TPFE - Le délaissé urbain : une déconstruction de "l'envers" de la ville par l'errance

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Marcel Proust : « Le véritable voyage de découverte ne consiste pas à chercher de nouveaux paysages mais à avoir de nouveaux yeux... » (Roman - à la recherche du temps perdu - 1913)


Travail personnel de fin d’études de Guinéheux Romain sous la direction de Graziella Barsacq Membres du jury Graziella Barsacq - Ingénieur paysagiste ENITHP Hélène Soulier - Paysagiste DPLG, docteur architecture Anne-Sophie Subilia - écrivaine, association C-Fal Aurélien Reymond - Architecte, Collectif Galta

NB : Sources et crédits En l’absence de mention des sources, toutes illustrations ou cartographie est un document personnel.

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Le mémoire...

Cette grande étape dans la formation d’un paysagiste DPLG, totalement abstraite en première année, plus que concrète en 4ème année. Il marque la fin d’un cursus scolaire à l’ENSAP de Bordeaux à la suite d’un parcours personnel dans le domaine du paysage depuis le baccalauréat. Un choix qui est devenu nourrissant pour ma propre réflexion dans des domaines que j’affectionne tels que l’art, l’histoire, la géographie, la conception de l’espace, la sociologie, l’environnement. Ce travail personnel est une opportunité d’expérimenter une méthodologie de projet qui me tient à cœur d’essayer, de traiter d’enjeux paysagers et sociétaux qui posent question dans le devenir de nos villes. Il est l’occasion d’essayer d’appliquer ce que j’ai appris durant les années de formation en paysage. De plus, il marque le début d’une aventure professionnelle que je construis par les rencontres lors de projets paysagers, le suivi de la formation ainsi que la pluridisciplinarité du métier de paysagiste. L’apprentissage paysagiste nous apprend à regarder, à observer ce qui rentre en interaction avec l’homme et son environnement. Mais on apprend aussi à transmettre, à expliquer aux acteurs d’un territoire les enjeux multiples, qui sont sources de potentialités et de projets en devenir. Mettre en lumière des potentialités, des valeurs de projets jusque là non visibles, et y faire adhérer les différents acteurs est un challenge essentiel pour l’avenir du territoire. Depuis mon BTS Aménagements Paysagers au lycée Jules Rieffel (44), je me suis intéressé aux délaissés urbains avec l’apprentissage du concept de « jardin en mouvement » dans une parcelle agricole en friche, avec le soutien du paysagiste Gilles Clément et l’équipe pédagogique. Cette expérience de terrain selon des dynamiques naturelles s’est poursuivie avec un workshop à la base sous-marine de Saint-Nazaire où il était question d’appropriation d’une friche militaire en état de « veille. » Les interstices urbains délaissés pour de nombreuses raisons posent question dans nos sociétés où la pression urbaine est croissante. L’espace qui nous entoure au quotidien change de configuration en permanence, et le milieu urbain est un lieu complexe où les changements sont habités par de nombreux flux aux temporalités diverses. Le rapport intime entre les vides et les pleins joue un grand rôle dans le fonctionnement d’un territoire urbanisé. La ville se présente comme un « mille-feuille » constitué de multiples strates témoin du temps passé. La frénésie de la ville pose des questions telles que la densification de « l’habiter », la consommation de l’espace et crée donc des résidus où l’accès est parfois difficile. La gentrification des villes contribue à la fragmentation et l’expansion du développement urbain, qui met en péril les quelques vides restants. Mais comment parler des délaissés urbains ? Comment les trouver et avec quelles méthodes ? Que vont devenir les espaces délaissés et quelles échelles de temps pour ces lieux vacants ? Pour traiter ce sujet qui cible les vides en milieu urbain, le choix de la ville est important afin de prendre conscience de cette préoccupation contemporaine qui touche de nombreuses métropoles du XXIème siècle.

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Introduction Dans le cadre de ce mémoire de fin d’études, j’ai choisi de regarder le milieu urbain par une clé de lecture qui est le vide : une composante de l’espace urbain dépendante des pleins. Au cours de l’histoire, par sa sédentarité l’homme a créé des pleins qui correspondent à l’édification d’une forme architecturale. A l’avenir, l’homme habitera de plus en plus en milieu urbain et non en campagne. Aujourd’hui plus de 70% des Européens vivent en milieu urbain. La question de la densité se pose avec un impact sur les interstices, et notamment la prolifération d’espaces résiduels par divers facteurs : abandon d’une activité (industrielle, artisanale), insuffisance économique du lieu, délais d’attente d’urbanisation... Les espaces délaissés offrent une vision morcelée de la ville, un recul qui se raccroche à une vision globale. L’ensemble des fragments d’un tissu urbain forme un tout composé de strates naturelles et anthropiques. Penser et « construire » la ville de demain par les délaissés (structure ferroviaire, infrastructurelle, industrielle, terrain vague, déprise agricole, militaire, artisanale, portuaire...) participe à construire la ville sur la ville et non sur ses franges. C’est un enjeux fort pour beaucoup de villes au passé industriel avec la question de l’héritage de « déchets » de l’aménagement. D’après la sociologue Perla Serfaty-Garzon, « les restes urbains donnent du sens au plein de la ville... les terrains vagues semblent condamnés à être au mieux traversés ». Ses propos interrogent sur la notion de frontière en ville et la mobilité urbaine de lieu en lieu. Dans notre monde contemporain, de nombreuses questions se posent sur la place du délaissé urbain. Ce sont des résidus de la planification urbanistique qui ont longtemps fait l’objet de débats publics. Une remise en question de la valeur des vides porteurs de la notion de diversité et une recherche de l’économie de l’espace. Les restes urbains posent la question du dialogue avec le plein de la ville. Cette relation soulève diverses questions : Ces espaces vacants tendent vers quelles transitions ? Une incertitude de la nature ? Quelle valeurs sociales ? Qualités des lieux ? Des espaces sources de libertés ? Des lieux mouvants qui échappent à la réglementation ? Ce thème donne à penser la ville autrement, par le prisme du vide urbain et plus précisément la friche, dans un contexte d’héritage industriel. L’espace « délaissé » m’intéresse sous divers angles : sa place en milieu urbain, le dialogue avec la ville, l’appropriation sociale, les regards sur le délaissé par divers acteurs, les ambiances, la nature oubliée, les étapes d’évolution, les dynamiques, le contexte, les empreintes d’abandon... L’errance est une méthodologie d’approche des lieux en état de veille parmi le « puzzle » d’une ville que je souhaite expérimenter. Une démarche de parcours urbain, d’itinéraires, de trajectoires aux aléas d’ambiances traversées, de situations, de rencontres. L’exploration des délaissés urbains va donc passer par l’expérimentation de l’errance à travers le tissu urbain de Genève. Une ville au passé industriel avec une place donnée au piéton, intéressante dans ses cheminements. Une spéculation immobilière grandissante face à des espaces en résistance par la flore spontanée et les initiatives d’appropriations. Expérimenter une méthodologie « sensible du regard » dans un territoire urbanisé est l’occasion pour moi en tant que paysagiste de rendre visible une facette de la « ville oubliée », dans l’ombre du développement urbain. Au cours de ce mémoire, je vais donc définir l’errance et le délaissé urbain, deux univers qui se croisent dans ma démarche personnelle, puis j’évoquerai des expériences urbaines qui ont nourri mon approche. Une grande partie est consacrée à montrer mon errance selon des situations, dans une quête du délaissé. Ensuite, je caractérise les interactions entre la ville fonctionnelle/normée et la « ville de l’ombre », une face obscure à mettre en lumière. Mon regard sera croisé avec la planification urbaine du territoire et des lieux en résistances (alternatives). Pour finir, ma marche débouchera sur un paradigme de l’envers à partir du tracé parcouru (nouvelle trame urbaine) : une vision qui offre des potentiels de projets via certains délaissés, un renouvellement urbain induit par des valeurs dans ses vides. 6


Un délaissé urbain peut en cacher un autre...

Friches dents-creuses espaces cachés chutes urbaines fractions incertaines espaces résiduels no man’s land espaces de rupture terrains vagues lieux en ruine jachères interstices délaissés

espaces secondaires espaces intermédiaires expérience interstitielle territoires du vide hors-lieux entre-deux squats tiers-paysage non-lieu junkspace zones blanches recoins

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S o m m a i r e

Introduction

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Partie I . L’errance comme approche artistique - L’exploration urbaine : un pas après l’autre... - L’errance : une recherche de la désorientation - Marcher, un acte anodin dans l’histoire ? > Flânerie et marche organisée > De la déambulation à la dérive > L’errance par les artistes > Un parcours collectif pour une vision contemporaine > Un changement de paradigme

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- Habiter l’inhabituel - Définir le « délaissé urbain » - Apprivoiser l’inconnu par ses temporalités

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Partie II . L’errance comme clé de lecture - Méthodologie et limites du procédé - Approche du territoire - Une expérience urbaine personnelle par regards croisés - Franchir le pas de l’exploration urbaine - L’écoute de la ville par l’écriture

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Partie III . Mon exploration urbaine de Genève - Se situer - Où se déroule mon errance ? - Une ville aux emblèmes prégnants - Une relation étroite entre le plein et le vide - Mon parcours labyrinthique - Un cheminement au gré de situations - Première errance : partir du cœur historique - Une désorientation à repousser - Un réseau vivant qui induit la marche - Deux univers traversés par le pas - Des structures paysagères en mouvement - Un dédale urbain traversé et vécu - Une trame naturelle hybride - Une mutation urbaine planifiée > Un urbanisme qui favorise l’espace public > Une « piétonnisation » de la ville par ses temporalités

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Partie IV . Une ville de l’envers aux pratiques alternatives - Un « entre-ville » à reconnaître - Un renouvellement urbain qui produit des vides - Un héritage du passé industriel - L’agglomération de Genève à « l’assaut » de ses vides - Une typologie de délaissés dans une ville « oubliée » - Catégoriser et spatialiser - L’impact du temps sur la face « obscure » de la ville

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130 Partie V . Des lieux de résistances sous forme de projets - Une culture alternative marginalisée 132 - Une agriculture urbaine dans les creux - Les squats : un mode de vie - Le street-art : une quête de l’envers de la ville - Des quartiers « utopiques » - L’urbanisme de transition (projets éphémères)

Partie VI . Projet personnel : l’errance comme paradigme de l’envers - Exploration de « l’envers » de la ville - Partir à l’aventure d’une interaction subjective > Des séquences paysagères traversées

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- Arpentage artistique : une expérience sensible - Inviter à l’exploration

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> Une transition urbaine via une frontière fluviale > Vers une confluence de délaissés urbains > Télescoper des situations paysagères « oubliées »

- Sublimer la friche par des îlots de fertilité - Des creux, source de renouvellement urbain

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- S’appuyer sur un réseau vivant pour repenser les délaissés - De nouveaux usages en perspective d’une expérimentation urbaine

- Un processus de projet par l’appropriation de délaissés

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- Un « No Man’s Land » à réinventer - Une réflexion croisée sur une zone industrielle (PAV) en mutation > Workshop « Cultura Fertilis » - Collectif Urbz > « Jardin de la Marbrerie » : un outil de projet pour le « Forum Grosselin » Conclusion Bibliographie

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Partie L

’errance comme approche lartistique

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L’exploration urbaine : un pas après l’autre...

L’errance : Une recherche de la désorientation

Afin de regarder la ville par les vides en état de délaissement, j’ai choisi la marche car c’est une méthode qui laisse du hasard dans la déambulation et aujourd’hui nos villes sont parfois hostiles à la flânerie. Beaucoup d’obstacles sont présents en centre urbain, une réglementation planifiée pour tous moyens de locomotion et donc une liberté du mouvement mise en péril. Les villes s’agrandissent et leurs configurations deviennent de plus en plus complexes. La disparition de la rue pour le piéton avec un zonage utilitaire donne une perception du monde urbain par un simple décor et non par une expérience aux multiples ambiances au gré des envies des usagers. Sans les habitants, on ne pourrait pas parler de ville, les usagers font vibrer le tissu urbain et les espaces publics en permanence par leurs déambulations. L’architecte Belge « Kroll Lucien » en 2006 dans son ouvrage « Construire autrement » démontre bien le positionnement de l’habitant piéton dans la globalité de la construction de la ville : « Quelqu’un marche : il fait une rue, elle est encore virtuelle mais il suffit d’emballer son agissement par des façades et elle existe visiblement. Ce piéton s’arrête devant un autre piéton qui vient à sa rencontre : il fait une place publique. Il suffit de les protéger par d’autres éléments bâtis et elle existe aussi (...). C’est donc l’habitant qui fait la ville, ni les architectes, ni les ingénieurs ». La ville se réécrit en permanence par le pas des passants, l’urbanisme du XXIème siècle cherche l’orientation et non la désorientation avec la cartographie très présente à chaque coin de rues. Marcher en errant dans un environnement bâti nécessite de savoir comment appliquer une errance sous nos pas, savoir se libérer de la contrainte signalétique, des limites publiques et privées et des obstacles. Une marche en dehors des sentiers battus qui ne rassure pas pour celui qui n’a pas l’habitude, un manque de repères qu’il faut savoir détourner en qualité d’observation. Marcher au cœur de la ville via les interstices permet une expérience par l’intérieur, c’est une autre forme d’appréhension. La routine urbaine peut se faire ressentir chez certains usagers, le mouvement du corps en errance est un moyen ludique de découvrir la ville autrement. User de la déambulation permet d’être directement confronté aux mutations de la ville. Marcher, est-ce une action qui permet de révéler de nouveaux paysages ? Une errance par la marche peut s’effectuer à diverses échelles, à l’échelle d’une rue, d’un quartier, d’une agglomération, dans les franges. Une imbrication de lieux intéressants à exploiter, une lecture fragmentaire sources de potentialités. L’errance du latin « errar » qui signifie se tromper, s’égarer et en vieux français aller, voyager, cheminer, comporte de nombreux visages. Elle peut relever du déplacement physique mais aussi d’un cheminement intellectuel. Cette manière d’agir sur l’espace intrigue, fascine ou au contraire inquiète. Errer possède un double sens, un premier venant du latin « errar » signifie « aller de côté et d’autres, au hasard, à l’aventure ». Par le passé, l’errant était celui qui errait contre la foi, c’était le mécréant. L’errance est associée au mouvement, à la marche, à l’idée d’égarement, à l’absence. Elle peut s’accompagner de pauses, de temps d’arrêts, de mêmes qu’elle peut comprendre des étapes lors d’un parcours.

L’artiste anglais en Land Art Richard Long : « Marcher est aussi une façon d’acquérir une connaissance beaucoup plus intime d’un lieu qu’on ne le ferait en se contentant de regarder. Marcher permet d’intensifier la perception, l’acte marque une construction d’une position dans le monde. »

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Marcher, un acte anodin dans l’histoire ?

> Flânerie et marche organisée Marcher est un acte que tout le monde peut expérimenter, c’est une approche de l’espace qui parle à de nombreux acteurs d’un territoire et donc facilite le partage des regards. Je vais illustrer l’appropriation de l’errance au cours de l’histoire afin de montrer ses évolutions ainsi que les mouvements clés qui m’ont permis par la suite d’expérimenter cette approche de la ville. Déjà au jardin de Versailles au 17° siècle, une élite bourgeoise pratiquait la marche, l’expérience de la flânerie. Puis à Paris au 18° siècle, la ville se transforme, les promenades s’aménagent afin de voir davantage autant que d’être vu. Cette mutation d’embellissement de la ville permet de dilater un espace public étouffant. Le déplacement pédestre est une divagation de l’esprit. Marcher est une pratique élitiste au départ car il y a derrière cela une capacité sensible d’apprécier l’expression artistique de son environnement et ainsi voir le monde. Flâner est un stéréotype bien de Paris d’après Victor Hugo : « Errer est humain, flâner est parisien ». Marcher est de l’ordre de l’évidence, anecdotique aujourd’hui, mais à l’époque c’était un processus intellectuel. L’écrivain Louis-Sébastien Mercier (1740-1814) affirme bien que la marche est un acte de positionnement : « Le génie est à pied, c’est un secret qu’il faut posséder pour tout voir. »

Lythographie 1665 Paris, Porte St Denis, Graveurs Perelle

Par la suite le dadaïsme est précurseur d’une vision nouvelle en milieu urbain dans les années 1920, un mouvement intellectuel, littéraire et artistique. C’est avec les dadaïstes que le déplacement et la marche furent élevés au statut d’opérations esthétiques inscrivant directement le mouvement d’un corps dans l’espace et dans le temps réel. Sur Paris des excursions sont organisées, créant un événement en plein air destiné à toucher de façon directe le public en ville. Des traces (photos, tracts) perturbèrent irrémédiablement le système élitiste et confiné des arts. Les dadaïstes avaient une prédilection pour le Paris ordinaire, le choix de la friche ainsi que la fréquentation régulière de lieux publics constituait pour eux un moyen concret de réaliser l’union entre l’art et la vie quotidienne. Groupe dadaïstes sur Paris en bord de Seine - 1921

Le choix de lieux ordinaires est une nouvelle affirmation du refus des valeurs dominantes, le refus d’une approche pittoresque de la ville. Le terme de « visite » peut être considéré comme un détournement de la « visite pittoresque de Paris » en vogue à cette époque. Les visites de Dada ne cherchaient pas le monument digne d’être peint mais les lieux dans l’ombre, sans qualité pour l’époque. 13


> De la déambulation à la dérive A la fin années 50, les situationnistes marquent un changement dans la façon d’appréhender la ville. La production situationniste relève à la fois de la création littéraire, des arts plastiques, de la réflexion intellectuelle et de l’engagement révolutionnaire. Son objectif central de construction de « situations » (bouleversement et de dépassement de la vie quotidienne) vise rien moins que l’abolition de la séparation entre « l’art » et la « vie », dans le même temps que sa critique radicale de la « société du spectacle » refuse la passivité imposée par le capitalisme aux humains pour à l’inverse leur conférer un pouvoir actif de création de leur existence. Parmi les situationnistes, Guy Debord (écrivain, poète 1931-1994) écrit de nombreux livres sur cette réflexion de la ville. Debord était profondément anti-fonctionnaliste et son objectif était d’installer une créativité permanente, d’expérimenter des comportements ludiques, de jouir du temps immédiat, de construire des situations éphémères qui ne se traduisent en aucune représentation, ne laissent aucune trace. L’idée véhiculée est d’activer l’émotion par la déroute des habitudes, des normes, ressentir la «ville par les pieds.» L’urbanisme normé et l’architecture encadrée contraint les corps et condamne à l’ennui. Les situationnistes emploient leur pratique urbaine au potentiel artistique par la déambulation. Le but n’était plus de déceler l’inconscient de la ville, mais de comprendre les effets psychologiques de la ville sur le comportement individuel. Le mot dérive du latin « derivare » qui signifie « traverser » apparait dans leur réflexion en 1953, dans le cadre d’une expérience de ville utopique en perpétuelle mutation. La dérive par la marche requestionne le quotidien, l’idée d’un mouvement non programmé, aléatoire. Ils décrivent la dérive comme « une technique de passage rapide à travers des ambiances variées, qui fait figure de grand appel d’air, vis-à-vis des plans d’urbanisme qui se mettent en place. »

Un projet de ville utopique est pensé dans les années 60 « New Babylon », basée sur la construction de situations représentées en «carte psychogéographique.» Un souhait de sortir de la ville dite « spectacle », c’est-à-dire un espace public qui n’est que décor et qui engendre la suppression de la rue. C’est un moyen de se réapproprier le territoire par un changement de situation et donc de comportements, une critique de la géographie urbaine, une volonté de voir édifier un monde comme « labyrinthe nomade ». La dérive urbaine permet une mise en lumière des zones « inconscientes de la ville ». Guy Debord « La ville devient un espace de l’à travers, qui empêche la pause et qui accélère les rythmes des déplacements, de plus en plus intenses et prolongés, qui se court-circuitent dans les lieux incertains du travail, de la vie domestique et du prétendu temps libre ».

Guide psychogéographique de Paris, une ville disloquée - 1962 14


> L’errance par les artistes Dans le milieu des arts, de nombreux personnages et groupes de personnes expérimentent un travail qui traite de l’abandon de soi, d’une errance dans le mouvement. Un outil du mouvement évolutif décrit les diverses expériences menées. La marche est l’outil de l’artiste britannique Richard Long (photographe, sculpteur) et le territoire son matériau. Le paysage traversé est vécu, une trace de celui qui est passé est laissée. Il fait parti des fondateurs du Land Art, travail qui ne se conçoit que dans le mouvement, au rythme d’un pas dont il choisit la cadence. Posé le temps d’une traversée sur chaque continent, son art se veut anonyme, non daté, voué à l’éphémère: entre la tentation du grandiose et la modestie de l’empreinte.

La marche devient « libératrice d’une fantaisie très ordonnée », où l’effort physique côtoie le ludique. « Elle est un bon moyen de penser », d’après Richard Long. Il a marché dans les landes et tourbières d’Irlande, dans les Highlands écossais, dans les landes du Yorkshire, au Sahara, en Laponie, au Ladakh, sur la côte pacifique du Japon, dans le bush australien. Seul critère pour les lieux choisis : leur désertion par l’humain. S’il consigne ses rencontres de matériaux, de paysages, de changements de climats, et parfois d’animaux, la rencontre humaine est absente de l’œuvre, ou présente uniquement en creux, comme trace d’un ancien passage. Il cherche le vide, la terre comme page vierge, l’espace comme abstraction où tracer sa route et ses lignes, marcher et sculpter à la fois. Une connexion de l’art et de la nature. Il a une volonté de « faire de l’art en marchant », cela lui sert à percevoir et faire percevoir des sensations et des sentiments. Ses œuvres, autant esthétiques que grandioses, sont alors tout un travail sur le temps, l’éphémère et l’éternité: les pierres restent alors que les autres matériaux évoluent, se transforment. Il recherche une indépendance dans l’acte de marcher, un art construit en arpentant les lieux. La démarche ici est artistique et soulève des questions dans « les possibles » qu’offre la déambulation dans un environnement. La marche permet de stimuler l’inspiration qu’on retire d’un lieu.

Richard Long - Première marche vers le « nulle part » 1967

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Après l’art dans une nature pauvre en présence humaine, arrive la littérature par l’errance, une manière d’écrire marginalisée mais explorée. Il s’inspire de la route, du tracé d’un chemin pour confectionner ses œuvres. C’est le cas de l’écrivain Julien Gracq (1910-2007), il prend le parti pris de voyager par l’errance. Il invente une mobilité inspirée qui conduit à une construction du monde, c’est une recherche poétique. Son œuvre commence par le souci d’affranchissement et par la volonté de rupture à l’endroit des repères et des codes. Il s’inspire de l’errance des écrits de Baudelaire et Rimbaud, une expérience enrichie par le surréalisme.

Julien Gracq : « Chemins, routes sont autant d’espaces capables d’orienter, de matérialiser la direction, d’indiquer des repères. Les chemins sont, dans le fragment, la trace visible de la réminiscence, la forme de la remémoration, le tracé du chemin sur la surface textuelle peut alors participer, à des degrés divers, au souvenir autobiographique lointain ou proche.»

Le photographe, journaliste Raymond Depardon (1942) nous fait part de son expérience du territoire de l’oubli dans son livre « Errance ». Il se dit «photographe de fiction», même s’il est dans le réel, c’est un metteur en scène. L’errance n’est ni le voyage ni la promenade mais cette expérience du monde qui renvoie à une question essentielle : Qu’est-ce que je fais là ? Pourquoi ici plutôt qu’ailleurs ? Quel est mon regard? Terme à la fois explicite et vague, d’ordinaire associé au mouvement et singulièrement à la marche, à l’idée d’égarement, à la perte de soi-même. Pourtant, le problème principal de l’errance n’est rien d’autre que celui du lieu acceptable.»

Raymond Depardon, ERRANCE - Allemagne 2000

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Une errance communiquée par l’écrit mais aussi la prise de clichés photographiques, un regard sur « l’espace flottant » où l’homme est peu présent. Tout le monde peut se lancer dans une errance mais chaque parcours sous le pas de la marche est singulier, ce qui fait une démarche propre à chacun. C’est la revendication de l’identité du regard, de l’être humain, des attirances pour des lieux autres. L’outil photo est très explicite dans la communication de l’ambiance des lieux et d’un arrêt du temps. La photographie est irrationnelle, il y a un aspect libre, inconscient ou conscient. La lumière, le sujet, le moment, c’est le réel qui commande l’image. Pour Raymond Depardon, l’errance est avant tout une « confrontation avec la patience ». L’errant est pour lui quelqu’un qui partage, qui vient d’ailleurs, qui ne reste pas longtemps. Il y a cette idée de partage, même s’il est dans sa « propre quête ».


> Un parcours collectif pour une vision contemporaine Au cours de l’histoire, les méthodes d’approches de l’espace urbain ont été expérimentées par de nombreuses personnes et certaines amènent à réfléchir sur un dépaysement de l’urbain par les interstices. Le «collecif Stalker» crée en 1995 à Rome, avec notamment l’architecte Francesco Careri et des urbanistes, interroge les espaces en marges, les zones suburbaines. La face obscure de la ville, les espaces de conflits, le négatif de la ville est ciblée dans la démarche. Une méthode de projet qui permet de voir « l’inexistant ». La dimension temporelle est particulière, un espace où le temps est oublié. Pour Francesco Careri, les vides sont comparables à des îles dans la ville. Les espaces pleins sont sédentaires alors que les vides sont nomades.

L’outil de la marche est comme un moyen d’explorer cet inconscient des villes, ce que notre monde, notre ville génère en sa périphérie, dans les « zones », là où la société se débarrasse de ses déchets, comme pour les refouler dans ce « vide » urbain qui, loin d’être aussi vide qu’on le pense, regorge de vie et de créativité libre. Ainsi, la société ignore encore que ces zones vivent, deviennent. S’aventurer dans la zone, par la marche, est donc un moyen de rencontrer cet autre qui est nôtre. C’est renouer avec un dialogue entre le plein (la ville), nous pourrions dire le saturé, et le vide, et découvrir par la rencontre la genèse d’une ville nouvelle.

Rome comme archipel, Stalker 1995 - Des délaissés urbains représentés à la manière d’une mer

La marche se trouve consacrée, originellement, dans son rôle d’écriture et de lecture, elle modifie le sens de l’espace et nous ouvre à celui de l’architecture. Pour le collectif, la flânerie est une façon de penser, d’expérimenter, de créer. Le flâneur avance, franchit des frontières et rencontres d’autres réalités. En transgressant l’espace et le temps pour reconquérir des zones de liberté à l’intérieur des villes, Stalker invente une nouvelle réalité. C’est par la marche et le mouvement qu’il déconstruit et rapproche des fragments hétérogènes. Le collectif se rapproche des situationnistes des années 50 dans la construction d’aventures pour un territoire plus ludique.

Maria Luiza Carroza (architecte brésilienne) : « Le paysage urbain est une image fragmentaire de la ville. Il est surtout la multiplicité d’images. Les paysages sont des fragments de la totalité du réel, sélectionnés par le regard (un certain regard) pour la contemplation. C’est dans ce sens que l’on peut dire que le paysage est une création du regard, à partir d’une sensibilité donnée. »

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> Un changement de paradigme Précédemment, l’espace est approprié par la marche de différentes manières, un outil de travail détourné qui donne une « vision militante » de notre environnement urbain. Un regard qui contre l’urbanisme fonctionnel et qui pose la question de comment marcher autrement en ville ? Les prises d’initiatives et l’expérimentation de la marche par des courants artistes et concepts au cours de l’histoire de notre monde bâti ont contribué à changer le regard sur le tissu urbain et l’évolution de l’urbanisme. Errer dans les villes d’après guerre en 1950 avec l’essor de l’automobile n’est pas chose facile. De nombreux flux doivent se côtoyer avec une place accordée à chaque mode de transport. Entre les années 50 et les années 90, la marche en milieu urbain n’était pas une priorité pour l’état en Europe. Une transition urbaine se fait à la fin des années 90, avec le passage d’une ville motorisée à la ville pédestre. Le piéton n’est pas simple à appréhender, à gérer, ni même à canaliser sur un espace public ou privé. D’abord parce qu’il est multiple et parce que la marche n’est pas seulement un mode de déplacement. Contrairement aux autres modes, elle peut se passer de motif : le piéton s’arrête, stationne et flâne, voir vagabonde. Le marcheur en ville est aujourd’hui « une figure active » de la mutation urbaine alors qu’il était auparavant seulement un usager de la marche, victime de la motorisation. La marche n’est pas une activité linéaire mais une succession de mouvements, elle possède un « pouvoir texturant » qui donne du relief au contexte d’après Michel Foucault (1926-1984, philosophe). Depuis quelques années, de nombreuses métropoles se tournent vers un tourisme de marcheurs, avec des parcours pédagogiques tels que la découverte de monuments, du patrimoine. Les usagers de la marche en ville qualifiés de piétons sont canalisés le plus souvent sur les trottoirs, un aménagement réglementaire qui parfois bride la liberté de mouvement. Les concepteurs de l’espace peuvent influencer la construction de la ville de demain à travers la dérive, l’errance. D’ailleurs Thierry Paquot (philosophe de l’urbain) l’exprime très bien : « Les architectes, urbanistes, paysagistes... doivent être invités à désobéir à de trop nombreux règlements et normes qui cadenassent plus qu’ils libèrent les sensations des humains dans leur environnement. » Les villes tendent vers la densification avec l’augmentation démographique et la marche est un moyen de répondre à divers enjeux des villes à l’avenir. Revenir un maximum à la marche à pied est une étape du développement durable de nos villes, certains usagers préconisent le retour à une sorte de lenteur et aux valeurs d’autrefois. Apaiser une ville consiste à éloigner les voitures du centre ou à autoriser leur accès de façon contrôlée et en réduisant leur vitesse de déplacement. Une ville de demain qui prône la mixité sociale : courtes distances favorisant la marche et le vélo, densification suffisante pour permettre la viabilité d’activités. Marcher ludique est peut-être le clé d’un urbanisme porteur de projets, dans nos ville toujours plus « aseptisée ».

Francis Hessel (écrivain 1930 dans « L’art de se promener ») « Le vrai promeneur est comme un lecteur : la rue est son livre ouvert qu’il lit par pur principe de plaisir. Il ne lit ni trop vite, ni trop lentement, au rythme de ses pas. »

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Habiter l’inhabituel

Définir le « délaissé urbain »

Comment nommer ces lieux aux allures marginalisées, dans l’ombre des vides ? Un délaissé urbain est très connoté et employé par divers termes : friches, dents-creuses, espaces cachés, chutes urbaines, jachères, espaces résiduels, no man’s land, interstices, terrains vagues, lieux en ruine, entre-deux, squats, tiers-paysage, junkspace, zones blanches, recoins... Selon les domaines dans lesquels le délaissé urbain est ciblé, le mot change et sa définition diffère. La ville est une lecture plurielle et subjective selon les regards et perceptions. L’anthropologue Marc Augé nous parle du monde complexe de l’urbain : « la ville est une figure spatiale du temps où se conjuguent présent, passé et futur car elle contient à la fois les centres historiques, les monuments et les itinéraires de la mémoire individuelle.» Les délaissés urbains font partie du paysage du quotidien et pourtant n’existent pas au yeux de tous. Dans la manière de représenter l’espace à travers la cartographie, les délaissés sont symboliquement insignifiants, transparents. La ville est le lieu de l’habité et d’interactions spatiales et temporelles. Vagabonder en ville donne une dimension en relief du terrain et la décompose par la traversée des vides entre les formes bâties. Au sein de ces interstices urbains, des lieux marginaux tombés parfois dans l’oubli. La dérive donne une compréhension de l’espace face au constat d’un paysage urbain contemporain aseptisé, freinant l’émergence de nouveaux types de consciences collectives. Les espaces délaissés permettent une lecture d’une partie de la ville, son négatif, la face cachée/ obscure. Le délaissé génère un dépaysement, un état d’appréhension qui conduit à une intensification des capacités perceptives, soudain l’espace assume un sens, l’oreille se met à l’écoute. Ce lieu que l’on trouve à différentes échelles et disloqué en ville est livré à lui même avec une constante évolution, l’état n’est pas figé. Auparavant, le délaissé de l’aménagement provoquait une vision négative, comme le déchet d’une déprise suite à l’abandon d’une activité, tel un passé ouvrier douloureux. Ce type de lieu est par moment incompris, pas facile à cerner, avec un changement de regard, que les politiques des villes essayent d’apprivoiser.

Luc Levesque (architecte, artiste) : « Les friches urbaines étant un phénomène rhizomatique au sein du tissu urbain. A la façon d’un rhizome, celle-ci inonde la nappe urbaine via une infinité de connexions. D’interstices en interstices, elles prennent racines à toutes les échelles de la ville. »

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Les délaissés urbains touchent plusieurs domaines : militaire, portuaire, infrastructure, industriel, résidentiel, lieux de stationnement, zone de stockage... Ils sont les conséquences des évolutions de la ville, du morcellement des sols, des excès de l’urbanisation, des reconversions. Les politiques d’aménagement produisent des résidus par un choix de développement et non le recyclage de site. Le délaissé est un espace isolé par des considérations urbaines et devient un lieu mis à l’écart. Il peut prendre diverses formes urbaines, il ne rentre pas dans une logique de rentabilité. Pour certain, il nuit à l’image de la ville « idéale », un point de vue réducteur sur une complexité de « l’habiter ». L’écrivaine Perla Serfaty (sociologue et spécialiste de l’appropriation des lieux ‘habités’) nomme ces lieux « les restes de la ville ». Un surplus spatial qui survit à notre satiété constante et pourtant sert d’espace de réserve au développement urbain. L’architecte Chilpéric de Boiscuillé (ancien directeur ENSNP Blois) porte un autre regard sur ce type de lieu : « Les délaissés ne sont peut-être que des résistances aux changements. Un délaissé redonne du sens aux notions de temps, une vision des restes de l’aménagement, un lieu sans ordre pour toutes les exclusions, personnes, mauvaises herbes... Les friches interrogent sur leur fonction urbaine, environnementale et sociétale. » Un lieu en marge qui accueille de nombreuses pratiques d’appropriation, une spontanéité du mouvement qui réinvente la ville sur des temporalités variées. Le délaissé peut marquer un espace de jonction entre différents contextes, parfois antagonistes, tels que le milieu rural et urbain. Sa valeur interroge la notion d’échelle, il peut prendre sens ponctuellement dans la ville ou sur une grande surface. La forme peut prendre divers tracés dans la ville, elle peut être linéaire, par exemple un chemin de fer abandonné, elle peut être un entre-deux entre deux espaces distincts. Le relief et l’agencement de la ville peut jouer sur la verticalité des friches, elle ne sont pas seulement terrestres mais peuvent être présentes sur les toitures, passerelles, ponts, façades bâties. Une situation à différents niveaux de lecture qu’il est possible d’entrevoir par l’observation. La notion de fertilité se pose dans une friche aux dynamiques naturelles et donc, une végétation spontanée prend forme. Le milieu urbain est dominé par un sol imperméable, dur, où la vie floristique et faunistique a très peu sa place. L’histoire des lieux laisse une empreinte sur les friches, laissant une forme architecturale, des restes de matériaux, d’objets, d’outils. Pour le paysagiste jardinier Gilles Clément, dans son concept de «Tiers paysage» (renvoi à tiers-état), la friche est un « fragment indécidé du Jardin Planétaire qui désigne la somme des espaces où l’homme abandonne l’évolution du paysage à la seule nature ». Il concerne les délaissés qui procèdent de l’abandon d’un terrain anciennement exploité. En secteur urbain ils correspondent à des terrains en attente d’affectation ou en attente d’exécution de projets suspendus aux provisions budgétaires, aux décisions politiques. Les délais, souvent longs, permettent aux friches urbaines d’acquérir un couvert forestier. La valeur environnementale est pour lui importante car le délaissé est support de dynamiques naturelles et refuge de la biodiversité. C’est pour lui l’espace du futur car il constate une population d’espèces beaucoup plus élevée que dans un lieu géré.

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Apprivoiser l’inconnu par ses temporalités

La première forme d’appropriation d’un délaissé urbain est marquée par un retour à la nature comme expliqué précédemment. Au cours de l’histoire, l’homme a essayé de domestiquer et côtoyer ces dents creuses par différents procédés.

Cartographie sensible du Grand Lyon - Robin des villes 2002

L’association «Robin des Villes» (architectes, urbanistes, géographes...) basée sur Lyon s’interroge sur les délaissés urbains depuis 1999. Ils définissent la « friche en sommeil » sous l’angle de trois désordres d’après Stéphane Tonnenat (CNRS Université Paris Nanterre) : le Vide (désordre de production ou de reste), Le rempli (désordre de saleté ou résidu) ou l’Occupé (désordre de transgression). La singularité d’approche de «Robin des Villes» a été de s’intéresser aux friches industrielles par le prisme de leurs modes d’occupations successifs. Ils étudient le délaissé dans une dimension qu’ils appellent le « temps de friche ». Une temporalité de l’état de veille avec une vision des occupations intermédiaires que le délaissé donne à observer. Le temps exact de dormance du lieu est pris en compte afin de montrer les différentes strates qui compose la friche.

Les délaissés sont dissimulés dans le tissu urbain à diverses échelles et temporalités, une exploration plus « clandestine » a pris son essor dans les années 90 : L’urbex (de l’anglais urban exploration), une activité qui consiste à visiter des lieux oubliés, cachés et difficile d’accès. Les pratiquants cherchent à remonter le temps à travers l’exploration, il y a une recherche de la transgression d’une réglementation d’un domaine privé. L’ambiance des lieux poussiéreux et le parcours chaotique stimule l’avancé et la frénésie de la découverte. On marche dans les traces d’autres personnes, dans un lieu déserté, qui donne l’impression de découvrir un trésor, un morceau de vie des activités antécédentes. C’est un sentiment profond, l’émerveillement, parfois une certaine mélancolie. Le photographe Niki Feijen (Pays-Bas) exprime son sentiment d’immersion dans les lieux abandonnés : « Parfois, quand la friche est en sommeil, il est possible de se glisser dans son ventre. Alors à ce moment-là, on a l’impression qu’elle ne dort que d’un œil. »

Collectif « Ici Même » Grenoble (Tous Travaux d’Art 2004) : « Friche lieu - Espace de possibles au milieu d’une ville, lieu d’amas de choses abandonnées en cours de route, zone de non-droit donc assez libre, espace à saisir pour y construire des cabanes, faire pipi dehors, peindre, récupérer, jeter... La friche ne va nulle part, ne produit que de l’éphémère et de l’inutile. Zone d’essais, brouillon permanent. Elle a la propriété singulière de transformer l’état d’esprit de ceux qui la traversent, espace souvent interdit au public. » 22


Rolland Barthes (Mythologie, 1957) : « Marcher est peut-être mythologiquement le geste le plus triviale donc plus humain ». (photo : quartier de l’étang - agglomération Genève)

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Partie Ll l’errance comme clÊ de lecture

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méthodologie et limites du procédé

Expérience partagée Expérience partagée

Regarder l’espace Regarder l’espace Collectif architecte/sociologue « Pas de Côté » (Lyon) Collectif architecte/sociologue « Pas de Côté » (Lyon) urbain par la marcheurbain par laAssociation marche « C-Fal » atelier écoute de la ville (Genève) Association « C-Fal » atelier écoute de la ville (Genève)

Expérimentation

Territoire

Observation milieuTerritoire urbain via les intersticesObservation délaissés milieu urbain

errer au fil de situations

via les interstices délaissés

Outils

Outils

Errance/dérive par la marche Cartographie + vue satellite Matériel photographique Carnet croquis-notes Errance/dérive par la marche Rencontres in situCartographie + vue satellite

Matériel photographique Carnet croquis-notes Rencontres in situ

Dynamique des friches identifiées sur 6 mois

Dynamique des friches Amorcer le projet identifiées sur 6 mois

Amorcer le projet - Workshop « Cultura Fertilis » Collectif Urbz - Bénévol « Collectif Largescalestudios » projet participatif - Workshop « Culturajardin Fertilis » Collectif Urbz Identification des délaissés des Moraines Carouge - Bénévol « Collectif Largescalestudios » projet jardinune errer au fil Unparticipatif projet par Ville par typologies de la Marbrerie Identification des délaissés - Réflexion mutation zone industrielle desJardin Moraines Carouge de situations expérience vécue de Genève Ville » « Forum Grosselin par typologies - Réflexion mutation zone industrielle Jardin de la Marbrerie Une combinaison -de L’appropriation des délaissés urbains par les habitants Genève « Forum Grosselin » de singularités Une démarche Une combinaison - L’appropriation des délaissés urbains par les habitants sensible au service de singularités Interaction ville d’une ville en fonctionnelle mouvement Valeurs de ville de « l’envers » Interaction ville l’interstice fonctionnelle Expérimentation

Valeurs de l’interstice

- Quelles échelles ? - Traces appropriations humaines ? - Reprise dynamiques végétales ? - Abandon de quelles activités ? échelles ? - Quelles - Temporalités du délaissé- ?Traces appropriations humaines ? - Accessibilité, contexte implantation ? - Reprise dynamiques végétales ? - Potentialités lieu ?

Enjeux

- Découvrir la ville autrement - Quels liens entretenir avec un délaissé ? Enjeux - La marche au service de la construction de la ville - Quelle place aux espaces éphémères ? - Découvrir la ville autrement - Interstice support de nature urbaine retrouvée? - Quels liens entretenir avec un délaissé ? - Liens des délaissés et dynamiques- de Laprojets marcheprogrammés au service de la construction de la ville - Abandon de quelles activités ? - Une spéculation immobilière forte (ville figée) Quelle place aux espaces éphémères ? - Un réseau culturel dense - Temporalités du délaissé ? - Accessibilité, contexte implantation ? - Un manque de culture alternative - Interstice support de nature urbaine retrouvée?

- Potentialités lieu ? Une dérive personnelle au gré de situations paysagères

Une quête du délaissé urbain

Une dérive personnelle au gré de situations paysagères

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ville de « l’envers »

projets participatifs : une source d’idées

Une quête du délaissé urbain

révéler une ville de l’envers

projets participatifs : une source d’idées

- Liens des délaissés et dynamiques de projets programmés - Une spéculation immobilière forte (ville figée) - Un réseau culturel dense - Un manque de culture alternative

révéler une ville de l’envers


Un projet par une expérience vécue Une démarche sensible au service d’une ville en mouvement

r ? Je pense que c’est lorsque l’on s’oublie au Guy Debord : « Quand commence-t-on à erre ct, lorsque nos sens prennent le dessus. (…) temps, lorsque l’on se soumet à son instin tendu. » Laisser place au hasard, à la surprise, à l’inat

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approche du territoire

Après avoir exploré l’errance et définit la friche, la méthode d’approche face à un choix territorial doit être personnelle, singulière et s’inspirer à la fois de différents regards portés sur le monde urbain. Arpenter les vides urbains par un parcours labyrinthique demande une marche sur plusieurs jours voire plusieurs mois afin d’intégrer les dynamiques des friches identifiées et le jeux de remplacement de ces délaissés. Les villes mutent très rapidement, il est donc intéressant d’appréhender les délaissés par un parcours «tentaculaire» et temporel. La saisonnalité des lieux peut jouer sur les ambiances, les pratiques humaines, la réglementation, le hasard des rencontres, les dynamiques végétales. L’approche personnelle de terrain se déroule sur 6 mois, de mars à août 2017. Ma rencontre avec les délaissés urbains par l’errance va me permettre de comprendre l’articulation de ces vides avec leur contexte d’implantation et questionner la mobilité dans un système urbain parfois hostile à la marche. Une démarche qui peut transgresser les règles d’urbanisme fonctionnel afin de chercher à désorienter l’usager, penser la ville autrement. Marcher en errant dans un dédale de rues et traverser des terrains privés ou publics peut engendrer une perte de repères. Le fil conducteur des délaissés urbains est une clé de lecture à ne pas perdre de vue, l’échelle de leur identification va dépendre de la densité de la ville en question. En centre urbain, les délaissés sont peu présent car pris d’assaut par la planification urbaine. Il va être nécessaire d’agrandir le rayon de l’exploration de la ville en question selon le degré d’interventions en aménagement urbain. Il va falloir être prêt pour braver des interdits de lieux, se faire parfois discret et trouver l’accès pour pénétrer le cœur du délaissé. La marche est adaptée aux franchissements d’obstacles, se hisser, grimper, observer, entrevoir, contempler et adapter son rythme dans l’espace. C’est une approche qui demande du temps d’observation, de compréhension, de prise de notes, de croquis, de patience mais riche en expérience de la ville. La création de cartographies suivant l’avancé de l’exploration des vides est indispensable afin de prendre de la hauteur et voir les relations que peuvent entretenir les interstices avec leur territoire. Cet espace en marge dans son rapport avec la ville pose la question de l’ordre de l’espace « civilisé », telle qu’une place, un square où les pratiques sont planifiées. Pratiquer la dérive en ville soulève diverses questions : La ville laisse t-elle une part de hasard à la déambulation et la découverte d’ambiances changeantes ? Quels regards portent les acteurs du territoire (habitants, politiques, artistes, associations, personnes sans domicile, anciens ouvriers...) sur les espaces de friches ? Comment les perceptions influencent-elles les occupations de friches et leurs usages ? Les friches assurent-elles la fonction des continuités face aux espaces urbains en perpétuel changement ? Que serait une ville sans friches ? Le sens de l’interstice ne passe t-il pas par une réappropriation du corps ? Le délaissé peut répondre à divers besoins : respirations, transitions, perceptions, divertissements, connexions, liberté du corps, fluidité... Un support de projet urbain intéressant dans une requalification d’espaces en devenir. Mon diagnostic par la marche permettra de retisser la ville, apporter une valeur aux friches dans un contexte de mutation urbaine. Le nomadisme ancre plus fortement le piéton à son environnement, les délaissés pourraient prendre plus de valeur et donner corps à la ville. Penser un urbanisme par le prisme des délaissés requestionne le devenir de nos villes.

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Un parcours de l’errance à travers la ville suisse de Genève selon des situations paysagères à la recherche des délaissés urbains...

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Une expérience urbaine personnelle par regards croisés

Franchir le pas de l’exploration urbaine... Avant de me lancer sur mon site d’étude qui renferme les délaissés urbains que je convoite, j’ai participé à une journée d’écoute et observation de la ville de Lyon avec le collectif « Pas de côté », organisé par Thomas Jennequin (architecte), Antoine Dubes (documentariste) et Julien Thiburce (doctorant langage du monde urbain). Le parcours consistait à pratiquer une errance dans Lyon à travers les places publiques, elles permettaient de croiser les regards échangés entre habitants et personnes extérieures. Apprendre l’urbain via les places publics permet d’appréhender une musicalité de l’espace par les passants. Chaque mètre carré d’un espace commun est interprété par chaque usager, avec des objets parfois détournés de leur fonction de base. Visuellement enfermée entre les bâtiments, essentiellement (mais pas exclusivement) minérale, la places a une étendue surfacique, qui l’emporte sur ses dimensions linéaires. La place est ainsi un lieu de circulation, mais surtout un espace public dédié au stationnement des piétons, propice aux rendez-vous, aux petits et grands rassemblements, à la discussion, au « lèche-vitrine » ou à la restauration sur terrasse. Elle marque également une scène idéale pour la représentation collective de la société urbaine, une image condensée des pratiques des « vides » urbains. Ces vides aménagés pour l’arrêt, la traversée, les jeux, marquent une entrée en matière de décryptage de l’espace. Dans cette promenade, nous avons tenté de saisir les différentes figures du passant dans la ville : des rôles qu’il se donne aux rôles qu’on tente de lui faire jouer, entre mise en marche et mise en arrêt.

Quel lieu pour la marche ? Quelle rue pour l’attente ? Quel potentiel offre la ville à celui qui s’arrête ? Et en retour, comment la ville est-elle modifiée par les allers et venues de chacun? Cette expérience me permet de faire le lien avec ma quête des espaces délaissés, observer le côté de la ville réglementaire, parfois figée dans le temps où chacun est à sa place. Cela permet de donner une autre dimension à la ville de « l’ombre » où les délaissés échappent aux changements d’une politique d’aménagement aux pratiques programmées. Le parallèle des vides non délaissés et délaissés est intéressant à exploiter.

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s ma Tho Place Bellecour Lyon 25 mars 2017 - Mise en commun des regards

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L’écoute de la ville par l’écriture

Grâce à l’association C-Fal basée à Genève, j’ai pu participer à deux marches urbaines qui consistaient à observer la ville, dans une cité (Cité du Lignon) à 4 km du centre ville de Genève, sur la commune de Vernier. L’écrivaine Anne-Sophie Subilia et l’architecte Aurélien Reymond, deux intervenants complémentaires dans leur approche de la ville, encadraient et dynamisaient ces « écoutes de la ville ». Guidée par les bruits, les textures, les volumes, la marche s’effectue à travers les diverses situations qui s’offrent à nous. Le principe est de restituer l’observation par l’esquisse et la prise de notes in situ. La matière récoltée dans les carnets est l’occasion d’expérimenter une écriture poétique par les relevés fragmentaires de la ville explorée. C’est une approche sensible de la ville par l’architecture et l’écriture, enrichissante pour ma marche personnelle sur mon territoire d’étude. La marche est ponctuée de haltes afin de faire le point et de croiser nos regards sur cet environnement urbain en bord du Rhône. Les participants ne sont pas habitants de la cité du Lignon, une observation de découvertes pour tous qui crée des surprises.

Genève

Rh

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Le Lignon

Une marche partagée à l’ouest de Genève 32


Gaston Bachelard (1884-1962, philosophe français) « On sait que la ville est une mer bruyante, on a dit bien des fois que Paris fait entendre, au centre de la nuit, le murmure incessant du flot des marées. »

Déborah (habitante Genève) : « Je suis assise près des pissenlits, les façades parsemées de coloris où l’ombre des oiseaux passe et repasse. Des corps vont et viennent, un homme s’accoude, on aperçoit un peu de chair et c’est la chair de l’immeuble qui déborde et ressort par les orifices : coursives, fenêtres, portes... » Brigitte (habitante ville voisine) : « Cylindrée vrombissante, couple de motards, centre commercial, parking, banlieue béton, réflexion des gris, training Adidas. Quelques pas dans le tunnel, sous le rideau, et badaboum, c’est le pays magique de l’autre côté du miroir. Le vert jaillit, les avions se sont changés en oiseaux, le marbre se fait solaire, les narines sentent les fleurs (ce locatif en bord de forêt, écho à l’immeuble de l’enfance, d’un côté la banlieue, de l’autre les têtards et les pierres plates). Deux faces opposées, deux mondes de chaque côté du rideau. Une façade réfléchit l’ombre, l’autre le soleil. On entend « cité », « promiscuité », puis le chant des merles. »

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Partie Lll

mon exploration urbaine De genève par l’errance

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Se situer...

Où se déroule mon errance ?

La ville suisse de Genève appelée « la ville du bout du lac », pour sa situation au pied du lac Léman, est pour cinq mois de mars à août 2017 mon terrain d’exploration du tissu urbain en quête des friches. Cette région sud ouest fait partie de la Suisse romande, la partie francophone du pays. En 2008, 350 sites délaissés ont été répertoriés et depuis, ces espaces ont eu le temps de changer. Un inventaire à grande échelle des friches industrielles qui laisse de côté la diversité des délaissés à l’échelle d’une ville, d’un quartier, d’une rue. La désindustrialisation de la Suisse dans les années 80 a créé des résidus d’activités interrompus en cœur de ville et sur les franges. L’industrie s’est retirée de l’espace urbain pour être transférée en périphérie, notamment de 1991 à 2001, la Suisse a perdu 20% d’emplois du secteur industriel.

France

Besançon

Genève est une ville au passé industriel fort, des traces subsistent toujours pour en témoigner. Cette ville suisse est la plus dense du pays avec 12.656 hab/km2 fin 2016 avec une surface de 15,93 km2 (201 105 habitants 2016). Sa surface est intéressante pour la pratique de la marche, sa densification favorise la mobilité douce. La corrélation de quartiers à l’identité industrielle et la spéculation immobilière produisent des délaissés urbains qui sont dissimulés à plusieurs échelles. Des espaces en attente d’usages ? Lausanne

Genève

Annecy

Répartition des friches en Suisse OFS 2008 36

Chambery


Allemagne

Mulhouse

Bâle Zurich

Suisse Berne

Autriche

Lucerne

Italie Milan

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Une ville aux emblèmes prégnants

Genève est vue comme la capitale des organisations internationales telles que la Croix Rouge (1863), l’ONU (1937), l’UNICEF, l’OMS. La ville du bout du lac Léman est située dans une vallée à la convergence du Rhône et de l’Arve. L’eau est donc très présente malgré une densification du centre urbain. Des années après guerre jusqu’au années 70, Genève se développe à un rythme très élevé (+25% population). Cette ville suisse est indissociable de certaines caractéristiques symboliques comme sa rade (plan d’eau lacustre autrefois mouillage d’une flotte) à proximité de sa cité (« vieille ville »), son fameux jet d’eau qui gravite à 140 mètres de hauteur et pour finir un cadre de vie urbain assez vert avec de grand parcs. La ville comprend plus de 50 parcs, une partie de ces domaines publics sont d’anciens domaines privés légués à la Ville de Genève (parc La Grange, Parc Ariana, bois de la Bâtie...) par des mécènes à la fin du 19ème siècle. Genève ville internationale s’inscrit dans une échelle plus grande avec son canton de 45 communes de 282,4 km2. Entre 1945 et 1975, le canton connait une forte croissance démographique passant de 185 000 à 336 000 habitants et une urbanisation aux abords du lac et de la vallée de l’Arve. L’agriculture (principalement céréalière) domine en franges du canton et côtoie les habitants des diverses communes. Le relief ceinture la vue genevoise avec la chaîne du Jura, le Mont Salève et en perspective du lac Léman, on peut apercevoir le Mont-Blanc. Un cadre idyllique entre paysage lacustre et système montagneux.

Un Genève dense au pied du lac Léman 38


Lac Léman Haute chaîne du jura

Genève

Rhône

L’Arve

Mont Salève

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Une culture de l’art dans la rue

Au premier regard, le territoire de Genève est agréable à arpenter par ses nombreux interstices urbains et la diversité de leurs échelles. L’eau structure l’espace et des quartiers se distinguent par l’architecture, l’histoire, le degré de minéralisation et la végétation des lieux. Les délaissés urbains se font timides, il va être nécessaire d’explorer chaque recoin de la ville par une errance sensible aux gré des situations. Le cœur de la ville est très maîtrisé dans l’aménagement, une propreté et une régularité sans faille. L’image désordonnée que renvoient les délaissés fait appel à ma patience... Marcher en périphérie du centre ville de Genève augmente t-il mes chances de quête de l’espace résiduel ? Le Rhône : Un passé industriel Un grand espace ferroviaire Confluence Rhône et l’Arve

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Panorama depuis le Mont Salève


Des quartiers charmants

Jet d’eau et Rade

La vieille ville : la Cité Une multitude de parcs arborés

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Aé roport

Lac Léman

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Genève

2 Limites villes «Vides» «Pleins»

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Une relation étroite entre le plein et le vide

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Selon les quartiers de l’agglomération de Genève, les vides sont plus ou moins importants. Cela varie par le nombre et le type de logements, la fonction des bâtiments (logement, artisanat, commerce...), les voies de communications, l’échelle des espaces publics... Pour comprendre les situations qui caractérisent les vides, trois contextes urbains différents (2015) : L’entité urbaine 1 correspond au quartier populaire des Pâquis-Genève avec 27 000 hab/km2. L’entité urbaine 2 est une frange industrielle (PAV Carouge-Genève) avec 3 600 hab/km2. Puis l’entité urbaine 3 marque une mixité pavillonnaire et d’immeubles, en limite de Genève sur Le Grand-Saconnex. Une densité de 2 700 hab/km2.

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En analysant l’urbanisation de Genève et ses villes voisines par un angle de vue cartographique, cela met en évidence le rapport entre le plein et le vide. Le plein est caractérisé par une entité urbaine (formes bâties) et le vide représente l’articulation entre les diverses formes bâties. Le vide incarne des flux, des usages, des dense bles 1 m activités. Ce sont des lieux en mouvement, se non figés dans le temps. Au sein de ce tissu urbain genevois, les formes urbaines ont été planifiées sur de nombreuses années par une politique d’aménagement. Cette planification spatiale concerne les boulevards, les parcs, les places, les trottoirs...

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1

Routes Chemin de fe r

La marche urbaine passe par une errance des lieux, et elle est aiguillée par différentes composantes du paysage genevois qui forment des strates successives. Ma quête des espaces en état de « délaissement » se déroule dans le tissu urbain dessiné par le plein des formes bâties. Les réseaux de communication tels que le tracé des routes, les lignes de chemin de fer ont contribué à choisir mon chemin. Cette circulation de flux permet le franchissement : contourner un lieu, passer en dessous, accompagner une linéarité du mouvement. Un accès facilité par l’aménagement mais sortir des sentiers battus est une nécessité dans ma dérive. 2

Au sein des formes bâties, des zones d’activités (industries, commerces...) se distinguent dans le paysage par l’échelle de leurs « vides » (accès, stockage, parkings) ainsi que par la dimension des bâtiments, par rapport aux quartiers de logements. L’espace public est bien différent de l’espace « habiter » et les piétons se font timides dans cette portion de ville triste et pas très accueillante.

Zones d’activ

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3

La construction de la sédentarité passe par un paysage « construit » l’accumulation d’objets (véhicules, poteaux, câbles, mobiliers, escaliers, panneaux...) dans l’espace, faisant parfois obstacle à la marche. La valeur sociale est omniprésente dans la strate bâtie avec un patrimoine industriel, administratif, maisons ouvrières et de maîtres. Le bâti organise fortement l’urbain, le conditionne et mute selon les époques et l’aménagement. 44


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Sur l’agglomération de Genève le relief ne passe pas inaperçu lorsqu’on déambule dans la richesse des situations paysagères. La Cité (vieille ville) se dresse sur les hauteurs non loin du lac et les vues lointaines offrent des perspectives sur un paysage montagnard. Les variations de hauteur sous le pas apportent du rythme, un angle de vue diversifié, un frein et un accompagnement dans un parcours à la dérive. La convergence de la vallée de l’Arve et du Rhône marque un paysage horizontal qui contraste avec ses limites (berges lacustre). Les variantes d’ouvrages selon le relief sont intéressantes pour le marcheur : passerelles, ponts, marches, talus, pontons, belvédères, tunnels...

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L’élément eau est indissociable du cadre de vie genevois. Le lac Léman est contemplé depuis ses quais où de nombreuses passerelles et ponts permettent un jeu de franchissements du fleuve et de la rivière. Plusieurs activités sont liées à l’eau telles que la baignade, pataugeoire parc, pêche, balade bateaux... Une composante qui accueille une flore et une faune riche qui accompagne le piéton dans une ambiance qui coupe avec la sonorité de la ville.

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Réseaux Parc s Strate arboré e

Malgré une densification assez forte en centre ville de Genève, la végétation est omniprésente grâce aux nombreux parcs arborés et les ripisylves aux abords des cours d’eau. Le couvert végétal est agréable pour la marche, l’impact des nuisances de la ville est atténué. Les continuités vertes forment un grand réseau où de multiples essences végétales accompagnent les formes urbaines. Certains quartiers à faible densité sont comme noyés sous le houppier des arbres.

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Mon Parcours labyrinthique Un cheminement au gré de situations

Texture sol

Stree-art mural

Formes végétales

L’architecture : « de ordre dans la ville »

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Perspective chemin de fer

Flux réglementés

Commencer le premier pas dans une ville dense comme Genève a été une grande surprise au cours des découvertes paysagères qui séquencent le tissu urbain. Lors de ma dérive, j’ai choisi de faire abstraction de la signalétique aux abords des rues et chemins afin de ne pas emprunter des itinéraires pouvant agir sur mon errance. La marche passe par une traversé de lieux, d’ambiances, de sentiments, de frontières, de rencontres (humaines, animaux). La quête du délaissé urbain est assez exaltante, le regard est à la recherche de lieux échappant au développement urbain. L’environnement rigide et parfois hostile de la ville contraint les sens. Pour cela, il est nécessaire de créer sa propre bulle pour faciliter son immersion personnelle dans l’espace. Marcher est bien un acte sensible, un moyen d’interaction entre le corps et le milieu que l’on parcourt. Un milieu constitué de tensions multiples, où objets et lieux cohabitent. Un lieu structuré quelconque est codifié, il renvoie à un concept, une histoire, une politique, l’art, le spontané, la symbolique, la technique, l’usage, l’utopie. Le corps est guidé par des strates successives inscrites dans une temporalité, les éléments ne sont pas figés. Ma démarche sur plusieurs mois et la saisonnalité permettent d’analyser le côté éphémère des lieux. Une méthode qui demande du temps, mais permet d’enrichir et aiguiser l’approche personnelle du terrain. En tant que paysagiste, cultiver son regard, déstructurer l’espace, capter les lignes structurantes, permet de simplifier une complexité.

Ouvrage : « passer au dessus de »

Les distances d’un espace public à un autre sont assez réduites, l’errance permet une mobilisation du temps. Il semble même s’étirer, se détacher de l’horloge. La lenteur de l’exploration comparée au vélo offre plus de chance de percevoir l’identité des lieux, les ambiances qui les habitent. Le délaissé fait parti du quotidien de la population genevoise mais il est présent ponctuellement et dissimulé à l’abri des regards. Ses limites peuvent prendre diverses formes avec plus ou moins de porosités. Le parcours en lui même guidé par des situations trace une trame paysagère porteuse de projets, de potentialités à mettre en lumière. Marcher peut paraître anecdotique mais il éveille la pensée et l’acte est inscrit dans un processus qui contraste avec la planification urbaine contemporaine. Errer sur plusieurs semaines implique au fur et à mesure du temps passé sur site, une connaissance accrue du cheminement et donc un risque de perdre le fil conducteur de la dérive. Se perdre est important même si les parcours répertoriés peuvent se croiser, s’effleurer.


47


Le relief : guide et obstacle naturel à la marche

Carte du delta avant sa maîtrise

St-Gervais

Rhône

Rade

Cité

Jonction Plainpalais Delta jusqu’au XVème siècle Arve actuelle Vieille ville

Mener une marche dans un territoire modelé par l’eau et un relief accidenté par endroit, va obligatoirement influencer mon parcours. Les méandres du Rhône et l’Arve ont façonné les berges, pouvant atteindre 400, 420 mètres d’altitudespar endroit, avec 50 m de dénivelé. Autrefois l’Arve prenait une place importante, créant un delta au XVème siècle. Cette rivière au fil des siècles, a érodé les roches les plus « molles». Aujourd’hui l’ancien delta forme une plaine urbanisée qui bute sur des falaises lacustres. Les quartiers de Plainpalais, Jonction, jusqu’à Carouge étaient des grandes étendues marécageuses, aujourd’hui l’Arve est canalisée avec des cheminements pédestres qui la bordent. La vieille ville de chaque côté du Rhône est au pied du lac Léman, avec Saint-Gervais et la Cité. Cette cité est sur un éperon rocheux, dominant l’urbanisation qui cerne son bâti ancien et ses rues étroites. Les anciennes fortifications (voir carte) créaient une limite franche avant les grands travaux de développement urbain. Dorénavant, ce contraste est visible par de grands boulevards et des formes bâties plus contemporaines. Le grand relief est visible de loin avec la chaîne du Jura et le Mont Salève mais un dénivelé est aussi présent dans l’agglomération de Genève. L’errance que j’ai mené (carte fil rouge), se calque sur les montées, les descentes, les plats du sol. Parfois obstacle mais aussi accroche visuelle et belvédère sur le paysage, les courbes de niveaux dessinent et mettent en pratique une approche du terrain sensible. L’homme fabrique aussi son « propre relief » avec la conception d’ouvrage et la modélisation de terrains (remblai, déblai). La strate arborée est présente sur les reliefs très accidentés, une végétation qui marque les points hauts.

Arve

Carouge

Berges Rhône dissymétrique : urbanisée / boisée Lancy - pavillonnaire (Alt 420m) Industries Acacias

48

Coupe : Lancy -Genève (2,7 km)

L’Arve

Place Plainpalais


Carte : Un relief qui impact l’errance

Lac Léman

Rade

Coupe

L’Ar v

e

Rhône

900m

0

Système hydrographique Chaîne Jura

Fortification (destruction 1849) Promenade de la Treille

Cité (400m Alt)

Parcs/Promenades

Errance Quartier commerçants (Alt 370m)

Rade Jardin anglais 49 49


16

roport

Meyrin Aé

Le Grand Saconnex

ONU

11 10

19

Prieuré Sécheron

Les Crêt 12

14 15 Les avanchets

8

Vieusseux Prairie-delices

18

Servette

Sant-Jean 17

Centre-ville

Cropettes

Saint-gervais 4 5

Rh

ône

9

13

Châtelaine

Vernier

Lac Leman

7

6

1 Eaux-Vives

3 2

Jonction

Lignon

Pâquis

Cité

Plainpalais 25 28

L’A rve

Lancy

22

FlorissantMalagnou 21

aCACIAS Champel

Onex La Praille

Carouge 24 26

0

1,5km Situations - orientations croquis

50

27

Centre névralgique

23

20

St-Georges

ChêneBougeries


première errance : partir du cœur historique

île Rousseau (1)

Raconter une errance n’est pas chose facile, je compte partager cette déambulation par le biais de situations et des délaissés découverts. Débuter la découverte de la ville par son centre névralgique permet de ressentir les identités des 16 quartiers de Genève, l’effervescence qui habite chaque ruelle. Je suis attiré par le bruit de l’eau qui fait frontière d’une rive à l’autre. Le vent s’engouffre dans un couloir depuis le lac, longeant les fronts bâtis. Saint-Gervais et la Cité dialoguent entre eux, des îles maçonnées flottent sur l’eau composées d’une architecture industrielle. Le Rhône marque un fort repère dans le paysage qui va me servir dans mon errance.

La Cité (vieille ville) donne l’impression d’une bulle, elle attire par ses rues étroites et son architecture qui contraste avec une urbanisation plus « lâche » en limite. Les traces anciennes des fortifications (démolition 1850) sont visibles par une rue plus large et les formes bâties d’une autre époque. Une promenade est accessible par une montée, donnant une vue sur le parc des Bastions et le grand théâtre. La vielle ville offre un parcours labyrinthique qui désoriente, les places publiques sont une respiration dans ce fragment de ville historique dense. De grands arbres attirent l’œil dans le centre-ville, le patrimoine arboré est impressionnant au sein des parcs, rues, boulevards, quais. Les nombreux monuments (cathédrale, palais, musée, temple...) donnent une autre échelle, ancrés dans une ville imposante. Promenade de la Treille (2) 51


> Plainpalais : un carrefour de flux

La place de Plainpalais ne passe pas inaperçue, elle marque un carrefour de flux. Plusieurs pratiques se regroupent sur cet espace public très minéral ponctué d’arbres en limite. Des piétons traversent, s’y arrêtent, repartent. L’architecture forme un bloc qui arrête la vue, la ligne bâtie paraît impénétrable. à l’intérieur des îlots, des cours intérieures très fermées sont accessibles par des porches, pénétrées par la lumière. Ce lieu très vaste en cœur de ville permet de penser à son orientation, faire le bon choix dans une marche selon des situations paysagères. Chaque élément oriente et dirige le corps vers un potentiel espace en état d’abandon, de déshérence. Le centre de Genève est soumis à un fort degré d’aménagements et de maîtrise de l’espace. La propreté y règne dans les moindres recoins, la végétation est entretenue et les adventices au sol se font rares. La signalétique dans le domaine public est très présente sur Genève, avec des panneaux d’interdiction en tous genres : présence chiens (gazon), se baigner (Rhône, l’Arve), barbecue (parcs), cracher, uriner... Les pratiques de chacun maîtrisées dans chaque lieu pour mieux gérer l’agissement de l’ensemble des usagers sur l’espace public. Les délaissés se font rares à part quelques délaissés résidentiels, avec la spéculation immobilière qui engendre un « état de veille » d’espaces en futur travaux. Cet espace en état d’abandon, dont une grille rouillée, attirant l’œil, semblait délimiter l’entrée, est situé à l’est à proximité du quartier des Eaux-Vives. L’errance doit être menée en dehors du centre-ville de Genève donc agrandir le rayon de la déambulation. Il y a plus de chance de trouver des délaissés urbains dans un tissu avec plus de dilatations, de dents creuses.

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Panorama place Plainpalais

Ancienne industrie requalifiée

Place Plainpalais : espace d’art et d’événements


Animaux errants

Trace d’appropriations marginalisées

Accès interdit

?

Une rencontre

Etat de délabrement

Lieu dissimulé

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Une désorientation à repousser

Explorer le centre-ville de Genève en quête de délaissés laisse une amertume : c’est une ville aux attraits touristiques nombreux mais trop figée à mon goût. Une « ville vitrine » qui rayonne à l’international dans de nombreux domaines mais manque de liberté d’actions, de mouvements. Les nombreux parcs qui attirent la foule lors des beaux jours marquent le tissu urbain par leur échelle et leur situation. Un espace public très réglementé lorsqu’on le traverse, les panneaux d’interdiction et de propreté s’enchaînent. Les préaux dans le canton de Genève sont importants car ils créent des porosités de lieu en lieu mais très réglementées. Avant 1986, les pelouses des parcs étaient interdites de piétinement, mais la vision de la ville a changé, ces espaces sont dorénavant très fréquentés. Depuis 2005, il existe un plan propreté dans le sens du bien commun mais qui peut brider les pratiques de chacun. Maîtriser l’espace via les comportements, l’agissement de tous usagers peut mettre en péril une urbanisation qui deviendrait « déshumanisante ». D’ailleurs, depuis 2008, une loi anti-mendicité fait la chasse aux marginaux du monde urbain, un contrôle d’une minorité qui ne cherche qu’à s’exprimer. La ville de Genève se diversifie par sa population cosmopolite, 42% d’étrangers y vivent. Une multitude de visages et de cultures qui dynamise les rencontres et les pratiques. Dans mon errance, la réglementation pose question car la planification de chaque espace public et les usages de la population manquent de spontanéité. Une intolérance des pratiques de chacun par l’état selon le lieu en question engendre une ville qui s’essouffle dans son renouvellement. La ville est pourtant un espace social, mais plus encore un espace énonciatif qui donne sens et valeur à l’ensemble des pratiques. La ville produit plus de délaissés dans un tissu distendu, c’est pour cela que mon parcours par la marche va devoir s’excentrer du cœur névralgique. Les distances courtes à pied d’un quartier à un autre favorisent l’errance à la conquête d’espaces montrant signe d’abandon.

54

Schéma situation délaissés / développement ville


Carte : un début d’exploration en manque de délaissés Pregny-Chambésy

GrandSaconnex

Cologny

Vernier Genève Chêne-Bougeries Lancy

Carouge

Vessy

Délaissés urbains Errance parcours Rayons d’exploration 55


> Jonction : une confluence insulaire

Une passerelle enjambe l’Arve

La pointe de la jonction située à l’ouest du centre-ville est un lieu au passé industriel à la confluence du Rhône et de l’Arve. Aujourd’hui subsistent des bâtiments qui témoignent de l’activité de fabrication, d’assemblage qui régnait dans les hangars. Ce bout de terre coincé entre un fleuve et une rivière rappelle le ressenti que l’on éprouve sur une île, l’eau borde les berges. Des passerelles permettent de relier à pied ou à vélo depuis le sud ce lieu, devenu branché par des initiatives associatives du côté du Rhône. Le street-art s’est emparé des objets et des murs des bâtiments, jouant avec les formes et les perceptions. Le quartier de la jonction paraît comme enclavé par le relief rive gauche et rive droite. Il est marqué par un cordon boisé de feuillus qui s’élève vers le ciel. Un versant est habité et végétalisé alors que l’autre au sud est marqué par le Bois de la Bâtie. A l’est du quartier, des venelles me guident au travers de grands ensembles bâtis, elles permettent la connexion des espaces publics et privés. Ces lieux intimes accueillent des espaces de jeux, de détente, de rencontres.

Des chemins de traverse en limite d’une zone d’activité

La pointe de la Jonction avec son sentier des saules

Cité Jonction Mail

Des venelles invitent à la déambulation, avec ses potagers urbains 56

600m


Centrale hydraulique abords RhĂ´ne

57


> Saint-Gervais : un quartier entre fleuve et ligne ferroviaire Ce quartier fait face à la Cité, un rapport de rive gauche et rive droite. L’eau fait le lien entre front bâti, les îles « habitées » et la perspective du lac. Les franchissements sont nombreux au dessus du Rhône, un parcours ludique très lumineux aux beaux jours. Les quais sont aménagés de chaque côté, ce qui permet une déambulation au gré des ponts et passerelles. La traversée s’accompagne d’une ambiance de fraîcheur, d’une architecture industrielle avec les « forces motrices » et « l’Usine », un bâtiment requalifié en centre culturel alternatif. Les quais permettent une vue en vis-à-vis et proposent un possible parcours dans les ruelles qui font face : un linéaire ouvert sur le paysage contrairement à la ligne de chemin de fer surélevée dans le quartier. Cette limite imposante, franche et bruyante laisse des porosités sous forme de porches pour passer dans un autre quartier (Prairies, Délices), une autre ambiance. L’ambiance ferroviaire lugubre est propice au street-art, les graffitis animent le parcours. Les tracés de l’errance se dilatent par la traversée de lieux qui se resserrent ou s’ouvrent devant moi. Côté rive droite, le quartier de la Jonction sur sa face est, est en mutation, les grues se dressent vers le ciel avec un vrombissement de travaux. Auparavant lieu autogéré (« Artamis »), il laisse place à la gentrification de la ville. Les îlots bâtis dense, me rappellent le plan « Cerdà » (Barcelone) avec une cour intérieure qui laisse place à un vide approprié (ornement, potager, détente, jeux, stationnements).

Une construction éphémère de mobiliers

Quais Turrettini avec vue bateau-lavoir

Franchir le Rhône maîtrisé (3)

58


Promenade des « Lavandières » sur le Rhône

Une ligne de chemin de fer surélevée Un street-art sur deux choix de directions (4)

Un parking en construction dans un délaissé

« L’Usine », lieu culturel ancienne industrie Une cour invite le passant (5)

59


> Saint-Jean / Vieusseux : Des espaces diversifiés aux usages multiples

Sentier falaises Saint-Jean Une allée invite à la détente (6)

Ce secteur exploré m’a permis de découvrir 6 délaissés urbains de type industriel et résidentiel. Un territoire en périphérie de l’urbanisation dense où le tissu est plus distendu. Les continuités boisées (corridors biologiques) sont plus nombreuses et l’échelle des vides plus importante facilite la progression. Parc des Franchises - art au sol

60

Appropriation artistique, abords ligne ferroviaire


Atelier artistique en limite chemin de fer

Une mise en scène d’un Cèdre majestueux Une ligne ferroviaire couverte et urbanisée (7)

L’ensemble des deux quartiers traversés offre de nombreuses situations qui accrochent le regard et invitent à la flânerie. Sur Saint-Gervais, les falaises longent le Rhône et la Jonction, avec un cordon boisé dense : une ambiance de balcon sur la pointe de la confluence, par ce relief marqué. En allant sur le nord, les chemins de traverse sont nombreux, les surprises d’empreintes d’appropriations de l’espace public dynamisent les lieux. La ligne ferroviaire est par endroit une limite mais sert aussi de continuité douce (piéton, cyclo). Un écoquartier se dresse sur la plaque qui couvre la ligne, la partie à ciel ouvert regorge d’endroits obscurs, interdits. Des venelles guident le pas étroit et s’ouvrent sur des parcs (Parc des Franchises, Parc Gustave) à la gestion d’entretien différenciée. Des lieux de rencontres où la vie fourmille de tous les âges, divers groupes culturels (asiatique, portugais, italien...) échangent, discutent. L’urbanisation est mixte avec du pavillonnaire, des cités (immeubles) et des zones d’activités. Mon avancée est facilité par des « entre-deux » ouverts au public tels que des préaux d’espaces de jeux, minéral ou végétalisé. Le quartier des Charmilles est en mutation (depuis années 90) mais des anciennes industries (fleurons industries genevoises) montre le passé ouvrier avec une architecture imposante. L’ancien stade (Charmilles) de Genève était autrefois à la limite du quartier St-jean, maintenant c’est un parc entouré par des industries et des logements.

Des hangars industriels en activité

Une cour d’école accessible, quartier Charmille 61


> Pâquis : un quartier populaire entre lac, parc et gare

Un ancien bâtiment industriel requalifié en école (8)

Un quartier tourné sur le lac dans ses limites 62

Une urbanisation dense et imposante

Un château (Banquet) encerclé par des résidences


Le quartier des Pâquis date de la fin du 19ème siècle, après la destruction des fortifications de la Cité et de St-Gervais. Aujourd’hui, cette partie de la ville est la plus cosmopolite et très populaire. L’urbanisation est très dense, les îlots très réguliers et de formes hétérogène, accueillent de nombreux commerces. Les hôtels cossus se mêlent aux grandes rues et à une circulation fréquente. On ressent vite un manque de repère dans ce quartier où les formes bâties se ressemblent. Bien que l’urbanisation soit proche du lac Léman grâce au quai Wilson, errer dans les « Pâquis » nous renferme, on en oublie la présence de l’eau à proximité. Des immeubles luxueux cohabitent avec des résidences où la délinquance prend de l’ampleur. Parmi les logements « verticaux », des bâtiments industriels ont été conservés et d’autres fonctions les font vivre. Son architecture contraste avec l’ensemble du quartier très strict, normé. Plusieurs préaux et cours invitent à la marche, on se sent en sécurité sous un plafond translucide où la lumière perce. L’industrie minoritaire dans le quartier, propose de grands vides entre les bâtiments, ce qui permet une fuite du regard et une dilatation de l’espace. Au sein de ce tissu urbain dense, les îlots bâtis sont constitués de cours intérieures minéralisées ou avec présence de végétation. Ces cours sont animées par différentes pratiques, les rendant parfois accessibles à mon errance : un déplacement par les rues, les cours, les préaux et les petites places publics. La gare Cornavin côté ouest, est en limite du quartier avec une grande respiration par la présence d’un vide où les flux se croisent sans arrêt. Un lieu traversé, bruyant, contrairement à la face est des « Pâquis », en étroite relation avec le lac. Le long quai qui relie la rade à la continuité de parcs (parc Mon Repos, parc de la Perle du Lac, parc Barton, jardin botanique) au nord est très fréquenté par les touristes pour apprécier les vues lointaines. Ma recherche de délaissés urbains va me mener aux abords de la ligne de chemin de fer, certains espaces montrent des signes d’abandon où une végétation spontanée s’épanouit.

Une cour d’école accessible aux promeneurs : une extension de la rue

Un îlot bâti récent avec son parc et l’intégration d’un patrimoine arboré

Pâquis 8

Gare

600m

63


> Cropettes / Délices / Servette: entre culture alternative et continuités boisées

îlot 13 : quartier des possibles

Quartier des Grottes avec son ambiance de village

Des continuités boisées connectent les espaces

Un wagon approprié dans le parc des Cropettes

9

600m

64

Cropettes Délices Servette

La quête de délassés urbains porte ses fruits dans ces quartiers en limite du centre-ville. Des industries et des résidences montrent des signes d’abandon, le développement urbain prend de l’ampleur, à l’assaut de l’éphémère. Des délaissés pas faciles à identifier car très dissimulés dans l’abondance de végétation et la diversité de formes bâties (mixités logements). Franchir des lieux interdits privés a été nécessaire afin d’en voir plus sur la déshérence.


Un parc avec une gestion différenciée des espaces

Ancienne usine accueille des associations d’artistes (Mottattom) (9)

Derrière la gare Cornavin de Genève, les trois quartiers ont une identité assez forte. La transition des Pâquis vers l’ouest s’effectue par un passage du minéral à une présence forte d’espaces verts (parcs, jardins). Les vides accueillent une végétation verdoyante avec de grands arbres et des continuités. Entre les immeubles, les espaces publics sont très grands, dynamiques et arborés. Le parc des Cropettes et Beaulieu se rejoignent pour tracer une continuité vers le parc de Trembley au nord ouest, une trame verte intéressante. Des architectures se démarquent comme l’ancien quartier ouvrier des Grottes avec une échelle humaine. Cependant, les petites maisons se mêlent aux immeubles de 20 m de hauteur. Les rues sont étroites, intimes, conviviales et habillées toutes en couleurs. La gestion de la végétation est plus lâche et abondante, comparé au centre touristique. La culture alternative s’exprime dans deux sites populaires et autogérés : îlot 13 et les Grottes. Une ville dans la ville qui se détache du paysage urbain aux alentours, par une expression artistique et d’événements éphémères. La ramification d’espace public fait que entre jardins de résidences, potagers, parcs, squares, se connectent et accompagnent mon errance. Le réseau de parcs est impressionnant (parc Vermont, Beaulieu, Cropettes, Délices, Geisendorf) où le vivant anime les lieux. Des usines du passé industriel sont requalifiées en d’autres fonctions ou délabrées.

Parc Beaulieu : un jardin de plantes nourricières

Une architecture originale en limite des « Grottes »

Un espace de jeux adossé à une usine requalifiée 65


> Prieuré - Sécheron

Un couloir obscur en lignes de fuites (10)

Quai Wilson en prolongement du Parc Mon Repos

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Un tunnel incite au franchissement de la ligne ferroviaire Sécheron-Genève

Un friche aux abords de la gare envahie par du Buddleja

Un délaissé industriel au Sécheron avec une réappropriation du lieu par la végétation


Vers le Jardin Botanique

Un tracé éphémère ?

Un regard qui converge vers une villa (« Rigot »)et son domaine (11)

Tout comme les Pâquis et Plainpalais, le quartier Sécheron est populaire. Par son passé industriel début 20ème siècle dans le domaine de l’automobile et du ferroviaire (SAAS), l’architecture se démarque ponctuellement dans le tissu urbain. Des lieux d’affaires sont plus modernes, contemporains et imposants. Des délaissés urbains font place sur des anciens sites industriels aux fondations perceptibles. Les clôtures et les bardages métalliques freinent l’œil curieux, ces terrains vagues sont comme cachés et tombent dans un certain oubli. Ambivalence des quartiers, une partie très minérale avec le contexte du chemin de fer et les bâtiments adossés puis en limite du lac et au nord, des espaces très verdoyants. Le vent, le chant des oiseaux, les insectes font parti du décor d’un ensemble de parcs (Perle-du-Lac, l’Impératrice, Moynier, Barton, les Nations). Ces lieux organiques aménagés, cernent le quartier Sécheron et du Prieuré pour embrasser le Léman. La ligne de chemin de fer crée une limite forte dans le paysage, difficile à pénétrer, seulement sur ses franges. Il est possible de la surplomber par un jeux de ponts et de passerelles ou bien d’emprunter un tunnel.

Un oubli du tissu urbain par « le monde du dessous »

SécheronPrieuré 11 10

600m

67


> Les Crêts : une urbanisation aux grand « vides » (espaces publics)

Parc de Trembley, des écoliers jardinent l’espace (12)

Les Crêts

12 13

600m

Un graffiti capte le regard en limite de parc 68

Jardin de la Paix : un ornement floral organisé


Le quartier, très grand, est à cheval entre la ville de Grand-Saconnex et Genève. L’emprise au sol de l’ensemble du bâti est relativement faible, cela permet une qualité de l’espace public végétalisé. Une diversité des époques de construction qui se télescopent, rend le quartier attrayant, sous forme de « puzzle » bâti. Un mélange de cités (Vieusseux) des années 60/70, avec des rues pavillonnaires, un patrimoine de maisons ouvrières, et quelques maisons de maîtres.

Une maison de maître et son grand domaine (Ferney)

Les logements collectifs sont caractérisés par des barres parallèles ou des barres d’îlots rectangulaires. La préoccupation à l’époque est hygiéniste, les espaces publics au pied des logements sociaux sont pensés comme un environnement de cité jardins. Les continuités de lieux plantés (diverses strates) fondent le tissu urbain dans une végétation dense et des formes bâties hétérogènes. Les diverses strates de construction sont très visibles, le paysage est marqué par un enchevêtrement d’époques de développement urbain (mutation de l’habiter). Un cimetière paysager (Petit-Saconnex) surprend mon errance par son allure de parc, un écrin de verdure cerné par des barre d’immeubles. Le parc de Trembley est connecté par des cheminements au Jardin de la Paix. Des lieux où jardinent des associations (écoles, habitants) rendent attractifs les espaces communs. Des sites aux limites floues, car les préaux (domaine scolaire) sont accessibles. Les délaissés urbains se font rares car de nombreux lieux sont réappropriés. Cependant, un jardin au pied d’un domaine (Ferney) est laissé en jachère, les légumes sont en graine depuis longtemps.

Des jardins familiaux cultivés à proximité de maisons et résidences sociales

Des vides arborés publics aux essences imposantes (chênes, marronniers...)

Un entre-deux « hygiéniste » (13)

69


> Les Avanchets-Châtelaine :

Une cité cosmopolite : les Avanchets

Un dénivelé qui offre des vues sur la rade

Surplomber un boulevard pour échapper aux flux routiers (Cité Avanchets) (14)

Les deux quartiers en limite ouest de Genève, sur la ville de Vernier, sont situés à 4 km à pied du Léman, à proximité du Rhône et de l’aéroport, avec beaucoup de nuisances sonores et visuelles, des limites franches avec une ligne ferroviaire et de longues routes très fréquentées. Les Avanchets sont très visibles par leurs logements verticaux imposants dans la cité et en limite une partie plus pavillonnaire, un changement d’échelle. La cité (5700 habitants) se piétine à divers niveaux, une partie sur dalle (pont, passerelle) et l’autre au niveau de la chaussée. Un jeux de verticalité en manque de repère mais ludique. Le quartier au nord est identifiable par ses villas à l’image d’une cité jardin. Mon parcours à la dérive est jalonné par des jardins familiaux, des zones industrielles pétrolières, des complexes sportifs, des centres commerciaux et une mixité de logements. J’emprunte des pistes cyclables par endroit, le cadre est agréable par les connexions des espaces publics. La recherche de parcours par les lieux arborés se fait ressentir, la plaque pétrolière fuit le vivant, elle repousse.

Route de Meyrin, lien : urbain/montagnes

14

Avanchets Châtelaine

600m

70

15


Dans ces quartiers, plusieurs délaissés sont explorés et issus de divers abandons : commerces, industries, résidences, parc. Franchir des barrières, haies, portails, tout ce qui fait limite, peut engendrer une nouvelle orientation par les situations paysagères. Être en périphérie de Genève avec une corrélation de grands « vides » et diverses fonctionnalités favorise le délaissement par une succession de couches historiques. La spéculation immobilière touche les franges du centre, là où des lieux sont encore source d’extension de nouveau logements. Contrairement au centre-ville plus figé, la situation des interstices offre plus de changement, un état éphémère et modelable par la nature et l’homme. Le Bois des Frères au pied du Rhône est une grande respiration et une coupure, où les usagers (piétons, sportifs, retraités, lecteurs, cyclistes...) se croisent. Une « bulle verte » non morcelée qui désoriente et permet de se replonger dans le tissu urbain sur ses limites.

Un chemin en lisière de bois délaissé

Bois des Frères : des « pénétrantes » douces

Des jardins familiaux ordonnés

Bâtiment « graffé » sur un terrain vague, route de Vernier

Un parc abandonné avec ses vestiges - Quartier de l’étang (15)

71


> Le Grand Saconnex : un quartier

Grand-Saconnex

Vernier, Le Lignon

Quartier de villas et ses jardins

1km

Cette ville entre aéroport et les Avanchets est reconnaissable par son allure de cité jardin et des limites marquées par des résidences de grands ensembles. Une marche à travers une multitude de rues étroites, et des ouvertures par la présence de parcs. Parc la Tour : u n

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72

n différ

Un marronnier fait limite et se détache dans le paysage (16) enciée

dans u

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> Vernier - Le Lignon : dans le méandre du Rhône

Site station d’épuration abandonnée le long du Rhône

Appropriation d’un terrain vague par la construction d’une cabane Une perspective agressive (18)

Cité du Lignon, descendre une pente par des marches (17)

La cité du Lignon m’a été présentée une première fois lors de « l’écoute de la ville » avec l’association C-Fal. Errer dans ce quartier hygiéniste offre des occasions ludiques avec des porosités au rez-de-chaussée des immeubles et un travail de niveaux (passerelles, coursives, escaliers, gradines, urbanisme sur dalle). La pente naturelle emmène le pas vers le Rhône en longeant le fleuve, un grand bâtiment graffé et délabré surplombe la rive. Le sol minéral voit jaillir une végétation spontanée. Au nord, la zone d’activité pétrolière est traversée par un réseau ferroviaire vétuste, explorée par des cheminements engrillagés. Des jardins familiaux surgissent du sol et contre-balancent la pauvreté du vivant à proximité. 73


> Meyrin : un paysage industriel en limite de l’aéroport

Un potager subsiste entre les lignes de chemin de fer (19)

Un jardin délaissé à proximité d’un quai ferroviaire

74

Un frêne contre une ancienne douane

C’est ma plus lointaine exploration de Genève, conduite entre autre par la ligne ferroviaire et la trouvaille très satisfaisante de délaissés urbains industriels. La marginalisation des pratiques et les lieux surprenants se multiplient. Des potagers sont cultivés en pleine zone d’activité, dans un contexte de sites pollués. Un contraste du monde vivant et des infrastructures aux nuisances fortes. Les avions survolent ma tête dans cette partie de la ville avec son couloir aérien. Le végétal survit comme il peut dans ce bétonnage du sol, sous forme de poches dissimulées entre les hangars, entrepôts, parkings. L’enrobé règne sous le pas de la marche, le contact de l’organique (terre arable) manque, contrairement au Grand-Saconnex. C’est une ville qui vit au rythme des activités (usine, stockage, commerces) qui bordent la ligne. Le logement se fait discret, par des barres d’immeuble ou de pavillons.


> Eaux-Vives : un quartier entre eau et parcs

Gare des Eaux-Vives, une mutation qui laisse des traces

Des structures construites aux lignes géométriques Un ancien emplacement d’habitat qui laisse place à une allée (20)

C’est un quartier qui marque une transition entre la vieille ville de Genève dense et un tissu urbain aux porosités plus conséquentes, un habitat qui embrasse le Léman, un cadre de vie agréable avec son quai Gustave-Ador, d’un long linéaire et le parc la Grange. La gare des Eaux-vives est en pleine mutation avec le projet de mixité de flux (train, piéton, vélo), une voie verte sera connectée à Annemasse à l’est. La grande zone de travaux fait limite, difficile à pénétrer, je suis obligé de la contourner. Mon errance s’effectue dans une urbanisation dense au nord, une traversée d’îlots bâtis fermés avec leurs cours. La partie sud est plus arborée, avec des promenades aménagées (Promenade du Pin, de l’Observatoire, Charles-Martin, Théodore-Weber), une marche végétalisée, englobée par les houppiers des arbres. En terme de délaissés, ils sont présents en frange de la ligne ferroviaire (industrie, résidentiel). Plusieurs espaces sont pris d’assaut par l’extension de l’immobilier, les grands jardins se réduisent.

Eaux-Vives

20

400m

75


> Malagnou / Champel : Des quartiers sur les hauteurs de l’Arve

Un pêcheur en bord de l’Arve

L’ombre de l’arbre dissimule une porosité (Parc Bertrand) - une traversée de la cour d’’école (21)

Le réseau « d’espace verts » (parc Malagnou, parc Bertrand, promenade des Crochettes, plateau de Champel) participe à une marche englobante, pleine de fraîcheur, d’ombre. Ces ramifications conduisent à la ripisylve de la rivière, une partie en pente abrupte et dans le creux du méandre, la rive est accessible. Le parc Bertrand offre un grand vide, un poumon vert encerclé par du logement collectif. L’urbanisation est à dominance de résidences en barre d’immeuble aux espaces publics généreux. Des ponts connectent les deux rives, pour aller sur Carouge. Proche de l’eau, les activités sont nombreuses, un lieu dynamique dans les pratiques. Des choix de lieux par des tracés aménagés, des lieux obscurs, des délaissés en veille 76


> Chêne-Bougeries : un urbanisme de villas sous couvert « forestier »

Un potager délaissé dans un domaine

Un chalets en bois voué à la démolition (22) Un jardin de particulier qui tombe dans l’oubli

Maison de maître abandonnée sur son domaine, sous un Tulipier de Virginie (23)

Ce quartier excentré de la rade de Genève s’arpente par de nombreuses ruelles, composées de maisons individuelles aux grands jardins. Une échelle humaine appréciable mais une désorientation amplifiée. Le choix de chemin est important, les lieux privés limitent certains périmètres d’exploration. Des délaissés résidentiels sont identifiés, de petites propriétés et de grands domaines. La vie est comme arrêtée, les objets (mobiliers, outils, remise...) sont engloutis par la végétation. Le contraste se fait ressentir entre le quartier Champel et Chêne-Bougeries, on passe d’un bâti imposant (immeubles) à une petite échelle (villas). Les espaces jardinés (ornement, nourricier) sont nombreux, soignés, ordonnés. 77


> Acacias - Carouge : une urbanisation contrastée en frange de l’Arve

Une perspective longe les bâtiments sportifs, Acacias

La vieille ville pittoresque de Carouge (24)

Pont Wilsdorf au dessus de l’Arve

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Un aménagement doux de la rive gauche

Une allée de platanes en « marotte », Carouge


Le street-art s’invite sur les berges

Tour de Champel visible depuis Carouge

Chemin longeant l’Arve avec des fenêtres visuelles (25)

Côté rive gauche de la rivière l’Arve, la berge piétonne permet de rentrer dans une partie de l’épaisseur de la ripisylve (saules, aulnes, frênes), en longeant diverses séquences bâties. Des ouvertures visuelles donnent sur le centre-ville de Genève, les monuments se dressent au delà de la cime des arbres. Carouge, une cité du 18ème siècle se démarque dans le paysage urbain par son architecture et ses bistrots aux terrasses animées. Un fragment de ville ceinturé par la plaque industrielle Praille-Acacias-Vernets, des zones d’habitats collectifs et pavillonnaires. Le quartier Acacias jouxte Carouge, un contraste dans la présence d’espaces plantés, la vieille ville et ses franges sont arborées contrairement à la zone d’activité très minérale. Les logements sont absents sur la partie ouest, la nuit est très calme excepté en bord de l’Arve avec ces lieux culturels. Traverser des lieux d’entreprises ne favorise pas l’arrêt, les espaces publics sont peu présents. Un cadre de vie triste à déambuler, la quête de délaissé est positive vers le PAV (Praille, Acacias, Vernets).

Genève

25

PAV 24

400m

AcaciasCarouge

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> Prailles-Vernet : une plaque industrielle « sillonnée » de lignes ferroviaires.

Une ambiance d’interdits entre deux wagons

Des ouvriers s’approprient les abords des lignes

Une plaque industrielle dynamisée ponctuellement par des lieux branchés

80 80

Des lignes désaffectées, présence de chats errants

Un skatepark discret sous une bretelle, direction la frontière française


Une ligne ferroviaire abandonnée s’enfouit dans les herbes (27)

Une frontière ferroviaire perméable souterraine (26)

L’ancien delta de l’Arve laisse place aujourd’hui à une grande zone industrielle, au carrefour de Genève, Lancy et Carouge. Un paysage très horizontal délimité par une rivière et un relief marqué à l’ouest. Une partie du quartier est en mutation avec le nouveau stade, des commerces et des espaces d’habitats programmés. Plusieurs lignes de chemin de fer tracent une armature « rhizomatique », une partie est délaissée. Cette grande zone manque de vie (humains, animaux), beaucoup de flux routiers de passage. La végétation se fait rare, elle perce d’elle même le sol par endroits.

81


> Lancy : une ville qui domine le PAV (zone d’activité) L’exploration de la partie est de l’agglomération de Genève sur Lancy m’a été guidée par la rivière l’Aire sinuant à travers une continuité boisée. Ce cour d’eau traverse la ville et est enterré sur la zone du PAV, une rupture dans le paysage. Cette ville voisine est positionnée sur un relief surplombant la vallée de l’Arve. Être en périphérie de la ville du bout du lac offre plus de chance de trouver sur son chemin des délaissés urbains. Plusieurs délaissés résidentiels sont dissimulés dans une pression urbaine perceptible avec la construction de nouveaux logements. Derrière des clôtures, portails, murets et autres limites de propriété, l’état d’’abandon attire l’œil. Percer l’inconnu, franchir un lieu qui semble interdit au public suscite une grande curiosité et une peur de se faire réprimander. L’interdit est oppressant, amène de l’adrénaline et les empreintes d’une vie passée se succèdent sous le pas. Je constate des traces de squats sur plusieurs propriétés, une revendication de la société genevoise contre le manque de logements disponibles. Certains espaces sont martelés au sol d’anciennes fondations bâties, preuve qu’il y avait autrefois une vie de « l’habiter ». Plusieurs lieux en mutation remplacent des maisons et leur jardins.

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Vernier

Genève

28

Lancy PAV

L’Aire

400m

Carouge


Portillon menant vers un jardin abandonné

Des typologies urbaines mixtes

Muret limite visible

Un cheminement d’une pratique passé

Parc Navazza-Oltramare, animé par les habitants

Des fenêtres visuelles sur le PAV, depuis le Bois de la Bâtie

Petit-Lancy, un terrain vague avec ses maisons abandonnées (28)

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Un réseau vivant qui induit la marche

Deux univers traversés par le pas

Mon errance que j’ai partagée précédemment est ponctuée de situations paysagères qui m’ont aiguillées lors de mon exploration urbaine. Passer du monde ordonné (univers fonctionnel), strict de la ville planifiée au monde désordonné (univers du délaissement), spontané, éphémère, permet de comprendre les interactions entre les deux. Une transition d’ambiances, une présence du vivant différente qui rythme le pas et les sens. Genève et ses villes voisines possèdent un réseau de places, de parcs, de préaux (cour d’école accessible) très dense et de diverses formes, qui permet une déambulation pleine de surprises. Les grands parcs de la ville du « bout du lac », les promenades arborées, les jardins de cour, tous participent à animer le tissu urbain. Traverser un terrain abandonné puis revenir à la ville envahie par la population procure une drôle d’impression. Les vitesses des flux (routiers, piétons, cyclos...) sont plus intenses et plus rapides contrairement aux espaces délaissés où la présence humaine s’approprie l’espace différemment et davantage (moins de réglementations). Le tissu de parcs très arborés sur Genève est très prisé par ses habitants (la Grange, Bertrand, Beaulieu, Cropettes, Trembley), une animation qui m’a conduit dans mon errance. Le passage sur les terrains vagues me réjouissait dans ma quête mais les lieux dynamiques de l’urbanisme normé (fonctionnel) étaient aussi attrayants pour le marcheur que je suis. Marcher en ville, permet de rentrer dans une intimité, créer sa propre immersion car les nuisances sont nombreuses face à l’interprétation sensible. Le corps en mouvement dans l’espace urbain n’est pas seulement celui des jambes, mais surtout celui des yeux et de l’esprit (dans ses composantes cognitives et émotives), attentif à percevoir et à lire les sens plus ou moins cachés que la scène urbaine lui présente. En tant que « promeneur », tout déplacement peut être traité comme un espace symbolique, une façon pour la subjectivité de se raconter elle-même. Le temps lui-même ne se donne que dans un espace symbolique (monuments, arbres, objets) ce qui favorise la multiplication des expressions apparentant le temps et l’espace. Cette association est si prégnante que nous n’entendons plus les métaphores qui la traduisent : on s’égare, on est déboussolé, on reste sur place, on contemple, on cherche son parcours. Certaines choses se mettent « en travers de mon chemin »... On peut aller « à son rythme », on remonte la pente, on trouve « la voie à suivre » grâce à des repères... L’erreur est associée à un « faux-pas », certains sont accusés de suivre « la voie de la facilité ». Le trottoir ou la rue, interdite au trafic et réservée aux piétons, deviennent le terrain de la rencontre, de la vie publique, le lieu d’un quartier à la vitalité la plus importante. Les commerces au rez-de-chaussée participent à la vie de quartier, un entrelacement de flux piétons, de bruits de foules qui fait « aimant » sur le corps. Le marcheur est celui qui donne profil à son chemin, ouvre ou trace une voie, mais qui le construit en fonction des accidents, des contraintes du parcours. On s’aperçoit donc qu’il y a un jeu subtil entre une passivité et une activité intrinsèquement liées. La traversée d’un paysage provoque ainsi des enchaînements d’idées. L’esprit devient lui aussi paysage, espace à traverser, déplacement physique et psychologique. Dans une ville toujours plus désincarnée qui refuse la dimension physique du contact, les flâneurs se déplacent en solitaire non plus parmi la foule mais à la recherche d’une foule qui se renie ou se coagule seulement dans les interstices urbains. De multiples microcosmes s’éveillent dans l’espace public, chaque promeneur réinvente son propre environnement, crée une narration. Errer dans l’espace public n’est pas uniquement pensé comme lieu de passage, mais comme lieu habitable. Elle questionne le rapport entre espace public et espace privé, parfois très flou dans ses limites. La présence corporelle de chacun dans les lieux publics, module l’environnement urbain par les moindres faits et gestes : utilisation banc détourné (skateboard), étirement sportif contre un arbre, fontaine utilisée comme pataugeoire, terrasses assises, le va-et-vient vers les commerces...

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Un va-et-vient entre frontières urbaines L’univers du délaissement

L’univers du fonctionnel

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84 8 9 3

km

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2 4

Dessiner l’espace par la marche Dans une errance, le tracé est singulier, il sillonne, arpente. Le parcours trace une nouvelle trame de l’urbain aux potentialités multiples, une ville labyrinthique qui donne à regarder autrement. Une dérive d’un tissu fragmentaire, qui donne du relief au paysage par les diverses strates (routes, eau, parcs...) traversées.

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5 1

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errance Délaissé urbain Aire de jeux Parc/promenade Potager associatif Bâti


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Des structures paysagères en mouvement

1 Parc trembley

falaises

ONU Parc vermont

saint-jean

gare

plainpalais les bastions

cité

Rade

2

Parc bertrand

Sentier le long du Rhône - Jonction

2

cité

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Parallèlement à ma quête de délaissés urbains, mon errance personnelle est passée par toute une trame de parcs, d’espaces publics où la ville est animée par différents usagers. Ce dynamisme humain est favorisé par un contexte, une situation propice à certaines activités. Les lieux fonctionnels sont des espaces de consommation mais aussi de jeux, de détente. Les « vides normés » participent au mouvement du tissu urbain malgré toute une codification. De nombreux flux humains transitent par les espaces publics. Les délaissés eux sont en arrière-plan, dans une « ville de l’ombre » où les changements sont plus perceptibles. D’ailleurs, la biodiversité peut se montrer plus riche dans ces espaces vacants (faune, flore).


aéroport grandsaconnex

Lac léman

1 gare

ône

vernier

Rh

rade

genève cité

l’arve

chênebougeries

lancy

pav

carouge

vessy

0

1,5 km Parc/promenade Aire de jeux plantée

Potager associatif Délaissé urbain

errance Axe routier

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Un dédale urbain traversé et vécu

Au cours de mon errance urbaine dans ma quête des délaissés, j’ai été orienté par des formes dans chaque contexte paysager. Que ce soit des points de repères, des perspectives (lignes), des ouvertures (fenêtre visuelle, surface dilatation), les structures qui composent un paysage guide, mais pas seulement,.Dans certains délaissés urbains, le hasard des rencontres et découvertes engendre une interaction du monde vivant avec ma marche. Les terrains vagues, pauvres en aménagements (destruction, abandon, délabrement) accueillaient par exemple des chats (quartiers voisin) qui me suivaient dans ma dérive. La minéralisation des rues, des trottoirs, de l’ensemble d’un quartier en centre urbain fait fuir une faune domestiquée ou pas (chiens, chats/oiseaux migrateurs). Animaux et humains se réapproprient les terrains abandonnées (jardinage, bricolage, street-art, habitat faune). Mais parallèlement à « l’univers du délaissement », la ville normée/fonctionnelle est habitée par de nombreux usagers. L’ensemble des espaces publics participe à la fabrication du tissu urbain, il accueille une sociabilité marquée par une quotidienneté ou de l’ordre de l’événement, une temporalité différente qui dynamique la ville. La place est un lieu de rassemblement alors que la rue est un lieu de rencontres. « Point, ligne, surface » rentrent en considération dans mon exploration de Genève. Les surfaces créent des ouvertures (esplanades, places...) ou même des fermetures avec des surfaces construites. Le point lui est un repère, une référence par rapport à l’espace (arbres isolés, monuments, grande tour habitée...). La ligne elle (ligne ferroviaire, route, trottoir, fil électrique aérien...), est structurante, crée de la profondeur dans le paysage et compose de nombreux dessins visuels. L’espace public se définit par sa forme et sa composante anthropologique. Espace ouvert dans la ville, il est utilisé et pratiqué par tous. En favorisant les échanges, l’expression de l’opinion publique, il est « le ciment de la ville ». Un ciment d’autant plus important que la ville contemporaine est perçue comme fragmentée par de nombreux réseaux et divisée en espaces fonctionnels reliés entre eux par les mêmes réseaux. Beaucoup d’espaces publics se sont retrouvés sur mon chemin, de diverses formes et avec de multiples usages. Des lieux échappent à la planification urbaine concernant certains usages dans l’espace commun. Un coin de lecture improvisé, une soirée barbecue non autorisée sur les berges de l’Arve, des fontaines utilisées en temps de grosses chaleurs, des événements de loisirs sur une chaussée fermée à la circulation. L’espace commun dans la ville vit différemment de la ville en mutation constante (délaissés). Les usages sont plus libre et parfois surprenant, ils sont spontanés dans les échanges et les initiatives. Des sans-abris étaient présents dans certains délaissés, ils habitaient un lieu de refuge en plein air, dissimulé car l’espace fonctionnel (ordonné) ne le permettait pas.

Un terrain de foot entre deux résidences, quartier Plainpalais - rue Dizerens

Une cour d’école accessible, quartier des Grottes à proximité de la gare --> Des porosités urbaines qui facilite une exploration par la marche (surfaces)

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linéarité, chemins Occupation étendue détente choisie Rassemblement public sortir des sentiers

Effectuer une errance personnelle en milieu urbain croise forcement des signes de vies. Chaque espace public est approprié par chacun avec un degré de liberté qui varie en fonction du lieu. Les accès linéaires sont par moment très empruntés et d’autres sont visibles mais par une curiosité de la marche (« chemin de traverse ») : l’entredeux, longer, accompagner, suivre quelque chose, un mouvement subjectif attiré par les flux qui dominent et en sortir quand l’envie nous vient. Tout est animé autour de ma dérive piétonne, de nombreux espaces dynamiques et surtout dans un rayon proche du centre névralgique de Genève. En périphérie à plus de 2-3 km, les vides sont plus discontinus et plus nombreux. J’ai été surpris de voir des événements bloquer une ruelle d’un quartier pour laisser place à une aire de jeux en plein air. Une prise d’initiative par des associations qui permet de mettre en mouvement un tissu urbain ordonné, strict dans ses lignes structurantes. La saison joue aussi son rôle dans l’appropriation de l’espace public, une temporalité intéressante en changements.

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une trame naturelle hybride

Grand- Saconnex Errance

1

genève

1

Réseaux des corridors biologiques sur Lancy, Genève et Carouge Lancy

carouge

800m

Carte occupation du sol, des milieux en interaction (Jardin Botanique Genève)

Cette approche d’écologie spatialisée met en évidence les vides urbains sous forme de rhizomes vivants, qui s’insèrent dans la ville. Ces vides sont occupés en partie par une minéralisation de l’espace public en centre-ville, et en périphérie, la végétalisation est dominante dans les interstices. Les vides sont constitués de strates végétales aménagées (gestion d’entretien) ou d’une végétation spontanée qui rentre en « résistance » dans les délaissés urbains.

Mon errance croise, s’arrête, suit les continuités biologiques. Cet univers du vivant s’exprime de diverses manières et de formes variées. De manière subjective, ce parcours singulier rentre en interaction avec mes sens, ces composantes non figées induisent une perception, un choix de direction. La végétation contribue aux changements d’ambiance de la ville, avec ses saisons et la faune qui transite ou habite les divers écosystèmes. Les cartes illustrent bien un centre urbain plus pauvre en végétation (spontanée/ornementale), les franges de la ville de Genève (moins dense) sont plus propices aux réservoirs de biodiversité. Au cours de ma dérive, le ressenti de transitions d’un milieu très construit à un environnement dense en végétation est perceptible, en s’éloignant de Genève. Malgré la présence de grands parcs, les délaissés urbains plus éloignés ne laissent plus la place au hasard du vivant. 92


La ville constitue un véritable écosystème avec un fonctionnement complexe, ses milieux naturels, sa flore, sa faune, ses arrivées et ses disparitions d’espèces, son évolution au cours du temps. Le contexte de l’agglomération genevoise bénéficie d’un environnement privilégié avec le Rhône, l’Arve, un relief marqué, son réseaux d’espaces de verdures (parcs, jardins, promenades, friches...) et une périphérie urbaine agricole. La ville de Genève à elle seule possède 20 % « d’espaces verts », dont le service des espaces verts (SEVE) en a la gestion. 250 arbres sont remplacés chaque année (rotation), le patrimoine arboré est très riche en espèces. Les délaissés sont des réservoirs de biodiversité essentiels en ville, ils sont le Un espace en « veille » en ville reflet d’usages anthropiques passés (usines, anciennes voies ferrées, vergers abandonnés, chemins/routes délabrés...). Des espèces peu adaptées aux pressions de la ville trouvent ainsi asile dans les espaces vacants. C’est le cas du bouillon blanc, du chardon crépu, des salsifis des prés, des résédas, ou du séneçon de jacobée, qui ne dévoilent leurs éclatantes inflorescences qu’au flâneur s’aventurant dans ces espaces en marge de la ville aménagée. Les terrains inoccupés avec un entretien minime accueillent les plantes voyageuses, vagabondes, elles trouvent leur bonheur parmi les plantes endé- Végétation spontanée miques, spontanées. à l’échelle du paysage urbain parcouru, le réseau d’espaces délaissés est dynamique et fonctionnel mais les dernières tendances montrent une fragilité de ces milieux. Ces réservoirs de biodiversité sont morcelés et en baisse par le renouvellement urbain qui croît en cœur de ville (densification) et en périphérie de l’urbanisation (acquisition terre agricole, maisons jardins...). Ces lieux en marge sont trop méconnus du grand public alors qu’ils sont sources de potentialités pour réinventer la ville. Dans mon errance labyrinthique à travers le tissu urbain, une végétation à Pigeons spectateurs l’entretien intensif et des lieux où règne la spontanéité sont en contraste dans les séquences paysagères. Dans les lieux « cachés », moins fréquentés, les signes de vie (faune, flore) se manifestent davantage. Ces sites désaffectés où la nature reprend ses droits avec une résistance face au « rouleau compresseur » de la ville, s’adaptent malgré tout avec une aide humaine lors de réappropriations éphémères. Réinjecter des pratiques dans un délaissement pérennise le site en question pour une forme de vie alternative, face à l’urbanisme fonctionnel (ville décor, uniformité, contrôle). Prêles en limite d’un bâtiment abandonné

Plantation en bac, ville dense minérale

Parc florissement ornemental (intensif)

Un canard vient de se poser dans un délaissé

Un écureuil dans un charme - Cité les Avanchets 93


Diverses strates dans les dĂŠlaissĂŠs urbains 1

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1- Sedum xp 2- Clématite des haies 3- Linaire commune 4- Molène 5- Chardon commun 6- Liseron des haie 7- Millepertuis commun 8- Renoué du Japon 9- Séneçon du Cap 10- Pissenlit commun

11- Tabouret des champs 12- Gallium 13- églantier 14- Centaurée des montagnes 15- Anémone des bois 16- Lotier corniculé 17- Trèfle des prés 18- Grande Éclaire 19- Bugle rampante 20- Ortie brûlante

21- Robinier faux-acacia 22- Charme commun 23- Cornouiller 24- Ailante glanduleux 25 - érable champêtre 26 - Chêne pédonculé 27 - Arbre aux papillons 28 - Houx commun

Identification de la flore dans les délaissés urbains (biodiversité en terrain pollué)

Une végétation à la fois éphémère et durable en zone ferroviaire (PAV) 95


Une mutation urbaine planifiée

> Un urbanisme qui favorise l’espace public

4OOm

Une pensée de projet de territoire - trame paysagère historique (1948)

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Une ramification de parcs urbains (2017)


Parcs/promenades Strate arborée Potagers associatifs Délaissés urbains Errance

Parcs/promenades Errance

Une nouvelle trame urbaine suivant mon errance (un cheminement qui va au delà de la trame « d’espaces publics historiques. »

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> Une « piétonnisation » de la ville par ses temporalités (Phasage)

La ville de Genève s’est rapidement tournée vers des espaces communs où la flânerie pourrait être pratiquée. Des aménagements urbains anciens et chargés d’histoire, ont vu le jour au cours du 16ème siècle et plus tard au 19ème. Une première promenade est créée en 1515, la « promenade de la Treille », elle doit son nom au coteau autrefois planté de vignes. Cette surface linéaire crée un espace de Une flânerie qui rassemble - 1818 détente à l’intérieur de la ville qui était à l’époque fortifiée. En 1721, deux lignes de marronniers d’Inde sont plantées pour remplacer des arbres sénescents. Elle se déploie entre les hôtels particuliers de la rue des Granges, l’Hôtel-de-Ville et les remparts dominant le parc des Bastions. Des bancs sont placés en limite du balcon sur le parc des Bastions, d’une longueur de 238 mètres. Sentier des Saules et le Rhône - 1890

Un espace de jeux et de détente - 1910

Une contemplation depuis la berge - 1900

Le sentier des saules rive gauche du Rhône, tire son nom des nombreux saules qui le bordaient au début du siècle dernier. Aujourd’hui, il n’en reste plus que quelques-uns. L’essentiel de l’arborisation est constituée de peupliers d’Italie, qui contrastent avec les falaises arborées de Saint-Jean. C’est au début du 19ème siècle que le sentier est aménagé en une promenade bucolique, profitant des vues et de l’ambiance de fraîcheur. Le sentier débute au niveau du Pont Sous-Terre sur la rive gauche du fleuve et conduit à la Pointe de la Jonction, où le Rhône et l’Arve mêlent finalement leurs eaux. à la Révolution industrielle, les grandes usines bordent le sentier. Il ne reste aujourd’hui que l’Usine Kugler, entreprise de robinetterie fondée en 1934. Actuellement, ce bâtiment est le siège de la Fédération des artistes de Kugler. C’est une promenade maintenant utilisée par de nombreux usagers, avec des aménagements liés aux activités du Rhône (baignade, barbecue, repos, buvette...).

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Un balcon sur le parc des Bastions

Vue de la promenade de la Treille en limite de la cité (2016)

Un sentier dorénavant en street-art

Vue du sentier des saules coincé entre « passé industriel » et le fleuve

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Carte : une place donnée au piéton par les aménagements

Mey

rin Gare Cornavin

Eaux-Vives

Ann

em

ass

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Rhône

Praille-Acacias -Vernets

0

Ar ve

1,5 km Voie verte projet (2018)

Balades thématiques (histoires, quais...)

Voie verte ville Vernier

La voie verte du Grand Genève est le projet phare de l’agglo concernant les modes doux. Elle traversera Annemasse Agglo sur 12 km depuis la frontière Suisse jusqu’à Bonne, dés mi-2018 pour traverser Genève d’est en ouest. Un projet qui tend vers une ville durable, des cheminements doux et qui donne une vrai place au piéton. La requalification de la gare des Eaux-Vives rentre en ligne de compte dans le projet, des sentiers piétons sont déjà existants mais demandent à être valorisés. Une voie verte est déjà présente, longue d’environ 10km, du quartier des Avanchets à Vernier-Village en longeant le Rhône et la Cité du Lignon. C’est une promenade tournée vers le fleuve qui traite la périphérie. 100


Genève est une ville dense et occupe une échelle territoriale à « l’échelle humaine », propice à la marche. Dès 1995, le service urbanisme de la ville initie une politique en faveur du piéton : élaboration d’un plan piéton dans le but d’améliorer la sécurité des usagers, embellir le cadre de vie des espaces publics afin d’encourager la découverte de la ville. à l’époque les aménagements réalisés sont plutôt discrets faute de budget suffisant. La ville a commencé par un travail de sensibilisation pour montrer aux habitants et touristes que de nombreux lieux intéressants sont accessibles en 10 minutes de marche. Afin de dynamiser la vie piétonne de Genève et ses alentours, des marches à thématiques ont été crées, accessibles sous forme de dépliants à disposition des genevois. Ces thèmes se déclinent en plusieurs catégories : parcs et domaines, quais, musées et patrimoine historique, l’eau, de ville en ville, de cour en cour (préaux, aire de jeux) pour les enfants. Le Muséum d’histoire naturelle de Genève propose des itinéraires sur le thème de la découverte de la biodiversité en ville : des lieux où la faune et la flore s’épanouissent dans des espaces délaissés (friches) ou aménagés (parc, jardins). Une manière de montrer la cohabitation de la nature et des aménagements urbains de façon ludique. Sur la ville de Genève, la mobilité douce correspondait à 33% des flux en 2000, aujourd’hui elle atteint 45% des usagers de l’espace public. La lenteur du déplacement est rentrée dans les mœurs pour une vison à long terme. Auparavant de 1960 à 1980, la ville privilégiait le « tout voiture », l’agenda 21 a contribué aux changements du mode de déplacement. En 2001, la ville obtient le prix de l’innovation « Mobilité Suisse ». Mon errance personnelle passe en partie par ses aménagements piétonniers mais sort par moment de ce tracé trop codifié, et la quête de délaissés m’y oblige.

Carte Muséum d’histoire naturelle - lieux d’intérêts écologiques

Plaquettes thématiques

Monuments

Végétalisation pont de la Machine, Saint-Gervais 101


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Partie LV

une ville de l’ombre aux

pratiques alternatives

103


Un « entre-ville » à reconnaître Tout l’intérêt des délaissés urbains réside dans le fait que ce ne sont en aucun cas des espaces vierges (non figés). Ils se caractérisent par des temporalités multiples selon trois phases successives. L’apparition du terrain abandonné, phénomène à relier à un contexte économique, social et urbain, place un terrain « disponible » au cœur des préoccupations de deux acteurs : l’état et le propriétaire. S’en suit un temps de veille, phase privilégiée pour l’intervention d’acteurs issus de la société civile ­(artistes, acteurs culturels, petits commerçants...) dont l’influence est majeure dans la phase de mutation finale, puis celle du projet (changement d’image). Les usagers qui s’approprient les délaissés, se caractérisent comme des « initiatives émanant d’en bas », d’où une opposition avec les grandes opérations d’urbanisme, publiques ou privées. L’appropriation humaine vient après un temps où le site en question mute de lui même (faune, flore), il rentre dans un mouvement en interaction avec des composantes vivantes. Divers usages peuvent être tolérées par la ville pour l’occupation d’espaces délaissés, dans le cadre d’un urbanisme de transition (éphémère, temporaire). Ces espaces vacants, parfois difficiles à qualifier et identifier, sont en « sommeil » pour produire un service environnemental mais pourraient contribuer davantage à la ville. Un projet de logements est parfois très long dans son phasage d’études, l’espace rentre dans un état de « friche » alors qu’il pourrait servir d’outil de socialisation de la ville. Pour les acteurs artistiques et culturels, l’investissement de ces lieux en déshérence est une réponse à l’absence d’autres lieux disponibles. Les friches constituent des sources d’inspiration en rapport direct avec l’architecture du site. La population demeure le plus souvent en retrait face aux lieux en marge, des sites « obscurs », qui n’attirent pas tout le monde au premier abord. La société est habituée à une ville ordonnée, organisée, propre, planifiée avec un minimum de contrôle des pratiques de chacun. Gilles Clément, François Béalu : « Regardée de face, avec les repères de notre culture - pieds ancrés dans le sol, ligne claire, horizon net - la friche est une intolérable dérive, une perte de pouvoir de l’homme sur son territoire, une souillure. Prise de biais, furtivement, de façon buissonnière (comme en vacances), la friche est un monde secret, inventif, dense, où l’homme devenu petit oppose à la nature son incurable innocence : il découvre… d’un côté la forme et sa ruine, de l’autre la vie et son incontinence. Quel est donc ce genre de paysage pour offrir, en même temps, le bonheur et la désespérance, le rejet et la curiosité, l’inquiétude et la sérénité ? » Enfants jouent avec des déchets organique

Empreintes et traces : signes d’interpellation Ignasi de Solà-Morales désigne « le terrain vague » comme « un espace marginal, exogène et étrange, un lieu obsolète où certaines valeurs résiduelles se maintiennent malgré une désaffectation complète du reste de l’activité urbaine (...), en retrait du circuit des structures productives de la cité. » La ville dans sa globalité est complexe, avec ses strates historiques qui s’imbriquent. Il y a énormément d’informations au cour d’une déambulation. Les délaissés urbains s’identifient par diverses formes, codes, symboles en limite ou au cœur du terrain vague : bardage/clôture - lieu d’interdiction, restes d’objets industriels (barils, ligne chemin de fer, matériaux, cables), mobilier de jardin (démolition maisons, jardins), restes de fêtes illégales (canettes, bouteilles, décoration), portillon délabré, toile de tente (sans abris), stockage déchets (gravats, pneu, matériaux...), bâtiment ruine, utilisation des matériaux sur place (cabane), graffitis mur/ squats habités. Avoir l’œil aguerri est nécessaire pour débusquer le lieu en attente...

104


Passé industriel et végétation spontanée

105


> Empreintes et traces des sites dĂŠlaissĂŠs

106


107


Un renouvellement urbain qui produit des « vides »

GrandSaconnex

Carte typologies bâtis XIXème Industries Logements-commercesadministrations Léman

4

Vernier

Cité

Lancy

ChêneBougeries

Ancienne Usine Hispano (2017)

5

Carouge PAV

Chemin de fer désaffecté (PAV) 2017

6

Ensemble usines, les Charmilles 1930 - fermeture 1985

108

Usine Merck-Serono - quartier Sécheron (2009)

Entreprise automobile (1913)


Un héritage du passé industriel Carte espaces industriels - 2017 Bâti industriel classé Espace d’activités/industriel actuel sécheron

Sites pollués

6

1 léman

vernier les charmilles

4

«parfumerie»

Ancienne usine Kugler réhabilitée (artistes)

2 1

jonction

3

2

genève gare Eaux-vives

lancy Les Forces motrices (1886) , ancienne usine hydraulique pav

5

3

1,5km Ancienne usine (SIP), lieu culturel (MAMCO) léman

1937

Le paysage urbain de l’agglomération genevoise est marqué par des reliques industrielles bâties. Le premier âge d’or est venu avec la révolution mécanique, chimique et électrique de la fin du XIXe siècle. L’eau à pression mise à disposition par le bâtiment des Forces motrices, puis plus tard l’électricité, faisait tourner machines, presses, tours et autres perceuses. L’industrie est en déclin après le premier choc pétrolier en 1973, avec la fermeture de sites d’où la présence de délaissés. Genève a été industrialisée dans divers domaines (horlogerie, mécatronique, parfums, automobile...), créant un urbanisme au grand « vide ». Les grands projets de mutation des sites industriels ont débuté à la fin des années 90, début 2000 (Charmilles, Sécheron, Jonction) pour proposer des logements collectifs. Certaines industries (PAV) vont à l’avenir être abandonnées, par la pression urbaine. 109


L’agglomération de Genève à « l’assaut » de ses vides

aéroport

pav

Carte du développement urbain - ville de Genève (2020)

Genève et ses communes limitrophes ont comme stratégie de libérer de la place pour l’extension urbaine, en grande partie en logements. Les terrains délaissés (industries, commerces, maisons...) et le programme de transfert des zones activités (PAV) en périphérie, contribuent à mettre en péril les réservoirs de biodiversité (friches). Ces espaces en partie en travaux aujourd’hui, ont été traversés par mon errance et des lieux sont en attente de projets après la destruction de bâtiments. Ce délai de « veille » est approprié en premier lieu par une végétation spontanée et des pratiques humaines éphémères. Les délaissés sont très mouvants mais dès lors qu’un programme immobilier aménage le sol, les formes changent, les textures, les couleurs, la présence de vie, une page se tourne.... 110


genêts

sécheron

L’étang

Une revendication de la population

Cité Vieusseux 3

Développement urbain

1

Charmilles ville dense

Gare eaux-vives 1

Gare Eaux-Vives : Projet CEVA (train + voie verte)

chêne-bougeries (villas)

pav 2

2

(plaque industrielle)

Vessy (agriculture) Futur quartier d’affaire, l’étoile (PAV)

400m Délaissés identifiés

Zones développement urbain (densification)

3

Délaissé approprié par les habitants (Quartier Concorde)

Après 2 mois : commencement des travaux (logements)

Face aux besoins de logements, la ville se développe en périphérie du tissu urbain déjà dense. Elle consomme les espaces disponibles, donc les délaissés (friches) pour accroître un environnement toujours aussi planifié, organisé. Lors de mon errance dans le quartier Concorde, le PAV ou la gare des Eaux-Vives, j’ai constaté cette consommation de l’espace avec un changement d’échelle. Les espaces de respiration vont se faire de plus en plus rares à l’avenir et pourtant indispensables. 111


Une Typologie de délaissés dans une « ville oubliée »

Grandsaconnex

meyrin

Léman

rh

ône

vernier

genève

Arve

lancy

chênebougeries carouge

0

2km Potagers associatifs

112

Délaissés urbains

Lignes train/tram

Errance


Catégoriser et spatialiser

Délaissé résidentiel

Squat/quartier expérimental

Délaissé commercial

Délaissé industrie/ artisanat

Délaissé ferroviaire

Délaissé infrastructure

Délaissé agricole/jardins/parc

113


Délaissé activité industrielle

2

1

3

1

Un flore spontanée sur un sol au passé industriel 114

2

Des limites franches sur terrain vague


L’errance m’a mené à la découverte de divers délaissés urbains dont des terrains abandonnés où une activité industrielle prospérait il y a plusieurs années avant son déclin. Les délaissés de ce type sont situés en périphérie du cœur de Genève, avec la présence de zones industrielles repoussées aujourd’hui à l’extérieur sous la pression urbaine. Sur Carouge, à 2.5 km de la rade, un terrain inoccupé (route des Moraines) croise mon chemin début avril 2017. Les limites sont obstruées par une clôture métallique sur laquelle il est indiqué de ne pas pénétrer dans la zone. Un terrain coincé dans un tissu urbain mixte où cohabitent un bâti pavillonnaire et grands ensembles. Une route goudronnée traverse le délaissé, bordant une strate herbacée spontanée. Des graffitis montrent un passage d’artistes itinérants, à l’empreinte artistique où le street-art se superpose comme témoin de l’histoire. Un talus de terre avec des sureaux est un refuge de renards, avec la présence de trous. Le sol paraît très pauvre, caillouteux, avec une texture chaotique. Le centre ville de Carouge avec ses petites maisons de « village » est à proximité, le réseau de jardins vient embrasser ce lieu en état de veille. Une activité de marbrerie (travail de la pierre) s’adosse derrière un mur rempli de graffitis. L’ensemble des délaissés industriels est peu éloigné du réseaux ferroviaire, avec dans le passé un moyen de transport des produits transformés ou l’arrivage de matière première. Chaque industrie a son activité avec un état de délaissement qui varie selon les sites et le contexte. Certains sites ne sont plus bâtis alors que pour d’autres, le patrimoine industriel laisse des traces d’abandon : objets, pancartes, fondations, véhicules, formes bâties... Les délaissés ne sont pas simples d’approche, tout est fait pour dissuader le public qui tenterait de s’en approcher. Les clôtures freinent déjà le regard et la pénétration dans ces lieux est comme un basculement vers une autre ville dissimulée.

3

Un délaissé industriel sur Carouge

115 115


Délaissé résidentiel

1

Maison individuelle en méfiance de squatters 116

Des traces d’intrusions artistiques


Les délaissés résidentiels, issus d’une spéculation immobilière qui entraîne un changement de formes bâties, sont les plus nombreux parmi les délaissés identifiés. Tout comme l’ensemble des sites en état d’abandon, ils sont situés en périphérie de Genève, avec des échelles au sol qui varient. Le développement urbain est comme un rouleau compresseur sur l’urbanisme d’antan, des quartiers autrefois ouvriers en mutation. Beaucoup de petites maisons ouvrières ou de maîtres sont délabrées pour ne pas inciter les squatters à leur occupation. Les logements collectifs prennent place en réduisant la surface de jardins (privés) et apportent une autre solution vers des espaces publics. Le contexte d’implantation des délaissés résidentiels s’inscrit dans une petite échelle (maisons individuelles) où les continuités boisées sont plus dense et connectées. Sur le Petit-Lancy à l’ouest du centre de la ville du bout du lac, à proximité du cimetière Saint-Georges, un ensemble de maisons attire l’œil par son état de délabrement et la condamnation des ouvertures (fenêtres, portes). Au sein du quartier, une maison a été occupée illégalement et des sans abris y ont laissé des traces de revendications. Derrière les haies faisant limite entre l’espace public du trottoir et l’espace privé pavillonnaire, les objets sont disloqués à même le sol. La végétation spontanée se mélange aux essences plantées d’ornement des jardins. Une rencontre de la nature et du maîtrisé où les strates d’aménagements s’effacent avec le temps. Les allées, les bancs, les massifs, les bordures, les éclairages, les cours, tous signes de structures paysagère de petits jardins disparaissent sous la reprise de la végétation. La vue de ces délaissés résidentiels (empreintes du monde des vivants, des pratiques passées) rend nostalgique le promeneur.

1

Délaissé résidentiel Petit-Lancy

117


Délaissé infrastructurel

1

Un mur en limite d’une route abandonnée 118

Une infrastructure qui disparaît avec le temps


Trouver des résidus d’infrastructure sur l’ensemble de l’errance n’a pas été chose facile car ce sont des lieux très discrets où la nature reprend ses droits rapidement. Il y a très peu de délaissés de ce type sur l’agglomération genevoise. Les routes, chemins, parkings peuvent ne plus servir ou être remplacés par une déviation ou autres activités. Des flux utilisaient ces voies de communication ou d’espace d’arrêt et aujourd’hui les strates végétales se succèdent avec le temps. Les délaissés infrastructurels se font rares car participant à la circulation d’une mobilité toujours en demande d’utilisation intense. Non loin de l’Arve, dans le quartier Champel de Genève (route du Bout-du-Monde), une ancienne route bordée d’un mur orné de graffitis, se montre sous le pas du piéton curieux. Une barrière interdit le passage et la limite maçonnée est très imposante. Difficile à croire que derrière un mur se cache une ancienne chaussée qui est comme engloutie par la végétation. Les graffeurs se sont appropriés le mur sur toute sa longueur créant une grande fresque. Des frênes, des ronces, des saules, de la clématite des haies, jaillissent du sol minéral comme pour rentrer en résistance. Cette ancienne voie de communication est une relique du passé où les stigmates restent tels que les bordures, les plantes d’ornement longeant le mur, l’enrobé, les panneaux signalétiques.

1

Une route abandonnée sur Champel

119


Délaissé activité commerciale

1 2

3

Des abords abandonnés lieu de stockage 120

Une friche arborée et arbustive en limite


Les commerces oubliés en attente de remplacement par une activité similaire ou autres fonctions marquent un temps de veille du délaissement. Les délaissés commerciaux sont situés dans les zones d’activités à l’urbanisme aux grands vides (parkings, stockage, routes...). L’architecture dessine une grande échelle dans l’espace où le minéral est roi. Les nombreuses infrastructures sont accompagnées de béton, d’enrobé avec un ensemble assez triste. Les délaissés de ce type sont à proximité des lignes de chemin de fer et à l’extérieur de la ville touristique. Pénétrer sur le terrain de ces espaces que j’ai traversés est accessible par une multitude de porosités aux épaisseurs variables. L’empreinte des activités passées est souvent bâtie tels que des restes de parpaings, de briques, de matériaux en tous genres. De nombreux bâtiments ont été visités ou même des fêtes ont été organisées illégalement dans ces locaux. Le mouvement de l’urbex explore ces lieux commerciaux abandonnés pour la prise de photos, la découverte de l’interdit. Le délaissé commercial du quartier de l’étang sur Vernier (ouest Genève), est composé de deux bâtiments en limite d’une route passagère à proximité de l’aéroport. La zone d’activité est très minérale avec des fragments de végétation (haies, bosquets, arbres isolés), une ligne de chemin de fer surplombe le site. Une végétation dense cerne le terrain vague, avec des objets divers (pneus, gravats, déchets végétaux, canettes...) formant une décharge sauvage. C’est paradoxalement un espace non utilisé dans un tissu urbain pourtant vivant.

3

Un espace délabré sur Vernier

121


DĂŠlaissĂŠ ferroviaire

1

2

1

Des reliques ferroviaire dans les vides 122

2

Une ramification de rails conduit le piĂŠtinement


L’activité ferroviaire ceinture Genève sur ses franges, avec des espaces délaissés aux abords et au cœur des zones de transport (marchandises, humains). Ce moyen de locomotion, arrivé au milieu du 19ème siècle dans la région, a vu son histoire évoluer au fil des années. Les zones industrielles sont à proximité du réseau de chemin de fer, ces industries sont aujourd’hui repoussées en dehors du tissu urbain. Des délaissés apparaissent à l’extrémité de la ville, proche des gares et lieux de stockage (quartier Sécheron/Cornavin, Eaux-Vives, Prailles/Acacias/Vernets). Le développement urbain crée des résidus dans ces fragments de ville à l’histoire mouvementée. Les industries transférées engendrent un site en état de délaissement ou pris d’assaut par la spéculation immobilière. Des lignes de chemin de fer sont abandonnées en limite d’industrie, la végétation s’empare du sol qui n’est plus entretenu. Cette réappropriation de la nature en site pollué est un lieu de refuge pour bon nombre d’espèces. Le site ferroviaire en partie en fonctionnement entre Genève et Carouge (sud ouest) accueille plusieurs linéaires de lignes désaffectés aujourd’hui. Ces lignes sont parallèles et connectées à un réseau principal. Les rails par endroits disparaissent sous une strate herbacée, des bouleaux, cornouillers et ailantes longent les voies rouillées. Le site est partiellement abandonné donc dangereux car des trains passent encore sur la voie centrale. Les graffitis sont présents presque partout, dans les interstices étroits entre les hangars. Les nuisances sonores martèlent l’oreille avec le passage de quelques trains et les activités industrielles aux abords.

Voie principale en fonctionnement - Carouge

123


Délaissé parc/jardin/agricole

2 3 1

1

Une entrée de parc accessible malgré l’abandon 124

2

Un banc délabré témoin du délaissement


Dans le monde rural, la déprise agricole engendre des friches et dans cette agglomération genevoise des sites sont eux aussi touchés par une déperdition des pratiques liées à un parc, une prairie, un jardin, un espace de jeux. Ces délaissés sont dans le tissu urbain, à proximité de logements. Cette dernière typologie de délaissés marque différentes pratiques et donc une présence humaine qui était autrefois forte, lors de passage ou de lieu de détente. Les parcs et jardins sont les plus représentés parmi cette catégorie, des lieux vivants entourés de bâtis. Le mobilier urbain est souvent enseveli sous un amas de végétation laissé à lui même. Les matériaux vieillissent, changent de couleurs, de textures. Divers objets et empreintes témoignent des pratiques passées telles que boulodrome, table de ping pong, poubelle, banc, portillon, remise outils, bordures, châssis légumes, récupérateur d’eau. Certains jardins abandonnés voient leurs légumes partir en graine sans récoltes et entretien car plus aucune activité ne fait vivre les lieux. Le temps est comme arrêté sur ces espaces avec une multitude de traces. Les adventices se mêlent aux plantes potagères et ornementales, une rencontre d’un monde ordonné et chaotique. Le délaissé de « parc » dans la ville de Vernier à l’ouest de Genève est implanté entre jardins familiaux, zones d’activités (commerces/industries), et grands ensembles (les Avanchets). La strate herbacée est dominante avec du mobilier urbain inutilisé. Un boisement dense sans trace de gestion borde l’espace public verdoyant. Les lisières épaisses ceinturent le site avec des points d’appels d’une activité commerciale. La végétation qui ornait autrefois ce parc reste spectatrice d’un délaissement progressif. L’abondance de ronciers et la disparition de chemins guidant autrefois le promeneur témoignent du manque d’entretien.

3

Parc délaissé en zone d’activité - Vernier

125


L’impact du temps sur la face « obscure » de la ville

Chemin Subilia - Carouge J

F

M

A

J

M

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A

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O

N

D

Chemin de l’étang - Vernier J

126

F

M

A

M

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J

A

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N

D


La temporalité des délaissés urbains identifiés et qui sommeillent dans le tissu urbain appartient à une facette de la ville marginalisée. Ces espaces vacants sont mouvants, non figés et apportent un rythme dans les quartiers concernés. Les formes que peuvent prendre ses délaissés sont variées et insaisissables : lieux rejetés du système urbain, méfiance de l’état pour le « non aménagé » et considération en dehors des plans d’urbanisme. La question de l’esthétisme de ces vides renvoie à une image négative de la ville. Pour ma part, mes sens sont attirés par ces lieux. La désindustrialisation d’établissements entraîne un délaissement pour un temps incertain, un lieu en attente d’usages pour le faire de nouveau vivre. Le côté éphémère ressort beaucoup car le site en question est libre d’agir de lui-même, la dynamique végétale et les signes de réappropriation humaine mettent en mouvement une surface, un linéaire. Les limites sont d’ailleurs floues créant une discontinuité, un morcellement du tissu urbain. Le temps d’activité d’un délaissé suivi d’un abandon entraîne obligatoirement sans entretien, un changement, une mutation du contexte : les matériaux, les formes, les objets, les couleurs, les lignes qui structuraient l’espace autrefois, le degré de vie, le bruit, l’odeur, les textures, clair/obscur, ouverture/fermeture... L’équilibre recherché par les aménageurs tend vers un rapport à la ville différent, où le contraste de l’ordonné et du « chaos » est intéressant. La réappropriation humaine d’un délaissé passe tout d’abord par une appropriation du sol par la nature, la végétation n’attend pas pour se manifester. Les occupations par l’homme peuvent être de l’ordre du passage, de la détente (arrêt) ou de l’expérimentation, comme le graffiti, le jardinage, la création de structures (mobiliers, ouvrages d’art, modélisation de l’espace...). Les délaissés attirent les curieux, les artistes, les militants, les habitants d’un quartier, quelques touristes, une rencontre de divers univers. L’imprévu, la surprise, le spontané habitent ces lieux constamment à réinventer. La saisonnalité change l’image de ces sites de l’ombre, les arbres et arbustes sont déplumés de leurs feuilles l’hiver, les « mauvaises herbes » s’affirment davantage comme militante d’un lieu. L’outil photographique immortalise à un temps donné l’ambiance du délaissé et fige l’image rien qu’un instant. Comparer deux photos prises sur plusieurs mois de décalage permet d’en ressortir toutes les dynamiques qui rentrent en interaction avec le délaissé. Les pratiques d’appropriations changent et les lieux se transforment d’eux-mêmes. L’exemple du mur graffé marque un changement, une vision d’un « passage » par un artiste et qui peut-être sera remplacé par autre usager. La ville change rapidement dans les délaissés, cela la réinvente en permanence.

Réappropriation d’un délaissé : un fragment urbain éphémère (Carouge, Jardin des Moraines)

127 127


Une appropriation du délaissé par une co-construction

Chemin du Croissant - Châtelaine J

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128

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Un cheminement éphémère

Route de Vernier - Châtelaine J

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Un changement d’image radicale

Chemin du Coin de la Terre - Vernier J

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Le changement de saison change la flore mais il a aussi un impact sur les pratiques humaines d’un délaissé. En observant ces lieux en déshérence, la végétation est plus verdoyante l’été, les fleurs apparaissent et la faune habite chaque centimètre carré. Concernant le paysage construit, des cabanes voient le jour sur Châtelaine (chemin du Croissant) via les habitants (maison de quartier Mobile Concorde) mais de manière temporaire car il sera prit d’assaut en septembre par un projet de logement. Les travaux s’emparent rapidement des délaissés, comme sur Vernier (chemin du Coin-de-la-Terre) après un deuxième passage en deux mois. L’immobilier sur la couronne de Genève est très sollicité mettant en péril les délaissés, réservoirs de biodiversité. Les lieux mis de côté par l’aménagement sont pourtant source de mouvement face à la ville figée, touristique du centre-ville. Le montage photographique ci-dessous montre bien qu’un nouveau décor se dresse dans nos villes selon l’instant.

Quartier des Eaux-Vives, proximité gare

129


Partie v

des lieux de rĂŠsistances sous forme de projets

130


131


Une culture alternative marginalisée Une agriculture urbaine dans les creux

Après avoir identifié plusieurs types d’espaces délaissés, et montré la « ville de l’ombre » explorée par mon errance, on constate que ces lieux ne sont pas vides mais occupés par des usages. Des pratiques parfois marginalisées, en dehors d’une réglementation urbaine, du monde normé et mal connu du public. Dans l’appropriation des délaissés urbains, le travail de la terre est une première manifestation qui recréer du lien avec la nature. Les potagers urbains peuvent prendre diverses formes, en pleine terre ou en hors-sol (bacs, palettes, big-bag). Identifier des jardins nourriciers par l’errance en grande partie, mais aussi par les rencontres d’habitants, en les voyants prendre des chemins de traverse ou avoir des légumes et outils dans les mains. La plupart des potagers sont situés en périphérie de la ville dense de Genève, tout comme les délaissés urbains que j’ai cartographié. La partie ouest est plus fournie en grands jardins familiaux, la ville de Vernier excelle dans ce domaine. Cette terre disponible pour cultiver des légumes ne passe pas inaperçue, surtout les jardins avec les petites maisons à l’image d’une cité ouvrière. La situation de la strate arborée est proche de la localisation des potagers, un sol fertile disponible dans les lieux abandonnés. Dans les sites au passé industriel, la culture en bac est plus fréquente, très pratiquée dans la grande urbanisation de Genève. Cultiver est en vogue aujourd’hui mais concernant les délaissés, c’est une pratique d’appropriation ancienne sur le territoire. Sur Chêne-Bougerie, les villas aux jardins clos ont déjà leur propre terrain pour cultiver. La périphérie ouest, par ses projets de grands ensembles, soutient une aide sociale par l’appropriation de délaissés en potagers, parfois éphémères ou durables selon les initiatives et la solidarité des habitants. Des parcs accueillent des potagers urbains tels que Beaulieu, Geisindorf, Franchises, des lieux très animés où la pédagogie autour de la nature et la nourriture jouent un rôle. Certains préaux d’écoles sont équipés de bacs où les enfants végétalisent une cour bien minérale.

Sensibilisation dans le parc Geisindorf

Potager de la Roseraie, centre Genève

Potager hors-sol au pied de logements , quartier vélodrome

Le milieu urbain repousse le monde vivant floristique par ses revêtements toujours plus imperméables. Le paysage construit dense et contemporain est pauvre en surface délaissées et pourtant il est source de lieux en résistances. Une vision des restes urbains à valoriser même pour un temps court. La ville consomme l’espace et abandonne « l’inutile ». Aujourd’hui sur le territoire genevois, les jardins associatifs sont sous la pression urbaine. 132

Potager entre des résidences - Quartier Concorde


Aéroport

Parc d’Ariana

Grand-Saconnex

Parc Trembley

Parc de la Perle du Lac

Parc Beaulieu

Léman

Parc Cropettes Parc Geinsendorf

Parc des Franchises

Vernier

Parc de la Grange

ône

rh

Genève Bois des frères

Parc les Bastions

l’A rve

Parc Bertrand

Chênebougeries Parc des Evaux

Lancy Carouge

800m

Boisements

Potagers associatifs

Errance 133


Jardins sur buttes, Carouge (jardins des Moraines) Potager association Xénope

Cultiver un talus, quartier des Grottes

Un potager quartier Sécheron

Cultiver en bac sur une route délaissée 134

Certains potagers sont faciles à trouver dans le tissu urbain, avec une communication et une limite du lieu cultivé et d’autre sont dissimulés au détour d’une rue, un recoin, derrière un muret délabré, en lisière de bois, dans des matériaux de récupération. S’accaparer un lieu délaissé, peut être une pratique non réglementée selon le lieu. L’action de planter, semer, organiser des accès, ajout de matériaux change l’image d’un terrain vague qui favorise la biodiversité et créer du lien social. Le potager est un élément d’appropriation de délaissés mais aussi une revendication en milieu très fonctionnel, dans des espaces publics, au pied de résidences sociales. La ville peut se montrer « cruelle » avec le monde vivant, la végétation ne trouve pas toujours un coin de terre disponible pour s’épanouir. Les adventices (Séneçon, Pissenlit, Chénopode, Consoude...) s’approprient le moindre cm2, ils sont des repères d’une déshérence d’espaces.

Appropriation d’un délaissé (jardin villa), association « Utopiana »

Les maisons de quartiers jouent un grand rôle dans l’appropriation de terrains oubliés, un réseau associatif qui incite à la culture mais aussi aux jardinages urbains. Les franges de la ligne de chemin fer qui traversent plusieurs quartiers genevois accueillent divers aménagements nourriciers connus ou dans l’ombre du tissu urbain. Les espaces en attente de constructions (projet spéculation), sont valorisés en attendant l’édification de formes bâties, par un jardinage provisoire, éphémère. Dans le cadre des objectifs du Service Agenda 21 - ville durable, la Ville de Genève, en partenariat avec l’association équiterre et en collaboration avec l’association Utopiana, a réalisé un potager urbain dans le quartier de Saint-Jean en 2013. Une collaboration avec les habitants qui permet une appropriation d’un terrain sans usage derrière une villa. Un projet participatif qui est favorisé par une présence de délaissés urbains en périphérie de la frénésie de Genève. Des terrains inoccupés depuis plusieurs mois ou années, pour cause de projets urbains programmés mais qui créent un état de veille d’un sol. Cultiver, jardiner un lieu donne une valeur, un outil de travail, de dialogue, d’échanges. Les interstices où une végétation spontanée s’épanouissait changent donc l’image d’un vide lors du travail du sol pour y planter des graines ou plants. Dans le quartier Malagnou sur Chêne-Bougeries, l’association Xénope s’est appropriée une villa avec un terrain vague à proximité. Cultiver un potager a été un moyen de pérenniser cette résidence qui fait l’objet d’un squat.


école de Balexert

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Depuis 1933, « l’association Genevoise Coin de la terre » a mis à disposition de la population ouvrière, des parcelles potagères afin d’améliorer les conditions de vie. Des espaces étaient en friche à cette époque à proximité de la ville, ils ont été appropriés et cultivés pour perdurer. C’était une question de besoin, une nécessité, aujourd’hui les jardins sont un cadre de vie (image campagne) faisant oublier les contraintes de la ville. Sur Vernier, 20 hectares de jardins familiaux prospèrent pour le moment malgré la pression urbaine. Cela représente 886 parcelles sur la commune, plusieurs de ses quartiers ont une allure de cité jardins, avec de nombreuses continuités boisées. Les jardins familiaux sont très aménagés avec des allées, des cabanons. Un paysage ordonné comparé aux potagers qui naissent dans les délaissés actuels, une spontanéité qui manque. Jardin familiaux avec maisons ouvrières aux abords 135


Les squats : un mode de vie

Squat Rhino, un des plus célèbre de Genève à l’époque

Squat Artamis, une valorisation des matéraiux et du patrimoine industriel

Squats de l’histoire de Genève : --> Rhino (1988 - 2007) --> La Tour (2000 - 2007)

Squat de Malagnou 2017- association collectif Xénope (occupé depuis 2012)

--> Artamis (1996 - 2010) --> Goulet 25 (1991 - 2001)

En une décennie on passe de 122 à 27 (1990-2000-) squats suite au changement de politique, par le préfet Daniel Zappelli en 2002. Dans les années 70, on dénombrait 170 squats. Les marginaux revendiquent une philosophie politique, un positionnement dans la société. Les squats étaient lieux d’expérimentation, témoins des difficultés d’accès aux logements. Beaucoup de personnes délaissées, ont milité durant des années pour garder cet art de vivre. Dur à croire aujourd’hui que Genève était une des villes les plus squattées d’Europe au prorata de sa population au milieu des années 90. Près de 2000 personnes occupaient des logements, par une tolérance du milieu politique.

Il subsiste encore des lieux proposant une culture alternative tels que l’Usine (ancienne usine, ouverte depuis 1989) aux abords des quais du Rhône, la cave 12, la Reliure sur Saint-Jean, le théâtre la Gravière sur Acacias, le Motel Campo sur Carouge, la Buvette des Cropettes. Le directeur du théâtre lausannois TKM Omar Porras, est nostalgique de la fin des squats, il s’exprime : « Je regrette que Genève ait perdu ces îlots de culture. Il fallait les préserver, cela faisait partie du patrimoine de l’époque. Le mouvement alternatif est né parce qu’il y avait un vrai manque de lieux de rencontres et de canaux de communication, il s’est fait naturellement via la population. » 136


Le Pachinko, association culturelle des Grottes

137


Le street art : une quête de l’envers de la ville

Quartier Châtelaine, maison de quartier Concorde

Un espace public quartier Acacias

Art mural, sentier des Saules - Jonction

Théâtre de la parfumerie, quartier Acacias

Le street-art s’invite sur un container

L’association « ARV » (Félix Brüssow )en action sur la buvette de la pointe de la Jonction

Il y a un amalgame entre graffiti et tag, le graff est une composition de l’image, un travail graphique pour communiquer une œuvre extérieure. Alors que le tag est une signature rapide, du domaine de la calligraphie, une volonté de montrer son passage. Le graffiti est une pratique issue de la culture hip-hop au départ, censée véhiculer des valeurs positives et universelles, qui transcendent les groupes sociaux et les frontières. Les bombages muraux à la peinture aérosol font partie du décor de la ville de Genève. Une partie du street-art est organisé lors d’événements, intégré dans un projet collectif et le reste de manière « clandestine ». Le cadre bâti assure au travail de graff une confidentialité dans son élaboration, une multitude de supports à chaque coin de rue. Un moyen d’expression ludique, événementiel, revendicatif, dénonciateur, contestataire, amoureux. Le graff est une force dans sa communication, il donne en effet la possibilité d’entrer en interaction avec les gens, sans les voir. La politique de la ville soutient le travail des graffeurs de manière réglementée. La culture est très importante pour le canton de Genève, de l’ordre de 10% du PIB genevois. La Ville débourse plus de 250 millions par an pour ses institutions culturelles et artistiques, 23,4% de son budget. Parallèlement à mon errance personnelle, cet art dans le tissu urbain sur tous supports m’a suivi de nombreuse fois car ces artistes cherchent les lieux discrets, une conquête de l’envers de la ville. Une aide pour ma quête de délaissés urbains, leur empreinte artistique cible ces lieux. Le street-art met en scène des lieux, joue avec des objets, les structures du paysage, un point de vue. Pas seulement présent dans les délaissés urbains, cet art s’expose dans des quartiers populaire (Grottes, Acacias, Plainpalais, Pâquis) où le réseau associatif est fort.

138


Un terrain délaissé quartier des Eaux-Vives

139


Des quartiers « utopiques »

2

Gare Cornavin

1

Parc des Cropettes

Parc Beaulieu

1

îlot 13 : un village d’irréductibles Genevois 140

2

Les Grottes : quartier d’artistes et maisons colorées


Dans les années 1980, l’îlot 13 est voué à la démolition, les habitants vont partir en lutte contre l’état pour défendre ce quartier populaire. Ils vont proposer un contre-projet face à une spéculation immobilière prête à changer radicalement l’image de ce quartier à l’identité forte. Les squatters vont contribuer à sauver l’habitat en l’occupant illégalement au départ de la revendication. L’association « Lo’13 to » a pour mission de changer les mentalités autour de la consommation d’espace, du cadre de vie urbain et de l’auto-gestion d’un quartier. Elle va contribuer à la philosophie de ce microcosme urbain. La « trocante librairie » mythique du quartier, qui donne une seconde vie aux livres et la buvette bistrot, sont autogérées par les habitants. Les habitants recherche cette qualité de vie, une convivialité dynamisée par la vie associative. Les espaces communs sont autogérés, la co-construction des lieux fait partie de ce paysage urbain. Ce quartier est loin d’être figé, la végétation est verdoyante dans beaucoup de petits espaces, mêlée au street-art et la récupération de matériaux. Le quartier des Grottes ressemble à un petit village coloré perdu au milieu d’immeubles plus imposants. Longtemps un quartier de mauvaise réputation car il accueillait, depuis les années 1930, populations pauvres et réfugiés politiques. Il a fait l’objet de nombreux projets de réaménagements, souvent abandonnés. Il fait figure de pionnier en matière de projets urbains participatifs. Ce quartier d’artistes est en effet animé d’une vie singulière et de nombreux habitants ont euxmêmes combattu pour défendre ou reconstruire leurs squats. Cette ambiance bohème en fait aujourd’hui un quartier populaire très en vogue. Les habitants se sont mobilisés pour défendre leur patrimoine, créant l’Action Populaire (APAG) en 1971. La tradition de squat du quartier remonte à l’occupation du café Papillon, avec un mouvement féministe. Plusieurs événements animent ce fragment de ville, cinéma mobile en plein air, concerts, théâtre de rue, street-art, jeux de société, bistrot sur le domaine public. La proximité de la gare permet aux touristes et aux suisses de découvrir ce quartier qui surprend. La gentrification se fait de plus en plus oppressante autour des Grottes. Une partie des Grottes s’est embourgeoisée mais l’identité reste par les initiatives des habitants, un lieu non figé en permanence renouvelé. Deux parcs (Beaulieu, Cropettes) étendent les évènements de l’îlot 13 et des Grottes, de grands espaces arborés en frange d’un cadre de vie participatif.

Des espaces communs avec jardin, jeux

Un préau à proximité de la trocante librairie

Les formes bâties sauvées de la spéculation

Maison colorées à l’échelle humaine (Grottes)

L’Entraide du quartier pour redonner vie à une façade 141


L’urbanisme de transition (une vision internationale)

L’urbanisme éphémère se manifeste à chaque coin de rue, sur des temporalités variées, à différentes échelles. Du « Parking Day » à la création d’un potager sur la friche d’un quartier, cette forme d’aménagement peut prendre divers visages. Si pendant longtemps elles ont été perçues comme le résultat d’une appropriation sauvage d’un espace privé, allant même jusqu’à parler de “squats” et de “squatteurs”, ces pauses dans la ville fleurissent et sont aujourd’hui encouragées par l’ensemble des acteurs. Un phénomène en vogue dans de nombreuses grandes villes à l’échelle internationale, qui questionne notre rapport à la ville. L’émergence de notre société de consommation, accompagnée de l’avènement du numérique, a contribué à des changements structurels majeurs. Parmi eux, la tertiarisation de notre économie. Au cours des dernières décennies, nous sommes progressivement entrés dans une économie de services, libérant ainsi les nombreuses usines de production disséminées au sein de notre territoire urbain. L’appropriation éphémère engendre la création de potagers, de scènes musicales, de buvettes... Comme par exemple à la Gare Saint Sauveur de Lille, où un espace culturel s’est implanté depuis maintenant huit ans. Après des années d’étalement urbain au centre duquel était placée la voiture, on pense aujourd’hui « à échelle humaine ». Conséquence : on pense économies d’échelles et proximité : « cessons de repousser nos frontières urbaines ». La libération de foncier lié aux délaissés urbains est donc une aubaine et l’appropriation du moindre mètre carré en ville, une opportunité. C’est le cas du village utopique des « Grands Voisins ». Depuis 2012, le site de l’ancien hôpital Saint-Vincent-de-Paul a été investi par les associations, entreprises solidaires et personnes dans le besoin. L’accessibilité de ces locaux a permis à la fois de faire vivre le site en attendant la réalisation des premiers travaux, mais aussi de soutenir certains collectifs dans le lancement de leur activité. L’occupation des délaissés crée un évènement. Le quartier bouge, il s’y passe quelque chose d’insolite, il faut aller voir. Le caractère innovant des événements qui y sont liés suscite la curiosité des habitants qui se mettent à nouveau en mouvement. La dimension collaborative et coopérative des actions contribue également au renouvellement des sensibilités individuelles et collectives par rapport à la ville. Cela donne un nouveau souffle à l’attractivité urbaine et crée un cercle vertueux local à long et court terme qui bénéficie également à l’ensemble des acteurs. Investisseurs, propriétaires et services publics bénéficient des retombées de la revalorisation du bien. Les habitants se l’approprient, s’y attachent et profitent d’une amélioration de leur qualité de vie urbaine via cette poche d’air dans la ville. L’urbanisme éphémère est donc en quelque sorte un outil d’aménagement, d’incitation à la participation et de revalorisation des espaces publics. Il participe au changement de l’image d’un quartier. D’autant plus qu’en général, les quartiers dotés de friches et d’espaces interstitiels de ce type sont souvent connotés par la déprise économique et la précarité. Ensuite, l’urbanisme éphémère devient un outil d’aménagement du territoire au sens où il profite d’un sas d’expérimentation des projets. Disposer d’une surface en attente de projet, permet de tester la viabilité et l’intérêt de projets avant d’effectuer des investissements plus lourds. De plus, les installations temporaires font appel à une pluralité d’acteurs et cristallisent des modes d’intervention qui élargissent les compétences techniques et théoriques de l’urbanisme traditionnel. Bien avant cet urbanisme contemporain, des projets ont été précurseurs dans l’histoire des renouvellements urbains. Aux Etats Unis, avec les premières opérations de reconquête des « waterfronts », au milieu des années 1970 (Quincy Market à Boston, Harborplace Baltimore), illustrent le rôle attribué aux activités ludiques et commerciales et non plus uniquement industrielles. La friche autorise l’émergence d’une dimension culturelle attachée au projet de renouvellement urbain. C’est un tournant dans les régénérations urbaines, les activités passées sont délocalisées. Les quartiers populaires des Docklands de Londres ont subi aussi une grande transformation dans le début des années 80 qui a marqué l’histoire de la ville.

142


Collectif « Wayward plant » (Londres)

Quartier les Grands Voisins, Paris

Collectif Bellastock - Ville éphémère, Paris

Les ruelles de Montréal

Collectif ETC, Saint-étienne - concours « Défrichez-là »

Concept « Woonerf », ruelle animée

« Yes We Camp » réhabilitation friche - Marseille

L’urbanisme transitoire englobe toutes les initiatives qui visent, sur des terrains ou bâtiments inoccupés, à réactiver la vie locale de façon provisoire, lorsque l’usage du site n’est pas encore décidé, ou le temps qu’un projet se réalise. Mon errance personnelle dans le tissu urbain genevois : traverser de nombreux lieux qualifiés de friche, délaissé, terrain vague, interstice qui animent la ville de manière éphémère et rejoignent les projets d’un urbanisme de transition. De multiples lieux sommeillent dans nos villes et leur appropriation peut être encadrée ou initiée par des collectifs, des associations. Les idées de projets ne manquent pas, elles germent déjà dans « l’état de veille » du délaissé. L’existant affirme de lui même ses dynamiques naturelles, en intéraction avec les quelques usages spontanés, ponctuels. La ville de Genève et ses villes voisines (Carouge, Vernier, Chêne-Bougeries...) procèdent à cette manière de construire la ville mais c’est encore trop marginalisé. Les politiques laissent de beaux jours aux promoteurs immobiliers pour continuer dans une homogénéité de la ville de demain. Et pourtant, les projets participatifs venant du cœur d’un quartier sont riches d’expérience, permetent la rencontre de divers acteurs et la valorisation d’un espace en déshérence pour une période incertaine. Face aux coûts d’immobilisation des terrains et immeubles vacants, les initiatives d’urbanisme transitoire marquent un début de laboratoire urbain, d’exploration des possibles. L’éphémère peut même devenir pérenne sur certains projets urbains, une occupation qui se transforme en lieu de vie projeté dans l’avenir de la construction d’un quartier. 143


Partie vl Projet personnel :

l’errance comme paradigme de l’envers

144


145


Exploration de la « ville de l’envers »

Interactions : « ville figée » ---> « ville en mouvement » Léman Rhône

Lancy

Genève Ville « normée »

PAV Carouge

L’Arve

Explorer une face cachée de la ville dans un « face à face » (dualité urbaine)

Après avoir exploré Genève et ses communes voisines via des situations paysagères et ma quête des délaissés urbains, un territoire s’est détaché de mon errance. La ville dense entre le Rhône et l’Arve contraste avec la rive gauche de la rivière, une « plaque industrielle » à la densification faible et aux formes urbaines imposantes. L’Arve marque une frontière entre ces deux fragments de ville aux dynamiques différentes. En effet, le centre névralgique de Genève avec ses nombreux espaces publics est très vivant mais très aménagé, strict, manque de renouvellement. Au contraire, la zone industrielle et artisanale du PAV (Praille, Acacias, Vernets) est dans une dynamique de mutation, plusieurs délaissés ont été identifiés au cours de ma marche. Sa situation est intéressante par la proximité du centre ville (confluence habitants/touristes), un paysage très horizontal cerné par le relief de la moraine de Lancy et à l’est la « vieille ville » de Carouge. Dans le cadre du projet, mon parti pris est de mettre en lumière les interstices parcourus entre ces deux « univers urbains », avec une progression vers l’éphémère (délaissés au sein du PAV), le temporaire, l’imprévu offert par un dédale urbain rythmé et labyrinthique. Les deux entités urbaines peuvent « se nourrir » entre elle à l’avenir. Le site du PAV est en plein renouvellement et offre de nombreuses potentialités dans ses vides. Trois échelles de projet vont être abordées afin de montrer toutes les valeurs que soulève une errance urbaine. Cette grande zone industrielle et artisanale d’une surface de 230 ha (6,7 km périmètre) est constituée d’un grand réseau ferroviaire, qui marque le paysage dans son organisation. Les voies pénètrent le site sur sa partie ouest, en venant au pied des diverses entreprises et locaux. Ces voies de communication dans le transport de marchandises sont en déclin sur le réseau est, avec l’apparition de délaissés urbains dans les lieux en déperdition d’activité. 146


partir à l’aventure d’une interaction subjective

Léman

e

ôn

Rh

PAV

2 3

1

e

v L’Ar

Parcs/promenades Strate arborée

Potagers associatifs Délaissés urbains

Errance

échelle territoriale : « basculement urbain » (transition) échelle site industriel : arpentage sensible (immersion) 3 échelle stratégie paysagère : îlots de fertilité 1 2

Projet

1,5 km

147


> Un processus de projet sous trois échelles Cimetière paysager Parc des Bastions Place Plainpalais d Parc Baud Bovy e Bois de la Bâtie f La Gravière(culture) g Caserne des Vernets h Résidence artistes i Motel Campo J PAV Bar k Village du Soir L Jardin de la Marbrerie a

1

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Cité c g

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Carouge

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Rade

L’échelle territoriale se justifie par une dualité urbaine délimitée par la rivière l’Arve. Le centre urbain dense est à deux pas de la plaque industrielle du PAV. Cette échelle permet de comprendre la trame urbaine que j’ai « dessinée » par mon exploration personnelle. La place de Plainpalais, la cité (vieille ville), le parc des Bastions, les rues animées et la pointe de la Jonction peuvent être intimement liés au paysage industriel rive gauche. Ces lieux parcourus lors de l’errance jalonnent la déambulation et accueillent un fort dynamisme dans ses flux, effervescence du mouvement et d’événements. Entretenir un lien entre les « deux villes » va permettre de mettre en relief une continuité du cadre de vie du centre urbain, basculer une « ville figée » vers un urbanisme en transition. La zone industrielle et artisanale (PAV) offre un grand terrain de jeux pour l’errance. Les dilatations dans l’espace et le micro-relief aménagé (escaliers, rampes, passerelles, ponts, talus...) rythment le pas et éveillent les sens. Les vides, très éparses, sont d’une autre échelle comparé à la ville dense de Genève et marquent une discontinuité. La partie nord est au pied de l’Arve, avec des berges aménagées. En limite avec Carouge, elle est habitée par des immeubles, le reste de la zone est composé d’entreprises (transports, carrosserie, centre commercial, électro, matériaux...). De manière ponctuelle, des lieux émergent pour proposer une culture alternative tels que le « Motel Campo », « la Gravière », « Village du soir », « la résidences des artistes (EoFA) », « PAV Bar ». Ils amènent une autre vie la nuit que le monde des entreprises n’apporte pas, une autre temporalité sur ce site.

2

3 148

jonction

Cette dernière séquence paysagère située au sud du PAV est « entrelacée » par de nombreux délaissés urbains que j’ai identifiés au cours de ma démarche. De surprenantes découvertes ont émergé sur mon chemin, dans ce dédale urbain aux nombreux interdits (limite forte : lieux privés, ligne ferroviaire en fonctionnement). La route des Jeunes, voie principale, organise cette facette de la ville en deux parties avec toute une ramification ferroviaire en déclin. Un paysage très minéral par les activités qui ont éloigné la nature. Pourtant, une végétation spontanée de « plantes vagabondes » vient s’approprier les lignes de chemin de fer abandonnées. Un paysage aux allures de jardin à la belle saison et qui soulève des questions dans la construction de la ville de demain. Une association (Forum Grosselin) au « Jardin de la Marbrerie » initie des projets participatifs et entreprend de nouveaux usages dans les délaissés urbains industriels. Des idées qui fabriquent l’espace et mettent en réseau un tissu associatif, afin de croiser les connaissances (jardinage, bricolage, urbanisme, art, musique...).


Rade

e

Rhôn

Cité

1

Jonction

Musée ART Culture alternative

L’A r

ve

Place Plainpalais

parc Bastions

Parc Baud Bovy

Complexes Sports Caserne Vernets

Pav

2

3 Carouge

Transports livraisons

Jardin des Moraines

Jardin de la Marbrerie Stade

Carte échelle territoriale 300m

Délaissés urbains Errance

149


arpentage artistique : une expérience sensible

Explorer la ville de "l’envers"

Inviter à l’exploration par la carte

Une carte itinérante va engendrer de nouveaux flux, un tracé valorisé pour se diriger vers la face sud du PAV où de nombreux délaissés n’attendent qu’à être réappropriés par la population ou la nature (« laisser faire »).

genève Le rhône

Cité

Jonction

Bois de la Bâtie

3

1

Place Plainpalais 4

5

6

2

Caserne des Vernets

7

L’Arve

Lors de mon errance, j’ai déambulé sur plusieurs jours sur la plaque industrielle, un environnement ludique à arpenter. Un site avec des limites franches : l’Arve, le relief de Lancy et Carouge aux allures de village. Proposer une aventure sensible rend visible une facette de la ville « dissimulée » dans le tissu urbain. Les lieux oubliés avec comme caractéristique un certain « temps de veille » sont par moment appropriés ou voués aux dynamiques naturelles. Une ville en mouvement, éphémère et temporaire qui ryhme la marche avec de nombreuses surprises de jour en jour. Faire le lien entre deux univers urbains montre toute la complexité de la ville, ainsi que les valeurs et potentiels de projets qu’offrent les délaissés urbains. Mettre en lumière « l’envers » de la ville offre un nouveau regard sous un autre angle, communicable à de nombreux usagers. L’espace n’est que traversé, peu d’arrêts, de détente, de flânerie sur le paysage industriel : la présence de promeneurs sur ce site se fait rare, on ressent un sentiment de solitude.

Parc Chuit 8

LANCY

L’étoile

carouge

16

PAV

15

9 14 13

Stade Genève 10

12

11

Délaissés urbains 150

O

300m

Parc des Bastions


1

2

Place Plainpalais : un carrefour de flux qui donne à choisir son chemin sur cet espace ouvert et qui relie la ville de Genève sur son paysage de montagne.

4

3

Le Pont Hans-Wilsdorf franchit la rivière l’Arve, le promeneur bascule d’une ville dense, imposante à un quartier industriel rive gauche. Un changement d’ambiance frappant.

Le pont de Saint-Georges fait le lien entre les rives du Rhône, la pointe de la Jonction et les rives de l’Arve. Un accès vers un réseau ferré au pied du relief de Lancy.

Les berges de l’Arve sont accompagnées d’un cordon boisé et de street-art mural dans un quartier culturel (théâtre du Loup, la Gravière)

8 7 5

Une ripisylve avec un cheminement temporaire au gré des piétinements,

6

Le bâtiment « Sicli » au delà de l’accueil d’expositions, possède une architecture étonnante.

Une voie ferrée désaffectée appropriée par l’art mural, en contrebas du parc Chuit.

Un ancien entrepôt qui témoigne de l’identité industrielle du quartier.

12 10

9

Dans les franges de la plaque ferroviaire du PAV, des vestiges d’un potager associatif.

Des espaces industriels en mutation qui laissent place au « Village du Soir », un lieu alternatif par rapport à la zone d’activité.

11

Une spontanéité du lieu par un « tableau artistique » changeant en fonction de la saison. Plantes mellifères et street-art en dialogue.

Un skatepark dissimulé sous une route passagère, dynamise cette linéarité par un flux de sport de glisse.

16 13

Le jardin de la Marbrerie surprend par son renouvellement permanent et sa fertilité à tous points de vues (biodiversité, jardinage, jeux...)

14

En limite du réseau ferré partiellement en activité, des vestiges du transport de marchandises se conjuguent avec une végétation endémique des lieux.

15

Le réseau ferré parallèle en déclin, crée de longs couloirs où une nature reprend ses droits, plusieurs strates colorisent le sol industrialisé.

Les abords du « Motel Campo », lieu de la vie nocturne, sont renouvelés par des constructions temporaires et créent un nouvel espace public.

151


> Une transition urbaine via une frontière fluviale

2

rive gauche

PAV

2

Franchir ou longer une dualité urbaine 152

rive

droite

Découvrir « l’envers de la ville » sur la plaque industrielle du PAV, demande à franchir l’Arve. Pour cela, des ponts et passerelles traversent la ripisylve boisée et assez dense. Depuis la place de Plainpalais, l’architecture du pont « Hans-Wilsdorf » incite à la découverte de la rive gauche. Les berges végétalisées de la rivière créent un écran visuel qui laisse place à la découverte après le franchissement. De nombreux genevois et touristes « habitent » les espaces publics aménagés de la ville fonctionnelle sur la rive droite. Le quartier industrialisé au sud est moins verdoyant, peu accueillant avec cette plaine en activité (entreprises, peu de parcs/promenades). Pour de nombreux habitants, le PAV est gris/sombre, un cadre de vie où il ne fait pas bon de s’y arrêter. Et pourtant, il regorge d’interstices avec street-art, potagers hors-sol, lieux culturels/sportifs et formes architecturales riches.


ville « figé e Genè » ve

rive

3

droite

Autre accès, le pont de « Saint-George » qui traverse le quartier de la Jonction rive droite pour rejoindre la plaque industrielle. La rive droite sur le Bois de la Bâtie est marquée par un relief (40m de dénivelé) qui délimite la zone industrielle du PAV. La route qui converge vers la rive gauche traverse la plaine du nord au sud, sur sa longueur. Les berges de chaque côté sont piétonnes et agréables à suivre. Une culture alternative est présente (la Gravière, théâtre du Loup) PA rive gauche « VilleVd dès qu’on passe l’Arve, en face du Bois. e l’enver s

Pointe Jonction Bois de la Bâtie

»

3

2

3

Un accès large et bruyant vers « l’envers de la ville » 153


> Vers une confluence de délaissés urbains (baliser) Mettre en valeur des espaces en état d’abandon par une communication au grand public, permettrait de les rendre visibles et traversés par d’autre marcheurs. Des lieux aux valeurs fortes : architecture, végétation, ludiques, labyrinthiques... 3

6

4 5

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> Téléscoper des situations paysagères « oubliées »

PAV

1

2

Cheminements illustrés par les fresques

L’errance personnelle que j’ai menée sur cette partie sud de cette entité industrielle est rythmé par de nombreux délaissés. Ces vides témoignent d’une activité passée, des usages qui appartiennent à diverses temporalités. Fragmenter une marche par des captures d’images met en lumière une déambulation mouvementée, ludique et permet de « réenchanter » la ville. Partager cette expérience via des fresques exposées en plein air dans des lieux fréquentés, montre toutes les potentialités d’interstices urbains sources de « reconstruction de la ville sur elle-même » (mutation). La première expression plastique (1) montre une errance en frange du récent quartier du stade de Genève (stade, école, centre commercial). Elle traverse la longue route des Jeunes (deux niveaux) avec son skatepark au rez-de-chaussée, puis vient une traversée à l’ambiance industrielle forte. Les voies de chemins de fer créent de grands vides linéaires qui organisent l’espace, une limite pas rassurante à traverser. Les entreprises toutes parallèle aident à s’aiguiller, le graffiti accompagne le sol et les murs. à l’extrémité est, le jardin associatif de la Marbrerie est comme une « clairière » ceinturée par des formes urbaines industrielles et des logements. La deuxième fresque (2) rentre en immersion dans un dédale de voies de chemins de fer en partie délaissées. Le réseau central est en activité, contrairement aux voies parallèles qui pénètrent et longent les hangars et bâtiments imposants. La végétation spontanée est riche en biodiversité, essentiellement herbacée. Les abords ferroviaires sont comme jardinés, la saison estivale offre de multiples couleurs par les plantes mellifères. Les mousses (bryophytes) colonisent le sol minéral, créant une nouvelle texture éphémère ou plus ou moins durable. Des interstices non figés par la végétation (tiers-paysage) impliquent des changements de « scènes paysagères » en permanence, un renouvellement de la ville par le milieu vivant (une certaine résistance). Les abords des rails sont comme des écrins de nature, une végétation en rébellion face à la stérisation des sols (béton/enrobé, industries). Ce cheminement exploré est dynamisé par un street-art (graff, tag) sur plusieurs verticalités (passerelles, toits, murs...), ainsi que par une culture alternative véhiculée par des lieux ponctuels (PAV Bar, Motel Campo). 156


Partager une expérience de « l’envers de la ville » et soulever des questions urbaines

1 Communiquer une démarche artistique à proximité du stade de Genève

2 Avenue Vibert : un point clé entre la ville de Carouge et la plaque industrielle (PAV)

157


Fresque 1 : Du stade de Genève au jardin participatif de la Marbrerie

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Carouge

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Fresque 2 : Rentrer dans le dédale d’un réseau ferroviaire en « déclin »

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Sublimer la friche par des îlots de fertilité Des creux source de renouvellement urbain

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Une végétation « marginalisée » Ar m

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Après avoir montré toute la richesse des situations paysagères traversées sur cette partie sud de la plaque industrielle, par une expression artistique, je vais m’intéresser à des délaissés urbains qui peuvent « reconstruire » un quartier, aujourd’hui en mutation. La grande zone 6industrielle et artisanale doit être requalifiée dans les années à venir, avec un transfert des activités (entreprises) vers la périphérie de la ville. Il y aura donc une libération de place, des lieux disponibles pour repenser la ville sur ses vides. Les délaissés sont essentiellement ferroviaires avec plusieurs lignes de chemin de fer parallèles, qui viennent mourir contre la voie routière et piétonne centrale (route des Jeunes). Une partie du réseau ferroviaire est en activité au nord du stade de foot et les lignes à l’est qui fuies vers le nord. La route autoroutière qui surplombe la voie principale des « Jeunes », est accompagnée au rez-de-chaussée d’un skatepark dissimulé sous l’infrastructure. Un lieu dynamique qui fait la jonction entre les lieux fréquentés aux abords du stade et les linéaires délaissés à l’est. Le jardin de la Marbrerie marque son territoire par l’émergence de pratiques, d’usages qui réinvente la ville. Un site où les idées fructifient en permanence et peuvent nourrir d’autre lieux identifiés en « état de veille ». L’industrie renvoie à des activités mais ne contribue pas réellement au renouvellement de la ville alors que la présence de lieux fréquentés par la population met en mouvement le tissu urbain. Une stimulation de l’espace par les divers usagers qui pourrait être « réinjecter » dans les espaces vacants. Pour cela, il va être nécessaire de mettre en musique les délaissés, les mettre en scène par des interventions temporaires ou durables. 162


4

5

3

2

1

Vue d’un fragment des délaissés ferroviaires : des espaces support d’une mutation urbaine 1

2

Un sol « habité » qui fuit la pression urbaine Les « papaveracées » s’expriment... 3

Wagon, rails : perspective végétalisée

Des abords de locaux désaffectés 4

Une nature disparue qui reprend ses droits

5

Une épaisseur ferroviaire source d’empreintes industrielles

Les lignes de chemin de fer délaissées regorgent de nature en résistance sous la plaque industrielle aménagées et donc recouverte d’un revêtement en dur. Cet « ensauvagement » à dominance herbacée et arbustive ne demande qu’à s’exprimer d’avantage. Les bâtiments artisanaux et industriels cadre les accès avec des quais surélevés par rapport aux rails. Les reliques ferroviaires sont nombreuses avec par endroits des lieux détournés de leur usages initiaux. Les ouvriers créent des espaces de détentes avec des matériaux de récupération, des idées porteuses de projets. Ces linéaires délaissés sont de plusieurs échelles dans leurs épaisseurs, une dilatation intéressante dans les franges. Les délaissés parallèles sont coincés entre la route des Jeunes et la voie ferroviaire centrale, une intimité à dévoiler. 163


S’appuyer sur un réseau vivant pour repenser les délaissés

La

Place stade Genève centre commercial Praille

nc

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Skatepark de la Praille Un espace public linéaire entre industries et centre commercial « Motel Campo », lieu vie nocture-abords espace public construction éphémère

Carouge

« Village du Soir » Vie nocture - lieu temporaire

Jardin de la Marbrerie Association Forum Grosselin Un lieu expérimental varié

PAV Bar - co-construction éphémère

Résidence des artistes étrangers (EOFA)

Quartier de l’étoile : une dynamique urbaine en devenir

Nous avons vu précédemment que la plaque industrielle du PAV est labyrinthique par sa configuration spatiale. L’essentiel de l’occupation du sol est industrialisé, donc une présence pauvre en espaces publics (place, parc, trottoir, ruelle...). Les logements sont repoussés en limite de la zone et ponctuellement des lieux dynamisent le paysage industriel. Ces lieux, véhiculent une « fertilité » par des espaces vivants (détente, arrêts, rencontres, usages créatifs...) qui peuvent être utilisés comme vecteurs de réappropriations des délaissés. Les points ciblés (PAV Bar, l’étoile etc...) concentrent divers usagers de la ville qui peuvent être potentiellement intéressés par une pratique de la ville plus indépendante, moins stricte que la ville normée/fonctionnelle. Le réseau ferroviaire abandonné sert de fil conducteur, il est un trait d’union entre « l’aménagé » et les futurs espaces évolutifs (violet). « Nourrir » des couloirs ferroviaires en état de sommeil par une dynamique humaine dans des lieux ponctuels et temporaires, permettraient d’accompagner l’évolution des délaissés et les rendre attractifs. 164


Un processus de temporalités La n

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Schéma processus : nourrir un projet par des lieux dynamiques et temporaires

N Station tram-bus ce centre

commercial

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Un site industriel en « manque de végétation » (dominance minérale)

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Coupe de l’éxistant : friches ferroviaires source d’un développement sur les 7.8ha 2

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La stratégie de développer un nouveau quartier sur le long terme à partir des délaissés identifiés, rentre dans la mutation du PAV. L’énergie déployée dans les creux vont permettent de renforcer toutes formes d’appropriations et aiguiller le projet de logements sur les abords.

Nouvelle forme urbaine --> naissance quartier par une sublimation de friches ferroviaires Le Bois de la Praille

La friche jardinée

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De nouveaux usages en perspective d’une expérimentation urbaine

La stratégie paysagère qui consiste à repenser la ville par des interstices ferroviaires sur la partie est du PAV, rentre dans un processus participatif et de concertation des acteurs du territoire en question. Les voies de chemin de fer avec son organisation parallèle aux bâtiments imposants, offrent une grande variété des « possibles ». Plusieurs séquences paysagères pourraient voir le jour grâce aux réseaux associatifs sur Genève et Carouge (banque de graines, matériaux, outils...) et les « lieux dynamiques » répertoriés. Les îlots de fertilité permettraient de créer différents univers : îlot où le laisser faire est de mise (valoriser le tiers paysage), îlot en potager urbain, îlot libre de pratiques dans l’espace (constructions, jeux, détente, rencontres, musiques, street-art...). Travailler sur diverses temporalités et mécanismes de valorisation des délaissés va engendrer une nouvelle ville, qui va par la suite réinventer un quartier. L’image (A) proche du Jardin de la Marbrerie servirait d’extension à la réflexion déjà mise en place par l’association « Forum Grosselin ». Le paysagiste créer dans certains interstices linéaires une amorce (voir séquences) d’un futur paysage en transformation.

A

Une mise en scène d’un tissu vivant, dynamisé par des regards « pluriels »

Converger dynamiques naturelles et pratiques sociales au court du temps II

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Le projet de réappropriation des délaissés ferroviaires s’effectue dans un contexte de pollution des sols dû aux activités industrielles pendant des années. Accompagner l’évolution floristique selon les stades identifiés dans les « linéaires de rails » inoccupés, reste la priorité dans le cadre de cette réhabilitation à long terme. En premier temps, le réseau de lieux temporaires (qui gravitent autour de la zone ciblé va contribuer à investir les lieux en friche, avec une concertation de la richesse d’acteurs concernés par le phasage temporaire du PAV. La zone de 7.8ha est à l’interface avec le développement du quartier commercial et la ville de Carouge. Cet espace peut voir sa mutation s’effectuer sur plusieurs années, avec une appropriation du sol par cinq espaces aménagés à un degré différent. Chaque friche est caractérisée par une flore, cette végétation identitaire du lieu sera mise en valeur dans le temps avec des variantes d’entretiens différenciées. Nous sommes sur une stratégie de sublimation de la friche et son accompagnement selon les stades d’évolution de la flore. La dépollution des sols se fera par un travail de phytoremédiation qui demandera du temps, pendant que les cinq lieux prendront forme avec un impact sur le devenir des locaux industriels. L’appropriation des « couloirs ferroviaires » en vue d’un nouveau quartier habité et culturellement dynamique, s’étalera sur la surface ciblée (rouge). Le Bois I Chaque espace linéaire prendra de la P Une do raille min forme et inventera sa propre strate a ance de la rborée aux ambian identité selon les pratiques, cela ce Maintie s de clairières nd . dans un cadre d’urbanisme en rence d e la transpau transition. remonte bois par une r des ho

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Déploiement de la dynamique d’appropriations : impact sur les formes urbaines - suppression/réhabilitation

I A Jardin de la Marbrerie Une continuité d’initiatives (débats, jardinage, constructions...)

II

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Développer un nouveau quartier par une appropriation de délaissés ferroviaires à l’existant végétal spontané et apporter une nouvelle réponse urbaine d’habiter un territoire industriel Révéler l’id entité de lie ux des strates végétales et industriels par l’accom pagnement les pratiques des acteurs locaux

La fricheII Mouvem jardinée e flore pa nts de la r un en tretien des dyn am naturell iques es. Scu lpter les stra te d’échell s sur un jeu es.

Le jardin III des fissures Un sol min peu vég éral existant é co-cons talisé où la tr uction jaillir le d vivant. u lieu fait

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La prairie méllifère Grandes éten du bacées pont es d’heruées d’arbr es vagabonds (robinier, chêne, figui er...)

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Un processus de projets par l’appropriation Un « No man’s land » à réinventer

PAV

Site

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Largescalestudios Situation du délaissé urbain réapproprié par le projet participatif - Carouge

Parallèlement à ma démarche d’errance dans l’agglomération genevoise, j’ai participé aux premiers travaux d’un projet participatif avec le collectif « Largescalestudios », d’avril à août 2017. Cette rencontre s’est faite au cours de ma marche et l’identification de ce délaissé urbain début avril. Ce projet de réappropriation d’un délaissé est intéressant en terme de potentialités et de construction de la ville à partir de ces lieux « oubliés ». Le « terrain vague », objet d’appropriation, est situé en limite du centre-ville de Carouge, rive gauche de l’Arve. Plusieurs anciennes industries sont encore existantes dans cette partie est. D’ailleurs, le site en question est sur l’emplacement d’une usine (domaine de la métallurgie) en activité il y a plusieurs années. Le sol est en partie pollué, même si il a fait l’objet d’une dépollution. Une clôture métallique borde le site de 2000 m2, depuis la rue seulement un portail permet d’y accéder. Un reste de route traverse le terrain avec son enrobé et le sol nu est habité par une flore spontanée (toutes les states). Le sol est pauvre, caillouteux et pourtant riche en biodiversité. Un monticule de terre est couvert de sureau et des renards ont trouvés refuge dans cet habitat en pleine ville. Le collectif composé d’architectes a obtenu le site pour une période de deux ans, en attendant la réalisation d’un projet de logements. Ce contrat passé avec la ville de Carouge, va permettre d’expérimenter avec les habitants du quartier, une appropriation du lieu par divers usages (jardinage, street-art, événements musicaux, cinéma plein-air...). Le terrain est appelé « Jardin des Moraines » depuis les premiers travaux du collectif, une manière de lui donner une nouvelle identité. Un projet participatif et éphémère où les usages sont très « libertaires » comparé à l’espace public « normé ». 168

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Un existant artistique et végétal

Cette expérience personnelle montre toutes les possibilités de réinventer la ville via les délaissés urbains. Une « construction » sans fin d’un lieu qui remet en question la vie d’un quartier. Une ville en mouvement qui se réécrit continuellement et rythme le cadre de vie urbain.


Le début d’une aventure Afin d’initier et de dynamiser une démarche de projet, nous avons commencé par la mise en place d’une trame potagère en bac (hors-sol) et en buttes de terre surélevée. Au départ seulement quelques habitants et réseaux associatifs participent à la création d’un aménagement nourricier. Cela permet d’occuper une partie de l’espace et de montrer à la population du quartier que le terrain est bien en pleine révolution (nouveaux usages à venir). L’entrée ça pousse sur un sol désindustrialisé ? fermée auparavant, est dès à présent ouverte lors de travaux d’aménagements (constructions, jardinage), pour faciliter le dialogue avec les habitants. Cultiver un sol qui était autrefois pollué et donc fermé au public est un grand changement dans la vie du quartier. Le réseau associatif est très important pour l’aide financière et les fournitures (matériaux, plantes...) : graines et plantons viennent de l’association « les Artichauts », la terre végétale pour les buttes vient de chez un agriculteur de la périphérie, et les sacs en toile de jute proviennent du festival Big (Biennale des espaces d’art indépendants). Préparation sac à graine La récupération de matériaux est intéressante en terme de créativité et de co-construction avec les habitants. Tous les âges sont présents au cours de l’élaboration et la mise en œuvre d’un nouveau cadre de vie. La création d’événements va être un moyen de dialogue, de débat avec des personnes issues d’associations et les habitants du quartier. Pour savoir les attentes de chacun en lien avec la mise à disposition du « Jardin des Moraines », et leur perception du lieu, des journées sont organisées (thèmes : construire, animer, cultiver, fonctionnement). Les idées de chacun et l’échange favorisent un « terreau » propice à une cohabitation d’usages dans le temps. Faire vivre un lieu qui était en « sommeil » demande un travail de communication auprès d’un public qui serait intéressé par du jardinage, bricolage, scène de musique extérieure, projection films...

Communiquer un projet participatif pour l’avenir du lieu

Arrosage des buttes après plantation

Une appropriation par le sol

Une manière ludique de réhabiliter un lieu Affiche événements

échanges de regards sur une délaissé urbain, outil de sociabilisation et mise en réseau 169


Réappropriation par « l’habitant »

Chaque espaces est réinvestis par la population locale - Occuper des microcosmes par une « liberté créatrice » de lieux communs

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Un changement d’image inscrit dans le temps

Avril 2017 : un terrain sans présence humaine

Mai 2017 : une occupation de l’espace par des aménagements temporaires

Une limite franche appropriée par des graffitis (Avril)

Une bordure habillée d’une végétation nourricière (Juin)

Une entrée minérale et végétale (Avril)

Une plantation hors-sol qui conduit le visiteur (Juillet)

En quelques mois, chaque recoin du délaissé urbain réapproprié change par le vivant et les objets. La dynamique naturelle après plantation contraste avec le « construit » (béton, enrobé, bois...) de la ville. Chaque prise d’initiatives du collectif, d’associations, d’habitants contribue chaque jour à son évolution. Les objets font partie d’une récupération, des plantes sont transplantées d’un ancien jardin, toute fourniture réinvente le délaissé qui n’était plus regardé. Changer le regard d’un site en état de délaissement passe par une communication mais aussi une nouvelle « mise en scène » pour se projeter. 171


Une réflexion croisée sur une zone industrielle (PAV) en mutation

> Workshop « Cultura Fertilis » - Collectif Urbz

échanger autour d’un besoin de « vie culturelle » en quartier en mutation

carouge

Collectif

Quartier en mutation (l’étoile)

Genève

Carouge Lancy

Un quartier émergant qui relie la « ville figée » (Genève) à la « ville de l’envers »

Le collectif « Urbz » composé d’urbanistes, avait organisé deux journées de workshop (6-11 avril 2017) au sein de la zone industrielle et artisanale (PAV). Elles avaient pour but la réflexion sur un futur quartier (l’étoile) d’affaire et culturel, intégré dans la grande mutation urbaine de la plaque industrielle du PAV. Mandaté par les villes de Genève, Carouge et Lancy, le workshop permettait de débattre et d’apporter des idées sur l’aspect culturel de ce fragment de ville. Plusieurs associations étaient présentes, ainsi que des habitants pour un échange des possibilités que peut offrir un lieu culturel dans ce quartier en mutation. J’ai choisi de m’intéresser à ce paysage urbain industriel en limite du centre ville de Genève pour ses qualités. Au cour de mes premières sessions d’errance, les situations paysagères sur mon chemin m’ont guidé à plusieurs reprises vers ce territoire de bord de l’Arve. L’échange avec les acteurs de l’agglomération genevoise a été enrichissant sur divers points : émergence d’idées sur le devenir du site industriel, un passé historique raconté par certains habitants, le rapport entretenu avec la ville dense de Genève (relation des rives), l’importance de la culture sur le territoire, le réseau associatif et le manque de culture alternative. Les workshops montre toute l’effervescence de chaque acteur, lorsqu’il est question de co-construire la ville à plusieurs regards. 172


> « Jardin de la Marbrerie » : un outil de projet pour le « Forum Grosselin »

Carouge

Lancy Site délaissé : « Jardin de la Marbrerie »

Vue du site approprié par l’association en limite du PAV

Réunion participative entre acteurs associatifs

Première installation potagère et lieu de débat

L’association « Forum Grosselin » est soutenue par la ville de Genève et de Carouge afin de développer des collaborations avec les habitants Réfléchir aux potentiels de projets en quartier en du quartier en frange du site, les collectivités, les associations et les entreprises. mutation ( un lieu des « possibles ») Leur devise est la suivante : « participer/transformer/innover ». Depuis avril 2017, les potagers en bacs ont été les premières interventions sur ce site industriel désaffecté. Une appropriation par le jardinage qui par la suite à été déclencheur de création d’usage tels qu’un terrain de pétanque, le montage d’une pergola, la construction de mobiliers (bancs, tables), mise en place d’une roulotte/camionnette. Toutes interventions est éphémère car le quartier va évoluer dans les années à venir, mais elles contribuent à la réflexion et l’émergence d’intérêts venant de différents acteurs du territoire : artistes, étudiants, familles, associations... Des événements permettent de dynamiser le lieu régulièrement : soirées cinéma plein air, jeux (boules, molkky), concertation d’acteurs (débats), cours de jardinage et reconnaissance botanique (flore spontanée in situ). Une association qui est en mesure d’alimenter la construction participative de la ville dans d’autres délaissés urbains à proximité (étendre la réflexion).

Mise en scène d’une friche industrielle et expression du vivant (anthropique-écologique)

173


174


conclusion Dans le cadre du mémoire, j’ai pu expérimenter une méthode d’approche de la ville via l’errance, une expérience très enrichissante. Une exploration sur 6 mois qui m’a permis d’appréhender la ville par ses composantes et ses temporalités qui l’habitent. Une démarche assez longue mais qui permet de nourrir le regard du paysagiste dans sa faculté à ressentir et observer son environnement. Les diverses expériences participatives sur des délaissés urbains montrent l’engouement de la population pour le devenir de ces espaces en mutation, en mouvement perpétuel. Découvrir un territoire urbain sous un autre angle par une quête du lieu délaissé amène à déambuler au gré de situations paysagères. Une conception ludique de la marche par l’égarement, le hasard, l’aléatoire. Errer au rythme de ses pas dégage un sentiment de liberté qui permet de découvrir une autre ville, sortir du moule classique des réseaux de communication normés. Les diverses partitions qui composent la ville amènent à des continuités, des coupures, une succession de lieux en mouvements ou d’arrêts. Toute la complexité de l’univers urbain est déconstruit sous l’angle de la marche via un parcours dans « la ville de l’envers». Une découverte des coulisses d’une ville de l’ombre qui peut permettre l’expression de nouveaux comportements sociaux (usages, occupations) et la résurgence de « l’intimité » des délaissés. La démarche méthodologique est importante car elle construit une vision, une manière de repenser la ville sous un certain angle de vue. Mon processus de projet commence dès l’arpentage du terrain car l’errance est au service d’une pensée (« faire la ville »). Lors des premiers kilomètres sur Genève, je m’attendais à de grands espaces délaissés car son histoire industrielle avait produit des lieux vacants. Le développement urbain est grandissant sur ce territoire avec une spéculation immobilière à chaque coin de rues. Et pourtant, ma quête des délaissés a été positive, il a fallu agrandir mon rayon d’exploration, aller chercher les entre-deux sous forme d’îlots disloqués/ fragmentés dans la ville. Une discontinuité intéressante pour le renouvellement d’un quartier riche en biodiversité et émergence d’usages. L’errance libère le regard et facilite l’interaction avec son environnement, cela croise les délaissés urbains comme prétexte de découverte d’un territoire oublié. Nous l’avons vu, ces vides urbains qui habitent la ville de façon nomade sont parfois difficiles à découvrir avec des limites fortes ou floues. Construire la « ville sur la ville » et non sur ses franges est un enjeu contemporain fort en renouvellement urbain. La grande plaque industrielle du PAV (Praille, Acacacias, Vernets) illustre bien toutes les potentialités qu’offrent les délaissés urbains en sommeil. En parallèle, mon expérience participative d’appropriation de terrain en « déshérence » montre l’effervescence que peut susciter un lieu source d’idées, d’occupations diverses, de sublimation de la friche. Un territoire où l’on perçoit le caractère transitoire de la matière, du temps et de l’espace. être à l’écoute du contexte d’implantation du délaissé et co-construire une « sphère » qui puisse rayonner dans un quartier, pose de nombreuses questions dans une ville en permanence en construction. Penser la ville par ses vides suivant une démarche d’expérimentation induit une ville sans finalités, un changement de paradigme éphémère-temporaire qui peut devenir durable par la suite. La planification urbaine contemporaine laisse parfois peu de place à l’imagination de chacun, à l’expression d’un réenchantement des vides et pourtant ils véhiculent une ville en mouvement par leurs traits de caractères en résistances et mouvants (faune, flore unique). Le tracé de mes pas a mis en relief une carte de l’envers de la ville qui met en lumière les « agrafes », qui font limitent entre les franges des délaissés et l’intégration au tissu urbain. Une confluence de délaissés a été révélée et peut permettre de renouveler la face sud de la zone industrielle du PAV. Un quartier en pleine mutation à l’avenir avec une libération de place (transfert activités), qui peut construire une « ville en mouvement » en lien avec la « ville figée » du centre urbain de Genève et Carouge. Jouer sur les temporalités, avec des lieux éphémères apporte un dynamisme recherché par la culture alternative sur le territoire (expression d’usages inventifs) et permet de renouer du lien avec une nature sauvage oubliée. 175


Annexes Carte identification dĂŠlaissĂŠs urbains (errance)

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Capturer l’errance selon l’instant - Relation « INTRA »

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Bibliographie Livres - Errance - Raymon Depardon, éditions Points 2000 - Une histoire de la marche - Antoine Becque, édition Perrin 2016 - Les situationnistes en ville - Thierry Paquot, Infolio 2015 - Les friches industrielles, cartographie et modes d’occupation - Robin des villes, éditions du Certu 2008 - Déplacements urbains : sortir de l’orthodoxie - Thomas Buhler, PPUR 2015 - Walkscapes, la marche comme pratique esthétique - Francesco Careri, éditions Jacqueline Chambon 2013 - Ville côté jardin, ville côté cour - Spomenka Alvir, l’Harmattan 2015 - Street Photographie - David Gibson, édition Dunod 2014 - Regards croisés sur Genève, promenade littéraire - Collectif (Alain Bagnoud, Olivier Beetschen...), éditions Slatkine 2017 - Histoire de Genève - Alfred Dufour, Edition Puf 2014 - Des friches urbaines aux quartiers durables - Sophie Lufkin, éditions PPUR 2015 - Genève à travers les siècles - Guillaume Fatio, éditions Slatkine 1994 - Flore des friches urbaines - Audrey Muratet, Marie Pellaton 2017, éditions Xavier Barral

Cartographie - https://sitg.maps.arcgis.com - https://map.geo.admin.ch - http://wikimapia.org - https://map.wanderland.ch - http://ge.ch - http://hepia.maps.arcgis.com - http://www.ge200.ch/carto/

Mémoire - Sortir de la ville par l’entre-ville de Marion Guichard, travail de fin d’études 2012 ENSNP Blois - De la monumentalité des friches urbaines de Montréal de Claire Duquesne, Mémoire architecture 2015, faculté LOCI - Friches urbaines et espaces en mutation de Ophélie Perrin, Mémoire Urbanisme et Aménagement des Territoire 2014 - Le projet urbain par la marche de Tiffany Sutter, Mémoire de fin d’études, ENSA Paris la Villette 2015 - à l’abordage des délaissés de Mathieu Lemarié, Mémoire de fin d’études, ENSA Grenoble 2014 - Le renouveau de la marche urbaine : terrains, acteurs et politiques de Sonia Lavadinho - Doctorat en Géographie 2011 - L’interstice urbain : un lieu potentiel de la ville contemporaine de Godeffroy Rivière - Mémoire de fin d’études 2012 ENSACF - De la friche urbaine à la biodiversité. Ethnologie d’une reconquête de Julie Scapino - Thèse Anthropologie de l’environnement, 2016 190


sites internet - http://www.notrehistoire.ch - http://www.potagersurbains.ch - https://www.franceculture.fr - «Marcher, une histoire des chemins» par Antoine de Baecque - http://forumgrosselin.org - http://www.largescalestudios.com - http://mobile.lemonde.fr «Quand les friches se transforment en laboratoires de la ville» - http://www.parc-hentsch.ch : Histoire passé industriel quartiers Genève - http://lechainonmanquant.be - http://www.ville-geneve.ch - http://www.geneve500m.com/ «Genève projet territorialé - http://www.villes-cyclables.org «Réenchanter la marche, ludifier la ville» de Sonia Lavadinho - https://books.google.com «L’errance urbaine» de Danielle Laberge 2000 - http://planetephotos.blog.tdg.ch «Actualité graffiti» Genève - https://www.rts.ch (archives agglomération Genève) - https://www.lafabriquedelespace.com - https://www.letemps.ch (histoire squats genevois) - http://la-veille-autrement.blogspot.fr : « L’éphémère régénérateur de l’espace public ? » - http://www.demainlaville.com : « Habiter la ville autrement avec Les Grands Voisins » - 2017

revues - https://www.cairn.info : « La marche en ville. Une histoire de sens » de Rachel Thomas, 2007 - http://www.persee.fr : «Les fortifications de Genève» de Walter Zurbuchen, revue le Globe 1984 - https://www.urbanisme.fr/marcher/dossier-359 : Revue «Marcher» n° 359 Mars-Avril 2008 - https://www.cairn.info : « Les friches : espaces en marge ou marges de manœuvre pour l’aménagement des territoires ?» 2008, Claude Janin - http://www.persee.fr : « 50 ans d’aménagement du territoire » à Genève de Dominique Joye, Vincent Kaufmann. N°80-81, 1998 - https://sociologies.revues.org : « La mobilité, nouvelle question sociale ? » de Jean-Pierre Orfeuil. 2010 - https://communicationorganisation.revues.org : « Espaces en friche, des lieux dédiés à l’expérimentation et à la création culturelle » de Ghyslaine Thorion, 2005 - https://www.cairn.info : « Friches en ville : du temps de veille aux politiques de l’espace » de Charles Ambrosino, 2008 - https://geocarrefour.revues.org : « La ville événementielle : temps de l’éphémère et espace festif » de Philippe Chaudoir - 2007 - https://brussels.revues.org : « Le rôle de l’usage temporaire dans le (re)développement urbain : exemples bruxellois » de Aurelie de Smet - 2013

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Merci

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Je tiens tout d’abord à remercier toutes les personnes rencontrées tout au long de mon parcours professionnel et scolaire. Toutes ces personnes ont ouvré de près ou de loin à faire de moi ce que je suis aujourd’hui. L’aboutissement de ce travail n’aurait pas vu le jour sans le soutien et l’accompagnement, depuis son élaboration, de toutes ces personnes. Merci à ma directrice d’étude Graziella Barsarcq pour sa confiance et ses conseils avisés, ainsi qu’aux membres de mon jury : Hélène Soulier, Anne-Sophie Subilia, Aurélien Reymond. Merci aux deux membres genevois d’être venus tout droit de mon lieu d’étude, et pour m’avoir permis de participer aux ateliers « d’écoute de la ville » (association C-Fal) sur la cité du Lignon. Merci au « Collectif Largescalestudios » (Benoit Beuret, Elias, Sébastien) de m’avoir permis de contribuer à l’élaboration du jardin des Moraines sur Carouge, un projet participatif très enrichissant de rencontres et de connaissances. Merci au collectif « Urbz » pour leur workshop « Cultura Fertilis », un échange autour du quartier en pleine mutation du PAV. (quartier de l’étoile) Merci à Alex Verhille, assistant enseignement HES en architecture du paysage pour ses connaissances en plantes, le jardinage et son partage du regard paysagiste. Merci au Conservatoire et Jardin botanique de la ville de Genève (Nicolas Wyler), pour leur partage de cartographies de corridors biologiques et leurs connaissances de la faune et la flore sur le canton genevois. Merci au système d’information du territoire de Genève, (SITG) pour l’échange de données géoréférencées (couches, vues axonométriques...) Merci au service d’urbanisme de Genève, Bruno Beuret pour son regard sur la ville de Genève, son travail de planification urbaine et le partage du développement de l’agglomération des dents creuses. Merci au collectif « Pas de Côté » situé sur Lyon (Julien Thiburce, Antoine Dubos, Thomas Jennequin) pour l’organisation d’une marche dans le centre ville lyonnais. Un regard croisé dans les rues à travers un réseau de places publiques. Merci à la maison de quartier « mobile Concorde - Ouches » (MQM) pour le partage de leurs missions associatives avec les habitants (jardins,constructions,) et la construction d’une cabane éphémère dans un délaissé urbain. Merci à ma famille pour son accompagnement au quotidien et de m’avoir soutenu tout au long de ces études. Je remercie mon amie pour son soutien et ma belle-mère pour les nombreuses séances de relecture.

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