Éléments d’une grammaire ouverte (2) : boues
Textes et photographies de Régis Poulet
-ISans marche exténuante sur ces terres volcaniques, avec pour horizon une carrière de soufre, je n’aurais pas connu le gésir. En contrebas des collines de palagonite, je m’effondre. Le sol est sec et dur. A quelques dizaines de kilomètres du cercle polaire, le soleil darde néanmoins. Dans ce corps en déshérence, les implosions liquident ce qui reste de la structure des eaux, la masse organique meurt ses organes. Avec le temps s’étale un excrétat jaunâtre, résidu souffreteux d’une culture malade.
- II Le suint des cieux lessive les sols, entraîne les cendres organiques dans les fissures. C’en est fini : la peur s’en va. Le flanc s’est enfui sur son envers, aspiré par ses matières fécales en sa propre fosse à l’air libre, à l’air venté sous l’œil solaire, et se perd dans les diaclases en collation pour la terre qui lance ses vapeurs à la rencontre des percolations. L’eau mère épouse l’hydre aux gênes sulfureux et précipite la naissance du vitriol « Visita Interiora Terrae Rectificandoque Invenies Occultum Lapidem » il ronge le sein du sol et dissout les frontières abolit l’érogène en une mare acide
- III Comme un trou noir qui servirait de tombe, le sol est avalé par sa gravidité, dissolvant la matière en une boue soumise aux éructations de la vie volcanique – vomissures sulfurées – où se tient l’âtre. L’œuvre se fait, lente, au noir…
- IV … dans la matrice intestinale, des sucs sans chairs s’abandonnent à la brûlure étonnante d’un sourire, les gaz mortels sont des éthers pour l’hôte qui sait les déserts où s’abrite la pierre occulte la boue balbutie ses borborygmes s’embouche et lie ses méandres au méat du soleil perçant des lèvres du ciel
-Vle vitriol sa pierre vitreuse l’univers accole ses sphincters en cet endroit la glèbe de l’astre solaire s’enfle hurle avec la voix de lumière noire de l’en-sphère
- VI Dansante comme un malade en rémission la boulimique d’espace explose en réticules et en dentelles de synapses la boue fuit la boue pour feue la boue sans fin les corolles évoluent sous les flux du soufre insufflé par le col baisers sans cris pas sans murmures…
- VII Les orbites solaire et terraqué conjoignent leurs anneaux expulsent en l’un l’autre tous les états de la matière mâles et femelles de la pierre à la boue à l’air à la lumière debout mais quelle face à venir pour le mort ? à ces lèvres quels mots de guerre à renaître ? derrière ce front quels meurtres ? et ces yeux ?
il a plongé au creux obscur de la terre, et le visage d’avant sa naissance lui est apparu laid