L’ESPEE DE COMBAT OU L’USAGE DE LA TIRE DES ARMES Par François DANCIE, Sieur Du Verdier, Limousin
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A TRES NOBLE ET TRES MAGNANIMES SEIGNEUR Henri Deschomberg, Comte de Nanteuil, Chevalier des Ordres du Roi, Capitaine de cent hommes d’armes, Gouverneur & Lieutenant général pour sa Majesté es Provinces de haut & bas Limousin & Angoumois, & Surintendant des Finances du Royaume. MONSEIGNEUR , Si je vous offre mon ESPEE ce n’est pas pour besoin que vous ayez d’un second [comme la Nature ne vous a quasi point donné de pair, la Fortune & la vaillance ne sauraient trouver qui vous secondât] ni pour estime que je fasse de sa valeur, mais pour contenter ma dévotion à consacrer mes armes, comme j’ai fait mon service, à l’un des plus puissants Génies de cet état, & des plus vaillantes épées du royaume. Un brave Roi appelait jadis le plus favori de la cour, SON EPEE, parce que le conseil & la vaillance de ce sien affidé lui servait comme de tranchant affilé par son …/…
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…/… autorité Royale, à couper tous les différents, & trancher toutes les révoltes. Chacun m’entend assez, qui sait le rang que votre mérite vous a acquis auprès de la personne du Roy, & qui voit que vos sages conseils servent à pointer l’épée de sa justice contre ses ennemis en nécessité de guerre, & la remettre au fourreau pour ne faire paraître que le sceptre et la main d’ivoire de sa clémence, en bienséance de paix. Ce sont des faveurs qui vous sont dues (Monseigneur) malgré l’ennui, & sauf l’édit des duels, je présente hardiment le cartel de défi pour venir à la pratique de mes préceptes, à quiconque sur ma proposition se voudrait inscrire à faux, ou à votre désavantage donner un démenti à la Renommée. Aussi ne saurais-je donner loisir à ma lame de se rouiller dans son fourreau tant que l’occasion de servir le Roi, & maintenir votre réputation se voudra accorder à ma science :comme le peu ou prou de science que j’en ai, n’a jamais dédit le désir & la loi d’en user pour de si justes causes. Néanmoins s’il arrive que par les adresses que je donne aux gens d’Epée de se prévaloir de la Tire pour le service du Roi, soit à attaquer, soit à repousser l’ennemi, quelque bon coup se fasse, le louerais mon EPEE de m’avoir fait en cela le meilleur service qu’elle fit jamais. Et alors si non aussi vaillant, au moins plus sage que celui qui fit …/…
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…/… graver à la poignée de son estoc, à fin de le faire reconnaître & priser à la postérité, Je suis de Talbot pour vaincre mes ennemis, je graverais sur mon EPEE qu’elle est au Roy, & à vous, pour combattre les ennemis de l’Etat & les vôtres. Et c’est ce qui m’a fait en ce temps mettre comme par coutume ou longue habitude, la main à L’EPEE, & L’EPEE au vent quoique d’une façon nouvelle, & sans coup férir :non pour donner du vent d’en avoir écrit l’usage & l’excellence en termes de muguet de cour, ou de discoureur, [il me ferait beau voir d’avoir d’une allumelle forgé un graminet pour tailler ma plume à bien écrire, & coucher de belles paroles.] Mais pour montrer à ceux qui y sont moins adroits que vous [qui m’en feriez leçon, comme Maître passé en toute science convenable à un grand Capitaine] la façon de s’en servir, ou pour parer aux coups, ou pour coucher son homme en bonne guerre. J’ai toujours oui faire cas d’un trait d’esprit d’un quidam qui disait, que s’il avait à faire des legs de ses armes aux nations qui guerroient, il léguerait les gardes & le pommeau de son épée à l’Espagnol, parce qu’il ne la porte bonnement que par contenance & pour s’y appuyer la main, la pointe au Français qui n’a disait-il, que la pointe pour piquer ou égratigner, mais non la raideur pour enfoncer …/…
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…/… La lame & le tranchant seraient pour l’italien, qui tranche des deux côtés, et est à qui plus lui donne, & se joue des éclats & des pièces des armes de ces deux nations. Je ne suis point si pointilleux que ce testateur, & ayant maintenant à tester de mes armes & mon EPEE, je n’en réserve que l’usage ma vie durant, pour le service du Roy & la défense de ma patrie. Pour le surplus (Monseigneur) le la vous donne toute, puisque vous n’avez rien à partir avec personne, & qu’il semble que la vertu même ne vous a point donné de cohéritier, lorsqu’elle s’associât & fit moitié d’acquêts avec votre Fortune pour vous faire toutes deux leur héritier universel, & vous rendre l’un des plus heureux & mieux appointés Cavaliers qui se mêlent de porter l’épée pour l’honneur du Roy, & le bien commun de la France. Si la France ne le savait (pieça ?) par son expérience propre, je serais ambitieux qu’elle le sut dès aujourd’hui par la publication de Votre très humble & très obéissant serviteur, FRANCOIS DANCIE
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A MONSIEUR DANCIE SIXAIN Ce petit livre est un tableau Non moins admirable que beau Ou l’on peut voit l’art de la Tire Mais sans DANCIE rien de fait Car il montre plus par effet Que sa plume n’en peut écrire Par le sieur LAGARDE AU MÊME En ce rare traité des Armes, Qui plait & profite si fort, Que tu trouve de puissants charmes A vaincre le Temps & la Mort Défia la Gloire prémédite Des louanges pour ton mérite, Afin de le perpétuer : C’est un miracle que ce livre, En nous montrant l’art de tuer, Il te va faire toujours vivre Par le sieur MAYNARD Président d’Aurillac
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A MONSIEUR DANCIE, Sur le sujet de son Livre Il est vrai, généreux Athlète, L’Epée vous doit un laurier, Mais si faut-il que je regrette Que vous l’ayez mise en cahier. Non, qu’imprudent, je veuille croire, Que sa pratique décrivant, Elle vous doive moins de gloire, Que lorsque vous l’avez au vent. Ou que l’œuvre, quoique petite, N’en contienne dans peu d’écrits, Tout ce qu’un brave Palestrite A de réservé pour un prix. Mais c’est que nous voulant apprendre Tout ce que l’Art a de plus fin, Ce dessein ne saurait attendre De posséder jamais la fin. Car quand la main la plus guerrière Prendrait les armes, c’est en vain, On ne leur verra jamais faire Ce qu’elles font en votre main. Par le sieur DECOMBES.
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A MONSIEUR DANCIE SIEUR DU VERDIER Sur le sujet de son livre
Ton Epée ni ton escrime N’avaient que faire de ma rime, Pour te louer, le meilleur vers Est un bon coup de ton revers II Grand tireur à qui en veux tu Avec ton épée blanche ? Si on offense ta vertu Est-ce pour en avoir revanche ? III Ce preux héros de qui l’épée Dedans l’eau du Styx fut trempée Pour durer une éternité Eu mieux fait pour la faire vivre Comme tu fais, d’écrire un livre, Témoin de sa dextérité. Par le sieur SALVAN.
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A MONSIEUR DANCIE SIEUR DU VERDIER Sur son épée de combat (Le Casseron ou L'espadon?) dit-on, seul poisson porte épée Ne l’a jamais ailleurs qu’en son encre trempée Car il est dépourvu & de sang & de cœur : Mais toi qui bien souvent par la Tire des armes As fait perdre l’escrime aux plus braves gendarmes Et ne sortis jamais du combat que vainqueur, Saurais-tu faire un jeu plus beau ni plus sûr ? Car tenant d’une main & ton cœur & ta lame A ton fer animé ton courage sert d’âme Ta force de poignée & de pommeau ton cœur. Par le sieur LABARRE.
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Avant-propos Après le culte qui est du à la Divinité, j’ai toujours affirmé que la chose au monde la plus nécessaire est la conservation de la vie : car jasois que (bien que) ce souffle que nous appelons vie, ne soit qu’une petite vapeur qui se dissipe aisément, si (cependant) faut-il avouer qu’elle est le fondement de tous les biens que nous pouvons ou faire ou recevoir, & la source de toutes les actions de mérite tant naturelles que surnaturelles. Je n’en dirais pas davantage, pour deux raisons, l’une c’est que je renonce dès à présent aux longs discours, car j’ai appris & fait métier toute ma vie, non de m’escrimer de la langue ou de la plume, mais de l’épée. L’autre raison, c’est que la vie nous est assez recommandée par la Nature même, sans qu’il soit besoin de plus grand discours n’y ayant si petit animal en l’air, sur la terre & sous les eaux, voire si chétive créature inanimée qui ne bataille
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…/… pour conserver son être puisque nous voyons les gouttes d’eau faire un petit miracle, & contre leur naturelle pesanteur prendre l’air & s ‘amonceler en rond, pour ne se point séparer, se pressant tant qu’en s’écoulant elles périront, cette même lampe qui m’éclaire tandis que je veille à faire ce petit ouvrage fait des (estans ?) de flamme, & lutte vivement contre l’extinction qui est son adversaire & sa mort. Tellement que supposant ce qui est très-vrai, que maintenir & conserver sa vie, va devant & par dessus tout, selon le dire du bonhomme qui couchait sur ses papiers premier article « Item il faut vivre » je dis que la tire des armes est pareillement chose au monde des plus nécessaires, puisqu’elle tend à garder & à sauver la vie, soit il contre la cruauté des bêtes, au danger, soit contre la fierté des hommes, qui est mainte fois pire : car la bête irritée est toujours une bête, l’homme passionné se sert de l’avantage de sa nature, de son esprit, & de ses inventions, forces & ruses pour armer la rage & donne le fil & le tranchant à ses passions, par la raison, dont il abuse : ce qui se voit à toute heure en noz querellant dans ce royaume, ou l’outrage étant si ordinaire, l’art de se défendre ne doit être à mépriser, que ceux qui se méprisent & haïssent eux – même. Que la tire des armes est en ce premier degré de nécessité, que la nature & l’humeur de ce …/…
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…/… Royaume nous font voir : Il appert, s’il est besoin de l’apprendre. Or te dis bien plus, passant du bien particulier au public qui est plus grand, il est tout vrai qu’on ne peut être homme de bon service, ni pour son pays, ni pour son Roi, ni pour l’Etat, & la Religion (qui est le plus souverain bien de ceux que Dieu nous communique) si l’on est ignorant de cette adresse, laquelle fait un homme habile, & à se défendre & à charger ou attaquer l’ennemi. Ceci n’a pas besoin de paroles, mais ce qui m’en fera épancher plus que je ne pensais, c’est de voir aujourd’hui l’indignité avec laquelle on manie cet exercice. Je me plains surtout, non sans sujet, d’un tas de coureurs, qui professant la maîtrise en ce métier, & n’y étant qu’ignorants, méritent d’être appelés « Clercs d’Armes », voire quelque chose de pis : car outre qu’ils font tort aux gens d’honneur, qui y savent bien, & décrient tout le métier par leur incapacité. Ils mènent de plus une vie débordée & s’escrimant aux couteaux dans les tavernes & cabarets, font voir qu’ils joueraient mieux d’un verre que d’une épée. Joigniez à cela qu’ils semblent s’entendre avec Messieurs les chirurgiens pour leur donner pratique, car ils enseignent si mal leurs écoliers, qu’ils leur apprennent à recevoir plus de coups qu’à en donner. Et les abusant sottement, ils les portent en outre à des actions vicieuses, par leur mauvais exemple, & à se battre sans …/…
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…/… fondement ni raison d’où vient qu’ils vérifient le commun dire : « tel maître, tel disciple ». Partant pour ce que le premier bonheur de l’apprenti, c’est l’excellence de son maître, je ne puis donner meilleur avis que celui de bien choisir à qui on puisse fier son instruction, en un point ou il va de l’honneur & de la vie. Et quoi. J’apprend que les philosophes jadis & à présent, donnent tant d’axiomes & de règles, pour enseigner à bien disputer & pontiller. Les avocats ont de gros codes & des digestes assez indigestes pour la plupart, afin de savoir s’escrimer des lèvres & du babil. Et nous pour bien savoir disputer nos vies, celles de nos amis, & le salut de la république, nous croirons qu’il n’est pas besoin de grande science, que tout homme qui s’y dit Maître doit être cru, & suivi sans autre choix ni recherche ? Pour moi qui fraye le premier chemin d’écrire sur ce sujet en notre langue & qui pourtant serait plus digne de pardon si je ne fais qu’ébaucher, sans perfectionner l’ouvrage, je suis en cette croyance qu’il naît à peine en beaucoup de siècles un seul maître. Et puis avancer ce que le vieux poète disait, « qu’on fait tous les ans des Maires & des consuls, mais après cent ans à peine peut on faire un habile homme » en ce métier et capable d’enseigner les autres. On me dira que chacun fait ce qu’il sait, mais je dirais qu’aussi chacun doit savoir ce …/…
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…/… qu’il fait, et de ne se mêler de rien dont il ne puisse bravement se démêler. Toutefois parce qu’il ne sert de rien de mettre le jeu si haut, et loger l’affaire à l’enseigne de jamais, je maintiens qu’au fin moins un maître doit être en quelque façon physionomiste, sinon par art et science, pour le moins par expérience, afin de connaître un chacun qui apprend de lui pour s’accommoder à son naturel, d’autant qu’il est plus aisé d’accommoder l’art à la nature, que la nature à l’art. Bien qu’on doit corriger et accommoder le naturel d’un chacun à ce qui est de plus propre et de plus nécessaire en cet exercice, comme si un excellent maître montrant à des gens de bonne maison, en reconnaît qui par défaut naturel seront timides, sa prudence les doit relever et aider à ce défaut en tout ce qui lui sera possible par une douce démonstration de cet exercice, sans les plonger jamais dans aucune difficulté ni danger apparent, car au lieu de se servir de la Tire, et de s’en enhardir davantage, la connaissance du péril qu’il y a en tirant les rendraient beaucoup plus craintifs et timides. D’ailleurs le maître les doit faire tirer avec lui cinq ou six mois, sans leur permettre de tirer avec autre, afin de se rendre plus familier cet exercice, et quasi comme s’il était né avec eux. Et après le Maître permettra à un homme de cette humeur de s’exercer contre quelqu’un beaucoup plus faible que lui, ou pour le moins s’il est plus …/…
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…/… fort qu’il soit prié du Maître de l’épargner. Cette méthode assurera grandement les gens timides, et si la timidité était trop grande, faut leur montrer à tirer en reculant et à ne jamais attaquer. Or pour être bien montré il faut chercher les bons maîtres qui sont assez rares en France, n’y en ayant connu d’excellents que les sieurs Duperche, Driancourt, et Beaunays : car pour le sieur Geronyme, je ne lui veux ôter sa réputation qui est très grande. Et nous autres Français avons obligation à feu son père, pour l’épée et poignard, et au sieur Patenostrier pour l’épée seule de toutes les belles inventions de la Tire, de quoi nous sommes imitateurs & eux les inventeurs. Un bon maître doit aussi retenir la fougue de certains bouillants, qui pour montrer qu’ils tirent avec grand courage, vont sans jugement ni raison, ainsi à tout heurt, trouvant un homme froid, ils s’exposeront au danger de l’épée de leur ennemi. Bref il faut qu’un bon maître se peine pour acquérir de l’honneur, de connaître le naturel d’un chacun qui apprendra de lui, afin que soit-il grand, ou petit, fort, ou faible, craintif, ou hardi, il montre à chacun selon sa portée, et s’accommode à son naturel. Et cela fera que le Maître acquerra de la réputation, & connaîtrat-on qu’il n’a pas tenu au Maître qu’un chacun à qui il aura montré n’aie appris, étant très certain que tous ne peuvent exceller en cet exercice, qui demande …/…
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…/… un homme né pour soi, & non pour filer. Voilà une bonne partie de ce que j’avais à dire en cet avant-propos, si ce n’est, que pour (d’esgrosser = dégrossir ?) cette matière, je mette encore par préalable la signification de certains termes de l’art, qu’on ne peut ignorer pour s’en mêler tant soit peu, & qui sont nécessaires aux Maîtres pour montrer, afin de faire entendre aux écoliers les mouvements du corps qu’il faut qu’ils fassent en tirant. Le mot le plus commun est celui de Garde, lequel on prend d’ordinaire pour s’empêcher de recevoir, ou bien pour parer du poignard & donner de l’épée. Mais quand à moi je dis que ce qu’on appelle Garde aujourd’hui est vraiment une posture, qu’un homme qui tire, forme à sa fantaisie, ou pour le moins selon la démonstration que lui en a été faite par le Maître, ou Maîtres qui l’ont enseigné. Et sous cette posture il met son corps à l’abri de l’injure qui lui pourrait arriver de son ennemi. Botte, est un mot italien qui veut dire en Français une estocade, ou un coup de pied ferme, bref un coup de pointe d’épée. Une feinte, est faire semblant de donner une estocade en un lieu, pour obliger l’ennemi à y parer & lui donner ailleurs, bref une tromperie permise en tirant.
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Passer, c’est porter le pied qu’on a derrière, devant celui de devant. Quarter, c’est tourner la paume de la main vers le ciel. Volter le corps, c’est porter le pied gauche au delà du pied droit en tournant tout le corps, sur la partie droite, & passer le plus près de l’ennemi qu’on pourra, pour ne pas être offensé de lui. Un appel, est faire semblant de se débander, pour offenser l’ennemi, lequel se débandant lui-même, tout de bon, lors on pare du poignard, & l’offense-t-on de l’épée. Riposte, est un mot italien, qui veut dire répondre en français, repartir, & ainsi ce sera parer & tirer en même temps. Contretemps, terme de la tire improprement parlé, d’autant qu’on l’applique lorsqu’on se donne tous deux à la fois. Et sauf meilleur avis je l’appelle un même temps, ou coup fourré. Je dis aussi qu’un contretemps, est lorsque contre un temps que l’ennemi fait en présence & en mesure on lui donne. Pas commun, est n’éloigner l’un pied de l’autre, plus loin que lorsqu’on va son pas. Pas extraordinaire, est éloigner en tirant le pied droit du gauche, tant qu’on le pourra porter en avant, toutefois il ne faut pas que la pointe du pied aille plus avant que le pli du genou, …/…
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…/… ni moins aussi, de peur qu’il n’arrivât, ou qu’on ne s’en pourrait pas retourner, s’il était trop avancé ou qu’on tomberait, si on ne l’avançait pas assez, d’autant que la tête emporterait le corps. Assaut, se prend quand deux tirent l’un contre l’autre, & appelle-t-on tout le temps qu’ils y mettent faire assaut, d’autres ont appelé, les passes assaut, pour dire il est allé d’assaut. Esquiver, & effacer, est tourner le corps hors de l’épée de l’ennemi, ou le changer d’un lieu en un autre. Ajuster l’épée, se prend pour la pointe d’ordinaire, qu’est l’appointer si justement près des armes de l’ennemi que de là avant on l’en puisse offenser infailliblement. Contraster, se prend quand deux tireurs raidissent leurs épées l’une contre l’autre. Contregarde, est former en telle façon une garde contre celle de notre ennemi, qu’il ne puisse sans faire changement nous tirer.
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L’EPEE DE COMBAT OU L’USAGE DE LA TIRE DES ARMES Du courage, & de la posture intérieure Quoi que l’âme, & le courage, n’aient pas proprement de situation, ni de posture, si parlons nous ainsi qu’un homme a le cœur haut ou bas, selon la petitesse, ou grandeur de son courage. Vu mêmement que comme la liqueur dans un vase triangulaire prend la même figure, ainsi souvent l’esprit, va suivant la disposition du corps, soit naturelle ou casuelle. Nous parlerons par après de la disposition du corps, mais pour le maniement & posture intérieure de l’homme, qui
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…/… est son courage & sa raison, puisqu’il conviens commencer par tels préceptes, imitant Bonne Dame Nature, laquelle ourdit la structure du corps humain, par le cœur, & que le cœur en toute chose est la meilleure pièce du sac. Je dis tout premièrement qu’il faut que le cœur soit toujours droit, & ne gauchisse, ni ne s’abaisse jamais, moins s’ébranle de rien, il faut souvent plier ou biaiser du corps, mais du cœur jamais. Or pour former cette garde intérieure (pour ainsi parler) & mettre le cœur en bon sens Deux choses sont grandement nécessaires en cet exercice : la première & principale, c’est la crainte de Dieu, sans laquelle toute adresse est vanité principalement celle-ci, ou le vent du point d’honneur met au vent les Epées de force gens qui portés d’ambition d’acquérir ce point d’honneur, qui n’a point d’honneur, se portent trop légèrement sur le pré, & quittant la raison naturelle, …/…
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…/… qui est la clarté de l’homme s’y repaissent du sang de leurs ennemis comme des bêtes. La seconde, c’est ne craindre point son ennemi, d’autant que tout homme qui craint un autre, n’exécute jamais ce qu’il sait, parce que la crainte lui assoupit & engourdit & les sens & les membres, & comme une statue exposée aux vents, endure toute forme de grêle. Ainsi le craintif, endure toute sorte de coups de son ennemi, mais c’est ce point d’honneur qui l’a exposé à ce danger. Le moyen de craindre Dieu, je laisse à un chacun à le rechercher selon la portée de sa dévotion, & de son humilité, & aux théologiens en discourir, car pour moi j’aimerais mieux savoir pratiquer cette vertu qu’en savoir dévider de belles fusées de paroles. Mais pour le moyen de ne craindre point son ennemi, soit il à tirer au Fleuret ou à l’épée blanche, j’en discourrais selon la portée du peu de sens qu’il a plu à Dieu …/…
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…/… me donner, & selon aussi la pratique que j’ai de l’un & de l’autre, c’est que j’ai toute ma vie tenu pour maxime de n’offenser jamais personne, petit ni grand, & ainsi vivant dans cette retenue de discrétion, ai trouvé que ceux qui m’attaquaient, fut-il à l’épée ou au fleuret, étaient à demi battus d’abord que je paraissais devant eux. Pour le fleuret on me dira qu’on n’y court le risque de sa vie, à cela je répondrais, que non toutefois il est fâcheux à un homme qui a bonne réputation de savoir tirer les armes, de s’exposer à toute rencontre de tirer, comme nous sommes fort sujets en France à ce malheur, qu’on veut toujours voir ce qu’un homme sait faire, quelle réputation qu’il aie tant les Français sont curieux d’essayer les hommes, & non de les imiter. De perdre cette réputation bien souvent, fait qu’on ne peut exécuter ce qu’on sait, sinon qu’en la façon que j’ai dit ci dessus, de ne commencer …/…
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…/… jamais à rechercher personne de tirer. Pour l’épée blanche, je trouve que la discrétion est encore beaucoup plus nécessaire qu’au fleuret, pour deux raisons : la première qu’il y va du salut de l’âme & de la perte de la vie. Voilà pourquoi le commun proverbe est très bon, qui dit qu’il faut que l’homme sage porte cent ans son épée pour s’en servir une fois en sa vie. C’est que le plus tard qu’on peut, on doit s’exposer à ce malheureux danger de duel, et crois-je que le meilleur serait de ne s’y exposer jamais. Quelqu’un dira que je parle contre ma profession, bien que je ne sois pas digne de me mettre au rang des sages. Je dis que c’est plutôt folie que courage de se battre en duel, & vraiment folie Française, car j’en ai séparé d’autrefois qui se battaient, que les retirant du pré ils étaient plus morts que vifs, & se battaient comme si l’on baillait …/…
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…/… des épées à deux aveugles, que si l’un tuait l’autre on dirait : il ne le pensait par faire, pardonnez lui ; & de faire gloire de tuer un homme, je la trouve bien petite, car il y en a eu qui ont été tués, de la piqûre d’une mouche, pour montrer que la vie d’un homme tient à bien peu de chose. A quoi donc sera bonne cette dextérité de tirer des Armes, puisque nous en blâmons l’usage es duels mal entrepris ? Elle est grandement à louer comme nous avons dit en Avant-propos, pour le service de Dieu, de notre Roi, & de notre vie propre. Ainsi apprenant qui que ce soit doit avoir ce dessein, de n’apprendre que pour servir Dieu, le Roi, & se défendre. Qui m’a fait (ami lecteur) te peindre le mieux qu’il m’a été possible, les gardes pour attaquer & défendre, en te servant de divers coups, que te sont ci-dessous marqués (en temps & lieu). Ainsi que ton …/…
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…/… jugement te poussera à faire, que si les paroles sonnent mal à tes oreilles, à cause des redites, tu dois considérer que j’y était contraint pour rendre intelligible cet exercice, que d’ailleurs n’ayant guère de lettres, je n’ai peu relevé davantage mon style, & puis j’ai cru qu’un métier tel que celui ci qui est tout dans le fer, & les blessures, ne se doit traiter avec délicatesse ni mignardises de paroles & d’autres chatouillements d’oreille, notre propre n’est pas de flatter, mais de frapper, bien te doit suffire que mon affection m’aie porté à rédiger par écrit cet exercice, par suite de jeu, ainsi que verras, & sera aisé de me reprendre, & de faire mieux à qui pourra.
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Bref Discours des quatre Gardes La première Garde s’appelle Prime, qui est lever la main, tant haut que la portée d’un chacun qui tire se peut entendre, mais fort peu de gens forment cette posture, comme fort pénible, peu utile, & malaisée à tenir, & encore plus à défendre qui m’empêche à en faire un plus long discours. La Seconde garde, comme descendant de Prime, qui est avoir tout le bras de la hauteur de l’épaule, & l’épée de même, le tout ne faisant qu’une ligne droite : garde plus propre aux Espagnols qu’aux Français, pour faire plus de mine que de jeu, qui m’empêche aussi de m’y arrêter, bien que souvent en tirant il arrive qu’il faut agir en Seconde.
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La troisième Garde s’appelle Tierce, que je trouve plus propre pour attaquer l’ennemi, & se doit former le poing droit vis à vis de la ceinture, la pointe de l’épée droit à la tête de l’ennemi pour le tenir en crainte, & l’empêcher de venir à soi, ton poignard près de l’épée pour la secourir, quand & lorsqu’il en sera besoin, ton corps en bonne assiette, le genou gauche plié, affin d’y appuyer & soutenir tout le corps, sans pour autant qu’il y aie aucune contrainte, pour rendre par ce moyen le pied droit libre & disposé pour agir en avant ou en arrière, lorsque tu jugeras que le temps que ton ennemi te donnera t’y appelle, sans entrer en conseil en toi même, si tu dois faire ceci ou cela, car cette longueur fait entrer l’ennemi en mépris de toi. Or un homme méprisé est à demi battu, j’entends lorsqu’il y a de la peur mêlée avec la considération.
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La quatrième Garde est selon aucuns, la paume de la main tournée en haut, & la pointe de l’épée regardant le dehors de la partie droite : mais quand à moi je tiens qu’il faut la former, la pointe de l’épée croisant de la partie droite à la gauche, le poing bas, & la pointe haute, d’autant qu’en cette façon l’épée couvre tout le corps, & en telle façon le couvre, que quand même un homme serait las, ou vieux, cette posture le garde en telle sorte qu’il est quasi malaisé de l’y offenser sans courir un grand risque de recevoir, pour peu que celui qui tient cette posture soit expert en cet exercice. Toutefois les postures & gardes se forment selon la volonté, naturel ou habitude d’un chacun, qui plus haut une garde, qui plus bas une autre, & ainsi chacun qui tire cours à ce qu’il pense le mieux pour se défendre ou attaquer, bref la peur de la peau fait qu’en cette action …/…
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on forme bien souvent des postures tout au contraire de celles qu’on a apprise, ou pour s’y trouver mieux campé, ou pour s’y trouver plus aisé. Et ainsi chacun quelle posture ou garde qu’il tienne, tâche à se couvrir du péril éminent qu’il a devant soi, & cours à son naturel qui est plus fort que l’art, quand aux gardes.
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Exercice & méthode pour bien tirer des armes Lorsque tu viendras à t’affronter devant ton ennemi, démarchant de loin, viendras à pas lents & graves en partant du pied gauche l’épée avancée, le bras étendu croisant un peu de la partie droite à la gauche, le poignard en arrière fort élevé que tu ramèneras en avant en portant le pied droit, & formeras la posture de Tierce, comme la plus propre pour attaquer, & entre en mesure que tu sois, te débanderas pour offenser ton ennemi entre deux armes, en portant le pied droit tant avant que tu pourras d’un pas extraordinaire, & la main & l’épée, avec toute sorte de vitesse, lui donneras une estocade entre deux armes, la main …/…
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…/… en Quarte en reculant, à même temps que partiras pour tirer ton Poignard fort arrière, & de telle façon, que depuis la pointe de ton épée, jusqu’à la pointe de ton poignard avec le corps, ne s’y fasse qu’une ligne droite, afin que s’il arrivait que ton ennemi tirât à même temps, que son épée ne trouve que l’air, & passe devant ton corps. Après avoir ainsi offensé ton ennemi entre deux armes te retirant, pareras de ton épée sur la sienne, & la lui tiendras engagée sous la tienne, laquelle voulant dégager & caver au dessus de la tienne, lors tu prendras le même temps qu’il remuera, & portant le pied & la main, l’offenseras sous l’aisselle droite, en parant de ton Poignard, & te penchant jusque à donner du genou gauche à terre, pour effacer aussi la partie droite de devant l’épée de ton ennemi, qui ne …/…
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…/… trouvera que l’air, par le moyen de ton esquive. L’ennemi se voyant ainsi pipé par le moyen de ton esquive, se portera à te vouloir offenser d’estoc ou de taille ainsi que l’on dit : mais c’est lors qu’il perd la Tramontane. Voilà pourquoi s’il arrive à te tirer un revers sur la tête te voyant ainsi bas, tu peux faire de deux choses l’une, ou le choquer incontinent après l’avoir offensé, & le porter par terre, ou bien en te retirant d’un pas commun, parer de ton épée & contraster avec lui. & si sur la contraste il quitte ton épée de la sienne, & y porte son poignard pour la saisir, comme cela est commun à la colère d’aller étourdiment, lors lâchant encore le pied & haussant ton épée, l’offenseras d’une Botte au dessus de son poignard droit dans la gorge.
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Etant remis en la posture qui te sera la plus propre commode & aisée, & surtout faire paraître les armes libres à la main, pour donner de la terreur à ton ennemi, sous le poignard duquel ajusteras la pointe de ton épée, & battant du pied & poussant ton épée en la même ligne qu’elle sera ajustée d’un pas extraordinaire, & d’un battement redoublé, portant le pied & la main, l’offenseras au dessus de son poignard, la main en Seconde. Et d’autant que naturellement quoi qu’on reçoive, on veut ôter de devant soi, ou de sur soi, l’épée qui nous a offensée, & en quelque façon en parant on tire (mais mollement) voilà pourquoi il est très nécessaire en te retirant de parer de ton épée & engager celle de l’ennemi, pour la tenir si sujette, qu’il ne puisse en aucune façon t’offenser sur la retraite.
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Et bien que l’épée n’aie qu’une ligne droite, & que de cette même ligne, on en agisse en différentes façons contre son ennemi pour l’offenser, soit-il entre deux armes dessus, dessous son épée ou son poignard. Pourtant est-il grandement nécessaire, à celui qui fait profession de tirer, que venant à tirer contre un étranger adroit, & à nous inconnu, qu’on déguise si à propos les temps différents & moyens d’offenser, qu’il ne puisse jamais asseoir jugement certain de ce que tu veux faire, que tout aussitôt que tu l’auras offensé, en quelle partie de son corps que ce soit, soit-il entre deux armes, ou sur son poignard, tu dois juger qu’il se raidira à y parer, & ainsi faisant semblant de le vouloir offenser, en même façon il sera aisé à tromper par suite de jeu. Voilà pourquoi après l’avoir offensé au dessus du poignard, feindra lui redonner dessus, en portant …/…
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…/… le pied & la main d’un pas commun, & l’épée droit à l’œil gauche fort près, pour le mieux obliger à parer, ce que faisant tournant le poing de Seconde en Quarte, & portant le pied d’un pas extraordinaire, l’offenseras au dessous de son poignard. Et puis te retireras, & pareras de ton épée, ainsi que j’ai déjà dit, & n’oublieras jamais cette maxime, qu’il faut nécessairement que l’épée réponde de la défense du corps, lorsqu’elle est avancée pour offenser l’ennemi, étant très dangereux d’y ramener le poignard en présence ce qu’on ne peut faire sans exposer tout le corps à la merci de l’épée de l’ennemi, qui piqué au jeu d’avoir été frappé tâche de donner à quel prix que ce soit. Pour tromper aisément ton ennemi, lui tireras une demi estocade entre deux armes, la main en Quarte, & voyant ton épée s’avoisiner du poignard …/…
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cela l’obligera de parer, ce que faisant, retireras le pli du genou, & le corps seulement, sans bouger le pied de sa place, qui fera remettre ton ennemi en sa première posture & garde accoutumée, ce que faisant & prenant le temps qu’il se remettra en sa garde, si tu lui tires à mesure qu’il se remettra les armes sur soi, tu lui donneras infailliblement, étant impossible à un homme surpris d’aller en avant & arrière tout à la fois, & à même temps. Et après l’avoir ainsi offensé, te retireras en saisissant l’épée de ton ennemi, en quel lieu qu’elle soit, ce qui est aisé à faire avant qu’il aie repris son jugement. L’ennemi tenant le poignard avancé tu ajusteras ton épée au dedans de ses armes, & d’un tour de poing, lui feras un cercle à la pointe d’icelui, & portant le pied d’un pas …/…
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extraordinaire, l’offenseras d’une Botte à l’épaule droite, la main en Quarte, afin que si l’ennemi tire, à même temps ton épée rencontre la sienne, ce qu’étant tu la tiendras bien sujette, afin que venant à la vouloir dégager, pour te tirer au dehors de la tienne, & te vouloir offenser à l’épaule droite, tu lui fasse les susdites suites, tant dessus que dessous son épée, & son poignard, & là ou ses actions & mouvements t’en feront naître le sujet, que tu prendras au poil avec vitesse & jugement : étant très certain que l’homme blessé redouble son action, & la rend plus vigoureuse & moins judicieuse. Ton ennemi se remettant encore sur la même posture du poignard, avancé comme étant naturel à un chacun de courre à ce que lui est le plus propre, ajusteras derechef ton épée entre deux armes de ton ennemi, & …/…
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feindra lui tirer en Quarte en même lieu, qui l’obligera à parer, ce que faisant, redoublant le pas d’un pas extraordinaire, & tournant la main de Quarte en Seconde, l’offenseras au dessus de son poignard, mouvement excellent & propre à tromper son compagnon : mais il le faut faire hardiment & prestement ou ne s’en mêler point. Le même coup se peut exécuter au dessous du poignard de l’ennemi lui faisant le même temps & tournant la main de Quarte en Seconde, l’offenseras au dessous de l’aisselle gauche, faisant couler la pointe de ton épée le long de son poignard, & de la main gauche, en t’étendant & t’abaissant jusqu’à donner du genou en terre. Et si l’ennemi te voyant aussi proche pare en bas & comme offense te tire, lors tournant la main de Seconde en Quarte, par un demi cercle que feras au dehors de son poignard, et parant …/…
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…/… du tiens son épée par le dedans, l’offenseras d’une Botte en Quarte à l’épaule droite, rompant toutefois la mesure, par le mouvement de ton corps, que tu dois faire en arrière. Que si au contraire l’ennemi, quoiqu’il aie reçu sous l’aisselle gauche, te viens à tirer quasi à même temps qu’il reçoit, qui t’empêcherait de pouvoir t’amener ton poignard assez à temps pour pouvoir éviter son temps, à cela l’épée étant étendue & le bras droit, comme plus proche de celle de l’ennemi, je te conseille de t’en aider, & en parer, en baissant la pointe & tournant le poing en bas, & faisant une demi volte de ton corps sur la partie gauche, laissant le poignard fort en arrière, & dégageant ton épée avec prestesse, & faisant une retraite du pied gauche fort en arrière & faisant suivre le pied droit, lui décharger un estramaçon …/…
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…/… sur la tête, & se remettre incontinent en ta posture accoutumée & la plus assurée, & un peu hors de mesure, pour avoir mieux loisir de reprendre ton jugement, & mieux t’asseoir ton corps en sa juste assiette, & force plus solide, pour mieux arrêter ton ennemi, s’il a encore la force de pouvoir venir en avant. Ayant encore l’ennemi le poignard avancé, ajusteras ton épée au dehors d’icelui, & près du poing & poussant en avant ton épée en la même ligne qu’elle sera ajustée, & haussant le poing en telle façon, que depuis le milieu de ton épée descendant à la garde, elle passe & coule au dessus de la pointe du poignard de ton ennemi, & la pointe demeurant dans son point, fera que l’ennemi ira à la parade en dehors de la partie gauche, & ainsi découvrant le dedans de son corps, ton …/…
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…/… épée l’offensera à la gorge, sans trouver ni épée ni poignard qui l’empêche, laquelle t’amenant en te retirant sur la sienne, s’il la veut dégager, pareras de la tienne, & entrant du pied gauche, l’offenseras un ou plusieurs coups à l’épaule droite, ou là ou son mouvement t’en donnera le sujet, en saisissant pourtant la sienne de ton poignard, pour jouer au plus sûr. Contre ce même poignard, avancé comme posture plus commune que toute autre, d’autant que le cœur, faisant son siège du côté gauche, cette partie s’expose plus librement au danger, quelle habitude familière qu’il y aie au contraire, qui me fera mettre ici force coups contre ledit poignard avancé, même par dessus la pointe qui portent feinte, par une dextérité du poing, quoiqu’ils soient tous d’un temps Bottes (connues de …/…
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…/… peu de personnes) afin de tromper plus aisément ledit poignard, & font lesdites feintes très bonnes : soit qu’elles viennent de dehors, ainsi qu’on trouve l’ennemi en posture plus aisée à les lui exécuter. Or trouvant ce poignard avancé, haussant ton épée d’une liberté & mouvement de bras & de corps, la logeras au dessus de la pointe d’icelui. Et portant le pied & la main, faisant deux temps de l’un & de l’autre, savoir de ton épée, un temps en descendant sur la pointe dudit poignard, qui l’obligera à parer : ce que faisant tu l’offenseras d’une Botte, en Quarte à l’épaule droite, te recommandant toujours de gagner l’épée de l’ennemi & l’offenser de là ou tu verras le pouvoir faire. D’autant qu’un arbre ne tombe pas d’un coup de cognée, comme ne fait pas aussi un homme d’un coup d’épée.
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La même estocade se peut faire, logeant ton épée au dedans du poignard de l’ennemi, haute & croisée de la partie droite à la gauche, & feignant lui donner un coup entre deux armes, tenant la main & l’épée de biais, qui l’obligera à y courre du poignard pour la saisir, ce que faisant haussant ton épée, lui donneras au dessus de son poignard droit à la gorge, & te retirant pareras de ton épée, jusqu’à ce que soit hors de mesure, ou te remettras en garde, pour attendre ton ennemi : lequel s’il remue ou avance mal à propos, faut prendre au pied levé, car le plus vite & le plus prompt trompe son compagnon en cet exercice. Logeras encore l’épée au dehors du poignard de l’ennemi, & fort haute Par une liberté & mouvement de corps, qui bien souvent cache à l’ennemi …/…
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ton dessein, & portant le pied & la main d’un pas commun, feindras lui donner d’un tour de poing sous le poignard, qui l’obligera de courre à la parade, ce que faisant redoublant du pied & de la main, l’offenseras d’une Botte, en Seconde au dessus de son dit poignard, & te retirant arrière en rompant mesure du corps, formeras une posture de demi Seconde, & feras jeu entre deux armes, afin d’obliger ton ennemi d’y tirer, ce que faisant en parant de ton poignard, l’offenseras de Riposte à l’épaule droite, j’entend Riposte, qu’aussitôt frappe ton épée, comme ton poignard pare, autrement le temps serait faux. Tenant toujours l’ennemi son poignard avancé, lui feras de ton épée autour de la pointe un grand cercle, en t’ouvrant fort entre deux armes, & avançant ton épée vers …/…
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…/… lui, qui l’obligera à tirer, & tirant gagneras de ton épée la sienne. Et entrant du pied gauche, la lui saisiras de ton poignard, & l’offenseras du tranchant de la tienne au poing droit, & puis d’une Botte au corps, soit entre deux armes, ou au dessus, te défendant de quitter son épée de la tienne, que plutôt tu ne la tienne du poignard.
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Contre l’épée avancée Etant en mesure de l’ennemi, avançant son épée en posture Quarte, feindra la vouloir saisir avec ton poignard par le dedans qui l’obligera à la vouloir dégager pour t’offenser, lors tournant le poing du poignard, pareras en bas, & offenseras l’ennemi, en portant le pied & la main d’une Botte, à la partie droite, la main en Quarte, qui est parer feintement, pour faire débander l’ennemi, & redoublant le parer, l’offenser à la partie qu’il découvre. Si au contraire l’ennemi se tient en tierce, feindra lui vouloir saisir l’épée par le dehors, en portant ton poignard …/…
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près d’icelle, sans le bouger du lieu, où tu l’avanceras, pour l’obliger à dégager, & te vouloir offenser au dessus de ton dit poignard. Ce que faisant redoublant ton parer, l’offenseras d’une Botte en Quarte à la partie droite, en portant le pied & la main, à même temps qu’il remuera pour agir en avant. Continuant l’ennemi la même posture de garde avancée, attaqueras son épée de la tienne par le dehors d’icelle, qui l’obligera à tirer au dedans de tes armes, ce que faisant & prenant le même temps qu’il muera son pied, partant d’une grande prestesse, l’offenseras d’une Botte en Quarte à l’épaule droite, en portant le pied & la main. Et te retireras, tant pour parer, que pour dégager ton épée, que tu dois toujours tenir libre, pour être prête à offenser, ou à te défendre.
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Après avoir trompé l’ennemi, par l’attaque de dehors de son épée, te remettant en garde, tenant ton épée haute, viendras à réattaquer celle de l’ennemi par le dedans, laquelle pressant, l’obligera à changer de dedans dehors, pour t’offenser au dessus de la tienne. Et tout incontinent qu’il changera, prends le temps en te penchant sur la partie gauche, afin d’effacer la droite, & portant le pied & la main lui donneras une Botte en tierce à l’épaule droite, & te retireras en Seconde, en préparant ton poignard, affin d’offenser encor l’ennemi de Riposte s’il te tire. Si au contraire l’ennemi se voyant son épée engagée, & ne t’ayant pu surprendre en l’attaquant, & qu’au lieu de tirer, il recule, & dégage en reculant son épée, s’il demeure dans la mesure, prenant le temps du changement, …/…
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portant le pied & la main en l’étendant le long de son épée, l’offenseras d’une Botte sous l’aisselle droite, & tiens pour certain qui recule en présence se voyant pressé, ou il le fait de crainte, ou pour reprendre des forces, ou son dessein. Et si au lieu de reculer, il ne fait que change son épée de dedans dehors la tienne, & vienne à contraster, lors obéissant d’un tour de poing, saisiras de ton poignard son épée, & l’offenseras de la tienne entre deux armes, & s’il t’arrive à propos, lui bailleras la jambe par le dehors du pied droit, & le porteras par terre, chose fort aisée quand il est fait à temps & prestement. Mais je t’avertis d’être bien appuyé sur le pied qui demeure à terre, lorsqu’on baille la jambe de l’autre, car au lieu de faire tomber …/…
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tomber l’ennemi, tu serais pour tomber toi même. Il y a des hommes qui n’attaquent jamais, ou pour n’y être pas propres, ou de crainte qu’ils ont, qu’en se débandant pour attaquer, ils viennent à recevoir, comme de fait il n’y a rien si aisé que d’éviter un coup qui est tiré en crainte, si telles gens tiennent leur épée avancée en mesure que tu sois, entrant du pied gauche, portant ton épée par le dehors de celle de l’ennemi, qui l’obligera à la baisser au dessous, laquelle saisissant de ton poignard, l’offenseras d’une, ou plusieurs Bottes, dedans, dessus, ou dessous son poignard, en tenant toujours son épée du tien, jusqu’à ce qu’il se rende : tout jeu peut s’exécuter, soit-il que l’ennemi recule ou avance, & tout autant que tu conserveras ton jugement, de quoi tu dois être grandement …/…
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…/… soigneux, comme le fondement de cet exercice. Se pourra aussi attaquer l’épée de l’ennemi avec la tienne, par le dedans de laquelle voulant dégager, poussant la tienne avant, jusqu’à la faire passer au dessus de la pointe de son poignard, pour l’obliger à te la vouloir saisir d’icelui, laquelle tournant en Quarte la dérobant à son dit poignard, par ce moyen l’offenseras au dessous de l’aisselle gauche, en portant le pied & la main, & saisissant avec ton poignard l’épée de l’ennemi. Ce coup se peut exécuter entrant du pied gauche, ou de pied ferme, selon la taille de celui qui l’entreprendra, étant les passes plus propres aux petits hommes qu’aux grands, toutefois ce sera selon le naturel d’un chacun. On pourra aussi étant dans la juste mesure, battre avec vitesse de ton épée, …/…
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…/… celle de l’ennemi par le dedans, & portant le pied & la main, l’offenser en Quarte à l’épaule droite, & retirant le pli du genou arrière, pour t’ôter hors de la mesure, & pour te donner moyen de tirer l’épée hors du corps, redoubleras un ou deux coups, ainsi que l’action de ton ennemi te portera. Et parce qu’un homme tant soit-il peu expert en cet exercice, connaît la manière en laquelle son ennemi l’a offensé, qui fait qu’il dispose son esprit & ses armes, & raidit ses membres, pour l’éviter s’il y retourne plus. Ainsi un tireur rusé le connaissant, comme il est aisé par une longue pratique, fera semblant de refaire le même coup, & portant son épée sur celle de l’ennemi, lui appuiera sans l’en bouger, jusqu’à ce que l’ennemi, venant pour la vouloir saisir de son
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…/… poignard, lors prenant le temps en portant le pied & la main, & haussant ton épée, & saisissant la sienne de ton poignard, l’offenseras d’une Botte en Seconde à la gorge, t’assurant qu’en toute action que l’ennemi est surpris, son épée demeure muette, qui te donne temps, ou de te retirer, s’il avance, ou de le suivre, s’il recule, moyennant que tu conserve ton avantage, & surtout ne t’émouvoir aucunement, pour la furie en laquelle l’ennemi entre, lorsqu’il est blessé. Si l’ennemi te laisse approcher dans la mesure, avoisinant le plus doucement qu’il te sera possible ton poignard de son épée, & entrant prestement du pied gauche, battras son épée en bas avec ton poignard par le dehors, & l’offenseras d’une Botte en Seconde ou en Quarte, ainsi que la liberté de ton corps s’y trouvera plus …/…
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…/… aisée, car étant maître de l’ennemi, cela dépend de ta dextérité, de l’offenser au lieu le plus commode de son corps, & ou tu connais moins d’empêchement. Se pourra aussi ajuster l’épée par le dehors de celle de l’ennemi, & portant le pied & la main avec toute sorte de vitesse, dégageant ton épée de dehors, dedans, la faisant couler autour de la pointe du poignard de l’ennemi, par un demi cercle que la pointe de ton épée y fera, pour l’obliger à la vouloir saisir, qui le fera ouvrir, & découvrir le dedans de ses armes, ce que faisant l’offenseras d’une Botte, la main en Quarte à l’épaule droite, & saisiras son épée de ton poignard par le dedans & te penchant sur le côté droit en exécutant ce coup, qui sera très malaisé à parer, étant entrepris …/…
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avec vitesse & hardiesse, & quand même l’ennemi parerait, ce sera tout ce qu’il pourra faire que de le soutenir, & ne te pourras offenser, d’autant qu’infailliblement tu trouveras son épée, ou de la tienne ou de ton poignard, tant cette action est assurée. Se peut aussi faire une feinte à la tête de l’ennemi, lui portant la pointe de l’épée le plus près qu’il se pourra de l’œil gauche, étendant les deux armes vers lui tout à un temps, le poignard par le dedans de son épée, faisant semblant de la vouloir saisir, qui l’obligera à tirer au dessous, & à vouloir ôter ton épée de devant soi, aussi avec son poignard, ce que faisant, redoublant ton parer en bas, lui saisiras son épée avec ton dit poignard, & l’offenseras dessous du sien d’une estocade la main en Quarte, & tout aussitôt rompras la mesure, …/…
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…/… en retirant & le corps, & le pli du genou droit, haussant ton épée & unissant tes forces, redoubleras d’un coup de pied ferme entre les deux armes à ton ennemi, & après te retireras en parant de ton épée. L’ennemi continuant la même posture de tierce serrée, logeras ton épée au dessus de son poignard, & portant le pied & la main feindras le vouloir offenser au dessous de Quarte, qui l’obligera à parer, ce que faisant, redoublant d’un pas extraordinaire, & tournant le poing de Quarte, en Seconde, l’offenseras au dessus de son dit poignard, & si l’ennemi venait à te tirer au premier temps, voltant à demi le corps, effaceras la partie gauche hors de l’épée de l’ennemi, qui ne trouvera que l’air, & incontinent après te remettras en garde, en engageant sur la retraite de ton épée, celle …/…
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…/… de l’ennemi pour jouer au sûr. Si l’ennemi vient à passer sur toi de grande vitesse, te voulant saisir ton épée de son poignard, & t’offenser de la sienne, lors portant le pied & la main, l’offenseras entre deux armes, d’une estocade la main en Quarte, en voltant le corps, & effaçant la partie gauche, pour éviter sa promptitude, & s’il est besoin de faire le tour entier, le faut faire pour donner moins de prise à ton ennemi, & plus vite il vient, plus il est aisé d’éviter son choc, moyennant qu’on prenne le temps d’esquiver & volter, aussitôt qu’il se débande pour passer. On pourra aussi pour éviter telles passes, lâcher le pied droit en poussant l’épée en avant, à la partie que l’ennemi découvre, en venant à toi, & là l’offenser d’un coup de pointe, soit il dessous ou dessus son poignard, ainsi …/…
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…/… qu’il te fera jeu en gagnant & saisissant toutefois son épée de ton poignard. Laquelle tenant ne quitteras que ne l’aie mis à quia par tes redoublements que tu feras à temps & à propos, puisque tenant l’épée de l’ennemi tu en est le maître. Ton ennemi voulant passer & saisir ton épée par le dehors avec son poignard, & t’offenser de la sienne, lors portant le pied & la main jusqu’à donner du genou à terre, & t’étendant & dérobant ton épée, & son poignard du même côté qu’il la voudra prendre, lui donneras une estocade sous l’aisselle gauche parant de ton poignard, par le dedans de son épée, Riposte très bonne pour arrêter ceux qui passent à l’étourdie.
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Contre ceux qui campent sur le pied gauche Je dis que le pied gauche, est la retraite des ignorants en cet exercice, même s’il vient à s’y camper au commencement d’un assaut, d’autant que la gentillesse de la Tire, ne se peut faire voir en cette posture, toutefois je ne blâme pas celui qui après avoir tiré quelque temps sur le pied droit, vient à s’y camper, moyennant que subitement en rentrant du pied droit, il vienne à offenser l’ennemi à la partie la plus faible de son corps, que si au contraire on s’y retire de peur, cette retraite étant connue par un tireur entendu, offensera & donnera à son ennemi à la partie qu’il voudra, étant naturel, …/…
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…/… presque à tous ceux qui forment ces postures du pied gauche, d’avancer le poignard, qu’étant plus court que l’épée est aisé à tromper, qui fait que je ne puis approuver de donner la défense du corps à une arme si courte que le poignard. Tellement que s’il arrive qu’on s’y campe, je conseille d’avancer l’épée, la tenant haute, vis à vis de la tête de l’ennemi, pour le tenir toujours en cervelle, & plus éloigné de soi, & ton poignard avancé à l’égal de ton épée, pour que les forces de ton corps soient unies, que ton épée croise sur la pointe de ton poignard pour éviter les coups du dessus. Toutefois le naturel de tous n’est pas semblable, ainsi on se campe, chacun selon la portée de ce qu’il sait, ou qu’il a été montré : & dirais – je qu’il faut être né à ce de quoi on se veut mêler, …/…
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…/… & bien que tous puissent apprendre cet exercice, pourtant, quand il s’agit de l’exécution, le naturel accompagné de la pratique & du courage, surpasse tout savoir. Ainsi je mettrais ici certains coups, & pour, & contre le pied gauche, que j’ai jugé les plus propres & assurés. Premièrement je dis à ceux qui aiment cette posture, qui mérite & veut un homme robuste nerveux & hardi : Qu’il faut appuyer tout le corps sur la jambe droite en pliant le genou d’icelle, & tenant la gauche tendue sans pli au genou, afin d’être plus reculé de l’ennemi, l’épée haute entre Seconde & Quarte, qui croise de la partie droite à la gauche, sur la pointe de ton poignard, la pointe droit au visage de l’ennemi, pour le tenir en crainte, les deux mains également …/…
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…/… avancées, afin que la force de ton corps soit plus unie, & ainsi planté & appuyé sur tes pieds, si ton ennemi t’attend, feindras en avançant ton corps, sans bouger pourtant le pied droit, sinon que tu plieras le genou devant le vouloir offenser à l’œil gauche, lui approchant ton épée le plus près que tu pourras, afin de l’abandonner plus aisément à parer, ce que faisant, entrant du pied droit, l’offenseras en Quarte au dessous de son dit poignard, en saisissant du tien son épée, laquelle tenant s’il la veut dégager, la suivras de ton dit poignard, & l’offenseras dessus ou dessous, ainsi que ta pratique te fera juger le plus aisé. Si ton ennemi, te voyant en cette posture du pied gauche, se bande & avance le poignard, & recule son épée, de peur qu’elle lui soit saisie, …/…
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lors ajustant ton épée au dessous de son dit poignard, ton corps plié & appuyé, ainsi qu’il est dit ci-dessus. Entreras du pied droit d’un pas extraordinaire, & haussant ton épée en Seconde, l’offenseras au dessus de la pointe de son poignard, lui gagnant la sienne du tien. Et s’il s’opiniâtre sur la même posture, baille lui la jambe, en le poussant de la main du poignard, & fais le tomber, chose assez aisée, étant faite à temps, à propos & prestement. Continuant ton ennemi la même posture du poignard avancé, pour se mieux défendre de ton pied gauche, ajuste ton épée vis à vis du poing de son dit poignard, & au dehors d’icelui le tien près de ton épée, afin de le secourir, ² aider à offenser ton ennemi, sans courre risque de recevoir. Ce qui te seras aisé, si haussant en même temps la pointe de ton épée au dessus de son dit …/…
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…/… poignard en la même ligne qu’elle sera, de lui donner une Botte à l’épaule droite, tournant la main en Quarte, & saisissant la sienne par le dedans avec ton poignard, & te retirant porteras ton épée sur la sienne, pour éviter de recevoir sur la furie de ton ennemi. Et s’il t’arrive que ton ennemi approche son épée de ton poignard, pour être plus près pour t’offenser, feins la lui vouloir saisir de ton dit poignard par le dedans, que lui feras changer de Seconde en Quarte, pour pensant t’offenser au dessous de ton dit poignard, duquel tu pareras en bas, et passant du pied en portant la main, l’offenseras de Quarte à l’épaule droite. Le même faux parer du poignard se peut faire étant sur le pied gauche …/…
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…/… par le dehors de l’épée de l’ennemi laquelle dégageant pour t’offenser au dessus pareras. Et portant le pied & la main en Quarte, l’offenseras d’une estocade à l’épaule droite, hormis que si l’ennemi y portait son poignard (comme il arrive à ceux qui sont lents tireurs) en ce cas faudra l’offenser au dessus d’un coup de pointe en Seconde. Etant sur le pied gauche, & ton ennemi t’attendant, partiras du pied droit avec vitesse, en battant deux fois d’icelui le dernier battement, faisant l’entier pas extraordinaire, faisant feinte au dessous du poing du poignard de l’ennemi, lequel parant, l’offenseras au dessus d’un coup d’estocade, la main en Seconde, qui est la feinte au poignard, ainsi vulgairement appelée. Et s’il arrive que ton ennemi tire à même temps que tu partiras, fait une demi …/…
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volte de ton corps pour l’éviter. Et puis te remettant, gagneras son épée de la tienne, pour lui ôter tout moyen de t’offenser. Après l’avoir trompé par cette feinte sur le poignard, feindras la vouloir refaire en avançant ton épée sur son dit poignard, et ouvrant les armes pour obliger l’ennemi à te tirer entre deux, & à parer de son poignard. Ce que faisant, en t’abaissant & courbant du côté gauche, pour effacer la partie que l’ennemi veut offenser, et parant de ton poignard, & entrant du pied & de la main, offenseras l’ennemi en Seconde au dessus de son épée. Et s’il se retire, & pare du poignard, l’offenseras au dessus d’icelui. Et s’il pare encore, l’offenseras au dessous. Car lorsqu’un homme a perdu l’escrime, il ne sait ou il est.
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Pour attaquer la posture du pied gauche Il est ainsi qu’en toute chose il y faut procéder avec toute sorte de sagesse, même en cette action, où les fautes ne peuvent être petites, puisqu’il y va de la vie, & ne peut-on faillir qu’une seule fois. Tellement que trouvant un homme acculé ou campé sur le pied gauche, qui comme un lion grince les dents, & se bande en tout ce qu’il peut d’aller tout au contraire de ce qu’on lui veut faire, qui fait que pour l’attaquer & l’offenser, il y faut aller avec poids & mesure, & s’approcher de lui avec grand jugement montrant en ton visage une hardiesse & espèce d’effronterie pour étonner l’ennemi. Afin …/…
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…/… qu’ayant permis que tu soit entré en mesure, lors avec toute sorte de prestesse tu le puisse offenser à la partie que la pratique de cet exercice te mettra au devant. Toutefois avant que l’attaquer de résolution, le sonderas par quelque mouvement de ton épée que tu lui feras près de la pointe de son poignard, & s’il se défend, te remettant en ta garde accoutumée, en portant le pied & la main, lui feras un cercle avec ton épée à la pointe de son poignard, & l’offenseras d’une estocade entre deux armes, ou à la partie qu’il avancera davantage, en engageant son épée de la tienne. Et s’il s’opiniâtre à la vouloir dégager, la saisiras de ton poignard, pour après l’offenser, ou ton action te conduira plus aisément. Tu peux aussi ajuster ton épée au dehors du poignard de l’ennemi vis à vis du poing gauche en Tierce serrée, …/…
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…/… & ainsi ajustée, portant le pied & la main, l’offenseras à l’œil gauche d’une Botte en Quarte, faisant passer & couler l’épée depuis la garde jusqu’au milieu au dessus de la pointe de son poignard la pointe de ton épée, suivant la ligne de sa justesse, pour porter l’ennemi à parer en dehors, encor qu’on ne tire qu’au dedans. Coup très excellent, étant bien entrepris, d’autant qu’il porte feinte, quoiqu’il soit tout d’un temps fort aisé à donner, étant en mesure, & très malaisé à parer, s’il est fait avec une grande résolution, sans laquelle le tirer est inutile. D’ailleurs il est aisé, en te retirant d’engager l’épée de ton ennemi. Rencontrant un homme sur le pied gauche, ajuste ton épée entre les armes. Et entrant du pied gauche, haussant ton épée, & le poussant au devant la pointe du poignard de l’ennemi, …/…
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…/… pour l’obliger à la vouloir saisir d’icelui l’offenseras au dessus d’une Botte en quinte, en saisissant du tien la sienne. Cette Botte est très bonne, malaisée à parer, mais il faut qu’elle soit entreprise par un homme qui aie le corps bon & souple, & qui soit expert en cet exercice. Et me suis trouvé l’exécuter souvent sur des gens qu’on estimait fort adroits, & qui l’étaient en effet, & qui ne savaient d’ou ce coup leur venait, & en étaient grandement surpris, & bien souvent les portais par terre, toutefois chaque chose à son temps. Si l’ennemi continue cette posture du pied gauche, lui feras un appel entre deux armes, lui tirant en Quarte, en portant le pied & la main d’un pas commun, qui l’obligera à courre à parer, & parant d’entrer sur toi pour t’offenser de Riposte. Ce que faisant, te …/…
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…/… pencheras du côté gauche jusqu’à donner du genou à terre, et parant de ton poignard le dehors de son épée, l’offenseras au dessous d’icelle, d’une Botte en Tierce. Et tout aussitôt te retireras, & engageras l’épée de l’ennemi avec la tienne, tenant le poing bas, & la pointe de l’épée haute, afin d’avoir plus de force, & aussi d’obliger l’ennemi à vouloir dégager, & en dégageant, saisir par le dedans avec son poignard ton épée. Qui fera que te retirant en arrière, en tournant le poing, l’offenseras au dessous d’une Botte en Quarte. Le même appel se fait contre la même posture par le dehors du poignard de l’ennemi, lorsqu’il couvre la partie droite, & fait jeu sur la partie gauche, pour donner occasion de lui tirer, afin de surprendre par Riposte. Tellement qu’au lieu de lui tirer de …/…
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…/… résolution, il faut faire semblant seulement, en portant ton épée sur son poignard jusqu’à la lui laisser prendre. Laquelle dérobant, & t’abaissant jusqu’à terre en parant de ton poignard le dehors de l’épée de l’ennemi, l’offenseras au dessous d’icelle, la main en Quarte ou Tierce, ainsi qu’il se rencontrera mieux à ta commodité. Et dégageras l’épée, ainsi qu’il est dit ci-dessus & l’offenseras tout autant de fois que ton jugement & son action t’en feront naître le sujet. Que si la main de l’épée se lasse, arrête toi, en lui tenant son épée engagée de la tienne. Si l’ennemi ainsi campé sur le pied gauche te laisse approcher dans la mesure ajusteras ton épée au dedans de son poignard. Et de là partant avec une grande prestesse, portant le pied & la main, l’offenseras d’un temps sous l’aisselle gauche, faisant couler ton épée …/…
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…/… le long de son poignard & de son bras, & t’abaissant fort bas. Et te retireras aussi avec grande prestesse, en parant de ton épée, comme chose très nécessaire de faire tout autant de fois qu’elle sera avancée, t’en défendant dehors, dedans, bref ou la colère de l’ennemi le pourra porter à te tirer, piqué d’avoir reçu. On peut faire aussi contre le pied gauche une feint au dehors du poignard de l’ennemi, la main en Seconde, comme si on lui voulait donner à l’œil gauche, et tournant le poing de Seconde en Quarte, l’offenser au dessous de son poignard, lorsqu’il en voudra saisir ton épée, à quoi ta feinte le portera, te recommandant toute sorte de prestesse, de peur du même temps qui ne se peut éviter que par l’esquive. La feinte ordinaire se peut aussi faire contre cette même posture, mais je ne la …/…
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…/… conseille à personne, qui n’aie la main & le pied bien vite. D’autant que tout coup qui va au fort des armes de l’ennemi, bien qu’on l’en offense, est dangereux de faire recevoir un contretemps. Ce que je n’ai jamais approuvé d’hasarder de donner pour recevoir, même en ces postures du pied gauche où on ne se campe jamais que pour repartir, & non pour attaquer. Et conseille à chacun qui se trouvera avoir à faire à telles gens de se servir d’appels, pour les faire débander, & les prendre au pied levé par Riposte ou esquive de corps en quartant. Il se pourrait mettre ici d’autres temps, tant contre l’une que contre l’autre garde. Mais y ayant mis les meilleures & plus nécessaires, il m’a semblé à propos de ne remplir mon livre de mouvements, & temps malaisés à entendre, pour être malaisé de bien dépeindre les mouvements divers, desquels on fait agir le corps en tirant, …/…
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…/… remettant à un plus grand loisir d’en écrire davantage, si ce peu contente les lecteurs. CONCLUSION Pour l’exécution de tout le jeu ci-dessus dépeint sont nécessaires trois choses : Un grand jugement pour s’ajuster & mettre en mesure, un grand courage pour entreprendre chaque coup en temps & lieu, et une grande vitesse en démarchant pour l’exécuter. Le jugement sert à disposer & placer le corps au lieu où il faut qu’on se mette, & de quel côté on doit ajuster la pointe de son épée, pour de là avec courage & vitesse exécuter le coup qu’on aura desseigné & jugé le plus aisé sur l’ennemi, & à la partie la plus proche, & la plus découverte de son corps, sans autre discours que la résolution de donner, puisqu’on est en mesure, hors de laquelle on ne doit rien …/…
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…/… entreprendre. Le jugement sert aussi à aller à l’attaque de l’épée de l’ennemi, & aux contregardes. Comme quand l’ennemi porte son épée haute, ou basse, reculée ou avancée porter la tienne au dedans, ou au dehors de celle de l’ennemi, pour le contraindre de reculer, ou avancer. Et lors prendre les temps qui te sont ci-dessus dépeints, & l’offenser au lieu, où son action & mouvement te conduira. Sert aussi quand l’ennemi porte le poignard avancé, de le sonder par quelque mouvement de ton épée, s’il en pare ou non. S’il en pare, lui feras tel des coups dedans, dessus, dessous qui te sont ici décrits, & les plus propres pour toi. Et si au lieu de parer il te tire, lui feras des temps résolus de donner, ou des appels, & l’offenseras à la partie qu’il avancera. Bref tu feras ce que la pratique te mettra le plutôt au devant. ADIEU. Garde les yeux.
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SONNET Il y a des esprits à qui rien ne peut rire, Et qui rient de tout :tout leur est imparfait Leur imperfection est celle qui leur avait fait Faire si peu d’état de ce que l’on admire. Il y a des esprits à qui l’art de la Tire Qui tire mon esprit admirant son effet : N’effectue que mal : & le mal il défait En défaisant l’effet que l’impie conspire Je conspire tirant contre le seul effort Du fort malicieux & de l’obscure mort : On meurt obscurément quand on ne sait pas vivre. Vivre comme DANCIE en discret & humain Et aux seuls inhumains, tels que marque son livre, Livre grand s’il marquait son cœur avec sa main
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Autre en liant. Tu ne peux exprimer ton cœur avec la main Ta main a cependant de ton cœur la prestesse Prestement il la meut & émeut ta souplesse, Souplesse, dont tu es ô DANCIE tout plein Pleinement tu ne peux exprimer ton dessein Le dessein de ton cœur surpasse ton adresse Ton adresse la mort & la mort s’y adresse Te dressant tu lui rend le stratagème vain En vain donc la mort , DANCIE te querelle, Et le querelleux temps en vain s’arme pour elle, Ni elle, ni le temps n’ont qu’un coup, tu le sais Tu le sais détourner, & non pas ici mettre Mettant pour les tireurs tous les souples essais Cet essai gît au cœur, non à la main du Maître. Par le sieur DE LATOUR.
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EXERCICE DE L’EPEE SEULE & bonne méthode pour s’en servir Avant de dépeindre ici les divers coups, gestes & mouvements qui se peuvent faire, exercer, & exécuter de l’épée seule (seule s’entend sans poignard) je dirais, que c’est la compagne muette de l’homme, compagne que celui qui fait profession des armes ne doit jamais quitter. Les nobles mêmes ne portent jamais de poignard, d’autant que porter un poignard à son côté, appartient plutôt à un vilain & sanguinaire, qu’à un gentilhomme, qui ne s’en sert sinon aux duels assignés. Mais de l’épée seule ils s’en parent & accompagnent aux …/…
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meilleures compagnies & assemblées les plus relevées tant pour montrer sa grandeur que pour en repousser l’ennemi, s’il osait s’affronter à lui. Ainsi je dis que la plus belle plume d’un Grand, c’est l’épée, sans laquelle il ne peut être distingué d’un financier, marchand ou bourgeois, que l’injure du temps permet d’être aussi bien habillé que lui. Mais l’épée seule seulement le fait connaître seul noble entre mille roturiers aussi bien habillés que lui. Si donc l’épée marque la noblesse, pourquoi le gentilhomme ne sera-t-il curieux d’en apprendre à tirer, pour s’en savoir aider & défendre au besoin contre qui que ce soit, & quand bien ne serait que pour honorer l’épée, puisque l’épée l’honore lui. Or il y en a beaucoup qui portent …/…
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…/… une épée au côté, qui ne savent pourquoi ils la portent, soient-ils gentilshommes ou autres, d’autant qu’ils méprisent d’apprendre à s’en savoir servir, & ainsi ne le sachant pas, la mettent si souvent au vent, qu’elle sent aussitôt le vent que le musc. Voilà pourquoi j’ai voulu blâmer le mépris qu’on fait de l’excellence & grandeur de l’épée : car les rois ne sont pas craints tant à cause de leurs chevaux (ainsi que veulent dire les écuyers) que pour raison de leur épée. Un homme & un cheval ne sont qu’un homme & un cheval, mais donnez lui l’épée & vous ferez un brave soldat. Estimant donc l’épée seule si noble, que le sujet le mérite, j’en ai voulu décrire ici au plus près ce qui m’en semble meilleur & ce que je trouve le plus sûr pour la conservation …/…
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…/… de la vie de l’homme, afin que si je ne profite rien à personne, pour n’être pas assez expérimenté en cette science, on dise au moins que j’ai eu envie de profiter à autrui : car c’est mon seul but, & non de m’acquérir avec le papier la gloire, que j’ai toujours plus aimé poursuivre & conquérir avec l’épée. L’EPEE SEULE n’a qu’une ligne droite, de laquelle ligne droite tous les divers temps qui te sont ci-dessous dépeints, doivent sortir bien à point, & sans confusion ou embarras. Te défendant de te hâter, sinon lorsqu’il en est besoin, afin de prendre le temps au pied levé : et ne t’arrêter aussi, sinon lorsque tu sentiras n’avoir pas les pieds bien disposés à partir. En un mot, soit prudent & grave en toutes tes actions, desquelles tu banniras toute démonstration de crainte, à ce que ton ennemi …/…
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…/… demeure toujours dans l’appréhension de tes armes, qui doivent être en la posture que je m’en vais te mettre ici. S’il arrive qu’il faille disputer ta vie à l’épée seule, contre un homme adroit l’ayant à la main, et démarchant du pied gauche, haussant & avançant ton épée vers ton ennemi la main gauche près de la tête, afin de tenir le corps ferme, t’approcheras à pas lents & graves jusqu’à être en mesure. Et lors appuyant tout ton corps sur la jambe gauche, afin de rendre la partie droite disposée & libre d’avancer ou reculer si besoin est. Et lorsque ton ennemi t’en fera naître le sujet, apporteras ton épée, la main en Seconde, faisant suivre tant soit peu le pied droit, d’autant qu’il faut que chaque mouvement de la main soit accompagné du pied, contre celle de l’ennemi par le dehors, jusqu’à la toucher, qui l’obligera à la …/…
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…/… dégager, pour te vouloir offenser par le dedans de la tienne, ce que faisant, prenant le temps au pied levé, & poussant ton épée de Seconde en Quarte, l’offenseras à l’épaule droite, te recommandant au reste de tenir ton épée juste à la main, qu’encore que ton ennemi vienne à changer quand tu approcheras de la sienne, que tu ne t’écarte en aucune façon, mais tu suive ta ligne droite, qui doit viser à l’épaule seulement. Et courre plutôt à donner qu’à parer : assez pare celui qui donne. La plus grande difficulté qu’il y aie à la tire, c’est de s’empêcher de recevoir ; même quand on a donné à un homme, qui piqué d’avoir reçu, vient avec toute sorte de vitesse, & sans règle. Voilà pourquoi en retirant & le pied, & le pli du genou droit, & rapportant & appuyant ton corps sur …/…
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…/… la jambe gauche, engageras l’épée de l’ennemi, qui le contraindra de reculer ou de changer en avançant, ne pouvant faire que l’une ou l’autre de ces deux choses. S’il change en avançant, pour t’offenser au dessus de ton épée, poussant la tienne en la ligne que l’auras appuyée sur la sienne, & portant le pied droit d’un pas extraordinaire, lui donneras une Botte, la main en Seconde, à l’épaule droite. Et si au contraire un homme recule après avoir reçu, comme il arrive aux moins hardis de reculer, plutôt qu’avancer, en ce cas il ne te blesse pas. Et prenant le temps qu’il reculera, le suivras en lui faisant une feinte à la tête par le dehors de l’épée, en battant du pied au premier mouvement. Et puis portant le pied & la main, l’offenseras d’une Botte, la main en Quarte, sous son épée : faisant pourtant escourre le pied …/…
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…/… gauche, & suivre le droit, comme il faut faire à toute action que l’ennemi fera en reculant, s’il s’éloigne plus que de mesure. D’autant que tirer hors de mesure, ce serait tirer en vain, & prendre une peine inutile. Si ton ennemi forme une posture de Quarte, & que la pointe de son épée couvre plus le dehors que le dedans de son corps, lors entrant en mesure attaqueras de ton épée celle de l’ennemi par le dedans (qui s’appelle contregarde). Et si ton ennemi prend le temps, lorsque tu attaqueras son épée, & dégageant de dedans au dessus de la tienne pour t’offenser, lors portant le pied & la main, & poussant en avant ton épée en même ligne qu’elle sera, offenseras l’ennemi à l’épaule droite d’un coup de Seconde, en te penchant sur le côté gauche, pour effacer la partie droite du chemin de l’épée de l’ennemi …/…
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…/… t’avertissant que tout autant de fois que la main droite agit en avant, tout autant de fois il faut que la main gauche agisse en arrière, & en différente façons : comme si tu tire la main en Quarte, il faut que la main gauche en reculant se hausse. Et lorsque tu tireras en Seconde, il faut que la main gauche reculant, aille bas étendue le long de la cuisse & de la jambe gauche. Et ainsi elle sert de contrepoids au corps de l’homme qui tire, & lorsqu’on a tiré, & en se retirant, & parant, il la faut ramener toujours & à tout temps près de l’oreille gauche, pour tenir le corps bien appuyé, ferme & disposé, pour agir en avant ou arrière. Bien que la tire soit une chose très périlleuse & dangereuse, si est-ce pourtant que l’homme accort & rusé fait semblant de ne l’appréhender point, lorsqu’il y est exposé. Et ainsi sous cette …/…
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…/… bonne mine attaque son ennemi avec effronterie, pour lui ôter le moyen de pouvoir lire en son visage nulle sorte de peur, quand bien même il aurait peur : qui fait qu’avec hardiesse il faut attaquer l’épée de ton ennemi par le dehors. Cette attaque hardie le presse de tirer, & en tirant changer de dedans dehors. Ce que faisant, entrant du pied & de la main battant de ton épée la sienne que tu tiendras jusqu’à ce qu’aie pris avec ta main gauche la garde de son épée, afin que jouant au sûr, tu l’offense après, sans courir de risque là ou tu voudras, des parties de son corps découvertes. Toute entreprise doit être hardie, même celle de vouloir offenser d’une épée, celui qui a une épée comme nous. Toutefois à tirer le plus fin, le plus prompt, le plus hardi trompe son compagnon : ainsi donc voulant …/…
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…/… tromper notre compagnon, & l’offenser d’une épée, quoiqu’il aie une épée je dis qu’il faut y aller avec toute sorte de finesse de promptitude, & hardiesse qui me fera dire qu’étant en mesure, l’épée au dehors de la sienne, faisant d’un tour de poing revenir la tienne au dedans en t’ouvrant, pour l’obliger en t’approchant de lui, de prendre le temps de te tirer : ce que faisant t’abaisseras jusque à donner du genou à terre, & l’offenseras d’une Botte sous son épée, la main en Seconde, que nous appellons la passe dessous. Coup
inventé selon CAMILLO AGRIPPA Italien, qui a écrit en sa langue de cet exercice, plus pour montrer qu’il était & géométrien, & philosophe, que non grand Tireur : bien qu’il aie fait peindre des hommes en postures de Tireurs dans son dit livre. Chose inutile, d’autant qu’il faudrait autant de postures en un livre, qu’il y a …/…
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…/… de mots. Voyant (se) battre deux coqs qui se haussant tous deux à la fois en se battant, l’un passe au dessous de l’autre. & ainsi de là est sorti le passé dessous. Mais je dirais en italien, que se non è vero è ben trovato & crois que c’est une bourde. Te remettant en mesure ajusteras ton épée au dehors de celle de l’ennemi, & tournant la main de Seconde en Quarte, feindra de l’offenser par le dedans de son épée à l’œil droit, ou tu approcheras ton épée le plus qu’il te sera possible, afin d’obliger mieux ton ennemi à parer. Ce que faisant, entrant du pied de derrière devant, l’offenseras en redoublant ton tour de poing de Quarte en Seconde, entre le col & l’épaule droite, tenant le poing de l’épée bas, & la pointe haute, pour disposer mieux ton épée à offenser l’ennemi, & être moins sujet à recevoir. T’avertissant de te repencher, & de porter …/…
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…/… le corps, le plus qu’il te sera possible du côté gauche, en exécutant ce coup cidessus, qui est très malaisé à éviter, lorsqu’il est entrepris avec hardiesse & prestesse. Il ne faut pas faire toujours un seul coup contre ton ennemi, quand bien même on le pourrait exécuter, soit-il, ou pour être plus propre à notre humeur, ou pour être le plus aisé à le lui donner : mais bien en pratiquer plusieurs, à fin d’adextrer le corps à toutes sortes de mouvements, & le rendre par ce moyen plus libre d’agir à tous temps que celui contre qui il tirera lui fera en mesure. Tellement qu’arrivant que ton ennemi se vienne mettre en quelque posture que ce soit devant toi, quand même ce serait un peu hors de mesure. Lors feignant lui donner sous le poing de l’épée, par un mouvement que tu feras de la tienne en portant un …/…
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…/… peu le pied droit. Et soit qu’il se débande pour parer, ou non, entrant du pied gauche d’un pas extraordinaire le plus à côté que tu pourras le faire hors de son épée pour éviter le danger d’icelle, que tu courrais en allant l’offenser d’une Botte en Seconde à l’épaule droite. Or il est grandement dangereux à l’épée seule de recevoir en se retirant, quand on a passé. Voilà pourquoi je défend très expressément de se retirer, ainsi entends qu’on saisisse de la main gauche, la garde de l’épée de l’ennemi pour lui ôter le moyen de reprendre son épée de l’autre main. Et après la lui avoir saisie, l’offenser de la tienne en son corps jusqu’à ce qu’il se rende. Tenant pourtant tout ton corps tant reculé & éloigné de celui de ton ennemi que se pourra, & ton épée la main basse, la pointe droit à son visage …/…
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…/… D’autant que tenant la main de l’épée basse, & la pointe haute, jamais l’épée ne te pèsera à la main, & n’en battras pas la terre en parant, comme font la plupart. Ainsi la tenant en cette façon, fera un merveilleux effet, c’est de couvrir tout le corps, depuis le genou jusqu’au sommet de la tête : outre que tu tiendras ton ennemi en crainte de son visage, te voyant ton épée ainsi haute. Et ne faut pas douter que les postures retiennent ou donnent moyen à l’ennemi de s’approcher, ou ne s’approcher de nous & c’est selon qu’elles sont bien ou mal formées. Il dépend de la prudence d’un excellent tireur d’aller à la contregarde en serrant l’épée de l’ennemi, par l’avoisinnement de la sienne, soit-il dedans ou dehors, ainsi qu’il t’en donnera sujet. Si ton ennemi tient son épée haute, fais lui une feinte par le dehors d’icelle, …/…
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…/… qui l’obligera à parer : mais soit qu’il pare ou non, à tout temps résolu il faut aller en avant. Entre du pied gauche, & tournant la pointe de ton EPEE sous le coude de la main de l’EPEE de l’ennemi, & te penchant jusqu’à terre sur ta partie gauche, l’offenseras d’une Botte en Seconde sous l’aisselle droite t’avertissant toujours d’agir avec toute sorte de prestesse, qui est une des bonnes parties de la Tire. Ajustant ton épée au dessous de celle de l’ennemi par un mouvement accort & fin, viendras en portant le pied & la main avec toute sorte de vitesse, en dégageant ton épée de dedans au dehors de celle de l’ennemi, par le moyen d’un tour de poing. Et battant du tranchant de dessus l’épée de ton ennemi au dehors de la tienne, agiras la main en Quarte & l’offenseras d’une estocade à l’épaule droite. D’autant que donnant à l’épaule droite, ou au dessus des mamelles de notre ennemi : Nous estimons ces Bottes sans Riposte, …/…
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…/… parce qu’outre qu’on arrête la force de l’ennemi, on empêche le mouvement de son EPEE. Qui me fait dire que la chose du monde que doit le plus rechercher celui qui se mêle d’apprendre cet exercice, c’est la justesse. Or justesse s’appelle proprement donner justement là ou on vise. Et bien que la plupart ne peuvent comprendre qu’est-ce que justesse à tirer, pour n’avoir pas assez pratiqué cet exercice, si est-il très nécessaire de le savoir : Car si un bon tireur a à faire à un autre bon tireur, & vienne à approcher son épée de celle de l’ennemi, ou dehors, ou dedans, selon qu’il le trouvera en posture : Il faut qu’il fasse cette approche d’EPEE si accortement, que si l’ennemi venait à tirer en s’approchant, qu’à même temps il achève de pousser son EPEE au corps de l’ennemi, pour l’arrêter en son dessein. Que si au contraire il permet l’approche, lors …/…
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… /… ayant cet avantage d’avoir gagné son EPEE, tu lui fasse ce que tu jugeras le plus aisé, selon la pratique & exercice que tu auras de cette science. Il semble bien que quelquefois celui qui a appris cette science d’un excellent Maître, devrait mépriser certains coups qui sont plutôt engendrés du naturel, que de l’artifice. Mais je trouve à propos de se servir de tous coups & mouvements en se battant, desquels nous pouvons acquérir sur notre ennemi l’avantage que l’honneur du combat nous permet d’acquérir. Voilà pourquoi je mettrais ici le coup de l’ignorant, qui se peut accommoder avec dextérité, à un plus savant de cet exercice. C’est qu’ayant ton EPEE assez voisine de celle de l’ennemi, tu apportes ta main gauche sur icelle, & battant de la tienne celle de l’ennemi par le dehors, & entrant du pied gauche, & …/…
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…/… te penchant sur ce même côté, tu l’offense d’une ou plusieurs Bottes à son épaule droite. Estimant tout coup bon, moyennant qu’on l’exécute. L’ennemi tant soit peu accort & rusé qu’il soit en cet exercice se voyant une fois trompé par quelque mouvement de cette science bande son esprit, son corps, & ses armes, pour éviter une autre fois cette tromperie. Voilà pourquoi il faut lui faire semblant de lui vouloir exécuter le même coup, par un faux semblant de battre son EPEE avec la tienne par le dehors, qui l’obligera à dégager de dehors dedans, en te voulant offenser d’une Botte en Quarte : qui fera que prenant le temps de son dégagement, tu l’offenseras d’une Botte en Quarte à l’épaule droite, voltant à demi ton corps, pour éviter le (même coups). Estimant la science de la Tire inutile, si …/…
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…/… on la dépouille de l’esquivation du corps, qui est la finesse des finesses, pour donner sans recevoir. S’il arrive que ton ennemi te crie plus adroit que lui, il entre en crainte & appréhension de toi, ou bien en une furie désespérée, action bien plus dangereuse que la crainte. D’autant que venant de grande furie, & sans aucun mouvement réglé, selon la méthode de cette science, il fait bien souvent perdre la Tramontane aux plus adroits (qu’on appelle perdre l’escrime) A telles gens j’approuve grandement une résolution judicieuse : & soudain qu’on les cognait à port d’EPEE, leur tirer hardiment & de toute ta force, afin de leur donner, ou les arrêter : te défendant de ne reculer jamais à L’EPEE seule, lorsque ton ennemi vient à toi avec résolution de t’offenser : d’autant que reculant, toujours ton corps demeurerait …/…
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…/… exposé & sujet à l’EPEE de l’ennemi. Mais au contraire t’approchant tu fais deux bonnes actions, l’une de témoigner par ton approchement le peu de crainte que tu as de ton ennemi, l’autre que t’approchant, tu rend l’EPEE de ton ennemi hors de moyen de te pouvoir offenser, si ce n’est qu’il retire la main. Ce que faisant il ne te blesse pas, comme j’ai dit ailleurs. Un homme furieux bien souvent bat de son EPEE celle de l’ennemi, s’il peut la rencontrer, sinon le mouvement & branle de son corps le fait avancer jusque à venir prendre au collet : que si cela t’arrive, ne recule point, ainsi au contraire t’approchant de lui, & le coquant de ton épaule droite, changeant ton EPEE de la main droite à la gauche, en la prenant par le milieu de la lame, lui donneras un coup de pointe dans le ventre. Et puis le poussant …/…
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…/… encore lui bailleras la jambe au pied qu’il aura devant, & le jetteras par terre, chose assez aisée, étant faite à propos. Si l’ennemi attend à l’épée seule, & te forme une garde de (judice), à cela faut entrer du pied gauche, approchant ton EPEE de la sienne par le dehors, qui l’obligera à changer : Ce que faisant, entrant encore du pied droit l’offensera d’une estocade à l’épaule droite, en tournant la main de Seconde en Quarte. Et voltant tout ton corps d’un tour entier (ce qui s’appelle la Quarte du pied gauche) te remettras incontinent en ta Posture accoutumée, pour t’empêcher d’être offensé, en offensant, si besoin est ton ennemi, à chas- temps qu’il sera en mesure. L’ennemi venant de grande furie à toi, en battant ou voulant battre ton …/…
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…/… EPEE au dehors : lors avançant le pied droit & la main, & donnant du genou gauche à terre, en tournant la main en Quarte, & portant la main gauche en avant pour secourir ton EPEE, l’offenseras dans le ventre d’une Botte. Et si le mouvement était si violent qu’il ne se peut retenir, & que la tête lui pesait trop, en ce cas repousse le avec la main gauche, à fin qu’il ne te saisisse ou bien te relevant, en le poussant baille lui la jambe, & l’envoie à terre. Mais il faut noter que le plus près de terre n’est que le meilleur pour faire tomber. S’il t’arrive que l’ennemi t’abandonne à parer par quelque faux mouvement, en telle façon que tu ne puisse remettre ton épée en son lieu : En ce cas l’ennemi venant à prendre le temps sur toi, & à passer, pour t’offenser de dessous au dessus de ton épée, lors voltant …/…
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…/… à demi le corps, & tournant ton épée vers l’ennemi, de Tierce en Quarte, l’offenseras à la tête, & l’épée de l’ennemi passera entre ta tête & ta main de l’épée. Et te retirant & remettant en garde, lui donneras un coup d’un revers de ton épée sur les jambes. On peut aussi étant abandonné par un faux mouvement de son ennemi, parer du fort de l’épée, & par le dehors d’icelle, en tournant aussi à demi le corps, pour éviter de n’être pas blessé à la tête : toutefois j’approuve fort de donner plutôt que de parer, bien que souvent les plus adroits y sont surpris. Et peut on en parant en la susdite façon décharger un coup de tranchant sur la tête de l’ennemi : t’avertissant en le faisant, de tenir toujours ton épée proche de celle de l’ennemi, de peur de quelque coup de pointe, beaucoup plus dangereux que les coups …/…
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…/… de tranchant : Car il n’y a rien si assuré qu’un tireur levant la main pour offenser un autre d’un coup de tranchant cela l’oblige à s’approcher de lui, & lui tirer, & donner de la pointe dans le ventre. Ainsi je n’approuve guère les estramaçons, sinon que parmi les Suisses, soit à cause de la grandeur de leur corps, ou de la grandeur de leurs épées avec lesquelles ils en peuvent lever une belle pièce. Trouvant ton ennemi l’épée fort avancée, la lui attaqueras par le dehors, en avançant ta pointe haute, jusqu’à porter le fort de ton sur le faible de la sienne, & t’ouvrant & montrant tout l’estomac, à fin de l’obliger à caver, pour t’offenser d’un coup à l’estomac. Ce que voulant faire, suivras de ton EPEE celle de l’ennemi, sans la quitter jusqu’à ce que sera entré du pied gauche, & saisissant du bras gauche …/…
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…/… L’EPEE de l’ennemi le plus près de la garde que tu pourras. Et ainsi pliée avec ton bras gauche, la lui arracheras de la main, par un effort que tu feras en te retirant en arrière, & lui portant, & l’offensant de la tienne droit au visage, de peur qu’il ne te saute au collet pour garder sa vie, ou pour t’ôter la tienne. Coup très assuré, entrepris par un Tireur qui aie la main bonne : Car si lorsqu’on attaquera L’EPEE, l’ennemi ne tire pas mais au contraire recule, il ne fait nul mal, & un rusé Tireur peut prendre des temps sur le reculement, principalement quand la peur le fait faire. S’il tire (qui est ce que ce coup demande) il ne faut pas douter qu’on ne puisse gagner L’EPEE, y allant avec vitesse & jugement, & la résolution requise en telles affaires. Cela arrivant qu’on t’aie saisi ton EPEE, ne dispute pas à la vouloir retirer, …/…
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…/… d’autant que ton ennemi te pourrait offenser à la mort pendant cette Contraste : Mais au lieu de disputer, saute lui au collet, le saisissant de la main gauche, & avec ta droite tâche de lui ôter la sienne : ou bien en allant à lui, baille lui la jambe, & le porte par terre, & n’entre nullement en considération qu’il soit plus fort que toi. Que s’il l’est pour le moins avant de le quitter, il te donnera la vie. Et vaut plus la demander, que la perdre follement, sans se pouvoir défendre. La peur de mourir fait faire bien souvent des choses étranges. On dit que ceux qui se noient, prendraient une barre de fer ardente, pour éviter ce genre de mort. Aussi la plupart de ceux qui se battent en duel assigné, s’attachent à prendre les épées les plus tranchants avec la main toute nue, aimant mieux perdre une main, que tout le …/…
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…/… corps. D’où arrive que souvent des ignorants & maladroits en cet exercice, ont tué des gens adroits, braves & vaillants, faute de savoir toutes les ruses de la Tire, prenant ainsi l’épée avec la main gauche. Qui me fait mettre ici le moyen d’éviter dorénavant ce danger, qui est, que cela arrivant, il faut soudainement jetter la garde de ton épée sur celle de l’ennemi, pour éviter le coup de la sienne, & incontinent lui prendre de ta main droite, le pommeau de la sienne, & de ta main gauche, la garde : & ainsi la lui arracher de la main qui sera assez aisé, fait avec prestesse : D’autant que l’ennemi, outre qu’il sera empêché du jet de ton EPEE, qu’il tiens par la pointe, & la lame & la garde de lui croisant sur la sienne, pour la lui rendre inutile, & hors de moyen de te pouvoir offenser, il sera aussi surpris par la promptitude de ton action : laquelle étant faite avec grand jugement …/…
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…/… & prestesse, te peut apporter de l’avantage sur l’ennemi, quoiqu’il aie saisi ton EPEE. S’il arrive aussi que ton ennemi Vienne à te gagner le dedans de ton épée, par un changement qu’il aura fait de dehors dedans, qui ôte le moyen de prendre le temps. Et s’étant tellement approché de toi, qu’il lui semble que tu n’aie aucun moyen d’éviter le danger duquel son épée te menace, étant ainsi fort avant sur la tienne : A cela ne faut nullement reculer, ainsi au contraire te penchant sur le côté gauche, & donnant du genou à terre, dégageras ton épée de dessous celle de ton ennemi, sans la reculer en aucune manière, ainsi la feras passer sous le poing de l’épée de l’ennemi, & apportant la main gauche près de la garde, pour avoir plus de force à soutenir le choc de l’ennemi. Ce qu’ayant fait, l’offenseras après …/…
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…/… dessus, dessous, où ses mouvements te conduiront plus aisément, n’ayant rien si penaud & étonné, qu’un homme qui est surpris en un dessein qu’il pensait assuré. Mais aussi il ne lui faut pas donner temps de se reconnaître, ainsi le faut frapper au pied levé, & au moindre mouvement qu’il fera pour en venir à bout. Je laisse à mettre ici beaucoup d’autres mouvements qui se font, ou peuvent se faire à L’EPEE seule, pour les juger moins nécessaires. Espérant néanmoins d’en écrire davantage pour contenter les curieux. Toutes sortes d’Arts veulent, quand nous les avons appris de quelque excellent Maître, être pratiqué souvent, mêmement celui-ci, auquel il faut tenir le corps disposé par exercice, pour agir en avant ou arrière, avec …/…
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…/… toute sorte de vitesse, de courage, & de jugement, lorsqu’il est besoin. Et qu’il faut qu’on prenne le temps sur le moindre mouvement que l’ennemi fasse en mesure, sans aucunement marchander : de peur que l’ennemi, qui a la raison & les armes comme nous, pour aller au contraire de tout ce que nous voulons faire, ne prenne avantage de plus grande résolution sur nous. Toute cette connaissance dépend d’avoir été bien montrée, & d’avoir pratiqué souvent cette science avec des gens qui l’entendent peu ou prou : car de savoir une chose, & ne la pratiquer pas, c’est un trésor caché qui se rouille : Aussi le corps discontinuant l’exercice, s’engourdit & ralentis. En deux mots, la science & la pratique rendent les hommes maîtres. FIN
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