Le réemploi sur site des eaux usées domestiques - Mémoire de master (2019) - Romain Legendre

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EAU ET HABITAT COLLECTIF Quelle pertinence pour le réemploi sur site des eaux usées à l’échelle de l’habitat collectif ?

Romain Legendre Directeur de mémoire Denis Bruneau Séminaire Architecture, Ingénierie, Environnement et Ville durable Année 2019


SOMMAIRE

INTRODUCTION 6 01 - L’EAU DANS L’HABITAT COLLECTIF : ÉTAT DES LIEUX A - HISTOIRE de l’eau dans l’habitat

9 10

1. Avant l’arrivée de l’eau courante 2. L’arrivée de l’eau courante en France 3. Le confort moderne B - Le circuit global de l’eau

12

1. Grand cycle et petit cycle 2. Traitement préalable de l’eau 3. Assainissement et évacuation C - Au sein de la cellule de logement

15

1. Besoins et postes de consommation 2. Eaux grises / eaux noires 3. Les ressources à récupérer, opportunités à saisir

02 - LES TECHNOLOGIES EXISTANTES DE TRAITEMENT DE L’EAU A - Agir a la source

19 20

1. Réduire la quantité d’eaux usées 2. Réduire la pollution des eaux B - Traiter les eaux usées

23

1. Les traitements primaires 2. Les traitements secondaires 3. Les traitements tertiaires C - Réutiliser les ressources annexes 1. Energie 2. Boues, matières organiques et biomasse 3. Circuits d’eau annexes

34


03 - FREINS ET LEVIERS AU RÉEMPLOI SUR SITE DE L’EAU DANS L’HABITAT COLLECTIF EN FRANCE 39 A - Un cadre légal contraignant

40

1. L’influence du droit international 2. Le cas français 3. Le réemploi sur site : système du cas par cas B - Coûts et financements

43

1. Rentabilité comparative 2. Subventions et primes 3. Inadaptation au modèle économique C - Acceptabilité sociale

51

1. La société face au réemploi des eaux usées 2. Les mécanismes de rejet individuel 3. Evolution des mentalités

04 - QUELS DISPOSITIFS POUR LE RÉEMPLOI DES EAUX USÉES DOMESTIQUES SUR SITE ? 57 A - Le traitement des eaux usées sur site dans le monde

59

1. TWIST ++ : un cas allemand de circuit combiné 2. BaityKool : Un système bouclé individuel 3. Zero Liquid Discharge : Un principe de circuit fermé à usage industriel B - Imaginer un dispositif de réemploi en France

68

1. Redéfinir le cadre de conception 2. Propositions de dispositifs de traitement sur site avec réemploi 3. Des dispositifs à intérêts variés C - adéquation des dispositifs de traitement aux différents types d’habitat

76

1. Ciblage des types d’habitat 2. Adéquation comparative des différents dispositifs

CONCLUSION 82 BIBLIOGRAPHIE 86


TABLE DES FIGURES 1. Les cycles de l’eau

p. 12

2. La consommation d’eau moyenne par jour pour une personne et un foyer en France en 2018

p. 15

3. La répartition des eaux usées domestiques dans un foyer de 4 personnes

p. 16

4. La composition des eaux usées domestiques

p. 17

5. Mécanisme de fonctionnement des toilettes sèches

p. 21

6. Impact des toilettes sèches sur la consommation d’un foyer

p. 21

7. Principe du dégrillage

p. 24

8. Principe des bassins de décantation

p. 25

9. Principe des bassins de lagunages

p. 36

10. Principe des bassins à macrophytes

p. 27

11. Principe du lombrifiltre

p. 28

12. Principe des micro-stations

p. 29

13. Principe du traitement UV solaire et non solaire

p. 30

14. Principe de purification Bio-Solar

p. 31

15. Principe de fonctionnement de l’Energy Recycling System (E.R.S)

p. 34

16. Valorisation / élimination des boues produites en France en 2010

p. 35

17. Principe de fonctionnement de l’aquaponie en boucle fermée

p. 36

18. Principe de fonctionnement de l’aquaponie connectée à un système de traitement

p. 36

19. Principe de fonctionnement des panneaux à micro-algues

p. 37

20. Extrait de l’arrêté du 11 janvier 2007 définissant les normes de qualités microbiologiques, chimiques et

p. 41

organoleptiques de l’eau destinée à la consommation humaine 21. Comparaison de la rentabilité de 4 systèmes de traitement des eaux usées pour un foyer individuel

p. 47

22. Comparaison de la rentabilité de 4 systèmes de traitement des eaux usées pour un foyer au sein d’un

p. 47

habitat collectif de 10 logements 23. Comparaison de la rentabilité de 4 systèmes de traitement des eaux usées pour un foyer individuel avec

p. 49

des subventions à 60% 24. « Seriez-vous prêt à consommer de l’eau issue du recyclage des eaux usées ? », Baromètre de l’eau

p. 54

25. L’allée de bassins à macrophytes devant le projet Twist ++ à Lünen

p. 60

26. Principe de traitement des eaux usées au sein du projet TWIST ++

p. 61

27. Le mur aquaponique dans le patio de BaityKool

p. 62

28. Principe de traitement des eaux usées au sein du projet BaityKool

p. 63

29. Le système Zero Liquid Discharge tel que proposé par Aquatech

p. 64

30. Le principe du système Zero Liquid Discharge

p. 65

31. Le système usager passif - cadre normatif

p. 70

32. Le système usager passif - cadre évolutif

p. 71

33. Le système usager actif - cadre évolutif

p. 72

34. Le système usager actif - cadre normatif

p. 73

35. Les gradients de densité urbaine

p. 76

36. La répartition des 5 types d’habitat

p. 77

37. L’arborescence des canalisations

p. 78

4


TABLE DES TABLEAUX

1. Caractéristiques du dégrillage

p. 24

2. Caractéristiques des bassins de décantation

p. 25

3. Caractéristiques des bassins de lagunages

p. 26

4. Caractéristiques des bassins à macrophytes

p. 27

5. Caractéristiques du lombrifiltre

p. 28

6. Caractéristiques des micro-stations

p. 29

7. Caractéristiques du traitement UVc

p. 30

8. Caractéristiques de purification Bio-Solar

p. 31

9. Caractéristiques des traitements par chloration, ozonation et déphosphoration

p. 32

10. Caractéristiques des combinés de traitements tertiaires

p. 33

11. Le projet Twist ++

p. 60

12. Fiche système i.WET

p. 61

13. Le projet BaityKool

p. 62

14. Fiche système Lombrifiltration / BioSolar

p. 63

15. Fiche système Zero Liquid Discharge

p. 64

16. Fiche synthèse comparative des 3 exemples de systèmes combinés étudiés

p. 67

17. Les attentes inhérentes aux 4 systèmes proposés

p. 69

18. Comparatif des caractéristiques des 4 systèmes proposés

p. 75

19. Comparaison des différents couples systèmes - habitats

p. 80

5


INTRODUCTION

Le développement durable est aujourd’hui

Cette

ressource

dite

secondaire

se

une notion communément partagée aux enjeux

retrouve dans tous les circuits mis en place par

reconnus par une majorité de personnes. Il

les activités humaines, et ce à diverses échelles :

s’appuie

(écologique,

l’agriculture, l’industrie, le tertiaire ou les utilisations

économique, culturel et social) et concerne

domestiques sont tous des domaines émetteurs,

ainsi plusieurs domaines. Parmi les nombreux

et produisent des eaux usées spécifiques.

enjeux qu’il recouvre, la gestion soutenable des

En effet, chaque utilisation de la ressource la

ressources terrestres est un thème récurrent, aussi

modifie de façon très spécifiques, et y intègre

bien concernant les ressources énergétiques que

des composants particuliers. On retrouvera par

biologiques, dont l’eau, qui va ici nous intéresser

exemple dans les eaux usées industrielles des

plus particulièrement.

métaux absents de celles issues de l’utilisation

sur

plusieurs

piliers

domestique. Les circuits diffèrent également de

Si dans de nombreuses régions du

manière drastique selon les domaines : on notera

monde, l’eau constitue une ressource précieuse

par exemple que l’agriculture ne fonctionne pas en

car rare, la question de l’accès à l’eau en Europe

circuit fermé et la majorité des eaux est perdue dans

et spécifiquement en France n’est pas la

les sols ; c’est là d’ailleurs une source de pollution

problématique rencontrée. L’enjeu est davantage

non négligeable. La consommation domestique

porté sur l’optimisation des systèmes, et la

urbaine est cependant bien plus cerclée, car une

valorisation de la ressource. Les circuits de l’eau

grande partie de l’eau consommée ou utilisée est

sont la source d’opportunités écologiques et

collectée pour être évacuée. La ressource est donc

économiques, notamment dans la réutilisation

dans ce contexte facilement récupérable et peut

directe des eaux déjà utilisées. Ce produit issu

alors être le sujet d’une valorisation consécutive.

de la consommation quotidienne est le centre de l’attention de plusieurs organismes engagés dans

Les innovations en matière de traitement

des démarches soutenables, en témoignent le

des eaux usées peuvent se lire à différentes échelles.

nombre de directives et de rapports de recherche

On observe bien évidemment l’assainissement au

liés à la revalorisation des « déchets » du circuit, tel

niveau de la commune par les stations d’épuration

que le Rapport mondial des Nations Unies sur la

mais qui ne consistent pas en un recyclage. On

mise en valeur des ressources en eau de 2017 sous

observe également des innovations en terme

titré « Les eaux usées, une ressource inexploitée ».

de technologie de traitement éclore et des


expérimentations être menées puis développées.

notion aborde la question de l’échelle de traitement,

En parallèle, des particuliers développent et

et une fois encore interroge sur la pertinence

expérimentent

de l’échelle intermédiaire de l’habitat collectif.

leurs

propres

systèmes

de

traitement, axés souvent sur la récupération d’eau

Se forme alors un ensemble de sous-

dans des circuits très courts. Ces initiatives, si elles

questions : quelles solutions techniques existe-

relèvent davantage du bricolage que d’un système

t-il ? Serait-ce intéressant du point de vue de

techniquement calibré, sont liées à des exceptions

l’usager ? Du point de vue global ? Qu’est-ce qui en

de modes de vie personnels très engagés loin

freine le développement ? Qu’est-ce qui pourrait le

d’être généralisables. Ces systèmes sont souvent

pousser ?

à la marge de la légalité, car le contexte législatif

et normatif est très contraignant. En revanche,

démarche afin de constituer des éléments de

on remarque que l’échelle de l’habitat collectif,

réponse à ces questions, nous permettant d’établir

intermédiaire entre les deux échelles évoquées

une piste de réponse à la question première. Cette

ci-avant, est moins le sujet des innovations et

démarche se déroule en quatre temps.

des expérimentations, et ce non pas faute de

Tout d’abord, se rendre compte de l’état des lieux

l’existence de technologies adaptables.

actuel en matière de circuit d’eau domestique :

Ce document vise à mettre en place une

il convient de récolter les données sur le fonctionnement du réseau d’eau de nos jours, afin On peut ainsi se demander dans quelle

d’en analyser le processus et de comprendre ce

mesure le traitement direct et le réemploi sur site

que sont les eaux usées. On s’intéressera ensuite

des eaux usées présente un intérêt à l’échelle de

aux systèmes déjà utilisés ou innovants qui sont

l’habitat collectif ?

utilisés à des échelles différentes, afin de, dans un

troisième temps, étudier les cadres qui régissent ces systèmes, tant légalement qu’économiquement ou

Plusieurs notions sont questionnées ici. En

socialement. Finalement, on étudiera les modèles

premier lieu, est initiée la question de la pertinence

partiels existant pour établir un modèle théorique

des circuits de réemplois, c’est à dire en boucle

de retraitement de l’eau le plus complet possible,

fermées, par rapport à d’autres systèmes, comme

qui permettrait alors d’évaluer la pertinence ou non

les systèmes de traitement sur site avec rejet des

à la fois du système en boucle fermée et de son

eaux usées dans les milieux naturels. La seconde

échelle intermédiaire.

7


0


01

01 L’EAU DANS L’HABITAT COLLECTIF : ÉTAT DES LIEUX

9


01

A - HISTOIRE DE L’EAU DANS L’HABITAT 1. AVANT L’ARRIVÉE DE L’EAU COURANTE

humaine ont fortement changé au cours de l’Histoire : alternant entre vecteur néfaste de maladies et aide au maintien en bonne santé,

L’eau est indissociable de l’humanité et

comme en témoignent les fluctuations de l’intérêt

de son évolution, physique comme spirituelle.

pour les bains publics, adulés des romains et

Elle transporte une image tout à fait ambivalente,

progressivement délaissés au XVe siècle, à partir

génératrice de la vie mais aussi destructrice, elle

duquel on privilégie la toilette sèche. L’eau fait

fascine et fait peur, elle est aussi bien une nécessité

son retour comme élément hygiénique central au

qu’un luxe.

XIXe siècle, favorisé par le développement de la

thalassothérapie.

Si les civilisations sont nées à proximité

des points d’eau, c’est aussi par ce biais que

s’est effectuée leur évolution spirituelle. Il est

été quotidien, son introduction domestique est

frappant de constater l’omniprésence de l’eau

très récente2. L’eau claire était utilisée dans

dans les religions païennes (sous forme d’esprits

des lieux comme les rivières, les puits, ou les

aquatiques, de nymphes, ou de dieux), tout comme

lavoirs selon les besoins, à savoir se laver, boire,

dans les religions monothéistes les plus répandues.

et laver les vêtements. Malgré l’apparition des

Ainsi, la chrétienté admet l’eau comme la base de

canalisations dans le monde romain durant

la bénédiction divine par le baptême ; l’islam, dont

l’Antiquité, les porteurs d’eau furent de corvée du

le berceau se situe dans des régions arides, érige

seau jusqu’au XXe siècle. De même, le transport

l’eau comme élément sacré ; le Lévithique, relatif au

de l’eau jusqu’aux villes par les aqueducs romains,

judaïsme, prône l’eau comme purification préalable

sa distribution par fontaines, ainsi que son

à la lecture des textes sacrés ; le bouddhisme

évacuation ne fut que peu maintenu et répandu

considère les lieux aquatiques comme propices

dans les villes médiévales. Il faudra plusieurs

à la pureté, tout comme l’hindouisme qui les

innovations technologiques (la pompe hydraulique

considère divins, le meilleur exemple étant le fleuve

notamment), quelques tentatives infructueuses de

sacré qu’est le Gange.

distribution domestique de l’eau (sous Louis XVI

Bien que l’usage de l’eau ait toujours

notamment) et l’arrivée du baron Haussmann à la

L’usage premier de l’eau par l’homme est

moitié du XIXe siècle pour que Paris se dote d’une

sans aucun doute sa consommation directe. Les

gestion municipale de l’eau avec eau courante et

sources étant limitées, la question du transport

égoûts, donnant naissance aux premières sociétés

de la ressource se pose très vite, provoquant le

de distributions de l’eau.

développement de nombreuses techniques pour y remédier, et favoriser un accès plus facile à cette ressource, bien qu’elle soit alors rarement consommée pure.

L’eau porte également un très fort aspect

hygiénique1. Les rapports entre eau et hygiène 1 Toilette et soins corporels, EAUX, exposition virtuelle des Musées de la Région du Centre (APSMRC), tenue en ligne à partir du 22 décembre 2010

2 L’eau courante, EAUX, exposition virtuelle des Musées de la Région du Centre (APSMRC), tenue en ligne à partir du 22 décembre 2010

10


2. L’ARRIVÉE DE L’EAU COURANTE EN FRANCE

écologique ; il en fut de même au niveau européen avec des directives de 2003 donnant des objectifs de contrôle de l’eau, tant d’un point de vue

C’est suite à son retour d’exil en Angleterre,

écologique, que d’un point de vue de gestion et

que Napoléon, impressionné par la modernité de

d’économie3, contraignant ainsi à une collecte

la reconstruction de Londres suite à son incendie,

et à un traitement responsable des eaux usées

décide de doter Paris de son propre système

domestiques.

de distribution générale de l’eau à l’échelle

3. LE CONFORT MODERNE

domestique ainsi que d’un système d’égoûts, surdimensionnés alors et toujours en usage aujourd’hui. Entre la moitié du XIXe siècle et la

moitié du XXe siècle, la distribution de l’eau en ville

logements a eu un impact fort sur l’organisation

se faisait à basse pression avec l’aide de châteaux

de ceux-ci. Bien qu’auparavant les riches familles

d’eau. Chaque immeuble possédait une pile (sorte

disposassent déjà dans leurs appartements de

de château d’eau individuel) à hauteur du château

leurs propres pièces d’eau dédiées au lavage

d’eau et qui se remplissait petit à petit, permettant

corporel, ce n’était pas un dispositif largement

à chaque foyer de s’approvisionner. Ces systèmes

répandu dans l’habitat commun, mais bien un luxe.

étaient régis par un syndicat des eaux qui gérait

En témoigne l’épisode du rigolarium, lorsque Le

la répartition de la consommation. Les voisins des

Corbusier introduisit dès 1924 dans son ensemble

étages supérieurs disposaient de faible pression et

de logements pour ouvriers de la Cité Frugès à

n’avaient alors pas toujours d’eau à disposition.

Pessac toutes les commodités hygiénistes alors

d’avant-garde4.

Selon le Centre d’Information sur l’Eau

L’arrivée de l’eau courante dans les

(C.I.EAU), en 1945, seules 30% des communes rurales sont desservies, et ce n’est que dans les

C’est au cours des décennies suivant

années 80 que la presque totalité des Français en

la seconde guerre mondiale, en lien avec la

dispose.

reconstruction expresse des Trente Glorieuses et avec l’industrialisation de l’habitat que les pièces

Une fois l’eau arrivée dans les foyers, il

humides (cuisine, salle de bain, cabinets) trouvent

fallait toutefois qu’elle en ressorte une fois utilisée.

leur place dans l’habitat du français moyen. Il n’est

Bien que les systèmes de récupération des eaux

plus question de se laver à tour de rôle dans un

usées aient déjà été déployés en parallèle des

grand baquet que l’on sortait de la pièce de vie,

systèmes de distribution, les eaux usées étaient

la majorité de la population accède au confort

alors directement rejetées dans la nature. Avec

moderne et à l’hygiène à domicile.

la démocratisation de l’eau courante, c’est tant la consommation de l’eau que sa pollution qui ont explosé. Il fallut pourtant attendre les années 60 pour que se mettent en place des politiques municipales de retraitement des eaux par stations d’épuration. Cette prise en charge fut par la suite

3 Directive n° 2000/60/CE du 23/10/00 établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l’eau, Journal Officiel, 22 décembre 2000

appuyée législativement par les lois du 3 janvier 1992 et celle du 30 décembre 2006, visant à

4 Pezeu-Massabuau J., Demeure mémoire. Habitat : code, sagesse, libération, Marseille, Parenthèses, 2000, 180p

garantir la qualité de l’eau ainsi que sa préservation

11


01

B - LE CIRCUIT GLOBAL DE L’EAU 1. GRAND CYCLE ET PETIT CYCLE

Le cycle domestique est lui complètement

artificiel et comporte un plus grand nombre Avant d’arriver au robinet, l’eau parcourt

d’étapes. Bien qu’il soit qualifié de cycle, le circuit

un circuit défini, sous la forme de deux cycles

n’est en réalité pas réellement fermé : il est raccordé

interconnectés (fig. 1) : l’un est naturel et appelé le

au grand cycle de l’eau. Les secteurs de l’agriculture

grand cycle de l’eau, l’autre est artificiel et qualifié

et de l’industrie disposent généralement de leur

de petit cycle, ou cycle domestique.

propre petit cycle, mais nous nous concentrons

ici sur le cycle géré municipalement pour les consommations

domestiques.

Il

se

déroule

comme suit : 1 - Le captage, qui se fait depuis une rivière, un lac ou une nappe phréatique ;

2

2 - La potabilisation en centrale spécifique (cf 1

01.B.2 - Traitement préalable de l’eau) ;

3 4

3 - Le stockage en château d’eau ; 4 - La distribution de la ressource aux logements

Grand cycle

concernés ;

Petit cycle

5 - La consommation domestique (cf 01.C.1 -

Fig. 1: Les cycles de l’eau

Besoins et postes de consommation) ; 1 L’eau contenue dans les océans et les lacs s’évapore en continu sous l’effet du soleil et

6 - La recollecte des eaux usées, et leur

provoque des formations nuageuses mobiles.

acheminement via les égoûts ;

2 La vapeur d’eau des nuages se condense au

7 - L’épuration des eaux usées recollectées (cf 01.B.3 - Assainissement et évacuation) ;

gré des conditions de pression et de température et tombe au sol sous forme de pluie ou de neige

8 - Le rejet en milieu naturel de l’eau assainie. 3 L’eau devenue liquide ruisselle le long de ruisseaux, rivières et fleuves jusqu’à l’océan, ou

Une fois rejetée dans l’environnement,

s’infiltre dans les couches terrestres pour rejoindre

l’eau reprend le chemin du grand cycle. Il est

les nappes phréatiques.

alors évident que laisser repartir dans la nature des eaux toujours polluées ou souillées revient à

4 Le petit cycle de l’eau correspond à la captation,

contaminer l’ensemble du cycle, d’où la nécessité

l’utilisation et le rejet de l’eau dans la nature par

de responsabiliser la gestion de cette ressource

l’homme pour ses besoins.

à l’échelle du petit cycle, la commune, ou

communauté de communes.

12


2. TRAITEMENT PRÉALABLE DE L’EAU

floculation (un produit coagulant est versé, on élimine près de 90% des matières restantes qui se de

regroupent en flocs) ; la filtration (pour filtrer les

l’assainissement des eaux usées à l’échelle d’un

particules de l’étape précédente, plus ou moins

habitat collectif, il est important de comprendre

performant avec microfiltration, ultrafiltration,

les traitements actuellement mis en place par les

nanofiltration) ; et la filtration par membrane

communes.

(en complément ou à la place des deux autres :

Afin

de

traiter

du

réemploi

et

membranes fibreuses organiques ou minérales,

qui filtrent plus ou moins finement selon la taille

Selon leur provenance de captage, les

des pores).

eaux naturelles n’auront pas la même qualité et n’auront donc pas besoin des mêmes traitements

AFFINAGE

avant d’être considérées comme potables. La grande variété des traitements utilisés en station rend très divers les circuits de traitements mis en

Cette étape sert à donner à l’eau des

place. Les procédés les plus courants sont répartis

qualités de confort de consommation (dites

en 4 catégories : physiques (dégrillage, filtrations,

organoleptiques). Elle se fait par traitement

décantations etc), physico-chimiques (coagulation,

chimique spécifique (adsorption sur charbon actif

floculation), chimiques (oxydation, acidification

pour évacuer les composés organiques dissous

etc) et biologiques (cultures bactériennes). Ils

restants et les polluants non encore enlevés) ou

sont soumis en succession et en complétion afin

chloration (un peu de chlore pour préserver la

d’obtenir une eau potable en fin de parcours.

qualité de l’eau dans les canalisations, et éviter la formation de nouveaux micro-organismes).

Le processus de potabilisation le plus

courant se déroule en trois grande parties :

Une fois traitée, l’eau est stockée puis

distribuée aux différents points de consommation. PRETRAITEMENT

Le

prétraitement

permet

d’éliminer

les déchets les plus gros, de faciliter l’étape de clarification et de maintenir en bon état les différents systèmes suivants. Plusieurs techniques sont mises en place : le dégrillage et le tamisage par exemple. CLARIFICATION

Le processus de clarification vise à

l’élimination des particules en suspension (sable, limon, débris organiques…), des matières colloïdales (argiles fines, bactéries…) et d’une partie des matières dissoutes (matières organiques, sels…). Il existe différents dispositifs : la décantation, ou

13


3. ASSAINISSEMENT ET ÉVACUATION

particules nocives précédentes mais également les organismes pathogènes. Ces traitements mettent

en jeu des dispositifs plus spécifiques : traitements

Une fois consommée, l’eau est rejetée

par UV, chloration, charbon actif etc.

dans le circuit municipal en direction de stations d’épuration.

Les traitements visant à nettoyer l’eau

En France, les traitements primaires sont

avant de la rejeter dans la nature sont moins

de plus en plus abandonnés au profit de traitements

contraignants que ceux visant à la rendre potable.

secondaires surdimensionnés et utilisant un

Il s’agit principalement de la rendre claire et sans

système de boues activées : les bactéries issues

résidus. On compte trois étapes nécessaires à ces

des boues de la décantation sont réutilisées

traitements :

dans les procédés biologiques secondaires. Ces procédés induisent des gains économiques et spatiaux.

- un traitement primaire : une décantation permettant d’évacuer

la majeure partie des

matières en suspension sous forme de boues, qui

Le

processus

d’assainissement

des

sont ensuite traitées (incinérées ou valorisées si

eaux usées n’est pas nécessairement accessible

possible). Ce sont ces boues qui sont responsables

partout. Dans les zones d’habitations dispersées,

de la majeure partie des mauvaises odeurs

il est souvent du devoir de l’habitant de gérer ses

associées aux stations d’épuration.

eaux usées individuellement, sans raccord au tout à l’égoût. D’autres traitements à plus petites

- un traitement secondaire : il a pour but d’éliminer

échelles interviennent alors, supposément sous la

les composés organiques polluants (la plupart

régie d’un personnel municipal qualifié.

des polluants nécessitant la consommation de dioxygène pour être dégradés, leur rejet dans la nature entraîne une consommation du

O2 des

écosystèmes et empêche ainsi le développement des

organismes

nécessitant

du

dioxygène

pour se développer). Les traitements visent particulièrement à récupérer les nitrates et les phosphates présents dans l’eau, nocifs pour l’environnement. Les procédés physiques (filtration par membrane par exemple) sont souvent couplés aux procédés chimiques (incorporation de sels pour précipiter les composés à extraire) et biologiques (introduction de bactéries et d’oxygène qui vont dégrader les composés). - un traitement tertiaire : non généralisé, ce traitement est mis en place lorsque l’eau est relâchée

dans

des

milieux

écologiquement

sensibles. Il s’agit d’éliminer plus efficacement les

14


01

C - AU SEIN DE LA CELLULE DE LOGEMENT 1. BESOINS ET POSTES DE CONSOMMATION

Les besoins en eau au sein d’un logement

réduite), son mode de vie (les athlètes consomment

en France ont fortement évolué depuis la Seconde

par exemple bien plus d’eau, à l’ingestion comme

Guerre Mondiale, favorisés par la plus grande

pour l’hygiène), ou les conditions climatiques

démocratisation de l’eau courante et par le

(en milieu sec et chaud, les gens consomment

développement d’espaces dévolus aux soins et

davantage d’eau). Cependant, il est possible

à l’hygiène au sein même du logement. D’après

d’établir un paysage de consommation moyen par

l’observatoire SISPCA, la consommation moyenne

foyer1 (fig. 2). Il ne faut pour cela pas se contenter

par jour et par habitant en France est de 148L en

de quadrupler les données, mais se référer aux

2018. Il faut noter que la consommation en eau

données relevées, car nombre d’usages ne se

change drastiquement en fonction de l’âge du

démutiplient pas lors de l’ajout de personnes dans

consommateur (un enfant consomme bien moins

le foyer (le lave-vaisselle consomme toujours

qu’un adulte), son niveau de revenu (les foyers

autant d’eau par exemple).

les plus pauvres présentent une consommation Fig. 2: La consommation d’eau moyenne par jour pour une personne et un foyer en France en 2018 (données OMS et INSEE) 39%

20%

1%

boisson

6%

cuisine

6%

jardin

2L 9L 9L Consommation par jour pour 1 personne

10%

12%

vaisselle

lessive

douche

toilettes

divers

15L

18L

56L

30L

9L

6%

148L

52%

29%

2%

2%

boisson

cuisine

2%

jardin

3%

vaisselle

8%

2%

lessive

8L 9L 9L 15L 36L Consommation par jour pour un foyer de 4 personnes

1

15

douche

toilettes

divers

224L

120L

9L

430L

C.I.EAU, L’Observatoire de l’eau, [en ligne]


2. EAUX GRISES / EAUX NOIRES la

logement (fig. 3), mais les eaux usées se regroupent

consommation d’eau se rapporte à son utilisation

dans les réseaux urbains avant l’arrivée en station

globale, et non pas à son ingestion simple par

d’assainissement des eaux usées, conjointement

l’humain. Le consommation d’eau rejette donc

avec les eaux issues du ruissellement.

nécessairement ce qu’on appelle des eaux usées.

Celles-ci sont réparties en deux catégories : les

eaux grises ou eaux ménagères, et les eaux noires

les 430L d’eau consommés par un foyer, seulement

ou eaux vannes.

96% sont récupérés en tant qu’eaux usées. Les 4%

Les eaux grises correspondent à l’eau que

restants sont perdus, soit par leur utilisation même

nous utilisons au quotidien pour nous laver, faire

(irrigation des plantes, brumisateurs, etc), soit par

la vaisselle, la lessive etc. Elles proviennent tant de

impossibilité de récupérer l’eau. Il en est ainsi pour

la salle de bain que de la cuisine, et sont chargées

la grande partie des usages de lavages : l’eau qui

de nombreux produits manufacturés : détergents,

sert à laver la voiture s’infiltre dans le sol, celle

solvants, résidus alimentaires, etc. Les eaux noires sont quant à elles les

pour laver les sols s’évapore. Cette eau réintègre directement le grand cycle de l’eau naturel.

eaux issues des toilettes, et transportent donc

les matières fécales et l’urine. Elles sont quant à

de l’eau consommée, les eaux noires un tiers. En

elles fortement chargées de matières organiques

reprennant les chiffres moyens de consommation

azotées et de germes fécaux.

d’un ménage, on calcule qu’environ 275L d’eaux

ménagères et environ 137L d’eaux vannes sont

Dans

l’espace

domestique,

Il est intéressant de remarquer que parmi

Les deux circuits de récupération de ces

eaux usées ne sont pas connectés dans l’espace du

Les eaux grises représentent deux tiers

produites par jour par foyer.

Fig. 3 : La répartition des eaux usées domestiques dans un foyer de 4 personnes

ingestion Arrivée d’eau boisson 8L

cuisine 9L

jardin 9L

vaisselle 15L

lessive 36L

Eaux grises 275L = 63 %

Eau perdue (infiltrations dans le sol) = 2%

16

douche 224L

toilettes 120L

divers 9L

Eaux noires Eau perdue 137L (évaporation) = 33% = 2%


3. LES RESSOURCES À RÉCUPÉRER, OPPORTUNITÉS À SAISIR

Les eaux grises et noires, une fois

longtemps pour leurs propriétés nutritives utiles

récupérées dans les canalisations, sont prêtes

au

à être envoyées en centrale d’assainissement

ou végétaux, et peuvent donc constituer une

des eaux usées avant d’être rejetées dans la

ressource intéressante à récupérer, dans les cas

nature. Cependant, elles disposent à ce moment-

où elles pourraient être réemployées sur site. Les

là de nombreuses ressources qui peuvent être

quantités de détergents présentes dans les eaux

récupérées. Bien que l’élément ‘‘eau’’ représente

vannes sont minimes en comparaison aux autres

90%

composantes.

de

la

composition

des

eaux

usées

développement

d’êtres

vivants

animaux

domestiques, elle n’est pas l’unique ressource intéressante à récupérer et à réemployer : que ce

soit pour les eaux grises ou les eaux noires, leur

de matières organiques constituent une part

processus d’utilisation les enrichit de composants

trop peu importante pour être envisagée comme

valorisables.

récupérable ; tout comme les composants

S’agissant des eaux grises, les quantités

liquides autres que l’eau qui y sont dilués. Il faut

Ces ressources se retrouvent d’une

en revanche noter une autre caractéristique des

part dans la composition des eaux usées.

eaux ménagères qui n’est pas en lien avec sa

Comme on peut le constater dans le schéma

composition : l’eau de nettoyage particulièrement,

2

de composition des eaux usées domestiques

issue des lave-linges par exemple, est récupérée à

(fig. 4), les eaux noires contiennent une part

une température avoisinant les 32°C en moyenne3,

importante

et

de

matières

organiques

par

le

mélange de l’eau à l’urine ainsi qu’aux fèces.

dont

les

calories

sont

potentiellement

récupérables à destination d’autres usages.

Les matières fécales sont réconnues depuis

Fig. 4 : La composition des eaux usées domestiques Eaux usées Eaux grises

Nettoyage - Eau - Détergents - Résidus organiques (aliments, tissus)

Eaux noires

Hygiène

Eaux jaunes

- Eau - Savons - Résidus organiques (poils, peaux)

2 Eme C., Boutin C., Composition des eaux usées domestiques par source d’émission à l’échelle de l’habitation - Rapport final, document élaboré dans le cadre du PANANC, 2015

- Eau - Détergents - Urine

Eaux brunes - Eau - Détergents - Fèces - Résidus papier

3 Biofluide environnement, Que sont les eaux grises, [en ligne]

17


0


02 02 LES TECHNOLOGIES EXISTANTES DE TRAITEMENT DE L’EAU

19


02

A - AGIR A LA SOURCE

Avant de penser à en récupérer les

économiques personnels et les campagnes

ressources, il convient de se poser la question

publicitaires télévisées, que par la sensibilisation

de la « création » des eaux usées, tant en terme

à l’école (affiches, exercices de maths mettant en

de quantités que de qualité. Sachant que les

scène des fuites d’eau, etc)1.

traitements municipaux de l’eau avant et après

consommation ont un impact sur l’environnement

(consommation d’énergie, utilisation de produits

produit un impact réel sur la consommation d’eau

chimiques, matières polluantes relâchées dans

des français : la consommation moyenne par jour

la nature...), quels sont les moyens de réduire

et par habitant en France était de 106L en 1975,

les volumes d’eau consommée et donc usée ?

et a augmenté continuellement jusqu’à atteindre

De quelle façon est-il possible de réduire la

165L en 2014. C’est à partir de cette année-là que

contamination de l’eau durant le processus de

la consommation a chuté pour atteindre 148L en

consommation ?

20182.

1. RÉDUIRE LA QUANTITÉ D’EAUX USÉES

Depuis

la

considération

de

de contrôle de sa consommation, l’instauration de

l’eau

gestes

quotidiens

visant

à

réduire

sa

consommation, et l’avènement de technologies propices à la réduction de la consommation d’eau.

préservation abreuve nombre de réflexions et

de campagnes de sensibilisation, tant au niveau

La première étape n’est pas une réduction

de sa consommation à proprement parler mais elle

mondial que national (l’UNESCO a notamment créé

consiste à évaluer ses consommations d’eau. Au

en 2000 le World Water Assessment Programme

delà de la simple attention portée à son utilisation,

ou WWAP afin d’équiper tous les acteurs de

des moyens existent afin de quantifier les volumes

l’eau des connaissances, outils et compétences

d’eau usés. C’est par exemple ce que propose

nécessaires à sa bonne gestion).

certaines

applications

permettant

d’installer

des capteurs sur ses compteurs d’eau et sur les

Au niveau mondial, les événements et

robinets afin de suivre et d’analyser en temps réel

campagnes internationaux s’orientent vers des

sa consommation effective.

dangers liés à l’hygiène, la gestion politique de l’eau

et aux problèmes sanitaires : la difficulté d’accès à

A partir de ces constats, il est simple de

modifier ses pratiques afin de réduire les volumes

l’eau potable, la consommation d’eau non potable,

d’eau utilisée. Les idées ne manquent pas : prendre

la défécation en plein air, etc.

un bain plutôt qu’une douche, couper l’eau pendant

Dans les faits, cette réduction s’explique

par trois biais : le développement des technologies

comme une ressource écologique à protéger, sa

Ces campagnes de sensibilisation ont

la vaisselle ou que l’on se brosse les dents, cibler et

En France, c’est en revanche sur l’utilisation

réparer les fuites…

éco-responsable et citoyenne de l’eau que se

tournent les sensibilisations. Il s’agit d’éduquer le citoyen sur l’impact que son usage de l’eau

1 Henri Smets, La sensibilisation aux valeurs liées à l’eau et à la bonne gouvernance, VertigO - la revue électronique en sciences de l’environnement, mis en ligne le 2 juillet 2008

produit sur l’environnement, afin de l’inciter à lutter contre le gaspillage. Cela passe par de nombreux biais, tant par la démonstration des bénéfices

2

20

Observatoire SISPCA


Finalement, des installations existent afin

Fig. 5 : Mécanisme de fonctionnement des toilettes sèches

de limiter mécaniquement les consommations d’eau. C’est le cas des limitateurs-régulateurs d’eau à fixer sur les embouts des robinets, mais aussi

solide

s

des chasses d’eau à deux vitesses aujourd’hui

liquide

s

généralisées dans les logements, et qui permettent de diviser par deux le volume d’une chasse d’eau

stockage

classique.

Les toilettes sèches se sont développées

enlevage régulier

au niveau de maisons individuelles par des

évacuation par canalisation

particuliers très investis dans un mode de vie

Le mécanisme est simple (fig. 5) : l’urine s’écoule

éco-responsable, mais elles font aujourd’hui leur

par gravité avant d’être canalisée, tandis qu’un

apparition dans les habitats collectifs en France.

activateur

C’est ainsi qu’un HLM breton, Ôôôberge, dont la

solides d’être acheminés vers un stockage à

livraison des 24 appartements est prévue fin 2020,

l’arrière du dispositif. Ces systèmes mécaniques

va se voir doter de toilettes sèches dans chaque

permettent d’éviter l’utilisation de l’eau pour

logement . Evitant l’utilisation de matière carbonée

l’évacuation des déjections, économisant ainsi

comme la sciure de bois, ce système permet tout

en moyenne 120L par jour par foyer (fig. 6). Il est

à la fois de ne plus utiliser d’eau pour évacuer les

important de noter cependant que l’intervention

déjections, mais aussi de récupérer d’une part les

humaine est nécessaire pour l’évacuation des

urines, et d’autres part les excréments qui seront

matières solides stockées, à raison d’un enlevage

valorisés par la suite.

tous les 6 mois géré par une entreprise dédiée.

3

manuel

permettra

aux

éléments

Fig. 6 : Impact des toilettes sèches sur la consommation d’un foyer ingestion Arrivée d’eau boisson 8L

cuisine 9L

jardin 9L

vaisselle 15L

lessive 36L

Eaux grises 275L

Eau perdue

3 Ginisty F., Assainissement écologique : pour la première fois, des toilettes sèches vont équiper un habitat collectif, L’âge de faire, n° 138 (Février 2019)

21

douche 224L

toilettes sèches 0L

Urine Fèces (à valoriser)

divers 9L

Eau perdue


2. RÉDUIRE LA POLLUTION DES EAUX

Diminuer les volumes d’eau consommée

et les différentes espèces qui le peuplent

est un processus relativement accessible, il en va

peuvent alors s’asphyxier. C’est ce qu’on appelle

différemment pour diminuer la contamination de

l’eutrophisation d’un milieu naturel.

l’eau utilisée car l’être humain a des besoins de déjections vitaux qui ne peuvent être modulés. Le

seul levier d’action dont l’on dispose sur la qualité

positivement : les phosphates (augmentant

de l’eau que l’on rejette se situe au niveau de la

considérablement la DCO) sont interdits dans

nature des produits utilisés et qui sont incorporés

les lessives ménagères depuis 2013, et dans les

aux eaux usées : les différents détergents, savons

produits pour lave-vaisselle depuis 20174. Il faut

et produits d’entretien utilisés contiennent une

cependant noter que tout élément tensio-actif,

variation de produits plus ou moins polluants.

composant de base de tout détergent, sera toujours

La facilité de traitement de l’eau variera alors en

néfaste pour l’environnement car très difficilement

fonction des produits utilisés. On constate depuis

dégradable, et ce même s’il est d’origine naturelle

quelques années l’apparition sur le marché de

car il se retrouve très concentré dans le produit

produits d’entretien utilisant uniquement des

fini5.

produits naturels et biodégradables, mais il

Ainsi, la seule façon de limiter la contamination

reste difficile de changer l’image d’efficacité

des eaux usées domestiques par ces produits est

que

d’en faire un usage raisonné au profit de moyens

possèdent

les

détergents

traditionnels

La

législation

européenne

aux composés polluants qui nécessitent des

dits mécaniques : frotter, gratter, etc.

traitements lourds en centrale de retraitement.

Sachant

que

la

évolue

contamination

des

Afin de comprendre ce qui rend une eau

eaux usées vient du mélange de l’eau avec des

polluante, deux notions sont à retenir : la Demande

composés autres, il est nécessaire d’isoler les

Biochimique en Oxygène (DBO) et la Demande

différents composants pour les réutiliser ou les

Chimique en Oxygène (DCO). Ce sont ces deux

valoriser. La séparation des flux d’eaux usées selon

critères qui permettent d’évaluer la charge polluante

leur provenance permet de faciliter les traitements

des eaux usées. La DBO est la quantité d’oxygène

spécifiques

requise par les bactéries pour oxyder les matières

ressources. Plutôt que de canaliser ensemble les

organiques biodégradables présentes dans l’eau.

eaux grises et noires vers les stations d’épuration,

La DCO est quant à elle la quantité d’oxygène

la mise en place de réseaux différenciés permet

requise par les oxydants chimiques pour oxyder

de ne pas incorporer les matières organiques des

les particules minérales présentes dans l’eau. Plus

eaux vannes dans les eaux ménagères, ou de ne

il y a d’éléments à dégrader biologiquement, plus la

pas diluer les calories des eaux ménagères dans

DBO augmente, et plus il y a d’éléments à dégrader

les eaux vannes par exemple. On évite ainsi la

chimiquement, plus la DCO augmente.

« sur-contamination » des eaux.

et

d’optimiser

le

réemploi

des

Lorsque ces valeurs sont élevées, beaucoup d’oxygène présent dans les milieux naturels est

4 Service public fédéral, Santé Publique, Sécurité de la chaîne alimentaire et Environnement, [en ligne]

consommé dans cette optique de dégradation, et seul le reste est utile au développement des

5 Les tensioactifs : des ingrédients indispensables mais souvent critiqués, BioLinéaires, numéro 42 (Juillet-Août 2012)

espèces de l’écosystème aquatique concerné. Si le milieu est en manque d’oxygène, il est en anoxie,

22


02

B - TRAITER LES EAUX USÉES

Une fois les eaux usées produites,

Afin de pouvoir comprendre et comparer

plusieurs dispositifs existent afin de les traiter sur

les différents systèmes, ils seront présentés à l’aide

site en vue d’une réutilisation. Tout comme les

d’un tableau comparatif reprenant leurs principales

traitements des stations d’épuration municipales,

caractéristiques, ainsi que d’un schéma explicatif

ces systèmes sont classés selon trois niveaux :

du fonctionnement.

un traitement primaire (visant une épuration mécanique par filtration par exemple), secondaire

La première caractéristique donnée sera

(clarifiant l’eau et la nettoyant de la majorité des

la phase de traitement dont se charge le dispositif,

éléments nocifs et pathogènes) et tertiaire (pour

certains assurant tout à la fois les niveaux

affiner les performances de clarification et amener

primaires, secondaires, et/ou tertiaires ;

l’eau aux normes de potabilité).

L’état de l’eau à l’entrée du circuit indiquera

les qualités de l’eau qui peuvent y être traitées :

Ces trois niveaux de traitements combinés

eaux vannes ou ménagères, brutes, filtrées (c’est-

visent à redonner à l’eau trois critères de qualité :

à-dire débarrassées des particules supérieures

physique (l’eau ne contient plus de matières

à 0,5mm), ou claires (c’est-à-dire filtrées puis

solides ou en suspension), microbiologique (l’eau

clarifiées mais non potables) ;

est purifiée des micro-organismes, bactéries ou

virus potentiellement pathogènes) et chimique

indiquera le but optimal recherché, c’est-à-dire

(l’eau ne contient que des minéraux dans des

les meilleures performances atteignables avec un

quantités la rendant propre à la consommation

système optimisé ;

humaine et sans danger pour les milieux naturels).

La mention des effets du dispositif

Les sous-produits annexes récupérés

correspondront aux ressources obtenues au cours

Les systèmes analysés en suivant sont

du processus de traitement autres que l’eau et

des dispositifs conçus professionnellement, déjà

dont l’on pourra disposer en sortie de circuit ;

commercialisés et utilisés à différentes échelles,

allant des débits correspondant à l’habitat

les dispositifs physiques et/ou les surfaces

individuel jusqu’aux débits issus des stations

nécessaires à l’étape de traitement ;

municipales. Sont donc écartés les systèmes

bricolés par des particuliers, dont les méthodes,

mentionnera la nécessité ou non d’un apport

bien que suivant des protocoles détaillés, ne sont

énergétique autre que celui nécessaire à la

pas contrôlées et monitorées. On pourrait citer

canalisation et au transport de l’eau pour les

parmi ces méthodes celle de la décantation des

besoins du traitement ;

trois pots, ou les différentes filtrations sur tissu

par exemple. On ne s’attardera pas non plus sur

précisera pour quelle cible se trouve aujourd’hui le

les systèmes uniquement présents à très grande

dispositif dans le commerce (particuliers, collectifs,

échelle (méthode de nanofiltration, percolation...).

municipalité, industries).

23

L’installation

La

nécessaire

consommation

évoquera

énergétique

Finalement l’échelle de commercialisation


1. LES TRAITEMENTS PRIMAIRES

Les

traitements

primaires,

ou

prétraitements ont pour but de nettoyer l’eau afin de rendre les traitements en aval plus performants. Il s’agit de retirer les particules les plus grosses, telles que les matières fécales ou les débris organiques, mais aussi une partie des matières en suspension (MES).

Le dégrillage

Le dégrillage progressif correspond au

Afin d’être efficacement filtrée, l’eau

traitement primaire le plus couramment employé

doit arriver sur la grille à une vitesse n’excédant

tant en entrée de station d’épuration que dans

pas 1,2m/s. Les différentes grilles doivent être

les systèmes industriels. Il s’applique aux eaux

régulièrement relevées afin de récupérer les

usées mais également aux eaux de ruissellements

éléments filtrés appelés refus de dégrillage. Cela

charriant parfois branches et autre débris. Agissant

permet d’une part d’éviter la colmatation des

comme des tamis de plus en plus fins (fig. 7), les

filtres qui limiterait alors les débits de traitement,

grilles permettent de séparer l’eau des déchets et

et de valoriser les refus de dégrillage, qui sont le

particules les plus grosses.

plus souvent des matières végétales sur les grilles sont

les plus grosses, et forment des boues au niveau

indispensables à tous les circuits afin d’éviter que

des tamisages les plus ressérés. Ces boues sont

des débris possiblement dangereux pour l’intégrité

parfois valorisables mais le plus souvent incinérées

du réseau entrent dedans et l’abiment.

ou enterrées.

Les

grilles

les

plus

larges

Tab. 1 : Caractéristiques du dégrillage

Fig. 7 : Principe du dégrillage Eau usée liquides

Microstations

solides

Dégrillage moyen 40 > 10 mm

Phase de traitement

Primaire / secondaire

Etat de l’eau à l’entrée du circuit

Eaux vannes ou ménagères brutes

Effet

Dégrillage fin 10 > 6 mm

Tamisage 6 > 0,5mm

Eau usée filtrée

Refus de dégrillage (à valoriser)

24

Taux d’abbatage moyen des MES (50%), DBO (60%) et DCO (60%). Faible action contre le phosphore et les micro-organismes

Sous-produit annexe

Boues

Installation nécessaire

Cuves enterrées

Consommation induite

Energie électrique

Echelle de commercialisation

Particuliers


Les bassins de décantation

Les

bassins

de décantations furent

et solvants des eaux ménagères. Dotés d’une

les systèmes les plus utilisés dans les stations

densité moins importante que celle de l’eau, ces

d’épuration municipales à la fin du XXe siècle

produits flottent en surface, et les lames racleuses

pour leur facilité de fonctionnement. Ils étaient

du pont les guident vers la périphérie ou elles sont

aussi bien utilisés en traitement primaires que

récupérées. On récupère cette fois les eaux claires

secondaires, mais on tend aujourd’hui à limiter

en partie basse de la cuve.

leur usage aux traitements primaires afin d’assurer

Tab. 2 : Caractéristiques des bassins de décantation

par la suite un assainissement plus efficace via d’autres technologies.

Bassins de décantation

Le principe de base est très simple (fig.

8) : il se base sur la gravité. Arrivant dans une cuve ronde par une colonne centrale, les eaux usées stagnent un certain temps, le temps que les particules lourdes et les matières en suspension

Phase de traitement

Primaire

Etat de l’eau à l’entrée du circuit

Eaux vannes ou ménagères brutes Nettoie l’eau d’une partie des MES (taux d’abbatage de 50%) et des huiles

Effet

se déposent au sol. Une partie des bactéries s’agrège, ou flocule, et forme des agrégats plus faciles à récupérer. La cuve circulaire permet la mise en place d’un pont racleur qui, comme son nom l’indique, pousse les flocs vers le puit central, permettant la récupération des boues. On récupère

Boues, huiles

Installation nécessaire

Cuves avec ponts racleurs ou ponts suceurs X

Consommation induite

les eaux claires en partie haute de la cuve.

Sous-produit annexe

Ces bassins permettent également, par le

Echelle de commercialisation

même procédé gravitationnel, de séparer les huiles

Municipalités, industries

Fig. 8 : Principe des bassins de décantation Pont racleur Amène les boues décantées vers le puit central

Pont racleur Dirige les huiles en surface vers la périphérie

Récupération de l’eau décantée Par surverse

Récupération des boues

Récupération des eaux décantées

Arrivée des eaux usées dégrillage préalable

Arrivée des eaux usées dégrillage préalable

25

Récupération des huiles Par surverse


2. LES TRAITEMENTS SECONDAIRES

Les

traitements

secondaires

ou

bassins aérobies, tout comme les bassins à

de

clarification ont pour visée de purifier l’eau d’un

macrophytes,

disposent

d’atouts

esthétiques

point de vue physico-chimique : il s’agit d’enlever

valorisants : eau claire, végétaux...

un maximum de matières en suspension (MES),

mais aussi de demande biochimique en oxygène

d’installation en fait un dispositif assez peu

(DBO) et de demande chimique en oxygène (DCO).

développé au niveau de maisons individuelles

La demande en surface de ce type

ou de groupements d’habitats, au profit des municipalités. Les bassins de lagunage

Tab. 3 : Caractéristiques des bassins de lagunage Traitement par bassins de lagunages

Le lagunage consiste à faire passer

les eaux usées à un débit très lent à travers une

succession

de

plusieurs

bassins

aux

caractéristiques différentes.

Phase de traitement

Primaire / secondaire

Etat de l’eau à l’entrée du circuit

Eaux vannes ou ménagères dégrillées

La profondeur des bassins anaérobies

permet la dégradation des particules sans

Bon taux d’abbatage des MES (79%), DCO (60 à 80%), DB0 (80%), phosphore et azote (60 à 70%) Bonne action contre les micro-organismes grâce à l’exposition solaire

Effet

oxygène (d’où le nom). C’est également dans ce bassin que les MES décantent par gravité. Couplés aux bassins facultatifs, les bassins anaérobie permettent d’éliminer 75% de la DBO et de la DCO1. Cette performance est accentuée dans les bassins aérobies. La faible profondeur de ces derniers

Sous-produit annexe

Boues (tous les 10/15 ans)

Installation nécessaire

Plusieurs bassins successifs, pour une surface de 12m² par équivalent habitant

permet également, par action des UV solaires, la destruction des germes pathogènes résiduels.

difficilement

intégrables

au

paysage

X

Consommation induite

Si les deux premiers bassins sont car

Echelle de commercialisation

sombres et pouvant faire émaner des odeurs, les

Municipalités

Fig. 9 : Principe des bassins de lagunages Eau usée dégrillée liquides solides Eau claire

bassin anaérobie (5 > 2,5m)

bassin facultatif (2,4 > 1,2m)

bassin aérobie (<1m)

1 Racault Y., Boutin C, Le lagunage naturel en France - Etat de l’art et tendances, Ingénieries n° spécial, 2004, p77 à 86

26


Les bassins à macrophytes

Les bassins à macrophytes, bien que

relativement coûteux en surface, permettent une bonne intégration paysagère, sans risques d’odeur. Ils nécessitent également assez peu d’entretien

Les

bassins

à

macrophytes

se

si ce n’est le faucardage annuel des roseaux et

développent en France à partir des années 80 pour

l’évacuation décennale des boues résiduelles.

les traitements des eaux des petites et moyennes collectivités, puis sont adoptées par les particuliers.

Tab. 4 : Caractéristiques des bassins à macrophytes

Les macrophytes désignent les végétaux utilisés

Traitement par bassins à macrophytes

pour purger l’eau. Le système le plus courant est dit à écoulement vertical (fig. 10).

Phase de traitement

Primaire / secondaire

Etat de l’eau à l’entrée du circuit

Eaux vannes ou ménagères brutes

Effet

Très bon taux d’abbatage des MES (98%), DCO (85%), DB0 (98%), phosphore et azote (65 à 70%) Mauvaise action contre les micro-organismes

Sous-produit annexe

Matière végétale suite au faucardage des roseaux

Installation nécessaire

Plusieurs bassins plantés, entre 1m² et 2,5m² par équivalent habitant

L’eau usée domestique arrive dans le

bassin chargée de tous ses éléments organiques (seul un dégrillage sommaire préalable est requis), et y reste au repos pendant une période calibrée selon les quantités d’eau traitées. Le substrat du bassin présente plusieurs étages de graviers à la granulométrie croissante. C’est la biomasse présente à l’étage supérieur (les macrophytes, souvent des roseaux, et leur flore bactérienne) qui permet de dégrader les matières organiques, pendant que l’eau, filtrée, avance dans le circuit. On

Consommation induite

compte deux à trois bassins à macrophytes afin d’atteindre les normes d’abbatage de MES, DBO et

Echelle de commercialisation

DCO dans l’eau avant son rejet (cf Tab. 4) . 2

X Particuliers, municipalités

Fig. 10 : Principe des bassins à macrophytes solides Eau usée liquides

graviers fins 80 cm

graviers grossiers galets

drainage

2 EPNAC-IRSTEA, Epuration des eaux usées domestiques par filtres plantés de macrophytes, 2005

27

Eau claire


Le lombrifiltre

Développé dans les années 2000, le

permettent de filtrer les particules que les vers

lombrifiltre joue sur la combinaison de deux

ne traitent pas, notamment les germes fécaux.

acteurs biologiques : les lombriciens (vers de terre

En fin de parcours, l’eau est récupérée en fond de

qui digèrent la terre et l’aèrent), et les bactéries

cuve. Ce dispositif biologique permet un excellent

aérobies. Sa flexibilité de mise en place est un

traitement des MES, DCO et DBO (cf tab. 5)4.

atout : la cuve peut être enterrée comme hors-sol,

Tab. 5 : Caractéristiques du lombrifiltre

et ne nécessite que peu d’entretien. On le retrouve

Traitement par lombrifiltre

aussi bien pour traiter les eaux usées de petites collectivités que dans des habitats individuels.

Phase de traitement

Secondaire

Etat de l’eau à l’entrée du circuit

Eaux vannes ou ménagères broyées

Effet

Excellent taux d’abbatage des MES 99%), DCO (85%), DB0 (99%), azote (84%) Faible action contre le phosphore et les micro-organismes

Sous-produit annexe

Lombricompost

Installation nécessaire

Cuve enterrée ou hors-sol 0,5m² de surface par équivalent habitant

l’effet de la gravité, et atteint les étages à composants

Consommation induite

X

minéraux (sables, graviers). C’est à ce niveau là

Echelle de commercialisation

Le lombrifiltre est un dispositif de bio-

traitement composé de plusieurs couches (fig. 11). Les eaux usées domestiques, après un premier broyage visant à réduire la taille des débris organiques, sont projetées au sommet de la cuve. Le premier étage est composé de copeaux de bois auxquels sont joints les lombriciens (à raison de 25.000 par m2)3. Ces vers de terre ingèrent les déchets et les excréments présents dans l’eau et les digèrent. L’eau descend petit à petit les étages sous

que se développent des bactéries aérobies qui

Particuliers, Municipalités

Fig. 11 : Principe du lombrifiltre solides Eau usée liquides poste d’injection lombriciens + copeaux de bois ( 1m ) sables + bactéries aérobies ( 50cm ) graviers ( 20cm )

Eau claire

4 Sohé assainissement, Guide d’utilisation de l’unité Débéo 5EH, 2015

3 Mairie de Combaillaux / CIHEAM-IAMM, LombriStation, épuration des eaux usées par les lombriciens, mai 2005

28


Les Micro-stations

Les micro-stations sont des reproductions

temporelle qui s’opère : on alterne les phases de

miniatures des stations d’épuration collective. On

décantation et d’aération dans une seule cuve au

en trouve aujourd’hui une trentaine d’agrées et

lieu de trois.

parues au Journal Officiel.

Tab. 6 : Caractéristiques des micro-stations Microstations

Elles peuvent être de deux ordres : à

boues activées ou à cultures fixées. Le système à boues activées (fig. 12) comporte trois cuves : la première sert à décanter les matières organiques principales ; la seconde est aérobie (on y injecte de l’air) afin de faire floculer les matières en

Phase de traitement

Primaire / secondaire

Etat de l’eau à l’entrée du circuit

Eaux vannes ou ménagères brutes Taux d’abbatage moyen des MES (50%), DBO (60%) et DCO (60%). Faible action contre le phosphore et les micro-organismes

Effet

suspension et les micro-organismes. Enfin, la dernière cuve permet de faire reposer les agrégats créés avant de récupérer l’eau claire. Les boues de la dernière cuve sont récupérées et insérées dans la première afin de faciliter la décantation des matières organiques par les bactéries : ce sont les boues activées. On les récupère ensuite depuis la première cuve.

Le système à boues fixées répond aux

mêmes principes, mais au lieu d’une séparation spatiale des procédés, c’est une séparation

Sous-produit annexe

Boues

Installation nécessaire

Cuves enterrées

Consommation induite

Energie électrique

Echelle de commercialisation

Particuliers

Fig. 12 : Principe des micro-stations Décanteur primaire

Aérateur Bactéries aérobies

Clarificateur

Arrivée des eaux usées brutes Eau claire

Récupération des boues

29


3. LES TRAITEMENTS TERTIAIRES

Les traitements tertiaires ou d’affinage

Ces traitements sont disponibles à des

ont pour but de rendre l’eau conforme aux normes

échelles très variées : de la station autonome avec

chimiques de potabilité mais aussi d’en améliorer

panneau solaire pour une utilisation individuelle ou

les qualités organoleptiques, c’est-à-dire ce qui la

domestique, à la station d’épuration municipale.

rend agréable à boire : goût, turpitude, ou odeur.

Fig. 13 : Principe du traitement UV solaire et non solaire

Pour ce faire, il faut jouer sur quatre facteurs : la présence résiduelle de matières en suspension

Eau claire

(MES), de micro-organismes pathogènes, de phosphore et d’azote.

UVc

Il est important de noter que ces

traitements ne sont pas indispensables selon les usages envisagés pour l’eau traitée : si elle est destinée à l’irrigation, les matières en suspension, le phosphore et l’azote sont autant de nutriments qui, en quantités controlées, servent à enrichir la terre.

Lampe UV

UV (solaire ou non)

Eau désinfectée

UVc

L’action des rayons ultra-violets (UV)

Eau claire

est essentiellement dirigée vers les microorganismes pathogènes (répartis en 4 catégories : virus, bactéries, protozoaires et vers). Le principe d’action est simple : les UV dirigés contre les micro-

Eau désinfectée

organismes s’attaquent directement à leur ADN, Réacteur

empêchant ainsi leur reproduction et conduisant à leur disparition. La longueur d’onde optimale est de 254nm5. Elle est présente naturellement dans

Tab. 7 : Caractéristiques du traitement UVc

les rayonnements UV solaires mais peut aussi être induite par une lampe à basse pression de vapeur

Traitement par UVc

de mercure (fig. 13).

Les critères à respecter pour que le

traitement soit efficace tiennent principalement à la clarté de l’eau : plus il y aura de particules opaques (comme les MES), plus les rayons UV seront stoppés. Un micro-organisme caché derrière une particule sera protégé et donc pas affecté par le

solaires

Phase de traitement

Tertiaire

Etat de l’eau à l’entrée du circuit

Eau claire

Effet

Désinfection X

Sous-produit annexe

traitement. Les traitements secondaires préalables sont donc indispensables.

Installation nécessaire

Cuve solaire

Réacteur avec lampe UV

Consommation induite

Energie solaire

Energie électrique

5 Genoud E., Le traitement de l’eau par UV, une méthode efficace pour éliminer les micro-organismes, Le Journal des Fluides n° 38 (Mai-Juin 2010)

Echelle de commercialisation

30

non solaires

Particuliers, Municipalités


Procédé de purification bio-solar

Tab. 8 : Caractéristiques de purification Bio-solar

Le procédé de purification Bio-Solar

développé par Helio-Pur reprend le principe de

Purification Bio-Solar

la désinfection par UV solaires en y joignant un apport de CO2 (fig. 14).

C’est un filtre biologique composé de

deux éléments : une cuve transparente, similaire au traitement UV classique, et une pompe à compresseur d’air, ou Airlift. C’est ce dispositif qui permet d’introduire du CO2 dans la cuve. Le but du dispositif est d’accélérer la photosynthèse, qui permet de transformer les germes fécaux en biomasses (petites algues). Ces organismes sont facilement récupérables en sortie de circuit, et sont une ressource bénéfique en matière de nutriments, tant pour les végétaux que pour les animaux.

Phase de traitement

Tertiaire

Etat de l’eau à l’entrée du circuit

Eau claire

Effet

Désinfection

Sous-produit annexe

Biomasses

Installation nécessaire

Cuve solaire, compresseur d’air pour injection de CO2

Consommation induite

Energie solaire

Echelle de commercialisation

Particuliers, Municipalités

Les rendements en terme de désinfection

sont meilleurs que le système à UV classique, et permettent la constitution d’un sous produit valorisable, les micro-algues (tab. 8).

Fig. 14 : Principe de purification Bio-solar

UVc

Oxygène

Eau désinfectée

Eau claire CO2

Biomasse

31


chloration, Ozonation, dephosporation

L’adjonction

aux

eaux

traitées

de

L’utilisation de l’ozone est bien plus

produits chimiques spécifiques est un procédé

coûteuse car elle nécessite des équipements

très communément utilisé. Ne reposant pas sur

spécifiques afin de créer l’ozone à partir d’air et

l’utilisation d’un rayonnement, la chloration et

d’électricité. C’est un gaz aux propriétés oxydantes

l’ozonation ne nécessitent pas de traitements

bien plus importantes que celles du chlore. Il

secondaires aussi performants que ce qu’exige un

possède aussi des propriétés désodorisantes qui

traitement par UV : ils purifieront tout aussi bien

en font un procédé efficace dans l’amélioration des

une eau moins claire et contenant plus de MES,

qualités organoleptiques de l’eau. Ce procédé reste

DBO et DCO.

très peu utilisé actuellement en raison de son coût.

Le produit utilisé le plus ancien est

Les

été

de

sujets

déphosphoration

le chlore, qui dispose d’une bonne capacité

actuels

à endommager les membranes des micro-

récents. Le phosphore est un élément favorisant

organismes, même en petite quantité. Facile

l’eutrophisation des milieux (cf 02.A.2 - Réduire

à mettre en place et peu chère, cette solution

la pollution des eaux), mais il est aussi un

présente toutefois le désavantage de former des

composant essentiel de nombreux fertilisants. Le

sous-produits possiblement cancérigènes . Une

récupérer sert donc un double objectif de réduction

étape supplémentaire de déchloration par l’ajout

de pollution et de valorisation de ressource. C’est

de bioxyde de souffre ou par charbons actifs est

ce que met en place la technologie StruviaTM de

souvent nécessaire afin d’en neutraliser les effets

Veolia : le phosphore est précipité en réacteur sous

indésirables (goût par exemple). Dans les cas où

forme de cristaux de struvite récupérables, grâce

l’eau n’est pas réutilisée sur site mais stockée,

à l’augmentationdu pH et à l’adjonction de sels de

elle est presque systématiquement chlorée afin

magnésium7.

6

ont

principes

de

développements

d’éviter la reformation de micro-organismes. Tab. 9 : Caractéristiques des traitements par chloration, ozonation, et déphosphoration Chloration Phase de traitement Etat de l’eau à l’entrée du circuit Effet

Ozonation

Déphosphoration

Tertiaire

Tertiaire

Tertiaire

Eau claire

Eau claire

Eau claire

Désinfection, affinage de Désinfection, affinage de l’abattage des MES, DBO et DCO l’abattage des MES, DBO et DCO

Précipite le phosphore en cristaux de struvite (99%)

X

X

Cristaux de struvite (fertilisant)

Installation nécessaire

Réacteur

Réacteur

Réacteur

Consommation induite

X

Sous-produit annexe

Echelle de commercialisation

Municipalités, industries

Energie électrique Municipalités, industries

X Municipalités, industries

7 Veolia Water Technologiy Communication, StruviaTM, le recyclage durable du phosphore à partir des eaux usées, Novembre 2015

6 Bourbon B., Lapalus G, Le Daheron V., Louvet C., Marais J., Pages M., Les traitements tertiaires : pour quoi faire ?, 2015

32


Combinés de traitements tertiaires

Tab. 10 : Caractéristiques des combinés de traitements tertiaires

Plusieurs entreprises ont développé des

stations à usage des particuliers pour améliorer les propriétés de l’eau arrivant du circuit collectif.

Combiné de traitements

Ces stations prêtes à l’emploi existent à plusieurs échelles : un traitement de l’eau à l’arrivée dans le logement, un traitement à chaque point de consommation d’eau (sous l’évier par exemple), ou en traitement des arrivées d’eau alternatives comme l’eau de pluie. Elles n’ont pas vocation à

Phase de traitement

Tertiaire

Etat de l’eau à l’entrée du circuit

Eau potable

Effet

Désinfection, réduction des MES, déphosphoration

potabiliser l’eau mais à en améliorer le goût, l’odeur, Sous-produit annexe

la clarté, etc.

Ce sont souvent des stations combinant

plusieurs traitements tertiaires basiques : filtres

Installation nécessaire

Stations individuelles (succession de filtration, charbon actif, lampe à UVc)

Consommation induite

Energie électrique

Echelle de commercialisation

Particuliers

à particules, filtres à charbon actif supprimant le goût du chlore, déphosphoration, lampes à UV... Ces stations nécessitent un entretien régulier (changement des filtres par exemple) afin de garantir leur efficacité.

33

X


03

C - RÉUTILISER LES RESSOURCES ANNEXES

Retraiter les eaux usées, c’est en extraire

Le système Energy Recycling System

les composés qui s’y sont intégrées lors du

ou E.R.S., mis en place via un partenariat entre

processus de consommation. Une grande partie

BioFluides

de ces composés est une ressource possiblement

Construction

réutilisable. Il est aussi intéressant de voir qu’au-

parisiennes de logements sociaux de se doter

delà du traitement, la mise en place de circuits

d’un dispositif de captation des calories des eaux

bouclés annexes peuvent tirer parti des eaux usées

usées vers la production d’eau chaude sanitaire.

mais ne sont pas des dispositifs de traitement.

Le dispositif permet de récupérer 49 000 KWh/an,

Environnement a

permis

et à

Paris

deux

Ouest

opérations

soit 55% des besoins en énergie pour l’eau chaude sanitaire des bâtiments1.

1. ENERGIE

Le système regroupe les eaux usées dans

On a pu le constater précédemment (cf

un volume d’eau (ballon de préchauffage). L’eau

01.C.3 : Les ressources à récupérer, opportunités

usée refroidie est ensuite éjectée. L’eau chauffée à

à saisir), les eaux ménagères entrent dans le circuit

45°C intègre alors le ballon d’eau chaude sanitaire

des eaux usées à une température moyenne de

(E.C.S.), dont la température est encore augmentée

32°C. Concernant les lave-linges et lave-vaisselles

à l’aide d’une chaudière électrique avant de pouvoir

uniquement, cette valeur s’établit à 50°C.

intégrer le circuit de consommation (fig. 15).

un dispositif qui, par transfert de calories, chauffe

Fig. 15 : Principe de fonctionnement de l’Energy Recycling System (E.R.S.)

55°C

Chaudière

Ballon E.C.S.

10°C Arrivée d’eau 37°C

45°C

Ballon de préchauffage E.C.S.

9°C

32°C Consommation

Eaux usées à traiter

E.R.S. 1 STARQUEST CAPITAL, Logements : une eau chaude recyclée à partir des eaux grises usées, 2013

34


2. BOUES, MATIÈRES ORGANIQUES ET BIOMASSE

En extrayant les différents composants

Le compostage réemploie les matières

des eaux usées, une grande partie des systèmes

sèches des boues et les associe aux déchets verts

de traitement conduit à la production de sous

(issus

produits : boues ou biomasse par exemple.

macrophytes par exemple) pour produire un

des

faucardages

des

bassins

à

compost aéré dont les qualités sont maîtrisées. Les boues issues des différentes stations

De par leur nature très humide et très compacte,

d’épuration municipales (STEP) ont des devenirs

les boues sont difficilement brûlées, ce qui fait de

variés (fig. 16). En 2010, environ 1,1 millions

la filière incinération un moyen peu écologique de

de tonnes de matière sèche ont été produites

les supprimer.

en France . Chaque technique de valorisation

Faisant partie de la catégorie des déchets non

ou d’élimination nécessite une déshydratation

dangereux, ces boues sont enfouissables après

préalable et un traitement spécifique.

déshydratation.

2

Dans le cas de boues issues de systèmes de Fig. 16 : Valorisation / élimination des boues produites en France en 2010

petites dimensions (habitat individuel, petites municipalités), elles sont intégrées majoritairement à un système de compostage.

43% 33%

Les

matières

organiques

fécales

récupérées des toilettes sèches sont également valorisables via la filière du compostage. Ces

18%

systèmes sont en voie de développement, comme le montrent l’apparition de nouvelles subventions 1%

en Bretagne pour la filière du compostage et la

1%

mise en place d’une filière de valorisation des urines3.

Ep

an ag da r g Co icol e m e po st ag e In ci né ra tio n S En to fo ck ui ag ss e ge Va l in oris du a st tio En riell n e d’ vo au yé tre e s S ver TE s P

4%

Les biomasses issues par exemple des

systèmes Bio-Solar sont également d’excellents

L’épandage agricole consiste à récupérer

fertilisants car elles contiennent les nutriments

la matière sèche des boues pour les déposer dans

nécessaires au développement des végétaux

les zones de culture. Etant donné la faible marge

lorsqu’ils sont intégrés dans la terre, mais

de manoeuvre sur la qualité de la matière déposée,

également au développement animal lorsqu’elles

et malgré son coût peu élevé, ce procédé tend à

sont réinjectées dans des systèmes aquaponiques

diminuer au profit du compostage.

par exemple.

2 AMORCE, Boues de station d’épuration : techniques de traitement, valorisation et élimination, mis en ligne en Novembre 2012

3 Ginisty F., Assainissement écologique : pour la première fois, des toilettes sèches vont équiper un habitat collectif, L’âge de faire, n° 138 (Février 2019)

35


3. CIRCUITS D’EAU ANNEXES

Fig. 17 : Principe de fonctionnement de l’aquaponie en boucle fermée

Cultures Absorbent les nutriments (nitrates) et renvoient une eau propre

Au cours du processus de traitement,

notamment après les traitements secondaires, d’autres boucles peuvent être greffées sur les

Bassin à poissons Produisent des déjections

circuits d’eau.

Systèmes aquaponiques

Les systèmes aquaponiques se basent

sur l’interaction de trois entités : les végétaux, les animaux et les bactéries. Le principe de base est un circuit fermé (fig. 17). Des poissons sont élevés dans des aquariums. Ils produisent des déjections (excréments et urine). L’eau souillée est envoyée

Cuve à bactéries Transforment l’ammoniaque et l’urée des poissons en nitrates

dans une cuve bactérienne, où les bactéries dégradent l’urée et l’ammoniaque en nitrates. Cette eau arrive alors dans des bacs où des plantes sont mises en culture. Trois techniques existent : sur

Plantes comestibles

des racs flottants, dans un substrat perméable

Poissons comestibles

ou par gouttière, l’important étant que les racines végétales soient en contact direct avec l’eau. Les plantes se nourrissent des nitrates, nutriments

Fig. 18 : Principe de fonctionnement de l’aquaponie connectée à un système de traitement

alors présents dans l’eau et rendent l’eau propre pour être renvoyée aux poissons. La culture de

Arrivée d’eau usée après traitement secondaire

plantes maraîchères ou aromatiques en permet la consommation, tout comme l’élevage contrôlé des

Cultures

poissons, si les espèces choisies sont comestibles (un exemple classique est la truite).

Bassin à poissons

Ces systèmes disposent également d’une

alternative connectée à un réseau de traitement (fig. 18) : les eaux usées, après un traitement secondaire sont riches en phosphore et en azote qui sont très nutritifs pour les plantes. Elles absorbent ainsi ces nutriments avant de renvoyer l’eau claire aux poissons. Avec l’ajout d’une source d’eau supplémentaire, il faut rééquilibrer le cycle en ouvrant une sortie, l’eau pouvant alors être soumise à des traitements tertiaires. Cuve à bactéries Evacuation du trop-plein possible continuité de traitement

36


Micro-algues

Qualifiées d’or vert, les micro-algues

sont dotées de nombreuses propriétés propices aux développements de systèmes de production d’énergie. Installées dans des panneaux de façade, elles permettraient à l’avenir de produire de l’électricité par la production de biogaz, aussi bien que d’assurer un confort thermique.

Bien qu’encore assez peu utilisés car peu

connus et récemment développés, il existe déjà des panneaux de façade utilisant cette technologie, appelée colonne Morris. L’utilisation de ces algues mène à trois actions concrètes bénéfiques au

développement

écologique

de

la

ville :

purification du CO2 présent dans l’air, production de biométhanes et de biogaz, et finalement récupération d’une biomasse valorisable1.

Fig. 19 : Principe de fonctionnement des panneaux à micro-algues

Le procédé se déroule ainsi en trois

temps (fig. 19) : les algues sont baignées entre deux couches de verre dans une eau enrichie en

Arrivée d’eau usée après traitement secondaire

nutriments nécessaires à leur développement. En utilisant le CO2 présent dans l’air et la lumière,

Nutriments liquides

elles se développent par photosynthèse. Au cours de la photosynthèse, de la chaleur est produite, qui pourrait à terme être récupérable et participer

CO2

au chauffage du bâtiment. Les panneaux sont

Air purifié

en fait des bains de culture voués à maximiser le Panneau de façade Photosynthèse

développement des algues. Celles-ci sont ensuite récupérées, afin de les faire fermenter en cuve (digesteur) pour en extraire un biogaz (production d’électricité verte) ou des biométhanes (production de biocarburants). Une fois ce processus terminé, les algues sont séchées et transformées en

Digesteur fermentation

biomasse réutilisable.

Il est à noter que l’utilisation de ces Evacuation possible continuité de traitement

panneaux de façade impose la visibilité des algues et leur teinte verte.

1 Les micro-algues : la ressource énergétique du futur, L’EnerGEEK, mis en ligne le 7 Juin 2017

37

Biométhanes Biogaz

Biomasse


0


03

03 FREINS ET LEVIERS AU RÉEMPLOI SUR SITE DE L’EAU DANS L’HABITAT COLLECTIF EN FRANCE

39


03

A - UN CADRE LÉGAL CONTRAIGNANT

L’eau

étant

considérée

comme

2. LE CAS FRANÇAIS

un

patrimoine public, son utilisation est soumise à de nombreuses législations qui contraignent sa

consommation et son retraitement.

d’un Code de l’Eau qui regrouperait l’ensemble

La législation française ne dispose pas

des lois et décrets liés à la ressource. Toutes ces législations sont éparpillées entre le code

1. L’INFLUENCE DU DROIT INTERNATIONAL

de l’environnement, le code des collectivités territoriales, le code pénal etc. Toutefois, on peut

distinguer la construction progressive et toujours Le droit international adopte le principe de

actuelle d’un régime juridique de l’eau organisé

souveraineté nationale en matière de législation sur

autour de trois grandes lois sur l’eau : la loi du 16

l’eau. Cela signifie que, bien que divers organismes

décembre 1964 relative au régime et à la répartition

comme l’UNESCO ou l’OMS publient régulièrement

des eaux et à la lutte contre leur pollution ; la loi du

des recommandations juridiques, chaque pays

3 janvier 1992 sur l’eau, et la loi du 30 décembre

est libre de légiférer comme il l’entend. Toutefois,

2006 sur l’eau et les milieux aquatiques.

ce principe de souveraineté nationale est limité par le principe de coopération, qui impose par

exemple une gestion équitable et raisonnable

la loi les nécessités de protection de la ressource

de la ressource en eau. Les Etats riverains et

face à la pollution, en mettant en place des moyens

partageant par exemple un fleuve ont obligation de

de contrôler les bassins hydrographiques et de

coopérer sur la mise en place de leurs législations,

sanctionner les pollueurs. Elle institut aussi les

ou devront en répondre devant la Cour de Justice

Agences Financières de Bassin (appelées Agences

Internationale (CIJ) .

de l’Eau depuis 1991), dont le rôle est de mettre en

1

La loi du 16 décembre 19643 intègre dans

place les moyens de contrôle, de traitement, et de

Le droit de l’Union Européenne (UE)

protection des eaux.

présente quant à lui beaucoup plus de contraintes imposées à l’ensemble des états membres. Ainsi,

la directive cadre sur l’eau du 22 décembre 20002

précisément la gestion de l’eau par la mise en

fixe des normes générales en matière de qualité et

place de deux documents : les schémas directeurs

de quantité de consommation de l’eau. Elle soumet

d’aménagement et de gestion des eaux (SDAGE)

les états membres à des exigences de résultats,

et les schémas d’aménagement et de gestion des

dans des délais prescrits. L’objectif de cette loi est

eaux (SAGE), différencié par l’échelle d’action (les

d’harmoniser les juridictions européennes en vue

SAGE correspondant à une portion réduite des

de protéger efficacement le patrimoine aquatique.

SDAGE).

La loi du 3 janvier 19924 organise plus

1 Encyclopédie de l’environnement, Le droit de l’eau en France, [en ligne]

3 Loi n° 64-1245 du 16 décembre 1964 relative au régime et à la répartition des eaux et à la lutte contre leur pollution, JORF, 18 décembre 1964

2 Directive 2000/60/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2000 établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l’eau, JOCE, n° L 327, 22 décembre 2000

4 La loi n° 92-3 sur l’eau du 3 janvier 1992, JORF, n° 3, 4 janvier 1992

40


La loi sur l’eau du 30 décembre 20065

domestiques spécifiques : hygiène (douches, bains)

renforce la loi de 1992 en garantissant l’accès à

et consommation (eau de cuisine, de boisson) ;

l’eau dans des conditions économiques viables.

ainsi que des seuils de qualité. Les paramètres

Autour de ces trois lois gravitent nombres

microbiologiques, chimiques et organoleptiques

de réglementations annexes. Parmi elles, on

de l’eau requis pour sa consommation humaine

trouve certains arrêtés qui définissent l’usage

(toute utilisation sur équipement résidentiel donc)

de l’eau potable obligatoire pour des usages

sont très clairement définis (fig. 20).

6

Fig. 20 : Extrait de l’arrêté du 11 janvier 2007 définissant les normes de qualités microbiologiques, chimiques et organoleptiques de l’eau destinée à la consommation humaine

5 Loi n° 2006-1772 du 30 décembre 2006 sur l’eau et les milieux aquatiques, JORF n° 303, du 31 décembre 2006 6 Arrêté du 11 janvier 2007 relatif aux limites et références de qualité des eaux brutes et des eaux destinées à la consommation humaine, JORF n°31, 6 février 2007

41


3. LE RÉEMPLOI SUR SITE : SYSTÈME DU CAS PAR CAS Les différents systèmes de traitement

les propriétaires à garantir la conformité de

autonome ou assainissement sur site sont

leur installation sous un délai de quatre ans,

sujets à une évaluation de leurs performances

tant

avant la mise sur le marché. Ces filières agrées

d’eau que pour le rejet dans l’espace naturel.

dépendent des Services Publics d’Assainissement

Non Collectif (SPANC), qui détermine la viabilité

des dispositifs. Le SPANC a deux missions

traitement des eaux usées et leur réemploi sur site

principales7 : guider les professionnels dans la

dépend donc d’une coopération entre différents

mise en place des assainissements autonomes,

acteurs : les entreprises créatrices des technologies

et en contrôler les installations. Pour atteindre ces

de retraitement, les municipalités, les différents

objectifs, les professionnels peuvent mettre en

organismes

place plusieurs démarches, dont l’établissement

et

d’un

résidentiels.

Avis

Technique

(procédure

décrite

et

encadrée par l’arrêté du 02/12/1969). Celui-ci est

pour

des

qualités

de

consommation

La mise en place d’un système de

bailleurs

de

contrôles,

sociaux

les

initiateurs

constructeurs des

projets

En synthèse

délivré après analyse exhaustive des capacités du dispositif, notamment après installation test

et plusieurs années de fonctionnement. Ces

au réemploi sur site de l’eau traitée. Les textes

vérifications permettent de garantir une qualité de

citant les eaux usées n’envisagent que leur

l’eau répondant aux normes en vigueur.

utilisation pour l’irrigation. Jusqu’en 2014, il

Il n’existe pas en France de loi spécifique

était même interdit de faire circuler de l’eau

Les systèmes de retraitement sur site

non potable dans des circuits internes au

font partie de l’assainissement non collectif : le

logement. Bénéficiant d’un trou juridique, les

cas le plus courant étant par exemple les fosses

systèmes de boucle fermée doivent uniquement

septiques chez les particuliers qui ne peuvent

répondre à deux conditions : respecter les

pas être reliés au tout-à-l’égoût. En celà, ils

normes de traitement des eaux usées, et

sont soumis à deux législations principales :

satisfaire les exigences de qualités chimiques,

la loi sur l’eau et les milieux aquatiques de

microbiologiques et organoleptiques requises

2006 (LEMA)8, et la deuxième loi Grenelle9, qui

par la loi pour la consommation humaine. Au delà

ont défini les exigences requises. La LEMA de 2006 a donné aux maires et aux communautés

de l’aspect législatif, c’est la frilosité du SPANC

d’agglomération des outils pour gérer les services

concernant les accréditations des dispositifs qui

publics d’eau et l’assainissement, notamment

limite leur développement.

en

matière

de

contrôle

des

dispositifs

La mise en place de systèmes de

d’assainissement non collectifs. La deuxième

retraitement combinés au réemploi sur site

loi grenelle leur permet en outre de contraindre

de l’eau est donc traitée au cas par cas par les organismes de contrôle. Toutes ces procédures nécessitent un véritable investissement de la

7 Ministère de la transition écologique et solidaire et Ministère des solidarités et de la santé, Portail sur l’assainissement non collectif, [en ligne]

part des constructeurs et bailleurs sociaux (conjointement aux entreprises d’installation) qui

8 Loi n° 2006-1772 du 30 décembre 2006 sur l’eau et les milieux aquatiques, JORF n° 303, du 31 décembre 2006

doivent alors trouver leur compte ailleurs dans la

9 Grenelle II ou Loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement JORF n°0160, 13 juillet 2010

leur rentabilité.

mise en place de ces systèmes, notamment par

42


03

B - COÛTS ET FINANCEMENTS 1. RENTABILITÉ COMPARATIVE Pour calculer la rentabilité des systèmes

systèmes permettant de traiter les eaux usées

de traitement sur site (que nous appellerons TSS),

domestiques sur site en vue de réutiliser l’eau

il faut les comparer avec les frais qu’engendrent

comme eau de consommation. Ce sont forcément

un raccordement au tout-à-l’égout, et aux stations

des circuits complets pour potabiliser l’eau

d’épuration (STEP). On utilise pour ce faire un

(traitement secondaire et tertiaire). Ces dispositifs

ensemble de données de base moyennes, qui

exemptent les habitants concernés de la part

rendent compte d’une synthèse de plusieurs

du prix de l’eau dédiée à son assainissement,

sources

rapportant

1,2,3,4

tant sur les consommations que sur

prix

de

l’eau

à

2,05€/m³.

les systèmes utilisés.

le

Ce que l’on nommera STEP neuve

correspond

Les TSS avec rejet sont les systèmes

au

raccordement

d’un

habitat

permettant de traiter les eaux usées domestiques

au réseau urbain de traitement de l’eau, avec

sur site avant de les rejeter dans la nature sans

le paiement sur 20 ans de la construction

passer par les circuits de traitement municipaux,

de la station d’épuration. La STEP existante

constitués

secondaires

correspondra au raccordement de l’habitat au

majoritairement. Les TSS avec réemploi sont les

réseau urbain, dans les cas où la station existe déjà.

de

traitements

Durée de vie

Consommation

Prix

- La durée de vie moyenne

- Sur la base de la consommation

- Le prix de l’eau moyen en France

estimée d’une STEP est de 100

moyenne par foyer de 430L/jour,

en 2014 est de 3,98€/m³ dont

ans. Son financement se fait sur

on obtient une consommation de

2,05€ dédié à la potabilisation

20 ans ;

157m³/foyer/an ;

et au transport et 1,93€ dédié à

- La durée de vie moyenne d’un

- Dans le cas d’un TSS avec

TSS secondaire et tertiaire est

réemploi, on estime à 90% la part

- Les tarifs du SPANC sont

estimée aux alentours 25 ans.

d’eau recyclée dans le volume

standardisés

d’eau consommée, soit 10% d’eau

dérives existent : le contrôle initial

provenant du réseau, équivalent à

est tarifé à 130€, la redevance

15,7m³/foyer/an.

annuelle

l’assainissement ;

est

(bien

que

de

33€/an

moyen

des

des

en

moyenne) ; -

Le

prix

TSS

secondaires est estimé autour de 8 000 € (cas des microstations et des lombrifiltres par exemple) ; 1 Le service public d’information sur l’eau, Le prix de l’eau, [en ligne] 2

- Le prix moyen des TSS tertiaires

ECLA, L’assainissement non collectif, [en ligne]

est estimé autour de 4 000 € (UV,

3 Higounenc F. et Sécher M., Etude de la rentabilité d’une STEP, [en ligne]

et charbon actif).

4 Tricel Environnement, Coût annuel d’une microstation d’épuration, [en ligne]

43


Pour établir la rentabilité des systèmes, on

met en place une formule permettant de chiffrer globalement les coûts liés au dispositif : Frais de mise en place

Frais de fonctionnement, d’entretien et de consommation

+

Uniques

Annuels

Il est primordial de noter que ces coûts d’investissements

correspondent

aux

coûts

pour un foyer unique et pour une installation (ou un raccordement unique). Nous verrons par la suite comment considérer ces résultats pour une multitude de foyers.

LES STATIONS D’ÉPURATION NEUVES

LES STATIONS D’ÉPURATIONS EXISTANTES

Dans le cas des STEP neuves, la mise en

Dans le cas d’une municipalité dont la

place du dispositif municipal est un investissement

station d’épuration ne nécessite pas de transition

important. Il est répercuté sur la facture d’eau des

ou de réfection à neuf, les seuls frais facturés aux

foyers qui sont enregistrés comme bénéficiant du

foyers connectés sont les frais d’entretien, les

service d’assainissement des eaux usées.

taxes et l’eau achetée.

Prix du terrain + prix d’installation + prix des réseaux + sécurité de 10% pour imprévus - subventions

:

prix de l’eau x consommation d’eau par foyer

nombre de foyers reliés

Annuels

Uniques Prix du terrain + prix d’installation + nombre + prix des réseaux de foyers : + sécurité de 10% pour imprévus reliés prix de l’eau - subventions x consommation d’eau par foyer Uniques Annuels

prix de l’eau x consommation d’eau par foyer

On obtient alors la formule Annuels

suivante :

3,98 €/m³ x 157 m³/an = 625 €/foyer/an

prix de l’eau

Pour une ville de taille moyenne, cefoyer prix s’établit à x consommation d’eau par

3,98 €/m³ 5 90 €/an/foyer, Annuelssur une durée de 20 ans .On établit

Annuels

x 157 m³/an 90 €/foyer/ an + = 625 €/foyer/an alors la formule suivante : Annualisés (sur 20 ans) Annuels

+

d’investissement

Annuels

+

90 €/foyer/ an Annualisés (sur 20 ans)

3,98 €/m³ x 157 m³/an = 625 €/foyer/an

Cette formule représente la situation d’une majorité des foyers en France : en effet on estime que 95%

3,98 €/m³ x 157 m³/an = 625 €/foyer/an

des logements sont reliés au tout à l’égoût6 et utilisent les services d’assainissement des eaux

Annuels

usées de la municipalité.

5 CAPAS, Station d’épuration : le coût complet (détail des calculs), [en ligne]

6

44

ECLA, L’assainissement non collectif, [en ligne]


LES TRAITEMENTS SUR SITE AVEC REJET

LES TRAITEMENTS SUR SITE AVEC RÉEMPLOI

Les TSS rejetant l’eau n’ont pas de lien

Tout comme les TSS avec rejet, les TSS

avec les stations d’épuration municipales, ce qui

avec réemploi de l’eau usée n’ont pas de frais

induit deux conséquences : d’une part les foyers

en lien avec l’assainissement municipal. Le prix

concernés ne payent pas les frais d’installation de

de l’eau est donc aussi de 2,05 €/m3. La formule

la STEP, d’autre part le prix de l’eau est de 2,05 €/m3

générale d’investissement est identique, mais les

en moyenne, car les frais d’assainissements sont

valeurs qui y sont associées changent.

exclus.

Frais d’installation + contrôle SPANC

Frais d’installation + contrôle SPANC Uniques

Uniques

+

+

Redevance SPANC + frais d’entretien des installations + frais de consommation d’eau

Redevance SPANC + frais d’entretien des installations + frais de consommation d’eau

Annuels

Annuels

Nécessitant

des

traitements

de

Les TSS avec rejet ne disposent que

potabilisation de l’eau, ces dispositifs sont plus

de traitements secondaires, ce qui en fait des

chers à l’achat (12 000 € en moyenne basse) et

installations moins coûteuses que les TSS avec

induisent également des frais d’entretien plus

réemploi de l’eau nettoyée, on se trouve aux

€ élevés,12de000 l’ordre de 250 €/an.

alentours 8 000des € 8 000 €. Le coût d’entretien est lui

8 130 € Frais d’installation + 130moins € aussi bien élevé avec une moyenne globale + contrôle SPANC Uniques de 150 €/an, bien que les fraisUniques soient en réalité + + Uniques

+ 130 €

Uniques

12 130 €

Cependant, l’avantage de ces systèmes Uniques Frais d’installation

est la réinjection dans le circuit de consommation + contrôle SPANC

+

+

de l’eau nettoyée. Cela évite alors de reprendre de Uniques

l’eau 33 au€ +réseau à 15,7m³/ 250 € municipal. € + On estime 315

plutôt ramassés par période (l’entretien décennal +

+ 32 €

foyer/an la consommation d’eau du réseau.

par exemple). 33 € + 150 €

505 € Redevance + frais d’entretien installations + 322 €consommations Les frais deSPANC d’eaudes s’élèvent quant + frais de consommation d’eau Annuels à eux à 322€ par an : Annuels Annuels

Redevance SPANC + frais d’entretien des installations Annuels Ainsi, les frais liés à l’eau duAnnuels réseau sont de + frais de consommation d’eau

32 €/foyer/an : Annuels

2,05 €/m³ x 157 m³/foyer/an = 322 €/foyer/an

2,05 €/m³ x 15,7 m³/foyer/an = 32 €/foyer/an

On obtient ainsi la formule d’investissement par

On obtient ainsi la formule d’investissement par

foyer suivante :

foyer suivante :

8 000 € + 130 € Uniques

+

Uniques

33 € + 150 € + 322 € Annuels

12 000 € + 130 €

8 130 €

Uniques

+

+

12 130 € Uniques

33 € + 250 € + 32 €

505 € Annuels

Annuels

45

+ 315 €

Annuels


COMPARAISON DES SYSTÈMES

A

partir

des

différentes

formules

On se base sur un habitat collectif

d’investissements, on peut mettre en place

abritant 10 foyers. Les besoins surdimensionnés

un graphique comparatif de la rentabilité des

des systèmes TSS induisent une augmentation

différents systèmes pour un foyer unique (fig.

approximative de 50% de leurs prix7.

21). Pour rappel, les TSS correspondent aux

La formule d’investissement par foyer dans le

traitements sur site, les STEP au raccordement en

cadre d’un immeuble de 10 logements change

station d’épuration.

alors pour devenir :

(

Trois constats sont à établir :

Premièrement, on voit qu’au moment de la

Frais d’installation + contrôle SPANC

Uniques

( (

) ) )

Frais d’installation + + contrôle SPANC Redevance SPANC + frais d’entretien des Uniques installations +

fin de leur durée de vie théorique (25 ans), aussi bien les systèmes de traitement sur site avec rejet de l’eau que ceux avec réemploi direct sont moins rentables que le raccordement aux stations

:

nombre de foyers reliés

:

nombre de foyers reliés nombre

:

de foyers reliés

(dès 21ans d’utilisation), les traitements sur site

Annuels Redevance SPANC + nombre : + frais d’entretien de foyers + frais dedes consommation d’eau installations reliés Annuels Annuels

avec réemploi de l’eau sont plus rentables que

ceux rejettant l’eau dans la nature.

réduites, tantrejet pour les traitements avec rejet que TSS avec TSS avec réemploi

(

d’épuration.

Deuxièmement, on constate qu’à terme

Troisièmement,

on

constate

que

+

Les sommes sont alors considérablement + frais de consommation d’eau

Annuels

si

pour les traitements avec réemploi : 1 213 €

l’utilisation des traitements sur site avec réemploi

TSS avec rejet Uniques

perdure au-delà de leur durée de vie théorique, ils

+

deviennent plus rentables que le raccordement

18 € Uniques + 322 €

De cela on peut déduire qu’actuellement,

Annuels

dans le cadre d’un logement individuel, les

18 € + 322 €

installations de retraitement sur site ne sont pas rentables. Face à ça se présentent deux solutions :

340 €

+

1 813 €

TSS avec réemploi Uniques

+

1 813 €

1 213 €

aux traitements municipaux.

)

28 € Uniques + 32 € Annuels 28 € + 32 €

340 €

60 €

+ 60 €

Annuels

Annuels

ou bien avoir des systèmes dont la durée de vie atteint les 35 ans pour les TSS avec réemploi et

En comparant la rentabilité de ces

au moins 50 ans pour les TSS avec rejet, ou bien

systèmes avec le raccordement aux stations

baisser les frais de mises en place et les frais

d’épuration (fig. 22), il devient évident que les TSS

d’entretien du système.

sont économiquement très rentables, et ce dès la 3e année pour les TSS avec réemploi, et la 4e pour

C’est

intéressante

là :

qu’arrive mutualiser

une

proposition

les

installations

les TSS avec rejet.

On constate également une rentabilité

autour d’un certain nombre de foyers dans le

bien meilleure des traitements avec réemploi que

cadre d’habitats collectifs. Si les frais de mise

celle des traitements avec rejet, amortissant dès la

en place augmentent un peu, ils n’augmentent

seconde année leur prix initial.

pas proportionnellement au nombre de foyers raccordés.

7 Tricel Environnement, Coût annuel d’une microstation d’épuration, [en ligne]

46


Fig. 21 : Comparaison de la rentabilité de 4 systèmes de traitement des eaux usées pour un foyer individuel Investissement ( en € ) 40 000

Durée de vie théorique des TSS

TSS avec réemploi TSS avec rejet

30 000

STEP neuve STEP existante

20 000

12 000 10 000 8 000

0

5

10

15

20

25

30

20,5 n ( en années )

35 31,5

40 33

Fig. 22 : Comparaison de la rentabilité de 4 systèmes de traitement des eaux usées pour un foyer au sein d’un habitat collectif de 10 logements Investissement ( en € ) 40 000

Durée de vie théorique des TSS

TSS avec réemploi TSS avec rejet

30 000

STEP neuve STEP existante

20 000

10 000

1 800 1 200 0

5 2 3 4

10

15

20 n ( en années )

47

25

30

35

40


2. SUBVENTIONS ET PRIMES

Assainissement non collectif

Les subventionnements se font à deux

niveaux : d’une part au niveau des municipalités pour le développement de filières de retraitement

Là encore les Agences de l’Eau jouent un

des boues ou pour faire transitionner leurs stations

rôle primordial dans l’obtention de subventions. Il

d’épuration vers des stations biologiques ; d’autre

faut préciser que bien que les subventions visent

part à destination des particuliers pour les aider

les traitements non collectifs (c’est-à-dire non

à mettre en place leur système de traitement

raccordés aux stations d’épuration municipales),

autonome.

les Agences de l’Eau n’ont pas pour interlocuteur des particuliers mais des bureaux d’études, syndicats ou constructeurs. Les aides octroyées

Assainissement collectif

peuvent monter jusqu’à 60% du coût de l’étude et

Les

subventions

à

destination

des travaux, avec un plafond fixé à 3 000€9.

des

collectivités émanent des conseils régionnaux et départementaux (parfois jusqu’à hauteur de 25%

D’autres organismes moins attendus

du prix de la station d’épuration) mais aussi des

peuvent participer également : l’agence nationale

diverses Agences de l’Eau. Ces subventions visent

de l’habitat (ANAH), jusqu’à 50% du coût des travaux

la plupart du temps à développer les filières peu

et 50 000€ ; la caisse des retraites jusqu’à 3 500€ ;

énergivores et peu polluantes. Elles proviennent de

et le SPANC (Services publics d’assainissement

l’argent des redevances collectées via la facture

non collectif) également jusqu’à 60% du prix des

d’eau de tous les usagers connectés aux stations

travaux10.

d’épuration (par le biais de la taxe d’assainissement d’un montant de 1,93 €/m3 d’eau consommée).

contractés pour le financement des installations : la

Les subventions servant au financement

Des

prêts

peuvent

également

être

stations

CAF propose des prêts de 1 000€ à ses bénéficiaires,

d’épuration, il existe aussi des primes dédiées

et l’ADEME (Agence de l’Environnement et de la

à récompenser l’efficacité des dispositifs. Ainsi,

Maîtrise de l’Énergie) propose des prêts à taux zéro

l’Agence de l’Eau de Bretagne a mis en place

jusqu’à 10 000€.

préalable

à

la

construction

des

une prime à l’assainissement collectif en 2018 , 8

dédommageant

financièrement

les

maitres

Tous les dispositifs ne sont pas elligibles

d’ouvrages de stations d’épuration selon les

aux subventions et prêts. La situation du projet

qualités de l’eau traitée.

(réhabilitation ou neuf) et la situation personnelle

Ces

primes

accompagnées

de

et

subventions

contrôles

réguliers

dans le cas de logements individuels influencent

sont

également

du

l’obtention

ou

non

des

divers

financements.

fonctionnement des systèmes de traitement.

9 Agence de l’eau, Les aides financières de l’agence de l’eau Loire-Bretagne en assainissement non collectif, 2018

8 Agence de l’eau, Prime - assainissement collectif, [en ligne]

10 Green Tech Journal, Les subventions pour une micro-station d’épuration, [en ligne]

48


Fig. 23 : Comparaison de la rentabilité de 4 systèmes de traitement des eaux usées pour un foyer individuel avec des subventions à 60%

Investissement ( en € ) 40 000

Durée de vie théorique des TSS

TSS avec réemploi TSS avec réemploi subventionné 30 000

TSS avec rejet TSS avec rejet subventionné STEP neuve

20 000

STEP existante

10 000 4 800 3 200 0

5

10

15 11

20

25

30

35

40

22 n ( en années )

Si l’on se doute que les subventions

Le seuil de rentabilité d’un TSS avec

rendent les TSS d’autant plus rentables qu’ils ne

réemploi face au raccordement à une STEP

le sont déjà théoriquement à l’échelle d’un habitat

existante est alors établi à 15 ans, tandis que

collectif, on se rend compte en revanche qu’une

celui d’un TSS avec rejet est de 22 ans. Ces deux

subvention de 60% des travaux permet de les

valeurs étant inférieures à la durée de vie théorique

rendre suffisemment rentables dans le cadre

des TSS, on constate que les subventions sont

d’habitats individuels (fig. 23), et ce à partir de la

indispensables à la rentabilité de tels systèmes au

11 année au mieux face à une STEP neuve.

niveau des logements individuels, ce qui n’est pas

e

le cas pour le collectif.

49


3. INADAPTATION AU MODÈLE ÉCONOMIQUE Un des principaux freins au développement

40%11. Cette baisse des volumes traités entraîne

des traitements sur site, avec ou sans réemploi

une baisse des revenus liés à l’assainissement,

est sans conteste son inadaptation au modèle

récupérés par la taxe d’assainissement sur

économique en vigueur en France et à la grande

la facture d’eau. Or la majorité de leurs frais

centralisation des systèmes d’assainissement des

sont fixes, liés à l’entretien de leurs réseaux.

eaux.

Ça peut être l’initiation d’un cercle vicieux :

ceux qui possèdent les moyens de sortir du réseau

Le développement de ces systèmes

en sortent, laissant les charges augmenter pour ceux

locaux

induirait

baisse

qui en dépendent. Le débat est toujours en cours

des volumes d’eau traités par les collectivités,

quant aux solutions possibles face à ce problème :

et par là même la baisse de leurs revenus. En

instauration d’une taxe de départ du réseau,

Australie, suite au développement de systèmes

réduction des réseaux et obligation des systèmes

de recyclage horsdes stations municipales, les

alternatifs dans certaines zones, acceptation de

volumes traités par la ville ont baissé jusqu’à

la non rentabilité du réseau d’assainissement...

nécessairement

une

en synthèse

L’installation des systèmes de traitement

dynamiques à long terme pour la majorité des

sur site (TSS) en habitat collectif présente un

technologies de traitements sur sites actuels.

avantage indéniable au niveau financier, tant

face au logement individuel (qui nécessite lui

l’apport de subventions extérieures pour être

sont

rentable) que face au raccordement en station

parallèle tant des filières collectives municipales

d’épuration collective (STEP). Bien que le modèle

que des filières autonomes, témoignant d’un côté

de calcul proposé fasse une synthèse moyenne

d’une dépendance au consommateur, et de l’autre

des systèmes existants, il est probant dans les

d’un désir d’innovation et de circuits courts.

De plus, il faut noter que les subventions symptomatiques

d’un

développement

11 Leflaive X., Conditions de déploiement des systèmes d’eau urbains alternatifs, Flux, n° 76-77 (FévrierMars 2009), p 62-70

50


03

C - ACCEPTABILITÉ SOCIALE 1. LA SOCIÉTÉ FACE AU RÉEMPLOI DES EAUX USÉES

usages domestiques, il n’y en aurait en réalité besoin que pour 10%.1

La

stratégie

politique

face

à

ces

changements de paradigme est l’information LA culture collective de l’eau

des citoyens, on cherche à convaincre l’individu

d’adopter de nouvelles pratiques.

La culture collective de l’eau tourne

autour d’un faisceau de valeurs, de symboliques,

Les risques sanitaires

de conventions et de pratiques partagées par une

même communauté. Ces concepts induisent une

représentation collective spécifique des notions de

constituent certes un risque pour les milieux

confort, de plaisir et de statut social. En France et

naturels mais aussi un risque pour l’homme. Elles

dans la majeure partie des pays dits occidentaux,

peuvent être le vecteur de maladies hydriques

la culture de l’eau est basée sur une conception

telles que le choléra, la dysenterie ou les hépatites

industrielle et hygiéniste issue des XIXe et XXe

A et E, à cause des micro-organismes pathogènes,

siècles, lorsque les circuits d’eau courante se

des germes fécaux ainsi que des contaminants

sont démocratisés (cf 01.A.2 L’arrivée de l’eau

chimiques qu’elles charrient.

courante). L’innovation du recyclage de l’eau et de

sa consommation directe remet en cause bien des

niveaux : par l’ingestion directe d’eaux usées — de

principes issus de cette conception.

l’eau en elle-même mais également des aliments

Les eaux usées mal traitées ou non traitées

La contamination peut se faire à plusieurs

issus de plantations irriguées par eaux usées — ;

Tout d’abord cela remet en question la

par contact cutané, lors de l’aspersion des eaux

centralisation technique et de gestion au profit de

usées sur les espaces verts par exemple ; ou

circuits courts. De ce fait, le citoyen n’est plus un

par inhalation, les composés polluants volatiles

receveur passif de service mais devient un acteur

pouvant s’extraire des circuits d’eau à l’air libre.

de sa consommation : il est responsabilisé.

Plusieurs cas sont recensés et ont fait

Ensuite, cela change la perspective sur le

grand bruit (jouant sur l’activation des mécanismes

dogme traditionnellement admis de la dissociation

de dégoût, cf 03.C.2 - Les mécanismes de rejet

entre l’eau pure, associée à l’eau potable et l’eau

individuel) : on peut citer par exemple le cas d’un

usée considérée comme un déchet, en considérant

circuit d’eaux usées ayant fui et contaminé les

celle-ci comme une ressource. Cela nécessite

eaux propres d’une ville des Pays-Bas, causant

de nuancer les catégories, en introduisant les

un développement de maladies hydriques dans la

concepts d’eaux grises, noires, brunes par exemple,

population du quartier.2

mais aussi la notion d’adaptation entre la qualité

de l’eau et son utilisation. En effet, si on utilise

recommandations quant au réemploi des eaux

actuellement de l’eau potable pour la totalité des

usées, sans pouvoir d’obligation légale ou juridique,

L’OMS

publie

régulièrement

des

la limitant à la simple irrigation et mettant en

1 Barbier R., Le buveur d’eau et le recyclage des eaux usées, Espaces et sociétés, n° 139 (Avril 2009), p 107-121 2 Fife-Shaw C., Barnett J., Chenoweth J., Consumer Trust and Confidence: Some Recent Ideas in the Literature, International Water Association, Maastricht, juin 2007

51


place des barrières de contrôles à chaque étape (traitement, irrigation, récolte, vente des cultures).

Il faut noter tout de même que l’eau traitée sur

se forment de deux manières4 : d’une part les

site présente souvent de meilleures qualités que

croyances empiriques, issues de l’expérience

l’eau du réseau : en circuit court elle n’est stockée

personnelle préalable ; d’autre par les croyances

que peu de temps et évite de circuler dans des

dans les informations issues d’un autre émetteur.

kilomètres de canalisations parfois dégradées ou

Concernant la croyance dans les systèmes de

incorporatrices de polluants. On pense notamment

réemploi de l’eau, on se situe davantage dans ce

aux cas de saturnisme liés aux canalisation

deuxième cas, étant donné que les cas existants

parisiennes .

sont rares voire inexistants en France. La confiance

3

se base donc sur les informations extérieures ; or

2. LES MÉCANISMES DE REJET INDIVIDUEL

la majorité de la littérature accessible aux profanes concernant ces systèmes adopte un point de vue sceptique sur ces technologies.

LA DESINFORMATION COMME SOURCE DE REJET

Face aux difficultés d’acceptabilité sociale

des

omniprésence des informations négatives se

stratégie ne prend pas en compte la façon dont

double d’une forte méfiance envers les colporteurs

chaque individu adopte ou non un changement

des rapports officiels et industriels, présentant eux

qu’on lui propose, demande, ou impose. Au delà

une image positive de l’innovation. Les usagers

de l’information en tant que telle, c’est la façon

avancent comme argument le fait que les lobbys et

dont elle est amenée qui importe le plus. La

les politiques n’ont que peu d’intérêt dans la santé

défiance envers les corps politiques et les lobbys

publique et cherchent la rentabilité ou le pouvoir.

industriels est un facteur de la réticence à accepter les gages de performances vantés par les experts.

De plus, il faut noter que ce n’est pas parce qu’une

Les aspirants émulateurs des systèmes

de traitements sur site doivent donc jouer sur

information est intégrée par un individu qu’elle a

la valorisation des expérience positives pour

nécessairement un impact sur son comportement.

améliorer d’une part l’image du gestionnaire

Pour motiver un changement dans l’acceptation spécifiquement

retentissements

des problèmes de santé aux habitants5. Cette

par le biais d’études expertes. Cependant, cette

ici

les

a contaminé le réseau d’eau potable et engendré

serait de démontrer l’efficacité des systèmes

et

cause,

où un système de traitement sur site avec rejet

d’accuser le manque d’information. La solution

innovation,

En

scandales sanitaires, par exemple aux Pays-Bas

du recyclage de l’eau sur site, la réaction est

d’une

Les croyances de manière générale

et donc la réception du message envoyé, mais

du

aussi développer la connaissance empirique

recyclage de l’eau et de sa consommation directe,

du

deux facteurs sont importants : les croyances

consommateur

en

le

confrontant

aux

expérimentations en cours.

vis-à-vis des conséquences du changement, et l’aspect émotionnel et affectif. LA FORMATION DES CROYANCES 3 Ministère de la santé, Le plomb et le saturnisme — de la recherche aux actions de réduction des expositions, 2015

4 Fife-Shaw C., Barnett J., Chenoweth J., Consumer Trust and Confidence: Some Recent Ideas in the Literature, International Water Association, Maastricht, juin 2007 5

52

Idem.


L’ASPECT EMOTIONNEL ET AFFECTIF

Les

aspects

émotionnel

et

affectif

Un autre critère important est le facteur

jouent aussi un grand rôle dans l’adhésion aux

« beurk », issu de la rupture entre une innovation

innovations, notamment en matière de recyclage.

et les représentations traditionnelles ancrées dans l’imaginaire commun. Dans notre cas, c’est

Le sentiment d’injustice est un puissant

le fait de considérer de l’eau usée, mentalement

moteur de rejet : les consommateurs incités à

assimilée aux déchets, comme un élément de

changer leurs modes de vie et de consommation

ressource pour la consommation humaine.

peuvent éprouver un tel sentiment face à la disproportion apparente des demandes. Cela

s’exprime via des questionnements tels que

dans un quartier australien disposant de circuit de

« pourquoi me demande-t-on de consommer les

retraitement d’eaux usées mais sans réemploi :

eaux usées, alors que les eaux usées domestiques

99% des habitants se disaient d’accord pour

représentent bien moins de volumes que les

utiliser l’eau traitée pour l’irrigation ; ce chiffre

effluents industriels ou agricoles ? » . Pour palier

chutait à 49% pour des usages de lessives ; et

ce sentiment, la sensation de décision active et non

seulement 0,7% d’entre eux se sentaient prêts à en

subie est d’une grande importance. Le dialogue et

envisager la consommation directe. Pourtant, les

la concertation sont donc des outils d’adhésion à

contrôles réalisés attestaient que l’eau traitée était

l’innovation.

de bien meilleure qualité que l’eau issue du réseau

6

Un exemple probant est une étude réalisée

municipal !8

Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si une Le facteur « beurk » peut facilement

grande partie des projets innovants en matières

de retraitement des déchets et notamment de

être modulé par le dialogue entre gestionnaire et

réemploi de l’eau usée sur site se fait dans le

habitants. Une solution communément apportée

cadre d’habitats participatifs, où les habitants se

au niveau des municipalités est de rejeter l’eau

sentent véritablement acteurs de la conception

propre dans une nappe phréatique, induisant l’idée

de leur lieux de vie. En témoigne par exemple

de nettoyage naturel de l’eau, avant de la repomper

le projet d’habitat participatif Ôooberge, où les

depuis la même nappe phréatique. L’acceptation

habitants ont conjointement décidé d’installer

par les habitants s’en retrouve très augmentée.

dans chaque logement des toilettes sèches (cf

Cependant

02.A.1 - Réduire la quantité d’eaux usées).

compatible avec un retraitement en circuit court.

7

ce

type

de

solution

n’est

pas

8 McKay J., Hurlimann A, Attitudes to Reclaimed Water for Domestic Use: Part 1, Water n° 30 (Mai 2005) p 4549

6 Barbier R., Le buveur d’eau et le recyclage des eaux usées, Espaces et sociétés, n° 139 (Avril 2009), p 107-121 7 Ginisty F., Assainissement écologique : pour la première fois, des toilettes sèches vont équiper un habitat collectif, L’âge de faire, n° 138 (Février 2019)

53


3. EVOLUTION DES MENTALITÉS Les données du baromètre de l’eau9

ressource en eau (réduire sa consommation ou

effectué par le C.I.EAU les plus récentes montrent

consommer des eaux usées recyclées) si cela a un

une très grande évolution entre 2013 et 2018 dans

impact bénéfique sur leurs finances (fig. 24).

l’image qu’ont les français du réemploi des eaux

usées. En 2018, 86% des français accepteraient

en plus en tête les risques d’une pénurie d’eau

d’utiliser une eau issue du traitement des eaux

qu’induirait

usées, mais seulement 53% seraient prêt à la boire.

sentiment d’insécurité agit comme un moteur sur

C’est tout de même une grande évolution, quand

les velléités de changement de mode de vie.

on sait qu’ils n’étaient que 5% à l’envisager en

2013. Ils seraient 75% à accepter de consommer

mettre en perspective avec le revirement de

des produits agricoles irrigués avec des eaux

l’augmentation des volumes d’eau consommés

usées, contre 68% en 2014.

depuis 2014 par habitant (165L/jour en 2014 contre

Plusieurs raisons sont évoquée pour

148L/jour en 2018). Cela montre qu’en plus de

expliquer ce changement. D’une part, l’aspect

l’intégration mentale des nécessités écologiques,

pécunier joue un rôle primordial : 53% des français

celles-ci commencnet à infuser dans les pratiques

envisagent des gestes de préservation de la

quotidiennes avec des résultats quantifiables.

D’autre part, les français ont de plus le

réchauffement

climatique.

Cette évolution des mentalités est à

Fig. 24 : « Seriez-vous prêt à consommer de l’eau issue du recyclage des eaux usées ? », Baromètre de l’eau

5% 5% OUI

Raisons de l’acceptation

OUI

2014

€ €

NON NON

53% 53%

5%

2018

NON NON

OUI OUI

7% 7%

NON

53%

48% 48% 45% 45%

Raisons de l’acceptation

OUI

€ €

7%

22% 22% 25% 25%

48% 45%

53% 53%

22% de l’environnement Sauvegarde

NON - enquête 9 C.I.EAU, TNS Sofres, Les français et l’eau OUI nationale 2018, Document élaboré dans le cadre du Baromètre de l’eau 22e édition, 2018

25%de la ressource en eau Préservation

€ Attrait financier 54

Le

53%


EN SYNTHÈSE

des

démarche proche de la nature, la sensibilisation

usagers face à la consommation directe des

économique… On peut constater une évolution

eaux usées traitées sur site tient à un ensemble

positive dans l’image que renvoit le réemploi des

complexe de valeurs et de notions : l’ancrage

eaux usées pour la consommation depuis 2014,

d’une culture de l’eau spécifique, la méfiance

d’autant plus lorsque l’on constate que les gestes

envers ceux qui la promeuvent, les sentiments

de préservation de la ressource s’ancrent petit à

d’injustice ou le facteur beurk par exemple.

petit dans les pratiques domestiques, entraînant

une réduction des volumes d’eau consommés.

Le

rejet

communément

admis

Cependant, les lignes peuvent bouger

grâce à plusieurs leviers : la concertation entre

gestionnaires et consommateurs, la sensibilisation

parcourir avant que le réemploi passe d’une

par l’expérience, la modulation des façons de

acceptation théorique dans les mentalités à une

concevoir le réemploi pour l’inscrire dans une

acceptation de sa mise en pratique dans les faits.

55

Toutefois, il reste encore du chemin à


0


04 04 QUELS DISPOSITIFS POUR LE RÉEMPLOI DES EAUX USÉES DOMESTIQUES SUR SITE ?

57


Maintenant

vu

les

projet Twist ++, mettant en oeuvre un système

l’eau,

les

partiel de réemploi des eaux usées en Allemagne ;

consommations ménagères et les différentes

et c’est à l’occasion du Solar Decathlon Middle

technologies

de

East qu’a été conçu le projet BaityKool, présentant

l’eau ainsi que l’environnement légal, financier

une boucle complète de recyclage de l’eau dans le

et social qui les entourent, il est temps de nous

cadre d’une habitation individuelle. C’est face à la

intéresser aux dispositifs existants qui combinent

raréfaction de la ressource et aux priorités établies

ces traitements. Afin de reconsommer de l’eau

que l’on a vu apparaître les systèmes appelés

sur site, il est nécessaire d’employer au moins

Zero Liquid Discharge aux Etats-Unis avant que

des traitements primaires et secondaires, si ce

ces boucles de recyclage total des eaux issues de

n’est également des systèmes tertiaires selon

l’industrie ne se diffusent dans d’autres pays.

fonctionnements

que

des

l’on

cycles

permettant

le

a de

retraitement

les usages envisagés. Cependant, on se rend vite compte que de tels projets sont encore rares et

Théoriquement, en tirant parti des acquis

expérimentaux, et d’autant plus en France.

apportés par l’étude de chaque cas, il devient concevable d’imaginer une boucle fermée de

C’est

dans

le

cadre

d’événements

traitement et de réemploi total de l’eau pour un

liés aux innovations durables que des projets

ensemble de logements dans un cadre législatif

émergent : l’IFAT de Berlin par exemple, ou

et culturel français), ce que l’on tentera d’établir en

les différents concours du Solar Décathlon.

suivant afin d’évaluer la pertinence et la faisabilité

En effet, c’est à l’IFAT qu’a été présenté le

de ces dispositifs.

58


04

A - LE TRAITEMENT DES EAUX USÉES SUR SITE DANS LE MONDE

Afin d’étudier les différents projets, nous

phases de traitement établies, les systèmes

nous baserons sur plusieurs informations. Tout

utilisés, et les dimensionnements tant en volumes

d’abord, le cadre dans lequel le projet est né,

traités qu’en surface nécessaire au dispositif.

que ce soit à l’occasion d’un concours, d’une

étude expérimentale ou en réponse à un besoin

traités, on utilise l’unité de l’équivalent habitant

empirique. Ensuite, nous verrons l’échelle de mise

(ou EH) qui correspond à une certaine quantité

en place du dispositif, afin d’évaluer la concordance

d’éléments

avec l’échelle de l’habitat collectif qui nous

traiter, et non pas à un volume d’eau. Ainsi, deux

intéresse. Enfin, nous noterons le cadre législatif

volumes d’eau égaux mais pollués différemments

et normatif dans lequel s’inscrit le projet en notant

ne correspondront pas au même nombre d’EH.

les différences et similarités avec le cadre législatif

Si l’Europe1 définit 1EH comme 60g de DBO, en

français détaillé en partie 03.A - Un cadre légal

France, 1EH correspond à 60g de DBO, 135g

contraignant.

de DCO, 15 g d’azote et 4 g de phosphore (cf

Pour les dimensionnements en volumes

potentiellement

contaminants

à

02.A.2 - Réduire la pollution des eaux pour

L’analyse des systèmes ne détaillera pas

comprendre DBO et DCO).

les différentes technologies mises en oeuvre, car

Afin

de

mieux

comprendre

elles ont déjà fait l’objet d’une analyse en partie

fonctionnement des différents systèmes, un

02 - Les technologies existantes de traitement

schéma global de fonctionnement sera également

de l’eau. Cependant, on notera les différentes

établi.

1 Directive n° 91/271 du 21 mai 1991 relative au traitement des eaux urbaines résiduaires, JOCE n° L 135 du 30 mai 1991

59

le


1. TWIST ++ : UN CAS ALLEMAND DE CIRCUIT COMBINÉ

Fig. 25 : L’allée de bassins à macrophytes devant le projet Twist ++ à Lünen

TWIST ++

Si certaines expérimentations visent à

améliorer les installations en place pour les rendre

Maître d’oeuvre

Bauverein à Lünen (BVzL)

Localisation

Lünen, Allemagne

Type de projet

Réhabilitation des circuits d’eau d’un ensemble de logements

Nombre de logements

120

Etat

En chantier (2017-2020)

moins polluantes et plus efficaces, le constructeur Bauverein, situé à Lünen en Rhénanie-du-NordWestphalie (Allemagne), y construit un complexe de logements collectifs visant à proposer un nouveau modèle urbain en terme de gestion de l’eau. Il met en place le système i.WET développé par l’institut Fraünhofer ISI, et permettant de valoriser les eaux usées domestiques. Le projet regroupe 120 logements de petite taille, représentant 250 EH à

Tab. 11 : Le projet Twist ++

traiter chaque jour. Il est intéressant de préciser

que le projet s’inscrit dans un environnement urbain : voisinage dense et rues à l’alignement (fig.

25).

Système i.WET Le projet TWIST ++ a été présenté à l’IFAT

— le salon international des innovations en matière Concepteur

Fraunhofer ISI

de gestion et traitement de l’eau — de Berlin en mai

2014. Dirigé par l’institut de recherche Fraünhofer Phase de traitement

Primaire / secondaire

Se situant en Allemagne, le cadre législatif

diffère des possibilités de système en France. La

ISI, le projet regroupe des expérimentations faites sur trois secteurs au sein de villes allemandes Systèmes utilisés

difficulté majeure liée au système i.WET réside

innovantes en matière de traitement des eaux

sein même du logement, en tant que réservoir

- Récupération des calories desàeaux grises pour le (dont Lünen), consistant tester des installations chauffage

dans la réutilisation des eaux grises brutes au de chasse d’eau. Cette réutilisation est dans les

des eaux grises usées. En tant que - Réemploi projet innovant, il a pu dans les toilettes

faits impossible en France, car tout usage lié à la

bénéficier de subventions par son inscription

consommation humaine doit encore actuellement

- Traitement des eauxprioritaire noires dans le programme-cadre de recherche par bassin à macrophytes

être effectué avec de l’eau potable (cf 03.A - Un

« Recherche pour le développement durable — Gestion l’eau ». Volumes de traités

> 250 EH

Surface occupée

≈ 1m² / EH donc > 250 m²

cadre légal contraignant).

60


des logements à une température avoisinant les

Système i.WET

32°C et acheminées dans les caves où, selon un

Concepteur

Fraunhofer ISI

Phase de traitement

Primaire / secondaire

Systèmes utilisés

- Récupération des calories des eaux grises pour le chauffage

système proche de l’E.R.S (cf 02.C.1 - Energie), les calories en sont extraites pour participer au chauffage des logements. Les eaux grises froides sont alors stockées pour servir à la chasse d’eau. Les eaux noires sont ensuite envoyées vers un second réseau, de traitement cette fois ci, basé sur des bassins à macrophytes (cf 02.B.1 - Les

- Réemploi des eaux grises dans les toilettes

traitements primaires). Ceux-ci sont intégrés à l’aménagement paysagé extérieur. Ils servent alors

- Traitement des eaux noires par bassin à macrophytes

une double fonction : d’une part traiter les eaux vannes avant leur rejet par infiltration dans les sols,

Volumes traités

> 250 EH

Surface occupée

≈ 1m² / EH donc > 250 m²

et d’autre part mettre à distance visuellement la rue des logements. La surface de 250m2 de bassins à macrophytes nécessaire pour traiter les eaux

Tab. 12 : Fiche système i.WET

usées produites est donc étirée tout au long de la

Le système i.WET (fig. 26) repose sur

présentant une croissance rapide, ils seront

l’extraction sélective des flux d’eaux usées :

revalorisés en tant que biomasse en usine afin de

on traite séparément les eaux grises des eaux

produire de l’électricité ou d’être transformés en

noires. Les eaux grises sont récupérées au sein

compost.

parcelle. Les essences plantées (osier, roseaux)

Fig. 26 : Principe de traitement des eaux usées au sein du projet TWIST ++ Arrivée d’eau

Récupération d’eau de pluie

LOGEMENTS Utilisation

Utilisation

Eaux grises 32°C CAVES

Eaux noires

9°C

EXTERIEUR PARTAGE

Récupération des calories pour le chauffage des logements

Traitement par macrophytes

61

Rejet des eaux traitées

Valorisation des déchets végétaux


2. BAITYKOOL : UN SYSTÈME BOUCLÉ INDIVIDUEL

Fig. 27 : Le mur aquaponique dans le patio de BaityKool

BaityKool

Si le projet se situe dans le désert du

Moyen-Orient, les entreprises participant au

Maître d’oeuvre

Consortium universitaire (ENSAPBx, ENSAM, UBx)

Localisation

Dubaï, Emirats Arabes Unis

français.

Type de projet

Habitat individuel écologique

Nombre de logements

1

Etat

Construit (2018)

développement du circuit d’eau sont cependant françaises et exercent aussi sur le territoire

Le concours encadre les projets par un

document contenant toutes les règles et attendus des différents jurys (chaque équipe doit soumettre son prototype à 10 épreuves, de l’architecture à l’ingénierie en passant par la soutenabilité ou la

Tab. 13 : Le projet BaityKool

communication). Le programme est un logement

Le projet BaityKool est né dans le

imaginant que le module puisse s’adapter afin de

cadre duLombrifiltration Solar Decathlon Middle Purification East 2018. Système + BioSolar Ce concours permet à une vingtaine d’équipes

permettre le télétravail, modifiant le calcul des EH

Concepteur Nobatek et + HelioPur internationales de proposer de construire un

logement uniquement) et 10 EH (configuration

habitat écologique utilisant uniquement l’énergie

accueil de travail).

Phase deCette traitement / secondaire tertiairea solaire. premièrePrimaire édition en pays /chaud

vu la participation d’une équipe française portée

par des universités et écoles bordelaises sous

limitent le réemploi des eaux usées ou des eaux

BioSolar Purification le nom de BaityKool. -Parmi d’autres innovations

de pluie récupérées à un unique usage, l’irrigation.

(rafraîchissement par (rayonnement vers) la voûte + toit rafraîchissant

Cette disposition rapproche le contexte normatif

Systèmes utilisés

pour quatre personnes. Baitykool le réinvente en

à traiter, ainsi compris entre 4 EH (configuration

- Lombrifiltration

De plus les réglementations du concours

céleste ou intégration de panneaux solaires à

du concours de la législation française (bien qu’une

des systèmes de toiture), le projet développe

nuance soit à apporter : depuis 2014 en France, on

un propos sur la sauvegarde de la ressource en

devrait pouvoir utiliser de l’eau usée si celle-ci est

eau, particulièrement précieuse en climat chaud.

conforme aux normes de potabilité établies).

( + aquaponie )

Volumes traités

4 EH < 10 EH

Surface occupée

≈ 10m²

62


Nombre de logements

1

Etat

Construit (2018)

Système Lombrifiltration + BioSolar Purification Concepteur

Nobatek + HelioPur

Phase de traitement

Primaire / secondaire / tertiaire

Systèmes utilisés

- Lombrifiltration

Le système de traitement établi traite

ensemble eaux ménagères et eaux vannes (fig. 28). Il combine à la fois un traitement primaire/ secondaire (le lombrifiltre) à un traitement tertiaire (le BioSolar Purification), mais également à des fonctions annexes par l’intégration d’un système aquaponique et d’une toiture végétalisée (fig.

- BioSolar Purification

27). Celle-ci permet de refroidir le patio par l’effet

( + toit rafraîchissant )

d’évapotranspiration des plantes. Il faut noter que le bâtiment n’est pas relié à un réseau mais

( + aquaponie ) Volumes traités

4 EH < 10 EH

Surface occupée

≈ 10m²

dispose d’un réservoir d’eau au début du concours afin de monitorer sa consommation.

Finalement, l’eau issue de ce double

système de traitement est théoriquement potable, et donc potentiellement réinjectable dans le circuit

Tab. 14 : Fiche système Lombrifiltration / BioSolar

de consommation d’eau, bien que le règlement du concours ne permette pas la mise en place de ce dispositif.

Fig. 28 : Principe de traitement des eaux usées au sein du projet BaityKool Réservoir d’eau LOGEMENT

EXTERIEUR

Utilisation

Lombrifiltre

PATIO

Toit rafraîchissant

Aquaponie

Poissons

BioSolar Purification

Végétaux

Rafraîchissement

Biomasse à valoriser

63


3. ZERO LIQUID DISCHARGE : UN PRINCIPE DE CIRCUIT FERMÉ À USAGE INDUSTRIEL

BaityKool Maître d’oeuvre

Consortium universitaire (ENSAPBx, ENSAM, UBx)

Localisation

Dubaï, Emirats Arabes Unis

Type de projet

Habitat individuel écologique

Nombre de logements

1

Fig. 29 : Le système Zero Liquid Discharge tel que proposé par Veolia, Karbala, Irak Etat

Construit (2018)

Tab. 15 : Fiche système Zero Liquid Discharge

Système Zero Liquid Discharge Concepteur Phase de traitement

Le Zero Liquid Discharge (ZLD) est un

principe d’assemblage de différentes technologies

Divers ( Aquatech / Suez / Veolia...)

de traitement des eaux usées industrielles. Il est

Primaire / secondaire / tertiaire

systèmes d’assainissement comme Aquatech,

développé par plusieurs entreprises proposant des Suez ou Veolia.

Systèmes utilisés

- Traitements physico-chimiques

Ces

différents

dispositifs

se

sont

- Traitements biologiques

développés dans les endroits où les milieux

- Filtration membranaire

étaient trop fragiles pour permettre le rejet d’eaux industrielles, même traitées. Dans les régions où

- Evapoconcentration Volumes traités

Variables (selon industrie)

Surface occupée

> 400 m²

la ressource en eau est rare, les autorités se voient parfois contraintes d’imposer aux industriels de fonctionner en boucle fermée : ce fut le cas par exemple en Californie suite à la sécheresse de 2015.

64


Le ZLD a d’abord été employé par des

chimique permet de se débarrasser des huiles et

industries charriant de gros volumes d’eau, mais

principales matières organiques ou lourdes par

l’exclusivité de ces secteurs n’est plus de mise

décantation simple, ou par ajout de produits visant

aujourd’hui : la démocratisation des systèmes et

à faire coaguler, floculer ou précipiter les différents

l’apparition de nouvelles technologies a rendu le

polluants.

ZLD adaptable à de plus petites structures.

Puis, les traitements biologiques se mettent à l’oeuvre pour éliminer les polluants organiques de

L’intérêt pour les industries, au delà du

l’eau.

fait de réduire leur empreinte écologique, se situe

Ensuite, les filtrations membranaires permettent

d’un point de vue légal : comme elles ne rejettent

d’abattre les MES, DBO et DCO, tandis que les

pas l’eau dans la nature, elles s’extraient des

filtrations sur charbon actif permettent d’éliminer

législations qui y sont liées, et n’ont donc pas

le phosphore et l’azote. De ces filtrations

à respecter les normes spécifiques aux milieux

membranaires sont issues d’une part de l’eau

naturels en matière de DBO ou DCO par exemple.

recyclée qui peut être réutilisée, d’autre part des

L’eau traitée doit simplement correspondre aux

déchets liquides. Par évapoconcentration, on

normes en vigueur dans l’utilisation industrielle,

peut séparer l’eau de ces déchets, qui sont alors

qui varie selon les process de chaque usine.

éliminés ou valorisés.

Le système ZLD fonctionne en suivant 4

étapes (fig. 30). Tout d’abord, le traitement physico-

Finalement, le cycle reprend son cours.

Fig. 30 : Le principe du système Zero Liquid Discharge Procédés physico-chimiques Décantation, coagulation, floculation

Utilisation en process industriel Eaux usées

Boues valorisables

Eau recyclée

Evapoconcentration Séparation des déchets liquides de l’eau

Déc liqu hets ide s

Procédés biologiques Boues activées, bioréacteurs, microalgues...

Déchets à traiter Filtration membranaire Microfiltration, ultrafiltration...

65


En synthèse Chacun de ces dispositifs présente

également un autre propos (mise à distance, mise

plusieurs similarités avec l’idée du réemploi des

en conscience, mobilier, etc) comme un atout

eaux usées dans l’habitat collectif, que ce soit en

primordial.

matière de normes, de lieux et de modes de vie, d’usage, de système employé, de visée en terme

Face

au

constat

de

l’inexistence

de qualité de l’eau, ou de volonté d’intégration du

d’exemple correspondant au sujet, il paraît

système. Malgré tout, aucun ne répond entièrement

intéressant de vouloir extrapoler les expériences

à la problématique, car aucun ne présente à la fois

menées (de retraitement partiel, à petite échelle

les critères recherchés : un système fermé (avec

ou dans un domaine différent de celui du cadre

traitement et potabilisation), pour réemploi (dédié

domestique) afin d’imaginer ce que pourrait être

à la consommation humaine), le tout dans un

un système de recyclage sur site des eaux usées

habitat collectif. Cependant, comme le synthétise

domestiques.

le tableau n° 16, il y a des enseignements à tirer de ces cas expérimentaux.

définir le cadre de conception, c’est à dire les

Pour ce faire, on commencera par en

Pour l’analyse, on considère les apports et

objectifs fixés et les principes de réflexion mis en

productions annexes comme bénéfiques lorsque

oeuvre, ainsi que les référents desquels on tiendra

ceux-ci participent à la vie du foyer ou sont

compte, en terme de législation et de mode de vie.

valorisables sans trop de dépenses énergétiques

(ce qui n’est pas le cas des déchets industriels

comment ces systèmes peuvent se constituer et

par exemple). Quant à l’intégration, on considère

quels avantages ils peuvent présenter.

le fait que le système de traitement de l’eau serve

66

Ensuite

seulement

nous

verrons


Tab. 16 : Fiche synthèse comparative des 3 exemples de systèmes combinés étudiés Dispositif

Twist ++ Allemagne

BaityKool

Zero Liquid Discharge

(Non transposable en raison de la législation française)

(Cadre normatif et concept de vie du logement similaire à la France)

Emirats Arabes Unis

International

Secteur d’utilisation

Habitat

Habitat

Industrie

Echelle

Collectif

Individuel

Primaire / secondaire

Primaire / secondaire tertiaire

Situation géographique

Phase de traitement

Réemploi sur site

Partiel

(eaux ménagères réutilisées, eaux vannes traitées puis rejettées)

- Récupération des calories pour le chauffage du bâtiment Apport annexe

- Récupération des déchets végétaux pour compost ou production énergétique

Bonne

Intégration

Partiel

(possible techniquement mais non mis en place sauf pour irrigation)

Primaire / secondaire tertiaire OUI

- Biomasse issue de la BioSolar Purification - Végétaux et poissons issues de la culture en aquaponie

- Boues de décantation

- Rafraîchissement du patio

Bonne

Mauvaise

— Système de récupération des calories en local technique

— Lombrifiltres et BioSolar Purification peu valorisés

— Installation très lourde

+ Bassins à macrophytes intégrés au traitement de la lisière de parcelle

+ Systèmes annexes (aquaponie et toit végétal) qui participent du confort de vie dans le logement

+ Efficacité d’installation

Lombrifiltre potentiellement intégrable comme mobilier de jardin (pour exemple voir Napevomo)

67


04

B - IMAGINER UN DISPOSITIF DE RÉEMPLOI EN FRANCE

1. REDÉFINIR LE CADRE DE CONCEPTION

périphérie des villes.

Finalement, deux principes doivent être

appliqués pour chaque circuit : le principe de Critères immuables

contrôle, qui assurera en tout temps la qualité des eaux consommées ou rejetées, et le principe

Le premier des points importants dans

de sobriété qui préconise d’éviter la combinaison

la conception des systèmes sera le concept de

de deux systèmes dont les effets se superposent

boucle. Il ne s’agit pas de dispositifs de traitement

dans un souci d’économie (on ne combinera

des eaux usées avec rejet ultérieur dans la nature

pas un lombrifiltre et un bassin à macrophytes

mais d’un système de recyclage, c’est à dire de

par exemple, car tous les deux permettent des

réemploi des eaux usées au sein du logement

traitements primaires et secondaires).

comme eau de consommation après traitement.

Environnement légal

Bien entendu, tout comme il est vain

d’imaginer une machine à mouvement perpétuel sans prendre en compte les frottements induits

et qui en invalident le concept, il serait vain de

réemploi des eaux usées domestiques constituent

penser un système de recyclage des eaux usées

actuellement une entrave à la facilité de conception

comme complètement hors-circuit. Deux aspects

et de mise en oeuvre de ces dispositifs (cf 03.A.3

sont à prendre en compte : d’une part la fluctuation

- Le réemploi sur site, système du cas par cas).

des besoins selon les périodes de l’année et les

Par exemple, et malgré le changement effectué en

occupations, qui rend variable les volumes d’eau

2014, il reste très compliqué d’avoir l’autorisation

présents dans le circuit ; et d’autre part le processus

de faire circuler de l’eau non potable dans des

même de la consommation humaine de l’eau qui

circuits intérieurs, par exemple pour la chasse

en élimine une partie du circuit et provoque des

d’eau (au risque qu’un enfant boive dans la cuvette,

pertes de volumes, que ça soit par l’ingestion, par

et s’intoxique). On distinguera donc deux cas :

l’irrigation ou tout simplement par évaporation.

l’un s’inscrivant dans les bornes du cadre légal

Même en disposant de systèmes de réservoirs

français actuel, l’autre se permettant d’en sortir

pouvant absorber les variations volumiques de

pour optimiser davantage le circuit.

Deux

dispositions

légales

liées

au

consommation, il reste nécessaire que le circuit soit relié à une ou plusieurs sources d’eau claire

extérieure (circuit municipal ou récupérateur d’eau

normes, il s’agira de potabiliser les eaux usées sans

de pluie par exemple), et dispose d’un moyen

distinction d’usage de réutilisation. Les eaux usées

d’évacuer les surplus (trop-plein, possibilité de

traitées mais non potables ne seront admises que

rejet naturel).

pour des usages d’irrigation. On qualifiera ce cadre

de « normatif ».

Bien que l’on soit rattachés à la question

Pour le premier cas respectueux des

du logement collectif, et donc d’une certaine densité de logement notamment en cadre urbain,

on envisagera également certains systèmes

étudier la possibilité d’un double circuit d’eau de

déployables au sein de groupements de logements

consommation, l’un potable servant à l’ingestion

individuels, comme il en existe beaucoup en

directe notamment, le second d’eau purifiée mais

68

Dans le second cas en revanche, on pourra


n’atteignant pas les normes de potabilité et qui

les lombriciens, qui peuvent rebuter une personne

permettrait de remplir les réservoirs de chasse

non avertie (cf 03.C.2 - Les mécanismes de

d’eau ou de lave-linge. Cette disposition, bien que

rejet individuel). Enfin, on évitera également les

complexifiant les circuits, respecte le principe de

systèmes imposant un changement d’habitudes et

sobriété en évitant de potabiliser des eaux qui n’en

de modes de vie, comme les toilettes sèches. Ces

auraient pas besoin, et permet par ce biais là de

premières dispositions visent à présenter des

préserver les dispositifs mis en place en limitant

systèmes aptes à entrer dans le quotidien des gens

leur sur-utilisation. On qualifiera ce cadre de

de manière démocratisée. Nous appellerons ces

« évolutif ».

usagers « passifs » dans leur rapport à l’évolution des pratiques face au défi écologique.

Impact et investissement personnel

A l’inverse, on imaginera aussi le cas de

foyers volontaires dans l’évolution de leur mode

De la même manière, le cadre social

d’acceptabilité

de

ces

mentalités), on étudiera deux cas de figure. Le

des possibilités de changements des habitudes

premier concernera des systèmes induisant

(toilettes sèches, gestion active des déchets,

peu de changements de mode de vie, le second

entretien des systèmes, cultures sur place…). Nous

s’adressant à des foyers investis écologiquement.

appellerons ces usagers « actifs ».

Evolution

envisagera donc la mise en place de systèmes annexes de production par exemple, mais aussi

(cf

-

évoluant des

doucement

03.C.3

systèmes

de vie et devenant acteurs de leur logement. On

Afin de garantir une intégration peu

impactante de ces systèmes de réemploi à un

Suite à la définition du cadre de conception,

mode de vie actuel, le premier critère sera le peu

on distingue deux environnements différents,

d’entretien requis de la part de l’usager afin de

normatifs et évolutifs, et deux cibles, les usagers

maintenir l’installation en état de marche. De

passifs et actifs. La combinaison de ces différents

même, les systèmes utilisés privilégieront les

éléments nous amène donc à imaginer quatre cas

dispositifs peu présents visuellement, et présentant

distincts, présentant des attentes et des objectifs

des facilités d’acceptation : on évitera par exemple

spécifiques (tab. 17).

Tab. 17 : Les attentes inhérentes aux quatre systèmes proposés

USAGER PASSIF

USAGER ACTIF

CADRE NORMATIF

CADRE EVOLUTIF

USAGER PASSIF - CADRE NORMATIF

USAGER PASSIF - CADRE EVOLUTIF

- potabilisation complète avant réemploi - intégration discrète du dispositif - pas de dispositifs annexes nécessitant une intervention de l’usager

- possibilité de double circuit eau purifiée / eau potable - intégration discrète du dispositif - pas de dispositifs annexes nécessitant une intervention de l’usager

USAGER ACTIF - CADRE NORMATIF

USAGER ACTIF - CADRE EVOLUTIF

- potabilisation complète avant réemploi - acceptation de dispositifs induisant des changements d’usage - acceptation des dispositifs annexes nécessitant une intervention de l’usager

- possibilité de double circuit eau purifiée / eau potable - acceptation de dispositifs induisant des changements d’usage - acceptation des dispositifs annexes nécessitant une intervention de l’usager

69


2. PROPOSITIONS DE DISPOSITIFS DE TRAITEMENT SUR SITE AVEC RÉEMPLOI

Usager passif + cadre normatif Le système « usager passif - cadre

L’ensemble des eaux usées est ensuite traité par

normatif» répond à un besoin de traitement et de

micro-épuration puis potabilisé via un traitement

potabilisation complète des eaux réutilisées, grâce

UV. La chloration permet de garantir de bonnes

à des systèmes facilement acceptés par des foyers

conditions de stockage. Le réservoir collectif

peu investis écologiquement. Pour expliquer son

permet d’approvisionner en eau les logements, et

principe, on peut le résumer à une boucle simple :

si les quantités ne suffisent pas, l’arrivée d’eau du

consommation - récupération des eaux usées -

réseau municipal peut venir en complément. On

potabilisation - stockage, et le circuit recommence

peut également compter selon les régions sur la

(fig. 31).

récupération d’eau de pluie avant traitement pour

Après consommation de l’eau on récupère

renflouer les volumes consommés. Finalement,

de manière différenciée les eaux grises et noires

une évacuation est prévue, mais après le passage

afin de tirer parti des calories présentes dans les

en micro-station pour garantir les normes de

eaux grises pour le chauffage ou l’eau chaude.

sanité requises pour le rejet en milieu naturel.

Fig. 31 : Le système usager passif - cadre normatif

Arrivée d’eau

LOGEMENT

Utilisation

Eaux grises 32°C

Récupération des calories (pour E.C.S ou chauffage)

LOCAL TECHNIQUE COLLECTIF

Réservoir d’eau potable

EXT.

Eaux noires

Traitement UV + chloration

Microstation d’épuration

Evacuation (si trop-plein)

Récupération d’eau de pluie

70


Usager passif + cadre évolutif Le système « usager passif - cadre

extrait les calories avant de les purifier en vue

évolutif » reprend le principe du système

de leur reconsommation. Si les eaux noires

précédent en imaginant son adaptation face à un

rejoignent les eaux grises dans la première étape

potentiel assouplissement des réglementations.

de traitement, une différenciation du circuit s’opère

Contrairement

on

par la suite : avant sa potabilisation, une partie de

distingue ici deux boucles de traitement en partie

l’eau traitée emprunte un circuit différent, dédiée

connectées : l’une dédiée à la potabilisation des

aux usages nécessitant une eau claire mais pas

eaux grises, l’autre au réemploi direct des eaux

forcément potable, comme la chasse d’eau ou le

noires (fig. 32).

lave-linge. C’est dans ce circuit d’eau claire que

s’adjoindraient les arrivées d’eau de pluie.

au

précédent

système,

Concernant les eaux grises, le système

est exactement le même que le précédent. On en

Fig. 32 : Le système usager passif - cadre évolutif

Arrivée d’eau

32°C

LOCAL TECHNIQUE COLLECTIF

Réservoir d’eau potable

EXT.

Utilisation

LOGEMENT

Utilisation

Récupération des calories (pour E.C.S ou chauffage)

Réservoir d’eau claire

Traitement UV + chloration

Microstation d’épuration

Evacuation (si trop-plein)

71

Récupération d’eau de pluie


Usager actif + cadre évolutif Le système « usager actif - cadre évolutif»

moins consommateur d’énergie et d’espace mais

répond à un mode de vie engagé prenant en compte

qui nécessite une ouverture d’esprit vis-à-vis de la

l’évolution législative et les facilités qu’elle pourrait

consommation de l’eau qui en résulte. De même,

apporter. Assez similaire au système précédent

les traitements UV sont remplacés par le BioSolar

(système en deux boucles), la différence réside

Purification qui nécessite un entretien plus régulier

dans le choix des technologies utilisées, moins

lié à la biomasse qui s’y développe.

consommatrices d’énergie, et dans l’adjonction de

Les systèmes annexes peuvent être implantés

système annexes (fig. 33).

à deux endroits du circuit : soit en lien avec le

On retrouve les deux circuits, l’un d’eau

réservoir d’eau claire, soit en sortie de lombrifiltre

potable, l’autre d’eau claire. Les traitements

afin de ne pas perdre les nutriments utiles aux

primaires et secondaires ne sont plus assurés

cultures. Comme vu précédemments, leurs intérêts

par une micro-station mais par un lombrifiltre,

sont divers : alimentation, énergie, confort…

Fig. 33 : Le système usager actif - cadre évolutif Arrivée d’eau

Utilisation

LOCAL TECHNIQUE COLLECTIF

LOGEMENT

Utilisation

32°C

Réservoir d’eau potable

Récupération des calories (pour E.C.S ou chauffage)

EXTERIEUR

BioSolar Purification + chloration

Biomasse

Evacuation (si trop-plein)

Réservoir d’eau claire

Système annexe

Lombrifiltre

Produits

Récupération d’eau de pluie

72


Usager actif + cadre normatif Le système « usager actif - cadre

permet également de remplacer les eaux noires

normatif» permet de respecter les réglementations

par la récupération de l’urine d’une part et des

actuelles, en reprenant le principe du circuit unique

fèces de l’autre. Combinées aux macrophytes

potable. Il présente deux différences vis-à-vis du

faucardés, les fèces sont un excellent compost qui

circuit précédent : d’une part, le lombrifiltre laisse

peut être réutilisé sur site selon les nécessités, ou

la place à un système donnant des sous-produits,

valorisé par les municipalités afin d’en faire profiter

et d’autre part la boucle d’eau claire est en fait

le secteur agricole.

remplacée par une filière sèche (fig. 34).

Si le circuit des eaux grises est très

similaire

au

précédent,

le

traitement

Si le système respecte les législations

par

actuelles, il demandent en revanche un grand

lombrifiltration laisse la place à un traitement par

investissement de la part des habitants, pour

macrophytes, qui nécessite cependant davantage

accepter les toilettes sèches mais aussi pour

de place. Le faucardage des roseaux permet

entretenir les bassins à macrophytes dont les sous

de disposer tous les six mois d’un apport de

produits permettent d’optimiser le fonctionnement

déchets verts. L’instauration de toilettes sèches

du système dans son ensemble.

Fig. 34 : Le système usager actif - cadre normatif

LOCAL TECHNIQUE COLLECTIF

Arrivée d’eau

Eaux grises 32°C

Réservoir d’eau potable

Récupération des calories (pour E.C.S ou chauffage)

BioSolar Purification + chloration

EXTERIEUR

Utilisation

LOGEMENT

Utilisation

Biomasse

Système annexe

Evacuation (si trop-plein)

Produits

73

Traitement par macrophytes

Récupération d’eau de pluie

Compost (déchets verts + fèces)


3. DES DISPOSITIFS À INTÉRÊTS VARIÉS

Le tableau 18 permet de comparer les

quantités consommées tant par le réemploi que

caractéristiques des quatre systèmes proposés.

par l’élimination des eaux noires, mais permet

On se rend très vite compte que les systèmes

aussi de valoriser aussi bien les eaux traitées

demandant un engagement de la part des usagers

(calories, nutriments) que les déchets produits

présentent de meilleurs caractéristiques en terme

(déchets verts, fèces)...

d’intégration et de valorisation du dispositif (en

En synthèse

terme de quantité de sous produits récupérés par exemple).

L’établissement de ces systèmes nous

permet de dégager quatre remarques sur la

L’analyse du système « usager passif-

faisabilité des dispositifs de réemploi sur site.

cadre normatif » nous indique qu’il serait possible dès à présent de concevoir les systèmes permettant

tout à la fois de s’inscrire dans la législation sans

circuits possibles. Par le nombre élevé de

avoir à détourner les usages traditionnels de

solutions techniques existantes et de circuits

l’habitant vis-à-vis de l’eau.

annexes disponibles, le réemploi sur site peut

Le

évolutif »

système est

une

« usager réponse

passif-cadre

présentant

prendre de multiples formes afin de s’adapter

une

tant aux bâtiments qu’aux habitants.

meilleure sobriété écologique par l’intégration du

double circuit, ajustant les traitements aux besoins

De plus, la nature combinatoire des

systèmes (le fait d’associer plusieurs dispositifs

réels de qualité d’eau dans le logement. Sa faible

les uns à la suite des autres) peut permettre

nécessité de modifications de modes de vie, tout

un phasage temporel dans la mise en place du

comme le système précédent, pourrait faciliter la

circuit. On peut par exemple commencer par un

démocratisation de ce type de systèmes.

La première est la grande variété des

circuit de traitement sur site avec rejet des eaux

Le système « usager actif - cadre

claires dans la nature, pour venir quelques années

évolutif » est un bon exemple d’un système

plus tard compléter le circuit par des traitements

compact (adaptable en local technique plutôt qu’en

plus pointus et ainsi constituer une boucle de

extérieur si besoin) qui pourrait se développer

réemploi.

en milieu urbain et s’accompagner de systèmes annexes facilement intégrables au logement. Il

Si les deux points précédents sont

requiert cependant un investissement de la part de

positifs, deux autres viennent ternir la facilité de

l’habitant dans la gestion des systèmes.

conception des systèmes de boucle. Peu importe

Finalement, avec le système « usager

les solutions techniques adoptées, tous ces

actif - cadre normatif », on se rend compte que le

circuits nécessitent un espace assez conséquent

cadre normatif n’est pas nécessairement bloquant

pour être mis en place, que ce soit en intérieur

à la mise en place de circuit de recyclage de l’eau

(local technique) ou en extérieur, ce qui complique

sur site sous réserve qu’il soit accompagné d’une

leur apparition dans le cadre de réhabilitation ou

grande velléité de changement et d’investissement

dans des environnements urbains très denses.

écologique de la part de l’habitant. C’est pourquoi

des circuits de ce format sont plus à même d’éclore

L’absence de systèmes prêts-à-l’emploi

dans le commerce actuellement est aussi un frein,

dans les habitats individuels ou dans le cadre de

car il nécessite un investissement de recherche

conceptions participatives de logements collectifs.

et de collaboration professionnelle préalable au

Il reste le plus intéressant vis à vis de la protection

chantier.

de la ressource en eau : il permet d’en limiter les

74


Tab. 18 : Comparatif des caractéristiques des quatre systèmes proposés USAGER PASSIF CADRE NORMATIF

USAGER PASSIF CADRE EVOLUTIF

USAGER ACTIF CADRE EVOLUTIF

USAGER ACTIF CADRE NORMATIF

BOUCLE SIMPLE

DOUBLE BOUCLE

DOUBLE BOUCLE

BOUCLE SIMPLE

- eaux grises et noires traitées ensemble - potabilisation générale

- circuits eau potable / eau claire

- circuits eau potable / eau claire

- élimination des eaux noires - potabilisation des eaux grises

Systèmes de traitement

- microstation - UV - chloration

- microstation - UV - chloration

- lombrifiltre - BioSolar Purification (BSP) - chloration

- bassin à macrophytes - BioSolar Purification (BSP) - chloration

Systèmes annexes

- Récupération calorique

- Récupération calorique

- Récupération calorique - Systèmes de culture

- Récupération calorique - Systèmes de culture

Sous produits récupérés

- Chaleur

- Chaleur

- Chaleur - Produits de culture - Biomasse

- Chaleur - Produits de culture - Biomasse - Compost (déchets verts + fèces)

Système

Type de boucle

Intégration du dispositif

Reponsabilité d’usage

Intérêt du dispositif

MOYENNE

MOYENNE

BONNE

TRES BONNE

— Pas de valorisation architecturale des dispositifs

— Nécessité d’un grand local technique

— Nécessité d’un grand local technique

— BSP en extérieur visible difficilement intégrable

Pas de valorisation architecturale des dispositifs

BSP en extérieur visible difficilement intégrable

Nécessité de surface extérieure conséquente

+ Pas de gêne visuelle ou odorante

+ Pas de gêne visuelle ou odorante

+ Lombrifiltre valorisable comme élément architectural

+ Macrophytes très facilement intégrable en extérieur

Systèmes annexes valorisants d’un point de vue confort visuel

Bonne symbiose des dispositifs

BASSE

BASSE

Pas de nécessité de changement d’usage ou de mode de vie

Pas de nécessité de changement d’usage ou de mode de vie

Entretien restreint et délégué

Entretien restreint et délégué

Adaptable dès à présent sous réserve d’assurer la compatibilité et l’optimisation des dispositifs combinés

HAUTE

Facile à démocratiser et présentant une bonne sobriété écologique

75

Systèmes annexes valorisants d’un point de vue confort visuel

TRES HAUTE

Nécessité de gestion des systèmes annexes

Adaptation aux toilettes sèches

Vérification régulière des lombriciens

Nécessité de gestion des systèmes annexes Entretiens réguliers des macrophytes

Facile à adapter en densité de logements haute, peu consommateur et vecteur de bénéfices

Adapté en périphérie urbaine avec des espaces extérieurs, très réducteur des conso d’eau et vecteur de bénéfices


04

C - ADÉQUATION DES DISPOSITIFS DE TRAITEMENT AUX DIFFÉRENTS TYPES D’HABITAT

Maintenant que l’on a un aperçu de la variété

des possibilités de combinaisons des traitements sur site des eaux usées domestiques en vue d’un réemploi, on cherche à affiner la pertinence de tels systèmes selon les différents types d’habitat, en comparaison aux stations d’épuration et aux systèmes de traitement sur site avec rejet. Pour ce faire, on définira les différents types d’habitats ciblés et leurs caractéristiques, avant de comparer les différents couples systèmes-habitats.

1. CIBLAGE DES TYPES D’HABITAT Les gradients de densité urbaine

Afin d’établir les différents types d’habitat

que l’on veut introduire dans notre analyse

Ainsi un centre-ville peut se trouver à cheval sur le

comparative, on se base sur deux critères. Le

centre urbain et l’aire urbaine, où n’être qu’une petite

premier tient à la typologie de l’habitat, c’est-à-

partie du centre urbain. De plus, le système est

dire si les logements sont collectifs ou si ce sont

ici simplifié sous forme de cercles concentriques

des logements individuels. Le second critère tient

mais il peut s’adapter en intégrant des dimensions

à la densité urbaine dans laquelle il se situe. Pour

géographiques ou des polycentralités, sans que

classifier ces densités, on se base sur les modèles

notre analyse s’en retrouve toutefois changée.

urbains initiés par Clark d’après une base de Burgess, sur les gradients de densité urbaine (fig.

Fig. 35 : Les gradients de densité urbaine

35). En adaptant ce modèle, on retrouve 3 zones de

Aval

densités différentes :

- la première, dite centre urbain, correspond

Densité Zone périphérique

aux espaces de centralité disposant des densités de bâti les plus élevées ;

Aire urbaine

- la seconde, dite aire urbaine, correspond

aux quartiers alentours disposant d’une densité moyenne de bâti ;

Centre urbain

- enfin la troisième, dite zone périurbaine,

Densité -

Densité +

correspond aux espaces d’étalement urbain à la frontière de la zone rurale et présente une très faible densité de bâti.

Il est à noter qu’il n’y a pas de corrélation

systématique entre ces trois zones et les dissociations centre-ville / banlieues, car le modèle Amont

se base uniquement sur la notion de densité bâtie.

76

Densité -

Densité -


Les cinq catégories d’habitat

En

combinant

les

deux

critères

préalablement décrits, on distingue cinq catégories d’habitat, répartis inégalement dans les différents gradients de densité urbaine (fig. 36) : on retrouve dans le centre urbain les habitats collectifs denses existants, et les habitats collectifs denses neufs ; dans l’aire urbaine se situent les habitats collectifs peu denses (auxquels on assimile les habitats

Collectif dense existant

individuels groupés), et les habitats individuels

denses ; finalement se trouvent dans la zone

Collectif existant Collectif dense neuf Lesdense habitats collectifs denses existants

correspondent aux immeubles desgroupés centre-villes Collectif dense neuf Collectif peu dense / individuels

périurbaine les habitats individuels isolés.

historiques, souvent très denses, par exemple Collectif peu dense Individuel dense/ individuels groupés

le centre historique de Bordeaux, composé Individuel dense Individuel isolé

d’immeubles anciens de 3 à 6 étages. Les habitats

Fig. 36 : La répartition des 5 types d’habitat

Individueldenses isolé collectifs

neufs

correspondent

aux

immeubles qui seront construits dans le centre urbain, par exemple au niveau des Bassins-à-flot de Bordeaux. La distinction entre neuf et existant est nécessaire dans la mesure où elle permet de prendre en considération la possibilité d’intégrer ou pas des locaux dédiés aux solutions techniques de traitement des eaux.

Collectif dense existant

Collectif dense existant

Collectif dense neuf

Collectif dense neuf

Collectif peu dense / individuels groupés

Individuel dense

Collectif dense / collectifs individuels peu groupés Lespeu habitats denses et les

habitats individuels groupés sont assimilés en Individuel dense une seule catégorie car ils présentent les mêmes

Individuel isolé

Individuel isolé

caractéristiques vis-à-vis de l’intégration des

solutions techniques de traitement des eaux :

Encore une fois, le schéma présenté est

association de plusieurs foyers autour d’un

une simplification de la répartition globale des

même système, dans un environnement bâti

différents types d’habitats. Chaque zone urbaine

moyennement dense. On pourra citer comme

présente un plan de répartition tout à fait différent

exemple de ces quartiers celui du Grand Parc à

de celui des autres.

Bordeaux (habitat collectif moyennement dense).

77


L’implantation du circuit d’assainissement municipal

Sur le schéma de répartition des différents

types d’habitat ciblés vient se calquer le circuit d’assainissement municipal (fig. 37). Souvent située en aval de la rivière quand elle existe, afin Collectif dense existant

d’éviter que les rejets ne contaminent les stations

Collectif dense neuf

de captation placées en aval, la station d’épuration est le point d’arrivée d’une arborescence de

Collectif peu dense / individuels groupés

Les dense habitats Individuel

individuels

denses

canalisations. Ces canalisations présentent un

ou

certain coût de mise en place, répercuté sur la

moyennement denses sont une catégorie distincte Individuel isolé

facture d’eau via la taxe d’assainissement, mais

des habitats individuels groupés dans la mesure

également un coût d’entretien régulier. Leur

où leur système de traitement des eaux est géré

disposition arborescente met en exergue un

individuellement. De par leur nature de logement

déséquilibre de rentabilité : en effet, on considère

individuel, on considère dans la majorité des cas

que sur l’ensemble de la zone urbaine, 60% des

la présence d’un espace extérieur privatif, bien

gens vivent dans le centre urbain, contre 40% dans

que réduit. Les logements peuvent être existants,

l’aire urbaine et la zone périurbaine ; en revanche,

comme neufs. Un exemple de ces quartiers est

25% seulement du réseau de canalisations à

celui des quartiers d’échoppes bordelaises.

destination des stations d’épuration desservent le centre urbain, et 75% sont déployés dans les zones périphériques1 ! Ce décalage montre donc que les portions périphériques au réseau sont bien moins rentables que les portions centrales, ce qui touche les habitats individuels mais aussi les collectifs en zone peu dense. Fig. 37 : L’arborescence des canalisations

Collectif dense existant

Aval

Collectif dense neuf Collectif peu dense / individuels groupés

Individuel dense

Individuel isolé Finalement,

les

habitats

individuels

isolés correspondent aux différents quartiers périphériques, symptomatiques de l’étalement

60% des habitants

pavillonnaire. On peut également y intégrer les

25% du réseau

logements géographiquement distants des zones urbaines ou périurbaines, de type maisons de campagne ou logements agricoles.

40% des habitants 75% du réseau

Amont

1

78

C.I.EAU, L’Observatoire de l’eau, [en ligne]


2. ADÉQUATION COMPARATIVE DES DIFFÉRENTS DISPOSITIFS

Facilité d’acceptabilité citoyenne

Maintenant que les différents types

d’habitat et leurs caractéristiques sont définis, on peut les croiser avec les les systèmes de traitement

Afin

d’introduire

étudiés, en établissant des couples. Le tableau 19

d’acceptabilité

(page suivante) permet de restituer l’ensemble des

aspects sont à prendre en compte. Le premier

couples. Afin de les comparer, on y introduit les

concerne le type de système employé : les stations

points positifs et les points négatifs qui résultent de

d’épuration et les systèmes de traitement sur

l’adaptation de chaque système au type d’habitat.

site avec rejet sont bien plus facilement acceptés

Ces critères sont issus des réflexions menées

que les systèmes avec réemploi direct (bien que

précédemment dans l’établissement du présent

l’on ait vu que des adaptations de systèmes sont

document. Ils sont basés sur 4 champs.

possibles pour rendre l’acceptation citoyenne plus

citoyenne

la du

dimension

système,

deux

facile).

Intégration à l’habitat

Deuxièmement, la typologie d’habitat

joue aussi, puisque les probabilités sont bien plus La première donnée étudiée correspond

fortes qu’un foyer seul accepte des systèmes

à la possibilité et à la facilité d’intégration du

responsabilisants. Ainsi, plus le nombre de

système ciblé selon le type d’habitat. Ainsi, pour

logements raccordés au système augmente, plus

les traitements sur site, les logements neufs

la probabilité que l’ensemble des foyers concernés

seront favorisés, car ils peuvent intégrer dès leur

accepte des systèmes responsabilisants diminue.

conception des locaux techniques dédiés aux

Pour l’installation de traitements avec réemploi,

dispositifs de traitement. Ce sera également le

les logements collectifs (et les systèmes pour

cas pour les logements disposants d’espaces

groupement d’habitats individuels) sont donc

extérieurs et pouvant accueillir ces systèmes a

défavorisés au profit des logements individuels.

posteriori. Rentabilité

Intérêt écologique

La seconde donnée relevée fera état

Finalement,

le

dernier

critère

relevé

de la rentabilité du système. Si dans l’absolu les

concerne la performance du système d’un point

systèmes de traitement sur site sont plus rentables

de vue écologique global. De ce point de vue,

que les systèmes de traitement sur site avec

les systèmes de traitement sur site permettant

rejet et d’autant plus rentables que les stations

l’adaptation de systèmes annexes sont avantagés,

d’épuration, il ne faut toutefois pas oublier que leur

par la production locale de sous-produits valorisés.

rentabilité dépend aussi de l’échelle du système

Les systèmes avec réemploi, par leur faible

et donc du type d’habitat (individuel ou collectif),

consommation sont eux-mêmes avantagés par

ainsi que des subventions disponibles. Ainsi, on

rapport aux systèmes avec rejet. Concernant les

se souvient que les systèmes de traitement sur

stations d’épurations, les stations neuves (ou ayant

site sont difficilement rentables dans le cas des

transitioné vers un modèle plus éco-responsable)

logements individuels en l’absence de subventions.

seront également favorisées, car elles seront plus

On notera également la rentabilité ou non du

à même d’intégrer des systèmes plus performants

réseau municipal selon la situation urbaine propre

et moins dégradants vis-à-vis des milieux naturels

à chaque type d’habitat.

sensibles que les stations existantes.

79


Le tableau 19 nous permet de regrouper

Le système n’est globalement pas adapté

toutes ces remarques dans les cases associées

Le système ne présente pas d’intérêt spécifique

sous forme de + ou —. La synthèse de ces éléments

Le système est adapté

pour chaque couple donne alors une tendance.

Le système est optimal

Tab. 19 : Comparaison des différents couples systèmes - habitats SYSTEME HABITAT

Station d’épuration (STEP) Existante +

Neuve +

Possibilité de STEP écologique

Individuel isolé —

INDIVIDUEL

Réseau périphérique peu rentable pour la ville

+

Individuel dense

Réseau périphérique peu rentable pour la ville

+

COLLECITF / INDIVIDUEL GROUPE

Collectif peu dense ou individuel groupé

Réseau périphérique peu rentable pour la ville

+

Collectif dense neuf

+

Possibilité de STEP écologique

Réseau périphérique peu rentable pour la ville

+

+

Espaces extérieurs idéaux ; Petits volumes rejetés donc peu de risques de pollution des milieux

Non rentable sans subvention

+

Petits volumes rejetés donc peu de risques de pollution des milieux

Non rentable sans subvention

+

Possibilité de STEP écologique

Rentable face aux STEP ; Espace disponible pour les dispositifs de traitement

Réseau périphérique peu rentable pour la ville

+

Réseau central très rentable pour la ville

Possibilité de STEP écologique ; Réseau central très rentable pour la ville

+

Collectif dense existant

Réseau périphérique peu rentable pour la ville

Traitement sur site (TSS) avec rejet

+

Rentable face aux STEP ; Espace disponible pour les dispositifs de traitement

+

+

Réseau central très rentable pour la ville

Possibilité de STEP écologique ; Réseau central très rentable pour la ville

Rentable face aux STEP ; Espace disponible pour les dispositifs de traitement

Peu d’espace disponible pour les dispositifs de traitement

80

Traitement sur site (TSS) avec réemploi +

Espaces extérieurs idéaux ; Pas d’eau rejetée donc pas de pollution des milieux; Foyer individuel donc acceptation plus facile ; Facilité de réemploi des composts créés

Peu rentable sans subvention

+

Pas d’eau rejetée donc pas de pollution des milieux ; Foyer individuel donc acceptation plus facile

Peu rentable sans subvention

+

Très rentable face aux STEP ; Espace disponible pour les dispositifs de traitement ; Pas d’eau rejetée donc pas de pollution des milieux ; Facilité de réemploi des composts créés

Nécessité de concertation pour certains systèmes

+

Très rentable face aux STEP ; Espace facile à concevoir pour les dispositifs de traitement ; Pas d’eau rejetée donc pas de pollution des milieux

Nécessité de concertation pour certains systèmes

+

Très rentable face aux STEP ; Pas d’eau rejetée donc pas de pollution des milieux

Nécessité de concertation pour certains systèmes ; Peu d’espace disponible pour les dispositifs de traitement


En analysant les résultats de synthèse du

ils restent en deçà des systèmes avec réemploi sur site

tableau 19, trois constats s’imposent.

de l’eau. En revanche, leur force réside dans la facilité

Tout d’abord, on se rend compte que sur du

d’acceptation citoyenne qui en font des systèmes plus

logement neuf, les traitements sur site avec réemploi

faciles à démocratiser que les systèmes avec réemploi,

direct sont les plus adaptés. Si l’on regarde le cas

constituant déjà un pas vers l’acceptation globale des

des logements individuels, on se rend compte que

circuits locaux d’assainissement.

la difficile rentabilité des systèmes en boucle fermée est contrebalancée par leur facilité d’intégration, de

valorisation et d’acceptation. C’est ce qui fait des

d’épuration. On constate que leur arborescence

logements individuels un bon terrain d’expérimentation

spécifique en fait des systèmes à valoriser dans

pour ces systèmes avant de passer à des échelles plus

les quartiers denses ou les réseaux peuvent être

grande. Au niveau des logements collectifs ou individuels

rentables. Au contraire, dans les zones périphériques,

groupés neufs ou en zones peu denses, on voit que si

il devient évident qu’il est plus intéressant, tant pour

les usagers arrivent à passer la barre de l’acceptation

la municipalité que pour les usagers, de se tourner

des systèmes responsabilisants, ceux-ci ne présentent

vers des systèmes d’assainissement sur site. De plus,

aucun autre désavantage.

comme précédemment évoqué, le fait de faire basculer

Le troisième constat concerne les stations

des stations d’épuration sur des réseaux plus petits

Deuxièmement, on constate que les traitements

permettrait d’adapter facilement des bio-technologies

sur site avec rejet ne sont jamais les systèmes optimaux,

telles que les lombrifiltrations, comme il en existe déjà

car tant en terme d’intérêt écologique que de rentabilité,

dans certaines petites municipalités2.

En synthèse

Dans

une

logique

de

gestion

de

des stations d’épuration plus neutres vis-à-vis

l’assainissement à l’échelle globale, les systèmes

des milieux naturels.

de traitement sur site ne se présentent pas

comme une solution exclusive mais plutôt

comme une alternative parmi d’autres. Cela peut

municipal, c’est-à-dire dans des zones moins

permettre la transition de notre gestion de la

densément bâties, devraient ainsi se tourner vers

ressource en eau, car l’introduction d’une nouvelle

des solutions de traitement des eaux sur site.

échelle d’assainissement entre la municipale et

Ces réseaux locaux permettraient de retrouver

l’individuelle permettrait de les optimiser.

une échelle de traitement intermédiaire. Si l’on

peut imaginer que les traitements sur site avec

Les zones qui seraient alors hors-réseau

Ainsi, au regard de notre analyse, il

rejet se démocratiseraient plus rapidement

semblerait intéressant de recentrer les réseaux

dans le cas d’habitats collectifs, on peut aussi

d’assainissement municipaux sur les zones très

penser que les traitements avec réemploi

densément bâties. À cela deux raisons : favoriser

trouveraient dans les logements individuels

la rentabilité du réseau en équilibrant le ratio

un champ d’expérimentation bénéfique à leur

logements connectés / longueur du réseau, mais

développement et, à terme, à leur déploiement

aussi permettre une transition plus facile vers

général.

2 Mairie de Combaillaux / CIHEAM-IAMM, LombriStation, épuration des eaux usées par les lombriciens, mai 2005

81


CONCLUSION

La réflexion mise en place dans ce

De ces deux constats émane alors un

document est issue de deux constats. Tout d’abord,

premier questionnement : le traitement et le

la nécessité croissante de gérer de manière

réemploi sur site des eaux usées domestiques

responsable la ressource en eau, thématique

ont-t-ils un intérêt à l’échelle de l’habitat

largement abordée dans les différents rapports sur

collectif ? Deux notions sont questionnées ici :

le climat. Cette gestion raisonnée s’attache, dans

d’une part la pertinence du système de réemploi

les pays occidentaux, à la conservation de la qualité

en lui même, en comparaison avec les systèmes

de l’eau dans les milieux naturels, c’est-à-dire les

d’assainissement classiques qui rejettent l’eau

ressources constituant le grand cycle de l’eau, mais

dans les milieux naturels ; et d’autre part la notion

aussi à réduire l’impact du cycle domestique de

d’échelle de traitement, qui proportionne ces

l’eau sur les milieux, que ce soit par la réduction des

dispositifs à un foyer, un groupement de logements,

volumes d’eau consommés ou par une meilleure

ou à une ville.

efficacité des dispositifs d’assainissement. Ce

premier constat mène naturellement au second :

subsidiaires :

si le cycle domestique de l’eau se développe aussi

existe-t-il ? Est-ce intéressant du point de vue de

bien au niveau municipal qu’au niveau individuel, il

l’usager ? Du point de vue global ? Qu’est-ce qui

n’existe en revanche que très peu d’exemples de

en freine le développement ? Qu’est-ce qui pourrait

cycle à une échelle intermédiaire, c’est-à-dire à

le pousser ? La réponse à ces questionnements

l’échelle d’un groupement de logements (habitat

secondaires ont permis de répondre à la question

collectif ou habitats individuels regroupés).

guidant ce rapport.

82

S’en suit un faisceau de questions quelles

solutions

techniques


Afin de rassembler nos éléments de

évidence les limites indéniables qu’elles imposent.

réponse, la démarche que nous avons mise en

L’étude de la rentabilité des systèmes s’est faite

place s’est déroulée en quatre temps.

par une comparaison à deux niveaux : d’une part

une comparaison des systèmes, démontrant une

Il a fallu tout d’abord comprendre en

meilleure rentabilité des dispositifs de réemploi

détails comment nous gérons actuellement notre

direct de l’eau que celle des dispositifs avec rejet,

ressource en eau. Par le détour de l’histoire pour

et a fortiori que celle des stations d’épuration ;

comprendre sa mise en place, nous avons détaillé

et d’autre part une comparaison en terme

le fonctionnement du cycle domestique de l’eau.

d’échelle de traitement, montrant l’importance

Nous avons ainsi compris quels sont les traitements

des subventions dans l’objectif de rentabilité des

préalables à sa consommation, et quels sont ceux

systèmes individuels. Finalement, en se penchant

qui permettent son assainissement. Pour clore

sur les mécanismes d’acceptation citoyenne de

ce chapitre d’état des lieux, nous avons analysé

ces systèmes, nous nous sommes rendus compte

le paysage aquatique d’une cellule de logement,

d’une évolution très positive vis-à-vis du réemploi

afin de comprendre quels sont les éléments à

direct de l’eau, mais qui nécessite maintenant un

cibler dans le retraitement des eaux usées, et en

passage de l’acceptation théorique à la pratique.

s’efforçant de considérer chaque composant

comme une ressource à exploiter.

avons dans un dernier temps tenté d’établir des

Forts

de

ces

connaissances,

nous

Une fois ces informations en tête, nous

propositions de dispositif de réemploi sur site. La

nous sommes penchés dans un second chapitre

première étape, regarder des systèmes similaires

sur les différentes façons de traiter les eaux

mais incomplets (soit en boucle partielle, soit sur

usées, à travers un catalogue global des solutions

de l’habitat individuel, soit sur le secteur industriel),

techniques possiblement mises en oeuvre. Le but

nous a permi de montrer la viabilité et la faisabilité

a été de se nourrir des différentes connaissances

des systèmes de réemploi. La seconde étape a

actuelles en matière de retraitement, mais aussi,

permis de développer quatre dispositifs répondant

dans un but de sobriété écologique, en matière de

à des cadres de conception distincts, et mettant

réduction de la pollution et de valorisation globale

en exergue la flexibilité d’adaptation des systèmes

de la ressource.

de retraitement sur site avec réemploi. Enfin, une

dernière étape a été nécessaire afin de nuancer

Il a fallu dans un troisième temps prendre

l’adéquation de ces systèmes à tous les types

conscience des différents cadres dans lesquels

d’habitat.

s’inscrivent les systèmes de retraitement des eaux

domestiques sur site et d’autant plus ceux incluant

un réemploi direct de la ressource. Pour ce faire,

nous retrouvons avec bon nombre d’outils en main

nous avons étudié l’ensemble des législations

afin de proposer une piste de réponse à notre

s’appliquant sur la ressource aquatique, et mis en

question première.

83

Une fois cette démarche terminée, nous


Deux points se révèlent en faveur des

des accréditations du SPANC, qui autorise ou non la

systèmes de réemploi sur site à l’échelle de l’habitat

mise en place des systèmes d’assainissement non

collectif. Le premier est l’intérêt écologique de ces

collectifs, qui empêche ces systèmes d’émerger.

solutions, et ce à plusieurs niveaux. Le premier aspect, le plus évident, est la nette réduction

des volumes d’eau consommés et donc captés

sociale. Si l’on a pu voir que le rejet qui entoure

dans la nature, grâce au système de boucle. Cet

ce type de système provient tout aussi bien de

aspect se double d’une minimisation des risques

l’environnement sociétal que de mécanismes

de pollutions des milieux naturels aquatiques

psychologiques individuels, on a également

en éliminant le rejet des eaux usées. D’autres

constaté que les mentalités changeaient depuis

aspects sont moins évidents, et nécessitent un

quelques années. Deux raisons sont mises en

autre regard que la simple observation factuelle :

avant : d’une part le sentiment de plus en plus

les systèmes de retraitement sur site permettent

généralisé d’urgence écologique, et d’autre part la

une mise en évidence visuelle et donc une mise en

possibilité de rentabiliser l’investissement, qui agit

conscience des problématiques de traitement des

comme un levier puissant sur les changements

eaux, ce qui peut mener à terme à une meilleure

de mode de vie. Ce frein de l’acceptation sociale

responsabilisation citoyenne.

pourrait donc, par le biais de l’attrait financier,

se convertir en moteur du développement des

Le second point d’intérêt concerne la

Le second frein est celui de l’acceptation

systèmes de réemploi sur site.

rentabilité des systèmes. Dans la prolongation de la sobriété écologique, la réduction des

Le troisième point noir soulevé est celui

consommations due au réemploi permet de

de l’inexistence actuelle de solutions prêtes-

réduire les investissements financiers annuels.

à-l’emploi. Seuls le temps et l’expérimentation

Cette réduction permet de compenser les prix

à échelle individuelle ou sur des systèmes de

d’installation des systèmes, et d’autant plus dans

traitement avec rejet en milieu naturel pourront

le cadre de logements collectifs, car les logements

permettre la création de systèmes combinés

individuels doivent compter sur les subventions

standards, facilitant leur démocratisation.

pour que de tels systèmes soient rentables.

En revanche, trois points se sont révélés

Ainsi, afin de répondre à la question

aller à l’encontre du développement des dispositifs

de l’intérêt des systèmes de réemploi des eaux

de réemploi sur site des eaux domestiques. Le

domestiques sur site à l’échelle de l’habitat

plus évident d’entre eux concerne les cadres

collectif, et en considérant les dimensions

législatifs, réputés très contraignants en France.

écologiques, financières et sociales comme des

Après l’analyse des différents textes éparpillés,

aspects jouant en faveur de tels dispositifs, on

nous nous rendons compte qu’en effet, la loi est

tend à affirmer la pertinence tant du système

limitante sur l’utilisation des eaux usées dans le

de réemploi que de l’échelle d’action. Il faut

logement, réduisant leur usage à l’irrigation, tous

toutefois rappeler que ces solutions présentent

les autres usages étant obligatoirement associés

un intérêt en tant qu’alternative parmi d’autres, et

à de l’eau potable. En revanche, et c’est là un point

non comme système exclusif. Un développement

intéressant peu mis en pratique, rien n’interdit

des systèmes de réemploi sur site, en parallèle

de réutiliser des eaux usées traitées si celles-ci

d’un recentrage des réseaux municipaux et du

sont potabilisées selon les normes en vigueur.

développement de terrains d’expérimentations

Légalement, rien ne limite aujourd’hui la mise en

permettrait une optimisation profitable de la

place de ces systèmes. Toutefois, c’est la frilosité

gestion de la ressource en eau en France.

84


Suite

à

cette

analyse,

d’autres

pistes de réflexion s’ouvrent, avec leur lot de questionnements. D’une part, maintenant que l’on sait que ces systèmes présentent un intérêt, quelles sont les pistes afin d’en favoriser le développement? Certaines notions abordées dans le présent document apportent quelques hypothèses : la standardisation des systèmes mettant en jeu le développement technique et la coopération des entreprises, l’assouplissement des accréditations données par le SPANC, les expérimentations à échelle individuelle afin de calibrer les systèmes, mais aussi le développement de la promotion de tels dispositifs. D’autre part, on peut aussi se poser la question de l’intégration architecturale poussée de ces systèmes. Comment penser des solutions techniques qui servent l’architecture plutôt que de la contraindre ? Le développement de ces technologies peut-il et doit-il produire une nouvelle esthétique architecturale ?

Le

développement

des

systèmes

d’assainissement des eaux domestiques sur site avec réemploi direct en est encore à ses balbutiements, et il devra répondre à nombre de défis techniques, architecturaux et sociaux avant d’ambitionner son déploiement et sa démocratisation générale.

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Eau et Habitat Quelle pertinence pour le réemploi sur site des eaux usées à l’échelle de l’habitat collectif ?

Romain Legendre Directeur de mémoire Denis Bruneau Séminaire Architecture, Ingénierie, Environnement et Ville durable Année 2019


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