infosantésuisse Nr.01/2011 français

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info santĂŠsuisse

Health Technology Assessment (HTA)

Le magazine des assureurs-maladie suisses


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Les HTA ne seront pas financés par les primes. Pour être optimum, ils exigent la transparence : transparence des méthodes, des structures et des processus. Stefan Kaufmann dévoile sa vision des HTA dans une interview.

La transparence naît de données scientifiquement fondées. Les chercheurs de l’Institut d’Epidémiologie clinique et de Biostatistique de Bâle (CEB) nous expliquent ce que sont l’Evidence Based Medecine et les HTA.

Le Conseiller d’Etat Carlo Conti s’oppose à la caisse unique. La concurrence régulée, encadrée par les solides gardefous sociaux et le système de réduction des primes, garantit une répartition plus juste et plus souple des ressources limitées qu’une caisse étatique.

Sommaire Sous la loupe

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Un défi pour la Suisse – Nom de code : HTA Sondage. Différents acteurs de la santé donnent leur avis sur les HTA Medical Board : des questions délicates mais nécessaires Interview avec Stefan Kaufmann, directeur de santésuisse CEB : la recherche au service des patients Graphique du mois. Plus d’efficacité pour arrêter la spirale des coûts Combien vaut une vie ?

Domaine de la santé

18 Trois questions à Carlo Conti, Vice-président de la CDS Service

1 9 20 20 21

En Bref. Décision importante du Tribunal fédéral Service. Pour en savoir plus sur les HTA Nouvelles du Monde Image du Mois

No 1, mars 2011 Paraît six fois par an prix de l’abonnement 54 fr. par an, 10 fr. le numéro Éditeur et administration santésuisse, Les assureurs-maladie suisses, Römerstrasse 20, case postale, 4502 Soleure Responsable de la rédaction Maud Hilaire Schenker, Département Communication, Case postale, 4502 Soleure Téléphone : 032 625 41 27, Fax : 032 625 41 51, Courriel : redaction@santesuisse.ch production : Rub Graf-Lehmann AG, Murtenstrasse 40, 3001 Berne Conception de la mise en page  Pomcany’s mise en page  Henriette Lux administration des annonces Toutes les annonces – les offres d’emploi y compris – sont à adresser à : « infosantésuisse », Römerstrasse 20, case postale, 4502 Soleure courriel : redaction@santesuisse.ch Administration des abonnements Téléphone : 032 625 42 74, Fax : 032 625 41 51 Portail : www.santesuisse.ch Page de titre : Heiner Grieder, Langenbruck ISSN 1660-7236


La transparence au service de la qualité Tout patient veut recevoir des soins de qualité, autrement dit la prestation des meilleurs soins et l’atteinte des meilleurs résultats possibles. Or, comment définir la qualité des soins ? Comment l’évaluer ? Comment savoir si une nouvelle prestation est plus efficace et plus adaptée – et par conséquent meilleure – que celle déjà offerte ? Et au final, comment décider si une nouvelle prestation doit être admise et/ou remboursée par l’assurance maladie ? Les Health Technology Assessments (HTA) essaient de répondre à toutes ces questions. Mais de quoi s’agit-il au juste ? Les HTA sont une évaluation pluridisciplinaire des prestations médicales. Ils examinent systématiquement la sécurité, l’efficacité et l’efficience clinique, le coût, le rapport coût-efficacité, les implications organisationnelles et les conséquences sociales, légales et éthiques d’une technologie médicale. Les HTA sont très complexes et leur champs d’investigation sont multiples. Leur but est en revanche très simple : rationaliser notre système de santé, autrement dit, améliorer les pratiques pour mieux employer les ressources limitées sans pour autant nuire à la qualité des soins. Leur seul inconvénient, ils sont encore trop rares en Suisse. De cette apparente opacité, doit jaillir la transparence : transparence des objectifs, des évaluations, des recommandations, des décisions et de leur fondement. Cette transparence permettrait en outre de lever certaines inquiétudes quant à un éventuel rationnement des soins, et d’expliquer concrètement aux assurés pourquoi une prestation ou un médicament n’est pas ou plus remboursé. L’objectif des HTA n’est pas de limiter ou de supprimer l’accès à des prestations utiles. Leur but est de garantir de manière durable un système de haute qualité fondé sur la solidarité, l’accessibilité et l’équité des soins.

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Maud Hilaire Schenker Responsable de la rédaction


Évaluations médico-économiques : vers un consensus national ?

Un défi pour la Suisse – Nom de code : HTA Sous l’acronyme HTA (Health Technology Assessment), se cache un concept qui profiterait à tous les acteurs du système de santé suisse. Son but : systématiser l’évaluation des prestations médicales pour concilier qualité des soins, innovation et économicité. De quelle manière ? Est-ce déjà opérationnel ? L’HTA livre ses secrets.

Progrès de la médecine, hausse constante des dépenses de santé et vieillissement démographique soulèvent une question : comment garantir une qualité des soins optimale pour tous sans mettre en péril la pérennité financière d’un système de santé ouvert à l’innovation ? La solution serait d’évaluer systématiquement les coûts et les avantages des prestations médicales. Il s’agirait d’établir quel est le niveau du bénéfice supplémentaire et des coûts liés à une nouvelle analyse, une nouvelle technique chirurgicale ou un nouveau médicament par rapport à ceux déjà existants. C’est dans ce but précis que les Health Technology Assessments (HTA) se sont développés au niveau international. En Suisse, il manque encore un consensus national pour harmoniser les pratiques et optimiser leur utilisation. Mais face à la complexité de ses évaluations et à l’ampleur des ressources requises, la tâche se révèle ardue. Quelle est la situation actuelle ?

Le groupe libéral-radical a déposé le 16 juin 2010 une motion « Pour une véritable agence nationale de Health Technology Assessment » (10.3451). Texte déposé Pour assurer l’économicité et l’adéquation des soins de santé, le Conseil fédéral est chargé de créer les conditions-cadres pour la création d’une organisation indépendante de « technology assessment », chargée d’analyser l’impact économique (rapport coût-utilité, coût-efficacité, etc.) des nouvelles technologies et prestations médicales, et d’en publier les résultats destinés au public. Le Conseil fédéral a proposé d’accepter la motion.

mettre en place un consensus pour la Suisse. Les assureursmaladie et l’industrie pharmaceutique œuvrent de concert à la réalisation d’un tel projet au sein de SwissHTA (voir page 10–11). De quoi s’agit-il ?

Le concept de Health Technology Assessment (HTA) désigne, dans le monde entier, une évaluation systématique des procédures et technologies médicales. Il est un instrument essentiel du conseil politique et de la prise de décision basés sur les preuves. Ce processus multidisciplinaire, systématique, transparent et objectif, s’appuie sur des méthodes de recherches scientifiquement fondées. Il rassemble des informations relatives aux aspects médicaux, économiques, sociaux et éthiques pour une prestation médicale donnée. Au début du processus, les HTA évaluent de manière systématique les bases factuelles disponibles, en par-

Photo: Prisma

Actuellement, l’assurance-maladie suisse exige la preuve et la vérification systématique de l’efficacité, de l’adéquation et de l’économicité – ce que l’on appelle les critères EAE – des prestations de l’assurance de base (art. 32 LAMal). Or, bon nombre de prestations ne sont jamais évaluées ou le sont de manière insuffisante et ne font pas l’objet de contrôles systématiques.1 Il est donc essentiel d’optimiser l’évaluation systématique des prestations et des médicaments (HTA) et de

Débat parlementaire

Les HTA : une solution au service de notre système de santé.

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ticulier sur l’innocuité et l’efficacité. Puis, ils déterminent le rapport risques-bénéfices en mettant en balance les résultats cliniques souhaités et pertinents pour les patients d’un côté et les potentiels effets indésirables de l’autre. Ensuite, ils analysent la rentabilité en comparant les coûts directs et indirects d’un côté et les bénéfices de l’autre. La quatrième et dernière étape consiste à analyser et évaluer les effets du point de vue éthique et juridique. Actuellement, les HTA jouent surtout un rôle rétrospectif, ils analysent les données déjà existantes. Mais ils pourraient à terme avoir aussi un rôle prospectif et définir quelles sont les preuves nécessaires ou manquantes pour prendre une décision politique.

Glossaire A Appraisal Evaluation (généralement sur la base d’un assessment dans le cadre des HTA) et recommandations tenant compte d’autres critères non pris en compte dans l’assessment, comme par exemple les aspects juridiques, éthiques, sociaux et sociétaux.

Assessment Evaluation scientifique objective à l’aide de critères explicites, souvent standardisés. Les HTA se composent d’appraisals et d’assessments..

E

H HTA Health Technology Assessment

Quels en sont les principes-clés ?

Une étude américaine2 a répertorié les principes-clés, garants d’HTA efficaces et efficients : • Pertinence et explicitation des objectifs : avant de lancer un processus HTA, les problèmes et les objectifs auxquels doivent répondre les HTA doivent être détaillés ; • Transparence et objectivité : les HTA doivent être menés de manière indépendante ; • Prise en considération de toutes les alternatives thérapeutiques pertinentes dans l’évaluation coût-utilité ; • Définition claire des priorités des HTA : quels sont les secteurs qui doivent être analysés en priorité etc. ? • Adéquation des méthodes d’évaluation des rapports coûtsbénéfices ; • Recherche et évaluation de toutes les données valables; • Prise en considération de tous les tenants et les aboutissants éthiques et sociétaux liés à une décision clinique ; • Explicitation des incertitudes qui flottent autour de certains résultats : toutes méthodes d’analyse sont susceptibles d’être biaisées, limitées ou erronées. Les analyses doivent clairement faire part de ses limites ; • Implication de toutes les parties prenantes du système de santé (patients, fournisseurs de prestations, assureurs-maladie, industrie pharmaceutique etc.) ; • Monitorage des découvertes des HTA ; • Communication appropriée des résultats aux différents décisionnaires ; • Transparence et définition claire du lien entre les découvertes des HTA et les prises de décisions politiques.

EAE Efficacité, adéquation et économicité (selon la LAMal)

O Outcome Egalement « conséquence » ou « effet » ; terme générique désignant des conséquences (souvent sur la santé) d’une technologie ; peut aussi (en fonction de la définition concrète) englober les coûts. C’est un élément important dans l’évaluation coût-Bénéfice.

T

Technologie (Technology) La définition très large dans le cadre des HTA peut englober des produits (médicaments, appareils, etc.), des procédures (interventions chirurgicales, concepts thérapeutiques multimodaux, etc.) et des systèmes (programmes de prévention et de soins gérés, etc.).

existants de détermination des prestations de l’assurance de base ? Quelles prestations évaluer en priorité ? Quelle méthode adopter ? Comment gérer les incertitudes et communiquer les résultats ? Comment comparer les données à l’échelle internationale ? Toutefois, un premier pas a été réalisé avec la création de SwissHTA (voir p. 11). Sur le plan politique, les choses avancent aussi puisqu’une motion « Pour une véritable agence nationale de Health Technology Assessment » a été déposée par le parti libéral-radical (voir encadré). Cette proposition rencontrera-t-elle l’adhésion de tous les acteurs de la santé ? Les paris sont lancés. maud hilaire schenker

Vers un consensus national ?

Si les HTA visent un objectif commun, les méthodes pour y parvenir divergent. Aussi la route est-elle encore longue avant la mise en place d’un consensus HTA en Suisse. De nombreux aspects restent à définir que ce soit le cadre institutionnel chargé de réaliser les HTA, le processus de décision, la participation de toutes les parties prenantes ou l’opérationnalisation des critères EAE pour les divers domaines de prestations ainsi que leur ancrage légal. Les questions en suspens font légion : faut-il privilégier les solutions centralisées ou décentralisées pour réaliser les études HTA ? Comment intégrer les résultats des HTA dans les processus

Rapport annuel 2008 du Contrôle parlementaire de l’administration, Annexe au rapport annuel 2008 des Commissions de gestion et de la Délégation des Commissions de gestion des Chambres fédérales, 23 janvier 2009, p6 2 Drummond, Michael F. et al., « Key principles for the improved conduct of health technology assessments for resource allocation decisions », dans International Journal of Technology Assessment in Health Care, 24 :3 (2008), p. 244-258 1

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Sondage : différents acteurs de la santé donnent leur avis sur les HTA

Un seul mot d’ordre : consensus

Photos : màd.

Les évaluations médico-économiques (HTA) examinent de manière systématique l’efficacité, l’adéquation et l’économicité des prestations de soins et rapprochent tous les acteurs de la santé : le scientifique, le politique, le prestataire de soins, l’économiste et le patient. Leurs représentants donnent leur avis sur les HTA. Tous appellent au consensus. Tous voient les HTA comme un gage de qualité, non comme un outil de rationnement.

Pr Gianfranco Domenighetti, économiste, Université de la Suisse Italienne à Lugano

Thomas Heiniger, Conseiller d’Etat (PLR) et directeur de la santé du canton de Zurich

Erika Ziltener, Présidente de l’Association faîtière suisse des patients

Pr John-Paul Vader, Institut de médecine sociale et préventive, Université de Lausanne

Que pensez-vous des HTA ? Comment voyez-vous leur avenir en Suisse ? En quoi les HTA sont-ils nécessaires ?

La croissance des coûts de santé est d’abord la conséquence directe de la diffusion anarchique et exponentielle de « l’innovation » technologique sans évaluation de la plus-value et sans considération d’une utilisation adéquate aux besoins. L’HTA sera donc un outil important qui permettra de disposer des informations nécessaires pour réglementer efficacement la diffusion et l’utilisation des technologies de santé à l’intérieur de l’assurance-maladie sociale et ceci en fonction de leur efficacité réelle. L’avenir en Suisse d’une telle démarche, qui suppose la création d’une institution nationale qui puisse procéder directement ou indirectement à de telles évaluations, est à mon avis lourdement hypothéqué par le fédéralisme,

Les progrès médicaux et techniques ouvrent des possibilités quasi infinies de traitement des maladies. Face à cette pléthore d’offres, les HTA créent la transparence en termes d’efficacité, d’adéquation et d’économicité, tant pour les patients que pour les fournisseurs de prestations. Or, ces critères fixés par la LAMal ne font aujourd’hui l’objet que d’examens ponctuels. Le catalogue des prestations actuellement remboursables est également sujet à modifications, si de nouvelles formes de traitement, tout aussi efficaces mais moins coûteuses, sont disponibles. Les évaluations sont donc aussi nécessaires pour les prestations déjà remboursables. Elles peuvent enfin influencer le développement de nouveaux produits, en mettant en évi-

Il arrive fréquemment de nos jours que des patients reçoivent des soins médicaux hautement spécialisés dont les avantages et le bénéfice pour la santé ne sont pas prouvés, mais qui arrangent les intérêts de divers fournisseurs de prestations. Des études HTA impartiales seraient donc souhaitables d’un point de vue économique, mais aussi pour les patientes et les patients qui sont en droit d’attendre un traitement efficace. Un système d’évaluation international non dépendant des enjeux économiques contribue à réduire les coûts de la santé. Mais il examine aussi l’intérêt d’un traitement et de soins d’un point de vue éthique en tenant compte du bénéfice pour la santé, tout en étant conscient et en acceptant que tout traitement

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L’évaluation des technologies de santé (HTA) est un élément clé dans nos efforts pour réformer et optimiser notre système de santé, et le rendre plus efficace à un coût acceptable. De ce fait, les HTA sont un moyen incontournable et je suis extrêmement content que le Conseil national (Motion Cassis 10-3451) et le Conseil fédéral aient donné un feu vert de principe pour la mise en place et l’exploitation de cet outil. Un tel outil est déjà en place dans nombre d’autres pays et la Suisse est déjà membre d’un réseau international d’agences d’évaluation des technologies de santé. Le canton de Zurich a sauté le pas en créant son « Medical Board », et j’en suis content. Mais ce n’est pas en créant 26 « Medical Boards » que nous aurons rendu ser-


Gianfranco Domenighetti

Thomas Heiniger

Erika Ziltener

John-Paul Vader

soit par l’autonomie cantonale qui nous caractérise.

dence quelles sont les innovations nécessaires et souhaitables. Pour moi, les HTA ne sont pas un instrument de rationnement, mais une contribution visant à optimiser la qualité des traitements.

médical ne soit pas forcément toujours judicieux.

vice aux efforts pour améliorer la performance de notre système de santé. Au contraire.

Quels sont leurs atouts et leurs faiblesses (en Suisse et en général) ?

L’HTA a notamment deux objectifs : le premier, d’ordre scientifique consiste à faire des évaluations systématiques fondées sur des bases factuelles et des données probantes concernant les coûts et les bénéfices relatifs aux traitements médico-sanitaires. Le second objectif, d’ordre politique, vise à fournir les informations et les résultats des évaluations aux responsables politiques et aux autres décideurs. L’avantage potentiel de l’HTA est de promouvoir une utilisation rationnelle des ressources et de minimiser le gaspillage. La faiblesse principale de l’HTA réside dans le manque de consensus concernant le processus et les méthodologies d’analyse et d’évaluation des bénéfices sanitaires des traitements ainsi que des coûts. Il reste aussi de nombreuses questions importantes liées au manque de transparence des méthodes utilisées, à la mise en œuvre tardive des évaluations par rapport aux besoins et à la pertinence des analyses économiques comparatives qui utilisent les coûts exprimés en années de vie gagnée (QUALY)1. 1

L’évaluation des prestations de santé clarifie la situation : quels traitements répondant à quelles indications sont optimaux pour quels groupes de patients ? Ainsi, on évite de fournir des prestations comparativement inefficaces et coûteuses. La faiblesse des HTA réside dans les méthodes d’analyse qui ne sont pas encore uniformisées, rendant ainsi plus difficile la comparaison des résultats. Il faut mettre en place des processus d’évaluation homogènes : ils doivent tenir compte d’une part, du rapport coût-efficacité et, d’autre part, de considérations éthiques. Les discussions portant sur les limites de coûts à rembourser pour certains traitements sont particulièrement délicates. Dans un arrêt rendu il y a quelques semaines, le Tribunal fédéral a créé un précédent en établissant les bases de l’introduction de telles limites (voir page 19). Des processus HTA transparents et reposant sur un large consensus peuvent à l’avenir contribuer à ce que de telles décisions soient prises de manière fondée.

Les avantages sont avant tout de pouvoir évaluer quel est l’intérêt de certaines prestations hautement spécialisées pour les patients et de les soumettre à une évaluation éthique. Le mode d’évaluation et la mise en œuvre des résultats doivent être définis au départ pour éviter que les groupes d’intérêts ne « torpillent » les résultats des évaluations qui leur sont défavorables. La lutte de pouvoir lors de l’évaluation des premières prestations par le Medical Board (MB) l’a prouvé de manière impressionnante. Le MB n’a entre autres pas pu démontrer l’avantage de l’Avastin pour le traitement du cancer du côlon. Le fait que toute chimiothérapie est un traitement lourd souvent accompagné d’effets secondaires importants n’a pas été pris en compte. Une lacune pourrait consister à ne pas garantir dès le départ que seul l’intérêt des patientes et des patients compte et que les HTA soient réalisés de manière impartiale. Faute de quoi, ils subiront le même sort que le MB et seront rejetés.

Une agence d’évaluation des technologies de santé doit pouvoir, indépendamment des lobbys en tout genre (industrie, médecins … mais aussi patients), mais après avoir sollicité, suscité et entendu les points de vue des parties prenantes, étudier sous différents angles (économique, éthique, scientifique, sociétal, etc.) ce que peut apporter une nouvelle technologie à la palette de prestations et d’interventions déjà offertes. Elle doit aussi pouvoir se prononcer sur le fait que ces nouvelles technologies auront à remplacer à bon escient, et peut-être même à moindre coût, des technologies désuètes, mais ancrées dans le système. Ce dernier élément me paraît essentiel. Si un mécanisme pour faire le ménage des prestations inutiles et désuètes fait défaut, nous n’aurons pas les ressources nécessaires pour financer les nouvelles avancées scientifiques et technologiques.

23 656 millions de CHF est le

4,9

Voir page 16–17

Chiffres clés 1300 millions

de dollars US est la somme nécessaire au développement d’un médicament.

5000

est le nombre estimé d’articles publiés par jour dans le domaine de la recherche biomédicale.

montant des prestations brutes pour l’année 2009. Les prestations brutes comprennent aussi les participations aux coûts des assurés.

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milliards de CHF est le chiffre d’affaires total du marché suisse des médicaments.


Photo: Prisma/santésuisse

Concernant les HTA, la Suisse doit rattraper son retard. Les sondés s’accordent tous sur ce point.

Gianfranco Domenighetti

Thomas Heiniger

Erika Ziltener

John-Paul Vader

Quelles sont les mesures à prendre (par les politiques, les scientifiques et les fournisseurs de prestations) pour que les HTA soient un véritable succès ?

Pour des questions d’efficacité, d’équité et de justice, il va de soi que l’HTA n’aura de sens que s’il est implanté au niveau national. Il faudra avant tout trouver un consensus au niveau politique, social, scientifique et des grands partenaires du secteur de la santé quant à l’utilité d’une démarche HTA pour la Suisse. Si un tel consensus venait à se concrétiser, il faudrait en tous les cas prévoir une institution nationale chargée des évaluations des technologies. Celle-ci devrait alors travailler en collaboration avec les écoles universitaires suisses et les autres institutions HTA de l’étranger telles que celles de l’Allemagne, du Canada, de l’Australie et le NICE britannique. Enfin, une base légale qui fera le lien avec la LAMal sera nécessaire. Le succès d’une telle démarche dépendra, à mon avis, si l’HTA est perçu comme un processus utile pour promouvoir l’adéquation des prestations et minimiser le gaspillage ou comme une forme de « rationnement » implicite.

Les responsables politiques doivent créer les conditionscadres favorables à la réalisation d’études d’évaluation des technologies médicales et à la mise en œuvre concrète des résultats de ces recherches. Les autorités d’admission et les fournisseurs de prestations doivent pouvoir en tenir compte dans l’accomplissement de leurs tâches. Il faut que les milieux politiques, scientifiques et les fournisseurs de prestations collaborent et que la Confédération assume la conduite de ces travaux. Les ressources à consacrer à de tels projets étant limitées, l’approche pragmatique consistant à construire à partir de ce qui existe déjà me paraît judicieuse. Je pense au « Medical Board » créé par le canton de Zurich et soutenu aujourd’hui par la CDS, la FMH et l’ASSM (voir page 9). Afin qu’un tel organisme puisse être reconnu au niveau national, il est essentiel que les HTA ne soient pas perçus comme un instrument de rationnement. Il s’agit d’améliorer la qualité des traitements et de garantir l’objectif premier de notre système de santé, un approvisionnement en soins médicalement indiqué, éthiquement défendable et financièrement supportable à long terme.

La Confédération doit assumer la responsabilité des HTA et les parlementaires voter les moyens financiers nécessaires pour garantir l’impartialité des HTA et à long terme les ressources en personnels et les délais requis. Le rôle des fournisseurs de prestations et des bénéficiaires de prestations doit être clair dès le départ et leurs intérêts doivent passer après le bénéfice pour les patientes et les patients. La science doit créer les conditions cadres des HTA, les accompagner et les soutenir de façon à disposer des connaissances, des critères éthiques et des directives nécessaires à l’évaluation et à permettre un travail impartial de haute qualité.

La transparence est un élément fondamental, de même que la participation de toutes les parties prenantes. Tous doivent pouvoir donner leur avis par rapport aux thèmes et technologies qui feront l’objet des évaluations, puis pouvoir donner leur avis dans le processus d’évaluation lui-même. Mais tous doivent aussi être prêts à soutenir et à mettre en œuvre les recommandations des rapports d’évaluation. Les ressources nécessaires pour le travail doivent être mises à disposition, y compris les ressources pour réexaminer périodiquement les technologies déjà évaluées, de manière à faire des ajustements en fonction de l’expérience et des avancées scientifiques et technologiques.

SONDAGE: Silvia Schütz ET Maud Hilaire Schenker

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Canton de Zurich : pionnier des HTA en Suisse

Medical Board : des questions délicates mais nécessaires Au printemps 2008, la direction de la santé du canton de Zurich lançait un projet pilote, le Medical Board, chargé d’évaluer l’efficacité, l’adéquation et l’économicité (EAE) de traitements médicaux. Cinq cas ont déjà été examinés. Le projet pionnier soulève des questions politiques fondamentales.

Le Medical Board est un groupe d’experts venus d’horizons différents (éthique, médecine, soins, droit et économie), indépendant des pouvoirs publics, des fournisseurs de prestations et de l’industrie. Son but est de formuler des recommandations pour la mise en œuvre de traitements médicaux et l’utilisation de technologies diagnostiques. Selon Thomas Heiniger, conseiller d’Etat et directeur de la santé du canton de Zurich, « la recommandation de renoncer à des traitements et des diagnostics inefficaces peut grandement contribuer à la qualité des soins et à la baisse des coûts ». En 2010, le Medical Board a reçu le soutien financier de la direction de la santé publique du canton de Zurich et de la Conférence suisse des directrices et directeurs cantonaux de la santé (CDS). Depuis le début du mois de février 2011, la CDS, la Fédération des médecins suisses (FMH) et l’Académie Suisse des Sciences Médicales (ASSM) font partie de l’organisme responsable du Medical Board. Des recommandations lisibles

Le groupe d’experts rédige des recommandations claires et compréhensibles. Pour y parvenir, il recueille et examine des données, des faits et des études existantes sur les effets médicaux (désirables et indésirables), sur les coûts et sur les rapports coûts/bénéfices. Mais il évalue aussi les résultats d’un point de vue juridique et éthique. Pour être concrètes, les recommandations demandent également que soient définis des critères quantitatifs pour mesurer l’efficacité et les coûts. Par ailleurs, des spécialistes suisses renommés issus de différents domaines de prestations mettent leur savoir-faire à disposition pour les évaluations. Les recommandations qui en ressortent sont ensuite adressées à l’organisme responsable, qui se charge d’une diffusion adaptée au public visé. Leur mise en œuvre peut intervenir à différents niveaux : publication dans des revues spécialisées, adaptation de directives médicales, conditions liées à des mandats de prestations jusqu’à l’introduction de procédures de contestation. A titre d’exemple, citons que dans le cas de la rupture des ligaments croisés, le travail des experts a coûté 150 000 francs. Mais il sera à l’avenir possible d’économiser beaucoup plus si les recommandations sont suivies et les opérations chirurgicales abandonnées dans la moitié des cas au profit de la physiothérapie.

voir l’absence de mesurabilité. L’évaluation explicite du rapport coût/efficacité des prestations médicales a permis de résoudre le problème. Cette mise en œuvre a toutefois donné lieu à des critiques, en cause, l’utilisation du concept QALY (Quality adjusted life year – année de vie gagnée pondérée par la qualité). Selon ce paramètre, une année en bonne santé correspond à un QALY de 1, une année avec une maladie se situe entre 0 (décès) et 1 (en bonne santé) selon la gravité et le type de restriction fonctionnelle dû à la maladie. Ce critère d’évaluation de l’efficacité médicale – « l’année de vie pondérée par la qualité » – peut être rapporté aux coûts. Aux Etats-Unis, par exemple, une année de vie gagnée grâce à la dialyse coûte environ 50 000 dollars. Le prix d’une année de vie : une question délicate

Mais est-il admissible d’évaluer et de discuter des dépenses engagées pour une année de vie supplémentaire ? Le Medical Board s’est posé la question différemment : peut-on mener un débat sur la répartition des ressources limitées sans appliquer de critères quantitatifs pour mesurer l’efficacité et les coûts ? Autrement dit, sans se demander combien un traitement pour une année de vie gagnée coûte réellement et peut/doit coûter ? Suffit-il de comparer différentes alternatives (de traitement) ou faut-il fixer des limites ? Le Medical Board ne se focalise pas sur les limites, mais met l’accent sur la comparaison d’alternatives de traitement. Selon Thomas Heiniger, « la discussion sur les limites est évitée dans notre système de santé, ce qui n’est pas le cas dans d’autres domaines ». Il cite, en guise d’exemple, les mesures de prévention contre les risques naturels. En Suisse, dans ce cas précis, on a fixé à un maximum de 5 millions de francs les coûts qui doivent être investis pour sauver la vie d’un individu. La décision du tribunal fédéral dans le cas du Myozyme (arrêt 9C_334/2010 du 23.11.10. ; publications du TF)1 le prouve aussi, la discussion sur les limites en cas d’interventions médicales devra faire tôt ou tard l’objet d’un débat politique en Suisse. Des recommandations suivies

Les recommandations2 du Medical Board – notamment celles concernant le médicament Bevacizumbab et les ligaments croisés – sont déjà suivies par plusieurs assurances et médecins. Le travail de pionnier s’avère donc payant et sans perte au niveau de la qualité des traitements. silvia schütz

1 2

voir page 19 Les recommandations publiées et d’autres informations sont disponibles sous : www.medical-board.ch

Comment le Medical Board mesure-t-il l’économicité ?

Le Medical Board s’est aussi attaqué à une lacune de l’actuelle évaluation des prestations sur la base des critères EAE, à sa-

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Interview de Stefan Kaufmann, directeur de santésuisse, sur les HTA

Tout ce qui est nouveau est-il nécessairement meilleur ? Tout ce qui est nouveau est-il nécessairement meilleur ? C’est la question que doivent se poser les HTA, selon Stefan Kaufmann, directeur de santésuisse. Pour lui, mettre en place de bons HTA en Suisse est essentiel, si l’on veut rationnaliser notre système de santé. Reste à connaître les modalités d’exécution.

Les HTA sont-ils un outil, gage de la qualité des soins ?

La qualité est un aspect des HTA, notamment quand ils comparent les prestations médicales. Mais ce n’est qu’une partie des HTA. Leur but est avant tout d’évaluer si les nouvelles prestations répondent bien aux critères d’efficacité, d’adaptation et d’économicité définis par la LAMAl (art.32). Dans le monde de la santé, on part souvent du principe que ce qui est nouveau est meilleur, mais ce qui est nouveau est aussi plus cher. Les HTA doivent donc prouver de manière systématique, si la nouvelle prestation apporte réellement une valeur ajoutée par rapport à celles qui existent déjà. Une chose demeure importante : les expertises HTA doivent être neutres et menées de manière indépendante. Actuellement, les seules informations disponibles pour la prise de décision (trancher si un traitement doit être pris en charge par l’assurance de base) sont celles fournies par les entreprises qui ont créé le produit. Les HTA seraient-ils alors un moyen de freiner l’envolée des coûts ?

Non, je ne pense pas que les HTA soient un outil dont le but premier est de réduire les coûts. Dans le monde complexe des prestations médicales, les HTA collectent des informations pour évaluer de manière systématique si un nouveau traitement est plus adéquat, plus efficace et plus économique. Pour être efficients, les HTA doivent être intégrés au quotidien, mais concrétiser un tel projet nécessite des ressources et des procédures claires. On ne peut pas évaluer toutes les prestations. Qui fixerait les priorités ?

Toute nouvelle prestation doit être évaluée. Mais il se pose la question de la réévaluation des prestations. Je suis persuadé que les prestations prioritaires sont celles qui sont le plus souvent utilisées, celles qui ont une grande influence sur les coûts. Il reste à déterminer qui fixe les priorités et comment elles le seront. On pourrait imaginer que la Confédération fasse une analyse des besoins et des priorités et qu’ensuite elle lance un mandat en fonction de ces priorités. On peut aussi imaginer qu’une instance donnée fixe les priorités. Différents modèles sont possibles.

Qui pourrait effectuer les HTA ?

A mon avis, il faut qu’un institut national dirige le programme HTA (comme l’IQWIG en Allemagne ou le NICE en GrandeBretagne). La Suisse est un très petit pays, il faut donc un projet réalisable. La première étape est d’établir des procédures claires pour la Suisse qui définissent la marche à suivre et les priorités. Cet institut national remplirait ces deux fonctions, mais il ne mènerait pas directement les HTA. Les HTA pourraient ensuite être mandatés à l’échelle internationale et réalisés par des instituts et des experts spécialisés dans le domaine en question.

« Dans le monde de la santé, on part souvent du principe que ce qui est nouveau est meilleur.  » Peut-on donc envisager la reprise du modèle du Medical Board ?

Le Medical board pourrait être une institution qui mènerait certains HTA. Il faut cependant distinguer deux points dans les HTA : les « assessments », soit les évaluations en elles-mêmes et les « appraisals », soit les recommandations et les décisions qui découlent de ces évaluations (dans notre cas savoir si une prestation doit être prise en charge par l’assurance-maladie de base). Actuellement, le Medical Board fait des « assessments » et diffusent ses résultats, mais ensuite rien n’oblige à suivre ou non ses recommandations. Le Medical Board pourrait faire les assessments et postuler pour obtenir les mandats. On pourrait même imaginer que le Medical Board soit l’institut suisse qui dirige les HTA. Cependant, la décision finale, qui repose sur ses assessments, doit suivre la procédure actuelle. Ce qu’il faut modifier, ce n’est pas l’issue – la décision – mais plutôt ce qui fonde la décision – les données fournies.

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Photo: Henriette Lux

fait du déplacement du financement des soins des impôts vers les primes. Nombre de prestations relevant autrefois du domaine stationnaire (remboursées à 50 % par les cantons) étant aujourd’hui ambulatoires (remboursées à 100 % par l’assurance maladie), le financement s’est en effet modifié. Les programmes HTA soulèvent des questions éthiques délicates, relatives notamment aux échelles de valeur du type QALY souvent controversée.

Selon Stefan Kaufmann, les données nécessaires aux HTA ne doivent pas seulement provenir des entreprises qui produisent la technologie à évaluer.

Tous ces concepts QALY et autres sont des aides pour prendre des décisions, ils sont des outils, des indicateurs précis et concrets. Ils ne sont toutefois pas le critère déterminant. Il est difficile de dire que telle ou telle prestation ne sera pas remboursée parce qu’elle a tel ou tel indice QALY. Derrière, se cache toujours une question éthique, des questions souvent délicates. Personne ne veut prendre ces décisions. Toutefois, ces décisions sont nécessaires. Mais les aspects économiques ne sont pas les seuls à entrer en ligne de compte.

« En tous les cas, ils ne seront pas financés par les primes.  » Quel serait exactement le rôle de la Confédération ?

Aujourd’hui, les rôles de la confédération sont mêlés : elle doit faire les « assessments » et les « appraisals », notamment dans le domaine des médicaments. Les entreprises fournissent les informations nécessaires pour élaborer un assessment. Sur cette base, la Commission fédérale des médicaments et la commission fédérale des prestations générales et des principes conseillent l’OFSP pour l’établissement de la liste des spécialités et de la liste des moyens et des appareils (LiMA) et dans l’élaboration de dispositions. A l’avenir, il faudrait que les assessments des HTA et les appraisals soient clairement séparés. Les appraisals pourraient ainsi être effectués de manière indépendante. Il n’est pas impératif qu’ils soient menés par l’OFSP. C’est une question politique de savoir qui au final est légitime pour prendre de telles décisions : le monde politique ou une institution experte qui se baserait sur les rapports HTA ? Même avec un rapport d’assessment, tout n’est pas noir ou blanc, il y a toujours une part politique.

La mise en place d’un tel projet nécessite, on le voit, au préalable réflexion et dialogue. Est-ce pour cette raison qu’a été créé le projet SwissHTA ?

Le but du projet SwissHTA (voir encadré) est de soumettre des propositions pour implanter de « bons » HTA en Suisse, en prenant en considération les institutions existantes et la culture suisse. Le projet SwissHTA ne veut pas partir de rien. Il veut améliorer et changer ce qui doit l’être. Le projet a invité tous les acteurs du monde de la santé à prendre part à la discussion. Nous sommes convaincus, et les expériences étrangères l’ont aussi prouvé, qu’une discussion ouverte entre les partenaires est essentielle. Chaque partenaire apporte en effet un point de vue différent, mais utile. Interview : maud hilaire schenker

SwissHTA : qu’est-ce que c’est ?

« C’est une question politique de savoir qui au final est légitime pour prendre   de telles décisions. » Et qui financerait ces programmes ?

C’est une question passionnante. Là encore, différentes possibilités sont envisageables : par exemple, les entreprises qui veulent soumettre un produit à l’assurance-maladie de base pourraient payer les assessments. On peut aussi imaginer un financement mixte : une part serait payée par les entreprises et une autre part par les impôts. Mais les assessments resteraient neutres et indépendants. Le fait que les entreprises financent ne signifie pas qu’elles aient leur mot à dire sur les assessments. En tous les cas, ils ne seront pas financés par les primes. La pression sur les primes est déjà suffisante, du

SwissHTA est le fruit de la collaboration de santésuisse et d’interpharma. Son but est de trouver un consensus national aboutissant à la création d’un programme HTA suisse. Aussi favorise-t-il la rencontre des différents acteurs du système de santé lors d’ateliers de réflexions et de conférences. Des problèmes-clés y sont abordés comme les questions méthodologiques, financières, institutionnelles, légales etc. Des économistes de la santé renommés sont ainsi venus présenter les expériences étrangères en matière d’HTA et les différentes facettes du très controversé QALY. Le consensus national doit concilier les connaissances scientifiques en matière d’économie de santé, les conditions générales institutionnelles et légales, les objectifs nationaux en matière de santé et les volontés sociales du peuple suisse. Plus d’informations sur le site Internet www.swisshta.ch.

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CEB : recherche clinique, enseignement et évaluation des technologies à Bâle

La recherche au service des patients Photo : Silvia Schütz

L’Institut d’Epidémiologie clinique et de Biostatistiques (CEB) est l’un des rares instituts de Suisse, dont les collaborateurs sont sollicités au niveau international, en qualité d’experts, pour effectuer des Health Technology Assessments (HTA) ou évaluations des technologies de la santé. L’institut publie aussi régulièrement dans des revues de renom ses recherches sur certains traitements médicaux (des « méta-analyses »). Le but de ces analyses est de fournir aux médecins les éléments de décision factuels qui leur manquent dans la pratique.

Comment distinguer une infection virale d’une infection bactérienne ? Les médecins de premier recours ont bien souvent du mal à répondre à cette question, notamment pour le traitement de la sinusite. Les symptômes sont identiques dans les deux cas. Les médecins ont donc tendance à prescrire trop d’antibiotiques contre des infections présumées d’origine bactérienne. Les directives existantes les y encouragent : elles recommandent en effet le recours aux antibiotiques lorsque les symptômes persistent entre sept et dix jours. C’est ce genre de situation qui interpelle le CEB (www.ceb-institute.org)1. Etude sur les antibiotiques

En collaboration avec d’autres chercheurs, Heiner C. Bucher a constaté, en ré-analysant les données individuelles existantes de 2547 patients ayant souffert d’une sinusite (métaanalyse), que le traitement antibiotique ne se justifiait pas pour les symptômes et signes cliniques usuels, même si ceuxci durent entre sept et dix jours. L’analyse a révélé que les patients souffrant d’une infection des voies respiratoires supérieures pendant plus de huit jours reçoivent souvent des antibiotiques, leur infection étant prise par erreur pour une sinusite d’origine bactérienne. De plus, dans 64 % des cas, ces infections guérissent spontanément, sans traitement, après deux semaines. Les données n’ont permis d’identifier aucun sous-groupe dans lequel les symptômes et signes cliniques habituels d’une sinusite sont imputables à une infection bactérienne. Il a donc été conclu que « les symptômes et signes cliniques ne permettent pas d’identifier des patients pour lesquels un traitement antibiotique est indiqué. Ceuxci ne doivent pas être systématiquement prescrits, même si les symptômes durent entre sept et dix jours ».2 Des bases de décision factuelles

« Les analyses s’appuyant sur des données individuelles de patients sont complexes et durent généralement trois ans, mais elles permettent de réexaminer une problématique sur la base de données existantes », explique Heiner C. Bucher

Le professeur Heiner C. Bucher, directeur du BICE et professeur à l’Université de Bâle et deux de ses collaborateurs, le professeur Matthias Briel et le Dr Heike Raatz, devant le bâtiment du Basel Institute for Clinical Epidemiology and Biostatistics (CEB).

dans son bureau situé sur le campus de l’Université de Bâle. Le soleil brille en cette belle journée de février et à l’intérieur du CEB, la petite équipe de dix-neuf personnes travaille sans relâche. Les travaux sont publiés afin de fournir aux médecins praticiens et aux cliniques des informations factuelles permettant de prendre des décisions médicales rationnelles pour le bien des patients. 75 % d’antibiotiques inutiles

Dans le bureau voisin, Matthias Briel a étudié avec des collègues de l’hôpital universitaire de Bâle comment les anti-

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L’Evibox au secours des praticiens

Le CEB est en train de programmer les résultats des analyses sous formes d’aides diagnostiques factuelles pour les smartphones, iPad, PC et ordinateurs portables afin de faciliter la tâche des praticiens. Heiner C. Bucher montre le fonctionnement de l’Evibox sur un iPhone et un PC en prenant le cas d’un patient hospitalisé aux urgences. La gravité est évaluée à l’aide de questions auxquelles le médecin répond par oui/non ou une estimation (« Le patient est-il épuisé ? », « Souffre-t-il d’une maladie des artères coronaires ? », etc.). Ce diagnostic rapide permet au médecin de savoir s’il doit ou non hospitaliser le patient. « Notre objectif premier n’est pas de faire des économies, mais d’améliorer le suivi des patients en leur proposant le traitement le mieux adapté à leurs besoins », affirme Heiner C. Bucher qui dirige une équipe très motivée. Des HTA pour des clients étrangers

Les HTA sont des évaluations systématiques des traitements médicaux suivant les méthodes de la médecine factuelle. Ils consistent à examiner à la fois les traitements médicamenteux et non médicamenteux ainsi que les mesures diagnostiques. Il s’agit fréquemment de l’évaluation systématique de faits existants. En leur absence, un HTA peut être à l’origine d’une nouvelle étude. L’étendue des aspects à étudier (efficacité clinique, risques, aspects sociaux, économiques et éthiques etc.) dépend des questions auxquelles le HTA doit répondre et des décisions (ou clients) pour lesquelles le rapport doit servir de base de décision. Les projets peuvent avoir des durées relativement courtes de quelques semaines ou quelques mois ou s’étendre sur une à deux années. De nombreuses organisations de HTA font appel à des experts externes pour évaluer des technologies. Le CEB travaille, sous la responsabilité du Dr Heike Raatz, en tant que

Point de mire Johann Steurer, professeur et médecin, directeur du Centre Horten de recherches appliquées et de transmission du savoir, Zurich.

Photo: mad.

biotiques pouvaient être évités dans la médecine de premiers recours sans que les patients n’aient à craindre davantage de complications. Car bien que les infections des voies respiratoires soient plus souvent provoquées par des virus que par des bactéries, les médecins de premier recours prescrivent dans 50 % des cas des antibiotiques pour combattre une infection soi-disant bactérienne. Or, les patients risquent de développer des résistances en cas de prescription trop fréquente. Une étude randomisée auprès de médecins de premier recours en Suisse du Nord-Ouest a révélé que les médecins qui se fondent sur le dosage de la procalcitonine pour décider ou non d’utiliser des antibiotiques lors d’une infection des voies respiratoires inférieures, prescrivent moins d’antibiotiques. La procalcitonine est un marqueur d’infection d’un genre nouveau dont le taux sanguin s’élève lors d’une infection bactérienne. « 75 % des antibiotiques pourraient être évités si les médecins pratiquaient ce test », explique Matthias Briel. La conclusion dans ce cas est « de ne prescrire des antibiotiques qu’en cas de dosage élevé de la procalcitonine ».3

Rapports d’évaluation des technologies médicales : politiciens de la santé, gare aux conclusions qui s’imposent ! Au président américain se demandant comment le système de santé doit être financé, un médecin lui a répondu du tac au tac : « Définissez ce qu’est la bonne médecine et payez-là ». Les rapports d’évaluation des technologies de la santé (HTA) précisent ce que l’on entend par « bonne médecine ». En tenant compte des aspects sociaux, juridiques et éthiques – quoiqu’ils signifient concrètement – les rapports HTA évaluent l’efficacité, la sécurité et les coûts des interventions médicales. Les données sur l’efficacité et la sécurité s’appuient sur les résultats des recherches. Le plus souvent à partir de plusieurs études, il s’agit d’effectuer de manière sérieuse la synthèse des bases factuelles relatives à l’efficacité et à la sécurité, ce qui exige des compétences et n’est pas aussi simple que certains l’imaginent. Si les calculs de coûts se fondent en partie sur les données factuelles, les rapports coût-utilité des technologies étudiées sont pour une part établis sur la base d’hypothèses difficiles à vérifier. La rédaction de rapports HTA exige travail et argent. Les autorités politiques qui, en règle générale, commandent ces rapports devraient donc d’abord réfléchir à la question suivante : doivent-elles et ont-elles le droit de dépenser l’argent des contribuables pour réclamer de tels rapports si ensuite, pour des raisons de calcul et de tactique électorale, elles n’en tirent pas les conclusions qui s’imposent ?

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silvia schütz

Le site n’existe qu’en allemand et en anglais Jim Young, An De Sutter, Dan Merenstein, Gerrit A van Essen, Laurent Kaiser, Helena Varonen, Ian Williamson, Heiner C Bucher, « Antibiotics for adults with clinically diagnosed acuterhinosinusitis : a meta-analysis of individual patient data », dans Lancet 2008 ; 371 : 908–14. 3 Matthias Briel ; Philipp Schuetz, Beat Mueller, Jim Young, Ursula Schild, Charly Nusbaumer, Pierre Périat Heiner C. Bucher, Mirjam Christ-Crain, ProcalcitoninGuided Antibiotic Use vs a Standard Approach for Acute Respiratory Tract Infections in Primary Care, Archives Intern Medicine 2008 ; 168 : 2000-7. 4 Rapport pour l’IQWiG : https ://www.iqwig.de/d06-01a-positronen-emissionstomographie-pet-bei.986.html ?tid=1135 5 EUnetHTA : http ://www.eunethta.eu/Public/About_EUnetHTA/HTA/ 1 2

Photo: Silvia Schütz

spécialiste externe pour des clients internationaux comme le Deutsche Institut für Qualität und Wirtschaflichkeit im Gesundheitswesen (Institut allemand pour la qualité et l’économicité du système de santé - IQWIG) ou le National Institute for Health and Clinical Excellence (NICE) de Grande-Bretagne. En collaboration avec d’autres experts – fréquemment aussi dans le cadre de coopérations internationales –, le CEB évalue les faits pour déterminer les avantages d’une technologie pour les patients, par exemple la tomographie par émission de positrons (TEP et TEP/CT) pour les malades atteints d’un lymphome. Il participe aussi à la rédaction de rapports.4 Un traitement et une évaluation si possible exhaustifs, systématiques et transparents des faits existants est à la base de tout HTA. Une présentation transparente des résultats et des évaluations doit permettre aux décideurs d’arrêter par exemple si une mesure thérapeutique doit être admise ou remboursée. A la demande du réseau suisse de HTA, le CEB participe aussi au projet EUnetHTA5. Le but de ce projet financé par la Commission européenne est de regrouper les ressources existantes en Europe pour la réalisation – longue et coûteuse – de HTA. L’élaboration de « Core HTA » selon une méthode standardisée et la collecte systématique d’informations provenant de HTA nationaux doit permettre à l’avenir aux organisations européennes de HTA d’utiliser ces informations pour leurs propres HTA et de les adapter simplement à leurs caractéristiques locales. « La méthode est en cours de développement et la pratique nous montrera l’efficacité de ce concept », explique Heike Raatz. Un bon HTA, affirment tous les membres du CEB, se distingue par la transparence, une méthode irréprochable, la qualité et l’impartialité des groupes d’intérêts. Par ailleurs, selon Heiner C. Bucher, les traitements à analyser doivent être choisis par un comité d’experts indépendant et les HTA faire l’objet d’un appel d’offre international.

3 questions à Heiner C. Bucher « Les HTA sont dans l’intérêt même des consommateurs avertis » Pourquoi n’existe-t-il pas encore de HTA à l’échelon national en Suisse ? Les raisons sont multiples. L’une des principales est sans doute la structure d’approvisionnement fédéraliste du système de santé suisse dans lequel les cantons sont également des fournisseurs de prestations. Il n’y a donc pas de système d’incitation efficace pour examiner les prestations sur la base des faits et de l’efficacité. Bien que nous ayons l’un des systèmes de santé les plus chers d’Europe, il y a encore trop peu d’incitations à fournir des offres médicales efficaces et probantes. Peu de citoyens se demandent visiblement si la prestation et la qualité sont à la hauteur des dépenses. Or, les HTA sont dans l’intérêt même des consommateurs avertis. A quoi servent les HTA ? Ils nous permettent de mieux utiliser les ressources et de distinguer les traitements réellement bénéfiques pour les patients de ceux qui ne le sont pas voire qui sont mêmes nuisibles. Les HTA permettent aux décideurs du système de santé de disposer de bases plus objectives afin de mieux utiliser les ressources limitées du système de santé et offrir des avantages optimaux aux patients. Les HTA peuvent aussi révéler des lacunes au niveau de la pratique et la nécessité d’effectuer des recherches supplémentaires. Par exemple ? Nous avons besoin de nouveaux tests diagnostiques dans la médecine de premier recours afin d’optimiser la prescription des antibiotiques. En dépit des moyens du fonds national, nous n’avons pas réussi à réunir les sommes nécessaires pour réaliser une étude auprès des médecins de premier recours et avons dû rendre les fonds accordés.

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Graphique du mois

Plus d’efficacité pour arrêter la spirale des coûts Une étude de l’OCDE le prouve : améliorer l’efficacité des soins et donc leur qualité endiguerait l’envolée des coûts sur le moyen terme. Autrement dit, un système de santé toujours plus coûteux n’est pas synonyme de qualité.

du Sud et la Suisse sont les pays qui obtiennent les meilleurs résultats sur le plan de la santé pour l’argent qui y est consacré. Si la Suisse semble avoir un bon rapport coût-efficacité, elle pourrait encore réduire ses dépenses de santé d’environ 0.5 % du PIB d’ici 2017. La Grèce, les Etats-Unis, l’Irlande et le Royaume-Uni sont les pays où la marge d’amélioration des résultats, sans accroissements des dépenses, est la plus importante.

Les gouvernements doivent améliorer l’efficacité de leurs systèmes de santé s’ils veulent maintenir la qualité des soins sans créer davantage de tensions sur les finances publiques, telle est la conclusion d’un rapport de l’OCDE. Ainsi, les gouvernements ne peuvent plus augmenter les dépenses pour améliorer les résultats de santé, comme ils l’ont fait pendant plusieurs décennies.

Efficacité accrue = qualité accrue à coût constant

En gagnant en efficacité, les pays continueraient d’améliorer la qualité des soins à coût constant, selon le rapport de l’OCDE. L’adoption des meilleures pratiques pourrait réduire les coûts de près de 2 % du PIB d’ici 2017, au niveau de l’ensemble de l’OCDE, par rapport à un scénario sans réformes. Si tous les pays devenaient aussi efficients que les pays les plus performants, l’espérance de vie à la naissance pourrait augmenter de plus de deux ans, en moyenne, dans la zone de l’OCDE, sans aucune augmentation des dépenses de santé. A titre de comparaison, un accroissement de 10 % des dépenses de santé allongerait l’espérance de vie de trois ou quatre mois, si l’ampleur des inefficiences restait inchangée.1

De grosses dépenses de santé

Les soins de santé sont aujourd’hui l’un des plus gros postes de dépenses pour les gouvernements. Ils représentent en moyenne 15 % des dépenses publiques des pays de l’OCDE. Et les coûts continuent de croître. Certes, les dépenses accrues ont entraîné une amélioration continue des résultats en termes de santé : allongement de l’espérance de vie d’un an tous les quatre ans, augmentation des taux de survie à des maladies comme le cancer etc. Mais la hausse ne peut se poursuivre indéfiniment sans peser trop lourdement sur les assurés.

maud hilaire schenker

Des écarts d’efficacité entre les pays

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Des analyses comparatives révèlent des écarts d’efficacité dans les systèmes de santé. L’Australie, le Japon, la Corée

Le rapport de l’OCDE analyse les liens entre les choix de politique et l’efficacité du système de santé et fait des suggestions spécifiques pour des améliorations, pays par pays. Pour plus d’informations : www.ocde.org

economies potentielles dues a une plus grande efficience des depenses publiques de sante  % PIB 2017 SOURCE : OCDE

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Si la Suisse est déjà très efficiente à l’échelle internationale, des améliorations sont toujours possibles.

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Regard sur les expériences européennes en matière d’HTA

Combien vaut une vie ? La vie a-t-elle un prix ? Si oui, lequel ? 100 000, 500 000, 1 million de francs ? Cette question éthique choquante affleure sur toutes les lèvres face à la montée constante des coûts de la santé. Les HTA aideront peut-être à répondre à cette question. Encore faut-il avoir un programme HTA structuré et coordonné à l’échelle nationale. Regard croisé sur la question en Europe.

fournies unilatéralement par l’industrie, les intérêts particuliers, des experts ou encore sur les décisions prises à l’étranger. Le défi est donc de rationaliser et d’optimiser la prise de décision, sans pour autant créer des livres de recettes toutes prêtes, et de les intégrer dans le processus décisionnaire existant. Pour ce faire, les évaluations HTA doivent se systématiser, s’adapter aux priorités de santé publique, être structurées et coordonnées à l’échelle nationale.

Combien au maximum peut rembourser l’assurance-maladie de base pour un traitement donné, sans que cela ne pèse trop lourdement sur la collectivité ? Actuellement, en Suisse, aucun cadre légal ne permet de répondre à cette question. Quoi qu’il en soit, les politiques devront tôt ou tard s’atteler au problème s’ils veulent garantir un système de santé solidaire. Les évaluations médico-économiques HTA permettront peut-être de donner une réponse, à condition que soit mis en place un consensus national. Il convient néanmoins de préciser que le but des HTA n’est pas tant d’évaluer le coût d’une vie, que d’estimer la valeur-ajoutée d’un nouveau traitement. Autrement dit, ce dernier est-il plus efficace et efficient que celui déjà existant ? Plusieurs états européens ont déjà mis en place de tels programmes nationaux.

Leçon 2 : unité de méthode, unité d’organisation

Situation actuelle en Europe

Les HTA se sont développés au milieu des années 60 en Europe, quand des groupes de chercheurs se sont interrogés sur les implications politiques, sociales et économiques de l’introduction de technologies médicales. La première agence nationale pour les HTA n’a cependant été créée qu’en 1987, en Suède. Son but était alors d’informer le gouvernement suédois et les comtés sur les technologies de santé. Depuis, leur nombre n’a cessé d’augmenter. Les HTA sont aujourd’hui considérés en Europe comme un élément essentiel à l’amélioration de la qualité des systèmes de santé. Les pratiques, les mandats et les rapports au monde politique sont toutefois hétérogènes, à l’image des systèmes de santé. On distingue principalement deux types d’agence, celles qui agissent au niveau régional ou national et celles qui opèrent au sein des hôpitaux, les aidant à prendre des décisions organisationnelles. Généralement, elles ont un but non lucratif et sont financées par l’argent public. Face à tant de diversité, quelles leçons peut tirer la Suisse ? Leçon 1 : passer d’assessments sporadiques à une systématisation des HTA

Même si un pays ne possède pas de programme HTA clairement défini, les autorités de santé doivent toujours prendre des décisions politiques concernant l’adoption d’une nouvelle technologie. Elles s’appuient alors sur les informations

Il est bien évident que le succès des HTA dépend de la qualité des rapports, de la communication et de la diffusion des informations. Il est donc nécessaire d’avoir une harmonisation des pratiques et des méthodes pour permettre la circulation des données et leur lisibilité par les différents acteurs. Il faut donc fixer la méthode à adopter. En Allemagne par exemple, deux organismes mènent les HTA : la Deutsche Agentur für Health Technology Assessment (DAHTA@DIMDI) l’Institut für Qualität und Wirtschaflichkeit im Gesundheitswesen IQWiG). Or, les méthodes utilisées par l’IQWiG ont essuyé de nombreuses critiques, jugées trop complexes, et donc impraticables. Les premières ébauches méthodologiques ont donc été profondément remaniées. En France, en revanche, les évaluations médico-économiques des technologies sont menées par un seul organisme, la Haute Autorité de Santé (HAS), qui coordonne toutes les activités liées à la qualité des soins (HTA, guides des pratiques professionnelles, accréditations des hôpitaux). Cette unité permet de définir les priorités nationales et de gagner en efficience. Leçon 3 : coopérer avec les autres pays

Les HTA ne sont pertinents que pris dans le contexte politique et le système de santé d’un pays donné. Toutefois, face à la tâche colossale que représente l’évaluation systématique de toute prestation de santé, il serait intéressant de pouvoir utiliser les HTA déjà élaborés à l’étranger. Un monitorage des résultats et une uniformisation des pratiques seraient ainsi utiles. Différents organismes à but non lucratif favorisent la coordination internationale comme l’International network Agencies for Health Technology Assessment –INAHTA qui rassemble 50 agences HTA financées par des fonds publiques de 26 pays différents ou encore l’EUnetHTA (the European Network for Health Technology Assessment) qui rapproche des agences HTA, des unités ministérielles et des groupes de recherches de pays où il n’existe pas d’agences HTA formellement établies. Elle compte 54 partenaires issus de 31 pays européens. Mais la route reste longue avant une coopération transnationale efficace. Reste à résoudre l’ultime énigme. Leçon 4 : comment évaluer le coût de la vie ?

Deux méthodes s’opposent. La première a cours en GrandeBretagne et est appliquée par le National Institute for Health and Clinical Excellence (NICE). La seconde essaie de rationaliser le système en prenant également en compte des facteurs sociaux et sociétaux.

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Questions à Gérard de Pourvourville Ce professeur, titulaire de la Chaire d’Economie de la Santé à l’ESSEC Business School (France), a été conseiller scientifique du Ministère de la Santé français et consultant auprès de laboratoires pharmaceutiques. Quels sont les avantages et les inconvénients des HTA en France ? L’HTA en France est du ressort quasi-exclusif de la Haute Autorité de Santé, par le biais de sa Direction Médicale, Economique et de Santé Publique, mais également par le travail de commissions spécialisées dont l’objet principal est l’évaluation des médicaments et produits de santé avant l’admission au remboursement par l’Assurance Maladie. Quatre commissions sont impliquées : la Commission de la Transparence pour les médicaments, la Commission nationale d’évaluation des dispositifs médicaux et des technologies de santé, la Commission d’Evaluation des actes professionnels, et une commission transversale, la Commission d’Evaluation Economique et de Santé Publique. L’Assurance Maladie a également investi depuis quelques années dans l’analyse des bases de remboursement pour évaluer les pratiques de soins. Certains établissements hospitaliers universitaires ont aussi mis en place des services de HTA pour guider leurs décisions en matière d’adoption des innovations. Plutôt que de parler d’avantages et d’inconvénients, je mettrai l’accent sur les points forts et les points faibles. Il existe en France un fort potentiel d’expertise technique en évaluation, sans doute encore insuffisante en évaluation économique. Les évaluations sont principalement cliniques et un point faible essentiel est l’absence relative de mécanismes incitatifs à la mise en œuvre des recommandations pour changer les pratiques. En France, peut-on évaluer l’impact des HTA sur les coûts de la santé ? L’objectif du HTA est d’améliorer le rendement de la dépense, pas seulement de diminuer les coûts. Ceci ne sera observable que si l’HTA conduit à identifier des gaspillages – le financement de traitements non efficaces – ou à identifier les traitements les moins chers à efficacité égale. Il n’est pas possible aujourd’hui d’évaluer un impact global des activités de HTA à la fois sur l’efficience et les coûts, car il manque un dispositif incitatif d’application des recommandations. Des succès certains ont néanmoins été obtenus sur la prescription d’antibiotiques, fort enjeu de santé publique à cause du développement de résistances et sur la pénétration des médicaments génériques. Quels sont les éléments indispensables à un programme HTA national ? Il me semble qu’il y a quatre facteurs clés de succès : • une institution indépendante dont le financement est garanti, qui peut réaliser elle-même les études requises mais aussi solliciter des équipes externes (car elle ne peut pas faire tout toute seule) et qui n’hésite pas à faire des recommandations de mise en œuvre ; • une formation des décideurs publics aux principes de l’HTA, de façon à ce qu’ils puissent en comprendre les résultats et les traduire en action ; • une articulation avec l’Assurance Maladie pour développer des incitations auprès des services de soins de santé  ; • un système d’information en santé performant.

La première s’appuie sur le concept Quality Adjusted Live Year (QALY) ou « année de vie gagnée ajustée par la qualité ». Cet indicateur économique peut être utilisé pour évaluer la valeur monétaire d’une intervention ou d’un traitement thérapeutique. Une année en bonne santé correspond à un QALY de 1 ; une intervention causant la mort correspond à un QALY de 0 ; une année dans laquelle l’intervention thérapeutique permet de prolonger l’espérance de vie effective tout en affectant les conditions de vie (par exemple en évitant le décès au prix d’un handicap) sera située entre 0 et 1. Le concept QALY est très controversé tant au plan éthique que scientifique. Les critiques portent notamment sur le fait que QALY discrimine systématiquement les personnes handicapées et les patients âgés. En Grande-Bretagne, les évaluations coût-utilité fondées sur le concept QALY sont couplées avec un seuil fixe, ce qui conduit à un rationnement des soins. Le NHS (National Health System) ne rembourse en règle générale que les traitements médicaux dont les coûts ne dépassent pas le seuil de 30 000 livres par QALY. Ces calculs ne prennent nullement en compte les coûts indirects ou les questions sociales comme la perte de gain survenue après la maladie, la réinsertion professionnelle, la qualité de vie, l’autonomie du patient etc. Aussi ce concept est-il rejeté par certains pays comme l’Allemagne ou la Suède. En France, les évaluations économiques ont « pour objectif de hiérarchiser les différentes options envisageables en fonction de leur capacité à engendrer les meilleurs résultats possibles à partir des ressources à mobiliser. » Les méthodes utilisées relèvent de trois catégories : les analyses coût-efficacité, les analyses coûts utilité et les analyses coût-bénéfice. Mais elles évaluent aussi « les conséquences économiques de la modification de l’organisation des soins, l’impact de la prise en charge collective de l’intervention sur les dimensions d’équité » etc.1 Autrement dit, quel effort la collectivité est-elle prête à consentir pour éviter une mort supplémentaire, diminuer le risque de mortalité et améliorer une situation médicale ? Si l’analyse coût-bénéfice permettrait en théorie à l’économiste de le révéler, la question reste ouverte. Les nombreuses implications éthiques, philosophiques et personnelles d’une telle question rendent toute réponse difficile. Maud Hilaire Schenker

Haute Autorité de Santé, L’Evaluation économique à la Haute Autorité de Santé, Principes et méthodes, janvier 2010, Document soumis à consultation publique, pp.15-16

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Trois questions à Carlo Conti, Conseiller d’Etat (PDC) et chef du département de la santé de Bâle-Ville

Carlo Conti se prononce contre la caisse unique

L’initiative populaire « Pour une caisse publique d’assurancemaladie » a été lancée le 31 janvier dernier. Les directeurs cantonaux de la santé qui la soutiennent se sont résolument engagés en sa faveur dans les médias. On prétend que dans le camp bourgeois aussi le front contre la caisse unique se lézarde. Jusqu’à ce jour, vous vous êtes constamment exprimé contre l’idée d’une caisse unique. Pourquoi ?

Dans le domaine de la santé, nous devons relever de véritables défis afin que la génération suivante puisse profiter d’un système de santé de grande qualité et financièrement supportable pour les payeurs de primes et les contribuables. La fusion des caisses-maladie en une caisse unique coûterait dans un premier temps beaucoup d’argent. Je doute qu’une caisse unique – qui n’aurait pas de concurrence à craindre – travaille en tenant effectivement mieux compte des intérêts des clients et à des coûts plus avantageux que ce que font les assureurs-maladie les plus performants.

Comprenez-vous que les différences massives de primes irritent la population alors que chaque caisse – tout au moins dans l’assurance de base – est tenue d’offrir le même catalogue de prestations ?

Je comprends fort bien cette colère et je fais même un pas de plus, je la partage. J’espère au moins que l’initiative fera peur aux assureurs-maladie qui ont jusqu’à présent ignoré le mécontentement de la population face à leur publicité agressive et coûteuse pour recruter de nouveaux clients. La branche s’est maintenant engagée à mettre fin au démarchage téléphonique, à limiter les frais de courtage et à fixer des normes de qualité en matière de publicité. De plus, le Conseil fédéral a mis en consultation une nouvelle loi sur la surveillance des assureurs censée empêcher à l’avenir les abus d’une concurrence nuisible aux assurés.

ficience des coûts des soins médicaux. La croissance des dépenses des prestations médicales s’en trouvera aussi freiner. Mais nous n’atteindrons ces objectifs que si tous les partenaires du système de santé tirent à la même corde et dans la même direction, dans l’intérêt de l’ensemble de la collectivité. Françoise tschanz

Photo: màd.

Avec une caisse unique, les coûts de la santé continueront aussi d’augmenter. L’initiative populaire « Pour une caisse publique d’assurance-maladie » ne s’attaque pas aux causes de la hausse des dépenses dans notre système de santé. Il importe à présent de mettre rapidement en œuvre les réformes de la LAMal visant la qualité et l’efficience des coûts – à savoir le nouveau mode de financement des soins et des hôpitaux et les réseaux de soins intégrés. Il faut certes se réjouir des progrès techniques de la médecine et de l’évolution démographique, mais ces facteurs contribueront à faire augmenter les primes d’assurance-maladie.

La santé n’est-elle pas un bien trop précieux pour qu’elle soit sacrifiée aux lois économiques du plus fort ?

Nous sommes nous-mêmes prioritairement responsables de notre santé, et non pas les assureurs-maladie. En payant nos impôts et nos primes, nous fournissons une contribution solidaire afin que chacun d’entre nous – pauvre ou riche – reçoive en cas de maladie le même traitement efficace, adéquat et économique. Il serait éthiquement condamnable de faire comme si les ressources financières dont dispose notre système de santé étaient illimitées. La concurrence régulée, encadrée par les solides garde-fous sociaux de l’assurance obligatoire et par le système de réduction des primes, garantit une répartition plus juste et plus souple des ressources – par définition limitées – qu’une caisse pilotée par l’Etat. Toutefois, il ne faut pas seulement actionner le levier de la surveillance des assureurs-maladie. Le nouveau mode de financement des hôpitaux, les réseaux de soins intégrés et la compensation des risques affinée conduiront à remplacer la concurrence sous forme de chasse aux bons risques par une concurrence portant sur la qualité et l’ef-

Carlo Conti, docteur en droit, conseiller d’Etat (PDC) du canton de Bâle-Ville, est chef du département de la santé de ce canton depuis l’an 2000. Il est viceprésident de la Conférence des directeurs cantonaux de la santé (CDS), président du Conseil d’administration de SwissDRG SA et vice-président de Swissmedic.

18 | Domaine de la santé 1/11


Actualités : décision importante du Tribunal fédéral

Quel est l’objet de cette affaire ?

La cour a été saisie pour décider si une caisse-maladie doit payer près de 500 000 francs par an pour le médicament Myozyme – qui ne figure par sur la liste des spécialités – pour traiter une pathologie rare : la maladie de Pompe. La prise en charge des coûts pour un tel médicament (également appelé « off label use »1) présuppose que la préparation procure un bénéfice thérapeutique élevé. Un domaine d’application important à ce titre est constitué par les médicaments utilisés contre des maladies si rares qu’une procédure d’homologation n’est pas rentable pour les firmes pharmaceutiques (médicament orphelin ou maladie orpheline). En la matière, le Tribunal fédéral statue en ces termes : « N’importe quel bénéfice thérapeutique ne saurait être suffisant pour l’admission d’un médicament « off label use », sans quoi l’évaluation du bénéfice dans chaque cas individuel pourrait se substituer au système de liste prévu par la loi et le vider de son sens. Comme le système légal est soumis au principe d’économicité, il convient notamment d’éviter que des jugements prononcés dans ces cas particuliers se muent en pratique extensive et se substituent à la voie ordinaire d’inscription sur les listes en contournant le contrôle d’économicité lié à la liste des spécialités. » Le Tribunal fédéral statue sur l’efficacité et l’économicité

Les médicaments orphelins sont eux aussi soumis à l’exigence d’efficacité, d’adéquation et d’économicité (art. 32 LAMal). Au sujet de l’efficacité, le Tribunal fédéral a spécifié : « L’étude LOTS constate une [...] amélioration significative sur le plan statistique, mais relativement modeste, au terme de laquelle un trajet à pied de 6 minutes a pu être prolongé de près de 10 % grâce au traitement par Myozyme ». Il cite textuellement l’étude LOTS : « The treatment has a positive, if modest effect on walking distance and pulmonary function »2. Pour ce motif, il a répondu négativement à la question de l’efficacité dans le cas présent. Dans la suite de son argumentation, le Tribunal répond également par la négative à la question de l’économicité. « Dans l’optique générale de la proportionnalité, applicable à l’ensemble des actions de l’Etat, il convient de refuser une prestation en présence d’une grave disproportion entre les moyens déployés et le succès de la guérison [...]. Ceci présuppose une évaluation du rapport entre les coûts et les bénéfices [...]. Il est impossible de considérer séparément l’efficacité thérapeutique élevée et l’économicité [...], la question doit plutôt être jugée graduellement et en relation avec les coûts du traitement : plus le bénéfice est élevé, plus des coûts élevés sont justifiés. »

100 000 francs pour une année de vie supplémentaire ?

Le Tribunal fédéral contredit explicitement dans ce contexte l’avis qui voudrait que la question des coûts n’ait pas le droit d’être posée, puisque, s’agissant de la santé humaine, elle est irrecevable éthiquement et juridiquement. « Les moyens qui sont consacrés à une mission bien définie ne sont plus disponibles pour remplir d’autres missions tout aussi souhaitables. Pour cette raison, aucun objectif ne peut être visé sans tenir compte des charges financières ; au contraire le rapport coût/ bénéfice ou coût/efficacité doit être mesuré. Ce principe est également applicable à la prévention en matière de santé et à l’assurance obligatoire des soins. » Le Tribunal fédéral récapitule tout d’abord l’état de la jurisprudence en matière d’obligation d’économicité qu’il qualifie de « globalement plutôt réservée ». Il retient ensuite que des coûts de traitement annuels de 500 000 à 600 000 francs ne peuvent plus être considérés comme adéquats pour des raisons d’égalité devant la loi. « L’opinion de la NZZ, parue dans l’édition du 23 décembre 2010, selon laquelle le Tribunal fédéral est enclin par le présent arrêt à fixer une limite de 100 000 francs par an pour les coûts de traitement, paraît tout à fait réaliste », précise Jürg Waldmeier, avocat indépendant chez Vogel Helfenstein & Partner à Zurich, qui a représenté la caissemaladie devant le Tribunal fédéral. A cette question, le Tribunal oppose un calcul très éloquent : la Suisse recense 180 000 personnes qui, pour diverses raisons médicales, vivent avec une restriction de leur qualité de vie comparable à celle des patients atteints de la maladie de Pompe. Si ces personnes bénéficiaient d’un traitement coûtant 500 000 francs par an et permettant d’améliorer sensiblement leur vie quotidienne, il en coûterait 90 milliards de francs, soit nettement plus que les coûts totaux du système de santé suisse, commente le Tribunal fédéral.

En

Dans un arrêt jurisprudentiel (9C_334/2010), la deuxième Cour de droit social du Tribunal fédéral s’est prononcée sur la prise en charge par l’assurance maladie de base du traitement de la maladie de Pompe.

Signification pour les assureurs-maladie

santésuisse part du principe que l’observation du Tribunal fédéral – qui dit que le grand bénéfice thérapeutique du Myozyme pour les patients atteints de la forme adulte de la maladie de Pompe n’est pas démontré – a valeur de preuve générale. Par conséquent, la poursuite de la prise en charge par l’assurance-maladie du Myozyme pour les personnes atteintes de la forme adulte de la maladie de Pompe n’est plus possible. Ce diagnostic est très rare (1 : 40 000 naissances). Selon santésuisse, 15 à 20 personnes en Suisse sont atteintes de la forme infantile et adulte de la maladie. La discussion sur une éventuelle limite des coûts doit être menée par les politiques. alain vioget

Prescription de médicaments hors de leurs indications officiellement enregistrées 2 «Le traitement a un effet positif, quoique modeste sur la distance parcourue et la fonction pulmonaire.» 1

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Voici une sélection de publications récentes : • Haute Autorité de Santé, L’Evaluation économique à la Haute Autorité de Santé, Principes et méthodes, Paris, décembre 2010, 78 pages, consultable sur http ://www.has-sante.fr Ce document a pour objectif d’expliciter les principes qui fondent les avis rendus par la Haute Autorité de Santé sur l’efficience d’une intervention de santé, puis de poser un ensemble de choix méthodologiques cohérent avec ses principes. Le document a été mis à la consultation publique du 2 décembre 2010 au 31 janvier 2011. En conséquence, le document actuellement mis en ligne est une version provisoire, qui a vocation à évoluer à la suite de la consultation publique. • Sorenson, Corinna, Drummond, Michael et Kanavos, Panos, Ensuring value for money in health care : the role of health technology assessment in the European Union, European Observatory on Health Systems and Policies, XV +156 pages Ce livre en anglais détaille le rôle des HTA dans l’Union européenne. Il examine les méthodes et les procédures des HTA dans les systèmes de santé. Il présente également des études de cas détaillées de la Suède, des Pays-Bas, de la Finlande, de la France, de l’Allemagne et du Royaume-Uni. Son but est d’améliorer les procédures des HTA en Europe.

Photo: Prisma

• Euro Observer, le bulletin d’information en politique de santé de l’Observatoire européen sur les systèmes et les politiques de santé, consacre son numéro 4, volume 12, hiver 2010 aux HTA. Les différents articles portent sur l’impact des HTA sur les systèmes de santé en dressant une comparaison internationale, sur les HTA et l’accès aux médicaments contre le cancer etc.

Nouvelles du monde

Pour en savoir plus sur les HTA

Service

A lire : publications sur les Health Technology Asssessments (HTA)

Scandale des médicaments en France… Tout a commencé avec le Mediator, un médicament prescrit à de nombreux diabétiques jusqu’en novembre 2009. Responsable de graves problèmes cardiaques et pulmonaires, il aurait causé en 33 ans la mort de 500 à 2000 personnes en France. Trois autres médicaments (non autorisés, interdits ou sous étroite surveillance en Suisse) seraient aujourd’hui visés. Depuis, les autorités de surveillance sont suspectées de privilégier les intérêts économiques des firmes et les autorités politiques de faire la sourde oreille. Serait-ce lié au fait que, durant 18  ans, le laboratoire en question a eu pour avocat un certain Me Nicolas Sarkozy ?

…source de réformes… Face au flot de critiques, le Ministre de la santé, Xavier Bertrand, s’est engagé à « rebâtir un nouveau système de sécurité sanitaire ». Le financement de l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé devrait désormais être assuré par une subvention de l’Etat et non plus directement par les contributions de l’industrie.

….et de méfiance Aussi, selon un sondage paru dans le quotidien Le Parisien, 35 % des Français n’ont-ils pas confiance dans les médicaments. En revanche, ils croient massivement en la parole de leur médecin (94 %) et de leur pharmacien (90 %) pour les informer sur les médicaments, alors qu’ils sont tout juste majoritaires pour se fier à l’expertise des organismes officiels de contrôle des médicaments.

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Seule la pointe du Weissfluh brille dans le soleil du matin. En dessous, il fait froid et gris. Au programme : faire du ski de fond en utilisant la technique du pas de patineur (« skating »). Le magasin de sports Hofmänner à Davos m’équipe de manière professionnelle : pointure, poids, hauteur des bâtons, tout est mesuré avec précision. Je suis prêt, chaussures aux pieds et skis bien fixés. Mon moniteur est bronzé, vêtu de bleu et s’appelle Urbi Meier. Il est devant moi avec deux autres élèves. A peine debout sur mes deux lattes minces et étroites, je fais connaissance avec le sol. Il faut dire que le ski de fond requiert un sens certain de l’équilibre. Les adultes débutants comme moi ont plus de peine, à cause du centre de gravité situé plus haut, m’explique Urbi dans son dialecte grisonnais. « Il faut toujours avoir le ski bien à plat sur la neige et il ne peut rien se passer ». J’en déduis que le parfait skieur de fond doit être petit et avoir les pieds larges. A cela s’ajoute que la technique du pas de patineur est plus exigeante que la technique dite traditionnelle. Alors que les skieurs de fond classiques restent toujours dans les traces, les « patineurs » se balancent régulièrement d’un côté et de l’autre. Si les skieurs professionnels se balancent, moi, pauvre débutant, je trébuche. Après la troisième chute, je sais fort bien où est mon coccyx et je maudis Pauli Siitonen, le Finnois, père de cette technique diabolique. Il y a quatre sortes de pas de patineur

différents. Urbi nous en fait la démonstration et file en glissant, tel un éclair bleu. Les deux élèves qui sont avec moi se balancent, parfaitement en rythme. Je suis le seul à ne pas y arriver. Passe encore le pas de « deux temps » ou le « pas diagonal ». Mais pour le reste, cela ne marche pas. Plus le ciel se dégage au-dessus de Davos, plus mon humeur est sombre. A la septième chute, je plonge en avant, tête la première, et sens la neige fondre lentement sur mon visage. Je vois avec quelle élégance et j’entends avec quelle régularité plusieurs skieurs me dépassent. Il doit bien y avoir quelque chose dans ce sport qui plaît aux gens. Sinon, pourquoi, année après année, seraient-ils 10 000 à participer au marathon de ski de fond de l’Engadine ? Après deux heures et demie de cours, Urbi me donne sa bénédiction et me laisse seul pour effectuer mon parcours. Et maintenant, maintenant seulement, je parviens à maîtriser la technique du pas de patineur, en faisant courageusement un pas, puis un autre. Un sentiment de bonheur m’envahit. Un, deux, un, deux. Tout à coup, je ne vois plus que du bleu : le ciel de Davos m’enveloppe et semble ricaner au-dessus de ma tête. Gregor Patorski, 14 janvier 2011

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Mois Image

Photo : Prisma

Tout vient à point à qui sait attendre…


Der Schweizerische Versicherungsverband SVV ist die Dachorganisation der privaten Versicherungswirtschaft, der über 70 grosse und kleine, national und international tätige Erst- und Rückversicherer angeschlossen sind. Im Zuge einer Nachfolgeregelung sucht die Geschäftsstelle in Zürich eine/n

Projektleiter/in Kranken- und Unfallversicherung und stellvertretende/r Bereichsleiter/in Aufgabe und Verantwortung Als Interessensvertreter beobachten und analysieren Sie die Entwicklung im Bereich der Kranken- und teilweise auch der Unfallversicherung und erarbeiten zusammen mit den Projekt- und Arbeitsgruppen Stellungnahmen in Vernehmlassungsverfahren sowie Grundlagen- und Positionspapiere. Sie pflegen regelmässige Kontakte zu Dach-, Partnerverbänden und Aufsichtsbehörden und nehmen im Sinne einer zukunftsorientierten Weiterentwicklung der Krankenversicherung Einfluss auf die politische und technische Diskussion. Sie betreuen und unterstützen die zwei Kommissionen «Gesundheitswesen» und «Technik Kranken/Unfall». Im Weiteren stellen Sie die Umsetzung der erarbeiteten Schwerpunkte sicher und sind für die Informationen und Dokumentationen an die Mitgliedgesellschaften zuständig. Anforderungen • Hochschulabschluss (Uni/FH) oder gleichwertige Aus- und Weiterbildung • Gute Kenntnisse im Bereich der Kranken- und Unfallversicherung • Verhandlungsgeschick und Kommunikationskompetenz • Analytische und konzeptionelle Fähigkeiten • Hervorragendes mündliches und schriftliches Ausdrucksvermögen Wir bieten eine interessante und vielfältige Aufgabe, sehr gute Anstellungsbedingungen in einem interdisziplinären und modernen Umfeld. Haben wir Ihr Interesse geweckt? Dann freuen wir uns auf Ihre Bewerbungsunterlagen an folgende Adresse: [m.a.g.] management consulting Micheline Aebersold-Golay Gotthardstrasse 21 8002 Zürich

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E-learning SwissDRG à partir d’avril 2011 Les forfaits DRG arrivent en 2012. Le Département Formation de santésuisse est prêt. Il vous propose une introduction moderne au système SwissDRG grâce à l’e-learning. La formation est destinée aux collaboratrices et collaborateurs des assureurs-maladie, des assureurs privés et des autres assureurs sociaux. L’apprentissage électronique (e-learning) vous permet de travailler à votre rythme, où vous voulez et quand vous le souhaitez. Le cours SwissDRG répond aux besoins spécifiques des assureurs-maladie et traite les thèmes suivants : • Du remboursement des coûts à l’indemnisation des prestations • Termes techniques utilisés dans le cadre du système DRG • Le forfait par cas • Les données Vous trouverez toutes les informations utiles sur le site Internet de santésuisse, où vous pouvez dès à présent vous inscrire à ce cours (www.santesuisse.ch/Formation). Extrait de notre vision de l’apprentissage électronique : • Notre objectif n’est pas d’utiliser l’e-learning uniquement à l’interne, mais de le proposer également à l’externe aux groupes intéressés (assureurs-maladie, fournisseurs de prestations etc.) • Apprendre efficacement obéit certes à des principes didactiques, mais nécessite aussi de la fantaisie. Notre conception pragmatique de l’enseignement et de l’apprentissage nous permet de proposer une offre e-learning de grande qualité. Renseignements : Melisa Muharemovic, Projektleiterin NKG, Tél. 032 625 42 92, melisa.muharemovic@santesuisse.ch


Sanitas gehÜrt zu den fßhrenden Krankenver­ sicherern in der Schweiz. Das Geheimnis dieses Erfolges? Eine fortschrittliche Unternehmens­ politik, ausgezeichnete Mitarbeitende und erst­ klassige KrankenversicherungslÜsungen. An unserem Hauptsitz in Zßrich im Departement Leistungen suchen wir zur Ergänzung unseres Teams kompetente Personen als

Fachspezialist/in Leistungseinkauf OKP/VVG Spital Fachspezialist/in Leistungseinkauf ambulante Leistungserbringer HÜhere Berufsbildung und fundierte Kenntnisse im Gesundheitswesen Ausgeprägtes Verhandlungsgeschick Konzeptionelle, methodische und prozessorientierte Fähigkeiten In dieser anspruchsvollen Tätigkeit fßhren Sie Vertragsverhandlungen mit Spitälern respektive ambulanten Leistungserbringern. Sie pflegen die Beziehungen zu den Verhandlungspartnern und bauen diese wei­ ter aus. Mit unseren Leistungseinkaufspartnern sowie den internen Fachstellen stimmen Sie die Verhandlungsinhalte ab und arbeiten an gemeinsamen Projekten. Sie sind verantwortlich fßr das Verhand­ lungsreporting, entwickeln und pflegen Tarifmodelle, erarbeiten Statistiken und fßhren spezifische Auswertungen durch. Zu Ihren weiteren Aufgaben gehÜren die Unterstßtzung der Leistungsabteilun­ gen auf den Service Centern bei der Umsetzung der Verträge und die Sicherstellung eines aussagekräftigen Vertragscontrollings. Fßr diese Positionen wßnschen wir uns PersÜnlichkeiten mit (Fach­) Hochschulabschluss und/oder mehrjährige Berufserfahrung in der Krankenversicherung oder im Spitalbereich. Fundierte Kenntnisse im Leistungsbereich sowie Vertrags­ und Tarifwesen setzen wir voraus. Ein Abschluss als Krankenversicherungs­ oder Sozialversicherungs­ Fachfrau/­Fachmann ist von Vorteil. Ihre Muttersprache ist Deutsch und Sie kÜnnen sich in einer zweiten Landessprache oder in Englisch verhandlungssicher verständigen. Sie sind eine dienstleistungsori­ entierte und durchsetzungsstarke PersÜnlichkeit mit der Fähigkeit, vernetzt zu denken und Verhandlungen auf verschiedenen Hierarchie­ ebenen zur fßhren. Ausserdem verfßgen Sie ßber Erfahrung in Konzept­ und Projektarbeit. Interessiert? Dann senden Sie Ihre kompletten Bewerbungsunterlagen an: Sanitas Krankenversicherung Human Resources, Verena Hunold, Postfach 2010, Jägergasse 3 8021 Zßrich, E­Mail: verena.hunold@sanitas.com Fragen? Dann wenden Sie sich an: Norbert Lenzlinger, Leiter Leistungseinkauf Telefon: 044 298 63 78 , E­Mail: norbert.lenzlinger@sanitas.com

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Referate

13. Schweizerisches Forum der sozialen Krankenversicherung Donnerstag, 19. Mai 2011 im Kongresshaus Zürich

Andreas Faller Vize-Direktor BAG Jean-François Steiert Vizepräsident des Dachverbandes Schweizerischer Patientenstellen

Das Gesundheitswesen im Umbau: Aktuelle Reformen auf dem Prüfstand

Gerd Glaeske Gesundheitsökonom, Universität Bremen Klaus Peter Rippe Ethiker, Universität Zürich Charles Giroud Präsident RVK Benjamin Tommer Redaktor NZZ am Sonntag

Informationen und Anmeldung: RVK, Haldenstrasse 25, 6006 Luzern www.rvk.ch, forum@rvk.ch

Diskussion auf dem Podium Rita Ziegler Vorsitzende der Spitaldirektion des UniversitätsSpitals Zürich Marc Müller Präsident Hausärzte Schweiz Beat Ochsner CEO Sympany Gruppe Moderation Markus Gilli Programmleiter Tele Züri

Verband der kleinen und mittleren Krankenversicherer

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