Actes du séminaire des 21 et 22 avril 2011 : l'information et l'observation culturelle, acte III

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Acte III

Séminaire

L’Information et l’observation culturelles

Economie, production, diffusion, emploi, formation : mais comment font-ils ailleurs ?

21-22

Le Théâtre des 13 vents, Centre Dramatique National Languedoc-Roussillon Montpellier

Domaine de Grammont, AVRIL 2011 Mont pellier

Actes du séminaire coordonnés par Thomas Grospiron

Organisé par www.coreps-languedoc-roussillon.fr

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Introduction

INTRODUCTION Économie, production, diffusion, emploi, formation : mais comment font-ils ailleurs ? En 2007, sous l’impulsion conjointe de l’Etat et de la Région Languedoc-Roussillon, se tenait un temps fort dans le paysage culturel : Acte I L’information et l’observation culturelles : un point d’appui du développement du spectacle vivant et de l’audiovisuel. Avec la restitution publique et la mise en débat de trois études régionales – portant sur l’emploi, la formation et les conditions de création et de diffusion des œuvres – ces deux jours d’échanges avaient permis de dresser les lignes de force du développement du spectacle vivant, du cinéma et de l’audiovisuel en Languedoc-Roussillon au travers d’engagements forts de la Drac et de la Région. Après bientôt sept années de travaux – dont un point d’étape réalisé en 2009 (Acte II) – menés en lien constant avec les syndicats représentatifs en région, s’ouvre maintenant l’Acte III de cette réflexion collective dans un contexte rendu propice à tous les questionnements. Evolutions technologiques, mutations structurelles, financières, réglementaires et territoriales, le secteur tout entier doit, sans cesse, réinventer sa trajectoire, son équilibre. Questionner ces mutations, les confronter à d’autres pratiques ou approches pour mieux accompagner le développement du spectacle vivant, du cinéma et de l’audiovisuel, tel est l’objectif de ce nouveau séminaire. Moment de rencontre incontournable entre professionnels, le programme de cet Acte III se veut résolument ouvert sur l’Europe et l’international pour mieux nourrir et enrichir la réflexion et se construit autour de deux séances plénières et de quatre ateliers :

Séance plénière 1 La diffusion des œuvres, du local à l’international : les dispositifs de soutien en question.

Ateliers • Modèles économiques, entre utopie et inventivité : économie sociale et solidaire, mutualisation, nouvelles formes d’activités, quels apports face aux mutations à l’œuvre dans le secteur ? • Transversalité des parcours professionnels entre cinéma, audiovisuel et spectacle vivant : optimiser une vie professionnelle en multipliant ses réseaux, mythe ou réalité ? • Numérique et évolution des métiers : la création artistique face aux nouvelles technologies, quelles mutations des pratiques professionnelles et des emplois, comment les accompagner et les anticiper ? • La diffusion interrégionale, point d’appui au développement de la circulation et de la visibilité des œuvres du spectacle vivant : la coopération interrégionale, un nouveau souffle pour la diffusion ?

Séance plénière 2 Emplois et métiers de demain, quelles perspectives pour les professionnels ? Quels enjeux pour un meilleur accompagnement du secteur ?

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O M S SOMMAIRE

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Programme

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Jeudi 21 avril Vendredi 22 avril

Séance d’ouverture

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Accueil Ouverture Introduction générale du séminaire

Séance plénière 1 La diffusion des œuvres, du local à l’international : les dispositifs de soutien en question(s) Échanges avec la salle

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Sommaire

E R I Séance plénière 2

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Ouverture

Séance plénière 2

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Emplois et métiers de demain, quelles perspectives pour les professionnels ? Quels enjeux pour un meilleur accompagnement du secteur ? Échanges avec la salle

Synthèses des ateliers 1 et 4

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Biographie des intervenants

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Lexique

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Liste des participants

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MM

PR OG R A 6

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Programme : jeudi 21 avril

PROGRAMME Jeudi 21 avril Accueil à partir de 13:00 13:30 - Présentation et signature publique de la Charte d’accompagnement des œuvres et des équipes artistiques professionnelles du spectacle vivant en Languedoc-Roussillon par lescollectivités territoriales, l’Etat et les partenaires sociaux. 14:30 - Ouverture du séminaire Accueil Solange Dondi, présidente de Réseau en scène Languedoc-Roussillon Jean-Marc Urrea, président de Languedoc-Roussillon Cinéma

Ouverture Georges-François Hirsch, directeur général de la Création artistique, ministère de la Culture et de la Communication Christian Bourquin, président du Conseil régional Languedoc-Roussillon Claude Baland, préfet de la région Languedoc-Roussillon, préfet de l’Hérault

15:15 - Introduction générale du séminaire Jean Hurstel, président fondateur du réseau culturel Banlieues d’Europe, auteur de « Une nouvelle utopie culturelle en marche ? Essai sur une autre vision de l’action culturelle en Europe ».

15:30 - Séance plénière 1 - suivie d’un débat avec la salle La diffusion des œuvres, du local à l’international : les dispositifs de soutien en question(s) Animation et modération : Nicolas Marc, directeur de La Scène Intervenants : Fabien Jannelle, directeur de l’Onda - Office national de diffusion artistique Karine Gloanec-Maurin, présidente de la commission culture de l’ARF - Association des Régions de France Jean-François Guéganno, directeur du Département du développement et des partenariats de l’Institut français Antoine Leclerc, délégué général du festival de cinéma d’Alès Itinérances, responsable de l’association Carrefour des Festivals Sébastien Ramirez, danseur, chorégraphe de la compagnie Clash 66 Pascal Brunet, directeur de Relais Culture Europe

19:00 > 20:00 - Crossing Borders / A la frontière, programme européen de courts métrages Soirée courts métrages issus de la collection Crossing Borders, proposée et animée par Antoine Leclerc.

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PROGRAMME Vendredi 22 avril 09:30 - Introduction de la journée par Didier Salzgeber, coopérateur culturel Intervenants : Alain Soussen, chef du service mutations économiques à la Direccte Languedoc-Roussillon - Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi Jack Aubert, président de la CPNEF AV - Commission paritaire nationale pour l’emploi et la formation de l’audiovisuel Johannes Studinger, UniMei - syndicat mondial des médias, du spectacle, des arts et du sport Jean-François Pujol, secrétaire général adjoint de la FNSAC - Fédération nationale des syndicats du spectacle de l’audiovisuel et de l’action culturelle - CGT Spectacle

10:30 - Quatre ateliers, chacun suivi d’un débat avec le public Atelier 1 - Modèles économiques, entre utopie et inventivité Economie sociale et solidaire, mutualisation, nouvelles formes d’activités : quels apports face aux mutations à l’œuvre dans le secteur ? Animation : Nathalie Moureau, économiste et maître de conférences à l’Université Montpellier III Rapporteur : François Bernard, réalisateur multimédia et accompagnateur d’activité ou d’entreprise d’économie solidaire, vice-président de la chambre Régionale de l’économie sociale et solidaire d’Ile-de-France, En présence de : Christine Vergnes, directrice-adjointe de la culture et du patrimoine, Région Languedoc-Roussillon Xavier Quérond, compagnie La Grosse Situation, soutenue par Créa’Fonds, Fonds mutuel d’accompagnement à la production et à la diffusion du spectacle vivant Adrien Guillot, ingénieur culturel Philippe Berthelot, président de l’Union fédérale d’Intervention des structures culturelles, directeur de la Fédurok – Fédération nationale de lieux de musiques actuelles/amplifiées) Samo Selimovic, chargé des projets européens de Bunker, coopérative slovène intégrée au projet Sostenuto Caroline Couret, chargée de mission de Fusic - Fundació societat i cultura - Barcelone, membre du réseau creative tourism network

Atelier 2 - Transversalité des parcours professionnels entre cinéma, audiovisuel et spectacle vivant Optimiser une vie professionnelle en multipliant ses réseaux, mythe ou réalité ? Animation : Xavier Timmel, consultant pour Harmoniques Rapporteur : Valérie Ruche, directrice du CIBC LR - Centre interinstitutionnel de bilans de compétences Languedoc-Roussillon En présence de : Alain Soussen, chef du service mutations économiques à la Direccte Languedoc-Roussillon - Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi Patrick Ferrier, directeur du CFPTS - Centre de formation professionnelle aux techniques du spectacle Pascal Charousset, représentant du Synpase en Languedoc-Roussillon - Syndicat national des prestataires de l’audiovisuel scénique et événementiel Philippe Maurizi, producteur de spectacles, de concerts de musiques actuelles, consultant musical pour le cinéma Jean-Christophe Bouhier, régisseur audiovisuel

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Programme : vendredi 22 avril

Atelier 3 • Numérique et évolution des métiers La création artistique face aux nouvelles technologies : quelles mutations des pratiques professionnelles et des emplois, comment les accompagner et les anticiper ? Modération : Jean-Paul Fourmentraux, sociologue du travail et des arts, maître de conférences à l’Université Lille III : Arts et culture et laboratoire interdisciplinaire en sciences de la communication Geriico Animation : Philippe Le Guern, professeur à l’université d’Avignon, chercheur associé au laboratoire G. Fridmann (Paris I CNRS), responsable de l’étude en cours « S’adapter ou périr ? Comment les professionnels de la culture négocient le virage numérique » Rapporteur : Frédéric Burnier, chef du service de l’inspection du secrétariat général du CNC - Centre national de la cinématographie et de l’image animée En présence de : Laurent Hébert, directeur général de la CST - Commission supérieure technique de l’image et du son Philippe Baudelot, consultant en arts numériques et membre du Ran - Réseau des arts numériques Grégory Diguet, directeur du label Bipolar, bureau de production et de diffusion en art

Atelier 4 - La diffusion interrégionale, point d’appui au développement de la circulation et de la visibilité des œuvres du spectacle vivant La coopération interrégionale : un nouveau souffle pour la diffusion ? Animation : Anne Quentin, journaliste au magazine La Scène Rapporteur : Emmanuel Négrier, chercheur CNRS au Centre d’études politiques d’Europe latine, Université Montpellier I Intervenants : Fabien Jannelle, directeur de l’Onda – Office national de diffusion artistique Véronique Chauvois, direction du développement culturel spectacle vivant Conseil régional du Limousin, membre de Rencontres à l’Ouest Anne Tanguy, directrice du Théâtre d’Auxerre, membre du réseau Quint’Est Karine Gloanec-Maurin, présidente de la commission culture de l’ARF - Association des Régions de France Joël Brouch, directeur de l’Oara - Office artistique de la région Aquitaine, co-signataire de la Charte de diffusion interrégionale Jean-Pierre Wollmer, directeur de Réseau en scène Languedoc-Roussillon

12:30 - Déjeuner offert par la Région Languedoc-Roussillon 14:00 - Séance plénière 2 - suivie d’un débat avec la salle Emplois et métiers de demain, quelles perspectives pour les professionnels ? Quels enjeux pour un meilleur accompagnement du secteur ? Modération et animation : Didier Salzgeber, coopérateur culturel Avec les rapporteurs des 4 ateliers : François Bernard, atelier 1 : « Modèles économiques, entre utopie et inventivité » Valérie Ruche, atelier 2 : « Transversalité des parcours professionnels entre cinéma, audiovisuel et spectacle vivant » Frédéric Burnier, atelier 3 : « Numérique et évolution des métiers » Emmanuel Négrier, atelier 4 : « La diffusion interrégionale, point d’appui au développement de la circulation et de la visibilité des œuvres du spectacle vivant »

16:00 - Clôture du séminaire

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Ouverture du sĂŠminaire


Accueil

Solange Dondi, présidente de Réseau en scène Languedoc-Roussillon Mesdames, Messieurs, il me revient d’inscrire ce séminaire Acte III dans la continuité du premier acte initié en 2007 sous l’impulsion conjointe de l’Etat et de la Région Languedoc-Roussillon. Je tiens à saluer l’exemplarité de ce Comité régional des professions du spectacle (Coreps) dans la mise en œuvre d’une réelle politique d’action et de concertation, et je ne pense pas me tromper en disant qu’il n’y a pas d’équivalent aussi actif dans une autre région. Je ne voudrais fâcher personne, je me suis renseignée et effectivement, ce Coreps a énormément travaillé depuis sa création. Durant toutes ces années, avec l’Acte II qui était l’étape intermédiaire en 2009, en lien constant avec les syndicats représentatifs en région, nombre de travaux ont été réalisés à l’écoute de ce secteur du spectacle vivant, du cinéma et de l’audiovisuel dans la région Languedoc-Roussillon. Afin que les travaux de ce Coreps puissent être suivis dans les meilleures conditions professionnelles, une coordinatrice a été recrutée en 2010, Laure Mazé, que je salue ici. Ce séminaire Acte III auquel vous apportez votre contribution se veut résolument tourné vers l’Europe et l’international. Alors, au moment où le monde bouge, où le progrès technologique modifie en profondeur nos relations aux autres, nous nous devons de proposer à la réflexion les enjeux d’avenir, les utopies que portent la culture et par là même ceux qui en sont les acteurs majeurs, c’est-à-dire vous. Avant de passer la parole à Jean-Marc Urrea, je voudrais remercier très chaleureusement les équipes organisatrices de ce séminaire. Tout d’abord, Monsieur Karim Ghiyati, directeur de Languedoc-Roussillon Cinéma, Jean-Pierre Wollmer, directeur et Yvan Godard, directeur-adjoint de Réseau en scène Languedoc-Roussillon, et plus particulièrement, Manon Martin qui a été stagiaire et qui a assuré avec brio la préparation de ce séminaire, soutenue en cela par toute l’équipe qui travaille à Réseau en scène Languedoc-Roussillon ; le Théâtre des 13 vents et son directeur, Jean-Marie Besset, ainsi que toute l’équipe des 13 vents pour son accueil, et particulièrement celle qui a œuvré pour la logistique et l’ensemble de la technique qui nous accueillent aujourd’hui ; l’ensemble des partenaires du Comité régional des professions du spectacle du Languedoc-Roussillon qui œuvre sans relâche depuis 2004, sans qui rien de tout cela ne serait arrivé ; la Région Languedoc-Roussillon, le ministère de la Culture et de la Communication, Monsieur Hirsch, ses services déconcentrés, Monsieur Didier Deschamps, directeur de la Drac Languedoc-Roussillon, la Ville de Montpellier pour son accueil, les intervenants qui ont répondu présents à cette invitation et vous tous. Je vous remercie et je laisse la parole à Jean-Marc Urrea, président de Languedoc-Roussillon Cinéma.

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Ouverture du séminaire

Jean-Marc Urrea, président de Languedoc-Roussillon Cinéma Madame la Vice-présidente du Conseil régional, Monsieur le Directeur régional des affaires culturelles, Monsieur le Directeur général de la Création artistique, Mesdames, Messieurs, Chers amis, « Économie, production, diffusion, emploi, formation ». Je ne me souviens pas avoir assisté à beaucoup de rencontres qui s’établissaient à partir de l’ensemble de ces notions. L’habitude est plutôt de découper tout cela en morceaux, d’un côté production et diffusion, de l’autre emploi et formation, le terme économie pouvant s’accrocher aussi bien à l’un ou à l’autre de ces morceaux. Il est encore plus rare qu’à l’occasion d’une réunion professionnelle on se place au croisement de pratiques du spectacle vivant, du cinéma et de l’audiovisuel, quand bien même ces deux secteurs appartiennent à la même branche professionnelle. Tapez « spectacle vivant et cinéma » sur Google, vous ne trouverez que très peu d’entrées communes à l’exemple du « guide pratique et utile pour votre vie professionnelle d’intermittent » ou « les entretiens de Macha Makeïeff à l’occasion de l’exposition consacrée à son oncle, Jacques Tati, à la Cinémathèque en 2009 ». Les 21 et 22 avril, en ce moment à Montpellier, en Languedoc-Roussillon, on atteint des sommets en décidant de mettre au travail l’ensemble de ces notions dans un même temps de réflexion : économie, cinéma, production, formation, spectacle vivant, emploi et diffusion. Pour autant, on ne fabrique pas un gros gâteau de Savoie lourd et indigeste. On conçoit un séminaire de deux journées sous l’impulsion conjointe de la Drac Languedoc-Roussillon et de la Région Languedoc-Roussillon, préparé et organisé par les deux associations que sont Réseau en scène Languedoc-Roussillon et Languedoc-Roussillon Cinéma. Un Acte III largement nourri des Actes I et II, des années 2007 et 2009 ainsi que des travaux au long cours organisés par le Coreps de notre région. En cela, nous sommes dans la ligne de travail proposée par Didier Salzgeber, en clôture du dernier séminaire : « il nous faut savoir mieux comprendre les parcours d’entreprises, les parcours artistiques, les parcours de territoires. C’est à cette condition que nous arriverons à explorer et à construire de nouvelles articulations1». Je crois à la mobilisation de la connaissance et à la permanence du débat qui sont la garantie de notre capacité à repenser le sens et la forme de nos actions. Je vais saluer ici la présence importante des représentants du cinéma et de l’audiovisuel, et en particulier tous ceux qui œuvrent à leur développement dans le cadre de l’association Réalisateurs et auteurs en Languedoc-Roussillon (Real) et ceux de la Ligue des producteurs extraordinaires du Languedoc-Roussillon qui se réunissent fréquemment et qui ouvrent des chantiers essentiels à nos travaux. Enfin, je remercie l’équipe de Languedoc-Roussillon Cinéma dans son ensemble : Karim Ghiyati, son directeur, Sandrine Courouble qui a beaucoup œuvré à la mise place de ce séminaire ainsi que Piala Coïc, Marin Rosenstiehl, Nathalie Degouzon, Pierre-Yves Cruaud, Amélie Boulard, Valentine Pignet, Delphine Jouan et Hélène Pernette. 1

Citation de Didier Salzgeber en clôture du séminaire Acte II, l’information et l’observation culturelle, un point d’appui du développemment du spectacle vivant, du cinéma et de l’audio visuel en Languedoc-Roussillon le 24 mars 2009 http://www.coreps-languedoc-roussillon.fr/index.php?option=com_flexicontent&view=items&cid=93&id=241&Itemid=17

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Georges-François Hirsch, directeur général de la Création artistique au ministère de la Culture et de la Communication Mesdames, Messieurs, La réunion d’aujourd’hui est chargée de symboles et constitue une étape importante. Je suis heureux d’y assister. La signature de la « Charte d’accompagnement des œuvres et des équipes artistiques professionnelles du spectacle vivant en Languedoc-Roussillon », élaborée avec les organisations d’employeurs et de salariés ainsi que les collectivités territoriales et l’Etat est l’aboutissement de mois d’efforts, auxquels vous avez tous contribué. C’est une démarche forte et je souhaite sincèrement remercier tous les élus et toutes les organisations professionnelles, d’employeurs et de salariés, qui sont dans cette salle et qui ont participé à cette discussion, à ce dialogue. Leur travail a démontré que nous pouvions réussir à trouver des chemins communs, sous l’égide de la Drac Languedoc-Roussillon. Je salue le travail de Didier Deschamps et de toute son équipe. Cette démarche s’est inscrite dans la continuité des Entretiens de Valois qui ont conduit à la mise en place des « conférences du spectacle vivant et de l’audiovisuel en région ». Elle a poursuivi plusieurs buts : l’établissement d’un diagnostic partagé visant à identifier de manière précise les forces et les faiblesses de l’équipement et de l’aménagement du territoire aussi bien que la mise en œuvre de modalités d’actions concertées, permettant notamment de soutenir l’évolution des démarches artistiques des institutions ainsi que le développement de la création dans les prochaines années. C’est assez dire le caractère exemplaire de cette signature. Elle nous éloigne, en visant précisément le contraire, du panorama que vient de nous décrire Jean-Marc Urrea lorsqu’il dit que nous séparons parfois dans nos raisonnements production, création, économie et emploi. Je crois que nous sommes ici au cœur de ce sujet et c’est ce qui donne toute son importance à la réunion d’aujourd’hui. Pour des raisons d’opportunité, la Région Languedoc-Roussillon et la Drac Languedoc-Roussillon ont souhaité fusionner la conférence du spectacle vivant et le Coreps car un travail de réflexion conforme aux objectifs assignés à la première avait déjà été entrepris au sein de la seconde. Trois études ont été rendues dès 2007 dédiées respectivement à la structuration, au financement et à l’emploi dans le secteur du spectacle vivant et de l’audiovisuel. Vous savez combien l’Etat est attentif à ces questions qui ont fait l’objet d’un certain nombre de groupes de travail, dans le cadre des Entretiens de Valois notamment. Ces réflexions conduisent à un diagnostic partagé sur la structuration de l’emploi. La pérennisation de l’emploi dans le spectacle vivant ne peut certes pas s’exonérer des impératifs budgétaires. Pour autant, l’Etat et les collectivités territoriales ont un rôle fondamental à tenir en cette matière. Tous les partenaires en effet doivent s’engager dans la lutte contre la précarité et pour une sécurisation des parcours professionnels. Les conclusions de vos propres études, vos constats ont fait écho aux réflexions que nous développons au niveau national et je m’en réjouis. Vous avez notamment constaté l’urgence de développer des collaborations concernant le soutien aux équipes artistiques et à leur structuration pour mieux adapter les conditions de production aux réalités de la diffusion tout en favorisant l’émergence.

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Ouverture du séminaire

Vous avez également constaté que de nombreuses équipes artistiques hésitent parfois à s’inscrire durablement dans une démarche de production. Leur structuration permettra de développer une double dynamique, en faveur de la création et de la production. Au regard de différentes expériences exprimées par les participants, vous avez envisagé la mise en œuvre d’une réflexion sur l’accompagnement et la production. Ces travaux devront faire l’objet d’un compte-rendu lors de la prochaine séance plénière du Coreps. La création pose aujourd’hui la question de la refondation des politiques publiques. Il est donc nécessaire de dialoguer en amont avec les différents financeurs publics. La situation budgétaire contrainte de l’ensemble des collectivités publiques impose désormais une meilleure concertation entre les collectivités, l’Etat et les professionnels créant la nécessité d’un dialogue permanent entre tous. En Languedoc-Roussillon par la signature de cette charte, vous avez clairement posé les enjeux de ces évolutions pour la création et je fais le vœu d’une collaboration entre l’ensemble des acteurs concernés de la profession, les collectivités et l’Etat servant d’exemple au soutien de la création dans notre pays. Je vous souhaite bien sûr d’excellents travaux et redis toute ma gratitude à tous les participants à cette réunion d’avoir été là pour porter aujourd’hui sur les fonds baptismaux cette charte qui, je l’espère, sera la première d’une longue série d’autres, conclues partout en France.

Josianne Collerais, vice-présidente du Conseil régional Languedoc-Roussillon et présidente de la Commission culture, patrimoine, cultures occitane et catalane Le Président Christian Bourquin se faisait un plaisir de vous accueillir. Il voulait saisir l’occasion de cette rencontre pour exprimer devant vous l’engagement du Conseil régional sur les trois prochaines années de son mandat, envers les acteurs culturels. Cependant, la venue d’une ministre d’Etat l’a contraint à bousculer son agenda. L’objet de cette visite concernant l’emploi et la formation, une des compétences obligatoires de la Région, fait qu’il se devait d’être à ses côtés, compte tenu de sa fonction. Il regrette sincèrement de ne pouvoir être là et vous prie de l’en excuser. Vous l’aurez compris, je le représente donc, avec fierté et émotion car j’ai conscience de l’importance du moment. Je ne trahirai pas sa pensée profonde en vous confirmant sa volonté et son ambition de poursuivre la dynamique culturelle impulsée par Georges Frêche depuis 2004, que je m’efforce avec conviction de mettre en œuvre et de toujours faire évoluer depuis 2008 en relais du travail mené par Patrick Malavielle. Cette ambition, ce travail de fond pour toujours mieux accompagner ce secteur professionnel font de la Région un interlocuteur incontournable des artistes et des professionnels de la culture.

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La signature de la Charte, une première en France qui, je l’espère, fera des « petits », est le reflet des relations fortes qui se sont nouées ici, entre la Région, l’Etat, les collectivités territoriales et les partenaires sociaux. Nos initiatives communes sont souvent des références au niveau national et les acteurs culturels régionaux sont de plus en plus pris en exemple pour la qualité de leur travail et l’exemplarité de leurs projets. Je partage avec le Président Bourquin cette idée forte « qu’une politique culturelle ne peut se construire qu’avec des partenaires et des alliés ». Ce secteur est trop enclin à une marchandisation ou à une instrumentalisation. Nous avons besoin d’être unis, artistes, penseurs, organisateurs et politiques pour le défendre en France, en Europe et dans le monde. L’art et la culture doivent être au cœur des politiques publiques. Ces disciplines doivent marquer de leur influence les compétences obligatoires d’une Région : la formation professionnelle, l’éducation, l’économie et l’aménagement du territoire. Elles doivent par leur seule présence au sein de l’institution, marquer le sens de l’action publique et les valeurs d’humanisme, de partage, de générosité que nous voulons affirmer. Avec le Président Christian Bourquin, nous croyons en la force de la créativité et de l’action culturelle pour tous nos territoires. Et nous serons à vos côtés pour les faire avancer, ici en Languedoc-Roussillon mais aussi lors des prochaines échéances qui seront les nôtres. Ces mots sont pesés, ils se concrétisent par des actes, preuves de cet engagement. Alors que la plupart des collectivités souffrent des décisions fiscales du gouvernement qui engendrent souvent la baisse des budgets culturels, le Président Christian Bourquin, grâce à nos importants échanges, a fait voter avec sa majorité une augmentation du budget culture et patrimoine de 4,92 %. Une part conséquente de cette augmentation sera au bénéfice du spectacle vivant car l’ambition nous tient, et nous voulons aller plus loin sur ce mandat. Cet argent est dédié évidemment aux projets dont je voudrais fixer devant vous, les trois axes majeurs de ces trois prochaines années : dans un premier temps, la poursuite d’un soutien à la construction d’équipements culturels nécessaires à l’équilibre des territoires, au travail artistique et à la rencontre des œuvres avec des publics nombreux et variés. Entre 2011 et 2014, j’aurai le plaisir aux côtés du Président Christian Bourquin, d’inaugurer de nouveaux lieux importants : le Théâtre de l’Archipel de Perpignan, la Scène de musiques actuelles de Nîmes, la salle de spectacle de Saint-Chély-d’Apcher en Lozère, les espaces du Pôle Cirque à Alès et, j’espère que nous pourrons tenir les engagements pris avec l’Etat dans le cadre du Contrat de projets Etat-Région (CPER2) révisé, concernant la rénovation de la Scène nationale de Sète et la construction du Centre de développement chorégraphique à Uzès, véritable lieu de travail en faveur de la danse. En matière de cinéma et d’audiovisuel, le Conseil régional vient de voter un plan de soutien sur trois ans à la rénovation des salles de cinéma et à l’équipement numérique, notamment celles situées en milieu rural. Dans un second temps, une accentuation du soutien régional sur certaines disciplines. Cela concerne les musiques actuelles, les arts de la rue et les arts du cirque et les professionnels du cinéma, de l’audiovisuel. Des soutiens qui n’existaient pas avant 2004. Nous allons renforcer notre aide à la production et à la diffusion des musiques actuelles. Et pour être mieux à l’écoute et au plus près de ce secteur, nous allons adapter nos aides à ses besoins de structuration, en forte mutation, et allons favoriser l’ouverture de lieux nouveaux. Par exemple, en partenariat étroit avec la Drac Languedoc-Roussillon, le Conseil général et la Ville de Carcassonne nous venons d’ouvrir un nouveau lieu dédié à ces musiques : Le Chapeau rouge3. Concernant les arts de la rue, nous allons continuer à favoriser la création, la diffusion et l’ouverture internationale de ce secteur, avec des crédits supplémentaires. Je peux vous annoncer qu’en 2011, nous allons lancer un réseau régional autour des arts de la rue avec davantage d’aides à la production, à la diffusion et une incitation à la diffusion internationale.

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Le Contrat de projets Etat-Région est un document qui fixe les engagements pluriannuels de l’Etat et de la Région sur les grands axes d’une stratégie commune. Ils pourront être rejoints par d’autres partenaires publics en fonction des objectifs que ceux-ci souhaitent partager et dans lesquels ils voudront s’investir.

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L’association 11bouge œuvre au développement des musiques actuelles sur le département de l’Aude à travers la gestion de la salle du Chapeau Rouge à Carcassonne, en lien avec le développement des cultures urbaines sur l’agglomération du Carcassonnais.


Ouverture du séminaire

Sur le cinéma et l’audiovisuel nous avons fait un bond considérable en quatre ans. En nombre de jours accueillis de tournage, nous sommes passés de la 15e à la 6e place. Les producteurs nous sollicitent de plus en plus et je m’en réjouis au regard de la qualité de projets, de l’impact économique et des retours directs sur l’emploi pour les professionnels de la région. Nous sommes là sur un champ concurrentiel, nous pouvons attirer encore davantage de tournages. Mais pour ce faire, en plus des moyens financiers non extensibles que propose la Région, nous avons besoin de jouer collectif. L’exemple de la série Antigone 344 à Montpellier, avec le partenariat Région, Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC5), Agglomération de Montpellier, Ville de Montpellier, Languedoc-Roussillon Cinéma est parfait pour illustrer cela. Je sais, je sens, que bientôt la dynamique régionale sur ce secteur va nous proposer des opportunités qu’il ne faudra pas rater. Notre région a une spécificité artistique forte qui est la danse. Je veux que nous gardions cette force. Avec le festival Montpellier Danse Languedoc-Roussillon, avec le Centre chorégraphique national et l’Agora à Montpellier, avec le Centre de développement chorégraphique d’Uzès, avec le travail des autres lieux culturels, et le talent de nos artistes, je pense que nous devons continuer à être ambitieux sur cette discipline que j’affectionne. En 2011, nous mettrons donc des moyens supplémentaires sur cette discipline. Le troisième et dernier axe, et pour moi pas le moins important : poursuivre le rayonnement des artistes. Les aides aux artistes vivant en région resteront une priorité. Le budget dédié à 150 compagnies ou groupes de 1,5 million d’euros, ne sera jamais, pour moi, une variable d’ajustement. En lien avec les organisations syndicales, nous allons poursuivre le développement de dispositifs concrets adaptés à la réalité de leur quotidien. La Charte de diffusion interrégionale6 est un bon exemple de l’attention que nous portons à la nécessaire qualité des conditions de travail pour les artistes. Les lieux de fabrique, les résidences et la diffusion en région et hors région seront encouragés. Nous soutiendrons les partages de risques des diffuseurs sur les nouvelles créations et favoriseront les apports en coproduction par les lieux. Enfin, à travers le plan régional de formation professionnelle, nous favoriserons la sécurisation des parcours professionnels et lancerons des passerelles avec le secteur de l’économie pour favoriser les industries culturelles. Avant de conclure sur des remerciements, je voulais vous annoncer que le Président Christian Bourquin vient de donner son accord à la signature d’une convention sur trois ans, très importante pour la mobilité des œuvres et des artistes, avec l’Institut français, afin de mettre en avant la qualité de nos artistes dans le monde et leur offrir ainsi une visibilité accrue. Nous serons l’une des rares régions de France à signer une telle convention autour de la diffusion internationale. Ces engagements du Président que je fais miens, pour les artistes, les techniciens mais aussi tout le personnel administratif, ceux qui sont dans la lumière et ceux qui sont dans l’ombre et qui font vivre l’art et la culture, montrent l’importance qu’il accorde au monde culturel dans l’intérêt et pour le grand bonheur de ses concitoyens, ce public que nous nous efforçons, ensemble, d’élargir pour donner du sens à ce fameux slogan qui nous guide : « la culture partout et pour tous ». J’en arrive à la conclusion sincère : un grand merci à vous tous d’être là, si nombreux. Un grand merci à Jean-Marie Besset et son équipe qui nous accueillent dans ce théâtre, un immense merci aux organisateurs de ce troisième et très important rendez-vous sur l’information et l’observation culturelle. Je veux vous dire ma profonde estime, ma reconnaissance et mon admiration pour votre savoir-faire. Je pense ici aux équipes de Réseau en scène Languedoc-Roussillon et Languedoc-Roussillon Cinéma, mais aussi à toute l’équipe de la Direction de la Culture et du Patrimoine de la Région Languedoc-Roussillon, aux équipes de la Drac également. Plus largement je salue ici toutes celles et ceux qui ont contribué à l’organisation de ces deux jours. Il va de soi que les intervenants sont associés à ces remerciements, car j’en suis sûre ils vont, dans cette magnifique rencontre, nous aider avancer et à porter plus loin nos réflexions. Merci pour votre écoute et votre incroyable patience. Bon séminaire et à très bientôt.

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Antigone 34 est une série télévisuelle française créée en 2011. Cette intrigue policière suit les aventures d’un capitaine de police, d’une psychologue et d’un médecin que tout oppose devant unir leurs compétences pour affronter un puissant ennemi commun.

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Le Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) est un établissement public administratif placé sous la tutelle du ministre chargé de la culture ; le CNC a la personnalité morale et est doté de l’autonomie financière. Il assure, sous l’autorité du ministre chargé de la Culture, l’unité de conception et de mise en œuvre de la politique de l’Etat dans les domaines du cinéma et des autres arts et industries de l’image animée, notamment ceux de l’audiovisuel, de la vidéo et du multimédia, dont le jeu vidéo.

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L’Onda, Arcadi, l’Oara, l’Odia Normandie et Réseau en scène Languedoc-Roussillon ont signé une charte visant à favoriser la diffusion des compagnies des régions Ile-de-France, Aquitaine, Haute et Basse-Normandie, et Languedoc-Roussillon sur le territoire national.

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Didier Deschamps, directeur de la Direction régionale des affaires culturelles Languedoc-Roussillon En ouvrant ce troisième séminaire, j’ai le sentiment que dans notre région, le patient travail réalisé depuis 2005 dans le cadre du Comité régional des professions du spectacle (Coreps) montre une fois de plus que les termes de dialogue, d’écoute et de partage ont toujours prévalu au sein de cette instance et qu’au-delà des mots et des vœux, il importe de ne jamais oublier que le dialogue social ne se décrète pas mais qu’il se construit dans la confiance et l’ouverture. Cette qualité de travail réside certainement aussi dans le fait que cette instance appartient à tous ceux qui la composent et que ses résultats sont le fruit d’une construction collective et assumée tant par les collectivités territoriales, que par les syndicats de salariés et patronaux mais aussi par l’Etat. A l’image des séminaires qui se sont tenus en 2007 et en 2009, celui qui s’ouvre aujourd’hui est le fruit d’un travail réalisé depuis deux années sur des problématiques fondamentales autour de la création, de l’emploi et de la formation dans le domaine du spectacle vivant et de l’audiovisuel. La Charte que nous venons de signer ne constitue pas une fin en soi, même si, là encore, elle se veut exemplaire, en Languedoc-Roussillon, du nécessaire partenariat entre l’Etat, les collectivités territoriales et les partenaires sociaux. Cette Charte est avant tout un outil qui nous permet de nous interroger, chacun à notre place, sur la notion d’accompagnement à la création ainsi que sur la nécessité et les conditions de cet accompagnement. Le Coreps Languedoc-Roussillon a fait le choix depuis maintenant près de six ans de mener plusieurs réflexions de front et, sans vouloir revenir sur les engagements conjoints que nous avons pris ces dernières années, force est de constater que nous avons respecté notre feuille de route avec, me semble-t-il, une réelle exigence de résultat au profit des artistes et de la création. Que ce soit dans le domaine de la formation professionnelle et de l’emploi, au travers de l’accord cadre pluriannuel sur l’emploi et la formation professionnelle dans le spectacle vivant et l’audiovisuel en Languedoc-Roussillon7 ainsi que de l’Accord pour le développement de l’emploi et des compétences8 (Adec) qui met l’accent sur la formation professionnelle et l’adaptation de l’offre de formation aux besoins de la profession, sans oublier, bien entendu, la cellule de veille sur l’emploi initiée il y maintenant trois ans et qui a largement démontré combien son existence était nécessaire, que ce soit dans le domaine de la prévention, au travers notamment des travaux entrepris dans le cadre de la commission d’attribution des licences d’entrepreneurs de spectacles ainsi que sur la lutte contre le travail illégal, mais aussi au travers de la prise en compte des problématiques des risques professionnels et de santé au travail, que ce soit enfin dans le domaine de la création, au travers de la Charte d’accompagnement des œuvres et des équipes artistiques professionnelles du spectacle vivant, qui aura surtout permis d’ouvrir un débat et de donner du sens à nos interventions dans un contexte où il importe que nous puissions nous retrouver, non pas uniquement sur un langage commun, mais sur un contenu qui permet à chaque artiste et technicien du spectacle vivant de ne pas être un simple pion sur l’échiquier mais un acteur essentiel de nos politiques culturelles.

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Certes, le chemin parcouru depuis 2005 est important et le séminaire qui s’ouvre aujourd’hui constitue la partie visible d’un patient travail mené tout au long de l’année et qui doit se poursuivre avec cette volonté commune qui permet de réunir dans le plus grand respect de chacun les organismes professionnels, les collectivités territoriales et l’Etat. Sur ce point vous me permettrez de souligner combien je me réjouis de l’investissement et de la qualité de la collaboration des services de l’Etat au travers de la Direction régionnale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi9 (Direccte) et au travers de la Drac. Je souhaite que ce séminaire qui réunit un grand nombre de partenaires culturels de l’ensemble du territoire national soit l’occasion de confronter nos points de vue et d’échanger sur nos pratiques. Le Comité régional des professions du spectacle (Coreps) en Languedoc-Roussillon ne saurait être un modèle mais il est certainement exemplaire par la qualité des relations qui se sont tissées au fil des années et la confiance mutuelle de l’ensemble des personnes qui œuvrent dans une même direction et avec le même souci d’une concertation au service des œuvres, des artistes et des publics. Je souhaiterais, avant que ne s’ouvrent nos travaux, rendre un hommage amical, au nom de tous ceux qui l’ont connue, à Dany Guilhou. A travers elle, son implication au service des acteurs culturels et son militantisme, c’est toute une conception du service public que nous devons préserver et qui doit aussi nous rendre humbles devant la création de tout édifice.

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http://www.languedoc-roussillon.culture.gouv.fr/fr/0index/01actu/Adec-SVAV-LR-1709sign%E9.pdf

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L’accord cadre régional Adec Spectacle vivant, cinéma et audiovisuel a été signé le 17 septembre 2010 par les organisations professionnelles du secteur, la Drac Languedoc-Roussillon et la Direccte Languedoc-Roussillon ainsi que par les partenaires institutionnels (Audiens - CMB - CPNEF SV et CPNEF AV - Afdas -CIBC Languedoc-Roussillon - CRGE Languedoc-Roussillon - Aract Languedoc-Roussillon - Languedoc-Roussillon Cinéma et Réseau en scène Languedoc-Roussillon). Il permet la mise en œuvre d’un certain nombre d’actions en faveur des professionnels du secteur, qu’ils soient salariés ou employeurs. http://www.coreps-languedoc-roussillon.fr/index.php?option=com_flexicontent&view=items&cid=93&id=435&Itemid=17

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La Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (Direccte) regroupe des services administratifs issus de divers horizons : commerce extérieur, tourisme, commerce et artisanat, intelligence économique, industrie, travail et emploi, concurrence et consommation.

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Introduction générale du séminaire

Jean Hurstel, président fondateur du réseau culturel Banlieues d’Europe, auteur de Une nouvelle utopie culturelle en marche ? Essai sur une autre vision de l’action culturelle en Europe Les forces de création, les forces instituantes, innovantes, émergentes, sont au cœur de notre vie sociale, au centre de toute forme de démocratie, à la source de toute aventure artistique. Mais même si ces forces-là sont actuellement mises en cause par l’absolue domination d’une politique économique libérale et une régression générale des financements publics, devons-nous pour autant renoncer, ou seulement tenter de survivre ? Impossible. Nos actions seraient condamnées plus sûrement que toute régression des financements publics. Nous n’avons pas le choix, nous sommes dans l’obligation de repenser le sens et la forme de nos actions dans ce contexte. Faire surgir un nouveau texte, inscrire de nouvelles solidarités sociales, de nouveaux partenariats avec l’ensemble des forces sociales, éducatives, universitaires, qui nous sont proches. Imaginer un souffle collectif de la culture qui ferait vibrer ce temps et cet espace que nous traversons. Jean Hurstel, président de Banlieues d’Europe – mars 2011.

Mesdames, Messieurs, Je suis un rôdeur des confins, un arpenteur des marches, un passeur des frontières. J’ai toujours exploré les lisières, les bordures, les limites de la culture instituée, figée, bornée, hiérarchisée pour parcourir les marges et les friches, les banlieues et les bords du paysage culturel français. J’ai toujours pensé qu’il n’y avait pas d’ici sans ailleurs, pas de singulier sans pluriel, pas de convergences sans divergences, pas de reproductions sans créations, pas de similitudes sans différences. Au modèle mondial du « mainstream » culturel, à la tyrannie du « succesfull » artistique, au despotisme un peu tyrannique de la Commission européenne, il nous faut donc opposer notre cri de révolte commun : pas d’institutions culturelles sans force instituante. Et répéter cette incontournable vérité dans le domaine artistique, c’est bien dans les marges, les bordures, les confins que naît et se développe, croit et se multiplie l’ensemble des forces vives de l’institution. Le spectacle vivant est vivier, force d’entraînement et de coalition pour que les vivants de la culture puissent vivre. Et pour qu’ils puissent vivre, pour que cette fragile dimension du vivant puisse menacer les idoles de la mondialisation et les giboulées intermittentes des modes esthétiques, pour qu’ils puissent vivre dans sa véritable dimension de diversité et de vie, je crois qu’il nous faut revenir vraiment à cette notion essentielle qui est le territoire. Le territoire n’est pas une unité administrative. Il n’est pas une vision satellitaire et géographique. Le territoire est un territoire humain, c’est un territoire culturel, c’est un territoire vivant. Je crois que l’on n’a pas assez compris que dans toutes les

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Ouverture du séminaire

actions, nous étions en relation avec deux termes de la culture. L’un renvoie à des représentations de la mythologie collective, une fiction collective, et si nous ne comprenons pas cette fiction collective, nous ne pouvons pratiquement rien faire. Sinon reproduire de façon narcissique notre propre dimension, celle de l’égoïsme. Ce sont dans ces dialogues réels avec ces singularités réelles du territoire et des habitants que se noue cette relation au territoire. Je crois qu’en ayant exploré réellement un territoire, nous pouvons dire que nous avons le fil et la trame. Nous sommes des êtres de langage et le théâtre est un acte de langage. Nous sommes plongés en particulier dans les signifiants imaginaires et symboliques des gens avec lesquels nous travaillons. Il existe toujours un dialogue entre imaginaire et symbolique des artistes et de la population. Je suis arrivé à la frontière allemande dans le bassin ouvrier lorrain, cette région frontalière de mines, où le premier mineur que j’ai rencontré m’a dit : « qu’est-ce que nous sommes ? Les Allemands savent qu’ils ont Berlin comme capitale, les Français, Paris mais nous, à la frontière, qu’est-ce que nous sommes ? » Et c’est sur cette question que nous avons travaillé. Dans ces espaces frontaliers, cette question est essentielle : qui suis-je ? Moi qui parle un dialecte germanique, le même que vous parlez de l’autre côté de la frontière mais qui ai changé quatre fois de nationalité et de langue depuis cent ans. Donc si vous voulez, je crois que c’est un temps et un espace très particuliers, c’est un temps qui nous a été transmis, que nous travaillons, que nous transformons et que nous transmettons à nos enfants en même temps. C’est ce passage-là qui est essentiel dans notre travail. Et effectivement, je crois que c’est là que se joue réellement la question essentielle de la relation au territoire. Quand on regarde la ville de Belfast, en Irlande du Nord, on voit une ville segmentée à l’infini, avec d’un côté des quartiers protestants et de l’autre des quartiers catholiques et leurs enclaves respectives. Et dans ce contexte de frontières et de fermetures terribles, que se passe-t-il ? Il y a une initiative culturelle d’un théâtre qui s’appelle The Beat Initaitive10 qui fait un immense théâtre de rue avec catholiques et protestants, avec des rythmes brésiliens et africains contre les défilés orangistes qui provoquent chaque année des morts et des blessés. On s’aperçoit alors de la dimension de l’Europe. Revenons à l’Europe. J’aime beaucoup ce terme de « glocal11 », initié par un sociologue brésilien et qui veut dire à la fois, agir localement et penser globalement. Et je crois que lorsqu’on franchit les frontières même européennes, on s’aperçoit que les systèmes culturels n’ont absolument aucune similitude, qu’ils sont extraordinairement différents. Par exemple, j’ai essayé d’expliquer à nos amis allemands il y a quelques années, la différence en France entre animateur et créateur. Et je leur ai énoncé le terme de créateur. Ils m’ont répondu : « c’est quand même bizarre, chez nous, il n’y a que Dieu qui est créateur ». Alors je leur ai expliqué les beautés réelles du terme animateur. On ne parlait pas de médiateur à l’époque. Ils ont éclaté de rire et m’ont dit : « c’est quand même curieux en France le débat culturel, chez nous, « animieren12 », ça se dit seulement de l’ambiance qu’il y a dans un bordel. » Alors, j’ai compris que nos débats franco-français n’étaient pas les mêmes d’un côté et de l’autre du Rhin. Un autre exemple : une friche en Autriche, le WUK13 à Vienne, ancienne usine de locomotives reconvertie en friche culturelle. Vous êtes très étonné de voir une galerie d’art minimaliste à côté d’un atelier de réparation de vélos, un théâtre complètement alternatif à côtés d’un jardin d’enfants. Cela fait référence à notre manière de penser. Puisque chez nous, le socio-culturel est d’un côté, le culturel de l’autre, il n’y a pas d’interférences. Alors que chez eux, cela ne pose pas de problèmes. Le terme « SozioKultur14 » est un terme extrêmement valorisé parce que les théâtres, là-bas, ce sont trois mille personnes, salariées pendant une saison, qui travaillent, qui répètent une pièce l’après-midi et jouent le soir. Mais très rapidement émerge ce que j’appelle une force instituante à la marge qui consiste à dire : il y a des scènes libres, « Freibühne15 », et en même temps, il y a des espaces comme les friches qui deviennent une alternative au système culturel en place.

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http://beatcarnival.com/

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Le monde globalisé serait en fait un monde « glocal », francisé en «GlobaLocal» formé en associant les termes global et local selon la définition du sociologue espagnol Manuel Castells désignant un « nœud de valeur » d’un point de vue économique et un « lieu de vie » d’un point de vue social. Le sociologue Blaise Galland, en 1995, utilise le terme de «glocalisation» pour caractériser l’effet des technologies de l’information sur l’aménagement du territoire. Il définit ce qui pourrait être une nouvelle phase de l’évolution urbaine comme : «le processus double par lequel la ville se décharge de sa fonction de production, d’échange et de traitement de l’information en la déplaçant dans le cyberespace, tout en développant, conséquemment, de nouvelles formes d’organisations socio-spatiales au niveau local.»

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Le terme « animieren » a pour traduction française la plus probable le terme « animer ».

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http://www.wuk.at/

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Le terme « SozialKultur » a pour définition française de manière littérale le terme « culture sociale »

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Le terme « FreiBühne » a pour définition française de manière littérale le terme « Scènes libres ». A noter que l’expression allemande « Bühne Frei » correspond à l’expression française « lever de rideau »

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Autre exemple : ce qui se passe en Belgique est assez extraordinaire. Les centres culturels régionaux en Belgique ont gardé l’éducation populaire et la diffusion artistique. Bien sûr, ils ont des ateliers de création et ils ont une responsabilité sur les centres culturels locaux. Visiblement, ils ont un public et n’ont pas de problèmes de public car les activités diverses et variées leur permettent d’avoir une assise locale extrêmement importante. Si on pense à l’Europe, on s’aperçoit que ce n’est pas l’Europe officielle qui a commencé à coopérer, ce sont les réseaux qui ont commencé. Le Réseau international des arts du spectacle16(IETM), le réseau Trans Europe Halles17, Banlieues d’Europe que je préside, sont des réseaux qui sont nés dans les années 1990-2000 et permettent une collaboration effective à travers les frontières, par affinité élective plutôt que par devoir ou par institution. Nous sommes vraiment dans une phase où l’utopie devient une dimension absolument naturelle, l’horizon naturel de toutes nos activités. Si on veut réellement travailler en Europe, c’est par ces réseaux-là que cela passe forcément. Il n’y a pas de projet européen soutenu sans qu’un réseau n’en soit à l’origine. Je crois que cette dimension européenne est menacée actuellement par deux grandes forces contraires, forces de mort pour moi. Tout d’abord, le nationalisme. Que vous alliez en Suède, en Finlande, au Danemark, en Norvège, en Hollande, en France, en Italie, vous observez une montée du nationalisme. Et la culture est sa première victime. L’autre danger tout aussi important est l’économisme : penser qu’il n’y a que des forces économiques en présence, qu’il n’y a qu’un marché et que l’économie qui va sauver l’Europe. Or nous constatons le contraire actuellement. Je suis très frappé que lors des dernières élections ou même les élections qui se présentent, le mot « culture » ne soit plus prononcé. Nous sommes effectivement dans une dimension où la culture est effacée. Elle n’est d’une certaine façon même plus évoquée ni dans les programmes ni dans les discours. Dans ces deux dimensions qui existent actuellement, il me semble qu’il y a un travail énorme à fournir, comme ce travail de liaison avec le territoire, ce que je pourrais appeler effectivement l’utopie d’une réelle démocratie culturelle. Je pense que nous n’en sommes plus uniquement à travailler à l’intérieur de notre système culturel. Il faut trouver des forces à l’extérieur. Ces forces s’appellent le « socioculturel », extrêmement dévalorisé en France, très valorisé par ailleurs dans les autres pays. Tout ce secteur, comme les maisons des jeunes, doit répondre à une exigence culturelle, il a fait un travail culturel extrêmement important. Il faut travailler avec l’université, avec les forces éducatives, toutes les forces instituantes qui pourront transformer ce laminage lent, une érosion lente de l’importance de la culture. Et pas seulement dans ce pays mais en Europe en général. Je pense que l’utopie de la démocratisation lancée par Malraux en 1959 à la création du ministère de la Culture a réussi et a échoué. Elle a réussi d’une certaine façon sinon nous ne serions pas là à en discuter puisqu’il y a eu effectivement une réussite totale : la décentralisation culturelle. En ce qui concerne la démocratisation, c’est-à-dire l’élargissement du public, nous n’en sommes encore qu’aux prémices. Je pense que nous avons besoin non seulement de techniques de production, de diffusion, de formation mais nous avons besoin d’une utopie nouvelle. Cette utopie nouvelle est celle du partage de la culture mais bien au-delà, ce sont de nouveaux champs qui s’ouvrent à nous qui sont le lien social. Je n’ai jamais écrit « culture et lien social » mais « culture est lien social ». Car sans ces forces imaginaires et symboliques, il n’y a plus de collectivités, il n’y a plus que des consommateurs individuels. Donc c’est bien l’art et la culture qui sont les ferments d’un renouvellement total du lien social. Deuxièmement, je pense que nous avons une tâche énorme qui nous attend, qui n’est pas nouvelle mais qui se reproduit à travers l’Histoire : la lutte contre le nationalisme et la xénophobie. Si nous, en tant qu’acteurs culturels, nous ne travaillons pas sur ce champ-là, il est bien évident qu’ils vont complètement laminer la société. Lorsque nous travaillons avec un territoire, nous sommes une « biosphère » culturelle. C’est-à-dire que des gens vivent, survivent dans un environnement humain qui a une véritable capacité à survivre quand les conditions extérieures sont extrêmement mauvaises. Le développement culture durable à l’intérieur de cette biosphère, l’ouverture sur le monde, l’ouverture sur l’Europe sont nos tâches essentielles. Nous ne pouvons rien faire sans le désir et le plaisir de faire ce que nous faisons.

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Réseau International des Arts du Spectacle – International Network for Contemporary Perfoming Arts http://www.ietm.org/

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Trans Europe Halles est à la fois un festival culturel et un événement politique. C’est le premier festival transnational en Europe se déroulant dans 12 villes simultanément dans le but de promouvoir la démocratie, l’égalité et la culture au-delà de l’Etat nation. http://www.teh.net/


Ouverture du sĂŠminaire

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Introduction La diffusion des œuvres, du local à l’international : les dispositifs de soutien en question(s) En conclusion de l’Acte I du séminaire sur l’observation et l’information culturelles, Jean-Pierre Saez (directeur de l’Observatoire des politiques culturelles de Grenoble) mettait l’accent sur le fait que la circulation des œuvres était « inquiétante et insuffisante pour que l’économie du secteur s’en sorte ». L’interrégionalité avait alors été citée comme l’une des possibilités permettant de nouvelles coopérations, une meilleure connaissance des œuvres françaises et de ce fait une meilleure diffusion des œuvres. Lors de l’Acte II, Didier Salzgeber (à l’époque directeur de l’Établissement public de coopération culturelle Arteca) proposait une autre alternative dans sa conclusion sur la question des territoires : « je pense réellement que la puissance publique doit aider des compagnies à développer des stratégies sur l’espace européen ». Deux ans plus tard pour l’Acte III, nous souhaitons revenir sur ces questions de fond que sont la diffusion des œuvres, la circulation des artistes et leur attachement à un territoire. La culture en effet ne se définit plus uniquement à l’échelle régionale, elle se doit d’être mobile et accessible à tous, à tous les citoyens d’un pays mais aussi aux citoyens d’Europe ou du monde. Le paysage des créations artistiques reflète de plus en plus les problématiques liées aux conséquences de la mondialisation et concerne donc un public qui dépasse les limites de notre territoire. Les artistes et les institutions qui les soutiennent se doivent de s’adapter à cette nouvelle échelle de diffusion. La présence de Fabien Jannelle et de Pascal Brunet permettra de nous éclairer sur la question suivante : quelles sont les logiques institutionnelles d’aide à l’export et à la diffusion des œuvres françaises à l’étranger ? Antoine Leclerc présentera des projets européens de diffusion de films. Karine Gloanec-Maurin mettra l’accent sur les liens entre le local et l’international : un ancrage régional fort pour les œuvres est-il le point de départ pour une diffusion à l’étranger ? Enfin, Jean-François Guéganno et Sébastien Ramirez pourront développer la question des œuvres françaises à l’étranger en abordant la question suivante : quels sont les éléments déclencheurs qui permettent une diffusion hors frontières d’un travail artistique ?


Séance plénière 1 suivie d’un débat avec la salle


Animation et modération de Nicolas Marc, directeur de La Scène Bonjour à tous, Nous allons commencer cette première séance plénière intitulée « Diffusion des œuvres du local à l’international : les dispositifs de soutien en question(s) ». C’est avec grand plaisir que j’ai accepté l’invitation de Réseau en scène Languedoc-Roussillon à modérer cette rencontre où nous allons parler de mobilité des artistes, de circulation des œuvres, de stratégies de diffusion des œuvres à l’international, de pratiques, d’expériences et explorer différentes thématiques liées à l’international. L’international, qui vous le savez, est un ensemble un peu générique qui réunit des réalités, des contextes géographiques, économiques, culturels variés et des pratiques qui diffèrent considérablement d’un territoire à un autre. Comment bien appréhender une stratégie de diffusion internationale ? Quelles sont les pratiques ? Quelles sont les expériences ? Quelles sont la nécessité et les conditions de mise en œuvre de ces stratégies ? Ce sont autant de questions auxquelles nous allons tenter de répondre durant cette plénière. Pour en parler, Réseau en scène Languedoc-Roussillon a convié plusieurs intervenants que je vais vous présenter maintenant. Tout d’abord, Antoine Leclerc, délégué général du festival de cinéma d’Alès Itinérances et responsable de l’association Carrefour des festivals. A ses côtés, Karine Gloanec-Maurin, présidente de la Commission culture de l’Association des Régions de France18 (ARF), et également présidente de la Fédération nationale des collectivités territoriales pour la culture19 (FNCC) puis Fabien Jannelle, directeur de l’Office national de diffusion artistique20 (Onda) et Pascal Brunet, directeur du Relais Culture Europe21. A leurs côtés, Dirk Korell, directeur du bureau de production et de diffusion Camin Aktion22 accompagnant Sébastien Ramirez. Sébastien Ramirez, danseur, chorégraphe de la Compagnie Clash 6623 et Jean-François Guéganno, directeur du Département du développement et des partenariats de l’Institut français24. Sébastien Ramirez, j’ai envie de commencer avec vous. Vous êtes artiste, chorégraphe, danseur. Vous avez fondé en 2007 la Compagnie Clash 66, en référence au département dans lequel vous êtes implanté car vous êtes installé à Perpignan dans les Pyrénées-Orientales. Vous explorez différentes facettes de la danse hip hop, de la culture urbaine. Je précise que vous n’êtes pas là pour être le porte-parole ou l’ambassadeur de la communauté artistique mais pour exposer, expliquer votre démarche à l’international. Vous travaillez notamment avec l’Allemagne, le Cambodge, le Brésil, la Finlande. Qu’est-ce qui vous a tout d’abord amené à vous tourner très tôt dans votre vie d’artiste vers l’international ? Vous êtes accompagné de Dirk Korell qui s’occupe de votre bureau de production. Cela me semble intéressant qu’il y ait à la fois la parole de l’artiste et celle de celui qui l’accompagne au quotidien, notamment dans le développement de ces projets internationaux. Quels sont précisément les projets que vous avez développés à l’étranger ?

Sébastien Ramirez, danseur, chorégraphe, directeur de la Compagnie Clash 66 J’ai des liens forts avec mes partenaires en danse qui sont situés à Berlin ; donc j’ai commencé avec cela. Avec mes partenaires, nous avons beaucoup travaillé à l’international. Nous avons développé des chorégraphies, des concepts. Le travail présenté par la vidéo, par exemple, est un travail de recherche pour ma nouvelle création qui est basé à Berlin. Je suis basé à Perpignan, ma compagnie l’est aussi. Je pars avec une idée, un concept. Et le concept que je vais développer me permettra de me déplacer et d’aller à l’étranger. Nous avons réalisé trois créations. Elles ont été développées en coproduction franco-allemande, mon partenaire est berlinois et nous avons développé des spectacles à Perpignan.

Dirk Korell, directeur du bureau de production et de diffusion Camin Aktion La création mise en place porte déjà en elle l’embryon de la diffusion : comment travaille-t-on ailleurs ? Comment fonctionne-t-on à l’international ? Sébastien Ramirez vient à la base du hip hop. Sans vouloir le « labelliser », techniquement, il vient du sol. Aujourd’hui, il s’en détache et va vers l’élévation, je trouve cette démarche extrêmement intéressante. Le hip hop est une culture internationale, un réseau international méconnu par les institutions culturelles. Ce sont deux mondes qui vivent en parallèle. La question internationale ne se pose pas tellement dans la culture hip hop. La question est : dans la création chorégraphique dans le spectacle vivant, comment peut-on réaliser la coopération internationale ? Cela repose évidemment sur les réseaux et sur les coproducteurs.

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L’Association des Régions de France (ARF) a été créée en décembre 1998 pour répondre au besoin de concertation étroite ressenti par les Présidents de Conseil régional, les élus et leurs services. Ils ont souhaité mettre en commun les expériences vécues dans les Régions. http://www.arf.asso.fr/

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La Fédération nationale des collectivités territoriales pour la culture (FNCC) est un lieu de rencontre exceptionnel entre élus, permettant l’échange d’informations, la confrontation des expériences, l’analyse en commun des problématiques sectorielles et l’élaboration de propositions dans tous les domaines de l’action culturelle locale. http://www.fncc.fr

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L’Office national de diffusion artistique (Onda) encourage la diffusion, sur le territoire national, d’œuvres de spectacle vivant qui s’inscrivent dans une démarche de création contemporaine soucieuse d’exigence artistique et de renouvellement des formes, et stimule les échanges en matière de spectacle vivant en Europe et à l’international. http://www.onda.fr


Séance plénière 1

Sébastien Ramirez dit que ses partenaires sont ici et ailleurs. Comment peut-on donc gérer cela sur le plan du montage de la production et de la diffusion ? Cela passe toujours par des étapes de coproduction qui ne sont jamais évidentes car on a tout de suite affaire à d’autres logiques de programmation, à d’autres réalités économiques mais également à d’autres législations. Mais nous y arrivons. Les productions internationales peuvent trouver un ancrage et un soutien régionaux par des institutions, par des réseaux et des outils qui sont en place régionalement comme c’est le cas avec Réseau en scène Languedoc-Roussillon qui accompagne Clash 66 depuis ses débuts. Ces mécanismes permettent une visibilité, une diffusion régionale, interrégionale et bien évidemment des correspondances avec l’extérieur. Donc on conjugue les différents réseaux qui existent, qu’ils soient institutionnels, informels comme l’IETM, ou que ce qu’il s’agisse des réseaux comme Dance europe movement25 (Dem) qui est récent et porté par des bureaux de production. Dem s’est créé en Catalogne, et compte des membres d’Espagne, d’Allemagne, de Finlande, du Royaume-Uni et des Pays-Bas.

Nicolas Marc : Vous êtes une compagnie qui fonctionne avec une équipe très réduite. Comment concrètement êtes-vous organisé pour aborder l’international ? Quelles sont les stratégies que vous avez mises en œuvre ?

Sébastien Ramirez : La Compagnie Clash 66, par elle-même, ne pouvait pas gérer tout cela seule. On travaille dans une zone rouge. C’est pour cela que la compagnie travaille avec d’autres compagnies, d’autres structures comme Moov’N Aktion26, des structures de production et de diffusion qui m’aident à réaliser des projets. Ces structures ont des réseaux et une expérience qui permettent d’avancer.

Dirk Korell : C’est de la mutualisation. C’est la philosophie la plus adaptée à la situation où les réalités de budget se réduisent à peau de chagrin. Voilà un exemple par lequel on peut répondre aujourd’hui à la réalité du milieu culturel. La structure d’une compagnie est liée forcément à son rayonnement, et vice-versa. Les choses s’influencent les unes les autres. La remise en question de l’intermittence du spectacle, qui est une réelle menace dans le domaine du spectacle vivant, il faut y faire face. La mutualisation est, jusqu’ici, quelque chose que nous avons mis en place ensemble. Évidemment, un bureau de production ne peut pas vivre sans les artistes, sans les compagnies. Les compagnies également en bénéficient, donc il y a une mutualisation. Ici, en Languedoc-Roussillon, on trouve une autre solution à la mutualisation. Chez nous, par exemple, quand on parle de l’administration, comment peut-on déléguer ? Comment peut-on travailler ? Alors l’Ardec est l’un de ces outils dont on peut se servir. Sébastien Ramirez se trouve aujourd’hui à un moment où ce n’est plus de l’émergence, mais où la compagnie n’a pas encore les moyens pour un fonctionnement établi. Il est donc largement suivi pour pouvoir se structurer. Donc comment y arrive-t-on ? Et c’est toute cette articulation, ce cheminement qui sont très importants. L’émergence reconnue, comment est-elle établie ? Et la mutualisation est un outil que nous avons trouvé pour répondre à cette question.

Nicolas Marc : Vous parliez tout à l’heure de réseaux comme l’IETM. Les réseaux sont une nécessité. Comment avez-vous fait pour vous constituer ces réseaux ? Comment utilisez-vous les réseaux existants ?

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Centre de ressources sur l’Europe et la culture, le Relais Culture Europe sensibilise, informe et accompagne les acteurs culturels et artistiques français et européens sur les problématiques et enjeux liant Europe et culture, les objectifs, politiques et programmes communautaires, et leur traduction en termes de stratégies, pratiques et projets. Il poursuit un objectif global d’européanisation des pratiques des acteurs culturels français. http://www.relais-culture-europe.org

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http://www.caminaktion.eu

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http://www.sebastienramirez.com

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L’Institut français est l’opérateur du ministère des Affaires étrangères et européennes pour l’action extérieure de la France. Il se substitue à l’association Culturesfrance sous la forme d’un Etablissement public à caractère industriel et commercial avec un périmètre d’action élargi et des moyens renforcés. http://www.institutfrancais.com/ Projet de réseau européen pour la mobilité et la diffusion des arts du mouvement. http://www.dancemovement.eu

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http://www.moovnaktion.org

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Dirk Korell : Nous n’avons pas constitué l’IETM ! Il vient de souffler ses trente bougies donc c’est un réseau très ancien, mais informel. L’IETM est une plate-forme de réflexion, et surtout de mise en réseau informelle sans recherche mercantile entre les opérateurs culturels ; qu’il s’agisse des compagnies, des indépendants, ou encore des institutions qui sont des membres associés. Je salue vivement la présence de Réseau en scène qui est venu à plusieurs rencontres de l’IETM et qui permet une plus grande visibilité de la région dans ce réseau international. J’ai déjà mentionné le réseau Dem qui se met actuellement en place en Espagne. Dans ce cas, c’est une initiative de plusieurs bureaux de production qui se disent : comment peut-on travailler mieux au niveau international ? Comment peut-on encourager le travail des compagnies associées ? C’est un outil qui se crée au fur et à mesure. Lorsqu’on parle d’international, ce qui vient d’être dit m’a vraiment touché, on parlait beaucoup de territoires et c’est vraiment cela. Souvent, on nous dit : « en France, ça crise un peu. Allez à l’international ». Mais l’international n’est pas une entité : il est représenté par différents territoires qui ont exactement les mêmes interrogations. Quand on va jouer en Catalogne, ils font face aux problèmes d’une situation économique commune très grave actuellement, surtout pour la culture. Il n’y a pas d’international, c’est une pluralité ; cela doit être compris et il faut s’en saisir. Et les réseaux permettent une analyse, une compréhension à ce niveau-là. Après, il faut voir comment on peut être visionnaire. Et avec la vision des artistes, on a besoin d’une vision politique et institutionnelle. Je salue les travaux du Coreps car ils sont un élément de réponse. La Charte de diffusion interrégionale signée par l’Onda, Arcadi27, l’Office Artistique de la Région Aquitaine28 (Oara), l’Office de diffusion et d’information artistique Normandie29 (Odia Normandie) et Réseau en scène Languedoc-Roussillon œuvre également à ce niveau. Il existe donc des mesures, des outils multiples à cette complexité qui est la globalisation que nous vivons aujourd’hui.

Nicolas Marc : Vous évoquez les réseaux plutôt formels. Quelle est la place des réseaux informels ? Comment constitue t-on son propre réseau de programmateurs et connaissances professionnelles à l’étranger que ce soit d’ailleurs en Europe ou sur d’autres territoires comme le Cambodge et le Brésil ?

Dirk Korell : Il y a donc des réseaux existants comme il y a des réseaux qui se mettent en place. Cela s’articule sur les deux. Quand on parlait du Cambodge, du Vietnam, par exemple, ce sont des réseaux existants. Nous travaillons aussi avec le Fonds Élysée30. C’est une aide franco-allemande au niveau gouvernemental avec le réseau culturel français dans le monde et avec les Goethe Instituts31 pour des projets communs en pays tiers. A partir du moment où Sébastien travaille beaucoup à l’échelon franco-allemand, on a un financement possible pour ces projets, que ce soit au Cambodge, au Vietnam ou maintenant en Finlande. Donc ce sont des réseaux qui existent et qui peuvent soutenir les projets des artistes.

Nicolas Marc : Avez-vous bénéficié d’aides ou de soutiens de la part d’institutions, d’organismes français pour vous développer à l’international ?

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Arcadi a pour mission de soutenir la création artistique, de favoriser la diffusion des œuvres et d’aider au développement d’actions artistiques dans les domaines de la chanson, de la danse, de l’opéra, du théâtre et du multimédia en Île-de-France. http://www.arcadi.fr/

28

L’Oara, agence du Conseil régional, a pour mission de contribuer au développement culturel et artistique du territoire aquitain dans le domaine du spectacle vivant. http://oara.fr

28

L’Office est missionné pour apporter son soutien aux disciplines suivantes : théâtre, musique classique et contemporaine, cirque, arts de la rue, danse. http://www.odianormandie.com/

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Le Fonds culturel franco-allemand en pays tiers créé à l’occasion du 40e anniversaire du Traité de l’Élysée en 2003 est un symbole de l’amitié liant la France et l’Allemagne. Son objectif est de susciter la coopération culturelle entre la France et l’Allemagne en pays tiers à l’aide de projets en arts visuels, arts de la scène, cinéma, audiovisuel, sport, débats d’idées, littérature, promotion de l’apprentissage de l’allemand et du français.

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Le Goethe-Institut est, au niveau international, la plus importante institution culturelle de l’Allemagne. Il a pour mission de promouvoir la langue allemande à l’étranger, d’encourager la coopération culturelle internationale et de communiquer une image aussi complète que possible de l’Allemagne, en informant sur la vie culturelle, sociale et politique du pays.


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Sébastien Ramirez : Il y a plusieurs coopérations avec l’Institut français, le Goethe-Institut et le Fonds Élysée qui nous permettent de réaliser tous ces projets.

Dirk Korell : Du côté français, c’étaient les Centres culturels français32 (CCF), les Instituts français et les Alliances françaises33. Actuellement, on met en place, par exemple, une tournée en Amérique latine avec les Alliances et bien évidemment, avec ce qu’on appelle aujourd’hui, l’Institut français qui était jusqu’ici Culturesfrance. Il apporte aussi ses outils, ses financements et encore une fois, le Fonds Élysée qui est géré par les deux pays en commun, la France et l’Allemagne.

Nicolas Marc : Sur un plan économique et financier, sans trahir de secrets, êtes-vous contraints d’adapter vos prix de cession selon les pays soit à la hausse soit à la baisse ?

Sébastien Ramirez : Forcément, quand on va au Vietnam ou au Cambodge, on s’adapte. Souvent, il n’y a pas d’argent donc on fait avec.

Dirk Korell : La France se situe plutôt sur une échelle haute, il ne faut pas l’oublier. Je ne veux pas dire qu’on a trop d’argent, loin de là. Par contre, le coût des charges sociales, qui sont une bonne chose à la base – et je ne remets pas en question le système social que nous avons –, pour d’autres pays, est très dur à supporter. La Société des auteurs et compositeurs dramatiques34 (SACD) est souvent une surprise pour la diffusion à l’international : quand on annonce qu’il y a 10 % pour la SACD, les gens se questionnent sur les droits d’auteur sur la chorégraphie. Ils ne connaissent que les droits d’auteur au niveau de la musique. Là-dessus, on est obligé de faire des compromis surtout si ce sont des régions sinistrées en Europe comme actuellement l’Espagne, maintenant le Royaume-Uni et le Portugal.

Nicolas Marc : Que vous manque-t-il, aujourd’hui, en tant que compagnie, pour être plus efficace à l’international ?

Sébastien Ramirez : Comme je le disais au début, la compagnie a besoin d’autres structures pour pouvoir fonctionner, pour la diffusion et la production. En elle-même, la compagnie a du mal à s’autogérer, à avoir un administrateur, à avoir un employé car nous n’avons pas de fonds spécial dédié à cela. On marche sur les cessions de vente de nos spectacles et ce n’est pas avec ces 10 % que l’on va pouvoir employer un administrateur ; donc pour moi, le plus gros problème, c’est ça. J’aimerais me structurer, avancer mais ce n’est pas évident car nous n’avons pas les moyens d’employer qui que ce soit pour l’instant.

Dirk Korell : On a joliment préparé quelques diapositives sur les chiffres sur l’international de 2008 à 2012. Dans ce cas, nous parlons des dates confirmées ou réalisées. La compagnie réalise quasiment la moitié de sa diffusion à l’international. En France, ce sont presque 20 % de la diffusion qui se sont réalisés en Languedoc-Roussillon. Quant à la moitié de la diffusion à l’international, bien évidemment, on se pose des questions sur la législation. Comment fait-on ailleurs ? Qu’est-ce que l’emploi ? Quelles sont les obligations sociales et fiscales ? Et bien évidemment, une compagnie qui travaille beaucoup à l’international, doit pouvoir répondre à cela. La compagnie totalise 126 diffusions depuis 2008 avec les prévisions confirmées de 2012. C’est une moyenne assez importante qui nécessite évidemment une gestion saine. Comme le disait Sébastien, c’est là que se situe le besoin. Comment peut-on être soutenu ou dégager des marges, ou peut-être trouver un fonctionnement à travers la mutualisation ? Pour un fonctionnement qui puisse répondre à cela, il faut un savoir-faire aux exigences internationales.

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Les Centres culturels français

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L’Alliance française diffuse la langue française et les cultures francophones à travers différents pays dans le monde.

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http://www.sacd.fr/

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Diffusion : nombre de représentations en France

Total régions : 12 Total Diffusion : 63 dont Languedoc-Roussillon : 13 Autres régions : 50

Languedoc-Roussillon Autres régions

Diffusion : nombre de représentations à l’International

Continents : 3 (Europe, Amérique du Sud, Asie) Total pays : 12 Total Diffusion : 58 dont Europe : 42 Extra-européen : 16

Europe Extra-européen

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Diffusion globale : 121 représentations

Total France : 63 Total International : 58

France Internationnal

Nicolas Marc : Merci pour ce chiffre. Pour conclure, quels conseils auriez-vous envie de donner à des artistes ou à des compagnies françaises dans leur approche d’une diffusion internationale ?

Sébastien Ramirez : De s’accrocher ! De parler anglais ! De faire un focus sur l’artistique. Faire un travail qui soit pertinent permet de rencontrer les bonnes personnes. C’est juste une opinion : le travail est le plus important.

Dirk Korell : Il n’y a pas de recettes. Il y a une multitude de solutions. A mon avis, du côté de la production, ce sont les réseaux, l’ouverture vers l’autre et les langues étrangères. Cela change beaucoup, la France change, le niveau de l’anglais est très important quand même. Il y a dix ans, c’était encore assez difficile. Aujourd’hui, quasiment tout le monde parle anglais. Les gens qui viennent, les opérateurs français, les compagnies françaises n’ont plus peur d’aller vers les autres. Ce sont avant tout des rencontres humaines.

Sébastien Ramirez : Il ne faut pas seulement être danseur, il faut aussi avoir envie de pousser sur d’autres niveaux, apprendre à communiquer. Dirk, qui mène une action dans la structuration de ma compagnie, me fait ouvrir les yeux sur d’autres choses, qu’il faut arriver à être particulier sur d’autres points. Il n’y a pas réellement de conseil à donner.

Nicolas Marc : Fabien Jannelle, je le rappelle, vous êtes directeur de l’Onda, l’Office national de diffusion artistique ; l’Onda qui a considérablement augmenté son intervention à l’international depuis votre arrivée à la direction et également suite aux Entretiens de Valois. Comment l’Onda, aujourd’hui, participe t-il aux échanges artistiques à l’échelle internationale ?

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Fabien Jannelle, directeur de l’Office national de diffusion artistique L’Onda est un organisme national financé par le ministère de la Culture et de la Communication, par la Direction générale de la Création artistique et par le département des Affaires internationales. Depuis son origine, l’Onda a toujours eu à la fois une activité de soutien aux artistes français sur le territoire national pour faciliter leur circulation mais aussi une action de soutien à la diffusion en France de compagnies étrangères. Cela s’est en effet renforcé depuis une dizaine d’années. La nouveauté depuis deux à trois ans est que nous considérons aujourd’hui que l’activité de circulation des spectacles dépasse les frontières du pays. On est aujourd’hui dans un espace ouvert, européen et de ce fait, il devenait de plus en plus difficile et totalement anachronique de considérer que le soutien à la circulation s’arrêtait aux frontières du pays. Donc nous avons mis en place en liaison avec l’Institut français un certain nombre de dispositifs Focus : Focus théâtre, Focus danse, Focus jeune public qui sont autant d’occasions de soutenir les compagnies françaises de manière à ce qu’elles soient mieux perçues, plus visibles pour les programmateurs étrangers.

Nicolas Marc : Jean-François Guéganno pourra s’exprimer sur ce point tout à l’heure. Mais quelle est, aujourd’hui, l’articulation entre les compétences, les missions, l’articulation entre l’Onda et l’Institut français ?

Fabien Jannelle : On est en train de les construire puisque l’Institut français vient d’être créé, début janvier 2011, en tant qu’établissement public. L’Institut français est devenu l’opérateur du ministère des Affaires étrangères et européennes, il n’est plus l’opérateur commun du ministère des Affaires étrangères et européennes et du ministère de la Culture et de la Communication, c’est très clair dans l’intitulé de l’établissement public. Cela manifeste une réflexion du ministère des Affaires étrangères et européennes sur les questions de diplomatie culturelle, de diplomatie d’influence, enfin quel que soit le nom. Cela montre qu’aujourd’hui, comme le disait récemment Olivier Poivre d’Arvor, il faut distinguer sans les opposer échange culturel et diplomatie culturelle. Est-ce que le ministère de la Culture et de la Communication va se saisir de cette question ? Aujourd’hui, le ministère de la Culture et de la Communication doit s’occuper de l’accompagnement, du soutien des compagnies, des artistes français à l’international. Cela ne peut plus être comme les années précédentes, totalement délégué au ministère des Affaires étrangères et européennes. Et ce n’est pas du tout de la « guéguerre ». Il faudra chercher toutes les synergies, toutes les rencontres possibles et imaginables afin de mieux articuler la réalité de la diplomatie culturelle et celle des échanges culturels. C’est une question nouvelle, tout cela est en train de se construire et je ne désespère pas que l’on avance.

Nicolas Marc : Comment organisez-vous concrètement, au niveau de l’Onda, l’accompagnement des artistes français dans leurs activités à l’étranger ? Vous parliez tout à l’heure de Focus. Quelles sont les différentes actions ?

Fabien Jannelle : Première chose, il y a un problème très clair : un programmateur étranger est désemparé devant ce qu’il se passe en France. Pour une simple et bonne raison : il y a une telle offre culturelle dans ce pays qu’il est extrêmement difficile de s’y retrouver. Il faut comprendre que les gens ne peuvent pas aller au festival d’Uzès, au festival de Montpellier, au festival de Rennes, aller à Lille, etc. Ils ne peuvent pas passer toute leur année en France pour suivre ce qui se fait dans notre pays. Et puis, il y a une énorme diversité des esthétiques dans notre pays que ce soit en danse, que ce soit en théâtre, etc. Par exemple, vous prenez la communauté flamande de Belgique, il y a une « flamisch touch » : le spectacle de Platel, vous voyez bien que c’est flamand. Vous avez un spectacle d’Ostermeier, vous comprenez que ça vient de Berlin. Cela contribue à leur succès international car ils sont très identifiables. En France, c’est très différent : voyez le travail de Braunschweig, de Py, de Pommerat, pour prendre trois metteurs en scène d’une même génération, ou de Maguy Marin, de Mathilde Monnier et de Josef Nadj, vous avez des esthétiques très différentes. C’est, me semble-t-il, plus compliqué qu’ailleurs. Il faut donc essayer de créer des occasions, c’est l’idée des Focus. Nous avons une collaboration active avec l’Institut français en mobilisant les postes diplomatiques pour favoriser la venue de programmateurs étrangers. Pendant trois ou quatre jours, cela leur permet de se faire une idée ; c’est une première chose. La deuxième chose : les artistes français étaient assez peu ouverts à l’international sauf quelques exceptions, comme Clash 66. Il faut le dire car dans notre pays, et c’est une chance, on pouvait produire et diffuser un spectacle avec uniquement des partenaires français. Ce qui n’est pas le cas des Italiens, des Anglais et d’autres pays de l’Union européenne et au-delà. Il faut aller chercher de l’argent à l’extérieur car on n’en trouve pas dans son propre pays. Cela pousse les artistes et leurs accompagnateurs, les administrateurs à aller à l’extérieur.

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Troisièmement, on peut diffuser correctement son spectacle en France. Nous sommes le seuls pays au monde à avoir un réseau aussi dense et aussi diversifié associé à un financement public conséquent. Chez nous, il y a les Scènes nationales et les théâtres de ville pluridisciplinaires, on fait de la diffusion, de la coproduction, il y des résidences. C’est d’une souplesse incroyable et d’une grande efficacité. Ce n’est absolument pas le cas en Italie : Romeo Castelluci qui est une « star » joue trois fois dans son propre pays. Pippo Delbono, que tout le monde s’arrache, joue à peine cinq à six fois dans son propre pays. S’ils veulent exister, ils sont bien obligés d’aller ailleurs. Il y a donc un petit retard des artistes français à l’international, et ce retard est en train de se combler. Aujourd’hui à l’IETM, les Français sont le groupe national le plus important. Cela atteste un besoin et un désir. Les gens essaient de prendre de plus en plus de contacts et je pense que ce n’est pas uniquement pour une raison financière. Je pense qu’il y a une génération Europe, une génération monde. Nos amis de Clash 66 le montrent bien : il y a des gens nés dans l’Union européenne qui ont une relation au monde via internet sans comparaison avec celle des générations précédentes. Ils ont avec leurs collègues des autres pays des relations naturelles. Ils parlent beaucoup mieux les langues étrangères et particulièrement l’anglais. Nous proposons donc un accompagnement aux artistes, nous avons des bases de données qu’ils peuvent utiliser en fonction de leurs spectacles. Prétendre à l’international appelle un travail particulier. Il faut savoir, premièrement : que fais-je comme type de spectacle ? Ce que je fais comme type de spectacle ne peut pas intéresser tout le monde à l’international. Comme en France, d’ailleurs. Donc un travail de repérage à l’international, chez les Allemands, chez les Flamands, chez les Wallons, chez les Anglais, trouver les festivals, les lieux... C’est le travail que nous essayons de faire avec eux. Comme durant trente ans, nous les avons aidés à construire et à augmenter leur diffusion au plan national, nous essayons de le faire dorénavant au plan européen et international.

Nicolas Marc : Vous avez réalisé une vaste étude sur les échanges artistiques entre la France et l’Europe en matière de spectacle vivant. Pouvez-vous nous en dire davantage sur la méthode employée et sur les résultats ?

Fabien Jannelle : Un premier point sur la méthodologie. L’étude Les échanges entre la France et l’Europe porte sur deux aspects : la circulation des œuvres françaises à l’étranger et celle des œuvres étrangères en France. Concernant la circulation des spectacles français à l’étranger, nous avons envoyé un questionnaire à 1 573 compagnies et 168 lieux. Les compagnies étant toutes celles qui avaient sur trois saisons reçu un soutien du ministère de la Culture et de la Communication ou qui avaient joué dans un lieu labellisé du réseau. Ensuite, 168 lieux qui avaient géré des productions déléguées. Il y a eu 577 questionnaires retournés donc on est sur une base un peu supérieure à 30 %, qui nous permet d’avoir un échantillon représentatif. En ce qui concerne la circulation des spectacles étrangers en France, nous avons travaillé sur la base de données du Centre national du théâtre (CNT) qui collecte chaque année l’ensemble des programmations de tous les lieux labellisés et des principaux théâtres de ville et festivals. Nous l’avons fait sur dix ans, particulièrement sur les trois premières années et les trois dernières des années 2000 permettant ainsi de voir des évolutions. Cela ne concerne que les arts scéniques c’est-à-dire théâtre, marionnette, performance, danse, cirque et arts de la rue. Une étude va être lancée prochainement pour le champ musical. Il ne s’agit que de mobilité des spectacles et non pas de la mobilité des textes, comme par exemple les textes de Lagarce qui sont joués ici ou là, ni la mobilité des individus c’est-à-dire un metteur en scène ou chorégraphe français qui va faire une chorégraphie à Hong-Kong ou à Bruxelles. Sur cet ensemble de réponses, la circulation des spectacles français à l’étranger sur les quatre dernières saisons (2006-2007 à 2009 à 2010), concerne 921 spectacles français pour environ 8 500 représentations. Même si ceux qui ont répondu sont les compagnies particulièrement concernées, on peut considérer que ce chiffre est très inférieur à la réalité. Ce volume de diffusion à l’étranger est significatif mais il doit être relativisé. Sur les quatre saisons, il faut savoir que 50 % des compagnies n’ont pas « exporté » plus de deux spectacles, cela reste épisodique et non une pratique courante. 50 % n’ont été représentés que dans cinq lieux différents et 50 % n’ont pas dépassé les quinze représentations. Des chiffres encourageants, car ils prouvent que nous sommes devant une réalité qui ne demande qu’à être encouragée par les pouvoirs publics. Le théâtre rencontre le plus de difficultés. Les quatre arts qui tiennent le haut du pavé sont la danse, en tête, suivi de la marionnette, des arts de rue et du cirque. Ensuite, on s’aperçoit que la diffusion portée par les compagnies en tant que productrices déléguées est beaucoup plus forte que celle des lieux. Cela s’explique : pour une compagnie, c’est une question de vie ou de mort de tourner que ce soit en France ou à l’étranger. J’aimerais insister sur plusieurs points que l’étude a révélés : tout d’abord, le conventionnement a une réelle incidence sur les capacités à tourner. Plus une compagnie a une assise financière, plus elle a de stabilité, plus elle a tendance à s’investir à l’international.

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Autre enseignement intéressant, 26 % des spectacles qui sont allés à l’étranger ont bénéficié d’une coproduction étrangère. C’est-à-dire que nous ne sommes pas uniquement dans l’échange mais bien dans un processus de coopération. Pour finir, l’Europe est la principale aire de diffusion. 78 % des spectacles tournent en Europe. Concernant les personnes, leur nombre est très modéré : 64 % des spectacles font travailler moins de six interprètes. Citons comme exemple le cirque : 48 % des spectacles français diffusés en France comptent de un à cinq interprètes, c’est-à-dire à peu près la moitié, contrairement aux spectacles présentés à l’étranger où le pourcentage est de 77 %. Le prix de vente des spectacles est la conséquence de ce qui a été observé : 68 % des spectacles qui tournent à l’étranger ont un prix de cession inférieur à 5 000 euros et 3 % de ces contrats ont un prix supérieur à plus de 20 000 euros. Notons que 6 % des spectacles ont baissé leurs prix de cession. En conclusion, aller à l’international n’est pas « rentable ». En revanche, cela augmente la durée de vie des spectacles, la durée de travail des artistes, des interprètes et des techniciens. Cela nécessite par ailleurs des compléments de financement tout à fait indispensables. On constate que 40 % des spectacles ont bénéficié d’une aide publique. La zone d’échange privilégiée des spectacles est l’Europe occidentale : 70 % des échanges se font dans cette zone et de manière très massive avec les pays limitrophes. Les questions linguistiques, de proximité géographique, d’équivalence de niveaux de développement et les liens historiques, comme par exemple avec les pays du Maghreb ou d’Afrique, sont des éléments déterminants attestés par les cartographies de circulation. J’entends souvent dire que « les Français sont très bons pour l’accueil en France et assez nuls à l’export ». Les pointages réalisés montrent l’inverse grâce aux réseaux européens : le théâtre français est quatrième au Danemark, second en Finlande, quatrième en République tchèque. La danse française entre 2006 et 2010 a été la première danse nationale en Allemagne devant la danse américaine et flamande. En ce qui concerne l’impact économique, on estime de manière très relative qu’il y aurait eu 24 millions d’euros de contrat de cession hors droits d’auteurs durant les quatre dernières saisons étudiées. Cependant, je pense que nous sommes très en deçà de la réalité de l’impact économique. Pour vous donner un ordre d’idée, le bureau de la danse et du théâtre à Berlin, pour l’année 2009, compte un million d’euros de contrat de cession ainsi qu’environ 70 000 euros de droits d’auteurs. Voilà, à ce stade, ce que l’on peut dire sur l’exportation des spectacles français. Parlons maintenant de la circulation des spectacles étrangers en France. Entre le début de la décennie et aujourd’hui, c’est-à-dire entre 2000 et 2010, on est passé de 3 % à 10 % de spectacles étrangers dans les programmations françaises. Il est passionnant de se dire qu’il y a un spectacle sur dix qui est étranger. Les spectacles étrangers sont partout aujourd’hui et cela doit nous réjouir. N’oublions pas que le public est en droit de voir autre chose que des artistes français. Quand vous allez au cinéma, vous voyez des films de toutes les nationalités. Dans votre discothèque, vous avez des chanteurs, des compositeurs de toutes les nationalités. Et dans votre bibliothèque, il n’y a pas que des livres d’auteurs français... Sur les plateaux, on est aujourd’hui dans ce mouvement, dans cette réalité. Les spectacles viennent à 66 % d’Europe et la francophonie est un élément qui renforce les échanges. Ce sont les spectacles de théâtre étrangers qui sont majoritaires dans les importations puisqu’ils représentent 54 % de l’ensemble. Nous avons en France une grande pratique du surtitrage, ce qui n’est pas le cas dans beaucoup de pays. Ce qui nous a énormément surpris, c’est la place des spectacles pour le jeune public. En l’an 2000, 2 % de spectacles étrangers sont présentés aux enfants dans le cadre des saisons jeune public. Aujourd’hui, 25 %, un spectacle sur quatre, vient d’un pays étranger. Beaucoup de la francophonie, les Québécois, les Wallons, les Suisses qui ont de belles équipes de théâtre jeune public mais aussi les Italiens qui adaptent en français leurs spectacles. Esquissons quelques conclusions provisoires. La première est que le rapport import/export est équilibré. C’est la grande nouveauté de cette étude : on pensait l’inverse. Sur les périodes 2007-2008 et 2009-2010, on estime que 250 spectacles étrangers ont circulé en France quand 230 spectacles étaient exportés. L’idée reçue d’un déséquilibre est donc totalement contredite. La deuxième conclusion : la distinction entre diplomatie culturelle et échanges culturels. Les biens culturels, en l’occurrence les spectacles, circulent dans le cadre d’échanges qui échappent au domaine d’intervention de la diplomatie. C’est une donnée positive de la mondialisation et il faut en tenir compte. La troisième conclusion : il faut des politiques adaptées de la part des collectivités publiques de préférence en liaison avec l’Etat via le ministère de la Culture et de la Communication et le ministère des Affaires étrangères et européennes. Les conventions de l’Institut français avec les collectivités territoriales en sont un exemple. Il faut mettre en place des dispositifs qui accompagnent et soutiennent les artistes français à l’international. La quatrième conclusion : l’international peut concerner tout le monde, à condition de travail, de patience, de persévérance… et de soutiens financiers. De modestes compagnies de marionnettes ont bâti un formidable réseau à l’étranger parce qu’elles sont allées dans des festivals internationaux où elles ont noué des liens. La cinquième et dernière conclusion concerne l’impact économique et social. J’associe les deux choses. Il y a de toute

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évidence un impact économique qui n’est pas négligeable, les chiffres en témoignent. Il y a surtout un impact social car cela allonge la durée de vie des spectacles, cela allonge les durées d’emploi des artistes et des techniciens. Et dans le contexte actuel, c’est une chose à laquelle il faut être attentif.

Nicolas Marc : Je me tourne maintenant vers Jean-François Guéganno. Vous êtes directeur du Département du développement et des partenariats de l’Institut français. Disposez-vous aussi à l’Institut français de données comparables ?

Jean-François Guéganno, directeur du Département du développement et des partenariats de l’Institut français Ce sont 10 000 artistes qui ont été accompagné par Culturesfrance à l’étranger en 2010. Sébastien Ramirez a cité le soutien de l’Institut français dont il bénéficie. En réalité, il s’agit d’un soutien partagé entre l’Institut et le Goethe sur un fonds franco-allemand créé justement pour favoriser les productions à l’initiative et partagé entre les Français et les Allemands en pays tiers. Sachez qu’il existe 150 Instituts français et plus de 1000 Alliances françaises. Certains voudraient qu’il n’y ait que des Instituts français ou que tout le monde s’appelle Alliance française. Cependant, l’histoire a rendu ce double réseau historique riche, dense qui continuera à se développer de cette manière-là. C’est un exceptionnel réseau : tous ceux qui ont travaillé à l’étranger, ceux qui sont partis en tournée ou qui ont réalisé des coproductions ont probablement à un moment ou à un autre croisé un Institut ou un Centre culturel ou une Alliance.

Nicolas Marc : L’Institut français a succédé à Culturesfrance avec une structure de périmètres élargis et des moyens renforcés. Pourriezvous nous repréciser la nouvelle organisation ?

Jean-François Guéganno : Pour rebondir sur les propos de Fabien Jannelle, nos relations sont au beau fixe avec le ministère de la Culture et de la Communication. On n’a jamais autant dialogué avec ce ministère et nos collègues ainsi qu’avec l’ensemble des dispositifs qui y sont associés. L’Institut français est un outil de la diplomatie culturelle s’inscrivant dans une vraie tradition française. Il y a eu auparavant les Œuvres françaises pour l’action à l’étranger. Ensuite, il y a eu l’Association française d’action artistique35 (Afaa) fusionnant par la suite avec Afrique en Création permettant de prendre en compte le soutien aux pays du sud dans ce dispositif. Ensuite, il y a eu la fusion avec l’Association pour le développement de la pensée française – ADPF pour la création de Culturesfrance. Aujourd’hui, la création de ce seul opérateur pour l’ensemble de la diplomatie culturelle regroupe l’ensemble des missions, bien évidemment les échanges artistiques et également toutes les missions qui relèvent du cinéma, du débat d’idées, de la circulation des savoirs dans le monde et également l’accompagnement de l’enseignement du français dans le monde. Les missions sont renforcées. Le budget de Culturesfrance était de 23 millions d’euros, celui de l’Institut français est de 45 millions d’euros à la fois sur le développement des dispositifs, sur l’accompagnement de la scène à l’international. Nous sommes dans un moment de transition entre Culturesfrance et l’Institut français. Aujourd’hui, les équipes ne sont pas totalement stabilisées. Nous sommes passés de 100 agents à 150-180 agents. Nous avons déménagé. Nous connaissons aujourd’hui nos missions, le renforcement des missions qui existaient déjà et le développement des nouvelles. Et les Ateliers de l’IF en juillet 2011 réunissant le réseau culturel français à l’étranger sont une occasion unique pour repenser l’ensemble des outils et le mode opératoire de l’Institut français. Il y a eu énormément de débats sur le rattachement de l’ensemble du réseau culturel français à l’Institut français. Aujourd’hui, on est entré dans une phase dite d’expérimentation et on mesurera la force, la valeur ajoutée du nouvel outil en 2013 lorsque la phase d’expérimentation sera terminée. Aujourd’hui, il y a 12 pays, un échantillon de 12 postes diplomatiques dans l’Institut français qui ont été créés par la fusion de l’établissement de l’autonomie financière, l’Institut français quand il y en avait un, et le Service de coopération et d’action culturelle (SCAC). Et dans ce rapport de l’Institut français au réseau, on est désormais dans une logique de marque unique d’influence qui s’appellerait l’Institut français si demain, l’expérimentation est jugée concluante. Sur les missions de l’Institut français, celles existantes sont très largement renforcées. Sur les questions du spectacle vivant, pour le Département des échanges artistiques que dirige ma collègue, Sophie Renaud, dont l’intérim est assuré par Laurent Maillot, l’ensemble des moyens a augmenté, l’enveloppe d’aides dans le cadre de l’appel à projets a également été abondée.

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L’Afaa fut l’opérateur délégué du ministère des Affaires étrangères et européennes (Direction générale de la coopération Internationale et du développement, DGCID) et du ministère de la Culture et de la Communication pour les échanges culturels internationaux et l’aide au développement, dans les domaines des arts de la scène, des arts visuels, de l’architecture, du patrimoine, des arts appliqués et de l’ingénierie culturelle.

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Cependant, nous portons une interrogation sur un probable nouveau dispositif ou un dispositif qui sera modifié voire amendé sur la logique de l’appel à projets. Nous sommes encore dans l’héritage de Culturesfrance dans l’appel à projets. Avant il fallait rentrer dans des dispositifs, correspondre à des programmes et s’inscrire dans des logiques thématiques. Aujourd’hui, toutes les structures peuvent déposer un projet et prétendre être éligibles sans que pour autant des clés sur les formats et sur la définition de ces projets soient aujourd’hui proposées. Par exemple, une tournée pour un soliste entre dans le cadre de l’appel à projets, une coproduction pour un orchestre symphonique pendant trois mois dans un pays étranger entre également dans l’appel à projets. Nous aurons peut-être besoin de rationnaliser cette manière de travailler avec les opérateurs et les artistes. A noter qu’il n’y aura pas de modifications sur l’appel à projets en 2011 ; éventuellement, de nouvelles règles ou un nouveau mode opératoire à l’horizon 2012.

Nicolas Marc : Dans ce qui a été évoqué tout à l’heure, on peut entendre le lien plus distendu entre l’Institut français et le ministère de la Culture et de la Communication. C’est un sentiment perçu par beaucoup d’opérateurs culturels français. L’Institut français s’affiche clairement comme l’opérateur du ministère des Affaires étrangères et européennes. Nous avons bien compris que vous avez plus de budget et que les missions se sont beaucoup plus élargies. Mais ce lien est-il devenu moins fort avec la culture, marquant une évolution profonde, ou cela est-il comme avant ?

Jean-François Guéganno : D’abord, je le dis très sincèrement et je ne veux pas faire de langue de bois, le lien n’est pas distendu avec le ministère de la Culture et de la Communication. Concernant le portefeuille des saisons et des festivals, nous sommes en train de travailler sur un tandem entre Paris et Buenos-Aires. Concernant les logos, il y a une double Marianne du ministère de la Culture et de la Communication et des Affaires étrangères et européennes comme on aurait pu l’avoir sur les supports de communication de l’Année du Mexique en France si elle avait eu lieu. Fabien Jannelle a raison : l’Institut français est l’opérateur pour l’action culturelle extérieure auprès du ministère des Affaires étrangères et européennes. C’est une mission de diplomatie culturelle et cela n’est pas quelque chose d’incompatible. Nous avons la chance extraordinaire que la France mette au cœur de sa diplomatie d’influence la culture et en fasse un des facteurs essentiels de sa diplomatie et de sa relation extérieure. Nous avons le plus grand réseau culturel au monde. Et nous sommes là pour l’améliorer, pour trouver d’autres outils et d’autres façons de faire. Soyons contents de cette chance que nous avons et que beaucoup de monde nous envie. A l’époque où Olivier Poivre d’Arvor dirigeait Culturesfrance, on annonçait l’Institut français comme le Goethe-Institut à la française. C’était une des problématiques de visibilité qui a été posée. Depuis la France, les questions étaient : que font-ils ? Comment cela se passe-t-il ? Ce n’est ni très clair ni très transparent. Ce problème de visibilité est en France. Dans quelque pays du monde où vous pouvez vous rendre, le dispositif de l’Alliance française, de l’Institut français, de l’action culturelle extérieure de la France est extrêmement visible. En poste à l’étranger à l’époque, j’ai souvenir du sourire de mes collègues du Goethe, du Cervantes, du Confucius car ils sont tous plutôt admiratifs du modèle français.

Nicolas Marc : Comment accompagnez-vous et assurez-vous la promotion des tournées internationales aujourd’hui ? Quels sont les projets ? J’ai bien compris que c’était un chantier. Quelles sont les grandes lignes de l’évolution qui se dessinent ?

Jean-François Guéganno : Les tournées et la programmation n’étant vraiment pas mon champ de compétences, je ne saurais vous répondre. Aujourd’hui, nous mettons évidemment en œuvre toutes les réflexions sur ce dispositif d’influence en cohésion parfaite et en synergie avec le ministère de la Culture et de la Communication, entre autres. Vous avez cité le dispositif des collectivités territoriales. En ce qui nous concerne, c’est un dispositif fondamental. Il y a aujourd’hui 22 conventions qui contribuent à la diffusion de la scène française à l’étranger. Nous avons fait savoir que nous sommes disposés à développer ces partenariats avec les collectivités territoriales, à signer de nouvelles conventions, avec Éric Lebas, par exemple, qui s’occupe de ce pôle des collectivités territoriales.

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Séance plénière 1

Je formule le vœu de signer très prochainement une convention très ambitieuse entre l’Institut français et la Région Languedoc-Roussillon. Il y a une vraie réflexion portée sur chaque territoire, essentiellement des dispositifs avec les Régions et les grandes Villes de France avec ce que l’on veut mettre en place en terme d’aide à la diffusion, entre autres. Ce que souhaite l’Institut français, c’est un dispositif pensé avec les collectivités qui ne soit pas simplement un appel à projets parallèle, à savoir un grand appel à projets au sein de l’Institut français avec un budget d’environ 3 millions d’euros offerts et mis à la disposition des structures et, en parallèle, un appel à projets « bis » selon la région. L’idée est de penser une stratégie culturelle à l’export avec les collectivités.

Nicolas Marc : L’Afaa, Culturesfrance puis l’Institut français ont conclu des conventions avec les collectivités territoriales. Josianne Collerais, la vice-présidente du Conseil régional Languedoc-Roussillon annonçait la signature imminente d’une convention entre l’Institut français et la Région Languedoc-Roussillon. On a souvent du mal à percevoir ce que recouvrent ces conventions. Pouvez-vous être plus précis par rapport à cela ? J’ai bien compris qu’il y avait des réalités différentes selon les régions mais quel est leur contenu ? Quelles sont leurs incidences concrètes pour les artistes sur les territoires régionaux ?

Jean-François Guéganno : L’incidence est un soutien concret à la diffusion et aux artistes très similaire à l’appel à projets. Si ce n’est que l’expertise est partagée entre la Direction régionale des affaires culturelles de la collectivité territoriale et les experts sectoriels de l’Institut français. Citons un exemple : nous sommes en train d’accompagner un tandem croisé, un automne parisien à Buenos-Aires et un automne argentin à Paris. Actuellement, la Ville de Paris accompagne le Théâtre du Rond-Point dans quelques semaines à Paris avec ses productions. L’idée d’exporter l’ensemble du concept du Théâtre du Rond-Point, la manière de faire et de programmer dans le cadre d’un échange entre le Théâtre San Martin de Buenos-Aires répond de notre volonté de voir se développer ces projets structurants. Je pourrais vous citer un autre exemple dans le cadre d’une convention entre New-York et Le Havre ou bien entre Bordeaux et Los Angeles où là, nous sommes sur des logiques de résidences croisées essentiellement pour des plasticiens. Aujourd’hui, nous essayons d’avoir une nouvelle réflexion. La typologie des conventions n’est plus la même selon nos interlocuteurs, qu’il soit directeur des relations internationales ou directeur des affaires culturelles. Il faut que cela soit une réflexion partagée entre les affaires culturelles et les relations internationales afin de penser en termes de stratégies et de territoires dans le but de définir notre direction. Fabien Jannelle l’a dit précédemment, il existe différentes typologies. Il y a des formes de spectacles ou de choix qui sont plus adaptées à l’international, à un territoire pour des logiques de marché et de territoires. Nous devons avoir cette réflexion avec le politique et avec les artistes. Qu’est-ce que l’Institut français ? C’est la cartographie de la vie culturelle en France et en effet un dispositif diplomatique. La valeur ajoutée est l’expertise du réseau ; mettre en synergie l’expertise de nos collègues du ministère de la Culture et de la Communication et des collectivités territoriales. L’expertise commune du réseau des associations des industries créatives et des acteurs sur le terrain, ceux qui pensent, réfléchissent et connaissent les opérateurs à l’étranger, est une valeur ajoutée indéniable. Ils sont des relais souvent très efficaces pour accompagner nos artistes à l’étranger. Je vois mal comment aujourd’hui on pourrait développer sans cet extraordinaire réseau.

Nicolas Marc : Karine Gloanec-Maurin, vous représentez l’Association des Régions de France, l’ARF, mais également la Fédération nationale des collectivités territoriales pour la culture, la FNCC. Vous êtes également élue locale. Quelle importance ces conventions Institut français-Collectivités ont-elles, de votre point de vue ?

Karine Gloanec-Maurin, présidente de la commission culture de l’Association des Régions de France Ce sont des conventions qui permettent aux artistes de la région, avec une expertise partagée entre l’Etat et les collectivités territoriales, de partir à l’étranger. Pour les Régions, ces conventions peuvent entrer également dans le cadre des accords de coopération décentralisée avec d’autres régions du monde. Citons un exemple très concret pour la Région Centre : la convention représente une ligne budgétaire de 60 000 euros partagée entre ce qui s’appelait il y a encore peu Culturesfrance, à hauteur de 30 000 euros, et la Région Centre à hauteur de 30 000 euros. Cela a permis en 2010 d’accompagner une formation musicale, Diabolus in Musica, en Amérique du Sud, de faire tourner Josef Nadj à Moscou, de faire un programme d’audiovisuel avec l’École des Beaux-Arts de Cracovie, une région avec laquelle nous sommes en accord prioritaire de coopération décentralisée, entre autres. Ce sont des actions très concrètes avec un financement qui est loin d’être exceptionnel : deux fois 30 000 euros, ce n’est pas un soutien énorme en comparaison avec la ligne budgétaire de soutien à la diffusion du budget régional.

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Nicolas Marc : Au-delà des conventions avec l’Institut français, quelles sont les actions des Régions en matière d’accompagnement des artistes sur la diffusion internationale ?

Karine Gloanec-Maurin : J’aimerais rappeler ce que représente la coopération décentralisée et la coopération internationale d’ailleurs pour les Régions françaises mais également les régions d’Europe. En début de semaine, à Orléans, nous avons eu la chance d’accueillir l’Assemblée des Régions d’Europe et son assemblée régionale des jeunes représentants des Régions d’Europe. Ce fut extrêmement intéressant. Dans ce cadre, nous recevions la commission culture, jeunesse, éducation-formation et coopération internationale. Toutes ces Régions d’Europe sont impliquées dans la coopération et beaucoup d’exemples de mobilité des artistes inscrits dans les échanges culturels ont été présentés par les différents participants. Depuis 1992, la loi permet aux Régions d’agir dans le cadre de la coopération décentralisée. L’échange culturel est souvent le premier axe et les premières actions les plus concrètes que l’on met en place avec nos régions partenaires. En 2007, la coopération décentralisée est renforcée par la loi Houdin sur l’eau, qui permet aux collectivités de diversifier leurs actions mais la culture reste une dimension extrêmement importante dans notre dialogue avec le ministère des Affaires étrangères et européennes. Le dialogue n’est pas tout à fait le même qu’avec le ministère de la Culture et de la Communication puisqu’il n’y a pas de loi qui autorise les collectivités à agir dans le domaine culturel ! Les exécutifs le font grâce à la clause de compétence générale et de manière volontaire. Moi qui suis en contact avec ces deux ministères, je remarque que paradoxalement, à travers ce développement des coopérations décentralisées, nous avons une chance très concrète de pouvoir développer les échanges et les soutiens à la diffusion pour les artistes à l’international.

Nicolas Marc : L’intitulé de notre table ronde est du local à l’international. Quel est finalement le lien entre l’ancrage régional et une diffusion à l’international, une dynamique internationale pour une compagnie ?

Karine Gloanec-Maurin : Pour une compagnie, une formation artistique sur un territoire, c’est la possibilité, par le biais du Conseil régional, entre autres, de s’adresser à la collectivité et de mieux comprendre ce qu’elle met en place dans le cadre de la coopération décentralisée avec les régions partenaires. Pour y trouver également des échanges. En Région Centre, par exemple, le festival international des jardins de Chaumont-sur-Loire a mis en place des échanges très fructueux avec une de nos régions partenaires, le Land de Saxe-Anhalt et le Bauhaus. Ce furent des échanges extrêmement intéressants entre des paysagistes et des architectes. C’est une manière intelligente de trouver des partenaires à l’international entre ces dispositifs dont nous avons vraiment la maîtrise. Bien sûr la coopération décentralisée se construit sur des thématiques très diverses mais une grande partie des actions menées s’inscrivent dans le champ des échanges artistiques et cela, avec différentes régions du monde.

Nicolas Marc : Avez-vous d’autres exemples de coopération à l’international de la part de collectivités, qu’il s’agisse de Régions ou de Villes ?

Karine Gloanec-Maurin : La Ville de Blois est en jumelage avec la Ville d’Azrou dans la région de Meknes Tafilalet au Maroc qui est une région partenaire de la Région Centre. Elle participe donc à différentes actions dont des échanges culturels avec trois artistes de la Région, un cinéaste, un comédien de théâtre et un musicien de jazz . Ceci dans le cadre d’un dispositif qui s’appelle “Aux arts lycéens”. Ils entrent dans cette coopération décentralisée sur cette thématique. Les collectivités peuvent évidemment accompagner les artistes sur des projets qui leur sont propres. Cela peut être l’initiative d’artistes qui permettent aux collectivités d’avancer sur d’autres échanges.

Nicolas Marc : Alors finalement, que recherchent les Régions en matière d’accompagnement des équipes artistiques à l’international puisque la culture n’est pas une obligation légale ?

Karine Gloanec-Maurin :

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La culture n’est pas compétence obligatoire. Nos collaborations se construisent avec le ministère de la Culture et de la Communication. La signature de cette charte est extrêmement importante et cela construit réellement une relation avec l’Etat. Toutes les collectivités sont très engagées pour défendre la culture de manière très volontaire, je l’ai déjà dit. Nous nous sommes tous battus pour que la culture soit toujours inscrite dans cette fameuse clause des compétences générales que la réforme votée en décembre 2010 voulait supprimer. Ceci pour que nous puissions tous et toujours construire des politiques culturelles. Ce qui me paraît intéressant aujourd’hui, c’est qu’à travers la coopération décentralisée, nous pouvons agir en faveur de la culture dans le cadre d’une compétence propre.


Séance plénière 1

Nicolas Marc : Y a-t-il une expertise à développer au niveau des services des collectivités ? Le service coopération nous renvoie au service culturel qui n’est pas forcément « outillé » pour répondre à ce type de demande. La coopération est plus habituée à travailler sur des projets de développement économique plutôt que de développer la culture à l’étranger. Lorsqu’il y a des délégations à l’étranger, il y a des représentants du monde économique, social, agricole ou autre. On trouve rarement un directeur de théâtre ou un responsable de compagnie qui ont fait de la prospection à l’étranger grâce à leur Région. Si vous avez des exemples...

Karine Gloanec-Maurin : C’est votre point de vue, Nicolas. Certains exemples indiquent l’inverse : la Région Rhône-Alpes et la Région Centre ont des réseaux très actifs avec les artistes. La semaine prochaine, nous partons justement au Maroc. Il y a effectivement une partie consacrée au plan économique mais il y a aussi une partie consacrée à l’échange de dispositifs dont je vous ai parlé très intéressant d’éducation artistique dans les lycées mis en place avec notre Région au Maroc. Notre délégation est composée, entre autres, d’un artiste et d’un directeur de structure. Évidemment, la Région Centre n’est pas une exception. Je sais que Rhône-Alpes et d’autres Régions sont très investies dans la coopération décentralisée et ont mis en place des réseaux en liens quotidiens avec la direction de la culture de la collectivité. Ce sont des choses qui se construisent. La meilleure transversalité des services dans ma Région est celle entre la direction des Relations internationales et la direction de la Culture car les premiers échanges sont souvent basés sur des échanges artistiques. Il faut tout construire ensemble comme toujours et cela représente beaucoup de travail comme disait Sébastien Ramirez tout à l’heure. Cette construction demande beaucoup d’énergie et de travail, pour nous, les élus, également dans le but de construire avec nos partenaires et les services appropriés. Pour rebondir sur ce qu’a indiqué Jean-François Guéganno, nous avons un réseau merveilleux reconnu internationalement. Il est véritablement le plus remarquable mais c’est un réseau qui n’a plus aujourd’hui beaucoup de moyens d’action : c’est notre inquiétude. Et les véritables partenaires tels que les Alliances françaises et les Centres culturels avec lesquels nous travaillons sont également contraints financièrement. Certes, l’Institut français va être ré-abondé, si j’ai bien entendu sa directrice, Sylviane Tarsot-Gillery. Elle annonçait que l’Institut français apporterait un budget renforcé. C’est une bonne nouvelle mais cela profite aux échanges avec les artistes et plus seulement à l’organisation que tout cela demande. Beaucoup de collectivités sont dans l’attente de conventions à mettre en place avec l’Institut français leur permettant encore plus d’échanges et de collaborations avec les régions du monde.

Pascal Brunet, directeur de Relais Culture Europe De la grande Europe à l’Europe monde

(EPSON - Europe in the world - 2007)

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Fabien Jannelle évoquait la difficulté pour un programmateur européen de comprendre ce qu’il se passe en France. D’amitié ou par expérience, nous avons l’impression que nous ne sommes pas si souvent capables de comprendre ce qu’il se passe en Europe. Avec différentes façons de vivre l’Europe, on oscille souvent sous le vocable européen entre une pratique bilatérale et une pratique multilatérale de l’Union européenne. L’Europe n’est pas si grande ; seulement âgée d’une petite cinquantaine d’années elle représente un peu plus de 500 millions d’habitants. De plus, on court toujours un peu après, l’Europe est toujours un peu en avance sur ce qu’on pense qu’elle est. Il est assez difficile d’être raccord avec ce qu’elle est en train de devenir. On commence à formuler, depuis Maastricht, ce que nous aurions à faire d’un point de vue culturel. Peut-on appeler cela une politique culturelle ? Il me semble que c’est trop tôt. Cependant, nous avons des choses à faire ensemble d’un point de vue culturel car l’Europe ressemblera plus à cela dans les dix années à venir.

De la grande Europe à l’Europe monde

(EPSON - Europe in the world - 2007)

C’est quelque chose qui nous sert à nous insérer dans le monde et non pas quelque chose qui servirait à construire dans un espace un peu clos. J’éprouve quelques difficultés vis-à-vis de la question territoriale depuis quelques années. Cependant, le territoire est quelque chose d’intéressant s’il nous propulse. C’est quelque peu inquiétant quand il nous enclot. La question européenne est d’inventer une politique culturelle pour se projeter sur ce territoire. Actuellement, nous sommes six milliards d’habitants voire un peu plus et on va être huit milliards de personnes dans les quinze ans à venir. Deux tiers de la population vont vivre en Asie entre Delhi, Singapour, Pékin. La grande interrogation culturelle est : comment formuler une politique culturelle qui se saisisse de cela ? Quelle place doit-on donner au soutien des échanges culturels ? Ce qui est intéressant est la manière de construire quelque chose qui nous soutienne en tant qu’acteur dans cet environnement en conciliant deux contextes : d’un côté une Europe très intégrée, de l’autre une relation aux voisins de l’Europe moins structurés. C’est intéressant de voir la Commission européenne demander à un certain nombre d’acteurs culturels : qu’avez-vous à proposer ou que faudrait-il que l’on fasse au regard de la transformation des sociétés du Sud méditerranéen ? Quelle serait la réponse culturelle ? Nous n’avions pas de réponses claires à apporter. Nous essayons de formuler avec très peu de moyens notre course permanente après cette transformation. Le budget actuel qui soutient la coopération culturelle est assez faible : 430 millions d’euros. Cela peut paraître énorme mais pour trente pays, cela ne représente plus grand-chose. Jean Hurstel parlait de la « despote » Commission européenne. Ses revendications sont : Etats membres, que voulez-vous ? La France, l’Allemagne et la Pologne se sont regroupées et annoncent quelque chose de culturel d’un peu fort sans avoir de contenu précis. Mais ce ne sont que 3 Etats sur 27. Nous ne savons pas ce que nous voulons. La Commission européenne formule très peu de demandes. Nous voulons en tant qu’acteurs culturels nous tourner vers nos représentants, c’est-à-dire que le Parlement européen formule un outil intéressant, tel qu’une hypothèse budgétaire de 800 millions ou un milliard d’euros.

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Séance plénière 1

Nous sommes en ce moment en train de constituer quelque chose, nous courons après ce qui est en train de se discuter mais également après une vision institutionnelle que nous ne comprenons pas très bien. Notre allié est le Parlement : les Etats membres sont actuellement devant autre chose qui concerne la gestion de la dette publique. Ils ne sont pas très ouverts à ce dont nous sommes en train de parler. Gestion de dette publique signifie concrètement : 40 % de baisse des crédits culturels en Angleterre, 30 % de baisse des crédits culturels au Portugal. Nos voisins espagnols sont à entre 30 et 35 % de coupes dans le budget culturel. Le terme de « pays sinistrés » fut évoqué tout à l’heure. Je ne sais pas s’il est encore adéquat. Il faut aller de l’autre côté de l’Europe pour parler de « sinistres ». C’est aussi intéressant d’avoir cela en tête, il n’y a pas beaucoup d’argent dans les Etats membres et dans les territoires non plus. De plus, il y a beaucoup d’inégalités dans les territoires. Le thème d’aujourd’hui étant l’économie, je vais essayer de me prêter au jeu. Nous connaissons cette vision économique que les économistes appellent « banane bleue ». C’est intéressant de voir que ce n’est plus tout à fait cela. Le développement ces dernières années de ces grands corridors rouges est appelé élégamment la pieuvre rouge.

Un déséquilibre territorial grandissant

Ces économistes montrent une Europe qui est en train de se développer de façon extraordinairement non cohésive. Nous avons des écarts dans cette Europe qui sont tout à fait conséquents. Le PIB moyen par habitant dans l’Union européenne montre un rapport de 1 à 300 entre certains pays : si le PIB moyen est fixé à 100 %, le PIB moyen par habitant à Londres est de 300 % alors qu’en Roumanie, il n’est seulement que de 22 %. Le secteur culturel vit dans ces écarts de richesses. Quand on parle de marché, comprenons le marché avec cette contrainte dans un rapport de 1 à 16. Pour un euro disponible pour la culture quelque part, vous en avez 16 à l’autre bout de l’Europe. Évidemment, les 16 sont plutôt disponibles à l’Ouest, les 1 sont tendancieusement disponibles à l’Est ; cela implique du salaire différentiel, des moyens de production différentiels et des moyens pour se former extraordinairement tendus. La Ville de Montpellier est une exception. Vous avez une classification des villes à fort potentiel européen réalisée par la Délégation interministérielle à l’aménagement du territoire et à l’attractivité régionale37 (Datar) qui en fut un des grands investigateurs. Quand on voit la carte pour certains, par moments, le résultat est cruel. 37

La Délégation interministérielle à l’aménagement du territoire et à l’attractivité régionale (Datar) est une administration dont la mission est de préparer, impulser et coordonner les politiques d’aménagement du territoire menées par l’Etat ainsi qu’accompagner les mutations économiques en privilégiant une approche offensive de la compétitivité. http://territoires.gouv.fr/la-datar

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Dans cette Europe se construisant en mode désordonné, le but est de mettre un peu de cohésion. Effectivement, on peut rêver. Les critères sont discutables bien que certaines choses soient en train de se tendre. D’autres choses sont intéressantes quand on parle du monde et de globalisation. Il faut regarder cette Europe à ses marges : Moscou, Istanbul, c’est tout cela qui est en train de se penser. Cela donne une discussion culturelle qui a un peu ces trois pôles, et cela me semblait intéressant de commencer par cela. Le pôle le plus actif est : « projetons-nous dans le monde, dans la politique internationale, que la culture soit dans les politiques internationales » et non pas la culture dans la diplomatie internationale. Soyons les acteurs de la vie internationale, ce que disait Fabien Jannelle tout à l’heure est extrêmement important. Nous avons un gros problème de vivre ensemble. Ce qui est en train de se dire au niveau de la politique culturelle est : comment va-t-on accepter les cultures qui choisissent de s’installer dans une Europe qui se dit fermée, pas tellement ouverte ? Regardons nos élections nationales mais également celles d’ailleurs. Le troisième pôle est : comment la culture peut-elle se penser dans un lien économique réel ? La réalité des économies donne un chantier assez vaste avec beaucoup de mauvais débats mais également de très bons débats. Exemple de mauvais débat : la créativité. Tout le monde a entendu parler de l’Europe créative. C’est un mauvais débat, ce sont des débats occultants qui mélangent tout. Reprenons des débats intéressants qui existent en Europe aujourd’hui. Il nous faut aller les saisir : parlons de la création, reparlons de l’économie réelle, de la citoyenneté.

Jean-François Pujol, secrétaire général adjoint de la Fédération nationale des syndicats du spectacle de l’audiovisuel et de l’action culturelle-CGT Spectacle (FNSAC) Pouvez-vous nous éclairer sur deux accords bilatéraux, avec la Corée, et bientôt le Canada, accords commerciaux dans lesquels sont parties prenantes les échanges culturels, avec la complicité de l’ensemble des Etats membres de l’Europe ? La Commission européenne a en effet délibérément inclus ces échanges dans un accord de l’Organisation mondiale du commerce38 (OMC). Elle a donc abandonné l’exception culturelle qui rendait ces accords non-négociables dans le cadre d’un accord commercial. L’Europe est en train d’établir ce type de relations bilatérales et il me paraît intéressant que vous commentiez cette initiative. Ne faisons pas l’erreur d’accuser Bruxelles de tous les maux, alors que ce sont les gouvernements qui abandonnent toute idée d’une politique culturelle propre à l’Europe. C’est en contradiction avec la convention Unesco et les coalitions pour la diversité culturelle – y compris celle du Canada – sont en complet désaccord avec la soumission des accords culturels aux règles de l’OMC.

Pascal Brunet, directeur de Relais Culture Europe C’est assez difficile de répondre de façon courte sur l’ensemble des débats, qu’ils soient inquiétants ou positifs. La question de l’exception culturelle est intéressante. En France, nous avons cru que l’exception culturelle était une chose naturellement transportée sur l’espace communautaire, que tout le monde parlait de cela. Bien au contraire. Ce qui était dit au niveau communautaire, ce qui était négocié, c’était de reconnaître une double valeur aux productions culturelles : une valeur vénale et une valeur symbolique. Je crois que l’exception culturelle a permis d’arriver à la reconnaissance de cette double valeur, base sur laquelle l’Union européenne fonde la plupart de ses négociations. Cela a donné des choses assez positives qui sont la convention Unesco : la reconnaissance à un niveau international de cette double valeur. Alors non pas l’OMC : le cycle de Doha a été un cruel échec, on verra quand le cycle de renégociation mondiale reprendra sur la négociation des services. À certains moments, dans des accords non bilatéraux Europe-pays tiers assez surprenants, on semblerait minorer ce que nous avons défendu ou obtenu de cette double valeur. Nous avons une Cour européenne de justice qui pourrait à un moment donné projeter qu’il faut passer par des voies de justice pour arriver à fabriquer du droit européen autour de cette question. L’organisation actuelle des acteurs culturels ne permet pas, pour le moment, d’aller sur le champ du droit international au niveau européen et communautaire. Le rôle principal de l’Union européenne n’est pas de subventionner. Ce que nous attendons de l’Union européenne, c’est qu’elle investisse réellement son pouvoir régulateur sur des sujets essentiels comme les prix : qui va saisir l’enjeu de la régulation des prix avec une telle distorsion des salaires entre les territoires au niveau européen et mondial ? Au niveau national, nous voyons que nous ne pouvons plus saisir cette question des enjeux. Nous n’avons pas les moyens de questionner les 15 à 20 000 euros de coût réel par cachet moyen : qui va les prendre ? Qui va réguler cela ? C’est un sujet bien plus important que de savoir si nous allons avoir quelques euros de plus sur un ensemble de choses assez marginales. L’autre question est : comment allons-nous soutenir la coopération européenne et nous saisir de cela ? Il va falloir que l’on renforce sérieusement notre capacité à faire de la coopération. Français, nous avons des difficultés même si nous

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L’Organisation mondiale du commerce est l’organisation internationale s’occupant des règles régissant le commerce entre les pays. Au cœur de l’organisation se trouvent les Accords de l’OMC, négociés et signés par la majeure partie des puissances commerciales du monde et ratifiés par leurs parlements. Le but est d’aider les producteurs de marchandises et de services, les exportateurs et les importateurs à mener leurs activités.


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apprenons vite. D’abord, on ne parle pas anglais, on parle le « globish39 » en Europe. Il est préférable pour négocier un contrat de bien comprendre la clause écrite en petit dans le contrat mais également d’être capable de coopérer, afin de saisir tous les enjeux économiques, politiques et techniques. Ce sont ces capacités qui nous permettront d’opérer sur la régulation et sur le renforcement avec l’Union européenne. Actuellement, on lui demande d’être supplétive à du financement, ce qui est une erreur. N’oublions pas que nous sommes dans une Europe avec des écarts magistraux entre les PIB par habitant de chaque pays : quand il y a des moyens limités, on essaie de les donner à ceux qui en ont le moins. Donc ne nous trompons pas de chantier, saisissons le débat et soyons vigilants comme vous l’êtes sur ces possibles ratés dans les négociations.

Nicolas Marc : Puisqu’on parle d’Europe, d’OMC, on parle très souvent des industries culturelles. C’est un marché qui a un certain degré de maturité. En ce qui concerne des disciplines comme le théâtre, la danse, les arts de la piste, les arts de la rue qui sont de mon point de vue non comprises dans les industries culturelles, est-ce que l’on n’est pas en face d’une construction de ce marché de la diffusion sur un plan européen ?

Pascal Brunet : En préparant l’intervention, je me suis essayé à créer une chaîne de valeurs. On parle de diffusion avec cette dynamique économique. La chaîne de valeurs est complexe : on parle de diffusion, de production mais chaque élément de la chaîne est important. J’entendais tout à l’heure : « la valeur principale est ce que je crée ». Cependant, « si je crée et que je ne produis pas, je ne suis pas un bon producteur ».

Une proposition de chaîne de valeurs (simplifié, d’après Charles Landry)

L’ensemble de cette chaîne est lié à un système d’acteurs extrêmement complexe, bien évidemment les équipes artistiques mais pas seulement. Sans être certain que ce soit systémique, nous parlons cependant de diffusion : au regard de ce qu’ont fait les industries culturelles, il nous faut répondre à l’ensemble de ce système d’acteurs et à l’ensemble de ce système de valeurs, le tout dans un environnement économique à tendances lourdes. Vous savez que le spectacle vivant n’est pas un secteur où l’on fait des gains de productivité majeurs. On pourrait constater que l’on a une économie de prototype longue, onéreuse, qui présente beaucoup d’inconvénients. C’est intéressant de voir que toutes les questions qui sont posées ici sont celles qui sont en train d’être posées dans cette grande réflexion qu’est la coopération européenne.

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Le « globish » est un mot-valise combinant les termes « global » et « english ». Ce néologisme est une version simplifiée de l’anglais utilisant uniquement les mots et les expressions les plus communs de cette langue. Il s’agit d’un jargon utilisé par des locuteurs de diverses autres langues quand ils veulent communiquer en anglais.

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Première chose qu’il nous faut saisir : la diffusion-production est liée fortement à une présence symbolique dans le monde et non pas avant tout à une présence économique. Je pense qu’il faut que l’on réaffirme cela. Si on laisse l’Union européenne réfléchir comme elle le fait pour les industries culturelles, on va directement vers la réflexion de type « produit ». Nous sommes devant une économie à symbolique forte. Analysons la mondialisation sans ses clichés : elle n’est pas simplement ce résumé du néolibéralisme. Nous sommes dorénavant face à un système avec de nouvelles régulations, que ce soit l’OMC que l’on peut « démoniser », ou que ce soient les régulations financières que l’on voit apparaître. Au-delà, on perçoit un rapport au monde qui est en train de changer. Je suis un grand admirateur du docteur Philip Dorrell, un intellectuel-poète qui sait se saisir du changement actuel de la mondialisation réellement complexe. Un autre point me semble important : il y a quelque chose de l’art du monde qui est en train de se faire. Il y a de l’art national, mais il y a une forme artistique en train de se construire et de s’échanger à l’étranger. C’est très important de le réaffirmer sans oublier que nous avons certainement à soutenir les acteurs culturels et les artistes français. De plus, je crois que la coopération nous permet de saisir la vraie appréhension du marché et la manière de l’aborder sans complexes. Le marché est en train de se construire mais n’existe pas. À part vendre en Allemagne un spectacle 10-15 % moins cher qu’en France, vous allez essayer de vendre votre spectacle en Roumanie, vous n’allez pas y arriver. Il est nécessaire d’aborder cette question de la forme de la régulation du marché. Veut-on que ce soit un marché qui se construise librement, c’est-à-dire dans un libéralisme un peu échevelé, sans aucune régulation ? Veut-on un marché libre correspondant à ce que l’on essaie de faire en Europe, une économie sociale de marché donc un marché régulé ou est-ce qu’on régule le marché ? On a quelques chantiers d’importance quand même ; le droit d’auteur, le droit de la propriété intellectuelle. Quand on regarde ce qu’il est en train de se passer dans les grands cercles de réflexion sur les « Creative Commons40 », on a envie de se poser la question du « droit à ce que j’ai créé » de façon différente. La question du prix me semble fondamentale mais si nous nous cachons derrière de la mobilité, on n’abordera pas réellement la question du marché. Par ailleurs je crois qu’il y a beaucoup d’acteurs qui sont en train de penser, dans la coopération, quelque chose de l’ordre d’une présence artistique et symbolique, quelque chose de l’ordre d’une présence économique réelle et quelque chose d’une présence solidaire et équitable. Je ne trouve pas anodin que beaucoup d’acteurs se penchent sur cette nouvelle forme d’économie sociale, de manière maladroite mais également de façon très renouvelée en dehors des injonctions communes telles que « regroupez-vous ». Cela passe par beaucoup d’innovations, par des acteurs culturels essayant de penser des circuits économiques différents, de la monnaie différente, sans penser de manière marginale. Prenons l’exemple de ces grandes Villes comme Nantes, Rennes, etc. réfléchissant à la question de l’émergence d’une « monnaie fondante41 », c’est-à-dire d’une monnaie complémentaire pondérant les effets du marché et créant de la solidarité. Je pense que ce sont des expériences qui sont en train de se construire dans le secteur culturel. Le secteur du spectacle vivant est un peu marginal par rapport à cela. Enfin, je crois qu’il faut que l’on assume ce qui se dit. Nous avons la chance d’avoir et de pouvoir jouer un rôle politique et diplomatique. On n’est pas forcément l’instrument d’une diplomatie : on peut être dans une diplomatie avec un rapport clair. Actuellement, être en Tunisie, ce n’est pas forcément mal, sans faire de démagogie, c’est relativement important. Sauf que tout cela se recompose. Je pense que l’Union européenne permet de poser plus clairement la question de l’échange aux côtés de la diplomatie. Nous devons le faire ensemble. La question du marché est réellement en train de se poser : abordons le marché dans toute sa complexité (mais il faudrait beaucoup plus de temps), abordons le marché par un outil qui s’appellerait la coopération européenne permettant ces combinaisons.

Nicolas Marc : Antoine Leclerc, vous êtes le délégué général du festival cinéma d’Alès – Itinérances qui, avec 45 000 entrées, est un rendez-vous cinématographique important en France, et par ailleurs responsable de l’association Carrefour des festivals. Vous représentez plus le secteur de l’audiovisuel et du cinéma. Vous retrouvez-vous dans les préoccupations et les constats de vos confrères, homologues, amis du spectacle vivant ?

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Creative Commons est une organisation à but non lucratif qui a pour dessein de faciliter la diffusion et le partage des oeuvres tout en accompagnant les nouvelles pratiques de création à l’ère numérique.

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La monnaie franche ou monnaie fondante désigne une monnaie qui, à l’image des biens de consommation (nourriture, vêtements, maison...), perd de sa valeur au fil du temps. Elle fut conceptualisée au tournant du 19e et du 20e siècle par Silvio Gesell. La notion de monnaie fondante part du constat que le détenteur de monnaie dispose d’un avantage par rapport aux producteurs de biens et commerçants, car ce premier peut différer dans le temps son achat alors que le producteur et commerçant doit vendre ses produits le plus vite possible pour éviter que ceux-ci perdent de leur valeur. Article du journal Alternatives économiques : http://www.alternatives-economiques.fr/le-boom-des-monnaies-paralleles_fr_art_202_23641.html


Séance plénière 1

Antoine Leclerc, délégué général du festival cinéma d’Alès – Itinérances et responsable de l’association Carrefour des festivals Il y a pas mal de problématiques qui sont communes. Un détail tout d’abord, je ne suis pas tout à fait surpris d’apprendre que l’Italie est rétive au surtitrage quand on constate qu’elle est rétive au sous-titrage. La VO sous-titrée n’existe quasiment pas dans les salles de cinéma en Italie. Concernant le jeune public et l’éducation artistique, c’est également un maillon important dans le champ du cinéma. La circulation des œuvres d’un pays à un autre dans le champ du cinéma est notamment facilitée par des actions d’éducation à l’image, d’autant plus pertinentes que ce sont des audiences plus spontanément ouvertes à la diversité que ne le sont des audiences adultes. J’ai également réagi avec intérêt à l’intervention sur la question de la Corée puisqu’on recevait à Alès il y a quelques années un des principaux cinéastes coréens, Im Sang-soo, et qu’on était alors en pleine bataille sur les questions qu’évoquait Jean-François Pujol. Il y avait un système largement inspiré par le système français de protection et d’encouragement à la production nationale forte avec un système de quotas qui portait ses fruits et qui était extrêmement menacé. C’est une bataille aujourd’hui perdue mais la guerre ne l’est pas ; d’autant moins que la période pendant laquelle ce système a pu fonctionner a vraiment permis l’émergence de talents coréens que l’on retrouve aujourd’hui dans nos salles, dans des festivals et également dans l’édition de DVD ou de Blu-ray. Je suis également sensible à la dernière intervention concernant la question des politiques européennes, notamment pour ce qui concerne le cinéma et l’audiovisuel au programme « Media 2007 - 201342 » de l’Union européenne qui est un des outils, un des leviers qui encourage la circulation d’œuvres européennes non nationales dans les autres pays de l’Europe. J’ai sursauté également à l’expression « industrie culturelle » et à la référence à ce secteur des industries culturelles que je ne prétends en aucun cas représenter ici : d’une part car le terme est barbare, d’autre part parce qu’il est très limitatif. Une des raisons de me réjouir d’être ici – avec la collaboration de Réseau en scène Languedoc-Roussillon et de Languedoc-Roussillon Cinéma – c’est de pouvoir réaffirmer que le cinéma et l’audiovisuel ont bien leur place dans le champ de la culture. Une autre raison de me réjouir est que la culture reste une compétence des collectivités territoriales, ce qui n’était pas gagné puisque la culture n’était pas en tant que telle mentionnée comme compétence partagée dans l’avant-projet de loi sur la récente réforme des collectivités territoriales. Y était préférée l’expression « patrimoine et création » qui était complètement réductrice. Et de son côté, l’expression « industrie culturelle » traduit aussi une vision complètement réductrice de la culture. Rappeler que le cinéma et l’audiovisuel ont leur place dans le champ de la culture peut sembler une évidence pour la plupart d’entre vous, mais si je le rappelle avec insistance, c’est que je peux vous garantir que ce n’est plus tout à fait une évidence partagée par tous, même en France. C’est un peu une tarte à la crème que de rappeler à chaque fois la phrase de Malraux : « Par ailleurs, le cinéma est une industrie43 ». Mais force est de constater que la dimension économique et marchande du cinéma, qui est aussi une réalité, a pu occulter progressivement les dimensions artistique et culturelle de cette discipline. On peut aussi rappeler les origines populaires du cinéma et le fait qu’il demeure la première sortie culturelle des Français, deux réalités qui ont pu nourrir chez certains le sentiment qu’il s’agirait d’une discipline moins légitime que d’autres champs artistiques jugés plus nobles. Je le dis d’autant plus volontiers aujourd’hui dans un lieu de spectacle vivant. Cette attitude ne concerne pas la Région Languedoc-Roussillon, pas plus par exemple que la Région Centre qui, avec Centre Images44, mène un travail en profondeur sur le cinéma. Avec vraisemblablement une part de coresponsabilité de part et d’autre, il semble bien qu’il y ait une frontière implicite entre le spectacle vivant d’une part et le cinéma et l’audiovisuel d’autre part. Une frontière qu’il convient d’autant plus de gommer que de nombreux enjeux sont tout à fait communs, par delà la seule question du marché et de l’actualité cinématographique..

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MEDIA 2007 est un programme de soutien au secteur audiovisuel européen. Il succède aux programmes MEDIA Plus et MEDIA Formation. MEDIA 2007 est conçu comme un programme unique qui regroupe les deux volets existants (développement, distribution, promotion / formation). Doté d’une enveloppe financière de près de 755 millions d’euros, il couvre la période 2007-2013. http://ec.europa.eu/culture/media/index_en.htm

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Par ailleurs, le cinéma est une industrie » est une citation d’André Malraux. Fameuse phrase clôturant le livre que Malraux consacrait à l’esthétique du cinéma, cette conclusion sibylline fait l’effet d’une sentence, un couperet voulant réveiller la conscience du lecteur. Cette phrase donne donc le sentiment d’une réalité morose à laquelle il faut se résoudre. Le cinéma est un art et une industrie. C’est le seul art dont l’essence est industrielle. Inventé par des scientifiques, développé par des chimistes, mis en place par des mécaniciens, c’est le premier art dont l’origine, la naissance, sont industrielles. Il ne faut en rien y voir quoi que ce soit de négatif, c’est sa nature même.

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Établissement public créé à l’initiative de la région Centre, en partenariat avec l’Etat, Centre Images permet de renforcer la coopération et d’améliorer ainsi la lisibilité et l’efficacité de l’action publique sur le territoire régional. En affirmant le soutien à la création et à la diffusion des œuvres, Centre Images entend jouer un rôle important tant auprès des créateurs que des publics. La recherche et l’innovation constituent les fondements d’une intervention résolument tournée vers l’éducation, la formation et la sensibilisation des regards. En privilégiant les partenaires locaux, Centre Images met son expertise au service de tous afin de favoriser l’émergence de projets exigeants. Si son intervention relève d’une politique culturelle volontaire, l’agence est aussi en mesure d’investir les champs de l’économie, de l’emploi et de l’aménagement du territoire. http://www.centreimages.fr

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À titre d’exemple, le festival d’Alès réalise un peu plus de 20 000 de ses 45 000 entrées au Cratère, Scène nationale d’Alès45. C’est un exemple de collaboration formidable qui concerne aussi des collaborations sur des contenus ; ce bel outil permet certes d’avoir une forte jauge facilitant de belles audiences. Mais aussi de coproduire des événements qui conjuguent cinéma et spectacle vivant, en particulier la musique avec des « cinémix46 » (avec la participation du groupe électro RadioMentale), des ciné-concerts (par exemple avec Pascal Comelade ou Alexandre Tharaud), des concerts (entre autres avec l’Orchestre national de Montpellier Languedoc-Roussillon). La journée d’aujourd’hui me semble un espace idéal pour insister sur cette question des relations entre les disciplines. Veiller à ce que la pluridisciplinarité, maître mot des Scènes nationales, ne s’arrête pas avant le champ du cinéma et de l’audiovisuel, c’est là un enjeu très important, particulièrement sur fond de transition numérique de la chaîne cinéma. Demain, dans l’atelier consacré à la question du numérique, je voudrais d’ailleurs vraiment insister sur un sujet qui a été évoqué tout à l’heure par Josianne Collerais, vice-présidente de la Région Languedoc-Roussillon, celui de la mutation, de la transformation et de la numérisation accélérée du parc de salles que la Région va légitimement accompagner aux côtés du Centre national du cinéma. On constate cependant qu’il y a de nombreux angles morts dans cette phase de transition numérique du cinéma. Tous les autres lieux qui, comme Le Cratère, accueillent des festivals de cinéma qui ont comme singularité de faire le lien entre les lieux de spectacle vivant et les cinémas, sont aussi concernés et voilà pourquoi je ne pense pas être hors sujet. Actuellement, toutes les aides sont focalisées sur les seules salles de cinéma mais la plupart des principaux festivals de cinéma en France – aidés notamment par le CNC et/ou le ministère de la Culture et de la Communication via les Drac – investissent aussi des lieux différents pour lesquels absolument rien n’est prévu. On a un vrai risque de rupture inédit : les œuvres cinématographiques à venir – au format DCP, standard de fichier haute définition qui s’est imposé et remplace désormais le 35 mm – ne pourront plus être diffusées dans ces lieux non équipés pour ce nouveau standard ; je pense par exemple à la Maison de la culture de Clermont-Ferrand qui accueille une bonne part des 140 000 spectateurs du festival de courts-métrages de Clermont-Ferrand. On peut aussi citer Le Quartz à Brest parmi de nombreux autres exemples. Cet enjeu de la transition numérique des autres lieux que les salles de cinéma est cruellement sous-estimé. C’est très naturellement que le CNC s’est d’abord concentré sur les salles de cinéma pour lesquelles les choses se règlent peu à peu, mais il y a encore des accompagnements nécessaires à inventer, par exemple en zones rurales pour les itinérants. Un des enjeux complémentaires est de maintenir notre capacité de diffusion des œuvres de patrimoine dont la numérisation est très incertaine malgré des déclarations d’intentions répétées. C’est là un enjeu culturel fondamental.

Nicolas Marc : Quels sont justement, les enjeux de la diffusion des œuvres françaises à l’international ? Et en particulier, les productions régionales dans le domaine du cinéma ?

Antoine Leclerc : On va traiter en même temps la question des œuvres françaises à l’étranger et la question des œuvres étrangères sur les territoires. Il y a des collaborations entre la France et d’autres pays, avec notamment des fonds dédiés et des mécanismes de coproduction bilatéraux (on verra au passage qu’il y a une place singulière des cinéastes d’horizons divers qui ont trouvé refuge, domicile, producteur ou soutien en France). Il y a bien sûr tout ce qui concerne le soutien et l’encouragement à l’exportation des œuvres cinématographiques françaises. Je ne veux pas entrer dans le détail de tous les mécanismes mais il y a un organisme très connu, uniFrance47, qui accompagne la promotion du cinéma français à l’étranger, au sein duquel d’ailleurs bien des films produits en régions. uniFrance joue un rôle de promotion important visant avant tout à faciliter la sortie sur les marchés étrangers des films français. Derrière cette mission première, il y a tout un travail de fond d’uniFrance, par exemple pour les courts-métrages dont on ne mesure pas toujours suffisamment l’importance car ils ne passent pas sous les radars des chiffres de l’exploitation cinématographique. Il est vraiment important de souligner à quel point des courts-métrages français circulent un peu partout dans le monde et contribuent au rayonnement de jeunes talents. Parallèlement à uniFrance, il y a d’un autre côté les saisons croisées de l’Afaa, maintenant l’Institut français, qui ont pour la plupart des volets cinéma qui facilitent d’une part la découverte et la présentation en France d’un grand nombre de films inédits en provenance de pays étrangers et, d’autre part, la circulation d’œuvres françaises à l’étranger dans le cadre de ces saisons. À ce propos, je ne veux pas torturer le représentant de l’Institut français mais ce qu’il s’est passé sur l’année du Mexique renvoie à la question que vous posiez : « sommes-nous dans une politique culturelle internationale ou dans une diplomatie culturelle ? Comment cela s’articule-t-il ? ». C’est une vraie question à clarifier. On risque désormais d’avoir une frilosité de la part de pas mal de manifestations pour repartir sur des saisons sans des garanties claires sur ce qui est de l’ordre du culturel et du politique, du symbolique et du diplomatique.

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http://www.lecratere.fr/

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La vogue du Cinémix a connu depuis le début des années 2000 en France un véritable engouement, grâce à de nombreux musiciens électroniques et DJs, invités à donner en live une nouvelle interprEtation sonore de films muets. Le duo RadioMentale figure parmi les pionniers et les inventeurs du genre.

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uniFrance est l’organisme chargé de la promotion du cinéma français dans le monde. Créée en 1949 sous la forme d’une association loi 1901, uniFrance est sous la tutelle du Centre national du cinéma et de l’image animée. L’association compte près de 600 adhérents, producteurs de longs et de courts-métrages, exportateurs, réalisateurs, comédiens, auteurs (scénaristes) et agents artistiques. http://www.unifrance.org/


Séance plénière 1

Jean-François Guéganno : D’abord, l’exercice des « saisons » et des « années » dans le dispositif de l’exercice est très particulier : c’est vraiment une décision politique d’encourager un pays qui décide de mettre en partage et confie à l’Institut français la mise en œuvre de « l’Année de ». Quand nous entrons dans une crise diplomatique entre la France et dans ce cas-là le Mexique, tout s’écroule. Nous sommes sur un exercice partagé où la règle d’ingénierie est simple : le pays invité prend en charge le transport des œuvres, des personnes, et le pays invitant les productions dans son pays. À partir du moment où la France dit pour des raisons qui lui sont propres qu’elle veut continuer l’Année du Mexique, que le Mexique veut continuer alors que chacun met une condition bloquante, de facto, l’Institut français fait le constat qu’il est impossible de mettre en œuvre l’Année du Mexique. On a écrit aux 360 opérateurs qui bénéficiaient d’un soutien franco-mexicain pour leur demander s’ils annulaient, s’ils reconfiguraient, s’ils avaient une possibilité, particulièrement dans le domaine du cinéma. La très grande majorité des festivals qui avaient choisi de maintenir cette programmation en choisissant une production mexicaine va bénéficier du soutien de l’Institut français.

ANTOINE Leclerc : C’est le cas du festival Travelling à Rennes qui devait « ouvrir le bal » en février. Quand vous recevez très tard le soir un appel de France Info qui cherche à joindre un responsable de l’association organisatrice, Clair Obscur48, c’est que cela se passe vraisemblablement mal. Pour l’anecdote, Travelling n’a jamais eu autant de presse nationale que cette année avec la crise entre la France et le Mexique. Mes propos traduisent à l’égard de mes collègues rennais une solidarité de programmateur car il faut bien mesurer pour les équipes ce que cela peut signifier de travailler pendant un an sur un projet de rétrospective qui se trouve soudainement menacé alors qu’une partie des copies est là, qu’on ne sait pas quoi faire et que l’on manque cruellement de réponses de la part des tutelles. Le cinéma a une particularité par rapport au spectacle vivant, c’est que l’on peut avoir les œuvres sans leurs auteurs. En l’occurrence, il devait y avoir les deux mais cela n’a pas été le cas et ce fut extrêmement acrobatique à gérer pour les organisateurs avec des conséquences économiques qui fragilisent gravement l’association et l’avenir même de la manifestation. C’est d’autant plus dommage que les « saisons » et les « années » restent un modèle intéressant de circulation. Rappelons que, d’une manière générale et en particulier dans les pays européens, les cinématographies autres que nationale et américaine sont très peu présentes. La France fait figure d’exception et pourtant les chiffres n’ont rien de faramineux. Vous savez qu’en France, il y a en gros la parité, peu ou prou selon les années, entre la production américaine et la production française mais peu de place pour les autres cinématographies. Dans d’autres pays européens, il y a des frémissements qui font que les cinématographies locales progressent. Mais ce n’est jamais ou rarement le cas des cinématographies autres que locales et américaines. Heureusement, le programme Media 2007-2013 encourage la production mais également la diffusion via notamment le réseau EuropaCinema qui, dans les salles ayant rejoint le réseau, facilite l’exposition d’œuvres européennes autres que les œuvres françaises en France, italiennes en Italie, etc. Cela donne des résultats tout à fait probants. Je voudrais parler rapidement d’un autre réseau qui est celui des festivals. On est parfois loin des chiffres et des données précis sur l’exploitation traditionnelle du cinéma, mais plus vous prenez des œuvres dites difficiles (cinématographies peu diffusées, films de patrimoine, etc.) plus ce réseau de festivals, en France comme à l’étranger, est important dans la diffusion des œuvres en question. Les festivals sont véritablement des espaces d’élargissement des horizons cinématographiques via des rétrospectives, des focus, des compétitions pour certains. Des festivals essaient de valoriser et favorisent certaines productions minoritaires : le festival international du cinéma méditerranéen de Montpellier49 (CinéMed), le festival international du film d’Amiens50, une opération entre Toulouse et San Sebastian autour de l’opération « Cinéma en construction », dédiée au cinéma latino et qui facilite l’exposition des œuvres en cours de construction comme l’indique le titre et présente ces films à des coproducteurs et distributeurs potentiels en France et en Espagne. On le voit, il y a là un accompagnement qui va au-delà de la seule exposition ponctuelle des films. Je voulais insister sur la place singulière de la France dans l’accueil de cinéastes du monde entier. C’est très propre à la France et d’une certaine manière aux Etats-Unis qui ont traditionnellement « digéré » des générations de talents étrangers. Aujourd’hui, des invités reçus à Alès au début de leur parcours au début des années 90 comme l’Autrichien Michael Haneke ou le Finlandais Aki Kaurismäki (à l’origine du nom Itinérances donné au festival) sont aujourd’hui des cinéastes majeurs dont tous les films sont coproduits, accompagnés par la France qui contribue au financement de leurs films et leur garantit une exposition importante dans des salles françaises. Kaurismäki vient même de tourner son dernier film au Havre. C’est valable aussi pour Lars Von Trier, Nanni Moretti ou encore le Philippin Brillante Mendoza qui est programmé régulièrement dans de nombreux festivals. La diffusion des œuvres ne s’arrête évidemment pas au champ des salles et des festivals, puisqu’il faut aussi prendre en compte les droits vidéo, les droits télévisuels et les nouveaux modes de diffusion comme la VOD. On recevait cette 48

L’association Clair Obscur, fondée en 1988, a pour objectif de promouvoir le cinéma et l’audiovisuel auprès de tous les publics sur l’ensemble du territoire de la région Bretagne, depuis son historique quartier de Villejean à Rennes. Elle crée son événement phare, le festival Travelling, dans une ville en pleine effervescence et en mutation culturelle. Une vingtaine d’années plus tard, le paysage a évolué. Travelling est un événement de renommée nationale inscrit dans le calendrier des festivals rennais. http://www.clairobscur.info/

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http://www.cinemed.tm.fr

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http://www.filmfestamiens.org

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année à Alès un auteur et réalisateur d’animation qui s’est récemment installé en région, Sylvain Chomet. Une de ses grandes fiertés est que Les Triplettes de Belleville comme son dernier film L’illusionniste – qui vient d’obtenir un César et était nominé aux Oscars – soient édités au Japon par les éditions du studio Ghibli. C’est-à-dire par le grand maître Hayao Miyazaki. C’est à la fois une vraie source de diffusion du film là-bas et une vraie reconnaissance. On voit que les frontières bougent. Pour l’anecdote, jusqu’à il y a une quinzaine d’années, Hayao Miyazaki était considéré par l’essentiel de la critique en France comme le représentant d’un genre alors méprisé, le cinéma d’animation japonais, et beaucoup avaient des difficultés à le considérer pour ce qu’il est, un des grands créateurs mondiaux. Sur les festivals, il est important de souligner que certains d’entre eux sont des lieux prescripteurs. Il est évident que le festival de Cannes, un cas très à part, est une chambre d’écho internationale qui va d’ailleurs bien au-delà des seuls films en sélection officielle. Côté court-métrage, le festival international de Clermont-Ferrand51 – qui réalise la plus grosse audience pour un festival de cinéma ouvert au public en France avec plus de 140 000 entrées chaque année – est aussi un lieu de prescription majeur pour des œuvres du monde entier. Quant aux dizaines de manifestations qui n’ont pas un tel rôle prescripteur, elles n’en sont pas moins des espaces réels de diffusion et de rencontre des publics. Le dernier court-métrage de Serge Avédikian, Chienne d’histoire, coproduit par les studios de La Fabrique dans le Gard et aidé par la Région Languedoc-Roussillon, a été intégré dans la déclinaison régionale du dispositif d’éducation « Lycéens au cinéma » cofinancé par l’Etat et la Région et mené par le festival d’Alès (en partenariat avec LanguedocRoussillon Cinéma, Les amis du cinoch’, l’institut Jean Vigo et Cinémaginaire). 6 000 lycéens l’ont découvert dans le cadre de « Lycéens au cinéma » en avant-programme d’un long métrage, en l’occurrence Valse avec Bachir. Ils l’ont ainsi découvert dans des conditions optimum en salle et le réalisateur est venu rencontrer des élèves. Parallèlement, le film a obtenu la Palme d’or du court-métrage à Cannes, a été présenté dans une centaine de festivals un peu partout dans le monde, diffusé sur Arte... On voit qu’il y a une interaction tout à fait possible entre initiative locale et diffusion internationale.

Pascal Brunet : Pour revenir sur le programme Media 2007-2013, l’idée de la commissaire en charge du programme « Europe créative » est de créer deux volets : un volet « cinéma ou média, industries culturelles » et un autre volet culturel ou non. On voit bien une grande incertitude.

Nicolas Marc : Depuis le début de la table ronde, on n’a absolument pas évoqué la notion de salon professionnel, notion qui peut être assez capitale. On est souvent frappé par l’absence totale de Français. Et lorsqu’ils sont présents, c’est de manière complètement maladroite ou avec un manque criant de préparation. Vous n’en avez pas du tout parlé. N’y aurait-il pas une responsabilité des institutions publiques qui n’accompagnent pas suffisamment les équipes artistiques sur les salons ? J’ai l’impression qu’il y a une réserve idéologique vis-à-vis des salons : comment peut-on se dépatouiller de cela ? Pour vous, c’est un outil important utile pour les compagnies françaises parce que, sur ces salons on trouve tout le monde sauf les artistes et les compagnies de France.

Fabien Jannelle : C’est un sujet sur lequel nous réfléchissons avec l’Institut français. Qu’est-ce qu’un salon ? Ce sont des sortes de grandes foires dédiées au spectacle vivant. Elles ont une forte dominante commerciale. Il y a la Conférence Internationale des Arts de la Scène52 (Cinars) à Montréal, The Association of Performing Arts Presenters53 (Apap) avec le Global performing arts market place and Conference à New York, le Tokyo performing arts market54 (TPAM), le Performing arts market in Seoul (Pams) en Corée du Sud ainsi que The performing arts market in Singapore.

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http://www.clermont-filmfest.com

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Le Cinars de Montréal a pour objectif de favoriser et soutenir l’exportation des arts de la scène à travers différentes missions : promouvoir les créations culturelles du secteur des arts de la scène et consolider leur commercialisation ; favoriser les échanges commerciaux entre les entreprises de production et de diffusion ; faire de Montréal un pôle d’attraction international pour les arts de la scène. www.cinars.org

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L’Association de présentation des arts vivant (APAP) basée à Washington D.C est un service national de représentation et de soutien du spectacle vivant composé de plus de 1400 membres du monde entier. Les membres de cette association représentent les centres d’arts vivants principaux des Etats-Unis, les salles municipales et universitaires dédiées au spectacle vivant, les associations à but non lucratif, des gouvernements étrangers, des agences indépendantes de diffusion artistique, des agences nationales d’observation des pratiques reliées au secteurs des arts vivants, ainsi que des artistes indépendants. En tant que leader dans ce domaine, l’APAP entend influencer par son travail des évolutions pour le secteur, grâce au développement professionnel, à l’échanges de connaissances et de bonnes pratiques, et l’engagement civique. http://www.apapnyc.org/

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Le Tpam est un marché dédié aux arts vivants tels que le théâtre, la danse ou la musique. Organisé pour la première fois en 1995, il a célébré cette année sa 14e édition en attirant de plus en plus l’attention des industries créatives à travers le monde. Des professionnels qui créent le lien entre les artistes et leur publics tels que des directeurs de théâtres, de festivals, des producteurs,des agents et des compagnies viennent du Japon et du reste du monde pour participer à cet événement. http://www.tpam.or.jp/


Séance plénière 1

Ce sont les principaux marchés internationaux du spectacle vivant. Cette année, nous avons tenté une expérience avec l’Institut français : nous avons invité quelques bureaux de production au Cinars dans le but de tester leurs réactions. Elles furent positives. Le problème est que nous avons affaire pour l’essentiel à des manifestations dont la finalité est le business avec ce que cela implique en terme de rentabilité. En France et en Europe en général, il y a une forte réticence des milieux artistiques à ce type d’initiatives. La coupure culturelle est réelle et certainement fondée. Peut-on la dépasser sans se renier, en imaginant des formes de présence originale et respectueuse ? C’est ce que nous souhaitons expérimenter dans l’avenir.

Nicolas Marc : Cela n’a-t-il pas pour conséquence de pénaliser les équipes françaises ?

Fabien Jannelle : Pour le savoir, il conviendrait de s’assurer que ce cadre commercial est compatible avec des artistes engagés dans le mouvement des esthétiques de la création contemporaine. Pour l’instant, nous ne le savons pas aussi est-il difficile de dire que les artistes français sont pénalisés. Il faut tenter d’autres expériences, les évaluer et en tirer des conclusions pratiques.

Jean-François Guéganno : D’une part, ces choses-là s’évaluent : la question est de connaître leur réelle utilité. Nous sommes sur des logiques de marché avec cette question : quelle est la valeur ajoutée ? Qu’a-t-on vendu par cette démarche ? J’aurais personnellement tendance à penser que nous sommes beaucoup plus efficaces en invitant les professionnels en France en terme d’attractivité, en terme de traitement, dans la façon de les accompagner dans les grands rendez-vous ; ou avec des dispositifs qui sont montés à leur intention. Il y a un geste vers eux, il y a une attractivité de la France qui fait que nous avons tout intérêt, d’un point de vue personnel, à aller vers ce type de démarches.

Dirk Korell : La Compagnie Clash 66 a été invitée il y a trois ans à participer à l’Internationale Tanzmesse NRW de Düsseldorf grâce à une aide de Réseau en Scène, évènement plus particulièrement dédié à la danse internationale ne voulant pas être assimilé à un marché, mais qui est une plate-forme internationale et un réseau avec des show-cases, etc. Nous avons donc participé à cette réunion pertinente. On peut toujours interroger l’utilité d’avoir un stand qui présente les compagnies du spectacle vivant sans montrer leurs travaux sur scène ; néanmoins, cette plate-forme a son intérêt. Lors de la dernière Tanzmesse55, à l’initiative d’Artistes en danses urbaines et du CCN de La Rochelle, dirigé par Kader Attou, nous avons été présents avec un stand dédié à la création chorégraphique hip hop, pour pratiquer du réseautage et cela permet quand même d’élargir les contacts. Avec ma vision internationale, je compare et je constate. En France, il y a un malaise à parler d’argent. Pour polémiquer, on dirait que l’artiste doit être créatif, mais modeste. Il se structure en association – sans surtout y figurer personnellement. L’artiste qui parle d’argent d’une manière franche est très mal vu. Peut-être une société commerciale serait-elle une autre forme adaptée à la création du spectacle vivant, en opposition à une structure associative qui a également ses failles. L’un des plus grand marchés du monde, c’est quand même le festival d’Avignon : le « Off » d’Avignon met les compagnies dans une cruelle concurrence et souvent dans une misère économique. Nous produisons du spectacle vivant – un processus de recherche et d’expérimentation qui n’est pas dirigé par la rentabilité – et devons ensuite le «commercialiser» sur un marché concurrentiel, avec toutes les contraintes fiscales qui s’appliquent aux produits industriels. Je considère que l’IETM est un réseau qui essaye de poser la question à partir de la base. La dernière rencontre à Stockholm la semaine dernière était « Whose story is it ? », « De l’histoire de qui parle-t-on ? » C’est l’idée que le secteur culturel aujourd’hui, le secteur du spectacle vivant notamment, s’exprime et formule soi-même sa propre vision pour que ces questions soient également posées au niveau européen. En aparté, entendre la chancelière allemande, la présidence française et par la suite le premier ministre britannique déclarer à l’unisson que la multiculturalité est un échec total, cela ne donne pas confiance en cette vision culturelle de nos gouvernements, notamment, de la locomotive franco-allemande. Nous avons la capacité de répondre par notre pluralité : le Goethe-Institut, l’Institut français même si on peut s’interroger à un certain point sur la mission diplomatique. Je suis d’accord avec mes camarades : le secteur culturel doit définir et donner la définition de la culture dans nos sociétés et mettre en avant ses valeurs. Cette valeur passe par la case « argent » mais contrairement aux banques, cela est directement investi dans l’humain, c’est-à-dire les salaires, les charges sociales, les régimes de retraite et de chômage, ou encore directement dépensé

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http://www.tanzmesse-nrw.com/

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sur place, pour les hôtels et l’alimentation des équipes en tournée. Nous pouvons aussi parler d’argent car il est la réelle valeur économique et le langage qu’il nous faut parler aujourd’hui. Donc, parlons ce langage-là. La culture n’est pas la dernière roue du carosse.

Nicolas Marc : Jean-François Guéganno, pensez-vous également qu’il nous faudrait avoir une vision décomplexée de l’argent, du marché ?

Jean-François Guéganno : Je partage tout à fait l’avis de Fabien Jannelle. À l’Institut français, nous travaillons sur l’ensemble du globe. Il est bien évident que l’on ne travaille pas avec les mêmes logiques dans la zone européenne, en Afrique ou en Amérique latine. Depuis plusieurs années, j’entends dire qu’on ne peut plus être partout et qu’il faut faire des choix. Les arts visuels ont fait ce choix-là depuis le Rapport Jobbé-Duval. L’Institut français l’a pris en compte et a tranché : le traitement des arts visuels répond à une logique de pays prescripteurs. En revanche, avec un secteur comme le spectacle vivant il nous est encore possible d’être présent en Afrique, en Amérique latine, dans les pays émergents. Ce n’est pas simplement se dire : doit-on se positionner dans des logiques de marché ? Bien sûr que l’on doit se positionner dans des logiques de marché, là où il y a un marché. Ce n’est pas pour autant que nous devons abandonner les autres territoires.

Fabien Jannelle : De toute manière, il y a un marché. Il est privé, il est subventionné ou il est mixte mais il y a un marché. La chute du mur de Berlin a complètement modifié les logiques de marché sur l’Europe continentale. Cela a été soulevé par Pascal Brunet précédemment. Il y a maintenant des inégalités absolument incroyables, c’est un vrai problème de cohésion. Ce problème d’inégalités pose donc la question de la régulation du marché. De mon point de vue, le marché du spectacle vivant, pour le théâtre d’art et la danse d’art, a certainement besoin de phénomènes correcteurs pour arriver à passer outre ces inégalités. C’est tout l’inverse que de dire « nous, on est dans l’art, l’argent est sale, etc. ». Le marché est très difficile pour les œuvres d’art du spectacle vivant, contrairement à certains autres secteurs que sont les industries, la peinture et les arts plastiques où il y a des effets de rentabilité qui n’existent absolument pas dans le spectacle vivant. Il ne s’agit pas d’être décomplexé : il s’agit de prendre cette réalité actuelle du monde et d’essayer de regarder de manière objective, afin de trouver les bonnes réponses aux vraies questions posées.

Nicolas Marc : Fabien Jannelle, ne faudrait-il pas un Onda européen ?

Fabien Jannelle : Personnellement, je pense que l’idée est intéressante et qu’elle mériterait d’être étudiée sérieusement afin de mieux prendre en compte les réalités des échanges artistiques et la circulation des spectacles au sein des pays de l’Union européenne. Les programmateurs de ces pays qui entretiennent des relations suivies dans le cadre des divers réseaux européens ont avant tout besoin de conseil et de soutien financier. On ne peut pas traiter les pays de l’Union européenne comme ceux du reste du monde. C’est une évidence. La réponse à la question que vous m’avez posée ne pourra être qu’interministérielle. Comme il a été dit en introduction à cette rencontre, l’Onda a vu ses missions s’étendre à l’Europe et à l’international. Il a fortement développé ses actions d’accompagnement des artistes et des spectacles dans cette direction comme cela a été dit. C’est une manière de répondre à la question que vous posiez.

Pascal Brunet : Le marché existe comme on vient de le dire. Si l’on se centre vraiment sur la question du marché, le problème posé est : le marché est-il solvable partout ? Non. Comment le rend-t-on solvable ? Peut-on intervenir ? Il y a un vrai problème de réflexion européenne. À mon sens, cela ira vers la question d’un Office européen de diffusion artistique. Il y a une structuration par différents angles. La question du marché est : comment y va-t-on seul ? Dans le monde de l’industrie, on n’y va pas seul. On a des assurances, on a un certain nombre d’accompagnateurs du monde économique que nous n’avons pas dans le secteur de la culture. Et comment combattons-nous les politiques de dumping du marché ? Cela se joue à l’international. Un exemple : quand nous vendons à 5 000 euros, nous « dumpons » le marché. Il faut être assez clair : nous investissons sur ce marché comme le font les Chinois. On parle des arts visuels, c’est assez intéressant de voir que les Chinois depuis trois-quatre ans « dumpent » clairement le marché des arts visuels en achetant massivement et assez cher leurs artistes pour faire grimper les prix et donc les cotes. Tous les gouvernements voient et agissent sur les marchés de l’art ou sur le marché de la culture avec des finalités différentes mais il faut que nous le décryptions clairement.

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Séance plénière 1

Antoine Leclerc : On parlait des salons pour le spectacle vivant tout à l’heure. Pour le cinéma, la présence de l’artiste est par nature très différente puisqu’elle n’est pas requise pour la présentation de ses films dans les marchés. C’est essentiellement au vendeur international de chaque film, parfois au producteur, d’être là, souvent aux côtés d’uniFrance. En ce qui concerne les marchés, le plus important pour le cinéma est évidemment le marché du film à Cannes, le premier au monde. Sur les marchés internationaux, il y a une expression parmi d’autres qui revient parfois pour caractériser les Français, c’est le manque d’humilité. Même si nous bénéficions par ailleurs d’un capital sympathie, il suffit d’échanger avec des programmateurs ou des distributeurs étrangers pour qu’on nous parle d’une forme d’arrogance française : « on vous regarde de haut quand on est intéressé pour voir un film et éventuellement l’acheter ». Il me semble que ces dernières années, uniFrance fait des efforts pour atténuer ce sentiment. .A contrario, j’ai le souvenir il y a quelques années à Berlin du stand français qui était certes très beau mais totalement hermétique, refermé sur lui-même avec deux cerbères devant la porte. Je pense que nous avons là un travers très français, d’ailleurs pas propre au seul domaine culturel, qui peut constituer un vrai frein que l’on mesure mal. C’est dommage car des prétentions trop excessives, notamment sur le plan financier, peuvent se traduire par des non-cessions de films sur des territoires étrangers. Et même sur le réseau alternatif de diffusion que constituent les festivals étrangers, il existe des demandes financières ahurissantes, et peu en phase avec les réalités locales, de certains vendeurs internationaux, avec parfois une situation « perdant-perdant ». Des films français n’étant au final ni digérés par le marché local, ni programmés dans les festivals volontaires du pays en question, le tout au détriment des œuvres et de leurs auteurs.

Yves Bommenel, délégué Languedoc-Roussillon du Syndicat des musiques actuelles56 (SMA) Je voudrais parler d’artistes qui se déplacent sans être subventionnés et qui s’exportent : les musiciens. On n’a pas évoqué la musique cet après-midi et c’est dommage. Le Womex est un marché international consacré à la musique world où on peut croiser des artistes d’ici comme les Boukakes57 qui font toute leur carrière à l’extérieur. Il y a le Midem58, marché orienté musique enregistrée : vous pouvez y croiser des groupes locaux comme The Chase, Waterlillies, entre autres. Bref, les musiciens jouent la carte de l’international depuis longtemps. Ils proposent pour la plupart des répertoires internationaux. Ce n’est pas un hasard si ces deux groupes de la région jouent en anglais. On peut le regretter mais c’est comme ça. Un point qui n’a pas été évoqué, qui touche les musiciens en tournée à l’étranger, c’est la libre circulation des artistes. Comme les contraintes sur la circulation des personnes, on voit des artistes bloqués à la frontière. De plus en plus de festivals, de diffuseurs, y compris de la région, sont perturbés par ces pratiques et cela s’est durci. C’est de plus en plus difficile. De plus à l’étranger, on voit des artistes vivant en France, n’étant pas forcément français et n’ayant pas forcément un passeport français. Je pense à mes camarades qui sont des artistes maghrébins qui vivent en France. Et quand ils essayent de tourner à l’étranger, les frontières sont un des problèmes. Donc pensons à eux. Le dernier point : on a parlé beaucoup de l’Institut français. Effectivement, il y a un travail sur la musique. Par contre, je voudrais parler du Bureau Export59 : il est devenu un service payant et son travail se concentre sur les plus vendeurs. Là, on exporte les artistes qui sont sur une major. Les artistes de taille plus modeste, qui sont sur de l’artisanat et non pas sur de l’industrie, ont du mal à bénéficier des services publics. Donc j’aimerais que l’on parle de ce service public. Ou de ce qu’il en reste...

Jean-François Pujol, secrétaire général adjoint de la Fédération nationale des syndicats du spectacle de l’audiovisuel et de l’action culturelle – CGT Spectacle (FNSAC) J’ai deux questions : d’une part, à propos de l’enquête de l’Onda, je suis intrigué que Fabien Jannelle n’ait pas pu obtenir de renseignements sur la masse salariale. Tout le monde sait que la circulation des artistes a comme présupposé la pression sur les salaires. Dans certains pays à faible économie, les artistes « circulent » mieux. Et dans les autres, baisser les cachets signifie plus de possibilités de travail avec une plus longue tournée. Cependant, il serait intéressant de savoir dans quelle mesure on demande aux artistes de faire des sacrifices, au nom de la notoriété d’un groupe en développement. Je peux concevoir que dans certains cas – et cela a été confirmé par Sébastien Ramirez – on puisse baisser les exigences. La variable d’ajustement, ce sont toujours les salaires ! Pour autant, un raisonnement visant à adosser une fois de plus l’économie du spectacle au système d’assurance-chômage spécifique de l’Unedic serait singulièrement dangereux (je ne suis pas bien payé mais j’accumule des heures pour

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Les valeurs du Syndicat des musiques actuelles sont issues de l’économie sociale et solidaire. Le SMA a pour objectif le soutien à l’émergence, à l’innovation et à la création musicales en tant que missions d’intérêt général, constitutives du patrimoine de l’Humanité, à la diversité des cultures et des acteurs, à l’équité territoriale et la considération des populations et la mixité des pratiques artistiques. http://www.sma-syndicat.org/

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http://www.boukakes.com/

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www.midem.com/

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http://www.french-music.org/

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ouvrir mes droits). Donc, a-t-on des renseignements sur les masses salariales ? Je suppose que non, selon les sources que Fabien Jannelle a pu se procurer ? D’autre part, seconde question : on a beaucoup parlé de coproduction et j’ai cru comprendre que cela signifiait qu’un pays – une institution – venait simplement compléter le financement d’une création d’un autre pays, d’une autre institution. Je suis très intrigué, car on ne parle jamais de métissage c’est-à-dire du montage d’un projet commun à plusieurs pays, entre deux équipes de nationalité différente. Pourtant, je trouve très enthousiasmant d’être partie prenante de la même construction d’un projet et pas seulement de son financement. Je l’ai vécu entre Catalans du sud et Toulousains, c’était bien plus excitant de tenter une synthèse entre des styles et des histoires différents, que d’agglomérer un financement complémentaire. Y-a-t-il donc des moyens de production, des aides, que ce soit l’Institut français ou l’Onda qui les prévoient, pour aider à la production d’un spectacle de « métissage » et pas seulement d’import-export ?

Jean-François Guéganno : Pardon mais cela est tout à fait éligible. Il existe énormément de coproductions, de chorégraphes qui vont aller en résidence dans un pays produire une pièce ou un travail de recherche avec des danseurs. Ce travail sera présenté à l’étranger puis dans un autre contexte, il reviendra en France quand on le peut. Pour prendre, entre autres, un exemple très lisible : très récemment, à la fin des années croisées France-Russie, Andrej Preljocaj a produit une création avec les danseurs du Bolchoï. Nous sommes plus enclins à favoriser ce type de projet favorisant la création de liens et laissant une trace, une visibilité qui va bien au-delà de la diffusion pure et simple. Et c’est pareil pour les musiques actuelles. Il n’est pas rare que dans une production de musiques actuelles ou dans le cadre d’une tournée, il y ait des temps ménagés de résidences vers un pays à la demande d’un artiste qui va avoir également un travail de recherche avec des musiciens selon son goût, sa sensibilité, c’est-à-dire selon son choix. Est-ce que les artistes qui sont dans la salle, les artistes qui répondent à ces appels à projets de l’Institut français, étaient plus à l’aise dans le dispositif des programmes ? C’est-à-dire pour Génération Musique, c’est Maghreb pendant deux ans et puis après on arrête. Puis pendant trois ans, c’est en Amérique latine. C’était clair et simple : c’était Tintas Frescas pour le théâtre pendant cinq ans de dramaturgie contemporaine en Amérique latine, etc. Ou alors êtes-vous plus à l’aise avec ce nouveau dispositif qui est beaucoup plus ouvert, spontané et large ? Si quelqu’un a une réponse à la question…

Fabien Jannelle : Nous savons grâce à l’étude que 63 % des producteurs ont dû baisser le prix de cession. Nous ne connaissons pas l’amplitude de ces variations de prix ni surtout par rapport à quelle base de référence est calculée cette baisse. Nous savons qu’en France tous les prix de cession sont généralement négociés. Il serait utile d’approfondir cette question par une enquête complémentaire. Je voudrais revenir sur un point évoqué par Jean-François : 26 % des spectacles exportés ont fait l’objet d’une coproduction internationale. Là, on passe du simple montage financier à de la coopération. Cette information fut une réelle surprise et je pense que là aussi il serait utile de creuser le sujet.

Jean-Marie Fraysse, directeur de l’association Chèvrefeuille Je suis ici au titre de l’association Chèvrefeuille60, responsable d’une plate-forme transfrontalière de coopération culturelle appelée Convivencia Pyrénées Méditerranée. C’est une plate-forme à laquelle contribue et participe notamment Réseau en scène Languedoc-Roussillon, organisateur de la manifestation aujourd’hui et avec des partenaires en transfrontalier, à Barcelone et en Aragon. Dans ce cadre, nous pratiquons les salons professionnels depuis ces dix dernières années en essayant de faire avancer concrètement la question de la mobilité des artistes. Cela fait longtemps que l’on réfléchit aux pratiques que l’on peut mettre en place et aux initiatives pour favoriser cette mobilité. C’est ainsi que nous avons décidé de créer avec Réseau en scène Languedoc-Roussillon et les collègues espagnols, un marché professionnel de spectacle vivant euro-régional. « Euro-régional » non pas pour s’enfermer dans de nouvelles frontières, mais au contraire dans le sens de se propulser vers de nouveaux horizons, comme le disait Pascal Brunet. Et c’est donc une actualité : dans un mois à Toulouse se déroulera le marché professionnel, Lo festenal, concernant aussi bien le cirque que le théâtre, la danse contemporaine et bien sûr les musiques actuelles. Je vous invite à venir à ce nouveau marché professionnel du 19 au 21 mai à Toulouse.

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L’Association Chèvrefeuille, passeur de culture pour tous et sans frontières mène une réflexion sur les formes actuelles de nomadisme, d’itinérance et sur leur nécessité en terme de construction et consolidation du lien social. L’Association Chèvrefeuille mène des actions qui répondent à la volonté de mettre en œuvre une action transversale, interrégionale capable de créer des liens entre les territoires, notamment entre les régions françaises, mais aussi des liens transfrontaliers. http://www.chevrefeuille.org/


Séance plénière 1

Alix Sattler, chargée de mission Lo festenal Je travaille à l’organisation de ce premier marché euro-régional des arts vivants qui se déroulera sur trois jours, les 19, 20 et 21 mai à Toulouse-Balma. Il y aura un salon professionnel constitué d’une trentaine de stands. Des compagnies de danse contemporaine, de théâtre, de marionnettes, des producteurs de musiques et des porteurs de projets français et espagnols ont d’ores et déjà manifesté leur intérêt pour participer à cet événement. Plus de 30 spectacles seront proposés aux professionnels dans leur intégralité. Nous n’avons pas souhaité proposer de show-case dans un respect du travail des artistes.

Constant Kaimakis, Conseil général de l’Hérault – Pôle développement humain – Direction des publics de la culture Je suis chargé de l’évaluation culturelle pour le Département de l’Hérault. Deux types de questions. La première se réfère directement à cette problématique du dispositif de soutien au local et à l’international sur lequel nous avons travaillé pendant quelques années. Un dispositif spécifique à l’Hérault s’appelant « Hérault Diffusion Artistique » a tenté de donner un petit coup de pouce aux artistes dans notre département. D’abord au niveau régional pour aller vers d’autres lieux de diffusion. Puis au niveau national avec l’opportunité de temps en temps d’aller vers l’international. Lorsque Réseau en scène Languedoc-Roussillon a pris son essor, le relais fut simple. Pour avoir fait l’évaluation de ce dispositif à plusieurs reprises, je soulève deux questions très spécifiques qui n’ont pas été vraiment abordées jusqu’ici. Première question : qui doit-on ou peut-on aider ? Une équipe artistique en émergence pour laquelle ce petit coup de pouce est toujours capital pour sa trajectoire à venir ; ou des artistes confirmés dans le but de travailler avec des partenaires de la scène actuelle étrangère et d’aller par exemple en Corée à l’occasion d’une grande manifestation internationale ? C’est une question relativement récurrente. Ceci est l’apanage de tous les échanges internationaux. L’ayant pratiqué pendant plusieurs années, la question est de bien cibler le partenaire et de trouver une réciprocité de caractère équitable, éthique ; mots que l’on emploie peu dans le jargon évaluatif. J’ai beaucoup aimé la philosophie d’utiliser les mutualisations, c’est-à-dire ce « travail ensemble », ce « vivre ensemble » pour des artistes et des techniciens qui vont vivre une aventure. Ce sont les vraies questions dont on n’a pas trouvé de bonnes solutions. Deuxième remarque inquiétante à titre plus personnel : je n’ai aucun problème avec les langues étrangères, je n’ai pas de problèmes linguistiques, j’apprends le patawak bruxellois comme le disait Pascal Brunet pour aller discuter avec les eurocrates si nécessaire. Le problème est surtout idéologique. Dans la directive des Services d’intérêt économique général, le Paquet Monti-Kroes61, la place de la culture n’est plus l’épisode de l’exception culturelle française, c’est aujourd’hui tout simplement l’humiliation culturelle. Il y a un petit encadré que je vous recommande d’aller lire, sur la situation du théâtre basque : le théâtre basque du Sud, de l’autre côté de la frontière, est toléré par la Commission européenne du simple fait de sa petite taille. Il est peu parlé et il a un micro impact économique. Quand on comprend les critères de ce petit guide, on est dans ce cas tout simplement nié et toléré par cette régulation du marché qui ne considère ni les offres fussent-elles culturelles ni les offres de qualité. Ce sont des offres économiques. Je propose éventuellement lors d’un Acte IV de ce séminaire, que ne manqueront pas d’élaborer les organisateurs de ces magnifiques journées, que nous ayons un temps d’échanges sur cette question car j’ai peur que ce soit ce qui nous attend demain ; au-delà de la réforme territoriale dont je partage évidemment les points de vue qui ont été évoqués. Je veux bien ensuite essayer de réfléchir à toutes les stratégies et tactiques possibles si j’existe. Mais à partir du moment où je n’existe plus... Je précise que je suis agent territorial, je ne suis ni artiste ni technicien ni intermittent du spectacle qui survit comme l’ensemble de mes collègues et de mes partenaires au quotidien.

Karine Gloanec-Maurin, présidente de la commission culture de l’Association des Régions de France Les journées auxquelles nous avons été conviés s’intitulant « économie », il est tout à fait logique que nous parlions de marchés et de salons permettant une diffusion, bien au-delà du débat qui nous a d’abord amenés sur les dispositifs et les soutiens permettant aux artistes une mobilité à travers le monde. Je suis élue, je représente l’ARF mais j’ai été également professionnelle dans le spectacle vivant. Cette question des marchés, des salons et de l’inquiétude que Constant Kaimakis a montré, la place éventuelle de l’activité artistique dans les échanges renvoie vraiment à l’exception culturelle française. Il va falloir que nous ayons un vrai débat sur cette question, c’est tout à fait nécessaire.

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Le « paquet Monti-Kroes » a modifié le cadre juridique opposable aux entités en charge de la gestion de services publics locaux et aux bénéficiaires de subventions des collectivités territoriales au titre des missions d’intérêt général qui leur sont confiées, lorsque ces missions ou obligations de service public relèvent d’une activité économique. http://www.chevrefeuille.org/

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L’activité que vous représentez dans les différents domaines artistiques est une activité économique. Dans ce cadre, on peut évidemment évoquer la notion de marché. Il est possible de construire des salons et de voir dans quelles conditions ils se déroulent et respectent le travail artistique. Tout à l’heure, le festival Off d’Avignon a été évoqué, il est une question. Car une collectivité accompagnant financièrement un artiste au festival d’Avignon peut se poser la question de la réelle destination de cet apport. Est-ce vraiment un artiste ? Ou sont-ce des personnes dont la capacité financière est très suffisante ? Posons-nous la question suivante : où se situe la dimension économique de l’activité du spectacle vivant ? J’ose le dire parce qu’au bout d’un moment il va falloir qu’on traite cette question. La question européenne va revenir très fortement et l’exception culturelle au niveau européen est devenue déjà diversité. Pascal Brunet l’a mentionné, dans la charte de l’Unesco, elle est devenue diversité culturelle. L’accepte t-on comme cela ou non ? Aujourd’hui, je pense ne pas avoir la réponse. Dans les années à venir, il va falloir que nous posions cette question. Cela a été un enjeu formidable de mettre l’exception culturelle au devant de notre réflexion pour que la dimension économique ne mange pas tout.

Pascal Brunet : Je fais partie d’une organisation qui essaie d’instaurer avec la Commission européenne des dialogues sur ce sujet en rapport avec les directives générales des services. Le problème est de cet ordre : le bureau du Relais Culture Europe est composé de deux salariés à temps plein et de deux stagiaires au sixième étage d’un petit immeuble. Il se trouve juste à côté du lobby de la sidérurgie c’est-à-dire 6 étages et 25 avocats. Voyez-vous notre problème ? Le secteur culturel doit sortir de cette position de voir arriver le danger sans agir. Il y a danger, c’est évident. Dans cette construction européenne, il y a des choses extraordinaires. En ce qui me concerne, il n’y a pas plus exaltant que la construction européenne aujourd’hui mais avec des projets énormes devant nous. Soit nous sortons de cette situation qui est de regarder, crier au désastre et ne pas agir, soit nous rentrons dans le débat européen. Il faut vraiment se saisir de ces sujets. De plus, je cite souvent cet exemple car je le trouve amusant : la personne qui est en charge de la culture au cabinet de la commissaire Androulla Vassiliou était auparavant en charge de la négociation du traité sur le gaz avec les Russes. Voyez le décalage ! Ce sont des hauts fonctionnaires, ils peuvent passer d’un dossier à un autre. La personne en charge de la culture constate qu’il est plus facile de parler avec les Russes qu’avec le secteur culturel. La capacité de ce secteur à formuler de la réponse collective et à formaliser de l’analyse collective est complexe. Alors, comment se saisir de ces sujets ? Ce devra être avec l’aide de quelques organisations tentant d’organiser le dialogue. Par la suite, nous allons publier vers le mois d’octobre une analyse assez fouillée de la Directive générale services et de ses conséquences. Nous aurions besoin d’une enceinte de réflexion sur ce sujet. Comme les généticiens ont une enceinte de réflexion sur l’éthique des politiques publiques dans la génétique, nous aurions peut-être besoin d’une commission sur la réflexion des politiques publiques dans la culture au niveau européen, car nous allons au devant de dilemmes éthiques et non au devant de dilemmes juridiques uniquement. Je crois qu’il y a le feu au lac, si vous permettez l’expression, il va falloir aller vite.

Laurent Hebert, délégué général de la Commission supérieure technique de l’image et du son62 (CST) Je fais partie d’une minorité à peine visible ici puisque je m’occupe essentiellement de cinéma – des techniciens de cinéma, du tournage jusqu’à la diffusion – et que nous négocions régulièrement des normes internationales pour le compte de la France même si notre tuteur, le CNC, porte souvent ce type de mission. Je réponds à Karine Gloanec-Maurin. J’étais à la Société civile des auteurs-réalisateurs-producteurs63 (ARP), l’organisme qui a inventé l’exception culturelle française en la personne de Pascal Rogard, son délégué général à l’époque. Nous avons créé l’exception culturelle en réponse aux Américains et à un aveuglement de la Commission européenne qui ne voulait s’en tenir qu’aux thèses du pur libéralisme. L’Europe est très faible sur ces questions. Par exemple, nous en sommes venus à négocier certaines choses directement avec les Américains. Certes, nous rencontrons des difficultés avec eux, mais nous arrivons à nous entendre et à conclure de bons engagements réciproques ; a contrario de ce qu’il se passe avec les commissions européennes. Nous ne comprenons pas pourquoi, ni ce qu’il faut faire.

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La CST est une association de professionnels de l’audiovisuel chargée de veiller à la qualité de la chaîne de production et de diffusion des images et des sons, qu’ils soient conçus pour le cinéma, la télévision ou tout autre média. Les missions de la CST sont étroitement liées aux progrès des techniques de l’image et du son, comme en témoigne l’évolution du rôle de l’association. Cette dernière a été créée en 1944 pour participer à la reconstruction du cinéma français et favoriser le passage du noir et blanc à la couleur. http://www.cst.fr/

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La Société civile des auteurs-réalisateurs-producteurs a pour objet l’action culturelle en France et à l’étranger, dans les domaines de la production et de l’exploitation des œuvres audiovisuelles. http://www.larp.fr/


Séance plénière 1

La culture dans le monde du cinéma conjugue le marché, le financement mais aussi l’art. Cela n’a rien à voir avec le pur commerce. Il y a des personnes qui gagnent de l’argent au cinéma, le succès fait gagner de l’argent. Mais il est réinvesti. Les échanges cinématographiques ont besoin de régulation. Il faut tenir compte de la spécificité des modes de ventes, du caractère culturel des œuvres, et des droits d’auteurs qui, en général, sont en contradiction avec les autres droits et notamment le droit du commerce. Le spectacle vivant et le cinéma peuvent faire cause commune pour agir de manière efficace au niveau européen afin de faire avancer l’idée qu’il n’y a pas deux mondes : un monde libéral et un autre qui ne le serait pas. L’Europe doit en permanence défendre la complexité et la richesse de sa culture, à travers ses différents marchés, ses différentes spécificités, etc. La grève de l’intermittence il y a quelques années a bien montré les réels enjeux économiques de la culture. La diffusion d’un court métrage dans lequel l’action se déroule dans une région ou à Paris, en faisant le tour du monde, va aussi promouvoir la région ou le pays. Il est primordial pour une société de comprendre que l’économie et la culture ne sont pas des choses antinomiques ; chacune a ses spécificités et cette complexité doit être prise en compte. Nous sommes dans l’obligation de proposer à l’Europe une vision moins simpliste et plus réaliste de celle qu’elle a aujourd’hui.

Dirk Korell : Jean Hurstel nous a exposé brillamment notre identité culturelle commune : le fait qu’il soit lorrain et en même temps un petit peu allemand. Mais qui est-il ? Un peu bulgare. Nous sommes tous dans un entre-deux, et c’est là que réside la culture, une culture qui nous est propre. Quelqu’un a dit : « la culture, c’est ce qu’on fait avec moi. L’art, c’est ce que je fais moi-mêmev.». C’est une citation intéressante. L’international se traduit par des régions et la « transfrontiéralité ». L’initiative transpyrénéenne menée par Réseau en scène Languedoc-Roussillon et l’association Chèvrefeuille en est un autre exemple. Je pense que l’avenir se dessine dans l’Europe des régions. À ce niveau, il est important que la France métropolitaine n’oublie pas les Dom-Tom.

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« La culture, c’est ce que d’autres m’ont fait. L’art, c’est ce que je fais à d’autres ». Carl André, cité par Boris Groys, Politique de l’immortalité, quatre entretiens avec Thomas Knoefel, Maren Sell Éditeurs, Paris, 2002-2005, p. 77

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Ce troisième séminaire autour de l’information et de l’observation marque sans doute la fin d’un cycle engagé depuis 2007 par le Conseil régional et la Drac Languedoc-Roussillon avec l’appui de Réseau en scène Languedoc-Roussillon. En effet, au regard des évolutions et des mutations en cours, il nous faut réexaminer les questions qui depuis quatre ans servent de socle à ce moment de rencontre. La complexité et l’ampleur des phénomènes sociaux, économiques et culturels, exigent de l’ensemble des acteurs une reformulation des questions auxquelles la puissance publique et les secteurs professionnels ont à répondre. Les secteurs de la création artistique sont projetés depuis plusieurs années dans ce qui est communément appelé « l’économie créative ». Ce modèle est-il une simple reproduction ou une transformation du rapport que les hommes et les femmes entretiennent au travail ? En quoi cette « économie créative » transforme-t-elle les conditions et le contenu du travail artistique ? Cette approche permet-elle de transformer des parcours de vie en trajectoire professionnelle artistique où l’idée n’est peut-être pas d’avoir un emploi (au sens de posséder), mais d’être (au sens de situer) dans un métier, c’est-à-dire être en situation d’activité, et donc d’emploi. C’est toute la dimension adhocratique du marché du travail développée il y a plusieurs années par Xavier Greffre. La journée du jeudi 21 avril visait à croiser de grandes problématiques : celle des enjeux européens où la dimension culturelle constitue l’une des clés ; celle de la circulation des œuvres ou les conditions d’import/export.


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Introduction

Didier Salzgeber, coopérateur culturel Quelques mots d’introduction pour vous présenter la manière dont nous avons pensé cette journée avec Réseau en scène Languedoc-Roussillon. Nous avons souhaité inviter la Commission paritaire nationale pour l’emploi et la formation de l’audiovisuel (CPNEFAV), la Commission paritaire nationale pour l’emploi et la formation du spectacle vivant (CPNEFSV) la Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi LanguedocRoussillon65 (Direccte), et Uni Media, Entertainment & Arts66 (UniMei). Depuis 2007, j’ai ce plaisir de venir ici, en Languedoc-Roussillon à Montpellier pour travailler sur l’information et l’observation. J’avais envie d’intituler mon mot d’introduction non plus « observer pour comprendre » mais « observer pour transformer ». Car nous sommes sûrement dans un moment où il nous faut tisser des liens entre tous les éléments apportés à chaque reprise par les tables rondes et par les contributeurs. Nous l’avons vu hier, nous sommes en face de mutations qu’il nous faut mieux comprendre : en particulier les questions de marché, les questions de changement d’échelle. La question du territoire, la question de la globalisation, nous renvoient à une nouvelle approche des territoires qu’ils soient vécus, administrés, symboliques. Nous allons les explorer. Nous sommes en face d’une complexité grandissante. Ce cycle des trois actes est intéressant car nous devons constamment nous poser la question de la reformulation des questions qui nous sont posées aujourd’hui. Nous sommes projetés dans ce que l’on appelle l’économie créative67 selon la thèse de Richard Florida68. Quelques questions : savons-nous si ce modèle proposé d’économie créative est une simple production de modèles que nous connaissons ? Ou s’agit-il d’une transformation du rapport que les artistes entretiennent au travail ? Cette économie créative transforme-t-elle les conditions et les contenus du travail artistique ? En quoi cette approche permet-elle de transformer des parcours de vie en trajectoires professionnelles et artistiques ? Où l’idée n’est peut-être pas d’avoir un emploi au sens de posséder mais plutôt d’être dans un métier, c’est-à-dire d’être en situation d’emploi. Est-on toujours dans une dimension adhocratique du marché du travail ? comme le disait Xavier Greffe69 où l’emploi n’est que la conséquence des projets portés par les artistes et les responsables de structures.

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http://www.languedoc-roussillon.direccte.gouv.fr/

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UNI MEI est le syndicat mondial des médias, du spectacle, des arts et du sport, représentant les travailleurs free-lance, indépendants et les travailleurs sous contrat de ces secteurs. Il regroupe une centaine de syndicats et de guildes dans plus de 70 pays. http://www.uniglobalunion.org/

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Le succès politique de l’économie créative s’est amplifié avec la thèse de Richard Florida sur la « classe créative » qui fonde la réussite du développement d’une ville sur la corrélation entre sa performance économique et sa capacité à attirer une certaine « masse critique » de talents créatifs qualifiés de « classe créative ». Les critiques opposées à cette théorie ont permis de pointer les limites opérationnelles et conceptuelles qui font son arrière-plan. La « ville créative » n’est ni un eldorado, ni un modèle absolu, mais un concept dont il faut désosser la mécanique pour comprendre ce qu’il bouleverse dans notre conception des politiques culturelles et dans leur évolution.

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Richard Florida est docteur de l’Université Columbia en aménagement urbain. Depuis la parution de son livre-culte The Rise of the Creative Class (2002), Richard Florida a prononcé de nombreuses conférences sur les effets de la classe créative et du secteur culturel sur la compétitivité des villes aux Etats-Unis, au Canada et ailleurs dans le monde.

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Xavier Greffe est Professeur à l’Université de Paris I Panthéon-Sorbonne où il dirige l’École doctorale d’économie, et le mastère de produits culturels. Il s’est spécialisé dans l’économie des arts et des médias, ses derniers ouvrages sont : La décentralisation (La Découverte, Paris, 2006), Artistes et Marchés (La Documentation française, Paris, 2007), CultureWeb (avec Nathalie Sonnac, Dalloz, Paris), La politique culturelle en France (La Documentation française, Paris, 2010).


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Ou bien sommes-nous devant une formidable accélération de la flexibilité de l’emploi et des inégalités dans le monde artistique ? comme le souligne Pierre-Michel Menger70. Est-on sûr de parler de la même chose quand nous parlons d’économie créative ? Avec les discussions d’hier mais surtout avec l’ensemble des discussions qui ont eu lieu en Languedoc-Roussillon depuis 2007, est sûrement venu aujourd’hui le moment de repérer quels sont les différents registres sur lesquels les acteurs culturels, professionnels, institutionnels et politiques, pourraient agir afin de développer de nouvelles solidarités voire construire de nouvelles réponses face à cette crise économique et sociale assez inédite. Je rappelle qu’en Europe, il y a plus de 800 000 personnes qui vivent en dessous du seuil de pauvreté. L’accumulation des dispositifs publics, accompagnée d’une diminution des moyens financiers sur chacun des projets n’est peut-être plus à même de répondre à l’ensemble des situations vécues par les praticiens, professionnels ou non. Il nous faut peut-être poser les questions d’une autre manière : sortir des modèles habituels en allant au-delà des maître-mots que nous utilisons dans le secteur de la culture et dans celui du spectacle vivant. Mais peut-être aussi, sortir des modèles prédéterminés en termes d’emploi, de formation et d’économie. Nous sommes conviés à aller vers de nouvelles problématiques, de nouvelles questions. Les organisateurs souhaitaient que ces deux jours puissent être un moment de convergence des questionnements qui sont posés aujourd’hui à différents endroits du territoire et y compris en Europe, que cela soit également un moment d’exploration de nouvelles problématiques. Et puis peut-être un moment de compréhension de stratégies auxquelles nous avons à répondre, que nous soyons responsables politiques, responsables professionnels ou tout simplement citoyens. Convergence, exploration et compréhension des stratégies. Hier, nous avons eu à traiter de la question de la globalisation, du rapport au monde, de la question de la circulation des artistes et des œuvres entre le Languedoc-Roussillon et le reste du monde. En terme de consigne pour les ateliers, prenons le temps d’expliciter ce que nous souhaitons dire. Nous avons à traiter certes de la globalisation, il est inutile d’être dans un processus d’en-globalisation des réalités pour être conforme aux références d’aujourd’hui comme le développement durable et solidaire. Ces discours d’en-globalisation permettent de mettre toutes les réalités sociales, artistiques, etc. dans le même panier sans forcément approfondir les problématiques auxquelles nous avons à répondre. Pour mener cette exploration, quatre ateliers vous proposent d’aborder l’ensemble des sujets sur ces questions de développement d’activité, d’emploi, de salariat : les modèles économiques, la transversalité, le numérique et la diffusion interrégionale. Maintenant, notre idée est moins d’introduire les ateliers que de poser déjà un certain nombre de questions qui seront mises au travail dans les ateliers. Nous avons invité Johannes Studinger, directeur de l’Uni-Mei, Jack Aubert, président de la Commission paritaire nationale emploi-formation audiovisuel71 (CPNEF-AV), Jean-François Pujol, vice-président de la Commission paritaire nationale emploi-formation du spectacle vivant72 (CPNEF-SV) et bien évidemment, la Dirrecte en la présence d’Alain Soussen qui depuis le début participe aux travaux du Coreps. Je vais inviter chacun à se présenter rapidement et d’emblée, à partager avec nous les questions qui leur paraissent important de traiter de leur point de vue dans les quatre ateliers qui vont suivre.

Johannes Studinger, directeur de l’Uni-Mei Je voudrais tout d’abord vous remercier de cette invitation. En ce qui me concerne, être convié à un séminaire régional et interrégional n’est pas une invitation que l’on reçoit souvent. Je pense donc apprendre beaucoup plus de vous, de vos discussions, des ateliers, que de ces quelques idées que je vais partager avec vous. Uni-Mei est une organisation globale qui représente et fédère des syndicats dans le spectacle vivant, l’audiovisuel, le cinéma. Nous sommes une structure à laquelle sont affiliés à peu près 140 syndicats à travers le monde. La totalité de nos différents adhérents représente environ 300 000 travailleurs à travers le monde. Historiquement, cette organisation qui a vingt-cinq ans d’existence, s’est structurée à partir de l’Europe. Aujourd’hui, les syndicats en Europe apportent évidemment un appui énorme à notre travail dans la zone européenne mais aussi à travers d’autres régions du monde. Le deuxième point fort de notre organisation se situe en Amérique, plus particulièrement en Amérique du nord étant donné la réalité de l’industrie cinématographique et télévisuelle. La raison d’être et les objectifs de l’Uni-Mei sont multiples. De manière très synthétique, la première raison d’être est simple : il s’agit de bâtir des ponts en terme de communication, de compréhension et d’échanges entre les organisations syndicales de salariés existant dans chaque pays, de leur permettre de dépasser dans ces échanges leurs préoccupations et d’élargir leur regard en dépassant les frontières nationales. Cela peut simplement aider à des relations bilatérales dans un monde globalisé, par exemple.

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Pierre-Michel Menger est directeur d’études à l’École des hautes études en sciences sociales, directeur de recherches au CNRS, ainsi que directeur du Centre de sociologie du travail et des arts. Il est notamment l’auteur de Portrait de l’artiste en travailleur (République des idées/Seuil, Paris, 2003).

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La commission paritaire nationale enseignement formation-audiovisuel (CPNEF-AV) a été créée en juillet 2004 par les partenaires sociaux en même temps que l’Observatoire des métiers et des qualifications, dont l’Afdas assure la gestion, et qui réalise des études sur les formations et sur les métiers.

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La CPNEF-SV a pour mission de proposer les moyens permettant d’assurer le développement et la sécurité de l’emploi et de promouvoir la qualification et la formation professionnelle. Elle a été créée en 1993. Elle regroupe la quasi-totalité des syndicats d’employeurs et de salariés du spectacle vivant.

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Notre seconde raison d’être est d’aider à formuler et identifier des préoccupations communes entre nos structures syndicales affiliées. À partir de cette identification, l’enjeu est de créer des plates-formes de revendication et de représentativité auprès de nos différents interlocuteurs pour essayer de faire changer les choses. Nos interlocuteurs sont également multiples puisqu’il s’agit aussi bien de compagnies qui opèrent dans plusieurs pays que de producteurs cinématographiques. Sur le plan institutionnel, notre organisation est aussi le dénominateur commun de tous les syndicats affiliés vis-à-vis de la Commission européenne, du Parlement européen, du Conseil de l’Europe, etc. Et puis, nos interlocuteurs sont également les associations professionnelles d’employeurs qui se regroupent comme nous au niveau régional, européen et international, afin de défendre leurs intérêts communs. Il y a donc une dimension de travail autour de conflits potentiels qu’il faut résoudre à une échelle européenne et/ou internationale. Nous travaillons surtout sur le dialogue social c’est-à-dire l’interlocution avec les employeurs. Pour prendre exemple sur l’Europe, à cette échelle, il y a des négociations organisées dans le champ du cinéma et également dans le champ du spectacle vivant. Nous sommes une structure privilégiée qui fait partie du Traité de Lisbonne, nous avons donc le droit d’être consultés pour toutes les législations qui touchent le secteur et dialoguons avec les entreprises associées. Les chantiers sont, entre autres, liés à l’ère du numérique. C’est un défi majeur pour les industries créatives et nous essayons de promouvoir une politique au niveau européen qui à la fois soutienne la création, les artisans de cette dernière mais protège également le contenu diffusé à travers ces plates-formes digitales. On touche également à la formation professionnelle de nos collègues : là aussi, on essaie d’instaurer un dialogue plus favorable à des systèmes qui permettent une transition entre les différents métiers mais aussi une mobilité plus facile, dans les différents étapes de la vie professionnelle. Nous travaillons sur la question de l’égalité des chances. Je vous ai mentionné le dialogue social dans l’audiovisuel où nous nous retrouvons avec les producteurs de cinéma, avec l’association des chaînes de télévision publiques et commerciales. Nous sommes en train de négocier un cadre européen pour promouvoir au travers de nos affiliés respectifs, qu’il s’agisse d’organisations patronales ou de salariés, des politiques communes qui prônent l’égalité des chances. Je pense que mon rôle est ici probablement d’offrir une vision extérieure à la France, peut-être pas mondiale mais dans ce cas plutôt européenne. Les quatre ateliers de ce matin mettent en avant des thèmes qui sont vivement discutés à l’échelle européenne dans notre travail mais avec beaucoup d’autres interlocuteurs. Didier Salzgeber faisait allusion aux questions qui se posent sur les modèles économiques liés aux industries créatives. Au niveau européen, nous avons une réflexion sur ce thème depuis plusieurs années avec les différents interlocuteurs de ces industries, des associations nationales et européennes ainsi que la Commission européenne DG Éducation et Culture73. Nous essayons de formuler et d’aider les politiciens à formuler des politiques qui soient plus cohérentes et qui apportent une valeur ajoutée aux industries créatives. Avec nos affiliés, nous sommes très gênés par une réflexion binaire sur les industries créatives qui voudrait soit sauver les autres industries à travers un apport créatif, soit l’extrême inverse c’est-à-dire affirmer que les industries culturelles vont toujours devoir être subventionnées. On oublie l’aspect intégral de l’industrie et de l’importance pour la société. Or vous allez discuter de ce modèle et j’aimerais vous poser ces questions : comment peut-on mieux articuler les différents leviers régionaux, nationaux et internationaux ? Et comment peut-on construire une conception qui favorise ou identifie le secteur ? Non pas comme une solution miracle pour mettre de la créativité ailleurs ni comme un problème financier où on coupe les subventions là où ça va mal. En ce qui me concerne, je préfère avoir une approche gagnant-gagnant à travers une coopération qui articule les différents programmes d’aide à la diffusion qui touchent l’atelier 4 mais aussi la production nationale, régionale et européenne.

Jack Aubert, président de la Commission paritaire nationale emploi-formation cinéma-audiovisuel Outre la fonction de président de la Commission paritaire nationale emploi-formation cinéma-audiovisuel, je suis aussi responsable des affaires sociales de la Fédération des industries du cinéma, de l’audiovisuel et du multimédia74 (Ficam) c’est-à-dire un syndicat patronal représentant les prestataires techniques audiovisuels et cinématographiques. Sur les travaux de notre commission, nous sommes en tant que partenaires sociaux, intéressés à l’heure actuelle par la question importante du numérique pour l’audiovisuel et le cinéma car il transforme les usages, les techniques et fait disparaître certains emplois dans notre filière. Dans le même temps, d’autres métiers émergent aussi. Les différentes branches de l’audiovisuel ont eu à se saisir de cette problématique, à l’intégrer et à mettre en place par la suite un certain nombre d’actions. Par exemple : vous avez actuellement la disparition du support pellicule. Il est en train de disparaître au profit d’autres supports numériques. Cela a des incidences notamment pour la filière des laboratoires cinéma qui assurent le développement argentique de ces pellicules et la production de bobines pour la diffusion en salles. Nous avons dû entre partenaires sociaux mettre en place avec l’aide du Fonds d’assurance formation des secteurs de

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Les actions de l’UE dans le domaine de l’éducation et de la formation visent à améliorer la qualité des systèmes d’apprentissage et à offrir de meilleures opportunités aux individus, à tous les stades de leur vie. Si chaque Etat membre est responsable de son propre système d’éducation et de formation, une action coordonnée permet d’atteindre des objectifs communs. La Commission européenne met l’accent sur deux aspects : d’une part, la coopération avec les autorités nationales et les parties prenantes européennes en matière d’amélioration des politiques et d’échange de bonnes pratiques, et d’autre part le développement et l’administration des programmes de financement.

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La Ficam (Fédération des industries du cinéma, de l’audiovisuel et du ultimédia), présidée par Thierry de Segonzac, est une organisation syndicale patronale, qui regroupe plus de 170 entreprises dont l’activité couvre l’ensemble des métiers et du savoir-faire technique de l’image et du son. Elle assure la défense et la promotion des intérêts des industries techniques de la création. http://www.ficam.fr/


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la culture, de la communication et des loisirs75 (Afdas) une plate-forme des métiers aidant à la transition des parcours professionnels et à la reconversion. Ce dispositif existe grâce à l’aide de l’Etat, de la Région Île-de-France, du Fonds social européen. Nous sommes effectivement intéressés par le fait de savoir si dans le spectacle vivant, le numérique a une incidence aussi forte sur l’emploi. L’incidence est assez brutale dans notre secteur. Quelles nouvelles perspectives le numérique apporte-t-il dans la diffusion du spectacle vivant ? Il y a aussi peut-être toute la question de la captation du spectacle vivant. Je vois certains adhérents de la Ficam capter des opéras en 3D pour des diffusions cinéma ou télévisuelle. Comment appréhendez-vous ces questions-là ? Quelle est votre proposition par rapport à cette nouvelle diffusion ? Quelle est également cette transformation économique qui fait que les personnes vont pouvoir regarder ces spectacles et en profiter ? Nous sommes également très intéressés par la circulation des parcours et des individus. Les techniques évoluant, changeant, se mutant, nous avons assisté également à certains parcours individuels de personnes, de salariés souvent intermittents qui passent de la sphère de l’audiovisuel au spectacle vivant ; cela s’est plutôt produit du spectacle vivant à l’audiovisuel. Il faut savoir que l’une des branches du spectacle est aujourd’hui une branche mixte, celle des entreprises techniques au service de la création d’événements, donc des prestataires techniques, qui est présente sur les secteurs du spectacle vivant et de l’audiovisuel. Je crois même que nous avons la présence dans la salle d’un intervenant du Syndicat national des prestataires de l’audiovisuel scénique et évènementiel76 (Synpase) qui est mon homologue côté patronal et côté spectacle vivant. Sur le dernier rapport de branche, on a constaté la circulation d’un secteur à l’autre d’à peu près 1000 salariés intermittents. Alors nous n’en sommes qu’au début, qu’au constat : dans cette dynamique de ce passage, quelle est la logique de parcours ? Est-ce que cela apporte un plus de carrière ? Quelles sont les incidences sur des métiers très ciblés ou est-ce plus diffus ? Le sujet est intéressant. Nous avons pu constater également que les personnes ayant cette logique de passage d’un secteur à un autre en tiraient aussi une rémunération moyenne qui était plus forte. Nous n’avons pas forcément de données sur le volume de l’emploi mais cela a une incidence sur le stock de travail disponible pour ces personnes-là. Ce sont donc deux grandes réflexions qui traversent aujourd’hui notre commission paritaire. On a bien conscience que vous allez apporter des éléments de réponse. Je veux dire en conclusion que je suis très favorable à ce genre de manifestations car ce sont généralement des journées très riches. J’assiste aussi depuis maintenant deux ans à des rencontres formation sur les métiers du cinéma d’animation qui ont lieu tous les ans à Angoulême. Je dois dire qu’il en ressort de la matière. La CPNEF du spectacle vivant organise une journée, le 5 mai prochain. La CPNEF de l’audiovisuel organise également une journée colloque sur l’alternance le 7 juin prochain. Cela permet d’avoir aussi des échanges avec la salle, de ressortir ces débats et de faire aussi que ces débats ne se fassent pas qu’entre nous.

Didier Salzgeber : Nous allons continuer l’articulation locale-nationale, régionale-Europe dans une perspective de coopération. La question de l’économie créative est intéressante : entre le développement des activités créatives ou la dimension créative ou la dimension culturelle du développement. La question du numérique était transversale à vos deux interventions : en quoi cela modifie-t-il les activités ? En quoi cela modifie-t-il les services ? En quoi cela modifie-t-il les métiers et les pratiques artistiques et culturelles de la population ? C’est aussi la question des parcours ; mieux comprendre le parcours professionnel et les passerelles entre les différents secteurs avec l’hypothèse suivante : plus les personnes sont en mouvement, plus il y aurait apparemment de possibilités de consolider des ressources et des revenus. On va continuer avec Jean-François Pujol, vice-président de la Commission paritaire nationale emploi-formation dans le spectacle vivant.

Jean-François Pujol : La charte, cette photographie des 28 collectivités publiques s’unissant sur un projet, qu’elles s’engagent à mettre en œuvre, est une aide précieuse pour un certain nombre de discussions en cours au niveau national ; elle doit être saluée comme telle. Le ministère de la Culture et de la Communication prépare plusieurs dossiers. L’un d’entre eux vise à acter toute une réglementation sur les thèmes évoqués dans la charte : financement de la création, aides au projet, conventionnements divers, y compris les règles de fonctionnement des anciens « comités d’experts » devenus « commissions consultatives ». Cette réglementation élaborée avec difficulté, avec la participation des organisations professionnelles, vise à sortir décrets, arrêtés et autres circulaires qu’il va falloir, ensuite, mettre en relation avec votre travail régional.

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L’Afdas est tout à la fois organisme paritaire collecteur agréé (OPCA), organisme paritaire collecteur agréé gestionnaire du congé individuel de formation (OPACIF) et direction de la formation des intermittents du spectacle. L’Afdas est agréé par l’Etat pour collecter les contributions obligatoires des entreprises au titre de la formation et répondre aux demandes de financement des entreprises, salariés et intermittents du spectacle.

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Le Synpase est un syndicat professionnel, créé en 1988, dont la vocation exclusive est la représentation et la défense des intérêts des Prestataires de Services de l’Audiovisuel Scénique et Evénementiel. http://www.synpase.fr/

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Un autre est censé préparer un projet de « loi d’orientation » très vieille revendication de mon organisation, la CGT spectacle (évoquée par elle en Avignon dès 1995), mais nous avons les plus grandes inquiétudes que la DGCA ne la mette à l’ordre du jour que comme un effet d’annonce, limitée au seul spectacle vivant et démarrant dans la plus grande confusion. Cette loi d’orientation visait, entre autres, à définir le rôle de chaque collectivité publique, nationale ou territoriale. Sur ce point, je constate que votre charte régionale témoigne de quelques longueurs d’avance ; au niveau national, ce type de rencontre reste encore un véritable défi. Cependant, – bémol de cette journée – je constate, sans aucune tendance conspirationniste, des avancées de l’idéologie dominante. Un autre travail du ministère, beaucoup plus confidentiel et sans aucun rapport avec les organisations professionnelles, a été élaboré, à l’initiative du secrétaire général du ministère de la Culture et de la Communication, sous l’égide du Département des études de la prospective et des statistiques77 (Deps). Il se veut un travail soit disant prospectif dont le titre parle de lui-même « Culture & médias 2030. Prospective de politiques culturelles78 ». Il s’avère, en fait dans sa première partie – qui n’a aucun lien avec la seconde – un pur produit de propagande, visant à convaincre du caractère inéluctable des politiques ultra-libérales. Ce genre de discours a généré, dans ce débat ici et aujourd’hui, des éléments de langage : « l’hyper-président », « budget contraint », « changement de paradigme », l’« économie créative », « Etat providence », etc. Fouillons donc tous ces termes, car ils sont plus une providence pour le CAC40, que pour une vraie réflexion sur ce qui reste d’une politique nationale. S’il y a un « nouveau paradigme », c’est effectivement la révolution numérique. Historiquement, les révolutions modifient notablement le fonctionnement de la société, en tous cas, ont un impact évident sur l’économie : la roue, l’imprimerie, la machine à vapeur... modifient sensiblement le mode de vie. Par contre, les choix politiques ne sont pas de « nouveaux paradigmes ». Ainsi après une grande période keynésienne, dans le monde entier dès la fin de la dernière guerre mondiale, la désindexation du dollar sur l’or a lancé une réforme politique. En France, c’est nationalement que la globalisation s’est construite peu à peu. Raymond Barre en 1976 opère un virage déterminant en privilégiant la rente et l’épargne au détriment des salaires. Mais Pierre Bérégovoy, puis Dominique Strauss-Kahn ont, eux aussi, pris des décisions favorisant l’omnipotence des fonds spéculatifs. En 2003, 10 % du PIB étaient passés au bénéfice de la rente et à l’épargne au détriment des salaires. À mon avis, cela va plus que s’aggraver. Or la rente et l’épargne ne s’intéressent qu’à la spéculation et non plus à l’investissement dans la production et la création. Dire qu’il n’y a plus d’argent pour des « coûts » salariaux, c’est refuser de les voir comme des investissements pour la croissance, c’est cacher délibérément le coût du profit et l’inutilité sociale de la rentabilité des fonds de pension ou d’investissement. L’économie est fondée sur la valeur d’usage : j’ai besoin de me vêtir, quelqu’un crée des vêtements, je les achète pour mon usage. Le problème est que cet échange est devenu la règle. La valeur d’échange, le « marché » gouverne les décisions politiques, en quelques nano-secondes, des ordinateurs surpuissants spéculent sur les valeurs d’échanges, qui cessent d’être des outils, pour devenir la loi. Lorsqu’un fonds de pension achète une entreprise, et exige 13 % de rémunération de son investissement, il sait bien que dans un taux de croissance à 2 % au mieux, cela signifie des plans sociaux successifs et dépôt de bilan. Dans cette logique, en référence au texte de Patrick Viveret, « Sortons du mur »79, que Didier Salzgeber nous a livré, où l’auteur part simplement de l’hypothèse qu’il est inutile de nous dire que nous allons « dans le mur », puisque nous y sommes déjà, j’ai bien compris qu’il veut nous proposer une nouvelle voie, mais pour simplifier, je n’aime pas du tout la façon dont il exécute les Trente Glorieuses. Je n’ai pas de fascination nostalgique pour cette période ; j’ai une fascination pour ce qui l’a produite, à savoir le programme du Conseil national de la Résistance (CNR), la base de la politique de la Libération. Le CNR était « dans le mur », préparé dans la clandestinité durant l’Occupation, dans l’angoisse d’une dénonciation, et donc d’une mort immédiate ou pire, très lente, de tous. Alors quand j’entends suggérer qu’il est vain de résister à la globalisation, telle que voulue par la Présidence actuelle, je ne suis pas d’accord. Je prétends qu’il y a du travail à mener dans la résistance par l’analyse quotidienne et pour la construction de l’avenir. Je rappelle que le programme du CNR s’appelait « Les jours heureux », ce qui prouve qu’il s’agissait de la construction de l’avenir, par des gens bien plus courageux que nous ne pouvons l’être. Autre « élément de langage », l’interrégionalité, autre cliché. N’oublions pas que l’Etat a une responsabilité publique spécifique à assurer dans l’aménagement du territoire et l’équilibre de l’ensemble des régions par la péréquation. Ce qui se passe dans les régions, entre les régions est souvent formidable, mais ne réglez pas entre régions l’absence ou le désengagement de l’Etat. Exigez dans le même temps, la collaboration entre toutes les collectivités publiques. L’Etat n’a qu’une envie, sous ce gouvernement, c’est de se désengager. La suppression du ministère de la Culture et

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Le Département des études, de la prospective et des statistiques (DEPS) appartient au système de la statistique publique nationale. Il est le service d’études en sociologie et économie de la culture et le service statistique ministériel, rattaché à l’Insee, du ministère de la Culture et de la Communication. http://www.culture.gouv.fr/nav/index-stat.html

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Le rapport « Culture & médias 2030 » a été réalisé pour répondre aux questions stratégiques de l’avenir de la culture et des médias, et de la politique culturelle de l’Etat, à un moment marquée par l’impact de la révolution numérique sur l’offre et les pratiques, un tournant dans le processus de globalisation et de profondes transformations sociales. http://www.culturecommunication.gouv.fr/Actualites/A-la-une/Culture-medias-2030-l-avenir-de-la-culture-et-des-medias/(language)/fre-FR

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« Sortons du mur ! Pour un nouvel imaginaire politique » est un texte écrit en 2008 par le philosophe Patrick Viveret. Ce texte est accessible sur http://www.etopia.be/spip.php?article835 ainsi qu’un entretien avec Patrick Viveret : http://www.etopia.be/spip.php?article836


Séance plénière 2

de la Communication a été plus qu’évoquée par le candidat Sarkozy. Je me rappelle même sa phrase : « on ne peut pas supprimer le ministère de la Culture, cela aurait une symbolique trop forte ». Mais l’envie ne manquait pas. Il faut donc, sur tous les points du débat, être parfaitement conscient d’utiliser, de repérer des éléments de langage qui installent une idéologie dominante visant à la résignation ou à la négociation du « moins pire ». Pour ce qui me concerne, il est hors de question de considérer un point de départ qui serait la pénurie. Nous devons exiger un changement de politique, et pas seulement d’en excepter la culture. Prenons l’exemple des congés payés en 1936. Le patronat de l’époque, la CGPF, avait déclaré qu’ils signifiaient la fin de toutes les entreprises. Aujourd’hui encore, nous pouvons voir qu’ils ont permis de construire la première industrie de tourisme dans le monde. On a été obligé de créer des structures et des PME pour accueillir ces « congés payés ». Alors, je vous incite à partir de l’intérêt des salariés, au lieu des intérêts de la rente. Et nous verrons l’impact sur l’économie. Et non plus « comment faire pour ne pas trop précariser une « économie créative » qui se doit d’être précaire avec des « budgets contraints » ? » Enfin, pour tout ce qui concerne la formation, je redis qu’il faut engager une vraie réflexion : plus on forme un salarié, plus l’on est contraint d’en induire des conséquences dans les grilles de classification et les salaires. Et on ne peut pas surformer un salarié, sans envisager l’emploi qui peut lui être offert, ni en lui offrant le même salaire qu’avant sa formation. Dans l’intérêt bien compris des salariés et des entreprises, nous devons aborder ces questions. En post-scriptum, je signale qu’il existe deux internationales d’artistes : la Fédération internationale des musiciens80 (Fim) et la Fédération internationale des acteurs81 (FIA). Ce sont de très anciennes organisations, dont nos organisations CGT sont fondatrices et qui ont permis en pleine guerre froide, que les deux Corée, et les Etats-Unis et l’URSS se rencontrent, dans l’intérêt des salariés. Il faut en tenir compte dans le dialogue social international, et particulièrement européen : EuroFIA82, EuroFim83, et pour les personnels techniques administratifs et d’accueil, Uni-europa84, entretiennent un « dialogue social européen » avec « Pearle85 » l’organisation de nos employeurs.

Didier Salzgeber : Comme d’ailleurs au niveau européen, il y a la fondation européenne du changement qui investit également sur les problématiques du travail. Au cours des ateliers, il faudra donc sûrement préciser ce qui relève de l’activité, de l’emploi, du métier, du salaire, des rémunérations. Soyons précis dans les éléments à aborder, y compris sur les problématiques de régulation : faut-il d’autres modes de régulation ? Par rapport à quels objectifs ? Comment la formation peut-elle jouer un rôle par rapport à cela ? À travers ce que dit Jean-François Pujol ainsi que les invités, nous proposons de tisser des liens entre les différents aspects que vous allez aborder. Le danger est d’être dans une accumulation de différents registres et de questions sans réponses. L’important est réellement notre capacité à mettre en lien les différents éléments que vous apportez. Et cet après-midi, nous essaierons de les problématiser.

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La Fédération internationale des musiciens (Fim), fondée en 1948, est l’organisation représentant les syndicats, guildes et associations professionnelles de musiciens au niveau mondial. À ce jour, elle compte environ 65 membres dans 57 pays. La Fim a créé trois groupes régionaux, pour l’Afrique (le CAF, Comité africain de la Fim), l’Amérique latine (le GLM, Grupo Latinoamericano de Musicos) et l’Europe (le groupe européen de la Fim). La Fim a pour but de sauvegarder et de développer les intérêts d’ordre économique, social et artistique des musiciens représentés par ses associations membres. http://www.fim-musicians.com/

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La FIA suit attentivement toutes les questions ayant un intérêt pour ses affiliés ainsi que pour les artistes-interprètes professionnels en général. Qu’il s’agisse de nouveaux développements technologiques, de la concentration dans les média, de conflits industriels, de questions professionnelles, de problématiques globales dans le secteur du spectacle ou d’autres sujets encore, la Fédération s’efforce de développer des lignes de conduite claires et de manifester son opinion sur toute question d’importance. http://www.fia-actors.com/fr/

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EuroFIA est le groupement régional européen de la Fédération Internationale des Acteurs. Il comprend actuellement les syndicats, guildes et associations membres d’artistes-interprètes de tous les pays de l’Union européenne, de la Zone économique européenne et de la Suisse, à l’exception de la Lituanie et de Malte.

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Le SNAM-CGT – Union nationale des syndicats d’artistes musiciens de France CGT – regroupe aujourd’hui 35 syndicats locaux ou régionaux. Créé en 1956, il est l’outil indispensable que les syndicats d’artistes musiciens, adhérents de la Fédération CGT du spectacle, ont décidé de créer. Il est l’héritier de la Fédération des musiciens créée au début du 20e siècle au sein de la CGT. http://www.snam-cgt.org/spip.php?rubrique13

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UNI-europa est la fédération syndicale européenne des services et de la communication. http://www.uniglobalunion.org/Apps/uni.nsf/pages/reg_europaEn

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Créée en 1991, Pearle est la Ligue européenne des associations d’employeurs dans le secteur des arts du spectacle. Pearle est le représentant de plus de 3 500 employeurs dans le monde du théâtre, orchestres et ensembles de musique, opéra, ballet et compagnies de danse, festivals et autres organisations dans le secteur des arts du spectacle en Europe (environ 40 organisations membres). http://www.cultureactioneurope.org/network/european-networks/43-european-networks/158-pearle-performing-arts-employers-associationleague-europe?e4b73c3745ac4bc374714928e835769b=41fae7013000d8a51f2846

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Alain Soussen, chef du service mutations économiques à la Direccte Languedoc-Roussillon Je suis très heureux d’être parmi vous et je peux interpréter votre participation comme une volonté d’être acteur de vos parcours, de votre destin. Cela correspond bien à la volonté des partenaires sociaux qui ont signé un accord pour dire que le salarié est et doit être acteur de son parcours professionnel. Je travaille dans une Direccte, Direction des entreprises de consommation, de la concurrence, du travail et de l’emploi, issue d’une fusion de sept directions régionales. Nous avons en charge le pilotage des demandeurs d’emploi et leur réinsertion professionnelle, les relations sociales et les conditions de travail au travers de notre inspection du travail, la consommation et la concurrence ainsi que de la compétitivité et bien sûr les mutations économiques dont je suis le responsable du service. Nous proposons aux entreprises dont nous sommes le guichet unique de prendra en compte aussi bien l’embauche dans le cadre des demandeurs d’emploi, la compétitivité mais aussi les relations sociales et bien sûr les mutations économiques. J’assure un suivi attentif de votre filière professionnelle, cependant je suis un petit peu candide par rapport à vos branches professionnelles. Je suis donc ici pour apprendre. Avec ce troisième acte, vous souhaitez aborder des thèmes assez difficiles, des thèmes d’actualité : modèle économique entre utopie et inventivité ; transversalité au niveau des parcours professionnels entre le cinéma, l’audiovisuel, le spectacle vivant ; numérique et évolution des métiers ; diffusion interrégionale. Tous ces thèmes sont aujourd’hui dans un contexte de mutation économique, d’évolution technologique et d’évolution des territoires dans le cadre d’un budget contraint. Concernant l’article de Patrick Viveret qui parle de « sortir du mur » : il me semble que nous sommes déjà dans le mur depuis la fin des Trente Glorieuses, puis des premiers chocs pétroliers en 1973 et enfin des années 80. Je pense que nous sommes dans le mur depuis que nous sommes passés d’un chômage conjoncturel à un chômage structurel. Au cours de ces différentes années, nous avons réussi à nous adapter. Mais aujourd’hui, si nous voulons aller plus loin, ce ne sont plus des approches d’adaptation mais bien une approche d’anticipation qu’il vous faudra, me semble t-il, avoir. Et s’interroger sur qui seront vos concurrents demain ? Où seront vos marchés ? Quel sera le public de demain, entre ceux qui seront en maison de retraite et ceux que l’appauvrissement aura gagné ? Ceux qui ont quitté les villes pour des questions de prix des logements reviendront-ils en ville pour voir un spectacle si le coût des transports continue d’augmenter ? Ou bien développeront ils des réseaux sociaux leur permettant de voir un DVD avec leurs copains sur une TV en 3D ?

Didier Salzgeber : Sur les questions qui vous paraissent importantes d’explorer, est-ce effectivement au salarié de trouver toujours des solutions d’adaptation par rapport aux crises ? On sent bien qu’il y a un changement à opérer. On perçoit aussi une brutalité dans le contexte et les situations d’urgence qu’il nous faut savoir aussi prendre en compte. Enfin, on ne peut pas toujours s’adapter dans des temps aussi courts. Sans méthode, on arrive à un moment où il y a un décrochage qui s’opère.

Alain Soussen : Il nous faut mieux comprendre les parcours des entreprises, les parcours artistiques des salariés, mieux vous connaître les uns et les autres, et c’est à cette condition que vous arriverez à construire de nouvelles articulations dans le cadre de la polyvalence et de la sécurisation des parcours en inter-filière. Je crois qu’il y a trois grandes questions qu’il va falloir explorer : comment être en veille permanente pour mieux anticiper ? C’est la première approche, qu’il nous faudra peut-être avoir. La seconde question est : comment mutualiser les moyens pour mieux sécuriser les parcours inter-filières ? Enfin, la troisième piste sera de mieux communiquer pour mieux vous faire connaître. Je crois que ce sont ces trois pistes qu’il faut peut-être explorer lors des différents ateliers. Je fais un parallèle avec des branches professionnelles communiquant sur leurs métiers. Pour exemple, La Grande Muette a communiqué sur les métiers qu’elle portait et on s’est aperçu du jour au lendemain qu’il y avait 400 métiers qui existaient au sein des armées. Au niveau du spectacle vivant, du cinéma et de l’audiovisuel, on a du mal à avoir cette vision globale. On vous connaît mais on ne sait pas qui vous êtes !!! Nous ne pouvons éluder le fait que vous êtes souvent de très petites structures fonctionnant sur des modes projets, à la recherche permanente de moyens pour subsister et que la qualité de l’emploi s’en trouve ainsi détériorée. La précarité touche souvent un bon nombre de salariés. L’autoentreprenariat, la création de groupements d’employeurs sont peut être des pistes à approfondir tout en veillant à la qualité de vie de l’homme au travail. Pour conclure, je tiens à préciser que nous avons des relations privilégiées avec les partenaires sociaux en Région Languedoc-Roussillon, avec le Coreps, Réseau en scène et les autres structures, la Drac et bien entendu le Conseil régional. Il en ressort des discussions honnêtes et imaginatives qui sont sans doute à votre image. Nous avons énormément besoin de vous dans ces périodes difficiles. Continuer à nous faire pleurer, rire et sourire.

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Comment anticiper l’accélération des mutations actuelles ? Alors que les cadres de référence maîtrisés à ce jour semblent devenir obsolètes, l’émergence de nouvelles stratégies de développement devient ardue. Pourtant l’urgence à laquelle est confrontée le secteur, cumulée à celle dans laquelle travaillent les individus qui l’animent, impose de nouveaux cadres. Cette séance plénière sera ainsi consacrée à interroger les impacts respectifs des conditions de production et de diffusion sur l’emploi, à interroger l’impact des évolutions financières et stratégiques sur les conditions de travail, et inversement, à dégager les véritables enjeux sous-jacents et bâtir des propositions de structuration et de développement étayées.


Séance plénière 2 Emplois et métiers de demain, quelles perspectives pour les professionnels ? Quels enjeux pour un meilleur accompagnement du secteur ?


Didier Salzgeber : Depuis 2007, j’éprouve un réel plaisir à venir en Languedoc-Roussillon et partager ces moments de réflexions avec vous. Il me semble qu’il nous faut aller vers un baisser de rideau après cet Acte III offrant une visibilité de la nécessaire articulation avec les dimensions européennes et internationales entre le régional et le local. Je trouve que cet Acte III est une réussite. À partir des éléments abordés durant ces deux jours dans le cadre des ateliers, l’objectif est de connaître les chantiers à mettre en place dans cette région Languedoc-Roussillon. D’ailleurs, est-ce seulement le Languedoc-Roussillon ? Est-ce avec d’autres ou pas ? La mise en chantier des réflexions, des expérimentations et des actions concrètes menées depuis 2007 va permettre de capitaliser ces travaux. La problématique générale de cet après-midi est d’examiner les emplois et les métiers de demain, c’était le titre de la plénière de clôture. En même temps, je pense qu’il est important de signaler que l’on n’arrivera pas à réfléchir à cette problématique si le désinvestissement global se poursuit d’un point de vue financier. Pour animer des espaces à penser, il y a nécessité d’une économie consacrée à cela. En introduction, la question est moins de savoir comment faire des économies que de savoir ce qui fait économie dans les activités qui nous intéressent ici, notamment les activités artistiques. J’ai proposé aux rapporteurs de structurer et d’articuler ce rendu des ateliers autour de trois moments. Ces moments portent sur la compréhension de la situation actuelle. Premièrement, quelles sont les différentes dimensions repérées ? Pourrait-on avoir une typologie des évolutions à venir ? En fait, il s’agit de dégager les points saillants qui permettent de comprendre la situation dans laquelle sont aujourd’hui le spectacle vivant, le cinéma et l’audiovisuel. Deuxièmement, il serait intéressant de ramener l’ensemble des éléments abordés durant les ateliers autour des améliorations à atteindre et la question de la pertinence d’un accompagnement avec un petit débat sur ce terme. Il me semble que la notion d’accompagnement n’est pas perçue de la même manière par tout le monde. Le troisième moment concerne la question du changement. Au regard des caractéristiques pointées collectivement par les participants, quels pourraient être les axes de travail structurants pour les prochaines années ? À l’échéance 2014. À la fois parce qu’il y aura la réforme des collectivités territoriales avec une modification assez radicale du paysage et l’élection présidentielle en 2012. De plus, nous serons en 2014 à la veille de la nouvelle programmation européenne 2014-2020. Il me semble que les axes de travail sur lesquels les acteurs en région peuvent s’investir doivent être en phase avec ces prochaines échéances. Dernier point : nous avons souhaité des échanges avec la salle et que l’on puisse enrichir les réflexions qui vont être apportées par les remarques et les propositions que vous aurez à faire. Qu’avez-vous compris de ce qui a été abordé ce matin ? Quels sont les éléments saillants qui vous paraissent importants à prendre en compte ? Je vous propose de passer au tamis les discussions pour repérer les éléments utiles à l’élaboration de futurs chantiers. Je vous propose de faire un premier tour dans chacun des ateliers sur les modèles économiques, les questionnements et les éléments facteurs à prendre en compte.

François Bernard, vice-président de la Chambre régionale de l’économie sociale et solidaire d’Île-de-France Le plus intéressant dans cet atelier fut probablement l’idée – assez rare pour la noter – qui consista à parler d’économie sociale et solidaire dans un colloque culturel. Nathalie Moreau avait introduit notre travail par ces mots, et il me semble que nous avons réussi à éviter l’écueil du mauvais débat entre les pour et les contre l’économie sociale et solidaire, une économie qui se revendique comme une économie plurielle et ne prétend pas sauver le monde. Il ne s’agit pas d’adopter une attitude de croyance par rapport à l’économie, il s’agit de rationaliser des choix qui nous permettent de gérer notre quotidien. Comment répondre collectivement à des besoins collectifs ? C’est le point de départ de notre réflexion Ce matin, nous avons pu éviter ce grand écart entre la discussion sur la coopération, les collaborations, les mises en commun et une pseudo réflexion éthique sur l’économie. J’ai vraiment l’impression que nous avons commencé à travailler ensemble et à parler d’économie. Nous vivons dans un pays où on peut suivre toute sa scolarité sans entendre un seul mot d’économie. Nous avons évité, je le crois, cette question insupportable qui est celle des coûts dans le spectacle vivant. Il a été réaffirmé une idée simple, mais qui n’est pas si fréquente : dans le champ culturel, nous sommes dans une économie de prototype. On ne peut savoir si le produit est intéressant qu’après l’avoir goûté. Vous ne pouvez apprécier un spectacle qu’à partir du moment où ce spectacle a été créé. Vous allez le voir et c’est l’attitude des spectateurs qui va faire le succès du spectacle. Philippe Berthelot l’a rappelé en montrant quelle était la spécificité de l’économie solidaire : réintroduire la personne au centre de l’économie. Cela a été dit plusieurs fois et en particulier par nos amis slovènes. Le public compte dans le spectacle, il est un acteur économique à part entière. Ce matin était posée cette question fondamentale consistant à

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réintroduire la personne au centre de l’économie, recentrer le modèle économique sur les acteurs eux-mêmes, y compris dans les questions européennes. Il n’y a pas de possibilités de gain de productivité dans la création. Il faut autant de temps aujourd’hui pour produire un spectacle qu’à l’époque de Molière. C’est toujours le même travail, même si certaines technologies permettent de gagner un peu de temps à la marge. Pour nos amis slovènes, le plus important est de penser comment une production culturelle prend en compte les habitants du quartier. Comment s’intègre une compagnie, une démarche de production culturelle sur un territoire ? Je ne sais pas si nos amis catalans ont été perçus comme des provocateurs avec leur idée de tourisme culturel, mais je reconnais que la tentative consistant à associer tous les acteurs du territoire, y compris les spectateurs, en faisant sponsoriser leurs propres fauteuils de théâtre, a été une idée un peu décoiffante. Cela peut évidemment choquer : comme à l’église autrefois nous pourrions avoir notre siège à notre nom au théâtre. Il y a très peu de subventions en Espagne, et pas de statut d’intermittent. Il faut trouver des solutions alternatives pour avoir des moyens de création. La précarité peut aussi parfois être un moteur pour l’innovation, à condition évidemment de ne pas en faire un système pour masquer le désengagement des politiques publiques.

Valérie Ruche, ancienne directrice du Centre interinstitutionnel des bilans de compétences du Département de l’Hérault Les Centres interinstitutionnels des bilans de compétences86 (CIBC) sont des structures de conseil spécialisées dans la gestion active des compétences, dont l’emblème est le bilan de compétences. Réseau national de référence, l’organisation des CIBC est fondée sur le partenariat avec tous les acteurs : économiques, collectivités territoriales, branches professionnelles, partenaires sociaux et institutionnels. Depuis plusieurs années, le CIBC du Gard Lozère Hérault travaille en partenariat avec le secteur du spectacle vivant, du cinéma et de l’audiovisuel et apporte sa contribution et son expertise auprès des professionnels du secteur afin de leur permettre de valoriser leurs compétences et leurs atouts en vue de faciliter leur mobilité professionnelle et la pérennité de leurs emplois. Ainsi, outre l’accompagnement individuel des professionnels, le CIBC pilote des projets et actions expérimentales avec les branches professionnelles, l’Etat, les collectivités locales, les OPCA. Dans ce contexte, nous avons eu le plaisir de participer à l’Acte III du séminaire du Coreps. Le second atelier était orienté sur la thématique de la transversalité des parcours professionnels entre le cinéma, l’audiovisuel et le spectacle vivant. Les échanges riches et dynamiques soutenus par les témoignages de professionnels ont tenté d’éclairer et d’apporter quelques éléments de réponse aux questions suivantes : la transversalité ou le transfert de compétences dans le secteur du spectacle vivant vers l’audiovisuel et le cinéma et inversement sont-ils aujourd’hui une vraie possibilité ? Quels sont les freins et les limites de la transversalité et quels en sont les leviers ? Comment fait-on pour rebondir et trouver des passerelles ? ». La transversalité n’est pas une fin en soi mais peut être un moyen pour sécuriser son parcours et pérenniser son activité professionnelle. Le fait même de s’interroger sur son parcours, son expérience et de travailler sur les possibilités de transfert des compétences permet de mieux se situer dans son environnement professionnel et ouvre des perspectives que sans doute nous n’aurions pas soupçonnées voire évite des choix enthousiasmants peut-être mais trop hasardeux. La question de la transversalité constitue donc à la fois un enrichissement personnel et professionnel mais permet également de faciliter la pérennisation de l’emploi. Alors, ne faudrait-il pas introduire le plus en amont possible cette notion en particulier dans les dispositifs de formation initiale et continue plutôt que de tendre de plus en plus vers la spécialisation qui crée des clivages ? Dans les métiers du spectacle vivant, du cinéma et de l’audiovisuel, les professionnels du secteur et les employeurs ont une identité professionnelle forte avec des représentations propres à leurs métiers. Ceci constitue une vraie force car le sentiment d’appartenance et la reconnaissance professionnelle permettent de faciliter l’accès aux emplois. Mais un environnement trop spécialisé peut se priver également d’autres compétences et au final s’appauvrir. On s’aperçoit qu’il n’est pas toujours facile « de tordre le coup à ces représentations » et qu’il est difficile pour un professionnel ayant exercé exclusivement dans le spectacle vivant par exemple, d’intégrer des activités de l’audiovisuel ou du cinéma. On ne va pas s’interroger sur son savoir-faire mais sur le milieu dans lequel il a évolué et il ne sera pas accueilli à bras ouverts dans un premier temps. Il existe encore des frontières peu perméables et outre le réseau, il semble compliqué de se faire une place « sans porter une étiquette » avant même d’avoir pu faire ses preuves.

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Le réseau des CIBC accompagne depuis plus de 20 ans les politiques publiques en matière d’emploi, de formation professionnelle, de reconnaissance des acquis de l’expérience. Avec le soutien des partenaires sociaux, économiques et institutionnels, la Fédération Nationale des CIBC contribue aux évolutions du bilan de compétences et à la diversification des activités de conseil en ressources humaines.

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Sans parler de corporatisme, il ne faut pas non plus nier la spécificité des métiers et il serait extrêmement dommageable de s’engager dans une logique d’uniformisation. Il y a cependant des choses à développer, et en particulier dans le cadre des différentes formations proposées, travailler sur ce qui constitue le socle commun de compétences tout en valorisant la spécificité qui apporte la plus-value et l’expertise. On peut s’interroger également sur l’activation de cette transversalité dans un environnement professionnel où l’urgence et la précarité sont souvent de mise et le besoin de recrutement est rapide et immédiat. Ainsi, le choix d’un professionnel va porter de manière « naturelle » sur sa disponibilité et son opérationnalité. La prise de risque d’un profil différent est encore très marginale d’autant plus dans un contexte économique tendu où les moyens financiers sont de plus en plus restreints. Certains professionnels arrivent à se frayer un chemin, portés par la volonté d’agir et de découvrir d’autres univers. Mais cela demande de l’énergie, du temps pour l’observation des évolutions du secteur et la rencontre d’autres professionnels, de l’audace, de la patience, de l’humilité et parfois une remise en question de ses acquis pour mieux en acquérir d’autres. À qui cela est-il finalement réservé aujourd’hui hormis à des professionnels déjà un peu installés et identifiés ? Ainsi, il paraît important d’offrir des dispositifs qui permettent d’accompagner cette mobilité entre les différents secteurs. Certains seront plus heureux dans un domaine précis et spécialisé mais d’autres seront plus enclins à naviguer d’un secteur à l’autre. La mobilité peut être subie dans certains cas mais elle peut être aussi choisie. Quoi qu’il en soit, elle doit être construite et accompagnée. Au cours des échanges et dans le cadre de la sécurisation des parcours, s’est également posée la question de la pluriactivité et de la pluri-compétences. Cela constitue-t-il un atout et que met-on derrière cela ? S’agit-il de polyvalence ? Si la pluriactivité est souvent nécessaire pour beaucoup de professionnels pour gagner leur vie, elle peut être parfois perçue de manière négative par les employeurs qui ont le sentiment que derrière cela il n’existe pas de véritables compétences ou qu’il paraît difficile de voir quelle est la technicité ou la spécificité du professionnel. C’est finalement plus rassurant pour un employeur d’avoir un professionnel très spécialisé. En revanche dans d’autres contextes, ce sera un vrai plus car les attentes du poste ou de la mission seront en adéquation avec un profil plus généraliste. Ainsi, on revient à la notion de construction voire d’accompagnement : définir ses objectifs professionnels, concevoir une stratégie d’action pour gagner en lisibilité et crédibilité.

Frédéric Burnier, chef de service à l’inspection au Centre national du cinéma et de l’image animée Je suis d’abord inspecteur du travail et donc particulièrement sensible aux problématiques de l’emploi. Ensuite, je suis rattaché au CNC, au secrétariat général qui suit l’évolution des métiers et des pratiques dans le secteur du cinéma et de l’audiovisuel. Le débat s’est longuement concentré sur le mot « numérique » avec le constat que tous les participants ne mettaient pas forcément la même chose derrière ce mot fourre-tout. Nous n’avions donc pas la même approche, la même attente dans l’atelier. Entre la création numérique, l’utilisation de nouveaux outils au service de la création artistique, et la technologie numérique elle-même et son incidence possible sur les métiers de l’ensemble des professionnels du secteur, que ce soit l’artiste mais aussi les techniciens voire les administratifs, nous avons eu ce long débat : y a-t-il un art numérique ? y a-t-il une création proprement numérique ? Ou le numérique n’est-il qu’une technologie au service des différents acteurs de la création et de la diffusion artistique ? Mais nous n’avons pas abordé l’économie numérique et l’incidence que le numérique peut avoir sur la diffusion et la commercialisation et le marché artistique. Nous avons abordé les incidences parfois contradictoires qui peuvent apparaître avec l’utilisation des technologies numériques. S’il y avait débat sur « l’Art » ou la simple « technologie numérique », il n’y avait pas débat sur la « révolution numérique » car, en analysant les discussions et les points de vue des uns et des autres, on s’apercevait qu’il y avait des révolutions douces dans un secteur qui s’appropriait petit à petit ces technologies dites numériques… mais aussi des révolutions plus brutales, comme dans le secteur du cinéma que je connais un peu mieux, où des projectionnistes se retrouvent licenciés. Des techniciens de laboratoire qui travaillaient sur les pellicules se sont retrouvés également licenciés. On a un passage à l’économie numérique progressif, parfois brutal. Il existe des secteurs pour lesquels la révolution semble appartenir déjà au passé, comme la post-production au cinéma, la musique où le numérique est installé depuis longtemps. Cela a commencé il y a trente ans et parler aujourd’hui d’une révolution ne fait plus débat. Pour autant, cette révolution demeure permanente dans ce secteur par le nombre de formats et de nouveaux outils numériques. Tous les ans, tous les deux ans, de nouveaux outils et de nouveaux formats arrivent, de nouvelles techniques apparaissent qui conduisent ces métiers à sans cesse faire évoluer leur approche professionnelle, leurs pratiques et leurs outils en eux-mêmes. Pour certains secteurs, des révolutions à venir s’annoncent. On a parlé du théâtre qui semblait encore peu touché par le numérique, même si cela commence. Une réflexion plus personnelle : ces révolutions ne sont pas nouvelles pour le secteur de la culture et pour les arts.

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Constamment, les arts s’approprient les évolutions technologiques qui les environnent. Nous sommes dans une nouvelle évolution des pratiques et des moyens de création. Autre incidence contradictoire sur les projets eux-mêmes. D’une part, Il y a le numérique qui permet le montage simplifié de projets. Grâce aux instruments, au matériel et à des logiciels de traitement peu coûteux : certains logiciels libres ou des entrées de gamme permettent à chacun d’entrer dans la création et favorisent donc l’émergence d’auteurs, artistes autodidactes qui, par la maîtrise de l’outil, entrent dans la création artistique. On en a moins parlé mais le numérique facilite également la démocratisation pour le public et pour la diffusion de beaucoup d’œuvres. Cette facilité relative à monter des projets a également donné lieu à une plus grande légèreté dans le montage financier des projets. D’autre part, lorsqu’on souhaite se professionnaliser dans la création plus pointue soit en qualité soit dans l’expérimentation, il y a des projets beaucoup plus coûteux : le matériel numérique de haute qualité est particulièrement onéreux car il est sans cesse en évolution, il a sans cesse besoin de se renouveler. Les projets, les créations s’intéressant et essayant de créer des filières avec ingénieurs, scientifiques et avec des membres de secteurs qui n’ont ni la même temporalité ni les mêmes exigences seront des projets beaucoup plus longs et mobilisant par conséquent des moyens de financement plus importants. On va donc avoir à la fois une facilité pour de petits projets mais également des projets plus lourds à travers des collaborations avec d’autres secteurs éloignés du milieu artistique cette fois-ci, notamment avec le secteur scientifique, informatique, etc. Surtout, le cœur de l’atelier fut consacré à l’évolution des métiers eux-mêmes, la transformation des métiers et des organisations. Je vous ai parlé des métiers qui disparaissent mais il y a aussi des métiers qui apparaissent : la captation numérique que ce soit du son ou de l’image, la gestion des données numériques, la sécurisation de ces données. De manière pratique, tous les métiers doivent s’adapter aux nouveaux outils. Les créatifs, comme par exemple ceux qui maîtrisent l’écriture, doivent s’adapter aux nouvelles possibilités qu’offrent les outils pour adapter la création. Les interprètes dans la danse pour citer un autre exemple, le danseur ou le chorégraphe doivent s’adapter, prendre en compte qu’il est relié à des capteurs qui vont actionner l’image numérique dans le but d’adapter sa chorégraphie, sa position sur la scène et l’approche de son propre art et de son propre corps. Ces révolutions entraînent des évolutions dans les équipes et dans les rapports qu’entretiennent ces équipes potentiellement cloisonnées. En reprenant l’exemple de la danse ou de la chorégraphie elle-même, le numérique peut favoriser la collaboration en intégrant des directeurs artistiques, des techniciens qui vont vraiment participer et s’intéresser à la compagnie. Cependant, le numérique peut être source de cloisonnement. Un exemple avec la musique : même si cela se pratiquait déjà avant le numérique, il n’est plus besoin d’avoir tous les artistes dans le même studio pour enregistrer ; chacun peut faire sa partie et le technicien qui n’a vu personne va faire le mix. Pour finir, ces nouvelles technologies nécessitent évidemment des adaptations parfois difficiles, confrontées à des fossés culturels : des personnes non-adaptées à l’informatique rencontrant des difficultés à adopter ce mode de production. Ces technologies induisent de nouveaux modes de travail, de nouveaux modes de production, de nouveaux rapports aux autres et au temps. Les lieux de travail peuvent aussi être différents et les difficultés d’adaptation visent aussi cela. Des personnes avec d’anciennes cultures professionnelles, avec des modes antérieurs de travail ont des difficultés d’adaptation aux outils technologiques ainsi qu’aux incidences que cela entraîne sur leurs méthodes de travail, leurs manières d’aborder leurs propres savoir-faire ou leurs relations aux autres acteurs de la production.

Emmanuel Négrier, directeur de recherche au Centre national de la recherche scientifique87 (CNRS) Concernant l’interrégionalité, nous avons entendu des expériences assez différentes. Le niveau régional est à la fois un niveau pertinent et impertinent pour aider les acteurs culturels et artistiques. Pertinent car il est une base à partir de laquelle une certaine forme de diffusion peut se mettre en place. Et en même temps, chaque organisme qui est apparu pour présenter sa politique de coopération interrégionale disait que l’interrégional était finalement un élément de plus dans cette forme d’aide. Évidemment, la plate-forme interrégionale la plus ancienne et la plus représentative fut l’Onda puisqu’elle est nationale et elle fut un fil rouge parcourant l’ensemble du débat sur la place de l’Etat. On aurait du mal à se défaire de la place de l’Etat même si des questions sont posées sur la manière dont il peut intervenir. Cependant, il reste la question de l’interrégional qui n’est pas simplement une manière de définir la politique culturelle sur le territoire français. Les expériences sont aussi extrêmement différente dans le « qui ? », le « quand ?» et le « comment ?». Dans le « qui ? », le premier dispositif est une première forme de coopération qui associe des agences avec l’Onda : il y en a cinq ; à chaque fois, il y en a cinq ; cela doit être un seuil de pertinence de l’interrégionalité. Le second dispositif associe par contre de manière mixte des institutions, des Conseils régionaux, des Drac et les programmateurs. Et puis un troisième réseau que consituent les programmateurs.

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http://www.cepel.univ-montp1.fr/

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Donc trois formules d’interrégionalité très différentes en sachant qu’il ne faut pas non plus fétichiser l’espace régional ; surtout en France avec nos régions généralement associées à deux noms, à cheval entre l’un et l’autre, LanguedocRoussillon, Basse-Normandie, Haute-Normandie, etc. L’interrégionalité est aussi l’internationalité, le transfrontalier et l’international. On a parlé de la Catalogne tout à l’heure qui avait quelque chose à dire sur l’interrégionalité en Espagne. La confrontation des institutions régionales peut précisément avoir pour effet pervers d’empêcher les œuvres et les artistes à l’intérieur même d’un Etat. Les coopérations différentes ont un impact sur les enjeux qui sont portés et sur les questions que posent ces dispositifs de coopération. Dans le cas des agences, on se pose la question de l’organisation du choix artistique de celles-ci alors que ce n’est pas tout à fait la même question pour les programmateurs eux-mêmes. C’est finalement l’alpha et l’oméga du travail que de programmer et d’opérer des choix artistiques. Se pose pour les structures de programmation la question de savoir jusqu’où la coopération comme une forme de mutualisation, de mise entre parenthèses à un moment et un espace donné d’une compétition entre les acteurs, jusqu’où cette compétition est-elle régulée, ou dissipée par les dispositifs de coopération ? Le « quand ? » : trois dispositifs, trois manières d’aider dans le temps. Une manière très en amont, c’est le dispositif Quint’Est88, Réseau Grand Est du spectacle vivant entre programmateurs qui intervient à la phase avant le brouillon. Quand on monte un projet, il va arriver en brouillon. C’est à ce moment qu’il sera suivi d’une charte d’accompagnement où les acteurs s’entendent pour donner simplement de l’argent dans le but de se dédouaner de leurs obligations de coproduction mais de suivre, d’accompagner et d’une certaine manière d’ouvrir leurs réseaux. Deuxième dispositif : le dispositif Rencontres à l’Ouest89, plus près de la réalisation éventuelle d’un projet qui va être labellisé et va ensuite bénéficier d’un appui pour obtenir des coproductions, des pré-achat, etc. Enfin, le troisième dispositif quand le projet est réalisé. Dans le cadre de sa réalisation, il va être aidé. Le « comment ? » est très différent avec les agences et l’Onda. Elles se partagent respectivement le rôle d’aider au transport et au défraiement ; et d’aider en garantissant contre les déficits excessifs pour l’Onda. Le « comment ? » de Rencontres à l’Ouest est un appel à projets. On fait tous les mêmes appels à projets entre les cinq Régions c’est-à-dire Bretagne, Centre, Poitou-Charentes, Limousin, etc. Dans le cadre de Quint’Est, c’est à partir d’une veille sur le terrain, élément partagé entre les différentes formules. Finalement, les agences jouent leur rôle de veille sur le terrain pour faire émerger des projets dignes d’être soutenus pour des raisons différentes, d’ailleurs. Rencontres à l’Ouest joue également son rôle de veille, Quint’Est le fait à sa manière. Ensuite, l’objectif est de présenter ses idées au brouillon pour être soutenu, accompagné dans la durée. Le point commun de tous ces exemples rassemblant quinze régions sur vingt-deux métropolitaines est un parti pris de modestie. C’est dans l’air du temps, nous ne sommes pas en train de faire une révolution dans les politiques culturelles mais on joue un rôle à un certain niveau qui est mieux que rien. Mais cela ne règle pas tout. Deuxième point commun : ce sont des dispositifs relativement récents. On le rappelait précédemment, ils ont commencé à germer dans les têtes en 2004. Ils ont mis plus ou moins de temps à se mettre véritablement en œuvre. Ils ne sont pas tous évalués, les dispositifs de Réseau en scène viennent de l’être mais c’est loin d’être le cas général. Troisième parti pris – avec lequel je suis franchement en désaccord total – est l’idée que ce ne sont pas des dispositifs de régulation. Je pense que c’en sont bien évidemment puisqu’ils sont, premièrement, des dispositifs qui reposent sur des structures quasi-réglementaires : des chartes par exemple. Deuxièmement, ce sont des textes qui objectivent des situations autant que faire se peut. Évidemment, le choix artistique est toujours au cœur des enjeux d’objectivation. Et troisièmement : ces dispositifs ont pour conséquence de distinguer des lauréats dans une masse dont on rappellera qu’elle est peut-être excessive mais sans que personne ne soit d’accord sur le fait de savoir qui est en trop. Néanmoins, il y a véritablement une régulation. Je n’irai pas jusqu’à dire que cette régulation puisse être qualifiée, mais nous tenons une vraie question par « comment ? », « pourquoi ? » et « vers qui ? » on régule à partir de l’interrégionalité.

Didier Salzgeber : À partir des discussions de ce matin, nous sommes peut être en train d’observer un déplacement des modèles : ceux que nous connaissions avant sont en train d’être enrichis par de nouveaux modèles issus d’expérimentations. Cette économie pose également la question des déplacements des modèles d’analyse pour comprendre les trajectoires et les parcours professionnels. On a beaucoup de mal aujourd’hui à comprendre les frontières entre la multi-compétence et la multi-activité.

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L’association Quint’Est a pour objectif le développement, la promotion et la circulation des œuvres du spectacle vivant entre les cinq régions composant le Grand Est : la Région Alsace, la Région Bourgogne, la Région Champagne-Ardenne, la Région Franche-Comté et la Région Lorraine. Elle se donne pour missions, entre autres, de promouvoir la création artistique, favoriser la mise en œuvre de moyens de production (coproduction, repérage de lieux de résidence…), accompagner des artistes dans leur parcours et leur rapport aux publics, etc. http://quintest.hautetfort.com/

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Pilotées par l’Agence régionale du spectacle vivant Poitou-Charentes, les Rencontres à l’Ouest ont pour but de favoriser la visibilité et la circulation des artistes, au-delà de leur territoire d’implantation.


Séance plénière 2

Le déplacement pratique est également une notion éclairée. J’aime beaucoup dans l’inter-disciplinaire la façon dont on se donne de nouvelles compétences par rapport à l’évolution des technologies. Cela modifie même la question des écritures et des langages. Un déplacement également sur la question du territoire. On se pose finalement la question de l’articulation entre le territoire administré, celui que nous connaissons : le département, la région par rapport aux territoires de projet et aux territoires de décisions. À travers ce qui est dit, il me semble qu’il y a un déplacement des endroits de décisions où le jeu des acteurs est en train de s’élargir. Deux choses qui me semblent difficiles à saisir. La première est la question: quels sont les marqueurs qui vont nous permettre de sentir les choses bouger ? Si je suis observateur d’un micro-sytème par rapport à l’ensemble des activités économiques, il est intéressant de sentir dans un secteur d’activité que tout bouge en même temps. Par contre, cela pose la question de l’objectivation de ces changements. Outre le fait de donner le tournis, il va bien falloir que nous réussissions à trouver les marqueurs qui nous permettent de comprendre les endroits de déplacements qui vont devenir structurels ou au contraire conjoncturels. Autre chose qui a été dite très rapidement : dans ce mouvement de la tectonique des plaques, la question est de savoir quelle place voulons-nous donner à l’Etat ? Quelle place souhaitons-nous avoir par rapport aux collectivités ? Et quels types de responsabilités pouvons-nous assumer professionnellement et politiquement dans cette mise en mouvement général ? Ceci n’est pas une synthèse mais il faut essayer de repérer les tendances. Il y avait une question qui revenait sur plusieurs choses : on parlait d’adaptation, hier, nous avons parlé d’inclusion. Cela me fait penser que l’inclusion est toujours par rapport à un monde fini. Il serait intéressant d’associer les termes de régulation et d’intégration à des logiques de transformation. Il y a une différence entre parler de la nécessaire adaptation à un monde qui change et de travailler à un changement du monde où les personnes sont acteurs du monde en train de changer. Sommes-nous ici pour simplement subir ces évolutions ? Sommes-nous là pour attendre des logiques de régulation qui vont être mises en place par d’autres ? Il est peut-être temps de prendre une part de responsabilité dans ces déplacements observés ce matin dans les ateliers.

Stéphane Grosclaude, coordinateur de la plate-forme interrégionale d’échange et de coopération pour le développement culturel90 (PFI) Je souhaitais faire deux remarques par rapport à la restitution de l’atelier concernant la diffusion interrégionale, point d’appui au développement de la circulation et de la visibilité. Tout d’abord, il y a d’autres dispositifs existants qui n’ont pas été mentionnés dans cette restitution et qui sont pourtant des espaces d’échange, de partage, d’expériences, mais aussi de visibilité et de facilitation pour la circulation des équipes et des projets artistiques. Ensuite, concernant la question de la régulation, je suis d’accord avec Emmanuel Négrier : les dispositifs interrégionaux constituent une régulation organisée de fait. Tel que cela a été dit ce matin, sur un plan politique, nous n’avons pas de régulations concrètes de la part des collectivités territoriales ou de l’Etat. De par la réflexion qu’ils font émerger, par le nouveau regard qu’ils permettent de porter sur ce sujet, les dispositifs interrégionaux invitent les collectivités à prendre position sur le plan politique.

Emmanuel Négrier : Je n’ai pas l’exposé de l’ensemble des dispositifs de coopération qui existent entre les régions en France pour la culture aujourd’hui. Je l’avoue humblement. Vous avez raison de dire qu’il y a une vraie question sur la place de l’action publique, pas simplement de l’Etat d’ailleurs. Quelle est la place de l’action publique ? Les dispositifs de régulation présentés, au vu de leurs principes, obéissent à des principes potentiellement contradictoires entre eux. Qui soutient-on à l’interrégional ? Soutient-on un acteur confirmé ayant fait ses preuves à l’échelle régionale ? S’agit-il donc de le faire progresser à l’échelle interrégionale après un premier parcours et une certaine légitimité artistique ? Ou au contraire, place t-on d’emblée un acteur émergent dans un contexte interrégional pour faire ses premiers pas dans une carrière non-enfermée dans des frontières, des réseaux ou des affinités territorialisées ? C’est un premier dilemme parmi d’autres. Ainsi, ce n’est pas seulement la place de l’Etat ou son investissement qui sont en question. C’est aussi la question des modalités : quelle place pour l’intervention directe, et quelle place pour une intervention, concertée ou non, via des agences ?

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La plate-forme interrégionale a pour vocation principale de faciliter le partage des méthodologies, des réflexions, de la documentation, des expériences et des travaux sur l’action culturelle, l’aménagement du territoire, l’éducation artistique, de faciliter les connexions entre les réseaux et de mutualiser un certain nombre d’outils, de services et de projets. Ses actions se traduisent notamment au travers de temps de rencontres et d’échanges, de séminaires, de formations, et par la mise au point de démarches et d’outils d’études, d’évaluations et d’actions.

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Intervention dans le public : J’ai simplement été surprise qu’aucun des ateliers n’ait traité le sujet des groupements d’employeurs alors que c’était un des sujets. En tous cas, ce n’est pas ressorti. J’aurais aimé savoir si vous avez omis de l’évoquer ou si cela n’a été évoqué dans aucun atelier.

Eva Loyer, Syndicat national des professionnels du théâtre et des activités culturelles CGT spectacle91 (Synptac-CGT) Languedoc-Roussillon Sur la question du groupement d’employeurs qui n’a pas été évoquée en tant que telle lors du séminaire, je ferai juste une précision que confirmera sans doute ma camarade patronale du Syndicat national des arts vivants92 (Synavi) qui est la mieux placée côté entreprise pour en parler. Nous avons ce chantier au niveau de l’Adec (Actions de développement de l’emploi et des compétences). Il s’agit d’ un accord d’action sur le développement d’emploi des compétences dans lequel un axe est observé : nous travaillons sur la Gestion prévisionnelle de l’emploi et des compétences93 (GPEC). Tout cela pour dire que la volonté est de définir la façon de sécuriser le parcours professionnel des professionnels. Certes mais il faut aussi une structure, des employeurs et que nos entreprises soient sécurisées. À partir de là, nous avons travaillé sur les principes de mutualisation et d’observation. Effectivement, les groupements d’employeurs existent et nous nous sommes aperçu durant nos travaux que dans toutes les situations, on ne rentrait pas dans ce modèle. Nous sommes en train de travailler dans le but de connaître les pratiques de mutualisation. Que peut-on en tirer ? Que peut-on traduire pour le formaliser socialement et améliorer les conditions d’exercice de nos activités, tant pour nos entreprises que pour les salariés ? Le chantier est assez complexe : les modèles et les solutions ne sont pas uniques avec des Toutes petites entreprises (TPE) et des « TPPPPE ».

Didier Salzgeber : Cela signifie qu’on ne parle que des éléments apportés aujourd’hui par les participants qui sont présents. Ce qui vient d’être dit et ce qu’il va falloir regarder collectivement est la façon de capitaliser les travaux réalisés à plusieurs endroits depuis 2007. Ils vous apporteront des éléments de réponse sur la problématique du groupement d’employeurs. Il y a eu de nombreux autres ateliers de travail entre tous ces actes du Coreps, il va falloir mettre en débat public tous ces éléments.

Catherine Vasseur, Syndicat national des arts vivants (Synavi) Languedoc-Roussillon J’ai assisté à l’atelier « Modèles économiques, entre utopie et inventivité ». Il y était surtout question de démarche et de savoir ensuite quels outils mettre en œuvre pour réaliser cette démarche. Tout ce que j’ai entendu depuis deux jours me conforte dans l’idée qu’il est nécessaire d’affirmer le désir d’une démarche singulière, que cette démarche s’installe dans la durée et que nous ne sommes pas seulement dans des économies de production. Nous sommes dans des économies d’activité artistique qui prennent en compte des temps de recherche, d’expérimentation, de sensibilisation, de rencontres avec le public et on ne peut pas limiter les activités à du volume commercial. D’autre part, l’exemple slovène montrait qu’il était question de la réappropriation par les artistes de leurs outils de travail dans le but de leur donner un sens très fort. Et donc aussitôt déconnecter ces outils de travail des outils de programmation. Tout à l’heure il a été dit que tout bouge. Mais nous, les structures de création, nous avons besoin de temps pour nous arrêter et effectivement reposer ces questions, remettre en question ces démarches. Il faudra qu’on nous donne l’occasion de prendre ce temps de réflexion. On parlait tout à l’heure de l’accompagnement. Qu’est-ce que l’accompagnement ? Ce n’est pas seulement le financement des accompagnateurs. Il est nécessaire que pour les structures qui veulent entrer dans ces processus d’accompagnement, le temps de travail que cela représente soit pris en compte. C’est un appel aux puissances publiques. Cela ne doit pas être des injonctions, sous peine d’inefficacité. Le choix d’un modèle économique doit être partagé et faire partie du projet artistique global.

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Le Synptac est le syndicat des techniciens et administratifs des théâtres et établissements d’action culturelle. Il est à l’initiative de la réalisation de toutes les conventions collectives du spectacle vivant dont trois sont, désormais, étendues par décret ministériel. C’est-à-dire applicables à toutes les structures qui relèvent de ces secteurs. Le SYNPTAC est également à l’origine de toutes les structures sociales particulières de nos secteurs (caisses de retraite complémentaire, Audiens , Afdas, CFPTS, FNAS, CASTP, Fonds de soutien, etc...) http://www.synptac-cgt.com/

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Créé en 2003, le Syndicat national des arts vivants (Synavi) rassemble plus de 370 compagnies et structures de la création indépendante, toutes disciplines des arts du spectacle vivant confondues (théâtre, danse, musique, marionnettes, cirque, arts de la rue), subventionnées ou non. Le Synavi défend la circulation et la diversité des œuvres du spectacle vivant ainsi que la polyvalence des artistes (artistes intervenants, porteurs de projets collectifs et de rencontres singulières avec le public). http://www.synavi.org/

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La Gestion prévisionnelle de l’emploi et des compétences (en anglais, « strategic workforce planning ») (GPEC) est une gestion anticipative et préventive des ressources humaines, en fonction des contraintes de l’environnement et des choix stratégiques de l’entreprise. C’est aussi une obligation de négociation triennale qui doit permettre d’éviter les restructurations brutales.


Séance plénière 2

Jean-François Pujol : Je regrette que le premier atelier n’ait pas fouillé la notion d’économie sociale et solidaire. Il ne faut pas se leurrer : ce sigle, presqu’un slogan, ne révèle pas le plus souvent une économie différente, ni ne sanctifie les relations sociales. De multiples exemples, et pas seulement dans notre champ, montrent que la loi du marché n’épargne pas ce secteur, que les salariés y sont toujours la variable d’ajustement. De grandes organisations très anciennes agitent ce sigle et s’en réclament avec vigueur, mais concrètement, dans l’entreprise, on s’aperçoit qu’elles valent bien des entreprises non solidaires et réputées non sociales. Il est donc regrettable que cet atelier qui a discerné des éléments intéressants ait évité de creuser la notion. Le rapport employeur-salarié est une base à creuser. Nous excepterons l’autoentrepreneuriat ou la profession indépendante, encore marginaux. Mon regret est que bien qu’ayant essayé de créer un débat spécifique sur ce point de fond, on a finalement parlé essentiellement des entreprises. Comprenons-nous bien, un syndicat n’attaque pas l’entreprise, c’est notre employeur, à nous les salariés. Autant que les entreprises se portent bien. L’accord Adec est significatif : deux de ses axes de travail, dévolus aux Régions, sont la pérennisation des entreprises et la consolidation des parcours professionnels. Pourtant, ce matin, je fus frappé de constater que l’on ne parlait que des entreprises, de leurs rapports, et des incitations à la mutualisation. Mais qu’en est-il des salariés à l’intérieur ? En un sens, ce sont les salariés que le public vient voir. Trois autre notions ont été également évoquées : la polyvalence, la pluricompétence et la multi-activité dans la branche. Mais la polyvalence a tout englobalisé : tu joues, tu fais les lumières, le ménage, tu démontes le décor, le tout pour un salaire dérisoire. La polycompétence suppose, pour la branche, que chaque compétence soit prise en compte dans le salaire, et donc que le budget doive en tenir compte. La polyvalence, c’est un salarié à tout faire, plutôt mal et peu payé. Quant à la multi-activité, elle désigne les salariés qui occupent des emplois différents chez des employeurs différents. Et chaque emploi est salarié en rapport avec le niveau de compétence utilisé : un exemple, les musiciens de variétés qui sont par ailleurs employés comme road par un prestataire. Certes les choses évoluent, les rapports sociaux évoluent mais dans la réflexion collective, il y a quand même des éléments de stabilité. Nous ne sommes pas pris dans un tourbillon de nouveautés, il suffit de bien discerner ce qui reste immuable comme base de réflexion, et il en reste ! Enfin, même observation sur le thème du numérique ; en ce qui concerne la formation, il faut veiller à ce qu’il n’y ait pas pléthore de formés dans tous les domaines, y compris le numérique, dans un « marché » que nous n’avons certes pas réussi à élargir : le « marché de l’emploi », le « marché de l’activité ». Et d’autre part, là encore, la polycompétence se paie en tenant compte de chaque compétence ! On considère trop souvent l’économie des entreprises, hors sol, telle qu’elle est conçue et non pas une économie tenant compte de la législation sociale, tout particulièrement des conventions collectives étendues. Nul n’est censé ignorer la loi, certes. Sauf que, y compris souvent avec la complicité des salariés, tout le monde fait l’impasse là-dessus. Donc on ne travaille plus sur l’économie réelle, mais sur des économies réduites, irréelles, et l’économie réelle est tirée vers le bas. Le mépris de la loi et des accords collectifs devient la base de tous les débats.

Didier Taudière, Syndicat français des artistes-interprètes94 (SFA) CGT Languedoc-Roussillon Tout périclite. Dans une période où nous sommes sensibles à la mode sécuritaire, je voudrais rappeler que la CGT prône la sécurité sociale professionnelle. En ce moment même, y compris peut-être encore plus dans l’économie sociale et solidaire, défendre la sécurisation des parcours, la sécurité sociale professionnelle, n’est pas très simple. Certaines personnes parlaient des coûts de masse salariale, s’agissant des ateliers de pratiques artistiques (transmission, formation). Oui, cela coûte un salaire, cela coûte une force de travail, cela coûte la valeur ajoutée, cela coûte la formation continue car on doit payer plus un salarié qui est mieux formé. Il est invraisemblable qu’il n’existe pas d’ancienneté dans le métier. Dans toute l’économie, l’ancienneté est prise en compte ; dans nos métiers d’artistesinterprètes, non. Pour qu’il y ait création artistique, pour que cette création s’inscrive sur un territoire, il existe un certain nombre de partenaires. À propos de Créafonds95, il a été rappelé aux partenaires que la mutualisation est une bonne chose et que le dialogue social doit s’installer. La mutualisation de la création artistique implique de réelles coproductions avec leurs prises de risques et les conséquences. Pour l’instant, on vend du spectacle clés en main qui coûte le moins cher possible, qu’on achète à coût plateau quoi qu’en dise l’Onda en référence à l’intervention de Fabien Jannelle lors de la première plénière. La pratique des coûts plateau est de plus en plus répandue et ce n’est pas avec cela que vont pouvoir être assumés les coûts salariaux de la production ainsi que le travail de sensibilisation et de transmission de l’équipe inscrite sur un territoire. Si la production comme vous le savez coûte cher, elle n’est pas réalisée toute l’année. Il y aussi le coût du travail de territoire réalisé à l’année. 94

Le Syndicat français des artistes-interprètes (SFA) est un syndicat de défense professionnelle des artistes-interprètes (tous sauf les musiciens et les chefs d’orchestre) affilié la Confédération générale du travail. L’adhésion au SFA confère statutairement à ses adhérents la qualité d’adhérents de la CGT. Sa place au sein de la CGT vient de son adhésion à la Fédération nationale des syndicats du spectacle, de l’audiovisuel, du cinéma et de l’action culturelle CGT (FNSAC). Celle-ci « fédère » l’ensemble des syndicats CGT de la branche professionnelle. http://www.sfa-cgt.fr/

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Créa’Fonds est un collectif d’accompagnement technique et financier de la production dans le domaine du spectacle vivant. http://mutualise.artishoc.com/iddac/media/5/creafonds_site.pdf

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Certes, on répète que des minima sociaux existent. Vous pouvez vous renseigner sur les différentes conventions collectives, les répétitions ont des coûts, sans oublier le travail de territoire. Si un artiste est inscrit sur un territoire, pour que cette implantation soit possible, il est amené à mener tout un travail en dialogue avec la collectivité. Ce travail est encadré par une convention collective. La plupart du temps, soyons clair, nous ne sommes pas payés. Le principe de la mutualisation doit prendre en compte les coûts et les risques impliquant tant les collectivités territoriales qui interviennent seulement sous formes de subventions, ne pouvant être co-producteurs en tant que tels, que les acheteurs, les organisateurs, les techniciens culturels présents sur un territoire. Les budgets votés par les élus doivent prendre en compte le vrai coût des salaires et Pôle Emploi n’aura plus de souci à se faire.

Véronique Chauvois, Chef du service culture à la Région Limousin Je m’étonne de l’intervention de la plateforme interrégionale, ou peut-être ai-je mal compris, sur le fait que les collectivités territoriales ne s’impliquaient pas dans la question de l’interrégionalité. Je pense qu’au contraire, comme il a été indiqué lors de l’atelier concernant la diffusion interrégionale, des dispositifs, auxquels les Régions participent, sont mis en place et prennent en compte les questions d’interrégionalité et de mobilité des artistes. C’est le cas, par exemple, des Rencontres à l’Ouest, dont la Région Limousin est partenaire. Il y aura cinq régions impliquées dans l’édition 2011 : une de plus par rapport à 2010. Les Régions sont impliquées dans le soutien aux artistes, elles ont besoin de cette présence artistique, mais si nous voulons que les artistes vivent, il faut aussi qu’ils sortent de leur territoire d’implantation. Nous sommes entièrement dans cette logique de prise en compte de ces questions de mobilité. J’ajoute que nous associons à nos démarches les services de la Drac, notamment dans les choix faits suite aux appels à projets à destination des équipes artistiques. Il est important que les services de l’Etat soient à nos côtés. Ils ne sont pas partenaires financiers pour l’instant mais ils suivent avec intérêt cette démarche.

Yves Bommenel : Sans parler au nom de mon syndicat, je voudrais essayer de replacer les quatre ateliers de ce matin et le mot « accompagnement » à travers notre expérience de l’accompagnement artistique à travers l’incubateur de l’association qui m’emploie, L’RIM96. Les quatre ateliers sont bien au cœur de notre métier et de nos interrogations. Au départ, si le professionnel de la musique, le diffuseur, le festival, les salles se posaient la question de l’accompagnement, c’était dans le but de compenser les effets du marché. En ce qui nous concerne, nous savons très bien ce que sont le numérique et ses effets : le disque s’est écroulé, la méthode de travail depuis les années 60 s’est arrêtée et par conséquence, les majors ne signent plus que des artistes qui ont déjà émergé. C’est-à-dire rencontré une demande solvable. Trouver le label qui fait la découverte, paye un à trois albums avant que l’artiste trouve son public n’est plus le fonctionnement de ce marché. Nous nous sommes donc posé cette question de l’accompagnement. Après, on s’est posé effectivement la question de la diffusion et du possible interrégional. Dans ce cadre, nous travaillons avec des acteurs culturels de Catalogne, de la Région Midi-Pyrénées, entre autres, pour essayer de trouver une zone géographique qui ne soit pas une zone de chalandise pour étendre le territoire praticable pour les artistes. D’une certaine manière, il est moins compliqué d’aller de l’autre côté des Pyrénées que d’essayer d’arpenter l’Europe entière. Toujours dans cette réflexion, nous constatons que les musiciens attachent une grande importance aux droits d’auteurs. Quand ils arrivent à placer une musique sur un film ou dans la pub, cela leur apporte une viabilité économique c’est-à-dire de l’argent pour créer. Pour finir, le dernier point important est l’interrogation du modèle économique. Nous n’avons pas trouvé ce matin, nous ne trouverons pas plus cet après-midi et nous savons que tout a bougé. Effectivement, on ne pourra pas être dans un service public de la musique. Cependant, nous nous rendons compte au quotidien des conséquences du marché sur le secteur. Il reste à définir ce nouveau modèle et j’espère qu’aujourd’hui, nous allons tracer les pistes au lieu de faire un constat.

Didier Salzgeber : Je vais rebondir sur cette proposition et proposer aux rapporteurs d’apporter leur contribution. Je vous propose de repérer les axes de travail à engager en priorité dans les prochains mois. Nous l’avons vu depuis le début de ce séminaire, cette signature de la charte symbolise un extraordinaire travail de réflexion par les partenaires sociaux et par l’ensemble des professionnels. Il y a une envie de réenclencher un certain nombre de dynamiques sur les prochains mois et les prochaines années. La question est la suivante : à travers les sujets exprimés durant ces deux jours, lequel serait pertinent à mettre en chantier à partir de la semaine prochaine ? Johannes Studinger, entre autres, l’a rappelé hier lors de la plénière : l’expérience des dialogues faite en Languedoc-Roussillon va devoir maintenant être utilisée à d’autres échelles, interrégionales, européennes et internationales. L’intérêt aujourd’hui est la capitalisation du travail réalisé ici en Languedoc-Roussillon, il doit pouvoir maintenant bénéficier de l’apport européen, de l’apport d’autres partenaires de l’espace européen. Cela

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Créé par La Méridionale des spectacles, L-Rim à pour but de repérer et d’accompagner les nouveaux talents régionaux. Réalisée par un comité de pilotage constitué de professionnels, sa sélection 2011 est composée de trois groupes musicaux représentatifs de la vitalité des musiques actuelles en région Languedoc-Roussillon : Le Skeleton Band (34), Reverso Mecanic (34) et Jack of Heart (66). http://asso-mds.org/l-rim/


Séance plénière 2

pourrait apporter des éléments de comparaison qui permettent d’avancer sur les problématiques sur lesquels nous travaillons.

François Bernard : Il me semble que le travail doit porter sur la question de la place de l’individu, qu’il faut replacer au centre d’un processus économique : le spectateur, l’habitant du territoire, les salariés, les sociétaires des entreprises culturelles. Traiter cette question peut faire avancer l’ensemble de la réflexion, nous permettre de nous positionner différemment par rapport à l’Union européenne, voire par rapport aux collectivités locales avec lesquelles nous avons besoin de modifier les conditions de collaboration. Des tentatives de type CréaFonds consistant à mettre autour d’une même table l’ensemble des parties prenantes, y compris celles qui sont fondamentalement concernées, les artistes et les spectateurs, doivent être analysées avec beaucoup d’attention. Dans un premier temps, replacer la personne au centre des valeurs de l’économie culturelle pourrait être un moteur de changement. Dans un deuxième temps, la question de l’accompagnement doit être reconsidérée, en faisant en sorte que l’ensemble des acteurs, et pas uniquement les spécialistes de l’accompagnement, réfléchissent à cette question.

Emmanuel Négrier : Tout d’abord, comme ce sont des dispositifs à la fois différents et très récents, je pense que le premier axe serait une discussion des bilans que chacun peut faire à propos des mérites respectifs de ces systèmes. Ils ont finalement les mêmes objectifs : aider de manière substantielle et durable au lieu de saupoudrer, améliorer la situation professionnelle des artistes et éventuellement aider à la professionnalisation et pour finir, améliorer la diffusion des œuvres. Au final, on tourne autour de ces trois objectifs quelle que soit la modalité. En ce qui me concerne, la première idée est de confronter ces dispositifs à des principes d’intérêt général. Sans parler de service public, Yves Bommenel a raison d’insister sur la question des musiques actuelles soulignée lors de l’atelier 4. L’hétérogénéité résulte de la différence de traitement des divers secteurs dans ces dispositifs de soutien à l’inter-région. Tous les secteurs ne sont pas interrégionaux, interrégionalisables de manière équivalente aujourd’hui. Posons-nous la question : pourquoi un secteur est-il plus interrégionalisé ou aidé à l’interrégional que d’autres ? Car il est un meilleur élève par sa rentabilité ? Par son nombre de dates ? Parce qu’il serait plus « naturellement » inter régional que d’autres, même s’il n’a pas forcément besoin de soutien public ? Ou alors doit-on le soutenir car son économie propre est insuffisante, ou insatisfaisante dans le cadre strict du marché ? Sommes-nous keynésiens, néo-keynésiens, non keynésiens ou néo-libéraux ? Tel est l’enjeu. Le second axe renvoie à la question : comment situer l’action publique ? Il me semble qu’affleurent dans ces logiques la qualité et la finalité publiques des formes de délégation de l’action. On est dans un système d’administration directe, napoléonique, comme disent parfois les Espagnols et les Italiens. Nous avons des systèmes qui agissent directement au profit du secteur contrairement à des pays anglo-saxons qui sont sur des logiques de délégation « at arms’length ». Chacun des systèmes a ses effets pervers : on est en train de faire des délégations implicites ou explicites, d’un pouvoir régional vers une agence, d’une agence vers un réseau plus ou moins formalisé d’entrepreneurs. L’enjeu est que ces entrepreneurs ne soient pas là pour faire leurs affaires, mais en suspendent le cours régulier, pour prendre en charge des missions d’intérêt général à leur niveau. Un réseau de programmateurs, c’est cela. Il y a une piste que les Anglo-saxons appellent le « empowerment97 », c’est-à-dire au lieu d’agir directement, faire agir les autres en fonction de règles définies en commun.

Didier Salzgeber : Je considère que la problématique posée sur les dispositifs interrégionaux renvoie à d’autres types de conventions : les accords que certaines Régions vont signer avec l’Institut français, les projets européens dans lesquels vous vous engagez. Cette logique d’articulation, de régulation et de développement des activités et de l’emploi est une problématique à travailler qui n’est pas simple à mettre en mouvement.

Frédéric Burnier : La première proposition sur le numérique est l’ouverture vers de nouveaux partenariats. Par exemple, le micro sans fil est à l’origine issu d’un projet artistique et scientifique, d’une collaboration entre artistes et scientifiques sur un projet qui a amené à développer cette technologie. A aussi été évoqué l’exemple d’une artiste de Montpellier accueillie en résidence dans une université scientifique pour développer son projet en lien avec des ingénieurs. Cela permet de créer des partenariats inhabituels pour la profession.

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Au plan individuel, Eisen (1994) définit l’empowerment comme la façon par laquelle l’individu accroît ses habiletés favorisant l’estime de soi, la confiance en soi, l’initiative et le contrôle. L’empowerment individuel comprend une dimension transactionnelle qui se joue aussi au plan social et collectif car il implique une relation avec les autres. À cet effet, Katz (1984) le représente comme un paradigme synergique où les personnes sont interreliées, où il y a un partage des ressources et où la collaboration est encouragée. Il demande un effort individuel qui est alimenté par les efforts de collaboration et un changement de l’environnement (Wallerstein & Bernstein, 1988).

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Second point concernant les organismes institutionnels qu’ils soient publics ou spécifiques au milieu du spectacle. Il faut adapter les structures, les modes de soutien et d’accueil à ces nouvelles technologies numériques. Antoine Leclerc l’a rappelé assez souvent : le cinéma et la projection numérique ont besoin d’une aide pour passer à une technologie numérique : certaines salles comme le Théâtre des 13 vents ne rentrent pas dans les cases d’aide prévues par le CNC au ministère de la Culture et de la Communication. Par conséquent, les soutiens ne sont pas suffisamment adaptés. De même, des créations qui ne relèvent ni vraiment de la danse ni du cinéma ne trouvent pas de lieux, de festivals pour s’exposer car nous sommes cloisonnés dans les différentes disciplines artistiques. Donc, il est indispensable de décloisonner et de trouver des modes de soutien, d’accompagnement et d’accueil nécessaires à ces nouvelles créations. Ensuite, former et accompagner les nouveaux créateurs. Ceux qui découvrent la création artistique ou qui développent leur création artistique en utilisant les outils issus du numérique ont besoin cette fois-ci des professionnels pour passer à une autre étape de la création artistique. Former évidemment les techniciens ainsi que les artistes dans le but de favoriser les nouvelles écritures. De nombreux professionnels présents dans le groupe de travail ont souligné que les formations sont basées sur les outils, généralement dispensées par les équipementiers eux-mêmes. Donc on apprend à utiliser la machine, le micro, la table de mixage en omettant de développer le savoir-faire. On en oublie ce qu’est le son, on en oublie ce qu’est d’apprendre l’éducation à l’image. Il faut recentrer la formation, certes en y intégrant les nouvelles technologies, mais en restant sur les métiers. Cela renvoie à une autre attention à porter cette fois-ci à la création : prendre en compte le numérique ne signifie pas oublier la création. C’est se recentrer sur une écriture qui doit prendre en compte la technologie numérique, sans s’effacer devant les nouvelles technologies. Si de nombreux films en 3D aujourd’hui ne reçoivent pas pleinement l’accord du public, c’est parce qu’ils ne sont pas le fruit d’une véritable réflexion sur l’image, sur la réalisation du film, prenant en compte la technologie 3D. Et la tentation peut-être aussi de masquer derrière de belles images, de beaux sons, des effets numériques, une paresse créative. La création ne doit pas s’appauvrir en passant au numérique. Enfin, les producteurs et les institutionnels doivent oser les paris. Cela a été nettement souligné : l’intégration des technologies numériques, de création, avec ces technologies demande des expérimentations parfois lourdes, parfois longues avec un résultat incertain. On a une idée, on pense que la technique peut aider à la réaliser. Parfois même, la technique n’existe pas encore, il va falloir l’inventer. Cela demande un véritable pari. Cela invite les institutionnels et les producteurs à réimposer le pari dans la création artistique.

Valérie Ruche : De manière plus générale et en tant que pilote d’un projet sur le développement de l’emploi et des compétences dans le secteur du spectacle vivant, du cinéma et de l’audiovisuel, nous pensons que les transformations du secteur passeront par sa capacité à développer des synergies et des partenariats. Avec la signature de l’accord cadre de développement de l’emploi et des compétences (Adec) régional du 17 septembre 2010, la Région Languedoc-Roussillon est la seule Région en France à s’engager sur les quatre axes : observatoire, formation, accompagnement des parcours et santé. Contrairement à d’autres Régions où la priorité est donnée à seulement un ou deux axes. À partir de cette Adec régional, nous mobilisons notre capacité à développer des synergies afin de favoriser la sécurisation des parcours, optimiser l’appareil de formation, développer cette mixité par rapport aux besoins dans le but de faciliter ces passerelles et contribuer à l’optimisation des formations proposées. L’enjeu se situe dans le travail que nous menons en accompagnant au quotidien les professionnels et en interaction avec l’ensemble des partenaires associés. Les axes de travail ont été posés, il faut creuser le sillon, avancer, sortir des sentiers battus, écouter les professionnels pour construire avec eux et non pas pour eux des actions concrètes et innovantes et ne pas se contenter d’une rhétorique séduisante. Le travail engagé depuis plusieurs années au niveau local avec l’ensemble des partenaires du secteur est stimulant et encourageant mais également avec l’Afdas et Audiens avec de nouveaux dispositifs pour favoriser la sécurisation des parcours professionnels. Si des choses avancent pour accompagner les salariés du secteur, on peut en revanche émettre quelques réserves sur l’accompagnement des structures qui, pour nombre d’entre elles, survivent et peinent à se stabiliser faute de moyens, de lieux de rencontres et d’interactions pour développer leur activité et leur créativité.

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Séance plénière 2

Didier Salzgeber : J’ai écrit sur les mots en « -ion ». Nous avions : création, diffusion formation, sensibilisation, éducation. Nous sommes en train d’explorer de nouvelles logiques qui tourneraient autour de l’articulation, de la modélisation, d’expérimentation, de sécurisation. Je trouve cela important aujourd’hui de pouvoir investir dans l’activité très concrète des compagnies au quotidien. En même temps, je rappelle qu’il est crucial de garder des espaces à penser pour nous permettre des logiques d’objectivation et de lancer des expérimentations et bien évidemment de favoriser la théorisation des expériences. Pour terminer, j’insisterai sur trois termes : • Des logiques de responsabilisation des partenaires et des acteurs en présence : aujourd’hui, on ne peut plus attendre que le film soit écrit par quelqu’un d’autre, chaque acteur est amené aujourd’hui à se faire entendre dans l’espace politique. • Des logiques de coopération : on l’a vu depuis le début de ce séminaire, la coopération produit des résultats très concrets, des engagements des collectivités à agir en faveur des entreprises, de l’activité et des emplois. • Et je terminerai par la nécessaire négociation qu’il faut poursuivre dans l’espace régional, national et européen. J’espère que ce séminaire aura apporté sa pierre à l’édifice engagé depuis 2004.

Jean-Pierre Wollmer, directeur de Réseau en scène Languedoc-Roussillon Durant ces deux journées, vous avez tracé les lignes de travail pour ces prochaines années. Je souhaite, cependant, revenir sur la Charte d’accompagnement des œuvres et des équipes artistiques professionnelles du spectacle vivant en Languedoc-Roussillon cosignée par les collectivités territoriales, l’Etat, les partenaires sociaux. Aujourd’hui, alors qu’un langage commun a été trouvé, que les bonnes pratiques sont définies, il reste à ouvrir les chantiers qu’ils impliquent. L’important est de savoir comment les acteurs concernés – artistes et opérateurs – vont se les approprier. Des travaux devraient aussi s’engager pour trouver l’articulation, de notre rapport au local, à l’interrégional, au national et à l’européen. Cet élan est à poursuivre afin de développer les outils qui, durant les trois année à venir, nous permettront de nous préparer à la programmation européenne 2014-2020. Enfin, je remercie chaleureusement les équipes organisatrices pour leur disponibilité durant ces deux journées, notamment celle du Théâtre des 13 vents et de son directeur, de son équipe et particulièrement la technique. Également je salue, ici, l’ensemble des intervenants qui ont participé à ce séminaire Acte III et ont contribué à sa réussite et le public, venu en nombre, témoignant de l’intérêt soulevé par ces questions.

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Depuis quelque temps, « l’économie solidaire », « le développement durable », « la mutualisation » sont des termes qui nous entourent au quotidien et dont les médias, les entreprises et maintenant le monde de la culture, se sont emparés. Face aux problématiques d’accès aux financements de la création et de la diffusion des œuvres, des artistes et des structures nouvelles se mobilisent afin de trouver ensemble de nouvelles mesures, de nouvelles structures juridiques, de nouveaux modèles économiques pour asseoir leur activité artistique. Les idées de mutualisation et de coopération posent alors une réelle question lorsqu’elles sont appliquées au monde de la culture : les offres culturelles dans le secteur sont bien supérieures à la demande, et de ce fait une concurrence importante existe entre les acteurs culturels. Est-il vraiment envisageable de miser sur la solidarité et la mutualisation ? N’est-ce pas une fausse solution, une utopie ? Quelles autres solutions pouvons-nous envisager, inventer, pour permettre à la création artistique de poursuivre son développement ? Comment nos voisins européens abordent-ils ces nouvelles donnes économiques ? Au travers de ces questions, cet atelier permettra d’interroger les alternatives au système associatif, qu’elles soient existantes ou à construire. La mutualisation peut-elle aussi permettre de faire des économies ?


atelier 1 Modèles économiques, entre utopie et inventivité Synthèse effectuée par François Bernard, vice-président de la Chambre régionale de l’Économie sociale et solidaire d’Île-de-France.


Le point de départ du débat est de ne pas assimiler mutualisation et réduction des coûts mais de considérer que la réalité du coût doit être intégrée dans sa globalité. Dans ces propos d’ouverture de l’atelier, Nathalie Moureau, économiste et maître de conférences à l’Université Montpellier III a tenté d’expliciter les fondements de l’économie sociale et solidaire, au-delà des effets de mode actuels et des formules toutes faites, car il s’agit d’un grand écart entre la discussion sur la collaboration, la mise en commun et la réflexion éthique et économique. Dans le champ culturel, plus précisément dans le spectacle vivant, le cinéma et l’audiovisuel, nous retrouvons ces deux pôles : • une réflexion sur la collaboration entre individus, la mise en commun de compétences et de ressources, voire la coopération pour la production • une deuxième source de réflexion, comme l’atteste le manifeste de l’Ufisc, qui s’attache davantage aux principes et aux valeurs éthiques de la production. C’est une généralité que de dire que les modèles économiques du cinéma, de l’audiovisuel et du spectacle vivant sont complètement différents. Il faut pour autant l’avoir à l’esprit. La crise générale n’est pas le seul motif d’une nécessaire réflexion sur d’autres façons de voir l’économie et de penser l’économie. Il est nécessaire de réfléchir à la maladie des coûts dans le spectacle vivant où les gains de productivité, par nature, ne sont pas possibles. Tout au long de l’atelier, des questions ont été posées, certaines avec quelques éléments de réponse, d’autres à creuser.

Comment gérer les spécificités de ces secteurs et quelles sont-elles ? Comment envisager la consommation d’un produit dont on ne connaît la qualité qu’une fois consommé ? Doit-on et comment peut-on arriver à faire des économie d’échelle ? Mutualisation et recherche de la performance sont-ils compatibles ? La question de la mutualisation dans le spectacle vivant ne peut pas être uniquement synonyme de gain de productivité. En effet, le temps nécessaire pour réaliser un spectacle aujourd’hui est le même qu’il y a cent ans et l’évolution des technologies n’y change rien (même s’il y a eu des tentatives, comme à l’Opéra de Paris, de rationaliser les coûts). Ce temps est incompressible et c’est peut-être ce qui justifie encore aujourd’hui les subventions publiques. Le modèle économique du spectacle vivant est à envisager comme celui d’une activité de prototype. Or, depuis les vingt dernières années, l’accroissement de l’offre a été important, mais les pratiques culturelles des Français dans le spectacle vivant restent très faibles : 20 % de la population française fréquente les théâtres.

Dans cette recherche de nouveaux modèles économiques, comment associer le public ? Les Associations pour le maintien des alternatives en matière de culture et de création artistique (Amacca) sont-elles des tentatives généralisables ? Préfigurent-elles une organisation sociale alternative dans le secteur culturel ? Sur cette dernière question, quelques précisions semblent nécessaires. Les Amacca sont fondées sur le micro-mécénat de « citoyens-spectateurs-producteurs ». Le micro-mécénat est une pratique collective permettant à un groupe de particuliers de s’allier autour d’un projet culturel commun et de porter sa création et sa diffusion. Le micro-mécénat comme le mécénat individuel peuvent ainsi représenter l’amorce d’une nouvelle approche du financement qui s’inscrit dans une logique d’économie solidaire permettant aux individus de ne plus être seulement consommateurs mais aussi co-créateurs de projets culturels. Les Amacca, constituées en associations loi 1901, et elles-mêmes organisées en micro-réseaux peuvent également solliciter le secteur des entreprises locales ou les collectivités territoriales à partir du moment où leur totale indépendance est respectée. Le débat pose alors la question de savoir si les réseaux d’Amacca pourraient être l’élément de lien entre la culture et la citoyenneté active. L’atelier s’est aussi très largement attardé sur le modèle du fonds d’apport en production Créa’Fonds98 qui réunit des opérateurs et des compagnies dans une approche solidaire de la création associant dès l’origine les questions de production et de diffusion artistique et culturelle. Il a pour ambition de faciliter la mobilisation de coproducteurs et de sécuriser les productions, de réunir l’ensemble des acteurs autour d’une même table sur une logique partagée de travail. Cependant, ce n’est pas sa seule ambition : l’ensemble des équipes accompagnées est partie prenante du projet. Les partenaires décident à la majorité qualifiée si ce projet peut être accompagné, ce qui n’est pas négligeable dans la gouvernance du projet. L’autre point important du projet réside dans l’investissement des équipes elles-mêmes. Chaque partenaire a un ticket d’entrée de 1 500 euros. Le Conseil régional délivre une somme équivalente et il y a une sorte de droit de suite des compagnies qui doivent contribuer à hauteur de 2,5 % pour réalimenter le fonds. 98

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Créa’Fonds est un collectif d’accompagnement technique et financier de la production dans le domaine du spectacle vivant. Créé en Gironde à l’initiative des villes de Canéjan, Libourne,La Teste de Buch, et Villenave d’Ornon, du CREAC de Bègles, l’ELAC - Les Colonnes de Blanquefort, l’Institut Départemental artistique et culturel de la Gironde – l’Iddac et la compagnie Opéra Pagaï. En partenariat avec le Conseil général de la Gironde, Aquitaine Active, le C2RA Aquitaine, le CNAR Financement. Et en collaboration avec l’Office Artistique de la Région Aquitaine, Oara, la Fondation de France, le Crédit Coopératif, la Caisse d’Epargne et le CNAR Culture.


Atelier 1

L’accompagnement dure trois ou quatre années. Ce dispositif est avant tout une occasion pour les partenaires de mieux se connaître, d’envisager les problèmes des petites compagnies : il contribue à une meilleure compréhension des uns et des autres. Xavier Quéron de la Compagnie La Grosse Situation énonce que la présence d’autres partenaires que le Créa’Fonds dans le projet est une exigence. Aquitaine Active réalise un audit. C’est une aide au projet et non une aide aux compagnies. L’accompagnement sur quatre ans implique une responsabilisation des projets sur l’exploitation. Il faut briser le cercle vicieux de la recherche de subventions et tenter des dispositifs qui permettent d’expérimenter la capacité à travailler ensemble. L’exemple de Créa’Fonds pose alors de nouvelles questions : • n’y a-t-il pas encore amalgame entre de réelles démarches de coproduction (engagement solidaire avec partage des déficits et partage des bénéfices) et de simples apports en coproduction ? • Comment faire pour associer des collectivités à la coproduction alors que cela ne leur est juridiquement pas permis ? • Comment éviter la marchandisation ? On parle de prise de risque artistique, mais les anciens coproducteurs ne deviennent-ils pas uniquement des « épiciers » ? Samo Selimovic, de la coopérative Bunker à Ljubljana en Slovénie, a illustré le débat en évoquant la question de la relation aux habitants. Pour lui, la question de l’économie solidaire et sociale est avant tout une question de définition de nouveaux modes de relations entre producteurs et usagers-consommateurs. Bunker est intégrée dans une zone d’environ 1 km². Cette démarche a été entamée en raison de mauvaises relations avec les habitants causées par des nuisances sonores. L’objectif est de créer un nouveau quartier culturel, mais différent de ce que l’on connaît habituellement en Europe. Il s’agit d’éviter le phénomène « d’embourgeoisement » lié souvent au développement culturel d’un quartier, alors que le projet développe à l’inverse un travail de proximité avec les écoles, les personnes âgées, afin de créer des synergies par la mise à disposition de matériel et de locaux. Au démarrage du projet de coopérative, il y avait beaucoup d’idées ; d’où le besoin de réaliser une étude sur le quartier pour évaluer les possibilités du quartier. Deux travaux ont été lancés : une étude assez scientifique et une étude anthropologique afin de mieux envisager le travail entre les artistes et les habitants du quartier. L’équipe a tenté d’avoir une vision plus large par rapport à ces manques en travaillant avec des organisations qui ne soient pas strictement artistiques. Pour mettre en place ce projet, il a été décidé, par exemple, d’élargir l’espace en occupant les parkings et d’organiser des activités dans le quartier. Street échange, échange de biens et de services non monétaires au premier abord, semblait assez complexe. Mais l’objectif était de provoquer un sentiment communautaire dans le quartier et de nouveaux modes de relations. La motivation des habitants était fondée sur l’échange et la participation. Pour l’Union fédérale d’intervention des structures culturelles (Ufisc)99, ce projet pose d’un côté une question de production artistique et de l’autre la question européenne. Autrement dit, ce témoignage conduit à réfléchir sur la production de l’industrie culturelle et de l’autre côté sur une théorie inclusive qui évite l’explosion sociale. Peut-être faut-il apporter une vision intermédiaire qui positionne le citoyen au centre de la production artistique. Cette réflexion sur l’art et la culture ne doit-elle pas être de nouveau précisée au niveau européen ? Cela devrait impacter la relation aux collectivités publiques. Cela pose, au final, la question du projet de société et du projet politique. Caroline Couret a ouvert son intervention en expliquant que l’économie sociale et solidaire fait partie de « l’ADN Catalan », y compris dans les financements abondés par les spectateurs (exemple de parrainage de sièges dans les théâtres). Cette forme de participation est pratiquée avec ferveur et le fait qu’il y ait peu d’aides publiques pour la culture est probablement aussi un moteur. Les fondations ont été des opportunités pour les citoyens, après la dictature, de promouvoir leur créativité. Au sein de Fusic, le constat a été rapidement fait que cette synergie entre plusieurs strates de projets et plusieurs champs économiques pouvait être développée. Fusic a donc créé en 2006 une plateforme de tourisme créatif qui cherche à apporter de nouvelles sources de revenus dans l’économie culturelle. Cette plateforme a rentabilisé des lieux privés ou publics : grâce à cette nouvelle demande, on apporte une nouvelle offre culturelle. La volonté participative renforce la demande et les spectateurs sont formés aux activités culturelles. Un réseau avec deux opérateurs de Paris et Rome, qui ont la même volonté participative et la même optique de développement, a été récemment mis en place afin d’offrir des possibilités semblables ailleurs. Christine Vergnes est intervenue pour rappeler que pour la Région Languedoc-Roussillon, le dialogue social est important. Une collectivité seule n’est rien si elle ne s’appuie pas sur les besoins de la population et des professionnels. Pour elle, Créa’Fonds, par exemple, va dans le sens des soutiens de la Région et de sa politique. La question de la coproduction est une question importante, mais la Région ne peut pas y intervenir directement. L’enjeu est de disposer d’un réseau d’opérateurs ayant à la fois la compétence et les ressources pour développer qualitativement et quantitativement ces pratiques de coproduction qui font cruellement défaut. La Région Languedoc-Roussillon soutient par ailleurs actuellement une étude socio-économique pilotée par l’Association des producteurs et éditeurs de musiques actuelle en Languedoc-Roussillon (Apem-LR). Ce type d’étude est l’espace idéal qui permet de poser la question du modèle économique, en lien avec la question de création artistique.

L’Ufisc représente plus de 2000 structures développant des projets artistiques et culturels qui conjuguent une pluralité d’activités : création et diffusion de spectacles ou d’événements, action culturelle sur un territoire en relation directe avec les populations, création par l’artistique d’un espace public et citoyen, transmission d’un savoir-faire et soutien au développement de la pratique amateur. http://www.ufisc.org/

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L’enjeu est de préciser les termes du débat. L’une des caractéristiques de l’économie sociale et solidaire est cette envie de partager la réflexion avant de produire. Il s’agit de coopérer car la mutualisation n’implique pas uniquement une réflexion sur les moyens. On est là dans la recherche de coopérations, y compris avec des acteurs qui ne sont pas uniquement des « cultureux » mais avec lesquels nous partageons le territoire. Adrien Guillot a replacé ces questions dans le contexte du dispositif Créa’Fonds : l’ensemble des acteurs se sont mobilisés avec la Chambre régionale de l’économie sociale et solidaire, afin de persuader les financeurs que l’économie de la culture était une question de mutualisation des risques. Aujourd’hui,la Région Aquitaine est mobilisée d’une façon très opérationnelle. Il faut inciter les compagnies à exploiter leur création sur plus d’un an et à trouver d’autres financements que le Créa’Fonds. Il s’agit d’un vrai débat qui doit inclure les compagnies. Pour Cyrille Perez, producteur de documentaires, l’économique sert à faire vivre un secteur. Parler de partage, de social et solidaire revient finalement à considérer qu’il y a des professionnels, des conventions collectives, des salaires. Le travail représente un coût et on voit bien que les moyens n’existent pas toujours pour ces productions et pour financer ce travail. La réflexion sur le lien entre pratiques culturelles, politiques culturelles, et modèles économiques issus de l’économie sociale et solidaire a au moins cette vertu de changer le regard. Cet atelier, même s’il n’a pas eu la prétention de répondre à toutes les questions posées, aura permis d’entamer une réflexion qu’il conviendra de partager et d’inscrire dans le cadre de l’ensemble des travaux de concertation menés sur la branche.

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Atelier 1

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atelier 4 La diffusion interrégionale, point d’appui au développement de la circulation et de la visibilité des œuvres du spectacle vivant Synthèse effectuée par Emmanuel Négrier, directeur de recherche au CNRS


La question de la diffusion interrégionale résulte de deux constats contradictoires en apparence : la pertinence du niveau régional, sans laquelle ce type de partenariat n’aurait pas lieu d’être (comme cela a été le cas dans la tradition jacobine française, mais comme c’est toujours le cas dans des pays apparemment très régionalisés, comme l’Espagne) et l’insuffisance de l’échelle régionale, à la fois en termes de valorisation économique, d’appréhension des publics et d’identification artistique. Les intervenants de la table ronde ont précisé la manière dont ils se mouvaient dans ce paradoxe d’une région-appui pour un espace interrégional plus conséquent. Le constat est intéressant : les partenariats s’effectuent à cinq, qu’il s’agisse des cinq régions s’inscrivant dans la Charte de coopération avec l’Onda présentée par Fabien Jannelle, directeur de l’Onda, Jean-Pierre Wollmer, directeur de Réseau en scène Languedoc-Roussillon et Joël Brouch, directeur de l’Office artistique de la Région Aquitaine (Oara). Cinq régions sont de nouveau associées dans le dispositif Rencontres à l’Ouest, présenté par Véronique Chauvois, chef du service Culture au Conseil régional du Limousin ainsi qu’avec le dispositif Quint’Est, détaillé par Anne Tanguy, directrice de la Scène nationale de Besançon, le Théâtre de l’Espace. Tout se passe comme si la coopération interrégionale pour la diffusion connaissait à cette échelle une compétence optimale, afin d’éviter le double piège d’un simple voisinage ou d’une action fédérative illustrée dans sa spécificité par Karine Gloanec-Maurin, présidente de la commission Culture à l’ARF. Dans son introduction aux débats, Anne Quentin, journaliste au magazine La Scène, indiquait que la diffusion interrégionale est une idée à la fois ancienne et un processus fortement renouvelé depuis 2004 par l’influence accrue de la Région comme collectivité territoriale et acteur des politiques culturelles. En tant que telle, elle pose bien sûr la question de la variété des dispositifs et des enjeux à affronter auxquels elle renvoie : l’absence de régulation d’un système que l’on dit inflationniste, et que certains intervenants, dans la salle, n’ont pas hésité à rapprocher d’une crise du jugement artistique (Franck Tenaille, rédacteur en chef du magazine culturel César), la recherche d’un modèle économique adapté aux différents cercles du spectacle, de la création à la diffusion, la valse-hésitation quant à l’expression d’une volonté politique dont l’ingérence possible et l’absence d’implication fut régulièrement critiquée. La diversité des pratiques que recouvre cette notion de coopération interrégionale porte sur plusieurs aspects que nous pouvons détailler : le qui ? ; le quand ? ; le comment ? À propos des acteurs participant à ces coopérations, plusieurs modèles coexistent et posent chacun leur enjeu spécifique. S’il s’agit d’une coopération entre agences, l’enjeu est alors celui de leur pertinence avec la fameuse question de savoir s’il est plus pertinent de coopérer entre proches (des agences qui partagent en amont les mêmes principes, des instruments voisins, des hinterlands artistiques comparables) ou si le véritable enjeu consiste à monter des partenariats entre acteurs à la fois éloignés et complémentaires. Sur ce dernier point, c’est la coopération internationale qui est visée, comme modalité et comme finalité d’une vraie politique de coopération. Les acteurs mixtes de Rencontres à l’Ouest, où l’on trouve à la fois des agences et des programmateurs, ou d’autres formules n’associant que des programmateurs entre eux, posent d’autres enjeux, comme celui de l’objectivation du choix artistique qui leur sera commun (qui choisir ?), ou de savoir jusqu’où on peut, dans ce cadre, mettre entre parenthèses la compétition entre acteurs (souvent euphémisée mais bien réelle) pour s’inscrire dans l’action collective. À propos du temps, il existe des formules très différentes qui présentent des atouts et contraintes spécifiques. Quint’Est, par exemple, s’inscrit dans une coopération très en amont, à deux ans de la réalisation de l’œuvre. On est dans l’espace-temps qui va de la veille à la coproduction avec ses étapes progressives de reconnaissance (présentation du projet, présentation à l’étape du « brouillon », qui permet d’élargir le cercle potentiel de la coproduction). Rencontres à l’Ouest s’adresse à des projets en cours, qui ont dépassé le stade auquel ils sont concernés dans Quint’Est. Quant à la Charte entre l’Onda et les agences, elle concerne par essence des projets qui ont déjà abouti. On constate que le moment choisi est différent. Plus le dispositif se situe en amont de la diffusion, plus il comporte une prise de risque importante nécessitant à la fois d’être assumée et maîtrisée par le partenariat. Plus il est en aval, plus il parie sur l’efficacité de l’action collective au bénéfice d’un parcours déjà reconnu, auquel il s’agit d’offrir un écho, de l’envergure, des perspectives d’enchaînements et de rencontres. Au sujet des instruments, une même diversité concerne nos dispositifs. La Charte Onda procède par le truchement d’un comité artistique, qui a identifié ses grands principes de soutien. Par l’exemple, l’absence d’appui à la diffusion dans la région d’origine (où les agences elles-mêmes ont déployé leurs dispositifs), une aide dans la perspective de parcours professionnels ou une aide plutôt orientée vers les jeunes équipes. Selon Joël Brouch, l’Onda finance le déficit lié à la diffusion interrégionale et participe en cela à la prise de risque aux côtés des agences. Il y a également dans ce partenariat la recherche d’une sorte de moralisation des logiques économiques : refus des stratégies de lieux

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Atelier 4

qui accueillent sans payer les artistes (au prétexte de les « lancer »), affirmation d’une stratégie d’accompagnement durable, au-delà des simples « coups ». La logique de l’appel à projet privilégiée par Rencontres à l’Ouest identifie une pluralité d’aides possibles, de la résidence à la coproduction. L’association de plusieurs types d’acteurs permet aussi de socialiser d’éventuelles « bonnes pratiques » de la diffusion interrégionale. Le point de vue le plus partagé est un parti pris de modestie. Ces aspects de l’aide publique viennent en complément de dispositifs le plus souvent considérés comme essentiels. Selon Jean-Pierre Wollmer, ces aspects touchent aux fonctions de conseil, de centre de ressources, à la coopération entre agences sur d’autres aspects que la stricte diffusion, à la coopération internationale, transfrontalière ou non d’ailleurs. L’aide à la diffusion interrégionale n’est pas considérée comme un véritable outil de régulation. En réalité, le parti pris est ici sans doute excessivement modeste. Bien que partiel, cet outil participe bel et bien à une régulation, à sa manière, d’un secteur qui souffre précisément du contraire : l’élaboration d’une charte, l’objectivation de critères, ou distinguer au sein d’un milieu, sont de la régulation. Et au titre de cette régulation, on se pose toutes les questions de l’action publique en milieu concurrentiel instable : choisir les bons élèves ou encourager les moins avancés ? Privilégier le professionnalisme ou l’émergence ? Préférer un secteur, une esthétique, ou adopter une formule générique ? Le rôle de l’agence est-il de se substituer à l’aide des collectivités territoriales ? Ou en est-il un complément spécifique ? Est-il de se substituer, et jusqu’où, au rôle des programmateurs dans cette perspective ? L’institution est-elle, et jusqu’où, une formule moins efficiente que le réseau ou la détermination individuelle, dont on sait qu’elle règne en maître derrière bien des discours solidaristes en apparence ? Puisque la question de la diffusion interrégionale aborde tous ces enjeux qui sont, avouons-le, à la fois d’intérêt général et de tradition dans le secteur du spectacle vivant, on peut alors en conclure que la diffusion a acquis ses lettres de noblesse dans le cadre français d’une république décentralisée, et au-delà.

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Biographies des intervenants


Jack Aubert, juriste de formation, assure depuis 2007 la fonction de responsable des affaires sociales de la Fédération des Industries du Cinéma, de l’audiovisuel et du multimédia (Ficam). À côté de ses missions traditionnelles (dialogue social, négociation conventionnelle), il coordonne les actions de la Fédération au sein de la plate-forme des industries techniques, structure créée pour faire face aux conséquences des mutations technologiques sur l’emploi (numérisation de la filière, dématérialisation des supports de diffusion). Il est par ailleurs, depuis 2010, président de la Commission paritaire nationale pour l’emploi et la formation de l’audiovisuel (CPNEF AV). Philippe Baudelot est consultant en arts numériques, délégué de Digital Performances & Cultures. Il intervient auprès de structures et événements dédiés aux arts et spectacles numériques (Bains numériques, Printemps de la Danse de Carthage...). Il accompagne plusieurs projets dont le programme européen MADE et Gaw Lab (Dakar) et des artistes (Cie Mulleras, Cie Skalen, Cie Corps Indice, Cie Mobilis-Immobilis, Étienne Rey...). Il est conférencier et intervenant (Agecif, Chorégraphes associés, Institut français de Dakar, Kawenga, Mes de Danzas à Séville...). Membre du comité de pilotage du Réseau arts numériques / RAN, il l’est aussi du réseau ARPAN (Arts numériques en région PACA).

Jean-Christophe Bouhier : attiré par le spectacle, son aventure démarre au sein d’un groupe de musique amateur en Île-de-France. Manager, il développe au fil du temps des compétences et un réseau, puis rejoint une structure de production de spectacles où il occupe un poste de tourneur. Les années suivantes l’amènent à créer son association d’entrepreneur de spectacles. L’économie fragile de ce projet l’oblige à réorienter son parcours, la proposition d’un ancien collaborateur de rejoindre une production audiovisuelle lui permettant de rebondir dans le cinéma, la télévision, la publicité... Des déménagements successifs ayant pointé du doigt les difficultés à vendre ce type de profil, il rejoint une formation diplômante (Master 2 recherche Arts du spectacle) qui lui permet de valoriser et d’améliorer ses compétences.

François Bernard

est réalisateur multimédia et accompagnateur d’activité ou d’entreprise d’économie solidaire. Il est également vice-président de la Chambre régionale de l’économie sociale et solidaire d’Île-de-France où il représente Acteurs et Collectifs pour l’économie solidaire en Île-de-France, structure territoriale du Mouvement de l’économie solidaire (MES), dont il est administrateur. Il est secrétaire-adjoint de l’Atelier, Centre de ressources de l’économie sociale et solidaire d’Île-de-France et chargé de mission d’Alice Coopératif Concept et administrateur de la compagnie Théâtre du Fil qui travaille avec des jeunes gens de 16 à 25 ans ouverts à une pratique d’animation ou d’expression artistique.

Philippe Berthelot est directeur de la Fédurok depuis mars 1999, membre fondateur de l’Union fédérale d’intervention des structures culturelles (Ufisc) qu’il préside depuis septembre 2009. Fondateur d’AGI-SON, il est aussi secrétaire national adjoint fondateur du SMA (Syndicat national des petites et moyennes structure non lucratives de musiques actuelles), membre de la Commission paritaire nationale pour l’emploi et la formation du spectacle vivant (CPNEF SV), président de la commission paritaire « musique » de l’Afdas, administrateur du Fonjep et du Centre national de variétés, de la chanson et du jazz (CNV). Joël Brouch est diplômé en culture, anthropologie sociale et enquête sociale approfondie. Il dirige le Théâtre GeorgesLeygues de Villeneuve-sur-Lot (47) avant de créer et diriger la direction de l’action culturelle et du développement territorial de l’Opéra national de Bordeaux. Il prend la direction de l’Office artistique de la Région Aquitaine en 2004. À partir d’un lieu permanent de résidences rémunérées, le Molière Scène d’Aquitaine, il multiplie les initiatives pour favoriser l’épanouissement des artistes aquitains. Coproduction, bourse d’aide à l’écriture dramatique et aide à la reprise structurent son action qui s’enrichit d’un vaste dispositif d’aide à la diffusion. Il crée notamment le dispositif « Ces théâtres qui nous ressemblent », avec une vingtaine de théâtres des trois régions limitrophes à l’Aquitaine pour favoriser la circulation des artistes aquitains et invente la Charte de diffusion interrégionale avec Réseau en scène Languedoc-Roussillon, l’Odia Normandie, Arcadi et l’Onda.

Pascal Brunet est directeur de Relais Culture Europe, point de contact pour le programme Culture 2000 de l’Union européenne, qui tend à favoriser la coopération et les échanges culturels en Europe. Ce centre de ressources apporte soutien, information et orientation à l’ensemble des professionnels du champ culturel français. Pascal Brunet a occupé différents postes à responsabilités dans le domaine du spectacle vivant contemporain : directeur administratif du Centre chorégraphique national de Rennes et de Bretagne, co-directeur d’Isadora, projet de développement chorégraphique, secrétaire général du Groupe de musique expérimentale de Bourges... Il est également membre fondateur du DBM, réseau de coopération euro-méditerranéen, et membre de plusieurs réseaux et forums européens, IETM, FEMEC.

Frédéric Burnier est chef du service de l’inspection au CNC depuis le 1er novembre 2010. Diplômé de l’Institut d’Études politiques de Bordeaux, Frédéric Burnier a intégré le corps de l’inspection du travail en 1999. Inspecteur du travail dans les Hautes-Pyrénées de 2000 à 2004, il a œuvré, en particulier, à l’amélioration des conditions de travail et à la lutte contre le travail illégal. Depuis 2005, il était détaché auprès de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité. Coordonnateur des enquêtes, il était, en outre, en charge du renforcement des collaborations avec les institutions publiques (inspection du travail, justice...), associations ou organisations syndicales. Enfin, il a présidé de 2004 à 2006 la commission mixte paritaire des entreprises artistiques et culturelles.

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Biographies des intervenants

Pascal Charousset est représentant du Syndicat national des prestataires de l’audiovisuel scénique et événementiel (Synpase) en Languedoc-Roussillon. Titulaire d’un DUT de mesures physique, il s’engage dans une carrière d’ingénieur du son à la croisée des chemins entre le spectacle vivant, la télévision et l’événementiel. Il est, depuis juin 2010, directeur de l’agence Texen Languedoc-Roussillon, entreprise prestataire de services et de conseils en logistique dans le domaine du spectacle vivant, de l’audiovisuel et de l’événementiel. Véronique Chauvois est chef de service culture à la Région Limousin. Elle fut responsable du secteur spectacle vivant dans cette même structure. Avant de travailler à la Région Limousin, Véronique Chauvois a travaillé dans les centres culturels municipaux de la Ville de Limoges, où elle était animatrice chargée de l’organisation et du suivi d’une partie des ateliers et stages de pratiques artistiques et culturelles. Elle a été ensuite chargée d’une partie de la programmation jeune public, puis tout public dans ces mêmes centres culturels.

Josianne Collerais est présidente de la Commission culture, patrimoine, cultures occitanes et catalanes au Conseil régional Languedoc-Roussillon. Caroline Couret, responsable du réseau Creative Tourism Network, est également depuis 2005 coordinatrice de Barcelone Tourisme Créatif – programme dont l’objectif est de promouvoir le tourisme créatif à Barcelone et en Catalogne – qu’elle a présenté lors de conférences dans divers pays et autour duquel elle a écrit plusieurs articles. Ces deux programmes sont impulsés par la Fundació Societat i Cultura (Fusic), basée à Barcelone, d’où elle assure depuis 2001 la coordination de divers projets internationaux. Elle a auparavant participé à l’organisation de manifestations en France, au Mexique et aux Etats-Unis, où elle continue à collaborer comme consultante auprès du International Creative Tourism Associates (USA). Didier Deschamps est Directeur régional des affaires culturelles (Drac) de la Région Languedoc-Roussillon. Grégory Diguet est à l’initiative de Bipolar, un bureau de production et de diffusion en art (Montpellier). Bipolar privilégie les écritures interdisciplinaires : installations, projets sonores, créations scéniques, performances... Les artistes accompagnés ont tous en commun d’intégrer la technologie dans une démarche de création innovante. Bipolar accompagne aussi bien des jeunes talents que des artistes plus confirmés pour le développement et la diffusion de leurs projets, en France et à l’international. Solange Dondi, après avoir dirigé des Maisons des Jeunes et de la Culture, devient secrétaire générale de la Maison de la Culture de Grenoble, puis de la Scène nationale d’Annecy. Conseillère pour la danse à l’Onda de 1995 à 2008, elle est depuis 2010 présidente de Réseau en scène Languedoc-Roussillon. Elle est également présidente de l’association Les Amis du Centre de développement chorégraphique de “La Termitière” de Ouagadougou.

Patrick Ferrier a occupé principalement les fonctions de régisseur au Théâtre national de la Colline et de secrétaire général du Synptac-CGT. En 2008, il devient directeur général du Centre de formation professionnelle aux techniques du spectacle (CFPTS) et du CFA du spectacle vivant et de l’audiovisuel.

Jean-Paul Fourmentraux, sociologue, est maître de conférences à l’université de Lille 3, UFR Arts et Culture. Il est également chercheur associé au Centre d’études sociologiques et politiques Raymond Aron, École des hautes études en sciences sociales de Paris (EHESS). Il mène aujourd’hui des recherches comparatives sur les interfaces entre création artistique, recherche technologique et innovation sociale, socio-économie de l’innovation et de l’Internet, sociologie de la communication et des médias, sociologie de la culture et du travail artistique, anthropologie des techniques et de leurs usages. Il est l’auteur de Art et Internet. Les nouvelles figures de la création (Éditions du CNRS, Paris, 2005, 2010). Il poursuit aujourd’hui ses travaux dans le cadre d’un contrat de l’Agence nationale de recherche (ANR) intitulé « PRATICABLES - Dispositifs artistiques : les mises en œuvre du spectateur » (Dalmes, 2009-2011).

Jean-François Guéganno est, depuis septembre 2010, directeur du Département développement et partenariats à l’Institut français. Auparavant, il fut durant trois ans attaché culturel auprès de l’Ambassade d’Argentine (Buenos-Aires). Il a aussi été successivement responsable du mécénat et du partenariat à Culturesfrance (ex Association française d’action artistique-afaa), après avoir été Directeur de l’Alliance française de La Paz (Bolivie). Adrien Guillot est actuellement chargé de mission à la mairie de Périgueux et travaille depuis juillet 2004 à la construction d’une politique territoriale de développement de l’art dans l’espace public en Poitou-Charentes associant les collectivités, les professionnels de l’aménagement et les professionnels de la culture. Il a été responsable de la préfiguration du Centre national des arts de la rue à Niort jusqu’en 2010. Le Temps des arts de la rue en Poitou-Charentes 2006 – 2009 en fut la traduction politique et technique. Diplômé d’un Master 2 Développement culturel de la ville sur le thème du développement urbain et des transformations culturelles, il a collaboré avec des équipes artistiques comme Ilotopie et Ici-Même (Paris), évalué la dimension culturelle des contrats de ville 2000-2006, programmé des spectacles à l’Institut français de Port-au-Prince en Haïti et communiqué sur la réouverture du Musée d’art et d’industrie de Roubaix-La Piscine.

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Karine Gloanec-Maurin est présidente de la Fédération nationale des collectivités territoriales pour la culture (FNCC), membre du Conseil des collectivités territoriales pour le développement culturel, présidente de la Commission culture de l’ARF et présidente de la sous-commission Education et Formation de l’ARE. Diplômée en Sciences politiques, Karine Gloanec-Maurin a commencé son parcours professionnel comme artiste dramatique puis comme directrice administrative. Elle crée plusieurs structures culturelles professionnelles et dirige de 1994 à 2004 l’Hectare, bureau de production devenu Scène conventionnée de Vendôme. Elle est aujourd’hui cadre dans le secteur culturel et dispense des formations (Greta, CFPTS). Elle a été membre du Conseil économique et social de la région Centre de 2007 à 2010. Élue depuis 1995 à Saint-Agil (41), elle est aujourd’hui première maire-adjointe chargée des finances et de la culture et vice-présidente du Conseil régional du Centre en charge de l’Europe, des politiques européennes et de l’interrégionalité. Laurent Hébert est délégué général de la Commission supérieure technique de l’image et du son (CST). Il a d’abord été réalisateur de publicité et de films institutionnels, puis producteur, distributeur de films de télévision et de longs métrages en salles de cinéma et scénariste. En 1996, la société civile de perception et de répartition des auteurs, réalisateurs et producteurs indépendants lui confie la direction et la programmation de ses salles de cinémas évènementielles à Paris : Le Cinéma des Cinéastes. En 2006, le réalisateur et directeur de la photographie, Pierre-William Glenn, président de la CST, fait appel à lui comme délégué général de l’association. Il s’agit de préparer la CST à la révolution numérique afin que les professionnels français du cinéma et de l’audiovisuel abordent ces nouvelles technologies comme une occasion de nouveaux développements, dans un esprit d’innovation et de respect des savoir-faire et de la qualité des œuvres.

Georges-François Hirsch, directeur général de la Création artistique, ministère de la Culture et de la Communication. Jean Hurstel

est le président-fondateur du réseau culturel européen Banlieues d’Europe qui fédère les projets artistiques dans les quartiers populaires du continent. Formé à l’École nationale supérieure d’art dramatique de Strasbourg (TNS), il fonde le théâtre universitaire en même temps qu’il effectue des études de philosophie. Passionné par la question de la relation au public et de l’insertion du théâtre dans la cité, il poursuit plusieurs expérimentations à l’usine Alstom à Belfort et dans les quartiers ouvriers de Montbéliard Peugeot dans le Bassin Houiller Lorrain. De 1992 à 2003, il dirige la Laiterie – Centre européen de la jeune création à Strasbourg. Depuis le 1er juin 2006, Jean Hurstel est président des Halles de Schaerbeek à Bruxelles, lieu du cirque contemporain, de la performance et de la danse, projet qui met en tension et en relation une programmation internationale et une dynamique de quartier. Il est l’auteur du livre Réenchanter la ville, voyage dans dix villes culturelles européennes paru en 2006.

Fabien Jannelle est directeur de l’Office national de diffusion artistique (Onda) depuis 1995. Cofondateur avec Michel Crespin de Lieux Publics, Centre national des arts de la rue (1982), il a été le directeur de La Ferme du Buisson - Scène nationale de Marne-la-Vallée (1980–1995). À l’origine de la création et du développement de nombreuses initiatives favorisant les échanges internationaux et la diffusion, Fabien Jannelle est notamment fondateur d’IRIS – Association sud-européenne pour la création contemporaine (2004), réunissant des directeurs de théâtres et de festivals en France, Italie, Espagne et Portugal – ainsi que du Fonds Roberto Cimetta, fonds de Mobilité pour les artistes et les professionnels de la Méditerranée, en 1998. Il est membre fondateur de la plate-forme européenne SPACE – pour la diffusion du spectacle vivant en Europe.

Dirk Korell

est directeur du bureau de production Camin Aktion à Montpellier qui œuvre pour le développement chorégraphique, la création, la diffusion et la coopération sur les contextes régional, transrégional, euro-méditerranéen et international. Il étudie les Sciences appliquées du théâtre à la Justus-Liebig-Universität Gießen puis au Département théâtre de l’Université Paris 8, Vincennes-Saint-Denis en 1990. En 1998, il fonde l’association Moov’n Aktion qui rejoint le réseau international du spectacle vivant IETM en 2004. Deux ans plus tard, Dirk Korell y intègre le conseil d’administration dont il est membre jusqu’au printemps 2011.

Antoine Leclerc est délégué général du festival cinéma d’Alès Itinérances. Il est l’auteur de Itinérances paru en 2006. Philippe Le Guern est professeur à l’Université d’Avignon, enseigne la sociologie de la culture et des médias. Il est membre du Centre Norbert Élias (anthropologie, communication, histoire, sociologie - EHESS-CNRS-UAPV). Il anime un programme financé par l’agence nationale de la recherche sur « le travail artistique en régime numérique ». Il a récemment dirigé (avec Hugh Dauncey) l’ouvrage Stéréo, sociologie comparée des musiques populaires France/ Grande-Bretagne. Il travaille actuellement sur le lien entre cultures sonores, technologies numériques et théories critiques de la modernité... Il est l’auteur de l’article « Les monteurs passent au numérique : révolution d’un métier et tentatives de régulation » (in Les ressorts de la mobilisation au travail, Jean-Pierre Durand et Danièle Linhart (dir.), Octarès Éditions, Toulouse, 2004).

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Biographies des intervenants

Nicolas Marc est fondateur et éditeur de La Scène, le magazine des professionnels du spectacle et des acteurs de la vie culturelle, de La Lettre du Spectacle, du Jurisculture, de CultureMédias et du Piccolo. Il publie également des guides et ouvrages spécialisés dans les domaines du spectacle et de la culture. Il dirige les Biennales Internationales du Spectacle (BIS), qui ont lieu à Nantes (10 000 participants en 2010). Il a également créé ACT’, organisme de formations culturelles et le festival Petits et Grands. Il est l’auteur de plusieurs ouvrages dans le domaine culturel dont 800 logos, spectacle vivant paru en 2010. Philippe Maurizi est producteur de spectacles et du festival Quand je pense à Fernande à Sète. Il est consultant musical pour plusieurs films, dont De Vrais mensonges de Pierre Salvadori avec Audrey Tautou, Nathalie Baye, Sami Bouajila, tourné a Sète. Producteur de concerts dans le champ des musiques actuelles depuis des années, il est aussi conseiller musical pour le Théatre sortieOuest, le festival des Nuits del Catet, ou le Printemps des Comédiens, où l’essentiel de la programmation musicale est dédié au jazz. Nathalie Moureau est maître de conférences en sciences économiques et spécialisée en économie de la culture. Elle enseigne à l’Université Paul-Valéry Montpellier 3 et est membre du laboratoire montpelliérain d’économie théorique et appliquée (unité mixte de recherche qui associe plusieurs établissements supérieurs). Elle a effectué plusieurs recherches pour le ministère de la Culture, la dernière consacrée à la diffusion de l’art contemporain en région ayant été récemment publiée (disponible sur le site du Deps). Elle est également co-auteure avec Dorothée Rivaud-Danset de L’incertitude dans les théories économiques (La Découverte, « Repères ») en 2004 et de Le marché de l’art contemporain avec Dominique Sagot-Duvauroux (La Découverte « Repères ») en 2010. Emmanuel Négrier est directeur de recherches au CNRS au Centre d’Etudes politiques de l’Europe latine (Cepel – Université de Montpellier). Ses recherches actuelles concernent la comparaison des politiques culturelles, les changements d’échelle qui les affectent à l’heure de la décentralisation et de l’intercommunalité, les publics de la culture et, en particulier, des festivals. Parmi ses récents ouvrages : La fin des cultures nationales (co-direction, Éditions La Découverte, Paris, 2008), Culture : le temps de l’intercommunalité (co-direction, Éditions de l’OPC, Grenoble, 2008), Les publics des festivals (dir., Éditions Michel de Maule, Paris, 2010), Montpellier, la ville inventée (co-direction, Éditions Parenthèses, Marseille, 2010).

Jean-François Pujol est comédien. Il partage sont temps entre Toulouse et Paris comme secrétaire général-adjoint de la CGT Spectacle. Il est également fortement impliqué sur les questions d’emploi et de formation au sein de la CPNEF SV dont il est vice-président. Anne Quentin est journaliste spécialisée dans les politiques culturelles à La Scène et critique dramatique (Cahiers de la Comédie Française, CNDP, Stradda). Elle est également responsable de formation pour ACT’ Formation (formation professionnelle pour les acteurs du spectacle vivant), enseignante en politique culturelle (CELSA, Paris IV-Sorbonne et Université du Mans) et auteure d’ouvrages sur le cirque contemporain (sur l’artiste de cirque Johann Le Guillerm et Furies, 20 ans de Turbulence(s)). Elle est membre de la Commission Beaumarchais pour les aides à l’écriture « cirque » et expert Drac Île-de-France, commission théâtre. Elle anime de très nombreux débats sur les questions d’actualité culturelle et a écrit Un cirque d’un nouveau genre (Stradda, Hors les Murs) en juillet 2011. Xavier Quéron, chargé de production, vit et travaille à Bordeaux. Il est titulaire d’un Master 2 Droit et administration des établissements culturels. Après quelques années comme chargé de communication au Glob Théâtre (scène contemporaine), il exécute diverses missions (principalement concernant l’organisation et la communication) pour les opérateurs culturels et les artistes du territoire girondin en parallèle d’une activité d’enseignement. Depuis 2008, il coordonne le collectif La Grosse Situation (spectacle La Conserverie de Vieux).

Sébastien Ramirez, danseur autodidacte issu de la culture hip hop, est un bboy de renom, ceci au niveau international. Aujourd’hui, il s’affranchit progressivement d’une labellisation pour développer son propre langage de danse, sa propre esthétique scénique. À Perpignan, il dirige la compagnie Clash 66, avec laquelle il signe le duo Monchichi co-dirigé par Hyun-Jung Wang (Berlin), une coproduction franco-allemande. Naviguant aisément entre le régional et l’international, il développe des liens entre le Languedoc-Roussillon et la scène de danse d’autres pays, notamment en Allemagne, en Scandinavie et en Asie du Sud-Est.

Valérie Ruche a été directrice du CIBC Languedoc-Roussillon jusqu’en 2011. Les CIBC sont engagés auprès des professionnels du secteur en appui de la Direccte et en partenariat avec l’Aract et le CRGE sur la conduite d’actions concernant la gestion des emplois et des compétences et la création d’un outil « Passeport compétences » pour la valorisation des compétences des professionnels du secteur spectacle vivant, audiovisuel et cinéma.

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Didier Salzgeber est coopérateur culturel. Après plusieurs années d’expérience dans le secteur culturel et artistique, il crée en 1992 l’association Arteca (Lorraine), qui devient en 2003 un EPCC, Centre de ressources de la culture, qu’il dirige jusqu’en février 2010. À ce titre, il anime de très nombreux projets de coopération, en particulier autour du développement des secteurs créatifs, plus largement sur l’observation de la culture, l’économie, l’emploi et la formation ; et sur les coopérations culturelles professionnelles, territoriales et européennes. Aujourd’hui, il continue à apporter une contribution aux débats publics sur la place des arts et de la culture, et à l’accompagnement de nouveaux projets. Publications collectives : Observer la culture en région (2003), EPCC : création et fonctionnement : vade-mecum pour mieux comprendre les établissements publics de coopération culturelle (Territorial Éditions, 2011). Samo Selimovic, diplômé en sciences politiques, est le plus jeune employé de Bunker où il s’occupe du projet européen d’innovation culturelle appelé Sostenuto. Son travail consiste à organiser des rencontres participatives reliées au projet Sostenuto. Il développe également la recherche de partenariats locaux et des processus de production pour le collectif artistique Betontac. Il participe également en tant que maître de jeu au projet « Future City Game » mis en place par le conseil britannique dans le cadre de son programme sur « les villes créatives ». (Le « Future City Game » est un projet de création participatif créé dans le but de générer des idées pour améliorer la qualité de vie dans les milieux urbains). Alain Soussen est chef du service mutations économiques à la Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (Direccte) Languedoc-Roussillon. Johannes Studinger est directeur d’UniMei Global Union depuis août 2009, organisation représentant 140 syndicats et guildes, dans les médias, les arts et le spectacle vivant à travers le monde. Avant de rejoindre le mouvement syndical international en 1999, il a travaillé pour le Secrétariat général de la Commission européenne et Graham Watson, membre du Parlement européen, ainsi que pour la Fondation Friedrich Naumann.

Anne Tanguy est directrice de la Scène nationale de Besançon. Diplômée de l’Institut de géoarchitecture (Brest), elle travaille à partir de 1998 à la promotion d’artistes à l’international et à la coordination de réseaux de théâtres ainsi que des premiers échanges inter-réseaux (groupe des 20 Île-de-France, Rhône-Alpes et Le Vivier en Normandie). Secrétaire générale de la Scène nationale d’Alençon de 2001 à 2006, puis directrice du Théâtre, Scène conventionnée d’Auxerre depuis 2006, elle est également depuis 2010 présidente du réseau Quint’Est qui a pour objet notamment le développement, la promotion et la circulation des œuvres du spectacle vivant entre les cinq régions composant le Grand Est. Xavier Timmel est consultant pour Harmoniques. Durant ses études d’architecture, il découvre la danse contemporaine et le théâtre – qu’il étudie entre autres avec A. Nikolaïs, S. Buirge, A.Vitez, A. Voutsinas... Il fonde la compagnie Après l’Orage et dans le même temps travaille avec divers metteurs en scène et chorégraphes. Depuis une douzaine d’années, il exerce une activité de consultant en direction des professionnels du spectacle pour divers organismes, lieux-ressources et institutions. Il travaille pour la réalisation de bilans de compétences (Afdas) et d’entretiens de validation de projet (Audiens/Fonds de professionnalisation). Il contribue également à divers dispositifs paritaires et institutionnels (auprès du ministère de la Culture et de la Communication et de la CPNEF-SV notamment). Il réalise des formations sur l’environnement social du spectacle et les droits de la propriété littéraire et artistique. Membre du conseil d’administration de l’Adami depuis 1988, il est l’actuel président de la Commission formation. Jean-Marc Urrea est directeur délégué du Centre chorégraphique national de Montpellier Languedoc-Roussillon dirigé par la chorégraphe Mathilde Monnier et président de Languedoc-Roussillon Cinéma depuis la création de la structure en 2006. Membre du Conseil national et délégué en région du syndicat national des entreprises artistiques et culturelles (Syndeac), il conduit, en son nom, les réflexions et négociations nécessaires à l’organisation du travail dans la branche du spectacle vivant en région. Il est aussi impliqué depuis de nombreuses années dans le développement de projets de coopération culturelle internationale.

Christine Vergnes est directrice-adjointe de la culture et du patrimoine au Conseil régional Languedoc-Roussillon. Jean-Pierre Wollmer est directeur de Réseau en scène Languedoc-Roussillon depuis 2007. Une formation en art dramatique le conduit à la mise en scène et à la direction artistique de plusieurs projets et compagnies de 1992 à 2001. Co-fondateur du Théâtre du Périscope à Nîmes qu’il dirige de 1999 à 2006, son entrée dans le domaine des politiques culturelles publiques est récente. En tant que directeur de Réseau en scène Languedoc-Roussillon, il a notamment contribué à la mise en place des dispositifs d’accompagnement à la diffusion, points forts de l’association. Sur le plan interrégional et transfrontalier, il associe Réseau en scène au Midem, à Quand les régions s’en mêlent, à la Charte de diffusion interrégionale co-signée par l’Onda, l’Odia Normandie, Arcadi, l’Oara et positionne l’association dans le développement de projets européens, notamment par le projet Convivencia Pyrénées Méditerranée ou l’adhésion à l’IETM.

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Biographies des intervenants

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Lexique des sigles utilisĂŠs


Adec : Accord pour le développement de l’emploi et des compétences ADPF : Association pour le développement de la pensée française Afdas : Assurance formation des activités du spectacle Afaa : Association française d’action artistique Apap : Association of perfoming arts presenters (New-York) Aract : Agence régionale pour l’amélioration des conditions de travail Ardec : Association régionale pour le développement des entreprises culturelles ARF : Association des Régions de France ARP : Société civile des auteurs-réalisateurs-producteurs CCF : Centres culturels français CCN : Centre chorégraphique national CIBC : Centre interinstitutionnel de bilans de compétences CGT : Confédération générale du travail Cif : Congé individuel de formation Cinars : Conférence internationale des arts de la scène (Montréal) Coreps : Comité régional des professions du spectacle CPER : Contrat de projet Etat-Région CPNEF : Commission paritaire nationale emploi-formation CPNEF-AV : Commission paritaire nationale emploi-formation audiovisuel CPNEF-SV : Commission paritaire nationale emploi-formation spectacle vivant CNC : Centre national du cinéma et de l’image animée CNRS : Centre national de la recherche scientifique CNT : Centre national du théâtre CST : CST Commission supérieure technique de l’image et du son Datar Délégation interministérielle à l’aménagement du territoire et à l’attractivité régionale Dem : Dance Europe mouvement Deps : Département des études de la prospective et des statistiques DGCID : Direction générale de la coopération internationale et du développement Direccte : Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi DIV : Délégation interministérielle à la ville Drac : Direction régionale des affaires culturelles

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Lexique des sigles utilisés

Epic : Établissement public à caractère industriel et commercial Fim : Fédération internationale des musiciens FIA : Fédération internationale des artistes FNCC : Fédération nationale des collectivités territoriales pour la culture FNSAC : Fédération nationale des syndicats du spectacle de l’audiovisuel et de l’action culturelle GPEC : Gestion prévisionnelle de l’emploi et des compétences IETM : Informal european theatre meeting Ficam : Fédération des industries du cinéma, de l’audiovisuel et du multimédia Lolf : Loi organique relative aux lois de finances Midem : Marché international de la musique Oara : Office artistique de la Région Aquitaine OMC : Organisation mondiale du commerce Onda : Office national de diffusion artistique Pams : Performing arts market of Singapore et Performing arts market of Séoul PFI : Plate-forme interrégionale d’échange et de coopération pour le développement culturel Real : Réalisateurs et auteurs du Languedoc-Roussillon SACD : Société des auteurs et compositeurs dramatiques SFA : Syndicat français des artistes-interprètes Synavi : Syndicat national des arts vivants Synpase : Syndicat national des prestataires de l’audiovisuel scénique et évènementiel Synptac : Syndicat national des professionnels du théâtre et des activités culturelles SMA : Syndicat des musiques actuelles TNB : Théâtre national de Bretagne Tpam : Tokyo performing arts market TPE : Très petites entreprises Unesco : Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture Uni-Mei : Global union Media, Entertainement & Arts

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LISTE DES PARTICIPANTS


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Nom

Prénom

Structure

Ville

ACQUAVIVA

Fabienne

Réseau Culturel du Lauragais

Castelnaudary

ADES

Marie-Christine

CFDT F3C

AKUTSA

André

Ami - Aide aux musiques innovatrices

Marseille

ALADREN

Stéphane

Cie Tintamarre et Boudeficelle

Narbonne

ALBALAT

Gilles

Ardec LR

Montpellier

AMARU

Laurence

ANDREE

Suzanne

Communauté de communes Vivre en Cévennes

Rousson

ANDRIANTSIMAHAVANDY

Sylvia

Arcade PACA

Aix-en-Provence

ANDRIEU

Valérie

La Méridionale des spectacles

Montpellier

ANDRIEU

Marc

Ville de Villeneuve-lez-Avignon

Villeneuve-lez-Avignon

ANTONINI

Eva

Arcade PACA

Aix-en-Provence

ANTUNES

Marie

Opéra de Montpellier

Montpellier

ARGAUD

Mathieu

illusion & macadam, un goût d’illusion

Montpellier

ARSAC

Vanessa

DAPC M2

ASTESANO

Valérie

Ville de Montpellier

Montpellier

AUBERT

Jack

CPNEF-AV

Paris

AWLASEWICZ

Agata

Vialas

AYROLLES

Roselyne

Conseil général des Pyrénées-Orientales

Perpignan

BAGOURD-ABHERVE

Gaëlle

Spectacle vivant en Bretagne

Rennes

BALAND

Claude

Région Languedoc-Roussillon

Montpellier

BARAIZE

François

Obster

Montpellier

BARBUT

Christophe

Cie Miso74

La Grand-Combe

BARTHES

Patrice

Patrice Barthès & cie

Montpellier

BASCOU

Jacques

Communauté d'agglomération Le Grand Narbonne

Narbonne

BASTIDE

Ingrid

Rose et les compagnies

Teyran

BAUDELOT

Philippe

Ran - Réseau art numérique

BAUMANN

Céline

BAUMLIN

Sylvain

T.a.c.

Montpellier

BEAUMONT

Brigitte

Association Asphodèles

Saint-André-de-Sangonis

BEDECARRATS

Thomas

Cie Mœbius

Montpellier

BEGUIN

François

Office de Développement Culturel

Villeneuve-lez-Avignon

BELLIARD

Anne

Cie Internationale Alligator - CIA

Villeneuve-les-Maguelone

BENARIBA

Fatia

Musique et danse en Lorraine

BENOIST

Christian

Montpellier

Pont-à-Mousson Montpellier

BERAUDY

Armelle

Ami - Aide aux musiques innovatrices

Marseille

BERGER

Stéphane

Théâtre de l’Archipel

Perpignan

BERNARD

Claire

ARF - Association des Régions de France

Paris

BERNARD

François

Cress d’Ile-de-France

BERNOS

Marie

Racont’art

BERTHELOT

Philippe

La Fédurok - UFISC Ville de Villeneuve-lez-Avignon

Mèze

BERTRAND

Jacques

BIDARD

Marie-Dominique IUFM – Institut Universitaire de Formation des Maîtres

Villeneuve-lez-Avignon Montpellier

BIGAS

Nicole

Montpellier Agglomération

Montpellier

BIOULES

Pauline

Réseau en scène Languedoc-Roussillon

Montpellier

BLANC

Nicolas

Scènes croisées de Lozère

Mende

BLANCHARD

Gentiane

Montpellier


Liste des participants

Nom

Prénom

Structure

Ville

BOILLE

Brigitte

Université Paul-Valéry - Montpellier III - SUFCO

Montpellier

BOMMENEL

Yves

La Méridionale des spectacles

Montpellier

BORE

Thierry

Odia Normandie

Mont-Saint-Aignan

BOUAD

Denis

Conseil général du Gard

Nîmes

Cie Up to you!

Montpellier

BOUCHER

Sandra

BOUCON

Lise

Montpellier

BOUHIER

Jean-Christophe

BOULARD

Amélie

Languedoc-Roussillon Cinéma

Montpellier

Saint-Georges-d’Orques

BOULDOIRE

Pierre

Communauté d’agglomération du Bassin de Thau

Sète

BOULESTIN

Patrice

Communauté d’agglomération Le Grand Narbonne

Narbonne

BOUQUET

Fabien

Orgammon

Montpellier

BOURDIN

Frédéric

Drac Nord-Pas-de-Calais

Lille

BOURGUET

Daniel

De bouche à oreille

Montpellier

BOURGUET

Zina

De bouche à oreille

Montpellier

BOURQUIN

Christian

Conseil régional du Languedoc-Roussillon

Montpellier

BOUSQUET

Marie-Christine

Communauté de communes Lodévois et Larzac

Lodève

BRAEMER

Luc

Théâtre Jean Vilar

Montpellier

BRETOU

Sandrine

BRISCOE

Helen

BROUCH

Joël

Oara

Bordeaux

BRUAS

Valérie

Drac Languedoc-Roussillon

Montpellier

BRUGUIERE

Odile

Itinérances – Festival de Cinéma d’Alès

Alès

BRUGUIERE

Elsa

BRUNERIE

Jacques

Les Archives du spectacle

Montpellier

BRUNET

Pascal

Relais Culture Europe

Paris

BRUNN

Gilles

Ville de La Grand-Combe

La Grand-Combe

BULTEL

Eric

Drac Languedoc-Roussillon

Montpellier

BURDIN

Christophe

Réseau en scène Languedoc-Roussillon

Montpellier

BURNIER

Frédéric

Centre National du Cinéma et de l’image animée

Paris

CACACE

Emmie

Clé de Cinq - SolutionspourlesArtsetLesVivants

Montpellier

CAMPAGNE

Nicolas

Conseil général de l’Hérault

Montpellier

CARCENAC

Nathalie

Cie Adesso e sempre

Montpellier

CASTELLANO

Jordi

illusion & macadam, un goût d’illusion

Montpellier

CATHALA

Hélène

Cie Hors Commerce

Montpellier

CAUSSE

Florent

Ville de Pézenas

Pézenas

CAYROL

Régis

Le Cratère, Scène nationale d'Alès

Alès

CAYRON

Didier

Centre de Développement Culturel

Allègre-les-Fumades

CAZORLA

Alain

Ville de Clermont-l’Hérault

Clermont-l’Hérault

CERDAN

Marc

Domaine Musiques

La Madeleine

CHABLE

Cyril

Créative Caméra

Saint-Denis

CHALLANDE

Brigitte

Cie Les Murs d’aurelle

Montpellier

CHAMPETIER

Bénédicte

Réseau en scène Languedoc-Roussillon

Montpellier

CHANTELOUVE

Christine

Cie La Strada

Cannes-et-Clairan

CHARBONNEAU

Pierre-Henri

Conseil général de l’Hérault

Montpellier

CHAROUSSET

Pascal

Synpase

Montpellier

CHARRIE

Bastien

Lâche les mots

Montpellier

105


106

Nom

Prénom

Structure

Ville

CHAUVOIS

Véronique

Conseil régional du Limousin

Limoges

CHAZE

Marie-Christine

Languedoc-Roussillon Livre et Lecture

Montpellier

CHAZE

Fanny

Montpellier

CHESSA-MUELLER

Monique

Conseil général du Gard

Nîmes

CHINNI

Sabrina

Ensemble Héliade

Sète

CIOFFI

Rita

Cie Aurélia

Montpellier

CLERGUE

Carine

Communauté de Communes de Valcèzard

Saint-Paulet-de-Caisson

COIC

Piala

Languedoc-Roussillon Cinéma

Montpellier

COLLERAIS

Josianne

Conseil régional du Languedoc-Roussillon

Montpellier

COMBES

Marjolaine

L’Atelline

Villeneuve-les-Maguelone

COMBREAS

Martine

Théâtre de Villeneuve-les-Maguelone

Villeneuve-les-Maguelone

CORTES

Camille

Association Lez’artsM3

Montpellier

COSSE

Leïla

Cie Hors Commerce

Montpellier

COSTE

Marie-Emilie

COURET

Caroline

Fusic - Fundacio societet i cultura

Barcelone

COUROUBLE

Sandrine

Languedoc-Roussillon Cinéma

Montpellier

COUSIN

Pauline

Aract LR

Montpellier

COUZELIN

Roxane

Les Anamorphoses

Montpellier

CRUMIERE

Laure

Cie Opt

CUISINIER

Catherine

CZEPCZYNSKI

Sûan

DANY

David

2DHD

Béziers

DAVIAS

Dolores

Cie Quasi

Mailhac

DE LA VAISSIERE

Julie

Apem LR

Montpellier

DELAFOSSE

Michael

Ville de Montpellier

Montpellier

La Force

DELAYAT

Gérard

DELERM

Maud

Crous de Montpellier

Montpellier

Saint-Siffret

DELHAYE

Christelle

Cie De si de la

Montpellier

DELSOL

Claude

Art’scène

Montpellier

DEMANGEL

Laura

Cie Anima

Montpellier

DEME

Agnès

Conseil régional du Languedoc-Roussillon

Montpellier

DENAT

Dominique

lelaitsurlefeu

Montpellier

DEPUCCIO

Gisèle

Montpellier Danse

Montpellier

DERIU

Hélène

Kawenga

Montpellier

DESCHAMPS

Didier

Drac Languedoc-Roussillon

Montpellier

DEVAUD

Jérôme

Association Melando

Notre-Dame-de-Londres

DI VIRGILIO

Arnaud

Apem LR

Montpellier

DIGUET

Grégory

Bipolar

Mudaison

DINH

Jean-Marie

L’Hérault du Jour

Montpellier

DIOT

Claire

Conseil régional de Lorraine

Metz

DJALO

Régine

NACRe

Villeurbanne

DO BELOUED

Véronique

sortieOuest

Béziers

DOMENGE

Frédéric

Addim 70 - Franche-Comté Mission voix

Vesoul

DONDI

Solange

Réseau en scène Languedoc-Roussillon

Montpellier

DREUILLES

Orianne

Cie Soon Kâ

DUBARD

Laurence

Cie Doré

Montpellier


Liste des participants

Nom

Prénom

Structure

Ville

DUCHEMIN

Alice

Réseau en scène Languedoc-Roussillon

Montpellier

DUCROUX

Christiane

Ville du Vigan

Le Vigan

DUFIET

Christine

CIBC Gard Lozère

Nîmes

DUMAS

Noémie

Les Films des deux rives distribution

Montpellier

DUPRE

Sylvine

Cie Tire pas la nappe

Montpellier

DURAND-GASSELIN

Yannick

Collectif La Basse cour

Nîmes

DUSSAUT

Sophie

Quand Les Arts S’En Melent - QLASEM

Agde

DUVAL

François

Drac Languedoc-Roussillon

Montpellier

DUVERNAY

Grégory

Ami - Aide aux musiques innovatrices

Marseille

EDMOND-MARIETTE

Dominique

Ville de Gignac

Gignac

EGUIENTA

Naomie

Uni'sons

Montpellier

EL KHOUDAR

Marie

illusion & macadam, un goût d'illusion

Montpellier

ELKABOUSS

Hamid

Cie MiM-H

Montpellier

EMILY

Marlène

Prestacles Prod

Montpellier

ENOCQ

Chantal

Lâche les mots

Montpellier

ESPINOSA

Gérard

Théâtre des 13 vents, CDN Languedoc-Roussillon Montpellier

Montpellier

ESTANY

Jean-Louis

Théâtre de Clermont-l'Hérault

ESTEVE

Joanda

Clermont-l'Hérault Béziers

ETARD

Baptiste

Cie L'Hiver nu

Lanuéjols

FABRY

Irène

Théâtre Ipso facto

Montpellier

FAUCAUNIER

Mélanie

Spectacle vivant en Picardie

Amiens

CFPTS

Bagnolet

FAVIER

Anne

FERRIER

Patrick

Nîmes

FERRIER

Dominique

FEUILLET-ROBILLARD

Hélène

Argos Communication

Montpellier

Agde

FEULIE

Emmanuel

Conseil régional du Languedoc-Roussillon

Montpellier

FIGUIERE

Antoine-Laurent Drac Nord-Pas-de-Calais

Lille

FILLOUX-VIGREUX

Marianne

Saint-Jory

FINO

Sophie

FLOIRAC

Estelle

FORGERON

Des'L

Ganges

Denis

Ardec LR

Montpellier

FOUCHER

Camille

Collectif La Basse cour

Nîmes

FOUCHET

Damien

Ville de Rodilhan

Rodilhan

FOULQUIER-CORTES

Corine

Drac Languedoc-Roussillon

Montpellier

FOURMENTRAUX

Jean-Paul

Université Lille 3 et EHESS Paris

Lille / Paris

FOURNIER

Denis

Vent du sud

Montpellier

FRAYSSE

Jean-Marie

Le Chèvrefeuille

Ramonville-Saint-Agne

GARRABE

Robert

Conseil général des Pyrénées-Orientales

Perpignan

GAUFFIER

Jacques

Montpellier Temps Chante

Montpellier

GAULEIN-STEF

David

Camin Aktion

Montpellier

GAUTRY

Mathilde

Cie La Maison - Mathilde Gautry

Montpellier

GAY

Virginie

Agence culturelle Cœur d'Hérault

Clermont-l'Hérault

GERBIER

Martin

Centre des arts du cirque Balthazar

Montpellier

GHIYATI

Karim

Languedoc-Roussillon Cinéma

Montpellier

GIBERT

Abel

Rude awakening / Head Records

Montpellier

107


108

Nom

Prénom

Structure

Ville

GIORGIO

Rose

Légi spectacle

Montpellier

GLOANEC-MAURIN

Karine

ARF - Association des Régions de France

GOBY

Christine

Jazzamèze

Mèze

GODARD

Yvan

Réseau en scène Languedoc-Roussillon

Montpellier

GOMEZ

Laurent

Afdas

Montpellier

GONZALEZ

Gabrielle

Association ThéâViDa

Montpellier

GOURDON

Frédéric

Ville de Pézenas

Pézenas

GOURMELEN

Thierry

La Galerie chorégraphique

Carcassonne

GRANATA

Julien

CRGE LR

Lattes

GRENIER

Bernard

Université Paul-Valéry - Montpellier III

Montpellier

GROSCLAUDE

Stéphane

Plate-forme Interrégionale d'échange et de coopération pour le développement culturel

Villeurbanne

GUDIN DE VALLERIN

Marie-Pierre

Drac Languedoc-Roussillon

Montpellier

GUEGANNO

Jean-François

Institut français

Paris

GUERRERO

Marion

Cie Tire pas la nappe

Montpellier

GUILLERM

Martine

Conseil général du Gard

Nîmes

GUILLOT

Adrien

Centre National des Arts de la rue

Niort

HAIRY

Julie

Mora Vocis

Nîmes

HARANT

Marie-Christine

L'Art Vues

Montpellier

HEBERT

Laurent

CST - Commission Supérieure Technique de l'image et du son

Paris

HEBTING

Laetitia

Cie Machine théâtre

Montpellier

HENIN

Eymeric

HERNANDEZ

Valérie

La Gazette de Montpellier

Montpellier

HERRERO

Maël

La Clé de cinq

HIRSCH

GeorgesFrançois

ministère de la Culture et de la Communication – DGCA

Paris

HOCQUARD

Frédéric

Arcadi

Paris

HORTOLAND

Henriette

Ville de Béziers

Béziers

HUGUET

Charlotte

Légi spectacle

Montpellier

HUMEAU

Géraldine

La Zouze - Cie Christophe Haleb

Marseille

HURSTEL

Jean

Banlieues d'Europe

Lyon

IRLE

David

Réseau en scène Languedoc-Roussillon

Montpellier

JANNEL

Maïa

Cie Taffanel

Castelnau-le-Lez

JANNELLE

Fabien

Onda

Paris

JARRIN

Maud

NACRe

Villeurbanne

JAUSSAUD

Pascal

Réseau en scène Languedoc-Roussillon

Montpellier

JODLOWSKI-PERRA

Cécile

Languedoc-Roussillon Livre et Lecture

Montpellier

JOESSEL

Benoit

Théâtre des 13 vents, CDN Languedoc-Roussillon Montpellier

Montpellier

JOSSERAND

Julie

CCN de Montpellier Languedoc-Roussillon

Montpellier

JOUAN

Delphine

Languedoc-Roussillon Cinéma

Montpellier Montpellier

JOUBERT

Marie-Agnès

JOYEUX

Laurent

illusion & macadam, un goût d'illusion

Paris

JURAND

Stéphane

L'Arts Vues

KAIMAKIS

Constant

Conseil général de l'Hérault

Montpellier

KOENIG

Arnaud

Musique Danse Bourgogne

Dijon


Liste des participants

Nom

Prénom

Structure

Ville

KORELL

Dirk

Camin Aktion

Montpellier

KRESLIN

Selina

2DHD

LACOSTE

Delphine

LAFAURIE

Denis

Le Cratère, Scène nationale d'Alès

Alès

LAGARDE

François

Hors-œil éditions

Montpellier

LAPIQUE

Frédéric

EPCC Arteca - Centre de ressources de la culture en Lorraine

Nancy

LARBIOU

Yves

Réseau en scène Languedoc-Roussillon

Montpellier

LAURENT

Sophie

U-Structurenouvelle

Montpellier

LAUSSEL

Sébastien

Prestacles Prod

Montpellier

LE GUERN

Philippe

Université d'Avignon

Avignon

LE METAYER

Sandrine

Cie Doré

Montpellier

LEBAS

Eric

Institut français

Paris

LECLANT

Philippe

Festival de musique à Maguelone

Saint-Gély-du-Fesc

LECLERC

Antoine

Carrefour des festivals

Paris

LEFEBVRE

Jean-Louis

Montpellier Agglomération

Montpellier

LEMAIRE

Catherine

Eurek'Art

Laroque

LEONETTI

Maryse

Lazuli

Deaux

LEQUENNE

Sophie

Cie Mœbius

Montpellier

LESCURE

Julie

LIGUORI

Anthony

CRGE LR

Lattes

LIOTARD

Marlène

Conseil régional du Languedoc-Roussillon

LOYER

Eva

URF LR CGT Spectacle

LUCI

Antoine

Association La Tac

Montpellier

LUTTIAU

Francis

Drac Languedoc-Roussillon

Montpellier

MAHDJOUBA

Valérie

La Villette

Paris

MAILLARD

Sabine

Hérault Musique Danse

Montpellier

MANGIN

Philippe

Coreps Poitou-Charentes

Poitiers

MANUEL

Fabrice

Conseil régional du Languedoc-Roussillon

Montpellier

MARC

Nicolas

La Scène

Nantes

MARCHAND

Karine

Association Lez'Arts M3

Montpellier

MARTIN

Manon

Réseau en scène Languedoc-Roussillon

Montpellier

MARTIN-VALLAS

Alice

Conseil régional du Languedoc-Roussillon

Montpellier

MARTINETTI

Emmanuel

Conseil général du Gard

Nîmes

MARTINEZ

Kathy

Conseil général de l'Aude

Carcassonne

MARTINEZ

Simon

Conseil régional du Languedoc-Roussillon

Montpellier

MARTY

Nathalie

Cie Humani théâtre

Quarante

MARTY

Delphine

Sufco

Montpellier

MAUGARD

Patrick

Conseil général de l'Aude

MAURIZI

Philippe

MAURY

Frédéric

Carcassonne Frontignan

Tomato Sound Factory

Montpellier

MAYEN

Gérard

MAZE

Laure

Réseau en scène Languedoc-Roussillon

Montpellier

Montpellier

MAZER

Vincent

Conseil régional de Provence-Alpes-Côte-d'Azur

Marseille

MENANTEAU

Sophie

Ville de Montpellier

Montpellier

MERCADAL

Jean-Marie

Communauté de communes du Carcassonnais

Carcassonne

109


110

Nom

Prénom

Structure

Ville

MERCIER

Eléonore

Université Montpellier II

Montpellier

MERVEILLE

Véronique

Cie Carambole

Saint-André-de-Sangonis

MEUNIER

Cyril

Ville de Lattes

Lattes

MICHAUT

Franck

Arcadi

Paris

MICHEL

Marie

Association Melando

Notre-Dame-de-Londres

MICOLA

Lionel

Communauté de communes Lodévois et Larzac

Lodève

MILLINER

Xavier

Cabinet Fidès Conseils

Toulouse

MILLOT

Sophie

Cie Miso74

La Grand-Combe

MIR

Carole

Zinc Théâtre

Sète

MIRA

Georges

Conseil régional de Midi-Pyrénées

Toulouse

MIRALLES

Chantal

Les Petits papiers

La Grand-Combe

MOSSI

Soltan

Association Time code

MOUREAU

Nathalie

Université Paul-Valéry - Montpellier III

Montpellier

MOUTALBI

Madani

Drac Languedoc-Roussillon

Montpellier

MULLER

Catherine

Agence régionale du spectacle vivant Poitou-Charentes

Poitiers

MULLER

Dominique

Conseil régional du Languedoc-Roussillon

Montpellier

MULLOT

Lise

Cie Hors Commerce

Montpellier

MUZZOLINI

Frédérique

Théâtre Jacques Cœur

NAKIB

Fatma

Lattes Montpellier

NAVEOS

Solène

Musique Danse Bourgogne

Dijon

NEGRIER

Emmanuel

CNRS - Cepel

Montpellier

OLIVE

Cécile

Conseil général de l'Hérault

Montpellier

ORLOWSKI

Laetitia

OTON

Nicolas

Cie Machine théâtre

Montpellier

OUDIN

Patricia

Conseil régional du Limousin

Limoges

PAGANO

Muriel

Association Lez'artsM3

Montpellier

PANSANEL

Gérard

PASCHAL

Maud

Communauté de communes du Pays de Sommières

Sommières

PATERNOT

Bruno

L'Art de Thalie

Lunel

PAULE

Sébastien

illusion & macadam, un goût d'illusion

Montpellier

PEIRO

Marie

Conseil général des Pyrénées-Orientales

Perpignan

PELLISSIER

Cédric

Conseil régional de Rhône-Alpes

Charbonnières-les-Bains

PEREZ

Jean-Paul

Onda

Paris

PEREZ

Cyrille

Treize au Sud production - PRIDES PACA

Marseille

PERNET

Cyrile

Réseau en scène Languedoc-Roussillon

Montpellier

PERNETTE

Hélène

Languedoc-Roussillon Cinéma

Montpellier

PIAT

Nathalie

Drac Nord-Pas-de-Calais

Lille

PICHOT

Nicolas

Cie Astrolabe

Montpellier

PICQ

Valérie

Domaine d'O

Montpellier

PIGNET

Valentine

Transit / Collectif photographique

Montpellier

POIGNON

Florence

Réseau en scène Languedoc-Roussillon

Montpellier

PORTA

Frédéric

Luna Collectif

Saint-Brès

POTY

Frédéric

Villeneuve en scène

PRADINAUD

Olivier

Montpellier

Villeneuve-lez-Avignon Montpellier


Liste des participants

Nom

Prénom

PUEL

Géraldine

Structure

Ville

PUERTO

Colette

Conseil général de l'Hérault

Montpellier

PUJOL

Jean-François

CPNEF-SV

Paris

PUMAREDA

Jacques

Ville d'Alénya

Alénya

QUENTIN

Anne

La Scène

Nantes

QUERON

Xavier

La Grosse situation

Saintes

QUERSONNIER

Laurie

Domaine d'O

Montpellier

RADOUAN

Henri-Noël

Télémac Théâtre

Nîmes

RAIMONDI

Joël

Cabinet Fidès Conseils

Narbonne

RAMIREZ

Sébastien

Cie Clash 66

Montpellier

RATSIMIHAH

Christiane

Garrigue Danse Rivage

Port-la-Nouvelle

RAYNAUD

Alberte

Garrigue Danse Rivage

Port-la-Nouvelle

REHEL

Jean-Luc

REIXACH

Domènec

Théâtre de l'Archipel

Perpignan

REVERBEL

Sandrine

Association Chrétiens et cultures

Montpellier

RICHARD

Cécile

CIBC LR

Montpellier

RIEDEL

Nicolas

NACRe

Villeurbanne

RIGAUDIN

Jean-François

Ville de Montpellier

Montpellier

ROBERT

Emilie

Théâtre Le Périscope

Nîmes

ROCHE-LECCA

Vincent

Ville de Saint-Jean-de-Védas

Saint-Jean-de-Védas

ROCHOUX

Philippe

Conseil général de la Lozère

Mende

ROSSIGNOL

Marielle

illusion & macadam, un goût d'illusion

Montpellier

RUAH

Emilie

Kametsa

Mons

RUCHE

Valérie

CIBC LR

Montpellier

SABOT

Luc

Cie Nocturne

SALZGEBER

Didier

SANOU

Salia

Montpellier

Clermont-l'Hérault Art-sur-Meurthe

Cie Salia Sanou

SANS

Jany

Communauté de communes Vivre en Cévennes

Rousson

SARRAT

Valérie

Inforim

Alès

SATTLER

Alix

Le Chèvrefeuille

Ramonville-Saint-Agne

SAULAIS

Tiphaine

Musique Danse Bourgogne

Dijon

SCHLICHT

Fatiha

Cie Adesso e sempre

Montpellier

SEGURA

Noël

Ville de Villeneuve-les-Maguelone

Villeneuve-les-Maguelone

SELIMOVIC

Samo

Bunker

Ljubljana

SIMONOT

Michel

Centre de Développement Culturel

Allègre-les-Fumades

SOLOCH

Jean-Michel

Drac Lorraine

Metz

SORGNIARD

Annie

SORIN

Hélène

Cie Primesautier Théâtre

Montpellier

SOUSSEN

Alain

Direccte LR

Montpellier

STAEBLER

Nadège

Réseau en scène Languedoc-Roussillon

Montpellier

STALDER

Katharina

L'Ambiguë

Montpellier

STOLL

Charlotte

STREIFF

Danielle

La Voix de l'âme Uni-Mei

STUDINGER

Johannes

SUBIAS

Pierre

SUON

Danielle

Montpellier

Bruxelles Narbonne

La Méridionale des spectacles

Montpellier

111


112

Nom

Prénom

Structure

Ville

SUSINI

Monika

Afdas

Marseille

SZTEINSZNAIDER

Corinne

Relais Culture Europe

TAILLADE

Jean-François

Ville de Sète

Sète

TAILLAIDE

Jean-François

Ville de Sète

Sète

TANGUY

Anne

Le Théâtre

Auxerre

TANNEAU

Franck

11 bouge

Carcassonne

TAUDIERE

Didier

SFA - Syndicat Français des Artistes interprètes

Cournonterral

TEMSTET

Frédéric

FT Music

Saint-Jean-de-Védas

TENAILLE

Frank

Mensuel culturel César

Arles

TERCIEUX-JACQUON

Laure

Drac Rhône-Alpes

Lyon

TERCJAK

Maria

Trob'art productions

Montpellier

TERNON

Sabine

Callisto production

Aniane

TIMMEL

Xavier

Harmoniques

Paris

TOOMS

Andrew

TORROGLOSA

Evelyne

Cie Astrolabe

Montpellier

TOULLIEUX

Agnès

Ministère de la Culture et de la Communication - DGCA

Paris

TOURNAIRE

Fred

Cie Vertigo

Montpellier

TOURNAYRE

Delphine

NACRe

Villeurbanne

TRANCHANT

Yvon

Scène nationale de Sète et du Bassin de Thau

Sète

TREBUCHON

Guilhem

Hérault Musique Danse

Montpellier

TROISVALLETS

Richard

Ville de Nîmes

Nîmes

TROTTE

Fabienne

Relais Culture Europe

TURMO

Pascal

URREA

Jean-Marc

Languedoc-Roussillon Cinéma CCN de Montpellier Languedoc-Roussillon

Montpellier

VALADE

Daniel-Jean

Ville de Nîmes

Nîmes

VAREZ

Elisabeth

Théâtre de Villeneuve-les-Maguelone

Villeneuve-les-Maguelone

VASSEUR

Catherine

Synavi Languedoc-Roussillon

Montpellier

VERGNES

Christine

Conseil régional du Languedoc-Roussillon

Montpellier

VERNIN

Amandine

De bouche à oreille

Montpellier

VIDAL

Catherine

Montpellier Agglomération

Montpellier

VIMONT

Maëlle

Pygmalion et Cie

Frontignan

VINCENT

Joël

Communauté d'agglomération Nîmes Métropole

Nîmes

VIOUX

Yann

EPCC Arteca - Centre de ressources de la culture en Lorraine

Nancy

VOLLAND

Nicolas

Hérault Musique Danse

Montpellier

WALLAERT

Violaine

La Compagnie Maritime

Montpellier

WASSERMAN

Agnès

Centre National de la Danse

Pantin

Montpellier


Liste des participants

113


114

Séminaire organisé avec l’aimable participation de la Ville de Montpellier et du Théâtre des 13 vents - CDN Languedoc-Roussillon Montpellier


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