THÉO LOPEZ
THÉO LOPEZ AURORA
EXPOSITION DU 13 SEPTEMBRE AU 25 OCTOBRE 2019
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THÉO LOPEZ
DU SPIRITUEL DANS LE GRAFF Par Renaud Faroux
Théo Lopez alors qu’il n’avait que 18 ans s’est fait remarquer au sein du collectif d’artistes du 9e Concept créé par Stéphane Carricondo, Ned et Jerk 45. A peine sorti de son école de graphisme, il devient en 2008, le plus jeune créateur à intégrer ce groupe de peintres, graffeurs et graphistes créé à Montreuil au début des années 1990. Pour des campagnes évènementielles de la marque « Desperados », il sillonne les clubs de France avec danseurs, chanteurs, comédiens, DJ, et signe ses prestations « TO », son nom de scène. En pleine vague « Body painting », dans des soirées il produit des tatouages éphémères qui enflamment le public. Il garde un souvenir ému de cette période et raconte qu’en dessinant sur la peau, il avait pris conscience que la toile aussi pouvait être une matière vivante. Cherchant une identité propre, il se rapproche de Romain Froquet, un de ses collègues du collectif d’art urbain, avec qui il partage une passion autour du dessin tribal polynésien. Dans ses premières compositions, il s’inspire de masques ethnographiques, recompose des entrelacs maoris mêlés à des éléments anthropomorphes, - visages, yeux, plumes - qui donnent naissance à des villes futuristes, un univers onirique et mystique. Ses représentions kaléidoscopiques de visages colorés, ses foisonnements de végétaux, se caractérisent par un point commun : l’utilisation rigoureuse de la symétrie. Théo Lopez explique qu’une représentation récurrente dans le motif évoque pour lui quelque chose de spirituel et de vivant comme si, par la géométrie, la toile devenait habitée.
A partir de 2013, lors de ses premières expositions, il présente des pièces où des lignes aléatoires, des nœuds compliqués se transforment en paysages, en totems à identités multiples. L’atmosphère semble peuplée de perroquets et autres oiseaux fabuleux. De drôle de masques et des saltimbanques les font voler au rythme harmonieux d’une joyeuse musique chromatique. Faune et flore étalent leur luxuriance dans des paysages tropicaux comme sous les enchantements de jardins inventés, d’eaux argentines pleines de poissons phosphorescents. La nature, telle une belle mécanique, compose une nouvelle arche de Noé à base de pylônes métalliques et modernistes. La perspective multiplie les angles de vue, nie la hiérarchie des points de fuite dans un chromatisme brûlant et des contrastes nets de couleurs primaires. Avec les membres du « Terrier », Mathieu Dagorne et Olivia Da Bona, et ceux du 9e Concept, Théo Lopez a construit de vraies amitiés et raconte : « Tous m’apprennent quelque chose d’important : le travail d’équipe est bénéfique. Etre ensemble, faire ensemble, c’est ce qui permet d’avancer, de se remettre en question par une confrontation constante et positive. On s’entraide, on se file des coups de mains sur des projets. Etre artiste est synonyme d’intimité et donc de solitude et il est très important pour moi d’être aussi lié à des rencontres, à des ouvertures sur le monde. J’aime le partage. »
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Son passage de la figuration à l’abstraction date de son séjour en Israël en mai 2015. Est-ce un hasard ou une véritable conversion ? Son premier travail vraiment abstrait apparaît au cours de ce voyage de dix jours, où il était parti peindre des fresques avec des artistes locaux. Il garde aussi en mémoire de cette aventure muraliste son émotion et son questionnement devant le mur des Lamentations à Jérusalem, autant que devant celui qui coupe le pays avec la Palestine. La solution plastique sera sa prise de conscience que par la peinture, l’espace devient élastique ! Tel Orphée, l’artiste nous invite à traverser les murs comme les miroirs. Cette expérience sera d’ailleurs à l’origine de son intérêt pour les arts numériques et des créations à base de « réalité augmentée ». Il précise : « C’est l’énergie spirituelle de Jérusalem qui m’a beaucoup inspirée, pas particulièrement les religions, mais plutôt la présence d’une force ancrée dans le sol et tournée vers le ciel, une impression d’élévation. J’ai ressenti cette même sensation à Barcelone devant les tours de la Sagrada Familia. » Il modifie alors son vocabulaire ou plutôt se concentre sur des détails, sur l’essentiel, comme dans un gros plan. L’artiste découvre la dimension spirituelle qu’il recherchait auparavant en se focalisant sur un simple élément de ses grands masques tribaux. Ses impressionnants fétiches bariolés avaient pris déjà une grande amplitude dans la fresque réalisée lors de « Résidence avant Destruction » au Carré Bonnat à Bayonne en 2014. Au cours de cette exposition au Pays Basque des rencontres plastiques fructueuses
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avaient eu lieu entre les artistes du collectif du 9e Concept et Hervé Di Rosa et Jean Faucheur. A partir de cette expérience formatrice, Théo Lopez va recadrer son sujet dans ce qu’il peut avoir de plus abstrait, de plus géométrique et s’interroger sur le processus et les moyens de production qu’il s’agisse du support ou de l’utilisation de caches, de bombes aérosols ou d’adhésif. C’est ce matériau qui va l’intéresser plus particulièrement car il permet de laisser visible dans ses dévoilements successifs différentes couches déposées au préalable. Il sert aussi bien à dessiner qu’à mélanger des couleurs et des matières. Il révèle ce qui a été caché, protégé, en dessous, comme le fait l’épiderme avec le derme. C’est comme le calque qui laisse transparaître plusieurs épaisseurs. Cette utilisation originale d’un vulgaire papier collant va lui permettre de mettre en œuvre des mutations formelles et chromatiques. Il se met à jongler entre construction et décomposition et poser des structures pour mieux les casser, perturber l’équilibre pour retrouver quelque chose de spontané et surtout d’aléatoire. A l’aide de rouleaux, il trace, aligne, ordonne plusieurs couleurs qui dessinent des formes organiques, boyaux, viscères, tuyaux puis reprend les formes à la bombe pour mettre en avant des effets tranchants syncopés par des aplats. Il joue aussi sur le ton sur ton, noirs plus ou moins foncés, effets de brillance et de transparence qui cisaillent la matière première. Il accentue les contrastes entre le chaud et le froid, le clair et l’obscur, le mat et le
brillant, le rugueux et le lisse, la droite et la courbe. Les volutes délicates, la saillie de volume laissent libre cours à un graphisme original qui de manière formelle le rapproche de la calligraphie orientale sans intentions volontaires de sa part. Par ces démarches, il cherche la vitesse et accepte l’idée d’accident, de rupture même, afin d’amener du vivant. Ce qui préoccupe l’artiste c’est donc de faire vivre des contrastes, d’animer des rythmes. Il va produire sa série « Moonlight » en 2015 avec des toiles comme « Stardust », « Eclipse », « Aurores Boréales » où il s’intéresse à la lumière lunaire et se questionne sur les illuminations qu’on trouve dans l’espace. Les mouvements ascensionnels sont rendus par des aspects vaporeux et éthérés. Par le geste qui doit être rapide et précis, il implique tout son corps, ce qui convient bien à ce sportif de haut niveau, spécialiste en arts martiaux. Quand le corps n’est pas figé, la toile semble en marche. Les expériences extatiques vont de pair avec l’engagement du corps comme chez les derviches tourneurs qui ne connaissent pas l’extase si leurs corps ne tournent pas. Sur la toile, le ciel devient alors visible, les étoiles sont comme palpables. Il peint ce qui semble inatteignable et vise par là une sorte d’extase. Tout rapport représentatif, figuratif, est éliminé au profit du seul jeu de la couleur, des taches et des lignes. La bombe aérosol constitue son moyen de peindre favori. Il aime sa facilité d’utilisation, sa rapidité, ses multiples orientations de projections
de peinture, ses possibilités offertes de dégradé et de relief. Il utilise le spray de différentes manières : en « nébulosités » » avec des capsules biseautées normalement utilisées pour la calligraphie, ou encore en mouvement, surtout pour les grands formats qui impliquent une large gestuelle corporelle. Inventer, c’est renouveler. Peut-être pas renouveler les idées, mais transformer les techniques et donner naissance à de nouvelles idées. L’abandon de toute figuration donne vie à un nouveau langage des signes, marqué par une gestualité exacerbée qui revendique la prééminence du signifié sur le signifiant. Ce qui caractérise cet élan artistique est la mise en place d’une pratique dictée par l’instinct et un rapport inédit au matériau pictural pour faire le procès d’une certaine rationalité. Théo Lopez s’inspire du monde organique, pour retrouver la peinture à l’état naissant. Pour contrer le risque de dissolution de la forme abstraite, il agence des aplats, intègre le motif de la grille dérivé du cubisme et installe à l’avant plan un réseau graphique qui entretient un rapport dynamique avec le fond. A la manière des artistes de l’Abstraction lyrique : Hans Hartung, Gérard Schneider, Pierre Soulages, Ladislas Kijno (à qui il a rendu hommage en reprenant la forme d’une de ses « Balises » emblématiques), ce n’est plus la main mais le bras qui est à la manœuvre. Dans son art non-figuratif, Théo Lopez a toujours été très curieux de la démarche des avant-gardes historiques : le dynamisme des formes des futuristes italiens, l’éclatant rayonnisme de Michael Larionov,
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la rigueur géométrique des constructivistes, la spiritualité des compositions et l’emploi des couleurs des peintres du « Cavalier Bleu » Franz Marc, August Macke, et plus particulièrement de Kandinsky pour ses liens avec la synesthésie, les résonances intérieures, les « correspondances » entre couleur et musique. Comme lui, il cherche à provoquer des effets symphoniques mais loin des compositions mystiques d’Alexandre Scriabine qui tendent « Vers la flamme », Théo Lopez est plus proche des sonorités et harmonies de l’électronique actuelle. Durant l’été 2018, l’inattendu frappe encore par l’entremise d’une invitation à un voyage en Russie pour une découverte de la Taïga. Outre la nature à foison, les lacs, le vert des arbres qui se reflètent dans l’eau, c’est la lumière de juillet dans la forêt immense et des couchers de soleil qui durent cinq heures qui fascinent le jeune peintre. L’artiste est touché ici par l’esprit de la forêt et son sentiment magique de liberté. Cette deuxième expérience fondatrice après celle en Terre Sainte le conforte dans sa quête utopique du rayon vert ! Ses expériences physiques, ses voyages, il les concrétise comme en détournant le châssis de ses toiles pour leur donner l’apparence d’un carré en perspective, puis s’essaye au tondo pour mieux rendre compte de son univers fait d’aurores boréales, de galaxies imaginaires, de poussières d’étoiles, de brouillards évanescents magiquement présents dans des œuvres comme « Silver Lining », « Nuage Soleil », « Between the line ». Dans ses trouvailles picturales Théo Lopez
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se rapproche souvent des éléments primaires. Le feu, l’eau, l’air, la terre donnent vie dans leurs combinaisons alchimiques à des cristaux, à des pierres précieuses, à des prismes merveilleux qui décomposent la lumière blanche et étalent leurs spectres arc-en-ciel dans les toiles. Ses références picturales sont aussi à chercher du côté de Robert Hardgrave, Dave Kinsey, Yesnik, Futura 2000… mais son approche de la matière et de l’abstraction est originale. Il s’éloigne du graffiti et du post-graffiti même si des formes de lettres étirées, toujours illisibles accompagnées de leurs couleurs fluorescentes reprennent la dynamique et les rythmes des lettrages chers au Street Art. Le vrai lien à découvrir entre ses créations et l’art urbain se trouve dans sa dimension musicale car avec Théo Lopez la peinture explose et vibre comme des infrabasses.
abordant non seulement la vison des formes et des couleurs, mais aussi celle des absences, des dédoublements, des souvenirs, des ambivalences psychiques et physiques. Sa quête spirituelle rejoint celle de Rimbaud qui écrivait dans la Lettre au Voyant : « L’esprit qui tire et qui accroche donne forme ou informe. » Le peintre fait le geste, celui qui regarde en reçoit la trace.
Dans des œuvres récentes de grands formats, « Gift », « High Lights », c’est toujours la couleur comme source d’énergie qui sert de point d’appui. Chaleureuse, comme le rayonnement d’un mur d’affiche en plein midi au mois d’août, elle s’achemine dans les œuvres pour provoquer une délectation, une joie profonde. L’artiste suggère ainsi que sa peinture est l’expression de la vie rêvée et s’organise comme une fonction cosmique. Théo Lopez, loin de sa rigueur géométrique initiale tend actuellement à dissoudre les formes élémentaires. Loin de susciter une seule émotion sensorielle, le tableau doit agir comme un objet enchanté
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Nebuleuse 150/150 acrylique et aerosol sur toile I 2019
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Detonacion (serie Aurora) 81/130 acrylique et aerosol sur toile I 2019
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Furia (serie Aurora) 81/130 acrylique et aerosol sur toile I 2019
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Climax (serie Aurora) 81/130 acrylique et aerosol sur toile I 2019
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Expande (serie Aurora) 81/130 acrylique et aerosol sur toile I 2019 p.14
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Exhibicion (serie Aurora) 97/130 acrylique et aerosol sur toile I 2019 p.15
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Gift 120/130 acrylique sur toile I 2019
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Dim.2 73/100 acrylique sur toile I 2019
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Dim.3 73/100 acrylique sur toile I 2019
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Dim.1 73/100 acrylique sur toile I 2019
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Dim.4 73/100 acrylique sur toile I 2019
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High light 120/130 acrylique sur toile I 2019
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ECO 50/70 aerosol sur papier I 2019
Reflejos 50/70 aerosol sur papier I 2019
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Agujas 50/70 aerosol sur papier I 2019
Destellos 50/70 aerosol sur papier I 2019
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Papier1 30/40 aerosol sur papier I 2019
Papier2 30/40 aerosol sur papier I 2019
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Papier3 30/40 aerosol sur papier I 2019
Papier4 30/40 aerosol sur papier I 2019
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Arena1 21/29,7 aerosol sur papier I 2019
Arena2 21/29,7 aerosol sur papier I 2019
Arena4 21/29,7 aerosol sur papier I 2019
Arena5 21/29,7 aerosol sur papier I 2019
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EXPOSITIONS PERSONNELLES
2018 HIDDEN SIDES - Art & Craft - Paris 2017 BRAINSTORMING - Artistik Rezo - Paris 2014 Apnée - NUNC - Paris 2013 Méandres - H2 basement - Paris
EXPOSITIONS COLLECTIVES
2018 Expo 96 - Fondation desperados/ JCDecaux - Paris Marseille street art show 2018 - Galerie St Laurent - Marseille Spectrum - City of Talent - Swinton and Grant - Madrid 2017 Urbstractions - Pretty Portal - Dusseldorf Kaliatropia - AYM - Generation Y / Ethereum - Paris Galerie Francis Noël - Expo Duo Indie 184 / Théo Lopez - Liège Kaliatropia - KROMACITY. (SOLD OUT). Paris 2016 FLOW - Retrospective 9ème Concept - Lille Fred Atax - STROKAR - Bruxelles - Belgique Dérive - L’anvers - Paris 2015 Gallery K - Parcours Aucwin – Le Mans 2014 Palais de TOKYO - Google cultural Institute - Paris villette street festival - 9eme Concept & AKR - Paris 2011 Musée du Quai Branly - L’afrique dans tous ses sens - Paris 2009 Palais de TOKYO - IMAGINE - Paris Scratch Paper - 9ème Concept - Paris
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