poèmes satiriques, Châtiments, pour fustiger «#le menteur#» et «#le voleur#» qui règne sur la France, ce Napoléon le Petit devenu l’empereur Napoléon III en décembre 1852. Par ailleurs, Hugo décide de ne pas rendre public le Livre des Tables craignant que son contenu ne soit accueilli par «#un immense éclat de rire#». «#En nous ridiculisant, je crains que cela ne ridiculise la démocratie, et la partie de la démocratie que nous représentons#»1. Son séjour jersiais est plus long que le bruxellois, mais il se termine de la même manière#: l’expulsion. Cette fois, elle est due à son soutien au journal des proscrits de Jersey, L’Homme, qui avait reproduit un texte hostile à la reine Victoria, alliée de Napoléon III lors de la guerre de Crimée.
45 Charles Hugo, Victor Hugo sur le rocher des proscrits, 1853. 46 Victor Hugo, La Conscience devant une mauvaise action, 1866.
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L’exil de la liberté 1851-1870 Édouard Launet
Quand, le 11 décembre 1851, Victor Hugo quitte précipitamment Paris sous une identité d’emprunt (celle d’un ouvrier typographe nommé Lanvin) pour rejoindre Bruxelles, il n’imagine pas qu’il s’engage sur la voie d’une renaissance. Il ne se doute pas non plus que son exil va durer près de vingt ans#: six mois à Bruxelles, trois ans à Jersey et quinze ans à Guernesey. Au fil du temps, Hugo se fera pourtant à l’idée qu’il ne reverra vraisemblablement jamais la France, que Guernesey sera son «#tombeau probable#». Son combat contre l’«#imposteur#» LouisNapoléon Bonaparte, sa lutte pour la liberté et la république, il était décidé à les mener jusqu’au bout, quoi qu’il lui en coûte. En 1848, Hugo a quarante-six ans, c’est un homme arrivé, pair du royaume, reçu aux Tuileries par Louis-Philippe, académicien, officier de la Légion d’honneur, auréolé de la gloire de ses jeunes années romantiques et architecte d’une œuvre solide, novatrice#: Les Orientales, Hernani, Notre-Dame de Paris, Lucrèce Borgia, Ruy Blas, Les Rayons et les Ombres et le début de la rédaction des Misères qui deviendront Les Misérables quatorze ans plus tard... Il pourrait s’assoupir comme tant d’autres à l’approche de la cinquantaine, or non#: les événements de 1848 le secouent, il devient républicain, s’enflamme pour la question sociale. Le coup d’État de décembre 1851 le fait basculer dans la clandestinité, tandis que son indignation fait naître en lui une volonté farouche. C’est le départ. Son combat contre l’«#usurpateur#» lui impose un recul salvateur, une nouvelle vie commence qui prendra la forme d’une ascèse et de l’accomplissement. Une énergie nouvelle l’emplit qui fera éclore de singulières fleurs dans l’archipel anglo-normand. À Bruxelles (décembre 1851-juillet 1852), cela se passe mal. Il arrive sans argent et est contraint d’en repartir six mois plus tard#: la publication de son pamphlet Napoléon le Petit le rend indésirable en Belgique. Avec la fidèle Juliette Drouet et son fils Charles, il rejoint Anvers puis Londres le 2 août. Il trouve un nouveau point de chute à Jersey (août 1852-octobre 1855), où le reste de sa famille l’attend. Il s’installe à Marine
Terrace, découvre la douceur de l’archipel de la Manche, la photographie et le spiritisme. «#Suis-je poète ou prophète#?#», se demandet-il alors que la table tournante lui semble dicter la Bible d’une religion nouvelle englobant le christianisme «#comme le christianisme avait englobé le paganisme#». Ce bref moment de vertige ne le détourne pas de son combat, il écrit un recueil de poèmes satiriques, Châtiments, pour fustiger «#le menteur#» et «#le voleur#» qui règne sur la France, ce Napoléon le Petit devenu l’empereur Napoléon III en décembre 1852. Par ailleurs, Hugo décide de ne pas rendre public le Livre des Tables craignant que son contenu ne soit accueilli par «#un immense éclat de rire#». «#En nous ridiculisant, je crains que cela ne ridiculise la démocratie, et la partie de la démocratie que nous représentons#»1. Son séjour jersiais est plus long que le bruxellois, mais il se termine de la même manière#: l’expulsion. Cette fois, elle est due à son soutien au journal des proscrits de Jersey, L’Homme, qui avait reproduit un texte hostile à la reine Victoria, alliée de Napoléon III lors de la guerre de Crimée.
45 Charles Hugo, Victor Hugo sur le rocher des proscrits, 1853. 46 Victor Hugo, La Conscience devant une mauvaise action, 1866.
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84 Victor Hugo, Les Châtiments, 1870, édition Hetzel. Écrits en 1852 pendant l’exil mais soumis à la censure impériale, Les Châtiments n’avaient jamais été publiés en France. La première édition française voit le jour à l’automne 1870 avec l’avènement de la Troisième République. « L’abeille qui est sur la couverture de ce livre, avant d’orner les Chatiments, avait orné le trône impérial. Elle était brodée sur le velours de l’immense manteau de pourpre qui descendait des lambrequins en dais et couvrait le trône aux Tuileries. En septembre 1870, M. Jules Claretie, membre de la Commission de recherche des papiers des Bonaparte, a détaché lui-même cette abeille du manteau du trône, et me l’a apportée. Victor Hugo. 21 mai 1872. Paris. »
La liberté retrouvée Victor Hugo et la Troisième République 1870-1885
3
Franck Laurent
En 1859, repoussant l’amnistie qui lui permettait de rentrer légalement en France, Hugo avait lancé#: «#Quand la liberté rentrera, je rentrerai1.#» Le 5 septembre 1870, trois jours après la défaite de Sedan, le lendemain de la chute du Second Empire et de la proclamation de la République, Hugo rentre à Paris, alors que les troupes allemandes avancent vers la capitale, qu’elles vont bientôt assiéger. Il est accueilli gare du Nord par une foule immense, aussi anxieuse qu’enthousiaste. Contrairement à ce que l’on pense parfois, l’ancien opposant à l’Empire n’a pas joui sans nouvel effort des honneurs de la république#: l’Histoire ne lui a pas laissé le loisir d’engranger sereinement les bénéfices de ses épreuves passées. La guerre et la défaite, la Commune et sa répression, la lente et difficile victoire de cette Troisième République bien mal engagée, voilà ce qui attendait le revenant de Guernesey. Ce n’est qu’après la crise décisive du 16 mai 1877 et la victoire des républicains que Victor Hugo pourra entrer dans la consécration républicaine. Ses actes, ses paroles et ses écrits durant cette période longtemps trouble comptent pour beaucoup dans l’émergence de ce statut symbolique si particulier qui sera le sien dans les dernières années de sa vie, et après sa mort.
85 Faustin, « Au moment de rentrer en France », 31 août 1870. 86 Mouchot, Arrivée de Victor Hugo à Paris gare du Nord, le 5 septembre 1870. « Et peut-être, en la terre où brille l’espérance Pur flambeau Pour prix de mon exil, tu m’accorderas, France Un tombeau. » Victor Hugo, « Au moment de rentrer en France », 31 août 1870.
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84 Victor Hugo, Les Châtiments, 1870, édition Hetzel. Écrits en 1852 pendant l’exil mais soumis à la censure impériale, Les Châtiments n’avaient jamais été publiés en France. La première édition française voit le jour à l’automne 1870 avec l’avènement de la Troisième République. « L’abeille qui est sur la couverture de ce livre, avant d’orner les Chatiments, avait orné le trône impérial. Elle était brodée sur le velours de l’immense manteau de pourpre qui descendait des lambrequins en dais et couvrait le trône aux Tuileries. En septembre 1870, M. Jules Claretie, membre de la Commission de recherche des papiers des Bonaparte, a détaché lui-même cette abeille du manteau du trône, et me l’a apportée. Victor Hugo. 21 mai 1872. Paris. »
La liberté retrouvée Victor Hugo et la Troisième République 1870-1885
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Franck Laurent
En 1859, repoussant l’amnistie qui lui permettait de rentrer légalement en France, Hugo avait lancé#: «#Quand la liberté rentrera, je rentrerai1.#» Le 5 septembre 1870, trois jours après la défaite de Sedan, le lendemain de la chute du Second Empire et de la proclamation de la République, Hugo rentre à Paris, alors que les troupes allemandes avancent vers la capitale, qu’elles vont bientôt assiéger. Il est accueilli gare du Nord par une foule immense, aussi anxieuse qu’enthousiaste. Contrairement à ce que l’on pense parfois, l’ancien opposant à l’Empire n’a pas joui sans nouvel effort des honneurs de la république#: l’Histoire ne lui a pas laissé le loisir d’engranger sereinement les bénéfices de ses épreuves passées. La guerre et la défaite, la Commune et sa répression, la lente et difficile victoire de cette Troisième République bien mal engagée, voilà ce qui attendait le revenant de Guernesey. Ce n’est qu’après la crise décisive du 16 mai 1877 et la victoire des républicains que Victor Hugo pourra entrer dans la consécration républicaine. Ses actes, ses paroles et ses écrits durant cette période longtemps trouble comptent pour beaucoup dans l’émergence de ce statut symbolique si particulier qui sera le sien dans les dernières années de sa vie, et après sa mort.
85 Faustin, « Au moment de rentrer en France », 31 août 1870. 86 Mouchot, Arrivée de Victor Hugo à Paris gare du Nord, le 5 septembre 1870. « Et peut-être, en la terre où brille l’espérance Pur flambeau Pour prix de mon exil, tu m’accorderas, France Un tombeau. » Victor Hugo, « Au moment de rentrer en France », 31 août 1870.
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UNE IMMENSE
FÊTE POPULAIRE
Pour être complète, cette reconnaissance ne pouvait pas seulement être officielle, elle se devait aussi d’être populaire. Jusqu’alors confinées dans un lieu fermé, une église, réservées à quelques privilégiés, ces funérailles se déroulent cette fois dans un espace ouvert, la rue, permettant la participation et l’implication de tous sans distinction de classe sociale. Elles acquièrent une dimension égalitaire et donc démocratique. La foule fut véritablement le second personnage principal de cette fête inoubliable. Le pouvoir l’espère autant qu’il la redoute. Au petit matin, elle est déjà compacte sur le parcours, depuis l’Arc de triomphe jusqu’au Panthéon. Présents depuis la veille autour des Champs-Élysées, certains ont même dormi sur place pour être sûrs de ne rien manquer de la cérémonie du lendemain. Carrioles, escabeaux, tables et chaises encombrent les trottoirs. C’est à qui verra le mieux. D’autres sont en équilibre dans les arbres, sur les réverbères, les grilles, les échafaudages, les toits. Les statues, les fontaines, les kiosques disparaissent peu à peu sous les grappes humaines. Comme au théâtre, les meilleures places se louent très cher. Quelques-uns
préfèrent payer 10 francs le siège dans une vitrine ou 15 francs au premier rang sur le devant d’un balcon. On est prié d’arriver deux heures à l’avance. La rue Soufflot est la plus demandée. Les propriétaires y marchandent chèrement les places, jusqu’à 150 francs pour être aux premières loges"! Bientôt, on ne parle plus que de la foule. Elle est énorme, inédite, difficile à quantifier, plus d’un million, peut-être deux. Animée d’une «"joie funèbre"», écrira Le Rappel le lendemain. Elle éclipse les officiels comme les révolutionnaires, elle est protéiforme, elle se découvre quand le corbillard passe devant elle, simplement orné de deux petites couronnes blanches, l’une portant le nom de Georges, l’autre celui de Jeanne, puis crie encore": «"Vive Victor Hugo"!"» ou applaudit le char de l’Algérie devenue province française. Elle est à la hauteur du regard que Victor Hugo lui avait porté, lui qui n’avait jamais cessé de sonder ses profondeurs. Elle chante pour lui en ce jour de départ": «"Tout le monde a souffert avec tes Misérables, les tyrans ont tremblé devant tes Châtiments, […] Jette un dernier regard, le peuple t’environne, petits, grands, jeunes, vieux, ensemble nous pleurons […]."»
«#À l’Arc de triomphe Toi dont la courbe au loin, par le couchant dorée, S’emplit d’azur céleste, arche démesurée#; Toi qui lèves si haut ton front large et serein, Fait pour changer sous lui la campagne en abîme, Et pour servir de base à quelque aigle sublime Qui viendra s’y poser et qui sera d’airain#!#» Victor Hugo, Les Voix intérieures IV, 2 février 1837 156
177 Places à louer. 178 Places de balcon et fenêtres à louer. 179 Affiche publicitaire, report des soldes, lundi 8 juin 1885. 180 Avis de fermeture des magasins.
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UNE IMMENSE
FÊTE POPULAIRE
Pour être complète, cette reconnaissance ne pouvait pas seulement être officielle, elle se devait aussi d’être populaire. Jusqu’alors confinées dans un lieu fermé, une église, réservées à quelques privilégiés, ces funérailles se déroulent cette fois dans un espace ouvert, la rue, permettant la participation et l’implication de tous sans distinction de classe sociale. Elles acquièrent une dimension égalitaire et donc démocratique. La foule fut véritablement le second personnage principal de cette fête inoubliable. Le pouvoir l’espère autant qu’il la redoute. Au petit matin, elle est déjà compacte sur le parcours, depuis l’Arc de triomphe jusqu’au Panthéon. Présents depuis la veille autour des Champs-Élysées, certains ont même dormi sur place pour être sûrs de ne rien manquer de la cérémonie du lendemain. Carrioles, escabeaux, tables et chaises encombrent les trottoirs. C’est à qui verra le mieux. D’autres sont en équilibre dans les arbres, sur les réverbères, les grilles, les échafaudages, les toits. Les statues, les fontaines, les kiosques disparaissent peu à peu sous les grappes humaines. Comme au théâtre, les meilleures places se louent très cher. Quelques-uns
préfèrent payer 10 francs le siège dans une vitrine ou 15 francs au premier rang sur le devant d’un balcon. On est prié d’arriver deux heures à l’avance. La rue Soufflot est la plus demandée. Les propriétaires y marchandent chèrement les places, jusqu’à 150 francs pour être aux premières loges"! Bientôt, on ne parle plus que de la foule. Elle est énorme, inédite, difficile à quantifier, plus d’un million, peut-être deux. Animée d’une «"joie funèbre"», écrira Le Rappel le lendemain. Elle éclipse les officiels comme les révolutionnaires, elle est protéiforme, elle se découvre quand le corbillard passe devant elle, simplement orné de deux petites couronnes blanches, l’une portant le nom de Georges, l’autre celui de Jeanne, puis crie encore": «"Vive Victor Hugo"!"» ou applaudit le char de l’Algérie devenue province française. Elle est à la hauteur du regard que Victor Hugo lui avait porté, lui qui n’avait jamais cessé de sonder ses profondeurs. Elle chante pour lui en ce jour de départ": «"Tout le monde a souffert avec tes Misérables, les tyrans ont tremblé devant tes Châtiments, […] Jette un dernier regard, le peuple t’environne, petits, grands, jeunes, vieux, ensemble nous pleurons […]."»
«#À l’Arc de triomphe Toi dont la courbe au loin, par le couchant dorée, S’emplit d’azur céleste, arche démesurée#; Toi qui lèves si haut ton front large et serein, Fait pour changer sous lui la campagne en abîme, Et pour servir de base à quelque aigle sublime Qui viendra s’y poser et qui sera d’airain#!#» Victor Hugo, Les Voix intérieures IV, 2 février 1837 156
177 Places à louer. 178 Places de balcon et fenêtres à louer. 179 Affiche publicitaire, report des soldes, lundi 8 juin 1885. 180 Avis de fermeture des magasins.
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187 Anonyme, Cortège dans le bas des Champs-Élysées et à la Concorde, 1er juin 1885.
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187 Anonyme, Cortège dans le bas des Champs-Élysées et à la Concorde, 1er juin 1885.
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35€ ISBN : 978-2-7577-0710-4 www.monuments-nationaux.fr