rara 3/2017

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rara LE MAGAZINE DE PROSPECIERARA ÉDITION 3 /2017

RESSORTIR LA BÊCHE À L’AUTOMNE Page 5

LA PÊCHE DE VIGNE, UNE VARIÉTÉ TRÈS SPÉCIALE Page 10

DE L’UTILITÉ DE CONNAÎTRE LES ANIMAUX … ET LES HOMMES ! « DIVERSIFOOD » – UN PROJET DE L’UE EN FAVEUR DE LA BIODIVERSITÉ

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Fondation suisse pour la diversité patrimoniale et génétique liée aux végétaux et aux animaux 1


Il est maintenant temps de planter l’oignon rocambole – ainsi que de nombreuses autres variétés et espèces (voir dès la p. 4). Cette plante facile peut prospérer pendant quatre ans au même endroit et nécessite peu d’entretien. Cueillez ses bulbilles aériennes, à saveur souvent prononcée, pour les préparer au vinaigre ou en sauce aigre-douce ou pour les utiliser comme des oignons. Au printemps utilisez ses tiges comme de fines herbes culinaires.

MERCI ! Votre soutien nous fait avancer : Donatrice /donateur plus à CHF 120.– /an Donatrice /donateur à CHF 70.– /an Donateur couple à CHF 90.– /an Donatrice /donateur junior ( jusqu’à 25 ans) à CHF 35.– /an Parrainage d’animaux entre CHF 150.– et CHF 450.– /an Parrainage d’arbres CHF 250.– /an Pour vos dons : CCP 90 -1480-3 IBAN CH29 0900 0000 9000 1480 3 BIC POFICHBEXXX

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Éditorial

Anna Kornicker, responsable de la communication

« Le rêve, c’est tout – la technique, ça s’apprend ! » Jean Tinguely

Il y a toujours au départ une idée, une vision, un rêve … Si l’on veut qu’ils deviennent réalité, il « suffit » de trouver la bonne occasion et d’avoir le savoir-faire voulu. Imaginez : pourquoi ne pas chausser à nouveau vos bottes en caoutchouc à l’automne, pas seulement pour nettoyer les plates-bandes, mais pour planter salades, fraises et oignons, semer des fleurs de printemps et planter arbres fruitiers, petits fruits et pivoines ? Vous voyez-vous déjà récolter des salades et du chou ­frisé en hiver ? Voyez-vous votre jardin fleurir plus tôt au printemps ? ProSpecieRara a dans son fonds de nombreuses variétés prédestinées pour le jardinage hivernal, propres à ­prolonger la saison du jardinage. Trouvez votre inspiration dans les pages qui suivent, lancez-vous, offrezvous un rêve de jardin hivernal et permettez aux variétés hivernales de renaître. 3


CIBOULE ’HAIE D’HIVER’ Au XVIIe s., on recommandait sa culture en complément des oignons habituels. Cette plante résistante à l’hiver se sème à l’été ou se plante en automne et peut être récoltée à la fin de l’hiver comme la ciboulette, ou alors plus tard comme petits oignons.

POIS MANGETOUT D’HIVER ’FRIEDA WELTEN’ Semée entre octobre et début novembre, cette variété de pois mangetout passe l’hiver sous forme de petites plantes de 5 cm qu’on peut protéger de la neige et du froid intense en les recouvrant de branches. Au printemps, ces plantes poussent vigoureusement, si bien que la récolte est précoce. 4

CHOU-RAVE D’AUTOMNE ’DYNA’ On sème cette variété vigoureuse de juin à août ou on met en terre le planton jusqu’en septembre. La récolte suit entre septembre et novembre. Leurs pommes décoratives à chair tendre se conservent bien.


Focus

Ressortir la bêche à l’automne Philipp Holzherr, responsable des projets Plantes de jardin et de plein champs

Youpi ! Voici revenue l’époque du marché des plantons ! L’excitation règne au ­moment de planter les plates-bandes. Les semences pour les navets sont déjà enfouies dans le sol, les jardiniers travaillent à plein régime, les plants de ­laitues sont plantés, et les marchands viennent tous les jours voir pousser leur précieuse marchandise. Votre cœur de jardinier se met-il à battre plus fort ? Est-ce que vous retrouvez l’excitation que vous ressentez au printemps lorsque le moment est enfin venu de vous remettre au jardinage ? Pas besoin d’attendre le printemps, en automne aussi, il y a de quoi planter ! Ce ne sont simplement pas les mêmes plantes. On sème des navets d’automne et pas des navets de printemps, on plante des salades d’hiver qui supportent le froid et non les salades de printemps qui poussent vite, et au lieu des fleurs d’été, il y a les plantes fleurissant au printemps qui sont montées en graine et qui ont besoin du repos hivernal pour refleurir au printemps suivant. Et la planification oblige à voir encore un peu plus loin.

ProSpecieRara compte parmi ses protégés quelques trouvailles qui étaient un peu ­tombées dans l’oubli. Laissez-vous inspirer !

TIRER PARTI DES ATOUTS Autrefois, il était tout à fait normal de ­cultiver le jardin et les champs également pendant la deuxième moitié de l’année. Une fois passées les récoltes céréalières de juillet /août, on semait des légumes ­parmi les chaumes, et on les récoltait avant les premières neiges. Vers la fin de l’hiver, lorsque les réserves s’épuisaient, les premières chaleurs du printemps ­faisaient surgir des légumes frais, riches en vitamines, qui avaient été semés à ­l’automne. ›› COMME LA CIBOULE ’HAIE D’HIVER’

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LAITUE POMMÉE D’HIVER ’CHEZ-LE-BART’ Il s’agit d’une sélection particulièrement résistante au gel de la variété printanière ’Reine de mai’. Le créneau temporel pour la culture de cette dernière est très étroit et il doit faire suffisamment chaud pour semer ; tandis que la variété ’Chez-le-Bart’ peut être semée dès les premiers jours sans gel ou tardivement à l’automne, car elle germe même à basse température. En revanche, sa propension à la montaison et sa sensibilité au mildiou ne portent pas à conséquence en hiver.

FRAISES Les pros du jardinage attendent aoûtseptembre avant de planter les fraisiers et cultivent autre chose sur leurs plates-bandes entre temps (p. ex. oignons et salades, parfaits pour précéder les fraises). Le plant a ainsi le temps de s’enraciner et de former des boutons, si bien qu’on approche du plein rendement dès le printemps. Misez sur les variétés anciennes. Relativement sensibles à la pression, elles ne conviennent le plus souvent pas pour la grande distribution ; en revanche, avec leur parfum intense, elles sont parfaites pour le jardin familial.

ne porte pas à conséquence pendant le semestre d’hiver. ›› VOIR LA LAITUE POMMÉE ’CHEZ-LE-BART’ Les agriculteurs sélectionnaient des variétés destinées aux cultures hivernales, qui se distinguaient des variétés estivales apparentées par leur tolérance au froid et leur résistance aux maladies cryptogamiques de l’automne. Cultivées à l’automne, certaines espèces n’ont pas l’occasion d’exprimer quelques-uns de leurs caractères négatifs. Par exemple, la tendance à la montaison de variétés de salade qui se cultivent au début de l’été 6

LE BON MOMENT POUR PLANTER Les novices de la culture hivernale ne découvriront pas seulement des variétés passionnantes, mais également toutes sortes de variétés qu’il est bon de ne semer ou planter qu’à l’automne. ›› PAR EXEMPLE LES FRAISES, qu’on propose actuellement en quantités à la vente au printemps alors que durant la première année, on ne peut pas s’attendre à un rendement digne de ce nom.


LECTURES CONSEILLÉES

GIROFLÉE La giroflée est une crucifère qu’on sème en juin ou qu’on peut planter jusqu’en octobre et qui fleurit de fin avril à mai. Dans des conditions favorables, elle peut survivre pendant plusieurs années pour le plus grand plaisir des abeilles à miel et des abeilles sauvages. D’autres plantes à floraison précoce et qui doivent être plantées dès avant l’hiver sont l’œillet de poète ’Oeschberg’ ainsi que les traditionnelles pensées du sélectionneur Roggli.

Il y a aussi des plantes ornementales, comme les fleurs de printemps bisannuelles qui ornent les jardins familiaux. On les sème en été, puis les plantes passent l’hiver à l’abri, et en mai, elles fleurissent à qui mieux mieux. ›› PAR EXEMPLE LA GIROFLÉE, plante traditionnelle des jardins de campagne. L’automne est également la meilleure saison pour planter arbres fruitiers, arbustes à baies et massifs (plantes ornementales vivaces, herbacées, p. ex. les pivoines). Au printemps, il faut s’occuper des nouvelles feuilles et tiges. Lorsqu’on attend le printemps pour mettre ces plantes en terre, elles nécessiteront un arrosage intensif et

SAVEURS D’ANTAN – ­VARIÉTÉS REDÉCOUVERTES DE PROSPECIERARA, TOME 1 HIVER-PRINTEMPS Avec cette série de deux livres pour cuisiner, lire et se documenter, destinée à tous ceux qui aiment la nature et les anciennes races et variétés, Martin Weiss s’inscrit dans le même esprit que celui qui habite la fondation ProSpecieRara. Le premier tome est consacré spécialement aux légumes d’hiver et de printemps. Plus d’excuses pour ne pas cultiver topinambour, panais, bette, … et plein de recettes pour que ces variétés anciennes, pour ainsi dire oubliées, retrouvent également le chemin de nos cuisines ! JE PRÉPARE MON ­POTAGER D’HIVER – ­SEMER AU BON MOMENT POUR RÉCOLTER … JUSQU’À PÂQUES ! Cet ouvrage de Blaise Leclerc, paru en 2016 aux éditions Terre vivante, sait nous convaincre de penser « aussi » aux légumes moins attractifs, car moins connus, et surtout il est plein d’astuces de culture tout en faisant constamment le lien avec l’utilisation en cuisine. Un ouvrage très complet et ­richement illustré, pour ne plus oublier qu’un potager d’hiver se prépare dès le printemps ! Vous trouverez ces ouvrages en ­librairie ou, pour le premier, sur notre site de vente en ligne (voir p. 18).

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CHOU FRISÉ Des variétés telles que le ’Haut frisé rouge’ ou le ’De Westphalie’ ou encore le ’Palmier de Frise orientale’ résistent relativement bien à l’hiver et se récoltent tout au long de la saison froide. Pour que ce chou développe toute sa saveur, il convient de toute façon d’attendre les premières gelées. Le semis a lieu entre juin et juillet. Au moment de la montée en graine au printemps, on peut encore une fois récolter les jeunes feuilles pour confectionner des smoothies printaniers excellents pour la santé.

régulier pour que les racines non encore ­ancrées dans le sol puissent absorber suf­ fisamment d’eau. Si on les plante en ­octobre  /novembre hors période de végétation, on peut généralement se contenter d’un unique arrosage initial.

AVANTAGES POUR LE SOL ÉGALEMENT Tant le sol vivant que le terreau apprécient la présence de végétation en toute saison. Moyennant l’ajout d’un peu de compost, la terre peut ainsi se régénérer tout au long de l’année. La succession des tomates (mai à octobre) et du rampon (septembre à mai) par exemple donne de bons résultats. On sème le rampon en septembre parmi les tomates. La salade absorbe les nutriments en provenance des racines mortes des tomates. Les salades non récoltées fleurissent au printemps, les graines retombent sur la terre et les plants se désintègrent, apportant des nutriments aux tomates plantées en mai. Grâce à la longue dormance du rampon, celui-ci ne germe qu’à l’automne, juste à temps pour le nouveau cycle qui commence …

CONSEILS POUR LA PLANTATION •  Lorsqu’on plante à l’automne, ne pas ajouter trop d’engrais azotés. Ils accélèrent la croissance tout en ramollissant la texture des plantes, les rendant plus sensibles au gel. Les légumes sont également de moins bonne garde. •  Ne jamais toucher, et encore moins récolter, des végétaux à l’état gelé. L’impact mécanique attaque les ­tissus et, au dégel, les végétaux ­présentent des taches noires et des endroits ramollis.

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ÉPINARD D’HIVER ’GUNTMADINGEN’ Les feuilles de cet épinard ressemblent à celles de la dent-de-lion. Le semis s’effectue d’août à octobre, selon l’altitude, et on voit se former de jolies rosettes à l’automne. Au printemps, il monte en graine relativement tard et permet donc une récolte prolongée.

UN NOUVEAU MARCHÉ « POUR LE JARDIN D’AUTOMNE » L’existence d’adeptes de l’horticulture ­hivernale qui cultivent et multiplient les variétés aux bons moments nous a permis de sauvegarder nombre de variétés utilisées dans le passé et de les maintenir jusqu’aujourd’hui. Différents producteurs – vous en connaissez certains de nos marchés de plantons du printemps – les proposent dans leur assortiment automnal : des plantons de légumes et semences résistant à l’hiver, mais aussi des petits fruits, des arbres fruitiers, des herbacées, des herbes aromatiques, des bulbeuses et des rosiers. Ce qui précède vous a-t-il donné ­envie de cultiver votre jardin à l’automne ? Alors rendez-vous le 24 septembre à Bâle, où les jardins Merian et ProSpecieRara ­organisent pour la première fois un marché de plantons avant l’hiver (voir encadré). Le jardinage automnal et hivernal présente de nombreux atouts. Il prolonge la saison au jardin de quelques mois et ­permet de récolter plus tardivement en ­automne et plus précocement au printemps des herbes aromatiques et des légumes. C’est pourquoi il vaut toujours la peine d’avoir en réserve des bottes en caoutchouc et des gants de jardinage rembourrés pour l’hiver.

NE – JARDINER EN AUTOM MARCHÉ DE PLANTONS AUTOMNAL

Récoltez des salades en hiver et préparez votre jardin afin que la floraison soit ­encore plus splendide au printemps. ­Découvrez une multitude de plantons de légumes d’hiver, de bulbes à fleurs, d’arbres fruitiers, de petits fruits, de vivaces à fleurs, d’herbes aromatiques de nos ­producteurs via notre marché en ligne (www.prospecierara.ch/placedemarche) et de semences de nos distributeurs privés via notre catalogue des variétés (www.prospecierara.ch/fr/catalogue-desvarietes) ou lors d’une visite à notre ­premier marché de plantons d’automne qui aura lieu le 24 septembre, de 10 h – 17 h, dans les jardins de la Fondation Merian (www.herbstgartenzeit.ch). Une occasion également pour nos lecteurs romands de découvrir notre siège de Bâle, avec des ­visites guidées centrées sur le jardinage automnal et la séminothèque ProSpecieRara, ainsi que la possibilité de déguster des plats à base de variétés et de races rares.

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Fruits

La pêche de vigne, une variété très spéciale Manuela Ghezzi, responsable ProSpecieRara de Suisse italienne

Comme son nom l’indique, la pêche de vigne était traditionnellement cultivée dans les vignobles. Culturellement, elle a sa place depuis le XVIe s., mais elle a peu à peu disparu avec l’intensification de la viticulture. ProSpecieRara a réuni les informations sur les derniers arbres restants et s’est attelée à constituer un réseau de conservateurs privés. Comme tous les projets ProSpecieRara, le projet de conservation des différents types de pêches de vigne a démarré en 2009 par un appel lancé dans les médias. L’idée était partie de la Fondation Delinat qui ­voulait enrichir ses vignobles valaisans en y réimplantant cette classique plante d’accompagnement. Plus de 80 personnes ont répondu à l’appel et envoyé des noyaux. Or le pêcher de vigne a ceci d’intéressant qu’à la différence de la plupart des autres arbres fruitiers, il est autogame à 90 % et qu’il est traditionnellement multiplié au moyen de ses noyaux et non par greffe comme les pommiers, poiriers ou pruniers.

commun l’époque de leur maturation, entre fin août et mi-septembre, la taille des fruits, un peu plus petite que celle des pêches qu’on trouve dans le commerce, leur arôme intense et leur multiplication qui se fait ­traditionnellement au moyen des noyaux, par sélection des meilleurs fruits.

UN FRUIT AUX MULTIPLES ATTRAITS Les réactions recueillies ont vite fait apparaître que le pêcher de vigne faisait partie du paysage dans les vignobles traditionnels. Au printemps, il apporte une touche de ­couleur par sa floraison rose tendre, et à la fin de l’été, il prodigue ses fruits savoureux. Il n’existe pas UNE pêche de vigne, mais de nombreux types différents, à peau jaune, rouge ou tirant vers le vert, à chair blanche, jaune, rouge clair ou rouge foncé, à la peau plus ou moins velue. Toutes ont en 10

Souhaitez-vous héberger une variété de pêche de vigne et contribuer ainsi officiellement à sa conservation ? Plus d’informations sous www.prospecierara.ch/fr/ projets/renaissance-de-lapeche-de-vigne


UNE QUESTION INÉDITE Ce mode de multiplication nous confronte à une question inédite, s’agissant de conservation des différentes variétés : devons-nous traiter les pêchers de vigne comme d’autres arbres fruitiers, c’est-à-dire assurer leur ­survie en constituant des collections avec différentes variétés, ou plutôt en confiant la multiplication des semences à des gardiens de ces variétés comme pour les ­légumes ? Comme notre intention est de conserver la multiplication classique au moyen du noyau, sans pouvoir entièrement exclure un croisement, nous avons décidé de créer un réseau de conservateurs qui ne cultivent qu’une seule variété dans leur jardin. Ils peuvent consommer les fruits mais s’engagent à mettre de côté les noyaux des plus beaux fruits et à les mettre à la disposition d’autres personnes intéressées par le biais de notre catalogue des variétés. En Suisse méridionale, des arbres ont été livrés aux 15 premiers conservateurs de variétés ; en Suisse alémanique et en Suisse romande, la survie de 22 variétés

Qu’elle est belle, et quel arôme !

est assurée par la culture de plus de 150 arbres, par exemple dans une collection à Unterlangenegg /BE, où figurent toutes les variétés de Suisse romande et de Suisse alémanique, qui peuvent ainsi mieux être décrites et comparées. Au Tessin ­également, nous ambitionnons de créer une collection de variétés régionales.

PLANTER DES PÊCHERS Ceux qui voudraient simplement accueillir un pêcher de vigne pour leur verger trou­ veront ce qu’ils cherchent dans notre catalogue des variétés. On met en terre les noyaux dans un pot qu’on place à l’extérieur, quitte à l’oublier. Cela peut durer jusqu’à un an et demi, avant que le noyau germe. L’arbre pousse alors relativement vite et porte des fruits déjà au bout de deux à trois ans.

Au printemps, les fleurs du pêcher de vigne colorent les paysages d’un rose tendre.

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Élevage

De l’utilité de connaître les animaux … et les hommes ! Interview : Nicole Egloff

En août, les chèvres deviennent intenables. Elles veulent connaître le bouc qui sera le père de leurs futurs chevreaux. Comme la considération première dans le choix du partenaire n’est pas le sentiment amoureux mais plutôt des questions d’endogamie et de traits se rapportant à l’apparence, les responsables des ­registres d’élevage des différentes races font office d’entremetteurs. Nous avons parlé de leur fonction avec Andreas Zingg, qui a assuré pendant plus de quinze ans la tenue du registre d’élevage des chèvres bottées.

QUELLES SONT LES ACTIVITÉS D’UN RESPONSABLE DE REGISTRE D’ÉLEVAGE ?

LE RESPONSABLE DU REGISTRE D’ÉLEVAGE DÉCIDE PARFOIS DE LA VIE ET DE LA MORT …

Les éleveurs annoncent au responsable du registre tous les changements intervenus dans les effectifs, naissances, ventes, morts. Enfin, théoriquement, ils sont tenus de le faire … Dans notre association, près de 90 % des détenteurs sont des amateurs ; ils ne sont pas toujours très disciplinés. Alors que dans les grandes associations, les animaux non déclarés sont simplement exclus du registre, dans notre cas, avec notre petit cheptel de quelque 800 animaux (sans les cabris de 2017), bien sûr que chaque animal nous intéresse. C’est pourquoi en tant que responsable du registre d’élevage, je dois souvent m’y reprendre à plusieurs fois pour obtenir ces déclarations, et il me faut faire preuve de psychologie. Il arrive qu’un détenteur m’explique qu’il n’a pas fait sa déclaration parce qu’il avait des problèmes de couple … Notre tâche serait beaucoup plus simple si ces annonces étaient une routine et nous parvenaient régulièrement.

C’est vrai. Environ la moitié de tous les cabris sont des boucs. Or en l’état actuel des effectifs, dix nouveaux boucs par an suffisent pour assurer la reproduction. Notre tâche consiste à déterminer lesquels choisir comme reproducteurs, lesquels castrer et consommer. Plusieurs facteurs interviennent dans la sélection : la présence génétique, ou en d’autres termes le nombre de parents proches du bouc dans la population. Nous privilégions les boucs avec peu de parents en vie, car cela restreint au maximum l’endogamie. Comme un bouc a beaucoup plus de descendants qu’une chèvre, qui ne peut mettre bas qu’entre un et trois chevreaux au maximum par an, l’évaluation des traits requis est beaucoup plus sévère dans son cas. Puis on veille à ce que la mère elle aussi ait reçu des experts un nombre élevé de points. Actuellement, nous sommes en train d’améliorer les pis. Ce n’est pas que nous voulions optimiser le rendement, mais nous

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Andreas Zingg (deuxième depuis la gauche) juge un animal à l’occasion d’une exposition de chèvres bottées.

voudrions obtenir une meilleure conformation et suspension des pis pour faciliter la traite. C’est pourquoi nous sélectionnons de préférence des boucs dont les mères ont des pis de qualité supérieure à la moyenne.

ET QUELLES SONT VOS TÂCHES ACTUELLEMENT, FIN AOÛT ? C’est une période plutôt tranquille pour le responsable d’un registre d’élevage d’une race caprine, car les boucs reproducteurs ont déjà rejoint les troupeaux. La chèvre n’est en chaleur qu’entre août et novembre, à la différence de certaines races de moutons où il peut y avoir des saillies pendant toute l’année. De nombreux détenteurs m’annoncent dès le printemps, à l’occasion de l’annonce des naissances, qu’ils auront besoin d’un

bouc à l’été. Je peux alors, en juillet, lorsqu’il faut sortir les boucs des troupeaux pour ­éviter qu’ils ne montent leurs mères ou leurs sœurs, pratiquer l’entremise de façon ciblée. Mais il y en a bien sûr toujours qui ne s’aperçoivent qu’en septembre, ou même en octobre, qu’il leur manque un bouc …

L’ASSOCIATION DES ÉLEVEURS DE CHÈVRES BOTTÉES EST ­ÉGALEMENT ACTIVE EN SUISSE ROMANDE … Il y a des élevages de chèvres bottées partout en Suisse à l’exception du Tessin. C’est pourquoi nous nous efforçons d’organiser aussi périodiquement des expositions ou des rencontres en Suisse romande. Ils n’étaient que deux à avoir participé à la rencontre 2015 en Suisse romande, mais

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nous avons passé une sympathique soirée autour d’une fondue et ils ont tout de même échangé un bouc. En 2016, ils étaient déjà cinq avec environ 30 animaux. Nous ­tenons beaucoup non seulement à avoir le contact avec les éleveurs, mais à ce qu’ils soient en contact entre eux ; et étant une petite association, nous pouvons organiser de tels événements informels à petite échelle.

QU’APPORTE LA PLATEFORME WWW.ANIMAUX-RARES.CH QUE PROSPECIERARA A MISE SUR PIED EN COLLABORATION AVEC LES DIFFÉRENTES ­ASSOCIATIONS D’ÉLEVEURS POUR L’ENTREMISE ANIMALE ? La plateforme est très sollicitée et fonctionne à merveille. Je pense qu’elle est ­aussi un bon moyen de faire connaître

les différentes races à des gens qui auraient bien envie de détenir une chèvre mais qui n’ont pas encore franchi le pas. Mais le plus important, ce sont les ­marchés-concours de chèvres bottées ainsi que l’exposition animalière que ProSpecieRara organise tous les cinq ans. À ces ­occasions, nous pouvons présenter notre race, nous engageons la conversation avec de futurs détenteurs, et nous pouvons leur signaler combien il importe, pour ­l’élevage conservatoire, d’enregistrer les animaux dans le registre d’élevage.

Andreas Zingg, ingénieur forestier à la retraite, a été en 1993 le premier président de l’association suisse d’élevage des chèvres bottées. Il a assuré la tenue de registre d’élevage pendant quinze ans. Il y a peu, il a passé le flambeau à Susette Kämpf mais reste présent à ses côtés en tant que conseiller.

Une chèvre bottée avec ses chevreaux. Cette chèvre de Suisse orientale se caractérise par sa jarre sur le dos et sur l’arrière-main, appelées « manteau » et « bottes ».

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Agenda

MARCHÉ D’AUTOMNE PROSPECIERARA

Un spécialiste de la faune vous emmènera découvrir les chèvres d’Appenzell, chèvres col-fauve et col-noir, Capra grigia, moutons de Saas et poules de race suisse qui s’exposent fièrement à la Garenne depuis le printemps 2016.

Cinquième édition pour ce Marché ProSpecieRara organisé conjointement par le Service des parcs et domaines de la Ville de Lausanne et ProSpecieRara. Cette année, le tapis vert sera déroulé en 23  septembre 2017, 10 h – 11 h 3 0 l’honneur de la thématique Parc animalier de la Garenne 1261 Le Vaud /VD des vergers : présentation ns sitio expo , iers d’arbres fruit de greffe, ateliers de mise en conserve, exposition de pommes anciennes, … Les poules et leurs œufs seront également au rendez-vous avec une présentation de différentes races locales menacées. Des démonstrations, DÉTENTION DE visites guidées, jeux, anima­PETITS RUMINANTS tions et stands gourmands (CAPRINS) viendront ponctuer la maniCe cours s’adresse à tou s festation. ceux qui ont récemme nt acquis des chèvres ou qu 10  septembre 2017, 9 h – 17h i Cantine de Sauvabelin, Signal ­désirent se lancer dans l’éle/ VD   1018 Lausanne vage de races rustique s menacées. Il permet d’a cquérir les aptitudes pratiq ues nécessaires pour déten ir les animaux conforméme nt à leurs besoins (OPAn).

PROSPECIERARA VERSUS VAVILOV

En marge de l’exposition « Graines pour le futur » ­présentée du 18 mai au 29 octobre aux Musée et ­Jardins botaniques cantonaux, Denise Gautier vous fera découvrir comment ProSpecieRara s’inspire de l’Institut Vavilov pour ses travaux de sauvegarde de la biodiversité végétale. 3  octobre 2017, 12 h 15 – 13 h Jardin botanique de Lausanne 1007 Lausanne /VD

DES COURS ­RECOMMANDÉS Détermination variétales fruitières 30 septembre, 28 octobre et 25 novembre 2017 4800 Zofingen /AG Galets en laine feutrée 24 septembre 2017 1222 Vésenaz /GE Duvet en laine cardée 12 novembre 2017 1222 Vésenaz /GE Plus d’informations sur ces ­événements et d’autres sous : www.prospecierara.ch /fr /calendrier

28  octobre 2017,
 9 h –  16 h 45 Institut agricole de Gra ngeneuve 1725 Posieux /FR 15

© iStock.com/sorendls

VISITE DU PARC ­ANIMALIER DE LA GARENNE


Collaboration internationale

«DIVERSIFOOD» – un projet de l’UE en faveur de la biodiversité Béla Bartha, directeur

Le nom est tout un programme : comment faire profiter notre ­alimentation de la biodiversité des variétés et des espèces ? 20 organisations (associations d’agriculteurs, instituts de recherche, départements des universités et ONG telles que ProSpecieRara) de douze États-membres de l’UE ont fait démarrer le projet en 2015. Il est financé, sous le haut patronage de la Commission de l’UE, par le programme HORIZON 2020. La Suisse y participe en tant que partenaire associé. L’idée est d’améliorer les plantes culturales de telle sorte que même dans des conditions de culture respectueuses de l’environnement, elles satisfassent à des exigences agronomiques et culinaires élevées – variétés de niche, variétés anciennes produites dans des conditions de culture participative (culture communautaire d’une variété par plusieurs agriculteurs dans des sites différents), mais encore variétés comme les lupins comestibles qui, sans avoir une longue tradition en Suisse, diversifieraient l’offre. Le projet DIVERSIFOOD fait profiter les parties prenantes du savoir et de l’expérience mis en commun par les différentes organisations. Les résultats obtenus font régulièrement l’objet de publications et sont rendus accessibles au public. ProSpecieRara dirige deux projets partiels : un inventaire des organisations actives dans le domaine des « neglected crops »* où sont décrites leurs structures et leur mode de fonctionnement : comment s’organisent-elles, comment travaillent-elles 16

«Le réseau euro-

péen d’organi-

sations renforce la conservation de la biodiversité cultivée et stimule par ailleurs nos connaissances à ce sujet. Béla Bartha

»


conjointement sur une variété donnée … Forte de son vaste réseau de conservateurs de variétés, ProSpecieRara peut faire valoir sa propre expérience ; d’un autre côté, les initiatives conjointes d’agriculteurs ayant une expérience de la culture participative sont un enrichissement pour elle. La collaboration entre chercheurs et agriculteurs de plusieurs pays européens permet de développer de nouvelles variétés adaptées à des zones climatiques et systèmes agricoles très divers. L’autre projet dirigé par ProSpecieRara concerne la commercialisation de variétés de niche. Il vise à proposer un fil conducteur rappelant les différents aspects à prendre en compte lors de l’élaboration d’un nouveau label afin de réunir les conditions optimales

pour la valorisation de variétés anciennes. Car il ne s’agit pas « seulement » de sauvegarder, mais également de rendre à nouveau accessibles ces variétés de niche sous forme de denrées alimentaires. ProSpecieRara peut jeter dans l’escarcelle le modèle, unique en Europe, de sa collaboration avec la chaîne de grande distribution Coop. *N eglected crops : espèces tombées dans l’oubli ou négligées

DIVERSIFOOD durera jusqu’en mars 2019. On trouvera de plus amples informations sous www.diversifood.eu

Fonctionnement du réseau italien de conservateurs Rete Semi Rurali. 17


Chronique

News

Un accomplissement

NOTRE LABEL ÉVOLUE

remarquable Maya Graf, conseillère nationale BL et membre du Conseil de fondation ProSpecieRara Lorsque je rentre à la maison après des réunions dans la Berne fédérale, je commence toujours par aller voir mes trois chèvres et leurs cabris. Mes trois chèvres ne font pas partie des races menacées ProSpecieRara. Je peux dire qu’elles sont le produit de ma propre sélection, que je poursuis ­depuis l’adolescence. Elles sont grandes, brunes ou blanches, un mélange entre differentes races suisses. Mais cela peut changer. Cela me plairait, à l’avenir, de ne pas seulement soutenir ProSpecieRara en siégeant dans son Conseil de fondation, mais de contribuer concrètement à la sauvegarde d’une race menacée en tant qu’éleveur. En effet j’ai toujours été impressionnée de voir ProSpecieRara ­s’investir dans la sauvegarde et dans la promotion des races d’animaux de rente menacées. Lorsqu’il y a 35 ans, les éleveurs étaient saisis par la folie des objectifs de sélection unilatéraux de plus en plus poussés et d’une agriculture de plus en plus intensive, les pionniers de ProSpecieRara ont ­compris qu’il fallait à tout prix empêcher les races anciennes de disparaître. Non pas par nostalgie, mais parce que nous avons un urgent besoin de leurs ressources génétiques : pour une agriculture respectueuse de l’environnement, ménageant mieux les ressources, misant sur la robustesse, la longévité et la diversité plutôt que sur une productivité unilatérale de courte durée. J’espère vivement que cette façon de voir aura sa place dans la nouvelle stratégie en matière d’élevage que la Confédération est en train d’élaborer en collaboration, entre autres, avec ProSpecieRara. 18

De plus en plus d’exploitations utilisent le label de qualité ProSpecieRara (LQ) en reconnaissance de leur travail de conservation et de la qualité de leurs produits. Avec ce succès, la volonté de mettre en place un organe de contrôle indépendant contrôlant le respect des directives du LQ, et assurant ainsi sa crédibilité, c’est affirmée. Avec la société bio.inspecta AG, ProSpecieRara a ­trouvé un partenaire qui prend indépendamment en charge ce contrôle. La cer­tification est basée sur le contrôle ­annuel de l’administration du LQ par ProSpecieRara et l’échantillonnage ­auprès d’exploitations labellisées. Ils ont eu lieu pour la première en 2017.

TOME 1 : SAVEURS D’ANTAN – TES VARIÉTÉS REDÉCOUVER HIVER-PRINTEMPS Ressortir la bêche à l’automne c’est bien, mais encore faut-il savoir utiliser sa future production ! Avec cet ouvrage, Martin Weiss dresse un panorama des variétés ProSpecieRara disponibles, où chacune est décrite en détail. Puis avec Albi von Felten, ils partent en ­cuisine et proposent plus de 60 recettes appétissantes et aisées à réaliser. À commander sous www.prospecierara.ch/fr/shop


IMPRESSUM Le magazine « rara » paraît quatre fois par an en français, en italien et en allemand. Éditeur : Fondation ProSpecieRara, Bâle, Suisse Rédaction : Denise Gautier, Nicole Egloff, Anna Kornicker Textes : Anna Kornicker, Philipp Holzherr, Manuela Ghezzi, Nicole Egloff, Béla Bartha, Maya Graf Traduction : Irène Kruse, Denise Gautier Photos : ProSpecieRara Layout : Reaktor AG, Kommunikationsagentur ASW, Aarau Impression : ZT Medien AG, 4800 Zofingen Papier : Cocoon 100 % Recycling 90 g /m2 Tirage : 10 000 expl. en français, 39 000 expl. en allemand, 1600 expl. en italien Féminin / masculin : Pour plus de lisibilité, nous renonçons à mettre les désignations au masculin ET au féminin. Que nous options pour l’un ou pour l’autre, il va de soi que le terme recouvre à chaque fois les deux genres.

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COMMANDER LE RARA Notre magazine vous plaît ? Si vous ne l’avez pas encore reçu, nous serons ravis de vous le faire ­parvenir à l’avenir. Contactez-nous pour un abonnement gratuit à l’essai. info@prospecierara.ch, Téléphone 022 418 52 25

FONDATION PROSPECIERARA Fondation suisse pour la diversité patrimoniale et génétique liée aux végétaux et aux animaux. ProSpecieRara Suisse romande c/o Conservatoire et Jardin botaniques de Genève Case postale 71 1292 Chambésy Suisse Téléphone +41 22 418 52 25 Fax +41 22 418 51 01 romandie@prospecierara.ch www.prospecierara.ch

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ProSpecieRara Svizzera italiana Vicolo S. ta Lucia 2 6854 San Pietro Svizzera Telefono +41 91 630 98 57 vocedelsud@prospecierara.ch www.prospecierara.ch

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Des paroles aux actes n° 138

Nous faisons aussi de la généalogie et redécouvrons des espèces anciennes. Les variétés traditionnelles de légumes connaissent en ce moment une renaissance, à laquelle nous contribuons largement. En effet, depuis 1999, nous soutenons la fondation ProSpecieRara dans son travail de préservation de la diversité des espèces végétales et animales. C’est pour cette raison que vous trouvez dans nos rayons plus de 120 articles portant le label ProSpecieRara, une garantie de notre engagement mais aussi d’un goût inégalable.

Pour tout savoir sur l’engagement de Coop en faveur du développement durable, rendez-vous sur des-paroles-aux-actes.ch


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