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info santésuisse Que nous réserve le futur ?
Le magazine des assureurs-maladie suisses
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Progrès médical : le revers de la médaille
Population vieillissante = hausse des coûts de la santé. Est-ce aussi simple ?
Entretien avec Stephan Sigrist, chercheur au Collegium Helveticum à l’EPF de Zurich
Sommaire Sous la loupe 4 Progrès médical : le revers de la médaille 6 Population vieillissante = hausse des coûts de la santé. Est-ce aussi simple ? 8 Les exigences en matière de santé ne cessent de croître 9 Point de vue d’Andy Fischer, CEO de Medgate 10 Entretien avec Stephan Sigrist, chercheur au Collegium Helveticum à l’EPF de Zurich 12 Trop gras, trop sucré : des facteurs de risque universels Domaine de la santé 14 De quoi sera fait « l’après 1er juin » ? Quelques commentaires 17 Cybersanté : solution pour le système de santé ou scénario terrifiant à la Orwell ? 18 Rapport d’activité de l’Ombudsman : les changements de caisse posent plus de problèmes 20 Managed Care – The next generation 22 Graphique du mois de juillet : le nombre de médecins stagne En bref 23 La première et la dernière prime de l’assurance-maladie obligatoire Service 24 Nouvelles du monde 24 La Conférence mondiale sur la promotion de la santé se tiendra en Suisse 24 Le magazine « senso » de Helsana récompensé 25 Rationnement dans le système de santé français ? 25 2900 décès prématurés dus au manque d’activité physique 26 Manifestations 26 M. Raoul
No 6, JUILLET 2008 Paraît dix fois par an prix de l’abonnement 69 fr. par an, 10 fr. le numéro Éditeur et administration santésuisse, Les assureurs-maladie suisses, Römerstrasse 20, case postale, 4502 Soleure Responsable de la rédaction Nello Castelli, Département Politique et Communication, case postale, 4502 Soleure Rédactrice : Maud Hilaire Schenker, téléphone 032 625 42 49, téléfax 032 625 41 51, courriel : redaction@santesuisse.ch production : Vogt-Schild Druck AG, Gutenbergstrasse 1, 4552 Derendingen Conception de la mise en page Pomcany’s mise en page Henriette Lux et Rahel Fischer administration des annonces Toutes les annonces – les offres d’emploi y compris – sont à adresser à : « infosantésuisse », Römerstrasse 20, case postale, 4502 Soleure courriel : redaction@santesuisse.ch Administration des abonnements téléphone 032 625 42 74, téléfax 032 625 41 51 Portail : www.santesuisse.ch Page de titre : Prisma Bildagentur AG, Schlieren (ZH) ISSN 1660-7236
Rejet de l’article sur la santé le 1er juin – et après ? Les assureurs-maladie déplorent le rejet, le 1er juin 2008, de l’article constitutionnel « Pour la qualité et l’efficacité économique dans l’assurance-maladie ». Cela ne change cependant rien au fait que nous avons toujours en Suisse un système d’assurance-maladie bien développé et accessible, en tout temps, à l’ensemble de la population. L’image des assureurs-maladie pourrait sans doute être meilleure. Faut-il s’en étonner, alors que nous avons la lourde tâche d’assumer les hausses constantes des coûts, qu’elles soient dues à de nouvelles prestations mises obligatoirement à la charge des caisses, à l’évolution démographique, aux exigences politiques, au progrès médical et aux attentes des clients ? Chaque année, nous sommes contraints d’ajuster les primes en fonction des coûts. Il est clair que notre image s’en ressent ! Somme toute, regardons vers l’avenir, car rien n’est plus constant que le changement. Le marché de la santé est aussi en perpétuelle mutation. Les valeurs, mais aussi l’attitude et les attentes de la population s’adaptent rapidement aux conditions cadres qui évoluent. Les idées suivantes dominent de plus en plus : la santé est sans limite et globale ; la santé est partout ; la santé peut être façonnée. Par le passé, les habitudes de vie et l’environnement professionnel se sont profondément transformés. Il en ira de même à l’avenir. L’augmentation du stress combiné à une alimentation malsaine et au manque d’exercice engendre de nouvelles maladies de société. De plus en plus de patients souffrent de maladies cardio-vasculaires, du cancer ou du burnout – un phénomène typique de notre époque. Le vieillissement de la population s’accélère et les coûts de la santé, avant tout dans le domaine de l’aide et des soins à domicile et des établissements médico-sociaux, augmentent plus que proportionnellement. Il est donc désormais très important que tous les acteurs du marché de la santé, mais aussi tous les assurés prennent conscience d’une chose : certes l’on peut élargir la palette des prestations assurables, mais on doit aussi pouvoir la financer. A l’avenir aussi, une prévention accrue, une alimentation saine et – avant tout chez les enfants – une activité physique suffisante seront incontournables. Seul un changement de comportement permettra d’influencer positivement et durablement les coûts de la santé. Nous en bénéficierons tous, si demain aussi, les primes d’assurance-maladie sont encore supportables.
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Dieter Boesch Membre du Conseil d’administration de santésuisse
Le progrès médical nous contraindra à répondre aux questions éthiques
La médecine évolue toujours plus vite. Tous les trois ans, le volume des sciences médicales quadruple. Les travaux de recherche paraissant annuellement dans des revues renommées se comptent par millions. Les chances de guérison s’améliorent rapidement pour de nombreuses maladies, qui jusqu’ici ne bénéficiaient pratiquement d’aucune thérapie. Mais le progrès médical a aussi ses mauvais côtés – et pas seulement en matière de coûts.
Photo: Prisma/santésuisse
Progrès médical : le revers de la médaille
Il existe deux sortes de progrès techniques :
• les innovations qui satisfont – ou créent – des besoins et des attentes, qui relevaient auparavant du domaine de la fiction. Citons à titre d’exemple l’invention de l’avion, de l’ordinateur ou de la téléphonie mobile. Dans ce cas, les consommateurs doivent financer les progrès sans que d’autres dépenses soient supprimées ; • les développements techniques: la découverte d’un appa reil aux fonctions plus performantes, au maniement plus simple, ou une production plus efficace ouvre des débouchés et un cercle d’utilisateurs plus grand. Il n’est pas rare que ces développements entraînent des baisses de prix : l’ordinateur et la téléphonie mobile sont à cet égard de bons exemples. Vers de nouveaux horizons
La plupart du temps, le progrès médical appartient à la première catégorie. Il consiste souvent en de nouvelles méthodes de traitement et rarement en améliorations de ce qui existe. La science a décodé les gènes humains, et pourtant on continue d’administrer les bons vieux antibiotiques. Ce serait en quelque sorte du gaspillage que de limiter l’utilisation des nouvelles découvertes génétiques à la seule amélioration des méthodes curatives existantes. L’objectif est de découvrir de nouvelles thérapies contre les affections jusqu’ici très difficilement soignables. Mais cela a un prix ! Carl Fried rich Gethmann, philosophe allemand, spécialiste des conséquences liées aux bouleversements technologiques, trouve une autre explication aux coûts élevés des innovations médicales : ces dernières permettent aux individus de vivre plus longtemps. De fait, ils recourent aussi plus longtemps aux prestations médicales. A quoi faut-il s’attendre ?
Que devons-nous attendre du progrès médical ? La science place les plus grands espoirs dans quelques rares domaines : • La biotechnologie et le génie génétique entendent exploiter les phénomènes vitaux cellulaires au profit de notre santé. Les bactéries génétiquement modifiées produisent par échanges organiques des enzymes qui ont une efficacité médicale. Le projet existe même d’obtenir, grâce au génie génétique, des vaches dont le lait a des effets thérapeutiques. La réparation de gènes défectueux constitue
un domaine de recherche important : il sera de la sorte peut-être possible d’éliminer des maladies héréditaires et certains types de cancer avant même qu’ils n’apparaissent en utilisant des virus en guise de chevaux de Troie. Ils seront censés apporter des gènes sains dans la cellule et ainsi remplacer les gènes déficients. • La médecine individualisée : certains gènes peuvent modifier le mode d’action des médicaments. Les êtres humains n’étant pas tous pareils, les médicaments provoquent des réactions chimiques différentes du métabolisme. En partant de ce constat, les pharmacologues travaillent sur des médicaments tenant compte de la variabilité individuelle. Les patients reçoivent la variante médicamenteuse qui correspond le mieux à leurs caractéristiques génétiques. • Les cellules souches sont la forme originelle des cellules que l’on trouve avant tout dans les jeunes embryons. Elles peuvent évoluer vers n’importe quel type de cellule. Grâce aux cellules souches, les chercheurs espèrent obtenir quelques succès dans le domaine des maladies incurables et dégénératives. La maladie d’Alzheimer par exemple résulte de la mort de cellules situées dans une région donnée du cerveau. En arrivant à fabriquer de telles cellules à partir de cellules souches, il serait possible de remplacer les cellules mortes et donc de stopper la maladie d’Alzheimer. On espère des résultats analogues pour les
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à l’encontre du génie génétique sont connues ; elles émanent des milieux religieux et des organisations protectrices de l’environnement. Mais pas uniquement, car d’éminents médecins posent aussi des questions critiques : « Le progrès médical soulève des problèmes de société. Comment devons-nous gérer le terrible diagnostic d’une maladie incurable dont le porteur, jusqu’ici épargné par cette lourde hérédité, ne sait encore rien ? » Frank Ulrich Montgomery, président de la Fédération allemande des médecins, sait que le progrès médical n’apporte pas automatiquement un surcroît de qualité de vie, d’où ses propos nuancés : « A lui seul, le progrès ne suffit pas, tout dépend de l’objectif visé. » Mont gomery n’a rien d’un sceptique face au progrès, il demande même que l’on investisse plus de moyens dans la recherche médicale. Mais il est d’avis que le mobile doit être une médecine meilleure et plus humaine. Il rejette catégoriquement par exemple que soient brevetés les gènes humains, synonyme de profit pour une petite poignée de nantis et de prix impossibles à payer pour le reste de la population. Objectifs concrets à assigner au système de santé
Le progrès médical nous rend-il tous heureux ?
diabétiques, les paraplégiques et les patients atteints de leucémie. • En médecine nucléaire, les chercheurs développent des médicaments légèrement radioactifs se focalisant sur une tumeur cancéreuse. Il devient ainsi possible de traiter la maladie de manière parfaitement ciblée. Les patients ne doivent plus subir de chimiothérapies dont les effets secondaires sont lourds et éprouvants pour tout le corps. • La nanotechnologie tire partie du fait que les substances ont des propriétés physiques totalement différentes lorsqu’elles sont réduites à l’état de molécule. Les projets scientifiques sont assez futuristes : ils envisagent la création de nanocapsules qui transportent les substances actives vers la partie malade du corps et les libèrent seulement une fois parvenues au bon endroit. Il est également prévu de munir les organes artificiels d’un film de nanoparticules. Dans ce cas, le système immunitaire ne pourra plus déceler le corps étranger, empêchant du même coup les phénomènes de rejet.
Le progrès médical coûte cher – très cher. L’Office of Health Economics anglais (économie de la santé) a calculé que les coûts de la santé n’atteindraient que 1 % de la somme actuelle si nous avions encore le standard médical de 1900. Le progrès médical est donc responsable de 99 % des coûts de la santé. Il est évident que les économies des nations industrialisées ne seront plus en mesure de supporter un tel choc le siècle prochain. Dans quelle mesure pouvons-nous donc encore nous payer le luxe d’autres progrès médicaux ? Les systèmes de santé et d’assurance sociale devront clarifier les objectifs d’une prise en charge sanitaire accessible à tous. Le monde politique sera obligé de trancher cette question et les problèmes éthiques qu’elle pose. Combien sommes-nous prêts à payer pour une année de vie supplémentaire en jouissant d’une existence de bonne qualité – et combien pour une année de vie supplémentaire marquée par les souffrances et un état grabataire ? En ne répondant pas à ces questions et en mettant à la charge du système de santé public tous les coûts du progrès médical, c’est le rationnement qui nous guette : il consiste à refuser au malade des prestations médicales nécessaires parce que d’autres, moins importantes, constituent une charge financière trop lourde. Frank Ulrich Montgomery le dit : « Le progrès médical dont peu de gens seulement bénéficieraient, alors que beaucoup en auraient besoin, constituerait même un recul. » PETER KRAFT
Le progrès : pas un but en soi
La médecine continuera de progresser à un rythme effréné – et de plus en plus dans des domaines qui suscitent des discussions de fond : voulons-nous vraiment mettre en œuvre une telle application ? En avons-nous le droit ? Les réserves
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La démographie, un des facteurs de la hausse des coûts
Population vieillissante = accroissement des coûts de santé. Est-ce aussi simple ? La Suisse vieillit – comme d’ailleurs l’ensemble du monde occidental. A l’instar de beaucoup d’autres pays, nous devons nous attendre à une hausse des coûts de la santé. A première vue, cela semble logique, mais à y regarder de plus près, ce n’est pas si simple. D’une part l’évolution démographique n’est responsable que d’une petite partie de l’augmentation des coûts. D’autre part, nous ne sommes pas condamnés à observer passivement les effets négatifs du vieillissement de la population.
lité, à savoir une fécondité de 1,1 enfant par femme. L’espérance de vie s’allongeant encore légèrement, le scénario pessimiste estime que 70 retraités reposeront sur les épaules de 100 actifs en 2050. Le scénario optimiste, quant à lui, compte 50 retraités pour 100 actifs. Aujourd’hui, 26 retraités environ sont à la charge de 100 personnes actives. Le vieillissement de la population va inéluctablement s’accélérer dans un proche avenir. Pourtant, les scénarios de l’OFS montrent qu’il existe des outils politiques permettant de rendre cette évolution plus supportable.
Le récent passé nous donne déjà un avant-goût de ce qui nous attend démographiquement ces prochaines années. Depuis l’année record de 1964, le nombre des naissances a reculé de 112 900 à 73 371 en 2006. Dans le même temps, le taux de mortalité a baissé. Nous continuons donc de bénéficier d’un léger excédent de naissances, dont l’incidence sur la croissance de la population est cependant faible. Les migrations jouent un rôle nettement plus important. Selon l’Office fédéral de la statistique (OFS), c’est grâce aux femmes étrangères, si l’excédent de naissances persiste. Si au cours de sa vie, une femme étrangère met au monde en moyenne 1,9 enfant, ce chiffre s’abaisse à 1,3 pour une Suissesse. D’autre part, nombre d’étrangers retournent dans leur pays une fois à la retraite. Puisqu’ils ne meurent pas en Suisse, ils font ainsi baisser le taux de mortalité de leur pays d’accueil. Ce taux n’est pas très élevé en Suisse pour une autre raison : la génération du baby-boom est encore dans la force de l’âge, alors que les classes d’âge caractérisées par une faible natalité arrivent en fin de vie. Mais les enfants de la vague du baby-boom vieillissent. Aujourd’hui déjà, 16,2 % de la population a plus de 65 ans – et les classes d’âge subséquentes marquées par une forte natalité vieilliront à leur tour. A terme, la part des retraités par rapport à la population active augmentera fortement. Avec un certain décalage dans le temps, la part des personnes très âgées va progresser de plus en plus vite. Le baby-boom se transforme en « papys-boom » !
Les petits ménages aggravent le problème
A chacun son retraité ?
Mais dans les faits, dans quelle mesure cette situation est-elle dramatique ? Chaque personne exerçant une activité professionnelle aura-t-elle bientôt à charge son propre retraité ? L’OFS a établi des projections détaillées de l’évolution démographique jusqu’en 2050. Trois scénarios se dégagent selon la variation d’optimisme. Le scénario optimiste table sur une fécondité maximale en Suisse de 1,6 enfant par femme. Les milieux politiques doivent décharger les familles et aider les femmes à concilier vie familiale et vie professionnelle. Sinon, c’est le scénario pessimiste qui risque de devenir réa-
L’évolution de la population mesurée uniquement en fonction de l’âge est un élément. D’autres changements structurels de la société pourraient encore aggraver les problèmes d’une population vieillissante. Selon l’OFS, la part des ménages avec enfants est passée, entre 1960 et 2000, de 68 % à 54 %. Quant à la part des familles nombreuses (trois enfants et plus), elle a diminué de moitié durant la même période, régressant de 19,2 % à 9,5 %. Le recul du nombre des mariages et des naissances est à l’origine de ce changement. Selon l’OFS, cette situation s’explique aussi par l’évolution du rôle des femmes. Elles aspirent beaucoup plus qu’il y a quelques décennies à mener une carrière professionnelle et à être économiquement indépendantes. Concilier vie professionnelle et vie familiale restant encore une entreprise assez périlleuse, beaucoup de femmes ne veulent pas ou moins d’enfants qu’auparavant ou remettent à plus tard la maternité. L’OFS estime ainsi que la taille des ménages et des familles va encore diminuer durant ces prochaines décennies, ce qui aura une influence non négligeable sur les coûts des soins aux personnes âgées. A l’heure actuelle, « seulement » 8 % environ des personnes de plus de 60 ans et 20 % des personnes de plus de 80 ans vivent dans des homes ou des établissements médico-sociaux. Ce n’est pas seulement dû à leur bon état de santé. L’assistance des proches y jouent pour beaucoup. Selon l’OFS, la contrepartie de ce travail bénévole atteint à l’heure actuelle environ 1,2 milliard de francs par an. En comparaison, les coûts des soins à la charge de l’assurance de base se situent à quelque 2 milliards de francs. L’aide informelle aux personnes âgées représente donc un allégement considérable pour les assureurs-maladie et les pouvoirs publics. L’OFS part néanmoins de l’idée qu’en raison de ménages toujours plus petits, la capacité des familles à prendre soin de leurs membres âgés baissera durant les prochaines décennies. Dès lors, les coûts à la charge des pouvoirs publics et de l’assurancemaladie grimperont. Que coûte le vieillissement de la population ?
Il est certain que l’évolution démographique entraînera une hausse des coûts de la santé, en particulier des coûts des soins aux personnes âgées. Dans quelle mesure ? Telle est la question. Les milieux scientifiques ne sont pas d’accord
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ment modeste dans la hausse des coûts, aboutit à un accroissement considérable des dépenses. En d’autres termes, les coûts de la santé n’augmenteront pas uniquement en raison de l’évolution démographique. L’OFS estime que le vieillissement de la population contribuera pour 25 % environ à la croissance des coûts durant les prochaines décennies. Pour le reste, d’autres causes existent. Que faut-il faire ?
Une espérance de vie plus longue va de pair avec une meilleure santé durant la vieillesse.
quant aux effets de l’allongement de l’espérance de vie sur l’état de santé de la population. Une interprétation très optimiste pense que le vieillissement de la population sera surcompensé par les progrès médicaux et un mode de vie plus sain. La Suisse de demain aurait donc une population certes plus âgée mais plus saine. La thèse pessimiste part de l’idée que le progrès médical soulagera mieux les effets des maladies chroniques mais ne les guérira pas plus qu’aujourd’hui. Conséquence : une meilleure qualité de vie pour les malades mais aussi une vie plus longue en étant malade. La troisième thèse, dite « réaliste », recueille le plus de suffrages : elle table sur une apparition plus tardive des maladies chroniques du fait de l’allongement de l’espérance de vie. En définitive, peu importe l’âge de la personne : son état de santé sera le plus désastreux peu avant son décès. Les projections de l’OFS quant aux coûts de la santé dans quelques décennies sont différentes : selon le scénario pessimiste, ces coûts passeraient des 52 milliards de francs actuels à environ 130 milliards d’ici à 2030. Le scénario réaliste table sur un montant de 111 milliards de francs. Même cette variante, qui attribue à l’évolution démographique un poids relative-
En 2006, le sociologue François Höpflinger et Avenir Suisse ont publié des études – indépendantes l’une de l’autre – sur les coûts de santé dans une société vieillissante. Toutes deux mettent en garde contre « l’illusion de la nécessité » : en dépit de l’évolution démographique, des moyens permettant de freiner la croissance des coûts de santé existent. En préconisant des primes en fonction de l’âge, Avenir Suisse choisit une voie probablement vouée à l’échec. François Höpf linger propose d’autres remèdes : une prévention taillée sur mesure pour les personnes âgées et une réadaptation plus efficace en fonction des maladies chroniques. Il est pour lui essentiel de soutenir les proches qui prodiguent des soins en proposant des formations, des conseils ou d’autres offres complémentaires facilement accessibles. A cet égard, les organisations d’aide et de soins à domicile (spitex) jouent un rôle important. La promotion de cette forme de soins présente un intérêt pour tous les acteurs – patients, assureursmaladie, pouvoirs publics. L’effet serait maximal si les caisses-maladie et les pouvoirs publics finançaient à parts égales les organisations d’aide et de soins à domicile et les établissements médico-sociaux. Les deux parties répondant des coûts seraient ainsi pareillement incitées à permettre aux personnes tributaires de soins de vivre aussi longtemps que possible chez elles, à la maison. La cause du vieillissement démographique est en fin de compte la faible natalité. Le seul moyen de la contrer est d’améliorer les conditions cadres de toutes les familles – que la répartition des rôles soit traditionnelle ou moderne. PETER KRAFT
Références: OFS : Le « panorama » de la population, février 2008 OFS : Scénarios de l’évolution de la population de la Suisse 2005–2050 OFS : Hypothèses et résultats des scénarios démographiques de la Suisse 2005 – 2050 OFS : Le défi démographique : perspectives pour la Suisse OFS : Les familles en mutation – Informations et données de la statistique officielle Jacqueline Schön-Bühlmann, « Les Prestations de soins non rémunérées des ménages et des particuliers », dans Sécurité sociale 5/2005 Lukas Steinmann, Harry Telser, Gesundheitskosten in der alternden Bevölkerung, (Coûts de la santé dans une société vieillissante) Edition NZZ, 2005 Francois Höpflinger, Valérie Hugentobler, Soins familiaux, ambulatoires et stationnaires des personnes âgées en Suisse, Editions Médecine & Hygiène, juin 2006
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Le système de santé est confronté à des prétentions croissantes. La cause : les changements majeurs de la société
Maintenant et tout de suite ! Nous n’aimons pas attendre. Il suffit que les trains aient un quart d’heure de retard, pour que les colonnes des journaux soient remplies de lettres de lecteurs mécontents. Les brefs temps d’attente pour les correspondances vont de soi, tout comme les wagons climatisés à suspension maximale. A défaut, les récriminations durent pratiquement aussi longtemps que dure le trajet en train. Les CFF connaissent aujourd’hui déjà les problèmes que rencontrera sous peu le domaine de la santé : le meilleur ne suffit pas.
A côté de primes d’assurance-maladie à la hausse, les Suisses consentent des dépenses privées élevées, afin de maintenir ou d’améliorer leur santé. Les primes de l’assurance de base représentent presque 6 % de l’ensemble des dépenses d’un ménage suisse moyen. Selon l’Office fédéral de la statistique, les dépenses à titre privé consacrées aux prestations de santé talonnent de près les primes : elles s’élèvent déjà à plus de 4 %. Une enquête de Plaut Economics a révélé que sur celles-ci, un milliard concernait uniquement les médicaments sans ordonnance. Les primes des assurances complémentaires et le domaine en plein essor du bien-être ne sont en revanche pas compris dans ces 4 %. Une étude de l’Université de Berne table sur le fait que les Suisses dépensent chaque année 200 millions de francs au seul titre des nuitées dans les hôtels wellness. Nous n’avons pas de chiffres confirmés pour l’ensemble du domaine du bien-être en Suisse. En Allemagne, l’institut de recherche Global Insight a évalué que nos voisins du nord dépensent chaque année 73 milliards d’euros pour le bien-être. A titre de comparaison, la somme des contributions individuelles versées à l’assurance-maladie légale s’élève à près de 144 milliards d’euros. Un bien-être complet peut-il être rétabli ?
Pourquoi sommes-nous prêts à dépenser de telles sommes ? Parce que la santé, comme le dit le proverbe, est « le bien le plus précieux » ? Cela ne peut pas être la seule raison – les Suisses ne dépensent-ils pas aussi volontiers pour des prestations ou produits nuisibles à la santé ? Ils consacrent environ 1,2 % de leur revenu à l’achat d’alcool et de tabac, sans compter les repas pris au restaurant.
Trois éléments pourraient être déterminants : la définition de la santé donnée par l’OMS est devenue un standard généralement reconnu – « la santé est un état complet de bien-être physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité. » Ensuite, le progrès médical nous fait croire que cet état peut être atteint ou rétabli. Enfin, les clients et patients sont beaucoup mieux informés qu’autrefois sur les « produits de santé » et les thérapies médicales grâce aux médias de masse et à l’Internet. Aussi, outre les dépenses privées considérables investies dans la santé, les attentes et les prétentions face aux fournisseurs de prestations changent. Les patients veulent être rapidement guéris, et conformément à ce qu’ils s’imaginent. « Incapable et pas à la hauteur de notre temps »
Le « Deutsches Medizin Forum » donne un exemple probant. Un internaute demande sur ce site s’il existe en Allemagne une certaine technique opératoire utilisée aux USA par deux spécialistes pour guérir une maladie des yeux. Par la même occasion, il attaque les médecins allemands qui auraient refusé de le renseigner sur l’existence de ce genre de spécialistes près de chez lui. Un médecin lui répond qu’une telle thérapie n’existe pas en Allemagne, en raison de son inefficacité depuis longtemps prouvée. Dans le monde entier, les deux médecins aux USA sont les seuls prestataires connus. Là-dessus, le patient traite le médecin qui lui a répondu d’incapable et le taxe de ne pas être à la hauteur de notre temps. C’est peut-être un exemple isolé et un peu exagéré. Mais le changement de comportement des patients estimant qu’ils ont des droits est une réalité sans cesse confirmée par les médecins. Ainsi, Reinhold Streit, ancien président de la Société bernoise de médecine s’élève, dans le Bulletin des médecins suisses, contre le reproche fait aux médecins d’induire la demande et de créer leur propre marché : « Les patients déterminent dans une large mesure le volume des examens et du traitement. » Les changements majeurs de la société encouragent la mentalité du « j’y ai droit »
Stephan Sigrist, chercheur à l’EPF de Zurich (voir aussi l’interview publiée dans cette édition) identifie quelques tendances sociétales majeures qui stimuleront à l’avenir encore plus fortement la demande en prestations de santé et les prétentions des patients. La complexité de la vie quotidienne, privée et professionnelle, augmente. Le temps devient une denrée toujours plus rare. Encore moins qu’aujourd’hui, on pourra se permettre à l’avenir d’être malade. D’autre part, le besoin de profiter de la vie et de se réaliser pleinement va s’accroître. Conséquence : les patients donnent à leurs propres besoins et conceptions une importance primordiale. Les fournisseurs de prestations seront toujours plus pressés d’être disponibles immédiatement et d’obtenir des succès rapides. Pour Andy Fischer, CEO de Medgate, centre de télémédecine, il est clair qu’en étant isolés, les médecins n’auront à l’avenir que peu de chance de satisfaire à ces
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Nécessité de buts clairement définis pour l’assurance-maladie
Le marché de la santé est en plein essor et les prétentions croissantes des patients alimentent la spirale des coûts. Ainsi, l’assurance-maladie devra tôt ou tard procéder à une révision totale du catalogue des prestations. En Allemagne, où les assureurs-maladie de l’assurance légale sont depuis longtemps confrontés à des problèmes de financement, de telles réglementations sont déjà en vigueur. Outre le catalogue « normal » des prestations, il existe ce que l’on appelle les « prestations de santé individuelles ». Elles sont règlementées par la loi, y compris les prix, et elles doivent être payées par les patients eux-mêmes. Il s’agit notamment d’examens de contrôle sans soupçon fondé, de vaccins en cas de voyages dans des pays lointains ou de traitements relevant de la médecine sportive. Mais l’élagage du catalogue des prestations ne suffira pas : c’est ce que déclarent pratiquement tous les experts. Nous dépensons en Suisse cinq milliards de francs pour des prestations LAMal dont il est prouvé qu’elles n’ont pas d’utilité médicale. En exploitant ce potentiel de rationa lisation, nous pourrons regarder l’avenir de manière plus se reine – et éviter des coupes trop franches dans le catalogue des prestations. Il est important de fixer des objectifs contrai gnants pour l’assurance-maladie de demain : à quoi sert l’assurance de base? A quoi ne doit-elle pas servir ? Les presta tions à la charge de la collectivité, soumises au principe de la solidarité, et les coûts à la charge de l’individu pris isolément devront être dissociés selon des règles strictes. Cette forme de transparence constitue finalement la meilleure protection contre le rationnement arbitraire de traitements véritablement importants. PETER KRAFT
Point de mire
exigences croissantes. La médecine mobile – autrement dit l’offre de prestations disponibles partout et en tout temps – ne peut s’effectuer qu’en groupe et avec une infrastructure commune. Stephan Sigrist l’exprime encore plus clairement : « Collaborate or die » (collaborez ou vous disparaissez). Un nombre toujours plus élevé de médecins en sont conscients. Ainsi, Verena Briner, présidente sortante de la Société suisse de médecine interne, écrit dans la revue Primary Care : « A l’avenir, les médecins de famille ne seront plus les premiers interlocuteurs en cas de problèmes de santé ». Les patients s’informent préalablement – par exemple en consultant les pages de sites spécialisés sur Internet. La relation médecinpatient prendra un autre visage. A l’avenir, les patients souhaiteront moins avoir affaire à une personne compétente qui les renseigne, qu’à des prestataires efficaces résolvant leurs problèmes le plus agréablement possible. « Centre cardiaque, centre de mammographie, centre des urgences : fini le médecin à qui l’on fait confiance, ce sont les expériences vécues qui sont attractives. »
Andy Fischer CEO du Centre suisse de télémédecine MEDGATE
Comment la télé-médecine changera le système de santé Les attentes et la demande des patients marqueront de leur empreinte le système de santé de demain. Au centre des besoins grandissants, on trouve : la disponibilité (médecin joignable 24 heures sur 24), la mobilité (médecin en tout lieu) et une qualité médicale optimale tout en conservant des coûts de santé stables. Cette évolution réclame de la part des acteurs du domaine de la santé une souplesse et une collaboration croissantes. En parallèle, la médecine devient toujours plus sophistiquée du point de vue technique. Le nouveau système de santé devra donc mieux tenir compte des exigences des patients, sans pour autant occasionner des coûts supplémentaires. La télé-médecine, plus exactement la consultation médicale par téléphone, est un instrument important permettant de satisfaire ces besoins. Sa caractéristique principale réside dans l’interaction entre patient et médecin (consultation téléphonique) ou entre médecins (conférence téléphonique) dans le cadre du diagnostic ou du traitement, sans que les intéressés soient en contact physique direct. Par la prise en charge médicale à distance, les prestations médicales ne sont plus liées aux limites géographiques. Plus de la moitié des patients qui font appel à une consultation par téléphone peuvent être soignés de manière définitive, sans qu’il soit nécessaire d’avoir recours à une consultation effective. D’où une réduction possible des coûts de 10 à 20 % – en particulier dans le domaine des modèles d’assurance alternatifs de télé-médecine.
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Entretien avec le Dr Stephan Sigrist, Directeur du W.I.R.E (Web for Interdisciplinary Research and Expertise), Think Tank de la Banque Sarasin et du Collegium Helveticum de l’EPF et de l’Université de Zurich
« Notre rapport à la santé se modifiera radicalement » Stephan Sigrist annonce de grands bouleversements pour le marché de la santé : les séances d’acupuncture se dispenseront dans les bars et nous connaîtrons nos maladies héréditaires avant qu’elles ne se déclarent. Faut-il s’en réjouir – ou au contraire craindre ces nouvelles technologies ? Tout dépend de l’usage que nous en ferons, répond Stephan Sigrist.
Illona Kickbusch, experte de l’OMS, parle d’une révolution imminente qui chamboulera le domaine de la santé. Partagez-vous cette vision ?
Une révolution est un événement unique qui entraîne dans son sillage un changement assez brusque et important. Or, le système de la santé suit un processus continu. Je suis cependant d’accord avec Madame Kickbusch sur le fond : notre rapport à la santé, mais aussi à la maladie, se modifiera radicalement. Toutefois, je pars de l’idée que cette transformation s’opèrera sur une durée plus longue. Par exemple, il y a dix ans, l’industrie plaçait de grands espoirs, encore non concrétisés, dans les médicaments biotechnologiques. Depuis, on reste plus prudent avant d’annoncer de grandes avancées. Néanmoins, vous envisagez de forts progrès dans le marché de la santé ? Concrètement, quel secteur a le plus grand potentiel de développement ?
Dans vingt ans, le marché de la maladie constituera toujours le cœur du sujet. Mais le marché de la santé connaîtra des taux de croissance plus élevés. Les offres jugées effectivement utiles par la population auront le plus fort potentiel, comme la régénération ou le bien-être et leur intégration dans la vie professionnelle et quotidienne. Dans un avenir proche, la santé sera un élément central pour organiser les lieux de travail. Des bars proposeront certainement des séances d’acupuncture aux côtés de leurs cocktails traditionnels. De grands changements sont aussi attendus avec les nouvelles possibilités de diagnostic. Nous pourrons analyser les prédispositions génétiques des individus et traiter les maladies avant même qu’elles ne se déclarent.
Si demain la quasi-totalité de la population reçoit des médicaments et connaît les maladies héréditaires qui la frapperont avant même qu’elles ne se déclarent, qui pourra encore prétendre être en bonne santé ?
Il s’agit là d’une question essentielle. Le danger est que les individus se sentent tout à coup malades, d’une manière ou d’une autre et demandent à être traités. En gros, il existera deux catégories de personnes : les unes tireront au maximum parti des nouveaux produits et possibilités pour améliorer leur santé. Les autres diront : advienne que pourra, de toute façon je suis malade – et vivront en marge du système de santé. Chacune de ces réactions a ses bons côtés. Les uns agissent pour leur santé et les autres se libèrent du stress causé par leur propre santé, qui peut compromettre la qualité de vie. Quels sont les facteurs stimulant le développement du marché de la santé ? S’agit-il de modifications technologiques ou de transformations de la société ?
Les deux sont indissociables. Si une technologie ne correspond pas aux conceptions de la société, elle n’a aucune chance. Un bon exemple nous est fourni par le génie génétique : cette technologie piétine parce que la société estime que les risques et les questions éthiques l’emportent sur l’utilité. La nanotechnologie n’est pas non plus franchement acceptée. Les autorités italiennes ont retiré du marché une sorte de riz portant le nom de Vialone Nano, parce qu’elles ne voulaient pas imposer à la population des denrées alimentaires issues de la nanotechnologie. Or, la seule particularité de ce riz résidait dans la petitesse de ses grains – en grec ou en italien, nano signifie nain. Ce qui compte, ce n’est donc pas ce qui est techniquement réalisable, mais avant tout ce que la société tolère.
« Des bars proposeront certainement des séances d’acupuncture aux côtés de leurs cocktails traditionnels. » N’est-ce pas aussi une question de génération ?
Est-il nécessaire de se savoir atteint d’une maladie héréditaire, 30 ans avant qu’elle ne se déclare ?
Quand des possibilités de thérapies appropriées existent, cela peut être très utile. Mais pour beaucoup de maladies héréditaires où encore aucune possibilité de traitement n’est disponible, la prudence s’impose. Un dérivé de Google offre déjà aujourd’hui la possibilité de procéder à une analyse génétique détaillée pour quelques centaines de dollars. La société et le monde politique devront trouver des solutions pour profiter des avantages de ces progrès qui vont se développer, mais aussi fixer de justes limites.
En partie, oui. Les personnes plus âgées se méfient souvent d’Internet et de la question de la protection des données. En revanche, les jeunes gens mettent sans sourciller sur le net leur curriculum vitae complet avec leurs photos et leurs coordonnées personnelles. Il faut toutefois noter que les doutes face au génie génétique vert ont aussi été partagés par la jeune génération. Comment l’Etat et les assurances sociales doivent-ils réagir à ces modifications ?
Dans le marché traditionnel de la maladie, les coûts continueront aussi à augmenter. L’Evidence Based Medicine (la médecine basée sur les preuves) jouera un rôle toujours plus grand pour définir un catalogue de prestations approprié. En
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parallèle, une discussion fondamentale est également nécessaire pour déterminer à quel niveau de santé le principe de solidarité s’applique et où commence la responsabilité individuelle. La condition préalable est de disposer de banques de données approfondies – peu nombreuses en Suisse. En Bavière, il existe un registre des cancers dans lequel sont recensés et analysés en détail pour tous les cas, les thérapies utilisées et les résultats des traitements. De telles démarches peuvent contribuer à améliorer la transparence des coûts et l’utilité d’une thérapie. Comment le rôle des fournisseurs de prestations traditionnels va-t-il se transformer ?
Photo: màd.
Leur rôle se modifie depuis des années déjà. Les médecins se spécialisent de manière encore plus pointue. Les médecins de famille travaillent avec plus d’efficience et ont moins de temps pour jouer également le rôle de la personne de confiance. Qui va donc prendre le relais, assumer la coordination de la chaîne de traitements ? Ce seront peut-être à nouveau les médecins de famille, grâce à de nouvelles formations, ou peut-être les Case Managers (les gestionnaires de cas) des assureurs. Il faudrait alors que les caisses se débarrassent de leur image d’organes couvrant exclusivement les coûts. On peut aussi imaginer l’émergence de nouvelles professions. Il y aura peut-être un jour des conseillers
en santé – comme nous avons aujourd’hui des conseillers financiers. Les malades chroniques auront besoin d’un Disease Manager (un gestionnaire de la maladie), à savoir quelqu’un qui dispose d’une vue d’ensemble des spécialistes et des thérapies dans la jungle des offres de santé. Les cabinets médicaux pourraient parfaitement assumer ce rôle. A l’inverse, je peux concevoir qu’à l’avenir les actes médicaux simples pourront être effectués par du personnel soignant et non plus par les médecins.
« D’où la nécessité pour les acteurs du domaine de la santé de s’ouvrir et de se mettre en réseau, de tordre le cou aux luttes idéologiques opposant économie de marché et médecine étatique. » La question cruciale entre toutes : l’essor du marché de la santé contribue-t-il effectivement à une meilleure santé ?
En soi, cela ne nous rend pas plus sains, mais cela nous donne la chance de l’être. Le recours à de nouvelles méthodes de diagnostic et la confrontation de tous les individus à leurs maladies héréditaires génèrent avant tout une société dominée par l’angoisse. Mais si nous utilisons ces possibilités de manière ciblée, notre système de santé gagnera en qualité et en efficience. Pour y parvenir, il faut cependant remplir au préalable quelques conditions : nous avons besoin de transparence. D’où la nécessité pour les acteurs du domaine de la santé de s’ouvrir et de se mettre en réseau, de tordre le cou aux luttes idéologiques opposant économie de marché et médecine étatique. Prenez l’exemple de la prévention : pourquoi doit-elle être exclusivement une tâche de l’Etat ? Quel acteur est plus indiqué que le commerce de détail pour informer des bienfaits d’une alimentation saine ? Des millions de gens y achètent chaque jour leur nourriture. Un bémol à ce type de prévention existe cependant : l’intérêt des entreprises à réaliser des profits est peutêtre plus important que la santé de la population.
Bien évidemment, il est nécessaire que l’Etat fixe des directives, mette en place des plate-formes et veille à la transparence. Je dis simplement que l’Etat ne doit pas tout faire tout seul. Il peut parfaitement chercher la collaboration de l’économie privée. INTERVIEW: PETER KRAFT Plus d’informations sur www.healthhorizons.ch
Ce qui compte, ce n’est donc pas ce qui est techniquement réalisable, mais avant tout ce que la société tolère.
Nutrition et prévention des maladies chroniques
Trop gras, trop sucré : des facteurs de risque universels Depuis maintenant une décennie, les recherches se multiplient pour trouver le mécanisme liant nourriture et maladies chroniques. Le sommet de la FAO (Food and Agriculture Organisation) qui s’est déroulé à Rome du 28 au 30 mai 2008 a réactualisé la question. La mauvaise nutrition n’est pas seulement synonyme de famine et ne concerne pas seulement les pays en développement. A l’opposé de ceux qui n’ont rien pour se nourrir, la population des pays industrialisés souffre d’excès nutritifs.
Depuis une dizaine d’années, les experts de l’OMS et de la FAO1 mettent en garde contre les méfaits sur la santé d’une nourriture malsaine. La recherche est en effet parvenue à préciser le rôle de la nutrition dans la prévention et le contrôle des maladies chroniques, même si certains aspects restent à approfondir. Les premières preuves sont cependant suffisamment convaincantes pour inciter dès à présent à l’action. Les maladies chroniques sont des maladies de longue durée, non contagieuses, mais souvent très coûteuses et pour la plupart évitables. Leur hausse liée aux mauvais régimes alimentaires et au mode de vie est une réalité qui affecte tant les pays développés que les pays en développement. Changements alimentaires et maladies chroniques
En raison de l’industrialisation, de l’urbanisation, de la globalisation et du développement économique, les changements rapides de l’alimentation et des modes de vie se sont accélérés, avec un impact significatif sur la santé, notamment dans les pays de transition. Une alimentation plus riche en sucres ajoutés et en graisses animales supplante progressivement les régimes traditionnels à base de plantes, de céréales et de pommes de terre. De plus, cette « transition alimentaire » se conjugue souvent avec un mode de vie plus sédentaire. De manière générale, à l’exception de l’Afrique sub- saharienne, la consommation moyenne en calories, la teneur en graisse et en sucre des aliments (notamment en Améri-
que du Nord et en Europe) et la demande en produits animaliers (viande, produits laitiers, œufs…) ne cessent d’augmenter. La consommation de poisson a elle aussi doublé depuis 1957. Or, la surconsommation de graisse, de sucre, de sel et la sous-consommation de fibres, de fruits et de légumes, combinées à un manque d’exercice, augmentent les cas de maladies chroniques. On peut y inclure l’obésité, le diabète, les maladies cardio-vasculaires, mais aussi l’hypertension, certains cancers ou les maladies dentaires. Maladies chroniques, première cause de mortalité
Etant la première cause de mortalité, les maladies chroniques représentent un coût important pour la société. On estime que 60 % des 56,5 millions de morts reportés en 2001 dans le monde sont dus à des maladies chroniques. Si l’âge, le sexe et la génétique ne peuvent être changés, il est possible d’influer sur d’autres facteurs de risque : • Facteurs comportementaux : régime, activité physique, tabagisme, consommation d’alcool • Facteurs biologiques : hypertension, surpoids, excès d’insuline • Facteurs sociaux : interaction de facteurs socio-économiques, culturels et environnementaux. Des changements dans les habitudes alimentaires sont donc nécessaires pour faire face aux maladies chroniques, mais il faut prendre en compte l’ensemble du processus – de la production alimentaire à la consommation. Plusieurs éléments, comme la pression commerciale et l’inertie des institutions, ont cependant limité la prévention contre les maladies chroniques.
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Double crise alimentaire dans les pays en développement
Une double crise s’abat sur les pays en développement. Les récentes « émeutes de la faim » en Asie, en Afrique et dans les Caraïbes rappellent que 30 % de la population mondiale souffre encore de la faim et de ses conséquences tragiques : mort, troubles physiques ou mentaux. Dans le même temps, nombre de pays en développement doivent faire face à une hausse des maladies chroniques à la suite de changements rapides dans l’alimentation et le mode de vie. Une offre sûre et adéquate en aliments est donc nécessaire pour combattre les carences et les maladies chroniques. Mais la clôture mitigée du sommet de la FAO à Rome laisse à craindre que ces fléaux continueront de se propager. Les recommandations de l’OMS
Pour prévenir les maladies chroniques, l’OMS propose des lignes directrices : • La consommation totale de graisses devrait représenter 15 à 30 % de l’apport énergétique de l’alimentation totale. • Les sucres libres, tels que ceux présents dans les sodas, les jus de fruits et dans de nombreux aliments transformés, devraient représenter moins de 10 % de l’apport énergétique total de l’alimentation. • Notre alimentation quotidienne devrait comprendre au moins 400 g de fruits et légumes. Si leur consommation s’amplifie, seule une minorité de la population en mange en quantité suffisante en raison du prix, d’un manque de temps, de la paresse et des préjugés. Le meilleur moyen de réduire les risques de développer des maladies chroniques est d’adopter un mode de vie alliant activité physique, alimentation variée et interactions sociales.
Le syndrome de la bedaine
L’Europe est loin d’être épargnée. La Suisse prend du ventre. Un adulte sur trois et un enfant sur cinq souffrent de surpoids. Les campagnes de prévention se multipliant (www. Promotionsanté.ch, www.mangerbouger.fr, www.syndromedelabedaine.org), la population est généralement plus informée mais pas nécessairement mieux informée. Les campagnes publicitaires noient souvent le consommateur sous un flot d’informations : alicaments, oméga 3… Le « trop » d’informations finit par tuer l’information. Promotion Santé Suisse, fondation soutenue par les cantons et les assureurs, coordonne des mesures et prodigue des conseils simples pour promouvoir un poids corporel sain. L’objectif fixé est d’enrayer d’ici 2010 l’augmentation de la part d’enfants et d’adolescents en surpoids en Suisse. La solution est simple – manger équilibré et bouger. Et pourtant les mauvaises habitudes persistent et les piètres excuses fleurissent, beaucoup ne se projetant pas sur le long terme : « je vais très bien comme çà », « pas le temps pour une activité physique », « le sport et moi, çà fait deux », « je fais un peu attention à ce que je mange, ça suffit amplement ». Beaucoup s’accordent pour dire que « la santé vient en mangeant »,2 alors, on se bouge ? MAUD HILAIRE SCHENKER
Le dossier complet est accessible en anglais sur http://www.who.int/ nutrition/topics/dietnutrition_and_chronicdiseases/en/ Un résumé en français est disponible sur http://www.greenfacts.org/fr/ alimentation-nutrition/apropos-alimentation-nutrition.htm 2 www.lasantevientenmangeant.inpes.sante.fr/ 1
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Du modèle des deux cercles aux contrôles systématiques de la qualité : les idées ne manquent pas
Après le 1er juin – politiciens et experts veulent poursuivre les réformes Pour les politiciens et les experts de la santé provenant des horizons les plus divers, une chose est claire : le non du 1er juin à l’article constitutionnel ne signifie pas un non aux réformes. Le besoin d’agir dans le domaine de la santé n’a pas tout simplement disparu. Les idées et les propositions sont certes très différentes, mais convergent toutes vers un même but : la meilleure qualité possible à des prix raisonnables. Tous voient dans la « coopération », le nouveau mot magique pour l’avenir. L’époque du médecin isolé semble révolue. Voici quelques réactions au vote du 1er juin.
Qualité et efficience au lieu de démantèlement des prestations et mentalité de défense des acquis
Dans les prochaines années, les coûts de la santé augmenteront toujours massivement, accroissant du même coup la pression exercée sur la solidarité. En matière de politique de santé, nous devrons décider s’il faut réduire le catalogue des prestations ou gérer le recours aux prestations. Etant donné que quelque 10 % de la population occasionnent 70 à 80 % des coûts de la santé, je préfère clairement une meilleure gestion du recours aux prestations. Concrètement, il ne suffit plus de rétribuer les prestations prescrites. Sera récompensé celui qui respecte des mesures claires de qualité et se soucie de gérer le recours aux prestations. Nous ne pouvons pas nous permettre plus longtemps d’avoir des spécialistes isolés, des combattants solitaires dans les cabinets médicaux et une mentalité de défense des acquis dans les hôpitaux et entre les cantons. Non seulement c’est trop cher, mais surtout cela ne répond plus aux exigences actuelles de qualité. Les patientes et les patients profitent des efforts de qualité accrus et de la meilleure coordination. Le libre choix du médecin de famille doit être garanti. En revanche, l’assuré qui refuse toute forme de coordination doit participer aux coûts en assumant une quote-part plus élevée. J’attends des assureurs-maladie qu’ils se préoccupent des malades et non qu’ils se livrent à la chasse aux bons risques et à la vente du plus grand nombre possible d’assurances complémentaires. Leur tâche première est de promouvoir des mesures favorables à une meilleure qualité, à une coordination accrue et à une utilisation plus efficace des moyens. Il est incompréhensible que jusqu’à ce jour seuls quelques rares assureurs se soient engagés en faveur de la légalisation des importations parallèles de médicaments brevetés. Elle permettrait pourtant d’économiser chaque année 350 millions de francs – sans aucune perte de qualité. SIMONETTA SOMMARUGA, CONSEILLÈRE AUX
Lentement, mais sûrement
Nous bénéficions dans notre pays d’un bon système de santé et d’une offre étendue et de qualité élevée. Ce marché de 60 milliards obéit à de nombreux intérêts et seule une minorité d’acteurs est prête à modifier profondément l’offre et la demande. Côté assurés, nous voulons également un accès aussi rapide et libre que possible aux meilleures prestations médicales. Du point de vue financier, nous avons également complété le puzzle avec le financement hospitalier (forfaits par cas, libre choix de l’hôpital, transparence, comparaisons de qualité) et le financement des soins (tarification, répartition des coûts, non indexation automatique au renchérissement, prise en charge intégrale des coûts des soins de transition limitée dans le temps). Il s’agit maintenant de les mettre en œuvre. Un objectif prioritaire consiste à trouver une solution de rechange au gel des admissions qui impliquera, à mon avis, un assouplissement partiel de l’obligation de contracter. Quatre modèles sont disponibles (participation à un réseau, Managed Care en tant que modèle de l’assurance de base, distinction entre médecins de premier recours et spécialistes, contingentement des spécialistes par les cantons). J’ai personnellement de la peine à admettre que la recherche d’une solution de rechange se concentre exclusivement sur un contingentement plus strict décidé par l’Etat (cantons). Il faut enfin mettre un point final au projet concernant le prix des médicaments. L’examen de ces prix tous les trois ans et lors de chaque élargissement des indications est juste et la nouvelle réglementation doit entrer en vigueur sans retard. Il est indispensable que, dans un marché de 4,5 milliards, la Confédération dispose au moins de ses propres chiffres en matière de prix d’usine et de prix publics. Les caisses bon marché (motion Frick) et, une fois encore, l’amélioration de la compensation des risques seront à l’ordre du jour durant ces prochains mois.
ETATS SOCIALISTE, BERNE
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Le besoin d’agir dans ces secteurs est évident. Cette liste n’a rien de spectaculaire et n’est pas exhaustive. Mais il s’agit au moins de petits pas en avant. URS SCHWALLER, CONSEILLER AUX ETATS PDC, TAFERS/FR
Des réformes pragmatiques
PETER GOMM, CONSEILLER D’ETAT SOCIALISTE, DIRECTEUR DE LA SANTÉ DU CANTON DE SOLEURE
Des soins de qualité pour tous au prix le plus juste
Le système de santé a besoin de réformes, car l’augmentation des coûts de la santé est un fardeau lourd que portent la population et surtout les familles avec des enfants. Lors des votations concernant la santé, le peuple nous a indiqué qu’il ne veut ni d’un système étatique avec caisse unique et primes liées au revenu, ni d’un système de concurrence non régulée. La direction est donnée, le système ac-
tuel est dans l’ensemble jugé bon, mais il faut l’améliorer. Le nouveau financement des hôpitaux, via des forfaits liés aux prestations accroît la transparence, incite à une plus grande efficience et cerne les coûts qui représentent 23,3 % des dépenses de l’assurance maladie obligatoire ou 5,2 milliards de francs. C’est la part la plus importante. Un autre projet de révision concerne les réseaux de soins. Je suis persuadée que la gestion de l’ensemble d’un traitement au sein d’un réseau intégré de médecins peut considérablement accroître la qualité et la maîtrise des coûts des traitements. L’expérience des cercles de qualité entre médecins, pharmaciens et assureurs a permis d’économiser des centaines de milliers de francs. L’introduction de la carte de santé évitera le gaspillage et appellera tous les acteurs de la santé (prestataires de soins, assureurs et patients) à plus de responsabilité quant au traitement et au comportement : plus d’examen à double, de tarifs surfaits, de tourisme médical inutile et qualité de traitement accrue. La transparence des comptes des assureurs-maladie dans l’assurance de base doit être complète et les réserves plafonnées. L’effort dans la fixation des prix de médicaments et l’emploi des génériques doivent être poursuivis aussi. Ces réformes ne doivent poursuivre qu’un seul but : l’accès à des soins
Photos: www.parlament.ch, Staatsarchiv Solothurn
La population suisse a rejeté le 1er juin 2008 le nouvel article constitutionnel sur la santé, avec une netteté que personne n’attendait. Faut-il y voir une invitation à ne plus poursuivre les réformes ? Je ne le pense pas. Les citoyennes et les citoyens ont d’abord eu peur de ne plus avoir leur mot à dire sur le futur système de santé, sur l’offre des prestations et sur celles auxquelles ils ont accès. De plus, les interprétations différentes du texte constitutionnel ont généré plus d’incertitude que de clarté. Le résultat a aussi montré que la population attache une certaine valeur à tout ce qui touche à la santé et qu’elle entend en garder la maîtrise. Les acteurs du domaine de la santé feraient bien de ne pas être sourds à ce message : la population ne veut pas de méthode bulldozer, mais des réformes pragmatiques, pas à pas. Des modifications fondamentales sont programmées pour l’année 2012 avec l’introduction du financement lié aux prestations et le libre choix de l’hôpital pour les séjours stationnaires. La mise en œuvre de ces mesures requiert des
efforts importants non seulement de la part des caisses-maladie, mais aussi des cantons. De nouvelles constellations et alliances se dessineront. Aussi bien les cantons que les assureurs auront intérêt à s’asseoir ensemble autour d’une table et à négocier le montant des tarifs avec les fournisseurs de prestations. De leur côté, les hôpitaux en tant qu’entrepreneurs auront besoin d’une certaine marge de manœuvre pour atteindre de bons résultats compte tenu des nouvelles règles et pour soutenir la comparaison avec les hôpitaux de référence. Si, dans ce processus de changement, les intérêts des patients restent au centre des préoccupations, je suis persuadé que nous réussirons aussi à relever ce grand défi.
Simonetta Sommaruga, Conseillère aux États Socialiste, Berne.
Dr Urs Schwaller, Conseiller aux États PDC, Tafers / FR.
Peter Gomm, Conseiller d’État socialiste, directeur de la Santé du Canton de Soleure.
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Photos : www.parlament.ch, Keystone, màd.
Thérèse Meyer-Kaelin, Conseillère PDC, Estavayer-le-Lac / FR.
Dr med. Felix Huber, Médecin, directeur médical de MEDIX Zurich.
Jean-Claude Rey, économiste de santé, ISE, Ecublens / VD.
de qualité pour tous au coût le plus juste.
dre à un succès identique s’agissant des offres de modèles de Managed Care. Le projet de la Helsana convainc en proposant la concurrence comme solution pour remplacer le gel des admissions. Il reste possible de maintenir l’obligation de contracter. En l’adoptant, la Suisse aura l’opportunité de donner de nouvelles impulsions aux modèles actuels de Managed Care qui rencontrent la faveur du public. Et ces modèles pourront démontrer qu’ils permettent aussi une meilleure prise en charge des patients à morbidité multiple. Enfin, le Managed Care instaurera une concurrence au niveau de la qualité, à même de faire redémarrer ce train de la qualité.
durs et sans compassion. Chaque fois qu’une assurance-maladie refuse une prestation, elle offense l’individu, tant un tel refus est perçu comme injuste. L’absence d’une séparation complète entre l’assurance de base et l’assurance privée semble être la cause principale de toutes les confusions et alimente la méfiance de l’assuré, de plus en plus conscient de l’asymétrie de l’information. Enfin, autre élément de méfiance, la perception d’un non-respect de la législation sur la protection des données par les nouveaux systèmes de remboursement (TARMED, DRG). Il faut rétablir la confiance. Or, comme les coûts vont augmenter à nouveau plus rapidement que l’indice des prix à la consommation, le débat reprendra de plus belle et de nouvelles propositions, initiatives, référendums, seront mises à nouveau en discussion. Si les caisses-maladie ont su retrouver leur capital de confiance, elles seront mieux à même de convaincre. Deux mesures prioritaires ressortent des constats ci-dessus, la transparence de fonctionnement et le respect des dispositions sur la protection de la sphère privée des assurés. Elles correspondent à de véritables révolutions, elles seront probablement impossibles à réaliser dans la situation actuelle sans un effort colossal. Elles ont nom séparation complète de l’assurance de base et de l’assurance privée et pool national des fonctions de médecins conseils, évitant la transmission aux caisses des données médicales sans dommage majeur.
THÉRÈSE MEYER-KAELIN, CONSEILLÈRE PDC, ESTAVAYER-LE-LAC/FR
Pas de situation d’impasse grâce au Managed Care
En ce qui concerne le moratoire sur l’ouverture des cabinets médicaux, le Parlement s’est donné un dernier délai. Au projet d’économie planifiée caractérisé par une planification cantonale des besoins s’oppose le modèle des deux cercles de la Helsana. Si le Parlement se prononce en faveur de la planification cantonale, la situation actuelle du pseudo gel des admissions – mise en œuvre de manière très différente par les cantons – perdurera et, avec elle, ses conséquences néfastes. Les cabinets possédant un numéro de code créancier continueront d’être vendus à un prix exagéré, tandis que les jeunes médecins n’auront d’autre choix que de reprendre de tels cabinets ou de se voir attribuer une place libre par le médecin cantonal. Cette solution nuit à la concurrence et à l’innovation. De plus, en nous bornant simplement à limiter le nombre des médecins, nous n’obtenons aucune amélioration des processus de traitement. La quote-part différenciée proposée dans le modèle des deux cercles de la Helsana est préférable en ce sens qu’elle stimule la demande d’une prise en charge plus efficace. L’instauration de la quote-part différenciée pour les médicaments a permis de faire augmenter d’un seul coup et massivement la demande des génériques. On peut s’atten-
FELIX HUBER, MÉDECIN, DIRECTEUR MÉDICAL DE MEDIX ZURICH
Et maintenant où va-t-on ?
Pourquoi, pour une écrasante majorité de la population, les arguments des opposants ont-ils porté ? Les arguments du néo-libéralisme ont généré plus de peurs que d’espoirs. S’en remettre aux règles du marché n’a pas convaincu. Les scandales aux Etats-Unis, pays phare du néo-libéralisme (Enron, les « subprimes », la pratique des assureurs décrite dans le film « Sicko ») et leurs pendants suisses (débacle Swissair et impunités des responsables, débacle UBS, etc.) ont été perçus comme autant d’exemples des dangers du marché. L’image des caisses-maladie s’est dégradée depuis une vingtaine d’années. D’entités perçues comme bienveillantes, l’image est devenue celle d’acteurs économiques comme les autres, plutôt
JEAN-CLAUDE REY, ÉCONOMISTE DE SANTÉ, ISE, ECUBLENS/VD
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Les carnets de santé virtuels
Cybersanté : solution pour le système de santé ou scenario terrifiant à la Orwell? Avec le lancement de HealthVault par Microsoft, de Google Health (Google santé) et du Dossier Médical Personnel (DMP) en France, l’avenir de la santé est-il sur la toile ? Les « cyberdocteurs » et les « cyber carnets de santé » sont-ils l’apanage d’un « cyber-patient » ou sont-ils une solution réelle aux problèmes pour un système de santé réellement performant ?
Depuis le 20 mai, les internautes américains peuvent stocker gratuitement leur dossier médical sur Internet grâce à Google Health (Google Santé), en concurrence directe avec HealthVault lancé par Microsoft en octobre 2007. Google Health permet d’archiver toutes les informations médicales souhaitées (résultats d’analyse, traitements, allergies…) et de créer divers profils pour
également suivre son entourage. Le « patient » choisit de partager ou non les données et désigne les personnes autorisées à les consulter. Pour ce faire, il lui suffit de créer un compte Google et un mot de passe. Connecté avec des hôpitaux, des laboratoires et des pharmacies, le site permet d’importer les informations médicales et de dresser l’historique médical du patient. Un annuaire est aussi disponible pour chercher le médecin le plus proche en fonction de sa spécialité ou de sa localisation. Le site alerte même le patient en cas d’inter action néfaste possible entre les différents médicaments ingérés. Les deux sites veulent prévenir les doublons thérapeutiques, favoriser le suivi des malades chroniques, centraliser le dossier médical en un lieu unique et faciliter la prise en charge des globe-trotters qui peuvent accéder n’importe où à leur dos sier médical. En dépit de leurs bonnes
intentions affichées, les critiques fusent : usurpation d’identité, ventes de fichiers (malgré les affirmations de Google) et invention digne d’un George Orwell sont invoquées. Le Dossier Médical Personnel (DMP)
En France, un projet national coordonné par le Ministère de la santé, le DMP, permettra bientôt la création et l’archivage sécurisé d’un dossier médical personnel électronique pour chaque habitant du pays. Grâce à des procédures sécurisées, la consultation pourra se faire à tout moment par les patients ou les professionnels de santé autorisés par le patient. Le DMP vise une meilleure coordination des professionnels autour du patient, une diminution des actes redondants ou des erreurs médicales, fruits d’une mauvaise circulation de l’information. Protection des données
Photo: Prisma
Les risques de piratage sont pointés du doigt. Google assure avoir l’un des systèmes les mieux protégés. Le Professeur Emmanuel Hirsch, directeur de l’Espace Éthique de l’Assistance Publique-Hôpitaux de Paris, a rappelé que « les conditions actuelles de conservation des données sous format papier sont honteuses sur le plan de la sécurité. » Et de ce point de vue, a-t-il ajouté, « le dossier médical personnel va clairement nous permettre de gagner en qualité. » L’informatique, un moyen et non une fin en soi
L’informatique est utile, mais ne remplace pas le médecin.
Certains professionnels redoutent aussi un appauvrissement de la relation patient-médecin. Toutefois, ces services ne dispensent pas d’un interrogatoire attentif du médecin. Comme le patient choisit les données à faire inscrire, cela est d’autant plus nécessaire, car le médecin ne sait jamais si le dossier est complet. Il est évident que l’informatique ne remplacera pas une consultation : cela reste un moyen et non une fin en soi. MAUD HILAIRE SCHENKER
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Rapport d’activité 2007 de l’Office de médiation de l’assurance-maladie sociale
Les changements de caisse créent un nombre croissant de problèmes Environ 5000 assurés – soit 6,5 % de plus que l’année précédente – ont demandé en 2007 des renseignements ou des conseils à l’Ombudsman de l’assurance-maladie. 3⁄5 des cas concernaient les prestations d’assurance, un petit quart la conclusion d’une assurance ou le changement d’assureur. Les primes n’ont constitué que 9 % des demandes. En prenant l’exemple fictif de la famille Dupont, le rapport annuel décrit les problèmes les plus fréquemment rencontrés par l’Ombudsman.
Après une légère tendance à la baisse, le nombre de dossiers soumis à l’Office de médiation de l’assurance-maladie sociale à Lucerne a de nouveau augmenté en 2007. 3125 dossiers (soit 62 % des 5087 cas) concernaient les prestations d’assurance, 1167 (soit 32 %), la conclusion d’une assurance ou le changement d’assureur, et seulement 474 (soit 9 %) les primes. Les cas provenant de Suisse alémanique ont été sensiblement plus nombreux que l’année précédente, ceux de Suisse romande ont en revanche quelque peu diminué. Rudolf Luginbühl, l’Ombudsman, l’explique par une présence accrue de l’Office de médiation dans les médias alémaniques. La répartition des entrées par langue donne 83 % des demandes en allemand, 15 % en français et 2 % en italien. Moins d’assureurs concernés
Alors que les changements de caisse ont été très peu fréquents, les problèmes qu’ils ont générés ont fortement augmenté. Selon l’Ombudsman, la raison en est la publicité intensive notamment par téléphone derrière lesquels le message réel n’était d’ailleurs pas toujours immédiatement perceptible. De plus, les courtiers en assurance n’ont
EVOLUTION DES ENTRÉES DE 1996 À 2007 8000
Source: Ombudsman de l'assurance-maladie sociale
6967
7000 6358 6000
6140 5574
5474
5231
6071
5481
5431
5000
5145
4775
5087
4000 3000 2000 1000 0
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
Après avoir fléchi durant les quatre dernières années, les demandes adressées à l’Ombudsman ont à nouveau légèrement augmenté en 2007.
souvent pas résilié un contrat en cours ou l’ont fait trop tôt, négligeant parfois le fait qu’une résiliation partielle fait perdre le droit à des rabais ou encore se sont gardés de parler des délais de carence. Les problèmes ne sont surve nus que chez peu d’assureurs-maladie, mais cependant en grand nombre. L’Office de médiation devra, semblet-il, s’occuper pendant encore un certain temps des suites de changements de caisse problématiques. Problèmes d’assurance-maladie de la famille Dupont
Les types de problèmes qui ont été soumis le plus souvent à l’Ombudsman au cours de l’année 2007 sont illustrés à travers le modèle fictif de la famille Dupont. L’histoire commence lorsque Madame Dupont, mal conseillée, résilie son assurance complémentaire chez son ancien assureur avant d’avoir reçu confirmation que le nouvel assureur lui garantit la même couverture d’assurance. L’Ombudsman a finalement obtenu que le nouvel assureur réponde de la faute de son démarcheur et accepte Madame Dupont dans l’assurance complémentaire sans lui imposer de réserve. Un autre problème est apparu : à la suite du changement d’assureur, Madame Dupont risque de perdre une prestation en cours, des conseils nutritionnels. Selon l’ordonnance sur les prestations de l’assurance obligatoire des soins, ceux-ci ne sont remboursés que pendant une durée limitée, à moins que le médecin-conseil de l’assureur ne recommande de les poursuivre plus longtemps. Après avoir consulté son médecin-conseil, le nouvel assureur refuse de prendre en charge cette prestation que le médecin-conseil de l’ancien assureur avait pourtant recommandé de prolonger. Sur la base de cet exemple, l’Ombudsman conseille aux personnes qui bénéficient de prestations garanties par un assureur en vertu de son pouvoir d’appréciation de ne pas changer d’assureur à la légère. De plus, en changeant d’assurance complémentaire, les assurés devraient examiner
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de manière très précise quelles prestations sont couvertes par la nouvelle assurance complémentaire. Devoir d’information en matière d’assurance d’indemnités journalières
Le grand-père Dupont tombe malade et l’annonce à son assureur d’indemnités journalières. Peu avant sa retraite, il avait conclu une assurance individuelle d’indemnités journalières complète, avec primes correspondant à une couverture totale, en vue d’exercer une activité lucrative indépendante après sa retraite. Le vendeur lui a certes remis le règlement de cette assurance, mais sans signaler qu’à partir de 65 ans, l’assuré ne peut obtenir que des prestations partielles et que, dans chaque cas d’assurance, il doit prouver la perte de gain. Après intervention de l’Ombudsman, l’assureur rembourse la prestation partielle réglementaire, met fin à l’assurance et restitue rétroactivement une partie des primes. L’Ombudsman commente ce cas de la manière suivante : en matière d’assurance d’indemnités journalières, les assurés font souvent valoir qu’ils ont été mal conseillés par leur assureur. Dans l’assurance d’indemnités journalières régie par la LAMal, qui n’est plus très courante, il s’agit de savoir dans quelle mesure une obligation de conseiller les assurés peut être déduite de la loi sur la partie générale du droit des assurances sociales (LPGA). En matière d’assurance d’indemnités journalières régie par le droit privé, il incombe à l’assuré lui-même de vérifier périodiquement sa couverture d’assurance. En particulier dans cette branche d’assurance, la situation de l’intéressé peut facilement varier en raison d’un changement d’emploi, d’une réduction du temps de travail ou d’une forte augmentation de salaire. En vertu des nouvelles dispositions de la LCA, il existe aussi un devoir d’informer l’assuré lors de la conclusion d’une assurance d’indemnités journalières régie par le droit privé.
Suspension des prestations et faillite privée
Un autre exemple de la famille Dupont concerne la suspension des prestations en cas de faillite privée et d’arriérés de primes impayées. Deux types de questions se posent en la matière et concernent le statut privilégié de la créance et la mise en cause de l’avantage accordé par la loi sur la poursuite pour dette et la faillite : celle-ci donne au débiteur en faillite privée la possibilité de rétablir sans contraintes sa situation financière. De l’avis de l’Ombudsman, ce principe ne devrait pas être remis en question. Valentin, le fils âgé de vingt ans, est confronté au fait que pendant des années ses parents n’ont pas payé les primes le concernant à l’assureur-maladie. Un enfant est lui-même débiteur de ses primes d’assurance-maladie. Ses parents, qui lui doivent assistance, sont certes tenus de les payer. Mais l’assureur est en droit, malgré ce devoir parental, de suspendre les prestations à l’enfant en cas de non-paiement des primes. Le cas de Valentin a ceci de particulier que l’assureur l’a laissé payer les primes pendant deux ans sans attirer son attention sur les arriérés cumulés par son père. C’est pourquoi l’assureur a consenti à effacer cette dette. En voyage autour du monde, mais assuré en Suisse
Avant de commencer ses études aux USA, Valentin entreprend un voyage de six mois à travers le pays. Son assureur accepte de le garder dans l’assurance de base pendant ce périple. Au moment où Valentin commence ses études, l’assureur le considère à juste titre comme domicilié aux Etats-Unis et il doit donc être couvert par l’assurance de ce pays. La question du maintien de l’assurance pendant un séjour à l’étranger est un thème récurrent pour l’Office de médiation. La pratique à cet égard varie selon les assureurs. Pour l’Ombudsman, il est clair que les personnes qui voyagent – même pendant plusieurs mois – à travers le monde ne peuvent pas élire domicile à un endroit.
Elles conservent donc leur domicile en Suisse et continuent d’être soumises à l’assurance obligatoire. D’autres exemples concernent des étudiants étrangers en Suisse assurés auprès de compagnies internationales, la contribution journalière aux frais de séjour hospitaliers du concubin, la participation aux coûts en cas d’accident, l’utilisation d’un médicament en dehors des indications figurant dans la liste des spécialités (« off-label-use ») et les prestations à bien plaire. Dans l’assurance de base, les prestations à bien plaire sont interdites, mais il y a toujours des cas où l’assureur dispose d’une marge d’appréciation. Dans une telle situation, l’Ombudsman est d’avis que l’assureur « devrait, sans que le doute profite systématiquement à l’assuré, user de cette faculté avec souplesse ». C’est souvent une question de bon sens. WALTER FREI
L’Office de médiation pour l’assurancemaladie sociale, fondé par santésuisse, est actif depuis 1993. Le président actuel du conseil de fondation est Rudolf Gilli, ancien directeur de la Concordia. L’Office est dirigé par Rudolf Luginbühl, Ombudsman. Adresse :
Ombudsman de l’assurance-maladie sociale Morgartenstrasse 9, 6003 Lucerne Tél. allemand: 041 226 10 10 Tél. français: 041 226 10 11 Tél. italien: 041 226 10 12 Renseignements :
du lundi au vendredi, de 9 h à 11 h 30 Fax: 041 226 10 13 Mail: info@om-kv.ch www.ombudsman-kv.ch
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Symposium Forum Managed Care
Managed Care – the next generation Durant les prochaines années, le vieillissement, le progrès technologique et médical, mais aussi le changement de comportement des patients vont amplifier la complexité du domaine de la santé et la pression des coûts qui pèse sur lui. Le Managed Care est-il prêt à relever de tels défis ? Comment sera le Managed Care de la prochaine génération – au-delà du gatekeeping, des rabais de primes et du renoncement au libre choix total du médecin ? Le Forum de cette année a les yeux braqués sur le futur.
Coopération au-delà de la branche de la santé
En référence au film primé en 2003 de Sofia Coppola, Stephan Sigrist* a intitulé son exposé « Lost in translation ». Comme un étranger dans la jungle d’une grande ville japonaise, le patient moderne semble se perdre dans le système de santé, devenant toujours plus complexe et se transformant toujours plus vite. L’évolution démographique, le progrès médical, la définition globale de la santé ainsi que l’individualisation et la commercialisation de la société constituent le moteur de ce changement. Ces forces modifient durablement le spectre de l’offre et de la demande. Le domaine de la santé ne se limite plus au médecin et à l’hôpital dont les missions consistent à guérir les patients. Aujourd’hui, on attend également des services de santé le maintien et la promotion de la santé (prévention), mais aussi l’amélioration des performances individuelles ou de la beauté (enhancement). Cette évolution de la structure de la demande conjuguée au progrès technique conduit à un élargissement massif de l’offre. Aux côtés des fournisseurs traditionnels de prestations de santé, de nouveaux fournisseurs issus de l’industrie des biens de consommation et de la branche du tourisme viennent se greffer sur ce marché.
Photos: màd.
Le Managed Care jouit d’une faveur grandissante auprès de la population, comme le démontre la demande croissante d’année en année en produits d’assurance correspondants. Qu’en sera-t-il à l’avenir ? Les caractéristiques jusqu’ici déterminantes du Managed Care telles que le gatekeeping, les rabais de primes et le renoncement au libre choix total du médecin suffiront-elles encore à convaincre l’assuré d’opter pour ce modèle dans un domaine qui devient toujours plus complexe ? Non – et les avis exprimés dans le cadre du symposium concordent largement – le Managed Care doit aussi évoluer et se distinguer s’il veut, à l’avenir aussi, continuer de répondre aux besoins des patients. Il est en l’occurrence également possible de tirer profit de l’expérience de branches extérieures au domaine de
la santé. Lors du Symposium Managed Care 2008, ce thème a été plus développé dans deux exposés.
Cornelius Claus de l’entreprise Porsche : les expériences issues de l’industrie automobile servent aussi dans le système de santé.
Aussi la complexité s’accroît-elle pour le patient. Quel traitement choisir ? Le patient souhaite de la transparence et de la simplicité. Selon S. Sigrist, les systèmes traditionnels de prise en charge du patient – médecin de premier recours, spécialiste, hôpital et réadaptation – ont atteint leurs limites. En tant que fournisseurs individuels, ils ne sont plus armés pour répondre aux prétentions et aux besoins des patients. En conséquence, S. Sigrist demande que les fournisseurs de prestations, l’industrie et les assurances collaborent. Seul un tel « Managed Care » est à même de garantir le transfert intersectoriel indispensable du savoir et de la technologie, d’augmenter la qualité des prestations et des traitements, de promouvoir la transparence et, en même temps, de tenir compte des besoins individuels des patients. Apprendre en s’inspirant d’autres domaines
Cornelius Clauser, partenaire de Porsche Consulting SARL, explique comment le domaine de la santé peut tirer profit d’expériences réalisées hors du secteur de la santé. A première vue, il peut sembler aberrant de transposer les expériences de l’industrie automobile au domaine de la santé, notamment aux hôpitaux. C. Clauser en a pourtant démontré avec succès la faisabilité. Les coûts de la santé ne cessant d’augmenter, il faut impérativement trouver des solutions. C’est un fait que personne ne conteste. Les discussions politiques se focalisent la plupart du temps uniquement sur la question de savoir s’il faut augmenter les contributions des assurés ou supprimer des prestations. Pour C. Clauser, il est cependant beaucoup plus important d’identifier dans quelle mesure des gains d’efficience dans le système de santé sont encore réalisables. Par efficience s’entend un résultat optimal obtenu avec le moins de ressources possibles. Aux yeux de C. Clauser, les principes de l’industrie automobile, du Lean management et de la Lean production (voir encadré) peuvent aussi être utiles au domaine de la santé grâce à l’optimisation des processus de travail. Point n’est besoin d’aug-
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Discussions animées entre les auditeurs : le sujet du congrès a fourni de multiples sujets de conversation.
menter les prestations en travaillant plus vite par exemple ou de couper aveuglément dans les dépenses. L’essentiel est d’éliminer les gaspillages dans les processus de travail. La création de la valeur ajoutée occupe une place centrale – dans le domaine de la santé. Il s’agit en l’occurrence des activités proches des patients. Selon les investigations effectuées par Porsche Consulting, un médecin consacre seulement 30 % de son temps de travail à de telles activités. Le reste de son temps – dédié à la documentation, aux entretiens, etc. – est considéré par l’industrie comme gaspillage. Toutes ces activités ne sont certes pas superflues, mais il faut au moins les organiser de telle sorte qu’elles correspondent aux qualifications de la personne qui les exécute. Les gains d’efficience ne doivent en aucun cas se faire au détriment de la qualité. Mais qu’est-ce que la qualité ? Tout le monde en parle, mais personne ne sait exactement en quoi elle consiste. Dans l’industrie, c’est le client qui juge de la qualité. Pour C. Clauser, le désir du client doit aussi être placé au premier plan pour ce qui a trait à l’ensemble des activités du domaine de la santé. Le patient préfère la transparence et un message compréhensible à des explications techniques. La perception de la
qualité par le patient ne repose donc pas seulement sur la qualité médicale, mais aussi sur la qualité de la prise en charge et du suivi. En d’autres termes, outre la pertinence du diagnostic et du traitement, le respect des délais, la suppression des temps d’attente, la communication et l’empathie jouent aussi un rôle décisif dans la perception qu’a le patient de la qualité. La qualité doit être mesurable au moyen d’indicateurs. Ce qui n’est pas mesurable ne peut, par définition, être amélioré. En appliquant les principes mentionnés ci-dessus, propres à l’industrie automobile, Porsche Consulting a par exemple réussi à augmenter de 30 % la productivité de la division de chirurgie cardiaque du Centre cardio-vasculaire de Fribourg, à diminuer la durée moyenne de séjour des patients tout en améliorant la qualité. Un résultat très encourageant prouvant qu’il existe encore un certain potentiel de réduction des gaspillages dans notre système de santé. Il serait souhaitable de l’exploiter avant de parler de rationnement. MATTHIAS SCHENKER
Lean management : concept de gestion développé au Japon, axé sur l’augmentation de la compétitivité grâce à la baisse des coûts, la prise en compte des désirs des clients et des standards de qualité élevés et qui suggère que l’ensemble de la conduite de l’entreprise s’inspire des principes du Lean production. L’organisation d’équipes, le démantèlement des hiérarchies (hiérarchie plate) et l’amélioration systématique jouent un rôle particulier. Lean production : moyen de gestion de la production centré sur le principe d’économicité en vertu duquel on cherche à obtenir une baisse considérable du temps de travail et des coûts dans les secteurs du développement et de la production, notamment grâce au travail de groupe et à la standardisation des flux de matériel. Le concept de base essentiel est la distinction entre activités à valeur ajoutée et gaspillages dans le but d’augmenter ensuite la part des activités à valeur ajoutée.
* Responsable d’un think tank (laboratoire à idées) concernant les sciences vivantes, le marché et la société de la Banque Sarasin et du Collegium Helveticum, le bureau de recherche transdisciplinaire de l’Ecole Polytechnique et de l’Université de Zurich. Voir aussi l’interview du Dr Stephan Sigrist à la page 10.
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Graphique du mois de juillet
Statistique des médecins en 2007 : leur nombre stagne Le moratoire sur les cabinets médicaux, en vigueur depuis 2002, semble avoir eu des effets, quoique tardifs. Le nombre des médecins exploitant un cabinet médical a certes encore une fois légèrement augmenté en 2007, mais par rapport au nombre des habitants, il a légèrement régressé.
Selon la statistique des médecins de la FMH, la Suisse comptait en 2007 environ 15 588 médecins (hommes et femmes) ayant ouvert un cabinet médical, soit 56 de plus (ou 0,4 %) que l’année précédente. En passant de 20,6 à 20,5 médecins pour 10 000 habitants, l’année 2007 a été marquée par un léger recul. En 2007, on comptait un médecin avec cabinet médical pour 489 habitants (en 2006 : 487) ; en 1996, année de l’entrée en vigueur de la LAMal, on comptait encore 560 habitants pour un médecin.
De grandes disparités en matière de densité médicale
Les cantons enregistrent de très grandes disparités au niveau de la densité médicale (voir tableau). Bâle-Ville, dont la densité médicale a continué de s’accroître, compte 38,7 médecins avec cabinet médical pour 10 000 habitants, un nombre environ trois fois supérieur à celui des cantons d’Obwald, de Nidwald, d’Appenzell Rhodes Intérieures, d’Uri, de Schwyz et de Thurgovie. Genève occupe la deuxième place en matière de densité médicale avec presque 33 médecins pour 10 000 habitants. Le canton de Vaud vient au troisième rang, mais avec un écart considérable (24,6). Les cantons de Zurich, Berne, Neuchâtel et du Tessin se situent également au-dessus de la moyenne Suisse (autour de 20,5). Accroissement du nombre des médecins malgré le gel des admissions
Depuis 2002, année de l’entrée en vigueur du moratoire sur l’ouverture des cabinets médicaux, le nombre des médecins exploitant un cabinet a continué de s’accroître dans tous les cantons, sauf
dans celui d’Uri. A l’échelle nationale, l’augmentation a atteint un peu plus de 8 % ; au niveau des cantons, elle a même été de 23,3 % dans le canton de Zoug, de 21,5 % dans le canton d’Appenzell Rhodes Extérieures et de 19 % environ dans les cantons de Schwyz et de Glaris. En analysant la densité médicale (voir graphique), on constate qu’outre le canton d’Uri, le canton de Genève a également enregistré un léger recul. Le nombre des médecins pour 10 000 habitants y est passé, entre 2002 et 2007, de 33,3 à 32,9 et, dans le canton d’Uri, de 13,2 à 12,5. Les cantons de Zurich, du Valais et d’Appenzell Rhodes Intérieures n’ont enregistré qu’une légère augmentation, alors qu’elle a été sensiblement supérieure à la moyenne suisse dans les cantons de Bâle-Ville, d’Appenzell Rhodes Extérieures et de Glaris. Les chiffres montrent que le gel des admissions a manifestement été appliqué de manière très différente dans les cantons. Mais entre 2006 et 2007, la tendance à la hausse semble avoir été interrompue dans la plupart des cantons. WALTER FREI
Source: FMH
Depuis 2002, le nombre des médecins a augmenté de plus de 5 % en Suisse. Cette tendance semble à présent s’inverser.
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Photo: Prisma
La première et la dernière prime de l’assurance obligatoire des soins
Selon l’art. 3, alinéa 1 LAMal, toute personne domiciliée en Suisse doit s’assurer pour les soins en cas de maladie ou être assurée par son représentant légal, dans les trois mois qui suivent sa prise de domicile ou sa naissance en Suisse. En principe, il n’y a pas de primes au pro rata. Elles sont en général mensuelles et doivent être payées à l’avance (art. 90 OAMal). Chaque assureur détermine lui-même quelle règle s’applique au mois où a lieu l’affiliation ou la sortie de la caisse.
au moment de l’affiliation. Dans le cas d’un retard non excusable, l’assuré doit s’acquitter d’une majoration de prime se situant entre 30 et 50 % de la prime (art. 8, al. 1 LAMal). L’assureur calcule le supplément en fonction de la situation financière de l’assuré. Si le règlement de la majoration met celui-ci dans la gêne, l’assureur fixe un taux inférieur à 30 %, en tenant compte équitablement de la situation de l’assuré et des circonstances du retard. Il n’est pas perçu de supplément, lorsque les primes sont prises en charge par l’autorité compétente d’aide sociale.
Première prime
En principe, un enfant peut déjà être annoncé avant sa naissance auprès d’une assurance-maladie. Au plus tard avant l’échéance des trois premiers mois de vie, le nouveau-né doit être déclaré par ses parents ou son représentant légal auprès d’une assurance- maladie. Dans le cas d’une affiliation à temps, l’assurance déploie ses effets dès la naissance. Pour autant qu’il séjourne à l’hôpital avec sa mère, les soins et le séjour d’un nouveau-né en bonne santé sont facturés à la charge de l’assurance-maladie de la mère et font ainsi partie des coûts liés à la maternité, exemptés de la participation aux coûts. Le séjour et les soins à l’hôpital d’un nouveau-né malade en revanche, ne font pas partie des coûts liés à la maternité, même si la mère séjourne dans le même hôpital que son nouveau-né. Ces coûts sont imputés à l’assurance-maladie du nouveau-né. Les personnes étrangères qui élisent domicile en Suisse et sont détentrices d’un permis de séjour sont également tenues de s’annoncer dans les trois mois auprès d’un assureur-maladie. Dans le cas d’une annonce à temps, la protection d’assurance débute au moment de la prise de domicile. Dans le cas d’une affiliation tardive, la protection d’assurance débute
Dernière prime
La dernière prime mensuelle est, à l’expiration du mois correspondant, liée à l’extinction de la protection d’assurance. L’assurance prend fin à la date du décès de la personne assurée, au moment d’un déménagement à l’étranger, si aucun domicile ne subsiste en Suisse, ou pour une raison particulière mettant fin au contrat d’assurance (voir notamment art. 4, al. 3 et art. 7, al. 6 OAMal). Lorsque l’événement qui met fin à l’obligation de s’assurer survient, l’assurance s’arrête automatiquement, sans formalité de résiliation. S’agissant des ressortissants étrangers détenteurs d’une autorisation d’établissement ou d’une autorisation de séjour, l’assurance prend fin le jour de la date de départ annoncée au service suisse compétent pour le contrôle des habitants, ou dans tous les cas le jour du départ effectif de la Suisse, à savoir le jour où ils quittent le territoire suisse. VERENA BUCHER
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Nouvelles du monde
La 20e Conférence mondiale sur la promotion de la santé de l’UIPES se tiendra du 11 au 15 juillet 2010 à Genève
La Suisse accueille la plus grande conférence mondiale en matière de promotion de la santé L’Union Internationale de Promotion de la Santé et d’Education pour la Santé (UIPES) existe depuis plus de cinquante ans. Elle est le réseau mondial le plus important de promotion de la santé et d’éducation pour la santé. Parmi ses membres, elle compte des gouvernements, des institutions proches des gouvernements, des universités, des instituts, des organisations à but non lucratif et des experts individuels. L’UIPES travaille en étroite collaboration avec les bureaux de promotion de la santé des différents pays, mais aussi avec l’OMS, l’UNESCO et l’UNICEF. Elle organise tous les trois ans une conférence internationale qui, après des débuts modestes, est aujourd’hui l’événement majeur en matière de promotion de la santé dans le monde. La 20e Conférence mondiale sur la promotion de la santé de l’UIPES se tiendra du 11 au 15 juillet 2010 à Genève. L’événement sera organisé conjointement par la fondation Promotion Santé Suisse et le canton de Genève sous le patronage de l’association internationale UIPES. Cette conférence aura lieu pour la première fois depuis plus de 50 ans en Suisse. La manifestation d’une semaine aura pour thème « Santé, équité et développement durable ». 2500 invités originaires de 80 nations représentant tous les continents sont attendus pour cet événement. Dans notre monde globalisé mû par la dynamique de la modernisation et de l’urbanisation, le besoin d’un développement écologique durable et d’une promotion équitable et durable de la santé se fait de plus en plus ressentir. La course aux richesses du sous-sol et la destruction de l’environnement qu’elle entraîne minent la solidarité et accroissent les inégalités sociales. C’est pourquoi, l’amélioration durable de la santé et du bien-être exige une collaboration transfrontalière renforcée. Celle-ci va bien au-delà du domaine de la santé. Une intervention judicieuse, éthiquement défendable et fondée sur l’expérience et les faits est indispensable. La 20e Conférence mondiale sur la promotion de la santé de l’UIPES entend présenter des solutions qui font du développement durable l’un des piliers de l’amélioration de la santé. Les thèmes suivants seront traités lors de la conférence : • Environnement durable : planification urbaine, équité environnementale, partenariats locaux et internationaux en matière d’urbanisation et de développement durable • Développement équitable de la santé : développement de capacités et de compétences, acquisition durable de fonds • Conduite participative : partenariats, réseaux et coopération. Informations complémentaires sous www.promotionsante.ch
« senso » : parmi les 5 finalistes sur 659 participants
La fin des « cigarettes bonbons » Lors de la Journée mondiale sans tabac, la ministre de la Santé, Roselyne Bachelot, a annoncé qu’elle interdirait, en mesure de prévention, les cigarettes sucrées. À la saveur douce (vanille, chocolat..), elles facilitent la dépendance et leurrent les adolescents qui les pensent moins dangereuses.
La clinique de l’horreur Par appât du gain, les chirurgiens d’une clinique privée de Milan ont pratiqué systématiquement des opérations inutiles. 91 cas frauduleux ont été recensés, dont 5 avec une issue fatale. Une patiente atteinte d’une pneumonie a ainsi subi l’ablation d’un poumon, alors qu’un traitement antibiotique aurait amplement suffi.
Prime unique en Allemagne ? Les grands assureurs Allianz et Axa proposent d’introduire en Allemagne une « assurance de base obligatoire pour toute la population financée au moyen d’une prime unique. » Ce modèle correspondrait dans une large mesure au modèle suisse. Le SPD a déjà signalé son soutien à cette proposition.
Urgence
Le magazine pour les clients de Helsana décroche une médaille d’argent «senso», le magazine pour les clients de Helsana a participé au concours « Best of Corporate Publishing » qui s’est tenu à Munich. La publication figurait parmi les cinq finalistes sur 659 participants et a finalement remporté la médaille d’argent dans la catégorie « systèmes de santé/ pharma ».
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Dans le cadre d’un essai pilote réalisé à New York, un spécialiste des organes est systématiquement présent dans l’ambulance lors d’interventions d’urgence. Cette mesure doit permettre d’accélérer le prélèvement d’organes pour d’éventuels dons. Certains jugent toutefois l’expérience dangereuse, tant il est difficile d’établir, sur le lieu de l’accident, si une personne est effectivement décédée.
Vers un rationnement du système de santé français ? La France, déjà grande consommatrice de médicaments, a vu ses dépenses en médicaments encore augmenter de 4,8 % l’année passée. L’Etat a donc décidé d’agir. L’ensemble des médicaments remboursables par l’assurance maladie a fait l’objet, entre 1999 et 2001, d’une réévaluation de leur service médical rendu (SMR), à la demande des ministres chargés de la Santé et de la Sécurité sociale. En février 2006, 835 médicaments au SMR insuffisant, « les vignettes orange », n’étaient plus remboursés qu’à hauteur de 15 % pendant deux ans, avant leur déremboursement total au 1er janvier 2008. C'est maintenant chose faite. Les médicaments concernés sont essentiellement des veinotoniques, des anti-diarrhéiques, ou des médicaments utilisés en oto-rhino-laryngologie. Pour compenser cette mesure, les scientifiques de la HAS (Haute Autorité de Santé) ont proposé des traitements alternatifs.
Conséquences directes : depuis le 1er février 2006, les ventes de veinotoniques ont chuté de 50 % en deux mois et les prix des médicaments désormais libérés ont augmenté de 36 % en moyenne. Les prix des veinotoniques dont le ministre de la Santé avait annoncé une diminution de 20 % n’ont baissé en réalité que de 12 %. Les assurés sont les premiers à en pâtir. Souvent mal informés des médicaments qui ne sont plus remboursés, ils se trouvent souvent dépourvus au moment de régler la facture. Ils ont alors le sentiment de voir un rationnement du système de santé et se demandent pourquoi ces médicaments continuent d’être prescrits et vendus s’ils sont inefficaces. Si le but réel de ces vagues de déremboursement est bien la rationalisation et non le rationnement du système de santé, la campagne de communication gagne à être perfectionnée.
L’inactivité coûte plusieurs milliards de francs par an
2900 décès prématurés dus au manque d’activité physique une plus grande activité physique. Les coûts directs des traitements médicaux qui en résultent se montent à 2,4 milliards de francs par an. Plus d’informations sous www.baspo.admin.ch – Thèmes – Santé.
Photo: Prisma
Chaque année, 2900 personnes au moins décèdent prématurément en Suisse, parce qu’elles bougent trop peu. C’est ce que révèle une étude récente du Département fédéral des sports. S’y ajoutent les 2,1 millions de maladies qui pourraient être évitées avec
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Service
La fin du rembours ement des « vignettes orange »
Manifestations Organisateur
Fait particulier
Date / Lieu
Renseignements
Versorgungsnetzwerke: Chancen, Stolpersteine, gute Beispiele (Réseaux d'approvisionnement : chances, écueils et exemples concluants) Société suisse pour la politique de la santé (SSPS)
Exposés et ateliers pratiques
21 août, Université de Zurich Irchel
www.sggp.ch
Das Krankenversicherungsgesetz: Der Kampf ums Überleben beginnt! (Loi sur l'assurance-maladie : la lutte pour la survie commence !) Université de Saint-Gall
Exposés notamment de Pierre-Yves Maillard, Peter Indra, Ruth Humbel et Manfred Manser
28 août Grand Casino Lucerne
www.irp.unisg.ch
4ème colloque platine de la SSMI Société Suisse de Médecine Interne
Thème : Wie viel Gesundheit braucht der Mensch? (De quel niveau de santé l’être humain a-t-il besoin ?)
www.sgim.ch 29 et 30 août Hôtel Seerose, Meisterschwanden
Qualitätsindikatoren in der Schweiz – Gibt es gemeinsame Konzepte? (Indicateurs de qualité en Suisse – Existe-t-il des concepts communs ?) RS Medical Consult GmbH
Exposés notamment de Peter Indra, vice2 septembre directeur de l’OFSP, et Verena Nold, directrice Hôtel Marriott adjointe de santésuisse Zurich
www.rsmedicalconsult.com
Dessin: Marc Roulin
Informez-nous de vos manifestations : redaction@santesuisse.ch Plus d’informations sur www.santesuisse.ch
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Kantonsspital
GraubĂźnden
Symposium Qualitätsindikatoren in der Schweiz – gibt es gemeinsame Konzepte? 2. September 2008 im Marriott Hotel Zßrich Nicht erst seit der Verabschiedung der 3. KVG Revision durch das Bundesparlament hat der Begriff Qualität in all seinen Facetten und Schattierungen Hochkonjunktur, sondern spätestens seit der VerÜffentlichung von patientenbezogenen Umfrageergebnissen durch einen privaten Anbieter. Jahrelang Versäumtes im Bereich der Qualitätssicherung soll nun innert kurzer Zeit nachgeholt werden. Doch wo steht die Schweiz in Bezug auf die Messung der Qualität der medizinischen Leistungen wirklich? Besteht ßberhaupt ein ßbergeordnetes Konzept? Eine besondere Stellung nehmen dabei Qualitätsindikatoren ein. Nur dadurch wird es mÜglich sein, die erbrachten Leistungen miteinander zu vergleichen und, sofern notwendig, diese zu verbessern. Dieser Prozess muss angestossen und gefÜrdert werden, auch im Hinblick auf Qualität und Wettbewerb.
Ziel des Symposiums: Die Veranstaltung soll aufzeigen, wo die Schweiz mit der Einfßhrung von Qualitätsindikatoren steht. Dabei werden Vertreter von Interessengruppen aufzeigen, welche Wege sie in der Entwicklung von Qualitätsindikatoren zur Zeit beschreiten und welche Entwicklung aus ihrer Sicht angezeigt ist. Es referieren: s 0ETER )NDRA 6IZEDIREKTOR DES "UNDESAMTES Fà R 'ESUNDHEIT s 4HOMAS -ANSKY ,EITER MEDIZINISCHE %NTWICKLUNG Helios Kliniken Berlin s -ICHAEL (EBERER ,EITER )NSTITUT Fà R #HIRURGISCHE Forschung und Spitalmanagement, Mitglied der Spitalleitung Universitätsspital Basel s #HRISTIAN 'à NSTER &ORSCHUNGSBEREICHSLEITER )NTEGRIERTE !NALYSEN 7ISSENSCHAFTLICHES )NSTITUT DER !/+ 7)D/ Bonn s $ANIEL " (ERREN :ENTRALVORSTANDSMITGLIED &-( 2ESSORT Qualität s "ERNHARD 7EGMà LLER $IREKTOR ( $IE 3PITÊLER DER 3CHWEIZ s 4HOMAS 3TRAUBHAAR 0RÊSIDENT )61 n )NTERKANTONALER Verein Qualitätssicherung und -fÜrderung in den Spitälern s 6ERENA .OLD 3TELLVERTRETENDE $IREKTORIN SANT�SUISSE Präsidentin der nationalen Koordinations- und )NFORMATIONSSTELLE Fà R 1UALITÊTSSICHERUNG +)1 s !RNOLD "ACHMANN #%/ +ANTONSSPITAL 'RAUBà NDEN s %RIKA :ILTENER 0RÊSIDENTIN $ACHVERBAND 3CHWEIZERISCHER Patientenstellen Anmeldung und weitere Informationen: www.rsmedicalconsult.com
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FĂźr die neu geschaffene Stelle an den Schnittstellen Leistungserfassung / Leistungsabrechnung suchen wir per sofort oder nach Vereinbarung eine/n Mitarbeiter/in
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Ihre Krankenversicherungs-Spezialisten für alle Fälle Als staatlich beaufsichtigtes Revisionsunternehmen mit der spezialgesetzlichen Zulassung als Revisionsstelle für Versicherungsgesellschaften garantieren wir aufgrund unserer langjährigen Erfahrungen im Krankenversicherungswesen eine kompetente und einwandfreie Revision nach den gesetzlichen Bestimmungen (KVG, VVG und VAG) und Verordnungen (KVV und AVO).
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Mise au Point – Politique de la santé
Cette publication est conçue en premier lieu pour les politiciens, les journalistes, les cadres des assurances et toutes les personnes intéressées à la politique de la santé. Cette revue paraît quatre fois par année. Elle est disponible par numéro ou sous forme d’abonnement. Veuillez compléter et retourner ce talon à: santésuisse, service des éditions, case postale, 4502 Soleure, fax 032 625 41 51.
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