DU
ECOLE D’ARCHITECTURE DE RABAT
LOGEMENT SOCIAL A L’HABITAT SOCIAL Un ESSAI pour une ville inclusive Réalisée par : Sarah ABDELILAH Encadré par : Abdelkrim TAHTI
Membres du jury : Mme. Khadija KARIBI Mme. Samira SAOUDI
Mr. Abdellah EL HOUARI Mr. DEPOUTOUX
PROJET DE FIN D’ÉTUDE 2018 / 2019 EN VUE D’OBTENTION DU DIPLOME D’ARCHITECTE
UNIVERSITÉ INTERNATIONALE DE RABAT
Résumé : Repositionner l’homme dans son environnement, et assurer son épanouissement représente le principal enjeux de tout acte architectural. Ainsi cette affirmation a accompagné ce travail de mémoire depuis ses premiers prémices jusqu’à ces dernières conclusions. En effet , on s’est intéressé, dans ce mémoire, de plus prêt à la relation de l’homme et de son environnement, pour ainsi analyser en détail la différence entre le logement social et l’habitat social, et leur relation interactive à l’Homme dans sa pratique de la vie quotidienne. A travers l’hypothèse de l’habitabilité comme étant le pilier majeur d’intégration de l’homme dans son environnement immédiat, ce travail de recherche a ainsi pu affirmer la définition principale de l’acte d’Habiter comme étant une qualité de vie en premier lieu, dont l’homme est sujet interactif avec son environnement, sa ville et sa demeure. Ainsi, du logement social à l’habitat social, une mutation de valeurs et une revalorisation des conditions de vie et de la qualité d’habiter s’impose, pour une meilleure intégration au sein d’une ville inclusive et durable. A travers une démarche durable, qui vise à repositionner l’homme dans son environnement, et à renouer le lien de sa pratique de l’espace avec ce dernier, l’habitat social devient un moteur essentiel pour un cadre de vie agréable dans des conditions décentes.
PRÉSENTATION GÉNÉRALE : INTRODUCTION PROBLÉMATIQUE METHODE D’APPROCHE STRUCTURE DE L’ÉTUDE
01
Situation du logement
02
HABITER la ville de demain,
03
social au Maroc :
Réalité ou utopie :
Quels enjeux pour le logement social ?
L’HABITAT SOCIAL : Nouvelle approche pour une
Habitabilité du logement social
Chapitre 1 : Situation du Logement social au Maroc : Réalité ou Utopie :
Chapitre 2 : Habiter la Ville de demain, quels enjeux pour le Logement Social ? INTRODUCTION
INTRODUCTION 1. Présentation générale du logement social au Maroc
9
Première partie : LOGEMENT ET HABITAT : De
2. Rétrospective du logement social au Maroc
9
la séparation de l’espace au « chez soi ».
3. La promotion nationale du logement social entant que programme social 3.1.
Présentation du programme des 200.000
13
logements 3.2. Présentation du logement à 140.000 DH
13
3.3. Présentation du logement à 250.000 DH
14
4. Analyse et regard critique à travers l’expérience du
14
16
situation actuelle de la pratique du logement social par
21
3. Présentation du logement
23
4. Présentation de l’Habitat
23
5. Concept de l’Habitabilité
24
Synthèse : L’habitabilité, une nécessité pour une
27
ville habitable. Habiter selon différentes
1. Approche Fonctionnelle : 1. 1. Vision de Walter Gropius
29
1. 2. Vision du Corbusier
30
2. Approche Humaine :
son usager 17
CONCLUSION
2. Présentation de l’Habiter
approches :
social 4.2. Le logement non réglementaire : Reflet de la
21
Deuxième partie :
logement social au Maroc : 4.1. Atouts et dysfonctionnements du logement
1. Présentation du Loger
2. 1. Vision de Heidegger
31
2. 2. Vision de Hassan Fathy
32
3. Approche Organique : 3.1. Vision de Frank Lloyd Wright. Synthèse : La conception du logement : entre confort,
32 33
technique, et expression de soi CONCLUSION
34
Chapitre 3 : L’habitat social : nouvelle approche pour une habitabilité du logement social : Faisabilités et outils d’intervention :
Première Partie : Vers un habitat intégré à son site et connecté à sa ville 1. Mobilité et Accessibilité : Outils de pratique de l’Habiter dans la
37
II. Repenser les Espaces intermédiaires de l’habitat social : pour une meilleure habitabilité des espaces partagés :
ville 2. Les équipements de proximité : Composantes intégrantes de
38
l’Habitat ;
53
2. De la Rue au logement : Réarticuler l’espace
3. Outils d’insertion de l’habitat dans son environnement :
intermédiaire ;
a. Topographie ;
39
b. Qualités environnementales et paysagères ;
39
c. Forme urbaine
41
Synthèse : L’habitant s’approprie la ville à travers un logement
1. La résidentialisation de l’habitat ;
2.1. Les espaces verts et les aires de jeux dans leur définition de l’habitat ; 2.2. La rue en étage, pour un habitat social au service
54
de l’urbanité ;
42
intégré à son Site et connecté à sa Ville.
54
2.3. Le Potager urbain : espace de pratique de
58
sociabilité ; Deuxième Partie : Penser l’Habitat social de l’extérieur vers
2.4. La terrasse jardin : Espace réinvesti pour un
l’intérieur : Un parcours résidentiel commun pour mieux vivre
habitat réintégré dans la vie urbaine ;
ensemble : I. De l’espace public à l’espace privé : une transition spatiale pour
Synthèse : De l’espace partagé à l’espace privé : Une sociabilité désirée
1. Définition de la transition spatiale
44
2. Définition de l’espace intermédiaire ou l’espace transitionnel
44
Troisième partie : Observer, ressentir, et vivre l’habitat
3. La transition spatiale à travers le rapport du Dedans et du Dehors
46
social :
3.1. De La rue à l’espace intermédiaire
47
Introduction
3.2. De l’espace intermédiaire à la cellule d’habitation :
49
I/ La perception dans l’habitat, ou l’habitat des sens :
a. La transition horizontale : à travers le couloir et la coursive b.La transition verticale standardisée génératrice du plan type :
49 51
c. La lumière naturelle, composante fondamentale pour la qualité des espaces communs de distribution
60
transition spatiale pour un habitat intégré et une
44
une bonne pratique de l’Habiter
comme outil de distribution
59
52
1. L’environnement sonore de l’habitat
63
2. L’environnement tactile de l’habitat
64
3. L’environnement visuel de l’habitat
65
4. L’environnement olfactif
65
II / Structuration de l’espace bâti : Concilier qualité et rationalité dans la conception de l’habitat social : 1. La typologie en logement : comme configuration spatiale, et réponse aux scénarios de mode de vie : 1.1. La constitution de la famille marocaine
67
1.2. Configuration du mode de vie de la famille marocaine à
69
faible revenu ; 1.3. L’appropriation du logement ;
72
1.4. La mixité typologique ;
74
2. Structuration de l’espace intérieure de la cellule d’habitation : 2.1. Les superficies, entre limites et qualité d’espace produit
75
2.2. Cloisonnement ou non cloisonnement des espaces
78
intérieures : Fluidité et de flexibilité intérieure, mais à quel degré ? 2.3. Répartition Jour / Nuit : A prendre comme base ou à
81
requestionner ? 2.4. La pièce en plus : Évolutivité et résilience 3. Le confort thermique et hygrothermique
83 84
CONCLUSION
85
CONCLUSION GENERALE
88
RECOMMANDATION CHOIX ET PRESENTATION DU SITE PRESENTATION GRAPHIQUE DU PROJET BIBLIOGRAPHIE
91
INTRODUCTION : Le logement a constitué l’une des principales préoccupations
Le logement et, plus particulièrement, le logement social, reste
de toute société humaine, depuis bien longtemps. Cet espace,
un sujet très sensible, qui de nos jours interpelle l’intérêt et la
en perpétuel changement, dû au mutations et aux événements
curiosité de tous les intervenants. Suite à l’ère industrielle, ce
de recomposition de la société et des espaces urbains, reste
dernier a connu un âge d’or à partir des années 1950. Construire
jusqu’à nos jours un sujet d’actualité et de débat, qui suscite
pour le grand nombre, était ainsi le but des concepteurs qui ont
beaucoup de questionnements et de réflexions, en vue de
contribué à pousser la réflexion du logement social après la
garantir son amélioration et son adaptation au mode de vie de
deuxième guerre mondiale.
ses habitants.
Migration rurale, urbanisation accélérée, la demande en terme de
Penser les espaces du logement, pour répondre au besoin de
logement, devint problématique, et dépassa rapidement l’offre
l’être humain, objectif premier de toute architecture, qui se
des villes en logements. Ce déficit en terme de logement
veut au service de l’habitant. Ainsi le poids de l’espace pensé
présente une situation critique au sein des villes du monde entier,
pour abriter et servir d’habitat pèse lourd sur les réflexions de
qui voient jour après jour, de l’habitat insalubre, non
plusieurs théoriciens, qui ont contribué à faire évoluer l’acte de
réglementaire pousser comme des champignons dans ses zones
l’Habiter pour reconsidérer l’Homme dans son environnement.
périphériques.
Suite à cela, la question de la qualité du logement social
Au Maroc, et suite à l’avènement du protectorat, la production
produit au Maroc, est aujourd’hui sur le devant de la scène
du logement a pris un nouveau tournant, et a connu une mutation
interrogeant l’habitabilité des espaces de vies généré par ce
qui a généré de nouvelles formes d’habitat. Suite à plusieurs
type d’habitat, et son rôle dans l’intégration de l’habitant dans
tentatives pour résorber le déficit en terme de logement et à lutter
sa ville, ainsi que dans son milieu social.
contre l’insalubrité, le logement social a connu pendant cette période plusieurs essais de composition urbaine et architecturale.
Aujourd’hui et malgré tous les efforts, le logement social produit au Maroc reste incapable de préserver nos villes des constructions non règlementaires qui poussent et demeurent une partie prenante de notre paysage urbain.
Indéniablement, l’expérience du logement social au Maroc, représente de nos jours une référence de qualité, reconnu mondialement par ses réalisations inédites, et réussies sur le plan théorique, qui une fois exécutées sur le territoire marocain, présentent des anomalies liées à leurs exploitations quotidiennes. Ainsi ce passage de la théorie vers la pratique, garde toujours en lui des dysfonctionnements qui semblent freiner la réussite cette transition, qui pose problème de nos jours.
PROBLÉMATIQUE: Le logement social au Maroc, a toujours suscité un intérêt
marocain, se résume à des opérations de logements collectifs
particulier et a fait l’objet de plusieurs réflexions et
généralement en R+4 ou en R+5, dotés de façades architecturales
interventions.
identiques, reflétant une monotonie flagrante du paysage urbain
Théoriquement, conçu pour lutter contre l’habitat insalubre
de la ville. Cette dernière représente aujourd’hui un champ
et non réglementaire, il garanti la dignité et participe à la
d’expérimentation où l’objectif de garantir un logement social
cohésion sociale des citoyens. Il revêt ainsi une grande
décent reste toujours non abouti, vu son approche quantitative
valeur sur le marché de l’immobilier et sur la politique
pour répondre au déficit du logement, sans porter d’intérêt à
d’aménagement de la ville et de son organisation spatiale.
l’habitant et à son vécu au sein de ce type d’espace produit.
Ainsi afin de garantir un logement décent pour tout citoyen,
Suite à cela, la question de l’habiter et du loger au sein du
et de lutter contre toute forme de précarité au sein du milieu
logement social au Maroc, constitue une réflexion primordiale,
urbain, la ville s’est dotée de nouveaux mécanismes de
pour décortiquer le sens même de l’habitabilité des espaces de
production de logements collectifs, pour une population
vie d’un logement, et de son approche dans la reconsidération de
jusqu’alors marginalisée et mise à l’écart.
l’homme dans son environnement.
Néanmoins, malgré plusieurs efforts fournis par le pouvoir
Cela nous amène à réfléchir sur la qualité du logement social
public et les secteurs privés, nos villes, se retrouve dans
produit et des émotions générées par ses espaces planifiés, qui au
l’incapacité de résister à la pression démographique, et de
premier lieu sont destinés à assurer le confort et l’intégration de
répondre au droit constitutionnel de ses habitants au
ses occupants.
logement. Avec l’inadéquation de la demande par rapport à
Ainsi la qualité des espaces de vie défini au sein du logement
l’offre en terme de logement, l’habitat informel ne cesse de
social produit au Maroc, peut-elle représenter un frein face à
surgir et de faire partie du paysage urbain de nos villes.
l’habitabilité de la ville de demain, et à l’intégration de l’habitant
En effet, le logement social produit, partout dans le territoire
et son appropriation du logement ?
Comment alors, à travers le logement social, réinventer un
habitants, et qui constitue une composante intégrante et
cadre de vie décent, adapté aux besoins de la ville et de ses
inclusive dans le paysage urbain de nos villes.
habitants ? Est-ce-que le programme du logement social au
Ces dernières, doivent faire face à plusieurs défis dont le
Maroc est tenu de répondre uniquement à la fonction d’être
principal se présente comme suit : faire preuve d’une ville
loger ? Est-ce-que l’offre de ce dernier n’est plus à la hauteur
inclusive, durable et résiliente, en réponse aux besoins de ses
des attentes d’une société en perpétuelle mutation ? Et
habitants. Et par inclusive, on sous-entend, une ville qui
finalement, est-ce-que la réglementation engendre le même
répond aux besoins de l’humanité dans sa diversité, et qui
type de conception architectural et freine la créativité des
remet l’homme dans son environnement, en favorisant la
architectes en terme de conception du logement social au
mixité sociale et l’intégration de ce dernier.
Maroc ? Au-delà du précité, au sein d’une société cadrée par de nombreux normes et
prescriptions générales de conception
et de réalisation du logement social, et au sein de laquelle une partie de la population occupe un logement non réglementaire, questionner l’adaptation du logement social produit aux besoins des citoyens semble prépondérant pour ce travail de recherche Partant sur le constat du logement non réglementaire, comme étant un révélateur de la non adaptation du logement social aux besoins quotidiens des habitants, l’objectif de ce mémoire constituera une analyse et un diagnostic de l’état actuel pour élaborer un essai de démarche d’approche, afin de concevoir un habitat social qui répond qualitativement et quantitativement aux besoins des
QUESTIONNEMENTS :
- Comment à travers le logement social , réinventer un cadre
Hypothèse :
de vie décent adapté aux besoins de la ville et de ses
- L’Habitabilité des espaces produits par le logement social,
habitants ?
peut-il nous offrir de meilleurs qualités de vie au sein d’un
- Est-ce-que le programme du logement social au Maroc, est tenu de répondre uniquement à la fonction d’être loger ?
- Est-ce-que l’offre du logement social au MAroc, n’est plus à la hauteur des attentes d’une société en perpétuel mutation ?
- Est-ce-que la réglementation engendre le même type de conception architecturale et freine la créativité ds architectes en termes de conception du logement social au Maroc?
- Comment pet-on créer des espaces de vie qui suscite des émotions de bonheur et de bien-être au sein du logement social collectif et partagé ?
habitat décent et désiré ? Ainsi rappelons qu’à travers une analyse et une relecture du logement social au Maroc, le but de cette recherche, constituera un essai pour établir une démarche plus qualitative lors de la conception des espaces du logement social, pour assurer l’habitabilité de ce dernier, au sein d’une ville inclusive, et permettre l’intégration de l’habitant dans son milieu social, pour mieux vivre et s’approprier son habitat.
MÉTHODE D’APPROCHE : en tant que qualité de vie et de condition humaine. La question de la qualité de logement social au Maroc, va être abordé selon un volet théorique et un volet pratique. Le plan de travail de ce mémoire de recherche se déclinera dans la partie théorique en trois grands chapitres afin d’approcher le logement social selon différentes types d’analyse : historique, significative, et expérimentale. D’un côté le premier chapitre, permettra à travers une brève rétrospective de l’Etat des lieux du logement social au Maroc, de bien cerner les différentes tentatives d’expérimentation, entreprises par l’Etat marocain, afin de répondre à la demande
Afin de concrétiser cette qualité, le troisième chapitre détaillera l’habitat social comme nouvelle approche décente du logement social, à travers un nombre d’éléments définissant l’habitabilité de ce dernier. Ainsi cette partie théorique s’achèvera par une analyse de la configuration spatiale interne de l’unité d’habitation, pour dresser certains concepts liés à l’habitabilité de cette dernière. A travers cette partie théorique, une approche descriptive et analytique des espaces au sein du logement social présent dans la ville, sera établie, pour ainsi synthétiser les raisons derrières
de la ville en terme de déficit de logement.
lesquelles ce dernier est toujours problématique. Un recours ainsi
Ainsi à travers un regard critique de cette expérience, se
à une comparaison et étude des logements sociaux dans le
dressera un bilan détaillant chacun des atouts et dysfonctionnements du logement social au Maroc.
monde sera intégré pour compléter ce travail. Concernant la partie pratique, cette dernière sera établie suivant
Dans la deuxième partie théorique, au sein du deuxième
une analyse paysagère, fonctionnelle, et morphologique, pour
chapitre, sera exposé une présentation d’un concept important
soulever les atouts et les inconvénients du site. Ces deux volets
pour la qualité des espaces de vie du logement social à savoir le concept d’habitabilité. Lors de l’établissement de ce
théorique et pratique, nous permettront de dressera une liste de recommandations pour le projet urbain afin de les traduire en
chapitre, différentes présentations étymologiques de certains
options d’aménagement suivant les synthèses des deux parties.
termes référents à l’acte d’habiter, seront ainsi exposés, pour
Ce mémoire constituera un essai de réinvention de l’habitat
ensuite analyser les différentes manières d’habiter un lieu d’habitation selon différentes visions. Questionner ainsi le manière d’habiter nous permettra de souligner l’acte d’Habiter
social, et une expérimentation de nouvelles principes pratiques, pour une meilleure vision de la ville future de demain : une ville durable, résiliente, inclusive et partagée.
STRUCTURE DE L’ÉTUDE :
Chapitre 1 : Situation du logement social au Maroc RĂŠalitĂŠ ou utopie :
Introduction :
STRUCTURE DU CHAPITRE
Généralement, le logement social au Maroc, est rapidement repéré par son implantation souvent dans les extrémités des
Présentation du logement social au Maroc
villes, sur des terrains vierges à l’entrée et à la sortie de la ville, et par son cadre bâti extérieur, dans la plupart des cas, sous forme de groupement de plusieurs immeubles aux façades
Rétrospective du logement social au Maroc
presque identiques, sans réel recherches esthétique apparente. Associé à la catégorie sociale la plus démunie, aux revenus les plus modestes, son apparition au Maroc date depuis les années
Période Post-coloniale
Période coloniale
du Protectorat. Cette première partie, représente un état des lieux de la situation du logement social au Maroc jusqu’à de nos jours, à
La promotion nationale du logement social entant que programme social
travers une présentation du logement social, et une brève rétrospective de ce dernier, ainsi qu’une présentation des différents programmes étatiques mis en place pour la promotion du logement social au Maroc.
Programme
Programme des
Programme des
200.000 logements
140.000 logements
250.000 logements
A partir de cette brève mise en scène de l’état des lieux du logement social au Maroc, cette première partie, s’achèvera avec une analyse et un regard critique de ce dernier, pour
Atouts et dysfonctionnements du logement social
conclure vers sa réussite ou non à intégrer l’habitant dans sa ville. Conclusion
1. Présentation du logement social au Maroc :
plusieurs quartiers insalubres se sont installés dans les
Deux critères essentiels qui définissent le logement social au
périphéries des villes marocaines. Occupés par une vague de
Maroc, d’un côté le critère de revenu, et de l’autre côté le critère
migrants ruraux, qui en quête de meilleur conditions de vie,
de prix et de superficie. En effet le logement social désigne tout
s’installèrent dans ce type de quartier, qui se développa à grande
logement destiné à une catégorie de personnes à faibles revenus,
vitesse, dans de mauvaises conditions, d’une manière spontanée
trouvant des difficultés pour se procurer un logement.
et chaotique. L’intervention du pouvoir étatique, afin de réaliser
Bénéficiant de l’intervention de l’Etat, notamment par des
du logement social, devint du jour au lendemain, une nécessité de
subventions totales ou partielles, il est accessible par un prix
première ordre, et un enjeu politique de taille. En effet, le
modéré pour des superficies allant de 50 m2 à 100 m21 . Il peut
logement social au Maroc s’est d’abord, dans une première
être construit soit par le secteur public ou privé, avec 60% de la
phase, inspiré par les conditions de logement de l’ouvrier
contribution du secteur privé2.
français menées dès la fin du XIXe siècle en France, pour ensuite
2. Rétrospective du logement social au Maroc depuis le protectorat : - La période coloniale :
dériver à partir de l’année 1950, du modèle de l’urbanisme fonctionnel, cadré par la charte d’Athènes. Prenant forme pour la première fois au Maroc sur les terrains vierges de la ville de Casablanca, le logement social a connu ses premières
Les réflexions sur le logement social au Maroc ont été à leur
expérimentations avec l’arrivée de Michel Ecochard3, qui
summum de gloire à partir des années 1950. En effet, l’habitat à
fortement inspiré par le mouvement moderne, et disciple du
connu plusieurs évolutions lors de la période coloniale, passant
Corbusier, met toute sa créativité au service des villes
par différentes phases, toutes œuvrant à répondre à la crise du
marocaines, afin d’éradiquer toute construction insalubre, et
logement et à la pression de l’urbanisation. Pendant cette période,
offrir aux habitants marocains un logement décent adapté à leurs
1
article 92-I-28 du Code général des Impôts)
3
Michel Ecochard : Architecte et Urbaniste français 9
besoins et leur mode de vie. Casablanca constituera ainsi tout au
En effet Ecochard met en place d’abord les grands axes de
long du Protectorat un véritable laboratoire d’expérimentation
développement des quartiers, donnant priorité aux circulations
architectural et urbanistique, où se concrétisera la théorie de
piétonnières et aux équipements spécifiques, comme la mosquée,
« l’habitat pour le grand nombre » d’Ecochard. Ce dernier s’est
l’école coranique et le hammam. Chaque quartier abritait 9.000
basé sur deux points essentiels pour sa conception urbanistique
habitants avec 5 unités de voisinage de 1.800 personnes. Ces
architectural.
quartiers comptent de nombreuses structures : infirmeries, terrains
Le premier point consistait à élaborer un plan pour l’organisation
de sport, garderies, écoles, salle de spectacles, marchés, etc.
des zones d’extension urbaines développant comme élément
Ensuite, il met en place cette fameuse « trame 8 x 8 mètres»
majeur l’unité de voisinage. Le deuxième point compte à lui,
appelée aussi «trame sanitaire», de forme carrée de 8 mètres de
était de baser l’étude du logement sur une trame d’habitation
côté, au caractère évolutif, pour développer l’urbanisme à
répartie sur une parcelle de 8 x 8 m= 64 m2.
l’horizontal, mais développé aussi à côté le Logement à la verticale, avec des réalisations qui prennent la forme d’immeubles en barre pour dégager des jardins au sol, et tendent vers la standardisation du logement en immeubles avec des coursives et des escaliers à l’air libre sur le modèle des appartements européens. Permettant de loger 350 personnes sur un hectare, la trame d’Ecochard assure une orientation solaire optimale à ses habitants (orientation sud et est), avec deux pièces donnant sur un patio, WC et cuisine. 200 logements par jour été construit, grâce à des méthodes industrielles qui n’existaient pas encore en Europe.
FIGURE 1 : TRAME D’ECOCHARD SOURCE : ECOCHARD M, CASABLANCA. LE ROMAN D'UNE VILLE 10
FIGURE 3 : IMAGE AÉRIENNE DE CARRIÈRE CENTRALE À CASABLANCA FIGURE 2 : CITÉ HORIZONTALE,1953. MICHEL ECOCHARD
SOURCE : ECOCHARD M, CASABLANCA, LE ROMAN D'UNE VILLE (3) 28/02/2010 BERTRAND TERLINDEN
11
- La période post-coloniale : Les deux grandes périodes de
la production du logement social au Maroc :
Deux grandes périodes ont marqué la production du logement
Au cours de cette période, ces deux modalités ont été les
social au Maroc à savoir : les années 1970 jusqu’à la fin de
principaux moteurs de production du logement de façon directe
1990 et l’année 2000 jusqu’à nos jours.
(offre de lots de terrains équipés) ou indirecte (restructuration et
Pendant la première période allant de l’année de 1970 jusqu’à
équipement des quartiers non réglementaires).
la fin de l’année 1990, la création d’un ministère de l’habitat et
Concernant la deuxième période, allant de l’année 2000 jusqu'à de
de l’urbanisme eu lieu et la production de l’habitat social fut
nos jours, elle voit l’intervention de promoteurs immobiliers
programmée selon deux modalités importantes d’intervention
(Privés, Publics), comme acteurs premiers de la production du
de l’Etat marocain qui s’engage à mettre en place une politique
logement social dans les villes. En effet, et vue d’un épuisement
du logement à partir de son assiette foncière
des réserves financières de l’Etat, ce dernier lègue la mission de
La première modalité consistait à réaliser des lotissements et
réalisation des logements sociaux aux promoteurs, en leur
de l’habitat mixtes, qui regroupent différentes couches sociales
facilitant l’accès à des terrains subventionnés et à travers l’octroi
de différents niveaux socioéconomiques, et cela à travers la
d’exonération fiscales. Par ailleurs l’Etat s’est chargé de la mise à
péréquation, en produisant des lots sociaux et des lots pour la
niveau urbaine, notamment à travers le programme villes sans
classe moyenne.
bidonvilles.
La deuxième modalité consistait à lutter contre l’habitat insalubre, à travers le lancement des opérations de restructuration et d’équipements des quartiers défavorisés ainsi que des bidonvilles. Cette opération existe jusqu’à aujourd’hui, notamment dans les centres urbains à proximité de la ville d’Agadir ( Siddi wassay, El Qliaa, Ait Melloul….) 12
3. La promotion nationale du logement social entant que programme social :
Par ailleurs cette liste de programme étatique sociaux n’est pas exhaustive, d’autres tentatives de lancement de projet dans le cadre social ont été entreprises, on s’attardera néanmoins pour
Introduction :
cette étude sur ces 3 diapositives cités ci-dessus.
Afin de résorber le déficit en logements et en équipements, et de lutter contre les bidonvilles, et l’habitat insalubre, ainsi que
3.1. Présentation du programme des 200.000 logements :
de faire face à la crise du logement, le gouvernement s’est doté
Le programme des 200.000 logements, est une promotion de
de nouveaux dispositifs renforçant la politique de la ville et du
logements décents, à un prix n’excédant pas les 200.000 Dirhams
logement. En effet après la loi de finances de 1999-2000, qui a
avec un minimum de 70m2, afin d’équilibrer prix et qualité.
pour la première fois évoqué le concept de logement social
Stratégie entreprise en 1995 par le ministère de l’habitat, en se
comme étant un logement subventionné, ces dispositifs ont
basant sur un travail en collaboration avec des bureaux d'étude et
succédés à cette loi, et ont constitué une étape importante pour
des concepteurs afin de proposer des logements décents avec le
le Maroc. En effet ils ont permis de propulser le secteur de
moindre coût respectant ainsi les normes de qualité minimale, en
l’habitat et de dynamiser l’économie du Pays.
baisant ainsi le coût global du projet de 6,5%.
Ainsi une première tentative avec la loi de Finance de 1995 a vu le jour, par le lancement du programme des 200.000
3.2. Présentation du logement social à 140.000 DH :
logements, ensuite depuis 2008 à 2012, le dispositif concernant
Le logement social à 140.000 DH est un dispositif de logement
la promotion du logement social à 140.000 DH TTC a été
social mis en place sur une période allant de 2008 à 2012. Destiné
lancé, pour être succéder par la suite en 2010 par un autre
prioritairement aux ménages résidant dans les bidonvilles, il fut
dispositif du logement social à 250.000 DH TTC , instauré à
créé suite à un réaménagement dans le sens de la réduction des
l’horizon 2020. Ces deux dispositifs, jusqu’à aujourd’hui,
exonérations fiscales.
mènent en grande partie la promotion publique de logement pour les populations à revenu faible ou irrégulier.
3.3. Présentation du logement social à 250.000 DH :
4.1. Atouts et dysfonctionnements du logement social :
Initié en 2010, avec comme objectif de créer 300.000 unités à
A travers cette brève rétrospective de l’expérience du logement
l’horizon de 2020, le programme de logement social à 250.000
social au Maroc, présentée au sein de la première partie de ce
DH hors TVA, visait à réduire le déficit en logement, et lutter
travail de mémoire, plusieurs atouts et dysfonctionnements
contre l’habitat insalubre. C’est en effet un logement dont la
peuvent se dresser afin de souligner la réussite ou l’échec de cette
superficie varie entre 50 et 100m2, destiné aux ménages non
politique d’habitat.
propriétaires d’un logement, à faible revenu, et exploitant le
En premier lieu, et indéniablement, le logement social au Maroc
logement à titre d’habitation principale pendant une période de 4
a participé à réduire le déficit en terme de logement et à lutter
années.
contre l’insalubrité. A travers le lancement du programme « Villes sans bidonvilles » depuis 2004, 760 071 habitants, ont
4. Analyse et regard critique à travers l’expérience du
bénéficié de ce programme, en accédant à des logements
logement social au Maroc
réglementaires, selon l’Enquête Nationale d’Evaluation d’Impacts des Programmes de Lutte contre l’Habitat Insalubre sur les Conditions de Vie des Ménages effectué par le Ministère de l’Habitat en 2013. Ainsi la politique du logement social au Maroc a permis d’améliorer les conditions de vie de 84,6% de ménages qui résidaient dans des bidonvilles et des logements sommaires. L’accès aux services de bases, à savoir le branchement au réseaux d’assainissement et d’électricité sont devenus possible pour une large population jusqu’à alors marginalisée. Par ailleurs, malgré la diminution du déficit en
FIGURE 4 : CARICATURE
SOURCE : HTTPS://AURELIEBSG.FILES.WORDPRESS.COM/ 2014/12/IMMEUBLES1.JPG
terme de logement par l’intermédiaire des opérations de logement social au Maroc, et leurs contributions à résorber l’insalubrité 14
dans les villes marocaines, les anomalies et les
Au-delà du précité, le ratio de l’espace vert, espace indispensable
dysfonctionnements du logement social ne manquent pas au
pour la santé psychique et morale de l’habitant, est loin de la
rendez-vous.
moyenne par habitant. Malgré les recommandations minimales
Tout d’abord, leur localisation au sein de la ville pose un énorme
du cahier de charge du logement social à savoir, l’obligation de
problème face à l’intégration des habitants. En effet la plupart
planter un nombre d’arbres correspondant au nombre de
des opérations destinées aux personnes à faibles revenus, sont
logements réalisés d’une hauteur de 3 mètres, ces dernières ne se
installés dans les périphéries des villes, à l’entrée ou à la sortie de
voient pas respecter mais plutôt négligés ou mal appliquées. Bien
cette dernière, constituant ainsi un frein face à l’accessibilité et la
plus encore, ce cahier de charge, qui définit la réglementation
mobilité de ces tissus marginalisés.
relative à la conception et à la réalisation du logement social au
Concernant la qualité des espaces de vie produite au sein du
Maroc, est parmi les causes premières à l’échec de l’intégration
logement social au Maroc, cette dernière ne prend en aucun cas,
de l’habitant et de son appropriation du logement.
les aspects d’habitabilité d’un espace voué à être habiter et à
Ainsi il ne définit en aucun moment la perception sensible que
assurer le confort et le bien-être de son utilisateur.
peut générer l’espace intérieur habité, ni les orientations
En effet, et à cause de l’absence de mixité programmatique, le
favorables à une meilleure exposition de lumière naturelle, et se
logement social produit tâche uniquement à répondre à une seule
limite à cette unique réglementation à savoir : « chaque pièce
fonction qu’est le loger. Sans équipements à proximité, ni
d’habitation ou cuisine doit être éclairée par une ou plusieurs
espaces extérieurs communs bien aménagés, toute vie urbaine et
fenêtres dont l’ensemble devra présenter une surface au moins
communautaire s’efface face à un logement favorisant
égale au 10e de la superficie de la pièce » 4.
l’exclusion sociale et le développement de la criminalité, au sein
La relation ainsi de l’espace habité à son extérieur se résume à
d’une population où le plaisir de vivre et d’occuper un espace
des fenêtres sans principale orientation vers un espace de qualité
reste malheureusement absent.
qui devrai générer un plaisir à occuper l’espace habité.
4
CAHIER DES CHARGES DES PRESCRIPTIONS MINIMALES URBANISTIQUES, ARCHITECTURALES ET TECHNIQUES RELATIVES AU LOGEMENT SOCIAL 15
Parlant de l’espace habité, ce dernier au sein du logement social
seule raison derrière ce recours fréquent à une forme de
produit au Maroc, reste défini dans des superficies strictes,
construction anarchique et insalubre. En effet, plusieurs familles,
minimales, qui ne répondent pas aux modes de vie des occupants
rejettent les appartements dessinés et conçus dans le logement
de cet espace. Ainsi par leur rigidité, et leur manque
social, revendiquant ainsi un espace plus flexible et adapté à leur
d’adaptabilité à une société en perpétuelle mutation, leur
manière de vivre.
occupants ont tendance à les exploités d’une manière non
En effet le tissu d’habitat insalubre, est souvent reconnu par sa
réglementaires, pour répondre à leurs besoins, défini
capacité à développer une vie sociale assez riche, qu’on ne
principalement par l’envie d’une chambre de plus ou d’espace de
retrouve pas forcement dans les immeubles de logement social
rangement.
R+4 développé à la verticale. Ainsi le manque d’espace partagé commun favorisant les
4.2. Le logement non réglementaire : Reflet de la situation
relations de voisinage, et de la vie urbaine sociale, affecte
actuelle de la pratique du logement social par son usager:
directement l’intégration des habitants dans leur ville, et leur participation à la vie communautaire.
Malgré les efforts fournies pour éradiquer toute construction
Ce type de logement non réglementaire, se traduit aussi par le
insalubre, grâce au programme VSB (Villes sans bidonvilles),
recours à une modification de la façade des logements sociaux,
lancé il y’a environ 15 ans, le logement non réglementaire fait
comme c’était le cas pour le fameux Nid d’abeille, vu l’absence
toujours face dans les milieux urbains et ruraux du territoire
de résilience de l’espace intérieur de la cellule d’habitation face
marocain.
aux changements des modes de vie.
En effet et en dépit des nombreuses opérations de construction de logements réglementaires, par l’Etat comme par les promoteurs privés, la demande en logement reste toujours insatisfaite, et le recours à un logement auto-construit, s’avère l’ultime solution pour un habitant sans abri. Par ailleurs, cela ne représente pas la 16
C O
Le logement social au Maroc en échec, comme facteur d’intégration et de cohésion sociale des habitants au sein de leur ville :
N
Lutter contre l’insalubrité dans les villes marocaines, et procurer un habitat décent pour les populations les plus démunies, tel était les objectifs principaux derrière la politique de l’habitat social, établie au Maroc, depuis le
C L
protectorat jusqu’à aujourd’hui. A travers nombreuses tentatives, l’Etat à pu répondre en partie à la demande croissante en terme de logement, et à procurer un nombre d’habitat réglementaire à nombreuses familles pauvres. Certes face à une réponse quantitative à cette problématique du logement insalubre, et à l’établissement d’un
U
programme de logement en dépit des besoins de ses utilisateurs, et de leur mode de vie, ce type d’habitat à rapidement connu un échec, dans sa contribution à la cohésion sociale, et à l’intégration de l’habitant dans son
S
milieu social. Ainsi cet échec, renvoie à une politique au sein de laquelle plusieurs failles persistes jusqu’à de nos jours, dont les plus importantes, résident dans le manque de dispositif traitant l’habitabilité des espaces de vie dans
I O
le logement social, ainsi que la qualité d’habiter et de pratique décente d’un espace intégrant un ensemble d’équipements, incitant à développer des liens sociaux et a participé à une vie communautaire riche et agréable.
N
17
LOGEMENT SOCIAL AU MAROC
1950
ECOCHARD
RÉPONSE AUX MODES
LOGEMENT DÉCENT
RÉPONSE AU DÉFICIT
DE VIE
1995
LOGEMENT HORIZONTAL
ETAT
SECTEUR
Programme 200.000 logements
PRIVÉ
2008
2012
Programme des 140.000 logements
2010
Programme des 250.000 logements RÉPONSE AUX MODES DE VIE
RÉPONSE AU DÉFICIT
LOGEMENT DÉCENT
LOGEMENT SOCIAL AU MAROC EN PÉRIL ET NE RÉPOND PAS AUX BESOINS DE SES USAGERS 18
Chapitre 2 : HABITER la ville de demain, quels enjeux pour le LOGEMENT SOCIAL ?
STRUCTURE DU CHAPITRE
LOGEMENT ET HABITAT : De la séparation de l’espace au « chez soi ».
1. Présentation du Loger
3. Présentation du Logement
2. Présentation de l’Habiter
4. Présentation de l’Habitat
CONCEPT D’HABITABILITÉ
Approche Fonctionnelle HABITER selon différentes approches :
Approche Humaine Approche Organique
Conclusion 20
Introduction Habiter, se loger, s’abriter, tous des mots qui renvoient
Première partie : LOGEMENT ET HABITAT : De la séparation de l’espace au « chez soi ».
à une certaine façon d’être dans un espace. Cet espace que ce soit le logement, l’habitat, la demeure, ou tout simplement le lieu d’habitation définit un lieu où
1. Présentation du Loger
l’homme passe une bonne partie de sa vie, et où il
Le loger désigne tout simplement la demeure, où l’espace du
déploie ses activités quotidiennes. Ainsi habiter la ville
logement. Se loger se présente ainsi comme introduire ou placer
de demain, repose-il sur le fait d’occuper un logement
un être humain dans un cadre physique bâti en lui procurant un
ou un habitat ? Quelle différence entre L’habiter et le
abri et un lieu protégé des intempéries extérieures.
Loger ? Logement social ou habitat social, par quel moyen peut-on assurer l’habitabilité de l’être humain ? Dans une première section de cette deuxième partie, on
2. Présentation de l’Habiter
interroge l’Habiter dans tous ses dimensions, pour ainsi
Depuis l’aube des temps, habiter un espace représentait une des
établie une différence entre le logement social et
préoccupations majeures de l’être humain. Cette préoccupation
l’habitat social, afin de déceler l’un des concepts
générait à travers l’histoire de l’humanité plusieurs possibilités
primordiaux pour la ville de demain qu’est
pour se loger et se procurer un abri tout en s’intégrant dans son
l’Habitabilité.
environnement. De la caverne des nomades, jusqu’à l’immeuble
Dans une seconde section, L’habiter est exposé selon
du XX eme siècle, l’habitat n’a cessé de se réinventer pour
différentes approches de théoriciens qui se sont
répondre au besoin de l’homme sous différentes conditions.
intéressé à l’espace habité comme étant un lieu de
L’être humain a toujours eu besoin de s’abriter, de se protéger et
qualité de vie primordial pour la condition humaine.
de s’approprier des espaces. Mais que signifie réellement Habiter ? 21
Est-ce qu’Habiter se limite au besoin de se loger ?
Habiter ne se limite pas à la seule fonction de se loger, au
Comment est-ce-que l’Homme peut s’approprier un
contraire, il est considéré comme étant une expression de l’être
espace ?
(Heidegger, 1958), où l’activité corporelle n’en représente
Etymologiquement, le mot « chez », se dérive du latin
qu’une partie. Habiter rend le lieu architectural un espace que
Casa (Maison).
Il peut en effet désigner différents
son utilisateur prend plaisir à voir et à regarder en même temps
espaces, allant de la personne à la maison, au quartier,
qu’il prend plaisir à exercer son activité, il constitue alors une
à la ville, au pays, ect…
pratique poétique capable de faire surgir une jouissance de vivre.
Le « Chez Soi » définit le rapport qu’entretient
Ainsi Habiter contrairement à Se loger, est une qualité de vie ?
l’Homme avec les différents espaces de vie qu’il fréquente. Il caractérise aussi le lien intime entre l’habitat et la forme de l’intégration de l’habitant au sein d’un groupe social. En effet, Habiter est une expérience par laquelle passe l’habitant pour s’approprier et se définir dans un espace architectural. Il peut être défini comme un « vivre avec l’espace » (Pinson et Thomas, 2002), c’est-à-dire une relation active qui comprend expériences, pratiques, et significations, par laquelle nous assurons les conditions de notre existence matérielle et idéale.
Mais comment alors un espace peut-il devenir désirable et susciter une envie de vivre et d’être, tout en se l’appropriant à travers nos activités quotidiennes ? Comment peut-on définir l’habitabilité d’un espace architectural ? D’où l’intérêt de décortiquer les définitions de chacun du logement et de l’habitat afin de déceler une définition de l’habitabilité au sein d’un espace de vie.
22
3. Présentation du logement
société à travers sa configuration spatiale intérieure. Il est
Selon l’INSEE 5, un logement est « un local fermé par
susceptible d’être soumis à de nombreuses normes et formes de
des murs et cloisons, sans communication avec un autre
régulations administratives. Il représente le cadre bâti, et se
local, si ce n’est pas les parties communes de l’immeuble
résume à un espace qui permet une partie de l’habiter, au sens
(couloir, escalier, vestibule…), ainsi qu’indépendant, à
restreint du terme à savoir se loger. Le logement social est en
savoir ayant une entrée d’où l’on a directement accès sur
effet un produit et un cadre bâti, d’une politique qui vise à
l’extérieur ou les parties communes de l’immeuble, sans
résorber l’habitat insalubre.
devoir traverser un autre local. » 6
4. Présentation de l’habitat
Le Logement représente ainsi un lieu d’habitation, où une ou plusieurs personnes peuvent s’abriter, et exercer leurs activités
« L'habitat, pourrait-on dire, est au logement ce que le
et besoins fondamentaux quotidiens (se détendre, manger,
territoire est à l'espace : l'habitat, c’est le logement qui
dormir) . Selon Robert Leroux7, le logement doit répondre à 3
aurait été prolongé et enrichi »9
fonctions : « La protection de l’individu contre les intempéries,
L’habitat est un concept très ancien, qui évolue avec
protection contre des agressions et offrir une certaine intimité
l’évolution de l’homme et de sa pensée. En effet l’habitat,
contre les indiscrets. »8
En effet le logement peut être
désigne l’ensemble des conditions d’environnement du
considérer comme une unité fonctionnelle et une séparation
logement : accessibilité, espaces publics, commerces et
normative de l’espace, qui reflète les normes culturelles de la
services, etc. A travers l’Habitat, l’être humain affirme une
.
5
INSEE : Institut nationale de la statistique et des études économiques
6
LOGEMENT / https://www.insee.fr/fr/metadonnees/definition/c1702
7
Robert LEROUX, sociologue
8
LEROUX, 1983, P.25
Trouillard Emmanuel, M2 Carthagéo. Rendu dans le cadre du cours de M. Christian Grataloup. Logement et habitat(ion) : De l'espace géométrique au « home, sweet home ». 9
23
position sociale, et un statut au sein de la société. Chargé de
environnement, en reconsidérant sa relation sensorielle et
caractéristiques symboliques et identitaires, il définit le lien
perceptible avec ce dernier.
intime de l’homme avec l’espace où il réside, en définissant
5. Concept de l’habitabilité :
ainsi les interactions socio-économiques que l’Homme entretient dans un milieu social (son quartier, sa ville …). Le terme Habitat contrairement au logement peut être dénué de toute caractéristique matérielle. En effet le terme « j’habite ici », pourrait signifie j’habite ce quartier, ou j’habite cette ville, ce Pays… Habitat renvoie ainsi à un lieu d’appartenance qui dépasse les murs fermés et les espaces intérieurs d’un logement, pour englober l’environnement immédiat de l’Homme. Le terme Habitat prend alors une signification plus large d’appartenance et d’appropriation d’un espace. L’Habitat reflète aussi les liens qu’entretiennent les habitants d’un même logement entre eux. Chaque habitant s’approprie un espace d’un logement selon ses besoins, et cette appropriation renvoie à la culture, la société, les mœurs voire l’identité de l’usager. L’habitat permet ainsi à l’homme de refléter sa manière de vivre l’espace et faire avec l’espace, à travers des émotions et une joie de vivre dans un environnement, où le cadre immatériel du logement
FIGURE 5 : SCHÉMA RÉSUMANT L’HABITAT
est présent. Ainsi l’Habitat vise à placer l’habitant dans son
24
S’approprier et désirer un espace, ressentir une appartenance et
l’habitabilité représente le vécu d’un habitant dans un espace en
s’exprimer à travers un espace, tel sont les notions par
rapport avec son environnement extérieur. Elle reconsidère la
lesquelles l’habitabilité s’affirme. En effet le logement, espace
partie immatérielle du logement, pour dépasser ainsi son cadre
de vie par excellence, peut représenter un habitat décent, là où
bâti et l’intégrer dans son espace environnant.
l’habitabilité de ses espaces est assurée. Ainsi, l’habitabilité se définit par « la capacité à éprouver des situations et des
La technique comme facteur essentiel de l’Habitabilité :
émotions, à entrer en résonance et répondre en apportant le
« Ecologie humaine, science de l’habitat », de l’auteur Robert
confort approprié » 10.
Leroux, est l’un des ouvrages traitant l’habitabilité dans les
Tout espace doit être pensé en répondant au besoin de l’homme et en intégrant ce dernier dans son environnement, pour être ainsi un espace vivant, malléable selon chaque individu. Ainsi le logement décent et désiré est un habitat propre à chaque usager, représentant son identité, et permettant à ce dernier de
années 1960, époque qui connait l’apparition d’une nouvelle crise du logement. En effet l’auteur s’appuie sur des recherches du docteur Daniel Biancani, qui divise la vie humaine en deux périodes : l’anabolisme et le catabolisme. Cette étude amène à classer les critères de l’espace habitable selon l’usage des pièces, la nuit (régénération du corps), et le jour.
s’adapter et de s’intégrer dans un milieu social.
En effet étudier le fonctionnement du corps humain, détermine
L’habitabilité définit ainsi la capacité d’un logement à
le rôle fondamental de la technique pour assurer l’habitabilité
produire un espace flexible, modulable selon le besoin de
d’un espace. Cela dit la technique normalise les relations entre
chaque individu, qui suscite des émotions propres à son
individu et espace à habiter. Pour qu’un espace soit habitable il
habitant, en relation direct ou indirect avec son
doit répondre à des normes qui assure l’hygiène à travers sa
environnement, interpellant ainsi les différents sens de
ventilation et son raccordement aux réseaux d’eau, et
l’Homme lors de sa pratique de l’espace.
d’électricité … Ces normes techniques facilitent l’utilisation de
10
(Rifkin, 2011), Géo-Regards REVUE NEUCHÂTELOISE DE GÉOGRAPHIE L’habitabilité inattendue N° 9, 2016 25
l’espace et œuvre à répondre à des besoins primordiaux de l’homme. Par ailleurs la technique à elle seule ne peut définir complètement l’habitabilité d’un espace. Le logement ne peut
Casellati (1997) le résume de manière expressive : «le terme
représenter un habitat pour son usager que s’il met en équilibre
habitabilité signifie que nous vivons la ville comme des
la notion de la technique et de la malléabilité de l’espace et son
personnes réelles »; c’est à dire des personnes ayant une identité
rôle dans l’expression de soi et de son intégration de l’habitant
et une singularité.
dans son environnement. Sans cette dimension de flexibilité, et d’appropriation de l’espace, l’homme ne peut ressentir l’envie de vivre dans un logement. L’habitabilité comme expression de soi : S’opposant à la pensée fonctionnaliste, l’habitabilité est une
Rejoignant l’action de l’Habiter, L’habitabilité caractérise ainsi le degré et la forme d’inclusion et d’intégration qu’entretient les individus pour vivre et entretenir une relation avec leurs lieux de vie.
expression de soi, dans un espace qui reflète la singularité de l’identité et la personnalité de son usager ainsi que l’authenticité de ses pratiques. Elle ne se caractérise pas la notion de vivabilité, et œuvre à faire dialoguer l’habitant à travers ses émotions, et ses rapports sensibles au lieu de son habitation, qui assure des qualités de confort et d’esthétique. Ainsi cette notion, ne se limite pas à la seule fonction de l’espace entant que forme et norme dans sa production du lieu d’habitation et de vie, mais le dépasse pour analyser la manière dont l’espace lui-même est habité dans son expression spatial singulière. 26
S
L’habitabilité, une nécessité pour une ville habitable :
Y
Le logement représente une partie de ce qui fait la ville. Cette dernière, englobe tout un ensemble d’éléments, dont le logement, pour constituer un espace de vie où l’interaction entre ses utilisateurs et leur environnement est
N
primordiale, et où l’intégration et la cohésion sociale est présente, pour assurer la vivabilité de ce qu’on peut considérer comme ville inclusive et habitable.
T En effet, la ville habitable est tout d’accord une ville qui positionne l’habitabilité en premier degré d’importance H
au sein de sa planification et son organisation spatiale. En replaçant l’homme dans son environnement immédiat, et en dépassant la fonction du loger, pour constituer un habitat, où « un chez soi », le logement vient s’intégrer à
È S
une longue chaine, dont il représente qu’un seul maillon parmi tant d’autres, à savoir l’environnement, l’espace non bâti , l’espace partagé, l’équipement de proximité etc…Tous ses éléments sont ainsi indispensable pour l’équilibre de cette longue chaine, qui assure l’habitabilité de la ville inclusive et durable.
E
27
FIGURE 6 : SCHÉMA RÉSUMANT LE CONCEPT D’HABITABILITÉ 28
Deuxième partie : HABITER selon différentes approches : 1. Approche Fonctionnelle et rationnelle : 1. 1. Vision de : Walter Gropius : Cités et logement social
Reposant sur le rationalisme du mouvement moderne, ces
de Berlin
adeptes du Bauhaus incitent sur une conception de l’espace
Fondateur du Bauhaus, Walter Gropius prime l’art au service
dominé par la relation entre l’intérieur et l’extérieur en intégrant
de la fonctionnalité dans sa pensée.
la paroi de verre en façade.
S’inscrivant dans une nouvelle ère qui appelle à
A travers la conception des six cités du logement social, l’habitat
l’industrialisation et à la mécanisation pour construire plus
ainsi que les conditions de vie des personnes à faibles revenus se
haut et rapidement, walter Gropius ainsi que plusieurs adeptes
sont améliorer grâce à des approches novatrices en matière
du mouvement moderne, ont contribué à faire évoluer la
d’urbanisme, d’architecture et de conception des jardins.
qualité du logement social, à travers la construction des 6
L’espace semi-public, occupe en effet une grande place dans la
cités de logements sociaux à Berlin.
réflexion sur le logement social au sein du mouvement moderne. A travers leurs principes, ils se fixèrent comme but de créer des logements qui soient accessibles aux personnes de toute catégorie sociale, dotés de cuisines, de salles de bains, de grands balcons et loggias exposés au soleil. Ils souhaitaient ainsi inventer une architecture moderne reflétant la structure du plan au sol, et insérant le logement dans les espaces verts fonctionnels environnants.
Figure 11 : immeubles d’habitation pour le quartier Hansa de Berlin (1955-1957) Photo: Theo Heimann/dapd 29
Ainsi Améliorer les conditions de santé et de vie familiale, tel
aussi au sein des unités d’habitation, le Corbusier développe la
était l’objectif derrière la réinvention de nouveaux typologies
vie collective en étage, dans des unités de logements
de logements, et de modes de vie, s’intéressant principalement
standardisés, en série, pour le grand nombre. Il mène sa réflexion
à associer le concept urbain à celui d’architecture et du
sur l’usage rationnel d’espace de vie, en minimalisant les
paysage, intégrant l’habitant dans une structure globale de
dimensions des espaces de vie et le mobilier introduit.
ville, ainsi que dans son environnement le plus proche grâce
Au-delà du précité, dans sa réflexion menée sur les cinq points
aux cités jardin, un des concepts far, d’une nouvelle vision de
de l’architecture moderne, le Corbusier introduit la façade libre
logements ouverts, de cette époque.
dans ses principes de conception, favorisant des espaces de vie bien éclairés. Ainsi la lumière représente une composante
1.2 Vision du Corbusier :
fondamentale dans sa réflexion sur l’espace intérieur du
Par sa fameuse expression : « Une maison est une machine à
logement.
habiter » , le Corbusier, adepte du mouvement moderne, propose une nouvelle façon de penser l’habitat, qui repose principalement sur l’industrialisation et la rationalisation des espaces de vie au sein d’une unité d’habitation. A travers sa conception du Modulor, le Corbusier affirme des standards communs, similaires et identiques de l’Habiter, affirmant un même idéal type de conception conforme au besoin de l’homme. Suite à cette conception techniciste et purement fonctionnelle, il essaye de préserver l’intimité de l’habitant par rapport à son voisin, dans un système de vie à la vertical, incluant équipements nécessaires pour la vie social en commun. Par souci d’optimisation de l’espace au sol, mais
FIGURE 8 : CROQUIS DE PRINCIPE DE LE CORBUSIER POUR SON ‘UNITÉ D’HABITATION’ SOURCE : UNITE D’HABITATION, LA VIE D’UN CONCEPT NICOLAS CHATELAN & ANDREW DRAGESCO 30
2. Approche Humaine :
l’Homme de s’identifier, et d’être entant que soit même, au sein d’un espace approprié et ressenti à travers les sens de chacun.
2. 1. Vision de Heidegger : « L’homme habite en poète »11, est une phrase rendu célèbre
2. 2. Vision de Hassan Fathy :
par Heidegger, reprise au sein de l’un des poèmes de Holderin,
Construire avec le peuple et pour le peuple, tel était la principale
poète et philosophe de la période classico-romantique. Pour
préoccupation de Hassan Fathy, précurseur, et visionnaire de
Martin Heidegger, philosophe allemand, l’acte d’Habiter
l’architecture vernaculaire, au service de l’être humain. Ce
représente une expression de l’être. Habiter doit relever d’un
dernier développa toute une philosophie de l’Habiter basée sur la
bonheur à déployer ses activités quotidiennes dans le
réutilisation de techniques ancestrales de construction afin de
logement, mais aussi de se l’approprier, d’une manière
dessiner un nouveau langage vernaculaire, qui replace l’homme
sensorielle, qui interpelle les sens de l’homme afin de ressentir
dans son environnement et au cœur même du processus de
une jouissance de vivre et d’être dans son propre habitat.
conception.
Rejetant le principe Corbuséen de « la machine à habiter », la
Hassan Fathy, affirme rigoureusement la valeur de l’identité de
vision humaine de l’acte de l’Habiter ne considère pas ce
chaque pays ou espace urbain, et son caractère unique, pour
dernier en tant que fonction mais plutôt en tant que condition
assurer un habitat unique et propre à chaque espace, tout en se
de vie primordiale pour l’affirmation de l’être dans son milieu.
restant en contact avec le contexte général et idéologique de
Ainsi habiter devient « un trait fondamental de la condition
l’époque en cours. C’est pour cela qu’il proposa pour la
humaine ».
construction du village de Gourna 12, la réutilisation de méthodes
Pour cela Heidegger considère l’espace habité, comme étant
anciennes de construction, en recherchant des procédés de
l’espace vécu de l’être humain, qui dépasse les quatre murs en
construction innovants, garantissant l’authenticité de
béton d’un logement, pour englober tout lieu permettant à
l’architecture local et des valeurs culturelles du village.
11
« L’homme habite en poète », vers repris par Heiddeger d’un poème de Hölderlin
12
Village de Gourna : Village situé sur la nécropole des nobles du Nouvel Empire, sur la rive ouest de Louqsor, realisé par Hassan Fathy, sous sa philosophie : Construire avec le peuple. 31
Ainsi habiter pour Hassan Fathy, prend tout d’abord une dimension humaine, en intégrant l’habitant dans son environnement, à travers son engagement dans le processus de conception, et peut être considérer aussi comme une contextualisation des méthodes d’habitat, dans une approche respectueuse de son environnement, qui s’adapte au climat du milieu urbain, en assurant avec le moindre coût, un confort thermique approprié à l’habitant. Habiter passe d’abord par la compréhension des modes de vie des habitants, et par la réinterprétation de ces derniers dans un habitat soucieux de son environnement, proche à la culture locale de la région, et adapté aux contraintes climatique de cette dernière, et aux matériaux locaux présents sur site, faisant d’eux
Figure 9: New Gourna Housing
un atout pour une bonne gestion ergonomique et thermique de
image: Dimitri Papadimou - © all rights reserved
l’espace. 3. Approche Organique : Vision de Frank Lloyd Wright : Frank Lloyd Wright mène durant toute sa carrière une pensée dirigée vers l’architecture organique, qui parmi ses principes, faire dialoguer l’espace bâti avec l’environnement et la nature, en suscitant des émotions et des sensations chez ceux qui habitent cet espace. En effet, l’espace habité dans le logement pour Wright, dépasse l’intérieur du lieu d’habitation, pour se prolonger 32
vers l’extérieur et ramener la nature au sein même de l’espace interne. Cette relation du dedans et dehors, vient se concrétiser par une intégration au site et à l’environnement, en adaptant l’allures des constructions à l’ambiance écologiques durable existante. Faire avec la nature et ses composantes, pour replacer
La conception du logement : entre confort, technique, et
l’homme dans son milieu naturel, est ainsi primordial dans la
expression de soi :
pensée de Franck Loyd Wright.
Suite à cette analyse de visions d’Habiter selon les
L’homme doit maintenir une relation dynamique avec son
différentes approches fonctionnelles, humaines, et
environnement, et entretenir des liens écologiques avec ce
organiques, on constate qu’Habiter reste un mélange de ces
dernier.
trois façons de voir l’espace habité. En effet ces approches
Habiter pour Wright, ne peut être dissocier de coexister avec la
complètent l’une l’autre, mais ne peuvent se limiter à elles
nature et l’environnement autour.
seules pour définir le vrai sens de l’Acte de l’Habiter. Cela
L’espace bâti n’est pour ce dernier qu’une manière d’actualiser
dit, Habiter doit répondre à des normes techniques
l’expérience sensible de la beauté.
fonctionnelles, mais ne peut se résumer qu’à la question de
Ainsi à travers le lieu d’habitation, Wright essaye d’accentuer la
la technicité de l’espace, il doit en effet exprimer des
dilatation de l'espace vers l’extérieur, tout en utilisant des
émotions, et des sensations permettant à l’habitant de se
matériaux locaux, pour s’immerger dans le lieu d’implantation,
reconnaitre dans son milieu et de s’intégrer au sein de sa
sans pour autant déranger sa sérénité et son calme naturel.
ville.
S Y N T H É S E
Opacité et de transparence, Lumière naturelle et artificielle, Espace extérieur et intérieur, et intégration paysagère forme les composantes indispensables de l’habitat décent selon Wright, pour une approche organique, et éco-responsable.
33
Suite au développement de cette partie, qui détaille l’acte de l’Habiter selon différentes approches, tout en soulignant la différence entre le logement et l’habitat, on ne peut nier la complexité et la richesse de l’Habiter entant que qualité vitale de l’être et de l’appropriation de l’espace. Entre confort technique basé sur les normes moderne d’hygiène et confort sensorielle C O N
basé sur la relation de l’habitat avec l’environnement immatérielle, interpellant les sens de l’homme et suscitant des émotions de jouissance de vivre, l’habitat social doit être en perpétuel équilibre et à pied d’égale entre le cadre physique matériel et immatériel du logement, pour répondre aux besoins de l’homme et pour l’intégrer dans son milieu social. Ainsi l’habitabilité des espaces de vie conçu au sein de l’habitat, repose sur sa capacité à intégrer l’habitant dans sa ville, tout en s’appropriant son espace de vie intime d’une manière non seulement spatiale, mais aussi poétique et sensible à son
C
environnement immédiat. L’habitat social repensé en relation avec son espace extérieur, intégrant l’homme dans son environnement, constitue l’un des
L
composant vital de la ville inclusive et durable. Ainsi pratiquer la ville durable, c’est être en constante relation avec ses espaces privés, mais aussi public, en étudiant les liens que produisent cette interaction entre la cadre physique bâti (le
U S I
logement) et le cadre non bâti (l’environnement), pour ainsi assurer l’habitabilité de l’être humain. En effet le logement représente une maille dans une chaine composée de plusieurs entités, assemblé tous pour constituer un HABITAT. Ainsi ce dernier se veut fragilisé lors du manque d’un de ses composants. Le logement, principal composant de ce dernier, ne peut à lui seul constituer un habitat décent à ses utilisateurs. Néanmoins, son interaction avec les autres composants de l’Habitat permet, de renforcer l’habitabilité de ses espaces de vie et d’améliorer le cadre de vie de ses
O
usagers. Ainsi le passage du logement, comme micro forme d’un ensemble, à l’Habitat, comme entité macro forme, est indispensable
N
pour mener une vie seine dans un milieu social inclusif. Partant de cette conclusion, nous allons développer dans la partie qui suit cette transition du logement à l’Habitat, en focalisant sur l’Habitat comme nouvelle approche une habitabilité du logement social, à travers l’analyse de trois principes fondamentaux pour un Habitat social décent, inclusif, résilient et durable 34
Chapitre 3 : L’HABITAT SOCIAL : nouvelle approche pour une habitabilité du logement social : Faisabilité et outils d’intervention
PREMIÈRE PARTIE : VERS UN HABITAT INTÉGRÉ À SON SITE ET CONNECTÉ À SA VILLE:
1.
Mobilité et Accessibilité : Outils de la pratique de
l’Habiter dans la ville :
Face aux mutations du monde d’aujourd’hui, vers une pratique
de déplacement au sein d’un tissu d’habitat, réside dans la
intelligente de l’espace, optimisant le rapport temps-distance, à
proximité de ce dernier au moyen de transport et de
travers des moyens de déplacements de plus en plus développés,
circulation. Cela dit l’éloignement des zones d’habitat, par
la mobilité, ne cesse de se prononcer, et de s’imposer comme
rapport aux espaces d’arrêt des moyens de transport, constitue
condition de qualité de vie dans sa relation forte à l’Habiter. En
un handicap à l’Habiter, et rend l’accessibilité à la ville une
effet, elle est devenue l’un des éléments qui définissent le mode
tâche lourde et difficile pour les habitants.
de vie des habitants et la vie communautaire.
Habiter aujourd’hui c’est être mobile, et pouvoir se déplacer
Ainsi elle représente un « analyseur de la vie en société »13, et
en exerçant les tâches quotidiennes de la vie. Ainsi sans cette
favorise l’accès aisé vers les différents espaces de la ville.
possibilité de pratiquer la mobilité, le tissu d’habitat se
En renforçant les pratiques de l’espace urbain, et en intégrant
retrouve marginalisé et écarté du reste de la ville, et devient
l’habitant dans un tissu connecté, et facile à joindre ses différents
ainsi un élément de ségrégation de ses habitants au sein du
coins et recoins, elle est aujourd’hui sur le devant de la scène, et
tissu urbain.
présente une nécessité face à l’intégration de l’habitant dans sa ville. Ainsi la mobilité se définit comme un processus qui permet un déplacement d’un point vers un autre dans un espace physique, à travers un moyen de transport. En effet l’un des facteurs qui agissent sur la mobilité et ses rendements en terme de facilité 13
Vincent Kaufman,
Mobilités et modes de vie. Vers une recomposition de l’habiter. 37
2. Les équipements de proximité : Composantes intégrantes de l’Habitat :
Organisateur de vie communautaire sociale dans un habitat, les
importante, et leur absence affecte négativement l’acte d’habiter
équipements de proximité se veulent nécessaire, pour assurer un
la ville.
cadre de vie sain et équilibré. A travers la mise en place d’un dispositif d’équipements collectifs, incitant une forme
3. Outils d’insertion de l’habitat dans son environnement :
d’implication dans le vie active du citoyen, une bonne politique d’habitat, qui se veut intégrale dans sa version à approcher les
Introduction :
conditions de l’habitat et de services attribué aux habitants, ne
Choisir un lieu d’implantation pour un habitat social, est souvent
peut omettre les équipements dans sa conception d’un habitat
problématique. Ce dernier se retrouve dans la plupart des cas
complet et intégré à la vie sociale.
dans des zones en périphérie des villes, en rupture avec les
En effet, la présence d’une école, d’un dispensaire, ou bien d’un
données de son site, présentant ainsi une masse non intégrée,
espace commerciale, œuvre à redynamiser un tissu d’habitat, et à
comme si elle a été parachutée et tombée du ciel.
offrir des services de proximité aux usagers. Ces services de
Ainsi l’insertion de l’habitat dans son environnement, est un
bases, permettent l’équilibre de l’acte d’Habiter, qui se définit
critère important dans la réflexion urbaine, qui reflète clairement
également à travers l’interaction de l’homme avec les différents
une démarche d’intégration ou non de l’habitat dans son
services et équipements dans son milieu urbain. Ainsi, au sein de
environnement. Dans cette partie nous allons évoquer trois
l’habitat social, les équipements de proximité, représentent une
données prépondérante à l’insertion d’un habitat dans son site, à
donnée sensible à traiter et souvent évoqué dans les débat traitant
savoir : sa relation avec la topographie du site, sa forme urbaine,
la réussite ou l’échec d’un habitat social à intégrer son habitant
et son exploitation des qualités paysagère.
dans la vie active quotidienne. Leur importance est très 38
a. Topographie :
b. Qualités environnementales et paysagères :
Minimiser les travaux d’excavation et de terrassement d’un
Les qualités paysagères d’un site, sont un deuxième point
terrain, en profitant des avantages de la topographie de ce
important dans la prise en compte des atouts d’un lieu
dernier, s’inscrit dans une démarche durable, responsable face à
d’implantation et la relation du bâti à l’environnement.
l’environnement. Ainsi la topographie, donnée importante dans la
En effet bâtir suivant une démarche écologique, revient moins
réflexion à l’implantation de l’habitat, n’est souvent pas présente
couteux aux promoteurs immobiliers. Ainsi faire avec le climat,
dans les immeubles d’habitat social au Maroc. S’implantant
et non pas en conséquences du climat, dépend d’une bonne
généralement dans des zones faibles en terme de qualité
exploitation des qualité environnementales et paysagères d’un
paysagère et de données topographiques.
site. De l’orientation, aux ouvertures, au matériau utilisée, une bonne prise en compte des aspects naturelle d’un Les qualités paysagères d’un site, sont un deuxième point important dans la prise en compte des atouts d’un lieu d’implantation et la relation du bâti à l’environnement. En effet bâtir suivant une démarche écologique, revient moins couteux aux promoteurs immobiliers. Ainsi faire avec le climat, et non pas en conséquences du climat, dépend d’une bonne exploitation des qualité environnementales et paysagères d’un site. De l’orientation, aux ouvertures, au matériau utilisée, une bonne prise en compte des aspects naturelle d’un site ainsi que
Figure 10 : Opération de logement social au Maroc Source : Casablanca : 1/3 des acquéreurs ne résident pas dans les logements sociaux
de ces potentialités, permet une habitabilité proche au besoin de l’homme, et respectueuse envers son environnement immédiat. 39
Ainsi , comme témoigne l’expérience de Hassan Fathy dans sa FIGURE 11 : COUPE SCHÉMATISANT LA VENTILATION NATURELLE
conception du village Gourna, en exploitant des méthodes
DANS UNE BATIMENT DU VILLAGE GOURNA
ancestrales de construction en terre pour impliquer les habitants
Source : Pinteres
dans la réalisation d’habitat propre à leur région et leur culture, et respectueux envers l’environnement, nécessitant une dépense énergétique faible par rapport aux logements standards. Cette démarche prouve la force d’une bonne exploitation des Qualités paysagères (Vents dominants, ensoleillement, topographie, etc…) dans la démarche de conception.
FIGURE 12 : VILLAGE GOURNA Source : Hassan Fathy : Une architecture "baladi" pour New Gourna
40
c. Forme urbaine : La forme urbaine, témoigne de forme l’intégration d’un habitat dans un milieu urbain, par rapport aux gabarits de toute construction existante. Généralement très faible au niveau de la conception du logement social au Maroc, elle est aujourd’hui reconsidérée comme principal atout de revalorisation de la vie sociale au sein de l’habitat social. Composition et fragmentation, sont à la recherche dans la conception des nouveaux logements sociaux en Europe, en vue d’exploiter la forme urbaine, afin de régénérer des espaces de vie communs, et des lieux de rencontre et de partage. Ainsi le projet de logement social développé par Fala
FIGURE 13 : PERSPECTIVE DE VUE LOGEMENT SOCIAL/ FALA
Atelier, lors d’une réponse à un concours de conception de
ATELIER
logement social, reste l’un des exemples les plus concrets d’une forme urbaine génératrice d’espace intermédiaire d’interaction sociale. Ainsi à travers un jeu de composition se basant sur une unité répétitive, de base régulière, la forme urbaine dynamique, crée en horizontalité comme en verticalité une vie dense et partagé par des espaces communs renforçant les Liens sociaux de voisinage. Cette composition met en valeur la qualité architecturale du logement social dans sa dimension esthétique mais aussi fonctionnelle, un parfait équilibre pour un logement intégrant, et vivant pour ses habitants.
FIGURE 14 : MAQUETTE DE LOGEMENT SOCIAL / FALA ATELIER SOURCE : PINTEREST 41
L’habitant s’approprie la ville à travers un logement S
intégré à son Site et connecté à sa Ville : Le rapport de l’habitat à sa ville, est indéniablement un
Y
rapport crucial dans la réflexion autour de la qualité de vie produite dans un logement social collectif. Assurer une
N
mobilité réfléchie, pour un habitat intégré au sein d’une ville accessible sont ainsi les recommandations
T
nécessaires pour une politique d’habitat intégrante et H
réussie. Bien encore, l’intégration de l’habitant dans sa ville, ne
É
peut se faire, en l’absence des moyens de transports, ou d’équipements collectifs dans la structure primaire de
S
l’habitat. Ce dernier à travers sa forme urbaine, doit s’intégrer à la topographie, et permettre de créer des
E
espaces de prolongement de soi, grâce à une architecture de forme et de sens.
42
INTEGRATION
LE LOGEMENT
LA VILLE
ORIENTATION
ACCESSIBILITÉ
SUPERFICIE
MOBILITÉ
LUMIÈRE NATURELLE
EQUIPEMENTS
CONFIGURATION SPATIALE
INSERTION AU PAYSAGE
QUALITÉS PAYSAGÈRES ET TOPOGRAPHIQUES
VILLE CONNECTÉE
LE SITE
LE LOGEMENT SOCIAL : COMPOSANTE URBAIN INTÉGRANTE DE LA VILLE POUR UN HABITAT INTÉGRÉ À SON SITE ET CONNECTÉ À SA VILLE 43
DEUXIÈME PARTIE : PENSER L’HABITAT SOCIAL DE L’EXTÉRIEUR VERS L’INTÉRIEUR :
UN PARCOURS RÉSIDENTIEL COMMUN POUR MIEUX VIVRE ENSEMBLE :
I. Introduction :
De l’espace public à l’espace privé : une transition spatiale indispensable pour la pratique de l’Habiter
La dualité du public / privé, a fait couler beaucoup d’encre depuis
1. La transition spatiale :
bien longtemps. Sujet de débat pour les concepteurs, aménageurs,
La transition spatiale est un mouvement impliquant le passage
et décideurs de la politique des villes, ainsi que pour les habitants et
de différents espaces, distincts l’un par rapport à l’autre.
usagers de ces espaces, le passage de l’un partagé vers l’autre plus
Souvent associé aux frontières public privé, intérieur extérieur,
intime, a connu différentes formes, et représentations qui ont
elle exprime un changement d’espace, qui génère une mutation
définit l’habitat et sa relation avec son environnement immédiat.
d’ambiance, infectant directement le vécu de la personne
Cette deuxième partie, éclaircie ainsi le rôle de la transition spatiale
concerné par cette transition. Ainsi ce déplacement à travers
au sein de l’habitat social, ainsi que des espaces intermédiaires
différents espaces à caractères distincts, semble présenter un
dans le développement d’une bonne qualité de vie et de bien-être
acte omniprésent dans la pratique de l’habiter. En effet cette
commun. A travers la lecture des différentes formes que prend ces
transition induit la présence d’un espace transitionnel, ou
espaces intermédiaires, une synthèse des dysfonctionnements ou
intermédiaire, entre l’espace public et l’espace privé de l’habitat.
bon fonctionnement de ces derniers nous amènera à repenser ces espaces en fonction de nouveaux paramètres contribuant à
2. L’espace transitionnel ou l’espace intermédiaire :
l’intégration de l’habitant dans sa ville.
Que ce soit appelé espace de transition, espace intermédiaire, ou espace transitionnel, ce dernier renvoie clairement à un espace de transition spatiale, exprimant dans sa pratique une dichotomie entre le public et le privé. En effet, de par leurs variétés de terminologie, les espaces intermédiaires de l’habitat collectif, ont toujours été sujet de débat et de réflexion dans le cadre de la production architecturale et urbaine de l’habitat social collectif. 44
Cela dit, l’espace intermédiaire représente tout espace de
dernier de communiquer avec l’espace extérieur de la cellule
circulation et tout aménagement d'usage commun mis au service
d’habitation.
des habitants d’une même unité d’habitation, qu’ils traversent et
Lieux de confort, et de qualité de vie urbaine, ces espaces
exploitent pour rejoindre leur logement depuis le domaine public
participent vivement à l’urbanité de la ville, et permettent de
de la ville, à savoir la rue. Il peut être soit : cage d'escalier,
connecter l’habitat à sa ville, en intégrant l’habitant dans son
ascenseur, palier, hall, couloir, coursive, cave, local poubelles,
environnement. Leur pratique est avant tout une expérience
parking, cour intérieure, jardin, espace vert collectif, ou aire de
humaine et riche, qui interpelle les émotions de ses usagers.
jeux, etc.
Penser l’espace intermédiaire au sein de l’habitat social collectif,
Evoluant depuis la fin du XIX siècle, époque qui voit l’apparition
est ainsi indispensable pour repositionner l’homme dans un espace
de l’expression « espace intermédiaire », jusqu’au XXe siècle,
de prolongement de soi et de son habitation.
dans sa représentation des espaces communs de l’habitat social,
Cependant cet espace de transition, a été pendant une bonne
l’espace de transition constitue une composante primordiale pour
période négligée, et mis à l’écart dans la conception et la réalisation
la création de la vie sociale et du bien-être commun au sein de
des ensembles du logement social au XXème siècle. A travers les
l’habitat. En effet cette transition de l’espace public vers le
grands ensembles du logement pour le grand nombre, l’espace
territoire privé du « chez-soi », génère une multitude d’ambiances,
intermédiaire, s’est vu sacrifier, au profit de contraintes financières.
et représente une pratique sensible et sensorielle de l’espace
Cela a engendré une pratique de l’habiter ennuyante et désagréable
partagé, vécu, et ressenti en commun. Cet espace générateur de
pour ses habitants, pour qui l’habitat ne représente plus qu’un
liens sociaux, permet à ses utilisateurs de s’approprier leur habitat,
logement non intégré à son environnement. C’est ainsi le cas au
en constituant un repère visuel dans la mémoire de ces derniers, à
sein de la plupart des opérations de logements sociaux au Maroc,
travers lequel il se définissent et reconnaissent leur territoire. Il
où l’habitabilité de l’être humain est écarté, et négligé au profit
permet aussi de créer une transition entre la rue et l’habitat, en
d’un logement à moindre coût, qui finalement se résume à des
prolongeant le logement vers un espace extérieur semi public, qui
boites sans âme, voué à devenir des logements ségrégués,
préserve l’intimité de son utilisateur, tout en permettant à ce
informels, et non intégrés au sein du tissu urbain de la ville. 45
3.
La transition spatiale à travers le rapport du Dedans et du
Dehors
Introduction : Pour accéder à son espace de vie, l’être humain passe par une succession d’espaces, de différents statuts allant du public au semi public au privé. Tous participant à la fabrication d’une image sensorielle lors de la perception de l’espace vécu par l’habitant, en générant différentes émotions à travers différentes ambiances. En effet au sein de l’habitat collectif, ses espaces de transition se présente sous deux plans, un premier plan où l’habitant se retrouve dans une première sphère d’espace intermédiaire lors de son passage du domaine public au domaine semi public, et un second plan intermédiaire, plus intime, au sein de la deuxième sphère, lors de son passage du semi-public/semi-privé vers le privé. Cela est ainsi schématisé dans la figure représentée à droite.
FIGURE 15 : LE PARCOURS RÉSIDENTIEL À TRAVERS LA TRANSITION SPATIALE AU SEIN DE L’HABITAT COLLECTIF 46
3.1. De la rue à l’espace intermédiaire : Des espaces semipublics à intérêt commun : La rue, partie intégrante de la ville, et espace public d’interaction sociale par excellence, représente un milieu social, dynamique, où les habitants d’une ville peuvent se rencontrer et pratiquer l’espace commun public de cette dernière. Pour accéder à l’espace privé du
n’assurant pas l’intégration de l’habitant au sein de son environnement. Concentré sur l’amélioration du confort individuel de la cellule, ce type d’immeuble moderne, représente ainsi un frein au prolongement de l’habitat de l’intérieur vers l’extérieur, vu l’absence de tout espace vert ou équipement connecté à la ville.
« chez-soi », une transition de la rue vers ce dernier s’effectue automatiquement, et constitue une pratique quotidienne omniprésente. Cette transition a connu plusieurs formes d’interprétation depuis bien longtemps, selon différents courants urbains et architecturaux. De L’ilot à la barre, et vis-versa cet espace commun développé soit à l’horizontal ou à la verticale, pour l’un comme pour l’autre, il entretient ou rompt les liens de l’habitat avec sa ville. Ainsi, L’immeuble en barre, solitaire, et déconnecté de sa ville, à la manière Corbuséennes dans sa conception de la cité Radieuse, au sein de la pensée du mouvement moderne, efface toute liaison spatiale de l’habitat avec sa ville. En effet, la rue au sein de l’unité d’habitation du Corbusier, ne fonctionne que comme étant un espace de distribution vers les cellules d’habitation, qui ne met en aucun cas, l’homme en relation avec son environnement extérieur. La relation de l’habitat à l’espace public est ainsi méprisé et peu développée, ce qui génère un espace intermédiaire faible,
FIGURE 16 : LE CORBUSIER, UNITÉ D’HABITATION, MARSEILLE, AERIAL VIEW, 1945–53 (FONDATION LE CORBUSIER, PARIS, FLC L. 1.13.5; © F.L.C./ADAGP, PARIS/ARTISTS RIGHTS SOCIETY [ARS], NEW YORK 2014). 47
En contradiction à la pensée moderne de l’habitat collectif, une nouvelle vision de ce dernier s’est développé, par l’architecte Christian Prortzamparc, qui a imaginé une nouvelle représentation de l’ilot, à travers un ilot ouvert, comme alternative à l’ilot Haussmanien, ou à l’immeuble en barre, redéfinissant de nouvelles pistes de revalorisation de l’espace intermédiaire de l’habitat collectif. Ainsi l’ilot ouvert, permet de créer différentes séquences semi-privatives, qui dessinent l’espace partagé commun, à travers des aménagements d’espace vert, fonctionnant comme espace de transition de l’espace public vers le logement. Ces premiers espaces intermédiaires permettent de créer un premier filtre d’intimité pour ses utilisateurs, qui les fréquentent pour s’approprier un espace extérieur à leur logement permettant une meilleure qualité de vie, et de pratique sociale de l’espace commun. Cet espace transitionnel, offre en effet un confort sensoriel à son utilisateur, qui prend plaisir à le pratiquer en observant, et ressentant ses différentes composantes. Depuis ses espèces végétales plantées, au mobilier installé, ainsi qu’aux matériaux de revêtement utilisés pour les espaces de circulation, ce dernier offre une qualité d’air renouvelé, à travers son système bioclimatique, qui œuvre dans une approche durable, à rééquilibrer l’espace bâti et l’espace non bâti de l’habitat.
FIGURE 17 : SCHÉMA DES TROIS AGES DE LA VILLE ET DE L’ILOT OUVERT DE PORTZAMPARC 48
3.2. De l’espace intermédiaire à la cellule d’habitation :
En effet, comme schématisé sur l’image de droite la distribution vers les appartements se fait par un couloir central, aveugle et
a.
La transition horizontale : à travers le couloir et la
coursive comme outil de distribution :
sombre sans aucun éclairage naturel. Ce type d’espace, ne préserve aucune intimité, et reste néfaste pour la santé morale de ses utilisateurs. Un tel espace sans âme, dépourvu de toute identité, ne
L’espace intermédiaire, au-delà de l’espace représenté au cœur de
contribue guère à générer des émotions de joie et de plaisir à le
l’ilot de Portzamparc, définit aussi les espaces de distribution
pratiquer, et constitue un obstacle à l’intégration des habitants au
intérieurs au sein du logement. Du hall de l’entrée du logement,
sein de leur habitat, et à la préservation de l’intimité de ses
vers la cellule d’habitation, plusieurs espaces sont partagés, qui
derniers.
représentent un second plan de transition spatiale, cette fois-ci plus intime. En effet, le hall, la cage d’escalier, ou le couloir desservant la cellule d’habitation, jouent un rôle important dans la préservation de l’intimité de l’habitant, tout en instaurant une sociabilité entre les différents utilisateurs du même espace.
Ce deuxième espace intermédiaire, prend en effet deux configurations différentes, qui ont été parmi celles les plus utilisées depuis l’aube des temps, pour assurer une distribution horizontale vers les cellules d’habitation, à savoir le couloir de distribution et la coursive. Ainsi en dépit de l’évolution des modes de vie, ainsi que de la pensée architecturale, et malgré que le mode d’habiter diffère d’un pays à un autre, ou d’une région à une autre, la distribution intérieure des logements reste très standardisée et stéréotypée.
FIGURE 18 : PLAN DE LOGEMENT SOCIAL DES JARDINS HAY
CHRIFIA MARRAKECH MAROC
Source : http://www.jardinhaychrifia.com/fr/ 49
Par ailleurs, nombreux sont les architectes qui se sont intéressés à repenser cet espace afin de le revaloriser au sein de l’habitat, et d’offrir à l’habitant une meilleure perception de ce dernier à travers un nouveau système de coursive qui connecte le bâtiment avec son environnement extérieur. Comme représenter sur la figure 11, la coursive devient un élément de transition en liaison directe avec l’environnement extérieur, rompant ainsi la vision stéréotypée du couloir de distribution, qui tue toute relation sociale entre les voisins, et constitue un espace malsain pour ses utilisateurs
FIGURE 19 : Gisors, rue de Verdum,47 PLA LQCM, démarche QIH, Logirep, Atelier des 2 Anges arch., 1998
Source : Pensé l’habité, Le logement en question 50
b.
La transition verticale standardisée génératrice du
plan type :
Habiter en vertical, de nos jours, semble attirer l’attention de
sociabilité au sein des espaces intermédiaires de l’habitat collectif.
nombreux architectes et urbanistes, qui adhèrent à cette nouvelle
A travers cette perspective de vue, l’habitat collectif devient un
approche de densification des villes. En effet l’habitat en vertical,
moteur principal pour la contribution à l’urbanité de la ville, en
permet de préserver les terrains agricoles, en freinant l’étalement
prolongeant l’espace de la rue au sein même de l’immeuble
urbain. Cette configuration de l’habitat collectif, est ainsi une
d’habitation. Cela permet ainsi d’intégrer l’habitant dans son
solution efficace pour remédier à la crise du logement, en intégrant
milieu, à travers un logement connecté à son espace extérieur
plusieurs unités d’habitation dans un seul immeuble, qui n’occupe
environnant.
pas beaucoup d’espace au sol.
Ainsi l’espace intermédiaire vertical du logement, ne se résume pas
Par ailleurs cette configuration, a généré dans plusieurs cas, des
uniquement à une superposition des espaces de circulation
immeubles à plan type, qui de plus en plus font face, et représentent
verticale, mais doit en effet, pouvoir assurer une traversée paisible,
un réel danger face à la créativité et la diversité des typologies de
et désirée, pour une ville durable, et inclusive.
l’habitat collectif. A travers une transition verticale standardisée (cage d’escalier superposées, ascenseur) le logement collectif se résume à une superposition du même plan, sans recherche de mixité de typologie, adaptés aux besoins des habitants et leurs différents modes de vie, notamment dans le logement collectif social. En effet, l’habitat vertical doit être pensé comme une alternative à la recomposition de la vie urbaine en étage. Ainsi il doit pouvoir recréer l’espace public de la rue horizontale en étage et assurer une 51
c. La lumière naturelle, composante fondamentale pour les espaces
ces derniers, et accentuer leur caractère vivant et désirable. Ainsi
communs de distribution :
leur pratique, à travers une transition douce et lumineuse, devient un geste désiré et apprécié par leurs utilisateurs, à qui est assurer
Comme représenté sur la figure 19, la coursive, élément de
une bonne qualité de vie et une meilleure habitabilité.
distribution et de circulation, permet pour ce projet, de lier deux
En effet au sein de l’habitat social collectif, la valorisation de
immeubles, en assurant un passage de l’un vers l’autre, par un
l’éclairage naturel joue un double rôle, celui du confort visuel, par
jardin central qui amène de la lumière à cet espace de transition,
la mise en place d’une ambiance lumineuse gaie, mais aussi celui
tout en préservant l’intimité de chaque habitant. En effet, cette
d’économie de dépenses énergétiques dans l’éclairage des espaces
configuration remet en question un des aspects de l’habitabilité des
communs. Cela dit pour assurer une efficacité énergétique, l’habitat
espaces de vie d’un habitat social collectif, à savoir le rapport du
social doit être pensé en prenant compte de l’orientation, ainsi que
dedans et du dehors. Assurer le bien-être des habitants, condition
les emplacements des ouvertures en façades, et leurs tailles. Tous
fondamentale derrière chaque geste architectural, devient ainsi
ces éléments favorisent une bonne pénétration de lumière naturelle
concrète, par l’introduction de la lumière naturelle, au sein des
grâce à une exposition réfléchie des espaces de vie, et une maitrise
parties communes de l’habitat collectif et à travers la connexion de
des qualités climatiques du site d’intervention, œuvrant ainsi à un
ce dernier à son environnement immédiat.
développement durable et intelligent de nos villes.
En effet la lumière, est une composante nécessaire à la vision et est
En effet comme le souligne le Corbusier dans sa fameuse phrase :
fondamentale pour comprendre et ressentir une forme, une couleur,
« L’architecture est le jeu savant, correct, et magnifique des
et une ambiance. Elle contribue au confort visuel et psychique de
volumes sous la lumière », ou bien tout simplement et en résumé
l’être humain, et anime les espaces par un jeu d’ombre, invitant
dans la phrase de Tada Ando : « La lumière est l’origine de tout
l’environnement extérieur à s’incruster au sein des espaces
être », on ne peut nier son importance dans la réflexion
intérieures de l’habitat.
architecturale pour la conception d’un espace habitable, dont la
Amener de la lumière naturelle aux espaces communs de
pratique est jouissante et plaisante pour son utilisateur.
distribution au sein d’un habitat collectif, serai injecter une âme à 52
II. Repenser les Espaces intermédiaires du logement social : pour une meilleure qualité des espaces communs
1. La résidentialisation du logement : La résidentialisation, nouveau concept attribué au immeubles HLM en France, se voit de plus en plus utilisé et médiatisé. En effet, action de transformer en « résidence », elle représente un processus de revalorisation du tissu d’habitat, à travers une attribution de quelques qualités de l’habitat résidentiel modeste à l’habitat collectif social. Elle permet en effet d’assurer un premier critère indispensable pour la vivabilité de l’habitat social à savoir : la sécurité. Elle offre ainsi un cadre décent, sécurisé, et désirable pour les habitants du lieu. A travers un renouveau symbolique et d’usage, l’habitat social ‘résidentialisé’, redonne une nouvelle image à l’habitat, une image positive qui reflète un espace de vie positif et agréable pour ces utilisateurs. En effet parmi les critères importants de la résidentialisation, la mise en place de jardin et d’espace vert planté comme espace intermédiaire au logement. Elle instaure ainsi une base servant de support de conception de
FIGURE 20 : SCHÉMA DE LA RÉSIDENTIALISAION
l’habitat social, qui repose sur la revalorisation des espaces communs de l’habitat. Cette mise à valeur de l’espace commun, permet d’accentuer la mixité sociale, et l’interaction sociale des habitants, ainsi que d’améliorer la qualité de vie et le vivre ensemble.
53
2. De la Rue au logement : Réarticuler l’espace intermédiaire : Indéniablement, les espaces verts offre également une biodiversité 2.1. Les espaces verts et les aires de jeux dans leur définition
dans les villes, et participe au développement durable des quartiers.
de l’habitat social :
En rééquilibrant le rapport du bâti et du non bâti, ces derniers
Les espaces verts ainsi que les aires de jeux sont deux entités
définissent la relation du logement avec son environnement
fondamentales pour la définition de l’habitat social. Espaces de
extérieur, et constituent en effet des espaces de prolongement de
rencontre intergénérationnel, et de pratique de liens sociaux, ces
l’habitation vers ce dernier.
espaces définissent l’acte de l’habiter dans ses dimensions
Les aires de jeux, comme pour les espaces verts, constituent des
extérieures, à travers lesquelles, il dépasse la seule fonction de se
lieux de rencontres et de communication, nécessaire pour le
loger.
développement et le bien-être des enfants. Ces espaces, souvent
En effet, les espaces verts de l’habitat social, permettent de mettre
négligés dans la conception de l’habitat social au Maroc, ou mal
en place une zone de confort propice à la détente, et à la relaxation
entretenus, constituent un frein pour le développement de l’enfant
de l’habitant. Ils œuvrent ainsi à recréer un cadre paisible, naturel,
et son appropriation de l’environnement physique et social qui
qui remet l’homme en relation avec son environnement, et lui
l’entoure. Cela nuit à la santé morale de ces enfants, qui souffrent
permet d’interagir avec les composantes naturelles de ce dernier.
par la suite de troubles causés principalement par le stress et la
Cette interaction agit directement sur la santé mentale de l’habitant,
frustration d’être privé d’espaces de jeux, où s’exprimer et
et constitue une base fondamentale pour l’équilibre de la vie
apprendre à apprécier son environnement.
humaine. Selon une étude hollandaise en 2003, 10% d’espaces
En effet, ces espaces dont on néglige l’importance, sont aussi des
verts en plus, signifie moins de symptômes pour les résidents à
espaces d’apprentissage, et d’expériences premières pour l’enfant,
proximité, comme s’ils avaient rajeuni de 5 ans. Ainsi la présence
qui participe à la définition d’une part de son identité. Ces lieux par
des espaces verts au sein d’un milieu d’habitation participe au
leurs ambiances, et leurs symboles s’ancrent dans la mémoire de
fonctionnement harmonieux du corps humain. Ils renforcent ainsi
l’enfant, et représentent les premières impressions qu’il peut se
le sentiment d’appartenance, et permettent aux résidents de
forger sur la société.
s’approprier leur habitat. 54
Ainsi l’importance des aires de jeux et des espaces verts, devra
Cela dit, la rue lieu d’urbanité par excellence, chargé de symboles
rester sur le devant de la scène dans la conception et la réalisation
et de signes interpellant la pratique sensorielle de l’homme,
de l’habitat social, pour assurer une bonne atmosphère, propice à
représente une unité importante de la ville. Elle constitue un lieu de
l’évolution mentale et physique de l’enfant et au confort et bien-
de théâtralisation de l’espace public, et redéfinit différents scénaries
être de l’être humain.
grâce à sa charge symbolique, son mobilier, et ses revêtements. Par ailleurs depuis sa fonction primaire à savoir, organiser le tissu
2.2.
La rue en étage, pour un habitat social au service de
urbain de la ville, elle se voit appliqué aux immeubles de logement,
l’urbanité :
pour une organisation intérieure de ce dernier.
Du couloir serré et sombre à la coursive connectée avec l’extérieur,
Elle permet ainsi de définir un nouveau mode d’habiter, basé sur le
l’espace intermédiaire de distribution au sein de l’habitat collectif a
partage d’un espace de déplacement commun, qui interagit avec les
connu plusieurs mutations. Aujourd’hui et depuis un certain temps,
éléments extérieurs de l’immeuble et permet une expérience unique
la réflexion sur l’espace public au sein de l’immeuble converge
de l’espace public en étage.
pour la plupart des concepteurs et aménageurs de l’espace urbain,
Constituant une faille et une percée dans le logement, elle assure
vers une nouvelle configuration de ce dernier à savoir : la rue en
une pénétration de la lumière naturelle, ainsi qu’un renouvèlement
étage. Encore plus élaborée que la coursive, la rue intérieure au
d’air, en instaurant un micro climat au sein même de l’immeuble.
logement est une nouvelle façon de requalifier l’espace public au sein même de l’immeuble d’habitation. En effet cette configuration, a démontré nombreux avantages dans sa contribution à la création d’une sociabilité vertueuse entre les différents membres de l’immeuble d’habitation, ainsi qu’à sa redéfinition du vivre ensemble et de l’espace partagé commun.
55
Les deux figures illustrent l’intérieur de la Cité Napoléon, une des cités ouvrières les plus célèbres du XIXe siècle. En effet cette cité représente un exemple concret de la revalorisation de l’espace intermédiaire du logement social à travers la rue intérieure comme dispositif de distribution et de circulation. Dans une période de fort accroissement du prolétariat, le souci d’instaurer une bonne qualité de vie au sein du logement social était primordial. Ainsi cette cité d’ouvrier vient en réponse au besoin de renouveler le mode d’habiter de la couche sociale pauvre, en leur fournissant un habitat sain, aéré et doté d’équipement.
Repenser la rue intérieur au sein des immeubles d’habitation n’est cependant pas une question récente, mais constitue plutôt une préoccupation qui a hantait la conscience des concepteurs depuis bien longtemps, grâce à ses qualités ressentis en terme de revalorisation de l’espace partagé et l’instauration d’un micro climat. Par ailleurs, nombreux sont ceux qui critiquent cette nouvelle configuration de la rue dans le logement, en pointant par le doigt sa rupture avec l’espace extérieur du logement. Cela dit pour que cette rue intérieure fonctionne, elle doit non seulement permettre une bonne pratique de l’habiter à l’intérieur du logement, mais doit aussi assurer une liaison de ce dernier avec son espace extérieur.
Figure 21 et 22: Vue sur la rue Intérieure la Cité NAPOLEON MarieGabriel Veugny 56
Cette réflexion a été mené par l’équipe P.Caillot et M.C.Gangneux, dans le cadre du concours PAN « Programme Architecture Nouvelle » , sous le thème du « Logement en questions ». En effet ils proposent une succession de halls, cour, passages, pour aérer l’ilot, permettant le passage depuis l’espace d’habitation vers les équipements de l’ilot, créant ainsi une forte mixité urbaine, comme représenter dans la figure 23.
Figure 21 et 22: Plan RDC P.Caillot et M.C.Gangneux Source : Penser l’habité : le logement en questions PAN1
57
.2.3. Le Potager urbain : espace de pratique de sociabilité En dépit de la rue en étage comme espace de sociabilité et d’interactions sociales entre les différents habitants, le potager urbain représente aussi un des concepts clefs pour favoriser la rencontre et le partage. De plus en plus présent dans l’habitat social, ce dispositif permet de créer une biodiversité au sein de l’immeuble d’habitation. En effet, cette pratique qui favorise l’installation de l’agriculture sur les toits terrasses, ou même dans des sous-sols aérés, aide à réconcilier la relation nature-ville, et à améliorer la qualité de l’air. Ainsi la ville comestible préoccupe petit à petit l’esprit des pratiquants de l’espace urbain, pour qui cette nouvelle façon d’introduire l’agriculture urbaine peut aider à vivre en cohésion avec le monde naturel, en préservant les terrains agricoles confronter à l’étalement urbain. Au-delà du précité, le potager urbain, vise à humaniser l’habitat social, en mettant en place des jardins familiaux partagés. Cette pratique permet aussi dans un souci de ressources financières de produire sur place la consommation d’une petite famille, et de réduire le déplacement de cette dernière pour subvenir à ses besoins fondamentaux vitaux. Ainsi l’agriculture urbaine favorise le développement durable des villes à travers ses multifonctionnalités
Figure 23: Multifonctionnalité de l’agriculture urbaine Source : Multifonctionnalité de l’agriculture urbaine à Montréal : étude des discours au sein du programme des jardins communautaires
schématisés dans la figure à droite : 58
2.4. La terrasse jardin : Espace réinvesti pour un habitat réintégré
dont Jean Renaudie, l’un des architectes qui a consacré la plupart de
dans la vie urbaine :
ses réalisations à réfléchir à la problématique de l’habitat pour le
Reconnu par leur contribution à l’amélioration de la qualité de l’air,
plus grand nombre. Rejetant l’idée de la cellule d’habitation,
et à la mise en place d’une biodiversité au sein de la ville, les
comme étant une « machine à habiter », Jean Renaudie, développa
terrasses jardins, représentent un outil fondamental, pour une
un système de terrasse jardins, et de jardins suspendus au sein d’un
nouvelle manière d’habiter le paysage urbain. De part, leur rôle
ensemble de logement sociaux, à l’architecture osée, aux formes
dans la préservation d’un climat sein dans les villes, ils constituent
triangulaires, dessinant des espaces irréguliers. A travers sa
en effet un prolongement de l’espace habité, et permettent de
conception de logements en étoiles, il a participé à réinventer
reconquérir un espace jusqu’à lors négligé, malgré son importance
l’habiter pour le grand nombre, à travers un habitat prolonger vers
dans la composition de l’habitat social collectif. Ils dressent en
l’extérieur et connecté à sa ville.
effet, une continuité visuelle vers l’extérieur, et permettent de concrétiser le rapport du dedans et du dehors au sein de l’espace privé de l’unité d’habitation. Ainsi la terrasse jardin joue un rôle primordial dans la qualité de la façade architecturale du logement collectif. Elle permet une décomposition de cette dernière, pour créer un jeu riche et intéressant de volumes, qui participe à dynamiser le paysage urbain de la ville. A travers ces nouveaux espaces partagés, se développent les liens sociaux entre les voisins et l’intégration de l’habitant dans son milieu social. Plusieurs architectes qui se sont intéressés à la question de la terrasse jardin au sein de l’habitat social collectif,
Figure 24 : Terrasse des logements sociaux en étoile / Jean Renaudie Source : Pinterest 59
De l’espace partagé à l’espace privé : Une Transition spatiale pour un habitat intégré et une sociabilité assurée A travers cette deuxième partie consacrée à la relation du bâti et du non bâti dans l’habitat social, se dégage une S Y N
conclusion claire de l’importance des espaces intermédiaires au sein de ce dernier et leur contribution au prolongement de l’espace habité vers l’extérieur. Ainsi les espaces partagés de l’habitat social, représentent une composante indispensable, pour une qualité de vie, et une bonne appropriation du logement et intégration sociale. Ces espaces œuvrent, à travers leur diversité, à mettre en place un parcours résidentiel agréable pour leur utilisateur,
T
permettant de pratiquer l’espace habité à travers une perception sensorielle, générée par différentes ambiances, qui interpellent les émotions de l’homme, et rend la pratique des espaces communs désirable et jouissante. En effet la
H
qualité des espaces non bâti dans l’habitat social, défini la relation de l’homme avec son habitat, et avec son environnement extérieur, et affecte directement son appropriation du logement et son intégration. Ainsi, la
È S E
transition spatiale depuis les différents espaces semi public, à l’espace privé, est indéniablement, un passage à valoriser et à traiter au sein de l’habitat social. Ce dernier prend en effet plusieurs configurations, de l’espace vert du jardin partagé à la rue en étage, ce parcours définit la relation de l’homme avec ses voisins, et avec son milieu social. Par ailleurs, penser ces espaces de transition, sans introduire la lumière naturelle, au sein de ces derniers, remet en question la qualité de ses espaces de partage, et leur effet sur la santé morale de leur utilisateur. Ainsi ces espaces doivent pouvoir profiter d’un ensoleillement et une lumière naturelle, afin de permettre une transition agréable et douce, vers la sphère privée de l’Habitat social, et de rompre avec les idées stéréotypées du couloir de distribution aveugle, utilisé dans la plupart des opérations de logement social dans le monde entier.
60
INTEGRATION
LOGEMENT SOCIAL
ESPACE PUBLIC
ESPACE PRIVÉ CAGE D’ESCALIER
ESAPCE VERT
DISTRIBUTION ESPACE DE JEUX COUR / PATIO POTAGER URBAIN RÉPARTITION SPATIALE TERRASSE JARDIN
ESPACE SEMI-PUBLIC / ESPACE SEMI-PRIVÉ LA RUE EN ETAGE ESPACE PARTAGÉ
L’UNITÉ D’HABITATION
LE PARCOURS RÉSIDENTIEL HABITAT SOCIAL POUR UN HABITAT SOCIAL PENSÉ DE L’EXTÉRIEUR VERS L’INTÉRIEUR
61
Troisième partie : OBSERVER, RESSENTIR ET VIVRE l’HABITAT SOCIAL :
I/ La perception dans l’habitat, Plaisir des sens :
Introduction 1.
L’environnement sonore de l’habitat :
S’interroger sur la perception sensible de l’espace où se mêlent
Souvent écarté entant qu’élément participant à nourrir la pratique
formes, couleurs textures et ambiances, se veut indispensable pour
sensorielle de l’habiter, le son au sein de l’habitat est considéré
appréhender le l’acte d’habiter dans tous ses aspects. Ce chapitre
comme une composante technique, matérielle, à laquelle on a
traitera ainsi la perception sensorielle de l’habitat, et dressera
tendance de s’éloigner et de réduire ses effets jugés comme
ensuite une analyse de la typologie au sein de l’habitat sociale, et
nuisibles à la santé et désagréables.
l’importance de sa diversité. A travers une brève présentation de la
Par ailleurs, le bruit n’est pas seulement une gêne à fuir, mais
constitution de la famille marocaine, ainsi que son mode de vie,
constitue en effet une partie intégrante de la pratique sensible de
différent d’un cocon familial à un autre, on essayera de dresser
l’acte d’Habiter.
quelques figures principales dans la manière d’habiter de la couche
Cela dit, le vécu sonore propre à chaque habitation, renvoie par son
sociale la plus démunie, qui fait objet de cet étude théorique du
immatérialité à une manière personnelle de percevoir l’espace, à
mémoire.
travers une pratique corporelle unique au sein d’une ambiance
Ensuite cette partie, détaillera le confort la relation qui régit la
spatiale particulière à chaque habitat.
norme concernant la superficie des espaces de vie imposé par le
Cela n’empêche pas de souligner l’importance des qualités
cahier de charge du logement social au Maroc, et la qualité de vie
techniques d’un matériau, dans la préservation d’un espace
de ces espaces.
confortable en terme de sa capacité à filtrer les nuisances sonores provenantes de l’extérieur. Dans ce sens, plusieurs nouvelles techniques ont vu le jour pour participer au confort intérieur sonore du lieu d’habitation, mais aucune tentative n’a été mise en place pour questionner la dimension sensible et qualitative d’un espace sonore. 63
En effet, l’habitat, à travers son environnement sonore,
indispensables pour le renforcement des liens sociaux, et
représente un espace de théâtralisation de scènes auditives,
l’amélioration du cadre de vie, présentent une perception sonore
définies dans le temps, et qui participent à enrichir la perception
particulière à travers leurs composantes environnementales et les
visuelle de l’homme et son
aménagement urbain.
interaction avec son environnement extérieur. Le son devient ainsi un évènement dynamique, moteur de fabrique
2. L’environnement tactile de l’habitat :
d’expériences sensorielles, accentuant la relation de l’homme et
Le toucher, comme l’ouïe et les autres sens physiologiques de
de son corps comme organisme vivant au sien de l’espace
l’homme, participe à la fabrication de l’image perceptuelle
habité.
sensible de l’espace. En effet, il contribue à l’élaboration
Ainsi l’introduction de différentes sons extérieurs de
d’ambiances intérieures au sein de l’habitat, par les différents
l’environnement immédiat à la cellule d’habitation, est
matériaux, couleurs et textures appliqués dans chaque espace.
indispensable pour assurer un équilibre entre le dedans et le
La perception tactile, est en effet une pratique qui se fait
dehors, et permettre l’appropriation de l’habitant de son
instantanément chez l’homme lors de son contact avec un
environnement et son interaction avec ce dernier.
matériau qui suscite son intérêt, et sa curiosité ou tout
Cela dit, l’environnement sonore, doit être pris en compte dans
simplement lors de sa pratique corporelle d’un espace. Ainsi la
la conception de l’unité d’habitation, à travers un agencement
perception par le toucher, influence et complémente la
réfléchi des espaces de vie, permettant le prolongement de ces
perception visuelle, et participe à l’amélioration de la qualité des
derniers vers l’extérieur.
espaces et au vécu interne au sein de l’espace habité
Au-delà du précité, le son représente également une entité présente au sein de la perception de la ville et de son urbanité. En effet, l’environnement sonore urbain participe à l’identité sonore de la ville et de ses espaces semi privés, constituant un repère pour leur utilisateur. Ces espaces intermédiaires, 64
3. L’environnement visuel de l’habitat : La lumière : condition du bien être au sein de l’habitat.
de l’espace habité. Comme déjà précisé, la lumière représente une condition primaire pour le bien-être et le confort de l’habitant au sein de
L’architecture est, et a toujours été ressenti par la perception
son logement. Elle participe à créer une ambiance reposante, et
visuelle, à travers le regard et la contemplation de l’œil
agit sur la santé morale de l’homme.
humain. Par ses formes et ses figures, elle est qualifiée et chargée de symboles parlants aux sens de l’homme et à ses
4. L’environnement olfactif :
émotions. L’environnement visuel représente ainsi, une entité
L’odorat, constitue l’un des sens les plus importants pour le vécu
importante dans la pratique des espaces générée par tout acte
d’un habitant dans un lieu précis. A travers ses expériences
architectural.
pratiques olfactives, l’homme se repère, se rappelle d’un
Au sein de l’habitat, le regard est l’un des outils
souvenir, et reconnait un endroit.
d’appropriation de l’espace habité et d’interaction avec le
En architecture, l’odorat est un élément important dans la
milieu extérieur. Cette interaction est accompagnée par
perception de l’espace urbain. Ainsi ce dernier agit sur la
différentes ambiances perçues et ressenties par l’expérience
perception des villes et leurs représentations chez chacun de
de la pratique du regard et de la vue, agissant directement sur
nous. En effet l’odeur accompagne l’être humain, partout ou il
la l’esprit de l’homme et son humeur.
va. Elle constitue une partie de son vécu quotidien et agit sur ses
De la couleur, à la forme, au matériau, tous des éléments qui
émotions. Ainsi l’environnement olfactif représente un
influencent la perception visuelle et créent un repère dans la
paramètre important , dans la conception architectural, qu’il ne
mémoire de l’être humain.
faut pas négliger lors d’une réflexion sur l’espace habité.
Evoquer la perception visuelle, en tant que pratique sensible de l’habitat, implique un retour sur le rôle de la lumière dans sa fabrication d’une image visuelle agréable pour les usagers 65
STRUCTURE DU CHAPITRE Structuration de l’espace bâti : Concilier qualité et rationalité dans la conception de l’habitat social :
La typologie en logement
La constitution de la famille marocaine Configuration du mode de vie de la famille marocaine à faible revenu
L’appropriation du logement
La mixité typologique
Structuration de l’espace intérieure de la cellule
Les superficies, entre limites et qualité d’espace produit
d’habitation : Cloisonnement ou non cloisonnement des espaces intérieures
Répartition Jour / Nuit La pièce en plus : Évolutivité et résilience
Le confort thermique et hygrothermique
CONCLUSION 66
II / Structuration de l’espace bâti : Concilier qualité et rationalité dans la conception de l’habitat social :
1. La typologie en logement : comme configuration spatiale, et réponse aux scenaris de mode de vie :
1.1. La constitution de la famille marocaine : Introduction :
Selon le HCP 14, la taille moyenne des ménages dans la famille marocaine connaîtrait une baisse significative,
La typologie dans le logement, défini la configuration
passant de 4,61 en 2014 à 3,18 en l'an 2050.
spatiale de l’espace intérieur habité. Elle répond aux modes de vie des habitants et reflètent les coutumes et pratiques sociaux-culturelles de l’acte d’Habiter de toute société. Diversifiée ou répétitive, elle favorise pour l’une la mixité
Milieu de résidence
2014
2015
2020
2025
2030
2035
2040
2045
2050
4,61
4,55
4,26
4,00
3,78
3,59
3,44
3,30
3,18
4,23
4,17
3,92
3,70
3,52
3,37
3,24
3,13
3,02
5,33
5,28
5,01
4,73
4,47
4,23
4,03
3,85
3,71
sociale, et dessine pour l’autre un habitat aux plans types. Dans cette partie, nous allons nous intéresser à la mixité de
National
typologie au sein de l’habitat et à sa contribution à répondre aux différents modes de vie, à travers l’analyse de ces
Urbain
derniers au sein de la société marocaine, plus précisément pour la couche sociale la plus démunie.
Rural
Figure 25 : TABLEAU : EVOLUTION DE LA TAILLE MOYENNE DES MÉNAGES SELON LE MILIEU DE RÉSIDENCE Source : PROJECTIONS DE LA POPULATION ET DES MENAGES 2014-2050 14
HCP : Haut Commissariat au Plan 67
Au Maroc, les ménages sont classés selon les catégories suivantes à savoir :
• Ménage nucléaire : Ménage composé
MENAGE NUCLÉAIRE
exclusivement de noyau familial
• Ménage élargi : Ménage non nucléaire dont chaque membre a une relation de consanguinité ou d’alliance avec au moins un autre membre
Couples
Complètes
Monoparentales
Nucléaires+isolés
• Ménage composite : Ménage dont au moins deux membres ne sont pas liés par une relation de consanguinité ni d’alliance.
•
Près de 250 807 ménages occupe des maisons sommaire ou bidonville dans l’espace urbain du territoire Marocain.
68
1.2. Configuration du mode de vie de la famille marocaine à faible revenu : Le mode d’habiter, miroir des valeurs sociaux-culturelles et des coutumes de toute société, évolue dans le temps, et constitue un des moteurs premiers révélateur du changement social. Au Maroc, les modes d’habiter ont connu une évolution importante, reflétant l’inscription de ce dernier dans un mouvement de modernité mondiale, et d’ouverture aux autres modes d’habiter occidentaux. Aujourd’hui, au sein du territoire marocain, figurent différents types d’habitat, de différentes configurations spatiales, qui renvoient chacune au statut social de ses utilisateurs. Par ailleurs malgré cette évolution des modes de vie, et cette mutation de l’habitat traditionnel vers un habitat plus moderne, certaines figures et configurations, persistent et représentent des bases fondamentales dans la pratique de l’habiter du logement au Maroc, notamment celui destiné à la couche sociale la plus démunie, qui constitue le sujet de ce travail de mémoire.
FIGURE 31 : MAISON DE CAMPAGNE À PROXIMITÉ DE TAROUDANT
En effet, la grande famille, est parmi les entités qui existent toujours dans les différents types d’habitat, notamment celui 69
de la population aux revenus les plus modestes. Ainsi les
Ainsi leur mode de vie a en partie ou complétement dans certains cas
grands-parents, dans la plupart des maisons marocaines,
changés.
occupent une place importante dans la constitution de la
En effet, au sein de leur espace primaire, (la maison à la campagne ou
famille, et se voient généralement occupé un espace dédié à
l’habitat insalubre à la ville), ces derniers ont souvent tendance à
eux au sein du lieu d’habitation.
exploiter
Cette donnée nous amène vers un questionnement particulier
vers l’extérieur, impliquant l’environnement immédiat dans toutes ses
concernant l’espace produit dans un logement social au
pratiques.
Maroc, ainsi comment à travers la conception intérieure de
Du linge exposé à l’extérieur de leur espace habité, aux tables et
ce dernier, l’habitat intergénérationnel peut-il se configurer ?
chaises installés dans la rue comme espace privatisé pour leur
Un questionnement auquel nous tâcherons de répondre dans
pratique quotidienne, (comme le montre clairement ces les deux
la suite de notre réflexion sur la configuration spatiale du
figures 32 et 33), l’espace extérieur, de leur lieu d’habitat, représente
logement au sein de l’habitat social.
un espace important pour leur mode de vie. Cet espace, généralement
De la maison à patio et à cour des médinas ou des espaces
banalisé ou négligé dans le logement social produit jusqu’à de nos
ruraux, à l’appartement de 50m2 à 80 m2, du logement
jours au Maroc, représente le premier frein face à l’appropriation de
social produit au sein de l’espace urbain, les usagers de ce
ce type de logement par ses habitants, et à leur intégration sociale.
l’espace
comme
prolongement
type de logement se sont retrouvés face à une configuration spatiale différente de celle habitué. De manière générale, la plupart des habitants du logement social, qui ont migré de l’espace rural vers l’espace urbain, et se sont forgé un habitant auto construit, insalubre, pour ensuite bénéficier de l’aide de l’Etat afin d’acquérir un logement social, ont fait face à un changement brusque dans la manière d’exploiter un espace et de le vivre.
FIGURE 32 : BIDONVILLE MAROC 70
n phénomène que pratique l’habitant, de manière immatérielle, ou
Indéniablement, chaque famille est particulière dans sa façon d’exploiter son espace habité. Ainsi on ne peut évoquer
En effet la taille et la constitution du ménage d’une famille à
l’habitat collectif, sans pointer du doigt la diversité des
faible revenu, diffère d’un toit à un autre, et témoigne de la
modes de vie de chaque famille, malgré plusieurs points de
diversité du mode d’habiter de cette couche sociale, qui se
ressemblances, qui reflètent une part partagée, et héritée de la
retrouve généralement dans un immeuble de logements de plans
culture communautaire. En général, la couche sociale pauvre
types, résumant toute cette diversité à une seule configuration de
au Maroc, dispose des ménages de grande taille. En effet, en
l’espace.
2014 la taille moyenne des ménages pauvres au Maroc était
Ainsi la relation entre l’espace habité et le mode de vie se
de l’ordre de 7,3 personnes.
représente comme une donnée indispensable à traiter lors de la
Cela n’empêche la diversité de sa composition allant d’un
conception de l’habitat social, afin de satisfaire au mieux le
ménage de 1 à 3 personnes, à un ménage de 10 et plus
besoin de ses utilisateurs en terme d’espaces et de configuration
comme figuré sur le tableau suivant.
spatiale. Comment alors à travers une mixité de typologies, l’habitat social, peut-il présenter un outil pour retranscrire la diversité des modes de vie de ses utilisateurs ?
FIGURE 33 : Répartition des ménages selon la taille et nombre moyen de personnes par ménage selon le milieu de résidence, la région économique, la catégorie de villes et la strate d’habitat urbain : 1995 Source : Structures et caractéristiques des familles au Maroc 71
1.3. L’appropriation du logement :
S’approprier son logement, est considérer comme une
Derrière cette appropriation, se cache en effet dans la plupart du
première étape pour l’habitant, vers une acceptation de son
temps, un rejet à l’espace dessiné pour accueillir un ménage
milieu d’habitation, et son identification à travers ce dernier.
important, dans le cas de l’habitat social. En effet, par besoin de
En effet l’appropriation, est un phénomène que pratique
satisfaire un manque ressenti en terme d’espace intérieures servant
l’habitant, de manière immatérielle, ou matérielle pour la
d’une chambre de plus, ou d’un espace de rangement ( absent dans la
plupart des cas, pour remodeler l’espace de façon à se sentir à
plupart des cas des logements sociaux au Maroc), l’habitant modifie
l’aise et bien dans les différents coins et recoins de son lieu
la configuration spatiale intérieure, et peut également intervenir sur la
d’habitation.
façade extérieure de son logement en la modifiant selon ses besoins.
FIGURE 34 : NID D’ABEILLE AVANT ET APRÈS 72
Tel était le cas de l’immeuble nid d’abeille à Casablanca, qui était l’une des tentatives entreprises lors du protectorat au Maroc, afin de répondre à la crise du logement, et à l’habitat du grand nombre. Cette expérience, en effet démontre la non intégration de l’habitant, dans son milieu d’habitation, à travers son remodelage de ce dernier pour satisfaire au mieux ses besoins primordiaux.
En effet, cela nous amène à réquisitionner la part de l’habitant et sa participation dans la configuration de son espace de vie, ainsi que la flexibilité des espaces imaginés dans l’habitat social. Anticipant un tel geste de la part des usagers de l’habitat social, ce dernier soit être penser dans une démarche de résilience, et d’évolutivité, permettant ainsi aux usagers de profiter d’une marge de liberté dans la conception intérieure de leur habitat.
73
1.4. La mixité typologique : La société marocaine, en perpétuelle mutation, a connu une
mais constitue par ailleurs, une solution préconisée bien avant,
transformation des modes d’habiter au sein des pratiques
dans l’immeuble haussmannien, afin de créer une diversité et
quotidiennes de ses habitants. Ainsi, et par la diversité des
une mixité sociale au sein d’un même habitat. Ecarté par la
types de familles, et de la composition des ménages, le
pensée moderniste, qui favorise l’unité fonctionnelle, et le
logement au Maroc, s’est développé de la maison a patio
recours à une base uniforme de conception de logements
traditionnelle, à l’immeuble de logement collectif, aux
collectifs, affirmant l’acte d’habiter comme une notion
inspirations architecturales modernes, issue de l’influence du
prédéfinie selon un seul mode de vie, pour différentes
protectorat.
personnes, cette dernière reste absente dans plusieurs projets de
Par ailleurs, l’habitat social collectif au Maroc, et depuis bien
logement social au Maroc.
longtemps, a connu une phase de stagnation en terme
Ainsi, la mixité de typologie, offre une large panoplie de choix
d’aménagement spatial intérieur de la cellule d’habitation, par
en terme de configuration spatiale, en répondant au maximum à
le recours à des plans types, dressant la même typologie de plan
la diversité des modes de vie de utilisateurs de l’habitat. Elle
sur tous les étages de l’immeuble social.
vient lutter contre la mécanisation du logement standardisée, et
Ce plan type ne répond pas en effet à la diversité des modes de
offre de nouvelle possibilité d’aménager l’espace et de se
vie des habitants, et résume la pratique de l’espace habité à une
l’approprier.
seule figure standardisée, qui ne reflète pas l’identité et la
Face à cette diversité de typologie, le logement social s’adresse
personnalité de l’habitant.
à la diversité de la condition humaine à être et vivre un espace,
Par ailleurs, diversifier la typologie des cellules d’habitation, ne
et constitue une des bases fondamentales pour la réussite de
représente pas une nouvelle méthode d’approche au logement
l’intégration de l’habitant dans son milieu social.
74
2. Structuration de l’espace intérieure de la cellule
En effet, selon le tableau mentionné dans la figure 36, les
d’habitation :
superficies définies par le cahier de charge du logement social du 250.000, laisse à réfléchir sur l’adaptabilité de ces surfaces aux
2.1.
Les superficies, entre limites et qualité d’espace
produit :
ménages qui les occupent. Comment ainsi la superficie agit-elle sur la qualité des espaces de
50m2 à 80 m2, telle est la superficie couverte du logement
vie d’un logement social ?
social produit au Maroc. Une surface qui stagne depuis des années, malgré les différentes mutations que connait la société
2.1.1. Plus de superficie, pour plus d’habitabilité : Cas de
et les modes d’habiter. Ainsi le cahier de charge qui régit la
Nemausus de Jean Nouvel
conception du logement social au Maroc, est devenu un guide
« Un beau logement, c’est un grand logement ; une belle pièce,
standard et statique, freinant la créativité des concepteurs et
c’est une grande pièce » Jean Nouvel
leur réflexion, en terme de résilience des espaces dessinés pour ce type de logement.
FIGURE 34 : Tableau des surfaces minimale des pièces du logement de 250.000 Source : Rapport de la Cour des Comptes / Logement social : dispositifs 140.000DH et 250.000DH
FIGURE 35 : VUE DEPUIS L’INTÉRIEUR D’UN APPARTEMENT À NÉMAUSUS, JEAN NOUVEL Source : ARZATAZ / Nemausus Jean Nouvel 75
FIGURE 31 : Vue depuis l’intérieur d’un appartement à Némausus, Jean Nouvel
Source : ARZATAZ / Nemausus Jean Nouvel
La superficie d’un logement social, est un critère important qui
social en France, pour l’augmenter de 30% avec le même coût de
juge de l’habitabilité ou non des espaces de vie internes de ce
réalisation.
dernier. Cette dernière a été sujet de plusieurs conférences et
Ainsi en utilisant des matériaux préfabriqués, il réalise un
débats, et a conquis l’intérêt de nombreux architectes, dont
imposant vaisseau de tôle, de fer et de verre.
Jean Nouvel, qui fasciné le monde du logement social, avec
« L’essentiel à mes yeux est d’agir sur la nature du logement, afin
son projet Nemausus, véritable prouesse pour un renouveau de
que les gens aient envie de vivre là où ils sont ; en leur offrant de
la façon de penser et de dessiner les espaces intérieures du
l’espace », ainsi il vise à introduire la lumière naturelle, comme
logement social. En quête d’espace et de lumière au sein de
élément primordiale pour une meilleure qualité de vie,, dans des
l’intérieur des appartements imaginés, Jean Nouvel, défi la
appartements traversant où l’air circule librement, d’une manière
réglementation stricte concernant la superficie du logement
renouvelée. 76
Il répond également à la diversité des mode de vie, à travers la mise en place de dix-sept typologies d’appartements ( simplex, duplex, et triplex entre 50 et 170 m2). A travers ces différentes typologies, Jean nouvel inventa un nouveau concept dans la configuration spatiale du logement social des années 80, à savoir : « le loft social », un type d’appartement modulable et polyvalent. Encore plus, la relation intérieure extérieure est aussi privilégiée par Jean Nouvel, à travers l’ouverture des appartements sur des terrasses privées, prolongeant d’avantage l’espace intérieur, vers un espace extérieur, en coulissant de grandes portes coulissantes.
FIGURE 37: COUPE SUR NEMAUSUS 1
Source : Pinterest
FIGURE 38 : VUE SUR LES TERRASSES PRIVÉES
Source : Pinterest 77
2.2. Cloisonnement ou non cloisonnement des espaces intérieures : Fluidité et de flexibilité intérieure, mais à quel degré ?
2.2.1. Le Loft de Jean Nouvel_ Nemausus : Partant sur le concept d’un aménagement minimum pour un
une entrée directe sur la cuisine. Cette configuration, remet en
espace maximum, Jean Nouvel dans la configuration intérieure
question la présence du Sas d’entrée dans la conception intérieure
des appartements de Nemaussus, prévoit un large espace
du logement. En effet, en l’absence de dernier, l’intimité des
intérieur ouvert, avec une hauteur de sous-plafond importante,
habitants s’efface, et l’espace de transition entre le public et le
afin de renforcer l’impression de grandeur.
privé se voit supprimé. Ainsi le hall intérieur au sein de la cellule
Cette tentative de décloisonnement de l’espace intérieur,
d’habitation, revêt une grande importance, grâce à ses
malgré ses avantages dans l’effet de grandeur et de spatialité
performances thermiques et acoustiques, contribuant à créer un
intérieure, a échoué.
filtre entre l’espace intermédiaire commun et l’espace privé.
En effet, les usagers de cet espace ont eu recours à un cloisonnement selon leur besoin, cela a engendré un coût additionné à la valeur du logement, ce qui a fait que la principale motivation de réalisé des logements à faible couts avec le maximum d’espace n’a pas été atteinte. Bien encore, le décloisonnement contredit l’usage quotidien des habitants, et efface toute articulation entre l’espace public et l’espace privé. Au-delà du précité, et comme représenter sur les plans de la figure , le décloisonnement, favorise une entrée directe sur la 78
FIGURE 39 : Plan d’un T3 Namausus 1 Source : Pinterest
FIGURE 40 : VUE INTÉRIEUR D’UN LOFT_ NEMAUSUS Source : Pinterest 79
2.2.2. Le plan Bâlois : Le cloisonnement face à une surface plus importante des espaces de vie : Le plan Bâlois, se présente comme étant une typologie pensée par les architectes de Bâle. Dessinant, des appartements traversant et minces, dont la distribution intérieure se fait pas l’intermédiaire d’un important couloir, favorisant une homogénéité de la taille des pièces . Sur cette configuration du plan Bâlois, on remarque une augmentation des superficies des pièces, face à un espace de distribution minimisé. Par ailleurs, cette configuration met en question la répartition Jour/ Nuit, en plaçant, les chambres dès l’entrée de l’appartement. En effet, les architectes adhérant à ce type de configuration, insistent sur l’importance de la polyvalence des pièces, grâce à une distribution par un couloir assurant une délimitation de chaque pièce sans pour autant les hiérarchiser.
FIGURE 41 ET 42: Plan Bâlois de différents appartements Source : Après le Team X, les expérimentations sur l’habitat : entre recherches formelles et recherche du sens. Jean-Michel Léger
80
2.3. Répartition Jour / Nuit : A prendre comme base ou à requestionner ?
Répartition classique des années 50, la configuration Jour / Nuit, séparant les chambres de l’espace de vie jour de l’appartement, souvent mis à proximité de l’entrée d’habitation, est toujours très utilisée dans la conception des logements sociaux partout dans le Monde. Par ailleurs, plusieurs sont ceux qui s’intéressent à déroger de cette habitude devenu une base de conception intérieure. En effet, de nouvelles manières de disposer les espaces à l’intérieur du logement ont vu le jour.
Ainsi Edouard François, requestionne cette configuration tant FIGURE 42 : Plan Bâlois de différents appartements
utilisée, par une nouvelle façon de planifier l’espace intérieur, dite une configuration tripartite (partie publique, privée, services). Ainsi, dans le projet de logement social d’Edouard François à Paris,Rue des Vignoles, les espaces intérieurs sont disposés autour d’un noyau central de service. Cette organisation permet en effet une souplesse intérieure, et changement des affectations des pièces selon l’orientation préférée.
81
FIGURE 43 : Plan transversal , d’un immeuble R+2 , Eden Bio Edouard Francois Source :Edouard Francois , EDEN BIO
82
2.4. La pièce en plus : Evolutivité et résilience : La pièce en plus de Bruno Rollet, est une configuration spatiale inédite, dans la conception de logements sociaux à Bordeaux. Le concept phare de ce projet, se prononce à travers son appellation : une pièce en plus. En effet, l’architecte à anticiper, le besoin d’une pièce de plus dans de futures conditions, pour des familles ne pouvant pas l’acquérir dès le début, puisqu’une pièce de plus dans la configuration intérieure d’un appartement coute encore plus cher. Dans ce sens le projet met en place des appartements liés à une pièce extérieure de plus, en cas de besoin ultérieur par l’usager.
Ce projet s’inscrit dans une tentative de réconciliation de qualité et de coût.
FIGURE 44 : VUE SUR UN DES BATIMENTS DE L’OPÉRATION EDEN BIO Source : Pinterest
FIGURE 45 : COUPE LONGITUDINALE EDEN BIO
Source : Pinterest 83
3.
Le confort thermique et ergonomique à travers la
configuration interne
de la cellule d’habitation : normes
et réglementations sanitaires
destiné à recevoir l’habitant, l’habitabilité de ce dernier, repose sur quelques normes techniques qui ne la mettent en aucun cas en valeur. En effet évoquer l’éclairement dans une conception de
Réussir un habitat, se mesure avant tout par sa capacité à
logement sans pour autant préciser une bonne orientation de ce
répondre au besoin de son utilisateur quotidien, à travers une
dernier, semble insuffisant pour élaborer une charte de conception
configuration spatiale qui répond le mieux à son mode
digne d’un habitat social décent, qui s’inscrit dans une approche
d’habiter, et qui interagit avec les conditions du milieu extérieur, pour permettre une bonne orientation et exploitation
de durabilité, principale motivation pour un aménagement sain et vivable pour ses utilisateurs.
des ressources naturelles en vue de produire une bonne qualité
Cela dit, pour assurer un confort thermique au sein d’un espace
d’espace habité.
bâti, Capter la chaleur et la redistribuer est ainsi primordial. A
Ainsi, dans un souci d’assurer le confort de l’habitant, l’habitat se doit de traiter quelques aspects qui favorise le bon
travers l’utilisation de matériau réfléchi, d’une bonne inertie thermique, cette dernière devient possible, et permet de réguler la
usage intérieur de la cellule d’habitation, à savoir : la relation
chaleur intérieure de la cellule d’habitation et de profiter aux
entre l’espace ouvert et l’espace fermé intérieur, l’exposition à
maximum des ressources d’éclairement naturel, dans un souci de
la lumière naturelle par le biais d’un ratio réfléchi de vitrage au sein des façades, la polyvalence des espaces intérieures et
contrôle des dépenses énergétiques de l’habitat. Cela implique, une réforme de réglementation, vers un guide de pratique
leur flexibilité pour s’adapter aux changements de mode de
technique, qui interagit avec le climat, et fait avec pour une
vie, la résilience des espaces de vie, etc.
architecture vernaculaire, et bioclimatique, assurant à la fois un
Au sein du cahier de charge, qui définit la réglementation liée
confort thermique, mais aussi un confort visuel, sensorielle.
au logement social au Maroc, aucune référence de la qualité de l’espace, comme générateur d’émotions n’a été mentionné. Entre ces lignes de rigidité de programmation de l’espace 84
L’habitat social, constitue une manière décente de pratiquer l’Habiter dans une ville
C
désirée, et habitable. Etudier le rapport de ce dernier à la ville, ainsi que son rôle dans le prolongement de l’espace intérieur du logement vers l’espace extérieur de ce dernier, vécu et pratiqué par tous les sens de l’Homme, représente une démarche vers l’établissement de nouvelle reformes de conception de l’habitat social et de sa réalisation.
O N C
Ainsi et afin d’assurer une habitabilité au sein de ce dernier, repenser ses espaces extérieures pour favoriser l’intégration de l’habitant, à travers la procuration
L
d’espace de promenade intermédiaire à son logement, permettant une transition douce de cet espace vert le chez soi semble indispensable. A travers un ensemble
U
d’équipements et d’espaces partagés commun l’habitat devient un outil d’insertion dans la ville et de cohésion sociale. Par ailleurs, la diversité de la configuration spatiale intérieure et sa résilience face aux changement de mode de vie, est primordiale pour le vécu interne de l’habitant. A travers un habitat évolutif, flexible, intégré à son site et connecté à sa ville, équilibrant le rapport du bâti et du non bâti,
S I O
et invitant par cela la nature et l’espace extérieur à communiquer avec l’espace intérieur de la cellule d’habitation, l’habitat social devient un vrai moteur d’insertion
N
sociale et d’appropriation du logement.
85
C
Repositionner l’homme dans son environnement, et assurer son épanouissement représente le principal enjeux de tout acte
O
architectural. Ainsi cette affirmation a accompagné ce travail de mémoire depuis ses premiers prémices jusqu’à ces
N
dernières conclusions. En effet , on s’est intéressé, dans ce mémoire, de plus prêt à la relation de l’homme et de son
C
environnement, pour ainsi analyser en détail la différence entre le logement social et l’habitat social, et leur relation
L
interactive à l’Homme dans sa pratique de la vie quotidienne. A travers l’hypothèse de l’habitabilité comme étant le pilier
U
majeur d’intégration de l’homme dans son environnement immédiat, ce travail de recherche a ainsi pu affirmer la
S I O N
définition principale de l’acte d’Habiter comme étant une qualité de vie en premier lieu, dont l’homme est sujet interactif avec son environnement, sa ville et sa demeure. Ainsi, du logement social à l’habitat social, une mutation de valeurs et une revalorisation des conditions de vie et de la qualité d’habiter s’impose, pour une meilleure intégration au sein d’une ville inclusive et durable.
G
A travers une démarche durable, qui vise à repositionner l’homme dans son environnement, et à renouer le lien de sa
E
pratique de l’espace avec ce dernier, l’habitat social devient un moteur essentiel pour un cadre de vie agréable dans des
N E R
conditions décentes. Ainsi occuper l’habitat social, se représente comme étant une qualité de vie, qui se traduit à travers nombreux paramètres,
A
facilitant l’intégration de l’habitant et la cohésion sociale dans un espace urbain partagé.
L
Habiter est en effet une pratique quotidienne dans un espace connecté à la ville, accessible, où la vie sociale est en plein
E
essor. A travers des équipements de proximité l’habitat devient un environnement de partage et de vie dynamique. Les liaisons sociales deviennent plus solides, et l’homme partage, un espace commun à tous.
86
C O
Cet espace offre de nombreuses qualités , qui agissent directement sur la perception de l’homme, et sur son ressenti. Ainsi un habitat décent offre à son habitant une multitude de parcours diversifiés, qui agissent comme des espaces transitoires
N
depuis l’espace public vers l’espace privé.
C
En effet l’habitat social, ne se résume pas uniquement à l’unité du logement privatisée, comme seule composante de ce
L
dernier, mais englobe une succession d’espaces intermédiaires qui favorise la convivialité, la rencontre et l’échange social,
U
au sein d’un espace qui offre plusieurs commodités et services. Un espace qui facilite l’intégration de l’homme dans son
S
environnement et assure son épanouissement. Cela dit, l’habitabilité de ce dernier est principalement lié à l’équilibre de
I O N
ses composantes. Ainsi le logement représente un maillon primordial parmi ces composantes, qui reflète ou non l’intégration de l’homme dans son environnement immédiat. Cela dit, le logement décent doit permettre un plaisir de pratique fonctionnelle, usuelle
G
et sensorielle, ainsi qu’un espace de prolongement de l’homme vers l’extérieur.
E
C’est ainsi que l’habitabilité est une équation sinequanone à l’intégration de l’homme et à son épanouissement dans son
N
environnement immédiat. Elle permet une qualité de vie décente dans une ville inclusive, qui met l’homme en relation avec
E R A
ses semblables et avec les différentes composantes matérielles et immatérielles qui constituent son environnement. Enfin différents paramètres agissent sur l’habitabilité et la qualité de l’habitat social produit. Afin de répondre au mieux aux
L
besoins diversifiés de ses habitants, ce dernier doit s’inscrire dans une démarche et une charte qui engloberai une multitude
E
de paramètres, s’inscrivant tous dans un développement de durabilité et de résilience. Ainsi cette charte de l’habitat social doit prendre en compte les 3 paramètres suivant :
87
C O N
1. Le rapport du logement social à la ville, qui se définit à travers les liens qu’entretient le logement en tant qu’entité urbaine dans un ensemble qu’est la ville, avec cette dernière, grâce à la mobilité et à l’accessibilité . 2. Le rapport du dedans et du dehors, qui se traduit par la relation du logement avec les différents espaces
C
intermédiaires qui occupent son environnement immédiat, assurant une qualité de vie agréable, et une transition du domaine
L
public au domaine privé jouissante et désirable.
U S I O N
3. Le vécu intérieur, qui ne qualifie d’autre que le confort intérieur de l’usager au sein de sa demeure, et de son espace habité privé, grâce à une multitude de paramètres, à savoir une bonne orientation, une ventilation naturelle, une composition spatiale optimisée et bien d’autres critères qui agissent sur la perception de l’homme et assure son bien être. Nous concluons ainsi sur ce schéma qui résume notre théorie sur l’Habitat social :
G E
1. Le logement social dans la ville
N E R A
2. Le logement social dans son environnement
L’HABITAT SOCIAL
L E 3. Le logement social dans se répartition spatiale
88
HABITABILITÉ
LOGEMENT SOCIAL
RAPPORT DU DEDANS ET DU DEHORS
RAPPORT A LA VILLE
- Assurer une diversité des espaces - Assurer une mobilité fluide - Permettre une accessibilité automobile et piétonne - Assurer une présence de moyen de transport
- Assurer une activité de proximité - Permettre une insertion urbaine - Créer un modèle architectural urbain connecté à la ville
intermédiaires à différentes ambiances Prévoir Le vide comme outil de conception architecturale et urbaine Prévoir l’implantation d’espaces verts
- Prévoir des transitions fluides entres les -
-
-
espaces publics, semi publics et privés Assurer un éclairage naturel des espaces de transitions Assurer une continuité et une liaison matérielle et immatérielle des différentes composantes de l’habitat . Prévoir une transition horizontale et verticale animée et connecté à l’environnement immédiat Développer des relations sociales de voisinage à travers des espaces de rencontres et de convivialité sociale.
- Prévoir des aire de jeux et des terrains de proximité
HABITAT SOCIAL
VECU INTERNE
- Assurer le confort intérieur de l’espace habité
- Prévoir une diversité typologique - Tenir compte de l’orientation - Prévoir un prolongement de l’espace habité vers l’extérieur
- Assurer une résilience de l’espace habité
- Répondre au mode de vie de la famille marocaine
- Assurer un équilibre entre les espaces bâtis et les espaces vides du logement
- Favoriser un éclairage naturel des espaces intérieurs ainsi qu’une ventilation naturelle
Ouvrages :
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Eleb-vidal Monique, Châtelet Anne-Marie, Mandoul Thierry. Penser l'habité: le logement en questions
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184 pages,
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Joud Christophe, MIX: Mixité typologique du
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