ATMOSPHÈRES, PROCESSUS & TERRITOIRE
Originaire de la région viticole Champenoise, je me suis questionnée sur le développement de l’activité viticole dans le domaine architectural et urbain.
Le village des Riceys s’étale le long de la Laignes en trois hameaux. Entouré d’une première frange de bois et forêt, les côteaux viticole se développent sur les versants sud perpendiculaire au village. Ces dernières années, les évolutions technologique ont obligées les vignerons à délocaliser leurs bâtiments et outils de travail à l’extérieur du village historique. Pour répondre à cette évolution, les vignerons se sont empressés de construire de nouveaux bâtiments viticoles sous forme de hangar agricole, rapide et peu coûteux. Or ces bâtiments ne tiennent pas compte du site sur lequel ils s’insèrent, ni des processus de travail du produit naturel qu’ils accueillent. Par conséquent, ce type d’architecture, fait fuir les touristes et clients qui souhaitent s’intéresser au processus de fabrication du produit.
Comment est-il possible de construire un bâtiment viticole qui soit le fruit d’une insertion paysagère et du développement des processus de fabrication du champagne ?
La carte suivante montre la disposition actuelle des bâtiments viticoles par rapport au développement du village, et aux typologies végétales. Les photos sont des exemples des hangars recensés dans le village
PLAN DE L’ORGANISATION DU VILLAGE
Si l’insertion paysagère d’un bâtiment viticole est un premier objectifs alors je décide de trouver un site qui soit en lien avec le village et avec le paysage viticole : les vignes. Les vignes les plus proches du village se trouve à l’ouest du hameaux, Riceys bas. Village de caractère, riche en patrimoine, Les Riceys marque ses visiteurs avec la présence singulière de murs en pierre sèche. Présent dans les rues historiques du village, ils retracent l’organisation du village. L’utilisation de ces matériaux originaires de la Bourgogne, montre la division de ce village, à la limite entre la Champagne et la Bourgogne deux régions viticoles fortes en France. Cet élément du paysage urbain me semble essentiel à exporter dans le projet.
La carte suivante recense les murs caractéristiques de ce village et l’impact de leurs présences. Les photos permettent d’argumenter par quelque exemple l’omniprésence de ces éléments caractéristique.
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PLAN DE L’ORGANISATION URBAINE ET DU PATRIMOINE
Tracé des murs
La transformation du raisin en champagne demande une multitude de processus et d’atmosphères différentes. La gravité et l’inertie sont deux élément fondamentaux dans la création de ce produit. Pour explorer ces deux éléments dans un projet architectural, il faut que le site choisi s’y prête. Dans mon cas, j’ai choisi un site qui possède un dénivelé et une possibilité d’enterrer en partie le bâtiment. La longueur du terrain permet de séquencer le bâtiment au gré des atmosphères nécessaires.
Photographie & panorama du site
Forêt
Lisière
Vignes
ORGANISATION SPATIALE DU PROGRAMME
ORGANISATION PROGRAMMATIQUE
Un batiment = 4 processus
Typologie actuelle
4 batiments = 4 processus
Typologie projet
COUPE SUR FORET DENSE
3
COUPE SUR FRICHE
2
COUPE SUR VERGERS
1
PLAN ANALYSE VEGETALE
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Parmi les acteurs d’un bâtiment viticole, les visiteurs sont une partie des flux à traiter. Pour expliquer le projet, j’ai choisi de scénariser le récit du ressentit d’un visiteur dans son parcours du projet.
En arrivant dans le village, et après la découverte d’un patrimoine riche et centré autour de l’église et du château, nous avons souhaité visiter une maison de champagne, si caractéristique de la région. Un accueil situé à proximité de l’église attire notre attention. Le personnel de la maison de champagne, nous invite alors à visiter un bâtiment expérimentale situé à l’extérieur du village.
ITINÉRAIRE CLIENTÈLE N
Nous acceptons avec joie, et puisqu’il fait beau, la visite débute par une randonnée Après avoir longé des rues sinueuses bordées de maisonnettes et de murs de pierre, nous sortons du village. Le paysage est ordonné, à notre droite, on aperçoit des coteaux de vignes baignés de soleil, et ce, à perte de vue. Tandis que sur notre gauche, des champs et des forêt nous bloquent l’horizon.
Le parcours continu, toujours au sein même des vignes puis, se retourne vers le village. La vue le surplombant nous fait retrouver les éléments du patrimoine découvert auparavant. Devant ce panorama sur la vallée, des murets en pierre sèche nous invite à cheminer vers un belvédère de béton cadrant la vue sur le village au loin. Sur ce belvédère des percements au sol nous intriguent. Par ces fenêtres, on perçoit les cuves au niveau inférieur. Etrange situation. Nous décidons de nous approcher de l’accueil, limpide cet espace laisse traverser les paysages . A l’intérieur, on nous explique la visite qui va suivre, un escalier en colimaçon nous attend.
Coupe C
La descente est rapide nous arrivons face à une baie vitrée dévoilant des chapeaux de cuves en inox brillant. Sur le côté, des machines imposantes remplissent l’espace. Ce sont les pressoirs. L’atmosphère devient plus froide, les outils métalliques et les murs bruts accentuent ces sensations. Heureusement les puits de lumière découvert sur le belvédère crée une multitude de faisceaux lumineux. Ils engendrent des reflets de lumière naturelle douce et chaude. L’ascension reprend par le même escalier, rapidement nous voilà dans un espace grandiose où des cuves sortent du plafond. Comme suspendue, l’espace de la cuverie ne ressemble a aucun autre, les lois de la gravité ici semblent défiées. Nous sommes libres de déambuler entre ces mastodontes de métal. Cette fois la température a chuté. Le sol lisse et humide augmente cette perception. La lumière artificielle nous désoriente.
Coupe D
Un porte ventilée nous attends, nous voilà dehors à nouveau longeant un mur de pierre. On s’y appuie pour observer la vitrine qui nous fait face. À l’intérieur, la lumière est forte et de nombreuses machines se suivent laissant la bouteille de champagne subir les évolutions techniques de l’homme. Aucun bruit ne vient déranger la quiétude qui nous gagne. Le rythme productif de cet espace semble rodé et harmonieux.
Coupe E
Au bout de ce long couloir vitré, une porte épaisse nous fait face. L’accès y est plus marqué. À l’intérieur un espace extrêmement vaste, et sombre. On aperçoit des empilements de cartons, et des palettes remplie de bouteille. Cet espace s’ouvre sur l’extérieur par une porte d’où les bouteilles prennent leur envol vers l’export. Nous traversons sans gêner les va et viens des employés et de leurs machines. Deux tunnels identiques s’offrent à nous sous forme d’une rampe lente. Elle nous mène sur un palier qui s’ouvre sur une salle à l’allure d’une cavité souterraine. Puis une deuxième rampe nous offre l’accès à cette salle. Les empilements de bouteilles nous impressionnent, leur rythme, et leur ordre cadre l’espace. Nous flânons entre ces murs de verre. L’espace est brut, les matériaux minimalistes laissant une place prépondérante à la bouteille de champagne. La température a baissé chamboulant les sens. Cet espace est vivant grâce à l’humidité prenante et inhabituelle. Plus loin nous découvrons un couloir voûté, similaire aux caves traditionnelles par sa forme, il l’est d’autant moins par sa matérialité de béton. Nous l’empruntons.
Au bout nous découvrons un puit de lumière. Le lieu semble accueillir des fûts de chêne disposés religieusement en cercle. Au centre une zone de dégustation se présente à nous. La lumière zénithale et naturelle nous rassure. L’acoustique particulière nous enveloppe. Des flûtes a champagne y sont disposées et un dégustateur nous présente la gamme des champagne élaborée dans cette maison. Après une dégustation riche en sensations gustatives et olfactives, celui-ci nous invite à prendre un escalier longeant ce puits. Lentement nous remontons, accompagné de percements qui nous donne à voir l’évolution de notre ascension. La lumière naturelle se fait de plus en plus puissante. Le paysage s’ouvre devant nous.
Un paysage de coteaux arrosé de soleil nous fait face. C’est un sublime spectacle que cette nature nous offre. Totalement libre de nous approcher de ce paysage nous descendons les quelques marches qui nous invitent à se projeter. L’air nous caresse le corps, la lumière naturelle nous réchauffe et la végétation nous encadre. La sensation de liberté est grande plus aucun mur ne nous sépare de ce paysage. La flânerie succède à la dégustation. Les sens sont en éveil.
Nous rejoignons l’escalier qui remonte vers un espace de verre, sas protégé entre cette nature et cette architecture. Une dernière salle nous est proposée, un espace d’exposition tout d’abord, puis un espace de vente ouvert sur l’extérieur terminent notre découverte de ce vignoble. La sortie vitrée nous relâche dans une nature libre où un cheminement nous guide vers l’itinéraire du retour à travers les vignes pour rejoindre le cœur du village.
ASSEMBLAGE ASSEMBLAGE LE LEPROJET PROJET
Accueil public Accueil public Réception des des vendanges Réception vendanges
Réception Réception Plan + 218m Plan + 218m
NN
ème ème Echelle 1/200 Echelle 1/200
0 0
QuaiQuai de déchargement de déchargement
4 4
8 8
12m12m
Boutique Boutique Exposition Exposition
Pressoirs Pressoirs
Cuverie Cuverie niveau hauthaut niveau
Traitement Traitement Plan + 215m Plan + 215m Activité professionnelle Activité professionnelle Activité public Activité public
Cuverie niveau bas
Cave Stockage industriel
Parking professionel
Plan + 210m Atelier (mise en bouteille/ĂŠtiquetage/emballage)
Puit de dĂŠgustation
Cave vieillissement
Plan + 205m
Autre acteur, le professionnel est présent dans le territoire villageois proche. Il a besoin d’atteindre de manière rapide et efficace son lieu de travail. L’itinéraire le plus direct au bâtiment est donc mis à sa disposition. Pour expliquer le projet, j’ai choisie d’écrire le récit chronologique des travailleurs dans leurs usages du projet.
Les dates se précisent, le raisin mûrit à vue d’œil. Le matériel fait son retour dans les vignes et dans le bâtiment. L’effervescence monte dans le vignoble. Le quai se transforme en véritable outil de travail et les assises deviennent des receveurs à raisin pour les pressoirs. L’espace d’accueil devient la tour de contrôle. Ici se gère l’arrivée des camions remplis de caisses à raisin. Au loin on peut appercevoir les coupeurs dans les vignes. Les premiers raisins arrivent, chaque véhicule empreinte le passage qui lui est réservé. Il s’arrête et décharge les caisses directement sur le quai latéralement. Puis une équipe se charge de verser le contenue de celles-ci dans les pressoirs. L’organisation de la circulations des véhicules se fait le long d’un seul axe dissimulé pour laisser toute la place au paysage.
ITINÉRAIRE PROFESSIONNELLE N
Parking client (vélo, bus, voiture)
Espace paysagé
Accès professionnel
Éclairage naturel
Protection
Ventilation naturelle
Revêtement perméable
Phytoépuration
Mûrs filtrants
Parking professionel
En dessous, le bâtiment devient machine. Les pressoirs fonctionnent de manière autonome. Ils pressent, et laisse s’écouler les jus naturellement (par gravité) dans le bâtiment vers les cuves qui leurs sont définis. Les déchets végétaux appelés aignes sont facilement récupérables par une évacuation prévu le long du bâtiment. De manière inéluctable les cuves se remplissent jours après jours, ce qui donne beaucoup de travail à l’équipe de la cuverie. Ce personnel traite les jus, pour leur permettre de se transformer en vin puis en champagne. Pendant quelque semaines la cuverie devient le lieu de l’influence de la main de l’homme sur le produit naturel. Le point cruciale est l’eau, elle est nécessairement consommée en masse. Le projet prévoit la récupération et le traitement des eaux souillées par le biais de bassins de phyto-épuration présent sur les toitures. Ce qui améliore l’inertie thermique du bâtiment.
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Les jus sont ensuite assemblés les uns aux autres dans les grandes cuves pour obtenir le jus final. Il est mis en bouteille dans ce que l’on appelle l’atelier. Espace baigné de lumière naturelle, il accueille toutes les machines nécessaire aux processus d’élaboration final. Les bouteilles sont ensuite transférées dans la cave situé au même niveau pour faciliter les déplacements. Elles y effectuent leur dernière transformation chimique. Un temps de repos obligatoire dans l’ombre, la fraicheur et l’humidité, puis elles sont ressortie pour être conditionnées. Le tout est stocké en attente de livraison. Le stationnement des véhicules du personnel s’effectue à l’extrémité du bâtiment à l’opposé du parking visiteur. L’accès au bâtiment se fait par le niveau central qui dessert les trois grands espaces de transformation : cuverie, atelier, et cave .
TN
Chaque espace peut fonctionner indépendamment. Seul les pressoirs, la cave de vieillissement et l’espace de dégustation se trouvent à des niveaux différents, reflet de leur temporalité différente dans les processus de fabrication du champagne. La cave de vieillissement totalement enterrée apporte au vin toutes les caractéristiques atmosphérique de l’inertie. Ce lieu met l’objet vinicole en valeur. L’espace de dégustation est un puits de lumière qui accueille en plus des visiteurs les vins qui vieillissent en fût de chêne. Intéressant sur une petite quantité de produit, le fût symbolise l’image du produit vinicole et apporte une chaleur à l’espace qui accompagne l’étape sensoriel de la dégustation. Enfin une équipe plus commerciale s’occupe de l’espace de vente. Elle accueille selon les visites, les clients dans un grand espace où est associé l’exposition et la vente du champagne ainsi que tous ses dérivés.
Remerciements StĂŠphane Bonzani Christophe Defrance Serge Joly Philippe Madec Charles Marmion Marco Lavit Nicora JoĂŤl Rochard