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Pour un déploiement réussi des énergies renouvelables

Comment planifier et mettre en œuvre la transition énergétique dans un monde aux ressources limitées ? En couplant des modèles numériques à des approches participatives et aux sciences humaines et sociales !

Si l’on en croit le discours institutionnel, la transition vers les énergies renouvelables est enclenchée. Selon le dernier rapport de l’Agence internationale de l’énergie (AIE), la crise énergétique que nous connaissons actuellement accélère même leur déploiement. Si bien que, sur la période 2022-2027, l’éolien devrait doubler ses capacités installées par rapport aux cinq dernières années, et le photovoltaïque les tripler ! Une bonne nouvelle en soi ?

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Dans le monde scientifique, des voix dissonantes commencent à se faire entendre. Selon certaines, cette notion de transition n’a jamais été observée historiquement – les énergies se sont toujours accumulées et non substituées – et reste donc incertaine pour le futur. De plus, des travaux de modélisation remettent en cause la possibilité d’opérer une transition tout en maintenant la croissance économique. En effet, les ressources à déployer (humaines, financières, matérielles…) sont limitées, et ce qui est mobilisé pour la transition ne pourra l’être pour les autres secteurs.

L’équipe-projet Steep d’Inria travaille sur ce sujet avec l’équipe Minéralogie de l’Institut des sciences de la terre (ISTerre), qui a développé DyMEMDS, un modèle dynamique reliant le produit intérieur brut (PIB) à la consommation d’énergies et de matériaux tels que les métaux ou le béton. À titre d’exemple, nous estimons que le déploiement de l’éolien et du solaire, nécessaire au scénario Sky, imaginé par Shell (qui prévoit une multiplication par trois de la consommation d’électricité dans le monde entre 2015 et 2050), mobiliserait en 2050 l’équivalent de 75 % du cuivre consommé pour tous les usages en 2015 !

Notre objectif est donc de contribuer à enrichir les débats sur les autres perspectives possibles pour nos sociétés, tant au niveau local que global. À quoi ressemblerait une économie qui ne dépasserait pas les limites planétaires ?

Quels arbitrages devront être faits entre les critères socioéconomiques et environnementaux ? Notre approche consiste à imaginer et évaluer des futurs radicalement différents.

Le M Tabolisme Des Territoires

Comment s’y prend-on ? Nous analysons d’abord l’économie d’un point de vue biophysique, c’està-dire en tenant compte des stocks et des flux de matières et d’énergies sur lesquels les sociétés reposent. Par analogie avec les sciences de la vie, le terme de « métabolisme territorial » est justement apparu pour désigner les flux (aliments, matériaux…) qui permettent à un territoire de se développer et d’évoluer en répondant aux besoins de base de la population (se nourrir, se loger…).

Il importe aussi de penser les problèmes de façon globale, en valeur absolue, plutôt que par unité de bien ou de service. On sait en effet qu’augmenter l’efficacité énergétique d’une technologie ne garantit pas la baisse de la consommation globale. C’est même le contraire qui est observé empiriquement : on parle d’« effet rebond » en général, et ici de « paradoxe de Jevons ». Enfin, la prise en compte des effets indirects est indispensable : certaines actions ne font que déplacer les problèmes vers d’autres endroits du monde, d’autres secteurs ou d’autres enjeux.

Prenons l’exemple de l’économie des services, qui est souvent présentée comme dématérialisée. Celle-ci repose en réalité sur le transport et le numérique, deux secteurs éminemment matériels.

Le Suivi Des Fili Res De La Bio Conomie

Pour modéliser les flux de matière et d’énergie, nous utilisons des outils numériques, comme l’optimisation et la propagation d’incertitudes (le modèle doit restituer ce qui relève de connaissances robustes et ce qui demeure des zones d’ombre à préciser ultérieurement). Ces outils sont aujourd’hui matures et valorisés par TerriFlux, une coopérative issue de l’équipe-projet Steep spécialisée dans l’analyse du fonctionnement multiéchelle des filières de production. Les modèles les plus précis concernent les filières agroalimentaires et forêt-bois, qui sont au cœur du développement de la bioéconomie (économie basée sur la biomasse plutôt que sur le carbone fossile). Ils aident en particulier à mieux appréhender les potentielles concurrences d’usage, notamment entre l’alimentation, humaine ou animale, les matériaux biosourcés et l’énergie.

Notre travail consiste également à effectuer une analyse qualitative des dimensions immatérielles et institutionnelles. Qui sont les acteurs derrière les flux étudiés ? Comment sont-ils organisés et quelles sont leurs relations de pouvoir ? Ces questions, qui relèvent des sciences humaines et sociales, sont indispensables pour identifier les blocages et imaginer des mécanismes pour les dépasser. Enfin, pour ancrer les modèles évoqués ci-dessus dans les territoires et se confronter au monde réel, le recours à des processus participatifs s’impose. L’objectif est de faciliter l’engagement de tous les acteurs (citoyens, associations, élus…) dans une dynamique transformative.

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Des démarches de ce type débutent au Pôle d’équilibre territorial et rural (PETR) du Grand Briançonnais et dans le cadre du Projet alimentaire inter-territorial (PAiT) de la grande région grenobloise. Le but est d’évaluer si les modèles développés en laboratoire les aident à mieux cerner les vulnérabilités de leur territoire et à imaginer des stratégies de transformation.

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