Mémoire de recherche Safa Ben Khedher - 2018

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Safa Ben Khedher

L’espace public du pavillonnaire U t o p i e, my t h e o u r é a l i t é ? Question posée sur le quartier du Pont de l'Arc à Aix-en-Provence

MémoireTPE[R]-juin 2018 Encadrement: Alexandra Biehler / Co-encadrement: Marion Serre © Safa Ben Khedher



Safa BEN KHEDHER

L’espace public du pavillonnaire U t o p i e, my t h e o u r é a l i t é ? Question posée sur le quartier du Pont de l'Arc à Aix-en-Provence

TPE[R]-juin 2018



Safa BEN KHEDHER

Encadrante: Alexendra Biehler Co-encadrante: Marion Serre

TPE[R]-juin 2018


Ce mémoire de TPE[R] est dédié à l’âme de M.Stéphane Hanrot... Qu’elle repose en paix...


REMERCIEMENTS Je tiens à remercier toutes les personnes qui ont contribué à la réalisation de ce projet et en particulier mon encadrante Mme. Alexandra Biehler et ma co-encadrante Marion Serre dont les corrections et les conseils ont porté ce travail. Merci pour m’avoir accompagnée tout au long de ce travail, merci pour votre patience et votre investissement. Je remercie Mme Anna Bela De Aaurjo qui a toujours cru en mon projet et qui lui a apporté ses remarques subtiles.

Je remercie aussi toute l’équipe enseignante du séminaire S9 AVT intitulé « Modes de constitution de l’espace public urbain » . Je remercie également Arnaud Sibilat, Zineb Ait.Bouali et tous les intervenants qui m’ont apporté leur savoir et prodigué leurs conseils. Je remercie aussi mes parents qui m’ont soutenue pendant tout mon parcours d’enseignement et ma vie en générale. Je remercie en particulier ma chère mère pour être toujours à côté de moi et me donner tant de force et de courage. Je remercie chaleureusement Ahmed HMIDI, mon compagnon, mon ami et mon collègue, une personne qui m’est chère Enfin, je remercie toutes les personnes qui m’ont apporté leur soutien tout au long de ce travail.

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Je souhaite aussi exprimer ma gratitude à M. Stéphane Hanrot, encadrant de mon parcours recherche pour ses corrections et compléments d’information. Paix à son âme...


THÉMATIQUE L’espace public dans le tissu pavillonnaire

MOTS CLÉS

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Habitat pavillonnaire Espace public Espace intermédiaire Proximité Intensification Densification


THEMATIC Public space in suburban fabric

KEYWORDS Suburban habitat

Spaces intermediate Proximity Intensity Renewal

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Public space



RÉSUMÉ

Face à l’étalement urbain, il paraît nécessaire aujourd’hui de repenser la périurbanisation et l’aménagement du territoire qui en résulte. L’espace public a un rôle important dans la structuration de l’urbain et l’amélioration du cadre de vie. Le tissu pavillonnaire, soumis à un projet de densification qui tend à limiter l’étalement urbain, nous fait penser qu’il est nécessaire de réfléchir, c’est-à-dire observer, étudier et certainement mettre en projet, le rapport qu’entretient, ou devrait entretenir, l’homme (l’habitant) à l’espace public. Ce questionnement préoccupe notre société occidentale plus particulièrement que ce soit pour répondre à un besoin d’échange avec « l’autre «, ou pour engager un développement soutenable et améliorer la qualité de la vie collective des habitants, d’un tissu urbain et des zones d’habitat résidentielle en voie de densification. Ce mémoire est un élément de préparation d’un sujet pour une thèse qui interrogera le devenir de l’espace public pavillonnaire face aux processus de densification. Dans cette optique, il est nécessaire de comprendre le fonctionnement et les usages qui ont lieu aujourd’hui dans les espaces publics pavillonnaires s’ils existent, de clarifier cette notion et distinguer sa nomination: existe-t-il des espaces publics, collectifs, partagés, communs...? Ce travail a pour objectif de théoriser et d’interroger la place, c’est-à-dire les fonctions, les usages, les représentations des espaces publics dans le périurbain et plus particulièrement dans les quartiers pavillonnaires. Il s’agit d’acquérir des connaissances permettant de penser les processus de densification tout en assurant des bonnes qualités des espaces publics sur le plan foncier, formel, social, économique et environnemental.

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Le phénomène de la périurbanisation apparu en France dans les années 1960 se poursuit (Bauer & Roux 1979 , Touati & Alii 2015). Il s’est accompagné d’un développement par juxtaposition, souvent stérile, d’entités urbaines, souvent mono-fonctionnelles. Les grands ensembles, le pavillonnaire et les zones d’activités constituent trois formes dominantes du phénomène de périurbanisation. Cette trilogie n’est pas exclusive d’autres composantes de la ville périurbaine susceptibles de renouvellement et de densification, comme les zones commerciales, les zones d’équipements ou les campus universitaires, mais elle caractérise un continuum urbain, entre le noyau central et la lisière (Sieverts 2004).



ABSTRACT

Faced with the urban sprawl, it appears necessary today to reconsider the periurbanisation and the regional planning that results from it. Public space plays a significant role in the structuring of both urbanization and the improvement of the living environment. The suburban fabric, subjected to a project of thickening which tends to limit the urban sprawl, makes it absolutely necessary to reflect, i.e. of observing, of studying and certainly of putting in project, the report which maintains, or was to maintain, the man (the inhabitant) with public space. This questioning worries our Western company more particularly than it is to meet a need for a positive exchange with “the other�, or to engage a bearable development and to improve the collective quality of life of the inhabitants, an urban tissu and zones of residential habitat in the process of thickening. This research paper is an element of a preparation of a subject for a thesis which will question to outcome of suburban public space facing the processes of thickening or renewal. Accordingly, one needs to understand how suburban public spaces today are being used and dealt with. This work aims to theorize and question the place, the functions, uses and representation, of public spaces in the peripheral zones of the city and more particularly in the residential areas. It is about acquiring knowledge making it possible to think the processes of thickening while providing good qualities of public spaces on numerous levels land, formal, social, economic and environmental.

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The phenomenon of periurbanisation that started in France in the 1960s still continues (Bauer & Roux 1979, Touati & Alii 2015). It was accompanied by a development by juxtaposition, often sterile, of urban entities, often monofunctional calculuses. The great units, the suburban and the zones of activities represent the three major forms of the phenomenon of periurbanization. This trilogy is not exclusive, there are many other suitable components of the periurbaine city for renewal and thickening, like the commercial areas, the zones of equipment or the university campuses, but it characterizes the urban continuum, between the core and the edge (Sieverts 2004).


SOMMAIRE 05 06 09

Remerciements Thématique et mots clés Résumé

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INTRODUCTION

PARTIE 1

25

Retour sur les notions d’espace public Quelle définition pour l’espace public pavillonnaire ? 27

— Qu’est-ce que l’espace public ? Entre formes, typologies et usages

33

— L’espace public dans le tissu pavillonnaire Quelle (re)définition ?

PARTIE 2

39

L’histoire de l’habitat pavillonnaire

L’exemple des évolutions du quartier du Pont de l’Arc 41

— L’imaginaire des pensées de la ville: quels sont les fondements de l’habitat pavillonnaire?

47

— L’habitat pavillonnaire entre définition et types de formes

49

— Des utopies urbaines à la réalité du pavillonnaire Quelle histoire?

55

— L’histoire du quartier du Pont de l’Arc d’Aix-en-Provence


PARTIE 3

L’espace d’un public dans le quartier du Pont de l’Arc 63 Entre forme et statut

— Les statuts de cet espace dans le pavillonnaire Entre structure foncière et réglementation

66

— Analyse typo-morphologique de l’espace d’un public pavillonnaire

75

— Analyse de la présence du végétal dans cet espace

101

— Quels usages de l’espace public dans le quartier pavillonnaire? Entre rapport de voisinage et proximité

109

CONCLUSION

Quel devenir de « l’espace d’un public » dans le contexte 137 de la densification pavillonnaire ?

Bibliographie Annexes Crédits illustrations

145 153 181



INTRODUCTION

« D’un point de vue général, les résultats de l’enquête sur les pavillonnaires s’inscrivent dans le droit fil des travaux d’Henri Lefebre qui, dès les années 1960, dénoncent le mal des grands ensembles. » (Marchal & Stébé 2017)


[1] «L’espace public, le paysage et la périurbanisation: un projet démocratique» Camilles Vivès, Nouveau lexique, 11 novembre 2016. https://cremaschiblog.wordpress.com, consulté le 02 mars 2018


Le modèle de l’habitat pavillonnaire tel que nous le connaissons en France aujourd’hui, s’inscrit dans le temps long de l’histoire de l’urbanisation. En effet, il a notamment été inspiré par le modèle américain développé en 1920 (Mangin 2004), ainsi que par celui des cités jardins anglaises théorisé par Howard en 1898 ou encore de «Broadacre City» imaginée par Wright à partir de 1932 . Wright a pensé ce modèle comme «une nouvelle organisation des communautés à l’échelle du territoire, plus respectueuses des ressources, des paysages et des hommes» (Wright, 1935, p.39). Ces modèles ont souvent été considérés a posteriori comme des modèles « anti-urbains » (King, 1985; Berque, 1995). Pourtant, il s’agissait initialement pour Howard comme pour Wright, de véritables utopies urbaines (Choay, 1965), visant à associer les apports de l’urbain, du progrès, à la qualité de vie et aux bienfaits de la campagne. Aujourd’hui, différentes études ont montré que le critère essentiel du choix de ce type d’habitat est le désir d’avoir un jardin privé (Cachon, 2007) qui permet le calme et la proximité de la nature (Bonnin & Berque, 2006). La maison individuelle présente aussi un refuge et une protection vis-à-vis de la collectivité. Comme l’a montré Frédéric Ramade dans son documentaire Ode pavillonnaire, «c’est un sentiment tout particulier d’avoir sa maison, de pouvoir fermer sur le monde la porte, non pas de sa chambre, non pas de son appartement, mais celle de sa maison tout court », (Ramade, 2007, p.2). Par ailleurs, le désir d’avoir une maison individuelle est aussi lié au désir d’être propriétaire (Durif & Berniard, 1969) et à l’augmentation du nombre d’enfants par ménage contribuant à l’augmentation des besoins en surfaces (Miet, 2013). 1 Appelées aussi des pavillons. Leurs origines remontent au début du XIXème siècle face à la croissance de la population, l’industrialisation et les migrations vers les villes en même temps que le développement du chemin de fer dans les environs de Paris à la fin des années 1830 (Haumont, 1965; Vogel, 1979). 2 D’après une étude du Credoc (Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie). URL: http://www.credoc.fr/, consulté le 17 octobre 2017. 3 D’après une enquête du journal De particulier à particulier, 2007. URL: http://www.immopub.fr/blog/ articles-immobilier.php, consulté le 18 octobre 2017.

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Aujourd’hui, on compte 19 millions de maisons individuelles1 en France sur des parcelles de 1000 m2 en moyenne et une taille moyenne des jardins de 600 m2 (INSEE 2016). En 2006, 54,3% de la population française habite en périphérie des villes (INSEE 2006). Cela est dû à la préférence d’une majorité de français pour la maison individuelle : elle serait effectivement considérée comme étant un logement idéal pour 82%2 et recherché par 66%3 d’entre eux.


Comme l’ont montré de nombreux auteurs, l’apparition de la voiture individuelle a marqué une étape essentielle dans la fabrique de l’urbain. Elle permet effectivement de faciliter les déplacements à grande distance et augmente la possibilité d’habiter en périphérie des villes, d’où le développement d’espaces urbains accompagnés de l’apparition des expressions qui désignent ces phénomènes tels que « la rurbanisation »1 (Bauer & Roux 1976), « la périurbanisation »2 et « l’étalement urbain »3. Ainsi, l’habitat pavillonnaire se caractérise généralement par une faible articulation au centre-ville et une densité plus faible malgré sa forte consommation d’espace (AULAB4, 2011).

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Comme le souligne d’ailleurs David Mangin, « L’étalement résidentiel de ces trente dernières années apparaît davantage comme une sorte d’implosion des cellules du grand ensemble, une caricature de villages sans rues, sans cours, sans commerces, où se juxtaposent des familles précautionneusement distancées, dans des maisons ‘ individuées ‘ plus qu’individuelles. De manière très codée, une distance physique et sociale avec des plus proches voisins est instaurée. La sociabilité mythique et tant vantée du village est inexistante, dans ces ensembles pavillonnaires de plus en plus segmentés socialement » (Mangin, 2004, p.201). L’analyse proposée par David Mangin établit aussi une relation directe entre le système de voiries dans les quartiers pavillonnaires à la volonté de protection: «La demande de protection, celle qui concerne aussi bien les espaces privés que les espaces publics, favorise la construction d’un «urbanisme en boucle», à l’image de celui de la ‘’rue en boucle’’ qui s’est considérablement développée dans les lotissements », (Idem, p.204).

1 L’installation dans des communes rurales des personnes qui viennent de la ville et qui y conservent leur emploi (Hamelin, 2018). Néologisme qui désigne le processus d’urbanisation rampante de l’espace rural, d’imbrication des espaces ruraux et des zones urbanisées périphériques. Sur le plan statistique, on peut évaluer la rurbanisation comme le mouvement des espaces urbains vers l’espace à dominante rurale (Dictionnaire de l’urbanisme et de l’aménagement, sous la direction de Pierre Merlin et Françoise Choay) . 2 L’installation des hommes et des activités dans l’espace péri-urbain (Hamelin, 2018). La périurbanisation correspond à une urbanisation périphérique autour des agglomérations urbaines. Encore pourraiton aussi l’interpréter comme l’urbanisation autour des villes, ce qui caractériserait le développement périphérique des villes, bref les étapes successives de la banlieue depuis la révolution industrielle, voire les faubourgs. Il s’agit d’un néologisme régulièrement utilisé dès les années 1960, voire parfois avant, mais qui n’a trouvé place dans les dictionnaires que dans les années 1980 (Dictionnaire de l’urbanisme et de l’aménagement, sous la direction de Pierre Merlin et Françoise Choay). 3 La consommation de l’espace qui dépasse la croissance de la population. Il s’agit d’une dilatation disproportionnée. L’étalement urbain est différent de «l’extension de la ville» qui, elle, répond à une nécessité. 4 Agence d’Urbanisme de l’Arrondissement de Béthune.


Deuxièmement, la clôture constitue l’un des éléments structurants du pavillonnaire en France. Elle témoigne notamment d’un besoin d’intimité (Frileux, 2010). Cette limite peut être perçue comme une rupture entre le privé et le public, mais elle peut être aussi garante de leur interaction. Par exemple, Nicolas Soulier montre qu’elle peut effectivement constituer un «frontage», entendu comme «l’espace de bord de rue, tant privé que public, qui s’étend devant un riverain» (Soulier, 2012, p.125). Ce «frontage» peut alors valoriser la qualité de l’espace public et maintenir la sociabilité des espaces «communs». Cette dernière réflexion nuance ainsi l’analyse de David Mangin, soulignant l’existence potentielle d’autres natures d’espace public. En effet, l’espace public en tant que forme, statut et usages est toujours en mutation ce qui donne naissance à différents termes tels que espace collectif, espace commun, espace partagé, espace intermédiaire, que nous allons explorer par la suite. Forts de ces constats, la notion d’ «espace public» dans le tissu pavillonnaire mérite d’être redéfinie, et surtout réactivée par les acteurs de la société. Comme l’on montré de nombreux auteurs, l’espace public en tant que lieu et lien de l’urbanité, apparaît comme l’ossature vide indispensable à la constitution du tissu urbain et un élément structurant essentiel pour fabriquer durablement un morceau de ville. De fait, dans le contexte du pavillonnaire principalement dominé par la propriété privée, penser la question des espaces publics et leur interaction avec l’espace privé apparait primordial. Sa forme, son mode de gestion et ses usages constituent des points de réflexion encore peu pris en compte dans les processus de densification et, plus largement, de renouvellement (péri)urbain à venir. En effet, l’espace public pavillonnaire a des caractéristiques autres que celles de l’espace public de la ville dense. Les spécificités du tissu et les types d’usagers qui l’occupent influent sur les pratiques de l’espace public. Il est donc primordial de définir et de caractériser l’espace public dans le tissu pavillonnaire, d’analyser ses usages en termes de mobilités et de rapport au voisinage afin de pouvoir, ensuite, se projeter sur son devenir dans le contexte de la densification pavillonnaire. Fort de ces constats, nous nous interrogerons ici sur l’existence même d’espace(s) public(s) dans le pavillonnaire. L’espace public existe-t-il dans le pavillonnaire ? Si oui, quelles en sont les caractéristiques morphologiques, sociales et juridiques ? Y a-til une distinction à faire entre les notions d’espace public, commun, partagé, collectif et intermédiaire ?

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Ainsi, la relation entre les espaces publics et les espaces privés dans le tissu pavillonnaire se différencie de celle existante dans la ville centre. Premièrement, la maison individuelle se compose d’un devant qui permet la transition entre l’espace public et les activités privées et d’un arrière caché du regard d’autrui. Cette observation renvoie notamment à la notion d’espace intermédiaire (Moley, 2006 ; Flamand, 2008), sur laquelle nous reviendrons dans la première partie.


Pour répondre à ces questionnements, nous avons posé des hypothèses de travail et défini une méthodologie pour les tester.

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Premièrement, l’espace «public» dans le tissu pavillonnaire se distinguerait de celui de la ville dense et se définirait autrement. Il serait même inexistant dans certains cas et certains types de pavillonnaire. D’une part, l’idéologie du pavillonnaire et la forme urbaine de ce tissu amèneraient à la création d’un espace «public» différent avec des usages différents. Le processus de résidentialisation des lotissements, quant à lui, ferait disparaître la notion même d’espace public et donnerait naissance à d’autres types d’espace. D’autre part, la nature de l’espace public pourrait évoluer au cours du temps, notamment en fonction des changements de la réglementation et, peut être, du statut foncier du pavillonnaire. Ces paramètres pourraient ainsi influencer sa typo-morphologie ainsi que ses usages. En effet, les pratiques des espaces publics dans le tissu pavillonnaire dépendraient de la mobilité, des possibilités de rencontre ainsi que du temps que passent les usagers dans ces espaces. Dans la continuité de ces réflexions, nous avons pour hypothèse centrale qu’il y aurait un intérêt à introduire la notion «d’espace d’un public», qui permettrait de définir les espaces du pavillonnaire accessibles au public, mais dont les statuts et les pratiques peuvent être divers et variés. Cette notion est intéressante car elle met en évidence la mutation de l’espace public. Elle met l’accent aussi sur la question d’échelle du quartier pavillonnaire dans le but de la contextualisation de ses espaces extérieurs. Comprendre cet «espace d’un public» et son interaction avec l’espace privé devrait alors permettre d’apporter un éclairage nécessaire à la fabrique future de «la ville sur la ville» (Owen, 1991; Newman & Kenworthg, 1999; Charmes, 2003; Touati & Crozy, 2015). En effet, il s’agit ici de réinvestir la notion d’espace public en vue de contribuer à la (ré)invention d’un «urbanisme pour les maisons» (Bauer & Roux, 1979), échappant depuis longtemps à l’action publique. Dans cette perspective, une méthodologie de travail a été mise en place. Dans un premier temps, nous reviendrons sur les notions d’espace public urbain et d’espace public pavillonnaire en se basant sur la littérature existante sur le sujet de manière à pouvoir appréhender l’espace public dans sa globalité et le replacer ensuite dans un contexte plus particulier : le tissu pavillonnaire. Cette première partie aboutira à une définition que nous donnerons à l’espace public du pavillonnaire. Dans la deuxième partie, nous nous interrogerons sur l’histoire de l’habitat pavillonnaire en général en se basant sur la littérature sur le sujet. Sur cette base, nous analyserons l’évolution historique de notre secteur d’étude : le quartier du Pont de l’Arc à Aix-en-Provence. Ce quartier, véritable interface entre la ville et la nature, est particulièrement intéressant à étudier, du fait de son actualité. Premièrement, différents projets vont le transformer considérablement : création d’une zone d’aménagement concerté (ZAC Barrida), de la faculté de droit et d’économie et d’une polyclinique. Par ailleurs, suite au changement de PLU datant de 2016, la densité de certains lotissements a augmenté et plusieurs secteurs ont été classés en zone à urbaniser.


Par conséquent, il s’agit d’un quartier en pleine mutation, dont l’espace public va être amené à évoluer. Nous proposons donc d’en faire un état des lieux, basé sur un travail de cartographie. Ceci nous permettra, dans la troisième partie, de brosser un portrait de l’espace public du pavillonnaire. Dans un premier temps, nous aborderons la question de son statut pour comprendre sa structure foncière et ses réglementations. Nous établirons, dans un second temps, une typo-morphologie des espaces publics existants dans le pavillonnaire en se basant sur notre terrain d’étude. Cette analyse se basera sur un relevé sensible du site et une cartographie des différentes formes et qualités urbaines. Cette partie contiendra aussi une analyse de la présence du végétal dans l’espace public pavillonnaire et son effet sur sa qualité paysagère.

Nous conclurons cette recherche par la présentation de notre sujet de thèse intitulé «le devenir de l’espace public pavillonnaire dans le contexte de la densification». Les territoires périphériques semblent être les lieux privilégiés d’un possible changement, d’un glissement de modèle et de stratégies : de véritables espaces laboratoires (Dodier, 2012). Dans cette optique, la notion d’ «espace d’un public» que vous évoquerons pour désigner l’espace public du pavillonnaire, mettra en évidence la mutation de ces espaces et la nécessité de penser leur avenir dans le développement des territoires périphériques en mutation. «L’espace d’un public» pourrait être l’ossature, un fil directeur sur lequel se base la densification pavillonnaire prenant en considération la participation citoyenne dans le renouvellement du pavillonnaire. Ainsi, nous nous interrogeons sur les possibles mutations de ces «espaces d’un public» en cas de densification de points de vue typo-morphologique, réglementaire et social.

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Ensuite, nous rappellerons le rôle social de l’espace public et nous questionnerons les usages des espaces publics du quartier d’étude. Notre analyse se basera, d’abord, sur des observations sur terrain qui permettront d’identifier les pratiques d’usages d’une manière objective. Ensuite, une cartographie de différents parcours que peut faire un habitant dans sa vie quotidienne en prenant en compte différentes catégories d’âge. Dans cette optique, nous étudierons les impacts de la mobilité sur les pratiques d’usage.



[2] La construction de l’espace urbain © Peter Downsbrough, New York, 2003.



Partie 1 Retour sur les notions d’espace public Quelle définition pour l’espace public pavillonnaire ?

« Étrangement, les espaces publics périurbains ont cependant fait l’objet de peu de recherches, malgré l’importance croissante des [études périurbaines] en France. » (Desjardins & Fleury 2014)

© Safa Ben Khedher



1-Qu’est-ce que l’espace public ? Entre formes, typologies et usages. Il existe plusieurs notions pour parler de l’espace non bâti, au sein duquel on observe des pratiques : espace commun, espace partagé, espace collectif, espace intermédiaire, espace public de proximité. Ceci nous laisse penser à la définition et aux caractéristiques propres de «l’espace public». Il s’agit, de définir ces termes et de les différencier, pour voir lesquels sont pertinentes à utiliser dans le contexte du pavillonnaire et en quoi la notion «d’espace d’un public» pourrait être pertinente.

Jürgen Habermas définit l’espace public comme étant l’espace de la démocratie et de la médiation entre l’État et la société civile. Cet espace favorise le débat public et la participation des citoyens dans la vie politique. Selon lui, l’espace public « ne peut pas se concevoir comme une institution, ni, assurément, comme une organisation (…). Il ne constitue pas non plus un système ; il admet certaines frontières intérieures, mais, vis-à-vis de l’extérieur, se caractérise par des horizons ouverts, poreux et mobiles » (Habermas, 1997, p.387). Ainsi, l’espace public est conçu de telle sorte que « les citoyens fassent de leurs droits de communication et de participation un usage qui soit, entre autres, orienté vers le bien public, un usage que l’on peut demander, mais qui ne peut être obtenu de force par le droit» (idem, p.492). Il se caractérise principalement par sa dimension politique. En effet, le concept de la sphère publique signifie l’espace qui offre la possibilité de formation d’une opinion publique. Il s’agit d’un espace libre et ouvert composé d’un public préoccupé par des affaires d’intérêt général. Jürgen Habermas évoque la notion de la publicité de l’espace public. En effet, en tant que citoyen acteur, on doit être participer à la scène publique et en même temps savoir être passif et capable d’ observer et commenter.

1 La «sphère» (Sphäre), désigne la dimension de l’action et de la vie humaine. Elle est distinguée du terme «espace» (Raum) comme définition d’une zone, d’un lieu délimité où se joue la relation entre une idée politique et un territoire. Le terme «public», quant à lui, désigne tout simplement ce qui est ouvert à tous, disponible pour tous, visible et su de tous, par opposition à la fermeture. Alors, la «sphère publique» désigne l’action publique et la vie humaine ouverte à tous. «Le Droit des peuples réglé selon le grand espace proscrivant l’intervention de puissances extérieures».(SCHMITT Carl, Guerre discriminatoire et logique des grands espaces, Paris, Editions Krisis, 2011, p.159). 2 Un espace commun est un lieu d’action et d’interaction entre les individus mais aussi avec des objets et de formes spatiales. Il s’agit d’un «agencement qui permet la coprésence des acteurs sociaux, sortis de leur cadre domestique pour disjoindre ainsi espace commun et logement. L’espace commun peut être pensé comme un espace de convergences et d’actes (Dictionnaire de la géographie et de l’espace des sociétés, sous la direction de Jacques Lévy et Michel Lussault, éditions Belin, Paris, 2003) .

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La notion d’ espace public a été employée pour la première fois par Jürgen Habermas dans sa thèse intitulée L’espace public publiée en 1960. Elle est apparue pour désigner la sphère publique1. Le terme « public » est associé au visible, au commun2 et au débat public.


Selon Marcel Henaff, philosophe et anthropologue français, le caractère public signifie : ce qui est exposé au regard de l’autre, de la communauté et de leur jugement. La notion d’espace public s’étend depuis «l’espace construit vers le dispositif institutionnel de débat ouvert» (Henaff, 2008, p.13). Il est l’espace civique du bien commun qui s’oppose à l’espace privé d’intérêts individuels (Arendt, 1983). On peut distinguer deux concepts de l’espace public, l’espace public d’une visibilité commune et l’espace public politique de débats et de décisions en rapport avec la vie citoyenne.

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Dans son ouvrage L’espace public, Thierry Paquot, philosophe et professeur à l’institut d’urbanisme de Paris, distingue «l’espace public» des «espaces publics». D’une part, l’espace public de la vie politique et des sciences de la communication signifie l’espace du débat public et de la confrontation des opinions privées. Il relève de la philosophie politique. D’autre part, «les espaces publics», quant à eux, désignent les espaces accessibles au public. Ils relèvent de l’urbanisme. Cette distinction entre « l’espace public communicationnel » et « l’espace public circulationnel » fait l’objet de cet ouvrage. Thierry Paquot considère que ces deux formes de l’espace public favorisent l’échange et la rencontre visibles et lisibles. Elles convergent autour des notions de communication et de partage. Cet auteur met en évidence l’évolution dans le temps et dans l’espace du « public » et du « privé ». Ensuite, il traite les espaces publics urbains, d’abord, comme formes urbaines puis comme lieux pratiqués en rapport avec les usages des espaces publics. L’espace public, selon Thierry Paquot, serait ainsi un lieu où se rencontre un public. Le « public » est tout ce qui est commun à la collectivité. Le « privé » est, selon lui, le domaine de l’intimité et du familier. Jacques Lévy, géographe, urbaniste, professeur à l’École polytechnique de Lausanne, directeur du Laboratoire Chôros et codirecteur du Collège des Humanités, considère que l’accessibilité est la qualité première de l’espace public. La qualité d’accessibilité d’un espace public est liée à la lisibilité de son « mode d’emploi ». Cette accessibilité mesure en même temps les qualités d’un espace et les prestations qu’il offre. Dans le Dictionnaire de la géographie et de l’espace des sociétés, il propose de rompre avec la dimension politique de l’espace public pour se concentrer sur sa dimension symbolique. En effet, l’espace public permet une fonction régulatrice des rapports entre espaces, sociétés et territoires. Il est un élément essentiel dans la constitution de la société. Comme en témoignent ces différents auteurs, l’espace public a donc été défini dans ces différentes dimensions; politique, symbolique et formelle. Il évolue dans le temps et dans l’espace. Néanmoins, il demeure toujours le miroir et «le champ d’expériences» de la société : la projection des faits politiques, économiques, sociaux et environnementaux (Paquot, 2009).


Dans la continuité des travaux de Philippe Chanial, nous considérerons ici l’espace public comme «le milieu général dans lequel s’accomplit la mise en forme, la mise en sens et la mise en scène du social» (Chanial,1992, p.63). Ainsi, l’espace public est défini comme un lieu de représentation. Dans son article «théâtre et Agora» publié dans l’ouvrage Prendre place: espace public et culture dramatique de Isacc Joseph, l’écrivain et dramaturge Jean-Christophe Bailly, associe la définition de l’espace public à celle de l’Agora et du théâtre, du point de vue des liens qui attachent démocratie et représentation dans ces espaces. Comme Bailly le souligne, ce qui fait le lien entre le théâtre et l’agora, «c’est leur caractère d’anomalie ou, plutôt, d’événement, dans l’espace de la cité. Or ce qui fait ainsi événement, ce n’est pas à proprement parler une construction, un monument, mais un vide, un évidement du tissu urbain» (Bailly, 1995, p.49). Parmi les caractéristiques qu’on peut relever des définitions de l’espace public, nous retiendrons surtout le critère de multifonctionnalité. Il s’agit d’un espace «possible» où se passent différents événements. C’est de ce point de vue là qu’on peut aussi associer le terme d’espace public au théâtre. Il s’agit d’une scène ouverte à toute activités selon les usagers et la temporalité de l’espace. Comme le souligne Hannah Arendt, «il faut donc songer pour comprendre l’espace public non seulement comme espace abstrait de délibération intersubjective, mais comme espace du mouvement, du rassemblement, de la dispersion et du passage.» (Arendt, 1983, p.199). Ainsi, l’espace public est un champ d’actions qui laisse lieu à des usages souvent différenciés. Comme le souligne Arnaud Gasnier, c’est notamment à partir des années 80 que « la recherche de polyvalence marque la conception des espaces publics : cours urbaines, places semi-piétonnes, élargissement des trottoirs, soulignent la volonté de privilégier la mixité sociale et fonctionnelle du centre-ville » (Gasnier, 2016, p.64). D’après ces différentes définitions, l’espace public appartient à un foncier public, il est accessible, ouvert à tous, il est aussi un lieu de d’expression et de représentation, politique et multifonctionnel. Sur cette base, il est à présent nécessaire d’explorer les définitions connexes qui sont progressivement apparues pour rendre compte de situations sociales et/ou spatiales diversifiées, telles que l’espace commun, l’espace collectif, l’espace partagé et l’espace intermédiaire.

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Pour synthétiser, Jürgen Habermas et Marcel Henaff traitent plutôt l’aspect politique de l’espace public : il est le support de l’opinion publique et de la confrontation des idées entre ce qui émane de l’Etat et ce qui émane de la collectivité. Cette notion d’espace public «politique » est aussi développée par Thierry Paquot qui la nomme « espace public » et qui la distingue des « espaces publics circulationnels » (Paquot, 2009, p.8) accessibles au public. La «publicité» de l’espace permet la possibilité de croiser l’autre, de discuter avec lui, de s’approprier les espaces, d’interagir et de partager. Elle dépend de son accessibilité qui permet de s’y rattacher, de le gérer et d’en faire le lieu de rencontre et d’interaction entre différentes catégories sociales sans distinction.


D’après Isaac Joseph, l’espace en commun ou l’espace du commun peut être défini comme « l’espace qui vient entre les hommes pour détruire tout arbitraire à leur dispersion et toute contrainte à leur rassemblement, cet espace n’est pas ‘collectif‘ et n’est pas propriété. Il est aussi un espace avec lequel l’espace public négocie, pour s’inventer et se propager, une sorte de contrat» (Joseph, 1995, p.34). L’espace commun serait, de même que l’espace public, un espace possible d’interaction et de pratique sociale des individus, mais qu’il oriente davantage les réflexions sur un type d’espace qui serait partagé par une communauté d’acteurs.

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L’espace collectif, quant à lui, est un espace approprié, marqué, qui participe à une sociabilité d’un groupe d’individus. La notion d’espace collectif se différencie ainsi de l’espace public par le fait qu’il n’est pas nécessairement ouvert à tous : «Il est précisément le lieu dans lequel se construit l’identité des individus comme membres d’un même territoire» (Watin, 1993, p.65). La notion d’espace collectif peut ainsi être utilisée pour mettre en évidence un espace qui serait réservé à un usage de voisinage par exemple. Ici, le collectif serait donc constitué par les voisins. La notion d’espaces intermédiaires a été mobilisée par différents auteurs pour mettre en évidence des entre-deux. Selon Philippe Bonnin, il serait ainsi «l’un de ces objets fragiles qu’on aborde rarement en raison d’une complexité de construction, d’un flou ou d’une apparente indétermination, mais qui pourtant nous révèlent beaucoup sur les liens distendus et les affrontements changeants de nos sociétés » (Bonnin, 2005, p.131). Dans le dictionnaire de l’urbanisme et de l’aménagement de Pierre Merlin et Françoise Choay, ces espaces sont évoqués dans les termes suivants : « Entre l’espace public et l’espace privé proprement dits, l’architecture et l’urbanisme distinguent en outre, souvent, des espaces entre le public et le privé, mais ils seraient surtout des espaces à aménager « de façon à répondre aux exigences du rapport public-privé. Il s’agit généralement d’espaces privés visibles de l’espace public [...] ou d’espace de distribution situés entre l’espace privé et l’espace public» (Merlin & Choay, 2000, p.335). D’autres auteurs ont aussi montré que le statut juridique de ses espaces est ambigu. Bien qu’ils soient considérés parfois comme étant des espaces privés d’usage commun (Flamand, 2005), les espaces intermédiaires ne bénéficient pas d’une reconnaissance officielle, d’un point de vue juridique et institutionnel. De fait, comme l’ont montré Claire Lévy-Vroélant, « l’expression espaces intermédiaires relève clairement du vocabulaire des professionnels de l’architecture et de l’urbanisme, faute que les représentations vernaculaires de l’espace urbain et de l’habitat soient en mesure d’offrir des images bien établies et un statut reconnu des divers lieux auxquels cette expression renvoie » (Lévy-Vroélant, 2003, p.18). Outre les espaces communs, collectifs et intermédiaires, les espaces partagés sont à étudier dans cette volonté de distinction des différents termes qui apparaissent et qui induisent à une confusion si on ne les appréhende pas chacun de son côté. En effet, il s’agit des espaces que les individus partagent entre eux


mais aussi qui sont utilisés par différentes modalités de transport. Dans cette optique Nicolas Soulier distingue deux principes basés sur le partage: le «partage frontal» et le «partage modal» En effet, ce dernier consiste au partage de la voie de circulation entre différents modes de circulations. Le «partage frontal», quant à lui, est le partage de la rue entre domaine public et riverains (Soulier, 2012, p78). La municipalité de Londres définit également l’espace partagé, en lien avec le partage modal: «une rue ou un endroit conçu pour améliorer le déplacement et le confort du piéton tout en réduisant la prédominance des véhicules à moteur et permettent à tous les usages de partager le même espace»1. Ainsi, pour ces auteurs, l’espace partagé est surtout lié à la circulation. Dans cette optique, il est aussi bien un espace de vivre ensemble qu’un espace de division (Viala, 2014).

L’espace public a toujours été pour les gestionnaires et la plupart des concepteurs de la ville un outil pour créer du lien social, une identité, une qualité de vie. Aujourd’hui, cette notion d’espace public structurante est loin d’être acquise face aux «contradictions d’acteurs qui défendent à la fois la privatisation et l’espace public» (Tapie, 2007, p.2). L’apparition de nouvelles notions ou de nouveaux termes tels que l’espace commun, collectif, intermédiaire et partagé, montre que l’espace public au vrai sens du mot est en mutation. En fonction de la configuration du bâti, des composantes de l’espace privé et des usages, l’espace public n’assure pas toujours sa définition de départ. Ainsi, nous nous interrogeons sur une fin possible des espaces publics (Gasnier, 2016) et nous engagerons dans sa redéfinition dans le contexte particulier du pavillonnaire. Les notions que nous avons distingué dans cette première partie, vont nous permettre d’identifier la nature des espaces non bâtis du tissu pavillonnaire, en analysant les formes, les usages et les statuts juridiques. Notre hypothèse serait que dans le pavillonnaire, il existerait ces différents formes d’espace : quelle(s) définition(s) peut-on établir pour les espaces publics du tissu pavillonnaire?

1 Note relative au transport local d’octobre 2011, département des transports, Londres.

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Cette différenciation entre ces terminologies nous amène à conclure que, bien qu’ils présentent des différentes définitions, ils sont tous des espaces qui n’ont pas de statut juridique. Le seul dont le statut juridique est déterminé est l’espace public. Par conséquent, il n’y a pas nécessairement de correspondances systématiques entre les statuts fonciers (public, privé et leur combinaison) et les usages (public, public privatisé, privé, privé à usage public ou usage collectif).



2- L’espace public dans le tissu pavillonnaire : Quelle (re)définition ?

Le lotissement renvoie à la « division d’une propriété en vue de l’implantation de bâtiments, ayant pour objet, sur une période de moins de dix ans, de porter à plus de deux le nombre de parcelles constructibles » (Merlin & Choay, 2000, p.625). Pendant la période de l’entre-deux guerres, le législateur met en place des réglementations nécessaires aux divisions de propriétés pour éviter l’anarchie de la construction pavillonnaire due au développement des « lotissements défectueux » et à la présence des parcelles « mal-lotis » (Fourcaut, 2000, p.7-10). Cette nouvelle législation se met en place progressivement de 1919 à 1952. En effet, en 1919, la loi Cornudet1 est le premier texte qui a traité les lotissements (Gaudin, 1985). Puis, en 1924, une autre loi généralise le permis de construire pour les lotissements ce qui oblige le lotisseur, quelle que soit la taille du lotissement, à déposer à la mairie un rapport de projet. Ces lois ont limité la liberté de lotir en imposant une réflexion sur les équipements collectifs et en renforçant le lotissement comme une véritable opération d’urbanisme. Cette opération d’aménagement consiste ainsi à diviser une ou plusieurs propriétés foncières en parcelles – lots – vendues à des acheteurs souhaitant y implanter des constructions (Masboungi, 2008). Il s’agit généralement d’une initiative privée mais il existe aussi des lotissements communaux. Cette procédure concerne les opérations de logements individuels même si elle est utilisée pour des urbanisations denses. Un lotissement, pareil à un permis de construire, donne des informations sur les bordures, les stationnements, les plantations…etc. Il est accompagné par un dossier technique (assainissement, réseaux, hydraulique…) qui permet la consultation des entreprises et la mise en place d’un programme d’aménagement d’ensemble (PAE). Élément très important pour notre étude: les équipements collectifs du lotissement (rues, trottoirs, éclairages, réseaux…) sont souvent des équipements appartenant au domaine privé. En fonction de la décision des habitants, ils peuvent être ouverts ou fermés au public. 1 Loi Cornudet, 1919 (rectifiée en 1924) : oblige les communes de plus de 10 000 habitants de se doter d’un plan d’aménagement, d’extension et d’embellissement, impose la création d’équipements collectifs avant la commercialisation des parcelles, lors de la division du terrain, définit le lotissement comme une opération d’urbanisme privé, effectuée sous le contrôle de la puissance publique.

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L’espace public du pavillonnaire est lié à l’idéologie du pavillonnaire et aux règles qui le modèlent. En effet, l’ensemble des idées et des règles du pavillonnaire ont été fondées sur le principe de la propriété privée. Fort de ce constat, l’espace public du pavillonnaire pourrait être considéré comme le «reste» des opérations d’aménagement privées, comprenant les voiries, mais aussi les talus et parcelles inexploitées résultant des divisions foncières. Pour définir l’espace public pavillonnaire, il est donc nécessaire de définir les formes de division foncières telles que le lotissement, pour comprendre l’origine de ces nouvelles formes d’espaces.


On peut distinguer trois procédures pour la création de lotissements. Premièrement, dans le cas où le lotissement serait communal, la commune assure la constructibilité, le tracé et la viabilisation des terrains. Ils sont ensuite commercialisés sous forme de lots libres via des agences immobilières. Deuxièmement, dans le cas des lotissements privés, l’unité foncière de base est divisée lors de la transmission ou de l’aménagement par les promoteurs et les constructeurs. Enfin, Il existe des lotissements aménagés par des sociétés d’économie mixte (SEM) dans le cadre de vastes opérations, liées à des projets tertiaires ou de loisirs destinés à des populations plus favorisées (Rougé, 2012).

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Dans son article «Fermeture et ‘entre soi’ dans les enclavements résidentiels», Delphine Callen affirme que seules les voies accessibles au public peuvent éventuellement être rétrocédées à la collectivité a posteriori. Dans le cas de la création de lotissement, l’espace accessible au public (s’il n’est pas fermé) est bien souvent réduit à la voirie. En effet, l’ensemble des rues sont tracées par les lotisseurs, qui cherchent à rentabiliser leurs terrains au maximum et donc à minimiser la création d’espaces communs au profit des parcelles privées. La commune accepte la rétrocession de ces voiries seulement s’il est démontré qu’il y a un intérêt pour la collectivité1. Dans les cas où la commune accepte la rétrocession d’une voirie, l’espace public peut alors être redéfini au travers d’un réaménagement de la voirie par exemple. Dans le cas où la voirie appartient au domaine privé, les habitants décident de son accessibilité. Arnaud Gasnier a notamment mis en évidence les mutations de la conception et de la fonction des espaces publics dans le tissu pavillonnaire. Ces derniers reflètent la société dans sa manière d’interagir avec l’autre. Il rapproche le phénomène de privatisation de l’espace accessible au public à la question de l’enfermement résidentiel, de la séparation et de la sécession sociale. La résidentialisation s’inscrit également dans la continuité historique d’un mode de production libérale des quartiers urbains et d’un non-engagement très ancien, durable, de plus en plus assumé et revendiqué par la collectivité qui montre des réticences et/ou des difficultés à prendre en charge depuis un siècle la voirie privée et les réseaux de proximité dans les zones à mono-fonction résidentielle (Degoutin, 2006). L’enclavement résidentiel est alors décrit comme un processus « par lequel des groupes s’approprient de manière exclusive des espaces où s’exprime l’absence de référence à la société globale » (Navez-Bouchanine, 2002, p.8). Il interroge aussi la question des usages publics de l’espace.

1 D’après les paroles d’Eric Charmes lors de l’émission radio Quartiers en marges traitant le sujet des «Gated communities», diffusée le 03 avril 2018 sur France culture.


L’espace public pavillonnaire, tel qu’il le définit Arnaud Gasnier dans son article « De nouveaux espaces publics urbains? Entre privatisation des lieux publics et publicité des lieux privés », est l’espace collectif de gestion privée accessible et ouvert au public. Il s’agit de nouveaux lieux où les notions d’espace public et d’espace privé s’imbriquent (Gasnier, 2006). Le traitement de ces lieux reste identique qu’ils appartiennent au domaine public ou privé : la possibilité d’accessibilité qu’ils offrent exige un aménagement différent et une limite particulière entre l’espace des activités privées et l’espace des pratiques publiques.

L’espace public, selon Antoine Fleury, est un maillon essentiel de l’espace urbain, « une construction sociale », toujours « en cours de production » (idem, p.4). Les espaces publics sont ouverts au public quel que soit leur statut et leurs aménagements. Ils sont des espaces de pratiques publiques dont découlent des interactions sociales. L’espace public est ainsi le support de la genèse et du renforcement du lien social. L’espace public pavillonnaire tel qu’il est définit précédemment est différent de l’espace public urbain de la ville dense d’un point de vue formel et fonctionnel. Il est un nouvel espace public qui possède ses caractéristiques conceptuelles qui impliquent de nouvelles pratiques sociales. Dans la ville centre, l’espace extérieur par rapport aux bâtiment est public. Comme le souligne Stéphane Degoutin, l’espace public est «généré lors du développement de la ville et se développant au même rythme qu’elle, l’espace [il] coïncide avec le tracé des rues et reste lié organiquement à la structure urbaine» (Degoutin, 2006, p.53). Sa forme permet la continuité et l’ouverture du tissu urbain. Cependant, dans le tissu pavillonnaire, le tracé de l’espace public et celui de la rue ne sont pas superposés. En effet, la rue appartient souvent au domaine privé ou communal et elle n’intègre pas des fonctions diverses: elle assure seulement la fonction de circulation. Ainsi, là où ils existent, les anciens espaces publics, sont remplacés par des espaces privés.

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Dans son ouvrage La Fabrique de l’espace public. Ville, paysage et démocratie, Denis Delbaere définit les espaces publics des périphéries urbaines comme des espaces publics « émergents ». Ils présentent des nouvelles formes et une faible fréquentation. En plus des équipements publics tels que les parcs aménagés, les équipements sportifs et les voiries, l’auteur considère les espaces agricoles comme « de véritables parcs ruraux (…) investis discrètement, mais résolument, par les riverains » (Delbaere, 2010, p. 64). Tous les espaces publics du pavillonnaire se caractérisent par leur aspect ouvert, leur faible aménagement et leur possibilité d’accueillir une « sociabilité diffuse, c’est-à-dire compatible avec le besoin contemporain de vivre entre soi, à bonne distance d’autrui, ou à l’inverse dans une forme de promiscuité provisoire » (idem, p.59). Ainsi, « On peut faire l’hypothèse qu’il existe des formes de sociabilité et des espaces publics spécifiques dans les territoires périurbains, sachant que ceux-ci se caractérisent par de plus faibles densités humaines » (Fleury, 2013, p.2).


En effet, les fonctions qu’assure l’espace public urbain sont remplacées par des miniatures dans l’espace privé de l’habitat pavillonnaire: le jardin privé, la piscine, la télévision, les jouets installé dans le jardin, la terrasse...etc. Cependant, ce n’est pas l’existence de ces miniatures dans la maison qui détruirait l’espace public mais c’est plutôt son absence dans les quartiers pavillonnaires qui «rendrait nécessaire cette domestication» (idem, p.62).

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Forts de ces constats, il paraît nécessaire d’élargir cette vision de l’espace pour pouvoir comprendre ses usages et ses enjeux dans le contexte du pavillonnaire. Pour cela, nous proposons donc d’introduire la notion «d’espace d’un public». Nous désignons par ce terme tout espace accessible au public quel que soit son statut foncier. « L’espace d’un public» est celui où on peut circuler librement même si on n’habite pas dans le quartier traversé. Ainsi, nous considérons les espaces extérieurs privés et accessibles comme étant des « espaces d’un public » du moment où ils sont le support de l’activité publique et permettent la possibilité d’appropriation. L’accessibilité dans cette nouvelle définition ne signifie pas seulement la possibilité de traverser mais aussi la possibilité de voir, de regarder et d’interagir. L’intérêt de parler de «l’espace d’un public» réside aussi dans le fait qu’il met en évidence l’existence d’un voisinage, d’un rapport de proximité: il s’agit un groupe d’individu ou d’une micro-société qui devrait être (re)considérée dans un tissu pavillonnaire faisant face à un renouvellement urbain. «L’espace d’un public» est un espace du possible, c’est-à-dire un espace où il est possible de croiser l’autre, de regarder, de circuler, de passer, de s’arrêter et de parler. C’est là que les gens se mêlent les uns aux autres, conversent, jouent, mangent…C’est une composante importante non seulement du système de déplacement, mais aussi du tissu social. Ainsi, la possibilité d’établir des relations est le critère essentiel dans la définition de l’espace public du pavillonnaire qui se caractérise par l’accessibilité, la visibilité, l’observabilité, l’exposition et l’offre de sociabilité sans pour autant être forcément un espace appartenant au domaine public. De fait, «l’espace d’un public» n’existe pas dans le pavillonnaire «résidentialisé». En effet, la privatisation des lotissements les rendent inaccessibles au public. Par conséquent, les espaces extérieurs des maisons dans un lotissement résidentiel, sont plutôt de l’ordre des espaces collectifs et ne seront pas concernés par l’appellation d’«espace d’un public» précédemment définis. L’analyse de «l’espace d’un public» défini précédemment doit être croisée avec celle des « espaces intermédiaires » (Flamand, 2011) et des « frontages » (Soulier, 2012). Les espaces intermédiaires sont, en effet, les espaces qui séparent le domaine d’activités privées du domaine d’activités publiques. D’après nos observations sur le terrain, ces espaces intermédiaires permettent un usage collectif malgré leur statut juridique privé. Cela sera démontré dans la suite de notre travail par l’analyse du terrain pour mettre en évidence la différence entre le statut juridique de l’espace et ses usages.


Comme nous allons le voir dans l’analyse des enquêtes de terrain, «l’espace d’un public» du tissu pavillonnaire est formé essentiellement par les voiries liées aux lotissements. Bien que ces voiries appartiennent dans la plupart des cas au domaine privé, nous les considérons comme étant «des espaces du public» car il s’agit d’espace de circulation pour piétons et véhicules. Ces voiries sont le lieu de la vie commune du fait qu’elles ne sont pas d’usage privé, mais elles ne sont que rarement le support de la vie publique (on ne manifeste pas là par exemple). Elles sont plutôt le support de la vie commune car elles se caractérisent par : l’identité (un sentiment d’appartenance au lieu et des relations de voisinage) la civilité, la mobilité (un lieu de passage permettant d’aller d’un point à un autre) ainsi que la diversité (un espace urbain où tous les individus de la société peuvent se croiser) : il s’agit d’un espace d’accueil, d’imprévu et de différences (Clair, 2014). Il paraît donc pertinent d’affiner la définition de «l’espace d’un public» pour qu’elle rende compte des modes de vie des habitants du pavillonnaire. Cette nouvelle définition permettra ainsi de repenser l’espace public du pavillonnaire et pourrait, à termes, devenir une composante essentielle pour envisager le rééquipement de ces quartiers mono-fonctionnels, un point de départ pour repenser «un urbanisme pour les maisons» (Bauer & Roux, 1979). Afin de comprendre le contexte des mutations que connait «l’espace d’un public» dans sa forme, sa fonction et ses pratiques, il est primordial de comprendre la naissance du tissu pavillonnaire et ses transformations au cours du temps. Cette base de connaissances nous permettra de faire état, par la suite, d’une analyse typo-morphologique et sociale des «espaces d’un public» pavillonnaires.

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La notion du «frontage» est quant à elle plutôt utilisée dans l’urbanisme nordaméricain. Dans son livre Reconquérir les rues, Nicolas Soulier les définit comme étant la surface du domaine public de voirie entre le caniveau de la chaussée et la limite du trottoir côté des habitations. Selon cette définition, le «frontage» est constitué du trottoir, des arbres de rue, des lampadaires, des mobiliers urbains, et des bandes de terrains plantées. Pour Soulier, « le frontage public est cette partie de la rue, où les piétons circulent et accèdent aux propriétés et aux bâtiments riverains ; il constitue un des principaux éléments de l’espace public » (Soulier, 2012, p.126). Ainsi, «l’espace d’un public» du pavillonnaire englobe aussi bien les espaces du domaine public (équipements publics, parcs, jardins…) que les espaces du domaine privé accessibles au public.



Partie 2 L’ histoire de l’habitat pavillonnaire L’exemple des évolutions du quartier du Pont de l’Arc

« Les idéologies du pavillonnaire sont établies depuis longtemps. » (Haumont 1966)

© Safa Ben Khedher



1- L’imaginaire des pensées de la ville: quels fondements de l’habitat pavillonnaire?

En premier lieu, il est nécessaire de situer les conditions dans lesquelles se posent au XIXème siècle, les problèmes de l’aménagement urbain. En effet, la révolution industrielle est à la base de la genèse du « pré-urbanisme ». Elle s’est accompagnée d’une croissance démographique des villes ainsi que d’un développement à partir des années 1830. La transformation des moyens de transport et l’apparition de nouvelles fonctions urbaines ont aussi contribué à l’éclatement des centres urbains. Comme l’explique Françoise Choay, « un nouvel ordre se crée, selon le processus traditionnel de l’adaptation de la ville à la société qui l’habite » (Choay, 1965, p.11). Cet ordre se caractérisait par « la rationalisation des voies de communication » (idem), la distinction des secteurs urbains selon leurs fonctions ainsi que la croissance de la périurbanisation. Comme le soulignait ainsi Choay, « l’industrie s’implante dans les faubourgs, les classes moyennes et ouvrières se déversent sur les banlieues et la ville cesse d’être une entité spatiale bien délimitée » (ibid). La société industrielle a été globalement critiquée pendant le XIXème siècle par les théoriciens tels que Charles Fourier dans son ouvrage De l’anarchie industrielle et scientifique (1847) et aussi Matthew Arnold dans son livre Culture et anarchie (1869). Plus tard, pendant le XXème siècle, le désordre urbain du développement de l’urbanisme industriel ne cesse également d’être critiqué, notamment par Gropius et Lewis Mumford, qui évoque le « non-plan of the non-city » (Mumford, 1932, p.183). Par opposition au désordre de la ville industrielle, deux propositions de modèles urbains ont alors vu le jour. Tout d’abord, on note le modèle progressiste qui a été définit à partir des caractéristiques de « l’homme-type », ses besoins et ses goûts. Il s’agit d’un modèle type qui peut être appliqué à « n’importe quel groupement humain, en n’importe quel temps, en n’importe quel lieu » (Choay 1965 p.17). Il s’agit ainsi d’un modèle obéissant aux exigences de l’hygiène, ouvert, composé de vide et de verdure. En outre, il se caractérise aussi par une distinction des lieux selon les fonctions humaines : lieux d’habitat, de travail, de loisir, de culture,…etc. Ce modèle a notamment été critiqué pour la rigidité qu’il présentait, qui ne permettrait pas son adaptation aux contextes. Les ensembles urbains seraient figés et prédéfinis, ce qui ne leur permettraient pas d’évoluer dans le temps. Comme le souligne Choay, ce modèle mettrait ainsi en place « des systèmes contraignants et répressifs » (idem, p.19)

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Pour bien appréhender le développement du tissu pavillonnaire, il importe d’analyser et de comprendre les idées qui ont été à la base de l’urbanisme. Il s’agit des réflexions et des propositions théoriques qui ont vu le jour sous le concept de « pré-urbanisme » et qui ont construit un cadre de références à partir duquel s’est développé l’urbanisme en tant que discipline.


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À l’opposé, se développe à la fin du XIXème siècle le modèle «culturaliste». Celui-ci a notamment été défendu par Ebenezer Howars, le fondateur du modèle de la cité-jardin1. Ce modèle n’a pas comme point de départ l’individu mais plutôt « le groupement humain », la cité : chaque individu est considéré comme une entité irremplaçable de la communauté. Ce modèle se caractérise par une série de concepts qui montrent l’opposition idéologique avec le modèle mécanique: organique et mécanique, qualitatif et quantitatif, participation et indifférence (ibid, p.21). Contrairement au modèle progressiste, le modèle culturaliste n’est pas fondé sur des prototypes, mais sur des spécificités. Dans cette optique, Engels et Marx ont critiqué les villes industrielles sans proposer de modèles dans la perspective d’une action transformatrice. Selon eux, l’avenir reste ouvert et évolutif. Les modèles pour eux seront trop déterminés et, de fait, inadaptés au développement économique et social de l’avenir. Malgré cette volonté « d’indétermination », on retrouve chez eux une image de la « villecampagne résultant de la suppression de la différence entre la ville et la campagne» (ibid, p.27). Pendant la même époque, aux Etats-Unis, la révolution industrielle donne naissance à un courant anti-urbain liée à « l’image d’une nature vierge ». Il s’agit d’une volonté de restaurer une sorte d’état rural qui serait pour eux « compatible avec le développement économique de la société industrielle » (ibid, p.29). Ainsi, l’anti-urbanisme américain a eu une influence sur l’urbanisme du XXème siècle. À ces modèles caractéristiques du pré-urbanisme ont succédé d’autres modèles : ceux de l’urbanisme2 en tant que discipline. Par exemple, le modèle progressiste a notamment été interprété par Tony Garnier dans La cité industrielle. Celle-ci a notamment influencer les architectes dits « rationalistes »3. À la suite de ce premier manifeste, la Charte d’Athènes a été rédigée en 1928, par les membres les plus actifs des C.I.A.M (Congrès Internationaux d’Architecture Moderne) notamment Le Corbusier. Elle distingue notamment les grandes fonctions des besoins humains universels : habiter, travailler, circuler, se cultiver. Ce modèle conduit à un espace homogène, indépendant par rapport à son site. Il s’agit d’une « ville-outil » conçue dans un objectif d’efficacité. 1 Ebenezer Howard publie en 1898 Tomorrow, dont la 2ème édition portera le titre Garden Cities of Tomorrow, et sera traduit en français dès 1902, sous le titre Villes-Jardins de demain. Par ses appartenances socialistes et son caractère utopique d’une part, par son retentissement pratique immédiat sur la création des premières garden-cities anglaises d’autres part, cet ouvrage constitue une véritable charnière entre le pré-urbanisme et l’urbanisme. 2 L’urbanisme diffère du pré-urbanisme sur deux points importants : «Au lieu d’être l’œuvre de généralistes (historiens, économistes ou politiques), il est celle des spécialistes (architectes) qui apparaît sous les deux formes théorique et pratique» (Choay, 1965, p.30).. 3 Le concept d’architecture rationaliste a été utilisé par les historiens de l’architecture pour désigner «le mouvement qui s’affirma, après la guerre de 1914, en faveur des formes pures (contre l’Art nouveau et sous l’influence du cubisme)» (Choay, 1965, p.31).


En parallèle, le modèle culturaliste du pré-urbanisme trouve son similaire à l’époque de l’urbanisme. Cependant, il n’a été peu représenté en France. Parmi ses fondateurs on retrouve l’urbaniste autrichien Camillo Sitte en 1889, puis les préurbanistes tels que Ebenezer Howard en 1898 avec le modèle des cités-jardins et enfin l’architecte urbaniste Raymond Unwin qui a réalisé avec Parker la cité-jardin anglaise de Letchworth : la seule ville entièrement fondée sur ses principes (voir figure 3).

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Ce modèle se caractérise par une réflexion globale sur la communauté plutôt que l’individu et le concept de la cité plutôt que la ville. Il se distingue par la mixité programmatique, l’articulation entre les fonctions au travers des espaces publics hiérarchisés (voir figure 4). Comme l’a souligné Choay, « Chaque cité occupe l’espace de façon particulière » en mettant l’accent sur les facteurs sociologiques. Elle ajoute pour distinguer la conception de la rue qu’au lieu de « l’espace abstrait, éclaté […] un espace concret, découpé dans la continuité d’un fond d’édifices. […] La rue est un organe fondamental, les formes directrices ne sont plus celles des édifices mais celles des lieux de passage et de rencontre » (Choay, 1965, p.44).

[3] Plan originale de Letchworth, 1904. https://digital.library.cornell.edu/catalog/ss:575323, consulté le 21 mars 2018


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[4] La cité-jardin d’Ebenezer Howard Diagrammes de développement d’une ville. http://urbanplanning.library.cornell.edu/DOCS/howard.htm, consulté le 21 mars 2018


De plus, un nouveau modèle apparaît pour mettre en évidence les idées du courant anti-urbain américain : le modèle naturaliste. Il a été élaboré sous le nom de Broadacre-City par Frank Lloyd Wright dont les caractéristiques ont été décrites dans son livre The disappearing City dès 1932. Ce nouveau modèle est fondé sur le principe que « la grande ville industrielle est accusée d’aliéner l’individu dans l’artifice. Seul, le contact avec la nature peut rendre l’homme à lui-même et permettre un harmonieux développement de la personne comme totalité » (idem, p.46). Ainsi, il établit un rapport fondamental avec la nature. On parle ici aussi de la notion de cité dont la nature est un milieu continu dans lequel les différentes fonctions forment des unités réduites. Ces cellules sont reliées entre elles par un réseau routier circulatoire désenclavant l’ensemble (voir figure 5). Le modèle naturaliste est à la fois « ouvert et clos, universel et particulier » (ibid, p.47). Il associe architecture, environnement et topographie. Il s’agit d’établir un rapport entre la ville et la nature.

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Les modèles utopiques pensés au XIX ème siècle, comme réponse à la révolution industrielle, ont contribué à la forme actuelle du pavillonnaire. En effet, l’habitat pavillonnaire prend ses sources de ces deux utopies: Les cités-jardins et Broadacre-City.

[5] Broadacre City, Frank Lloyd Wright Dossier d’architecture, vol.7, avril, 1935.



2- L’habitat pavillonnaire entre définition et types de formes

L’habitat pavillonnaire est un type particulier de résidence : le pavillon avec jardin, généralement situé dans la périphérie des villes. Le tissu pavillonnaire est le reflet de l’histoire politico-économique et sociale des villes et est apparu dans des différentes formes. Les origines du pavillon remontent au début du XIXème siècle face à la croissance de la population, l’industrialisation et les migrations vers les villes, couplés au développement du chemin de fer dans les environs de Paris à la fin des années 1830 (Haumont, 1966). D’après le Petit Robert, la notion de pavillon est avant tout qualitative. En effet, « pavillon » a une origine latine « papilio, onis » qui signifie papillon. Cette structure est liée à la légèreté. Le Petit Robert note un usage dès 1566 qui définit le pavillon comme étant « un petit bâtiment isolé, petite maison dans un jardin, un parc ». Le pavillon présente un rêve de nature et de «tranquillité» (Pinson & Thomann, 2002) pour les citoyens. Ce dernier est un élément complexe de la ville. Il a plusieurs définitions dont celle du dictionnaire Littré est : «Le pavillon est un logement portatif qu’on peut dresser partout et pour toutes sortes de gens, mais il est plus particulièrement employé par les gens de guerre. En termes d’architecture, il s’agit d’un corps de bâtiment, ordinairement carré, dont la forme est semblable aux pavillons d’armée». Comme l’a récemment souligné Daniel Pinson, architecte et docteur en lettres et sciences humaines,« dans le contexte des années 1970-1980, le pavillon exprime, pour les ménages modestes, des rêves d’évasion et de nature. La croissance des villes, leur mécanisation et les nuisances nouvelles qu’elle entraîne les rendent plus difficiles à vivre » (Pinson, 2017, p.9). Sur la base de ces définitions, nous pouvons à présent nous interroger sur la manière dont s’est développé le pavillonnaire. En effet, Marie-Geneviève Raymond dénombre trois types de formes. • Tout d’abord, elle identifie les « maisons de plaisance » de la noblesse puis de la grande et de la moyenne bourgeoise pendant la deuxième moitié du XIXème siècle (Raymond, 2001, p.32). Elles prenaient la forme de la maison de campagne ou pavillon de chasse dans une recherche de prestige et de salubrité. Il s’agit d’une des préfigurations de la forme du pavillonnaire dont un strict cahier de charge permettait la préservation des espaces communs et la normalisation des espaces privés. Les propriétaires assurent la gestion et l’entretien de l’ensemble. Le pavillon de plaisance est réalisé pour et par les gens les plus aisés. Ces derniers s’installent dans des lieux stratégiques tels que les bords de rivière pour pique-niquer, les vallons et toujours à proximité des infrastructures. Ainsi, le paysage change sous l’impact de ces pavillons de très bonne qualité. Leur architecture est riche de significations représentatives de l’ascension sociale (Verges, 2007).

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Appréhender l’espace public du pavillonnaire, nommé ici «l’espace d’un public», nécessite la compréhension de ce tissu particulier qui a fait que cet espace est différent de celui de la ville dense. Avant de commencer à l’analyser dans ces différentes dimensions, il est important de se pencher sur l’histoire de l’évolution de l’habitat pavillonnaire et de s’interroger en premier lieu sur ce qu’est le pavillon.


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• Ensuite, Marie-Geneviève Raymond a identifié le «logement patronal » construit pour les ouvriers en réponse au développement de l’industrie en France à partir de 1837. Il s’agit ici de résidences principales pour loger les catégories populaires. Dans certains cas, l’habitat individuel, en particulier l’accession à la propriété, est apparu comme une solution pour stabiliser la population ouvrière. En effet, comme l’a analysé Henri Raymond, « en rendant l’ouvrier propriétaire, la société Mulhousienne a rendu un grand service. Elle a fixé l’ouvrier nomade, l’a attaché à son pays, lui a fait comprendre le but de l’épargne, lui a donné avec le goût de la propriété l’habitude des efforts persévérants et féconds » (Raymond, 2001, p.33). Contrairement aux maisons de plaisance, le logement patronal se caractérise par sa simplicité et sa sobriété. Il est plus dense et les pièces d’habitation sont orientées vers la rue ce qui favorise la vie collective. En fonction de leurs besoins, les habitants de ces pavillons les ont transformés a posteriori (extensions). Par ailleurs, les logements ouvriers ont généralement été construits sur des terrains peu chers, proches des industries et parfois éloignés des services, alors que les maisons de plaisance étaient souvent construites sur les meilleurs emplacements. • Enfin, le « logement marginal » présente le dernier type de forme pavillonnaire. Il s’agit de la construction ou de l’auto-construction d’une maison en périphérie. Ces pavillons se développent en lotissement1 (unité foncière divisé en lots) ou en une trame libre (construction de maison parcelle par parcelle sans plan d’ensemble). Il s’agit de deux modes d’urbanisation du tissu pavillonnaire qui connaissent un changement du statut foncier de terrains agricoles ou d’anciennes propriétés bourgeoises en terrains constructibles (idem, p.34). De nombreuses maisons individuelles et lotissements se développent ainsi à la fin du XIXème siècle après la Première Guerre mondiale, sans prendre en considération les réglementations et la viabilité du terrain. Afin de combattre l’anarchie que l’insalubrité liées au développement de ces maisons et lotissements, des réglementations voient le jour pour le contrôler et le maîtriser. D’abord, en 1908, on note la première loi Ribot puis en 1912 la loi Bonnevay qui permet la création des Offices Publics d’Habitation à Loyer Modéré (HLM). Ensuite, en 1922, la deuxième loi Ribot met en place une aide de l’État auprès des petits propriétaires fonciers ayant des difficultés à construire. En 1924, la loi Le Cornudet oblige à fournir des plans d’aménagement communaux pour les nouveaux lotissements pavillonnaires. En 1928, la loi Sarraut institutionnalise une aide de l’État pour l’aménagement des lotissements suite à l’augmentation des mal-lotis. La même année, la loi Loucheur prévoit la création de 100 000 petits propriétaires en 5 ans par extension de la possibilité du financement par l’État. Daniel Pinson revient d’ailleurs sur ce lien entre l’évolution de la réglementation et celle du «pavillon», expliquant que le pavillon « est, en terre métropolitaine, le produit dérivé de l’évolution d’un impérialisme qui aura nourri, en moins d’un siècle, une petite bourgeoisie servie, dans ses projets d’accession, par la loi Loucheur de 1928 et, avant elle, par un actif développement des compagnies de chemins de fer » (Pinson, 2017, p.5). 1 L’article R315-1 du Code de l’urbanisme défini le lotissement comme « toute division d’une propriété foncière en vue de l’implantation de bâtiments qui a pour objet ou qui sur une période de 10 ans a eu pour effet de porter à plus de deux le nombre de terrains issus de ladite propriété. »


3- Des utopies urbaines au réalité du pavillonnaire : quelle histoire? Aujourd’hui, la forme pavillonnaire découle de la combinaison de ces différentes formes anciennes. Le pavillon actuel est alors une forme de la maison individuelle. « La maison individuelle périurbaine serait devenue la réponse à une aspiration à la tranquillité, permettant de mettre à distance le voisinage» (Vernay, 2004, p.45). En effet, la recherche du calme est exprimée par tous les habitants du pavillon quelque soient leurs âges et leurs professions. (Frileux, 2010).

Dans son ouvrage La ville fragmentée, le lotissement d’hier et d’aujourd’hui, Guy Burgel considère effectivement le lotissement comme la « non-ville » du point de vue discontinuité formelle et caractéristiques sociodémographiques (Burgel, 1989). Dans cette même optique, Jean-Pierre Frey dénonce le lotissement en tant qu’un «signe de mort de l’urbanité» (Frey, 1986, p.21). Comme l’a évoqué Frédéric Ramade, le lotissement est« né comme processus ségrégatif par l’espace, par la forme architecturale et le mode de production du logement, le lotissement ne serait pas ce grain non assimilable, mais porterai en germe la reconstitution de l’intégrité urbaine» (Ramade, 2007, p.2). Aujourd’hui, malgré le force des critiques, le développement pavillonnaire fait l’objet de deux courants de pensées opposés : l’un posant le pavillonnaire comme un mal pour la ville, l’autre cherchant à en montrer les qualités. En effet, d’autres auteurs le voient davantage comme étant une « ville émergente » (Dubois-Taine, 1998) ou une « invention de la ville » (Chalas, 1998). Comme le montre Dodier « La controverse porte principalement sur deux aspects : d’une part sur la capacité des espaces périurbains à participer à la nouvelle norme du développement durable; d’autre part sur la lecture de la vie périurbaine comme caractéristique d’un repli domestique ou de la montée d’un individualisme de nature à remettre en cause les bases même du « faire société» (Dodier, 2007). Ainsi, ce débat montre bien que, le pavillonnaire, comme tout type de tissu urbain, présente des qualités et des faiblesses. Cependant, il est aujourd’hui nécessaire de dépasser cette opposition «pro» ou «anti» pavillonnaire, en le considérant, de par son étendu et sa croissance, comme un territoire de projet à explorer. Il devrait être effectivement considéré comme « un agrégat de situations

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Les ensembles de maisons individuelles sont nommés différemment « lotissements résidentiels», « résidences pavillonnaires »,« nouveaux villages»…etc. Le terme le plus utilisé pour les qualifier est «lotissement» (Paquot, 2009) qui est communément défini comme une unité foncière divisée en parcelles occupées par des maisons individuelles avec jardin d’une certaine homogénéité architecturale et qui se caractérisent par un système de voirie en impasse, en boucle,…etc (Mangin, 2005). David Mangin affirme à ce propos : «cette acception [lotissement] désigne aujourd’hui, par métonymie, l’implantation de produits homogènes et fermés sur eux-mêmes » (Mangin, 2004, p.174). Comme en témoigne de cette citation, l’homogénéité sociale du pavillonnaire a souvent été l’une des principales critiques de ce type de tissu. Celle-ci est souvent couplée à la critique de l’homogénéité fonctionnelle et architecturale, puisqu’ils s’agit d’espaces exclusivement résidentiels même si on trouve parfois des espaces récréatifs, notamment dans les plus aisés (tels que le tennis, le golf, la piscine).


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urbaines distinctes mais reliées de façon fluide et ouverte » (Delbaere, 2010, p.75). Depuis plusieurs années, la pavillonnaire est devenu un terrain particulièrement intéressant, considéré comme un «espace laboratoire» (PUCA, 2013) de par la disponibilité du foncier, sa densité faible par rapport aux centres des villes, ses avantages économiques (Castel, 2011), ses qualités écologiques (Frilieux, 2013; Arnaud, 2014), architecturales et urbaines ainsi que sa capacité à devenir un «laboratoire de la réalisation de relations sociales et locales» (Dodier, 2012, p.6). Il s’agit aujourd’hui d’un type d’espace qui présente de fortes dynamiques du point de vue démographique et économique. Dans cette perspective, le renouvellement des tissus pavillonnaires est au coeur des réflexions sur la fabrique d’une ville durable et d’un développement soutenable. Dans son ouvrage La biorégion urbaine, Alberto Magnaghi définit la soutenabilité des villes contemporaines comme étant la convivialité et le frugalité. En effet, la convivialité consiste à la mise en place des espaces publics de mise en relation et en interaction des habitants. La frugalité, quant à elle, consiste au développement d’un processus de développement de la ville permettant de lutter contre l’étalement urbain et donc économiser les terres et les protéger de l’artificialisation (Magnaghi, 2014). Ainsi, ces deux principes de convivialité et de frugalité, en rapport avec les dynamiques sociales et économiques que présente aujourd’hui le tissu pavillonnaire font l’objet des réflexions sur ce tissu pourrait devenir un axe de développement des villes contemporaines. Nous nous intéressons dans ce mémoire plus spécifiquement à l’espace public qui résulte du développement de ce tissu urbain particulier par rapport à celui de la ville dense. Le quartier sur lequel portera notre analyse est le quartier du Pont de l’Arc au Sud d’Aix-en-Provence. Ce secteur recouvre les quartiers Sud de la ville qui se sont étendus au-delà de l’autoroute A8 et de la rivière de l’Arc. Ce terrain est très intéressant à analyser, d’abord, du point de vue de sa distance par rapport à la ville centre (voir figure 6). Ensuite, ce quartier est un révélateur de certaines dynamiques urbaines vue l’histoire de développement progressif d’un tissu résidentiel depuis 1960 à partir d’un centre historique multifonctionnel ainsi que son origine agricole. De plus, il présente différents types de formes urbaines, entre noyau villageois, lotissement donnant sur un chemin public, lotissement donnant sur un accès privé, trame libre et ensemble résidentiel fermé. Cette richesse se manifeste aussi en terme de type de voiries en cas du lotissement, entre voirie en boucle, en impasse et voirie linéaire (voir figure 7). Outre ses caractéristiques spatiales, historiques et urbaines, le quartier du Pont de l’Arc possède des qualités environnementales vu l’existence un axe paysager structurant «l’Arc» ainsi de sa proximité des terres agricoles au Sud. L’ensemble des définitions que nous avons exploré jusqu’ici vont nous permettre d’analyser notre terrain d’étude et de définir «l’espace d’un public», à la fois d’un point de vue théorique et d’un point de vue empirique. Notre terrain d’étude est pertinent car il est un territoire en projet. Il s’agit d’un quartier en développement dans le cadre de la densification et l’intensification des territoires périurbains. Dans cette dynamique de renouvellement, il serait intéressant de s’interroger sur les évolutions et les mutations futures de l’espace public.


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1

2 0

0.5

1km

1 — Centre ville d’Aix-en-Provence 2 — Quartier du Pont de l’Arc

[6] Carte de situation du quartier de Pont de l’Arc à Aix-en-Provence Base de données de QGIS, consulté le 26 mars 2018



1 2 7 6

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3

4

5

0

500m

1 — Autoroute A8 2 — L’arc 3 — Route des Milles RD9 4 — Avenue Fortuné Ferrini RD8 5 — Chemin de la Plaine des des 6 — Mairie Annexe du Pont de l’arc 7 — École Pont de l’Arc

[7] Plan du quartier du Pont de l’Arc à Aix-en-Provence Base de données de QGIS, consulté le 26 mars 2018


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1

2

3

0

0.5

1km

1 — Carte de 1960 : le noyau historique au Nord d’Aix est lié au Sud par la voie majeure RD8n’ 2 — Carte de 1970 : l’apparition de l’autoroute A8 et le développement de l’urbanisme 3 — Carte de 1990 : le développement d e l’infrastructure, de l’urbanisme et de la périurbanisation

[8] Le développement de l’urbanisme à Aix-en-Provence www.geoportail.gouv.fr, consulté le 22 février 2018


4- L’histoire du quartier de Pont de l’Arc d’Aix-en-Provence

En 1930, le secteur du Pont de l’Arc est une zone agricole (voir figure 9.1). Comme l’a souligné l’un des habitants du quartier, «jusqu’à la sortie de la deuxième guerre mondiale, tous les terrains étaient des terres agricoles de jardinage en maraîchage. Ma famille était des maraîchers. Donc, c’était de la production vivrière, fruits et légumes, et tout était acheminé sur le marché d’Aix-en-Provence. Mes parents étaient déclarés exploitants agricoles : on avait de la vigne, des raisins de table, des oliviers sur 3 à 4 milles mètres carrés. On était plus sur quelque chose qui visait l’autonomie. Il y avait un canal qui serpentait presque partout et donc on pouvait irriguer principalement les terres qui étaient près du canal. On faisait des légumes, du blé, etc…et puis, sur les terres qu’on ne peut pas irriguer, on va mettre des vignes, des oliviers, du blé »1. Des bastides sont dispersées sur le site. Elles sont les habitations des propriétaires originaux des terrains agricoles. On y accède par des sentiers qui séparent les différentes parcelles. Les premières constructions se développent au carrefour de voies majeures allant vers Marseille (avenue Fortuné Ferrini) et vers les Milles (route des Milles): quelques immeubles de logement collectif bordent le côté Nord-Ouest de la RD8n avec, au rez-de-chaussée, des commerces et des services. Ils forment une centralité à l’entrée du secteur. Des équipements publics se trouvent à gauche de la RD9. Dans cette optique, l’habitant explique que « tout ce qui est aujourd’hui l’autoroute sous le pont de l’arc était des pâturages, il y avait des vaches. Jusqu’à la guerre, le pont de l’arc c’était juste les commerces, les immeubles qui datent des années 1950-1960, et jusqu’à la deuxième guerre mondiale, le Pont de l’Arc était juste 5 à 6 maisons mais rien de plus. »2. En 1955, les deux premiers lotissements apparaissent au Sud-Est de la RB8n (voir figure 9.2): il s’agit de l’impasse Bourrely et l’impasse des Rosiers. Ces deux lotissements sont desservis par des voiries en impasse : une qui appartient au domaine public, l’autre est une rue privée (voir figure 7). Ensuite, en 1960, deux lotissements s’implantent au Nord-Est de la RD8n tout près de la centralité commerciale. L’un de ses lotissements est desservi par une voirie publique en boucle. On accède à l’autre par une voirie privée en raquette. En plus des maisons individuelles, des commerces et services au rez-de-chaussée donnant sur la route principale ainsi que l’hôtel d’Olympe qui renforcent la centralité à l’entrée du quartier (voir figure 9.3).

1 Extrait de la retranscription d’un entretien avec Hubert, 55 ans, habitant du quartier et fils des propriétaires d’une ancienne bastide. 2 Ibid.

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Au XIXème siècle, seul le centre historique est bâti. A partir du début du XXème siècle, l’urbanisation s’étend jusqu’à l’autoroute et aux rives de l’Arc. Quelques lotissements se développent à côté du Pont de l’Arc, le reste du territoire conserve sa fonction agricole. L’urbanisation qui s’est développée dans la vallée de l’Arc est en continuité avec la couronne urbaine. Cet espace urbain est constitué par des équipements et de l’habitat sans structuration des espaces publics (voir figure 8).


Puis, en 1964, l’école primaire Pont de l’Arc apparaît au nord-ouest et une voirie en boucle s’implante au milieu du quartier : elle est celle du lotissement de la Clairnande (voir figure 9.4). Comme le souligne un habitant, « la grande urbanisation s’est faite suite à la reconstruction après la guerre mondiale, ça a pris vachement du temps, le pont de l’Arc a bougé dans les années 1960-1970 (...). A la fin des années 1960, les gens avaient de l’argent donc n’importe quel ouvrier pouvait se dire bon je peux me faire construire ma maison, je peux avoir ma maisons à moi et donc on a fait beaucoup de lotissement à plat. »1. En 1975, une forte infrastructure routière apparaît : l’autoroute2 A8. La mairie du Pont de l’Arc et le lotissement de la Clairnande sont construits (voir figure 10). En 1985, un lotissement apparait à l’Est de la route des Milles : le lotissement de l’Armelière (voir figure 11). En 1995, le quartier continue à se développer dans cette zone périurbaine. Un nouveau lotissement s’implante à l’Est de l’avenue3 Fortuné Ferrini (voir figure 9.5).

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Jusqu’en 2003, l’urbanisation du secteur du Pont de l’Arc augmente et on voit apparaître quelques nouveaux logements (les logements sociaux de la Grassie et la résidence Royal Garden) ainsi qu’un local associatif (la vie au sud). L’image du quartier n’a pas changé depuis cette date (voir figures 9.6 et 9.7). Aujourd’hui, le Pont de l’Arc est soumis à une forte pression foncière, puisqu’il est situé dans la première couronne périurbaine d’Aix-en-Provence (voir figure 9.8). Au Sud, on trouve le massif du Montaiguet et ses collines accueillant des espaces de campagne. Cette campagne garde ses éléments structurants tels que les bastides, les haies et l’organisation parcellaire. Le secteur du Pont de l’Arc est donc un espace de transition entre la ville dense et les espaces naturels. Il se caractérise par une urbanisation spontanée, c’est-à-dire une urbanisation qui ne résulte pas d’un plan d’aménagement d’ensemble dans toutes ses composantes architecturales, urbaines, environnementales et paysagères, malgré le fait qu’elle présente de grands équipements. La proximité de la ville a donc une influence plus forte que la proximité des espaces agricoles: c’est la ville qui s’étend sur les zones agricoles. 1 Extrait de la retranscription d’un entretien avec Hubert, 55 ans, habitant du quartier et fils des propriétaires d’une ancienne bastide. 2 Route à chaussées séparées, à accès limité à quelques points d’échanges avec la voirie ordinaire, sans aucun croisement à niveau d’autre voie, destinée à la circulation rapide et sûre des automobiles et motocyclettes, et permettant des débits élevés (1600 à 2000 automobiles particulières par piste), régies en France par la loi du 18 avril 1955. Les autoroutes peuvent être construites par les services publics (elles sont alors financées par l’Etat avec, en zone urbaine, une participation de 15 à 45% des collectivités locales, y compris les régions) ou par des entreprises privées concessionnaires qui remboursent les emprunts contractés par la perception de péages (Dictionnaire de l’urbanisme et de l’aménagement, sous la direction de Pierre Merlin et Françoise Choay). 3 De l’allemand Bollwerk, ouvrage de défense, fortification (XVème siècle), ce terme signifie d’abord le terre-plein d’un rempart, le terrain occupé par un bastion ou une courtine, il désigne ensuite la place forte, puis la promenade ou la large voie de circulation plantée d’arbres qui, sur l’emplacement de ses anciens murs ou fortifications, fait le tour d’une ville (idem).


Le paysage est marqué par la présence végétale. Les éléments de la trame végétale jouent un rôle important dans la composition des espaces agricoles, des espaces naturels et des espaces péri-urbains. Les arbres d’alignement bordent surtout les voies historiques telles que la RD8n et font partie de la trame de composition des bastides. Ces bastides ont conservé leurs éléments structurels. Elles sont considérées dans le PLU et par les habitants comme des éléments patrimoniaux et identitaires importants à préserver et à valoriser.

Plus tard, le quartier s’est développé: son urbanisation a commencé avant la construction de l’autoroute A7 mais cette infrastructure a particulièrement favorisé son expansion. Si l’autoroute constitue une véritable fracture entre le quartier du Pont de l’Arc et le centre-ville, il est pourtant intéressant de souligner qu’il n’est qu’à 4 kilomètres du centre. De fait, à pied, le centre-ville se trouve à 30 minutes du quartier. Cependant, nous allons voir que les infrastructures sont peu adaptées aux modes de déplacements doux et que les habitants s’y rendent en grande majorité en voiture. L’un des habitants considère que « les villes c’est un peu comme un cancer, quand on regarde ça vue de dessus, au fur et à mesure, vous avez des métastases et chaque fois on rajoute une couronne»1. Cet habitant, qui habite pourtant le quartier, voit l’urbanisation comme un cancer, notamment du fait de la disparition des terres agricoles. Or, ce même habitant souhaite vendre son terrain à un promoteur et contribuera à ce développement. On perçoit ainsi les paradoxes qui animent la fabrique de la ville. Le territoire continue en effet à se développer en fonction des opportunités foncières et financières, même si certains des acteurs ont conscience des effets négatifs d’une urbanisation sans limite.

1 Extrait de la retranscription d’un entretien avec Hueber, 55 ans, habitant du quartier et fils des propriétaires d’une ancienne bastide.

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L’analyse de l’évolution historique de ce quartier montre que les deux infrastructures qui liaient le Sud d’Aix-en-Provence au centre-ville (la RD8n et la RD9) ont été le support d’un fort processus de périurbanisation. Ces routes, qui avaient une fonction de passage au milieu des terres agricoles vers la ville dense, ont attiré un nombre d’habitants qui se sont installés aux alentours. Les premiers immeubles qui apparaissaient à l’entrée du quartier et à l’intersection de ses deux infrastructures routières forment le premier noyau périurbain : une extension de la ville. Les commerces et les services qui se trouvent aux rez-de-chaussée ont été pratiques pour les propriétaires des terres agricoles de par leur proximité. Les propriétaires habitaient les bastides qui se trouvent généralement au milieu des parcelles. Jusqu’ici, l’activité principale du secteur était l’agriculture.


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1 — Carte de 1930

2 — Carte de 1955

3 — Carte de 1960


4 — Carte de 1964

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7 — Carte de 1995

5 — Carte de 1975

8 — Carte de 2017 GRIS CLAIR — Anciens chemins et voiries GRIS FONCÉ — Autoroute A8 BLEU CLAIR — Rivière arc BLEU FONCÉ — Nouveau bâti ORANGE — Nouveaux chemins et voiries 0

500m

[9] Évolution historique du quartier du Pont de l’Arc depuis 1930 www.geoportail.gouv.fr, consulté le 22 février 2018 6 — Carte de 1985

Photos aériennes de bases en annexe, pages 171-174.


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D’après cette analyse historique du quartier du Pont de l’Arc, on peut conclure que l’espace public est particulier du point de vue des éléments naturels qui le constituent notamment l’Arc comme étant un axe structurant du quartier, mais aussi concernant son développement historique. En effet, au cours du temps, l’espace bâti prend place sur l’espace vide, généralement agricole. Ainsi, l’espace «public» du quartier ou plutôt «l’espace d’un public» comme nous l’avons définit précédemment, diminue au cours des constructions pour laisser place au tissu pavillonnaire. De plus, «l’espace d’un public» le plus ancien est celui du noyau historique: il s’agit de la rue et des équipements publics qui animent ce centre. Au cours de la périurbanisation, la voirie a progressivement constitué «l’espace d’un public» majoritaire du quartier du Pont de l’Arc sur des parcelles agricoles ou sur des anciens chemins1. En effet, comme on peut le voir sur la figure 10, les « espaces d’un public » sont principalement les rues publiques et privées traversant le quartier2. L’absence de stratégie d’ensemble fait qu’aujourd’hui, les espaces publics sont manquants, ou du moins insuffisants, en regard de l’échelle du quartier et de la population qui l’habite (environ 3000 habitants). Le quartier s’est ainsi construit au coup par coup, selon les opportunités foncières et les modes du moment. Comme on a pu le voir sur la figure 9, les voiries ont évolué au cours du temps : les lotissements en impasse à partir de 1950 et les lotissements en boucle à partir de 1960. Cette périurbanisation qui a pris place sur des anciennes parcelles agricoles conduit au morcellement de ces terres et à une discontinuité écologique. Ainsi, on observe sur le terrain que « les espaces des densités intermédiaires sont marqué par cette importance des espaces non nommés : délaissés d’infrastructure, espaces en attente de construction, interstices en friche. Ces espaces sont particulièrement nombreux » (Desjardins & Fleury, 2014, p.5). Fort de ce constat, il apparait intéressant d’interroger la capacité des «espaces d’un public» à intégrer les évolutions des territoires et des modes de vie dans le tissu pavillonnaire. Ainsi, la réflexion que nous entamons sur «l’espace d’un public» est une manière de confirmer la spécificité de «l’espace public» pavillonnaire par rapport à celui de la ville dense. Elle met en exergue l’apparition de nouveaux types d’espaces possibles et potentiels: on les nommes « espace d’un public» pour mettre en évidence la question primordiale de l’échelle dans cette nouvelle définition d’espace public attribuée au tissu pavillonnaire.

1 Voie, généralement de largeur réduite et sommairement aménagée, reliant des lieux, habités ou non, selon un itinéraire précis, repéré et mémorisé par la population qui l’emprunte. es chemins constituent à la fois un réseau servant aux transports et à la communication, mais aussi des passages marquant les frontières et les seuils entre deux communautés s’appropriant économiquement et symboliquement les espaces qu’elles gèrent (Dictionnaire de l’urbanisme et de l’aménagement, sous la direction de Pierre Merlin et Françoise Choay). 2 Dans le cas de la ville centre, les espaces accessibles au publics sont multiples. Outres les voiries, on note les places, les marchés, les commerces et services installés aux rez-de-chaussées, etc...Voir Annexe, Comparaison avec l’espace public en ville : entre forme, proximité et usages, p.168-169, fig 73.


- 61 0

200m

NOIR — Bâtiments privés, non accessibles au public GRIS FONCÉ — Parcelles non accessibles au public GRIS CLAIR — Parcelles non bâties, accessibles, libres ou agricoles BLANC — Espaces accessibles au public

[10] Plan Nolli: carte d’accessibilité au public Cartographie à partir de la visite du terrain



Partie 3 L’espace d’un public dans le quartier du Pont de l’Arc Entre forme, usage et statut.

« Les modes d’habiter périurbains se caractérisent par une grande diversité qui permet d’abandonner l’idée de l’existence d’un archétype de l’habitat du périurbain.. » (Dodier 2013)

© Safa Ben Khedher



[11] Photo aérienne du quartier du Pont de l’Arc www.geoportail.gouv.fr, consulté le 10 Avril 2018


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0

200m

BLEU — Domaine public (voiries) ORANGE — Voiries et chemins privés GRIS — Divisions parcellaires BLANC — Parcelles privées

[12] Carte du foncier: entre le domaine privé et le domaine public Cartographie à partir du cadastre, www.geoportail.gouv.fr, consulté le 22 février 2018


Revenir sur l’histoire de l’habitat pavillonnaire, en lien avec celle du quartier du Pont de l’Arc, nous a permis d’aboutir à une considération générale entre la définition de «l’espace d’un public» et le développement du tissu pavillonnaire. Nous allons à présent analyser plus en détail «l’espace d’un public» pavillonnaire, notamment au plan formel, réglementaire et de l’usage. Pour cela, nous proposons d’analyser finement le quartier du Pont de l’Arc tel qu’il se compose et se pratique aujourd’hui.

Les espaces de statut public qui se trouvent dans le quartier sont soit les équipements publics (le bâti) tels que la mairie du Pont de l’Arc, la poste, l’école primaire, soit l’espace public (le non-bâti) tel que le petit jardin d’enfant et les routes RD8n et RD9 qui forment la desserte du quartier et qui présentent un flux de circulation important. La desserte interne des ensembles résidentiels et des lotissements relève plutôt du domaine privé. En effet, dans seulement trois lotissements, les voiries appartiennent au domaine public1. Ainsi, les voiries qui appartiennent au domaine public ne représentent que 30% de l’ensemble des voiries (voir figure 12). Le reste, relevant du domaine privé, peut être accessible ou non. Lorsqu’elles ne le sont pas, elles ont fait l’objet d’un processus de résidentialisation, tel que nous l’avons mentionné précédemment (voir figures 13 et 14). A partir de l’analyse du système viaire dans le quartier du Pont de l’Arc, on constate que les liens d’une voie à l’autre sont inexistants et donc le système de voiries ne constitue pas un véritable maillage de quartier. On note aussi l’existence de certains accès directs donnant sur des chemins de campagne ou encore des voies ou passages privés. Le maillage viaire est donc très cloisonné d’autant plus que les voies communales qui forment un réseau inachevé : l’inverse de la ville passante (Mangin, 2004) et poreuse (Vigàno & Secchi, 2009). Pour l’expliquer, nous allons revenir plus en détail sur les processus de résidentialisation, puis nous expliquerons en quoi la réglementation détermine la nature des espaces pavillonnaires.

1 Nous avons montré, au travers de la comparaison avec l’espace public de la ville centre, que toutes les voiries du centre historique d’Aix-en-Provence appartiennent au domaine public. Voir en annexe, la Comparaison avec l’espace public en ville : entre forme, proximité et usages, p.168-169, figure 73.

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1- Les statuts de cet espace dans le pavillonnaire : entre structure foncière et réglementation.


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[13] Un ensemble résidentiel fermé dans le quartier du Pont de l’Arc © Safa Ben Khedher, prise le 08 mai 2018


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[14] Les marquages de la rÊsidentialisation dans le quartier Š Safa Ben Khedher, prise le 08 mai 2018



a- La résidentialisation La notion de résidentialisation apparaît dès 1995 en lien avec les grands ensembles et «constitue le dernier avatar linguistique en date de cette question aporétique et mythique des espaces intermédiaires» (Moley, 2003, p.154). Le phénomène de résidentialisation confère un statut de limite des espaces intermédiaires.

Ainsi, la fermeture résidentielle présente des avantages pour les habitants de l’ensemble résidentiel fermé ou ceux du lotissement fermé. Elle garantit la sécurité des biens et des personnes, évite les problèmes de stationnement des véhicules, assure la gestion privée ou communautaires des espaces communs, ce qui prive les pouvoirs publique de la charge de cette gestion. Ce phénomène répond à un besoin de tranquillité et caractéristique des habitations des pays du Sud par opposition à une ouverture et une continuité visibles dans les pays du Nord. En effet, en évoquant l’accessibilité dans le territoire américain, Stéphane Degoutin note: « un Européen, au contraire, sera surpris qu’on ait pu produire une ville de 12 millions d’habitants à partir de maisons individuelles directement ouvertes sur la rue » (Degoutin, 2006, p.48). En France, les aspects positifs de la résidentialisation ont été mis en avant dans différents documents. Par exemple, dans le rapport Grosdidier à l’Assemblée Nationale n°997, la résidentialisation est définie comme étant un phénomène qui consiste à « donner un caractère privé à un ensemble résidentiel, par exemple en posant des grilles à l’entrée ou en aménageant un jardin au pied de pied de l’immeuble, permet une appropriation par ses habitants » (Grosdidier, 2003, p.20). Cette définition met particulièrement en avant la possibilité qu’offre la résidentialisation de s’approprier les « abords du chez-soi », c’est-à-dire les espaces intermédiaires tels que définis par Christian Moley. De même, l’Agence Nationale de Rénovation urbaine, valorise les avantages de la résidentialisation, en identifiant les « 5 piliers d’une réactualisation réussie » : un aménagement des entrées, une identification plus forte de chaque bâtiment, un renforcement du sentiment de sécurité ainsi que l’association des habitants à l’élaboration de nouvelles règles communes.

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La résidentialisation est un phénomène qui est apparu pour différents raisons. D’abord, il répond à des besoins de sécurité des habitants ainsi que des problèmes de stationnement. En effet, en 1998, un article du journal La Provence intitulé «Ces résidences qui se ferment à double tour» associe la clôture résidentielle et les problèmes de sécurité: «résidences bouclées, visiteurs sélectionnés, les Marseillais s’enferment, les problèmes de stationnement et la peur des vols encouragent le développement des portails automatisés». Au delà des motivations sécuritaires, les enjeux son davantage fonctionnels qu’il s’agisse de la sécurité des enfants, de la tranquillité des habitants et de la gestion ainsi que l’entretien des espaces communs. Nicolas Soulier met en évidence que cette gestion pose la question de «la capacité publique à la garantir et celle de la nécessité de recourir à des solutions individuelles, résidentielles relevant de la compétence des structures privées telles que la copropriété, les associations syndicales, ...etc» (Soulier, 2012, p.116).


Cependant, la résidentialisation, que ce soit à l’échelle du lotissement ou de celui de l’ensemble résidentiel, est considérée par certains auteurs comme représentative de l’incapacité de l’État à assurer la sécurité de ses citadins. Comme le montre Stéphane Degoutin, «Le succès de cet argument sécuritaire exprime finalement l’échec des politiques publiques qui n’arrivent pas à policer la société, non pas à la fliquer, mais à garantir la sécurité des personnes et des biens» (Degoutin, 2006, p.52).

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Pour d’autres auteurs, ce phénomène est significatif d’une forme de «repli communautaire», qui serait due à la délimitation et la privatisation des usages de portions d’espace urbain. Il s’agit de la fragmentation sociale et gestionnaire de la ville. Dans cette optique, les journalistes, architectes, photographes qui évoquent le sujet dans les médias insistent sur ce risque social. Ces contrastes dessinent une «dualité entre le nord populaire et le sud aisé qui recoupe une différence d’intensité de la fermeture résidentielle» (idem, p.56). L’enclavement résidentiel est aussi à l’origine des problèmes de discontinuité urbaine et de mobilité piétonne. En effet, il s’agit des impacts de la fermeture de l’espace par différents dispositifs qui imposent des détours, limitent les cheminements de proximité et la porosité des quartiers. Ainsi, la résidentialisation restreigne l’accessibilité aux espaces collectifs et augmente l’usage de l’automobile pour des courtes distances (Mangin, 2004). Dans l’esprit du développement durable du territoire, de la réflexion sur la continuité de la trame verte et bleu, de la vie sociale ainsi que la proximité des territoire, leur accessibilité et leur continuité urbaine, environnementale et biodiversitaire, il paraît nécessaire de penser la perméabilité de l’espace urbain, les cheminements piétons de proximité . Ainsi, il est primordial de réfléchir à une alternative à ce phénomène de résidentialisation en questionnant le devenir des urbanités des villes fragmentés.


b- La réglementation et la nature des espaces pavillonnaires. Le pavillonnaire, comme toute forme urbaine prend forme dans un cadre réglementaire. Pour analyser les espaces produits, il est important de connaitre et analyser les règles qui l’ont modelé, ainsi que celles qui sont énoncées à posteriori, en vue de le transformer. Le PLU, instauré par la loi SRU de 2000, est constitué de zones qui contiennent des articles spécifiques qui fixent le cadre de leur évolution. Les 14 articles permettent de maîtriser l’évolution de la forme du pavillonnaire : les clôtures, les marges de recul, l’implantation par rapport aux limites séparatives, les espaces libres et les plantations.

Selon la définition précédemment donnée à l’espace public pavillonnaire, notre étude porte sur l’ensemble des voiries et des «espaces d’un public» indépendamment de leur structure foncière. On analysera les espaces accessibles au public spatialement et visuellement où l’on peut établir des relations et des interactions avec l’autre et la collectivité. On s’intéressera notamment au caractère d’accessibilité car on a démontré dans la première partie de ce mémoire qu’il est un critère sur lequel l’ensemble des théoriciens s’accordent pour définir l’espace publics malgré ses multiples définitions. Pour comprendre les enjeux des «espaces d’un public» du tissu pavillonnaire, nous essayerons de confronter leurs statuts fonciers à leurs typologies et leurs caractéristiques formelles. Dans le chapitre suivant, nous apporterons des éléments aux questions suivantes: quels sont les caractéristiques typo-morphologiques des «espaces d’un public» pavillonnaire? Et quel rapport existe-t-il entre leurs statuts, leurs formes et leurs usages?

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La réglementation est, entre autre, à l’origine du rapport entre les habitants et les espaces publics car elle contribue à des formes et des qualités urbaines particulières dans le but de les organiser. En effet, les règles conduisent à faire de «l’urbanisme réglementaire» pas forcément adapté aux pratiques et à l’origine d’incohérences fonctionnelles (Tribillon, 2017, p.114).



Cette analyse est basée sur un relevé sensible du périmètre d’étude qui nous a permis d’identifier les différents types d’espaces «d’un public» et d’étudier leurs formes, leurs statuts et leurs usages. Cette étude permettra de croiser les notions théoriques qui sont rattachées à «l’espace d’un public» pavillonnaire avec son état existant et avec les pratiques d’usages qu’il permet. Notre analyse s’appuie sur une cartographie que nous avons développée et qui permet de dresser un état des lieux de «l’espace d’un public» en croisant des multiples critères qui font la qualité de la vie quotidienne des habitants. Notons à titre indicatif, la forme, la structure, la lisibilité, l’accès depuis la route principale, les accès vers les maisons, le système de clôtures, le type de sol, la topographie, la porosité entre ces espaces extérieurs et les espaces d’activités privées ainsi que la présence du végétal. Ces caractéristiques peuvent être différentes ou similaires entre les types «d’espaces d’un public» . Le tissu pavillonnaire correspond à une juxtaposition de parcelles. Le modèle commun à tous les quartiers pavillonnaires consiste à établir une différence ente l’espace de devant constitué par la voirie d’accès, la clôture et parfois le jardin qui sont parfois accessibles de par leur visibilité, et l’espace arrière conservé et destiné aux activités privées (la piscine, la maison,etc...). Cependant, l’occupation des parcelles varie selon les quartiers pavillonnaires. Ces derniers se caractérisent par une forte distinction entre le domaine public et le domaine privé en termes de forme et d’aménagement. En effet, en analysant notre terrain d’étude, nous avons remarqué que la plupart des «espaces d’un public» appartenant au domaine public sont aménagés tandis que ceux appartenant au domaine privé sont inactifs1 et non aménagés. Ainsi, la circulation piétonne s’avère difficile.

1 Inactif est l’opposé d’actif. Ce dernier signifie un espace où il se passe quelque chose: «des plantes poussent, des vélos sont garés, des jouets traînent...» (Soulier, 2012, p.142). Les espaces actifs sont utilisés par les riverains et leurs objets qui participent à sa qualité.

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2- Analyse typo-morphologique de l’espace public pavillonnaire


6

7 1 — Parking 2 — Centre historique du quartier 3 — Place Braille 4 — Lotissement rue du Maréchal Franchet d’Esperey 5 — Lotissement la Clairnande 6 — Domaine de l’Armelière 7 — Impasse Bourely 8 — Impasse des Rosiers 9 — Avenue Fortuné Ferrini RD8n

[15] Diversité des typologies du bâti et des voiries Relevé sensible du quartier du Pont de l’Arc

9

8


2 1

3

5

4

0

100m

200m


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La définition que nous donnons à «l’espace d’un public» propose une lecture géographique, spatiale et temporelle, intégrant le fait que l’ensemble de ses espaces sont fréquentés différemment. La notion d’espace d’un public évoque la question d’échelles spatio-temporel et géographique. Ainsi, on peut différencier les «espaces d’un public» du pavillonnaire en trois types: • Les équipements publics dont l’accès et la fréquentation sont temporaires en fonction des heures et de la période tels que les commerces, la mairie, la poste, ...etc. Il s’agit des espaces bâti recevant du public et accessibles à tous tant qu’ils sont ouverts (voir figure 16) • Les «espaces de jonction planifiés». Il s’agit d’un terme que nous avons introduit pour signifier des espaces non bâtis actifs par leur aménagement tel que les voiries, les espaces verts ouverts et les jardins ouverts ou fermés (voir figure 17). • Les espaces résiduels, interstitiels. On parle ici des espaces non bâtis non actifs tels que les bords de routes, les espaces agricoles en friche, les espaces naturels, les espaces délaissés, ...etc (voir figure 18).

[16] Les équipements publics à l’entrée du quartier © Safa Ben Khedher, prise le 08 mai 2018


© Safa Ben Khedher, prise le 08 mai 2018

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[17] Espaces de jonctions planifiées (dessus) / [18] Espaces résiduels (dessous)


Dans la partie suivante, nous allons revenir sur deux formes «d’espace d’un public» que sont la voirie, les commerces et les équipements publics du quartier du Pont de l’Arc. Puis, nous décrirons plus particulièrement le rôle de la clôture comme interface entre l’espace privé et «l’espace d’un public». • Voiries

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Comme nous l’avons souligné précédemment, «l’espace d’un public» des quartiers pavillonnaire est largement occupé par le réseau viaire. La limite des quartiers pavillonnaires est indiquée par les grandes infrastructures routières ou les routes départementales. A l’intérieur du quartier, le tissu pavillonnaire est généralement structuré autour d’une voie principale lisible par son aménagement, sa fréquentation importante et les activités qui s’y déroulent. Selon notre définition et catégorisation de «l’espace d’un public», la voirie est considérée comme étant un espace de jonction aménagé. De plus, parlant des métamorphoses de l’espace scénique à l’âge classique, Jacques Schérer disait que la rue était « le moyen le plus économique de conjuguer l’unité et la multiplicité des lieux » (Shérer, 1992, p.14). Ainsi, la notion d’accessibilité et la question primordiale d’echelles qui définissent «l’espace d’un public» sont à l’origine de cette modification décisive du regard sur l’espace de circulation. Dans une étude menée pour l’IAU-IdF dans le cadre du projet de recherche IP4, Céline Loudier met en évidence que le système de voirie dans les lotissements est une forte cause de l’enclavement. En fait, elle définit trois configurations de l’enclavement : l’impasse, la boucle et la raquette. Selon elle, ces formes sont propice à l’entre soi du fait qu’elles conduisent à une rupture avec le maillage public environnant. Physiquement, ces voiries ne sont utilisées que par les résidents même si elles sont de statut public. Dans cette optique, il parait nécessaire de mettre en évidence l’absence de la porosité dans ces quartiers. Dans le cas du quartier du Pont de l’Arc, comme le montre la figure 19, la route principale est la RD8n (l’avenue Fortuné Ferrini) qui se caractérise par l’implantation des activités commerciales et des services au rez-de-chaussée des immeubles d’habitation à l’entrée du quartier, par un alignement d’arbres qui bordent les trottoirs jusqu’à l’arrivée à la zone purement résidentielle et par la largeur de ses trottoirs et leur aménagement (éclairage publics, arrêts de bus, mobilier urbain…). Comme l’a expliqué l’un des habitants en disant : « moi si j’avais aménagé cet espace-là, j’aurais fait pas forcément plus de voies mais j’aurais supprimé tout le stationnement et j’aurais fait de ça une piste cyclable et un trottoir. J’aurais replanté des arbres »1.

1 Extrait de la retranscription d’un entretien avec Antoine, 45 ans, habitant du quartier.


1

6m

10m

7m

Séquence 1 2

3

5m

6m

5m

2.5m

Séquence 2

20m

Séquence 3 NOIR — Sol privé ORANGE — Chaussée BLEU — Trottoir

[19] Relevé de l’avenue Fortuné Ferrini (Rd8n)


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[20] L’aménagement de l’avenue à l’entrée du quartier © Safa Ben Khedher, prise le 08 mai 2018

[21] La rupture de son aménagement au niveau de la partie résidentielle © Safa Ben Khedher, prise le 08 mai 2018


Ensuite, les relevés des formes pavillonnaires résultantes des formes de voiries qui sont représentés dans les pages suivantes, montre que les lotissements sont desservis par des rues qui ont presque les mêmes largeurs. Elles sont peu distinctes et dont l’aspect varie peu de prime abord. Par conséquent, la lisibilité et l’orientation dans ce quartier pavillonnaire ne sont pas toujours faciles (voir figures 23 et 26). D’autant plus que l’espace viaire est souvent trop étroit et fortement occupé par le stationnement automobile. Le système de voiries présente des discontinuités et des ruptures dans leurs structures : des trottoirs parfois d’un seul côté ou totalement absents, des escaliers dans un bout de chemin qui mènent vers une rue étroite sans trottoirs…(voir les figures 22, 23, 28 et 30). L’aménagement des rues internes est pauvre en comparaison avec celui des routes principales : on trouve très rarement des dispositifs d’éclairage et peu de mobilier urbain (voir les figures 21-29)2. Cela est parfois directement lié à la volonté des habitants qui préfèrent ne pas être dérangés par des pratiques d’espace public. En effet, « la quête de tranquillité s’exprime chez tous quels que soient l’âge et le métier exercé. S’isoler, être tranquille, ne pas être vu, être chez soi… » (Frileux, 2010, p.645).

1 Extrait de la retranscription d’un entretien avec Antoine, 45 ans, habitant du quartier. 2 L’aménagement des voiries dans la ville centre est différent. Les trottoirs sont continues, éclairées, aménager parfois en mobilier urbain. Ainsi, elles ne sont pas dédiées aux voitures mais partagées entre circulation piétonne et circulation automobile. Voir en annexe, la comparaison avec l’espace public en ville : entre forme, proximité et usages, p.162-163.

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En se rapprochant de la zone résidentielle, la route perd en qualité, du fait de la disparition du végétal, l’absence du trottoir ainsi que le manque d’aménagement urbain et paysager. Les trottoirs commencent à disparaître jusqu’à ne plus exister, l’arrêt de bus est réduit à un simple poteau signalant l’existence d’un transport en commun, l’alignement d’arbre devient une simple haie qui délimite la route (voir figures 20 et 21). Dans cette idée, l’habitant insiste sur le fait que « le problème est que l’espace public ici n’est pas aménagé. Au niveau de la route, il n’y a pas de trottoir, il n’y a rien donc on ne peut pas profiter de l’espace public »1.


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1

3 2


3m

10m

16m

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36m

3m

1 — Façade longitudinale

14m

2 — Façade transversale

3 — Coupe transversale

NOIR — Sol privé ORANGE — Chaussée BLEU — Trottoir

[22] Relevé d’un lotissement en impasse (1955)


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[23] Absence du trottoir dans l’impasse Bourrely Š Safa Ben Khedher, prise le 08 mai 2018


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[24] Perspective close: manque de porositÊ Š Safa Ben Khedher, prise le 08 mai 2018


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1 2

3


10m

5m

38m

28m

3m

1 — Façade longitudinale Ouest

30m

3m

15m

30m

2 — Façade longitudinale Est

0.5m

6m

0.5m

3 — Coupe transversale NOIR — Sol privé ORANGE — Chaussée BLEU — Trottoir

[25] Relevé du lotissement la Clairnande (1960)

8m


[26] Une rue intÊrieure du lotissement Š Safa Ben Khedher, prise le 08 mai 2018


[27] La rue parallèle à l’avenue Fortuné Ferrini © Safa Ben Khedher, prise le 08 mai 2018


1

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3

2

10m

12m

17m

12m

14m

[28] Relevé d’un lotissement autour d’une voirie en boucle et linéaire (1960)

10m

14m

17m


0.5m

7m

5.5m

1 — Coupe transversale au niveau du rond-point

0.5m

7m

0.5m

2 — Coupe transversale au niveau du lotissement NOIR — Sol privé ORANGE — Chaussée BLEU — Trottoir

10m

17m

18m

14m

17m

10m

17m

8m

3 — Façade longitudinale


[29] Vue depuis l’entrée du lotissement © Safa Ben Khedher, prise le 08 mai 2018


1

2

5.5m

14m

10m

4m

25m

22m

4m

1 — Coupe transversale

16m

12m

2 — Façade Longitudinale NOIR — Sol privé ORANGE — Chaussée

[30] Relevé du domaine de l’Armelière : voirie linéaire (1985)


• Équipements publics

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Les équipements publics sont répartis dans le quartier de manière inégale: ils se trouvent à l’entrée et ne se prolongent pas dans son intégralité (voir figure 31). Le quartier est plutôt bien équipé, en particulier en commerces de proximité, tels que boulangerie, boucherie, pharmacie, coiffeur, fleuriste, restauration, vins… Le développement des activités commerciales sur les axes principaux permet la structuration du quartier et la constitution d’une centralité. Cette centralité à l’entrée du quartier est considérée différemment par les habitants du quartier. En effet, certains la trouvent qualitative car elle est représentative de l’identité du lieu et attractive en terme de relations de sociabilité et de convivialité. D’autres la considèrent encore pauvre en aménagement car elle ne présente pas une très grande diversité d’activités et de fonctions. Cette centralité ne semble pas encore satisfaire l’ensemble des habitants. Comme le souligne Antoine, habitant du quartier, « Après on parle d’un centre à l’entrée mais il n’y a que deux boulangeries, deux boucheries, deux banques… »1.

0

200m

ORANGE — Voiries aménagées BLEU — Équipements et services GRIS — Voiries non aménagées NOIR — Zone résidentielle

[31] Les équipements et services à l’entrée du quartier Http://www.maps.google.fr

1 Extrait de la retranscription d’un entretien avec Antoine, 45 ans, habitant du quartier..


• Clôtures

La clôture est un élément majeur pour l’ambiance de la rue. Elle matérialise la limite d’une parcelle et fait partie du « frontage » qui assure la transition entre les espaces d’activités publiques et les espaces d’activités privées. Ainsi, la clôture est un élément clef du paysage urbain. Elle a pour rôle principal d’empêcher les gens d’accéder à ton jardin. De plus, elle permet de délimiter la propriété et de cacher les jardins En effet, dans son livre Prisonniers volontaires du rêve américain, Stéphane Degoutin affirme que «dans les lotissements européens, chaque pavillon est clôturé. L’échelle individuelle de la maison définit l’espace [privé], alors que tout l’espace extérieur aux maisons est [public] puisqu’il est le seul lieu possible pour les échanges entre les individus » (Degoutin, 2006, p.69). L’ambiance change si cette délimitation laisse passer le regard vers le jardin ou si elle le masque. Les clôtures ont généralement une hauteur d’environ 1m50 dans les lotissements du quartier du Pont de l’Arc. En effet, la hauteur et la matérialité de la clôture sont écrites dans les règlements intérieurs et le PLU. Ainsi, les clôtures, en tant qu’interface, changent de forme et de matériaux d’une rue à une autre et aussi dans la même rue (en PVC, en métal, en bois…). Néanmoins, elles empêchent l’interaction entre l’intérieur et l’extérieur de chaque parcelle, entre le dedans et le dehors dans une recherche d’intimité et de sécurité. Dans les deux cas, la clôture est une limite caractéristique de ce quartier pavillonnaire. Elle répond à un fort besoin de sécurité mais aussi d’intimité. Dans ce sens, Pauline Frileux précise que « les renforcements de clôture que j’ai moi-même observés n’ont aujourd’hui rien à voir avec la protection des passants ou les intrusions. Ils traduisent un puissant besoin d’intimité » (Frileux, 2010, p.646).La recherche d’intimité et de sécurité ne se manifeste pas seulement dans les caractéristiques des clôtures en elles-même, mais aussi dans les ajouts qu’on peut remarquer et qui constituent des pare-vues. Ils sont souvent des bâches en plastique, des ajouts de bois, des pare-vues en paille, en métal ou en plexiglas devant ou derrière le grillage qui rendent les jardins invisibles et donnent un sentiment d’appropriation de la rue. En effet, cet élément met en évidence une forte appropriation de l’espace par ses habitants: il s’agit de l’une des qualités du pavillonnaire. Être chez soi permet de s’approprier, transformer, agir sur son espace (voir figure 32). Dans cette optique, Renaud Le Goix note que « l’espace du pavillon est caractérisé par son marquage (clôture) qui permet un fort sentiment d’appropriation. L’habitant a le sentiment de pouvoir avoir sa propre organisation de l’espace» (Le Goix, 2007, p.5).

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En France, comme le rappelle Renaud le Goix, la construction d’une clôture autour de la maison individuelle est inscrite dans la loi comme une obligation du propriétaire. Il explique que «le visiteur européen est donc frappé par l’accessibilité et l’ouverture du territoire américain, les rues et les routes s’étirent à l’infini, l’absence de clôtures entre les maisons, et de manière générale, par la facilité avec laquelle les Américains entrent chez leurs voisins» (Le Goix, 2007, p.30).


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[32] Les différentes matérialités des clôtures du quartier © Safa Ben Khedher, prise le 08 mai 2018


Pour conclure ce sous-chapitre, on peut retenir que l’une des grandes critiques portées à l’habitat pavillonnaire est qu’il donne lieu à des formes urbaines fermées sur elles-mêmes. Cette observation est particulièrement vraie dans le cas du Pont de l’Arc, composé de quartiers non-traversants, imperméables, en impasse, en boucle ou en raquette. Les espaces publics sont généralement répétitifs, monotones, peu nombreux et de conception sommaire. En effet, les quartiers pavillonnaires sont généralement mono-fonctionnels (de vocation résidentielle) et de faible densité. Les espaces publics sont larges sur l’axe routier principal et très restreints en cœur du quartier en se rapprochant des logements. A partir de cette analyse du quartier du pont de l’Arc, on constate la dominance des voiries en impasses et en boucles avec un nombre très limité d’accès au lotissement : une entrée et une sortie pour l’ensemble des habitants. Ces voiries enclavées présentent des difficultés de circulation et un isolement des maisons. La forme de voiries en impasses ou en boucles intéressent les promoteurs du fait que cette forme permet d’économiser du foncier, elle permet de construire au fond d’impasse une ou deux maisons de plus par rapport à la forme de voirie traversant. Cette forme limite aussi la distance des réseaux tels que le réseau de l’eau et du gaz. Enfin, ces voiries ne sont pas hiérarchisées. Leur taille s’adapte à la circulation en voiture. Leur organisation répond à une logique de rentabilité et à un besoin de confort et de sécurité des habitants en général et des enfants en particulier (Charmes, 2005) Si la forme générale du quartier fait son identité, les caractéristiques qui font la différence entre les typo-morphologies des «espaces d’un public» existants dans le quartier, définissent leur qualité, leurs enjeux et leur fonctionnement. En effet, La morphologie des espaces publics a une grande influence sur leurs « stérilisation » ou leurs « activation » en tant que « frontages publics » (Soulier, 2012). L’étude typo-morphologique des « espaces d’un public » pavillonnaires dans le but de comprendre leurs enjeux et leur qualité de vie est une source d’informations importante pour la compréhension de ses espaces. Nous allons à présent compléter cette étude par une analyse de la présence du végétal dans ces espaces ainsi que son effet sur la qualité paysagère de ces quartiers résidentiels.

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Selon Perla Serfaty-Garzon, la notion d’appropriation véhicule deux idées dominantes: « d’une part, celle d’adaptation de quelque chose à un usage défini ou à une destination précise ; d’autre part, celle, qui découle de la première, d’action visant à rendre propre quelque chose » (Serfaty-Garzon, 2003, p.2). Cette notion renvoie à la notion des espaces intermédiaires. En effet, s’approprier les espaces d’entre deux tels que la clôture et la façade de la maison individuelle, c’est gèrer des espaces entre le privé et le public. Christian Moley définit l’espace intermédiaire comme «cour, terrasse, balcon, parc, escalier, seuil, trottoir, espace lié à la mobilité, espaces liés à la relation sociales. Il développe le terme d’espace intermédiaire à plusieurs échelles : du bâtiment, du voisinage, du quartier, de la résidence, du logement, de l’îlot» (Moley, 2005, p.39). Ainsi, il faut plutôt les envisager comme le manifeste d’une dualité de l’habiter: «clore et marquer son territoire, se préserver de l’intrusion versus s’ouvrir à l’autre et développer des relations» (idem, p.42).



3- Analyse de la présence du végétal dans cet espace

Le végétal qui domine le quartier du Pont de l’Arc n’est pas seulement celui qui se trouve dans les lotissements pavillonnaires mais aussi celui des espaces historiquement agricoles , des espaces naturels, de l’ancienne bastide et des jardins publics ou privés (voir respectivement les figures 33, 34, 35 et 36). Il permet une ambiance agréable et donne une attractivité à ces « espaces d’un public». Comme tous les éléments constituants le paysage urbain, le végétal appartient parfois au domaine public et parfois au domaine privé. La présence de la végétation dans le domaine public est liée aux équipements qui se trouvent tout autour. En effet, Les deux alignements d’arbres du quartier étudié se trouvent aux bords des routes RD8n et RD9. Cela est dû à la présence des commerces, des services et des équipements administratifs qui forment une centralité et donnent l’image du quartier aux passagers. Ainsi, on note que l’investissement des pouvoirs publics dans l’aménagement urbain et paysager des espaces non bâtis dépend des fonctions qui s’y trouvent (équipements publics). En se rapprochant des zones résidentielles, on remarque que, en dehors des espaces privés, les espaces non-bâtis sont non aménagés. Dans les lotissements pavillonnaires, le végétal appartient plutôt au domaine privé (voir figure 38). Comme le souligne Pauline Frileux, «imposé par la réglementation, le grillage vert doublé d’une haie vive a été rapidement adopté par les Français» (Frileux, 2010, p.640). Il s’agit des haies et des arbres des jardins privés. En effet, l’État n’investit pas les rues de statut privé dans les zones résidentielles. Ainsi, la rupture et la discontinuité de « l’espace d’un public» pavillonnaire ne se manifestent pas seulement dans la forme des voiries et leur aménagement mais elles apparaissent aussi au niveau végétal. La végétation qui se trouve dans l’espace privé s’observe toujours de l’extérieur. Elle est parfois plus visible que la maison qui se trouve derrière. Alors, quel aspect donne le végétal à « l’espace d’un public» dans le tissu pavillonnaire ? Entre la recherche de l’intimité, de la sécurité et la volonté d’avoir des « espaces d’un public » de bonne qualité, les haies et les clôtures végétales nous semblent être une des solutions que les propriétaires peuvent avoir pour embellir l’extérieur tout en investissant ces espaces intermédiaires qui représentent aussi leurs espaces privés. Ils permettent à la fois de protéger les riverains du regard d’autrui en favorisant une «vie cachée» (Pinson & Thomann, 2002, p.9) et d’amplifier les promenades dans les rues des lotissements

- 101 -

Afin d’identifier la présence du végétal dans le quartier d’étude, nous avons eu recours au relevé sensible et aux différentes photographies prises sur terrain. L’apport du végétal sur la qualité spatiale a été analysé au travers du ressenti personnel, des compétences acquises à l’école en matière de paysage et des informations recueillies au cours des entretiens effectués auprès des habitants.


[33] Le végétal présent dans les parcelles agricoles © Safa Ben Khedher, prise le 08 mai 2018

[34] Le végétal présent dans les interstices © Safa Ben Khedher, prise le 08 mai 2018


[35] Alignements d’arbres vers l’ancienne bastide © Safa Ben Khedher, prise le 08 mai 2018

[36] Le végétal entretenu dans les espaces communs © Safa Ben Khedher, prise le 08 mai 2018


[37] Le végétal au bord de la route © Safa Ben Khedher, prise le 08 mai 2018

[38] Le végétal des haies du lotissement la Clairnande © Safa Ben Khedher, prise le 08 mai 2018


D’après nos observations et nos analyses, les haies et les clôtures sont parfois mal entretenues ou moins visibles quand elles sont doublées de pare-vue. Elles sont dans d’autres cas très hautes et cachent le jardin. Ainsi, en fonction de leur qualité (matérialité, impact visuel), elles peuvent avoir un effet de dévalorisation sur l’espace public et empêche toute interaction entre la sphère privée et la sphère publique (voir figure 37). Par exemple, les haies fleuries et bien entretenues ont une influence sur l’image, la forme et la qualité des « espaces d’un public » : elles les rendent agréables et y donnent de l’ombre qui encourage le passager à s’arrêter à l’abri (voir figure 39). Ainsi, les haies n’apportent pas le même sentiment et la même qualité à «l’espace d’un public» qu’un mur opaque et haut1.

La forme des quartiers pavillonnaires conditionne la distance vécue entre eux et le centre-ville, leur autonomie par rapport au tissu urbain dense environnant et la vie qui se développe dans le quartier. La discontinuité des formes des « espaces d’un public » engendre la difficulté du déplacement et encourage plutôt à parcourir les rues pavillonnaires comme un stricte passage dans une « ville diffuse ». Rappelons que la voiture individuelle était l’un des facteurs majeurs de la périurbanisation et l’un des éléments qui ont facilité le choix de la maison individuelle, de fait, on s’interrogera ici plus particulièrement sur les formes de mobilité et le choix modaux des habitants dans le quartier pavillonnaire du Pont de l’Arc. Nous tenterons notamment de répondre à la question suivante : quels sont les impacts de l’offre de mobilité sur les usages des « espaces d’un public » ? En effet, «l’espace d’un public » du quartier pavillonnaire serait un espace public intermédiaire qui permettrait d’assurer le lien actif entre les espaces intérieurs et les espaces extérieurs. Ainsi, il devrait assurer le calme et la tranquillité que les habitants cherchent dans leur jardin privé tout en étant un espace commun pour tous et accessibles par le public. Pour assurer son bon fonctionnement, il faut que «l’espace d’un public» appropriable par l’usager soit aussi confortable que son jardin privé qui, malgré son statut réglementaire privé, participe du point de vue visuel et environnemental à la qualité des « espaces d’un public ».

1 Voir en Annexe, la comparaison avec l’espace public en ville : entre forme, proximité et usages, p161 .

- 105 -

Fort de ces observations, on peut se demander quel est l’impact de cette typo-morphologie sur les pratiques de voisinage ? Quels sont les usages de « l’espace d’un public » dans ce quartier pavillonnaire ?


VERT — Plantations d’arbres ORANGE — Plantations d’arbustes BLEU — Jardins privés donnant sur la rue


0

100m

200m

[39] La présence du végétal dans les «espaces d’un public»



4- Quels usages de l’espace public dans le quartier pavillonnaire? Entre rapport de voisinage et proximité Afin de comprendre la relation entre la forme de « l’espace d’un public » du pavillonnaire et ses pratiques d’usages, nous avons utilisé plusieurs méthodes qui permettent d’appréhender la vie du quartier. D’abord, nous avons eu recours à des observations sur site pour analyser les pratiques des « espaces d’un public » et les rapports au voisinage d’une manière objective. Cela a été accompagné par deux entretiens avec les habitants pour croiser le visible et le ressenti des habitants et à leur manière de vivre et de se comporter. De plus, afin d’appréhender la question de la mobilité dans les quartiers pavillonnaires, nous avons analysé les différents parcours que l’habitant effectue au quotidien pour connaître les possibilités en fonction de ces parcours et comprendre la relation que pourrait avoir la qualité des « espaces d’un public » avec la mobilité dans un ce tissu pavillonnaire.

Dans son ouvrage L’Habitat pavillonnaire, Henri Raymond traite le sentiment d’être chez soi dans sa maison individuelle. Il s’agit de la liberté qu’offre le fait d’être propriétaire: « en pavillon, on est quand même plus chez-soi ; on est libre, c’est une autre vie quand même, celui qui veut un chien peut en avoir tandis qu’en appartement ce n’est pas vrai, tout le monde peut pas en avoir… » (Raymond, 2001, p.87) . Cependant, l’habitat pavillonnaire a été particulièrement critiqué de par l’homogénéité sociale qu’il semblait induire. En effet, « La maison individuelle en zone non dense, disjointe de l’agglomération morphologique, réalise le rêve séculaire d’une partie des membres de nos sociétés : échapper à la promiscuité des inférieurs à soi et, plus généralement, à toute forme d’interaction indésirable avec le monde social extérieur »(Lévy, 2001, p.5). Ces critiques ont cependant été nuancées par d’autres chercheurs, comme Anne Lambert par exemple, ayant montré des disparités sociales importantes dans le pavillonnaire (Lambert, 2015). Ainsi, cette vision a été largement dépassée dans le but d’étudier les faits en cas par cas. De fait, l’éloignement par rapport à la ville centre ne constitue toujours pas un enclavement. Il pourrait être «la raison pour laquelle il devient à nouveau possible de créer des ‘villages’, espaces collectifs privés, en dehors de l’espace public commun» (Degoutin, 2006, p.243). De plus, dans son article « Les périurbains et la ville: entre individualisme et logiques collectives », Rodolphe Dodier traite la question de la diversité et l’hétérogénéité sociale du pavillonnaire qui dépassent les idéologies du «repli sur soi». Il montre les deux cas possibles en disant que «certains ménages se caractérisent par une faible vie sociale et un vrai repli domestique, recevant très peu et essentiellement des membres de leur famille. […] En revanche, d’autres ménages ont d’intenses relations sociales, que ce soit à l’échelle du lotissement, du village ou de l’ensemble de la ville » (Dodier, 2007, p.36). Ainsi, il est possible de conclure que les modes d’habiter dans un tissu pavillonnaire sont tellement différents qu’il n’existerait pas vraiment d’archétype ou de règle uniforme pour tout le périurbain. Comme nous l’avons vu précédemment, on s’interroge aujourd’hui, en France, sur le phénomène de la fermeture résidentielle en lien avec la question de l’évolution de la société urbaine.

- 109 -

a- Les pratiques des espaces publics dans le tissu pavillonnaire.


Dans cette optique, Eric Charmes explique dans une émission sur les quartiers en marge à France culture qu’il s’agit d’une «incarnation, une forme spatiale qui va tout à fait avec un régime néolibéral» (Charmes, 2018). Il s’appuie sur la théorie de «l’espace défendable» (defensible space) évoquée dans les années 1970 par Oscar Newman (architecte américain). Ce dernier défend l’hypothèse qu’on devrait favoriser le maintien des rues privées fermées parce que peut-être qu’effectivement à l’intérieur de la rue les gens sont dans un entre-soi de voisinage mais finalement ils continuent à payer des impôts dans la ville, faire des courses,.. etc. Ainsi, l’espace privé fermé est un espace intermédiaire qui permet une appropriation par les riverains.

- 110 -

Aujourd’hui, on pourrait défendre l’hypothèse qu’il y aurait «plus de demande pour un transfert de propriété de rues privées dans le domaine public que de la création de rues privées car c’est moins cher pour les habitants qui ne s’en occupent plus mais c’est plutôt l’état qui les prend en charge» (idem). Le développement des ensembles fermés engendre la fermeture des espaces publics comme étant des espaces d’interactions. Les dispositifs qui construisent les «espaces d’un public» peuvent permettre l’interaction entre le citadin et l’espace, ce qui introduit une sensibilité à l’importance de ces espaces et à la nécessité de leur gestion. Certains citadins cherchent dans le pavillonnaire une sociabilité à une échelle différente de celle de la ville centre. Ils sont à la recherche de « l’intégration locale et de nouvelles relations sociales, en se référant souvent à un mythe de village convivial où tout le monde se connait » (Dodier, 2007, p.37). Néanmoins, dans les quartiers pavillonnaires, le « chez-soi » dépasse la dimension spatiale vers la dimension sociale : la recherche d’intimité, de la liberté et de la sécurité dans sa maison individuelle sont des critères essentiels de choix de ce type d’habitat. Ces enjeux présentent « l’une des composantes importantes de la conception des espaces publics dans les territoires à densité intermédiaires » (Desjardins & Fleury, 2015, p.9). Le droit de propriété de l’espace est un moyen qui permet son partage mais il n’est pas le seul. Il existe aussi le partage lié à la visibilité (être offert ou non aux regards du public) et le partage liée à l’accessibilité (être ouvert ou non au public). Le partage lié à la propriété correspond à des limites parcellaires sur le cadastre que ce soient les limites qui séparent les voisins ou les limites qui séparent chaque parcelle du domaine public. Cette analyse montre que la construction sociale peut, dans certains cas, être liée à la construction spatiale. En effet, la recherche de sécurité est l’une des raisons expliquant la fermeture des quartiers pavillonnaires. L’interface entre les espaces privés et les «espaces d’un public» joue un rôle crucial dans la sociabilité du quartier. Cette interface se présente par son épaisseur constitué des espaces de bordures. Pour que la vie sociale puisse se développer, on a besoin de l’espace physique de la rue, de la porosité et de la confiance.


Les pratiques des « espaces d’un public » dans le pavillonnaire ne sont pas seulement liées au rapport de voisinage mais aussi à la mobilité. En effet, comme le remarque Rodolphe Dodier, « la mobilité n’est pas un temps et un parcours d’ordre fonctionnel, elle reconfigure des interactions sociales et ainsi interroge le rapport entre l’individu et le collectif [...] Dans ce système, la proximité peut être posée comme une véritable ‘ ressource territoriale ‘ périurbaine, qui conditionne à notre sens l’habitabilité du périurbain » (Dodier, 2009, p.9-13). Afin d’affiner notre analyse, nous ne prétendrons pas à construire une analyse sociale mais plutôt à observer des usages. La planification urbaine dans le cadre du développement durable pose une réflexion sur « les trames vertes et bleue impliquant une réflexion sur les perméabilités de l’espace urbain, entre autres sur les cheminements piétonniers de proximité et à l’échelle des quartiers» (Degoutin, 2006, p.204).Etant donné que la mobilité est importante dans l’appréhension des espaces et que le temps du parcours est aussi primordial pour envisager une ville «soutenable» et «poreuse», Il nous paraît nécessaire d’étudier les possibilités de parcours en lien avec la qualité de ces espaces car, finalement, «la gestion de la circulation demeure l’une des principales motivations dans l’évolution de la conception des espaces publics» (Desjardins & Fleury, 2015, p.8).

- 111 -

Jane Jacobs, philosophe de l’architecture et de l’urbanisme, critique dans son ouvrage the Death and Life of Great Americain Cities le mouvement moderne en mettant l’accent sur les visions parfois opposées entre les usagers de la ville et les professionnels. Elle souligne le décalage entre les pratiques des habitants et les formes produites par les pouvoirs publics et insiste sur l’importance de la confiance qui peut être établie entre les riverains à travers l’aménagement de la rue comme étant une artère sociale. «Cette confiance prend forme, avec le temps, grâce à de nombreux, très nombreux contacts quotidiens entre les individus qui fréquentent la même rue […] La plupart de ces contacts entre les usagers de la rue sont tout à fait superficiels, mais leur somme ne l’est pas. En effet cette somme de contacts publics inopinés, dans le quartier, la plupart fortuits ou en rapport avec les courses quotidiennes, mais toujours effectués de plein gré et jamais imposés, est d’une grande richesse : elle constitue à la fois un sentiment d’appartenance à une identité commune, un réseau de confiance et de respect mutuels et un recours possible en cas de nécessité personnelle et collective » (Jacobs, 1961, p.136).



b- Les impacts de la mobilité sur ces usages

La voiture individuelle est l’un des facteurs de développement de l’habitat pavillonnaire. Ce moyen de transport a une influence sur la qualité de l’espace public: les stationnements, le bruit, la vitesse de circulation donne à la rue l’impression d’être un simple passage dans une « ville diffuse ». Les rues se caractérisent par l’invasion de la voiture qui roule sur les chaussées (voir figure 40) et qui stationne sur les trottoirs (voir figure 41). L’espace libre qui peut être le support d’autres activités est réduit à presque rien. On ne peut ni partager la chaussée avec l’automobile ni habiter l’espace extérieur qu’elle domine en stationnant. Ainsi, l’espace public du pavillonnaire est un espace de circulation automobile qui a pour but d’entrer ou de sortir sans pour autant regarder, parcourir et passer du temps. En effet, dans son ouvrage Espacements : l’évolution de l’espace urbain en France, Françoise Choay évoque la relation entre l’espace urbain accomplie par les théoriciens progressistes du XIXème siècle et l’espace de circulation. Selon elle, «éclatement et classement reçoivent dans la chartes d’Athènes [...] une élaboration plus systématique, liée à la généralisation de la circulation automobile et à la révolution structurelle et techniques de construction survenue dans le dernier quart du XIXème siècle» (Choay 2003, p. ). En outre, «Le stationnement résidentiel dévalorise l’espace public et ses fonctionnalités, n’encourage pas les déplacements doux, génère de l’insécurité et entrave les déplacements des personnes. Le stationnement dans la rue hypothèque des espaces pour d’autres projets et compromet les offres nouvelles»1.

1 Extrait du débat « La rue est à nous…à nous tous « animé par le CETE Nord-Picardie en 2008

- 113 -

Selon Henri Raymond « l’homme pavillonnaire » est attaché au symbole de l’autonomie pavillonnaire : la voiture. Elle est utilisée pour répondre à tous les besoins de la vie quotidienne : faire ses courses, voir sa famille, travailler, aller au cinéma, emmener ses enfants à l’école…(Raymond, 2001). La voiture apparaît comme un élément essentiel dans les quartiers pavillonnaires. Elle se trouve dans la rue, sur les trottoirs et dans la maison, dans un garage ou dans le jardin. L’automobile « prend » l’espace pavillonnaire (Mangin, 2004). Habiter dans un tissu pavillonnaire exige «une mobilité quotidienne, essentiellement fondée sur l’automobile» (Dodier, 2007, p.35). En effet, c’est la forme de la voirie qui conditionne «l’espace d’un public» comme espace dédié à la voiture: impasse, raquette, boucle,...etc. Dans ce cadre, on note que le lotissement, comme étant une forme du pavillonnaire, est «organisé autour de l’espace fonctionnel de la voirie» (Degoutin, 2006, p.128). Le lotissement sont caractérisés par des rues qui sont traitées comme «des rubans goudronnées dédiés à la voiture» (idem, p.130). De plus, les gens vont travailler dans d’autres quartiers et chercher des équipements qui ne se trouvent pas dans leurs quartiers. Cela favorise aussi les déplacements en voiture. Alors, prendre sa voiture est-il un choix ou une obligation ?


[40] La présence de la voiture à l’entrée du quartier © Safa Ben Khedher, prise le 08 mai 2018

[41] Le stationnement des voitures devant les commerces © Safa Ben Khedher, prise le 08 mai 2018


B

- 115 -

A

B

A

200m

0

A — Point de départ B — Point d’arrivée ROUGE — Lotissement 1, parcours en voiture VERT — Lotissement 1, parcours à pied ORANGE — Lotissement 2, parcours en voiture BLEU — Lotissement 2, parcours à pied

[42] Parcours à partir de son logement vers celui de son voisin

Type de voirie

Choix modal

Distance (km)

Temps (m)

Voirie en boucle

Piéton

0.75

9

Automobile

1.2

6

Piéton

1

12

Automobile

1.3

7

Voirie composée en boucle et linéaire

[43] Tableau comparatif des parcours


B

A

- 116 -

A

0

200m

A — Point de départ B — Point d’arrivée ROUGE — Lotissement 1, parcours en voiture VERT — Lotissement 1, parcours à pied ORANGE — Lotissement 2, parcours en voiture BLEU — Lotissement 2, parcours à pied

[44] Parcours à partir de son logement vers l’école du quartier

Type de voirie Voirie en boucle Voirie composée en boucle et linéaire

Choix modal

Distance (km)

Temps (m)

Piéton

0.55

7

Automobile

0.65

4

Piéton

0.6

8

Automobile

0.95

6

[45] Tableau comparatif des parcours


B

A

- 117 -

A

200m

0

A — Point de départ B — Point d’arrivée ROUGE — Lotissement 1, parcours en voiture VERT — Lotissement 1, parcours à pied ORANGE — Lotissement 2, parcours en voiture BLEU — Lotissement 2, parcours à pied

[46] Parcours à partir de son logement vers les commerces de proximité

Type de voirie Voirie en boucle Voirie composée en boucle et linéaire

Choix modal

Distance (km)

Temps (m)

Piéton

0.55

6

Automobile

0.6

4

Piéton

0.5

6

Automobile

0.7

4

[47] Tableau comparatif des parcours


- 118 -

Comme le montrent les figures précédentes (42-47), la distance parcourue par la voiture est toujours plus importante que celle parcourue par un piéton d’un même point de départ vers un même point d’arrivée. Néanmoins, le temps que prend le parcours du piéton est environ deux fois le temps que prend la voiture pour arriver à la destination en temps normal1. En comparaison avec celle du parcours en voiture, la distance du parcours piéton nous laisse s’interroger sur les facteurs qui encouragent le choix de la voiture pour se déplacer surtout que cette distance ne dépasse dans aucun cas les 10 minutes à pied. Nous nous intéressons plus spécifiquement au parcours des piétons vers les différentes destinations vers lesquelles on a besoin de se déplacer au sein d’un quartier. Nous analysons la qualité qu’offrent les rues et les routes, les «espaces d’un public » par lesquels on passe. Il s’agit de relever toutes les séquences des différents parcours en termes de forme et de qualité spatiale. Du point de vue formel, tous les espaces parcourus présentent des discontinuités et des ruptures telles qu’on l’a noté précédemment dans notre analyse morphologique. On note la discontinuité des trottoirs qui apparaissent des deux côtés puis d’un seul côté jusqu’à disparaitre totalement (voir les relevés séquentiels suivants). Stéphane Degoutin souligne cette idée en affirmant qu’il est «difficile de se promener à pied dans un quartier pavillonnaire, non seulement à cause des distances, mais aussi parce qu’on ne peut pas suivre un chemin précis: les trottoirs s’interrompent, ne communiquent pas les uns avec les autres» (Degoutin, 2006, p.128). De plus, la discontinuité se manifeste par les escaliers qui mènent d’une rue vers une route ou le contraire. Ces obstacles que présentent les voiries du pavillonnaire sont à l’origine de la marge qui se trouve entre la distance du parcours piéton et le temps qu’il prend. Formellement, «l’espace d’un public» du quartier du Pont de l’Arc n’est pas propice au déplacement piéton mais plutôt à la circulation automobile. Pour confirmer ou infirmer ces propos, nous analyserons la qualité spatiale et paysagère qu’offrent les différents parcours au piéton. En effet, les «espaces d’un public» du quartier présentent des ambiances différentes dans un même parcours. Le passage par les rues intérieures dans les lotissements donne l’impression d’être dans un espace inactif. Malgré la présence de la végétation lisible à partir du domaine privé, ces rues présentent une forte limite entre l’intérieur et l’extérieur ce qui renforce leur étroitesse.

1 L’analyse des différents parcours dans le cas de la ville centre (exemple du centre historique d’Aixen-Provence) a mis en évidence que ,au contraire de ce qui nous avons montré dans le quartier pavillonnaire du Pont de l’Arc, les temps des parcours en voiture à partir de son logement vers les commerces de proximité sont cinq fois plus importants que ceux des parcours piéton. Cela permet de favoriser la circulation piétonne. Voir en annexe la comparaison avec l’espace public en ville : entre forme, proximité et usages, p.165-167.


5 6

4

7

3

8

2

9

1

[48] Lotissement 1 : tracé de l’itinéraire du parcours piéton

0.5m

7m

0.5m

Séquence 1

0.5m

5m

Séquence 2

NOIR — Sol privé ORANGE — Circulation automobile BLEU — Circulation piétonne


1.8m

9m

Séquence 3

0.5m

10m

Séquence 4

Séquence 5

2m

1.8m


6m

10m

4m

Séquence 6

6m

1.2m

10m

0.6m

10m

0.6m

Séquence 7

Séquence 8

Séquence 9

[49] Les séquences du parcours piéton de son logement vers celui de son voisin Le lotissement 1 : à 250 m de l’entrée du quartier


7 6 5 4 3 2 1

Séquence 1

Séquence 2

Séquence 3

0.5m

7m

0.5m

0.5m

5m

1.8m

9m

1.8m


0.5m

Séquence 4

10m

Séquence 5

2m

6m

3m

15m

3m

3m

8m

1.8m

1.8m

Séquence 6

Séquence 7

[50] Les séquences du parcours piéton de son logement vers l’école du quartier Le lotissement 1 : à 250 m de l’entrée du quartier


6 5 4 3 2 1

Séquence 1

Séquence 2

Séquence 3

0.5m

7m

0.5m

0.5m

5m

1.8m

9m

1.8m


0.5m

10m

Séquence 4

2m

6m

Séquence 5

10m

4m

Séquence 6

NOIR — Sol privé ORANGE — Circulation automobile BLEU — Circulation piétonne

[51] Les séquences du parcours piéton de son logement vers les commerces de proximité Le lotissement 1 : à 250 m de l’entrée du quartier


7 6

8

5 4

2

3

1

[52] Lotissement 2 : tracé de l’itinéraire du parcours piéton

0.5m

Séquence 1

6m

Séquence 2

Séquence 3

0.5m

1.8m

4m

13m

2m


5m

6m

2.5m

6m

6m

3m

5m

2.5m

10m

4m

15m

3m

3m

8m

Séquence 4

2m

2m

Séquence 5

Séquence 6

Séquence 7

[53] Les séquences du parcours piéton de son logement vers celui du voisin Le lotissement 2 : à 600 m de l’entrée du quartier


7

6 5 4

2

3

1

0.5m

Séquence 1

0.5m

1.8m

Séquence 2

Séquence 3

6m

4m

13m

2m


5m

6m

2.5m

6m

6m

3m

5m

2.5m

Séquence 4

10m

15m

4m

3m

2m

Séquence 5

Séquence 6

NOIR — Sol privé ORANGE — Circulation automobile BLEU — Circulation piétonne

[54] Les séquences du parcours piéton de son logement vers l’école du quartier Le lotissement 2 : à 600 m de l’entrée du quartier


5 4

2

3

- 130 -

1

Séquence 1

Séquence 2

0.5m

6m

0.5m

1.8m


4m

2m

13m

5m

6m

6m

2.5m

5m

Séquence 3

2.5m

10m

Séquence 4

4m

Séquence 5

NOIR — Sol privé ORANGE — Circulation automobile BLEU — Circulation piétonne

[55] Les séquences du parcours piéton de son logement vers les commerces de proximité Le lotissement 2 : à 600 m de l’entrée du quartier


Cette analyse montre qu’il existe une forte relation entre la qualité des « frontages » (Soulier, 2012) et les déplacements. Le choix d’un mode de déplacement est appelé par les spécialistes de la circulation « le choix modal » (idem). Ce dernier dépend de la qualité des espaces parcourus et de la qualité que présentent les rues. Bien que certaines formes de voiries font qu’on a plusieurs accès qui donnent sur la rue et donc laissent la possibilité aux habitants de se croiser, elles ne présentent pas une sociabilité et une vie collective car le choix modal de la voiture et sa vitesse ne les permettent pas.

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L’ambiance qui règne dans les rues est une composante déterminante du choix modal qui engendre de son côté une ambiance particulière des rues. Ainsi, la nature des espaces intermédiaires influence la nature des déplacements et réciproquement. Se déplacer en vélo ou marcher à pied ne provoque pas des nuisances pour les habitants. Cela convient au désir du calme lié au choix de la maison pavillonnaire. Par contre, quand la voiture accapare la rue, la voie devient dangereuse et bruyante. Au lieu d’être multifonctionnelle tout comme dans la ville traditionnelle où l’on peut se déplacer, l’on s’arrête devant une boutique ou une terrasse, la rue n’est plus qu’un axe de circulation, réservé aux voitures: la rue1 devient une route2. On peut donc déduire que la qualité des «espaces d’un publics» pourrait influencer ses usages en terme de mobilité et de rapport au voisinage. En effet, le manque d’aménagement de ces espaces dans leur état actuel engendre un état de passage sans pour autant les appréhender et y passer du temps ou y faire des relations d’interactions. De plus, la discontinuité et les ruptures que représentent les voiries rend difficile le parcours piéton même à courte distance (voir figures 56, 57, 58,et 59). Stéphane Degoutin explique dans son ouvrage Prisonniers volontaires du rêve américain que «cette conception du tout automobile n’est pas favorable à la rencontre» (Degoutin, 2006, p.130). Ensuite, les espaces interstitiels non aménagés présentent, quant à eux, des terrains inactifs en terme d’usages, des terrains révélateurs de vides fonctionnels.

1 Du latin ruga (ride, sillon, puis, en bas latin, rue), voie bordée de maisons ou de murailles dans une ville ou village. Elément essentiel de toutes les cultures urbaines, depuis l’antiquité, elle y présente des aspects et y joue des rôles différents. Dans le monde occidental, son évolution morphologique est fonctionnelle ; elle a suivi celle des sociétés et des techniques. Les étapes de son histoire coïncident avec celles de l’histoire des villes et de l’urbanisation (Dictionnaire de l’urbanisme et de l’aménagement, sous la direction de Pierre Merlin et Françoise Choay). 2 Voie carrossable destinée à la liaison entre les localités et à la desserte des zones rurales. Les chaussées romaines étaient pavées. Les routes médiévales n’étaient pas revêtues. Depuis le XIXème siècle, les routes ont été revêtues dans les pays développées. La route comporte, outre la chaussée, les fossés, talus, bandes d’arrêt, pistes cyclables et plantations éventuelles (idem).


Les « espaces d’un public » de notre terrain d’étude se caractérisent par une discontinuité de forme et une rupture au niveau de leurs aménagements. Le quartier présente ainsi un état de passage. Le défaut en matière d’hiérarchie et d’aménagement des « espaces d’un public » et le déséquilibre entre son centre et ses parties résidentielles, sont le résultat d’une recherche de rentabilité, de confort et de sécurité. Au-delà de sa forme, « l’espace d’un public » est en forte relation avec l’espace privé. Dans ce sens, la clôture des pavillons, en plus d’être la limite qui assure la sécurité et l’intimité des habitants, est une interface importante dans l’étude des ces espaces. Notre analyse cartographique et photographique montre que les haies et les clôtures contribuent à l’image de « l’espace d’un public » ainsi que sa qualité paysagère.

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Ainsi, la nature tant désirée par les volontaires de la maison individuelle a disparu. Pour la retrouver, il faudrait déménager à nouveau plus loin, dans un processus qui engendrerait plus d’étalement urbain et augmenterait encore le nombre de voitures en circulation. Comme l’a défini Degoutin, il s’agit d’un «effet boucle» (Degoutin, 2006). Jane Jacobs raconte une anecdote qui le résume: « Une famille […] avait acheté à la campagne un terrain de quatre mille mètres carrés pour y construire une maison. Pendant des années, n’ayant pas les moyens de construire, [ils] vinrent de façon régulière sur leur terrain pour pique-niquer sur le tertre qui en formait le principal ornement. Et ils étaient tellement séduits par l’idée de continuer à venir sur ce tertre que, lorsque finalement ils bâtirent leur maison, ce fut à l’emplacement du tertre. Mais du coup, celui-ci disparut. Pour je ne sais quelle raison, [ils] ne s’étaient absolument pas rendu compte qu’ils le feraient disparaître s’ils choisissaient son emplacement pour leur maison » (Jacobs, 1991).


[56] La rupture visuelle due à la forme de la voirie et le type de clôture © Safa Ben Khedher, prise le 08 mai 2018

[57] La rupture par des escaliers permettant d’atteindre le niveau de l’avenue principale © Safa Ben Khedher, prise le 08 mai 2018


[58] La rupture de niveau entre l’avenue principale et la partie Est du quartier © Safa Ben Khedher, prise le 08 mai 2018

[59] Des escaliers à l’entrée de l’ensemble résidentiel fermé l’Olympe © Safa Ben Khedher, prise le 08 mai 2018


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CONCLUSION

ÂŤ There are no universel answers, but there are universal questions or dilemmas, and that is where we all need to start. Âť (Trompenaars 1997)



Quel devenir de « l’espace d’un public » dans le contexte de la densification pavillonnaire ?

Nous avons dans un premier temps exposé les différentes définitions de l’espace public urbain et de l’espace public du pavillonnaire établies par les spécialistes sur le sujet dans la littérature existante. Centrée sur « l’espace public du pavillonnaire», notre étude révèle l’existence de plusieurs notions qui parlent de l’espace non bâti où l’on constate des usages : espace commun, collectif, partagé, intermédiaire, public…Ces notions montrent qu’ils n’existent pas toujours de correspondances entre les statuts foncières et les pratiques d’usage. Seul l’espace public possède un statut foncier bien déterminé. L’espace public a évolué en fonction des idéologies, des modes de vie des habitants, de sa relation avec l’espace privé et des formes du tissu urbain. à partir d’une diversité de points de vues sur la définition de l’espace public, le caractère d’accessibilité est le seul sur lequel toutes les définitions s’accordent. Ainsi, il est la base de notre définition de l’espace public du pavillonnaire. Tout le long de notre mémoire, nous considérons par « l’espace d’un public », l’espace accessible au public quel que soit son statut foncier. Cette définition se rapproche de la notion d’espace intermédiaire tout en s’attachant particulièrement à la notion d’échelle du quartier pavillonnaire ainsi que celle du voisinage. Il met en évidence la mutation des espaces publics voir leur « fin » dans certains cas. De plus, il met en exergue la nécessité d’interroger leur capacité à intégrer les évolutions du territoire et des modes de vie pavillonnaire à partir de leurs particularités en termes de formes et d’usages dans leur état actuel. 1 Loi relative à la solidarité et Renouvellement Urbain du 13 septembre 2000. 2 On parle des lois Grenelle I et II successivement en 2009 et puis en 2010. 3 Loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové en 2014.

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Aujourd’hui, le questionnement sur l’espace public préoccupe les sociétés contemporaines dans une réflexion sur la ville durable et son développement soutenable. En même temps, la densification de l’existant est au centre des réflexions sur la ville en France. De fait, la loi SRU1, les lois Grenelles I et II2 ainsi que la loi ALUR3 ont pour objectif de limiter l’étalement urbain et de prendre en compte les enjeux environnementaux en facilitant la densification périurbaine. Finalement, la loi Nôtre a mis en place une nouvelle structure de gouvernance territoriale qui réorganise les jeux d’acteurs. Le tissu pavillonnaire peut être exploité pour la densification grâce à une disponibilité du foncier et une faible densité (Charmes 2006). La volonté de limiter la périurbanisation s’inscrit dans cette optique de densification et de diversification pour faire « la ville sur la ville » (Owen 1991 ; Newman & Kenworthy 1999 ; Charmes 2003 ; Touati, Crozy 2015) et « remettre en ville nos lotissements » (Bringand 2011). Ainsi, une réflexion préalable sur les « espaces d’un public » est indispensable pour promouvoir des solutions durables et efficaces. Ainsi, l’espace public du pavillonnaire semble nécessaire à étudier dans l’optique du renouvellement et de la mutation de ce territoire. Dans cette perspective, nous avons questionné au travers de ce travail de recherche, l’existence même de l’espace public dans le pavillonnaire. L’objectif de cette étude est de (re)définir l’espace public du pavillonnaire et déterminer ses caractéristiques typo-morphologiques, sociales et juridiques.


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Fort de ce constat, il nous a apparu pertinent revenir sur l’histoire de l’habitat pavillonnaire en se basant sur la littérature sur le sujet. En effet, le phénomène de périurbanisation a laissé apparaître de nouvelles formes urbaines dues aux idéologies pavillonnaires et des préfigurations de formes inspirées des modèles de pré-urbanisme. Malgré que ces modèles sont utopiques, ils présentent une pensée globale. Il s’agit d’une articulation entre les échelles sociale et politique assumée et une gestion des espaces publics hiérarchisés reliant les différentes zones fonctionnelles. Le travail d’analyse de « l’espace d’un public » du quartier du Pont de l’Arc, sur les plans typo-morphologique, social, juridique et paysager, nous a permis d’identifier trois catégories d’espaces d’un public : les équipements publics, les espaces de jonction planifiés et les espaces résiduels interstitiels. Ainsi, « l’espace d’un public » possède des potentiels écologiques, paysagers, sociales et environnementales. Il est intéressant d’associer ces potentiels en cas de la restitution des «espaces d’un public» pour l’espace public dans le contexte de la densification pavillonnaire. Sur le plan formel, le défaut en matière de la hiérarchie et d’aménagement des « espaces d’un public » et le déséquilibre entre son centre et ses parties résidentielles, sont le résultat d’une recherche de rentabilité, de confort et de sécurité. Une densification pavillonnaire étudiée devrait permettre, outre une augmentation de la population, une mixité programmatique qui pourrait financer une partie des infrastructures et des aménagements d’espaces publics. Les «espaces d’un public» révélés à travers ce mémoire ont du potentiel à muter en espaces publics dans le contexte de la densification pavillonnaire. Ils pourraient permettent la requalification des espaces publics, articulée avec les problématiques de densification et de déplacement en périurbain. Associer les espaces du domaine privé et ceux du domaine public accessibles au public dans une seule catégorie des «espaces d’un public», permet d’interroger la limite entre le public et le privé. Dans le contexte de leur mutation en espaces publics, cette association donnerait lieu à une articulation entre un projet local et un projet urbain d’ensemble à travers des stratégies intelligentes. Penser ces « espaces d’un public» dans le cas du renouvellement urbain, c’est articuler différentes échelles et gérer l’urbanisation des périphéries des villes en terme de consommation de foncier, d’installation de nouveaux programmes et d’autonomie du quartier. En effet, cette autonomie pourrait être assurée en partie par les espaces interstitiels d’origine agricole ayant du potentiel de devenir productifs en cas de leur requalification. La densification non planifiée du tissu pavillonnaire pourrait engendrer le dysfonctionnement formel, typologique et social de l’espace public. Néanmoins, une densification réfléchie pourrait permettre de maintenir les qualités des espaces publics voir même les améliorer selon un nouveau modèle d’habitat et une nouvelle densité d’habitants. La sensibilisation et la responsabilisation des habitants face à « l’espace d’un public » pourrait permettre de faire naître de nouvelles pratiques d’usages et de cogestion de ces espaces par ses occupants qui deviennent des


acteurs du développement urbain. Ainsi, les quartiers pavillonnaires pourront fonctionner comme étant des lieux soutenables. Connaître les qualités des « espaces d’un public » pavillonnaires, leur rôle social, économique et environnemental, tel est le défi pour les acteurs de la densification, qu’ils soient les habitants, les concepteurs, les collectivités locales, l’État et les investisseurs privés. Cela leur permet de les prendre en considération dans leurs projets dès la procédure du lotissement jusqu’à l’aménagement.

Aujourd’hui, on note de nombreuses recherches qui ont été faites autour de la densité des villes: des thèses dans des écoles d’architecture et de paysage comme celle de Vincent Fouchier1, des publications des instituts, des agences d’urbanisme, etc... Le processus de densification pavillonnaire fait l’objet des recherches lancées par l’ANR (Agence Nationale de Recherche) dans un programme «villes durables» en 2009 nommé BIMBY (Build In My BackYard)2 qui considère ce processus comme une «nouvelle filière de renouvellement urbain » (Miet 2012) et qui permet d’encadrer la densification dans le tissu pavillonnaire pour l’articuler dans une réflexion globale (Hanrot 2015). De plus, il constitue la thématique globale de recherche du laboratoire PROJECT’S à l’ENSA-M (Ecole Nationale Supérieure d’Architecture à Marseille) traitée selon différents angles tels que le jardin pavillonnaire, l’agriculture urbaine, l’énergie,...etc. Néanmoins, aucune recherche ne traite les espaces publics dans le tissu pavillonnaire dans le contexte de densification. Fort de ce constat, il serait légitime, dans la continuité de ce travail de TPE[R] et dans la suite d’une mission de recherche qui m’a été attribuée durant deux mois, de s’interroger sur le devenir de « l’espace d’un public » du pavillonnaire sur le plan formel et social. Cette thèse à venir pourrait se développer dans le cadre du programme de recherche CAPA.CITY3. Elle s’emploiera notamment à trouver des stratégies intelligentes pour densifier ce tissu tout en améliorant la qualité des « espaces d’un public » et préservant la qualité d’urbanisme du territoire. 1 FOUCHIER Vincent, Les densités urbaines et le développement durable. Le cas de l’Ile-de France et des villes nouvelles, La Documentation Françaises, Paris, 1998. 2 Un nouveau mode de développement urbain, initié par les habitants, maîtrisé par la commune, visant à faire émerger une vie durable des tissus pavillonnaires existants. La première partie du processus de recherche BIMBY a eu lieu durant 3 ans de 2009 à 2012. Elle questionne l’évolution des quartiers pavillonnaires dans nos villes. Elle étudie la division parcellaire et l’intensification de ces tissus afin d’apporter une réponse au manque de foncier et de limiter l’étalement urbain. Ensuite, cette démarche permettait la définition d’outils favorisant la densification pavillonnaire. Elle consiste à donner le droit de bâtir davantage sur la zone à densifier afin de mobiliser des terrains constructibles et donc créer du logement. 3 Il s’agit d’un programme de recherche européenne qui vise à développer des stratégies de renouvellement urbain à l’occasion de la densification périurbaine dans différents pays de l’UE : France, Belgique et Danemark.

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Même si les hypothèses que nous avons proposées ont été validées par les résultats de ce travail, il n’est qu’une étude spécifique à l’échelle de notre terrain d’étude qui n’est pas représentatif du tissu pavillonnaire malgré les différentes formes qui le constituent. Par ailleurs, un vaste travail mériterait d’être mené en expérimentant à grande échelle les hypothèses que nous proposons quant à «l’espace d’un public » dans le cadre du renouvellement urbain.



Sous quelles formes architecturales, urbaines et paysagères se matérialise l’espace public d’un tissu pavillonnaire plus dense? Comment les maîtriser? Quelles sont les modalités les plus respectueuses de l’environnement et des habitants ?

© Safa Ben Khedher

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Comment l’espace public peut-il devenir la colonne vertébrale d’un tissu urbain fragmenté et remettre en question les rapports entre le bâti et le non bâti ?


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4-Densification pavillonnaire Ouvrages FOUCHIER Vincent, Les densités urbaines et le développement durable. Le cas de l’Ile-de-France et des villes nouvelles, Paris, Éditions La Documentation Française, 1988. NAVEZ-BOUCHANINE Françoise, La fragmentation en question. Des villes entre fragmentation spatiale et fragmentation sociale ?, Paris, Éditions L’Harmattan, 2002. SALLEZ Alain, Les cahiers de l’observatoire de la ville n°1, Formes d’habitat et densités urbaines : Quelles opportunités de la ville de demain ?, Février 2007. TOUATI Anastasia et CROZY Jérôme, La densification résidentielle au service du renouvellement urbain : filières, stratégies et outils, Éditions La documentation Française, Paris, 2015.

Articles de Revues

Articles d’ouvrages collectifs HANROT Stéphane, Densifier le pavillonnaire: des principes à la réalité, in TOUATI Anastasia et CROZY Jérôme (sous la dir De), La densification résidentielle au service du renouvellement urbain : filières, stratégies et outils, Paris, Éditions La documentation Française, 2014.

Rapports de recherche INSEE, enquête logement, Paris, 2006. INSEE, 2010 : http://www.insee.fr/fr/themes/document.asp?ref_id=ip136, consulté le 05/01/2015. LE FOLL Benoît et MIET David, «Faire émerger la ville durable des tissus pavillonnaires existants », rapport de projet de recherche ANR-BIMBY, 2010. Http://bimby.fr/content/faireémerger-ville-durable-tissus-pavillonnaires-existants, consulté le 28 avril 2018.

Site internet Bimby.fr

- 151 -

CHARMES Éric, « La Densification des lotissements pavillonnaire de grande banlieue », Études foncières, Ethnologie Française, n°119, 2006, p.14-17. Http://www.cairn.info/revue-ethnologiefrancaise-2010-4-page-639.html, consulté le 29 mars 2018. LE FOLL Benoît et MIET David, « Construire dans mon jardin et résoudre la crise du logement. Cinq idées-clés pour comprendre la filière BIMBY », Métropolitiques, 18 mars 2013. Http:// www.metropolitiques.eu/Construire-dans-mon-jardin-et.html, consulté le 19 février 2018 PETITET Sylvain, «Densifier l’habitat pavillonnaire: des démarches individuelles aux projets collectifs », Métropolitiques, 20 mars 2013. Http://www.metropolitiques.eu/Densifier-l-habitatpavillonnaire.html, consulté le 17 février 2018.


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CONCLUSION

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ANNEXES



1- Comparaison avec l’espace public en ville : entre forme, proximité et usages. Pour mettre en évidence la relation entre la forme de l’espace public, sa qualité urbaine et les pratiques d’usages, nous analysons dans cette partie l’espace public urbain de la ville dans ses dimensions formelles et nous croisons de la même manière que pour l’espace public pavillonnaire, la forme avec les rapports au voisinage et la mobilité.

- 155 -

Le secteur d’étude est le centre historique au Nord de la ville d’Aix-enProvence. Nous étudions un périmètre de surface égale à celle du quartier de Pont de l’Arc (voir figures 60 et 61). Nous considérons la même définition d’espace public que nous avons donné au début de ce travail, à voir tout espace accessible au public et qui peut être le support de la vie collective quel que soit son statut foncier. Nous établissons à travers cette étude, une comparaison entre les espaces publics du pavillonnaire et les espaces publics de la ville dense en terme de foncier, de types, de formes, de pratiques sociales et de proximité.

1

2 0

1km

1 — Centre ville d’Aix-en-Provence 2 — Quartier du Pont de l’Arc

[60] Carte de situation du centre historique d’Aix-en-Provence Bases de donnés de QGIS, consulté le 26 mars 2018


4

3

5 7

9

8

2 6

- 156 -

1

0

500m

1 — Av. Napoléon Bonaparte 2 — Cours Sextius 3 — Av. Jean Jaurès 4 — Bd. Aristide Briand 5 — Cours Saint-Louis 6 — Cous Mirabeau 7 — Place des Cardeurs 8 — Marché fruits et légumes 9 — Place des Pêcheurs

[61] Plan du centre historique d’Aix-en-Provence Bases de donnés de QGIS, consulté le 26 mars 2018


- 157 -

Les espaces accessibles au public dans ce centre historique sont multiples (voir figure 62). On note, en plus des rues, les avenues, les boulevards, les commerces et les services aux rez-de-chaussée des bâtiments qui sont dispersés sur tout le secteur, les équipements administratifs, les places et les jardins. De plus, les voiries, les places et les jardins appartiennent au domaine public. Les commerces et services sont du foncier privé (voir figure 63). Néanmoins, la structure foncière n’empêche pas la vie collective au sein de ses espaces. Les espaces accessibles au public présentent presque la moitié des espaces.

0

200m

NOIR — Bâtiments privés, non accessibles au public GRIS — Parcelles mitoyennes BLANC — Espaces accessibles au public

[62] Plan Nolli : carte d’accessibilité au public Cartographie à partir d’une visite du terrain


- 158 -

0

200m

NOIR — Espaces du domaine privé BLEU — Espaces du domaine public GRIS — Parcelles mitoyennes

[63] Carte du foncier entre le domaine privé et le domaine public Cartographie à partir du cadastre, http://www.geoportail.gouv.fr, consulté le 26 mars 2018


- 159 0

200m

NOIR — Habitations au rez-de-chaussée BLEU — Équipements et services au rez-de-chaussée GRIS FONCÉ — Voiries GRIS CLAIR — Parcelles mitoyennes

[64] La diversité des fonctions au rez-de-chaussée des immeubles d’habitation Http://www.maps.google.fr



- 161 -

En terme de rapport au voisinage, l’espace public urbain présente plusieurs possibilités de croiser, de rencontrer le voisin, de s’arrêter, de discuter et d’établir des relations d’interaction et d’échange avec le monde d’autrui. La convivialité du quartier est assurée par la perméabilité des espaces publics et la porosité entre l’espace d’activités privées et l’espace d’activités publiques. En effet, sur une rue de même longueur que celle d’un lotissement du quartier pavillonnaire étudié, la possibilité du regard est plus facile : un nombre très important de portes, de fenêtres et de balcons qui permettent la transmission du regard et la facilité du contact et de discussion. Ces éléments architecturaux et urbains animent la rue qui devient le support des échanges entre les voisins et avec le monde extérieur (voir figure 65).

0

2m

[65] La multiplicité des ouvertures des façades participe à la scène de l’espace public Cartographie personnelle d’une façade du centre historique d’Aix-en-Provence

Les routes du centre historique d’Aix-en-Provence sont larges, bien aménagées avec des trottoirs d’environ 1m80 de large. Les rues intérieures sont moins larges. Dans le cas où ces derniers ne contiennent pas des trottoirs, le traitement du sol est en pierres. Ce type de sol favorise le déplacement piéton et permet de ralentir la vitesse de la voiture à environ 50 kilomètres par heure (voir figure 66). Les places sont multifonctionnelles : elles peuvent être le support des événements publics comme elles peuvent fonctionner en marché ou en extension des commerces et des services. Ces espaces participent à la vie collective du quartier et la mise en commun des habitants et des passagers. Les commerces qui se trouvent au rez-dechaussée, bien qu’elles appartiennent au domaine privé, participent à l’animation de l’espace public. Dans ce quartier du centre-ville, on trouve tous les services qui répondent aux différents besoins de l’habitant, il n’est pas obligé de se déplacer plus loin, tout est près de chez lui.


B

- 162 -

A

0

1.2m

Séquence 1 NOIR — Sol privé ORANGE — Circulation automobile BLEU — Circulation piétonne

3m

1.2m

200m


16m

0.5m

Séquence 2

6m

1.8m

6m

10m

Séquence 3

3m

5m

3m

Séquence 4

[66] Les séquences d’un parcours piéton de son logement vers la cours Saint-Louis


La relation entre l’espace public et l’espace privé dans la ville dense permet de confirmer l’apport et la nécessité des espaces intermédiaires. Selon leur aménagement et leur porosité, l’ambiance urbaine change. La qualité des espaces publics dans ce centre-ville donne envie de se promener et de s’arrêter. Elle permet l’appropriation du quartier et renforce les relations sociales. La compréhension des enjeux des espaces publics urbains nécessite de se pencher sur ses différents usages. Nous nous intéressons ici à la mobilité dans le quartier afin de comparer les choix modaux en ville à ceux dans le quartier pavillonnaire étudié. La méthode est la même que celle utilisée précédemment : nous analysons les parcours vers l’école et vers les commerces les plus proches et les plus loin d’un immeuble d’habitation qui se trouvent au milieu du périmètre d’étude pour avoir une idée des distances moyennes des déplacements.

- 164 -

Tout comme dans le cas du quartier de Pont de l’Arc, la distance parcourue par un piéton vers sa destination est moins importante que celle parcourue par une voiture. De plus, le temps que prend le piéton est inférieur au temps que prend la voiture (voir les figures 67-72). Cela encourage les habitants de se déplacer à pied plutôt qu’en voiture. Malgré la proximité des commerces et des services dans le centre d’Aix et l’autonomie qu’elle favorise, le transport en commun fonctionne pour permettre le déplacement hors du périmètre. Des arrêts de bus sont aménagés sur les routes de circulation principales d’une manière récurrente. Les espaces publics urbains fonctionnent en tant que support d’échanges et d’interactions entre les gens. Ils sont des espaces collectifs conviviaux qui donnent au quartier une vie et une âme. Indépendamment de leurs statuts foncier, ils participent à la vie collective car ils permettent la possibilité de rencontre et favorisent l’autonomie en terme de besoins et de mobilité. Ces espaces propices à la marche permettent de ralentir la vitesse de vie, de s’arrêter, d’habiter l’extérieur et ne pas le considérer seulement comme un passage. Forme, structure, usages, mobilité, sont des éléments indissociables dans l’appréhension de l’espace public en général.


A

- 165 -

B

0

200m

A — Point de départ B — Point d’arrivée ORANGE — Parcours en voiture BLEU — Parcours à pied

[67] Carte des itinéraires des parcours piéton et automobile de son logement vers l’école

Choix modal

Distance (km)

Temps (m)

Piéton

0.65

8

Automobile

0.7

4

[68] Tableau comparatif des distances et des temps des parcours


A

- 166 -

B

0

200m

A — Point de départ B — Point d’arrivée ORANGE — Parcours en voiture BLEU — Parcours à pied

[69] Les itinéraires des parcours piéton et automobile vers le plus proche commerce

Choix modal

Distance (km)

Temps (m)

Piéton

0.15

2

Automobile

2.1

10

[70] Tableau comparatif des distances et des temps des parcours


- 167 -

A

B

200m

0

A — Point de départ B — Point d’arrivée ORANGE — Parcours en voiture BLEU — Parcours à pied

[71] Les itinéraires des parcours piéton et automobile vers le plus loin commerce

Choix modal

Distance (km)

Temps (m)

Piéton

0.4

2

Automobile

2.6

12

[72] Tableau comparatif des distances et des temps des parcours


1 — Comparaison des statuts du foncier

0

200m

NOIR — Espaces du domaine privé BLEU — Espaces du domaine public GRIS — Parcelles mitoyennes

0

2 — Comparais

NOIR —

B

200m

BLEU — Domaine public (voiries) ORANGE — Voiries et chemins privés GRIS — Divisions parcellaires BLANC — Parcelles privées

NOIR — B GRIS FONCÉ — GRIS CLAIR — Parcelles


son de l’accessibilité au public

0

200m

Bâtiments privés, non accessibles au public GRIS — Parcelles mitoyennes BLANC — Espaces accessibles au public

0

200m

Bâtiments privés, non accessibles au public Parcelles non accessibles au public non bâties, accessible, libres ou agricoles BLANC — Espaces accessibles au public

3 — Comparaison de la diversité programmatique

0

200m

NOIR — Habitations au rez-de-chaussée BLEU — Équipements et services au rez-de-chaussée GRIS FONCÉ — Voiries GRIS CLAIR — Parcelles mitoyennes

0

200m

ORANGE — Voiries aménagées BLEU — Équipements et services GRIS — Voiries non aménagées NOIR — Zone résidentielle

[73] Planche comparative des du quartier de la ville centre et du quartier pavillonnaire Entre le centre historique et le quartier du Pont de l’Arc à Aix-en-Provence


Parcours de son logement vers l’école du quartier

Parcours de son logement vers les commerces

Quartier pavillonnaire (Pont de l’Arc)

Quartier de la ville centre (Aix-en-Provence)

Quartier pavillonnaire (Pont de l’Arc)

Quartier de la ville centre (Aix-en-Provence)

À pied (m)

En voiture (m)

À pied (m)

En voiture (m)

À pied (m)

En voiture (m)

À pied (m)

En voiture (m)

7

4

8

4

6

4

2

10

[74] Tableau de comparaison entre les longueurs de parcours à pied et en voiture


2- Les cartes historiques de l’évolution du quartier du Pont de l’Arc de 1930 à aujourd’hui.

0

200m

0

200m

- 171 -

[75] Carte de 1930 Http://www.geoportail.gouv.fr, consulté le 24 février 2018

[76] Carte de 1955 Http://www.geoportail.gouv.fr, consulté le 24 février 2018


0

200m

0

200m

- 172 -

[77] Carte de 1960 Http://www.geoportail.gouv.fr, consulté le 24 février 2018

[78] Carte de 1975 Http://www.geoportail.gouv.fr, consulté le 24 février 2018


0

200m

0

200m

[79] Carte de 1985

[80] Carte de 1995 Http://www.geoportail.gouv.fr, consulté le 24 février 2018

- 173 -

Http://www.geoportail.gouv.fr, consulté le 24 février 2018


0

[81] Carte de 2017 Http://www.geoportail.gouv.fr, consulté le 24 février 2018

200m


3- La retranscription des deux entretiens faits avec les habitants du quartier du Pont de l’Arc à Aix-en-Provence.

Par rapport au quartier, il s’est rien passé depuis 30 ans. Nous sommes maintenant ici dans une zone de 6 hectares qui est, en fait, urbanisable. Il y a des PLU qui sont mis en place, des plans d’occupation des sols et il y a une refonte de l’urbanisme au niveau national qui a entrainé beaucoup de retard au niveau des nouveaux PLU d’Aix-en Provence. En fait, au niveau de l’évolution, pour vous donner une idée sur un siècle, notre famille est ici depuis 1870. Je suis né dans la bastide. Moi et ma mère avons vendu la bastide à monsieur Ducon (son propriétaire actuel). La dernière urbanisation date de 30 ans et c’était le lotissement de l’Armolière. Tout ce qui aujourd’hui l’autoroute sous le pont de l’arc, il y avait des pâturages, des vaches. Les autoroutes datent des années 1970 même quand il a commencé d’avoir de la grosse urbanisation. Jusqu’à la guerre, le pont de l’arc c’était juste les commerces, d’un côté les immeubles qui datent des années 1960, et jusqu’à la deuxième guerre mondiale, le Pont de l’Arc était juste 5 à 6 maisons mais rien de plus. Les villes c’est un peu comme un concert, quand on regarde ça vue de dessus, au fur et à mesure, vous avez des métastases et chaque fois on rajoute une couronne. Moi je suis menuisier, j’ai 40 ans de métier et j’ai vu un certain nombre de maisons. La grande urbanisation s’est faite suite à la reconstruction après la guerre mondiale, cela a pris vachement du temps. Le pont de l’Arc a bougé dans les années 60-70. Après, de 1985 jusqu’à maintenant, tout s’est figé. Aujourd’hui, on repart d’une phase d’urbanisation mais entre le papier et la réalité, il y a de la marge. Tel que ça était défini dans les nouveaux plans d’occupation des sols, les maisons tout le long des routes, chacune avec ses problèmes d’assainissement, on va vers une redistribution de l’espace ce qui fait qu’on privilégie les petites résidences avec les parkings en dessous et on essaye de conserver un peu de l’espace vert autour plutôt que du lotissement à plat comme ça s’est fait en 1980. Dans les années 1950-1960, il y avait un besoin de masse donc on a fait des HLM et beaucoup des bâtiments. A la fin des années 1960, les gens avaient de l’argent donc n’importe quel ouvrier pouvait se dire bon je peux me faire construire ma maison, je peux avoir ma maisons à moi et donc on a fait beaucoup de lotissements à plat. Sur les 6 hectares qu’ils ont définis à urbaniser, ils ont un coefficient de 0.10 à 0.15. C’est totalement ridicule. C’est une arnaque qui est en train de se mettre en place. Pour qu’il y soit quelqu’un qui a la capacité d’acheter des terrains de 6 hectares, il faut qu’il soit une entreprise, un grand promoteur. Supposons 8 millions pour l’hectare, on sera face à 48 millions. On dit au promoteur, tu prends en charge tout ce qui est l’infrastructure et la viabilisation, les voiries et qu’en compensation,

- 175 -

Entretien 1 Habitant: Hueber, 55 ans, menuisier, fils des propriétaires d’une ancienne bastide. Date: 12 novembre 2016.


la mairie modifie le COS à 0.3 ou 0.45…de manière à ce que tout le monde retombe sur ses pattes. En attendant nous, propriétaires fonciers, dans l’état actuel des choses, le quartier est en phase d’attente. Au centre-ville, les cliniques sont très difficiles d’accès. Les structures de soin que ça soit l’hôpital d’Aix, la clinique Saint Thomas ou la clinique provençale, ce sont des structures très difficiles d’accès. Il faut toujours, avant tout projet, commencer un travail en amant de structure et d’infrastructure.

- 176 -

Pour construire dans les 6 hectares, le promoteur doit avoir l’accord des 11 propriétaires sauf que les intérêts des uns ne sont pas forcément les intérêts des autres. Dans le PLU, par rapport à la zone, seul un plan d’ensemble sera accepté de part la mairie. Notre terrain est nul dans son état actuel dans la réalité sinon dans l’absolu il est cher. Aujourd’hui, ils exigent que dans l’urbanisation, on doit avoir à la fois du social, du commercial, etc… Depuis la construction du lotissement l’Armolière en 1983, il y a plus d’urbanisation. Le lotissement de la Clairnande était construit dans les années 60 suite à la succession de générations. Maman et sa sœur ont gardé la bastide qui a été partagée puis vendu en sa moitié à monsieur Ducon (elle donne sur la façade Ouest) et ma tente vit toujours dans la deuxième moitié (elle donne sur la façade Est). En 1974, ma tente a construit juste là une petite maison et jusqu’à ce momentlà, on était à 4000 m de terrain. Jusqu’à la sortie de la deuxième guerre mondiale, tous les terrains étaient des terres agricoles de jardinage en maraichage. Ma famille était des maraichers. Donc, c’était de la production vivrières fruit et légumes et tout était acheminé sur le marché d’Aix-en-Provence. Mes parents étaient déclarés exploitants agricoles : on avait de la vigne, des raisins de table, des oliviers sur 3 à 4 milles mètres carrés. On était plus sur quelque chose qui visait l’autonomie. Il y avait un canal qui serpentait presque partout et donc on pouvait irriguer principalement les terres qui étaient près du canal. On faisait des légumes, du blé, etc…et puis, sur les terres en arrière qu’on ne peut pas irriguer, on va mettre des vignes, des oliviers, du blé. Dans les années 1800, on a construit un canal extérieur (le canal de Provence) qui serpentait et en même temps que la grande urbanisation, toutes les maisons sont branchées sur le canal de Provence. L’eau est quand même extrêmement importante. La flotte c’est vitale. L’urbanisation est à peu près comme le reste de la société, ça peut se concevoir. Ça me semble complètement nécessaire d’avoir un lieu où les gens puisse se croiser, se voir, se regrouper. Le coup de faire des petites résidences avec de l’espace vert commun me semble une bonne idée. Dans l’idée de l’urbanisation, ça me semble bien d’avoir une place centrale de manière à ce qu’on puisse voir l’autre et le croiser. Si on avait les moyens, on cultive l’individualisme, on ne va pas au-devant des autres. Pour moi, la substance du rapport au contact ne fonctionne plus. L’aménagement des passages piétons, des trottoirs permettent de faire croiser


- 177 -

des gens plutôt que vivre le cloisonnement vécu aujourd’hui. Les distances entre les habitants sont, entre autre, à l’origine de la volonté de se protéger. On n’a pas gardé cette pratique agricole parce que de nos jours ça ne permet pas de vivre, ce n’est pas rentable. Ma famille gagnait de l’argent jusqu’à la sortie de la deuxième guerre mondiale et aujourd’hui les paysans ont lâché. Ceux qui profitent le mieux de cette situation, ce sont les animaux. Là, il y a des troupeaux de sangliers, des cerfs, des vols d’oiseaux du jamais vu. Ils sont ceux qui, aujourd’hui, profitent le plus du désordre urbanistique : ils arrivent à s’adapter au tissu urbain d’une manière remarquable.


Entretien 2 Habitant: Antoine, 45 ans, avocat, propriétaire actuel de la bastide Date: 12 novembre 2016.

- 178 -

On a toujours besoin de l’espace public pour se déplacer. Le problème est que l’espace public ici n’est pas aménagé. Au niveau de la route, il n’y a pas de trottoir, il n’y a rien donc on ne peut pas profiter de l’espace public. On a besoin de l’espace public mais on a du mal, en France, à l’approprier, il n’y a rien que la voiture. Je ne peux pas envoyer ma fille seule descendre en ville car il n’y a pas de sécurité. Si je ne croise personne pendant toute une période, ça ne me dérange pas. Il y a plusieurs problèmes au niveau de l’urbanisme : ici, à l’heure du pointe, c’est complètement bouché, tout le monde prend les mêmes axes, ce n’est pas organisé. A l’entrée, en bas du pont de l’arc, ils ont maintenu une voie dans chaque sens, avec au milieu un terre-plein où il y a des arbres et ça c’est très bien. Après il y a un stationnement, une contre allée et puis les trottoirs. On peut dire que c’est très large mais finalement il n’y a pas plus d’une voie de chaque côté et le résultat que ça ne circule pas. Moi si j’avais eu aménagé cet espace-là, j’en aurais pas forcément fait plus de voie mais j’aurais supprimé tout le stationnement et j’en aurais fait une piste cyclable et un trottoir. J’aurais aussi replanté des arbres. Le problème qu’en France, on part d’un historique et on le maintien : si on a une route qui n’est pas assez grande, on l’élargie mais on ne change pas son fonctionnement. On maintient la possibilité de se garer devant les commerces sur un côté de la rue alors qu’il y a un parking à 5 m. On est dans une aberration totale. Donc il n’y a pas une réflexion urbanistique qui fait que l’espace est perdu et personne n’en profite parce qu’ils sont en 2*1 voie alors qu’il y a 30 m de large donc on aurait pu mettre 4 voies mais aussi en tant que piéton, on prend les risques tous les mètres donc on ne peut pas profiter de l’espace pourtant il est quand même grand. Le parking en bas du pont de l’Arc, on peut même l’étendre car de toute façon c’est une zone inondable où on ne peut pas construire. Après on parle d’un centre à l’entrée mais il n’y a que deux boulangerie, deux boucherie, deux banques…donc penser une infrastructure pour alimenter 3 commerces, ce n’est pas la meilleure solution. Il n’y a pas la variété des commerces, la voiture c’est presque le seul moyen de déplacement, le bus ne fonctionne pas. Il y a un paysan qui vient tondre le champ à côté, ça ne me gêne pas, c’était bien, c’était sympa. Maintenant, c’est le voisin qui amène sa tondeuse mais c’était mieux avant. L’absence de l’agriculture s’explique par la prise des propriétés par les enfants qui eux n’exploitent pas la pratique agricole. Pour notre alimentation, on achète les paniers bios des regroupements des productions biologiques dans les points relais. Le problème de la densification est qu’elle se fait sans pour autant avoir une réflexion urbanistique derrière. Ma logique sera de densifier autant pour que ça soit rentable : une vraie réflexion urbanistique avec des immeubles denses avec des espaces publics autour et là on ne loge pas 250 personnes mais plusieurs milliers de personnes.


Le problème aujourd’hui est que, comme ils ont le droit à la propriété, les gens vendent à un promoteur qui fait cette opération immobilière pour son profil, il construit quelques logements et il pourrit tout le paysage, l’environnement autour. Si on construit au bord de la route, ce n’est pas agréable avec la vue sur la route, les nuisances sonores, etc… Ce problème est dû à un conflit d’intérêt entre la commune qui n’est pas compétente de point de vue urbanisme, le promoteur qui lui cherche le plus de logements pour une rentabilité à court terme et il s’en fou complètement de l’espace public.

Moi je pense exploiter le terrain dans la limite de la rue, qui est sous exploité, pour en faire de l’agriculture, de la production sauf que ce n’est pas tout à fait sécurisé : il n’y a pas de clôtures. Pour faire un maraichage, c’est dommage parce que tout le monde passe devant, c’est au bord de la route, c’est facilement accessible. Néanmoins c’est faisable ailleurs mais ça dépend du degré de civilité des gens. Aujourd’hui, je trouve que c’est compliqué d’avoir l’arbre avec toute sa majesté dans l’espace public sauf que c’est possible d’avoir des murs végétales. On pourra végétaliser plus d’espaces à la verticale pour avoir l’image du jardin terrasse ou du jardin verticale qui pourrai remplacer la qualité du jardin horizontal rattaché à la maison individuelle. Il faut dans ce cas trouver un accord entre le propriétaire de ce mur et la commune pour entretenir cette végétation : ça valorise les maisons, d’une part, et ça améliore la qualité de l’espace public d’autre part.

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Pour ce qui est de l’espace public, les bancs dans la rue permettent l’interaction entre les habitants. Sauf qu’il faut aussi penser la disposition des bancs car parfois ils sont disposés là où il se passe rien du tout et du coup ça n’invite pas à s’arrêter. Les espaces publics tels que les plages, les terrasses sont parfois le support d’une variété de gens qui empêche de se sentir en sécurité, de silence donc on se contente d’entre chez lui dans son pavillon, son jardin et sa piscine. Moi dans ma maison je n’ai pas voulu faire une piscine parce que si je la fait, c’est mort, pour ma fille. Je trouvais que c’était idiot de la priver de la mer et tout le paysage qui va avec. Ce qui devient un luxe aujourd’hui est en réalité une prison, on sait plus comment est la mer, qu’est-ce que toucher du sable, etc…



[1] «L’espace public, le paysage et la périurbanisation: un projet démocratique» © Camilles Vivès...p.16 [2] La construction de l’espace urbain © Peter Downsbrough, New York, 2003.....................................p.22 [3] Plan originale de Letchworth, 1904.....................................................................................................p.41 [4] La cité-jardin d’Ebenezer Howard © Diagrammes de développement d’une ville................................p.42 [5] Broadacre City, Frank Lloyd Wright © Dossier d’architecture, vol.7, avril, 1935..................................p.43 [6] Carte de situation du quartier de Pont de l’Arc à Aix-en-Provence © Base de données de QGIS......p.49 [7] Plan du quartier du Pont de l’Arc à Aix-en-Provence © Base de données de QGIS.....p.51 [8] Le développement de l’urbanisme à Aix-en-Provence © www.geoportail.gouv.fr, p.52. [9] Évolution historique du quartier du Pont de l’Arc depuis 1930 © www.geoportail.gouv.fr....p.56 [10] Plan Nolli: carte d’accessibilité au public © cartographie de Safa Ben Khedher...........................p.59 [11] Photo aérienne du quartier du Pont de l’Arc © www.geoportail.gouv.fr...................................... p.62 [12] Carte du foncier: entre le domaine privé et le domaine public © cartographie de Safa Ben Khedher.......p.65 [13] Un ensemble résidentiel fermé dans le quartier du Pont de l’Arc © Safa Ben Khedher.....p.66 [14] Les marquages de la résidentialisation dans le quartier © Safa Ben Khedher.......................p.67 [15] Diversité des typologies du bâti et des voiries © Safa Ben Khedher...........................................p.74 [16] Les équipements publics à l’entrée du quartier © Safa Ben Khedher.........................................p.76 [17] Espaces de jonctions planifiées © Safa Ben Khedher........................................................................p.77 [18] Espaces résiduels © Safa Ben Khedher.....................................................................................................p.77 [19] Relevé de l’avenue Fortuné Ferrini (Rd8n) © Safa Ben Khedher....................................................p.79 [20] L’aménagement de l’avenue à l’entrée du quartier © Safa Ben Khedher..................................p.80 [21] La rupture de son aménagement au niveau de la partie résidentielle © Safa Ben Khedher.....p.80 [22] Relevé d’un lotissement en impasse (1955) © Safa Ben Khedher...........................................p.82-83 [23] Absence du trottoir dans l’impasse Bourrely © Safa Ben Khedher..............................................p.84 [24] Perspective close: manque de porosité © Safa Ben Khedher........................................................p.85 [25] Relevé du lotissement la Clairnande (1960) © Safa Ben Khedher............................................p.86-87 [26] Une rue intérieure du lotissement © Safa Ben Khedher.....................................................................p.88 [27] La rue parallèle à l’avenue Fortuné Ferrini © Safa Ben Khedher...................................................p.89 [28] Relevé d’un lotissement autour d’une voirie en boucle et linéaire (1960) © Safa Ben Khedher........p.90-91 [29] Vue depuis l’entrée du lotissement © Safa Ben Khedher..................................................................p.92 [30] Relevé du domaine de l’Armelière : voirie linéaire (1985) © Safa Ben Khedher......................p.93 [31] Les équipements et services à l’entrée du quartier © cartographie Safa Ben Khedher.............p.94 [32] Les différentes matérialités des clôtures du quartier © Safa Ben Khedher.............................p.96 [33] Le végétal présent dans les parcelles agricoles © Safa Ben Khedher......................................p.100 [34] Le végétal présent dans les interstices © Safa Ben Khedher........................................................p.100 [35] Alignements d’arbres vers l’ancienne bastide © Safa Ben Khedher..........................................p.101 [36] Le végétal entretenu dans les espaces communs © Safa Ben Khedher..................................p.101 [37] Le végétal au bord de la route © Safa Ben Khedher..........................................................................p.102 [38] Le végétal des haies du lotissement la Clairnande © Safa Ben Khedher................................p.102 [39] La présence du végétal dans les «espaces d’un public» © Safa Ben Khedher.............p.104-105 [40] La présence de la voiture à l’entrée du quartier © Safa Ben Khedher.......................................p.110 [41] Le stationnement des voitures devant les commerces © Safa Ben Khedher........................p.110 [42] Parcours à partir de son logement vers celui de son voisin © Safa Ben Khedher..............p.111 [43] Tableau comparatif des parcours © Safa Ben Khedher....................................................................p.111 [44] Parcours à partir de son logement vers l’école du quartier © Safa Ben Khedher...............p.112 [45] Tableau comparatif des parcours © Safa Ben Khedher....................................................................p.112 [46] Parcours à partir de son logement vers les commerces de proximité © Safa Ben Khedher......p.113 [47] Tableau comparatif des parcours © Safa Ben Khedher...................................................................p.113 [48] Lotissement 1 : tracé de l’itinéraire du parcours piéton © Safa Ben Khedher......................p.115

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CRÉDITS ILLUSTRATIONS


[49] Les séquences du parcours piéton de son logement vers celui de son voisin

© Safa Ben Khedher...................................................................................................................................................p.116-117

[50] Les séquences du parcours piéton de son logement vers l’école du quartier

© Safa Ben Khedher.............................................................................................................................................p.118-119

[51] Les séquences du parcours piéton de son logement vers les commerces de proximité

© Safa Ben Khedher....................................................................................................................................................p.120-121

[52] Lotissement 2 : tracé de l’itinéraire du parcours piéton © Safa Ben Khedher.......................p.122 [53] Les séquences du parcours piéton de son logement vers celui du voisin © Safa Ben Khedher.............................................................................................................................................p.122-123

[54] Les séquences du parcours piéton de son logement vers l’école du quartier

© Safa Ben Khedher.............................................................................................................................................p.124-125

[55] Les séquences du parcours piéton de son logement vers les commerces de proximité

© Safa Ben Khedher...................................................................................................................................................p.126-127

[56] La rupture visuelle due à la forme de la voirie et le type de clôture © Safa Ben Khedher...p.130 [57] La rupture par des escaliers permettant d’atteindre le niveau de l’avenue principale © Safa Ben Khedher....................................................................................................................................................p.130

[58] La rupture de niveau entre l’avenue principale et la partie Est du quartier © Safa Ben Khedher........p.131 [59] Des escaliers à l’entrée de l’ensemble résidentiel fermé l’Olympe © Safa Ben Khedher.....p.131 [60] Carte de situation du centre historique d’Aix-en-Provence © Bases de donnés QGIS...........p.151 [61] Plan du centre historique d’Aix-en-Provence © Bases de donnés de QGIS..............................p.152 [62] Plan Nolli : carte d’accessibilité au public © cartographie Safa Ben Khedher..............................p.153 [63] Carte du foncier entre le domaine privé et le domaine public © cartographie Safa Ben Khedher...p.154 [64] La diversité des fonctions au rez-de-chaussée des immeubles d’habitation © cartographie Safa Ben Khedher, p.155

[65] La multiplicité des ouvertures des façades participe à la scène de l’espace public

© cartographie Safa Ben Khedher................................................................................................................................p.157

[66] Les séquences d’un parcours piéton de son logement vers la cours Saint-Louis

© Safa Ben Khedher.............................................................................................................................................p.158-159

[67] Carte des itinéraires des parcours piéton et automobile de son logement vers l’école © Safa Ben Khedher....................................................................................................................................................p.161

[68] Tableau comparatif des distances et des temps des parcours © Safa Ben Khedher.......p.161 [69] Les itinéraires des parcours piéton et automobile vers le plus proche commerce © cartographie Safa Ben Khedher...............................................................................................................................p.162

[70] Tableau comparatif des distances et des temps des parcours © Safa Ben Khedher.......p.162 [71] Les itinéraires des parcours piéton et automobile vers le plus loin commerce © cartographie Safa Ben Khedher...............................................................................................................................p.163

[72] Tableau comparatif des distances et des temps des parcours © Safa Ben Khedher.......p.163 [73] Planche comparative des du quartier de la ville centre et du quartier pavillonnaire

© Safa Ben Khedher.............................................................................................................................................p.164-165

[74] Tableau de comparaison entre les longueurs de parcours à pied et en voiture

© Safa Ben Khedher..............................................................................................................................................p.166

[75] Carte de 1930 © www.geoportail.gouv.fr.....................................................................................................p.167 [76] Carte de 1955 © www.geoportail.gouv.fr.....................................................................................................p.167 [77] Carte de 1960 © www.geoportail.gouv.fr.....................................................................................................p.168 [78] Carte de 1975 © www.geoportail.gouv.fr.....................................................................................................p.168 [79] Carte de 1985 © www.geoportail.gouv.fr.....................................................................................................p.169 [80] Carte de 1995 © www.geoportail.gouv.fr.....................................................................................................p.169 [81] Carte de 2017 © www.geoportail.gouv.fr.....................................................................................................p.170


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NOTES



L’espace public du pavillonnaire U t o p i e, my t h e o u r é a l i t é ? Le phénomène de la périurbanisation apparu en France dans les années 1960 se poursuit (Bauer & Roux 1979 , Touati & Alii 2015). Il s’est accompagné d’un développement par juxtaposition, souvent stérile, d’entités urbaines, souvent monofonctionnelles. Les grands ensembles, le pavillonnaire et les zones d’activités constituent trois formes dominantes du phénomène de périurbanisation. Cette trilogie n’est pas exclusive d’autres composantes de la ville périurbaine susceptibles de renouvellement et de densification, comme les zones commerciales, les zones d’équipements ou les campus universitaires, mais elle caractérise un continuum urbain, entre le noyau central et la lisière (Sieverts 2004). Face à l’étalement urbain, il paraît nécessaire aujourd’hui de repenser la périurbanisation et l’aménagement du territoire qui en résulte. L’espace public a un rôle important dans la structuration de l’urbain et l’amélioration du cadre de vie. Le tissu pavillonnaire, soumis à un projet de densification qui tend à limiter l’étalement urbain, nous fait penser qu’il est nécessaire de réfléchir, c’est-à-dire observer, étudier et certainement mettre en projet, le rapport qu’entretient, ou devrait entretenir, l’homme (l’habitant) à l’espace public. Ce questionnement préoccupe notre société occidentale plus particulièrement que ce soit pour répondre à un besoin d’échange avec « l’autre «, ou pour engager un développement soutenable et améliorer la qualité de la vie collective des habitants, d’un tissu urbain et des zones d’habitat résidentielle en voie de densification. Ce mémoire est un élément de préparation d’un sujet pour une thèse qui interrogera le devenir de l’espace public pavillonnaire face aux processus de densification. Dans cette optique, il est nécessaire de comprendre le fonctionnement et les usages qui ont lieu aujourd’hui dans les espaces publics pavillonnaires s’ils existent, de clarifier cette notion et distinguer sa nomination: existe-t-il des espaces publics, collectifs, partagés, communs...? Ce travail a pour objectif de théoriser et d’interroger la place, c’està-dire les fonctions, les usages, les représentations des espaces publics dans le périurbain et plus particulièrement dans les quartiers pavillonnaires. Il s’agit d’acquérir des connaissances permettant de penser les processus de densification tout en assurant des bonnes qualités des espaces publics sur le plan foncier, formel, social, économique et environnemental.

Safa Ben Khedher ENSA-Marseille, juin 2018 Stage laboratoire Project[s] Mémoire de fin d’étude parcours recherche archi-safa@outlook.com


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