Incompiuto Emilia

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Renan Schneider Rapport de Projet de Fin d’Études Soutenance — Juillet. 14   Dir. d’Études. R.Rousseau, E.Essaian. DE4. Positionnement de fin d’étude École Nationale Supérieure d’Architecture Paris Val de Seine

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12.0514 120614

Remerciements Je tiens tout d’abord remercier mes professeurs, Romain Rousseau et Elisabeth Essaian, qui m’ont guidé et soutenu pendant ce semestre. Je remercie également Michael Halter et Alexiane Rossi et pour leur implication et leurs conseils. Je tiens également à remercier ma famille et mes amis pour leur soutien, et leur aide : Léa Bailleux, Éléonora Gigantesco, Celia Lebarbey, Patxi Gardera, Roméo Sanseau Dimitri Dupuis, Benoit Felici


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Tito Mouraz Open space office 2014




— ce rapport de projet de fin d’étude a pour objet d’expliciter la démarche de conception à laquelle répond le projet. il est un élément indispensable à la compréhension du processus et de la méthode mise en place


Avant-propos Ce rapport de présentation de projet de fin d’étude est l’occasion de faire le point sur l’éthique, le niveau d’intervention conceptuelle mise en place pour le projet sur la base des acquis de mes années d’études et de présenter la problématique à laquelle répond le projet. Il est donc bien plus que le témoignage d’un processus de conception, c’est un préambule indispensable à la compréhension de la démarche que j’ai entreprise et qui m’a permis d’aboutir à une méthode de projet intégré à un urbain redéfini. Le cadre de mon sujet se situe dans la continuité d’un début de travail de réflexion mené autour de questions mises en relief grâce au mémoire de licence. Il s’agissait d’interroger les différents tempo que mobilise la conception architecturale. Il m’a permis d’appréhender les œuvres elles mêmes au regard de certains paradoxes temporels (vécu/ conçu/perdu/reconstruit). Le contexte de crise globale dans lequel nous vivons aujourd’hui, me pousse à m’interroger sur l’expérience temporelle qu’une société peut avoir avec son passé et son futur. Le temps semble aujourd’hui s’accélérer, et tout dévorer, comme hier Chronos ses enfants, l’accélération technique, au travail, sur les écrans, des transports, de la consommation, et du développement de nos villes, semble précipiter le changement social – rien ne semble lui rester. Comment répondre à cette accélération , et cette incertitude ? Le processus qui implique le développement de nos villes a toujours visé à l’évolution de ces dernières plutôt qu’à leur conservation, en se fondant sur des éléments clés

capables de transcender le temps. Sur quels éléments les villes peuvent t-elle s’appuyer face ces mutations ? Comment la ville peut t-elle grandir avec la conscience de son passé, et regarder avec confiance vers l’avenir et ses changements ? Comment à travers ses mutations réintégrer les temps de la ville à son aménagement ? L’expérience de concours m’intéressait. Elle était l’occasion de répondre à des enjeux « réels », et ainsi me donner la possibilité de développer une réflexion – d’aller plus loin, autour d’un sujet donné. Elle offrait pour moi cet espace d’exploration. De ce point de vue, il était l’occasion d’une recherche concrète autour d’un sujet, tout en étant confronté à la réponse d’autres candidats – de s’inscrire dans un débat. Beaucoup de questions attisaient ma curiosité autour de cette expérience. Sera t-elle l’occasion de rebondir sur un autre concours ? Ou au contraire de développer les thématiques énoncées ? Ou de les remettre en question ? Le choix du concours Post Quake Visions en Italie, dans la région de Bologne est venu par la suite assez naturellement. Travailler en Italie, dans un fort contexte historique, en crise, en situation post sismique, avec un besoin de renouvellement urbain, représentait des enjeux réels et concrets auxquels il m’intéressait de répondre à travers un questionnement liés au temps. Comment rendre la ville résiliente après cette catastrophe ? La ville évolue en permanence, elle se restructure le plus souvent par imposition de nouvelles infrastructures. Dans un contexte de crise économique, l’organisation de ce concours fut motivé par un investissement permettant la reconstruction de la commune touchée. Comment la ville peut t-elle se reconstruire, se redévelopper avec la conscience de son passé, et


regarder avec confiance vers l’avenir et ses changements ? Comment intégrer ces temps de la ville à son aménagement ? Comment la reposionner et recevoir une acceptation collective ? Dans le domaine de l’architecture, plus que dans d’autres disciplines, ce qui est passé appartient à l’expérience du présent, auquel on a le devoir éthique et professionnel de se confronter, dans le but de préserver les objectifs d’unité et d’équilibre qui ont toujours caractérisé une manière de faire de l’architecture qui est avant tout habitude. Par conséquent, cette recherche pendant ces neufs mois, s’est structurée en trois parties : Dans un premier temps, la participation au concours Post Quake Visions : son énoncé, ses enjeux, ses problématiques — qui m’ont amené à des réflexes acquis lors de mon parcours et à la formulation d’une réponse dans un temps très court. Cette réponse donnée était plus une proposition d’attitude, face à l’idée de construction d’un réel projet. Nous verrons ensuite les réponses primées par le jury avec les éléments qui ont retenu mon attention. Car si la formule du concours est déjà reconnue comme une situation favorisant la recherche et l’expérimentation elle me permit aussi de participer indirectement dans son ensemble à la construction d’un espace public d’énonciation et de débat sur les valeurs et les orientations d’une société à l’œuvre dans le projet d’architecture. La publication des résultats, et une visite du site m’ont poussé à remettre en question cette consultation et à prendre une nouvelle position : formuler dans le temps une approche plus large, en sortant du cadre restrictif de la réponse demandée.

Dans un deuxième temps un essai, sur une nouvelle approche avec pour outil d’analyse une matrice, qui tentera la mise en relation de facteurs, et d’enjeux dans le territoire et d’en définir les outils. C’est à travers une analyse de site à l’échelle territoriale, que l’étude essaiera de comprendre les différents facteurs de mutations qui ont permis la vie sur ce site, depuis l’ère romaine jusqu’à sa condition actuelle. Nous reviendrons alors sur les événements du tremblement de terre, et analyserons ce nouveau programme que sont les nanotechnologies, et quelles problématiques elles soulèvent. Enfin, un dernier temps amènera à un choix d’intervention, et à l’établissement d’une méthode permettant de mettre ces questions à l’épreuve dans la matrice et de proposer une réponse caractérisant mon intervention dans un nouveau cadre défini.


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concours p ost quake visions

concours post quake visions Intitulé et Problématiques Abandon des centres historiques/Intervention dans le Patrimoine Recherche d’une nouvelle identité/Programme suggéré Résultats du concours

remise en question

Développement : Enjeux et impacts Reconversion : Programme et Investissements Prise de position & Questionnements 35

re t o u r s u r l e s e v e n e m e n t s

tremblement de terre émilia Crevalcore, ville la plus touchée de la région Émilie Romania Pertes et traumatismes Impasse de la ville en temps de crise

investissement et reconversion en un pôle technologique Potentiel de sortie de crise économique Un nouveau programme : les nanotechnologies Imprévisibilité de développement — Ruines modernes en Italie


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l a r u in e c o m m e m at ri c e

la grille dans le territoire

. Structure urbaine / Comparaison avec la Sillicon Valley . Historique des différentes mutations à partir de la grille romaine . Superposition de grilles et de conditions . Contrôle, Incertitude & Doute . Bâtiments symbolisant cette condition

la catastrophe, outil de résiliance & de developpement . Mémento Mori . Mémoire / Identité . Empreinte du temps . Les cours : un potentiel de remise en doute de la grille 65

p ro j e t

& mé thode

réhabilitation de l’hotel de ville

. Strates temporelles et mutations . Empreinte des batiments touchés . Potentiel de remise en question de la grille urbaine

méthode d’intervention

De la situation à la grande échelle Processus et thématiques d’intervention : Façade, Structure, Circulations, Occupation, Temporalités



CONCOURS

P O S T Q U A KE VI S I ONS

Concours Post Quake Visions Intitulé et Problématiques Réponse au concours — Intention Prix lauréats

Remise en question

Developpement : Enjeux et impacts Reconvertion : Programme et Investissements Prise de position & Questionnements

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VENISE

VERONNE

PARME MODÈNE

FERRARA

BOLOGNE

RIMINI

FLORENCE

Région Émile Romagne

FERRARA 40Km

CREVALCORE

MODENA 20Km

BOLOGNE 30Km

Crevalcore — BO, Italie


YOUNG ARCHITECT COMPÉTITION Septembre 2013, la commune de Crevalcore en Italie, dans la région de Bologne, est le sujet d’un concours organisé par Young Architect Competition. Le concours Young Architect Compétition interprète l’architecture comme une discipline qui compose et structure les lieux de l’action humaine. Elle répond à de nombreux enjeux, s’appuyant sur les capacités intellectuelles et créatives des candidats étudiants en architecture. La réponse ne doit donc pas se réduire à une recherche formelle ou fonctionnelle, mais doit être capable d’intégrer une pluralité de facteurs (spatiaux, environnementaux, économiques, techniques, philosophiques, etc...). Ce concours propose de travailler sur des thématiques contemporaines, traitant la temporalité et la personnalisation de l’espace architectural ; les choix envisagés doivent combiner l’« idée » comme pivot, l’« architecture » comme réponse et le « projet » comme moyen pour traduire l’intuition en préfiguration future. THÉMATIQUE — POST QUAKE VISIONS Pour sa deuxième édition, Post quake visions (vision post-sismique) propose de travailler sur des thématiques contemporaines, traitant de la temporalité et de la personnalisation de l’espace architectural. Ce concours offre une occasion de recherche concrète et hautement sophistiquée sur l’enjeu de la conception d’un projet post séismique La problématique de la préservation, de l’acquisition, et de la transmission de la mémoire historique est depuis toujours une thématique débattue. L’Italie est historiquement l’un des principaux terrains de jeu de cette dialectique. Orienté pour inhiber les possibles manipulations de requalification des centres villes historiques, la législation italienne, au nom de la conservation, s’est alourdie ces dernières années d’un étouffant système normatif.

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CREVALCORE — BO, ITALIE Vue Aérienne


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Un tel corps législatif est en train de condamner ces centres à l’abandon, et à une reconversion de plus en plus difficile. À présent, la plupart des communes italiennes de moyenne et petite taille sont en train d’assister à une augmentation implacable de l’abandon des centres historiques. Mais quand un évènement occasionnel, dramatique ou catastrophique interrompt ce mécanisme, quels scénarios s’ouvrent aux architectes ? Dans la nuit du 20 mai 2012, un tremblement de terre secoue le nord de l’Italie, rasant une centaine de bâtiments et réduisant de précieux centres historiques en tas de débris. L’actuelle crise économique en rend la reconstruction impossible, contraignant les architectes à une question essentielle : est-il possible que l’homme actuel, dans des contextes pas entièrement intacts, puisse proposer une solution architecturale qui aille plus loin qu’une simple restauration ? « Deux ans après le tremblement de terre l’impasse de la commune est évidente, la crise économique en rend la reconstruction impossible, contraignant les architectes à une question essentielle : est-il possible que l’homme actuel, dans des contextes pas entièrement intacts, puisse proposer une solution architecturale qui aille plus loin qu’une simple restauration ? Cette catastrophe est l’occasion de revitaliser d’anciens centres villes historiques, en clef culturelle et économique, afin d’engendrer une possible utilisation jusqu’à alors impensable ou inexploré. » Cette catastrophe est l’occasion de revitaliser d’anciens centres villes historiques en clef culturelle et économique, afin d’engendrer une possible utilisation jusqu’à alors impensable ou inexplorée. La recherche que ce concours souhaite récompenser est celle qui sera capable de lire dans les blessures infligées par le séisme les vides utiles à l’insertion d’architecture et de dispositifs architecturaux capables de s’harmoniser avec les anciens centres ville sur des fréquences contemporaines faites de temporalité, légèreté et personnalisation de l’utilisation. De véritables prothèses architecturales, pas simplement de remplacement, mais conçues pour augmenter et révolutionner, à travers un dialogue cultivé et élégant, l’utilisation des bâtiments historiques rescapés.


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AFP Finale Emilia, Italie 2013


Plan masse des parcelles touchĂŠs Lorenzo Migliorini Via Matteori, Cardo 2013


SITE — INTERVENTION Le lieu choisi est l’ensemble des lots touchés par le séisme dans l’enceinte de la ville romaine, cartographié lors de la récente planification post-sismique, dans le centre-ville de Crevalcore. Village médiéval d’environ 13 500 habitants, Crevalcore est en effet l’une des communes italiennes les plus endommagée par le séisme qui, en 2012, a fait trembler le nord de l’Italie. Un an après le tremblement de terre, l’impasse de la commune est évidente: coincée entre crise économique et réelles difficultés d’intervention, l’administration publique locale est à présent à la recherche de solutions adaptées à la reconstruction de la ville. Comment ordonner et orienter l’intervention de l’administration publique, structurant des propositions concrètes, durables et cohérentes avec les conditions particulières des environs qui rendent ce site remarquable. Fondé au XIIIe siècle pour renforcer le contrôle de l’ancienne ville de Bologne sur la région environnante, le centre historique de Crevalcore conserve les caractéristiques archétypales parfaitement reconnaissables, de la ville antique. Constituée suivant des directives strictement orthogonales, elle se présente comme un carré parfait de 350 m de côté, orienté selon des géométries qui depuis des siècles marquent la campagne de la région de Bologne. Une telle structure, associée à la configuration plane du terrain et à l’absence d’altération importante de la trame originale, nous permet de percevoir tout le développement decumanus01 d’une porte à l’autre de la ville. Crevalcore représente donc un arrière-plan de grande valeur et suggère le développement de solutions réparties qui sont en mesure de modifier sensiblement l’utilisation et l’appropriation des centres historiques. Développer les vides générés par le séisme comme laboratoires de recherche/expositions internationales/incubateurs d’entreprises visant le développement, la production et l’acquisition de technologies liées aux domaines mentionnés ci-dessus, est l’une des possible intégration entre le besoin de revitalisation du centre historique et les exigences des productions locales. Le séisme de 2012 a irrémédiablement compromis un grand nombre de bâtiments dans le centre historique de Crevalcore, à un niveau tel, que pour beaucoup d’entre eux n’est possible que la destruction. Quel que soit le lot - ou les lots - étudiés par les participants, la proposition de projet devra se confronter à un contexte architectural marqué par une forte connotation historique. Le dispositif architectural ainsi engagé - sans nécessairement l’abandonner à

1 . Decumanus — Mot latin désignant la voie ouest-est tracée dans les camps militaires et les villes romaines et se croisant au forum avec le cardo.

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Lorenzo Migliorini Batiments touchĂŠs Via Matteori, Cardo 2013


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son propre caractère - devra être en mesure d’établir un dialogue cultivé et élégant avec les architectures historiques ayant survécu, en identifiant le paradigme d’une approche globale et cohérente pouvant s’étendre à quelques vides causés par le tremblement de terre; expression de la sensibilité actuelle des architectes en rapport aux problématiques liées à la mémoire. PROGRAMME Tout en gardant la nécessité de revitalisation culturelle et commerciale du centre historique, le type d’intervention, ainsi que le genre et le nombre de lots sur lequel intervenir, est à l’appréciation du concepteur. Ce qui suit suggère cependant des lectures possibles du site, en soulignant que la composition de ces scénarii, l’intégration ou le réaménagement du site, l’accent mis sur l’un plutôt que l’autre, font partie intégrante du concours, et restent donc du domaine du choix du concurrent. Médiathèque — centres culturels diffus dans le centre historique, qui deviendront des lieux destinés à l’insertion des pavillons catalyseurs d’une offre culturelle diversifiée et en constante évolution; Centres commercial diffus — diffus sur le territoire pour repenser les centres historiques comme de réels connecteurs d’une série d’activités commerciales : promenades dans lesquelles insérer des architectures fonctionnelles attractives et économiquement rentables; Hôtel — diffus dans le centre historique capable de structurer une offre d’avant-garde dans un contexte pittoresque apte à l’affirmation d’un tourisme de niche qui vise à l’excellence de la région : plate-forme logistique 5 étoiles dans laquelle s’attarder ou à partir de laquelle partir à la découverte des merveilles de la région d’Émilia; Laboratoire — partie d’un laboratoire diffus en synergie avec la production locale et formative de la région de Bologne: expositions internationales pour le développement, la production et l’achat de la technologie mis en oeuvre par la production locale ; Lieux pour le bien être — le divertissement ou les relations publiques Lieux culturels pour la mémoire des centres historiques — Plate-forme complète de chaque type de service pour la conservation et la promotion du patrimoine architectural italien.


PHASE 01

URS POST QUAKE VISIONS R E VA LCO R E - I TA L I E TIMELINE timeline

UNFINISHED EMILIA

?

timeline

PASSÉ

PRESENT

FUTUR

Patrimoine existant

Seisme Emilia

Earth quake visions competition

VILLE ROMAINE

PAST

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SOLUTION 01 — RESTORAT

PASSÉ

PRESENT

FUTUR

PAST

Patrimoine existant

Seisme Emilia

Earth quake visions competition

SOLUTION 01 — RESTORATION

CONCOURS POST QUAKE VISION

SEISME EMILIA

VILLE ROMAINE

Past

CONCOURS POST QUAKE VISION

SEISME EMILIA

Past

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Present

ATTITUDES attitudes

concours young architects competition POST QUAKE VISIONS

attitudes

PAST

FUTURE

PAST + FUTURE

ETERNAL PRESENT

SOLUTION 01 — RESTORATION

SOLUTION 02 — NEW UTOPIA

SOLUTION 03 — GREFFE

SOLUTION 04 — UNFINISHED EMILIA

PAST

FUTURE

PAST + FUTURE

ETERNAL PRESENT

SOLUTION 01 — RESTORATION

SOLUTION 02 — NEW UTOPIA

SOLUTION 03 — GREFFE

SOLUTION 04 — UNFINISHED EMILIA

Past

Past

Present

Present

FuturPast

FuturPast

Renan Schneider Situation, et attidues Concours Post Quake Visions, 2013

Présent

Présent

Futur

Futur

Past

Present

Past

Futur

Present

Past Past

Past Past

Futur

Present

PORTE DE LA VILLE

CATALYSEUR. 01

INFORMATION TOURISME

HOTEL & PROMOTION DU PATRIMOINE

Present

Futur

Futur

SACRALISATION DU SAVOIR

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PROMO DU PATRI


Renan Schneider RĂŠponse au concours Post Quake Visions 2013


RÉPONSE AU CONCOURS Une première réponse à ce concours a permis de mettre en forme une attitude plus qu’un projet. Comment utiliser l’événement du tremblement de terre comme un événement marquant le site et le territoire et comme moteur de renouveau ? Comment intégrer la ruine dans le projet de reconstruction ? Comment le tremblement de terre peut amener à repenser la construction de la ville ? Faut-il garder les traces de cet evenement ? En gardant les traces de ce souvenir, je propose non pas de le refouler mais d’en faire la matière même de la base de cette nouvelle ville. La ruine intégrée dans le projet de reconstruction, faisant office de Memento Mori. Le tremblement de terre ; un événement à ne pas omettre mais à partir duquel repenser la construction de la ville. La ruine au centre d’un projet qui permet à l’habitant d’évoluer dans un environnement l’invitant à la contemplation du caractère cyclique de l’évolution du paysage, du monde et de son caractère transitoire. Un projet telle une vanité en peinture, nous rappelant le caractère fugace de nos certitudes. Une architecture qui ne se pose pas en tant qu’autorité immuable d’une vision du monde, mais plutôt comme une pratique qui intègre le mouvement et l’évolution du bâti via l’usage que l’on en fait. La ruine comme point à partir duquel tout recommence. Une ville phénix qui ne renie pas ses faiblesses, mais en fait ses fondations propres. Cette réponse est une réflexion sur le choix de ne pas renier/raser ce qui a failli, mais d’en faire le point de départ d’une nouvelle forme plus souple et ancrée dans la réel de ce site qu’est Crevalcore.

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LaurĂŠats du concours Post Quake Visions 2013

1.

2.


3.


REMISE EN QUESTION / POSITIONNEMENT C’est dans l’optique du projet de fin d’étude que j’ai remis en question, la consultation, et cet énoncé de concours, le jugeant incomplet et non justifié au vu de questions que le concours n’a pas abordé. En dépit de la revitalisation du centre ville historique, nous pouvons nous poser la question de l’avenir du centre ville de Crevalcore et de son développement en tant que pôle technologique. Quel impact un mall2 technologique aura t-il sur le cardo ? Quels seront les conséquences d’un développement économique et touristique sur l’étalement urbain déjà engagé hors de l’enceinte de la ville urbaine ? Ce programme est certes une opportunité auquel il faudra répondre, car c’est l’un des axes économique pour la reconstruction de la ville. Mais cette activité reste liée à un investissement économiques, à l’industrie et donc aux marchés financiers. Comment donc gérer l’imprévisibilité de cet investissement dans le temps. Au fond nous pourrions considérer cette reconvertion en pôle technologique comme un prétexte à un énième investissement. Investissement lié à l’industrie et aux marchés financiers, qui ont provoqué la crise que nous vivons aujourd’hui. Ce pretexte de la nanotechnologie n’est t-il pas une énième illusion ? Comment éviter que le centre ville ne deviennent un énorme centre commercial ou un simple centre d’étude ? L’activité économique n’est t-elle pas la vraie ambition cachée derrière le prétexte du savoir ? Doit t-on le prendre au pieds de la lettre et répondre a ce programme ? N’est ce pas pousser la ville vers l’échec et à l’entropie ? Doit t-on s’engager dans cette utopie ? Les villes étaient le berceau de l’innovation depuis l’apogée de la civilisation Greque ou encore à l’époque de la renaissance avec Florence. Mais gardons à l’esprit l’exemple de certaines villes qui ont échoués dans cette direction, et dont le sort a été tragique, comme par exemple Détroit. Imaginons un cadre urbain qui se voudrait moteur et conscience de sa planification et de ses développements à venir. C’est dans ces objectifs que les erreurs du passé peuvent servir de limites et de mémoires à ce qui ne doit pas être. La reconversion de Crevalcore doit donc prendre en compte l’impact réel de sa révolution et du nouveau développement qui va en promouvoir le futur developpement.

2. Mall — centre commercial, centre qui regroupe plusieurs grands magasins ou chaînes commerciales et qui permet de réaliser ses achats en un même lieu.


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Renan Schneider Photos, situation pĂŠriurbaine Crevalcore, Italie Collage PL.03 2014


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Renan Schneider Dévelopement actuel à partir du centre historique Phénomène périurbain 2014


RETOUR À LA QUESTION - PROJET & PFE Le scénario politique et social du développement de Crevalcore est ambivalent. D’une part, il montre comment il n’y a pas d’espace, touché par la production et la croissance, qui n’ait pas été laissé intact, qui n’ait pas imprègne tous les aspects de la vie des habitants. D’autre part, que de telles nouvelles conditions totalisantes, révèlent la dimention collective de toute forme de production, en particulier celle de la connaissance. Un travail dans lequel une communauté d’intérêts peut transcender le domaine de la société individuelle. Dans cet esprit, la proposition doit t-elle viser à un plan générique, putôt que de compter sur une image idéaisée de la diversité ? L’architecture de Nanotechnologie comprend des laboratoires, des logements au personnel, une hotellerie pour les chercheurs invités, ainsi que de nombreuses installations de loisirs. Mais il y a un paradoxe : alors que l’industrie ne peut se développer que dans le cadre du long terme, sa réalité économique est marquée par une profonde incertitude, et par les fluctuations du marché financier. Comment donc établir une médiation entre les pôles extrêmes de la vision à long terme et cette imprévisibilité de développement ? Comment offrir un système qui est à la fois spécifique, afin d’offrir une structure cohérente, et générique, dans le sens où elle permettra d’être ajusté en fonction des conditions imprévisibles de son développement.

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R E TO U R S U R

L E S E VE NE ME N T S

Tremblement de terre Émilia Bilan économique / Pertes et traumatismes Impasse de la ville en temps de crise Investissement et reconversion : potentiel de sortie de crise économique Un « mall » culturel et technologique potentiel Un nouveau programme : les nanotechnologies Imprévisibilité de développement : la question des ruines modernes en Italie

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AFP Tour de l’horloge 1ère et 2ème secousse Finale Emilia


TREMBLEMENT DE TERRE ÉMILIA

Des dommages estimés à

DIMANCHE 20 MAI 2012 04:03:52

13 milliards et 273 676.000.000 EUR

Un puissant séisme de magnitude 5,9 sur l’echelle de richter secoue le nord de l’Italie. MARDI 29 MAI 2012 09:00:00

Une nouvelle secousse, de magnitude 6,5 refrappe la région d’Émile Romagne, et sème la panique dans plusieurs villes de la région forçant les autorités à évacuer des villes comme Ferrara, Modene, Bologne,Mantua ... BILAN DE LA CATASTROPHE Pas un seul monument historique proche de l’épicentre, situé à Finale Emilia, petite ville de la province de Modène, ne sera épargné. L’Italie pleurera les sept victimes de la catastrophe. «Mille ans d’histoire ont disparu», a déclaré le maire de la petite ville martyre, où tous les monuments historiques ont été détruits. La liste des bâtiments abattus ou très endommagés dans la région prend des allures de bulletin de guerre. L’Italie surnommera l’en semble de la catastrophe du nom de son épicentre dans la ville Finale Emilia. La tour de l’horloge de Finale Emilia est devenu le symbole de cette catastrophe, quelques heures après la premièresecousse elle s’est littéralement fendue en deux, endommagé, le monument s’est finalement complètement écroulé après la deuxième réplique.

millions d’euros

pour les mesures d’urgences 3.285.000.000 EUR pour les habitations résidentielle 5.237.000.000 EUR aux activités productive comme l’industrie et l’agriculture 2.075.000.000 EUR pour les bâtiments historiques, culturels, religieux, le reste pour les bâtiments, et services publics. Crevalcore, petite ville de 13,500 habitants, de la province de Bologne est la ville la plus touchée. L’estimation de l’ensemble de ses dommages est estimée à 42 millions d’euros. 3000 personnes

ont été évacuées de la ville historique, et plus spécialement de la rue G.Matteotti, immédiatement déclarée zone rouge par les autorités. Les principaux dommages enregistrés furent l’effondrement du château de Ronchi, et de Galeazza. Les équipements publics comme l’hôtel de ville, l’école primaire, et l’église du centre ville ancien ont été très fragilisés, la rue principale est désormais impraticable, et dangereuse. Les façades en béton tiennent certes encore debout malgré d’importantes fissures, mais leurs structures menacent de s’effondrer.

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WE WI LL FAC E D IFFIC ULT ISSUE S, S U CH AS THE WO RK B E SC ARCE , AND ALL TH E UN CE RTAIN T IE S THAT ALREADY NORMAL LIFE H AD IN STO RE FO R US, WI LL CERTA IN LY B E AM P LIFIE D WI TH TH E E ART H QUAKE . claudio broglia

maire de crevalcore aout. 2012

PERTES ET TRAUMATISME Les dommages d’un tremblement de terre ne peuvent être uniquement quantifié sur un plan physique et économique. Au delà des chiffres et des faits, c’est la panique et la terreur qui règnent.

aidés des pompiers– pas le temps de penser dans une situation de survie et d’evacuation. C’est ensuite que le soutien se fera ressentir, par la mise en place des cellules d’aides aux victimes.

Les habitants sont perdus, n’ont plus de repères, et ont du mal à comprendre ce qui leur est arrivé. Ils ont perdus leur stabilité, leur sécurité et se projettent difficilement vers l’avenir - tout devient incertain ou irréalisable… Certains vivent dans la panique d’une nouvelle catastrophe.

Mais quelles traces garderont t-il après un tel drame ? La mémoire fonctionne sur différents canaux. Ils garderont en souvenir ses images mais aussi leurs sensations éprouvées lors du drame. Leur reconstruction morale sera liée à l’élimination des traces visibles du tremblement de terre, par la reconstruction de la ville, pour leur offrir une nouvelle sécurité.

Cet événement n’a heureusement engendré aucune perte humaine dans la commune, mais les effets secondaires ne sont pas négligeables. La fermeture des écoles, des théâtres et des églises, la disparition de bâtiments aussi bien publiques que privés, ont radicalement bouleversé la vie des citoyens. Leur vie quotidienne, leurs gestes, leurs habitudes, leur sécurité, leurs souvenirs tout est subitement remis en question.

Cette catastrophe marquera inévitablement un tournant dans la mémoire collective des habitants, et par la force des choses pousse la ville au changement et à de nouvelles opportunités. La question à laquelle cette recherche essaye de répondre vient d’abord de là : comment faire face à ce changement et par quels moyens assurer la mutation, et la reconstruction identitaire de Crevalcore ?

Tout s‘est soudainement effondré au propre comme au figuré, alors qu’ils se croyaient parfaitement en sécurité, chez eux, dans leurs maisons, dans leurs lits.

Il semble essentiel aujourd’hui pour la ville, de faire son bilan - un diagnostique urbain, une « radiographie » , pour évaluer de façon objective, quelles sont les conditions, les opportunités, et les perspectives économiques/sociales cibles de sa reconstruction.

Désormais rien ne sera jamais plus comme avant. Il va falloir apprendre à gérer cette peur, se mettre à l’abri du danger pressenti. Durant les premiers jours qui suivent la catastrophe, c’est l’action qui permettra de dépasser cette anxiété. Les habitants doivent faire face à des besoins fondamentaux,

Cette recherche tentera de répondre à une autre question, celle de la résilience d’ordre morale et psychologique. Par quel moyen la ville et ses citoyens pourront t-ils se reconstruire une iden-


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AFP Tremblement de terre Émilia 2013


tité, une stabilité ? Doit t-on tout reconstruire à neuf, partir sur une nouvelle impulsion (illusoire), pour fuir ce traumatisme par le déni ?

INVESTISSEMENT ET RECONVERSION : POTENTIEL DE SORTIE DE CRISE ÉCONOMIQUE

Ces événements violents, même si ils sont peu fréquents, font partie, d’une certaine manière, de la vie elle-même, dans la mesure où rien ni personnes ne peut nous assurer la tranquillité permanente.

De nombreuses stratégies de reconstructions et de développement ont étés adoptées au cours de l’histoire - on peut néanmoins en dégager trois grandes catégories : la reconstruction physiologique (où tout est reconstruit à l’identique), la relocalisation de la ville détruite et la refonte d’une ville nouvelle sur le site de la précédente .

Cette catastrophe ses ruines peuvent t ils être vue à la fois comme le poison et le remède de cette situation, comme une puissance destructrice et curative, développant sa propre thérapeutique ? Peut t-on questionner la manière dont, à chacune des grandes crises de croissance urbaine, les citadins ont développé de nouvelles stratégies de reconstruction ou de développement – Non pas par la fuite ou la transformation radicale, mais en trouvant des ressources dans les lieux et les conditions générées par la catastrophe et la ville elle même. La contingence d’un renouvellement est nourrie par cette volonté individuelle de se reconstruire à tous les niveaux - la reconstruction en termes physique et programmatique ne peut être sensible qu’en ce sens. Emilia a accéléré un processus d’autoévaluation déjà engagé en période de crise économique, mais n’ayant mené à aucune solution jusqu’à présent. Celui ci est aujourd’hui devenue vital. IMPASSE DE LA VILLE EN TEMPS DE CRISE À présent la plupart des communes italiennes de moyenne et de petite taille ont assisté à une augmentation implacable de l’abandon des centres historiques, pour un développement de quartiers pavillonnaires, sur les parcelles agricoles. Développement qui est à ce jour remis en question, couramment dénigré par le terme « d’étalement urbain ». Crevalcore avant Mai 2012, était elle aussi engagée dans un lent processus d’abandon. Les activités économiques et leurs reconversions, présentent avant 2012 était en stagnation et compromises par la crise économique globale que nous vivons aussi aujourd’hui.

En dépit d’une apparente marginalité, la municipalité de Crevalcore peut compter sur un certain nombre d’activités productives d’avant garde, fermement enracinées dans le territoire et la région. Recherche, développement et prototype dans les domaines de l’agriculture et de la Nanotechnologie , sont quelques uns des principaux poumons de l’économie locale : répondre de manière adéquat à ces points pourrait contribuer (malgrès la crise) à une revitalisation culturelle et économique du centre historique par sa réhabilitation dans le cadre du pôle technologique en développement. Sur la base de prévisions établies par des recherches menées par la Communauté Européennes, et les centres universitaires de Bologne, il est aujourd’hui possible de saisir cette nouvelle dynamique de reconstruction. D’autant plus que Crevalcore est un quartier préférentiel de la métrolopole de Bologne et de la région Emile Romania pour un possible investissement - Une reconvertion en un pôle stratégique à l’echelle du territoire y est envisagé. Les grands axes de Bologne et Véronne ainsi que ses principaux centres de développement de point de l’Italie font partie de la même zone d’influence. Cette proximité entre les trois grandes capitales de la région - en fait un lieu priviliégié pour un site en continuité avec l’aerotropolis et la zone industrielle de Bologne. Le rôle joué par les nouvelles technologies dans la production agricole sont de première importance. L’optimisation des ressources et des cycles de production sont la clé de son succès. L’étude des nanotechnologies et nanomatériaux, appliquée à l’agriculture et au-delà, sont le deuxième levier de réussite pour la ville. Ils sont déjà présents à petite échelle dans Crévalcore et représentent un potentiel énorme.


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Renan Schneider Un habitant, regardant à travers la vitrine d’une station essence (à la sortie de la ville historique) une photo de Crevalcore des années 30. 2014


Mall de Pentagon City, Arlington Virginie, États Unis


UN « MALL » CULTUREL ET TECHNOLOGIQUE POTENTIEL La définition générale du mall, ou du centre commercial est la suivante : un catalyseur de flux et d’activités. Dans ses différentes interprétations, elle peut aussi être de nature commerciale. Le centre historique , identifiable , scéniquement et culturellement , avec la Via G. Matteotti est la partie de la ville la plus endommagée par le séisme de mai 2012. Les bâtiments le long du parcours ont une histoire vieille de plusieurs siècles . La mairie , le cimetière , le théâtre municipal , le poste de police et l’école maternelle (1881) ont été construits au cours du XIXe siècle, sous la direction du maire Antonio Michelini de 1863 à 1872 - dans la période suivant la domination papale . L’école publique et l’hôpital Barberini (1824 ) ont des racines historiques encore plus profondes . Ces bâtiments sont les plus touchés par le séisme . La volonté des autorités est certainement de conserver physiquement ces espaces , mais en même temps d’y dessiner un nouveau processus de développement économique et culturel , en profitant du paysage unique du centre historique de la ville . Le succès de la ville comme l’a noté Edward Glaeser, professeur d’économie à Harvard n’est pas dicté par les bâtiments. Les bâtiments ne sont que le résultat d’un processus économique et culturel dominant. L’idée, apparue auprès des autorités et du processus d’enquête, est de coloniser ces espaces avec de nouvelles fonctions et des activités en lien avec les pôles émergents du territoire, et l’industrie de la recherche dans le domaine de la Nanotechnologie. Ainsi la transformation de la vieille ville de Crevalcore est envisagée tel un centre commercial technologique et culturel. Le castrum antique, prend ici la forme d’une nouvelle dimension intermédiaire entre l’industrie et la boutique, il devient un incubateur potentiel pour ces nouveaux scénari: co-working, salles d’exposition, partenariat entre les centres entreprises-administration-recherche (pour l’institut professionnel M. Malpighi, l’Université de Bologne, des laboratoires privés, et des investisseurs potentiels…).

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2. Mall — centre commercial, centre qui regroupe plusieurs grands magasins ou chaînes commerciales et qui permet de réaliser ses achats en un même lieu.


John von Neumann Scanning Electron Micrographs of Diatoms


UN NOUVEAU PROGRAMME : LES NANO-TECHNOLOGIES Grace à une manipulation de la matière à une échelle radicalement nouvelle les nanotechnologies promettent d’améliorer notre quotidien. Elles sont une clef pour l’avenir et ne concernent pas qu’un seul type d’application mais vont toucher tout les secteurs de notre quotidien. Les produits issus de ces recherches vont sans doute faire évoluer notre rapport au monde, mais de quel sens ? Les attentes démesurées qu’on leur attribue, fascinent autant qu’elles inquiètent. La vitesse à laquelle ces nouvelles technologies promettent de s’insérer dans notre quotidien et de remodeler nos sociétés suscite de plus en plus de questionnements. Il y a presque 30 ans, l’invention des nouveaux microscopes a ouvert aux chercheurs les portes d’une dimension encore inexplorée, celle du Nano (du milliardième de mètre) Le monde invisible des atomes et des molécules. À cette échelle la matière manifeste des propriétés surprenantes. Pouvoir les étudier promettait une avancée radicale, qui allait repousser les limites de toutes les technologies aujourd’hui exploitées. Les industriels l’ont bien compris. Cela reste avant tout un investissement rentable pour le futur. C’est ainsi que ce programme représente les plus gros investissements jusqu’alors dépensés pour la science et désormais l’ingénierie. Cet engouement repose à la base sur une utopie scientifique qui date des années 6O. L’idée était que si nous parvenions à manipuler les atomes qui nous entourent nous pourrions en théorie fabriquer tout et n’importe quoi. Nous pourrons même au bout du compte remodeler la conception de la matière un nanomètre après l’autre afin qu’elle réponde à nos exigences. Pensez à ce que cela implique autour de vous et vous arriverez vite à un scénario de science fiction. C’est Richard Feynman dans les années 60 qui jette les bases de la mise en point des premières machines de taille nanométriques. Il comprend déjà que l’avenir de toute technologie réside dans la miniaturisation et que la nanotechnologie est par conséquent inéluctable. Les portes de la Nano-utopie ont été ouvertes par l’invention du commutateur, permettant le début des puces en silicium, débouchant sur les puces aujourd’hui présentes dans nos ordinateurs et nos téléphones portables. Dans les couloirs des pôles technologiques de la Silicon Valley, le mot nano est sur toutes les lèvres. Il est question d’intégrer des nano-machines partout, des robots molé-

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culaires, invisibles, qui travailleraient autour de nous et transformeraient le monde réel en une extension du domaine informatique. Il y règne depuis des années une loi de la miniaturisation, appelée loi de Moore, du nom du père de l’industrie électronique. Cette loi stipule que tous les 18 mois, les transistors deviendront deux fois plus petits et que la puissance des ordinateurs sera multipliée par deux. Cette technique devait permettre de construire des ordinateurs de la taille d’un atome. Mais les conséquences imaginées par l’inventeur du mot nanotechnologie sont encore plus sidérantes. La fabrication à cette échelle permettra de modifier la matière comme on peut modifier des gigabits de données. Au cours du XXème siècle le rythme de l’évolution technologique s’est accéléré, indépendamment des désirs personnels du citoyen lambda. Dans l’air nano, nombre d’entres nous, aujourd’hui vivants, seront témoins d’une utopie technologique devenue réalité, ou d’un désastre planétaire. L’émergence aujourd’hui d’imprimantes 3d n’est que le premier pas vers cette utopie. Quoi qu’il en soit d’ici 2020 nous serons entrés de plein pieds dans l’air nano, si la loi de Moore s’applique toujours à la miniaturisation de la puce de silicium – prévu à quelques centaines d’atomes. Cette usine baptisée FAB.6 est le leader mondial de la miniaturisation. Ses propriétaires déclarent que d’ici 10 ans on y fabriquera des circuits de Sillicium d’une section de quelques centaines d’atomes. Le laboratoire est actuellement déclaré comme l’endroit le plus propre du monde. Cette usine a couté près d’un demi milliards de dollars, mais la prévision pour celle qui pourra fabriquer des éléments encore plus petit, devrait atteindre près de 10 milliards de dollars.

Sillicon Valley Fab.6


UNE METHODE ASCENDANTE Ainsi dans l’avenir nos relations avec les machines seront vraisemblablement très différentes de celles d’aujourd’hui. Tout ce dont nous aurons besoin sera l’envie de quelque chose, et les machines le fabriqueront. Elle deviendront une extensions physique de notre corps et de notre volonté. Plus les machines deviendront organiques, plus elle acquièreront les propriétés qui assurent aujourd’hui la préservation de nos systèmes vitaux - elles pourront donc s’agrandir. Cet emprunt au monde biologique est la porte ouverte à l’auto assemblage moléculaire, une nouvelle science qui vient d’apparaître et qui repousse les limites du silicium. Il se peut que le principe le plus important qu’on puisse emprunter à la biologie soit celui de la construction à partir de l’intérieur plutôt que de l’extérieur vers l’intérieur, qui est ce qui se fait dans la fabrication traditionnelle. Pour fabriquer quelque chose, vous prenez en général un bloc de matière et vous taillez dedans – les systèmes biologiques ne fonctionnent pas de cette manière, ils sont fabriqués à partir de blocs de constructions qui s’imbriquent de l’intérieur vers l’extérieur. Il y a 30 ans, un étudiant du Massachussets Institute of technologies s’était posé la question de savoir ce qu’il adviendrait si l’on fabriquait des machines de la même façon que la nature et dans quelle mesure cela changerait notre monde. Cet homme est Eric Dresler, il a été traité de futuriste, de fanatique… ses dix années d’études sur le sujet ont abouti à la publication d’un livre qui a soulevé la controverse dans le monde scientifique – Engines of creation. Une des premières idées de Drexler s’appelle la machine à viande. Il est parti du principe que sur le plan moléculaire, une vache n’est rien qu’une machine qui réarrange les atomes d’herbes en y ajoutant un peu d’eau pour en faire un beefsteack. Selon lui il serait possible de construire une machine qui serait capable de faire la même chose de manière plus efficace. Ce serait à la fois la solution aux problèmes de nutrition et au remplacement de l’agriculture. Autant dire que cette déclaration fut rejetée par la communauté scientifique. La vision de Drexler semblait alors farfelue. « Quand les séductions de la fiction pénètrent le réel, elles suscitent la crainte d’une dépossession de l’homme par les techniques qu’il a inventées » Marc Augé – Les nouvelles peurs La peur de l’apprenti sorcier est toujours présente. Pourtant aujourd’hui de nombreux scientifques pensent que cette utopie du nano, est possible, et de nombreux ingénieurs parlent déjà de son développement. Ce domaine est devenu plus que respectable et représente les plus gros investissements. Contre toute attente ses prévisions sont devenues réalité. 47


Atlas des ruines modernes en Italie, rĂŠpertoriĂŠ par le collectif Incompiuto Siciliano


IMPRÉVISIBILITÉ DE DÉVELOPPEMENT : LA QUESTION DES RUINES MODERNES EN ITALIE La ruiné habitée est devenue le style architectural le plus flagrant de l’Italie du xxème siècle. La mémoire architecturale italienne d’après guerre est hantée par des bâtiments inachevés, en ruines et restés inaboutis. Un phénomène auquel l’histoire, l’économie et la politique de ce pays ont donné naissance, et dont nous pouvons tirer une leçon. Le phénomène italien était basé sur un système économique tourné autour du ciment et du béton. Cela pose une question essentielle : celle de la sur-modernité, d’un pays d’après guerre, très pauvre, qui découvre le progrès dans les années 60 et qui se met à construire plus qu’il ne faut. La question n’est pas spécifique à l’Italie mais à notre civilisation. Les transformations qui ont mené à ces excès sont la résultante d’une accélération excessive du temps, d’une surdétermination et d’une surabondance événementielle et spatiale. La priorité n’était pas de construire un ouvrage qui puisse servir à la population. Les intérets se situaient dans les travaux en eux mêmes, qui généraient des affaires et des projets aux entreprises de construction. Que l’ouvrage soit terminé ou non était un détail. Tout tournait autour des appels d’offres et des pots de vins. Ces lieux dont le futur a déjà un passé et dont le présent a un éternel goût d’attente . Comment travailler sur un bâtiment reconductible ? Hors mandat et pouvant révéler par strates les usages perdus ? et générer sa propre trace ? Assurer par sa traçabilité, par une continuité, et éviter les dérives de la surconstruction à Crevalcore.

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Ruines modernes en Italie

UNFINISHED BUILDIN

WHICH COUL

OF THIS WHICH I

OF THIS WHICH M — MARC Le temps


NGS HAVE THE BEAUTY

LD HAVE BEEN

IS NOT YET THERE

MIGHT BE ONE DAY — C AUGÉ s en ruine

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L A RU I N E C O M M E

M AT RI C E

La grille dans le territoire Comparaison avec la Sillicon Valley Impasse de la ville en temps de crise Historique des différentes mutations du territoire Superposition de grilles et de conditions

La catastrophe outil de résilience et de dévelloppement Memento Mori Temps et rôle structurel de la matière

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Sillicon Valley, USA — Structure en grappes

Crevalcore, Italie — Grille Romaine


LA GRILLE DANS LE TERRITOIRE Structure urbaine : Comparaison avec la Sillicon Valley Cette reconversion, proposée par le biais du concours, est associée avec la Silicon Valley, comme image de référence. Mais ce modèle urbain est t-il réellement adapté à la structure existante, et à ce programme spécifique ? Cette concentration intensive de grande envergure , d’institutions du savoir, rend l’agglomération proposée radicalement différente de la Sillicon Valley et des grappes de haute technologie similaires, qui sont constituées de petites entreprises qui semblent prospérer dans l’architecture de l’étalement urbain . En revanche, les installations pour la biotechnologie semblent exiger une structure urbaine cohérente et plus ordonnée . Dans ce domaine, la connexion entre la connaissance et la connaissance appliquée, entre la recherche et la production, est encore plus forte que dans les modèles industriels précédents . La même chose peut être dite de l’intégration d’une université, d’installations d’essai et de sociétés d’investissements . Ainsi un cluster* biotechnologique nécessite non seulement des espaces bien définis pour les laboratoires mais aussi des espaces plus informels de rencontres sociales, car ce genre d’interactions joue un rôle fondamental dans la recherche scientifique, pour encourager la production et l’échange de connaissances . Historique des différentes mutations du territoire Il me semble essentiel d’essayer de comprendre cette structure pour mieux répondre à ce changement. Comment cette grille, à cette urbanisme si reconnaissable, s’est t-il mis en place sur le territoire ? Situé à 20 mètres au dessus du niveau de la mer, Crevalcore s’étend au milieu de la plaine du Pô. Sa fertilité est due à son origine alluvionnaire* entre les fleuves Panaro, ses affluents et le Reno. Il semble que son tracé urbain remontant aux années 1227-1231, devait être une intervention planifée de la Municipialité de Bologne. Les romains ont disposé un carré régulier sur la plaine, formant une grille de 32 blocs de taille à peu près identique, avec ses rues à angle droit. Le castrum construit le long du fleuve Panaro, faisait partie d’un système de défense byzantin, endommagé en 1219. Il fut reconstruit par Bologne en 1231, à 3km au nord ouest, plus proche du fleuve. La grille romaine était un rituel de consécration du lieu précédent la construction d’une ville chez les romain. Il donnait un cadre symbolique à l’habitat, initiant une division de l’espace par le choix du lieu. 55


Cet urbanisation dérive d’une vieille tradition italienne. Elle eu un succès chez les romains pour des raisons religieuses et militaires. La justification se trouve dans la discipline des augures. Ces spécialistes de la divination qui pour observer le vol des oiseaux commençaient par diviser le ciel et la terre par un système de grille. La ville est un carré parfait partagé par deux rues axiales, perpendiculaires, qui dessinent un T : le «cardo» orienté nord-sud, et le «decumanus» est-ouest. Ils ont les axes perpendiculaires principaux qui définissent le centre géographique et spirituel de la ville. Cardo est le mot latin pour « pivot », il est signifiant dans un contexte cosmologique car il fait référence au fait qu’il est la ligne idéale sur laquelle le ciel semble pivoter. Le rite de création du cardo et du decumanus était pratiqué par un magistrat qui déterminait le centre de la nouvelle ville selon une orientation solaire. À leur point d’intersection est établi le forum, vaste place rectangulaire à laquelle sont accolés l’église et l’hotel de ville - symboles du pouvoir en place. Des rues secondaires, parallèles aux deux axes, découpent des ilôts également carrés ou s’inscrivent les maisons et certains équipements publics. Dans l’ensemble des villes romaines, posséder des rues droites se coupant à angle droit était un idéal que toutes les municipalités s’efforçaient d’atteindre. On peut y voir un espace disciplinaire visant une hiérarchisation des éléments de la ville par la création d’un milieu. Les Romains exercaient leur contrôle sur cette grille, en la posant avec seulement quelques batiments symboliques indispensables à leur conception philosophique de la cité. Son développement futur et incertain se faisait alors selon les normes établies, afin de se prémunir de comportements déviants. Superposition de grilles et de conditions Vue du ciel, cette structure nous révèle l’influence de l’ordonnance rigoureusement géométrique de cette colonisation sur toute la plaine et les parcelles agricoles. Cette illustration de 1231 montre bien la plaine encore vierge de toute activité agricole. Les Romains semblaient vouloir contenir cette activité dans les enceintes de la ville. Ce n’est donc que plus tard que l’exploitation agricole de la plaine semble avoir été influencé par l’organisation géométrique romaine. Lorsque cette ville générique fut suffisamment programmée, après s’être assurée de la protection des dieux et s’être soumise aux visions de l’empereur, le paysage environnant est quadrillé pour l’agriculture. Dans les années 60, ces parcelles agricoles ont été vendues pour la construction de quartiers pavillonnaires. Une grille périurbaine, est venue se greffer à la ville existante, traduisant ainsi un nouveau mode de vie, et l’abandon progressif du centre historique. Le pavillon est également construit suivant une idéologie, celle de l’individualisme selon laquelle la propriété permet la protection de la famille.


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1. Crevalcore, Gravure, 1288 2. Crevalcore, Ville pĂŠriurbaine, 2014 3. Crevalcore, Plaine agricole, 2014


Des logements «faciles à habiter» selon Nicole Haumont dans son étude «les pavillonnaires» réalisée en 1966. Dans une société désormais organisée par les mobilités, et la liaison directe avec Bologne et Veronne par la voie de chemin de fer il faut donc entendre que le pavillon vient aussi en conséquence directe de ce nouveau mode de vie. Contrôle, incertitude & doute Cette grille originelle romaine, aseptisée, au sein de laquelle se dressera potentiellement le projet d’un bâtiment ou d’un paysage futur, permet d’apprécier les différentes intentions architecturales dans leur contexte réel. Mais avec ce type de structure, l’architecte ne peut plus montrer ses intentions. La reconvertion devient difficile, dans le sens où la composition architecturale ne devient qu’une somme de conséquences issues de cette condition (liées à une incertitude mesurée et controlée), et non plus d’intentions. Bâtiment symbole de cette condition La centralisation impériale a entamé une grande uniformisation des programmes dans les villes romaines. Les édifices en dehors de leur fonction pratique, avaient une signification idéologique bien plus importante que l’utilité qu’on pouvait leur porter. En parcourant cette illustration, nous pouvons rencontrer successivement presque tous les édifices indispensables à la vie d’une cité romaine type : le forum (ou la place) dédié à Marcello Malpighi, un scientifique très important des années 1600. On peut trouver sur cette place les principaux bâtiments de la ville : l’église de San Silvestro, la tour du clocher, le monument Malpighi, et face à l’église l’Hotel de Ville symbole du pouvoir en place. Rappelons nous que l’architecte romain travaille dans le même esprit que l’administrateur ou le soldat. Ou plutôt le véritable maître d’oeuvre romain est un homme politique et un militaire qui se fait aider par des techniciens. Les armées, en troupe, donnent une mesure au territoire qui prend un sens pour la vie des hommes qui la pratiquent. Ce n’est plus un paysage, mais une organisation symbolique, technique sur un territoire choisi grâce à sa fertilité. Quelles conditions cette grille doit t-elle mettre en place aujourd’hui pour permettre cette reconvertion, liée à un investissement (lui aussi incertain), afin de se réaliser ? Comment peut t-elle être génératrice d’une nouvelle identité ? Comment passer d’une situation de contrôle vers une ouverture de situations potentielles, et ainsi d’une remise en question profonde ? Si l’homme vit dans des normes qui sont propres à son époque, il requiert des lieux face auxquelles se positionner et se questionner face aux normes établies.


LA CATASTROPHE, OUTIL DE RÉSILIENCE ET DE DÉVELOPPEMENT

Memento Mori Prendre en compte le déclin de Détroit et du phénomène des ruines modernes en Italie, nous rappelle à leur catastrophe, et à une image de la ville en déclin ; à la construction d’un rêve, d’une utopie, désertée abandonnée, silencieuse, après le passage d’investissements instables, mais aussi à une multitude de bâtiments construis lors d’un boom économique, convoités, admirés, puis désertés, abandonnés… Peu de temps après avoir pris conscience de ce phénomène Italien par l’intermédiaire du collectif Incumpiuto Siciliano, j’ai fait la découverte d’un ouvrage intitulé Détroit, vestiges du rêve américain (The ruins of Detroit) de Romain Meffre et Yves Marchand. Cet ouvrage est venu vers moi, accompagné d’un nouvel engouement autour de ces sites à l’abandon. Un paysage qui a pris vie doucement autour de nous, sur nos réseaux sociaux, ou sur des sites qui désormais compilent et répertorient ces sites à l’abandon dont l’inventaire est sans fin. Cet atlas de ruines modernes, moins géographique que fantasmatique, a sa capitale : Détroit. Une fascination qui a un nom, le ruin porn : qui vient du sarcasme lancé par 59

Philippe de Champaigne Vanitas 1671


un habitant de la ville de Détroit à un journaliste venu y faire un reportage. On regarde aujourd’hui ces inventaires de ruines comme l’a fait remarqué cet habitant comme on regarde un porno, dans un plaisir immédiat. Le phénomène n’est pas nouveau. Les ruines ne sont par définition pas nouvelles, et les contempler non plus. Cette fascination pop et numérique trouve écho celle de la fin du XVIIeme siècle ; lorsque les Anglais se mirent à graver Tintern Abbey (batiment gothique à l’abandon) ou Piranèse avec ses ruines de Rome ou encore certaines gravures de Turner. Ils nous posaient tout comme le ruin porn, la question de l’avenir. La fin du XVII ème siècle était aussi marquée par les changement rapides d’une société à la soif de profit avec les dangers de la perversions. Il s’agissait donc de faire une projection, de sublimer sa peur. Aujourd’hui avec la Ruin- Porn est-ce la fin annoncée de l’illusion de la modernité , ou une post modernité remise à jour ? Est ce uniquement les développements urbains qui sont remis en cause ? Au sommet de notre ère capitaliste , les ruin porn de Détroit fonctionnent comme le Memento Mori, un appel à se rappeler que le même sort pourrait arriver à toute nos villes et leur réalisation si instables. L’architecture du Memento Mori existe aussi de la même manière depuis des siècles. Littéralement traduit comme « souviens toi que tu meurs « le genre utilise les mêmes symboles dans son language ; squelette ou crane, fleurs…. L’homme est-il conscient de la fugacité de son existence ? Non, et le Memento Mori a pour fonction de venir le lui rappeler. Elle lui offre la possibilité de prendre le temps de se remettre en question dans une époque où tout va de plus en plus vite. Le fait de savoir qu’il va mourir, pousse t-il l’homme dans des démarches autodestructrices ? Ici le Memento Mori intervient, et vient lui rappeler que sa vie et courte et fragile. Il vient questionner le spectateur sur la valeur qu’il porte à sa vie, pour l’interroger sur la vanité de ses actes. Cette figure du Memento Mori, me conduit à le voir comme une vision peut être brutale, qui pourrait pousser les citoyens et les investisseurs de Crevalcore, à faire face à cette sitation avec une responsabilité face à leur environnement. Il appelle à la réflexion et à la remise en doute. C’est un objet de ralliement pour penser et un outil de développement de la ville.


Temps et rôle structurel de la matière Le temps est présent, il nous positionne par rapport à ce qui a été, et ce qui va être. Ainsi la prise en compte de la relation entre l’architecture et son environnement est un élément essentiel de notre définition temporelle. Les effets du temps sur nos villes, nous situent et nous renseignent sur notre propre condition d’habitant. Toutefois, nous ne faisons pas que subir le temps. Nous nous construisons avec lui à travers une succession de périodes, de modes, de façons de faire, de vivre. Cet aspect de la temporalité est un élément primordial de notre vision, puisqu’il est fortement lié à l’idée de progrès de notre civilisation. L’architecture en est l’expression monumentale et témoigne des visions de notre société. Certains édifices nous semblent accepter la temporalité et, par cet aveu d’humilité, nous donnent pleinement conscience de l’écoulement du temps. Parce qu’elle nous situe autant qu’elle nous renvoie à notre propre existence, l’empreinte du temps sur le bâti nous émeut. L’architecte, qui consciemment accepte et anticipe la trace laissé par les années, les intempéries et l’usage, offre une part de poésie à l’ouvrage. Certain vont plus loin encore en cherchant à s’affranchir de cette temporalité : leurs bâtiments nous donnent l’impression d’être construits avec la volonté de se positionner hors du temps. La réalisation échappe à la datation. L’architecture ne s’inscrit ni dans une recherche de nouveauté formelle, ni dans une révision passéiste, ou dans une tentative de contemporanéité. Au-delà de la fuite en avant, de l’imitation ou du mimétisme, l’architecture est seulement la consécration d’une idée. Une idée juste, ne devrait-elle pas être construite pour durer? En prenant conscience de l’empreinte du temps, voire en s’efforçant de s’en affranchir, l’architecture nous livre une émotion bien présente. Contrairement à ce que l’on pourrait en croire, ces deux visions correspondent aux deux faces d’une même pièce. La persistance temporelle des interrogations architecturales et l’inévitable ancrage du bâti dans le temps se confondent dans la recherche de pérennité. Aujourd’hui, en regardant autour de nous, il semble que l’architecture se soit déconnectée de sa propre temporalité. Elle ne répond plus à ses questions originelles, elle ne paraît plus avoir l’ambition de durer. Ainsi ce divorce condamne le construit à la destruction ou au remplacement. La durée, la résistance sont mises à l’écart au profit de l’effet de nouveauté ou de mise à jour, quitte à les remplacer quelques années après. Outil roi de cette consécration de l’éphémère : l’emballage en panneaux de façade. Nous évoquions un peu plus haut un aveu d’humilité, mais nous avons ici le sentiment que l’architecture ne s’engage pas, ne joue plus le jeu du temps. 61


Ce sentiment nait certainement de la dégradation du rôle structurel de la matière, l’érosion de la pierre, la coulure sur le béton, ou le travail du bois paraissent inévitables, mais n’enlèvent rien à la qualité de l’architecture. Lorsqu’un panneau de plastique est détérioré, la matière perd son essence, et c’est l’architecture qui subit l’écoulement du temps. Elle s’abîme, devient obsolète - ou du moins l’enveloppe le devient. En effet c’est tout une architecture qui a contribué à cet inconscient collectif selon lequel il existerait une architecture publique de la vue extérieure - de la façade - et une architecture privée du confort intérieur. En suivant un tel modèle, on finit par saisir ce préjugé qui consiste à concevoir la matière comme une enveloppe, une simple composante, et un même projet, comme une collection de vêtement décliné en plusieurs matériaux. La question de la matière vient-elle au début ou à la fin du projet? N’est-elle pas plutôt une composante indissociable des autres paramètres de l’équation ?


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P RO J E T

MÉ T H ODE

Réhabilitation de l’hotel de ville

Strates temporelles et mutations Vides générés & potentiel de remise en question de la grille urbaine

Méthode d’intervention De la situation à la grande échelle Processus et thématiques d’intervention

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Place Marcello Malpighi Crevalcore, Italie Lorenzo Miglioni 2013


dans ce processus, la catastrophe naturelle n’est jamais vue comme une simple destruction mais plutôt comme une force régénératrice avec un projet moteur

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3

2

4 1 5

1. Hotel de Ville 2. Place Marcello Malpighi 3. Église 4. via g.matteotti

6

0

30m

Plan de situation Place Marcello Malpighi Crevalcore, Italie


RÉHABILITATION DE L’HOTEL DE VILLE C’est sur la place principale de Crevalcore, dédié à Marcello Malpighi 1, que se trouvent les principaux bâtiments de la ville: l’église de San Silvestro, le clocher, un monument dédié au scientifique, et l’Hotel de Ville. Le centre historique, identifiable, scéniquement et culturellement, est la partie de la ville la plus endommagée par le séisme de mai 2012. Les bâtiments le long de ce parcours, de la Via G. Matteotti, ont une histoire vieille de plusieurs siècles. La mairie, le cimetière, le théâtre municipal , le poste de police et l’école maternelle ont été construits au cours du XIXe siècle, sous la direction du maire Antonio Michelini de 1863 à 1872 - dans la période suivant la domination papale . L’école publique et l’hôpital Barberini (1824 ) ont des racines historiques encore plus profondes . Ces bâtiments sont les plus touchés par le séisme. La volonté des autorités est certainement de conserver physiquement ces espaces, mais en même temps d’y dessiner un nouveau processus de développement économique et culturel, en profitant du paysage unique du centre historique de la ville. Le projet de restauration d’un monument de centralité choisi peut être un facteur marquant du développement de la ville pour deux raisons fondamentales : tout d’abord parce que le monument est symbole, incarnation d’une mémoire collective, et ensuite parce qu’il est œuvre, qui renferme en elle même l’idée de la ville ; et ces deux caractéristiques sont indissolublement liées, et deviennent un élément premier du discours urbain. Mon intention est de soutenir le discours urbain et créer le moteur du renouveau de la ville. Les monuments sont des éléments architecturaux, ayant leur propre valeur, mais ils sont aussi des facteurs urbains, puisqu’ils résument dans leur existence une vaste pluralité de rapports et de significations. 71

1. Marcello Malpighi est un médecin et naturaliste italien. Il est considéré comme le père de l’anatomie microscopique ou histologie. Son nom reste attaché à des dizaines de structures du corps humain et chez les insectes.


Ils possèdent une double nature : du fait de leur classement ils sont des catalyseurs du processus urbain, et par là il ont des difficultés à s’adapter et sont des freins au développement. C’est justement la raison qui les rend des faits urbains primaires 2.. Bien qu’au cours du temps ils puissent perdre leur structure fonctionnelle, changer de nature, de destination, ils gardent une valeur de position. Ces mutations, leur font souvent changer leur rôle initial dans le tissu urbain, de sorte qu’elles modifient le développement et l’évolution de la ville à traver sa présence. Dans tous les cas la forme, le volume, la situation est la valeur permanante des monuments, car ce sont les seul pivots capables de résister au flux évolutif, continuel et inéluctable des centres-villes. Dans la réalité d’aujourd’hui, ces idées semblent perdues et la spéculation, la diffusion de modèles généraux, l’occupation du territoire sont le nouveau paradigme du développement urbain, depuis longtemps assujetti à des dynamiques d’entreprise, ou d’investissement. La forme de la ville italienne a perdu sa valeur d’œuvre d’art planifiée, elle ne vit que de son extension isotrope, obsédée par l’idée de métropole. Dans ce contexte il n’est plus possible de retrouver la construction d’une architecture qui fonde la ville, qui soit à même d’exprimer les rapports sociaux entre citoyen et état. Cette perte de sens, de direction, fortifie l’affirmation venant du siècle des Lumières que si la ville n’a pas de signification, la ville doit en trouver une. Ce projet veut voir l’hôtel de ville aussi bien comme événement fondamental pour le développement de la ville, essentiel à la sauvegarde de son identité, que comme une expérience prolongée d’un passé qu’on continue à vivre. Cette théorie présuppose, donc, une attitude spécifique par rapport à l’expérience historique: c’est à dire une vision du monument avant tout comme une réponse à un problème architectural bien déterminé et même comme une véritable leçon d’architecture nous obligeant à une confrontation perpétuelle à travers la ruine et la figure du memento mori, comme matière à penser. Le projet de restauration se révèle être une solution au problème de la continuité, s’il prend en considération, dans son devenir, l’amplitude des savoirs qui lui sont connectés : sa naissance devrait donc avoir lieu grâce à une méthode de dialogue conflictuel entre les différents acteurs de l’intervention, en entrainant un échange avantageux d’expériences qui constituerait la matière et la structure du projet. Le passé et la confrontation à la matière de la catastrophe, à travers le Memento Mori, sert en ce cas à inventer le présent, en favorisant les liens dans une relation indissoluble, qui ne cherche pas la conflictualité mais plutôt la continuité. Pour que cela se vérifie, il faut abandonner l’idée du monument comme quelque chose d’achevé et de fini, et surtout l’idée que chaque geste architectural est louable et donc à conserver.

2. Aldo Rossi L’architettura della città, Quodlibet Abitare, Macerata 2011


Il est nécessaire de croire au projet d’architecture comme remède pour la ville, capable également de réaliser une critique constructive du passé, avec lequel le professionnel se confronte pour accomplir un choix responsable par rapport à l’histoire. Ce serait comme vivre dans un temps statique, fixé par des points, un temps dans lequel la mémoire existerait en dehors de l’homme, dans sa propre objectivité, où le sens d’authentique serait indissolublement lié à la fugacité de l’instant de la création. On pourrait considérer le cas de Crevalcore, au vide laissé par l’action dévastatrice du tremblement de terre comme la volonté de donner à l’édifice sa fonction spécifique à l’intérieur de la ville, en partant du peu de fragments restants. L’intérêt, le seul qui puisse vraiment impliquer l’architecte, ne réside pas dans le romantisme de la ruine, mais la conservation active du monument, en tant qu’élément constitutif et fonctionnant de la vie collective. Ce projet se caractérise par sa double capacité de dialoguer avec le passé, et la catastrophe et, en même temps, avec le présent, pour arriver à la valorisation dans la continuité plutôt qu’à la simple restauration de l’édifice ou de collages. L’architecture même, dans sa relation entre ancien et nouveau, devient musée : c’est par la manifestation des restes, l’exaltation des traumatismes passés, le langage du collage qu’on véhicule le message de l’histoire. Le nouvel ensemble devient donc une exposition explicite du temps qui s’est écoulé : en parcourant les salles, on voit comment ancien et nouveau se fondent l’un avec l’autre avec une conscience éthique, autour de la catastrophe.

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Strates temporelles et mutations de l’hotel de ville


Strates temporelles et mutations J’ai choisi comme projet de restructurer le bâtiment central soit l’ancien Hôtel de Ville pour assurer et faire vivre la démarche de mutation du centre ville. Situé face à l’église, l’hôtel de ville est un grand bâtiment rouge avec ses arcades, et sur la partie supérieure de sa façade, le blason de la ville. Véritable symbole du pouvoir en place, il est la pièce centrale et stratégique de cet échiquier urbain mis en place par les romains. Le bâtiment a été reconstruit de 1867 à 1868 selon les plans de l’architecte Luigi Ceschi. L’ancien hôtel de ville était de plus petite taille. Constitué de 3 bâtiments différents, assemblés lors de sa reconstruction, ils forment aujourd’hui le siège de la mairie après de nombreuses reconvertions ; maison communautaire (une sorte de mairie), Église communautaire. Ce bâtiment comprenait, un lieu de débat, une école et un théâtre. En redessinant son plan, on y trouve une superposition de grilles, et de plusieurs types d’occupations différentes dans le temps. On peut facilement faire une analogie avec le plan de la ville elle même où il s’incère et joue un rôle clef. Rappelons qu’un monument romain révèle l’esprit du peuple impérial et que chacun d’entre eux peut être considéré comme une image de l’empire tout entier. Je propose donc la réhabilitation de l’hôtel de ville en centre dynamique de concertation pour le développement du centre ville et de sa périphérie. Le projet s’intègrera dans la grille d’aménagement et dans la nouvelle matrice proposée.

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Elevation de Luigi Ceschi Bâtiment avant sa reconstruction, 1867


HOTEL DE VILLE +0


HOTEL DE VILLE +1

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HOTEL DE VILLE +2


PLAN DE STRUCTURE 0

1

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COUPE AA

393 504

COUPE CC

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FAÇADE VIA G.MATEOTTI

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Potentiel de remise en question de la grille urbaine Si la grille urbaine peut difficilement être mise en cause, la règlementation qui gère sa transformation ou le devenir des bâtiments qui la composent est à réformer. Les vides générés par le seisme offrent dans ce sens un véritable potentiel d’intervention diffus dans la grille romaine. Ils pourraient, en étant conservés, desserer cette trame, et redonner un nouveau sens à cette structure fortement marquée et conditionnée par l’intervention Romaine. Nous poserons ici l’hypothèse que la trace de la catastrophe pourrait devenir la nouvelle matrice pour le futur dévelopement de la commune. La figure du Memento Mori, outil de cette matrice, permetterait de réguler le developpement, touristique, économique, scientifique, lié aux investissements et à la promotion d’un nouveau pôle du savoir. Ces cours, et ces ilots touchés dans la grille, offrent un véritable potentiel de parcours, et d’ouverture. Rappelons que la Passegiata, de la promenade, est l’un des rites, et l’une des traditions les plus vieilles d’Italie qui est celle de l’apparence sociale. Les Italient défilent lors de cette promenade de fin d’après midi en discutant au grès de leurs rencontres. La grille urbaine acquiert alors un nouveau sens dans ses parcelles touchées. Ses cicatrices, ne sont donc plus liées à l’incertitude, à un outil de sa mesure par les augures, mais à un doute structurant ses mutations. Le doute comme à la fois le refus de l’évidence, de l’autorité de pensée, du dogmatisme. Il semble donc bien être une caractéristique de notre liberté de pensée. Mais peut-on s’arrêter là ? Penser librement est-ce uniquement garder intacte la capacité critique ? N’est-ce pas aussi croire et affirmer, et donc trouver des certitudes ? Il ne semble pas nécessaire, avec cette forte écriture d’ensemble, de contraindre par règlements des zones, ou encore ce qui se passent dans les ilôts. Florence en est l’exemple parfait de par la rigueur de sa périphérie et la qualité de ses cours et de ses jardins. Par la suite ma proposition de la trace de la catastrophe comme matrice ouverte est une approche qualitative d’ensemble par un rapprochement d’éléments de qualité (la matrice) qui contribuent à l’homogénéité d’une conception, à la liberté de l’architecte , à un respect de l’histoire et de l’environnement et à une reconnaissance collective des projets.


PHASE 01

PHASE 01

CONCO CU OR N SC OPUORSST PQOUSATK E Q UVAI S K IEO N V ISS I O N C R E V ACLRCEOVRAEL C- OIRT E A L-I E I TA L I E

SIONS Bâtiments touchés par le seisme

Empreinte sur le Cardo

timeline timeline

UNFINISHED UNFINISHED EMILIA EMILIA

timeline

PASSÉ

PASSÉ

PRESENT

PRESENT

Patrimoine existant

Patrimoine existant

Seisme Emilia

Seisme Emilia

VILLE ROMAINE

conc

timeline

FUTUR

PASSÉ

PASSÉ

PRESENT

PRESENT

Patrimoine existant

Seisme Emilia

Seisme Emilia

VILLE ROMAINE

CONCOURS POST QUAKE VISION

SEISME EMILIA

VILLE ROMAINE

SEISME EMILIA

? ?

FUTUR

attitudes

PAST

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Earth quake visions competition Earth quake visions competition

Patrimoine existant

SEISME EMILIA

?

FUTUR

PAST

PAST

Past

CONCOURS POST QUAKE VISION

Past

FUTURE

Past Present

Present Past

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attitudes

FUTURE

PAST + FUTURE

ETERNAL PRESENT

SOLUTION 02 — NEW UTOPIA

SOLUTION 03 — GREFFE

SOLUTION 04 — UNFINISHED EMILIA

ast

Présent

Futur

PAST + FUTURE

ETERNAL PRESENT SOLUTION 04 — UNFINISHED EMILIA

Futur

Past

Present

Past

Futur

Present

Past Past

Past Past

Futur

Present

Futur

FUTURE

Present FuturPast

attitudes

concours young architects competition POST QUAKE VISIONS

SOLUTION 03 — GREFFE

SOLUTION 02 — NEW UTOPIA SOLUTION

PAS

Earth quake visions competition Earth quake visions competitionSOLUTION 01 — RESTORATIONSOLUTION 01 — RESTORATIONSOLUTION 02 — NEW UTOPIA SOLUTION 02 — NEW UTOPIA

Potentiel urbain des cours

UTOPIA

FUTURE

SOLUTION 01 — RESTORATION SOLUTION 01 — RESTORATION

CONCOURS POST QUAKE VISION

CONCOURS POST QUAKE VISION

SEISME EMILIA

FUTUR

PAST

Present

Futur

att

Présent

FuturPast

SOLUTI

Futur Présent Past

Futur

Présent

Past

Futur


Bâtiments touchÊs par le seisme et potentiel de remise en question de la grille urbaine


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Bâtiments touchÊs par le seisme et potentiel de remise en question de la grille urbaine

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1

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Façade

Circulations

Structure

Occupation

Temporalités


MÉTHODE D’INTERVENTION De la situation à la grande échelle Les villes aujourd’hui ont le même besoin qu’il y a plusieurs siècles. Des besoins de communication et de représentation. Elles ont besoin d’être connectées et attractives. Les éléments qui offrent ces nécessités changent et évoluent à travers le temps La ville est constituée de parties standardisées qui donnent une matrice. Les éléments représentent le basique et le squelette disponible. La ville est organisée selon une série de principes généraux qui sont déterminés socialement, culturellement et politiquement et qui dans la plupart des cas, se manifestent au travers de clairs exemples architecturaux et urbains. Comment articuler les prémices d’une grammaire de la ville? C’est la matrice qui a la même valeur qu’une carte génétique. La matrice choisie est celle d’un ilot type composé de trois bâtiments unifiés, l’Hotel de ville sur lequel emergera le projet. Si la grille peut difficilement trouver un nouveau sens par la réhabilitation d’un seul objet, à savoir son Hôtel de ville, nous verrons en quoi les principes de cette matrice, appliqués à l’échelle de ce bâtiment, peut t-elle générer des principes urbains, applicables aux parcelles touchées sur le reste de la trame urbaine. Processus et thématiques d’intervention La conception d’un bâtiment, lié à l’occupation d’une société, ou d’un investissement, fait souvent face à un paradoxe : l’organisation de l’espace fait face à deux besoins, celui d’une flexibilité, et celui de l’expression de l’identité d’entreprise. Alors que la flexibilité dans un bâtiment implique généralement, une répétition, un espace générique, l’entreprise, nécessite une spécificité spatiale, par besoin d’exprimer son identité. Le plus souvent , ce conflit se résout par l’expression de la société, à l’extérieur du bâtiment, en façade, laissant l’intérieur flexible. Comment résoudre ce conflit ? Quelle place accorder à l’expression de l’occupant, et à la flexibilité? Cette méthode d’intervention tentera de répondre à ce défi, en manipulant précisément certains éléments inhérents à la construction d’un bâtiment : tels que sa structure, sa circulation, sa façade, son occupation... Son usage, résultant de l’espace formé, ne devient alors pas simplement accessoire, mais partie intégrante de la chorégraphie et de l’expérience spatiale. Plus important encore, ils offrent une échelle de compréhension de la vie intérieure de chaque projet . C’est par l’isolement de chacun de ces éléments, que nous opérerons sous la forme d’une archéologie rétroactive. Un moyen conçu pour les mettre en relation les éléments d’un batiment les uns avec et contre les autres. Le projet tentera de voir par la suite, comment ces éléments marquant du vocabulaire architectural, peuvent définir une nouvelle matrice à travers la réhabilitation de l’hôtel de ville, et définir de nouveaux principes urbains, applicables sur les parcelles touchéss dans la ville romaine.

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L E XIQ UE

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Apparition

Espace / Temps

ESPACE TEMPS

Dou

Cent

EXURBAN


ute

tralité

Elasticité

ELASTICITÉ

Memento Mori

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NISATION

MEMENTO MORI


APPARITION

DOUTE

Élément essentiel du répertoire des illusionistes au même titre que son contraire, la → disparition, qui lui est souvent associée.

→ Le

Au xixe siècle → jean-eugène robert houdin met au point des tours spectaculaires basée sur le principe d’apparitions en série comme le Foulard aux surprises ou La Bouteille inépuisable. Il donne un descriptif de ce dernier dans son livre Confidences et révélations (1868) : « Je me présente en scène ayant en main une petite bouteille remplie de vin de Bordeaux. Je la vide complétement en versant son contenu dans des verres et je la rince ensuite avec un peu d’eau, en ayant soin de la bien faire égoutter. Ce préambule terminé, je m’avance au milieu des spectateurs et, tenant toujours la bouteille rencersée, je leur offre d’en faire sortir toute la liqueur qu’il pourront désirer. Ma proposition est généralement acceuillie avec une grande faveur. De tous cotés des demandes me sont aussitôt faites par des gens aussi désireux de s’assurer de la réalité du tout que de la qualité des liqueurs. Ces liqueurs sont aussitôt fournies que demandées. Il n’en est aucune, spiriteuse ou ...»

Ce doute permet de «reba des cahiers des charges. L de mettre en cause ses pro celles des autres, et de se dogmatisme.

ESPACE-TEMPS

CENTRALITÉ

→ L’idée

→ La

que l’espace et le temps ne sont pas nécessairement deux notions indépendantes se fait pressentir dès le xixe siècle. En 1916, Albert → Einstein conçoit la théorie de la relativité générale qui postule un espace-temps à quatre dimensions, dont les points, appelés «événements», sont représentés par trois coordonées d’espace et une coordonée de temps. Cherchant à accorder la loi de la gravitation à la théorie de la relativité, il imagine que l’espace-temps est courbe, et que ce sont les distributions d’énergie qui courbent cet espace-temps. Il prévoit que la trajectoire d’un rayon lumineux doit s’incurver au voisinage d’une masse gravitationnelle importante. Toutes les observations astronomiques corroborent jusqu’à aujourd’hui les hypothèses imaginées par Einstein pour expliquer l’univers.

doute permet de réi que sont le site et le prog en cause critique et prosp

Le doute est une méthod un récit commun. En dém et les automatismes qui o tion de la commande, l’a deviennent un élément cl

Cette recherche portant l question est une façon de de repousser les limites, d

Le temps du projet debvi espace d’interrogation et n’est définitif, tout peut c plaisir du jeu, mais pour adapté à la commande et

centralité qualifie l’a central sur sa périphérie. une notion hiérarchisée d tion par W.E Christaller du pouvoir d’attraction o élément qui repose à la fo central et sur son accessib un centre urbain, un équ spécialisé (centre comme administratif...). L’accessi majeure. L’attraction peu divers critères.


interroger les données gramme dans une remise pective.

attre les cartes», de sortir Le doute est une façon opres certitudes, comme prémunir contre tout

de, il permet de construire montrant les mécanismes ont conduit à la formulaanalyse critique, l’enquête lef du projet.

le bien-fondé même de la e dépasser les évidences, d’élargir les périmètres.

ient dans son entier un de proposition : rien changer, non pour le que le projet soit mieux t au contexte.

action d’un élément Elle a été définie comme de desserte et d’attracen 1933. Elle dépend ou de diffusion de cet ois sur l’effacité du pôle bilité. L’élément peut être uipement polarisant plus ercial, culturel, financier, ibilité est une condition ut être évaluée grâce à de

ÉLASTICITÉ → Physique.

Qualité d’un objet à être déformable tout en reprennant sa forme d’origine lorsque la contrainte qu’on lui applique disparaît. On peut étirer le réel, il ne se déchire pas ; on peut lui greffer autant de couches que l’on veut, il ne s’effondre pas ; on peut le froisser, le comprimer, le plisser, ou l’enrouler sur lui même, la déformation ne s’inscrit pas dans son tissu. Corps indéchirable, extensible et pliable à volonté, les perspectives que la manipulation de la réalité ouvre à l’artiste tout aussi complexes. À force de tordre le réel, peut-il se dédoubler? Ou faut-il plutôt, comme un surfeur prend le tube, s’essayer à glisser sur ses surfaces pour épouser la souplesse de ses formes et s’infiltrer subrepticement entre ses strates? Encore faut-il savoir se perdre dans ses replis. Car le corollaire de l’inépuisable capacité du réel à se métamorphoser sans se déliter, à muter pour

mieux se recombiner, c’est sa resistance. [ → Accélération] [ → Furtivité] [ → Mutants]

MEMENTO MORI Memento mori est une locution latine qui signifie « souviens-toi que tu mourras ». Elle désigne un genre artistique de créations de toutes sortes, mais qui partagent toutes le même but, celui de rappeler aux hommes qu’ils sont mortels et la vanité de leurs activités ou intérêts terrestres. On dit que dans la Rome antique, la phrase était répétée par un esclave au général romain lors de la cérémonie du triomphe dans les rues de Rome. Debout derrière le général victorieux, un serviteur devait lui rappeler que, malgré son succès d’aujourd’hui, le lendemain était un autre jour. Le serviteur le faisait en répétant au général qu’il devait se souvenir qu’il était mortel, c’est-à-dire « Memento mori ». →

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BIBL I O GR A P HIE

Harmut Rosa

Romain Meffre, Yves Marchand

Marc Augé

CRAU N°28

Accélération, une critique sociale du temps Édition la découverte, 2010

Le temps en ruine Édition Galillée, 2003

Marc Augé

Où est passé l’avenir Édition Seuils, 2011

Jean Baudrillard

Vérité ou radicalité de l’architecture Sens & Tonka, 2013

Koolhaas, Boeri, Kwinter, Tazi, Obrist Mutations Arc en rêve, 2000

Olivier Julien Nanotechnologies : la révolution invisible Arte France, 2012

Benoit Felici

Unfinished Italy Zelig film, 2011

Wim Wenders

Rendez vous à Palerme Océan Films, 2008

The ruin of detroit Steidl, 2011

La modernité suspendue Édition du patrimoine, 2013

Gilbert Picard

Empire romain D.Vincent L’equerre Paris, 1964

Aldo Rossi

L’ architettura della città Quodlibet Abitare, Macerata, 2011

Andrzej Kadluczka

Il monumento Architettonico e la formula dinamica Venezia, 2000

Rem Koolhaas, Bruce Mau S,M,L,XL — A typical plan The monacelli press, 1997

Robert Adams

The place we live Musée du jeu de paume, 2014

Lewiz Baltz

Common places Le B.A.L, 2014

97




I

concours

post

quake

visions

II

re t o u r

sur

les

ĂŠ venemen t s

III

la

r u in e

c omme

m at ri c e

IV

p ro j e t

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