TROIS SIÈCLES
D'HISTOIRE ANTILLAISE MARTINIQUE ET
GUADELOUPE DE
1635 A N O S J O U R S PAR
ALFRED
MARTINEAU
et
L.-PH. M A Y
Professeur
Archiviste paléographe
au Collège de France
Docteur en droit
Orné
de dix illustrations
hors-texte
SOCIÉTÉ DE L'HISTOIRE DES COLONIES FRANÇAISES ET LIBRAIRIE LEROUX 108,
BOULEVARD SAINT-GERMAIN
1935
MANIOC.org Réseau des bibliothèques Ville de Pointe-à-Pitre
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bibliothèques
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GRAVURE EN FRONTISPICE DE L'OUVRAGE DU PÈRE DU TERTRE »
HISTOIRE GÉNÉRALE DES ISLES
DE LA
GUADELOUPE,
DE
ISLES DE L'AMÉRIQUE
LA »
SAINT-CHRISTOPHE,
MARTINIQUE
ET AUTRES
PARU A PARIS EN
1654.
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TROIS SIÈCLES
D'HISTOIRE ANTILLAISE MARTINIQUE ET DE
GUADELOUPE 1635 A NOS JOURS PAR
ALFRED MARTINEAU
et
Professeur au Collège de France
L.-PH. MAY
Archiviste paléographe Docteur en droit
PARIS
SOCIÉTÉ DE L'HISTOIRE DES COLONIES FRANÇAISES ET
LIBRAIRIE LEROUX 108,
BOULEVARD SAINT-GERMAIN
1935
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Tous droits de traduction, de reproduction et d'adaptation réservés pour tous pays, y compris la Russie. Copyright
by Société
de l'Histoire
des Colonies
Françaises,
1935,
INTRODUCTION
Les gains réalisés
au
xvi
siècle par
e
les Espagnols
grâce à leurs colonies de l ' A m é r i q u e , dont ils possédaient avec les Portugais la partie continentale ou de terre ferme, déterminèrent assez tard nombre des autres nations à courir
restées inoccupées et dans les mers les
chances
d'opérations
d'aventuriers
dans les petites
d'un
les
caractère
Antilles
environnant particulier
confinant à la piraterie. O n arrêtait les navires espagnols
et
on
se
partageait
le
butin.
Ces
opérations
étaient en général lucratives. O n acquit ainsi avec le t e m p s une connaissance exacte de toutes ces îles et l'on se rendit compte que si elles s'abritaient derrière un rideau de verdure prometteur de richesses, ces richesses n'étaient
gardées que par une population
et d'apparence dans
le pays
inoffensive. puisque
les
clairsemée
Pourquoi ne pas Espagnols
s'établir
avaient
négligé
d'en prendre possession ? L'idée en vint simultanément a u x Français et a u x Anglais au début du
XVII
e
siècle
et, sans formuler encore un programme de colonisation auquel personne ne songeait, Richelieu, grand maître
INTRODUCTION
8
de la navigation en France, donna, en 1 6 3 5 , licence à
deux
petits
seigneurs
normands,
d'Esnambuc
et
Roissey, de tenter la fortune pour leur c o m p t e , sauf à leur accorder ensuite un appui plus efficace, si les circonstances
l'exigeaient.
Nulle
idée
humanitaire
religieuse ; ce sont là formules
imaginées après
pour
que
persuader
aux
peuples
leurs
ou
coup
dirigeants
n'obéissent jamais q u ' a u x inspirations les plus nobles et les plus désintéressées. Lisons plutôt ce qu'écrivait le P . Dutertre, le grand historien des Antilles, trente ans après l'occupation de la Martinique et de la Guadeloupe : « Ce n'est pas d'aujourd'hui que l'or et l'argent ont fait de fortes impressions sur l'esprit des h o m m e s et que le désir de posséder des richesses leur a fait mépriser les plus grands dangers et entreprendre les choses les plus
difficiles.
Quelque
violente
pourtant
qu'ait
été
cette passion, il faut avouer qu'elle n'a jamais agi si puissamment que
depuis
découvert
sur le cœur des habitants 1493,
auquel
l'Amérique,
Christophe
les richesses
nouveau monde animèrent
de
l'Europe
Colomb
immenses
toutes les nations
ayant de
ce
à leur
conquête et il n'y en eut pas une qui ne voulut partager avec les Espagnols un butin si riche et si précieux ». Ce sont les premières lignes de son ouvrage, les seules, il est vrai, qui contiennent une morale ou, si l'on préfère, une explication raisonnée de la colonisation
et
il n'est nullement indifférent que ces lignes aient été écrites en 1667 plutôt qu'en 1935 et qu'elles aient été écrites par un missionnaire. E n leur brutale loyauté, elles
fixent
les bases réelles
de la
colonisation
colonisation est d'abord affaire de commerce.
: la
9
INTRODUCTION
Les
conditions
d'établissement
ont
varié
dans
la
suite et elles ont varié tout à la fois suivant les climats et suivant le caractère, le nombre et la force
des p o p u -
lations avec lesquelles les Européens se sont trouvé en contact. A u x Antilles, où la température est rarement excessive, ot où le sol est fertile et riche, les Européens ont p u assez aisément s'établir et y prospérer, et ils auraient pu y développer leur race à peu près
dans
les mêmes
si le
conditions
que dans la mère-patrie,
travail, sous un climat
quand
même
un peu chaud,
humide et amollissant, n'avait dû, pour être productif, être exécuté par des h o m m e s plus habitués à peiner et à vivre sous un ciel aussi ardent. La race du p a y s , les Caraïbes, se refusant à tout effort, on fit venir d'Afrique des esclaves qui, en très peu de t e m p s , donnèrent a u x îles assez de bras pour leur procurer une très grande prospérité. Mais alors un nouveau problème se posa. L'instinct de la Nature, l'éternelle Venus Genitrix des t e m p s anciens et modernes, fit naître une race nouvelle, celle des sang-mêlés
ou mulâtres, qui, bénéficiant
général de l'affranchissement,
commença
en
à créer des
intérêts n o u v e a u x et ceux-ci devinrent bientôt
assez
forts pour que, par nécessité autant que par justice, on dut composer avec eux. Cependant la situation des sang-mêlés resta longtemps délicate et pénible,
entre
deux races différentes, la noire et la blanche, car ils demandaient
l'égalité
avec
l'une
et
la
repoussaient
avec l'autre. Cet antagonisme dura plus de cent cinquante ans, créant chaque jour entre les divers occupants de l'île un fossé de plus en plus profond. Toutefois
le
nombre
des noirs était devenu si considérable que ni blancs ni
INTRODUCTION
10
mulâtres ne pouvaient leur opposer pour toujours une résistance insurmontable.
Dès l'année
1763,
après la
violente secousse des guerres entre la France et l ' A n g l e terre, qui nous avaient fait perdre le Canada et avaient mis nos autres colonies d'Amérique en danger, le gouvernement royal de France comprit la nécessité d ' a d a p ter les conditions des divers occupants antillais aux nécessités nouvelles d'une y avait autant moyens
était
de notre
sol
époque où il
de justice que d'utopie.
L'étude
préparée en dehors de toute
sentimentale lorsqu'éclata la Révolution
des
publicité
qui, voulant
tout réformer, brouilla en fait toutes les réformes et les ajourna. L'abolition de l'esclavage, trop
brusquement
décrétée, nous fit perdre Saint-Domingue et nous eut fait perdre aussi la Martinique et la Guadeloupe,
si
ces îles avaient été plus étendues et plus peuplées. A v a n t d'engager davantage l'avenir, il parut plus sage d ' a t tendre
qu'un
état
de choses
normal
fut
rétabli
en
France. Ce fut alors la continuation du passé, c'est-à-dire la reprise de l'évolution régulière des différentes races de no6 colonies.
Il fallut pourtant encore trente
pour que cette évolution s'accomplît.
années
Elle fut, c o m m e
on le sait, activée par la déclaration de l'abolition de l'esclavage en pays anglais, en 1 8 3 3 ; mais depuis dix ans déjà, elle était préparée en France manifestations
parlementaires
par
diverses
et par quelques
qui avaient eu un certain retentissement.
Enfin
écrits vint
l'acte libérateur de 1848, qui est moins encore la fin d'un système économique basé sur de6 traditions séculaires que l'origine d'une autre civilisation et peut-être la création d'un peuple entièrement n o u v e a u .
11
INTRODUCTION
Placés désormais sur un pied d'égalité politique sociale absolue, trop peu n o m b r e u x pour former nation des
indépendante,
querelles
vis-à-vis
locales
de la
trop qui
Métropole,
avisés
pour
affaibliraient les
se perdre leur
Antillais sont
et
une en
autorité appelés
de plus en plus à fusionner leur sang, leurs intérêts et leurs aspirations, et, le t e m p s et le soleil aidant, à former peu à peu une race unique de demi-teinte, où le blanc et le noir seront harmonieusement confondus : il sortira de cette union un t y p e nouveau, déjà très sensible, où tous les atavismes anciens de l'Europe et de l'Afrique se trouveront
réconciliés.
LES ORIGINES ET
SAINT-CHRISTOPHE
SAINT-CHRISTOPHE
A y a n t obtenu congé du roi pour chasser les pirates qui empêchaient les marins français de naviguer au delà du
tropique
Açores,
du
Cancer et
Esnambuc
et
du premier
Roissey,
méridien
gentilshommes
des nor-
m a n d s , arrivent à Saint-Christophe en 1 6 2 5 , y trouvent des Anglais déjà installés et s'entendent avec eux pour le partage de l'île : les Anglais gardant le centre et les Français l'ouest.
occupant
les deux
Esnambuc
revient
extrémités,
à l'est
en
dès
France
et à
l'année
suivante pour chercher des capitaux et fonde pour une durée de trois ans une compagnie qui reçut
le n o m de
Saint-Christophe, avec obligation de transporter chaque année dans cette île un certain nombre d'engagés. Cette compagnie, dont la durée fut prorogée, subsista des
fortunes
diverses
jusqu'à
l'année
1635 ;
avec
elle
se
transforma alors en une société à but plus étendu, qui s'engagea à faire passer en vingt ans 4 . 0 0 0 colons a u x îles
d'Amérique
(12 février) ;
d'où
le n o m
nouveau
donné à la Compagnie. U n de ses premiers soins fut d'occuper la Martinique et la Guadeloupe, qui devinrent la m ê m e année colonies françaises,
et furent rattachées au gouvernement géné-
16
SAINT-CHRISTOPHE
tal de Saint-Christophe. Mais elles jouirent en fait dès leur origine d'une très large autonomie et prirent tout de suite un grand développement, pendant que SaintChristophe d'une étendue plus restreinte et resserrée encore par le voisinage des Anglais, v o y a i t son activité propre assez limitée. année,
laissant
Esnambuc
parmi
la
mourut
population
cette m ê m e
européenne
et
caraïbe de très vifs regrets. Le roi lui donna c o m m e successeur Philippe de Longvilliers de Poincy,
chevalier de Malte,
alors âgé de
54 ans. Poincy fut un gouverneur entreprenant,
mais
absolu, très personnel et qui eut maille à partir avec le gouverneur de la Guadeloupe et m ê m e avec ses propres administrés. Aussi la durée de ses pouvoirs étant expirée, la Compagnie et le roi songèrent-ils à le remplacer. On lui désigna c o m m e successeur le marquis de T h o i s y , mais
Poincy
refusa
de
le
laisser
débarquer
dans
l'île et garda l'autorité. D e v a n t ce refus d'obéissance, la Compagnie, soucieuse de ne pas pousser les choses à l'extrême, envisagea la cession des îles à leurs gouverneurs respectifs et, en 1 6 5 1 , elle vendit Saint-Christophe à l'Ordre de Malte. L'Ordre l'exploita pendant treize ans sous l'autorité royale, plus nominale qu'effective, comme
gouverneur.
remplacé
Celui-ci
et conserva Poincy
mourut
en 1 6 6 0 , et
par le commandeur de Sales, de la
de Saint François de Sales.
fut
famille
La colonie comptait alors
de 7 à 8.000 colons européens. L'Ordre de Malte, c o m m e les gouverneurs de la Martinique et de la Guadeloupe, table
propriétaire
de
l'île
était en réalité le vérisans
pour les colons qu'il pouvait
garantie
suffisante
impunément
exploiter ;
CARTE
GÉNÉRALE
DES A N T I L L E S
dressée aux environs de
1650
(Cabinet des Estampes, Collection Lallemant de Betz, Recueil Vx 8, p. 149).
1493-1625
17
le roi prit le parti de racheter a u x uns et a u x autres leurs droits à la possession du sol et à l'administration du pays
et, en 1 6 6 4 , il constitua la Compagnie des
Indes occidentales, plus étroitement rattachée à l ' E t a t . Les guerres qui commencèrent peu de t e m p s après entre la France et l'Angleterre eurent leur répercussion aux
Antilles
t o m b a deux
et n o t a m m e n t
à
Saint-Christophe qui
fois au pouvoir des Anglais
mais
nous
fut restituée à la paix. E n l'une de ces expéditions, celle de 1 6 9 0 , toute la population
française fut déportée,
de telle sorte que l'île était pour ainsi dire sans valeur pour nous au m o m e n t de sa restitution en 1 6 9 7 . D é p o u r v u e de tout m o y e n de défense, la colonie était une proie facile pour une nouvelle attaque et celle-ci se produisit le 16 juillet 1 7 0 2 . Le traité d'Utrecht consacra la perte définitive de cette première de nos possessions antillaises, dont la très faible étendue (la superficie totale de l'île est de 6 8 milles carrés ou 1 7 6 kilomètres carrés) limita dès le premier jour nos moyens
d'action. Les
Anglais, qui depuis ce t e m p s n'ont cessé d e la posséder, la n o m m e n t S a i n t - K i t t ' s .
LES
ORIGINES.
1493, 3-4 novembre. — Christophe C o l o m b , au cours de son second v o y a g e , d é c o u v r e Marie-Galante et la G u a d e l o u p e , n o m m é e alors Karukéra. 1502,
15 juin. —
Descente d e Christophe C o l o m b
à la
Martinique. XVI siècle. — P e n d a n t ce siècle, les Espagnols n ' a t t a c h a n t e
d'importance ANTILLES
qu'aux
pays
d e terre ferme
de
l'Amé2
SAINT-CHRISTOPHE
18
rique
négligent les petites Antilles, où ils a b a n d o n n e n t
parfois des matelots indisciplinés qui ne laissent après eux aucune trace. Ces îles sont alors entièrement peuplées de Caraïbes, apparentés à des peuples similaires h a b i t a n t le continent entre l'Orénoque et l ' A m a z o n e . 1522.
—
Juan
P o n c e de L é o n , g o u v e r n e u r espagnol d e
Porto R i c o , tente de coloniser la G u a d e l o u p e , afin de détruire le nid de pillards constitué par les Caraïbes qui y étaient retranchés. Il échoue. 1570. — Le Gouverneur de Haïti, l'amiral Diego C o l o m b , fils de Christophe, autorise A n t o n i o Serrano à peupler Karukéra et ses dépendances, savoir la Martinique, la D o m i n i q u e , la Désirade, A n t i g o a , Montserrat et la B a r b a d e . Cinq ans plus tard Serrano tente d'exécuter s o n p r o j e t ; il échoue également. 1595, 18 octobre. — Drake atterrit, a u cours de son second v o y a g e autour d u m o n d e , sur une plage de la G u a d e l o u p e , qui sera plus tard Basse T e r r e . 1603-1604. — L e g o u v e r n e m e n t espagnol envoie en 4603 à la Guadeloupe six dominicains
en v u e d e c o n v e r t i r
les indigènes ; ils sont massacrés. L ' a n n é e s u i v a n t e , des missionnaires qui se rendaient en Chine d é b a r q u e n t et t o m b e n t à leur tour victimes des indigènes.
Fin du XVI siècle et débuts du XVII siècle. — Les corsaires e
e
d ' E u r o p e c o m m e n c e n t à inquiéter les navires espagnols naviguant dans les mers des Antilles, et se saisissent p a r fois de leurs équipages a v e c des nègres amenés d ' A f r i q u e , qui formeront le premier p e u p l e m e n t noir d e c e t archipel. L e succès d e ces entreprises, d o n t il est impossible d e déterminer l ' i m p o r t a n c e , décide quelques Français à tenter un établissement durable en ces îles, où ne résident encore que de très rares Européens.
1625-1713
19
1612, 8 octobre. — L e roi crée la fonction p u r e m e n t h o n o rifique
d e vice-roi
dura j u s q u ' a u
de l'Amérique.
Cette
27 septembre 1 7 3 7 , f u t
fonction
qui
successivement
tenue p a r le c o m t e d e Soissons, (1612), le prince de Condé (1612-1620), le maréchal d u c d e M o n t m o r e n c y (1620-1625), le d u c d e V e n t a d o u r (1625-1644), le d u c d ' A n v i l l e (16441660), le marquis d e Feuquières (1660-1663), le c o m t e d'Estrades
(1663-1687), le vice-amiral
d'Estrées
(1687-
1707), le d u c d'Estrées (1707-1737). L a charge f u t alors supprimée. 1625.
Création de la Compagnie
au capital
du Morbihan,
de 1.600.000 livres. Elle est p o u r v u e d u m o n o p o l e d u c o m m e r c e a v e c la N o u v e l l e - F r a n c e , les Iles d ' A m é r i q u e , la M o s c o v i e , la N o r v è g e , la Suède, et H a m b o u r g .
Elle
échoue dès le d é b u t .
LA
COMPAGNIE
DE SAINT-CHRISTOPHE
1625-1635 1625-1626. Pierre Belain d ' E s n a m b u c , né à Allouville (SeineInférieure), le 9 mars 1 5 8 5 , part de D i e p p e en d é c e m b r e 1625 a v e c Urbain d u R o i s s e y , seigneur de Chardonville et 35 à 4 0 h o m m e s et arrive à Saint-Christophe, à la suite d ' u n c o m b a t a v e c u n galion espagnol. Il y t r o u v e déjà installés quelques Français et u n certain n o m b r e
d'An-
glais, sous les ordres d ' u n n o m m é W a r n e r . Unissant leurs efforts, ils d é j o u e n t
une
conspiration
ourdie
p a r les
indigènes et en t u e n t une centaine. Ils repoussent égalem e n t a v e c succès une attaque de 3 à 4.000
indigènes
v e n a n t des îles voisines e t , v i c t o r i e u x , ils envisagent le partage d e l'île. 1626, octobre. —
Lettres
patentes d o n n a n t
à
Richelieu
le titre d e « g r a n d - m a î t r e , chef et surintendant général de la navigation et d u c o m m e r c e en France ».
SAINT-CHRISTOPHE
20
1626, septembre-octobre. — R e t o u r d ' E s n a m b u c en France (septembre). Soutenu par Richelieu, il fonde a v e c 12 autres associés une société au capital de 45.000 livres ; Richelieu s'inscrit pour 10.000 livres (31 o c t o b r e ) . Cette c o m p a g n i e , qui a reçu le n o m d e Compagnie de Saint-Christophe, devait en principe avoir une durée de 3 ans et « laisser aux îles de Saint-Christophe, la Barbade et autres situées à l'entrée d u Pérou, le n o m b r e et la quantité de c e u x que b o n leur semblera pour y travailler et négocier des d e n rées qu'ils porteront aux habitants des dites îles, faire instruire sur la religion catholique, cultiver et améliorer la terre pour faire d u p e t u n (tabac)
et toutes
autres
sortes de marchandises, continuer et mettre en perfection les habitations c o m m e n c é e s ». 1627.
Quatre vaisseaux p o r t a n t
532 h o m m e s partent d u
Hâvre pour Saint-Christophe a v e c d ' E s n a m b u c et Roissey (24 février 1627). — Ils arrivent le 8 mai à la Pointe
de
Sable, après avoir perdu la majeure partie de leur m o n d e . Le capitaine W a r n e r a y a n t o b t e n u de son g o u v e r n e m e n t une concession analogue, s'était déjà installé à la Grande R a d e avec 400 h o m m e s . L e partage de l'île se fait entre les trois capitaines le 13 m a i . — Les maladies d é c i m e n t les colons d o n t la situation devient b i e n t ô t critique. 1627-1628. D u Roissey v a chercher d u secours en France. Ce renfort, qui fut de 150 h o m m e s , partit en février 1628 et arriva à Saint-Christophe à la Pentecôte dans le plus lamentable
état.
De 500 h o m m e s qu'elle aurait d û avoir, la colonie f u t réduite à 200. Profitant d e notre petit n o m b r e , les Anglais d é b o r d e n t insensiblement sur notre frontière. prend le parti d'aller lui-même
Esnambuc
en France exposer la
situation. En son absence un navire hollandais ravitaille opportunément navire,
français
notre
colonie.
celui-là,
Le
exténué
convoi par les
d'un
autre
privations,
1625-1713
21
périt au b o r d de la mer, d é v o r é presque v i v a n t par les crabes, q u ' o n n ' a v a i t plus la force d'écarter. 1628.
L'administration des Colonies est rattachée au d é p a r -
t e m e n t des Affaires Etrangères, d o n t le chef est Bouthilier. 1629, janvier. — O r d o n n a n c e , c o n n u e sous le n o m de Code Michaut, rendue sur les plaintes des Etats assemblés à Paris en 1614 et des Notables assemblés à R o u e n en 1617 et à
Paris en 1626. Les articles 430 et suivants c o n -
cernent la marine et constituent à partir de l'article 442 un véritable A c t e de N a v i g a t i o n en faveur des nouvelles Compagnies
de
commerce
dont
Richelieu
exhorte
les
Français à multiplier le n o m b r e . Les gentilshommes ne dérogeront pas en s ' e m p l o y a n t 1629.
au c o m m e r c e
de
mer.
Richelieu envoie 10 navires c o m m a n d é s par M. de
Cahuzac
(ou Cusac)
p o u r secourir Saint-Christophe
et
ramener les Anglais dans leurs limites. Partie de France le 5 juin 1629, l'escadre, ramenant d ' E s n a m b u c , arrive à Saint-Christophe le 27 juillet ; elle défait en rade, en un c o m b a t qui dura 3 heures, une escadre anglaise, et Cahuzac impose a u x Anglais l'obligation de rentrer dans leurs limites (5 a o û t ) . Ce résultat atteint, il m e t à la voile pour S a i n t - E u s t a c h e , qui n'est q u ' à trois lieues de là (11 septembre) et v a ensuite chercher fortune dans le golfe d u M e x i q u e . L e 17 s e p t e m b r e , une flotte espagnole c o m p o s é e
de
35 gros galions et de 14 navires marchands armés en guerre, et c o m m a n d é e par d o m Federico de Tolède paraît devant
Saint-Christophe.
Les
Français
et les
Anglais
s'unissent pour la résistance, mais celle-ci est mal organisée et tandis que les Anglais s'entendent a v e c les E s p a gnols pour les rapatrier en Angleterre, les 400 Français de l'île s'embarquent sur les d e u x navires qui leur restent et s'éparpillent à Saint-Martin, A n t i g o a ,
Saint-Barthé-
SAINT-CHRISTOPHE
22
l e m y et Montserrat. D u Roissey, d o n t la négligence avait p r o v o q u é notre perte, s'embarque sur l'un d e ces navires et rentre en France, où il est mis à la Bastille. Mal accueillis à Montserrat p a r les indigènes, les F r a n çais sont ramenés moins de trois mois après à SaintChristophe par le capitaine Giron e t , malgré la résistance des Anglais, qui n'avaient pas quitté l'île, ils parviennent à s'y réinstaller, au n o m b r e d e 3 5 0 . 1629, 17 novembre. — Déclaration p o r t a n t qu'il sera p a y é un droit d e 30 s. sur chaque livre d e t a b a c a p p o r t é des pays étrangers, excepté p o u r celui v e n a n t des îles SaintChristophe, la Barbade la Compagnie
de
et autres qui appartiennent à
Saint-Christophe.
1630 (vers). Les colons a y a n t renoncé à t o u t e culture p o u r faire uniquement
d u t a b a c , s o n t menacés
de f a m i n e .
L'île est secourue par un navire de Zélande qui l ' a p p r o v i sionne
des choses
les plus
nécessaires.
Le
commerce
hollandais se consolide au détriment de celui de la F r a n c e , qui est réduit pour ainsi dire à n é a n t . 1632. D ' E s n a m b u c règle les rapports des maîtres et d e leurs engagés européens : la durée des engagements est fixée à trois ans. L e n o m b r e des Français est alors d e 360 contre 6.000 dans la partie anglaise,
où la durée des
engagements était de 6 à 7 ans. 1634, 25 novembre. — L e roi défend a u x colons de faire le moindre c o m m e r c e avec les étrangers. Les colons r é p o n d e n t par la décision d e ne plus rien e n v o y e r en France e t d e vendre tous leurs produits à la H o l l a n d e . C o m m e riposte, on envisage en France la transformation de la Société. 1635. Les Anglais continuant à empiéter sur le territoire français, d ' E s n a m b u c règle définitivement la question de frontière par un arrangement a v e c le gouverneur anglais, c o m m u n é m e n t appelé le règlement
du
figuier.
1625-1713
23
— O r d o n n a n c e — inobservée — i m p o s a n t a u x colons l'alternative entre la culture d u t a b a c et celle d u c o t o n , et l i m i t a n t à 7 o u 800 livres pesant la p r o d u c t i o n d e c h a q u e habitant. —
U n e dizaine d'associés, d o n t plusieurs a p p a r t e n a n t
à la C o m p a g n i e d e Saint-Christophe, obtiennent d u roi une réforme de cette C o m p a g n i e , qui d e v i e n t la
Compagnie
des Iles de l'Amérique, a v e c p o u v o i r d'étendre ses o p é r a tions entre le 10° et le 3 0 ° de latitude n o r d , et obligation de faire passer a u x Iles 4.000 personnes en 20 ans. Réunis une première fois le 31 j a n v i e r 1635, ces associés rédigent le 12 février les conditions d e leur association, qui c o m prend 16 articles. Ils n o m m e n t quatre directeurs. A la suite d e c e t a c t e , un grand n o m b r e d e colons e t trois pères capucins passent à Saint-Christophe. — Des nègres pris sur les Espagnols sont v e n d u s p o u r la première fois dans cette î l e .
LA
COMPAGNIE
DES ILES
D'AMÉRIQUE
1635-1651 14 février. — U n lieutenant de Belain d ' E s n a m b u c ,
1635,
Liénart de l ' O l i v e , et un g e n t i l h o m m e n o r m a n d , Duplessis, signent a v e c la C o m p a g n i e un c o n t r a t p a r lequel celle-ci leur d o n n e p o u r d i x ans le c o m m a n d e m e n t des îles qu'ils coloniseront. —
(Voir G u a d e l o u p e
17 novembre. —
et Martinique).
E s n a m b u c prend possession de la
D o m i n i q u e , e t en d o n n e le c o m m a n d e m e n t a u sieur d e la
Vallée.
L'occupation
de
l'île
est presque
aussitôt
abandonnée. Fin 1636. M o r t de d ' E s n a m b u c . Il sera r e m p l a c é p a r P o i n c y . 1638, 13 septembre. — P o i n c y , encore en F r a n c e , y forme une association p o u r le c o m m e r c e des Iles d ' A m é r i q u e
avec
24
SAINT-CHRISTOPHE
un sieur Rigault, armateur, et u n n o m m é
Desmartins,
banquier à Paris. — Cette association donnera lieu en 1646 à un procès qui n'était pas encore terminé en 1676. 1639. P o i n c y part de France le 12 janvier, arrive le 11 février à la Martinique, le 17 à la G u a d e l o u p e , et regagne presque aussitôt Saint-Christophe. — 26 mai. — L a culture d u t a b a c s'étant d é v e l o p p é e outre mesure et les prix de v e n t e n'étant plus rémunérateurs, les gouverneurs anglais et français s'entendent p o u r suspendre les cultures de cette plante p e n d a n t 18 mois. —
L ' O l i v e , gouverneur de la G u a d e l o u p e , refuse de se
prêter à cet a c c o m m o d e m e n t et vient à Saint-Christophe, pour obtenir q u e l'interdiction
ne s'applique
pas à la
Guadeloupe ; il n ' y réussit pas. — 11 août. — De graves contestations surgissent entre les Français et les Anglais à p r o p o s des salines et des mines d u pays (avril ou m a i ) . D ' u n c o m m u n a c c o r d , les deux gouverneurs décident de soumettre le litige à leurs Cours respectives. 1640. P o i n c y assure le ravitaillement
d e Saint-Christophe
par des accords passés a v e c des marchands d e Flessingue. — mars. — P o i n c y intervient
dans les affaires de la
Guadeloupe. (Voir Guadeloupe). 1641. Sabouilly, capitaine au service de P o i n c y ,
réprime
un m o u v e m e n t séditieux p r o v o q u é p a r un n o m m é Clément
Bugaud ; celui-ci
peut
échapper
a u x poursuites
dirigées contre lui ; le P. Dutertre attribue à sa fuite la première colonisation de Cayenne. — août. — P o i n c y fait prendre possession de l'île de la T o r t u e , où s'étaient retranchés corsaires et flibustiers. 1644. Introduction de la culture de la canne à sucre.
25
1625-1713
1644-1645. P o i n c y propose à la C o m p a g n i e d e ne pas lui accorder le r e n o u v e l l e m e n t d e son m a n d a t , à c o n d i t i o n qu'il lui soit permis de rester à Saint-Christophe j u s q u ' à ce qu'il se soit acquitté d e ses dettes (7 avril). A la suite de cette offre, Noël Patrocles de T h o i s y est n o m m é gouverneur général p a r la C o m p a g n i e le 26 d é c e m bre et par le roi le 20 février 1645, « a v e c p o u v o i r de présider a u x sièges de justice de Saint-Christophe ».
Le même
j o u r (20 février), P o i n c y est invité à rentrer en France et son n e v e u , Longvilliers, qui est à la R o c h e l l e , prêt à s ' e m b a r q u e r , d o i t lui remettre c e t ordre en mains propres. 1645, juillet. — P o i n c y se préparant à la révolte contre les ordres
du
r o i , expulse
l'intendant
général
Leumont,
n o m m é en 1 6 4 2 , lequel se retire à la G u a d e l o u p e ; il se débarrasse ensuite de ses adversaires les plus gênants en les r e n v o y a n t en F r a n c e . — Il y avait à Sainte-Croix 100 à 120 Français, déserteurs d e Saint-Christophe. Sainte-Croix étant alors p a r tagé entre les Anglais
et les Hollandais, et des rixes
s'étant élevées au cours desquelles les d e u x
gouverneurs
furent assassinés, les Français craignent d'être les victimes de leur rivalité et se font transporter par un certain capitaine
à la G u a d e l o u p e
Paul, qu'ils accusent
ensuite
d'être un forban et font c o n d a m n e r c o m m e tel (16 a o û t 1645). — août. —
P a r une nouvelle
lettre
roi réitère à P o i n c y l'ordre de quitter
d e c a c h e t , le
Saint-Christophe
(18 août) et Longvilliers, qui vient de s'embarquer p o u r les îles, est confirmé dans les fonctions de gouverneur d e Saint-Christophe (22 a o û t ) . — 1
e r
septembre. — C o m m a n d e m e n t fait en l'Assemblée
des Seigneurs à Paris, à M . R o b e r t de Longvilliers, g o u verneur à Saint-Christophe, de faire recevoir M . d e T h o i s y
SAINT-CHRISTOPHE
26
c o m m e lieutenant général p o u r le roi a u x îles d ' A m é r i q u e . — L a Compagnie autorise M. de L e u m o n t à prendre à sa charge une partie des dettes de P o i n c y vis-à-vis des Hollandais, mais celui-ci est déjà en pleine révolte contre les ordres venus de France ; il venait d'expulser L e u m o n t . —
septembre-novembre.
—
Thoisy
s'embarque
au
Hâvre le 16 s e p t e m b r e , arrive à la Martinique le 16 n o v e m b r e , à la Guadeloupe Christophe.
Poincy
le 19 et le 23 d e v a n t
et le gouverneur
anglais
Saint-
refusent
tous deux de le reconnaître. T h o i s y revient le 28 n o v e m b r e à la Guadeloupe et s'y installe. 1646.
Les Anglais chassent les Hollandais d e Sainte-Croix.
— Thoisy, d ' a c c o r d a v e c D u P a r q u e t , gouverneur d e la Martinique, dirige une expédition contre P o i n c y (janvier). D e u x n e v e u x d e P o i n c y sont faits prisonniers, mais D u Parquet lui-même t o m b e au p o u v o i r d u gouverneur. H o u e l , gouverneur de la G u a d e l o u p e ,
v e n u à son t o u r
dès le 28 janvier a v e c une nouvelle e x p é d i t i o n , ne p e u t m ê m e débarquer et retourne à la G u a d e l o u p e le 3 février. Resté maître de la situation, P o i n c y chasse de l'île les Capucins qui prêchaient l'obéissance a u x ordres d u roi et ordonne o u laisse a c c o m p l i r des représailles,
allant
quelquefois j u s q u ' à la m o r t , contre ceux qui voulaient s'y soumettre. — 16-28 octobre. — L e roi d o n n e l'ordre à P o i n c y e t à T h o i s y (16 et 28 octobre) d e faire l'échange des p r i sonniers, amnistiant ainsi en fait la révolte d e P o i n c y , d o n t il n'a p u ou n ' a pas v o u l u briser la résistance, celle-ci a y a n t été dirigée moins contre le roi q u e contre la C o m p a gnie d o n t P o i n c y signalait et c o m b a t t a i t les e x a c t i o n s . 1647, janvier-mai. — P o i n c y envoie à la Martinique d e L a Vernade avec 5 bateaux et 800 h o m m e s p o u r s'emparer
1625-1713
27
de T h o i s y . T h o i s y , livré par les habitants de l'île, est e m m e n é à Saint-Christophe (24 j a n v i e r ) . E n passant à la G u a d e l o u p e , L a V e r n a d e e m b a r q u e Longvilliers, l'un des
neveux
de
Poincy,
contre
promesse
de
mise
en
liberté de D u P a r q u e t . L'autre n e v e u , T r é v a l , reste c o m m e otage. Arrivé à Saint-Christophe, T h o i s y est retenu prisonnier. D e v a n t les témoignages de s y m p a t h i e de la p o p u l a t i o n p o u r sa p e r s o n n e , P o i n c y le fait e m b a r q u e r n u i t a m m e n t p o u r France (fin avril) où il arrive le 17 m a i . Il en résulta un procès où P o i n c y fut c o n d a m n é à p a y e r à
Thoisy
90.000 livres. Ce p r o c è s , qui durait encore en 1671, p o r t a le plus grand préjudice au crédit moral de la C o m p a g n i e . D u P a r q u e t fut remis en liberté le 6 février. — 25
février. —
Dans
l'ignorance
des
événements
qui s'accomplissaient aux Antilles, le roi rend un arrêt m a i n t e n a n t P o i n c y p o u r un an c o m m e lieutenant général d e Saint-Christophe seulement et n o m m a n t T h o i s y lieut e n a n t général de la Martinique et de la
Guadeloupe,
a v e c résidence à la G u a d e l o u p e . L a durée d u g o u v e r n e m e n t de P o i n c y terminée, T h o i s y redeviendrait nant général p o u r toutes les îles. —
lieute-
L a c o m p a g n i e des
Seigneurs des îles d ' A m é r i q u e confirme ces dispositions le 26 mars. — Les directeurs de la C o m p a g n i e
ayant
demandé,
au mois de février 1646, q u ' o n informât sur les violences et exactions de P o i n c y , et P o i n c y réclamant de son c ô t é le r e m b o u r s e m e n t
de frais
qu'il
avait faits dans
l'île
et qu'il évaluait à 150.000 francs, on a b o u t i t à un premier a c c o r d , le 26 a o û t 1647, en v e r t u duquel Saint-Christophe est v e n d u e au frère de P o i n c y , p o u r le prix de 90.000 livres. Cet accord est a p p r o u v é par les Associés le 6 d é c e m b r e ; mais l'effet en resta suspendu, en raison de divers procès engagés entre P o i n c y d'une part et ses associés en F r a n c e ,
28
SAINT-CHRISTOPHE
Rigault et Desmarets, de l'autre. L a cession ne d e v i n t effective que le 24 mai 1651. — P o i n c y se débarrasse de 66 colons qui lui étaient suspects en les e n v o y a n t coloniser les Iles Vierges. Ceux-ci repoussent une attaque des
Espagnols
de
Porto-Rico,
mais ayant perdu dans cette guerre toutes leurs e m b a r cations et leurs plantations a y a n t été ravagées, ils se trouvent c o m m e prisonniers dans leurs îles sans aucune ressource et condamnés à une m o r t certaine. De désespoir, onze d'entre eux confectionnent d e u x piperis,
sorte de
radeaux, et parviennent à gagner P o r t o - R i c o ; les autres moururent p r o b a b l e m e n t de Les
1648.
Espagnols
ayant
faim.
abandonné
Saint-Martin,
le
gouverneur hollandais de Saint-Eustache et P o i n c y d o n nent presque simultanément c o m m i s s i o n , l'un à Martin T h o m a s , et l'autre à son n e v e u , Longvilliers, d ' y leurs nationaux.
Poincy
se basait sur une
établir
occupation
antérieure de l'île par les Français en 1638. Les d e u x partis s'entendent p o u r leur partage de l'île (23 mars) et de la T o u r est n o m m é gouverneur de la partie française. — 15 mai. — Les seigneurs de la Compagnie des Iles d ' A m é r i q u e , réunis p o u r aviser aux m o y e n s de remédier à la situation de la Compagnie en détresse, d é c i d e n t de poursuivre a c t i v e m e n t le procès engagé contre
Poincy
pour son administration et de c o n v o q u e r une assemblée générale des actionnaires
pour
aviser a u x
moyens
de
c o m b l e r le déficit ; il est décidé de d e m a n d e r à chacun d ' e u x une contribution de 4.000 livres, —
qui ne
fut
d'ailleurs pas versée. On envisage d'autre part la v e n t e des îles à leurs gouverneurs : P o i n c y avait déjà fait des propositions —
pour
Saint-Christophe.
(fin). — Après avoir o c c u p é Saint-Martin,
envoie le sieur
Jacques
d ' h o m m e s pour occuper
Gente
avec
une
Saint-Barthélemy.
Poincy
quarantaine
1625-1713
29
1649-1653. Un procès particulier entre P o i n c y vient
compliquer
la
procédure
déjà
et T h o i s y
engagée
avec
la
C o m p a g n i e et qui se poursuit en 1649 et 1650 ; enfin, le 24 mai 1651, intervient un c o n t r a t en vertu d u q u e l l'Ordre de Malte acquiert p o u r le c o m p t e de P o i n c y la propriété de Saint-Christophe, m o y e n n a n t 120.000 livres tournois. A la m o r t de P o i n c y , tous ces biens
doivent
revenir à l ' O r d r e , a v e c droits sur Saint-Martin et SaintB a r t h é l e m y . La ratification de cette v e n t e qui eut lieu en mars 1653, m a r q u e
la
Compagnie
des Iles d ' A m é r i q u e , d é j à dépossédée de la
la
fin
réelle de
Martinique
et de la Guadeloupe par des cessions de m ê m e nature faites à leurs gouverneurs 1650.
respectifs.
Les Espagnols d é b a r q u e n t 1.200 h o m m e s à Sainte-
Croix, chassent les Anglais
et repoussent
ensuite
une
contre-attaque des Espagnols. Résolu à profiter des circonstances, P o i n c y envoie de Saint-Christophe Vaugalan a v e c 300 h o m m e s et chasse à son t o u r les
Espagnols.
Il introduit aussitôt 300 colons dans l'île. Trois g o u v e r neurs n o m m é s pour administrer cette île meurent successiv e m e n t en 1650 et 1651.
L'ORDRE
DE
MALTE
1651-1665 1653.
P o i n c y a y a n t cédé à l'ordre de Malte ses droits sur
Sainte-Croix, l'ordre en o b t i e n t la concession
régulière
d u roi par un acte de mars 1653. 1654.
P o i n c y possédait en propre à cette d a t e 600 à 700
esclaves, sur 12.000 qui se trouvaient dans l'ensemble de nos îles. Un esclave valait 540 livres. 1656.
L'escadre
Christophe
anglaise
dans
de
l'intention
Penn de
arrive s'en
devant
emparer,
Saintmais
si
SAINT-CHRISTOPHE
30
désemparée et si d é p o u r v u e de vivres q u e l'amiral préféra signer avec le gouverneur français un accord qui confirme tous les précédents sur le partage de l'île entre les d e u x nations. 1657. P o i n c y s'étant réservé le m o n o p o l e de t o u t c o m m e r c e , m ê m e français,
dans l'île d e Sainte-Croix, les colons n e
p o u v a n t plus subsister se saisissent dans leur île et s'y e m b a r q u e n t ,
d ' u n navire arrivé
au n o m b r e
d'environ
200, pour une destination restée inconnue et q u ' o n suppose avoir été le Brésil. — Les Caraïbes massacrent les Français d e Saint-Barthélemy et l'île est c o m p l è t e m e n t
abandonnée.
1658. D u Bois, chargé de l'administration de Sainte-Croix, applique
des mesures
plus
libérales,
et ramène
avec
quelques colons une certaine prospérité. 1659. R é o c c u p a t i o n de Saint-Barthélemy. — D e u x missionnaires dominicains arrivent à SainteCroix. 1660. Saint-Christophe c o m p t e d e 7 à 8.000 —
février. —
verneurs
français
colons.
Réunion à Saint-Christophe des g o u et anglais
des Antilles
pour
établir
en c o m m u n les bases d'une paix a v e c les Caraïbes. Houel et le gouverneur
anglais d e Montserrat sont
désignés
pour assurer l'exécution de cette p a i x , laquelle est ratifiée le 20 mars à la Guadeloupe par les Caraïbes venus de diverses îles, — sous condition qu'il n ' y aura aucun é t a blissement français o u anglais à Saint-Vincent et à la Dominique. — 11 avril. — Mort d e P o i n c y , âgé d e 77 ans. Il avait c o m m a n d é 21 ans dans les îles, — 6 ans a v e c la commission de lieutenant-général sur toutes les îles, 2 ans dans
celle
de Saint-Christophe p e n d a n t les différends qu'il eut a v e c
1625-1713
31
T h o i s y , environ 3 ans en v e r t u d e l'arrêt d u
Conseil
qui le rétablissait pour un an seulement, et le reste a v e c l'autorité de Son E m i n e n c e de Malte sur les Iles de SaintChristophe, Sainte-Croix, Saint-Martin et
Saint-Barthé-
lemy. Le
c o m m a n d e u r de Sales le
d'Administrateur
de
la
remplace a v e c
Seigneurie
de
le
titre
Saint-Christophe
et chef de la nation française, établie par Sa Majesté pour Son Eminence de Malte. Son administration, en o p p o s i t i o n à celle de P o i n c y , fut en général bienveillante et libérale. 1664.
Un nègre est alors v e n d u 3 . 0 0 0 livres de sucre et un
cheval 1 . 8 0 0 livres. — L a p o p u l a t i o n française
de Saint-Barthélemy
est
évaluée à cent personnes. L e gouverneur particulier de cette île est alors M. de B e a u p l a n . — 17 avril. — E n v u e d'une transformation d u régime des colonies d ' A m é r i q u e , le Conseil d ' E t a t rend un arrêt invitant tous les propriétaires des îles à rapporter leurs titres et contrats d'acquisition. Cet arrêt est sanctionné par un édit d u 1 0 juillet suivant.
LA COMPAGNIE DES INDES OCCIDENTALES ET LE GOUVERNEMENT ROYAL 1665-1713
1665.
L'Ordre de Malte cède Saint-Christophe à la Compagnie
des Indes occidentales pour 5 0 0 . 0 0 0 livres. L a liquidation des c o m p t e s
XVIII
e
ne paraissait
pas terminée
au d é b u t
du
siècle.
— Sainte-Croix se d é v e l o p p e sous la sage administration de D u b o i s . Il parvient à établir a v e c des relations commerciales
Porto-Rico
que le g o u v e r n e m e n t
d ' E s p a g n e interdit au b o u t d'une année.
royal
32
SAINT-CHRISTOPHE
Les gouverneurs français et anglais de Saint-Chris-
1666.
tophe
renouvellent
(20 janvier)
l'accord
conclu
entre
d ' E s n a m b u c et W a r n e r en 1627. P r é v o y a n t une rupture en Europe entre les d e u x p a y s , W i l l o u g b y ,
gouverneur
général des Antilles anglaises, refuse de le ratifier.
La
guerre est en effet déclarée le 26 janvier et transportée à Saint-Christophe, à C a y o n n e , la Cabesterre et C i n q Combles.
De Sales l ' e m p o r t e sur les Anglais, mais est
tué le 22 avril, ainsi que le gouverneur anglais, de W a t t s . — Les Français sont maîtres de t o u t e l'île. L'année
suivante,
Saint-Laurent,
Sales, repousse à la rivière anglaise,
conduite
par
successeur
de
De
Pelan (17 juin) une attaque
Willougby.
Les milices françaises s'emparent de Montserrat.
1667.
— En vertu d u traité de Bréda, les Anglais rentrent en possession de leur territoire de Saint-Christophe, qui leur avait été enlevé au cours de la guerre. 1669.
Le g o u v e r n e m e n t général est transféré à la Marti-
nique. 1670, 17 décembre. — Lettres patentes sanctionnant l ' é t a blissement 1674.
d'un
Conseil
souverain
à
Saint-Christophe.
L e G o u v e r n e m e n t royal est substitué à celui de la
Compagnie. 1685.
Construction à Saint-Domingue de la première maison
de P o r t - d e - P a i x par M. de Cussy. L a ville se d é v e l o p p e rapidement, grâce à l'arrivée, cinq ans plus tard, d ' h a b i tants de Sainte-Croix chassés par les Espagnols et les Anglais. 1689.
Mort d u gouverneur Saint-Laurent ; il est remplacé
par le c o m t e de Guitaud. — R u p t u r e de la paix entre la France, la Hollande e t
CARTE DE
(Cabinet desEstampes,Collection L a l l e m a n t de Betz,
1650.
SAINT-CHRISTOPHE
dressĂŠe aux environs de
Recueil V x 8. p. 160).
33
1625-1713
l'Angleterre. Reprise des hostilités en A m é r i q u e . Rlénac, gouverneur général des Iles d u V e n t , fait évacuer SaintMartin et Saint-Barthélemy, qu'il ne p e u t défendre et transporte la p o p u l a t i o n
à Saint-Christophe.
Il enlève
ensuite Saint-Eustache a u x Hollandais et la partie anglaise de
Saint-Christophe.
1690, juin. — Codrington
enlève Saint-Christophe
après
une résistance d ' u n mois et d e m i soutenue p a r le g o u v e r neur fut
Guitaud. déportée
U n e partie p a r les
de la p o p u l a t i o n
Anglais,
l'autre
française
chercha
refuge
à la Martinique, à la G u a d e l o u p e o u à S a i n t - D o m i n g u e . 1696. Sainte-Croix
ne faisant
du commerce
q u ' a v e c les
Danois, on décide l ' a b a n d o n d e l'île ; tous les habitants a v e c leurs esclaves sont transportés à
Saint-Domingue
par leur gouverneur, M. de Galifet. 1697. Saint-Christophe
est restitué
à la
France
p a r le
traité d e R y s w i c k . 1701. Saint-Christophe n e c o m p o r t e plus q u e 1855 noirs ou mulâtres et 933 blancs. 1702, 16 juillet. — Saint-Christophe, à peine repeuplée depuis le rétablissement de la p a i x en 1697, t o m b e sans résistance au p o u v o i r des Anglais. L'île ne d e v a i t plus redevenir française. 1706. L e roi envoie a u x Antilles une escadre de 12 vaisseaux sous les ordres d ' H y d e v i l l e a v e c mission d'attaquer les îles anglaises. Saint-Christophe et Nièves sont prises le 2 avril, occupées guerre
ayant
jusqu'au
épuisé
22
et n o n conservées. L a
les belligérants,
ils c o n v i e n n e n t
d'une t r è v e , mais la guerre des corsaires dura j u s q u ' à la paix. 1713,
11 avril. — L e traité d ' U t r e c h t
définitive
consacre la perte
d e Saint-Christophe.
ANTILLES
3
MARTINIQUE, GUADELOUPE ET DÉPENDANCES GÉNÉRALITÉS
« Les possessions
les plus
importantes
que les
Français
ont acquises avec le temps sont la moitié de l'île SaintDomingue,
la Martinique,
la Guadeloupe
et
quelques
petites îles Antilles ; ce n'est pas la deux-centième des conquêtes avantages...
espagnoles, »
mais on en a tiré de
(VOLTAIRE,
l'esprit des Nations,
PREMIÈRE
Essai
sur
les
partie grands
mœurs
et
chap. C L I I ) .
PÉRIODE
:
1635-1674
« Les Antilles ne sont absolument que des établissements
de
commerce
»,
les
célèbres
Instructions
au
c o m t e d ' E n n e r y et au Président de Peynier, Gouverneur et Intendant de la Martinique, l'affirmaient
en
1765
presque solennellement. L'auteur
de
ces
instructions
était
Jean-Baptiste
D u b u c , le premier député que les Iles du V e n t aient eu auprès du R o i , à Paris, où il se fit rapidement remarquer par le Duc de Choiseul, qui lui confia la direction du Bureau des Colonies. On ne saurait donc s'étonner que l'histoire
de la Martinique et de la
Guadeloupe
soit avant t o u t une histoire économique. Pas une de leurs institutions qui ne soit inspirée du souci de f a v o -
38
MARTINIQUE,
GUADELOUPE
ET
DÉPENDANCES
riser la culture et la production, pas un événement de leurs annales qui ne trouve dans l'économique sa cause et son explication. Quant à la politique pratiquée par les
Gouvernements,
elle ne recouvre
qu'une
rivalité
analogue à celle des aventuriers qui se postaient sur le trajet
des
France,
flottes
à l'affût
Grande-Bretagne,
des cargaisons précieuses. Provinces-Unies,
Espagne,
et un peu plus tard D a n e m a r k et Suède, la plupart des Puissances de l'Europe des
flibustiers,
se disputeront,
les îles de l'archipel
à la
manière
considérées
pri-
mitivement c o m m e des bases d'opérations navales ou des entrepôts de contrebande, et, dans la suite, c o m m e des mines d'un nouveau genre fournissant inépuisablement, et au meilleur c o m p t e , le tabac, le sucre, le cacao, le café et les plantes tinctoriales. Le premier acte de cette rivalité se joua d'une part entre l'Espagne et l'Angleterre autour de la Jamaïque, d'autre part entre la France et la Hollande autour de la Martinique et de la Guadeloupe.
Nous n'avons
à
parler ici que de ce dernier conflit. Pourquoi la Martinique et la Guadeloupe ? Ce n'est pas seulement parce que le hasard des circonstances fit échoir ces deux îles à des ressortissants français auxquels le gouvernement
central devait
se
substituer un jour, mais parce que le succès des débuts fit dès l'origine augurer du succès de l'avenir. Leur position privilégiée sur la route des navires que les vents ramenaient
d'Afrique
vers le N o r d , leur
atmosphère
salubre, la fertilité de leur sol et l'abondance de leur faune, l'existence enfin, pour la Martinique au moins, d'une rade de débarquement et d'un carénage — à SaintPierre et à Fort R o y a l — tous ces avantages naturels
1635-1674
39
devaient les faire distinguer entre toutes et, selon les propres termes de l'abbé R a y n a l , « les élever en peu de t e m p s à une fortune considérable. » Dès 1 6 5 0 , l ' h o m m e qui prenait pour devise : « Quo non ascendam ? » avait
pressenti
cet
avenir.
Rêvant
d'une fortune politique après avoir échafaudé une fortune pécuniaire, Nicolas F o u q u e t avait eu l'attention attirée par l'activité de son propre père, m e m b r e d u Conseil de la Marine et du Commerce et co-directeur de la Compagnie des Iles, vers l'archipel que Belain d ' E s n a m buc venait de révéler à la France.
Il créait, presque
avec hâte, une habitation à Trois-Rivières de la Martinique et la pourvoyait de vivres et de munitions, tandis qu'il s'assurait par l'interposition d'un h o m m e de paille, Isaac de Feuquières, la V i c e - R o y a u t é d'Amérique. Belle Isle et la Martinique, devenaient la double base d'un complot dont on ignore encore le sens et la portée. Lorsque
Fouquet
fut
arrêté
en
1661,
ses papiers
révélèrent l'étendue de ses tractations et contribuèrent peut-être à intéresser Louis XIV
à des colonies j u s -
qu'alors étrangères à la vie économique de la Nation. E n dépit des efforts de Richelieu, le Roi n'avait pu prendre en effet sa part du butin antillais et le drapeau fleurdelysé, s'il flottait à la Martinique et à la G u a d e loupe, n'abritait que les opérations commerciales a u x quelles se livraient avec les colons les gens des P a y s - B a s . Flessingue, Middelbourg,
A m s t e r d a m retiraient de ce
trafic des richesses immenses que Colbert mesura avec d'autant plus de jalouse envie
qu'elles lui semblèrent
ravies au patrimoine national. Aussitôt parvenu au pouvoir en 1 6 6 3 ce dernier m o n t e une expédition
militaire puissamment
pourvue
pour
40
MARTINIQUE, GUADELOUPE
ET
DÉPENDANCES
établir a u x Iles l'autorité royale jusqu'alors plus nominale que réelle ; il décide l'achat des Antilles à leurs seigneurs particuliers et les cède l'année suivante à la nouvelle Compagnie des Indes Occidentales chargée de leur mise en valeur. Pendant dix ans il lutte à coups de tarifs protecteurs, de primes et d'encouragements de toutes sortes accordés a u x armateurs. Il m e t sur pied en 1 6 6 9 une Compagnie auxiliaire, la Compagnie du N o r d , destinée
à ouvrir
tropicales
la
vers
des débouchés a u x denrées
Scandinavie
et la Baltique
et à
fournir les matériaux nécessaires à la marine — à quoi concourt la célèbre Ordonnance sur les E a u x et Forêts rendue la m ê m e
année. Bien plus,
il ne craint pas
d'engager le R o i dans une guerre avec les ProvincesUnies, guerre dont l'analyse de la politique strictement européenne ne suffirait pas à rendre compte. En
1 6 7 4 , la Compagnie
des Indes Occidentales, à
bout de souffle, doit être liquidée. Mais l'objectif est atteint : les Hollandais ont été chassés de la Martinique et de la Guadeloupe, et les sucres constitueront à la fois un fret pour la flotte marchande première pour les manufactures.
et une matière
Les Iles sont ratta-
chées à la Couronne et, désormais, le Gouvernement s'efforcera
d'exploiter
directement
son
«
Domaine
d'Occident ».
1633, 22 janvier. — Richelieu accorde à Guillaume de Caen la
concession
d ' u n certain
nombre
des îles
Lucayes ;
Guillaume n ' e n prit jamais possession. 1635,
1
e r
septembre. — L ' O l i v e
la G u a d e l o u p e .
et d u Plessis,
colonisent
41
1635-1674 — Les Français
s'établissent
à
Saint-Pierre
de la
Martinique a v e c d ' E s n a m b u c . — 17
septembre.
—
D'Esnambuc
fait
occuper
la
D o m i n i q u e par une petite troupe q u e conduisait le c a p i taine Baillardel ; ces premiers colons sont massacrés p a r les
indigènes.
1638. Anglais
et Français s'accordent
a u x Antilles
pour
limiter la culture d u t a b a c . Ils invitent les Hollandais à se joindre à e u x « parce q u e ce règlement ne p e u t réussir s'il n'est observé par tous les habitants desdites îles ». 1638-1643. P o i n c y
envoie B o n n e f o y
en reconnaissance
à
la Grenade en 1634 et A u b e r t , gouverneur de la G u a d e l o u p e , y envoie Portel en 1643. 1637. Les poids à utiliser a u x Antilles sont ajustés a u x étalons de la v i c o m t e d e D i e p p e . — 2 septembre. — l'établissement
Première o r d o n n a n c e
d ' u n « papier
censier
» ou
concernant Cadastre.
L'idée sera reprise en 1 6 5 9 , en 1 6 7 0 , en 1 6 7 9 , en 1 7 0 6 , en 1721 et en 1764. 1639. L a Gazette de Théophraste R e n a u d o t relate les é v é n e ments qui se sont produits l'année précédente à la Martinique. 1640. Première relation concernant les îles : Relation l'établissement de la Martinique,
des Français
depuis
l'une des Antilles
l'an 1635 en
de l'isle
de l'Amérique, publiée
à Paris par le P. B o u t o n . 1642,
mars. — E n raison des résultats obtenus à Saint-
Christophe, la Martinique et la G u a d e l o u p e , le roi p r o mulgue un édit confirmant la cession à perpétuité a u x associés d e la Compagnie
des Iles
d'Amérique
des îles
situées depuis le 6° j u s q u ' a u 3 0 ° inclusivement, — réser-
42
MARTINIQUE,
GUADELOUPE
ET
DÉPENDANCES
v a n t aux seuls associés le c o m m e r c e d e ces îles, — e x e m p t a n t de tous droits d'entrée en France les marchandises en p r o v e n a n t , — et attribuant au Grand Conseil le règlem e n t des différends
que la C o m p a g n i e
pourrait
avoir
relativement à ses opérations. 1643-1650. H o u e l , gouverneur
de la G u a d e l o u p e ,
envoie
Noailly à la Grenade p o u r s'y installer et y rester ensuite c o m m e gouverneur (1643). Noailly a y a n t é c h o u é , B e a u manoir lui est substitué en 1646 et échoue
également.
Enfin, en 1650, D u P a r q u e t , gouverneur de la Martinique, parvient avec l'agrément d u chef caraïbe Kairouanne à y installer quelques colons qu'il place sous le c o m m a n d e m e n t d ' u n n o m m é L e C o m t e , son cousin. Après une o c c u pation de 8 mois, les Caraïbes c o m m e n c e n t à s'agiter et il en résulte des m o u v e m e n t s q u i , appuyés p a r les Caraïbes d e la D o m i n i q u e et de Saint-Vincent, durèrent plusieurs années. L e C o m t e se noie au cours d'une de ses expéditions et est remplacé par Cacqueray de V a l m é n i è r e , d o n t l'autorité n'est pas reconnue par tous les Français, d'où des désordres qui épuisent t o u t à la fois n o s forces et nos
finances.
1645, 3 mars. — I n t r o d u c t i o n par la Compagnie des Iles de la Coutume de Paris. — Histoire
et voyage des Indes
par Guillaume Coppier à L y o n .
Occidentales, publiée
Cette relation est suivie
à un an d e distance p a r la briève relation du voyage des Isles de l'Amérique d u P. Pacifique de Provins, imprimée à Paris. — 24 décembre. — T a b a g o est concédé à Louis Hurault de Vueil et Charles d e S a i n t - R e m y . 1650, 27 septembre. — D u Parquet achète la Martinique, la Grenade, les Grenadines et Sainte-Lucie pour la s o m m e de 60.000 livres.
43
1635-1674 —
Des colons français s'établissent à la Grenade, d ' o ù
ils chassent les Caraïbes. 1651, 9 octobre. — Cromwell p r o m u l g u e l ' A c t e d e N a v i gation,
étendant
au
commerce
d'Europe,
contre
Hollandais, l'acte de 1650. Cette loi demeurera jusqu'en 1652.
1821-1825.
Publication au Mans d u Voyage
en l'Amérique Maurile
les
intacte
de
qui font partie
des Isles
des Indes
camercanes
Occidentales,
par
Saint-Michel.
1654. Expulsion des Juifs d u Brésil, où ils avaient a p p o r t é l'industrie sucrière des Canaries. Ils émigrent vers l ' A m é rique d u N o r d et vers les Antilles. 1656. octobre. — D u P a r q u e t cède la Grenade à M. de Cérillac, g e n t i l h o m m e g a s c o n , m o y e n n a n t 30.000 écus. 1657. M. de Cérillac envoie son lieutenant prendre possession de
la Grenade
(1657). Celui-ci
est assassiné la m ê m e
année. Cérillac y v a l u i - m ê m e en 1658. 1658. César et Morale
de Rochefort
publie
des Iles des Antilles
son Histoire
de l'Amérique,
Naturelle qui inspira
d e n o m b r e u x imitateurs. 1659-1660. L'usage
d u chocolat
se répand
en
France ;
il avait été mis à la m o d e p a r la nouvelle jeune reine MarieThérèse. L e m o n o p o l e de sa v e n t e est o c t r o y é p o u r 15 ans à un m a r c h a n d D a v i d Chalion qui s'installe rue d e l ' A r b r e Sec. A la m ê m e é p o q u e les habitants des îles c o m m e n c e n t à s'intéresser à la culture d u c a c a o . 1661. Arrestation de F o u q u e t . O n d é c o u v r e dans ses papiers la contre-lettre par laquelle le vice-roi d ' A m é r i q u e , Isaac de
Feuquières, s'engageait
à lui remettre
réquisition la charge d e V i c e - R o i
à
d'Amérique
première d o n t il
était p o u r v u , l ' a y a n t achetée a v e c les deniers d u surinten-
44
MARTINIQUE,
dant.
L'activité
GUADELOUPE
déployée
ET
par
DÉPENDANCES
Fouquet
pour
munir
d ' h o m m e s et de munitions l' « habitation » qu'il possédait à Trois Rivières de la Martinique laisse penser que ses projets aventureux s'étendaient j u s q u ' a u N o u v e a u - M o n d e . 1662.
Les Hollandais de T a b a g o d e m a n d e n t le p r o t e c t o r a t
de la France. — 1663.
Établissement
d'une
raffinerie
à
Dunkerque.
L a population des Res s'élève à 30.000 âmes.
— R a c h a t par Louis XIV
des îles d ' A m é r i q u e en v u e
de la constitution d'une nouvelle Compagnie placée plus directement sous l'autorité d u roi. 1664, mai. — L e c o m m e r c e hollandais s'étant en fait substitué au c o m m e r c e français et les propriétaires des îles perdant leur temps à des contestations personnelles au lieu de s'occuper d u p e u p l e m e n t des îles, le roi décide de révoquer les concessions faites en mars 1642 et ordonne à tous les intéressés dans la Compagnie des Iles d ' A m é rique de rapporter dans la quinzaine tous leurs titres entre les mains commises à cet effet. Arrêt
préparatoire d e
des Indes occidentales
la
création
de
la
Compagnie
(16 avril) : dans un délai de 15 jours
les anciens seigneurs propriétaires des diverses îles d o i v e n t présenter leurs titres p o u r acquisitions.
Le
privilège
être d é d o m m a g é s de
la
nouvelle
de
leurs
compagnie,
c o m p o r t a n t l'exclusivité d u c o m m e r c e , était fixé à 40 ans. L e prix de chaque action était de 3.000 livres p o u r un capital total de 455.000 livres. — Édit
en 43
articles instituant la Compagnie des
Indes occidentales (28 m a i ) . Les seigneurs propriétaires des anciennes
compagnies
furent désintéressées c o m m e suit : Les héritiers Boisseret ( G u a d e l o u p e ) .
120.000
livres
Les héritiers Houel ( G u a d e l o u p e ) . . . .
120.000
»
1635-1674
45
L ' O r d r e d e Malte (St Christophe)
500.000
»
D u Parquet (Martinique)
120.000
»
Cérillac (Grenade)
100.000
»
Un capital réel de 1.415.000 francs était j u g é nécessaire p o u r le b o n f o n c t i o n n e m e n t de la Compagnie ; on p o u r v u t à la différence par des emprunts et des m o y e n s d e f o r t u n e . H o u e l , ancien gouverneur d e la G u a d e l o u p e , fut l'un des d i x premiers directeurs. — 5 novembre. — T r a c y part pour la Grenade, où il n ' y a plus q u e 150 habitants. Il en chasse Cérillac, fils d u gouverneur et y installe V i n c e n t . — Cette î l e , étant excentrique,
est p e u à p e u a b a n d o n n é e
à
elle-même.
Après avoir c o m p t é 500 habitants, elle n ' e n avait plus que 150. — 11 décembre. —
Établissement des Conseils S o u -
verains de la Martinique et de la G u a d e l o u p e . 1665.
A d o p t i o n des unités de mesure de Paris. L e pas reste
à 3 pieds et d e m i au lieu d e 5. — 15 septembre. —
Arrêt
marquant
une nouvelle
offensive contre le c o m m e r c e hollandais a u x Iles. A leur sortie de la c o l o n i e , les sucres vendus a u x étrangers sont taxés d e la manière suivante : 22 l. 10 s. sur les sucres raffinés. 15 l. sur les cassonnades. 7. l. 10 sur les m o s c o u a d e s . 6 l. sur les sucres d e San T h o m é . 4 l. sur les sucres bruts. A leur entrée en F r a n c e , les sucres étrangers sont soumis à des droits 2 à 5 fois plus élevés (7 £ 10 à 22 £ 10) q u e ceux
perçus
sur les sucres apportés
par les Français
(4 £ ) . 1667, 31 juillet. — Paix de Bréda. L a France restitue à
46
MARTINIQUE,
GUADELOUPE
ET
DÉPENDANCES
l'Angleterre Saint-Christophe, A n t i g o a et Montserrat ; elle reçoit l ' A c a d i e . L ' a c t e « uti possidetis » règle les relations anglo-hollandaises. la
L'Angleterre
Hollande
conserve
la
Nouvelle-Belgique,
et
Surinam.
Les Hollandais possèdent alors, outre leur G u y a n e , les îles de Curaçao, B o n a v i e , A r u b a , Saint-Eustache, Saba et la partie sud-est de l'île Saint-Martin. — L e P. Dutertre publie sa célèbre Histoire des Antilles 1668.
habitées par les
Générale
Français.
Colbert préconise une sorte de fédéralisme é c o n o m i q u e
entre les Antilles et le Canada, afin que ces puissent
se soutenir
mutuellement
en
cas
colonies
de
conflit.
L e c o m m e r c e ne prit de réelle consistance q u ' à
partir
de 1730. — L'esclave est déclaré meuble n o n sujet à h y p o t h è q u e , mais i m m e u b l e par destination dans les successions
et
inséparable d u fonds en cas de v e n t e . Il s'agit de conserver à la sucrerie la m a i n - d ' œ u v r e nécessaire à son
exploi-
tation. L e Code Noir de 1685 considérera en son article X L I V l'esclave c o m m e meuble u n i q u e m e n t . A la suite des protestations des colons, l'arrêt d u 22 a o û t consacrera l'usage 1667.
1687
antérieur.
Jean de Baas, marquis de Castelmore, est n o m m é en
remplacement de M. de T r a c y , a v e c le titre de gouverneur général des Iles. Il d o i t s'installer à la Martinique au lieu de Saint-Christophe l'administration.
où résidait jusqu'alors le chef
de
Le marquis de Baas était le frère
de
Paul de Castelmore, dit le Baron de Baas, et de Charles, c o n n u sous le n o m de sa mère c o m m e le chevalier d ' A r t a gnan-Montesquiou,
le héros de D u m a s .
Paul de Castel-
m o r e était une créature de Mazarin qui l'avait
envoyé
en mission d i p l o m a t i q u e auprès de Cromwell en
1654
47
1635-1674
après l'avoir utilisé à des négociations a v e c les Frondeurs p e n d a n t les troubles de la minorité. Il semble d o n c bien que le g o u v e r n e m e n t des Iles ait été dès cette
époque
considéré par les familles en v u e c o m m e un poste d e c h o i x , et cela d é n o t e l ' i m p o r t a n c e qu'elles avaient déjà prise. 1669, août. — Édit p o r t a n t règlement sur les E a u x et Forêts, en considération n o t a m m e n t de « l'accroissement d u c o m merce par les v o y a g e s de long cours dans toutes les parties du monde. » —
Édit
renouvelant
l'autorisation
pour
les gentils-
h o m m e s de s'adonner au c o m m e r c e de m e r sans déroger. — novembre. — Édit s u p p r i m a n t la charge de Grand Maître et Surintendant d e la navigation de
France
rendue
v a c a n t e p a r le décès
et commerce d u duc de
Beaufort, et rétablissant celle d'Amiral de F r a n c e , considérée c o m m e plus digne d e la marine, d o n t le d é v e l o p p e m e n t d u c o m m e r c e avait permis la restauration. — 9 décembre. — Colbert décharge les particuliers, qui se rendent a u x îles, d u droit de 6 1. par tonneau. — Colbert détache l'administration Affaires
Etrangères
des Colonies des
et la rattache au ministère d e la
Marine. (Voir 1628 et 1791). — Colbert, qui encourage depuis cinq ans le o o m m e r c e a v e c les pays scandinaves et baltes, crée une du Nord
munie d ' u n m o n o p o l e
Compagnie
pour v i n g t ans. Cette
C o m p a g n i e , qui signera un a c c o r d a v e c la Compagnie des Indes Occidentales (et prendra fin en 1689), t r o u v a i t dans les retours des Antilles la monnaie d'échange indispensable à l'acquisition des bois que le Ministre désirait obtenir pour les besoins d e la Marine. L a célèbre O r d o n nance sur les E a u x et Forêts, rendue la m ê m e année,
48
MARTINIQUE,
GUADELOUPE
ET
DÉPENDANCES
devait assurer p o u r l'avenir la fourniture des matériaux d'armement
qu'il était nécessaire
1670, 19 février. —
Déclaration
d'importer.
portant
monnaie métallique p o u r les Iles
fabrication
de
d'Amérique.
— 27 février. — A r r ê t d u Conseil p o r t a n t q u e c e u x qui n'auraient pas p a y é les frais de leur passage a u x Indes Occidentales ne p o u r r o n t être retenus plus d e 18 mois « en esclavage », à l ' e x c e p t i o n des artisans et gens d e métier. — 28 février. — L a durée des engagements est réduite de trois ans à 16 m o i s . Ces engagements
deviennent
d'année en année moins n o m b r e u x . — 19 avril. — Ordonnance sur l'enrôlement des
matelots
dans
toutes les provinces
général
maritimes
du
r o y a u m e . Elle sera complétée p a r un édit d ' a o û t 1673. — 4 juin. — U n e ordonnance royale décide que le prix des denrées importées o u exportées, fixé jusqu'alors par des c o m m i s d u g o u v e r n e m e n t , sera désormais librement d é b a t t u entre acheteurs et vendeurs. — 10 juin. — R è g l e m e n t interdisant a u x bâtiments étrangers
d'aborder
dans les îles d ' A m é r i q u e
à
peine
d e confiscation. — 10 décembre. — Pour achever d'évincer les étrangers, et les Hollandais en particulier, d u c o m m e r c e de la Martinique, Colbert diminue les droits perçus sur les sucres français (de 4 l. à 2 l.). Cette lutte
économique
a b o u t i t au conflit entre la France et les Pays-Bas. — Les sucres antillais c o m m e n c e n t à affluer à B o r d e a u x , où v i n g t raffineries — Colbert ordonne
seront b i e n t ô t
a u x capitaines
construites.
de vaisseaux
transporter a u x Iles à chaque traversée d e u x o u d e u x vaches, ou d e u x ânes.
de
cavales,
de 1650
(Cabinet des Estampes, Collection L a l l e m a n t de Betz,
environs
CARTE DE L A MARTINIQUE
dressĂŠe aux
Recueil Vx 8, p. 1 5 3 ) .
49
1635-1674
— Colbert tente de substituer a u x chairs salées d'Irlande des chairs salées d'origine 1671,
française.
18 juillet. — O r d o n n a n c e interdisant a u x p r o p r i é -
taires de navires construits a u x Iles d e c o m m e r c e r a v e c l'étranger. — 4 novembre. — R è g l e m e n t sur le fait d u c o m m a n d e m e n t des armes, d e la j u s t i c e , de la police, des et d u c h o i x des officiers
finances
a u x Iles d e l ' A m é r i q u e .
Le
lieutenant général p o u r le R o i et les gouverneurs p a r t i culiers c o m m a n d e n t la force a r m é e , a v e c le concours d u Directeur d e la Compagnie des Indes o u de s o n représentant. Des Conseils souverains, c o m p o s é s d u lieutenant général, des gouverneurs et d e m e m b r e s n o m m é s par le R o i sur la proposition de la Compagnie o n t la haute main sur la police et veillent à l'application de la c o u t u m e de Paris. Les officiers de justice inférieurs sont n o m m é s p a r la C o m p a g n i e . Les concessions de terre sont accordées p a r la C o m p a g n i e . — O r d o n n a n c e interdisant d e transporter des b œ u f s , lards, toiles et autres marchandises étrangères a u x Iles. — 8 novembre. — D e C a u c h y n o m m é gouverneur de la
Grenade. — 28 novembre. — O r d o n n a n c e autorisant le transport
aux Iles des vins de Madère. — 14 décembre. —
L e R o i autorise les Nantais à
trafiquer a v e c les Antilles, à condition d e ne pas exporter les sucres autrement
q u ' e n r e m o n t a n t la Loire
passant par le bureau d ' I n g r a n d e . U n tarif
et en
préférentiel
de 4 l. par quintal leur est a c c o r d é , alors q u e le droit était de 7 l. à la d o u a n e de R o u e n et d e 4 l. 5 à la d o u a n e de la R o c h e l l e et d e B o r d e a u x . V i n g t ans plus tard les Nantais f o n t plus de la moitié d u c o m m e r c e des Iles et o n t anéanti celui des N o r m a n d s . ANTILLES
4
50
MARTINIQUE,
GUADELOUPE
ET
DÉPENDANCES
— L a Compagnie d u L e v a n t construit u n e raffinerie à Marseille. Elle est autorisée trois ans plus tard à i n t r o duire cinquante milliers d e sucre en p a y a n t 8 1. au lieu de 2 2 . Elle obtient des facilités p o u r le transit vers l a S a v o i e , la Suisse et l ' A l l e m a g n e .
Les huiles, les savons
et les fruits de P r o v e n c e servent d e monnaie d'échange aux Antilles. E n 1695, la raffinerie est à son a p o g é e . 1672, 26 janvier. — On fait passer a u x îles p o u r leur défense six compagnies — portées à 8 en 1680 — de troupes d é t a chées de la marine. Ce régime dura j u s q u ' e n 1763. — 10 novembre. — Ordonnance d u roi introduisant la monnaie métallique dans les colonies, afin d e m e t t r e un terme a u x contestations
sur la qualité des sucres
employés au paiement des marchandises. 1673.
Admission a u x Iles des viandes étrangères.
— 11 novembre. — L e roi accorde à la C o m p a g n i e d u Sénégal un privilège pour la traite des noirs a u x Antilles. 1674. L e M o n o p o l e d u t a b a c est établi en F r a n c e . L a cherté des nègres de traite française entraîne la cherté d u t a b a c français q u e le t a b a c d e Virginie et d u Maryland, approvisionnées en nègres à meilleur c o m p t e , concurrence victorieusement. L e prix
d u tabac
tombe
en E u r o p e de 30 et 40 s. la livre à 5 sols. Aussi dès 1680 la culture d u t a b a c aura à p e u près disparu de la Martinique (sauf au M a c o u b a ) . — décembre. — L a C o m p a g n i e ne p o u v a n t
subvenir
aux frais des guerres maritimes dans lesquelles la p o l i tique d u roi l'avait engagée, son privilège est r é v o q u é et
les colonies
sont réunies
à l'Etat.
En d i x années
d'existence, elle avait contracté 3.525.000 livres de dettes ; son capital initial de 1.287.185 livres lui f u t remboursé.
DEUXIÈME
PÉRIODE :
1674-1763
Les Antilles réunies à la Couronne, Louis X I V Colbert éprouveront pour la nouvelle province —
et car
les Iles sont constituées en gouvernement et possèdent Gouverneur
général
tendresse paternelle
et
Intendant
: il n'est
—
une
véritable
pas de soins qu'ils
ne
prennent pour assurer sa croissance et son épanouissem e n t . O n verra à propos de chacune des colonies avec quelle minutie ils s'intéresseront
à leur
peuplement,
à l'accroissement et à la police de la m a i n - d ' œ u v r e , à l'enrichissement des espèces végétales et animales, au progrès des cultures et à la multiplication des échanges, enfin à la sécurité de possessions aussi précieuses et si lointaines. « La petite île de la Martinique et la Guadeloupe, que les en
1753,
Français
cultivèrent
fournirent
les
en
mêmes
1635,
écrit
denrées
que
Voltaire Saint-
D o m i n g u e . Ce sont des points sur la carte et des événements qui se perdent dans l'histoire de l'Univers, mais enfin ces pays qu'on peut à peine apercevoir dans une mappemonde
produisirent
en France une
circulation
annuelle d'environ soixante millions de marchandises. »
52
MARTINIQUE,
GUADELOUPE
ET
DÉPENDANCES
E t , en effet, grâce à ces atomes géographiques, la France réussira à s'emparer du monopole des sucres, à vaincre les
Hollandais
et les
Anglais
non
seulement
sur
le
marché des Antilles, mais par toute l'Europe. Les sucres
de
toutes
qualités,
le cacao, le t a b a c ,
l'indigo, le rocou, le coton, les cuirs, plus tard le café, affluent chaque année en quantités plus fortes à Nantes, à La Rochelle, à Bordeaux, à Marseille m ê m e , jusque dans les ports secondaires, d'où ils repartent par mer vers les pays du Nord et de l ' E s t , vers le L e v a n t qui fournissait jadis le sucre, à moins qu'ils ne remontent la Loire ou le courant du Rhône pour gagner les provinces les plus éloignées de la côte et atteindre parfois l'Italie et l'Allemagne du Sud. Pour leur transport, les fleuves se couvrent de chalands et les routes de charrois, les raffineries et les m a n u factures se lèvent sur leur passage ; toute une multitude d'hommes tirent leur vie d'une industrie nouvelle et d'un commerce qui se ranime, la bourgeoisie des villes maritimes
s'enrichit,
des quartiers
luxueux
se
cons-
truisent autour des principales cités de négoce : l'or blanc des Antilles coule à flot sur la France c o m m e autrefois sur l'Espagne l'or rouge du Pérou. Le commerce des Iles-à-Sucre est devenu le « trône » de tout le commerce du R o y a u m e . « Il a la plus grande influence
sur
notre
agriculture
et
nos
productions,
écrivent les Nantais au Chancelier, tant par l'exportation qu'il favorise que pour la subsistance et les besoins des colons, de farine, vins, eaux-de-vie, lins, chanvres, charbons, bois, merrains, feuillards, fer, p l o m b , légumes, etc... que par la consommation immense des étrangers de tous les pays et de toute condition, que ce commerce
1674-1763
53
attire dans le royaume ; enfin par l'enlèvement
que
font du superflu de nos sels, vins et eaux-de-vie une multitude de navires des autres nations que les denrées de nos colonies appellent dans nos ports ». Pendant tout le XVIIIe siècle le commerce
colonial
constituera, pour prendre l'expression du marquis de Mirabeau, « la p o m m e de discorde entre les Nations », chacune s'efforçant de s'emparer des possessions de sa rivale
ou plus simplement des richesses dont
celles-ci
étaient la source. Les escadres de guerre ouvrent a u x convois
marchands
l'Exclusif
ou
de véritables
Pacte
égoïsmes nationaux
Colonial
voies triomphales ;
devient
et la puissance
la
forme
se tient au service du Commerce, totalement. Arma
des
gouvernementale Cedant
Lucro.
« U n bon traité de commerce, écrit d'ailleurs en 1697 le Roi à ses plénipotentiaires, v a u t mieux que l'acquisition de quelques places fortes » : la Victoire brandit désormais le caducée. A cet égard, ce sont encore les Antilles
qui apparaissent
plus prisés. A u
comme
un
des enjeux
cours des préliminaires
de
les
Ryswick,
d'Utrecht, d'Aix-la-Chapelle, de T a r i s , les négociateurs se cèdent mutuellement les Iles c o m m e les joueurs des jetons pour marquer leurs succès ou égaliser leurs parts. Saint-Christophe, T a b a g o , Trinité, Porto-Rico, la Grenade, la Dominique, Saint-Vincent, changent de pavillon au gré des événements
d'Europe ; la Martinique,
la
Guadeloupe et Saint-Domingue jamais. Ces possessions sont
trop
précieuses
à
leur
métropole
pour
qu'elle
consente à les abandonner : en 1763 Choiseul préférera céder le Canada que de perdre les deux Iles du V e n t . Que feraient les villes maritimes qui trafiquent
dans
54
MARTINIQUE.
GUADELOUPE
ET
DÉPENDANCES
nos îles, interrogeaient les planteurs, sans le commerce des Petites Antilles ? E t Jean-Baptiste
Dubuc avait le droit
d'écrire
un
peu plus tard : « A l'aspect de tous les ports de France, le cultivateur d'Amérique peut dire : c'est par m o i que ces ports ont été créés, c'est
à mes dépens que ces
fortunes immenses et promptes de nos échangeurs ont été élevées... ; sans m o n industrie, sans m o n courage..., ces
villes,
ces
ports
n'existeraient
point
et
l'herbe
croîtrait encore où de magnifiques édifices annoncent l'opulence
de
ceux
qui
les
habitent
et
l'utilité
des
colonies, qui seules ont amené cette opulence sur des rives autrefois désertes et misérables ». La France du XVIIIe siècle est a v a n t tout Puissance des
Antilles.
Ses
armées
combattent
en
Allemagne,
mais ses victoires s'inscrivent en Amérique : c'est en Hanovre et sur l'Elbe ou l'Oder, c o m m e l'avouera N a p o léon, que la faiblesse de notre marine nous oblige à conquérir les « Indes ». Les diplomates et les négociants, les grands seigneurs à l'affût d'un gouvernement, n'ont pas seuls les y e u x tournés vers les colonies et les Iles-à-Sucre en particulier. Les Économistes
aussi, en quête d'une
expli-
cation des grandes perturbations qui ont agité l'Europe depuis
1492, et soucieux
d'enseigner a u x
Nations la
vraie « manière de devenir riche », aperçoivent dans le développement des établissements antillais une cause efficace. Les mines du Mexique et du Pérou engendré des
troubles monétaires
quences de tous ordres, les plantations de :
e t des É t a t s du Nord n'auraient-elles l'économie
de
la
France
et
de
avaient
fertiles en
la
consé-
l'Archipel
pas joué
dans
Grande-Bretagne
1674-1763 un rôle aussi déterminant
55
que l'or
et l'argent
dans
l'histoire de l'Espagne ? La première École économique qui ait existé, celle de Quesnay et de ses amis —
dont
le plus éminent, Le Mercier de la Rivière, sera intendant des Iles du V e n t de 1 7 5 9 à 1 7 6 4 —
découvre dans le
fait antillais une première confirmation de ses h y p o thèses. De
leur
côté,
les
publicistes
entrevoient
dans
le
régime des Iles et de l'Amérique du Nord la préfiguration du gouvernement qu'ils appellent de leurs v œ u x . « E n examinant seulement les colonies, qui se sont établies dans ces derniers t e m p s , écrit explicitement le marquis de Mirabeau,
et considérant celles où l'agriculture et
la
ont
population
fait
les progrès
les
plus
rapides,
on découvrirait aisément par l'inspection des m o y e n s connus, des formes et des lois de ces n o u v e a u x établissements, quelle est la nature du meilleur gouvernement quant à la formation des sociétés, nature prouvée par les succès mêmes de ces colonies ». Or, les Antilles, qui avaient si bien réussi, jouissaient de franchises
et de libertés qui les constituaient
en
véritable asile pour tous ceux qui fuyaient la réglementation de la métropole. On n ' y connaissait ni la vénalité des offices, ni les corporations ; chacun pouvait en principe accéder a u x magistratures et s'adonner à l'activité
qui lui convenait.
On y
échappait
surtout
a u x impositions sous lesquelles succombaient les roturiers de la métropole : point de taille, peu de corvées, rien
que
des
subsides
octroyés
par
les
habitants
consultés. U n tel régime avait favorisé chez les Planteurs une insubordination native et un goût prononcé de l'indé-
56
MARTINIQUE,
pendance.
Leur
GUADELOUPE
Conseil
ET
DÉPENDANCES
Supérieur,
dont
la
fonction
n'était autre que celle de ces petites Cours qui existaient en Alsace et en Roussillon, aimait à se prévaloir de sa compétence
en
dernier
ressort pour se parer
du
titre de Conseil Souverain et, jouant sur le terme, prétendre à un véritable pouvoir législatif. Le Roi s'était maintes fois opposé à une pareille titulature et l'avait expressément nourrissait
condamnée,
des
projets
mais l'aristocratie
d'autonomie
trop
sucrière
manifestes
— voir l'insurrection de 1717 conduite par les Dubuc — pour
qu'une
s'imposât
politique
pas.
Dans
de
les
douceur
moments
et de
d'habileté crise les
graves, à la fin de la guerre de Succession
ne plus
d'Espagne
comme au cours de la guerre de Sept ans, les administrateurs témoignent sur le terrain de la fiscalité d'une incroyable timidité lorsqu'on songe a u x pratiques mises en honneur dans la métropole. La Cour préférera affron ter les pires difficultés financières plutôt que d'accorder à la colonie l'Assemblée et le Syndic Général ne manque
pas
de réclamer
en
semblable
qu'elle
occasion.
Le Ministre se sent peu à l'aise en face de sujets aussi hardis. E t , de fait, les Planteurs sont dans la première moitié du XVIIIe siècle à l'apogée de leur puissance, de leur richesse : il faut compter avec de tels seigneurs. L'institution servile sur laquelle se fonde leur fortune n'est
pas encore sérieusement
discutée, ni ébranlée ;
les crédits consentis par les armateurs d'Europe
ont
forgé une chaîne qu'ils ne sentent pas encore. La question de l'esclavage et la question des dettes ne se poseront que dans la période suivante, au cours de laquelle les solutions révolutionnaires finiront l'emporter sur les réformes pacifiques.
par
1674-1763
57
E n dépit des difficultés que l'on sentait poindre a u x Iles dans tous les domaines, le Gouvernement ressentit leur perte dans les dernières années de la Guerre de Sept A n s avec une émotion non dissimulée. « N'est-il pas aussi humiliant que mortifiant d'imaginer que la perte de la Martinique ferait passer entre les mains des Anglais un commerce de 70 millions, ce qui fait plus des deux tiers de leurs dettes nationales ? » s'écriait le Ministre d ' E t a t Puysieulx au Conseil du 17 mars 1 7 6 0 . « M. le Duc de Choiseul a fait sentir les conséquences
qui résulteraient
de la
perte
funestes de
cette
isle importante, déclarait à la m ê m e occasion le ministre de la Marine, si les Anglais s'en étaient rendus maîtres lors de la négociation de la Paix. » Et
c'est
bien pour éviter le retour
d'une
pareille
éventualité autant que pour lier les efforts de la diplomatie espagnole et de la diplomatie française au cours des futurs préliminaires de la Paix, que Choiseul travaillait à la conclusion du Pacte de Famille. Tous les documents se rapportant à cet A c t e important d é m o n trent que l'arrière-pensée constante du Ministre consis tait dans l'établissement d'une alliance maritime, c'està-dire
d'une
alliance
coloniale.
« Je ne sais pas si l'on est bien persuadé en Espagne, écrivait-il le 14 novembre 1 7 6 0 à son ambassadeur, qu'en l'état actuel de l'Europe ce sont les colonies, le commerce et par conséquent la puissance maritime qui doivent emporter la balance du Pouvoir sur le continent.
La
Maison d'Autriche, la Russie et le Roi de Prusse ne sont que des puissances de second ordre, ainsi que celles qui ne peuvent faire la guerre que lorsqu'elles sont s u b sidiées par les puissances commerçantes »...
58
MARTINIQUE,
GUADELOUPE
ET
DÉPENDANCES
E t dans ces Instructions au comte d'Ossun du 27 j a n vier 1761 : « Si le roi d'Espagne v e u t consolider son union avec la France par un nouveau traité de commerce et défensif entre les deux Couronnes, le Roi portera tous ses efforts à la paix dans la partie maritime afin
d'être
utile à un allié qui lui est aussi cher que l'est Sa Majesté Catholique ». Les Iles du V e n t ont donc pesé de tout le poids de leur richesse dans la signature de deux actes internationaux d'une importance
capitale pour la
France
:
le Pacte de Famille et le Traité de Paris. E t l'on comprend que dans son vaste tableau historique l'abbé R a y n a l ait pu donner à sa pensée une forme aussi affirmative —
ce sera notre dernière citation :
« Les colonies ont élevé les nations qui les ont fondées à une supériorité d'influence dans le m o n d e politique, et voici c o m m e n t : l'or et l'argent culation générale de l'Europe du Pérou et du Brésil. Espagnols
et
aux
qui forment la cir-
viennent
du
Ils n'appartiennent
Portugais,
mais
aux
Mexique, pas
aux
peuples
qui
donnent leurs marchandises en échange de ces m é t a u x . Ces peuples ont entre eux des comptes qui en dernier résultat v o n t se solder à Lisbonne et à Cadix qu'on peut regarder c o m m e
une caisse c o m m u n e
et
universelle.
C'est là qu'on doit juger de l'accroissement ou de la décadence du commerce de chaque nation... Celle qui a plus v e n d u
a u x autres nations
qu'elle n'a
acheté
d'elles ne retire pas seulement ce qui lui est dû par l'Espagne et le Portugal, mais encore ce que lui doivent les autres nations avec lesquelles elle a fait des échanges. Ce dernier avantage est spécialement réservé a u x peuples
1674-1763
59
qui possèdent les isles. Ils voient grossir annuellement leur numéraire
par la vente
des riches
productions
de ces contrées et cette augmentation du numéraire assure leur prépondérance, les rend arbitres de la Paix et de la Guerre... »
1675.
Le monopole
du commerce
continue au profit d e
l ' É t a t , mais au détriment des particuliers ; le c o m m e r c e a v e c l'étranger
reste interdit, d ' o ù d é v e l o p p e m e n t
du
c o m m e r c e interlope. — L e R o i autorise les Nantais à introduire les sucres raffinés dans le r o y a u m e à condition d e payer au Bureau d ' I n g r a n d e 18 l. p a r quintal d e sucre royal et 17 l. p a r quintal d e sucre raffiné
ordinaire.
1676. B o r d e a u x envoie autant d e navires q u e Nantes à la Martinique. 1677. Charles Louis d e C o u r b o n , c o m t e de Blénac, succède au marquis d e Baas au g o u v e r n e m e n t général des îles. (Il m o u r u t à la Martinique en 1696 et fut enterré dans l'église
de F o r t - R o y a l ) . Blénac f u t le principal
artisan
de la construction d u F o r t et d e la ville d e F o r t R o y a l ; il d o t a la colonie d ' u n réseau routier, se p r é o c c u p a de sa mise en valeur et assura sa défense. — 20 février. — D'Estrées détruit la flotte d e l'amiral hollandais Binkes à T a b a g o , mais il ne peut prendre la Colonie. — 9 décembre. — O r d o n n a n c e prescrivant d'appliquer d e meilleurs traitements a u x engagés. — 29 décembre. — D'Estrées enlève T a b a g o a u x H o l landais, mais les Français ne c o m m e n c è r e n t à l ' o c c u p e r effectivement q u ' e n 1728.
60
MARTINIQUE,
GUADELOUPE
ET
DÉPENDANCES
1 6 7 8 , 10 août. — Traité de Nimègue entre la France et la Hollande. La
France conserve
Tabago.
— 7 novembre. — R è g l e m e n t fixant le t a u x de salaire journalier de chaque engagé. 1 6 7 9 , 25 mars. — Arrêté annulant le traité fait a v e c Jean Oudiette, fermier d u d o m a i n e d ' O c c i d e n t , par lequel il était obligé
d'introduire
800 nègres des côtes — 1er avril. — police,
finances
quatre
ans
Création d'un i n t e n d a n t de j u s t i c e ,
et marine, résidant à la Martinique
a y a n t juridiction est institué
a u x îles p e n d a n t
d'Afrique.
sur toutes les îles ; le p o u v o i r
à côté
d u p o u v o i r militaire.
et
civil
Patoulet fut
le premier i n t e n d a n t . — 1 2 août. — L e Conseil supérieur de la Martinique d e m a n d e au roi d ' e n v o y e r 100.000 écus d'argent m o n n o y é , afin d'abolir l'usage de stipuler en sucre. — Cette d e m a n d e n'est pas prise en considération ; la question d u numéraire restera
pendant
longtemps
l'une
des
plus
difficiles
à
résoudre. — Blénac a l'idée de conclure un traité de paix p e r p é tuelle a v e c les gouverneurs des îles anglaises ; le roi a p p r o u v e le p r o j e t (1680), qui c e p e n d a n t é c h o u e . 1 6 8 0 , L e roi interdit à M. de Blénac de faire la guerre aux Caraïbes de Saint-Vincent. — Les
appointements
des
gouverneurs
sont
ainsi
fixés : la Martinique, 64.000 livres de sucre ; G u a d e l o u p e , 36.000 ; Saint-Christophe, 64.000 ; Sainte-Croix, 30.000 ; Marie-Galante, 5.000 ; Saint-Barthélemy et Saint-Martin, 5.000 L e sucre à cette é p o q u e valait 5 à 7 francs le c e n t . — Colbert abolit tous les règlements de et toutes les taxes concernant les sucres.
fabrication
61
1674-1763
— A partir de cette date (1680), plus d e cent vaisseaux marchands se rendent annuellement a u x Iles. D i x ans plus tard, on en c o m p t e 200 « depuis environ 100 jusques à 300 t o n n e a u x , qui o c c u p e n t plus d e 7.000 matelots », alors q u ' e n 1664 la navigation au long cours était c o m p l è tement déchue. 1681.
Les marchandises françaises n e p e u v e n t être i n t r o -
duites a u x Antilles q u e p a r navires français. U n arrêt d u roi interdit la sortie d u r o y a u m e des sucres bruts. 1682, 18 août. — Arrêt relevant de 4 à 8 l. le droit d'entrée en France p o u r le quintal d e sucre raffiné a u x Iles. N é a n moins le marquis d'Angennes Maintenon, v e n u s'établir à la Martinique après avoir v e n d u son marquisat à d ' A u b i gné, ouvre
à Saint-Pierre
deux
raffineries
prendra rapidement une extension
dont
l'une
considérable.
1683, 6 septembre. — Mort d e Colbert. — 30 septembre. — Ordre d u roi de chasser dans le délai d ' u n mois tous les Juifs des colonies
françaises.
Cet ordre fut exécuté. 1684, 21 janvier. — L a création d e toute nouvelle raffinerie est interdite
a u x Iles. Les habitants
imaginent
alors
de « terrer » le sucre, procédé inventé par le colon Martin L e Fol p o u r blanchir sans
raffiner.
— septembre. — Arrêt rendant la liberté de sortie a u x sucres bruts et créant en faveur des raffineurs une prime à l ' e x p o r t a t i o n d e 9 1. 15 s. par quintal. 1685, mars. — E d i t t o u c h a n t la police des îles d e l ' A m é r i q u e française, appelé le Code Noir. — Les colonies sont interdites a u x Protestants. Cette mesure précède de six mois la révocation de l ' E d i t d e Nantes.
62
MARTINIQUE,
GUADELOUPE
ET
DÉPENDANCES
— 24 août. — En v u e de protéger la multiplication des bestiaux, une ordonnance p u n i t d e 1.000 l. d ' a m e n d e quiconque
abat
une génisse
o u une v a c h e
portante.
Cet acte reprenait un t e x t e d u 5 juin 1 6 7 9 . — L a p o p u l a t i o n des Iles s'élève à 52.000 âmes se répartissant ainsi : 15.194 âmes à la Martinique. 11.149
—
à la G u a d e l o u p e .
10.269
—
à Saint-Christophe.
992
—
à Saint-Martin et Saint-Barthélemy.
587
—
à la Grenade.
2.296
—
à Marie-Galante et Sainte-Croix.
800
—
à Cayenne.
10.000
—
à la Tortue et à S a i n t - D o m i n g u e .
L a p o p u l a t i o n noire s'augmentait tous les ans de 2 à 3.000 individus. —
D é b u t des relations entre Nantes et les p a y s d u
Nord (Dantzig, K œ n i g s b e r g , R i g a , e t c . . . ) , grâce a u x retours des îles (sirops et sucres). Quarante ans plus tard Nantes envoie dans ces p a y s des
quantités
considérables
d e produits
antillais. Par
H a m b o u r g , où sont installées trente raffineries, elle atteint les marchés russes et
finlandais.
1685-1688. Transportation
a u x Iles d e « religionnaires »
des Cévennes et d e Lorraine. 1686, 30 septembre. — O r d o n n a n c e édictant q u e le n o m b r e des engagés devra être égal à celui des esclaves travaillant sur les propriétés. Elle n e p u t être appliquée. — 16 novembre. — Traité d e Londres entre la France et l'Angleterre. Les d e u x p a y s s'engagent à ne pas c o m mercer a v e c les colonies d e l'autre. Cet acte avait égalem e n t pour o b j e t de soustraire les possessions d ' o u t r e - m e r
1674-1763
63
aux vicissitudes de la politique européenne en établissant une véritable
neutralité
coloniale.
i n c o n s c i e m m e n t les velléités
O n consacrait
ainsi
d'autonomie.
— 31 décembre. — L e recensement d e la Martinique accuse une p o p u l a t i o n totale de 16.553 habitants, d o n t 5.019 blancs, 119 Caraïbes, 314 mulâtres et 11.101 noirs. 1688, novembre. — L e roi édicte q u e toutes les prises faites dans les tropiques d e v r o n t être amenées et vendues à la Martinique ; — ce qui constitue au profit de cette île une situation privilégiée qui durera j u s q u ' e n 1759. 1690. D e G é m o s a t est n o m m é gouverneur de la Grenade. 1692.
U n édit d e j a n v i e r rétablit une ferme d u café, d u
t h é , d u c a c a o et d e la vanille, à l'imitation de celle d u t a b a c . U n prix m a x i m u m était fixé à 4 francs la livre de c a c a o , et 6 francs celle d e c h o c o l a t , à 18 francs le p a q u e t de 50 brins d e vanille. Les denrées devaient entrer par R o u e n et Marseille. Ce m o n o p o l e f u t supprimé l'année suivante, sur les protestations des épiciers qui offraient de p a y e r en échange tels droits d e d o u a n e qui c o n v i e n draient au R o i . 1694. L e prix
d u sucre t o m b e
d e 10 livres à 3 livres.
L e r o u c o u valait à l a Martinique 20 sols la livre, il a v a i t v a l u j u s q u ' à 30 et était t o m b é à 7. L ' i n d i g o se v e n d a i t entre 3 et 4 livres la livre. 1695.
L ' i n t e n d a n t R o b e r t reçoit l'ordre de détruire toutes
les raffineries. 1696, 26 septembre. — R è g l e m e n t d u Conseil d ' E t a t prescrivant d e mettre en culture dans les six mois les terres déjà concédées et n o n mises en valeur. 1697, 20 septembre. — L e traité de R y s w i c k confirme la France dans la possession de « la partie la plus belle e t
64
MARTINIQUE,
GUADELOUPE
ET
DÉPENDANCES
la plus fertile de l'île, la plus belle et la plus fertile des Indes occidentales et peut-être d u m o n d e », de S a i n t - D o m i n g u e . Il restitue à c h a q u e belligérant sa situation
coloniale
de 1688. Le tarif de 1667 est annulé en faveur d e la H o l lande.
On v i e n t
d'ailleurs
de d é c o u v r i r
que
par
leur
incidence les droits d'entrée frappent les sujets d u R o i . P o u r la première fois aussi, d u c ô t é français, le
souci
é c o n o m i q u e l ' e m p o r t e sur les considérations militaires : « la restitution de quelques places est moins i m p o r t a n t e q u ' u n b o n traité de c o m m e r c e ». — Les relations commerciales entre le Canada et les Iles c o m m e n c e n t à être plus suivies. 1698,
5 mars. — L e g o u v e r n e m e n t revient à la politique
des engagés. Un Arrêt d u Conseil d ' E t a t oblige les c a p i taines de vaisseau à transporter de n o u v e a u des travailleurs blancs. — 20 j u i n . — L e droit d'entrée en France sur les sucres bruts est abaissé de 1 l., tandis que le droit sur les sucres terrés est élevé de 8 l. à 15 l. et que les sucres raffinés sont traités c o m m e s'ils étaient d'origine étrangère
(le
droit de 8 l. est élevé à 22 l. 50). L a raffinerie d u Mouillage de Saint-Pierre est
obligée
de fermer ses portes. L a raffinerie de D u n k e r q u e est autorisée à
exporter
des sucres à l'étranger. — 20 a o û t . — E d i t rendant plus strict le régime des prohibitions commerciales et en aggravant les sanctions. — L'ambassadeur
de
Louis
XIV
à
Madrid
reçoit
mission de demander le droit p o u r les colonies françaises de c o m m e r c e r librement a v e c les possessions espagnoles. — L e prix d'un nègre valait cette année 425 francs, le sucre b r u t valait 7 livres 15 sols le quintal. — D e u x ans
1674-1763 après, en 1700, le sucre terré
65
se v e n d a i t de 36 à 44 l.,
le sucre b r u t 12 livres. U n e habitation valant d e 350 à 400.000 francs rapportait 90.000 francs. —
Rouen
possède
14 raffineries.
T o u r s , Orléans en possèdent
Angers,
Saumur,
également.
1699, 4 mars. — L e roi publie une nouvelle ordonnance p o u r le règlement d u c o m m e r c e et des îles et colonies françaises de l ' A m é r i q u e . — Défense de transporter en A m é rique des espèces d ' o r et d'argent. — 8 avril. — O r d o n n a n c e reportant a 36 mois la durée des engagements a v e c obligation d'avoir un engagé p a r v i n g t esclaves. 1700. L a H o l l a n d e frappe les sirops et les tafias
français
d ' u n droit qui restreint leur d é b i t dans ses colonies et dans la m é t r o p o l e . —
Une raffinerie est installée à Nîmes.
1701, 27 août. — Traité de l'Asiento entre les rois de France et d ' E s p a g n e , p o u r la fourniture par les Français de nègres dans les Indes espagnoles. L a guerre a y a n t repris en E u r o p e , le ministre de la
1702.
Marine écrit le 6 septembre 1702 au gouverneur général Machault d'essayer d e conclure un traité de neutralité a v e c les gouverneurs 1703.
anglais des îles
d'Amérique.
Les Etats d e L a n g u e d o c décident la création d'une
raffinerie à Sète. Celle-ci passait en 1717 pour « une des plus c o m m o d e s et des plus grandes qu'il y ait en E u r o p e » . Les propriétaires arment eux-mêmes des navires p o u r le transport des draps languedociens et le retour des sucres antillais. — Les manufacturiers de Lille d e m a n d e n t le droit d e s'approvisionner en c o t o n et en indigo des îles. ANTILLES
5
66
MARTINIQUE,
GUADELOUPE
ET
DÉPENDANCES
1705, 29 novembre. — E n raison de la pénurie d e s vivres p r o v o q u é e par la guerre, les colonies s o n t autorisées à s'approvisionner dans les îles voisines, amies o u ennemies. — Les nobles qui épousent des mulâtresses sont déclarés déchus d e leurs titres. —
O r d o n n a n c e réglant les peines à infliger a u x nègres
et mulâtres libres, qui permettent a u x nègres
marrons
de se retirer chez e u x . 1708. Des mesures officielles sont prescrites p o u r c o m b a t t r e la fièvre jaune d e v e n u e trop fréquente. — novembre. — Des Français c o m m a n d é s par Coullet chassent les Anglais de Saint-Vincent a v e c l'appui des Caraïbes. 1710. L e roi a c c o r d e des passeports a u x navires étrangers p o u r approvisionner n o s îles q u e la guerre prive à p e u près de t o u t e subsistance. 1711.
D e v a n t le n o m b r e
croissant des affranchissements,
des restrictions sont apportées à la libération des esclaves. 1713, 11 avril. — A la suite de la paix d ' U t r e c h t , la France et l'Angleterre signent u n traité d e c o m m e r c e par lequel est garanti le d é b o u c h é des sucres et le ravitaillement des Iles en chairs salées. — L e gouverneur général P h é l y p e a u x propose de permettre la saisie des nègres, jusqu'alors interdite, p o u r éviter l'arrêt des sucreries. Cette proposition sera reprise en 1720 par les administrateurs Feuquières et Bénard, et en 1762 par L e Mercier de la R i v i è r e . L e Ministre refuse, mais on distinguera en fait les « nègres d e jardin », employés à la plantation,
p o u r lesquels l'interdiction
sera maintenue,
et les « nègres d o m e s t i q u e s » à l'égard desquels la saisie devient
possible.
67
1674-1763 — Interdiction
d'importer
en France
des sirops et
tafias des colonies, pour ne pas faire t o r t a u x eaux-de-vie fabriquées
en
France.
— Les Hollandais offrent à Louis XIV
un plant de
caféier, d o n t un r e j e t o n sera transporté plus tard à la Martinique p a r Gabriel de Clieu. 1714. S a i n t - D o m i n g u e est distrait d u g o u v e r n e m e n t général des Antilles et constitue a v e c ses dépendances le g o u v e r n e m e n t général des Iles Sous le V e n t . 1715. Les administrateurs Duquesne et Vaucresson laissent s'établir entre les Iles et les colonies étrangères un trafic p o r t a n t sur les sirops et les tafias auxquels la France n'offre aucun d é b o u c h é . E n v u e de diminuer leurs frais d ' e x p l o i t a t i o n , les planteurs étaient en quelque sorte astreints à tirer parti de ces sous-produits de la fabrication d e s sucres. L a querelle qui s'instaure à ce sujet ne sera tranchée q u ' e n 1765. Les administrateurs coupables sont révoqués et remplacés par MM. de la Varenne et R i c o u a r t . Entre 1715 et 1 7 2 0 . L'usage de la houe est substitué à celui de la charrue p o u r la culture des terres. On ne r e v i e n dra à la charrue qu'après l'affranchissement des esclaves en 1848. 1716, 4 février. —
Règlement
renouvelant
l'obligation
p o u r les capitaines de navires allant a u x îles d ' e m m e n e r un certain n o m b r e
d'engagés.
1717. Feuquières, gouverneur de la G r e n a d e , est nommé gouverneur de la G u a d e l o u p e , puis gouverneur général. — Autorisation
d'exporter
à
l'étranger
les
sucres
antillais, après entrepôt en F r a n c e . — avril, — Lettres patentes instituant aux Antilles un régime de liberté relative.
13 ports sont
affectés
68
MARTINIQUE,
GUADELOUPE
ET
DÉPENDANCES
au c o m m e r c e colonial. Les marchandises françaises d e s tinées a u x colonies p e u v e n t sortir d u r o y a u m e sans p a y e r de droits ; il en est de m ê m e des marchandises étrangères entrées dans le r o y a u m e et a y a n t déjà p a y é les droits. Les denrées coloniales introduites en France ne p a y e n t que des droits m o d é r é s , et si elles sont destinées à l'étranger, elles p e u v e n t être entreposées m o y e n n a n t un droit de trois p o u r c e n t . L e régent, qui jusqu'alors avait négligé Sainte-Lucie,
1718.
entreprend d ' e n faire une succursale de la Martinique. Il en donne la concession au maréchal d'Estrées, g o u v e r neur de Nantes, et l'administration au gouverneur de la Guadeloupe. Vers 1718. Obligation p o u r les c o m m a n d a n t s
de navires
d ' e m b a r q u e r p a r v o y a g e à titre d'engagés de 3 à 6 personnes, âgées d e 18 ans au moins et 40 au plus. L e régent d o n n e ordre d e cesser toute
1719.
installation
à Sainte-Lucie. — 12 mai. — Ordonnance obligeant les capitaines de navires à transporter a u x îles des v a g a b o n d s c o n d a m n é s aux galères p o u r y servir p e n d a n t cinq ans en qualité d'engagés.
Les planteurs
signalent
le danger
d e ces
déclassés. — 17 novembre. —
Il est interdit a u x gouverneurs
d ' a v o i r des propriétés dans les colonies. 1720.
Les administrateurs Feuquières et Bénard autorisent,
c o m m e leurs prédécesseurs, le trafic des sirops a v e c les colonies étrangères. — décembre. — On frappe p o u r les îles une monnaie particulière, mais o n continue d'exiger en sucre l ' i m p ô t de capitation
fixé
en principe à 50 kgs par tête d ' e s -
69
1674-1763
claves, sauf exceptions totales o u partielles assez n o m breuses. — 27 décembre. — Les sucres achetés au m o y e n des cargaisons
de nègres sont exemptés
d e la moitié des
droits. —
Les pertes éprouvées au cours
de l'application d u
système de L a w obligent les planteurs, l'habitude
qui avaient pris
de résider la plupart d u t e m p s en F r a n c e ,
à revenir a u x îles p o u r surveiller de plus près leurs intérêts et leurs propriétés. — Il en résulte rapidement une prospérité plus grande, mais aussi une application plus stricte des conditions d u travail, c e qui p r o v o q u e en 1726 des soulèvements
sur plusieurs
habitations.
1721, 6 août. — L e Conseil de Marine interdit le surhaussem e n t de la monnaie dans les îles d u V e n t . 1722-1723. Les Anglais tentent une o c c u p a t i o n privilégiée de Sainte-Lucie (décembre 1722). Sur des représentations d u gouverneur de la Martinique, obéissant à des instructions préalables d e notre g o u v e r n e m e n t , ils quittent l'île le 8 janvier suivant. — Les Anglais tentent alors, mais sans succès, une o c c u p a t i o n
de S a i n t - V i n c e n t
sur les
Caraïbes. L a querelle au sujet de Sainte-Lucie dura j u s q u ' e n 1755. 1722, 3 août. — Déclaration d u roi sur l ' é p o q u e de la mise en valeur des concessions : un tiers dans les trois premières années, un autre tiers les années suivantes, le troisième tiers réservé. — Les droits d'entrée perçus en France sur les denrées des Iles d u V e n t s'élèvent à 2.500.000 l. par an. —
L e P. L a b a t publie son Nouveau
d'Amérique en six v o l u m e s .
Voyage
aux
Isles
70
MARTINIQUE,
—
GUADELOUPE
ET
DÉPENDANCES
28 décembre. — L'usage s'étant introduit q u e les
capitaines de navires négriers offrissent aux gouverneurs un p r é l è v e m e n t par c h a q u e cargaison d e 10 nègres au prix de 300 livres, alors q u e le prix réel était d ' u n millier de francs, — p o u r parer sans les supprimer p o u r t a n t a u x abus qui en résultaient, le roi rend une o r d o n n a n c e en vertu d e laquelle les capitaines n e seront plus tenus d e payer q u e d e u x p o u r cent sur leur cargaison, soit un p o u r cent au gouverneur, un d e m i à l'intendant et l'autre demi au gouverneur particulier. 1724, 18 mai. — Ordonnance royale traitant des mesures à prendre p o u r prévenir les empoisonnements
p a r les
esclaves, devenus plus fréquents depuis quelques années. — 11 septembre. — O r d o n n a n c e sur la voierie, qui demeurera en vigueur j u s q u ' à la fin d e l ' A n c i e n R é g i m e . Elle distingue les chemins r o y a u x ou publics, les chemins particuliers et les chemins d e c o m m u n i c a t i o n . 1726. L e roi valide le m o d e de partage des successions aux îles, partage égal en valeur et n o n en nature, p o u r éviter la division et la ruine des sucreries. —
E d i t autorisant les colonies des Antilles à exporter
en E s p a g n e , grande p o u r v o y e u s e d ' o r , toute espèce d e marchandises y compris les sucres, sauf les bruts réservés aux raffineries
du royaume.
1726-1738. L a classe des mulâtres c o m m e n ç a n t à devenir assez nombreuse p o u r inspirer de l'inquiétude a u x blancs, on les déclare inhabiles à hériter des blancs (1726), on leur défend de porter les mêmes n o m s q u e les blancs (1733),
on leur
interdit
le territoire
de la
métropole
(1738). 1727. D u p o y e t ,
gouverneur
de la Grenade,
gouverneur d e la Guadeloupe.
est
nommé
71
1674-1763
— octobre. — E d i t rétablissant a u x colonies un régime de prohibition absolue. Toutefois l ' i m p o r t a t i o n des viandes salées étrangères
est autorisée, à c o n d i t i o n
qu'elle se
fasse par navires français. Il est également permis a u x navires français
de porter
directement
en Espagne le
sucre raffiné des Antilles. Est
condamné
a u x galères
tout
individu
coupable
d ' a v o i r introduit des nègres o u marchandises autrement que par navire français. — O r d o n n a n c e généralement c o n n u e sous le n o m de Lettres
patentes
de 1727, établissant une sévère et m i n u -
tieuse répression d u « c o m m e r c e étranger » que le traité de neutralité de 1686 avait favorisé. Les Anglais useront de
représailles.
1729. Sur les instances de la Compagnie des Indes orientales, Maurepas interdit la culture d u café aux Iles d u V e n t . Les
colons
continuent
néanmoins
et l'année
suivante
e x p o r t e n t en France les premiers sacs. 1731. Autorisation d u trafic direct a v e c l ' I r l a n d e , le Cap V e r t et le D a n e m a r k , d ' o ù les Iles tirent les viandes salées d o n t se nourrissent les esclaves. Cette autorisation est renouvelée en 1 7 4 1 . 1732, 27 septembre. — Déclaration d u R o y autorisant l ' e n trepôt d u café dans les ports métropolitains de l ' A t l a n t i q u e et d e la Manche en v u e d e leur e x p o r t a t i o n dans les pays étrangers. 1732-1733. Les Anglais et les Français cherchent m u t u e l l e m e n t par des m o y e n s détournés à s'assurer la possession des îles Sainte-Lucie, Saint-Vincent —
et la
Dominique,
surtout celle d e Sainte-Lucie où plusieurs de leurs
nationaux sont installés, contrairement aux prescriptions de leurs gouvernements
respectifs.
72
MARTINIQUE,
La
1733.
France
GUADELOUPE
cède
ET
Sainte-Croix
DÉPENDANCES
au
Danemark
pour
738.000 francs ; nous n ' o c c u p i o n s plus en fait cette île depuis trente ans. Larnage,
1734.
gouverneur
gouverneur de la
de
la
Grenade,
est
nommé
Guadeloupe.
A partir de cette d a t e , l ' i m p ô t de capitation est p a y é
1735.
exclusivement en argent : il est de 6 livres. Le numéraire m a n q u a n t aux îles ou y étant p r o m p -
1736.
t e m e n t accaparé, il est décidé que les capitaines de navires v e n a n t de France seront tenus de vendre leurs m a r c h a n dises contre des denrées des îles propres à être écoulées en France, à des prix n o n plus imposés, mais débattus de gré à gré. Afin de se libérer, s'il était nécessaire, des exigences de c o m m e r c e causes
de
métropolitain
disette, le gouverneur,
M.
et de parer de
aux
Champigny,
ordonne de planter, entre autres cultures, le plus possible, 25 pieds de bananiers par tête d'esclaves (7 s e p t e m b r e ) . — 29 mai. — Les cafés p r o v e n a n t de nos colonies sont autorisés à pénétrer en France m o y e n n a n t certains droits, en concurrence avec la Compagnie des Indes qui avait seule le droit d'en
importer. L ' e x c é d e n t
d'importation
pourra être entreposé p e n d a n t six mois a v a n t de passer à l'étranger. — A la suite de cette mesure, la culture d u café se d é v e l o p p e rapidement aux Antilles. —
Un violent tremblement de terre est cause des plus
grandes pertes à la Martinique et à la G u a d e l o u p e . 1737,
16 mai. — Ordonnance dispensant les capitaines de
transporter des engagés, et leur prescrivant de
porter
à leur place les soldats nécessaires à la sécurité des îles. 1738.
L'introduction
des esclaves des Antilles en
France
étant interdite, elle est cependant tolérée pour permettre
73
1674-1763
un
apprentissage
ouvrier,
sans
q u e c e t apprentissage
d o i v e dépasser trois ans ; u n règlement royal d u 15 d é c e m b r e fixe les conditions de c e t apprentissage. 1744. L a France et l'Angleterre se déclarent m u t u e l l e m e n t la guerre les 17 et 29 mars. Dès le d é b u t des hostilités, les
Anglais
capturent
une quarantaine
de
bâtiments
français chargés de marchandises d ' E u r o p e . Les corsaires français r é p o n d e n t par des prises à p e u près équivalentes. Saint-Martin et Saint-Barthélemy ne p o u v a n t être d é f e n dues t o m b e n t
au p o u v o i r
— 5 juin. —
des Anglais.
Champigny
fait
occuper
Sainte-Lucie
par une c o m p a g n i e c o n d u i t e p a r de Longueville (8 juin). Celui-ci
est b i e n t ô t
remplacé
p a r de
Beyne,
envoyé
d'Europe. 1748, 28 octobre. —
Paix d'Aix-la-Chapelle.
Restitution
des conquêtes ; Saint-Vincent, la D o m i n i q u e , T a b a g o et Sainte-Lucie demeurent a u x Caraïbes. —
L e Maréchal de Saxe
d e m a n d e la souveraineté de
Madagascar p o u r la coloniser avec des familles allemandes. Le manque d'argent et d e navires le d é t o u r n e n t de cette entreprise ; il se contente de T a b a g o , c o n c é d é en s o u v e raineté relevant d e la c o u r o n n e . 1752.
B o r d e a u x exporte a u x îles p o u r plus de 5.500.000 1.
et en reçoit des denrées d'une valeur de 13.000.000 francs. 116
navires
accomplissaient
la traversée, 11
s'étaient
rendus en Guinée. D e 1750 à 1758, cette ville gagne dans son
commerce
tournois
grâce
avec
l'étranger
a u x denrées
194 millions
de livres
coloniales.
1754. Défense aux colons rentrant en France
d'emmener
a v e c e u x plus d ' u n nègre et obligation d e le ramener à leur retour, sous peine
d'amende.
74
MARTINIQUE,
1755.
Après
GUADELOUPE
de longues
Sainte-Lucie
nous
ET
DÉPENDANCES
contestations,
est reconnue
Longueville en est n o m m é
la possession
p a r l'Angleterre.
de De
gouverneur ; il o c c u p e r a ce
poste j u s q u ' à sa m o r t , en 1 7 6 1 . 1756. Les députés
du Commerce
à Paris
proposent
au
Ministre d'autoriser toutes les nations à faire le c o m m e r c e aux Iles j u s q u ' à ordre contraire. Les Chambres d e C o m merce protestent. L e Ministre n'autorise q u e les navires neutres munis d e passeports. L'année suivante l ' a u t o r i sation est étendue à tous les navires étrangers des colonies voisines. 1757. Pendant la guerre d e Sept ans, les Antilles privées de
subsistance
tirent leur
ravitaillement
des colonies
hollandaises et espagnoles. 1758. Les Anglais s'emparent de la G u a d e l o u p e . — Les circonstances de la guerre obligent le g o u v e r n e m e n t à autoriser la libre introduction des viandes étrangères. 1759. 25 janvier. — Ordonnance des administrateurs a c c o r d a n t p o u r quatre mois l'entrée sans droit et la sortie de m ê m e à tous navires français et neutres
apportant
des vivres dans les quatre ports principaux. Ils p o u v a i e n t emporter les denrées diverses d e l'Ile et n o n pas seulem e n t les sirops
ou les tafias. Le Ministre autorise le
26 juillet une entière liberté de c o m m e r c e p o u r les regnicoles o u étrangers porteurs de comestibles et autres effets. 1759, juillet. — Edit d e Création d'une Chambre mi partie du Commerce et d'Agriculture aux Iles d u V e n t . — 1
e r
décembre. — O r d o n n a n c e a c c o r d a n t aux g o u -
verneurs un traitement
fixe
en remplacement d u droit
de 2 % autorisé par l'Ordonnance de 1723. Il est a c c o r d é
1674-1763 au
gouverneur
un traitement
75
de 150.000
livres
et a
l ' i n t e n d a n t 120.000. Par une autre o r d o n n a n c e d u m ê m e j o u r , il est d é f e n d u a u x gouverneurs d'épouser des filles créoles. 1760, 15 a o û t . — Pacte de Famille, signé par les Maisons de France et d ' E s p a g n e , puis par celles d e Naples e t d e P a r m e . Il ébranle le système colonial
en A m é r i q u e espa-
g n o l e , mais il assure l'union des Maisons de B o u r b o n p o u r la p r o t e c t i o n d e leurs possessions dans le N o u v e a u M o n d e , les Antilles en particulier, dans l'état où elles se t r o u v e r o n t lors de la paix générale. L e régime d u traitement national était accordé a u x sujets des autres couronnes en matière de c o m m e r c e , de navigation et d'établissement (art. 23-25). Le
P a c t e créait d o n c une véritable union
économique
entre les colonies de la France et de l ' E s p a g n e . 1761, 19 décembre. — Arrêt d u Conseil d ' E t a t établissant un Bureau de législation des Colonies. Il se transforme rapidement
en un bureau de
contentieux.
— Election à la Martinique d u premier député des Iles en France :
Jean-Baptiste
D u b u c (1717-1795). Ce
créole, qui appartenait à l'une des principales
familles
de la Martinique, c o n n u e p o u r ses sentiments « r é p u blicains », c'est-à-dire autonomistes, d e v a i t devenir en 1765 Premier C o m m i s au Bureau des Colonies. Il j o u a c o m m e tel a u x côtés des ducs d e Choiseul et d e Praslin un rôle de premier plan. 1762, Les Anglais s ' e m p a r e n t 1763,
de la D o m i n i q u e .
10 février. — Traité de Paris.
La
France
recouvre
la Martinique, la
Guadeloupe,
Sainte-Lucie, Belle-Isle. Elle o b t i e n t le droit d e pêche à T e r r e - N e u v e et Saint-Pierre et Miquelon. Elle perd le Canada, l'Ile R o y a l e , la vallée d e l'Ohio et celle d u M i s sissipi, la Grenade et les Grenadines. Saint-Vincent, la
76
MARTINIQUE,
GUADELOUPE
ET
DÉPENDANCES
D o m i n i q u e et T a b a g o demeurent îles neutres. Elle renonce au Sénégal
sauf
Gorée. L ' E s p a g n e ,
p o u r reprendre la
H a v a n e , cède les Florides mais grâce au Pacte d e F a m i l l e , elle a reçu la Louisiane. Elle renonce au droit d e pêche à Terre-Neuve et reconnaît a u x Anglais celui de couper le bois de c a m p ê c h e sur les rives d u H o n d u r a s , à charge de détruire
les fortifications.
en
Elle
au Portugal
Elle restitue particulier
perd
aussi
ses possessions
San S a c r a m e n t o .
Minorque. d'Amérique,
L'Angleterre
acquiert
de grands d o m a i n e s , mais sa dette publique était passée p o u r la défense de ses colonies de 74 millions d e livres en 1739 à 1 3 2 , et la mise en valeur de s o n empire colonial devenait
problématique.
A v a n t de conclure affrontées
cette
p a i x , trois
thèses
s'étaient
:
1° Obtenir la Guadeloupe en rétrocédant le Canada. Les planteurs des îles anglaises espéraient s'assurer ainsi le m o n o p o l e d u c o m m e r c e des sucres. 2° Garder le Canada en r e n o n ç a n t à la G u a d e l o u p e . 3° Joindre Benjamin
au Canada Franklin
toutes les Antilles françaises-
avait soutenu la politique
nexion d u Canada, réfutant l'allégation
d'an-
q u e les treize
colonies, lorsqu'elles ne se sentiront plus menacées p a r le voisinage d e la France, se rendraient indépendantes. — 4 juillet. — M. d e B o u r l a m a q u e , gouverneur, reprend possession de la G u a d e l o u p e , au n o m de la F r a n c e . — Les Anglais
sont désintéressés
des dépenses
qu'ils
avaient
faites dans l'île p o u r des constructions et travaux d'utilité publique. — 8 juillet. — de la Martinique.
Les Français
reprennent
possession
TROISIÈME
Lorsqu'en
1763
la
PÉRIODE
:
Martinique
1763-1802
et
la
Guadeloupe
furent restituées à la France après une courte occupation par les forces britanniques, le Gouvernement, qui subissait depuis plusieurs années l'influence de la n o u velle école physiocratique, décida de réformer de fond en comble l'administration civile et militaire ainsi que le régime commercial des deux Iles. L'économiste
Le
Mercier de la
Rivière,
assumé de 1759 à 1762 la tâche délicate
qui
avait
d'Intendant
des Iles du V e n t , fut renvoyé à F o r t - R o y a l c o m m e Intendant de la Martinique a u x côtés du marquis de Fénelon n o m m é Gouverneur, tandis que le Président de Peynier gagnait
Basse-Terre
en
compagnie
du
Chevalier
de
Bourlamaque : pour assurer le libre épanouissement de la Guadeloupe le Gouvernement Général des Iles avait été
scindé
en
deux
gouvernements
particuliers
afin
de supprimer le contrôle des commissionnaires de SaintPierre sur l'ensemble du trafic des colonies jumelles et ceci marque une première offensive des
—
habitants
débiteurs contre les négociants créanciers. Tous ces administrateurs, hommes de grand savoir et de grand caractère, étaient acquis au libéralisme et
78
MARTINIQUE,
pour
cette
GUADELOUPE
raison,
semble-t-il,
ET
DEPENDANCES
avaient
été
chargés
d'appliquer les lois nouvelles, dont les unes, politique, étaient inspirées des idées de
d'ordre
Montesquieu
et les autres, d'ordre économique, reflétaient les idées de Quesnay — lois à la rédaction desquelles ils avaient assisté quand ils n ' y boré. Dès 1 7 6 1 ,
avaient
en effet,
pas directement
Choiseul avait
sailles un Bureau de Législation
créé à
collaVer-
des Colonies qui recueillit,
dans ses débuts au moins, toutes les suggestions utiles à la grande œuvre qui lui était assignée. Le m o m e n t avait
paru
être v e n u
de réorganiser
antillaises en tenant compte
les
possessions
de la maturité
politique
de leur population, du développement de leur culture et de leur industrie,
enfin de la situation
particulière
de la France et des conditions générales de l'économie mondiale. D u point de vue politique, la Cour avait
accepté
d'associer les habitants à la gestion de leurs intérêts collectifs, d'autant plus que le R o i , désirant se décharger sur eux de certaines dépenses militaires qu'il ne pouvait plus supporter, était contraint de leur accorder quelques concessions. Les Iles étaient donc dotées de Chambres d'Agriculture, Conseil
de Commerce
dont les députés auprès
seraient
désormais
en état
du de
faire entendre les avis des Planteurs que la v o i x des négociants de la Métropole avait jusqu'alors
étouffés.
Le Gouvernement semblait rendre de la bride, mais la transformation des milices devait consolider l'autorité royale en concentrant dans les mains du Général une puissance demeurée éparse entre les grands planteurs « c o m mandants de quartiers ». Cette mesure n'alla pas sans soulever de très vives résistances qui la tinrent en échec.
79
1763-1802 D u point de vue économique, une brèche était portée au principe de l'Exclusif
sérieuse
en faveur
des
sirops et des tafias dont l'écoulement à l'étranger était enfin autorisé en échange de matériaux nécessaires a u x sucreries
et
de
quelques
comestibles
indispensables.
Depuis le début du siècle les habitants avaient lutté pour obtenir cette permission, à défaut de la permission d'exporter
les sucres que la métropole
ne
parvenait
plus à absorber ; la vente des sous-produits de l'industrie
sucrière
contribuerait,
charges d'exploitation
disait-on,
à diminuer
sans cesse accrues par
les
l'accu-
mulation des crédits et l'élévation du prix des esclaves. Les
colonies
réformes
antillaises
de 1 7 6 3
politique, mais
avaient
donc
gagné
aux
une certaine liberté économique et
toutes
les
questions demeuraient
en
suspens. La cabale des Parlementaires et des Fermiers Généraux l'emportait à Versailles sur les Physiocrates ; les artisans principaux de ce qu'on appelait déjà la « régénération
» étaient
disgraciés
ou
paralysés
par
les intérêts particuliers coalisés pour mieux se défendre. Les Planteurs, refusant d'entrevoir la libération, s'assoà des
ciaient
mesures
toujours
plus restrictives
des
affranchissements ; les armateurs s'unissaient contre le relâchement du Pacte Colonial — autres
ne
comprenaient
qu'en
ni les uns, ni les
comprimant
certaines
forces on favorise leur explosion. Les avances des gens de Saint-Pierre
commençaient
en effet à peser durement sur les gens de la campagne : la majeure part des bénéfices par le service
agricoles était
des intérêts, tandis
dévorée
que les difficultés
auxquelles se heurtait la traite engendraient une hausse du prix
de revient
de la
main-d'œuvre
servile.
La
80
MARTINIQUE,
traite — —
GUADELOUPE
ET
DÉPENDANCES
et le système des engagements jusqu'en
1774
avait longtemps fourni un travail gratuit dès l'ins-
tant que les fonds d'achat avaient été amortis, car la « pratique du samedi », journée abandonnée au « nègre » pour la culture de son carré de terre, rendait ce malheureux responsable de son habillement et de sa nourriture. Mais
peu après la césure
XVIII
e
siècle, les
premiers
méfaits économiques des excès, auxquels les chasseurs d'hommes
s'étaient
livrés
sur
les
côtes
africaines,
s'étaient fait sentir. Les comptoirs s'étaient multipliés le long de l'Atlantique,
et les tribus riveraines
avaient
été dévastées. Il fallut désormais pénétrer dans l'intérieur des terres, jusqu'à deux cents lieues de l'océan, et cette incursion, avec tous les dangers qu'elle comportait alors, augmenta singulièrement le prix du « bois d'ébène
». Ce fut
un signe avertisseur ; la
nécessité
de sauvegarder une race, dont la disparition en son lieu d'origine menaçait d'arrêter le renouvellement des ateliers antillais, incita les administrateurs à se préoccuper d'une protection tardive —
et l'on se demanda si la
seule protection réelle ne consisterait pas dans l'affranchissement. E n faveur de la libération tout un m o u v e m e n t caractère évangélique
de
était né parmi les Quakers de
l'Amérique anglaise ; en France, un m o u v e m e n t
ana-
logue, de caractère rationnaliste, se dessinait chez les Philosophes, et ces deux tendances contribuèrent certainement Intendants
à développer des
chez les Gouverneurs
dispositions
favorables.
La
et les
question
fut agitée jusque dans les Bureaux du Ministre. Par un enchaînement invincible de circonstances, l'institution la plus efficace de la prospérité des Iles à Sucre était
81
1763-1802
condamnée ; la résistance que les Planteurs opposeront à
l'événement
créera
le plus profond
remous
de
la
période proprement révolutionnaire. M.
de Sartines, en
événements
qui
se
1 7 7 5 , semble préparaient
à
avoir
deviné
les
Saint-Domingue
c o m m e a u x Iles-du-Vent, si de sages réformes n'intervenaient à t e m p s . Le soulèvement de l'Amérique
du
Nord n'avait-il pas la valeur d'un présage ? D i x ans après que le Bureau
de Législation
créé par Choiseul
eût clos ses t r a v a u x — infructueux — il réunit dans un Comité
de Législation
des Colonies
les administrateurs
et les juristes les plus remarquables qu'il pût atteindre. Le comte d ' E n n e r y ,
Guillemain de Vaivres,
Malouet
alors à ses débuts, Foulquier, conseiller au Parlement de Toulouse, Le Mercier de la Rivière, le Martiniquais Moreau de Saint-Méry, juriste et archéologue, quelques autres encore, tous ces h o m m e s qui avaient vieilli dans la pratique des affaires antillaises, et parmi l'Empire
trouvera
des exécutants
lesquels
de premier
ordre,
collaborèrent à la grande œuvre de rénovation que le Maréchal de Castries, s'efforça
à la suite de
M.
de Sartines,
de réaliser.
Dès 1 7 8 0 , l'accord des commissaires et du Ministre était acquis, aussi bien
sur la question
sur celle de l'affranchissement nécessité
de
doter
les
colonies
des dettes et
des noirs, que sur la d'Amérique
d'assem-
blées élues, par l'intermédiaire desquelles les habitants pourraient
participer
à
l'administration
de
leur
île
d'une manière autrement efficace que par les Chambres d'Agriculture. entre
la
seules la
Les hostilités, qui se déroulaient
France
et
publication
ANTILLES
la
Grande-Bretagne,
des édits
alors
retardèrent
que le Comité
avait 6
82
MARTINIQUE,
GUADELOUPE
ET
DÉPENDANCES
longuement mûris. U n an après la Paix, le Roi signait l'arrêt célèbre constituant en ports d'entrepôt
Saint-
Pierre, Pointe-à-Pitre, Sainte-Lucie et Scarborough de Tabago,
ports où les étrangers
étaient admis à porter
en échange des sirops et des tafias un certain nombre de produits dénommés ; les facilités accordées en 1 7 6 3 et 1 7 6 5 étaient étendues (30 A o û t 1 7 8 4 ) . Q u a n t à l'acte de création des Assemblées Coloniales, il ne fut promulgué qu'en l'acte
1 7 8 7 , le 17 juin,
établissant
Provinciales
dans
calquées
la
quelques jours
Métropole
sur leur
les
avant
Assemblées
modèle.
Peu après le Maréchal de Castries quittait le pouvoir, et a u x réformes méthodiques que méditait une Monarchie pour laquelle le temps ne comptait pas, la R é v o lution
allait
donner
transfigura les effets.
un
rythme
précipité
D e 1 7 8 9 à 1 7 9 4 les
qui
en
Assemblées
métropolitaines voteront des mesures bouleversant sans aucun ménagement, sans aucune préparation, des situations complexes résultant d'un passé séculaire. L'accession des mulâtres, puis des noirs à la liberté et à l'égalité —
c'est-à-dire la ruine brutale et inconditionnelle des
Planteurs —
cette tentative
de révolution
sociale à
laquelle la révolution politique qui s'opérait en France n'offre rien d'analogue, devait jeter les deux îles dans des désordres sanglants. Chacune d'elles traversa « pour son compte » la tempête : leur histoire particulière présente pour cette période une disparité complète. Tandis qu'à la Martinique, les Planteurs
appelaient
à leur aide l'Angleterre pour échapper aux lois françaises préparant l'abolition de l'esclavage et restaient pendant huit
ans, de 1794 à 1802 sous la domination
britannique, les
Planteurs guadeloupéens qui avaient
83
1763-1802
adressé le m ê m e appel, ne purent conserver plus de six mois les positions qu'ils avaient acquises avec le concours de l'étranger. Le
Commissaire
civil
Victor
Hugues,
grâce
à
la
fidélité de Sainte-Lucie, reprenait pied à Pointe-à-Pitre quelques mois après la reddition de R o c h a m b e a u
au
Fort R o y a l devenu un instant Fort République, et la Guadeloupe connut un régime de semi-liberté pendant que les esclaves de la Martinique demeuraient sous le j o u g . Jusqu'au guerre
traité
d'Amiens
franco-anglaise,
la
en
1802,
Guadeloupe
terminant
la
constitua
un
v i v a n t foyer de patriotisme d'où les idées révolutionnaires Le
rayonnèrent
rétablissement
sur toute
l'Amérique
de l'esclavage
et
du
Nord.
de la traite,
retour à l'édit de 1 7 8 4 limitant les ports
le
d'entrepôt
y furent accueillis avec résistance et il s'en fallut de peu que la révolte des noirs n'eût les mêmes suites qu'à Saint-Domingue. A la Martinique, au contraire, où la population avait été sevrée de liberté, les lois de 1 8 0 2 passèrent presque inaperçues. Les Planteurs e u x - m ê m e s , quelque tage qu'ils eussent retiré de l'ouverture
avan-
de tous
les
ports de l'île, ne se sentaient pas blessés dans leurs intérêts ; sous la domination anglaise, ils avaient connu la concurrence
des autres
Iles à sucre
britanniques,
de la Jamaïque en particulier, sur le marché de leur nouvelle
métropole ; redevenus
français, ils
voyaient
s'établir à leur profit un Exclusif qui jouait dans les cadres de leur patrie agrandie par les conquêtes de la Convention et du Directoire. La
Révolution
avait retardé
de cinquante
ans
réalisation des réformes préparées par la Monarchie.
la
84
MARTINIQUE,
1763.
GUADELOUPE
L a Martinique
et la
ET
DÉPENDANCES
Guadeloupe f o r m e r o n t
deux
gouvernements particuliers, indépendants l ' u n d e l'autre. Par cette mesure o n s'efforce de r o m p r e la sujétion é c o n o mique sujétion
d e la G u a d e l o u p e
de la
Martinique,
qui résultait d e la concentration
vis-à-vis
des affaires
entre les mains des commissionnaires
d e Saint-Pierre,
et qui paralysait le d é v e l o p p e m e n t normal de la colonie. L e transport des denrées à Saint-Pierre accroissait les prix de revient et créait un véritable handicap
au profit
des planteurs martiniquais. —
Sugar Act (dirigé principalement contre les colonies
françaises des Antilles), réduisant d e 50 %
les droits
prévus par la loi de 1733 sur les sucres importés de l'étranger dans les colonies anglaises.
L a v o l o n t é d e le mettre
en application, alors q u ' u n t e x t e antérieur était demeuré lettre m o r t e , p r o v o q u e un m é c o n t e n t e m e n t général. L a c o n t r e b a n d e , d'ailleurs, le rend
inefficace.
— 9 avril. — Création d'une Chambre
d'agriculture
à la G u a d e l o u p e et à la Martinique. — 18 avril. — Mémoire d u R o i p o u r servir d'instruction générale a u x gouverneurs et intendants d e ces colonies sur l ' e x p o r t a t i o n des sirops et tafias de leur crû en échange des effets et denrées spécifiées dans la présente instruction. — 30 Juin. — O r d o n n a n c e décidant l'expulsion totale des noirs qui se t r o u v e n t dans le r o y a u m e . — juillet. —
Etablissement d ' u n service régulier d e
p a q u e b o t s entre la France et les Iles. — Les régiments d e ligne sont substitués a u x troupes détachées d e la marine p o u r la défense des îles. Des
85
1763-1802
détachements des régiments de Beauvais, d e Saintonge, d e V e r m a n d o i s et d e V e x i n arrivent successivement en 1763, 1765, 1767 et 1769. — Les planteurs a y a n t manifesté les plus grandes répugnances à accepter ces d é t a c h e m e n t s , les régiments
ci-dessus seront
remplacés
en 1772 par
4 régiments spéciaux, sédentaires, d o n t 2 p o u r
Saint-
D o m i n g u e , 1 pour la Martinique et 1 p o u r la G u a d e l o u p e . Ces forces s'étant avérées insuffisantes
au m o m e n t où
la guerre menaçait dans les colonies anglaises d ' A m é r i q u e , elles furent renforcées en 1775 à la Guadeloupe par l'envoi d u régiment d ' A r m a g n a c (affaire L a b o r d e , 14 janvier 1778). Ces mesures avaient p o u r résultat d e superposer a u x milices, troupes locales dans la main des planteurs, des forces métropolitaines chargées de sauvegarder un régime que l'esprit d ' a u t o n o m i e des grands sucriers m e t t a i t sans cesse en péril. 1766. D u b u c d u Ferret remplace J . - B . D u b u c au Conseil d u Commerce. 1768, 20 septembre. — Rétablissement d u g o u v e r n e m e n t général des Antilles sous la d é n o m i n a t i o n d e g o u v e r n e m e n t général des Iles d u V e n t d e l ' A m é r i q u e . 1771.
Emilien
Petit publie
un recueil
de lois
antillaises
sous le titre de Droit Public ou Gouvernement des colonies françoises. 1772, 18 août. — Création de 4 régiments coloniaux sous la d é n o m i n a t i o n d e régiments d u C a p , d e P o r t au Prince, Martinique et G u a d e l o u p e . 1774, 10 septembre. — Arrêt supprimant officiellement les engagements, qui avaient en fait à p e u près cessé dès 1737. — Recrudescence de la traite négrière. — 29 décembre. — D e Nozières, gouverneur général, et Tascher, intendant, promulguent une ordonnance astrei-
86
MARTINIQUE,
GUADELOUPE
ET
DEPENDANCES
g n a n t les gens d e couleur se disant libres à représenter dans un délai de trois mois les titres et leur affranchissem e n t . — Cette o r d o n n a n c e f u t annulée par un arrêt d u Conseil d ' E t a t d u 8 juin 1776. Sartines c o n v o q u e à Versailles des gouverneurs g é n é -
1775,
r a u x et des intendants d e passage en France p o u r d i s cuter de la réforme des colonies. Il constitue en 1778 u n n o u v e a u Comité de Législation
des Colonies, d o n t
font
partie M M . d ' E n n e r y , d e Tascher, de Foulquier, Malouet, etc..
L'année suivante L e Mercier de la Rivière y est
appelé et en d e v i e n t
le secrétaire-général.
Ce c o m i t é
prépare un ensemble m o n u m e n t a l de projets, d o n t certains passeront dans la législation en 1784 et 1787. 1776, juin. — E d i t relatif à la conservation des Archives et des papiers 1777, 1
e r
publics.
juin. — O r d o n n a n c e p e r m e t t a n t
l'introduction
en France des sirops et des tafias des colonies, mais p a r entrepôt et p o u r être ensuite exportés à l'étranger. — 9 août. — Déclaration d u roi renouvelant l'interdiction d u séjour des noirs en France et o r d o n n a n t de renv o y e r c e u x qui s'y t r o u v e n t . —
Emilien Petit publie son Traité sur le gouvernement
des esclaves. — Malouet est e n v o y é en G u y a n e a v e c mission d ' e n réformer
l'administration
et d e créer
une
Assemblée
coloniale, sur le t y p e a d o p t é par le Comité de législation. 1778, 6 février. — L a France signe un traité secret « d'amitié et de c o m m e r c e » a v e c les insurgés d ' A m é r i q u e . Par les art. 6 et 7 la France renonçait à t o u t e r e v e n d i cation o u c o n q u ê t e sur le continent américain e t les E t a t s Unis promettaient de ne p o i n t faire obstacle à des a c c r o i s -
1763-1802
87
sements de notre souveraineté dans les Indes Orientales. L'article 32 d u traité d e c o m m e r c e spécifiait q u e les ports francs des Antilles — qui n'étaient en réalité q u e des ports d ' e n t r e p ô t — demeureraient t o u j o u r s ouverts a u x « Américains ». Par l'interprétation q u e ces derniers p r é tendirent d o n n e r à cette stipulation, le régime é c o n o m i q u e des îles d u V e n t aurait été entièrement bouleversé ; il f u t , en réalité, p r o f o n d é m e n t —
transformé.
Les neutres sont admis à ravitailler les Iles, c o m m e
ils l'avaient fait dans les dernières années d e la guerre de Sept A n s . D e v a n t les protestations des armateurs, la mesure est rapportée. 1778-1782. A u cours
de la guerre
franco-américaine,
le
marquis de Bouille, gouverneur général des Iles, s'empare de la D o m i n i q u e en 1778, Saint-Vincent et la Grenade 1779, de T a b a g o ,
en
Saint-Eustache
et
Saint-Martin
en 1781, d e Saint-Christophe, Nièves et Montserrat en 1782 ; il échoue d e v a n t Sainte-Lucie. L e v i c o m t e d e D a m a s conquiert Saba. D e fréquents c o m b a t s navals furent engagés entre les amiraux français
d'Estaing,
Guichen
e t , d e Grasse, et
les amiraux anglais B y r o n et R o d n e y . D e Grasse, soutenu par l'amiral espagnol Solano, s u c c o m b a dans la dernière attaque a u x Saintes et fut fait prisonnier (12 avril 1782). 1781, 24 novembre. — Parmi tous les textes préparés p a r le Comité de législation, le maréchal de Castries publie une o r d o n n a n c e sur les Missions et une autre sur les chemins 1782.
publics.
François d e Foulquier, Président au Parlement de
Toulouse et m e m b r e d u Comité de Législation des C o l o nies, est n o m m é intendant de la Guadeloupe (2 février). Il a mission d e réformer l'administration et la justice ; il y créera une Assemblée coloniale. Il deviendra en 1786 intendant de la Martinique où il décédera le 13 février 1789.
88
MARTINIQUE,
GUADELOUPE
— 16 mai. —
Suppression
ET
DÉPENDANCES
du député
des Antilles
auprès d e la cour d e France. — Les droits sur les sucres sont portés à 60 livres par
quintal. 28 juin. — Arrêt encourageant la traite des Noirs.
1783,
— 3 septembre. — Traité d e Versailles. L ' i n d é p e n d a n c e des Etats-Unis est r e c o n n u e . Les pêcheries de T e r r e - N e u v e et la navigation d u Mississipi sont c o m m u n e s à l ' A n g l e terre et à l ' A m é r i q u e . L a France reçoit T a b a g o . 1784, 16 avril. — L e Ministre interdit d e transporter des nègres d'une colonie à l'autre. Il s'agit de préserver les cultures en conservant à c h a q u e exploitation sa m a i n d'œuvre. — 30 août. — Arrêt constituant en ports
d'entrepôt
Saint-Pierre de la Martinique, Pointe-à-Pitre de la G u a d e l o u p e , Sainte-Lucie, L e Cap Français,
Port-au-Prince
et Les Cayes d e S a i n t - D o m i n g u e ; et autorisant les étrangers à y porter certaines espèces d e comestibles, quelques matières premières
(bois, c h a r b o n s , cuirs, résines, g o u -
drons) et des animaux d e toute nature. Ainsi s'organise le système d e l' « Exclusif mitigé ». — 20 octobre. —
Cession
de l'île
Saint-Barthélemy
à la Suède afin d ' o b t e n i r la faculté d e déposer des m a r chandises dans le p o r t de G o t t e m b o r g et d e les réexporter sans payer d e droits. — 31 octobre. — Arrêt d u Conseil d ' E t a t
autorisant
tous les ports d e France à participer au c o m m e r c e des Iles. 1786, 27 mai. — Arrêt instituant le « d r a w b a c k » en faveur des sucres. Les droits sont restitués et lorsqu'il
s'agit
des sucres raffinés, une prime de 4 livres est p a y é e p o u r chaque quintal
réexporté.
1763-1802
89
— décembre. — Organisation d ' u n service régulier d e paquebots
entre la France
Saint-Domingue.
et les Antilles, y
U n e rivalité
commerciale
compris
inquiétante
c o m m e n c e à s'établir entre Basse-Terre et P o i n t e - à - P i t r e . 1787, 17 juin. — O r d o n n a n c e p o r t a n t établissement dans les Iles d u V e n t , après expérience à la G u a d e l o u p e , d'une Assemblée Coloniale et d ' u n Comité intermédiaire aux lieu et place des Chambres d'Agriculture.
Cette
assemblée,
élue p o u r quatre ans et renouvelable p a r moitié p a r les assemblées paroissiales, avait p o u r mission d e délibérer sur l'assiette et la répartition de l ' i m p ô t ordonné par le R o i . T o u t propriétaire d e 12 esclaves o u d ' u n e
maison
v a l a n t 40.000 £ était électeur. L ' A s s e m b l é e coloniale était c o m p o s é e d u gouverneur, l'intendant, le plus ancien
commissaire
de la marine,
2 députés d u Conseil souverain, 1 d é p u t é élu de chacune des paroisses de l'île, 2 députés des propriétaires d e SaintPierre et d e P o r t d e France (1 p o u r c h a q u e ville). L a première assemblée se réunit le 27 d é c e m b r e 1787. 1788, 11 septembre. — L a qualité de représentants d e la colonie est refusée a u x neufs Commissaires d u Comité Colonial e n v o y é s en F r a n c e . — novembre. — E d i t étendant a u x colonies l'application d e l'édit d e n o v e m b r e 1787 restituant a u x p r o testants un état-civil. 1789, 5 mai. — l'inauguration
Necker, dans s o n discours p r o n o n c é à des Etats Généraux, déclare :
« U n jour viendra peut-être, Messieurs, où v o u s é t e n drez plus loin v o t r e intérêt ; un jour viendra
peut-être
où associant à v o s délibérations les députés des colonies v o u s jetterez un regard de compassion sur ce malheureux peuple d o n t on a fait tranquillement un barbare
objet
de trafic ; sur ces h o m m e s semblables à nous par la pensée
90
MARTINIQUE,
GUADELOUPE
ET
DÉPENDANCES
et surtout p a r la faculté d e souffrir ; sur ces h o m m e s c e p e n d a n t q u e sans pitié p o u r leurs douloureuses plaintes nous a c c u m u l o n s , nous entassons au fond d ' u n vaisseau p o u r aller ensuite à pleines voiles les présenter aux chaînes qui les a t t e n d e n t . » — 1
e r
juillet. — Moreau de Saint-Méry est élu prési-
d e n t des Electeurs d e Paris. A ce titre il jouera un rôle i m p o r t a n t p e n d a n t les journées d u 13 et d u 14. Il fait nommer
le 15 L a F a y e t t e
commandant
d e la
Garde
Nationale, et décerne à Bailly le titre n o u v e a u de Maire de Paris. Il harangue le R o i lors d e sa réception à l ' H ô t e l de Ville le 17. — 25 septembre. —
Les colons
d e la
Martinique
résidant à Paris élisent p o u r députés Moreau de SaintMéry et le c o m t e A r t h u r de Dillon, maréchal d e c a m p depuis
1784 et ancien
gouverneur
de Tabago.
Dillon
appartenait à une famille anglaise implantée en France et avait acheté à la Martinique une i m p o r t a n t e habitation. Il défendit la cause des Grands Blancs et s'opposa v i v e m e n t le 4 mars 1791 à l'admission à la barre de l ' A s s e m blée d'une d é p u t a t i o n de gens de couleur. (Voir 1792). 1790, 28 mars. —
Décret
d e l'Assemblée
Constituante
autorisant les colonies à élire au suffrage universel (les indigents
seuls
étaient
exclus)
des assemblées
locales
chargées « d e faire connaître leurs v œ u x sur la Constitution, la législation
et l'administration
qui leur
con-
viennent. » — 9 avril. — Proclamation d u R o i sur un décret d e l'Assemblée
Nationale d u 28 mars 1790 et concernant
l'élection des Assemblées coloniales. — 15 mai. — Grâce à l ' a b b é Grégoire, à Robespierre et à R e w b e l l , les droits de citoyens actifs sont reconnus
1763-1802
91
aux mulâtres « fils de père et mère libres ». Mais une colonie telle q u e S a i n t - D o m i n g u e ne c o m p t a i t q u e 20.000 mulâtres sur 455.000
habitants.
— 21 juin-7 juillet. — Décret o u v r a n t tous les ports de France au c o m m e r c e colonial. 1791,15 mars. — L o i s u p p r i m a n t les primes d e réexportation et établissant les droits suivants : 18 francs par quintal de sucre b r u t , 36 francs p a r quintal de sucre terré et 50 francs p a r quintal d e sucre raffiné. Quelques jours plus tard, le 29 mars, des surtaxes réduites sur les sucres étrangers furent adoptées afin d e créer une légère p r o tection en faveur des sucres des colonies. — 3 avril. — L e Comité d'Agriculture et de C o m m e r c e s'adjoint d e u x m e m b r e s supplémentaires choisis dans les « députations » d e la Martinique et de la Guadeloupe : Moreau de Saint-Méry p o u r la première et le sieur d e la Charrière pour la s e c o n d e . Ainsi les intérêts de chacune des d e u x îles p o u r r o n t être librement défendus à l ' A s s e m blée Constituante. — 9 avril. — L ' A s s e m b l é e Constituante, sur l'interv e n t i o n de Moreau de Saint-Méry, écarte le p r o j e t d u Ministère des Colonies et laisse l'administration des territoires d ' o u t r e - m e r au Ministre de la Marine. (Voir 1669). — 9 décembre. — L'Assemblée Coloniale d e la Martinique a d o p t e l'idée des colons d e la Guadeloupe d e réunir un Congrès Général chargé d'élaborer un statut c o m m u n p o u r les Iles de la G u a d e l o u p e , de la Martinique, de SainteLucie et de T a b a g o . 1792, 28 mars. — Décret a c c o r d a n t à tous les h o m m e s d e couleur libres, sans distinction d'origine, les droits politiques.
92
MARTINIQUE,
GUADELOUPE
ET
DÉPENDANCES
— 4 avril. — Décret assimilant les h o m m e s de couleur et les nègres libres a u x b l a n c s , dans l'exercice des droits politiques. — J u i n . — A r t h u r de Dillon, d é p u t é d e la Martinique, est n o m m é c o m m a n d a n t en chef de l'armée d u N o r d . D e v e n u suspect après le 10 a o û t , il f u t mis sous les ordres
de Dumouriez,
mais
il partagea
ses intrigues.
D é n o n c é à la C o n v e n t i o n , il d e m a n d a à être relevé de ses fonctions e t à retourner a u x Antilles. Déféré au T r i bunal R é v o l u t i o n n a i r e , il f u t c o n d a m n é à m o r t le 14 avril 1794 et exécuté le m ê m e j o u r . (Voir 1789). — 11 août. — L a C o n v e n t i o n supprime par d é c r e t la prime accordée à la traite des noirs. — 22-23 août. — L o i organisant la représentation des colonies françaises à la C o n v e n t i o n . S a i n t - D o m i n g u e e u t 18 députés ; la G u a d e l o u p e 4 ; la Martinique 3 ; L a R é u nion, l'Île-de-France et l ' I n d e Française, 2 ; Sainte-Lucie, T a b a g o et la G u y a n e , 1. — 19 septembre. — Les républicains d e la Martinique réfugiés à R o s e a u de la D o m i n i q u e élisent députés Crassous de Médeuil, a v o c a t au Conseil Supérieur de F o r t R o y a l , Janvier L i t t é e , h o m m e de couleur, et Arnaud d e Corio, d é p u t é suppléant. Les Républicains élisent
Guillermin,
c o m m e suppléant,
qui décédera
de la G u a d e l o u p e
en m e r , D u p u c h e t ,
Lion.
1793, 19 février. — D u b u c et L. de Curt, délégués p a r les planteurs de la Martinique et de la G u a d e l o u p e , signent un accord a v e c les Anglais à W h i t e h a l l . (Voir Martinique), accord
formellement
r é p r o u v é p a r les Princes
émigrés
qui espéraient établir leur autorité dans les d e u x îles. — 19 février-26 mars. — Décrets accordant a u x navires des « Américains » des facilités p o u r c o m m e r c e r a v e c les Antilles e t les approvisionner en vivres.
1763-1802
93
— 29 mai et 16 novembre. — L e Martiniquais Alexandre de Beauharnais est n o m m é général en chef d e l ' A r m é e d u R h i n (29 mai) et le Guadeloupéen
Coquille D u g o m -
mier général en chef d e l ' A r m é e des Alpes et d'Italie (16
novembre).
— 11 septembre. — L a Convention supprime tous les droits perçus à l ' o c c a s i o n d u trafic colonial. Les sucres étrangers s u p p o r t e n t des taxes très faibles d e 3 fr. 60, 7 fr. 20 et 10 francs par quintal suivant leur qualité. Un droit de 0 fr. 50 fut rétabli pour les besoins de la Trésorerie le 3 Frimaire an V sur les sucres c o l o n i a u x . — 21 septembre. — Acte de Navigation p a r lequel la C o n v e n t i o n exclue les marines étrangères d u trafic colonial et d u c a b o t a g e : « Car sans marine, p o i n t d e colonies et sans colonies, p o i n t de prospérité c o m m e r c i a l e . » (Barnave). — octobre. — L a Martinique
et la G u a d e l o u p e
se
constituent s p o n t a n é m e n t en d é p a r t e m e n t s . — Les Anglais reconquièrent T a b a g o . 1794,
4 février (16 Pluviôse an I I ) . — « L a Convention
déclare aboli l'esclavage des nègres dans toutes les colonies ; en conséquence elle décrète q u e tous les h o m m e s sans distinction de couleur, domiciliés dans les colonies, sont citoyens français et j o u i r o n t d e tous les droits assurés par la Constitution. » — Cette mesure confirma l'affranchissem e n t des noirs de S a i n t - D o m i n g u e accordé par le c o m m i s saire S a n t h o n a x , le 29 a o û t 1793. A u x Petites Antilles la loi ne parvint à la Martinique, qui v e n a i t d e t o m b e r au p o u v o i r
des Anglais, q u e plusieurs semaines
après
sa c o n q u ê t e ; seule la p o p u l a t i o n servile d e la Guadeloupe p u t en éprouver l'application. —
13 octobre. — Crassous d e Médeuil, député
d e la
Martinique, propose à la Convention l'érection à E r m e -
94
MARTINIQUE,
GUADELOUPE
ET
DÉPENDANCES
nonville d u m o n u m e n t dédié à Jean-Jacques
Rousseau.
Il sera n o m m é secrétaire d e la C o n v e n t i o n le 22 o c t o b r e . 1795, 18-19 juin. — Sainte-Lucie est reprise p a r G o y r a n d aux Anglais, qui a b a n d o n n e n t dans la rade 150 b â t i m e n t s . Elle est reperdue le 1
er
juillet 1796 après une héroïque
défense. Les Anglais a y a n t perdu b e a u c o u p d e m o n d e d o i v e n t renoncer à leurs opérations contre la G u a d e l o u p e . 1799,11 janvier. — A c h a r d présente à Frédéric-Guillaume I I I de Prusse le premier échantillon d e sucre d e b e t t e r a v e . Il obtient une s u b v e n t i o n r o y a l e . Les Anglais s'efforcent de faire obstacle à la nouvelle industrie qui se d é v e l o p p e en B o h ê m e , en Silésie et en Russie. 1800.
L a Constitution de l ' A n V I I I supprime la d é p u t a t i o n
coloniale, mais maintient les colonies sous la puissance d u Législatif en f o n d a n t leur régime sur des lois.
QUATRIÈME
L'Exclusif teurs
PÉRIODE
:
1802-1848
mitigé et l'esclavage restaurés, les Plan-
pouvaient
espérer
en
un
second
dix-huitième
siècle. Mais l'Histoire ne recommence pas. Pendant tout le cours des guerres
napoléoniennes,
l'Angleterre isola les Antilles de la France, quand elle ne les occupa pas : ces îles éprouvèrent donc les effets de l'abolition de la traite dès 1 8 0 7 , année où Lord Grenville la fit voter par le Parlement, et par conséquent dix ans avant qu'elle fût promulguée en France. Le prix de revient de la m a i n - d ' œ u v r e servile — plus rare —
toujours
s'accrut au point de grever sensiblement
le coût de production du sucre. L'utilisation de la betterave, rendue nécessaire par le blocus et officiellement encouragée par
l'Empereur
en 1 8 1 2 , porta un autre coup à la culture des colonies du Vent. Très rapidement l'industrie sucrière, déchargée de toute fiscalité, prit dans la Métropole des proportions considérables et les Planteurs subirent une concurrence que les lois de 1 8 3 7 ,
1 8 4 0 et 1 8 4 3 eurent pour objet
d'affaiblir, mais non de supprimer. Le m o u v e m e n t des idées en faveur de l'affranchissem e n t des noirs se manifestait
d'autre part avec une
96
MARTINIQUE,
GUADELOUPE
ET
DÉPENDANCES
force imposante par tout l'Occident ; l'opinion publique, en
Angleterre
comme
en
France,
était
entièrement
acquise a u x principes pour lesquels Wilberforce avait c o m b a t t u depuis 1 7 8 7 , et que défendaient avec autant de courage que de talent Tocqueville, Broglie,
Passy
et Victor Schoelcher. Les conventions internationales, qui se succédèrent à partir de 1 8 3 1 en v u e de dépister la contrebande
négrière, et certaines lois
améliorant
le statut des esclaves annonçaient la grande
mesure
libératrice. Celle-ci fut votée en Angleterre dès 1 8 3 3 . Mais en France le parti des Planteurs demeurait puissant, et en 1 8 4 2 , à propos Anglais
prétendaient
du droit
exercer
en
de visite que les
vertu
des
accords
antérieurs, les négriers impénitents réussirent à faire revenir en arrière le gouvernement
royal, au
risque
de compromettre les relations diplomatiques entre Paris et Londres. E n dépit de ce sursaut de résistance, la législation
française
s'acheminait
vers
l'abolition,
et
la Seconde République put renouveler sans danger le geste de la Première ; le gouvernement provisoire prévit d'ailleurs de prudentes mesures
d'application...
L'expropriation des Planteurs pour être adoucie n'en était pas moins presque complète. L'essor de l'industrie sucrière dans la Métropole
semblait,
à vrai dire, la
rendre inévitable ; on verra plus loin à quels
efforts
d'adaptation les Antillais durent de sauvegarder situation, métropole.
en partie au moins,
sur le marché
leur de la
1802-1848
97
1802, 25 mars. — Paix d ' A m i e n s . L'Angleterre restitue la Martinique mais garde la Trinité (espagnole) et la G u y a n e (hollandaise). — 26 mai. —
Nouvelle
organisation
administrative
des colonies. Gouvernées p a r un Capitaine Général, un Préfet Colonial et un Grand J u g e , elles sont soumises à un régime de décrets. — 30 mai. — L o i rétablissant l'esclavage et la traite. — 18 juin. —
Organisation de la justice suivant le
régime de la m é t r o p o l e . — 23 juin. —
L e d i t d e 1784 sur le c o m m e r c e est
rétabli. — 2 juillet. — Les mulâtres perdent leurs droits politiques. Il leur est interdit d'entrer dans la Métropole. 1803-1805.
L e Code
civil
est p r o m u l g u é
aux
Antilles.
1807, février. — L a traite des nègres est défendue au P o r tugal. — 2 mars. — Les Etats-Unis interdisent l'importation d'esclaves africains à partir d e 1808. — 25 mars. — Lord Grenville fait v o t e r par le P a r lement l'abolition
de la traite, déjà
restreinte
l'année
précédente. L'African Institution, qui s'organise, veillera au respect d e la l o i , à son extension à l'étranger, à l ' é d u cation des noirs et au d é v e l o p p e m e n t des connaissances concernant l'Afrique. Les colonies d'Afrique
deviennent
des colonies de plantation. 1809. Les Anglais conquièrent la Martinique sur Villaret ANTILLES
7
98
MARTINIQUE,
GUADELOUPE
ET
DÉPENDANCES
J o y e u s e , prennent les Saintes, et l'année
suivante la
Guadeloupe. 1810. Les sucres bruts et sucres têtes s o n t frappés d ' u n droit de 300 et d e 400 francs p a r quintal. Les colonies antillaises étant t o m b é e s a u x mains des Anglais, cette fiscalité n'atteint
q u e les sucres étrangers.
Néanmoins
ce tarif prohibitif f u t supprimé par u n t e x t e d u 23 avril 1813 qui établit un droit u n i f o r m e
d e 40 francs par
quintal. 1812,15 janvier. — Décret en faveur d e l'industrie d u sucre d e b e t t e r a v e rendu p a r N a p o l é o n à la suite d e la visite de la sucrerie fondée à Passy p a r Delessert. Cinq écoles et quatre fabriques impériales sont fondées, 500 licences accordées et 32.000 hectares consacrés à la culture de la b e t t e r a v e . 1814, 30 mal. — Traité d e Paris. L a France récupère ses colonies dans l ' é t a t où elles se trouvaient le 1
er
jan-
vier 1 7 9 2 , sauf T a b a g o , Sainte-Lucie cédées à l ' A n g l e terre,
ainsi
q u e le S a i n t - D o m i n g u e
espagnol
rendu à
l'Espagne. L a Belgique est d o n n é e au Prince des Pays-Bas, qui s'engage à indemniser la Suède de la restitution d e la G u a d e l o u p e en lui a b a n d o n n a n t une des colonies hollandaises conquises par la Grande-Bretagne ; mais la Suède se c o n t e n t e d'une s o m m e d e vingt-quatre millions p a y é e par cette dernière. 1814-1818, Divers textes surchargent les sucres
étrangers
(surtaxe d e 20 francs en 1814, de 60 à 80 francs en 1816). Grâce
au tarif
préférentiel
dont
elles profitent, les
Antilles accroissent leur p r o d u c t i o n et entrent en lutte avec Bourbon.
P o u r égaliser les situations, une loi d e
1818 établit une distinction suivant l'origine et ramène à 40 francs en faveur de la colonie d e l ' O c é a n Indien le droit sur les sucres français porté p r é c é d e m m e n t à 45 francs.
99
1802-1848 1815,
4 février. —
puissances
L'Angleterre
européennes
l'acte
s o u m e t a u x principales d'abolition
de la Traite
et obtient leur signature. — 29 mars. — N a p o l é o n , revenu d e l'île d ' E l b e , et désireux de plaire à l'Angleterre, abolit définitivement la traite. E n mars 1818, seulement, la mesure sera appliquée. — avril. —
Tandis
q u e Napoléon
se p r é o c c u p e
de
négocier a v e c S a i n t - D o m i n g u e , les royalistes émigrés à Gand travaillent à conserver coûte que coûte au R o i les Antilles et le Sénégal, mais les Anglais s'en e m p a r e n t . 1816, 28 avril. — L e droit d'entrée en France sur les sucres étrangers est augmenté de 100 % et porté à 125 francs par quintal. Les étrangers sont évincés d u marché m é t r o politain. L a loi d u 27 juillet 1822, c e p e n d a n t , augmenta encore les droits et les porta à 135 francs. — L'Angleterre restitue la Martinique et la Guadeloupe à la France. 1817, L e g o u v e r n e m e n t français, dans l'esprit des Lettres de 1727, s'attaque à la c o n t r e b a n d e . — A b o l i t i o n d e la traite. — 30 avril. — O r d o n n a n c e surhaussant la monnaie à raison de 185 livres les 100 livres de France. — août. — Par ordonnances Roi
supprime
les intendants.
des 13 et 30 a o û t le L e Gouverneur
« Gouverneur et Administrateur
devient
p o u r le R o i ».
— 17 décembre. — Les colons des Antilles réclamant un abaissement d u tarif d u 23 avril sur les sucres, le Trésor répond en établissant un droit d e 40 francs sur le quintal de sucre b r u t des colonies et en portant à 60 et 65 francs le droit sur le sucre étranger.
100
MARTINIQUE,
GUADELOUPE
ET
DÉPENDANCES
1819, 22 septembre. — Les Conseils Supérieurs d e v i e n n e n t Cours
Royales
Première chaque
et les Sénéchaussées des T r i b u n a u x
Instance. colonie
et un Comité des Colonies,
Ministre, c o m p o s é
de
U n Comité consultatif est créé dans de délégués
auprès d u
choisis p a r ce dernier.
1820, 7 juin. — L a prime accordée à la r é e x p o r t a t i o n des raffinés, fixée à 90 francs p a r quintal par la loi d u 28 avril 1816, puis à 95 francs en 1818, est portée à 100 francs. 1821.
Depuis 1815 le prix des sucres est t o m b é en France
de 90 francs les 50 kilogs à 60, 55 et 50 francs. 1822.
L o i douanière sur les colonies françaises.
1825, 21 août. — Réorganisation d e l'administration c o l o niale. Au-dessous
d u gouverneur
concentrant
tous les
p o u v o i r s , le Directeur de l'Intérieur, le Procureur Général et l ' O r d o n n a t e u r se partagent l'administration intérieure, la justice et la défense de la colonie. L e Conseil
Privé
j u g e au contentieux a v e c appel au Conseil d ' E t a t . Le roi n o m m e
les conseillers
municipaux
qui p r o -
posent une liste sur laquelle le R o i choisit les conseillers généraux. Les Conseillers généraux proposent le député au Comité des Colonies. U n e ordonnance d u 9 février 1827 précisera les modalités
d'application.
1826, 26 janvier. — Convention franco-britannique, a u x termes de laquelle les navires des d e u x nations sont soumis à un régime c o m m u n dans les d e u x métropoles et dans leurs colonies. — 5 février. — Ordonnance autorisant l'entrée dans les îles de bâtiments étrangers. 1827, Création d ' u n conseil général au m o y e n des n o m i n a tions faites par le roi sur une liste de candidats proposés par les Conseils m u n i c i p a u x . — L e Conseil général n o m m e
1802-1848 le
député
devant
faire
partie
101 d u Conseil
consultatif
siégeant à Paris. 1830, 12 novembre. — A b o l i t i o n des règlements qui privent les h o m m e s d e couleur des droits de citoyens, et p r o c l a mation de leur assimilation à la race blanche. 1831, 4 mars. — Loi m e t t a n t fin au trafic clandestin des esclaves p a r des mesures rigoureuses de prohibition. — 30 novembre. — Convention
entre la France e t
l'Angleterre autorisant le droit d e visite réciproque afin de faire respecter les lois d'abolition d e la traite. 1832, 8 mars. — Les nègres trouvés dans les navires négriers sont
proclamés
libres.
— 12 juillet. — L a procédure de l'affranchissement est simplifiée. — L o i simplifiant les formalités d e l'affranchissement et supprimant la taxe perçue à cette occasion. 1833, 22 mars. — Convention au sujet d u d r o i t de visite précisant les juridictions compétentes en cas d'infraction aux lois d'abolition suivant le lieu d u délit. — A la suite d e débats à la Chambre des Pairs (le 1
e r
mars) et à la Chambre des Députés d u 13 avril au 23,
le Moniteur Officiel promulgue une d o u b l e loi sur l ' e x e r cice des droits politiques dans les colonies et sur leur régime législatif.
D'après
cette l o i , les colonies où les
Conseils généraux se c o m p o s a i e n t d e membres
nommés
par le r o i , sont remplacés p a r des conseils
coloniaux,
élus par des collèges
constitués
comme
électoraux
en France d'après
spéciaux,
le cens. T o u t
h o m m e libre
p a y a n t 200 et 300 francs d ' i m p ô t était électeur au Conseil, mais il fallait posséder, pour être éligible, un bien d'une valeur comprise situation.
entre 60 et 40.000 francs, suivant la
102
MARTINIQUE,
GUADELOUPE
ET
DÉPENDANCES
Sur cette base, les blancs, quoi qu'inférieurs en n o m b r e , représentaient à eux seuls 16.665.271 francs de capital, tandis
que les électeurs
de
couleur
ne
représentaient
que 788.077 francs. Aussi les seuls blancs furent-ils élus a u x Conseils. Les Conseils n o m m a i e n t , p o u r c h a q u e colonie,
deux
délégués auprès d u roi. Le gouverneur était assisté d'un Conseil Colonial, élu pour
5 ans, obligatoirement
consulté sur t o u t ce
qui
concerne la p o l i c e , l'affranchissement des esclaves, l'instruction publique et la presse. — 14
mai.
—
Lord
Stanley,
secrétaire
d'Etat
des
Colonies, dépose le p r o j e t du g o u v e r n e m e n t anglais pour l'abolition de l'esclavage. Ce p r o j e t v o t é le 12 juin par la Chambre des C o m m u n e s et le 23 par la Chambre des L o r d s , fut p r o m u l g u é le 28 a o û t . — 4 août. —
Loi o r d o n n a n t le recensement
obliga-
toire des esclaves. Les colons s'opposèrent v i v e m e n t à l ' e x é c u t i o n de ce t e x t e qu'ils interprétaient c o m m e une mesure préparatoire de l'abolition. L a Cour d ' A p p e l
de
la Martinique rend 38 arrêts d ' a c q u i t t e m e n t contre c e u x qui o n t c o n t r e v e n u à la loi. L a Cour de la G u a d e l o u p e , d e v a n t laquelle les prévenus furent renvoyés par la Cour de Cassation, maintient les sentences. — L o i supprimant la « marque » et la mutilation des nègres 1834.
marrons.
L'Angleterre émancipe les esclaves de ses colonies.
A la suite de cette mesure plusieurs centaines de noirs français passent à la D o m i n i q u e et à Sainte-Lucie. — Bissette fonde à Paris la Revue des Colonies
où
il poursuit sa c a m p a g n e en faveur de l'abolition de l'esclavage.
103
1802-1848
Les Conseils Généraux des Iles consultés au sujet d e
1835.
l'affranchissement des esclaves déclarent q u e la Métropole n'a pas le droit d e légiférer sur une telle matière. — 10 octobre. — Ordonnance affranchissant d e tous droits de d o u a n e les sucres exportés d e n o s colonies des Antilles pour la France et créant un droit de 3 % sur les marchandises v e n a n t d e F r a n c e . 1836. L o i rétablissant l'ancien adage d e droit q u e l e « sol d e France affranchit » : t o u t esclave débarqué dans la Métropole sera réputé i m m é d i a t e m e n t libre. 1837. Henri Passy p o r t e à la tribune d e la Chambre la question de l'abolition d e l'esclavage. U n e c o m m i s s i o n , instituée à sa d e m a n d e , v o t e l'abolition pure après
certaines
opposent —
mesures
préparatoires.
et simple,
Les colons
s'y
résolument.
Organisation des municipalités.
1837-1843. P o u r réduire la concurrence de la M é t r o p o l e , un droit de 15 francs est établi par quintal de sucre de b e t t e r a v e (18 juillet 1837). A la suite d e cette l o i , 103
fabriques
disparurent
atteint 40 millions
et la p r o d u c t i o n
d e kilogrammes
tomba
qui avait à 23. Sur
les instances des colonies de nouvelles aggravations furent décidées à l'égard des sucres métropolitains. Les lois d u 3 juillet 1840 et d u 2 juillet 1843 unifièrent les textes et les fabricants européens conservèrent le seul privilège de la v e n t e des sucres raffinés : leur importation demeurait interdite.
Les sucres
étrangers
étaient
fortement
sur-
taxés (20 francs a u x cent kilogrammes). 1839, 11 juin. — Ordonnance royale prescrivant le recensem e n t général de la population libre et esclave. Ce recensement accusa une p o p u l a t i o n d e 96.322 esclaves, d o n t 11.741 dans les villes et 84.581 sur les propriétés rurales.
104
MARTINIQUE,
GUADELOUPE
ET
DÉPENDANCES
— Loi fixant un certain n o m b r e de cas d'affranchissem e n t de droit. — T o c q u e v i l l e , rapporteur de la commission
chargée
d'étudier la question de l'affranchissement des esclaves, c o n c l u t à la nécessité de passer outre aux « ingénieuses clameurs...
d'une
des
aristocraties
les
plus
exclusives
qui aient existé dans le m o n d e ». Il estime à 250.000 le n o m b r e des esclaves et leur valeur à 300 millions ; il propose la libération après une période préparatoire de dix
années. L a
proposition
ne
fut pas discutée ; une
nouvelle commission fut réunie l'année suivante. —
Le pape Grégoire X V I prend fait et cause p o u r les
abolitionnistes. 1840. Victor
Schœlcher
(né
en
1804)
publie
l'Abolition
de V Esclavage. 1840-1845. Un p r o j e t de c o n v e n t i o n générale au sujet d u droit
de visite
et auquel
toutes les nations
devaient
participer est rédigé. A u m o m e n t de l'échange des ratifications,
en 1842, les armateurs nantais protestent, et
au n o m d u principe
de la liberté
des mers
s'élèvent
contre un traité à la suite d u q u e l , selon e u x , la G r a n d e Bretagne se serait assuré une véritable suprématie m a r i t i m e . L a Chambre refuse la ratification et v o t e l ' a b a n d o n des c o n v e n t i o n s de 1831 et 1833, à quoi s'oppose Guizot. Celui-ci fut c e p e n d a n t obligé de céder, et le 29 mai 1845 une c o n v e n t i o n fut signée a v e c l'Angleterre
suspendant
p o u r dix ans les d e u x accords incriminés.
Cependant,
le 20 février 1842, l'Angleterre, la Prusse et la avaient
signé
ouverte à la 1841. Chaque
la
Convention
Générale
en
Russie
la
laissant
b u d g e t local
distinct
France. colonie dispose d'un
des dépenses d'intérêt général.
105
1802-1848
1843, 20 avril. — Les denrées d u crû sont exemptes à leur sortie des îles d e tous droits d e d o u a n e , mais, p o u r tenir lieu de l ' i m p ô t foncier qui ne peut être perçu en l'absence de cadastre régulièrement établi, elles acquittent un droit spécial de 4 % sur les sucres et les sirops et d e 3 % sur les tafias, à la Martinique ; de 2 francs p a r quintal de sucre et 3 francs par quintal de café à la G u a d e l o u p e . L e Mercier d e la Rivière en 1764 avait, déjà eu l'idée de percevoir l ' i m p ô t foncier sous forme de droits de sortie. (Voir Martinique, 1764). — 29 avril. —
L o i autorisant l'entrée
a u x Antilles
de 61 marchandises étrangères d é n o m m é e s , classées en d e u x catégories distinctes : 1° Catégorie de produits p o u r lesquels il existe des marchandises similaires en France ; u n droit protecteur est perçu afin d'avantager l'industrie métropolitaine. 2° Catégorie
de
produits
pour
lesquels
il
n'existe
pas d e similaires en France ; un simple droit de balance est perçu. — 2 juillet. — Loi i m p o s a n t graduellement au sucre de betterave les droits établis sur le sucre de cannes. Cette mesure ne supprime pas la concurrence de la p r o d u c t i o n métropolitaine qui atteint en 1859, 102 millions de
kilogrammes
alors
que l'exportation
Martinique, d e la Guadeloupe
réunie
d e la
et B o u r b o n n'atteint q u e
93 millions. 1844, 23 janvier. — D e u x pétitions signées par des ouvriers de Paris et d e L y o n sont adressées à la Chambre en faveur de l'émancipation
des Noirs.
1843-1845. — Broglio, rapporteur de la commission constituée en 1840, conclut à l'abolition au b o u t de 10 ans, les propriétaires recevant une indemnité. L e G o u v e r n e m e n t
106
MARTINIQUE,
GUADELOUPE
ET
DÉPENDANCES
préfère à cette solution le système de l'affranchissement progressif. D ' o ù les lois suivantes : L a Chambre v o t e par 193 v o i x c o n t r e 52 un p r o j e t d e loi, préparatoire à la libération des esclaves, sur le rachat forcé des esclaves, le droit à l'instruction, la durée d u travail, le droit de propriété mobilière et les pénalités applicables aux maîtres (14 mai 1844). L'esclave est autorisé à posséder et à se racheter luim ê m e , p r o c é d é déjà admis par l'Ancien R é g i m e (1845). L o i fixant, les crédits p o u r l'introduction de travailleurs européens. (19 janvier 1845). —
L ' E t a t affranchit tous les esclaves d u d o m a i n e de
la Martinique, la G u a d e l o u p e , la G u y a n e et B o u r b o n . —
Des tribunaux spéciaux sont constitués p o u r juger
les crimes c o m m i s par des esclaves contre des h o m m e s libres
ou
inversement.
CINQUIÈME
PÉRIODE
:
1848-1935
Napoléon I I I avait effacé les effets politiques de la Révolution de 1 8 4 8 , mais il n'avait pu et ne désirait pas revenir sur l'abolition de la servitude. Très attaché au
libéralisme
anglophiles,
économique
il s'orienta
et
dans
animé une
de
sentiments
direction
nouvelle
que les physiocrates avaient indiqué jadis sans pouvoir y engager le G o u v e r n e m e n t . L'Empereur commerce
signait
avec
la
régime
du
cessait
d'être réservé
en
1860
le
célèbre
Grande-Bretagne
libre-échange
:
le
marché
traité
de
inaugurant
le
métropolitain
a u x Colonies, le Pacte colonial
n'existait plus. U n an plus tard, ce nouvel état de fait était consacré par un décret établissant dans les colonies elles-mêmes
le régime
Les Planteurs obtenaient
de la « porte
ouverte ».
la liberté quand ils ne pou-
vaient plus, semble-t-il, en profiter. Ils réussirent,
cependant,
à tirer parti des
crédits
consentis par les Banques que le Gouvernement patronait, et renouvelèrent avec les machines de provenance anglaise le matériel de leurs usines. Grâce aussi à une m a i n - d ' œ u v r e peu coûteuse recrutée en Inde, en Indochine, et un m o m e n t sur les côtes d'Afrique, les habi-
108
MARTINIQUE,
GUADELOUPE
ET
DÉPENDANCES
tants de la Martinique et de la Guadeloupe conservèrent une place enviable sur le marché français. De plus en plus, les rhums dans
les
consommateur XVIII
e
e
la
s'écoulaient
anglaises
furent
métropolitain,
et
exclusivement
appréciés
ce
qui
par
n'était
le au
siècle qu'une monnaie d'appoint dans les échanges
des deux îles XIX
qui jadis
colonies
avec l'extérieur
en devint à la fin du
la monnaie principale. On revint d'ailleurs force
des
choses
à un
protectionnisme
sous
sévère
et
la loi de 1922 réserva à la Martinique et à la Guadeloupe la majeure part du contingent des rhums affecté
aux
colonies, leur sauvegardant ainsi un élément de richesse qu'elles
n'étaient
plus
assurées
de trouver
dans
les
sucres. E n définitive, les deux Iles ont su adapter leur économie a u x conditions nouvelles de l'économie mondiale, c o m m e elles ont su s'adapter moralement et psychologiquement au régime de liberté et d'égalité instauré par les Lois et la Constitution de la République. Représentés au Antillais
Parlement
par leurs
mandataires
revendiquèrent c o m m e
un
élus, les
honneur
l'appli-
cation du principe du service militaire universel obligatoire ; il leur fut étendu en 1 9 1 1 , et lorsque trois ans plus tard leur patriotisme fut mis à l'épreuve, non contents de contribuer à la défense de la Patrie c o m m u n e , ils assurèrent encore, après la paix, la reconstruction des deux cités d ' É t a i n et de Neuvilly.
1 8 4 8 , 4 mars. — Loi abolissant l'esclavage. Une
commission
est
nommée,
présidée
par
Victor
1848-1935
109
Schœlcher (1804-1893) a v e c mission d e fixer les mesures d'application. — 5 mars. — Décret suivi d'une instruction le 8 mars, établissant le suffrage
universel.
L a Martinique
et la
Guadeloupe reçoivent chacune trois députés ; elles élisent l'une et l'autre V i c t o r Schœlcher qui opte p o u r la p r e mière. — 27 avril. — Décret proclaman t libres tous les esclaves. Une indemnité
est prévue
pour les propriétaires. Ces
mesures engendrent des troubles très graves, en particulier à la G u a d e l o u p e . 1849. L a loi sur l'inscription
maritime est rendue appli-
cable a u x Antilles. — L'indemnité à verser aux propriétaires p o u r chaque esclave affranchi est fixée à 430 francs à la Martinique, 470 à la G u a d e l o u p e , 618 à la G u y a n e et 705 à la R é u n i o n . Ces chiffres très inférieurs à la réalité suscitent chez les planteurs
une v i v e
indignation.
Les colonies
entrent
dans une période de crise grave. Pour retenir les noirs, les habitants leur offrent un salaire, mais ne réussissent pas à les conserver. Les affranchis se réunissent et forment de nouvelles
paroisses.
En v u e de parer au m a n q u e d e m a i n - d ' œ u v r e on envisage d e recruter des travailleurs en Chine, dans l ' I n d e et sur la côte occidentale d'Afrique. Grâce à cette nouvelle traite déguisée, qui c o m m e n ç a
en 1854, la p r o d u c t i o n
d u sucre, qui était t o m b é e d e 33 millions de kilogrammes en 1848 à au-dessous de 12 millions en 1 8 5 1 , se releva et dépassa en 1858 le niveau antérieur à l'abolition. 1851, 13 juin. — L o i protégeant le sucre métropolitain en t a x a n t le sucre colonial à 6 francs le quintal et le sucre étranger de droits variant entre 12 et 32 francs selon sa provenance et le pavillon. L'égalité entre le sucre de
110
MARTINIQUE,
GUADELOUPE
ET
DÉPENDANCES
betteraves et le sucre de cannes était prévue au terme d ' u n délai d e 4 ans. Les droits frappant les sucres étrangers furent augmentés de 1 o u 2 francs selon la catégorie par le décret d u 27 mars 1852. — Suppression d u G o u v e r n e m e n t Général des Antilles. Publication d e la Case de l'Oncle Tom, de M a d a m e
1852.
Beecher-Stowe. — L a Constitution nouvelle supprime la représentation des colonies au Parlement et remet au Sénat le p o u v o i r de légiférer à leur sujet. U n « Comité consultatif » est créé la m ê m e année, c o m p o s é d e m e m b r e s délégués p a r les Conseils Généraux des Colonies o u n o m m é s
par le
Chef de l ' E t a t . 1854. Sénatus-Consulte
distinguant
les affaires
coloniales
exigeant le v o t e d'une loi et les affaires p o u v a n t
être
réglées par un décret. — 3 m a i . — Sénatus-Consulte réglant
l'organisation
administrative de la Martinique et la G u a d e l o u p e . — 24 juillet. — Décret concernant les Conseils généraux des colonies. —
D é c r e t instaurant a u Ministère de l a
Marine un Comité
Consultatif.
1854-1860. Introduction d e la m a i n - d ' œ u v r e e x o t i q u e p o u r suppléer à l'insuffisance de la m a i n - d ' œ u v r e a u t o c h t o n e . En
1854, arrivent les premiers
Indiens, en 1857 des
Africains, en 1859 des Chinois. — En 1860, la colonie comptait
4.155 Indiens, 2.995
Africains,
184 Chinois.
— L a propriété m o y e n n e , et m ê m e la petite propriété, s'accroissent très sensiblement. 1855.
D e u x décrets d u 31 juillet et d u 29 septembre c o m -
plètent le sénatus-consulte d u 3 mai 1854. L a totalité des i m p ô t s perçus dans les colonies est abandonnée a u x
1848-1935
111
budgets l o c a u x . Les dépenses de l'armée, d u g o u v e r n e m e n t et d e la justice demeurent à la charge de l ' E t a t , tandis que les charges correspondant a u x t r a v a u x publics, à l'enseignement, e t c . , i n c o m b e n t à la colonie. C'est en définitive
le retour au s y s t è m e
pratiqué
par l'Ancien
Régime. 1856, 3 0 janvier. — Décret, confirmé par la loi d u 18 août 1857, autorisant l ' i m p o r t a t i o n a u x Antilles d e m a r c h a n dises d e Pondichéry et de l ' I n d e Française spécialement d é n o m m é e s . Ces produits étaient nécessaires a u x coolies immigrés
a u x Iles
depuis
l'abolition
de
l'esclavage.
L a loi de 1857 p r é v o y a i t également l'introduction, sans droits, p a r tous navires d ' a n i m a u x propres à la r e p r o d u c tion et l'admission d u t a b a c et de la vanille sous des droits différents. — 16 août. — Décret riales
des colonies
sous-quartiers,
fixant
les subdivisions territo-
antillaises ; création
des quartiers,
etc..
1857, Hausse d u cours des sucres.
Grâce
aux bénéfices
importants qu'ils réalisent, les usiniers renouvellent leur matériel et perfectionnent la technique d e la fabrication. 1857-1858. L a fabrication d u sucre d e betterave qui atteignait 64 millions de kilogrammes en 1848 et dépassait 90 millions en 1855 se chiffre à 151 millions, grâce aux progrès constants de la fabrication. 1858, 24 juin. — Création d u Ministère de l'Algérie et des Colonies, confié au Prince Napoléon, fils de J é r ô m e . — 21 novembre. — Création d ' u n Conseil Supérieur d e l'Algérie et des Colonies, organisme purement consultatif. 1859, 15 août. — Amnistie accordée à quelques proscrits célèbres. Schœlcher refuse d'en profiter.
11.2
MARTINIQUE,
GUADELOUPE
ET
DÉPENDANCES
1 8 6 0 , 28 m a i . — A la suite d u traité de c o m m e r c e signé avec
l'Angleterre,
le marché
métropolitain
est
ouvert
aux sucres étrangers. Un droit très faible de 1 fr. 50 par 100 kilogs les frappait lorsqu'ils étaient portés par navires étrangers, droit qui fut supprimé par le décret d u 16 j a n vier 1861. Les droits perçus sur les sucres étrangers étaient considérablement
réduits.
Depuis 1853 l ' A d m i n i s t r a t i o n régime
colonial.
La
signature
étudiait la réforme du
traité de
préparé par Chevalier d e v a i t modifier
du
commerce
entièrement
les
données d u p r o b l è m e . Les villes maritimes, les Chambres de c o m m e r c e les plus attachées au système de l'Exclusif, toutes reconnaissaient « qu'il n'est plus possible de m a i n tenir les dispositions d u Pacte Colonial à la charge des colonies quand les dispositions à leur profit
n'existent
plus. » — A partir de cette date les planteurs utilisent les crédits que leur a c c o r d e n t les banques à transformer les usines de petites dimensions e m p l o y a n t des moulins à vent
en de
vastes
manufactures
outillées
industrielle-
m e n t . L a p r o d u c t i o n totale d u sucre s'accroît dès lors dans une très forte proportion et atteint en 1884 105 m i l lions de kilogrammes, d'une valeur de 61 millions
de
francs. Mais le d é v e l o p p e m e n t de la culture de la b e t t e rave en France d e v a i t porter un c o u p presque fatal à l'industrie
sucrière
des
Iles.
Le
chiffre
du
commerce
total tombe à 60 millions en 1905 (32 pour la Martinique, 28 pour la G u a d e l o u p e , chiffre qui se relève à 40 millions en 1913). —
L'introduction aux Iles de Noirs de l'Afrique o c c i -
dentale est interdite. 1 8 6 1 , 3 juillet. — Loi établissant aux Antilles un régime de liberté commerciale à peu près absolue.
1848-1935
113
Le principe d e l'Exclusif ne j o u a i t surtout q u ' à l'égard des Anglais puisque les vaisseaux espagnols avaient t o u jours bénéficié d'une
e x c e p t i o n et q u e les Américains,
depuis 1778, jouissaient également, de grands a v a n t a g e s . Or en 1860 la France et la Grande-Bretagne
avaient
signé le célèbre traité d e c o m m e r c e base d'une véritable « entente cordiale ». Il était d o n c naturel d'abattre le dernier rempart qui séparait les Antilles d u m o n d e é c o n o m i q u e britannique. Désormais
toutes
les marchandises
étrangères
dont
l'introduction est permise en France p e u v e n t être importées à la Martinique, à la Guadeloupe (et à la Réunion) sous les mêmes conditions douanières q u ' e n France et sous tous pavillons. (Une surtaxe variant d e 10 à 20 francs est c e p e n d a n t perçue dans le cas où le navire est étranger). Les produits
de la Métropole
peuvent
être
également
portés dans les colonies — o u l'inverse — sous pavillons étrangers, mais dans ce cas une surtaxe de 20 francs par tonneau est perçue. Enfin les produits coloniaux autres que le sucre, le c a c a o , le café et les fruits o n t
l'entrée
libre en France. — 27 juillet. —
Décret
d o u b l a n t les droits
perçus
sur les tabacs étrangers e t les fixant à 120 francs p a r 100 kilogs s'ils sont en feuilles et à 240 francs s'ils s o n t préparés. 1862, 12 décembre. — Un contingent d e volontaires de la Martinique et d e la Guadeloupe débarque à la Vera Cruz pour soutenir l'expédition française d u M e x i q u e . Bazaine félicitera en 1865 le corps antillais d e sa belle conduite au cours des hostilités. 1863, 31 août. — Décret établissant le Crédit foncier C o l o nial, fondé pour une durée de 60 ans au capital d e 12 m i l lions d e francs. ANTILLES
8
114
MARTINIQUE,
GUADELOUPE
ET
DÉPENDANCES
1864, 8 novembre. — Convention internationale signée par la F r a n c e , la Grande-Bretagne, la Hollande et la Belgique, établissant un régime 1865,
c o m m u n p o u r les sucres.
L e p r o c é d é d e l ' e x t r a c t i o n d u jus par diffusion r é v o -
lutionne
l'industrie
sucrière
européenne.
Elle
ne sera
mise en pratique sur une large échelle q u ' à partir d e 1880. 1866, 4 juillet. —
Sénatus
Consulte modifiant
celui d u
3 m a i 1854 et élargissant les attributions des Conseils généraux des colonies. 1867, 26 mars. — Déclaration d i p l o m a t i q u e c o m p l é t a n t la C o n v e n t i o n de 1864. L'Assemblée
1875.
Nationale
attribue
a u x Antilles une
représentation au Parlement. 1878, 16 mars. — Prise de possession de l'île Saint-Barthél e m y rendue à la France par le traité d u 10 a o û t 1877. L a liberté d u c o m m e r c e a v e c tous les pays fut i m m é d i a t e m e n t accordée à la nouvelle colonie (10 o c t o b r e ) . 1880. L'institution d u j u r y est étendue a u x Antilles. 1883, 19 octobre. — Décret organisant le Conseil Supérieur des Colonies — (complété et modifié en 1890, 1891, 1898, 1904, 1905 et 1906). —
Les
travaux
de
cultures
vivrières
occupent
23.149 travailleurs ; plus de 89.174 autres étaient attachés a u x t r a v a u x salariés d'agriculture. Les importations furent de 28.110.848 francs exportations de 32.235.938 1884. L a loi organisant
et les
francs.
les municipalités
est appliquée
aux Antilles. L'une des plus anciennes revendications des colons reçoit satisfaction. — 26 juillet. — L a France a d o p t e le système
fiscal
115
1848-1935
pratiqué par l'Allemagne : l ' i m p ô t sur la b e t t e r a v e , au lieu de l ' i m p ô t sur le sucre. 1889,
18 juillet. — L o i étendant a u x créoles l'obligation
d u service militaire. 1893,
25 décembre. — Mort d e V i c t o r Schœlcher.
1897, 7 avril. — Nouvelle loi sucrière établissant un régime n o u v e a u en faveur des colonies et relevant les droits perçus sur les sucres étrangers. 1898.
Conférence
d e Bruxelles.
E n v u e de remédier
à
l'avilissement des cours d u sucre, des délégués de l ' A l l e m a g n e , l ' A u t r i c h e , la Grande-Bretagne, la F r a n c e , les Pays-Bas, la Russie et la Suède se réunissent à Bruxelles. Ils reconnaissent l'impossibilité d'élaborer un statut efficace t a n t q u e les Etats-Unis se tiendront à l'écart. 1911.
L e service militaire universel
obligatoire est i n t r o -
duit à la Martinique et à la G u a d e l o u p e à la d e m a n d e des deux
colonies.
1914-1918. A u cours d e la Grande Guerre, la Martinique, la Guadeloupe — et la Réunion — fournissent un contingent d e 51.618 c o m b a t t a n t s
sur lesquels 32.918 furent tués,
blessés ou mutilés. 1917,29 décembre. — Décret ratifié par la loi d u 13 mars 1920 interdisant l'importation en France d e sucres, alcools et mélasses en p r o v e n a n c e d e l'étranger. 1919,8 juillet. — Décret ratifié par la loi d u 20 décembre 1922 interdisant l ' i m p o r t a t i o n des sucres, mélasses, sirops et alcools étrangers dans toutes les colonies françaises. 1920, 25 juin. — L o i fixant le régime des rhums coloniaux aux Antilles et dans la Métropole. Ils sont e x e m p t s d e la surtaxe sous certaines conditions.
116
MARTINIQUE,
GUADELOUPE
ET
DÉPENDANCES
1 9 2 2 , 31 d é c e m b r e . — Loi sur le c o n t i n g e n t e m e n t . « A partir d u 1
janvier 1923, seuls p o u r r o n t
er
être
importés en France en e x e m p t i o n de la surtaxe prévue par l'article 89 de la loi d u 25 juin 1920 et jusqu'à c o n c u r rence d'une quantité annuelle de 160.000 hectolitres les rhums et tafias originaires des colonies françaises présentant les caractères spécifiques définis par l'article 6 d u décret d u 19 a o û t 1921 et ne titrant pas plus de 65°. » (art. 9) A la suite de cette loi, un décret fut rendu le 20 février 1923, fixant ainsi la répartition entre les colonies d u contingent qui leur était alloué : Martinique .
80.000 hl.
Mayotte . . .
Guadeloupe.
60.000
»
Madagascar.
18.000
»
Nouvelle-
140
»
Réunion...
Guyane Indochine...
1.133
»
92 hl. 630
»
Calédonie.
2
»
Océanie . . . .
3
»
Dans l'intérieur de c h a q u e colonie la répartition était faite entre les fabricants au prorata de leur
production,
par arrêté d u gouverneur sur avis de la Chambre
de
C o m m e r c e , de la Chambre d'Agriculture et des délégués des usiniers. Le décret d u 27 d é c e m b r e 1923 éleva le
contingent
pour l'année suivante à 185.000 hectolitres. L a part des d e u x îles fut accrue de 6.000 hectolitres chacune. 1 9 2 3 , 17 février. — l'exportation
des
Arrêté établissant la prohibition
de
sucres.
1 9 2 8 , 1 3 avril. — Loi fixant le régime douanier des colonies. Celles-ci sont divisées en deux groupes d o n t l'un, assimilé à la Métropole, c o m p r e n d
les Antilles
et la
Guyane,
Madagascar, la Réunion et l ' I n d o c h i n e . 1 9 3 1 , 10 juillet. — Loi autorisant les colonies à émettre des emprunts mique.
pour faire
face à leur outillage
écono-
LA MARTINIQUE
« La Martinique, la meilleure et la plus riche colonie qu'eut la France... » (VOLTAIRE, Le Siècle de Louis XV, t. II, chap. xxxv).
PREMIÈRE PÉRIODE: 1635-1674 La Martinique, dont la superficie est de 9 8 8 kilomètres carrés, n'est que deux fois plus étendue que le département
de la
Seine. Occupée
et colonisée à
l'origine,
c o m m e la Guadeloupe, par l'initiative des deux premiers gouverneurs de Saint-Christophe, d ' E s n a m b u c et Poincy, tivement fortune
à qui elle resta nominalement plutôt qu'effecsubordonnée, de
rencontrer
la
Martinique
d'abord
un
eut
l'heureuse
gouverneur
plus
humain ou plus avisé que ses collègues des autres î l e s ; ce fut D u Parquet. A la liquidation de la Compagnie des Iles d'Amérique, celui-ci acheta son propre gouvernement
pour
60.000
livres
et
l'exploita
jusqu'à
sa
mort, en 1 6 6 0 , sans se heurter à trop de difficultés. Il vit l'industrie sucrière se développer assez rapidement. Sa mort fut suivie de l'expulsion des Caraïbes et, parmi les colons, il régna pendant
quelque temps un
fort
mauvais esprit. D u Parquet laissait des enfants mineurs
120
LA MARTINIQUE
et leur tuteur fut un h o m m e maladroit.
Lorsque les
abus des seigneurs propriétaires des îles se furent accrus au point
de déterminer le gouvernement
à
racheter
leurs droits et à constituer une compagnie nouvelle qui fut la Compagnie des Indes occidentales, le roi n o m m a un gouverneur
particulier de la Martinique,
qui
fut
M . de Clodoré. La guerre ayant éclaté en Europe entre la France et l'Angleterre, le Roi jugea que, dans l'intérêt de leur défense c o m m u n e , il était nécessaire de placer toutes nos îles ou possessions des Antilles sous un gouvernem e n t unique et c'est alors, en 1 6 6 7 , que fut constitué le gouvernement général des Antilles qui, avec quelques retouches, a duré jusqu'à la Révolution. La Martinique, dont les ports se prêtaient mieux à l'abri de nos et
de
notre
commerce,
fut
choisie
comme
flottes
chef-lieu
de nos établissements et elle dut à ce choix la prospérité privilégiée dont elle a joui pendant plus d'un siècle. Le premier gouverneur général fut M. de Baas, de la famille
du
célèbre
d'Artagnan;
il
était
fonction lorsque la Compagnie des Indes disparut en Dès
encore
en
occidentales
1674.
1 6 6 4 , les premiers recensements effectués
à la
Martinique accusent une population de 3.515 habitants, dont 1.081 blancs, 2.416 noirs et 18 mulâtres.
121
1635-1674
1635.
Après avoir fait occuper la G u a d e l o u p e , en juillet,
par l'Olive et Duplessis, d ' E s n a m b u c d e la Martinique, le 1
er
prend
possession
septembre, fait construire un fort
à Saint-Pierre e t , laissant le c o m m a n d e m e n t à un sieur Du
P o n t , revient à Saint-Christophe. Les Français et
les Caraïbes se f o n t aussitôt la g u e r r e ; toutefois la paix paraît rétablie dès la fin de l'année. — D u Parquet s'installe
au C a r b e t ;
la rivière qui
le traverse prend le n o m de Rivière de Monsieur. 1636.
L e sieur D u P o n t a y a n t été pris en m e r par les E s p a -
gnols, au m o m e n t où il se rendait
à Saint-Christophe
et a y a n t été retenu prisonnier durant 3 ans, d ' E s n a m b u c le remplace au g o u v e r n e m e n t de la Martinique p a r son n e v e u D u P a r q u e t . — L a b o n n e conduite d e ce dernier attire d e n o m b r e u x habitants. 1637,2 décembre.— D u Parquet est n o m m é par la C o m p a gnie p o u r trois ans lieutenant général de la Martinique. 1639.
Un Flamand n o m m é Trézel, r e c o m m a n d é par Grotius,
o b t i e n t l'exploitation exclusive d u sucre à la Martinique jusqu'en
1645. On lui d o n n e
2.000
arpents
de terre.
Il d o i t c o m m e redevance 7 % d u sucre fabriqué. Après l'échec de sa tentative, il s'établit à R o u e n où il introduit l'industrie d e la confiserie. 1640
(commencement).
—
Les
premiers
missionnaires
arrivent à la Martinique. 1641.
D é b u t d u c o m m e r c e de la traite entre la Martinique
et l'Afrique. On p a y e 200 livres un nègre à Saint-Pierre. 1642.
L a C o m p a g n i e , désireuse d'établir la culture sucrière
aux Iles, se substitue à Trézel.
122
LA MARTINIQUE
1645.
Insurrection des colons contre la C o m p a g n i e .
1646.
D u P a r q u e t , d o n t d e u x de ses parents v e n a i e n t d'être
chassés de Saint-Christophe par P o i n c y , se d é c i d e à une expédition p o u r obtenir raison. Il fait prisonniers d e u x n e v e u x de P o i n c y , mais t o m b e l u i - m ê m e aux mains de son
adversaire
envoyée
de
la
(janvier).
Une
Guadeloupe
par
expédition le
de
gouverneur
secours Houel,
fin janvier, échoue et revient le 3 février. 1647. 17 janvier. — T h o i s y , gouverneur désigné p o u r S a i n t Christophe, est arrêté par des habitants de la Martinique et livré à P o i n c y
en échange de D u Parquet. Celui-ci,
libéré, rentre à la Martinique le 9 février. —
D u Parquet est confirmé dans le g o u v e r n e m e n t de
la Martinique. 1650.
La colonie e x p o r t e d u sucre. En réalité, seul le c o m -
m a n d e u r de P o i n c y est en état de blanchir le sucre. Son procédé lui v a u t des revenus de 30.000 livres par a n . Ces bénéfices considérables pour l ' é p o q u e expliquent son acharnement
à conserver le g o u v e r n e m e n t
des
Iles à
l'encontre d u chevalier de T h o i s y , n o m m é par le
Roi.
— Liquidation de la Compagnie des Iles d ' A m é r i q u e . D u Parquet achète 60.000 livres la Martinique, SainteL u c i e , la Grenade et les Grenadines (27 septembre 1650). Il est n o m m é l'année suivante gouverneur et lieutenantgénéral d u R o i en ces îles (août 1650). 1654.
Arrivée de juifs hollandais,
fugitifs d u Brésil.
ils
a p p o r t e n t le secret d u raffinage. On d o i t en particulier à un de leurs noirs le p r o c é d é de préparation de la terre en v u e d u blanchiement des sucres. —
Une révolte générale des Caraïbes, . p r o v o q u é e
en
grande partie par les pratiques de lucre des gouverneurs et des colons, et aussi par notre établissement presque
123
1635-1674
simultané à Marie-Galante, la Grenade et Sainte-Lucie, éclate dans toutes nos Antilles et fut particulièrement grave à la Martinique.
L a venue
inattendue
des juifs
hollandais contribua à l'apaisement d e la r é v o l t e . 1657. Les habitants de la Martinique refusent de payer quelques droits q u e le gouverneur v e u t imposer
pour
p o u r v o i r à la défense militaire de l'île, menacée par les nègres et les Caraïbes. 1658, 3 janvier. — Mort de D u Parquet. — L e R . P. Feuillet est e n v o y é en France pour d e m a n d e r la succession p o u r le fils aîné de D u Parquet. — 15 septembre. — Lettres patentes d u roi conférant au sieur d ' E s n a m b u c fils aîné d e D u Parquet et à son défaut à son frère, tous d e u x mineurs, le g o u v e r n e m e n t de la Martinique, sous la tutelle de leur mère. —
Expulsion des Caraïbes. — Insurrection des colons
contre Madame D u Parquet, qui est embarquée de force p o u r la France. Création d'un syndic, chargé d e représenter et de défendre
les intérêts
des
habitants;
la
capitation est réduite de 100 à 50 1. de petun. Ces d e u x réformes sont de courte durée. Colbert prend prétexte de ces troubles p o u r i n t e r v e n i r ; il p r o m e t a u x colons de d o n n e r satisfaction à leurs revendications, mais il ne tiendra pas sa parole. 1659. N o m i n a t i o n d ' u n arpenteur et d ' u n v o y e r . 1660, 31 mars. — L e Conseil de la Martinique s'associe à la paix
générale
conclue à Saint-Christophe
entre les
Caraïbes, les Français et les Anglais. —
Plantation des premiers pieds de c a c a o . Cinquante
ans plus tard, la colonie exportera 5.000 quintaux par an. 1663, 19 novembre. — Colbert charge le marquis de T r a c y
124
LA
MARTINIQUE
de reprendre les Iles, sur le sieur de V a u d r o q u e s , tuteur des enfants D u P a r q u e t , lequel s'est insurgé contre l ' a u t o rité royale. V a u d r o q u e s m e u r t a v a n t l'arrivée de T r a c y , qui prendra possession d e la Martinique sans difficultés. 1664. Etablissement de la C o m p a g n i e des Indes O c c i d e n tales. (Voir généralités). — T r a c y reçoit l'ordre d'interdire pour six mois t o u t c o m m e r c e entre les îles et les Hollandais.
L'exécution
de c e t ordre tue t o u t c o m m e r c e et plonge no s colonies dans la misère. —
Un
recensement
de
la
population
donne
une
population totale de 3.515 habitants, d o n t 1.081 blancs, 2.416 noirs et 18 mulâtres. Ce recensement ne paraît pas complet. — 19 novembre. — T r a c y étant v e n u de la Guadeloupe à la Martinique décide que les lois françaises seront applicables a u x Caraïbes dans toutes nos îles. — décembre. — L a nouvelle c o m p a g n i e
arme 4 v a i s -
seaux qui partent de la R o c h e l l e le 14 d é c e m b r e et arrivent à la Martinique en février, Ils y a p p o r t e n t trop p e u de marchandises p o u r subvenir a u x besoins de la population : d'où
première désillusion parmi les colons et quelques
m o u v e m e n t s qui durèrent j u s q u ' e n 1666. — Ces vaisseaux amènent M. d e Chambré c o m m e intendant général et M. d e Clodoré c o m m e gouverneur d e la Martinique. 1665, avril. — T r a c y quitte les Antilles p o u r aller prendre possession d u g o u v e r n e m e n t d u Canada. — L e gouverneur Clodoré décide la construction d u fort Saint-Pierre, p o u r réprimer les fréquentes séditions des habitants. — Mouvement
séditieux
parmi
les colons
provoqué
1635-1674
125
par une question de tarif des marchandises transportées en France. Les d e u x meneurs furent pendus. —
Règlement
fixant
le statut
de la colonie. Colbert
conserve le régime a n t é r i e u r : les habitants âgés de 15 à 50 ans p a y e r o n t
100 livres de petun à titre de capi-
t a t i o n , les créoles étant e x e m p t s et les h o m m e s mariés n'étant taxés q u ' à 20 livres. 1666. L a guerre a y a n t éclaté en E u r o p e entre la France et l'Angleterre, Clodoré arme un certain n o m b r e d'esclaves, que c o m m a n d e l'un d ' e u x , n o m m é Fabulé. — L a flotte anglaise c o m m a n d é e par W i l l o u g b y paraît d e v a n t la Martinique le 30 juillet et quelques jours après arrive à la G u a d e l o u p e .
Elle est dispersée le 4 août par
un o u r a g a n ; la partie de l'armée, restée à terre, est réduite à se rendre à discrétion le 15 août. 1 6 6 6 - 1 6 6 7 . La Compagnie arme pour les Antilles 8 navires, d o n t elle d o n n e le c o m m a n d e m e n t
à M. de La Barre,
maître des requêtes p r o m u lieutenant-général.
L'escadre
appareille de R o c h e f o r t le 27 juillet 1666, et, après avoir erré en m e r , arrive à la Martinique le 1
er
octobre.
Une autre escadre e n v o y é e par le roi était déjà arrivée à la Martinique depuis le 15 septembre. deux
escadres
s'emparent
sans
(15 fév. 67), A n t i g o a , (3 déc),
peine
de
Réunies, ces Montserrat
Saint-Eustache (15 n o v . )
et T o b a g o (fin a o û t ) . L a paix a y a n t été conclue à Breda le 31 juillet 1667, nous rendons nos conquêtes. Cette paix n'améliora pas la situation de nos propres possessions qui, soumises au régime de l'exclusif et mal ravitaillées par la m é t r o p o l e , vivaient littéralement dans la misère. 1 6 6 7 . Les
Anglais
attaquent
à
plusieurs
reprises
(juin-
juillet) les Français sur les côtes de la Martinique n o t a m m e n t dans la rade de Saint-Pierre.
et
LA
126
—1
er
MARTINIQUE
février. — L a Martinique d e v i e n t le chef-lieu
de tous n o s établissements en A m é r i q u e , l a G u y a n e y comprise. 1669. D e Baas, premier gouverneur général des îles, n o m m é en 1667, prend possession de ses fonctions
(4 février).
— Il e m b a r q u e le gouverneur Dulion pour France. — Les ordonnances o u règlements qu'il publie p o u r la Martinique sont obligatoires p o u r toutes les îles. — 3 octobre. — F o n d a t i o n d e la ville de F o r t R o y a l . 1670. 19 août. — Assemblée des députés des habitants réunie par le marquis d e Baas. Elle d e m a n d e n o t a m m e n t le droit d'élire un syndic et la permission d e c o m m e r c e r librement a v e c « la nation française ». — Le Conseil souverain de la Martinique décide q u e les cinquante pas d u roi sur le littoral
auront
désormais
p o u r p o i n t de d é p a r t , d u côté de la m e r , l'endroit où l'herbe c o m m e n c e à pousser. I n t r o d u c t i o n d e la monnaie ; elle c o m m e n c e à remplacer les paiements en nature. — Baas établit un « jardin d u R o i », sorte de pépinière où il tente d'acclimater — a v e c succès — les principaux arbres fruitiers d e France. — Débuts d ' u n c o m m e r c e entre la Martinique et le Canada. Colbert le soutient. 1671.
On p r o c è d e au d é n o m b r e m e n t des habitations.
E n s o n v o l u m e (t. I, p p . 562 à 5 7 2 ) , Dessalles donne les n o m s des habitants propriétaires de la Martinique, répartis par quartiers. (Il cite 42 quartiers, d o n t quelquesuns n ' o n t q u e d e d e u x à cinq habitants). — On possède u n état nominatif des habitants p r o priétaires de la Martinique, e n v o y é a u x Directeurs de
1635-1674
127
la Compagnie des Indes occidentales. Les quartiers indiqués comme habités s o n t : la Caravelle, Cul de Sac Louis, Fort Sainte-Marie, Fort Saint-Jacques, Pain de Sucre, Fond du Charpentier, Marigot, le Morne de Céron, Grande Anse, Basse Pointe, Macouba, Potiche, Grande Rivière, Anse du Lévrier, Anse du Céron, Prêcheur, Pointe sur la Mare, Fonds Canonville, Rivière Blanche, Ravine Sèche, Fort Saint-Pierre, Rivière Monsieur, Rivière de l'Acajou, Rivière du Lamentin, Rivière du Lézard, le Trou au Chat, Rivière Salée, les Trois Ilets, l'Anse du Milan, Anse des Navires, Grande Anse d'Arlet, Petite Anse du Diamant, Marigot du Diamant, les Trois Rivières, Anse Laurent, Anse du Serrurier, Rivière Pilote, Pointe de la Borgnesse, Cul de Sac Marin, Quartier des Suisses et Pointe Marin. — Les cultures se répartissent ainsi à la Martinique: 36.400 pas en tabac. 76.700 pas en cannes. 107.000 pas en vivres. Le prix du tabac tombe de 30 et 40 sous la livre à 5 sous à la fin du siècle. Cette circonstance favorise l'essor des plantations de cannes. — Le prix du quintal de sucre brut tombe de 121. à 61., d'où obligation de raffiner les sucres à la Martinique à peine de voir les plantations péricliter. Le Supérieur des Jésuites soutient le premier ce point de vue; la Compagnie envoie des ustensiles au sieur de Loover, Flamand installé à la Guadeloupe. — Incendie de Saint-Pierre. Vers 1671. — La ferme des droits seigneuriaux et de capitation est adjugée à Jean Oudiette, sous le titre de domaine d'Occident. 1672, 26 janvier. — Sous le nom de troupes détachées de la Marine, on fait passer six compagnies aux Iles du Vent:
128
LA MARTINIQUE
ces compagnies furent portées à 8 en 1680 : le gros des troupes se t r o u v a n t à la Martinique. Cet état de choses dura j u s q u ' e n 1763. 1 6 7 3 . Baas dirige une e x p é d i t i o n qui avorte contre Curaçao, entrepôt depuis 1634 d u c o m m e r c e des Hollandais a v e c les
Espagnols.
1 6 7 4 . L e raffinage s'est d é v e l o p p é dans les îles, grâce aux efforts de l ' I n t e n d a n t
P a t o u l e t , qui avait pris l'initia-
tive de fonder une société. Ce sont les débuts d u sucre « terré ». D i x ans plus tard, la Martinique
possédera
3 raffineries ; le prix d u quintal de sucre, qui était t o m b é à 50 et 60 sols se relèvera sensiblement. — 2 0 juillet. — L a H o l l a n d e , qui ne peut se résigner à la perte d u marché antillais, envoie des forces considé rables d e v a n t F o r t armée de 1.142
Royal.
Une flotte de 48
canons et m o n t é e
vaisseaux,
8.000
hommes
environ, a t t a q u e sous les ordres de R u y t e r la
citadelle
dans laquelle se sont enfermés 161
par
Français
commandés
par le gouverneur de Sainte-Marthe. L'intervention d e u x vaisseaux de la marine r o y a l e , Les Jeux, marquis d ' A m b l i m o n t
et le Saint-Eustache,
de
capitaine
capitaine
de
Beaujeu, bouleverse la m a n œ u v r e ennemie et R u y t e r doit mettre à la voile après avoir perdu 1.200 h o m m e s .
DEUXIÈME PÉRIODE: 1674-1763
Cette une
longue
période
période
de
de
prospérité
La métropole se refusant
quatre-vingt-dix
ans
croissante
absolue.
sinon
à exporter son
fut
numéraire,
le commerce avec l'île devait se faire en principe par des échanges et ces échanges étant insuffisants pour subvenir a u x besoins
de la population,
celle-ci était pour
ainsi dire obligée de recourir au commerce étranger qui était interdit. Les gouverneurs se prêtaient en général à ces complaisances et souvent faisaient du commerce pour leur compte personnel, en le déguisant par divers artifices : de là, la disgrâce d'au moins deux d'entre eux. Seul était autorisé et m ê m e favorisé le commerce avec le territoire continental des Espagnols en A m é rique : les Espagnols payaient en métal. Malgré ces entraves à la liberté ou ces entorses a u x principes, la Martinique connut une prospérité croissante
que
favorisait
encore
son
titre
antillaise. Ses sucreries et raffineries
de
métropole
se développèrent
et en 1721 ce fut l'introduction de la culture du café. Quelques autres cultures, c o m m e celle du mûrier, qu'on voulait
également
acclimater,
se
heurtèrent
devant
l'indifférence de la population. ANTILLES
9
130
LA MARTINIQUE
La mise en valeur du pays était presque entièrement faite par les esclaves : les engagés européens avaient à peu près disparu dès 1 6 8 3 . La
sécurité, que ne menaçaient
plus les Caraïbes,
disparus de l'île, fut à peine troublée par les deux guerres avec l'Angleterre de 1 7 4 4 à 1 7 4 8 et de 1 7 5 6 à 1 7 6 3 ; l'attention moins,
des Anglais,
en cette
était surtout tournée
guerre
au
du côté du Canada
dernière
et
notre commerce antillais en souffrit à peine. Le
nombre
des colons
cesse, quoique dans
d'Europe
augmentant
sans
des proportions assez faibles, des
idées de liberté commencèrent à naître dans les esprits ; dès 1 7 1 3 le roi songea à accorder a u x habitants quelques droits au contrôle de leurs contributions ; on envisagea qu'une
assemblée
des
paroisses
année pour voter l'octroi.
se
réunirait
Cet esprit
chaque
d'indépendance
ou de liberté se révéla d'une façon toute particulière en
1 7 1 7 , lorsque la population
soulevée renvoya
en
France le gouverneur et l'intendant, qui, au n o m de la métropole,
voulaient
leur
imposer
la
limitation
du
dramatique
ne
nombre des sucreries. D'ailleurs
nul
incident
réellement
caractérise cette longue période, où l'autorité
royale
fut absolument souveraine ; le seul qu'on puisse relever est
plutôt
du
genre
burlesque,
celui
dont
le
faux
prince de Modène fut le héros en 1 7 4 8 - 1 7 4 9 . Le m o u v e m e n t intellectuel paraît avoir été nul ; dans les paroisses l'autorité du clergé était pour ainsi dire souveraine et se maintenait pourtant
dans des limites
qui ne provoquaient aucune intervention
du
pouvoir.
131
1674-1763
1675. L e sieur Blondel établit les dessins d u F o r t
Royal.
1676. Des boucheries publiques sont établies à Saint-Pierre : le prix des viandes f u t réglé en 1678. 1677. Mort d e Baas (15 février). — Blénac est installé le 8 n o v e m b r e . 1678. 8 novembre. — Création d ' u n Grand V o y e r en la personne d u sieur d u J o n c h e r a y . L a construction route est entreprise entre F o r t
Royal
d'une
et Trinité, elle
sera achevée en 1680. 1679. Blénac réprime une légère insurrection
des nègres
à la Martinique. —
Débuts d u D i a m a n t .
1680. L e R o i interdit à Blénac d e faire
la guerre a u x
Caraïbes d e Saint-Vincent. 1680-1682. L e marquis d'Angennes Maintenon, v e n u à la Martinique en 1674 après avoir v e n d u ses terres à la nouvelle favorite d u R o i , reçoit d u g o u v e r n e m e n t mission d'établir entre la colonie et les territoires espagnols d u c o n t i n e n t un trafic qui d o i t les espèces
métalliques.
faire affluer a u x Antilles
Colbert
espère
remédier
ainsi
à l'absence de monnaie qui se faisait sentir dans les Iles, sans entamer le s t o c k métallique de la m é t r o p o l e . 1680-1686. Transport a u x Des d e f e m m e s tirées d e l'« H ô p i tal de Paris » où elles sont choisies a v e c soin. 1681.
14 septembre. — Blénac ordonne de transférer le
pavillon royal d e Saint-Pierre à F o r t R o y a l . 1683,
mars. — Saint-Laurent, gouverneur de Saint-Chris-
132
LA MARTINIQUE
t o p h e , est chargé de l'intérim d u g o u v e r n e m e n t d e la Martinique p e n d a n t l'absence d e M. de Blénac. — L e s engagés o n t à p e u près disparu à la Martinique ; ils o n t été remplacés p a r les Noirs. 1683-1700. Louis XIV faites
soutient c h a u d e m e n t les tentatives
p o u r introduire le mûrier a u x Antilles.
Il
fait
e n v o y e r des ouvriers spécialisés dans la manufacture d e la soie. B é g o n , alors i n t e n d a n t des Iles, s'efforce
d'accli-
mater la nouvelle culture ; il est secondé p a r les sieurs d e Lacalle et de M a n o n c o u r t , qui obtiennent en récompense les d e u x seules érections d e fiefs qui aient été concédées à des colons d e la Martinique. 1686. Assèchement d u marais de F o r t R o y a l par le creusem e n t d ' u n canal d é b o u c h a n t dans la rivière L e Vassor. 1690. Débuts d e la Trinité. — Blénac o r d o n n e l'établissement d'un n o u v e a u c h e min entre F o r t R o y a l et Saint-Pierre, qui passera p a r les hauteurs au-dessus d e Case Pilote. 1691. L e R o i décide q u e t o u t esclave v e n a n t des Antilles sera libre de droit en t o u c h a n t le sol de F r a n c e . 1692.
L e siège d u g o u v e r n e m e n t général, d é c i d é , en 1 6 8 1 ,
est transféré de Saint-Pierre à F o r t R o y a l , d o n t le port offrait plus d e sécurité. 1692-1693. Les Anglais
se livrent à des démonstrations
navales sur les côtes de la Martinique ; ils échouent dans leurs attaques
contre
Saint-Pierre
(1692)
et contre le
Cul d e Sac Marin (1693). — Un recensement des milices d o n n e le chiffre de 1.430 h o m m e s armés. 1693.
Descente des Anglais à Sainte-Anne et à Saint-Pierre.
1694. Prise d e d e u x vaisseaux anglais par des flibustiers d e la Martinique.
1674-1763 1695.
133
Les Jésuites desservaient à la Martinique 5 paroisses,
les Capucins 5, et les Jacobins 7. — A la m ê m e d a t e , le P. L a b a t d o n n e un état des paroisses de toutes les Iles, et des curés qui les desservent a v e c leurs droits respectifs. — L'ensemble
routier de la Martinique
est
achevé.
— A c h è v e m e n t des fortifications de F o r t R o y a l . 1697.
Claude de Fuchsamberg, marquis d ' A m b l i m o n t , s u c -
cède au c o m t e de Blénac. Il m o u r u t le 17 a o û t 1700 d u mal de Siam ou fièvre jaune et fut enterré à F o r t R o y a l . — A c h è v e m e n t d'un fort à la Trinité. 1698.
En
dépit des
interdictions
royales, la
Martinique
possède 18 raffineries. Toute-puissance d u marquis d ' A n gennes 1700.
Maintenon.
La Martinique
compte
22.000
habitants.
— Le roi refuse la permission d'établir à Saint-Pierre un collège, qui serait tenu par les J é s u i t e s ; « pour le latin, disait-il, il n'est rien de moins nécessaire p o u r faire de b o n s habitants et on peut m ê m e dire qu'il leur serait contraire. » — Charles d'Esnots succède au marquis d ' A m b l i m o n t . Il m e u r t l'année suivante à F o r t R o y a l de la fièvre j a u n e . — Débuts d u Cul de Sac Marin. 1701. L a p o p u l a t i o n 6.961 1702.
est de 23.362 noirs et mulâtres
et
blancs.
Charles
d'Esnots
François
de
Machault
au g o u v e r n e m e n t
général.
succède
à
Charles
Il m o u r u t à
Fort
R o y a l , où il fut inhumé, le 16 janvier 1709. 1705,
10 juin. — Le g o u v e r n e m e n t royal refuse de créer
un évêché à la Martinique p o u r ne pas créer un n o u v e a u
134
LA
MARTINIQUE
fonctionnaire, qui, par son autorité p r o p r e , pourrait entrer en conflit a v e c le gouverneur de l'île. L a Martinique fournit 1.200
1706.
volontaires,
habitants
et flibustiers, à une expédition que d'Iberville se
propose
de conduire en Louisiane. E n r o u t e , un premier d é t a c h e m e n t de ces volontaires, conduits par le c o m t e de Chav a g n a c , dévaste
Saint-Christophe.
L'escadre
elle-même
a y a n t t o u c h é la Guadeloupe fin mars en repart le 3 1 , ravage l'île Nièves et revient à la Martinique le 26 avril. — Débuts
de
Sainte-Marie.
R a y m o n d Balthazar P h é l y p e a u x succède
1709.
à
Charles
d e Machault au g o u v e r n e m e n t général. Il m e u r t la
colonie
le
21 o c t o b r e 1713.
Petit-fils
du
dans
Secrétaire
d ' E t a t et fils de l'intendant, il avait été e n v o y é e x t r a ordinaire d u R o i auprès de l'Electeur de Cologne. C'est le premier gouverneur qui n'ait pas appartenu au corps de la marine. L e régime de la m o n o c u l t u r e s'est généralisé
1710.
dans
la colonie. D u b u c livre c o m b a t au navire anglais la Julie
1711.
en
rade de Saint-Pierre et la m e t en fuite. Cassard part de la Martinique pour attaquer la petite île de Montserrat et menace Curaçao et Saint-Eustache. 1713.
L e R o i , d e v a n t les difficultés financières que la guerre
lui fait éprouver, songe à se décharger sur les colons des frais de troupes et de
fortifications.
Pontchartrain propose aux habitants de suivre l ' e x e m p l e des colons de S a i n t - D o m i n g u e et d'établir une d î m e sous forme d'octroi librement consenti. E n v u e d'obtenir une s o m m e de 200.000 1. il les autorise à n o m m e r cinq syndics d o n t un représenterait les négociants. Les 22 paroisses de la Martinique éliraient chacune un s y n d i c particulier,
135
1674-1763 m e m b r e d'une
assemblée qui choisirait
dans son sein
les cinq Syndics généraux. Cette assemblée se réunirait à la Noël et voterait chaque année l'octroi. 21 octobre. —
—
Mort de P h é l y p e a u x , gouverneur
général. Après un c o u r t intérim de la Malmaison, il est remplacé par D u q u e s n e , qui arrive dans l'île le 7 n o v e m b r e 1714. 1714. E n v u e d e satisfaire au désir toujours latent des colons de
posséder
un représentant,
Pontchartrain
songe
à
accorder à la colonie un d é p u t é d u C o m m e r c e au Conseil de
Commerce.
1715. 16 janvier. — Réunion p a r les administrateurs d'une assemblée des députés des paroisses en v u e d e leur d e m a n der le v o t e d ' u n octroi. 1716. L e Conseil de marine interdit l'établissement d e toute nouvelle sucrerie. 1716-1717. Instructions au gouverneur général de la Varenne et à l'intendant R i c o u a r t p o u r réprimer des abus d'ordre religieux, mettre fin a u x vexations des officiers de justice, soutenir les petits
habitants qui f o n t la force des c o l o -
nies et limiter les manufactures (25 a o û t 1716). Munis de ces instructions, de la Varenne et R i c o u a r t arrivent à l a Martinique le 7 janvier 1717. Ils interdisent la création d e nouvelles sucreries et o r d o n n e n t la d é m o lition de celles qui ne sont pas achevées. Ils m e t t e n t également l ' e m b a r g o de
sur des navires espagnols
chargés
piastres. Les intérêts menacés se coalisent contre e u x ; ils sont
arrêtés le 17 mai et embarqués pour France le 23. L e roi couvrit
ces actes
Ce m o u v e m e n t
p a r une amnistie le 22 septembre.
témoigne
d e l'esprit
d'autonomie
planteurs, d o n t certains affichaient des opinions
des répu-
blicaines et réclamaient la sécession. Il témoigne égale-
136
LA
MARTINIQUE
m e n t d e l'intérêt q u e les colons portaient à une c o n t r e bande
qui faisait affluer dans l'île n o n seulement des
vivres mais des espèces métalliques. 1716-1717. Tentatives d u R é g e n t p o u r introduire le caféier à la Martinique. L e gouverneur d ' A m b l i m o n t avait déjà proposé en 1699 une pareille transplantation. 1717. T e n t a t i v e
des grands
planteurs
conduits
par les
D u b u c p o u r établir dans la colonie une sorte de république aristocratique
indépendante.
1718. 2 octobre. — Mort à la Martinique de l ' I n t e n d a n t des Iles, Constant de Silvacane, ancien Président d e la Cour des Monnaies,
et Intendant
des armées
navales.
Fin
lettré, il avait traduit Perse et Juvénal. 1719. L e gouverneur d e la Martinique
confie
à
Poulain
la c o n d u i t e d'une expédition qui échoue contre les Caraïbes noirs de Saint-Vincent. 1720. L a Martinique
possède 338 sucreries.
— A p p a r i t i o n à Saint-Pierre d'une nouvelle sorte d e trafiquants, les commissionnaires, qui j o u e r o n t un rôle capital dans le d é v e l o p p e m e n t et des Iles. Travaillant
é c o n o m i q u e de la ville
p o u r leur propre
c o m p t e , ils
m o n o p o l i s e n t rapidement le négoce entre la Métropole et ses colonies, et centralisent les affaires de toutes les Petites Antilles à S a i n t - P i e r r e : le sort de la Guadeloupe d e v i e n t étroitement lié à celui de la Martinique (voir 1763). Prélevant 5 % de c o m m i s s i o n , ils constituent d e très grosses fortunes qui leur permettent d e servir de b a n quiers a u x planteurs c o m m e a u x a r m a t e u r s ; ils ne tarderont pas à arbitrer la situation. 1721.
Gabriel d e Clieu réussit à transporter un caféier d e
France à la Martinique et à en implanter la culture
dans
137
1674-1763 cette
colonie.
Deux
ans plus
t ô t l'intendant
Bénard
avait v a i n e m e n t repris les projets d u R é g e n t . Grâce à l'arbuste de G. de Clieu et à des graines apportées de B o u r b o n et de Surinam, le café prend pied a u x Antilles où il devient rapidement un nouvel élément de richesse. 1725.
Rivière Salée est détachée d e la paroisse d u Cul d e Sac
à Vaches. 1726. L a Martinique a son premier imprimeur privilégié ; ce fut un n o m m é D e v a u x , ancien notaire à Nantes. — L ' I n t e n d a n t Blondel propose d'accorder a u x colons un député au Conseil d u C o m m e r c e . — Refus indigné du
Ministre.
1727. 1
er
octobre. —
gouverneur
général
Révocation
d e M. d e Feuquières,
des Iles, c o u p a b l e
de spéculations
commerciales interdites à ses fonctions. — 21 octobre. — Rappel d u gouverneur d e M o y e n court, suspect de se livrer pour son c o m p t e au c o m m e r c e étranger. — U n t r e m b l e m e n t de terre dévaste la colonie et ruine les cacaoyères. A la suite de cette catastrophe la Cabesterre se tourne vers la culture d u café, à laquelle le gouverneur de Champigny accorde sa protection. 1728. Un d é t a c h e m e n t
de troupes françaises se rendant
par m e r au Fort R o y a l se révolte, tue quelques-uns d e ses officiers
et, étant
arrivé à Saint-Thomas, livre les
autres au gouverneur danois. L e gouverneur de la Martinique a y a n t réclamé les coupables et en a y a n t o b t e n u 8 0 , en fait exécuter une partie et envoie les autres a u x galères. — Débuts de la paroisse Sainte-Anne. 1731.
Débuts d u c o t o n sur une large échelle. On c o m p t e
2.900.000
pieds.
138
LA
MARTINIQUE
1731-1736. L a Martinique c o m p t e
58.548 habitants
dont
11.980 d e p o p u l a t i o n b l a n c h e . — En 1734 cette population sera de 12.705, sur une p o p u l a t i o n de 66.595 h a b i t a n t s . En 1736, les blancs seront 13.917 sur 69.609 habitants. 1736. L e roi rappelle au gouverneur
M. d e Champigny
les prescriptions d e 1713, t e n d a n t à entraver le d é v e l o p p e m e n t des affranchissements
d'esclaves.
1738. U n c o m m e r c e assez régulier est établi entre la M a r tinique et les colonies espagnoles. Les Espagnols payaient en argent. L e R o i favorise ce c o m m e r c e . 1740, 21 octobre. — Arrivée à la Martinique d u marquis d'Antin,
e n v o y é a u x Antilles p o u r parer à toutes les
éventualités p o u v a n t surgir de la guerre déclarée entre l'Angleterre et l ' E s p a g n e ; il en repart le 30 p o u r SaintDomingue. — L a p o p u l a t i o n d e la Martinique est d e 74.042 i n d i vidus. 1742.
L a Martinique
possède
456 sucreries. L e prix
du
quintal de sucre est remonté de 8 1. à 20 1. —
Introduction d u c a c a o de Cayenne.
1745 (fin). — U n e flotte marchande de 43 navires c o n d u i t e par D e g a y arrive à la Martinique ; seize de ces bâtiments t o m b e n t au p o u v o i r des Anglais au large de F o r t R o y a l . 1748, mars. — Arrivée au Marin (17 mars) d ' u n pseudo agent secret d u g o u v e r n e m e n t français chargé, sous le n o m d e c o m t e d e T a r n a u d , d'enquêter sur les facilités accordées par le gouverneur général de Caylus au c o m m e r c e étranger et sur la participation personnelle d u gouverneur dans ce c o m m e r c e . — Ce faux c o m t e de Tarnaud n'est autre que le f a m e u x prince de M o d è n e , qui sut maintenir la légende de ce n o m j u s q u ' e n mai 1749, et fit partout des
1674-1763
139
dupes au Marin, puis à Saint-Pierre. Réfugié en Espagne en juin 1749, il fut mis en prison. D ' A r g e n s o n , dans ses m é m o i r e s , le représente c o m m e u n agent de l'Angleterre. 1750. 13 mai. — L e gouverneur de Caylus, menacé d e disgrâce en raison de ses opérations commerciales, disparaît fortuitement
par m o r t mystérieuse
o u fuite
précipitée
à l'île de S a i n t - T h o m a s . Il est remplacé p a r le chevalier de 1751.
Bompar,
chef
On c o m p t e
d'escadre.
à la Martinique
12.068 blancs, 1.413
mulâtres libres et 65.905 esclaves. A u total 79.386 h a b i tants, d o n t 15.000 à Saint-Pierre et 4.000 à F o r t R o y a l . 1752.
U n esprit d e révolte soufflant
parmi les esclaves,
— à la Martinique — des arrestations sont opérées et six coupables sont rompus vifs. 1754, 9 mars. — Ordonnance p o r t a n t défense à tous maîtres de b a t e a u x d'avoir à leurs bords des nègres autres q u e c e u x de la Martinique ; on v e u t ainsi réserver à cette île le
monopole
absolu
du commerce,
en supprimant
le
cabotage. 1756. Les armements
p o u r la Martinique
q u i , en 1 7 5 0 ,
étaient d e 236 bâtiments et de 390 en 1 7 5 6 , s'élèvent à 308 dans les sept premiers mois de 1757. 1758, 20 mars. —
L'amiral
anglais Moore tente
contre
F o r t R o y a l une a t t a q u e , qui a moins pour b u t d ' o c c u p e r cette place q u e de se saisir des navires français qui i n c o m m o d a i e n t le c o m m e r c e anglais dans les mers des Antilles. 1759, 17-19
janvier. —
U n e nouvelle
escadre
anglaise
c o m m a n d é e par Moore et portant 6.000 soldats et 2.000 miliciens paraît d e v a n t la Martinique, Fort de France puis Saint-Pierre ; elle est repoussée et se porte presque aussitôt à la G u a d e l o u p e .
140
LA
— 23 juillet. — d'Agriculture
MARTINIQUE
Création
d'une
et de C o m m e r c e
Chambre
avec
faculté
mi-partie d'avoir
à
Paris un député à la suite d u Conseil. — 1
er
décembre. — O r d o n n a n c e qui défend au G o u -
verneur de percevoir le droit d e 2 % sur les nègres et supprime toutes les fermes existantes. Cette ordonnance répond a u souci des Physiocrates
d e mettre un
aux abus administratifs et de supprimer particuliers en matière
terme
les profits des
fiscale.
1 7 6 0 . Les corsaires d e la Martinique, parmi lesquels se distingue un n o m m é Marès, i n c o m m o d e n t le c o m m e r c e anglais dans les mers antillaises. 1 7 6 1 , 28 mars. — O r d o n n a n c e réunissant a u D o m a i n e la Ferme des Cabarets. L a suppression des fermes est d é s o r mais
absolue.
— 1 9 décembre. — Arrêt d u Conseil d ' E t a t établissant une Commission p o u r la législation des colonies. Cette commission se transforme rapidement en u n Bureau de c o n t e n t i e u x , m a n q u e à sa mission et prend fin en 1768. —
L'intendant
Thibault
d e Chanvalon
présente
à
l ' A c a d é m i e son Voyage à la Martinique, contenant diverses observations sur la physique, l'histoire naturelle, l'agriculture, les mœurs et les usages de cette île, fait en 1751 et dans les années suivantes ; il le publie en 1763. — L e Parlement d e Paris c o n d a m n e le Père Jésuite L a v a l e t t e , Préfet A p o s t o l i q u e à la Martinique, solidairement a v e c sa c o m p a g n i e à l'occasion d'une b a n q u e r o u t e de trois millions. L e P. Lavalette avait f o n d é , en association a v e c des juifs d e la D o m i n i q u e , un fructueux c o m merce entre Saint-Pierre et Marseille mais basé sur des crédits t r o p prolongés. L a perte d e plusieurs cargaisons saisies p a r les Anglais entraîna sa chute. L e procès fournit
141
1674-1763
des armes contre la Société de Jésus qui fut bannie de France p e u après. 1 7 6 2 . Les flottes anglaises des amiraux R o d n e y et Douglas, fortes de 49 vaisseaux et p o r t a n t de 15 à 18.000 h o m m e s , paraissent d e v a n t la Martinique le 7 janvier, a t t a q u e n t le Marin d'où ils sont repoussés, puis les Anses e t Case
Navire
d o n t ils
s'emparent, et
d'Arlet
paraissent
le
16 janvier d e v a n t F o r t R o y a l , qui capitule le 13 février. L a capitulation, étendue à Saint-Pierre, y
est
ratifiée
le 2 mars et l'île entière passe sous la d o m i n a t i o n anglaise. —
Des secours tardifs, amenés par Blénac, arrivent le
8 mars
: Blénac
continue
sur
Saint-Domingue.
L a Grenade et Sainte-Lucie capitulent les jours suiv a n t s . M o n k t o n est n o m m é provisoirement
gouverneur
de la Martinique. — 21 m a i . — Arrêt d u Conseil d ' E t a t fixant les bornes d u p o u v o i r militaire dans les Colonies par rapport à
la
Justice. Ce texte est visiblement inspiré d u principe de séparation des pouvoirs. Il s'agissait en l'occurrence de réfréner les abus auxquels se livraient les grands blancs, chefs de la milice de leur quartier.
TROISIÈME PÉRIODE: 1763-1802 La Martinique connut de 1 7 6 3 à 1 7 6 4 une véritable expérience
de
réforme
gouvernementale
analogue
à
celle que Turgot venait d'entreprendre dans son intendance du Limousin, mais en plus vaste. O n a v u précédemment dans quelle mesure les nouvelles idées « économiques » influencèrent les édits destinés à
fixer
le régime commercial
et politique
des
deux î l e s ; il reste à indiquer ici l'œuvre de Le Mercier de la
Rivière assisté de son collègue le marquis
de
Fénelon, telle qu'elle s'est accomplie dans le cadre particulier de la Martinique. Chargé d'établir l'imposition de la colonie, l'ami de Quesnay construisit un système très original, qui fut appliqué en 1 7 6 4 , dans lequel il t a x a i t les habitants non en raison du nombre de leurs noirs, c o m m e on l'avait souvent fait auparavant, mais en fonction du rendement des esclaves eu égard à la fertilité des terres qu'ils cultivaient. D o n c , impôt proportionnel au produit net, et non au produit brut c o m m e il l'était précédemment, ce qui le rendait destructeur. Les faibles droits de sortie, auxquels on recourait à titre de complément, prenaient place dans le système, à raison de leur incidence, pour tenir lieu de contribution
143
1763-1802
foncière, procédé auquel recourut explicitement le législateur de Par la
1843. création
d'une
maréchaussée,
par
l'organi-
sation de nouvelles milices bien en main, par la construction de fortifications
importantes,
Le Mercier de
la Rivière s'efforçait, d'autre part, d'assurer la « sûreté » intérieure
et extérieure
de la
colonie,
sans
laquelle,
selon lui, les agriculteurs toujours inquiets ne pouvaient étendre leurs exploitations. Il manifesta,
enfin,
par son désir d'abolir l' « abo-
minable » pratique du samedi, l'intérêt
qu'il
portait
à la classe servile dont il voulut améliorer la condition pour des motifs d'ordre économique autant que d'inspiration
humanitaire.
D e telles initiatives devaient inévitablement atteindre les Planteurs dans leurs intérêts les plus immédiats ; le Conseil
Supérieur
opposèrent
et
la
furieusement
Chambre et
d'Agriculture
obtinrent
son rappel
s'y au
m o m e n t m ê m e où il rentrait en France pour rétablir une santé usée au service de la colonie, pour laquelle il avait déjà sacrifié sa fortune : n'avait-il pas consenti, de 1 7 5 9 à 1 7 6 2 , pour les besoins de la défense,
des
avances dont il ne fut que partiellement remboursé ? Le
marquis
de
Fénelon
le
suivit
dans
sa
disgrâce.
Les successeurs de ces deux administrateurs
coura-
geux et désintéressés n'eurent les moyens d'entreprendre aucune réforme quelconque ; ils assurèrent le respect du régime établi par les textes de 1763 et 1 7 6 5 , a u t o risant le commerce sirops-comestibles
si nécessaire à
l'équilibre de la balance commerciale de la colonie, et sous certaines conditions l'introduction de nègres étrangers.
LA MARTINIQUE
144
Les événements d'Amérique conférèrent à la Martinique — à cause de sa rade de Fort R o y a l — une i m p o r tance
stratégique
de premier
ordre
qu'elle
partagea
avec S a i n t - D o m i n g u e . Le traité d'alliance, signé avec les
Insurgés
(1778),
consolida
les liens
qui
s'étaient
établis de fort longue date entre les habitants et les colons anglais du continent ; il offrit une sorte de dédomm a g e m e n t à la perte du Canada d'où les Planteurs retiraient depuis 1 7 3 0 des vivres et des bois. E n définitive, hormis les innovations éphémères de Le Mercier de la Rivière, aucune réforme réelle. Les revendications des habitants au sujet d'une
transfor-
mation des paroisses en municipalités et de la création d'une Assemblée et
d'un Syndic-Général
toujours insatisfaites.
demeuraient
La réforme judiciaire, proposée
dès 1 7 6 1 par Le Mercier de la Rivière, tendant à permettre la saisie réelle des débiteurs de mauvaise foi, n'avait
pu
être
accomplie
non
plus,
connaissait toutes les conséquences de
et
la
Colonie
l'effondrement
de son crédit. Surchargés
de
dettes
—
elles
dépassaient
vingt
millions de livres — les Planteurs n'obtenaient plus les avances nécessaires au développement ou simplement à l'entretien de leurs cultures : les commissionnaires de Saint-Pierre, leurs créanciers, n'avaient cure d'accroître leur passif. E n effet d'exercer
dans l'impossibilité où ils étaient
aucune poursuite,
ces derniers n'obtenaient
de payement que dans la mesure où ils opéraient des retenues sur les produits dont les Planteurs leur faisaient remise, c o m m e les y astreindra d'ailleurs le texte
de
1 7 8 4 fixant l'entrepôt de Saint-Pierre. Les batailles que se livreront au cours de la Révolution
LE FORT St.PIERRE
)DANS
L'ISLE DE LA MARTINIQUE
1763-1802
145
les deux partis adverses, « Patriotes » de la Ville et « Planteurs » de la Campagne, se localiseront autour des trois points
suivants
:
1. — « Ouverture », sinon de tous les ports, au moins des trois
autres
ports
principaux,
Trinité,
Marin
et
François, acte correspondant à une véritable abolition des dettes. 2. — Création de municipalités, dont la composition intéressait directement la situation des Planteurs dans leurs quartiers et influerait sur l'orientation de l'Assemblée
Coloniale,
créée en
1787,
assemblée
qui
devait
donner son m o t sur la question précédente et sur le statut des hommes de couleur. 3.
—
Affranchissement
des
Noirs,
imposé
par
la
Métropole et que les Patriotes de Saint-Pierre finiront par souhaiter en haine des Planteurs. Les diverses péripéties de la Révolution à la Martinique, de 1789 à 1 7 9 4 , expriment fidèlement les alternatives de fortune que connurent partisans et adversaires de ce programme en trois points. Lorsque
les
Patriotes
auront
réussi,
après
maints
épisodes dont les détails suivent, à s'emparer du p o u voir, les Royalistes, dont les biens ont été séquestrés et pour partie incendies, —
devant la double menace
d'une ruine complète et de désordres sanglants auxquels une libération prématurée, il faut bien le dire, eût inévitablement conduit, — ils prépareront la voie a u x forces britanniques. Le 2 3 mars 1 7 9 4 , la Martinique, bloquée par toute une flotte, envahie par une armée de 1 6 . 0 0 0 h o m m e s , est obligée de capituler. R o c h a m b e a u , enfermé dans le Fort
de la Convention,
avait
pendant
plus
d'un mois prolongé une défense sans espoir, au cours ANTILLES
10
146
LA
MARTINIQUE
de laquelle, pour la première fois, les h o m m e s de couleur ont c o m b a t t u
par amour de la Patrie et de la
Liberté. Le Département bre
de la Martinique, créé le 3 0 O c t o -
1 7 9 3 par un acte spontané
de l'Assemblée
des
Représentants des paroisses, redevenait la Colonie la
Martinique ;
celle-ci,
soustraite
retournait a u x lois de l'Ancien
à
la
de
Révolution,
R é g i m e , mais sous le
contrôle de l'Angleterre. Les Planteurs avaient obtenu l' « ouverture » de tous les ports, et ils la conservèrent jusqu'en 1 8 0 2 . Ils firent ainsi l'expérience de ce régime de quasi-autonomie que les révoltés de avaient
rêvé
d'instaurer,
mais
autres colonies britanniques
la
1717 et
concurrence
1792 des
leur en fit connaître le
prix.
1 7 6 3 , 25 février. — Arrêt d u Conseil d ' E t a t consacrant le p r o j e t d e L e Mercier de la Rivière en matière fiscale : impôt
proportionnel
et
à
certains
égards
progressif ;
i m p ô t de q u o t i t é . L a totalité de la charge est répartie sur l'ensemble de la c o l o n i e , et n o n sur les agriculteurs seulement c o m m e le v o u l a i e n t les disciples de
Quesnay.
— 2 4 m a r s . — R è g l e m e n t concernant l'administration générale de la colonie de la Martinique, désormais séparée de la colonie de la G u a d e l o u p e . Les d e u x p o u v o i r s civils et militaires se limitent r é c i p r o q u e m e n t . L e marquis de Fénelon et L e Mercier de la R i v i è r e , n o m m é s gouverneur et intendant de l'île, gagnent F o r t Royal.
147
1763-1802
— 9 avril. — Arrêt d u Conseil d ' E t a t créant p o u r les Iles d u V e n t , a u x lieu et place de la Chambre mi-partie, la
Chambre
d'Agriculture
prévue
dans
le
Règlement
précédent. A la suite de cette transformation le Ministre autorise la n o m i n a t i o n
d e « Commissaires mi-partie d u
c o m m e r c e de France et de la colonie. » — 18 avril. — Mémoire (voir Généralités) autorisant l ' i m p o r t a t i o n de bestiaux, d e comestibles et de toutes sortes de matériaux nécessaires a u x constructions et a u x sucreries, en échange de sucres et d e tafias. — 29 juillet. — Ordonnance de L e Mercier d e la Rivière concernant la levée d'une s o m m e de 750.000 1. argent des Iles, sur la colonie d e la Martinique p e n d a n t les six derniers mois d e l'année 1763. Cette o r d o n n a n c e , rendue à
la suite
tendait
à
d'une établir
délibération
d e notables
une imposition
habitants,
proportionnelle
« produit n e t » des terres, c o m p t e tenu
d e leur
au
degré
de fertilité. — 15 a o û t . — Mémoire d u R o i pour servir d'instruction a u x gouverneur et intendant de la Martinique.
Ce texte
confirme le m é m o i r e d u 18 avril et reconnaît à SainteLucie la qualité d e p o r t neutre. — 15 octobre. — L e Mercier de la R i v i è r e , fidèle a u x principes physiocratiques, substitue une Régie à la gestion par les « Frères de la Charité » d e l'hôpital de F o r t R o y a l . Cette mesure contribue à sa disgrâce. — 18 octobre. —
Organisation
d e la
maréchaussée
créée par L e Mercier d e la Rivière. Cette innovation blessait tous les grands Planteurs dans leurs habitudes
d'indé-
pendance puisqu'elle remettait entre les mains d u g o u verneur toutes les forces de police d e la colonie jusqu'alors à la seule disposition de l'aristocratie locale.
148 Le
LA
même
souci,
MARTINIQUE
très
physiocratique,
d'assurer
la
« Sûreté » de la colonie avait inspiré à l'intendant un plan de fortifications capables d e tenir en échec tous les assauts d e l'étranger. A c e t ensemble de t r a v a u x appartient le F o r t B o u r b o n , aujourd'hui F o r t Desaix, d o n t la c o n s t r u c tion entreprise en 1763 fut achevée en 1 7 7 1 . — décembre. — Organisation des d é n o m b r e m e n t s . Ici encore
perce
le souci
physiocratique
de substituer
à
l ' i m p ô t de répartition un i m p ô t de quotité, d ' o ù nécessité des recensements. 1764. L e c o m t e
d'Ennery
est n o m m é
Martinique, en r e m p l a c e m e n t
gouverneur d e la
d u marquis d e Fénelon,
lequel partage la disgrâce de L e Mercier d e la R i v i è r e . — 25 février. — Arrêt d u Conseil d ' E t a t
établissant
l'imposition à percevoir sur la Martinique. Il reproduisait un p r o j e t rédigé par L e Mercier d e L a Rivière l'année précédente, t o u t entier inspiré des principes de la nouvelle école. On recourait à un système
nouveau
d'assiette,
dit de la « part proportionnelle », q u e T u r g o t , après l ' a v o i r esquissé, avait renoncé à établir dans s o n i n t e n d a n c e . 1765, 25 janvier. — Mémoire d u R o y pour servir d'instructions au c o m t e d ' E n n e r y , gouverneur de la Martinique. Ce t e x t e , rétablissant l'arrêt d u 15 a o û t 1763, est l ' œ u v r e de D u b u c ; en v u e d e ménager les Chambres de C o m m e r c e , il c o m m e n c e
par affirmer
la
doctrine
protectionniste
o r t h o d o x e , mais p r é v o i t in fine une e x c e p t i o n qui e m p o r tera la règle. E t c'est en quoi ce m é m o i r e , considéré d ' o r d i naire par les historiens c o m m e le dernier manifeste de la Royauté
en faveur d e l'Exclusif,
constitue
en réalité
le premier succès d u parti des colons sur le parti des négociants
d e la
circonstances,
Métropole.
dit-il,
o ù la
« Il p e u t richesse
y
avoir des
et la prohibition
qu'il faut réunir dans les colonies seraient dans un état
149
1763-1802
d'incompatibilité, et alors la loi de la prohibition, t o u t essentielle qu'elle est, d o i t néanmoins céder. » En
conséquence,
le Mémoire
autorise
sirops-comestibles, y ajoute l'introduction
le
commerce
de la m o r u e
sèche e t établit à Sainte-Lucie un p o r t d ' e n t r e p ô t où d e v r o n t s'échanger les produits des Iles contre les denrées étrangères. Cette concentration d u trafic engendra, p a r suite des frais de transport, une élévation d u cours des sirops français et rendit, en fait, leur achat impossible aux Anglais et aux Hollandais. Ainsi, en dépit des intentions d u G o u v e r n e m e n t le n o u v e a u texte législatif anéantit le
commerce
qu'il
prétendait
— 16 décembre. —
Lettre
consolider.
(Voir
1784).
d u R o i p e r m e t t a n t , en
échange des sirops et des tafias, l'introduction a u x Iles de nègres étrangers par des navires v e n a n t directement des Côtes d ' A f r i q u e , à condition q u e la cargaison supérieure à 180 têtes. Le g o u v e r n e m e n t
soit
finissait par
accorder lui-même l'autorisation qu'il avait suffi d'attribuer l'année précédente à L e Mercier de la Rivière p o u r permettre
a u x adversaires
d e ce dernier d ' o b t e n i r
sa
disgrâce. — Choiseul fait introduire à la Martinique des familles alsaciennes qui s'établirent à « Champ Flori » dans le centre de l'île. 1766, 4 mars. — Création d'une p o s t e , projetée depuis 1 7 3 9 . — D u b u c d u Ferret, frère d e Jean-Baptiste
Dubuc,
est n o m m é représentant d e la Martinique à Paris. 1767, 29 juillet. — Arrêt d u Conseil confirmant le p o r t d'entrepôt
de Sainte-Lucie
S a i n t - D o m i n g u e , au Môle —
et en créant un second à Saint-Nicolas.
Petit d e V i é v i g n e , fils d'Emilien
Petit, publie le
Code de la Martinique. Des suppléments paraîtront en 1772 et 1786.
150
LA
MARTINIQUE
1768, 7 juillet. — L e Conseil supérieur d e la Martinique crée à F o r t R o y a l le collège Saint-Victor. 1771-1773. L a Vallière est n o m m é gouverneur d e la Martinique à la place d ' E n n e r y , mais c'est le n o u v e a u g o u v e r neur d e la G u a d e l o u p e , le c o m t e de Nozières, qui va o c c u per le p o s t e : l ' i n d é p e n d a n c e d e la G u a d e l o u p e est d e nouveau
sacrifiée.
D i o r é est n o m m é gouverneur de la G u a d e l o u p e (28 n o v . ) . Malade, il rentre en France le 14 avril 1773, laissant l'intérim à son s e c o n d , M. de Tilly. 1774, 29 décembre. — M M . d e Nozières et T a s c b e r r e n o u vellent une o r d o n n a n c e , n o n mise en vigueur, d u 18 juin 1761, par laquelle tous les gens de couleur étaient tenus dans le délai d e trois m o i s , de remettre à l'intendance les titres d e leur affranchissement — la vérification d e ces titres e x p o s a n t c e u x qui ne seraient pas en
règle
a v e c les ordonnances à être v e n d u s au profit d u r o i . L e Conseil supérieur d e la Guadeloupe proteste et l ' o r d o n nance n'est appliquée
q u ' à la Martinique, où elle est
annulée p a r un arrêt d u conseil d ' E t a t le 8 juin 1 7 7 6 . 1778. L e marquis de Bouille, gouverneur d e la Martinique, s'empare d e la D o m i n i q u e
(8 s e p t e m b r e ) . L e marquis
de Bouille d e v a i t s'illustrer plus tard, lors de la « Fuite d e Varenne ». 1783, 3 novembre. — Traité d e Versailles. — L a France conserve d e ses conquêtes l'île d e T a b a g o . L a guerre qui se termine a v e c ce traité, a surtout favorisé la
Mar-
tinique, où s'étaient faits tous les armements et préparées t o u t e s les expéditions. 1784, 30 août. — Arrêt établissant le régime d e l'Exclusif mitigé. Saint-Pierre, Sainte-Lucie et Pointe à Pitre sont érigés en ports d'entrepôt p o u r les Petites Antilles ; il
151
1763-1802
est ainsi mis fin a u x effets néfastes d u Mémoire d e j a n vier 1765. Les tafias et les sirops p e u v e n t passer à l'étranger ; certaines vivres et matériaux indispensables p e u v e n t être introduits. L a politique
économique
préconisée p a r L e Mercier
de la Rivière dès 1763 t r i o m p h e grâce à lui. (Voir Généralités, 1778). — 26 octobre. — U n e station navale est établie à la Martinique p o u r les Iles d u V e n t . 1784 (après). — L e gouverneur général, v i c o m t e d e D a m a s , supprime les c o m m a n d a n t s de quartiers et les remplace par des c o m m a n d a n t s d e paroisses ; il atteint p a r là le prestige des grands
propriétaires.
1786, 7 mars. — L e Président d e Foulquier, intendant d e la G u a d e l o u p e , est n o m m é intendant d e la Martinique. Il retourne en France rendre c o m p t e d e son administration (juin-décembre) et revient a v e c mission d'instaurer définitivement le système des Assemblées Coloniales préconisé par le Comité d e Législation, d o n t il avait
fait
partie,
et qu'il avait expérimenté à la G u a d e l o u p e . (Voir Généralités, 1778 et G u a d e l o u p e , 1782). 1787, avril. — Arrivée à la Martinique, v e n a n t de F r a n c e , de Moreau de Saint Méry, chargé p a r le maréchal d e Castries d'étudier sur place les effets probables des réformes entreprises p a r le Conseil. — 17 juin. — Ordonnance
créant dans les colonies
des Antilles des Assemblées coloniales chargées d'asseoir et répartir l'imposition
ordonnée par le R o i . Quelques
jours plus tard une ordonnance crée p o u r la Métropole, sur le m ê m e t y p e , des Assemblées
Provinciales.
— Création à Paris d e la Société des Amis des Noirs p a r Brissot, C o n d o r c e t , L a R o c h e f o u c a u l d ,
etc..
152
LA
MARTINIQUE
1788, 16 août. — Ouverture des ports de la colonie au c o m merce étranger j u s q u ' a u 1
er
janvier 1789.
1770 (vers). — L e gouverneur général d ' E n n e r y
réprime
sévèrement le duel qui était d e v e n u d'une m o d e courante. 1789, 9 février. — L'Assemblée coloniale d e la Martinique d e m a n d e au roi d ' e n v o y e r des députés a u x Etats généraux. — L e roi oppose un refus à cette d e m a n d e . — 13 février. — M o r t à Fort R o y a l d u Président d e Foulquier, intendant d e la colonie. Le fils d e l'intendant des Finances, F o u l o n Necker
devait
d ' E c o t i e r , à qui la succession
échoir le 12 juillet
— 10 mai. —
Ordonnance
de
1789, le r e m p l a c e .
permettant
l'entrée des
farines et des biscuits j u s q u ' a u 15 o c t o b r e . Cette o r d o n nance sera prorogée j u s q u ' a u 1
er
mars 1790.
— 28 mars. — L o i établissant des Assemblées
colo-
niales élues au suffrage universel, et dotées d u p o u v o i r législatif. — septembre. —
Dans les premiers
jours
d u mois
la cocarde tricolore est arborée à la Martinique. U n e grande fête a lieu à F o r t - R o y a l , le 27, p o u r célébrer la nouvelle alliance entre la R o y a u t é et la Nation. L e g o u verneur général, le v i c o m t e de V i o m é n i l , h o m m e de guerre déjà illustre p o u r sa conduite en Pologne lors de la guerre de Succession, a c c o m p l i t un geste qui excite l'indignation des planteurs et des blancs de Saint-Pierre : il embrasse un mulâtre. — 17 octobre. — L'Assemblée coloniale de la Martin i q u e , représentant constitue
surtout
les intérêts
des villes, se
en assemblée générale coloniale p o u r
nommer
d e u x représentants à l'Assemblée constituante, elle n o m m e Moreau de Saint-Méry et le c o m t e A . d e Dillon. Les planteurs résidant à Paris avaient auparavant désigné trois représentants p a r m i lesquels Moreau de Saint-Méry.
153
1763-1802 L'Assemblée
pressentait « les avantages qui d o i v e n t
résulter p o u r la colonie de porter elle-même par l'organe de ses députés son h o m m a g e , ses doléances et ses v œ u x à l'Asemblée cette
Nationale » et nourrissait « l'espoir
Assemblée
solennelle
et respectable
que
qui a bien
v o u l u déjà recevoir dans son sein les députés de SaintD o m i n g u e accueillera de m ê m e ceux de la Martinique et procurera ainsi à cette p r o v i n c e éloignée d e l ' E m p i r e Français un m o y e n
d e r a p p r o c h e m e n t et d'union à la
grande famille de l ' E t a t . » Les Planteurs réagissent v i v e m e n t et s ' o p p o s e n t à l'élection d e députés d o n t l'action aurait neutralisé à Paris celle d e leurs délégués. — octobre. — A la d e m a n d e des Saint-Pierrais
une assemblée
Planteurs et des
se réunit le
octobre
10
p o u r juger le g o u v e r n e u r ; elle se déclare i n c o m p é t e n t e et
réclame
la c o n v o c a t i o n
d'une
assemblée
générale.
Le g o u v e r n e u r est cependant désavoué par les colons. — 1 6 novembre. — Réunion de l'Assemblée générale sous la présidence de D u b u c . Les intérêts de la c a m p a g n e y
prédominent. — 23 novembre-2 décembre. — R è g l e m e n t de l ' A s s e m -
blée coloniale pour l'établissement des municipalités dans c h a q u e paroisse. (La municipalité de Saint-Pierre
devait
comprendre 1 maire, 4 échevins, 8 conseillers et 1 secrétaire g r e f f i e r ; celle d e F o r t R o y a l 1 maire, 2 échevins et 4 conseillers et chaque paroisse 1 maire ou juge de paix assisté d ' u n lieutenant d u maire). L a création d e ces municipalités répondait à l'une des plus anciennes revendications
des habitants, mais
portait atteinte a u x prérogatives des grands auxquels le régime des milices
elle
Planteurs
assurait une influence
décisive et une d o m i n a t i o n absolue sur toutes les paroisses. L ' A s s e m b l é e coloniale s'efforça d o n c de réduire à néant les droits qu'elle ne p o u v a i t refuser d'attribuer a u x n o u -
154
LA MARTINIQUE
velles municipalités en a j o u t a n t a u m o m e n t d e se séparer, le 2 d é c e m b r e , les articles 31 et 3 2 , articles q u e les SaintPierrais refuseront d e reconnaître. Ces articles rendaient les officiers m u n i c i p a u x personnellement responsables de tous les désordres qu'ils auraient p u prévenir en en appelant p r é v e n t i v e m e n t au p o u v o i r exécutif,
c'est-à-dire
au
Gouverneur. Ces
dispositions
aboutissaient d o n c à restituer en fait a u x autorités militaires la suprématie q u e la création m ê m e des m u n i c i palités avait eu pour o b j e t d e faire disparaître. — 3 décembre. —
Arrêté
d e l'Assemblée
générale
o u v r a n t a u x navires américains les ports de F o r t R o y a l , de Trinité, d u Marin et d u François, et supprimant les droits sur les marchandises mentionnées à l ' o r d o n n a n c e d u 3 0 a o û t 1 7 8 4 . Vioménil c o n s e n t , le 19 d é c e m b r e , à promulguer
une ordonnance
donnant
satisfaction aux
Planteurs, mais limitée à 4 mois seulement. (Il m a i n tient le droit d e 1 % ) . — 8 décembre. —
Arrêté
concernant
la
formation
d'une nouvelle Assemblée : le n o m b r e des représentants d e Saint-Pierre est diminuée des 3/4. — 11 décembre. — pour
réprimer
L a loi martiale
les m o u v e m e n t s
est proclamée
d e protestation
d e la
p o p u l a t i o n d e Saint-Pierre. — 19 décembre. — Les arrêtés d e l'Assemblée
sont
promulgués. — Arrêté établissant un contrôle sévère des entrées dans la colonie. — Les Planteurs s'efforcent d'isoler la Martinique d e la m é t r o p o l e ; le Conseil Souverain, d o n t ils o c c u p e n t tous les sièges e x p r i m e le désir
d'attendre
sous le régime ancien q u e les nouvelles lois soient a c h e vées.
155
1763-1802
— I n t r o d u c t i o n dans la colonie sur l'ordre d u Ministre, le c o m t e d e la Luzerne, b o t a n i s t e distingué, d e l'arbre-àpain et de l'hévi qui se multiplient f a c i l e m e n t ; d u c a m b a r a n , d u bilimbier, d u carambolier et d u
mangostan
qui réussissent également. L e Ministre envoie à la fin de l'année des arbres à épices. 1789-1790. A la fin de l ' A n c i e n R é g i m e , Marseille envoie à la Martinique autant d e vaisseaux q u e B o r d e a u x . Sur u n trafic total d e 358 millions d e francs, le n é g o c e venait p o u r 40 millions a v e c les Antilles, p o u r 92 millions a v e c le L e v a n t . L e n o m b r e des raffineries
était passé de 12 en 1776
à 30 en 1783. 1790, 9 janvier. — Nouvelle Assemblée d e députés habilem e n t sélectionnés p a r les Planteurs, qui espèrent faire v o t e r le statu quo. — Saint-Pierre constitue sa municipalité. L a « c o m m u n e intermédiaire » établit la liaison entre la m u n i c i palité et l a p o p u l a t i o n ; c e t organisme original a tous les caractères d ' u n c l u b . — 21 février. — D e u x officiers d e Saint-Pierre accusés d'avoir piétiné la c o c a r d e tricolore sont arrêtés p a r la foule et mis a u c a c h o t . Les troupes de l a garnison se retirent et se concentrent à F o r t R o y a l . Les habitants de Saint-Pierre f o n t appel à leurs partisans des paroisses voisines et d e m a n d e n t des secours à la G u a d e l o u p e . L e gouverneur
d e cette
colonie,
d e Clugny,
leur
envoie
110 volontaires c o m m a n d é s par D u g o m m i e r . On c o n v i e n t d'une trêve e t les volontaires retournent à la Guadeloupe le 13 m a r s . — 1
e r
mars. —
représentant
Une nouvelle
les intérêts
Assemblée
des c a m p a g n e s ,
générale,
confirme les
156
LA MARTINIQUE
pouvoirs de Moreau de Saint Méry et d u c o m t e Dillon. — Les députés des villes protestent contre les tendances et les actes de cette assemblée. — 5 mars. — Arrivée à Saint-Pierre des volontaires de la Guadeloupe sous la conduite de Coquille
Dugom-
mier. M o u v e m e n t en faveur d'une « R é u n i o n fédérative » des diverses îles. — 16 mars. — L ' A s s e m b l é e se sépare. Ses m e m b r e s f o n t c a m p a g n e dans toute la colonie contre les habitants de
Saint-Pierre
auxquels
viennent
se rallier
ceux
de
F o r t R o y a l . Ils préparent une expédition contre SaintPierre. — Saint-Pierre
envoie
à Paris des députés
chargés
de faire connaître ses revendications et d e contrebalancer l'influence
des députés
des Planteurs,
parmi
lesquels
Moreau d e Saint-Méry. — avril. — Les Saint-Pierrais e n v o i e n t à Paris d e u x députés, le sieur R u s t e et le sieur d e Corio,
Procureur
d u R o i , afin de tenir en échec le n o u v e a u d é p u t é des Planteurs, le sieur de Blanchetière
Bellevue.
— 23 avril. — Les « députés de la jeunesse citoyenne des Iles d u V e n t réunis dans la salle des spectacles de Saint-Pierre » après avoir formé un « p a c t e d ' u n i o n , d e fraternité et de confédération » font serment : 1° de respecter les décrets de l'Assemblée Nationale ; 2° de haïr les Emigrés ; 3° de se réunir au premier signal sous les ordres des chefs
municipaux
lorsque
la colonie
qui aura
besoin
de secours en aura formé la d e m a n d e p a r son corps représentatif. — avril. — Les malentendus persistant entre les p l a n teurs et les patriotes, D u g o m m i e r revient à la Martinique
1763-1802
157
a v e c 300 volontaires dans le courant d'avril.
N'ayant
p u concilier les partis, il retourne à la Guadeloupe à la fin d u m ê m e mois pour y c o m p r i m e r une révolte des esclaves. — mai. — quatre ports
L'ordonnance
de
décembre
étant venue à expiration
ouvrant
les
l'agitation renaît
autour de cette question. L ' i n t e n d a n t prend parti p o u r les Saint-Pierrais
et s'oppose
au renouvellement de la
p e r m i s s i o n ; il propose de s'en remettre aux
décisions
de l'Assemblée Nationale. Colère des Planteurs d o n t les représentants de Foulon
à
Paris
demanderont
d'Ecotier: le
aussitôt le
rappel
Conseil d ' E t a t refuse.
— juin-septembre. —
L'ordre
ne se rétablit
pas
à
Saint-Pierre. L e 3 juin, jour de la Fête-Dieu, des troubles graves éclatent durant une p r o c e s s i o n ; les planteurs et les h o m m e s de couleur d'un c ô t é , la classe m o y e n n e de l'autre. Le gouverneur o c c u p e militairement S a i n t - P i e r r e ; les principaux des patriotes emmenés prisonniers à F o r t R o y a l sont délivrés par la garnison soulevée. Le g o u v e r neur a b a n d o n n e la ville aux rebelles et, a p p u y é par les h o m m e s de couleur, résiste aux patriotes.
Dugommier
part de n o u v e a u a v e c 300 volontaires p o u r les soutenir dans leurs revendications (6 septembre). Il soutient contre le gouverneur une lutte où il est défait au C a m p d u Grand Morne par les mulâtres conduits par Percin. Les d e u x partis restent un temps sur leurs positions. Le 3 o c t o b r e D u b u c fait appel aux A n g l a i s ; ceux-ci refusent d'intervenir. — 7 juillet. —
L'Assemblée élabore p o u r la Colonie
un Statut. Elle prétend au p o u v o i r législatif et dépossède l'intendant
en établissant
un « Directoire
élu le 14. (Il c o m p r e n d r a les députés de
», qui
sera
Saint-Pierre,
2 députés de F o r t R o y a l et 15 députés de la campagne.)
158
LA
Elle s'attribue
MARTINIQUE
u n p o u v o i r législatif
absolu en ce qui
concerne les esclaves (art. I ) . — 21 juillet. — Suppression d u tribunal d u g o u v e r neur, d o n t le f o n c t i o n n e m e n t faisait échec au principe d e la séparation des p o u v o i r s . — 2 2 juillet. —
D é c r e t d e l'Assemblée
restreignant
la liberté d e la Presse, v u « le danger d e trop éclairer les h o m m e s sur leurs droits dans des pays où l'oubli d e ces droits a fait établir l'esclavage e t où la servitude est tellement inhérente à leur constitution qu'ils n e p o u r raient pas exister sans elle. » Il fallait une permission d e la m u n i c i p a l i t é ; l'impression de t o u t e relation des troubles populaires était punie d e 500 1. d ' a m e n d e . — 6 août. —
Décret
d e l'Assemblée
au sujet des
m u n i c i p a l i t é s ; celles-ci sont réduites à d e pures fonctions de salubrité et d ' h y g i è n e . — 2 9 novembre. — l'envoi 6.000
d'une
L'Assemblée
Nationale
escadre et d e quatre commissaires
hommes.
Elle
suspend
l'assemblée
décide avec
coloniale
et
casse le « Directoire ». Elle d o n n e l'entrepôt à la Trinité et à F o r t R o y a l p e n d a n t l'hiver s e u l e m e n t ; les Planteurs obtiennent d o n c satisfaction, p o u r moitié. 1791, mars. — Informé des troubles survenus à la Martin i q u e , le roi remplace le gouverneur de D a m a s par M. d e Béhague,
qui arrive
à
Fort
Royal
le 12 mars
avec
4 commissaires pour rétablir l'ordre. L a Colonie se s o u m e t dès le lendemain et D u g o m m i e r retourne à l a G u a d e l o u p e . L e Conseil souverain est c o n v o q u é le 26 a u x lieu et place d e l ' A s s e m b l é e ;
le 29, les commissaires
d é c i d e n t la création d ' u n c o m i t é d e conciliation de d o u z e m e m b r e s qui sera élu p a r la p o p u l a t i o n de Saint-Pierre « afin d e proposer tous les m o y e n s d'union. » Cependant
1763-1802
159
les forces des planteurs o c c u p e n t les forts et les troupes ralliées a u x patriotes sont embarquées p o u r la France. — L a connaissance des événements qui se sont p r o duits
à Saint-Domingue
parvient
à
Fort-Royal;
elle
contribue à jeter dans les bras des Planteurs le gouverneur général, qui rétablira les milices despotiques de l ' A n c i e n régime. Quelques secours partent de la Martinique p o u r le Cap le 3 avril. — avril. — Les Planteurs poursuivent leur c a m p a g n e contre Saint-Pierre, d o n t ils « b o y c o t t e n t »
le port; ils
envoient toutes leurs denrées à la Trinité o u à F o r t - R o y a l , o u dans les diverses petites rades d e la c ô t e q u e fréquentent les navires étrangers. — Les commissaires
des colons
d e la
Guadeloupe
p r o p o s e n t à ceux de la Martinique la réunion d ' u n « C o n grès » — le m o t était en faveur depuis
l'insurrection
américaine — qui serait chargé d'élaborer le statut p o l i tique des Iles. — 1 5 mai. — Décret d e l'Assemblée Nationale en faveur des h o m m e s d e couleur libres nés d e parents libres, qui deviennent électeurs. Leur n o m b r e était des plus restreints; ce t e x t e reste au surplus lettre morte dans la colonie. L e lendemain Moreau d e Saint-Méry et le c o m t e Dillon se
retirent
de l'Assemblée
Nationale
en manière
de
protestation. — 3 juillet. — E m e u t e grave à Saint-Pierre, où l ' o n apprend la fuite d u roi et les événements subséquents. L a p o p u l a t i o n est surexcitée par suite d u « b o y c o t t a g e » auquel se livrent les p l a n t e u r s ; le trafic maritime est paralysé et les commissionnaires
t o u c h e n t à la ruine.
— 28 septembre. — L o i émanant d e la Constituante et réservant aux colonies la législation quant aux p e r -
160
LA
MARTINIQUE
sonnes. L a question de l'affranchissement
des noirs et
des libertés des h o m m e s de couleur est d o n c
réservée,
aux assemblées locales. Ce texte a p o u r effet de transformer c h a q u e
colonie
en un c h a m p d e bataille entre partis adverses. Les mulâtres se détachent
des Planteurs
d o n t la mauvaise
volonté
à leur égard apparaît désormais d'une manière évidente. Les
Commissaires
civils,
d'autre
part,
se divisent
et
d e u x d'entre e u x regagnent la France (24 o c t o b r e ) . — 27 novembre. —
Les mulâtres
s'assemblent
et
décident de défendre leurs droits contre les Grands Blancs. Ils s'inspirent d u C o n c o r d a t de P o r t au Prince. L e lend e m a i n , le gouverneur général se décide à
promulguer
le texte d u 28 septembre qu'il est d e v e n u impossible de cacher plus
longtemps.
— 7 décembre. — Crassous de Médeuil et D u g o m m i e r . députés de la ville d e Saint-Pierre, réclament à la barre de l'Assemblée Nationale le rappel de Béhague et d e tous les chefs civils et militaires c o m p r o m i s dans les troubles. — 9 décembre. — L ' A s s e m b l é e Coloniale de la Martinique a d o p t e l'idée d ' u n Congrès général où les quatre colonies de la Martinique, la G u a d e l o u p e ,
Sainte-Lucie
et T a b a g o seraient représentées. Elle n o m m e six d é p u t é s , les sieurs Saint Cyran, G o d e t , G o n d r e c o u r t ,
Dondoire,
Clairefontaine et L a Salinière. L e Congrès se tiendra à Fort
R o y a l , à mi-distance entre la G u a d e l o u p e
et les
d e u x autres îles. — 12 décembre. — Béhague s'oppose
à
l'ouverture
d u p o r t d u Marin réclamée p a r les Planteurs. 1792,
janvier-avril. — L e « Congrès Général » tient ses
séances à F o r t R o y a l . Il limite les droits accordés a u x mulâtres par le décret d u 15 mai en j o u a n t sur les nuances
MÉDAILLES COMMÉMORATIVES
En haut et à gauche: Fortification de l'Ile de la Guadeloupe. 1721. A l'exergue: GVADALVPA INSVLA MVNITA. PHILIPPO REGENTE. (Bronze, 41 mm. Cab, des Médailles). En haut et à droite: Etablissement de la Compagnie des Indes. 1664. « JUNGENDIS COMMERCIO GENTIBUS ». A l'exergue: SOCIETATES NEGOTIATORVM IN VTRAMQUE INDIAM. (Bronze. 41 mm. Cab. des Médailles). En bas à gauche: Echec de l'expédition Hollandaise contre la Martinique. 1674. « COLONIA FRANCORUM AMERICANA VICTRIX ». A l'exergue: BATAVIS AD MARTINICAM CÆSIS ET FVGAT1S. (Or, 41 mm. Cab, des Médailles). En bas et à droite: Possession de l'Ile Saint-Christophe. 1666. « COLONIA FR. STABILITA ». A l'exergue: ANGL. EX. INSVLA ST. CHRISTOP. EXTVRBAT. (Argent, 41 mm. Cab. des Médailles).
161
1763-1802
et les couleurs. L e p r o j e t final déclare q u e les colonies font « partie d e l ' E m p i r e Français », mais q u e les députés des
Colonies
à l'Assemblée
Nationale
n'ont
consultative. Les tendances à l ' a u t o n o m i e
que voix
apparaissent
d o n c d e la f a ç o n la plus m a r q u é e . — 28 mars-4 avril. — L o i métropolitaine
accordant
les droits d u c i t o y e n à tous h o m m e s de couleur et nègres libres sans distinction d'origine. Des commissaires civils sont n o m m é s pour assurer l'exécution dans les colonies de ce nouveau texte. — 1er avril. — Ordonnance tendant à faire rentrer les i m p ô t s .
1790
Depuis
aucune
recette n ' a p u être
accomplie. — 1 5 avril. —
L a colonie, à n o u v e a u isolée d e la
Métropole p a r suite de la guerre, est contrainte d e faire appel a u x vivres de l'étranger. Béhague autorise, le 1 5 , l'entrée des farines. — 3 j u i n . — L'Assemblée de la Martinique, laquelle s'intitule « Assemblée Constituante d e la Martinique », accepte les dispositions de la loi d u 28 mars-4 avril qu'elle promulgue.
Elle
espère
ainsi
échapper
à l'action des
commissaires civils et de l'escadre, contre l'envoi desquels elle s'élève a v e c force,
dans une protestation
au R o i .
— 16 septembre. — Arrivée à la Martinique d u n o u v e a u gouverneur
général
Rochambeau
commissaires ; la flotte
accompagné
d e trois
est sous les ordres de Bruix.
Ils avaient quitté la France le 10 a o û t , mais la nouvelle des n o u v e a u x troubles révolutionnaires les avait précédés. Dénoncés a u x habitants p a r les Planteurs c o m m e des « brigands », les commissaires et leurs h o m m e s ne p e u v e n t débarquer ; ils continuent sur S a i n t - D o m i n g u e . Les Iles entrent en insurrection et arborent la cocarde b l a n c h e , le 17 s e p t e m b r e . ANTILLES
11
162
LA
MARTINIQUE
— 17 septembre. — L e c o m t e d e P r o v e n c e
délègue
a u x Antilles a v e c mission d e les soulever u n r é v o l u t i o n naire repenti qui a surpris sa c o n f i a n c e : c e t aventurier était autorisé à p r o m e t t r e la liberté d u c o m m e r c e a v e c l'étranger. — A la Martinique la plus grande inquiétude
règne
dans le milieu des Grands Blancs. Béhague entre en liaison a v e c les Emigrés par l'intermédiaire d e son n e v e u , tandis que D u b u c se fait e n v o y e r p a r les planteurs en mission à la Cour d e L o n d r e s . On parle à Paris d e l ' i n d é p e n d a n c e des Colonies. — 19 septembre. — L e s Patriotes d e l a Martinique et de la G u a d e l o u p e réfugiés à la D o m i n i q u e
affirment
leur a t t a c h e m e n t à la R é p u b l i q u e et se déclarent seuls capables d'élire des députés à l ' A s s e m b l é e . Les
Martiniquais
choisissent:
Crassous
d e Médeuil
et J a n v i e r L i t t é e , h o m m e d e couleur. — octobre. — L ' A s s e m b l é e locale adresse au R o i u n manifeste v i b r a n t o ù s'affirme
son l o y a l i s m e .
—
Les
patriotes a b a n d o n n e n t l a c o l o n i e ; ils élisent le 28 des députés
chargés
d e faire connaître à Paris les derniers
événements. L a C o n v e n t i o n décide le 8 n o v e m b r e d e rappeler les commissaires précédents et d ' e n e n v o y e r des n o u v e a u x . — 1
er
décembre. — L e m ê m e j o u r parviennent à la
Martinique de
le capitaine
soumettre
d e vaisseau
les Antilles,
Lacrosse,
e t le délégué
chargé
des Princes.
Celui-ci est accueilli a v e c enthousiasme par les Planteurs d o n t il préside une réunion mais il é p r o u v e la froideur d u gouverneur général. Lacrosse tente d'impressionner les habitants
p a r une p r o c l a m a t i o n
qu'il
fait répandre à
terre, mais Béhague maintient son autorité en consentant le 4 d é c e m b r e à l'ouverture d u Marin.
1763-1802
163
— 1 3 décembre. — L'Assemblée Coloniale se réunit, jure fidélité a u x Princes et déclare la guerre à la R é p u blique. L a sécession est c o n s o m m é e . Quelques jours plus tard la Convention en possession des dernières nouvelles, décrète Béhague d'accusation et envoie des commissaires civils. D u b u c de son c ô t é se rend à Londres où il retrouvera les députés de la G u a d e l o u p e , M M . de Curt et de Clairefontaine. Grâce à la fidélité de Sainte-Lucie, Lacrosse p e u t prendre pied a u x Antilles e t les inonder de ses proclamations. 1 7 9 3 , 7-9 janvier. — Les promesses d e Lacrosse n o t a m m e n t en ce qui concerne le statut des nègres et les menaces d e répression q u e contiennent tous ses manifestes ébranlent les habitants. Les h o m m e s d e couleur, enfin c o n v a i n c u s des bonnes
d e la Métropole
intentions
à leur
égard,
se rallient à la R é v o l u t i o n . L a Martinique et la Guadeloupe se rendent à Lacrosse. L ' A s s e m b l é e se transporte a u L a m e n t i n sur l ' H a b i t a t i o n Carrière et décide de r e c o n naître la R é p u b l i q u e (9 janvier). Les royalistes sont c o n traints d e suivre Béhague
dans sa fuite (10-11 janvier)
en empruntant une partie d e la flotte en station. — 1 2 janvier. — Création à la Martinique d ' u n « Conseil exécutif » chargé d'administrer la colonie en l'absence d e toute autorité. —
21 janvier. — L e j o u r m ê m e de la m o r t d u R o i ,
l'Assemblée
Coloniale fait a m e n d e honorable d e v a n t la
Convention dans une adresse qui témoigne d e sa part d ' u n retournement
complet.
— 1er février. — Entrée en guerre de l'Angleterre. —
3
février.
—
Rochambeau,
revenu
de
Saint-
D o m i n g u e , débarque à la Martinique et s'installe à F o r t R o y a l qu'il baptise F o r t R é p u b l i q u e o u Républiqueville. (Le F o r t B o u r b o n d e v i e n t le F o r t d e la C o n v e n t i o n ) .
164
LA
MARTINIQUE
— 8 février. — Création dans les bourgs de « Comités de Surveillance » faisant f o n c t i o n d e municipalités. Ces comités seront n o m m é s par des commissaires
concilia-
teurs choisis p a r R o c h a m b e a u .
jouissent
Les mulâtres
p o u r la première fois de l'égalité p o l i t i q u e . — A c t i o n des clubs, et de la « Société des Amis de la Convention Nationale », en particulier, c l u b d e Saint-Pierre
: la
Mar-
seillaise. — 16 février. — R o c h a m b e a u ferme tous les p o r t s , sauf
Saint-Pierre.
— 19 février. — D u b u c et Louis de Curt signent un accord a v e c les Anglais à Whitehall. Les Antilles passeront sous la d o m i n a t i o n britannique mais seront rendues à la France lors d e la restauration de la dynastie des B o u r b o n à condition q u e toutes les colonies anglaises d o n t la France aurait p u s'emparer fussent restituées et toutes les dépenses d'amélioration
remboursées.
— 19 mars. — Béhague signe un accord a v e c les Anglais de Trinidad où il s'est réfugié, en v u e d e s'emparer de la Martinique. Les royalistes d e la colonie, en intelligences a v e c le gouverneur fugitif, s'agitent. — 17 avril. — R o c h a m b e a u ordonne a u x Planteurs d e dissoudre leurs rassemblements ; ceux-ci lui r é p o n d e n t en le s o m m a n t d e fermer les Clubs. — 27 avril. — D é b u t d u c o u p de main des royalistes et des Anglais. — mai. — conquête.
Béhague
tente
Les Patriotes
d'exécuter
s o n plan
et les Royalistes
entrent
de en
lutte. — 8 juin. — belle conduite Bellegarde.
Victoire
de R o c h a m b e a u
d u bataillon
d e mulâtres
grâce
à la
conduits par
165
1763-1802
— 13 juin. — Arrivée de D u b u c , porteur des accords de Whitehall. Il encourage les rebelles, q u e soutiennent les troupes d u général Bruce. — 21 juin. — Déroute des Blancs, qui s ' e m b a r q u e n t sous le feu des Révolutionnaires dans le plus grand désordre. Les Anglais c o u v r e n t leur retraite. — juillet. — Mise en vente des biens des Emigrés ; la valeur totale de ces propriétés est estimée à cent millions à la Martinique seulement. — 11 septembre . — A b o l i t i o n par la Convention d e tous les droits perçus au sujet d u c o m m e r c e des colonies. — 17 septembre. —
Proclamation
de
Rochambeau
annonçant la formation des municipalités. — 22 septembre. — R o c h a m b e a u réunit à Saint-Pierre les « Commissaires
Représentants
» d e la Martinique,
au n o m b r e de 64. Ils représentent 17 paroisses sur 27. L'Assemblée élit c o m m e Président, Levassor. — 24 septembre. — Nationalisation des biens d u Clergé v o t é e par l' « Assemblée Républicaine ». — 25 septembre. — Ouverture des quatre ports j u s q u ' e n avril 1794. — 3 octobre. — Création de milices et d'escouades de vétérans, chargés d e la défense d e la colonie. D e u x bataillons de gens d e couleur sont également créés. — 18 octobre. — Création d ' u n Tribunal naire c o m p o s é d ' u n j u r y et d e cinq l'Assemblée.
Ses jugements
juges
sont sans
Révolutionnommés par
appel.
— 26 octobre. — Les Clubs sont officiellement reconnus et protégés.
166
LA
MARTINIQUE
— 26 et 28 octobre. — L ' A s s e m b l é e représentative d e la Martinique arrête : « L a Colonie d e la Martinique sera considérée d é p a r t e m e n t , q u a n t à s o n administration
comme
indépendante
des îles Françaises d u v e n t d e l ' A m é r i q u e ». L e g o u v e r n e u r général R o c h a m b e a u d o n n e son a p p r o b a t i o n à c e t arrêté le 30 o c t o b r e . — 8 décembre. —
L'Assemblée
m e t sur pied une
« Administration Provisoire ». L a R é v o l u t i o n t r i o m p h e . L e d é p a r t e m e n t d e la Martinique est divisé en quatre districts : R é p u b l i q u e v i l l e , Saint-Pierre, Trinité et Marin ; les districts en c a n t o n s . T o u t h o m m e â gé d e 21 ans e t inscrit sur le registre d e la Garde Nationale est c i t o y e n . Les Assemblées primaires n o m m e n t
4 assemblées élec-
torales (1 par district). Les Assemblées électorales élisent un Directeur et un Procureur général S y n d i c qui siégeront à
Républiqueville.
1 7 9 4 , 1 0 janvier. — R e t o u r offensif des Anglais ; la colonie est b l o q u é e par la flotte d u lieutenant général G r e y , m o n t é e par 16.000 h o m m e s . — 23 mars. — Après une courageuse défense q u e rend inutile l a trahison de Bellegarde, R o c h a m b e a u ,
assiégé
dans le fort de la C o n v e n t i o n , d o i t capituler. H é r o ï s m e de L u c a s et d u jeune mulâtre R o c h . R o c h a m b e a u reçoit les honneurs d e la guerre et gagne les Etats-Unis a v e c la pensée de demeurer ainsi à pied d'oeuvre si la reprise des Antilles devenait un j o u r possible.
QUATRIÈME PÉRIODE: Redevenue
française
1802-1848
en 1 8 0 2 , la
Martinique,
où
l'abolition de l'esclavage n'avait pu être proclamé et réalisé par la Révolution française, se retrouva naturellement appliquée
sous les lois avec
un
de l'Ancien
peu
plus
de
régime
français,
rigueur
encore.
Perdue à nouveau en 1 8 0 9 , mais recouvrée définitivem e n t en 1 8 1 6 , elle passa dans les années qui suivirent par une série d'agitations tumultueuses e t parfois séditieuses
comme
celle
de la
Grande
Anse
en 1 8 3 3 ;
d'autres conspirations furent étouffées avant d'avoir pu éclater. U n n o m , celui de Bissette, synthétise un m o m e n t toutes les espérances de la population noire vers un affranchissement
intégral.
Sans
leur
donner
encore
satisfaction, certaines réformes, tendant à une moindre inégalité politique, sont cependant accordées à la population
noire
sous
l'affranchissement
le règne
de Louis-Philippe.
Enfin
des esclaves est proclamé en 1 8 4 8 .
1 7 9 4 , 3 0 mars-25 avril. —
Les Anglais rétablissent l e
régime ancien à l a Martinique o ù la loi d'affranchissement n'a p u parvenir a v a n t leur victoire.
168
LA
MARTINIQUE
Les tribunaux de la Monarchie sont reconstitués, les royalistes regagnent leurs propriétés et reprennent leurs fonctions. Serment de fidélité à Guillaume I I I est prêté entre les mains d u gouverneur R o b e r t — 24 mai. — D u b u c d e v i e n t
Prescott.
administrateur général
de la Colonie p o u r le c o m p t e des Anglais. Ceux-ci l è v e n t une c o n t r i b u t i o n de guerre au profit de leurs armées d e terre et de m e r . — 8 juin. —
Victor
Hugues, nouveau
commissaire
chargé p a r l a C o n v e n t i o n d e reprendre les Iles perdues, leur adresse une p r o c l a m a t i o n . l'exploit
d e Lacrosse
Il tente d e renouveler
en profitant
du
mécontentement
des h o m m e s d e couleur et des noirs auxquels il a n n o n c e la liberté. (Les Anglais avaient annulé le 21 mai tous les affranchissements
postérieurs au 12 janvier
1793).
— juillet. — O r d o n n a n c e s u p p r i m a n t tous les droits d'entrée et d e sortie et établissant l'assiette de l'imposition sur les mêmes bases q u ' e n 1 7 9 2 . — 15 juillet. —
Les autorités
anglaises
interdisent
t o u t affranchissement. — 20 juillet. —
Ordonnance
l'Ile a u x étrangers j u s q u ' a u 1
er
ouvrant
les ports
de
n o v e m b r e . Elle sera r e n o u -
velée d e trois en trois mois j u s q u ' e n 1 8 0 2 . Les r e v e n dications des Planteurs obtiennent satisfaction
entière.
— 15 août. — Démission de D u b u c ; il demeure m e m b r e d u Conseil
Privé.
1795, 6 janvier. — Arrivée à la G u a d e l o u p e d e renforts destinés à la reprise de la Martinique et des îles perdues. — 19 juin. — Sainte-Lucie est reprise p a r G o y r a n d . Elle d e v i e n t une base d'opérations
contre les Anglais
d e la Martinique. — 30 octobre. — O r d o n n a n c e p o r t a n t règlement d e la police des Noirs. T o u t e s assemblées leur sont interdites.
1802-1848
169
— novembre-décembre. — Dans les derniers jours d e n o v e m b r e , les citoyens Fourne et Thibierge, Martiniquais installés à Sainte-Lucie, se rendent dans les environs d e F o r t R o y a l en v u e de préparer le d é b a r q u e m e n t de l ' e x p é dition préparée p a r Goyrand p e n d a n t les mois précédents. ils sont livrés a u x Anglais par les Planteurs et fusillés. Une soixantaine de républicains décidés à les venger quittent Sainte-Lucie au d é b u t de décembre et descendent au Vauclin. U n e « confédération » de 400 patriotes d u François tentent inutilement de les rejoindre. Les Anglais les a t t a q u e n t et les dispersent. U n e partie de l'expédition réussit à regagner Sainte-Lucie. Dès lors, la Martinique, où les autorités britanniques se livrèrent à de sévères représailles, demeura hors d'atteinte. 1800, 3 novembre. — Arrêt d u Conseil Souverain concernant les affranchissements
et renforçant les dispositions res-
trictives. —
I n t r o d u c t i o n à la Martinique d e la canne à sucre
de Tahiti qui régénère une culture m e n a c é e ; les cafés dépérissent par suite de l'épuisement d u sol. 1802,
25 mars. —
Sainte-Lucie
sont
Traité d ' A m i e n s . restituées
à la
L a Martinique
et
France.
— 18 avril. — Arrêté consulaire d o n n a n t à Fort R o y a l le n o m de F o r t - d e - F r a n c e , et au F o r t B o u r b o n celui de Fort-Desaix. 1802, 26 mai. — Organisation administrative des colonies de la Martinique et de Sainte-Lucie. — 14 septembre. — Villaret J o y e u s e reprend possession, au n o m de la France, de la Martinique. Gouverneur de la Colonie, il applique avec rigueur les lois de réaction et établit un régime militaire.
170
LA
MARTINIQUE
— 10 novembre. —
Fermeture d e toutes les écoles.
« L ' i g n o r a n c e , écrit Villaret J o y e u s e , est un lien nécessaire p o u r des h o m m e s enchaînés p a r la v i o l e n c e o u flétris par les préjugés. » 1803, 1
er
janvier. — O r d o n n a n c e fixant le régime douanier
de la colonie. L e s marchandises françaises sont exemptes d e tous droits à l'entrée et à la sortie, les b â t i m e n t s étrangers p a y e r o n t 2 % d e la valeur de leur cargaison et des sirops qu'ils e m p o r t e r o n t , et 6 francs
d'entrée
par quintal d e m o r u e et p a r tête d e nègres introduits. Les vaisseaux espagnols suivant la tradition mercantiliste sont e x e m p t s d e tous droits d'entrée et d e sortie. 1804, août. — Les Anglais, a v e c lesquels les Grands P l a n teurs sont demeurés en liaison, b l o q u e n t la Martinique. 1808. E t a t désastreux
d e l a Martinique. Les i m p ô t s n e
rentrent p a s . L e c o m m e r c e est arrêté, la culture d e l a canne est a b a n d o n n é e au profit de la culture des v i v r e s . Seuls les navires américains assurent le ravitaillement d e la c o l o n i e . 1809, 24 février. — Les Anglais s'emparent de la Martinique sur
Villaret
Joyeuse,
qui n ' o p p o s e
sérieuse. Ils font sauter le fort
aucune
résistance
Desaix.
1815, 4 juillet. — P r o c l a m a t i o n des administrateurs V a u g i raud et D u b u c en v u e d u maintien de la souveraineté d e Louis
XVIII.
Ils a c c e p t e n t l a c o n v e n t i o n
20 m a i p a r l'amiral —
L e vice-amiral
verneur par Louis
proposée le
anglais. c o m t e de V a u g i r a u d , n o m m é
XVIII,
gou-
livre l a colonie a u x Anglais
lorsqu'il apprend le retour d e N a p o l é o n à Paris. 1822,
14 octobre. —
U n s o u l è v e m e n t , p r o v o q u é p a r les
traitements infligés à quelques mulâtres et noirs s o u p -
1802-1848
171
çonnés de préparer une r é v o l t e ,
éclate au Carbet. Une
v i n g t a i n e d ' e x é c u t i o n s en fut la c o n s é q u e n c e . 1823.
Publication à Paris d'une b r o c h u r e d ' u n sieur A l v i l a ,
ayant pour
titre: De
la situation des gens de couleur libres
aux Antilles françaises. Cette publication p r o v o q u a une agitation au cours de laquelle on p r o c é d a à la Martinique à l'arrestation des véritables auteurs de la p u b l i c a t i o n , Bissette, V o l n y et Fabien. Bissette est poursuivi d e v a n t le Tribunal de la Martinique qui le c o n d a m n e a u x t r a v a u x forcés à perpétuité. Une trentaine de Martiniquais furent
déportés
au Sénégal. Ces faits
produisirent
en
France une v i v e é m o t i o n ; l'arrêt fut cassé par la Cour d e Cassation fin
et les autres c o n d a m n a t i o n s
de c o m p t e ,
la
révision a b o u t i t
révisées. En
à une
apothéose
de Bissette. 1824.
Une conspiration générale contre les Blancs est d é c o u -
verte et étouffée a v a n t d'éclater. 1831, 24 février. —
Les h o m m e s de
couleur
obtiennent
les droits civils. 1833. 26 décembre. — M o u v e m e n t séditieux de la Grande A n s e . Il y eut 87 prévenus et 190 témoins. L'instruction et les débats se poursuivirent j u s q u ' e n juillet 1834 et se terminèrent par plusieurs c o n d a m n a t i o n s à m o r t . 1834.
Sur 750 électeurs appelés p o u r la première fois à
l'exercice des droits politiques p o u r l'élection au Conseil Colonial de l'île, 650 prirent part au v o t e . Sur 25 inscrits de couleur, il ne se présenta que 5 o u 6 électeurs. A u c u n h o m m e d e couleur ne fut élu. 1835.
La
Martinique
a
109.916
habitants
dont
23.407
h o m m e s libres et 86.499 esclaves. 1839, 11 janvier. — Destruction d e F o r t de France par un t r e m b l e m e n t de terre.
CINQUIÈME PÉRIODE:
1848-1935
A partir de 1 8 4 8 jusqu'à nos jours, on peut dire que la Martinique n'a plus d'histoire. Toutes les revendications sociales sont satisfaites; il n ' y a plus d'autres luttes
que celles
d'intérêts
parfois
contradictoires
créés par un régime économique nouveau,
t o u t à la
fois plus libéral et plus anarchique. E t c o m m e dans la France elle-même les habitants de la colonie marchent vers des destinées nouvelles à travers un avenir incertain.
1848.
— L a Martinique élit députés à l'Assemblée C o n s -
tituante
Victor
Schœlcher
Schcelcher,
élu également
la Martinique. (Voir 1849.
—
Bissette
l'Assemblée
et
Mazulime
et
à la G u a d e l o u p e
Pory-Papy. opte
pour
Biographies). Pécoul
sont
nommés
députés
à
Législative.
1850,26 novembre. — Création de l ' é v ê c h é de F o r t de France. Le siège sera transféré à Saint-Pierre le 12 n o v e m b r e 1853 et reviendra à F o r t de France après la catastrophe de 1903. 1851, 5-6 août. — Premiers réveils de la M o n t a g n e Pelée. 1854, 3 mai. — Senatus-Consulte supprimant la représentation
parlementaire
e t déterminant
les fonctions
du
Conseil Général. Ce texte sera modifié en 1866 (4 juillet).
173
1848-1935
1862-1867. Guerre d u M e x i q u e . — L a Martinique, et Fort de France en particulier, sert de base navale pour les opérations. 1867. F o r t d e France est constitué en escale de la ligne transatlantique
France-Amérique
d u Centre.
1870 , 22 septembre. — P r o c l a m a t i o n d e la R é p u b l i q u e à la Martinique. — 24 septembre. — L e Sud de l a colonie entre en effervescence. 1871.
L'insurrection
est réprimée.
V i c t o r Schœlcher et P o r y - P a p y sont élus députés à
l'Assemblée
nationale. Schœlcher élu également par la
Martinique, l a G u y a n e et la Seine, o p t e à n o u v e a u p o u r la Martinique. 1880. Institution d u j u r y à la Martinique, où fonctionnait un 1882.
Collège
d'Assesseurs.
Création d u L y c é e de Saint-Pierre.
1888. L e b o u r g de Case Navire prend le n o m d e Schœlcher. 1890. Incendie d e F o r t de France. 1891.
L a colonie est ravagée par un c y c l o n e .
1902, 8 mai et 30 août. — Eruption d e la Montagne Pelée. Destruction d e Saint-Pierre ; trente mille habitants s u c c o m b e n t sous les ruines. 1911.
L e recensement d e la Martinique donne une p o p u l a -
tion d e 185.000 habitants. 1912.
Introduction à la Martinique de la loi d u 5 juillet 1889
sur le service militaire obligatoire. 1931, 10 juillet. — L o i autorisant la Colonie à emprunter 150 millions ; elle permit l'électrification
de l'île.
1934. A u 31 d é c e m b r e , la population était de 244.908 h a b i tants, d o n t 239.296 sédentaires, 5.123 métropolitains 489 étrangers.
et
LA GUADELOUPE
CARTE DE
1750
(Cabinet des Estampes. — BELLIN, Petit Atlas Maritime, 1 7 6 4 .
de
LA GUADELOUPE
dressée aux environs
TomeI,carte 86).
«La Guadeloupe, petite, florissante, où se fabriquait le meilleur sucre... » VOLTAIRE, Le Siècle de Louis XV, t. II, chap. xxxv).
PREMIÈRE PÉRIODE: 1635-1674 La Guadeloupe, dont la superficie est de 1.868 kilomètres carrés ou 1 8 6 . 8 0 0 hectares, est à peu près quatre fois plus grande que le département de la Seine qui ne compte que 4 7 . 9 0 0 hectares. Après la Seine et la Martinique, elle serait encore le plus petit département de France. Dès
1 6 3 5 , date de son occupation,
jusqu'en
1674,
où elle passa sous l'autorité royale directe, elle fut régie plutôt qu'administrée par trois compagnies successives, celle
de
Saint-Christophe,
et enfin, en deux
1664, celle
premières
taires,
exploitant
furent le
celle des
Iles
des
Indes
des
compagnies
pays
d'Amérique
Occidentales. de
Les
proprié-
pour leur c o m p t e ;
leurs
agents supérieurs ou Gouverneurs jouirent d'un pouvoir à peu près sans limite. exercé au profit
Ce pouvoir était naturellement
d'intérêts
personnels
d'autant
plus
exigeants que les engagés de France puis les esclaves ANTILLES
12
178
LA
d'Afrique ne
GUADELOUPE
auxquels on ne tarda pas à avoir recours,
pouvaient
se prévaloir
d'aucun
droit
seulement de considérations d'humanité
réel,
mais
dont à cette
époque on n'avait guère le sentiment. Aussi ne doit-on pas s'étonner que, dans la poursuite du gain, les gouverneurs propriétaires aient souvent manifesté un mépris du droit naturel, et aient ainsi éprouvé l'opposition
et
parfois la révolte
plutôt
de
fut n o t a m m e n t
le
de leurs administrés
leurs sujets, blancs et
noirs.
Tel
ou
cas de M . Houel, qui fut gouverneur, avec des fortunes diverses de 1 6 4 3 à 1 6 6 3 . Subordonné en droit au gouverneur général de Saint-Christophe, il méconnaissait en fait son autorité, c o m m e celui-ci méconnaissait celle du roi. Mais ces abus d'autorité ou ces aspirations à l'indépendance ne portaient que fort peu d'atteinte au développement économique de la colonie. E n 1 6 7 4 , celle-ci c o m p t a i t plus de 3 . 0 0 0 blancs,
contre
4 . 3 0 0 noirs et
5 0 métis ; le problème des races c o m m e n ç a i t à se poser.
1633-1634. Liénart de l ' O l i v e , lieutenant d e d ' E s n a m b u c , agissant
pour
son
propre
compte,
fait reconnaître
la
G u a d e l o u p e par le sieur Guillaume d ' O r a n g e , en v u e d ' y fonder un établissement (1633 ou 1634) et v a ensuite en France (1634), en d e m a n d e r la concession. 1635.
L ' O l i v e et un g e n t i l h o m m e dieppois, Duplessis, qui
avait pris part à l'expédition de Saint-Christophe en 1629, signent
a v e c la
Compagnie
un
contrat
par lequel
o b t i e n n e n t en concession la D o m i n i q u e , la
ils
Martinique
et la G u a d e l o u p e , s'engageant à y faire passer en dix ans j u s q u ' à 800 Français, tous catholiques (14 février), n o n
179
1635-1674
compris les femmes et les enfants. Ils s'embarquent le 25 mai et arrivent à la Martinique et à la G u a d e l o u p e les 25 et 28 juin, a v e c 4 missionnaires, 150 engagés
et
quelques familles les a c c o m p a g n a n t à leurs frais. Ils se fixent à la Guadeloupe ; s'entendant m a l , ils f o r m e n t au nord de l'île d e u x établissements limitrophes mais d i s tincts. — Duplessis m e u r t le 4 d é c e m b r e . 1635, 17 novembre. — D ' E s n a m b u c o c c u p e la D o m i n i q u e où il place le sieur de la Vallée, mais il l ' é v a c u é presque aussitôt, l ' a b a n d o n n a n t aux Caraïbes. 1636, L e pays n'étant pas organisé ni cultivé p o u r nourrir des colons, ce premier essai d é b u t a p a r une famine qui se p r o l o n g e a a v e c plus o u moins d'intensité p e n d a n t cinq ans. P o u r s'approvisionner, l'Olive déclare a u x Caraïbes le 26 janvier une guerre des plus barbares qui dura j u s q u ' e n 1639. Les Caraïbes finirent par abandonner la G u a d e l o u p e p o u r la Grande Terre, les Saintes, Marie-Galante et la Dominique. 1637, 2 décembre. — L ' O l i v e est confirmé p o u r d i x ans dans son poste de seul capitaine o u gouverneur général d e l a G u a d e l o u p e , mais étant en fait s u b o r d o n n é
à
Poincy,
il résultera d e cette situation d e graves difficultés. 1639. L ' O l i v e
a des démêlés
avec
ses engagés, d o n t le
c o n t r a t de trois ans était expiré et qu'il v e u t garder d e force. Malade et d e v e n u par surcroît aveugle, il se retire à Saint-Christophe où P o i n c y le retint c o m m e prisonnier. 1640. L a colonie restée sans gouverneur, et étant menacée de guerre p a r les Caraïbes, P o i n c y y envoie 260 colons de Saint-Christophe de
la
guerre
Vernade
(28
sous
la conduite
janvier).
Ceux-ci
contre les Caraïbes, d o n t
d e Sabouilly
et
reprennent
la
une partie
se réfugie
à A n t i g o a . Dans une autre rencontre qui dura
trente
heures (16 et 17 m a i ) , les Caraïbes sont également défaits.
180
LA
GUADELOUPE
P o i n c y , qualifié de Restaurateur de la colonie, en reporte l ' h o n n e u r à M. d e Sabouilly. U n e mortalité termina cette Six P.
effrayante
expédition.
religieux
arrivent
de France, parmi
lesquels le
Dutertre. — A u b e r t , ancien chirurgien
de Saint-Christophe
et
capitaine en cette île, où il avait épousé la v e u v e de D u p l e s sis, est n o m m é p o u r trois ans lieutenant général d e la G u a d e l o u p e , en r e m p l a c e m e n t de l'Olive (4 avril). A u b e r t arrive à la G u a d e l o u p e le 15 s e p t e m b r e , v a prêter serment à P o i n c y et revient à la G u a d e l o u p e où il trouve quelque hostilité dans son entourage. Il c o n c l u t la paix a v e c les Caraïbes. 1641-1642. A u b e r t interdit formellement a u x religieux d e faire acte d e prosélytisme à la D o m i n i q u e et fait revenir d e u x religieux qui s'y étaient rendus malgré ses ordres. 1642, 16 décembre. — L a C o m p a g n i e décide d'établir p o u r son
compte
une usine à sucre à la G u a d e l o u p e ; elle
charge de l'entreprise le F l a m a n d Trézel, déjà
installé
à la Martinique. — mars. — E d i t confirmant les privilèges des seigneurs de la C o m p a g n i e accordés le 12 février 1 6 3 5 , et étendant encore leur p o u v o i r qui d e v i e n t un véritable despotisme ; le m ê m e édit a c c o r d e la nationalité française a u x sauvages convertis au christianisme. —
H o u e l , l ' u n des seigneurs
de la C o m p a g n i e , est
e n v o y é à la G u a d e l o u p e pour y faire une enquête générale. Sa mission a c c o m p l i e , il revient en F r a n c e , a v e c l'idée de se faire n o m m e r gouverneur à la place d ' A u b e r t . 1643.
Houel
Aubert
est n o m m é
gouverneur
lui étant s u b o r d o n n é .
septembre.
de la
Guadeloupe,
Il d é b a r q u e au d é b u t d e
181
1636-1674
Houel v a à Saint-Christophe et refuse de prêter serment à
Poincy. Arrivée de M a d a m e de la Fayolle avec une douzaine de
jeunes filles de France. 1644. Houel accuse A u b e r t d'avoir v o u l u fomenter contre lui une insurrection des C a r a ï b e s ; A u b e r t se retire à Saint-Christophe. P o i n c y
envoie aussitôt un
enquêteur
qui, paralysé par les m a n œ u v r e s d ' H o u e l , revient moins de quinze jours plus tard sans avoir rien p u déterminer. Poincy
se considérant
c o m m e lésé dans ses droits
gouverneur général, d o n n e sa démission de
de
gouverneur
p o u r la Compagnie et retient seulement la qualité
de
commissaire d u roi. Houel
sentant sa situation m e n a c é e , s'embarque pour
la France (août), confiant au juge Marivet l'intérim d u g o u v e r n e m e n t . P o i n c y ne ratifie pas ce c h o i x et envoie à sa place M. de L e u m o n t , qui arrive à la G u a d e l o u p e le 3 n o v e m b r e . Il n'est pas reconnu et doit se rembarquer le 3 d é c e m b r e . Un ancien boulanger, Mathurin H é d o u i n , a p p u y é par M a d a m e de la Fayolle, usurpe l'autorité, tandis que Marivet est mis aux fers et y reste p e n d a n t huit mois (1644-1645). A Paris, A u b e r t est c o n d a m n é à m o r t par c o n t u m a c e , sur les déclarations d ' H o u e l , complices,
Durivage,
est
et l'un de ses prétendus
effectivement
condamné
aux
galères. N ' a y a n t p u obtenir la charge de gouverneur
général
à la place de P o i n c y , Houel se lie d'amitié avec T h o i s y qui est n o m m é à ce poste le 26 d é c e m b r e . — L a fabrication d u sucre c o m m e n c e à la G u a d e l o u p e . 1645, mars. — D ' A u b i g n é fait a v e c la C o m p a g n i e , p o u r la colonisation de Marie-Galante, un c o n t r a t qui n'eut pas de
suite.
182
LA
— 1
er
GUADELOUPE
août. — Déclaration d u roi établissant une j u s -
tice souveraine dans chacune des îles. —
H o u e l , précédant T h o i s y , revient à la G u a d e l o u p e
le 29 mai. Il fait reconnaître L a m b e r t c o m m e lieutenant général des Iles d ' A m é r i q u e au n o m de T h o i s y et destitue Marivet de ses fonctions de lieutenant civil et criminel. T h o i s y arrive à la Martinique le 16 n o v e m b r e et à la G u a d e l o u p e le 19. H o u e l lui prête serment. L e 25, il est à Saint-Christophe, où P o i n c y refuse de le reconnaître c o m m e g o u v e r n e u r général. Il revient le 28 à la G u a d e l o u p e , où la C o m p a g n i e , p r é v o y a n t les difficultés
qu'il
pourrait avoir a v e c P o i n c y , l ' a v a i t autorisé à résider le cas
échéant.
Ce
contretemps,
dérangeant
les
projets
a m b i t i e u x d ' H o u e l , celui-ci envisage dès ce m o m e n t les m o y e n s d e se débarrasser de T h o i s y . 1 6 4 6 . Dans une pensée de conciliation, la déclaration royale d u 1
er
Thoisy
promulgue
a o û t p r é c é d e n t , relative à
la justice souveraine. Par cet a c t e , il se désaississait en fait au profit d ' H o u e l
de ses p o u v o i r s souverains à la
G u a d e l o u p e « étant écrit dans ledit édit que « tous appels des contestations et sentences rendues dans chacune des îles » seront jugés et terminés par celui qui c o m m a n d e r a p o u r lors en icelles. » (29 avril). Dès le 7 m a i ,
Houel
se prévalant de ses droits, rend un arrêt contre le lieuten a n t d u Grand P r é v ô t , qui instruisait la révolte de P o i n c y . T h o i s y r é p o n d à cette a t t a q u e par l'établissement
d'un
conseil de guerre p o u r juger des crimes de lèse-majesté, dans le cas particulier de P o i n c y (1
er
août).
— 22 août. — T h o i s y fait remise a u x colons d'une partie des droits que la C o m p a g n i e percevait sur e u x . — 22
novembre. —
Houel
se prétendant
dépouillé
de ses droits de gouverneur par la présence de T h o i s y dans l'île, p r o v o q u e contre lui une sédition que celui-ci
183
1635-1674
conjure a v e c un grand esprit de conciliation et d ' a b n é (22 n o v e m b r e ) .
gation
1647, Informé q u ' o n voulait l'assassiner, T h o i s y s ' e m b a r q u e dans l a nuit d u 31 d é c e m b r e au 1
er
janvier p o u r la Mar-
tinique, où il arrive le 3. — Son départ f u t suivi d'une persécution générale d e ses partisans. — De la Martinique, Thoisy
passa
à Saint-Christophe,
d'où Poincy,
conti-
nuant à n e pas reconnaître s o n autorité, le r e n v o y a en France le 17 m a i . Après son d é p a r t , Houel persécute de diverses manières ses principaux
partisans.
— 8 février. — L a Compagnie c o n c è d e p o u r 4 ans l'île de Marie-Galante a u x capitaines Camo et la F o n t a i n e , victimes
de
Poincy.
Ceux-ci
promettent
d'introduire
c h a q u e année dans l'île 60 colons. Faute de f o n d s , ils ne p e u v e n t bénéficier d e cette concession. 1648, 8 octobre. —
H o u e l d e m a n d e à la Compagnie la
concession d e Marie-Galante a u x mêmes droits
qu'elle
la tenait d u roi (8 o c t o b r e 1648). Il fait occuper l'île par un sieur L e f o r t le 8 n o v e m b r e . —
Houel fait o c c u p e r les sept îlots des Saintes
mant
ensemble
(18 o c t o b r e ) .
1256 hectares)
par
le
sieur
(forDumé
Elles sont presque aussitôt abandonnées,
p o u r être réoccupées en 1652 par un sieur d e Hazier Dubuisson. 1649, 4 septembre. — Boisseret achète la G u a d e l o u p e , la Désirade,
Marie-Galante
et les Saintes, l a s o m m e
de
60.000 livres et une rente de 600 livres d e sucre fin rachetée aussitôt p o u r une s o m m e d e 1.500 livres argent à raison de 12 livres 10 sols le cent pesant d e sucre. 1651
(après). —
C o m m e réglement d e ses contestations
a v e c T h o i s y , Houel est c o n d a m n é à lui payer 61.715 livres de t a b a c .
184
LA
1 6 5 3 . Houel
GUADELOUPE
envoie le capitaine
Dumé
à la
Dominique
venger la m o r t de Français qui venaient d'être tués par les Caraïbes de cette île. 1 6 5 4 . A u c o m m e n c e m e n t de l'année, un millier de Hollandais, chassés d u Brésil par les Portugais, d é b a r q u e n t à la Guadeloupe et 300 à la Martinique. Ils y
améliorent
la fabrication d u s u c r e ; le plus grand n o m b r e d'entre eux retourne
en
Hollande.
1 6 5 6 . Boisseret refuse de v e n d r e sa part de propriété à son beau-frère v e n u en France, et meurt. H o u e l à la G u a d e l o u p e ; il r e n v o y é en France
son
revient frère
le
chevalier et ses d e u x n e v e u x . —
Houel
exonère
les
habitants
de
m o n t e r la garde pour la sécurité de
l'obligation
l'île;
de
en retour il
d o u b l e les droits seigneuriaux payés par les colons. 1 6 5 6 (fin). — D e u x nègres, Pèdre
et
Jean
Leblanc
sus-
citent un m o u v e m e n t , qui c o û t a la vie à quelques F r a n çais et se termina par l'écartèlement des d e u x nègres. 1 6 5 9 . M a d a m e de Boisseret et ses fils organisent une e x p é dition militaire à la Guadeloupe pour amener leur b e a u frère et oncle à reconnaître leurs droits dans l ' a d m i n i s tration de l'île. Cette expédition arrive à la Guadeloupe en juin. Le peuple se déclare en faveur des Boisseret. Houel v e u t résister, mais il est forcé d'accepter un a c c o m o d e m e n t , à la suite d'un arbitrage de 9 m e m b r e s (3 a o û t 13 septembre). E n v e r t u de cet a c c o r d , une partie de l'île est accordée au gouverneur et l'autre à ses parents. Le différend risquant de renaître, le roi d o n n e l'ordre à P o i n c y d e concilier les d e u x parties (25 mai 1660). — Les îles anglaises
de Montserrat et de Nevis, et
la colonie française de la Guadeloupe « s'unissent en une ligue solide, absolue et durable.
contre les
Indiens ».
185
1635-1674 Les gouverneurs étaient
chargés
de de
Montserrat la
direction
et de
de la cette
Guadeloupe ligue ;
les
autres îles p o u v a i e n t y adhérer. * 1663, 19 novembre. — H o u e l et ses associés ne s'entendant pas, le roi les rappelle tous en France et n o m m e Prouville de T r a c y c o m m a n d a n t général de toutes nos possessions en A m é r i q u e , m ê m e le Canada. 1664, 28 mai. — E d i t instituant la Compagnie des Indes occidentales. L'autorité d u roi est substituée à celle des seigneurs propriétaires. (Voir Généralités, 1664). — 10 juillet. — M a d a m e de Boisseret, devenue Madame d e C h a m p i g n y , cède à la Compagnie
ses droits sur la
Guadeloupe pour 120.000 livres. — W i l l o u g b y sacre gouverneur de la D o m i n i q u e W a r ner, fils naturel d'une Caraïbe et de l'ancien gouverneur de Saint-Christophe (16 avril 1664). B o u d e t , c o m m a n d a n t d u Saint-Sébastien,
croisant d e v a n t la D o m i n i q u e , p a r -
v i e n t à s'emparer de W a r n e r , qui est retenu prisonnier j u s q u ' à la p a i x . — T r a c y , après avoir passé par Cayenne et s'être arrêté 15 jours à la Martinique, arrive à la Guadeloupe le 23 juin ; dans la quinzaine qui suit, il renvoie en France
Houel
et ses neveux et établit Dulion et des Roses c o m m e g o u verneurs respectifs de la Guadeloupe et de Marie-Galante. T r a c y édicté une série de mesures pour l'administration des îles ; il crée à la Guadeloupe l'hôpital de la Charité. 1665. la
De V i n c e n t remplace Cérillac c o m m e gouverneur de Grenade.
— T h é m é r i c o u r t , fils de Boisseret, est n o m m é g o u v e r neur de Marie-Galante, —
il y arrive en mai.
Cette île c o m p t e alors 500 habitants.
186
LA
GUADELOUPE
1669. L e g o u v e r n e m e n t d e la G u a d e l o u p e est réuni à celui de la Martinique. 1670. 24 février. — L a durée des engagements est réduite de 36 à 18 m o i s . 1671.
U n recensement fait cette année fait connaître le
n o m et la résidence d e tous les habitants de la G u a d e La population
loupe.
blanche
est d e 3.083
habitants
contre 4.267 noirs et 47 métis. Dessalles publie par quartiers (t. I I , p p . 438 à 452) les noms
des habitants
d e la G u a d e l o u p e .
Les quartiers
étaient : le b o u r g d e Saint-Louis, la M o n t a g n e d e S a i n t L o u i s , la M o n t a g n e d e Beausoleil, la M o n t a g n e d e Bellevue, la M o n t a g n e de l ' E s p é r a n c e , la M o n t a g n e
Saint-Charles
et des Palmistes, le Quartier d u V i e u x F o r t , la ville d e la Basse Terre, le D o s d ' A n e , la Grande A n s e , le Petit Carbet, le Petit Cul d e S a c , le Quartier d e Saint-Marc, le Quartier d e S a i n t e - A n n e , le Quartier des Citronniers, le Quartier des Anses D u m o n t - G o s i e r , le Quartier d u Grand Cul d e S a c , le Quartier de l'Ile à G o y a v e s , le Quartier d e x V i e u x H a b i t a n t s , l ' A n s e à la B a r q u e , l a rivière B e a u g e n d r e , la M o n t a g n e d u Plessis, la M o n t a g n e S a i n t - R o b e r t , et le b o u r g d u Baillif. —La
C o m p a g n i e envoie à d e L o o v e r , F l a m a n d installé
à la G u a d e l o u p e , des ustensiles p o u r fabriquer d u sucre1674. Saint-Barthélemy
est réunie
au d o m a i n e
royal
et
rattachée au g o u v e r n e m e n t de la G u a d e l o u p e . — décembre. — Indes
occidentales.
Suppression
d e la C o m p a g n i e des
DEUXIÈME PÉRIODE: 1674-1763
Libérée du joug de ses gouverneurs particuliers qui sacrifiaient
tout
à
leurs
intérêts
particuliers,
mais
vassale de la Martinique devenue le siège d'un gouvernement général et qui centralisait obligatoirement le commerce de la métropole, la Guadeloupe ne connut pas,
durant
l'île voisine.
cette période, Cependant,
la grande prospérité
grâce à son étendue
de
et à la
fertilité de son. sol, l'industrie sucrière se développa, là aussi, dans des conditions satisfaisantes. Les Caraïbes avaient d i s p a r u ; les mulâtres n'étaient pas encore assez n o m b r e u x pour élever des revendications inquiétantes et, si les esclaves corrigeaient parfois quelques brutalités patronales par le poison, leur obéissance passive n'était
jamais
un
obstacle
au
travail
et
elle
ne
paralysa point la prospérité de l'île, entravée néanmoins par le monopole
dont la Martinique jouissait à son
détriment. Le gouverneur de Clieu fit tous ses efforts en
1 7 3 6 pour obtenir des relations
métropole;
il ne put y
parvenir.
directes avec
Le
commerce
la qui
pouvait se faire en contrebande avec les autres îles du voisinage, n'était ni assez sûr ni assez régulier pour entretenir un m o u v e m e n t
d'affaires,
où la
confiance
188
LA
n'était —
pas moins
GUADELOUPE
nécessaire que l'esprit
d'aventure.
Par ailleurs, le chiffre des engagés qui était de 8 0 0
en 1662 était t o m b é à 175 en 1 7 3 0 ; de plus en plus, la colonisation d'origine
de
l'île
devenait
l'œuvre
des
esclaves
africaine.
Nul autre fait que ceux de l'administration courante, désormais régulière et canalisée, ne s'impose lièrement à l'attention, sauf peut-être
particu-
l'établissement
d'une léproserie à la Désirade en 1 7 2 8 . Le plus grand intérêt que présente alors l'histoire de la Guadeloupe réside dans les faits extérieurs. Lorsque la guerre éclata en Europe entre la loupe,
de
toutes
rapprochée des directement à
plusieurs
France et l'Angleterre, la nos possessions
colonies
menacée, reprises.
elle se dégagea
anglaises,
et
elle
la
plus
se trouva
la
plus
fut
en
Partiellement
l'année
même
Guade-
antillaises effet
occupée
attaquée en
de l'étreinte
1691,
ennemie.
Menacée à nouveau en 1 7 0 2 , elle rejeta encore une fois les Anglais à la mer. La guerre de 1 7 4 4 - 1 7 4 8 la laissa hors de toute atteinte, mais celle de 1 7 5 6 - 1 7 6 3 devait lui être fatale. E n 1 7 5 9 , le général Barington débarqua près de la Basse-Terre et, après une guerre de trois mois, triompha de toute résistance. La
Guadeloupe
resta
sous la domination
anglaise
pendant quatre ans et c'est durant ce temps que furent arrêtés et entrepris les t r a v a u x d'un établissement à Pointe-à-Pitre, dont la première idée avait été par le gouverneur D u p o y e t vers l'année
Dès que la Guadeloupe se fût rendue, les se
préoccupèrent
qualifiait
d'assurer à
cette colonie
de « fertile et d'opulente
émise
1730.
» une
Anglais que
Pitt
prospérité
que la fiscalité royale n'avait guère favorisée.
189
1674-1763
Grâce à la traite négrière effectuée par les armateurs de Liverpool, l'île put en quelques mois accroître son « troupeau » de nègres, pour prendre l'affreuse expression du t e m p s ,
à des
prix particulièrement
avantageux ;
grâce au commerce régulièrement noué avec les planteurs
de l'Amérique
du
Nord
et
les négociants
de
Londres, les habitants réalisèrent des bénéfices impressionnants, et en moins de deux ans la colonie dépassa sa voisine en richesse et en vitalité. A u point que, le m o m e n t venu de discuter les clauses de la Paix, la Cour de Saint-James s'interrogea anxieusement sur l'opportunité Canada
à
celle
de
la
de sacrifier la conquête Guadeloupe
ou
du
inversement.
Lord Chatham en 1762 n'hésitait pas à plaider publiquement en faveur des îles Caraïbes — venait d'être occupée à son tour — c o m m e le London
Chronicle
la Martinique
et des journaux
ralliaient une part de l'opi-
nion à cette thèse : « L e c o m m e r c e d u sucre emploie plus de vaisseaux q u ' a u cun
autre c o m m e r c e
et quand
bien
même
aurions-nous
assez de sucre pour notre usage, ce qui n'est pas, d e v r i o n s nous céder lâchement à nos ennemis une branche de c o m m e r c e aussi considérable ? Quel avantage le Canada peut-il rapporter à la Grande-Bretagne en comparaison des Isles Caraïbes d o n t nous s o m m e s actuellement en possession, sans considérer les avantages qu'elles nous d o n n e n t sur la
France
et l ' E s p a g n e dans ces pays ? Les seules raisons que l'on e x p o sait pour que l'on garde le Canada étaient premièrement la sûreté de n'être point inquiété par le voisinage de la France, s e c o n d e m e n t le grand bénéfice de la pêche de Terre-Neuve » . . . (Numéro d u 9 septembre 1762). L'argument
politique
l'emporta,
surtout
lorsque
190
LA
GUADELOUPE
Franklin fut venu à Londres affirmer que l'expulsion de la France du continent américain ne
favoriserait
pas spécialement la tendance autonomiste des vieilles colonies britanniques.
Choiseul,
de son côté,
préféra
sacrifier au commerce du sucre les pêcheries de TerreN e u v e , pro
parte
du moins,
ainsi que les
pelleteries
du Canada auxquelles les Anglais du N o r d de l ' H u d s o n faisaient depuis longtemps une concurrence victorieuse. En
récupérant
la
Guadeloupe,
que
de
nombreux
publicistes londoniens considéraient avec la Martinique c o m m e « le bien le plus précieux t a n t par leur produit que par leur situation », la Cour de Versailles pensait accomplir une acrobatie diplomatique.
Et
c'est
ainsi
que la vieille Karukéra pesa d'une manière déterminante dans la négociation d'un traité qui marque une date de l'Histoire universelle.
1691
Les Anglais c o m m a n d é s par Codrington
s'emparent
en mars de Marie-Galante et descendent à la G u a d e l o u p e , où ils o c c u p e n t les d e u x villages alors distincts de SaintFrançois
et Basse
Terre, f o r m a n t
aujourd'hui
l'unique
ville de Basse Terre. Ils en sont chassés en mai par le marquis d ' E r a g n y , g o u v e r n e u r général des îles, et é v a c u e n t ensuite 1695,
15
Marie-Galante.
juillet. —
Mort
d'Hincelin,
G u a d e l o u p e . 11 est remplacé le 1
er
gouverneur
de
la
mars 1696 par A u g e r ,
créole de Saint-Christophe, gouverneur de Marie-Galante. 1697, 31 décembre. — L e premier recensement t o u t à fait régulier de la G u a d e l o u p e accuse p o u r cette île et ses d é p e n d a n c e s une p o p u l a t i o n totale de 11.437 h a b i t a n t s , dont
:
1674-1763 pour
8.698
la Guadeloupe
191
seule, soit 3 . 6 4 5
blancs,
4 . 9 8 3 noirs et 1 7 0 mulâtres ; 4 . 2 7 7 p o u r Marie-Galante ; 1 . 0 3 9 p o u r Saint-Martin ; et 4 4 3 p o u r
Saint-Barthélemy.
1699. Il y avait 1 9 églises, 1 hôpital, 7 b o u r g s , 4 8 sucreries, et 1 raffinerie. 1702.
L e P. L a b a t organise les travaux d e défense de la
G u a d e l o u p e . L e total des forces p o u v a n t défendre l'île est alors d e 1 . 4 1 8 h o m m e s . 1703,
mars-mai. —
Galante du
(mars)
même
Codrington
fils
s'empare
de Marie-
a v e c 4 . 0 0 0 h o m m e s , il débarque le 2 0
mois
à la G u a d e l o u p e ,
qui
compte
alors
1 . 4 1 8 défenseurs, tant h o m m e s de troupes que milices. Il
attaque
Basse-Terre
et après
diverses
opérations,
8 0 0 h o m m e s de secours étant venus de la Martinique, a v e c Gabaret, gouverneur particulier d e cette î l e , il est obligé 1.964
de reprendre la mer le 1 8 m a i , a y a n t hommes. —
— 23 août. —
Marie-Galante Ordonnance
perdu
est réoccupé.
réorganisant les milices
de la G u a d e l o u p e ; elle f u t r é v o q u é e dès 1 7 0 5 . — A u g e r , gouverneur d e la G u a d e l o u p e , est n o m m é gouverneur d e S a i n t - D o m i n g u e ; il est remplacé par la Malmaison, q u i , arrivé en 1 7 0 4 , chasse les Anglais de Marie-Galante. 1717-1719. M o r t remplacé presque
d e la
Malmaison,
p a r le marquis au
même
de
moment
(mai 1 7 1 7 ) ; il est
Feuquières, gouverneur
qui n o m m é général
des
Antilles, en r e m p l a c e m e n t de la V a r e n n e , laisse la place de gouverneur de la Guadeloupe au c o m t e de M o y e n c o u r t . Celui-ci prend possession de son poste en mai 1 7 1 9 . 1720. L e recensement accuse 215 affranchis sur une p o p u lation d e 1 4 . 2 5 0 habitants.
192
LA
—
GUADELOUPE
Premier recensement o ù l ' o n v o i t figurer le cotonnier
à la G u a d e l o u p e . Il y a alors dans l'île 1.447.000 pieds ; en 1 7 6 7 , chiffre m a x i m u m d u XVIII
e
siècle, il y en aura
12.157.000. En 1 7 9 0 , la G u a d e l o u p e e x p o r t a en France 257.000 livres d e c o t o n et la Martinique 957.400. —
L a m ê m e année 1 7 2 0 , il y a v a i t 3.650 pieds d e
cacaoyers ; en 1777 il y en a aura 45.000. 1721-1728. L e Conseil supérieur o r d o n n e d'isoler les lépreux des
autres
éléments
de la population
(14 mai 1721).
— Un i m p ô t spécial de 20 sous p a r tête de nègre est u l t é rieurement
décidé
(1726)
pour
créer
des installations
d'isolement : la Désirade est affectée à c e t effet. — L e c o m m e n c e m e n t d ' e x é c u t i o n n ' a lieu q u ' e n 1 7 2 8 . Il y a alors dans le petit archipel 125 l é p r e u x , d o n t 22 b l a n c s , 6 mulâtres et 97 nègres. Des mesures draconiennes s o n t prises p o u r l'application de cette mesure. 1726. Création de la paroisse des A b y m e s . 1730 (vers). — L e gouverneur D u p o y e t songe à fonder une ville à Pointe à Pitre. 1730. L a G u a d e l o u p e ,
qui avait
800 engagés
en 1 6 6 2 ,
600 en 1689, n ' e n a plus q u e 175 en 1 7 3 0 . —
U n recensement opéré en 1730 d o n n e 7.731 b l a n c s ,
27.739 mulâtres et noirs. Total 35.470. Il y avait 17 b o u r g s , 19 paroisses, 1 h ô p i t a l , 252 sucreries ; la quantité d e sucre
blanc
faite
par année
était de 8.003.460 livres
et celle d u sucre b r u t de 5.046.000. On c o m p t a i t 11.820 pieds de c a c a o , 10.300.834 pieds de cotonniers et 20.000 pieds d e café. 1732,16 juillet. — Etablissement à la Guadeloupe de C o m p a gnies d e cavalerie. 1736. L e gouverneur de Larnage fait tous ses efforts p o u r
LAVILLEDELABASSE TERRE
DANS
L'ISLE DE LA GUADELOUPE
1674-1763 développer
le c o m m e r c e
193
direct entre la
France
et
la
G u a d e l o u p e ; il ouvre un marché pour les sucres à la Basse Terre. L e gouverneur de Clieu réprime un s o u l è v e m e n t d e
1737.
noirs à la G u a d e l o u p e . — Il d o i t e n v o y e r trois compagnies de milice contre les nègres et les mulâtres libres de la Grande Terre qui refusaient de payer la capitation. —
R é v o l t e de nègres dans une douzaine d ' h a b i t a t i o n s ;
elle fut suscitée par une disette de vivres, causée elle-même par un ouragan. Les meneurs sont pendus. Par suite d e la famine, des colons et des esclaves passent dans les colonies anglaises. — Larnage
n o m m é gouverneur
de
Saint-Domingue
est remplacé par G. de Clieu, qui arrive à la Guadeloupe le 17 avril 1738.
1737.
La p o p u l a t i o n de la Guadeloupe est de 42.653 p e r -
sonnes, d o n t 9.338 b l a n c s ; à la suite d'ouragans qui o n t dévasté la colonie et c o m m e conséquence de l'interdiction de faire le moindre c o m m e r c e a v e c l'étranger, une partie de cette p o p u l a t i o n d o i t émigrer, et en 1740, il n ' y a plus que
41.236
individus,
soit
en
moins
1.417
individus,
d o n t 588 blancs. 1739.
La
population
blanche
était, de
9.212
habitants;
la p o p u l a t i o n noire o u métissée d e 33.381. — Il y a v a i t 22 b o u r g s , 22 paroisses, 5 églises conventuelles, 1 hôpital. On c o m p t a i t 865.803 pieds de café, 13.770 pieds de t a b a c , 13.816 pieds de cacao et 6.919.767 pieds de
coton: —
253 sucreries. 1740-1748. L a centralisation de tout le c o m m e r c e à SaintPierre de la Martinique, d é v e l o p p e à la Guadeloupe une misère réelle, q u ' a c c r o î t encore la difficulté des rapports a v e c la France p e n d a n t la guerre a v e c l'Angleterre ANTILLES
13
de
194
LA
GUADELOUPE
1744 à 1748. (Voir Martinique,
1720). Sans avoir été la
v i c t i m e directe d ' a u c u n e opération militaire, l a G u a d e l o u p e , malgré la sage administration d e d e Clieu, souffre profondément
d e la stagnation
générale
des affaires ;
le sucre, faute de p o u v o i r être e x p o r t é , t o m b e à 3 livres les 50 kilogs, le café à 2 sous la livre, tandis q u ' u n e barrique de v i n v e n a n t d e France se p a y a i t 1.200 livres argent. 1743.
P o u r 8.601 blancs et gens libres, il y a 33.778 esclaves.
P o p u l a t i o n totale : 42.379 h a b i t a n t s . 1745, 25 décembre. — Naissance d u f a m e u x mulâtre SaintGeorges, plus c o n n u sous le n o m d e chevalier d e S a i n t Georges. 1749, décembre. — L a lèpre se d é v e l o p p e d'une façon a n o r male à la G u a d e l o u p e . 1753.
G. de Clieu est remplacé p a r le chevalier de Mirabeau,
frère d u marquis d e Mirabeau, père d u grand orateur d e la R é v o l u t i o n . Clieu m o u r r a retiré à la Martinique en 1775. 1754. Il y a 10.538 blancs libres, et 45.653 esclaves, soit 56.191 habitants. 1759. Une flotte anglaise paraît d e v a n t la G u a d e l o u p e le 21 janvier. L a colonie n ' a q u e 4.000 h o m m e s à
opposer
à 8.000 Anglais. Ceux-ci o c c u p e n t Basse Terre le 23 j a n vier et l'incendient. Les Français continuent la lutte à l'intérieur, d ' a b o r d au Grand C a m p puis au Grand R é d u i t . L a Grande Terre est également o c c u p é e et les habitations incendiées. Après trois mois de résistance, la p o p u l a t i o n d e m a n d e au général anglais Barington une capitulation que le gouverneur français finit par accepter également après huit jours de négociations (22 avril-10 m a i ) . A ce m o m e n t arrivaient des secours v e n a n t d e la Martinique ; d e v a n t le fait a c c o m p l i , ils se r e m b a r q u e n t . L a G u a d e l o u p e passe pour quatre ans sous la d o m i n a t i o n anglaise.
195
1674-1763 L e gouverneur
français
Nadau du
Treil et
trois de
ses officiers furent dégradés à la suite de cette c a p i t u l a tion. — 6.000 esclaves furent transportés dans les colonies anglaises. 1 7 5 9 - 1 7 6 3 . P e n d a n t les quatre années de son
occupation,
la Guadeloupe fut successivement administrée par B a r i n g ton, Krump
et D a l r y m p l e .
Ils ouvrirent
l a r g e m e n t le
c o m m e r c e d u dehors, introduisirent dans l'île de 20 à 30.000 esclaves, fondèrent à Pointe à Pitre un p o r t plus sûr que celui de Basse Terre, et d o t è r e n t le p a y s
d'ins-
titutions représentatives sous forme de commissaires de quartiers, a y a n t la faculté de se réunir p o u r discuter des intérêts g é n é r a u x ; ces derniers se réunirent alors au Petit B o u r g — leur première réunion eut lieu dès le 11 juillet 1759 — et l'un d ' e u x ,
Deshayes, fut délégué à Londres p o u r
représenter officiellement la colonie. —
L'occupation
de
la Guadeloupe par les Anglais fut en s o m m e la libération économique du pays. 1 7 6 3 . Traité de Paris. — Par ce traité la G u a d e l o u p e nous est rendue, mais nous perdons définitivement la D o m i n i q u e , Saint-Vincent, T a b a g o , la Grenade et les Grenadins. L e 6 juillet, reprise de possession de la G u a d e l o u p e .
TROISIÈME PÉRIODE: 1763-1794
Redevenue gouvernement
française général
par des
le traité Antilles
de
Paris
n'ayant
et
pas
le été
rétabli, la Guadeloupe, trouvant plus de facilités pour développer son commerce, jouit aussi d'une plus grande prospérité. La suprématie de la Martinique fut, il est vrai, rétablie dès 1768 par ordonnance r o y a l e ;
mais
devant les protestations de la population et après la démission de deux gouverneurs
la mesure fut rapportée
en 1 7 7 1 et la Guadeloupe reconquit en fait son indépendance
en
1775,
sauf
pour
les
questions
d'ordre
militaire. Nul événement de quelque importance ne peut être signalé jusqu'en 1 7 8 9 ; seules les idées nouvelles d'indépendance et m ê m e de séparatisme, inspirées par l'exemple des colonies américaines, hantaient quelques esprits, surtout parmi les planteurs les plus riches. Les colons d'origine
plus
modeste
étaient plus
sensibles
à des
conceptions philosophiques d'égalité sociale, qui avaient fini par pénétrer a u x îles depuis une trentaine d'années. U n désir de nouveautés était dans tous les esprits et le m o u v e m e n t révolutionnaire qui, a u x colonies c o m m e en France, prit parfois les formes d'une explosion brutale
197
1763-1794
et inattendue, ne fut que l'aboutissement d'une vibration plus condensée
comprimée
dans
les esprits depuis un demi-siècle. La transition
que réellement
entre
1788 et 1 7 9 0 est moins absolue qu'elle ne paraît. La Guadeloupe n'avait
pas été conviée à
envoyer
des députés a u x Etats Généraux, mais elle fut représentée à l'Assemblée
Constituante et a u x
assemblées
qui suivirent. Les débats d'ordre colonial qui se déroulèrent en ces assemblées ne sont peut-être pas à l'honneur de la prévoyance française ; sans vouloir les juger, disons
seulement
que
l'esprit
qui les
anima
inspira
également les colons et surtout les petits colons de nos îles, qui ne virent pas tout d'abord le parti que les populations principes grands petits
noires
que
ou
métissées
nous posions.
planteurs,
des
mulâtres
colons, qui formaient
devaient
Sans et
tirer
des
tenir
compte
des
des
esclaves,
les
la majorité
de la popu-
lation blanche, se considérèrent c o m m e les maîtres des destinées
du
pays,
et le
gouverneur
de Clugny
les
rencontra tout d'abord sur son chemin. C'est par un miracle de prudence et de sagesse qu'il endigua plutôt qu'il ne refoula
des mouvements
qui tendaient
sans
cesse à le déborder. U n de ses successeurs, le général Collot, arrivé dans l'île en mars 1 7 9 3 , s'inspira des mêmes principes ; mais déjà le m o u v e m e n t
révolutionnaire
était plus
démo-
cratique et plus violent. Obligé de composer avec les éléments les moins recommandables de la population, Collot sut néanmoins maintenir l'ordre par son courage personnel et par un esprit de décision des plus remarquables
dans
plusieurs
situations
des plus
critiques.
A t t a q u é par les Anglais en avril 1 7 9 4 , il dut capituler
198
LA
devant
les forces
GUADELOUPE
supérieures
et pendant
un t e m p s ,
un t e m p s très court du reste, la Guadeloupe passa sous la domination
britannique.
L e g o u v e r n e m e n t d e la G u a d e l o u p e est constitué en
1763.
gouvernement
général.
— 12 juillet. — U n e o r d o n n a n c e royale p e r m e t a u x étrangers d ' i m p o r t e r à l a G u a d e l o u p e des bestiaux et des b o i s , en échange des sirops et tafias. — En contrepartie, un i m p ô t d e 375.000 livres est i m p o s é a u x h a b i t a n t s . — 19 février. —
L e chevalier d e B o u r l a m a q u e a m i
des physiocrates, est n o m m é gouverneur d e la G u a d e l o u p e et M . d e Peynier, i n t e n d a n t .
Bourlamaque
prend p o s -
session d e s o n g o u v e r n e m e n t le 4 juillet. P o u r ramener à la Guadeloupe
le c o m m e r c e
particulier
q u e cette île
était obligée d e faire antérieurement par le p o r t de SaintPierre, B o u r l a m a q u e
défend
l'exportation
des denrées
de l'île et l ' i m p o r t a t i o n des marchandises françaises p a r la v o i e d e l a Martinique. Il m e u r t le 24 juin d e l'année suivante. — 15 juillet. — L a Désirade est érigée en lieu d e d é p o r tation p o u r les jeunes gens d e famille, d o n t on v e u t se débarrasser en F r a n c e . 1765.
L a Chambre d'Agriculture d e la G u a d e l o u p e désigne
R o b e r t Deshayes c o m m e d é p u t é au Conseil d u C o m m e r c e . D e s h a y e s , qui était c o m m a n d a n t de milices, a v a i t représenté
la colonie à L o n d r e s , au t e m p s de
l'occupation
anglaise, mission au cours de laquelle il avait manifesté une
très
grande
habileté.
Il représenta
j u s q u ' a u 7 m a i 1 7 8 1 , date d e sa m o r t .
la G u a d e l o u p e
199
1763-1794 1 7 6 5 - 1 7 6 8 . Sous le g o u v e r n e m e n t de N o l i v o s , on l'ouverture
d'une
v o i e terrestre
entre
décide
Basse Terre
et
Pointe à Pitre, une poste a u x lettres est installée à Basse Terre, le canal d u L a m e n t i n est a c h e v é , la M a t o u b a est d é f r i c h é e ; une p r o m e n a d e plantée de tamarins, et appelée encore aujourd'hui Cours Nolivos, est créée à Basse Terre, le siège de l ' A m i r a u t é est transféré à Pointe à Pitre. L a Guadeloupe c o n t i n u a n t de prospérer sous un régime de plus grande liberté c o m m e r c i a l e , tandis que le c o m merce de la Martinique décline, les grands propriétaires de cette dernière île o b t i e n n e n t par une o r d o n n a n c e d u 20 septembre 1768, sous le n o m de g o u v e r n e m e n t général des Iles d u V e n t de l ' A m é r i q u e , le rétablissement g o u v e r n e m e n t général des Antilles, a v e c la
du
Martinique
c o m m e chef-lieu. D e v a n t ce fait, Nolivos quitte le g o u vernement de la Guadeloupe le 29 n o v e m b r e de la
même
année. Il est remplacé par le c o m t e d e Malartic. 1 7 6 7 . L a Guadeloupe c o m p t e 11.683 b l a n c s , 762 libres
et
affranchis et 72.761 esclaves, soit 85.206 habitants. 1 7 6 8 . Etablissement à Pointe à Pitre d u Tribunal de l ' A m i rauté et de la Juridiction de la Grande Terre. L a ville se d é v e l o p p e . 1769-1771. L'ordonnance
du
29
septembre
1768
r a t t a c h e m e n t de la Guadeloupe à la Martinique
sur
le
ayant
été enregistrée à la Guadeloupe le 7 mars 1769 y soulève une é m o t i o n générale. Une visite d u gouverneur général d ' E n n e r y n'apaise pas l'agitation. Le Conseil supérieur et la Chambre d'agriculture protestent. L e gouverneur Bouille d e m a n d e au roi son indépendance ou son r a p p e l ; il est rappelé et quitte la colonie au mois d ' a o û t 1771, laissant l'administration à D i o n , c o m m a n d a n t en second. Le
roi
rend
à
la
Guadeloupe
son
indépendance
(16 a o û t 1771) et le c o m t e de Nozières est n o m m é g o u verneur a v e c Tascher c o m m e intendant.
200
LA
GUADELOUPE
L e g o u v e r n e m e n t d e la G u a d e l o u p e est séparé p e n -
1772.
dans six mois d e celui de la Martinique. 1775, 24 octobre. — L a G u a d e l o u p e obtient une a d m i n i s tration i n d é p e n d a n t e , sauf p o u r la partie militaire et les finances
p o u r lesquelles elle reste subordonnée à la Mar-
tinique. L'interdiction
d u c a b o t a g e a v e c la Martinique
est m a i n t e n u e . D ' A r b a u d est n o m m é g o u v e r n e u r et Peynier intendant, ils arrivent à Basse Terre le 29 n o v e m b r e 1775. 1782.
François de Foulquier, Président au Parlement d e
T o u l o u s e , est n o m m é
intendant
d e la G u a d e l o u p e .
Il
faisait partie d u « Comité de Législation des Colonies » et d e v a i t procéder a u x grandes réformes administratives et judiciaires. Il crée en particulier une Assemblée C o l o niale.
(Voir
Généralités).
Il passe en 1786 à la Martinique a v e c mission d'établir définitivement l'assemblée représentative d o n t on avait fait l'expérience à la G u a d e l o u p e . (Voir
Martinique).
— 16 mai. — L e Conseil supérieur de l a G u a d e l o u p e a le droit d e présenter des magistrats à la n o m i n a t i o n des gouverneurs. Suppression d u d é p u t é à Paris. 1783-1784. L e b a r o n
d e Clugny
est n o m m é
gouverneur
de la Guadeloupe le 20 juillet 1783 et arrive dans la colonie le 27 mai 1784. Il a c o m m e second le c o m t e d ' A r r o t s , gouverneur d e la Grenade. 1784, 24 juillet. — Ordre d u gouverneur de ne plus inhumer dans les églises et d'établir les cimetières hors des villes. 1789. L a G u a d e l o u p e c o m p t e 13.712 blancs, 3.058 libres et 89.523 esclaves. T o t a l
106.393.
— L e roi en France c o n v o q u e les E t a t s - G é n é r a u x : les colonies ne sont pas a d m i s e s ; néanmoins les colons de la Guadeloupe présents à Paris élisent les députés qui
201
1763-1794
prêtent serment au J e u d e P a u m e et d o n t d e u x , de Curt et de Galbert, sont néanmoins admis à l'Assemblée Constituante (22 s e p t e m b r e ) . — Les h o m m e s de couleur, soutenus la
par
Société des Amis
des Noirs,
fondée
à
Paris,
d e m a n d e n t à leur tour leur admission dans le b u t d e t o u t faire échouer. Le club Massiac, créé en opposition à cette société, pousse les noirs à réclamer les m ê m e s droits. Dans la colonie, le gouverneur j u g e expédient de c o n v o quer une assemblée coloniale spéciale, q u i , p o u r départager la rivalité entre la Basse Terre et Pointe à Pitre, se réunit à Petit B o u r g le 1 Cette
assemblée
er
d é c e m b r e au n o m b r e de 96 m e m b r e s .
prend
le titre
d'Assemblée
Générale
coloniale et n o m m e 3 députés à la Constituante : Chabert de Lacharrière, Nadal
de Saintrac
et R o b e r t
Coquille.
Ces députés arrivent à Paris le 22 juin et sont admis à siéger a v e c c e u x p r é c é d e m m e n t désignés par les colons. 1790, avril. — Un c o m p l o t d'esclaves, déterminé par les idées nouvelles d'égalité et de fraternité, est arrêté dès son origine. Cinq des meneurs sont exécutés. — 10-26 septembre. — L e gouverneur d e la G u a d e l o u p e , M. de Clugny, est gardé à v u e en son hôtel p e n d a n t 17 jours (10-26 septembre) p a r un groupe de patriotes qui le s o u p ç o n n e n t d'être d ' a c c o r d
a v e c le gouverneur
de la Martinique pour étouffer leurs libertés. — 15- octobre. —
Organisation
des municipalités
à
la G u a d e l o u p e . Pautrizel, de tendances républicaines, est élu maire de la Basse Terre ; cette municipalité ne tarde pas à être en opposition a v e c le gouverneur. —
L'Assemblée coloniale, réunie à Pointe à P i t r e , se
déclare en permanence. 1791.
Quelques noirs a y a n t formé le p r o j e t d'incendier les
202
LA
GUADELOUPE
propriétés, sont arrêtés et e x é c u t é s , les uns en mai à Sainte-Anne et les autres à Noël à Marie-Galante. — 25 août. — Arrivée des commissaires civils v e n a n t de la Martinique. — 12 août. — L a nouvelle d e la fuite d u roi à V a r e n n e , c o n n u e le 12 a o û t , jette l'administration dans l'incertitude sur la m a r c h e qu'elle d o i t suivre, et favorise d u m ê m e c o u p le d é v e l o p p e m e n t des idées révolutionnaires. — 12 septembre. — L ' A s s e m b l é e la
dissolution
de la municipalité
Coloniale
prononce
d e Basse T e r r e , c o u -
pable d'afficher des principes inconstitutionnels et tretenir dans le p a y s une agitation missaires
et cause
prenant fait
d'en-
c o u p a b l e . Les c o m -
pour
la
municipalité,
Clugny d o n n e sa démission d e g o u v e r n e u r (3 octobre) ; son
second,
le v i c o m t e
L a municipalité
d'Arrots,
imite
son
exemple.
se déclare contre les commissaires qui
quittent la colonie le 19 o c t o b r e .
Clugny
reprend ses
fonctions. — 21 décembre. — L ' A s s e m b l é e Coloniale d e la G u a d e l o u p e se déclare « Constituante ». 1 7 9 2 . L a colonie j o u i t d'une tranquillité parfaite p e n d a n t les premiers m o i s . — L e 28 mars, l'Assemblée législative a y a n t décrété q u e les h o m m e s de couleur et les nègres libres jouiraient de tous les droits politiques, cette loi rencontre
un accueil
favorable
auprès
de
l'assemblée
coloniale. Les électeurs sont c o n v o q u é s p o u r le 24 juin. — 25 juillet. — Mort d u b a r o n d e Clugny ; d'Arrots lui
succède.
— E n v o i a u x Antilles d e 2.000 h o m m e s a v e c d e u x n o u v e a u x gouverneurs, R o c h a m b e a u p o u r la Martin i q u e , Collot p o u r la G u a d e l o u p e , en v u e d'appliquer la loi d u 4 avril. Les d e u x colonies refusent de les recevoir.
1763-1794
203
Sur la nouvelle fausse de la restauration de
l'autorité
r o y a l e , l'Assemblée coloniale de la G u a d e l o u p e brûle la cocarde
tricolore
et
arbore
le
drapeau
blanc.
Mieux
informée, l'assemblée maintient c e p e n d a n t sa fidélité au régime t o m b é à Paris le 10 a o û t . Les d e u x îles préparent leur défense et néanmoins délèguent d e u x députés
en
F r a n c e , D u b u c fils p o u r la Martinique et Clairefontaine p o u r la G u a d e l o u p e . — Les républicains les plus en
vue
sont déportés en F r a n c e ; d'autres se s a u v e n t dans les îles voisines, d ' o ù ils n o m m e n t députés à la C o n v e n t i o n Guillermin,
D u p u c h et L i o n ,
qui furent admis à siéger.
— D u g o m m i e r est élu dans les mêmes conditions par les proscrits de la Martinique. Marie-Galante par contre se déclare p o u r les idées nouvelles et renvoie à la G u a d e l o u p e son c o m m a n d a n t royaliste. T o u t e s relations étant r o m pues a v e c la F r a n c e , le gouverneur et l'assemblée coloniale o u v r e n t les portes de l'île au c o m m e r c e américain, afin de se procurer des approvisionnements Cependant arrive le 1
er
(30 n o v e m b r e ) .
d é c e m b r e a v e c la Félicité un
commissaire e n v o y é par la C o n v e n t i o n , le capitaine de vaisseau Lacrosse. A y a n t appris qu'il ne serait reçu ni à la Guadeloupe ni à la Martinique, il se fixe à la D o m i n i q u e , plus favorable aux idées nouvelles, et de là entreprend de désorganiser le parti royaliste de la G u a d e l o u p e par une p r o c l a m a t i o n où il o p p o s e les planteurs au reste de la p o p u l a t i o n . Invité à quitter la D o m i n i q u e par le gouverneur, il v a s'établir à Sainte-Lucie, qu'il organise révolutionnairement, et d ' o ù il noue des relations a v e c Marie-Galante. D e v a n t les dangers
qui les m e n a c e n t , les
planteurs
délèguent à Londres, p o u r solliciter le secours des puissances coalisées, D u b u c et Clairefontaine; leur mission en France étant devenue sans o b j e t . L e 7 d é c e m b r e , 230 citoyens actifs se réunissent à Pointe à Pitre p o u r examiner la s i t u a t i o n ; ils se d é c l a -
204
LA
GUADELOUPE
rent prêts à obéir a u x ordres que donnera la
Convention.
L e désarroi se m e t parmi les m e m b r e s de l'assemblée coloniale et, le 20, Pointe à Pitre arbore la c o c a r d e tricolore. Le g o u v e r n e u r d ' A r r o t s d e m a n d e des secours à la Martinique qui envoie d e u x n a v i r e s ; mais le m o u v e m e n t est plus fort et la R é v o l u t i o n t r i o m p h e à
Pointe à Pitre
le 4 janvier 1793.
—
définitivement Le
gouverneur
s'enfuit à la Trinité le 11 janvier et l'assemblée coloniale tient le 13 une dernière séance où il ne restait plus que sept personnes. 1 7 9 3 . Lacrosse
arrive à Pointe à Pitre le 5 janvier.
Des
clubs se créent s p o n t a n é m e n t dans tous les villages. Les citoyens de 22 paroisses sur 28 réunis en assemblées primaires le 20 janvier, élisent des représentants qui se constituent
avec
commission
des
générale
pouvoirs
presque
Lacrosse des fonctions
souverains
en
Celle-ci
investit
de g o u v e r n e u r j u s q u ' à
l'arrivée
extraordinaire.
de celui qui sera désigné par la R é p u b l i q u e . R o c h a m b e a u revenu
sur
ces
entrefaites
de
Saint-
D o m i n g u e (28 j a n v i e r ) , muni d u titre de gouverneur g é n é ral des Iles d u V e n t , confirme Lacrosse dans ses fonctions jusqu'à
l'arrivée
des
commissaires
civils;
ils
partent
ensemble p o u r la Martinique. E n l'absence de Lacrosse, arrive Collot investi p r é c é d e m m e n t des f o n c t i o n s de gouverneur, q u ' a u c u n arrêté ne lui
a enlevées;
il les r e v e n d i q u e .
La
Commission
générale investit Lacrosse (14 mars) et Collot
s'incline.
Mais on apprend le 19 mars que la guerre a éclaté entre la France et l'Angleterre.
Lacrosse, officier de m a r i n e ,
jugeant ne pas avoir les qualités requises p o u r c o m m a n d e r à une
armée
de terre, résigne ses fonctions, qui
sont
aussitôt reprises par Collot. H o m m e juste et pondéré et v o u l a n t concilier les intérêts et les races, Collot entreprend
dans l'île une
tournée
1763-1794 d'inspection
205
qu'il termine le 17 avril. Sur la d e m a n d e
de la Commission,
qui avait ses raisons p o u r
l'éloigner,
il repart dès le 19. L a Commission profite de son absence pour
organiser
contre
les
planteurs,
accusés
par
elle
d'intelligence a v e c l'étranger, des attentats, qui se t r a duisent dans la nuit d u lendemain 20 avril par l'assassinat de
17
personnes
reviennent
aux
Trois
triomphants
à la
Rivières. Basse
Les
Terre
assassins
au
nombre
de 2 4 3 ; ils y sont accueillis c o m m e les sauveurs d u pays. Désarmés, ils sont mis en prison, mais soutenus par la Commission, ils ne seront jamais j u g é s ; ils s u c c o m b e n t c e p e n d a n t massacrés dans leur prison, au m o m e n t
de
l ' a t t a q u e et de l'incendie de la ville par les Anglais, le 20 avril 1794. —
Les
Montagnards
demandent
l'arrestation
de
80 planteurs, coupables d ' i n c i v i s m e ; le gouverneur leur en
accorde
Commission neur.
27. Mal
satisfaite
de
cette
concession,
la
d e m a n d e la mise en accusation d u g o u v e r -
Collot fut appelé à la justice
du
peuple;
sorti
v i c t o r i e u x de l ' é p r e u v e , il se débarrasse de son principal adversaire, le maire de Basse Terre, Pautrizel, en l ' e n v o y a n t siéger à la C o n v e n t i o n . Les Montagnards prennent leur revanche le 7 juillet à Pointe à Pitre, en massacrant une partie des p r i s o n n i e r s ; les autres sont sauvés par des
dévouements
particuliers.
—
Un
mouvement
de
réaction de courte durée se manifeste dans les c o m m u n e s de Sainte-Anne et de —
Saint-François.
Le 12 septembre est promulguée la loi d u d i v o r c e .
Aussitôt c'est faire acte de civisme que de divorcer. —
octobre.
—
La
Guadeloupe
est
constituée
en
d é p a r t e m e n t (voir 1797). L'opposition le gouverneur
d e v e n a n t chaque jour plus aiguë
entre
soutenu
Basse
Terre et la Commission
par
la
municipalité
de
générale, celle-ci décide de
se
206
LA
transporter
à
GUADELOUPE
Pointe à Pitre
(5 d é c e m b r e ) .
Collot
l'y
suit. L a Commission lui d e m a n d e d'être sous son contrôle le chef militaire d'un conseil exécutif, il refuse. L a Commission se transforme alors en Corps représentatif révolutionnaire (21 d é c e m b r e ) ; les c o m m u n e s ne suivent pas le m o u v e m e n t . 1794. Le mais
Corps
à
représentatif décrète
l'élection
d u tribunal
de
Collot
d'accusation,
district les
modérés
l ' e m p o r t e n t ; en riposte, le Corps représentatif p o u s s e , à Basse
Terre,
au
massacre
des
prisonniers,
Collot
les
c o u v r e de son corps et les sauve (10 février). L e 21 février, on a p p r e n d le d é b a r q u e m e n t des Anglais à la Martinique. L a p o p u l a t i o n , craignant de rester sous le j o u g des terroristes, paraît p e u disposée à la r é s i s t a n c e ; néanmoins Collot prend t o u t e s les mesures de
défense
p o s s i b l e s ; il arme 500 esclaves. A u d é b u t d'avril, les Anglais s'emparent
de
Sainte-
L u c i e , le 9 ils o c c u p e n t les Saintes, et le 1 1 , c o m m a n d é s par l'amiral
John
J e r v i s , ils d é b a r q u e n t au Gosier et
o c c u p e n t sans difficulté la Grande Terre. L e 1 6 , ils d é b a r q u e n t a u x environs de Basse Terre. L e feu est m i s à la ville. Sans m o y e n s de défense, Collot capitule le 20 avril. L'occupation
anglaise, qui dura moins de d e u x
mois,
fut a c c o m p a g n é e d'une réaction contre les m o n t a g n a r d s . Marie-Galante qui, dès le 12 février 1793, s'était donnée une administration indépendante le n o m d'Assemblée
de 12 m e m b r e s
sous
coloniale administrative, t o m b e égale-
m e n t au p o u v o i r des Anglais, qui installent un commissaire dans
chacune des trois paroisses, le Grand
Capesterre et Saint-Louis
(21 avril).
Bourg,
la
QUATRIÈME PÉRIODE: 1794-1802 Tandis que la Martinique, tombée sous la domination anglaise en 1 7 9 4 , continuait à vivre sous le régime de l'esclavage, au grand bénéfice des planteurs dont rien ne trouble la sécurité, la Guadeloupe vivait d'une vie singulièrement plus agitée. Conquise elle aussi par les Anglais le 2 0 avril 1 7 9 4 , elle resta moins longtemps en leur pouvoir. Le 2 3 du m ê m e mois une flotte partait de France avec 1.500
hommes et un commissaire de la
Convention, Victor Hugues. Ce commissaire était porteur d'instructions pour la suppression
de
l'esclavage,
décrétée
en
France
le
4 février. Il put débarquer le 2 juin près de Pointe àPitre et cinq jours après il proclamait la liberté. Il s'acquit ainsi le concours des noirs et en enrégimenta une p a r t i e ; mais du m ê m e coup les planteurs restés dans l'île se rangèrent a u x côtés des Anglais. E t ce fut une guerre tout à la fois civile et étrangère. Dès la fin de l'année, Victor Hugues était complètement le maître de la s i t u a t i o n ;
les Anglais
s'étaient
rembarques
et
plusieurs centaines de planteurs avaient été fusillés ou guillotinés. Victor Hugues gouverna pendant de longs mois par la t e r r e u r ; il remplaça l'esclavage, officiellement aboli,
208
LA
GUADELOUPE
par une organisation du travail libre qui lui ressemblait par beaucoup de côtés. A peu près indifférent a u x instructions qu'il recevait de la métropole, il gouvernait ou administrait à sa fantaisie, ce qui ne v e u t pas dire sans j u g e m e n t ; si son administration ne fut pas libérale, elle fut bien ordonnée. Les relations politiques et commerciales avec la métropole étaient à peu près c o u p é e s ; il maintint néanmoins une réelle prospérité dans l'île par l'appui qu'il donna à de fructueuses opérations de corsaires auxquelles il était lui-même intéressé. Les pirateries de ces derniers créèrent d'ailleurs à partir de 1797 un véritable état de guerre entre la France et les
Etats-Unis.
Rappelé en France à la fin de l'année 1 7 9 8 , Hugues fut remplacé par le général Desfourneaux, qui, victime de sa faiblesse, finit par être embarqué pour la France, le 17 octobre 1 7 9 9 , par ses propres administrés. U n triumvirat de commissaires, inspiré du Consulat de France, administra l'île durant dix-huit mois, sans menaces de l'étranger c o m m e sans grandes intérieures;
les
émigrés
commençaient
à
difficultés reparaître.
Les petites îles relevant encore de la Guadeloupe furent cependant enlevées par les Anglais en mars 1 8 0 1 . Le 2 9 mai suivant, on vit revenir avec le titre de capitaine-général l'ancien gouverneur de l'île en 1 7 9 2 , le capitaine de vaisseau Lacrosse promu contre-amiral. Aussi réacteur qu'il avait été révolutionnaire neuf ans auparavant, il ne tarda pas, par des mesures intempestives, à indisposer la majeure partie de la population qui se révolta, et lui aussi, il fut embarqué d'office le 5 novembre 1 8 0 1 . Mais il ne dépassa pas la Dominique. U n de ses officiers, le général Pélage, un mulâtre,
C A P I T U L A T I O N DES A N G L A I S A
LA GUADELOUPE
e
(Dessin du X V I I I siècle. 0.73Xo.94.
Musée de Versailles).
devant le corps expéditionnaire commandé par Victor Hugues, 7 Juin 1794.
1794-1802 administra
l'île jusqu'à
l'arrivée
209 d'un
nouveau
capi-
taine-général, le général Richepanse. Celui-ci débarqua le 6 mai 1 8 0 2 , avec ses 3 . 5 0 0 h o m m e s , non plus pour lutter contre l'Angleterre avec qui la paix venait d'être rétablie, mais pour réprimer ce que, depuis la mésaventure de Lacrosse, on considérait c o m m e un soulèvement de la population. C'était une nouvelle phase de l'histoire de la colonie qui c o m m e n t a i t .
1 7 9 4 , 4 février. (16 pluviôse an I I ) . « La Convention N a t i o nale déclare que l'esclavage des nègres dans toutes les colonies est aboli ; en conséquence elle déclare que tous les h o m m e s , sans distinction de couleur, domiciliés dans les colonies, sont citoyens français et jouissent de tous les droits assurés par la Constitution. « Elle renvoie au Comité de Salut Public p o u r faire incessamment un rapport sur les mesures à prendre pour assurer l'exécution d u présent décret. » —
Dans
l'appréhension
d'une
attaque
France avait e n v o y é aux Antilles 1.453
anglaise, hommes
la
avec
3 commissaires, V i c t o r H u g u e s , Chrétien et Lesseignes. Partis de R o c h e f o r t le 23 avril, ils d é b a r q u e n t au Gosier le 2 juin et entrent le 7 à Pointe à Pitre. Ils adressent à la p o p u l a t i o n la proclamation suivante : CITOYENS,
« Un gouvernement républicain ne supporte ni chaîne, ni esclavage, aussi la Convention
Nationale
vient-elle
de solennellement décréter la liberté des nègres et
de
confier le m o d e d'exécution de cette loi aux commissaires qu'elle a délégués dans les colonies ; il doit d o n c résulter de cette rénumération (sic) naturelle et de son organisaANTILLES
14
210
LA
tion
civile:
GUADELOUPE
1° la bienfaisante égalité sans laquelle la
m a c h i n e politique est c o m m e une horloge d o n t le b a l a n cier perd s o n équilibre et s o n action p e r p é t u e l l e ; 2 ° une administration générale et particulière qui garantisse la propriété déjà formée des uns et le produit d u travail et de l'industrie d e s autres. « CITOYENS d e toutes couleurs, v o t r e fidélité dépend d e cette loi et d e son e x é c u t i o n ; les délégués d e la nation v o u s garantissent un m o d e qui sera la sauvegarde d e tous les amis d e l a R é p u b l i q u e française contre c e u x qui déjà o n t été et qui v o u d r o i e n t encore e n être les o p p r e s s e u r s ; mais il faut q u e les citoyens blancs offrent cordialement, fraternellement,
et à salaire
compétent,
d u travail à
leurs frères noirs et d e couleur, et il faut aussi q u e ces derniers apprennent et n'oublient jamais q u e c e u x qui n ' o n t p a s d e propriétés sont obligés d e p o u r v o i r , par leur travail et leur subsistance, à celle d e leur famille, et c o n courir en outre p a r ce m o y e n a u soutien d e leur Patrie. « C I T O Y E N S , v o u s n'êtes devenus égaux q u e p o u r jouir d u b o n h e u r et le faire partager à tous les a u t r e s ; celui qui est l'oppresseur d e s o n c o n c i t o y e n est un monstre q u i d o i t être aussitôt banni d e la terre sociale. « L e s délégués d e la Nation o r d o n n e n t à tous les corps administratifs, municipalités, force armée et à tous les individus, d'enregistrer sans délai, mettre à exécution et exécuter la loi qu'ils p r o c l a m e n t en tête d e la présente, et ils m e t t e n t sur l a l o y a u t é d e tous les individus la sauvegarde d e la république f r a n ç a i s e ; et sous la p r o t e c tion d e la loi tous les citoyens, leurs propriétés, leur i n d u s trie et le produit d e leur travail q u e l c o n q u e . « Ils o r d o n n e n t l'impression, l'affiche et la publication de la présente loi et proclamation. A la Pointe à Pitre, île G u a d e l o u p e , le 19 Prairial, l ' a n 2
e
d e la R é p u b l i q u e
française une et indivisible. Signé:
Pierre C H R É T I E N et V i c t o r H U G U E S . »
211
1794-1802
Victor Hugues, le premier des commissaires, enrôle les noirs, repousse une attaque d'une flotte anglaise
com-
mandée par Jervis et Grey (5 juillet), et se rend m a î t r e de la Grande Terre t o u t entière. — 1 6 juillet. — Pointe à Pitre prend le n o m de P o r t d e la Liberté et le Fort d u
G o u v e r n e m e n t celui de
Fort de
la Victoire. — Après trois mois de préparation, Hugues entreprend la c o n q u ê t e de la Guadeloupe p r o p r e m e n t dite et, malgré un insuccès initial à Bierville, i m p o s e le 6 o c t o b r e une c a p i tulation à l'armée anglaise, décimée par la fièvre j a u n e . 364 Français qui servaient a v e c les Anglais sont fusillés et environ 500 autres guillotinés. Basse Terre est investie et évacuée par les Anglais dans la nuit d u 10 au 11 d é c e m b r e . — Marie-Galante était réoccupée le 27 n o v e m b r e . 1 7 9 5 . Arrivée à Pointe à Pitre (6 janvier) de 1.500 h o m m e s de troupes, de d e u x
nouveaux
commissaires
du
gou-
v e r n e m e n t , Lebas et G o y r a n d et d u capitaine Magloire Pélage, alors
inconnu.
— V i c t o r Hugues institue un régime de terreur absolue ; la guillotine v a de c o m m u n e en c o m m u n e , a c c o m p a g n é e d ' u n tribunal révolutionnaire a m b u l a n t ; le dernier guillotiné le fut le 6 juillet 1796. Par suite de ces e x é c u t i o n s , auxquelles une b o n n e partie des victimes désignées p u t se soustraire par la fuite, le n o m b r e total des habitants blancs qui était de 9.371 en 1790, t o m b a en 1795 à 1.092, d o n t 255 h o m m e s seulement. Pour l'application de la loi d u 4 février 1794, les esclaves libérés sont d ' a b o r d astreints à travailler sur les terres de leurs
anciens
maîtres
moyennant
un
salaire
payé
par ceux-ci et contrôlé par l'autorité. C o m m e les p r o p r i é taires étaient presque tous en fuite, le salaire est b i e n t ô t remplacé
par l'octroi de d e u x jours de liberté
entière
212
LA GUADELOUPE
par décade afin d e permettre à l'esclave libéré d e t r a vailler e x c l u s i v e m e n t p o u r s o n c o m p t e , puis par un s y s t è m e de fermage, qui paraissait d o n n e r plus d'initiative et d e responsabilité. T o u t e c o m m u n i c a t i o n a y a n t virtuellement cessé a v e c la M é t r o p o l e , les approvisionnements de l'île sont devenus très d i f f i c i l e s ;
il est d é f e n d u
autrement
qu'une
fois
nationales
fonctionnant
d'acheter
par décade
dans
sous le contrôle
et d e v e n d r e des
agences
d e l'autorité.
Chaque particulier d o i t déclarer les objets de subsistance qui sont en sa possession. Ces difficultés propres au c o m m e r c e disparurent lorsq u ' o n prit le parti d'armer des corsaires, qui introduisirent dans l'île une grande quantité de marchandises. D e 1795 à 1 8 0 0 , 601 navires, parfois m ê m e des neutres, furent capturés. A u dehors, V i c t o r Hugues fait réoccuper Sainte-Lucie (22 avril-18 j u i n ) , p a r le commissaire G o y r a n d ; l'île est de n o u v e a u perdue en avril-mai 1796. Saint-Eustache et Saint-Martin sont également enlevés a u x Anglais. Par c o n t r e , on échoue en v o u l a n t reprendre la Martinique, la D o m i n i q u e et la Grenade. V i c t o r Hugues provoque
également mais sans succès une révolte des
Caraïbes d e Saint-Vincent contre les Anglais. 1796. L e 16 février, V i c t o r Hugues est n o m m é agent d u Directoire. L e 16 mars, il épouse Angélique J a c q u i n . S o n a v o i r personnel est alors évalué à 480.000 livres. Le 9 a o û t , il refuse de proclamer la Constitution de l'an I I I q u i , à son avis, ne peut qu'entretenir la haine entre les blancs et les noirs. 1797, 25 octobre. — L a G u a d e l o u p e forme un d é p a r t e m e n t divisé en 27 c a n t o n s . L'Assemblée locale avait d e v a n c é la Constitution de quatre années (Voir 1793). — Fin décembre. — Des noirs, au n o m b r e de 2 à 3 0 0 ,
1794-1802 s'insurgent
au
Lamentin.
Le
général
213 Boudet
réprime
le m o u v e m e n t . Un m o u v e m e n t identique se produit dans le
même
temps à Marie-Galante. Les meneurs sont presque aussitôt pris et fusillés. V i c t o r Hugues m e t la colonie en état de siège le 6 janvier suivant. Son g o u v e r n e m e n t très ferme continue de s'affirmer c o m m e très indépendant de l ' a u t o rité
métropolitaine.
1797-1798. Le
gouvernement américain envoie en
France
une mission pour mettre un terme aux opérations des corsaires de V i c t o r Hugues. Les négociations
échouent
par la faute de Talleyrand et le 7 juillet 1798 les E t a t s Unis déclarent nuls tous les traités antérieurs passés a v e c la France. L a mer des Antilles devient le théâtre d'une guerre maritime acharnée. 1 7 9 8 . V i c t o r Hugues est remplacé par le général Desfourneaux (3 juin) qui arrive dans l'île le 22 n o v e m b r e . Hugues est embarqué pour France le 4 d é c e m b r e . 1 7 9 9 . Desfourneaux esquisse une légère réaction p o l i t i q u e ; il c o m b a t le v a g a b o n d a g e , oblige les noirs à travailler sur les propriétés séquestrées et afferme p o u r cinq ans les biens nationaux. A p p e l é à appliquer pour les élections primaires la Constitution de l'an I I I , il rend illusoire le droit électoral en exigeant des électeurs le paiement effectif d'une contribution équivalente à trois journées de travail agricole;
aussi n ' y
eut-il
que peu d'électeurs.
Accusé
d'avoir outragé la souveraineté du peuple, il est rappelé par le Directoire et remplacé (14 août) par trois c o m m i s saires, Jeannet, L a v e a u x et B a c o . Entre t e m p s (17 o c t o b r e ) , Desfourneaux avait été embarqué pour
France,
à la suite d'une conspiration des officiers et de la m u n i cipalité de Basse Terre. — Le général Pelardy est investi provisoirement de l'autorité. Les commissaires le 10 d é c e m b r e .
arrivent
214
LA
1800.
Une loi d u 1
er
GUADELOUPE
janvier 1797 a y a n t prescrit une révision
générale de la liste des émigrés, les commissaires
s'ap-
pliquent à établir que p o u r avoir pactisé a v e c l'ennemi, aucun ne d o i t revenir dans la colonie. — L a mésintelligence ne tarde pas à régner entre eux ; L a v e a u x arrêté est r e n v o y é en France en mars et remplacé par Bresseau. B a c o m e u r t en d é c e m b r e . E n a o û t , les commissaires e n v o i e n t 14 navires corsaires à Curaçao, colonie hollandaise, sous prétexte d ' e m p ê c h e r cette île de t o m b e r a u x
mains des Anglais. L'île
est
néanmoins prise et a v e c elle cinq navires français (septembre). 1801, 19 avril. — U n arrêté des Consuls d u 19 avril a y a n t stipulé que la G u a d e l o u p e serait à l'avenir régie par trois magistrats, un capitaine-général, un préfet et un c o m m i s saire de justice, Lacrosse, Lescallier et Coster sont désignés p o u r ces fonctions. Ils arrivent à Pointe à Pitre le 29 m a i . —
Lacrosse avait déjà été désigné p o u r la G u a d e l o u p e
en 1793. Lacrosse s'affirme dès le premier j o u r c o m m e un r é a c teur. Les 5 et 6 j u i n , il fait arrêter 15 personnes de c o n d i tions diverses, suspectes de d é m a g o g i e , puis des militaires. Il réserve les fournitures à ses amis ou partisans. L e 25 j u i n , il autorise des émigrés à rentrer. Des empoisonneurs sont fusillés sans preuves suffisantes. Ces procédés p r o v o q u e n t le 8 a o û t un c o m m e n c e m e n t de révolte à Basse Terre. Lacrosse use d e représailles, visites domiciliaires, e m p r i s o n n e m e n t , menaces de d é p o r tation des h o m m e s de couleur ( s e p t e m b r e - o c t o b r e ) . Il v e u t faire arrêter Pélage, originaire de la Martinique, et après lui le chef de l ' a r m é e . P o i n t e à Pitre s'insurge et p r o c l a m e Pélage c o m m a n d a n t militaire de la G u a d e l o u p e : embarras de celui-ci entre son d e v o i r d e militaire
et ses sentiments
de
citoyen.
215
1794-1802 Un
essai d e
conciliation
est tenté ; Lacrosse
vient
à
Pointe à Pitre, il est arrêté par la p o p u l a c e et emprisonné. Pélage favorise son évasion
(5 n o v e m b r e )
et
Lacrosse
se retire à la D o m i n i q u e , d'où il réserve tous ses droits au
gouvernement. Pélage investi d'un g o u v e r n e m e n t provisoire se c o m -
porte a v e c prudence et sagesse ; il résiste à la fois impatiences d'un parti l o c a l , a y a n t p o u r chef
aux
Delgrès,
colonel mulâtre, qui rêve d ' i n d é p e n d a n c e , et a u x m a n œ u vres
de
Lacrosse
pour
reconquerrait l'autorité
restaurer
un
parti
blanc,
qui
souveraine. Cette situation des
plus délicates durera j u s q u ' à l'arrivée d u général R i c h e panse d o n t la nomination fut connue dès le mois de j a n vier 1802.
CINQUIÈME PÉRIODE: 1802-1848
L'installation de Richepanse à la Guadeloupe ne se fit pas sans résistance. Le rétablissement de l'esclavage et de la traite, le retour à l'édit de 1 7 8 4 limitant les ports d'entrepôt
provoquèrent
une
révolte
à
Basse-
Terre et il s'en fallut de peu que cette révolte n'ait eu les mêmes
conséquences
qu'à
Saint-Domingue,
c'est-
à-dire la perte de l'île. U n mulâtre, le colonel Delgrès, adressa « au m o n d e entier le dernier cri de l'innocence et du désespoir » ; il fut néanmoins vaincu après une lutte de courte durée. Ce fut une autre affaire de ramener ou retenir sur les propriétés
les anciens esclaves,
qui les avaient désertées ou les cultivaient avec plus ou moins de zèle à titre de travailleurs libres, c o m m e fermiers du gouvernement. Le retour des anciens propriétaires créait une situation nouvelle qui n'était pas sans danger pour le pouvoir lui-même. La défaite de Delgrès
rendit
la transition
moins Richepanse, mort le
plus facile.
Mais
ce
fut
3 septembre de la m ê m e
année, que son successeur Lacrosse qui eut à prendre les mesures de rigueur devenues nécessaires. Lacrosse était pour la troisième fois gouverneur de la c o l o n i e : il gouverna avec dureté et eut à réprimer
1802-1848
217
quelques mouvements séditieux. Son successeur Ernouf arriva au m o m e n t où la paix d'Amiens venait
d'être
rompue. L'île vécut cependant à l'abri de toute attaque ennemie pendant près de huit ans et pendant ce temps jouit d'une certaine prospérité grâce a u x nombreuses prises effectuées par les corsaires. Les émigrés avaient tous regagné leurs propriétés et l'on semblait
revenu
a u x institutions de l'Ancien Régime, lorsque la colonie succomba
à
6
1810.
février La
nouveau
Guadeloupe
fut
sous
une
restituée
attaque à la
anglaise
France
par
le les
traités qui terminèrent en 1814 et en 1 8 1 5 les grandes guerres napoléoniennes ; elle connut désormais un régime nouveau qui n'était plus celui du despotisme politique mais n'était
pas encore celui de l'égalité sociale.
La
période de 1 8 1 5 à 1848 reste marquée par une lente évolution de l'opinion publique en France en faveur de l'abolition définitive de l'esclavage, encore que l'idée sourît médiocrement
a u x planteurs, dont la
pouvait ruiner l'influence
et peut-être
réforme
compromettre
la fortune. Le nombre des affranchis croissait tous les jours, sans provoquer des heurts violents entre les races, mais sans les rapprocher dans des intérêts c o m m u n s . Aussi nul événement d'importance ne signale-t-il cette période de trente-trois ans, qui aboutit le 4 mars 1 8 4 8 à la célèbre déclaration du « portant
que
nulle
terre
Gouvernement française
ne
Provisoire
peut
porter
d'esclaves ». Les décrets parurent le 27 avril suivant.
1 8 0 2 . 6 m a i . — Arrivée à Pointe à Pitre
de
Richepanse
a v e c 3.470 h o m m e s ; avec les effectifs antérieurs, ses forces
218
LA
GUADELOUPE
s o n t de 7.460 h o m m e s . Il s'attendait à trouver le p a y s en pleine r é v o l t e ; Pélage l'accueille a v e c une l o y a u t é p a r faite. Par contre Delgrés se déclare le 8 mai en révolte ouverte
à
Basse
Terre. R i c h e p a n s e
s'y
p o r t e aussitôt
par mer. Il est reçu à c o u p s de c a n o n . Il engage des n é g o ciations
infructueuses.
Delgrés
peut
se maintenir
jus-
q u ' a u 22 mai dans le f o r t Saint-Charles de Basse Terre. Obligé de l ' é v a c u e r , il prolonge la résistance
jusqu'au
2 8 ; ce j o u r - l à , il se fait sauter, a v e c 300 des siens et 400 Français, par une mine préparée d ' a v a n c e à l ' h a b i t a tion d ' A n g l e m o n t . Trois jours a u p a r a v a n t , son lieutenant Ignace avait été tué près de Pointe à Pitre a v e c 675 des siens. L a résistance était v a i n c u e . Cette courte guerre priva la G u a d e l o u p e de 12.000 habitants, d o n t 2.000 émigrèrent et les 10.000 autres furent tués, déportés ou fusillés. L e 3 j u i n , obéissant à des ordres reçus a v a n t son e m b a r q u e m e n t , R i c h e p a n s e e n v o y a i t en France Pélage et les m e m b r e s d e la Commission provisoire. Après une d é t e n tion de quinze m o i s , Pélage fut réintégré dans ses charges et d i g n i t é s ; il m o u r u t en 1813 en E s p a g n e , après la bataille de V i c t o r i a . Richepanse
ordonne
le
désarmement
général
p o p u l a t i o n . Chaque h a b i t a n t d e v r a être porteur
de
la
d'une
carte de sûreté. Défense de se rendre d'une c o m m u n e à une autre sans un laissez-passer. Ordre de poursuivre les m o n t a g n e s les révoltés
qui s'y
dans
étaient réfugiés
et
création d'une t r o u p e de volontaires p o u r faire la chasse à ces coureurs des b o i s . Dans c h a q u e c o m m u n e il est créé un commissaire d u
gouvernement.
L e 16 juillet, R i c h e p a n s e , agissant au n o m des Consuls, p r o n o n c e le rétablissement de l'esclavage, sans que le n o m soit p r o n o n c é . Cet acte fut, par sa répercussion, la cause directe d e la perte d e
Saint-Domingue.
L e 14 juillet, Lacrosse est rappelé. L e 4 a o û t , il est
219
1802-1848
r e c o n n u à Pointe à Pitre c o m m e capitaine général, mais l'autorité réelle reste à R i c h e p a n s e ; il v o u l a i t r e n v o y e r Lacrosse à T a b a g o , lorsque la m o r t v i n t le surprendre le 3 septembre. — 16 juillet. —
Un arrêté consulaire porte que les
colonies de la G u a d e l o u p e , la Martinique,
Sainte-Lucie
et T a b a g o seront régies par les m ê m e s lois q u ' e n 1 7 8 9 ; par un autre arrêté, il est défendu d'amener en France aucun noir ou mulâtre. 1 8 0 2 - 1 8 0 3 . Lacrosse,
reprenant
le
pouvoir,
instaure
un
régime de terreur. Il chasse de la colonie les h o m m e s d e couleur et les noirs qui avaient servi dans la force armée des r é v o l t é s ; les chasseurs des bois sont renforcés et les gens de couleur obligés de s'embrigader dans les v o l o n taires d e la répression. C o m m e conséquence d u rétablissement de l'esclavage, les gens de couleur sont astreints à produire leurs titres de l i b e r t é ; il leur est a c c o r d é pour le faire un délai de trois m o i s , passé lequel ils seront considérés c o m m e v a g a b o n d s . L'effet de ces mesures sera que p o u r 14.912 h o m m e s libres,
8.207
redeviendront
esclaves.
—
Les
esclaves
étrangers venus se réfugier à la Guadeloupe sont v e n d u s . Ces mesures p r o v o q u e n t les 6 et 7 o c t o b r e dans la paroisse de Sainte-Anne une r é v o l t e , à laquelle s'associent m ê m e quelques blancs. Elle est c o m p r i m é e en peu de jours
et plus de 100 c o n d a m n a t i o n s
sont
prononcées.
L'île est divisée en 14 quartiers, administrés par des commissaires-commandants. — Trois tribunaux d e p r e mière instance sont créés le 5 n o v e m b r e à Basse T e r r e , Pointe à Pitre et M a r i e - G a l a n t e ; pour la première fois, un traitement est attribué aux juges. L e culte catholique est rétabli (3 d é c e m b r e ) . Les biens séquestrés étant rendus à leurs propriétaires, l'administration
remplace
par
des i m p ô t s
les
revenus
220
LA
GUADELOUPE
qui en provenaient et qui lui suffisaient depuis près de d i x ans. Les h o m m e s pris les armes à la main au temps d e V i c t o r Hugues et qui avaient été déportés a u x Saintes sont v e n d u s sur les côtes
d'Afrique.
— 8 mars. — Lacrosse, plus autoritaire q u e réellement d e s p o t e , est remplacé par le général E r n o u f ;
Lacrosse
finira c o m m e sénateur d e l ' E m p i r e . — 8 mai. — Arrivée d ' E r n o u f à Basse Terre. — Son administration
f u t en général c a l m e et réparatrice. Il
rétablit les émigrés en leurs propriétés et prend diverses mesures, n o t a m m e n t le rétablissement
d'ordre
financier,
de l ' e s c l a v a g e ;
nécessitées p a r
elles p r o v o q u e n t
un
instant un m é c o n t e n t e m e n t assez vif. — 12 mai. — R u p t u r e de la paix d ' A m i e n s . L a guerre est de n o u v e a u déclarée entre la France et l'Angleterre. — 22 juin. —
Les Anglais
attaquent
Sainte-Lucie.
— 24 juin. — Ernouf p r o c l a m e la déclaration de guerre et organise aussitôt la garde nationale. — 5 septembre. — U n e flottille française se disposant à aller attaquer A n t i g o a est surprise à Deshayes, sur les côtes occidentales de la G u a d e l o u p e . L ' a t t a q u e est r e p o u s sée, mais on d o i t renoncer à A n t i g o a . — 5 octobre. — L e préfet Lescalier rentre en F r a n c e ; il
est remplacé
successivement
par
Roustagnenq
et
Kerverseau. 1804, 9 juillet. — Un tribunal de paix spécial est créé à l'île 1805,
Saint-Martin. 20 février. — Arrivée à la Martinique d'une
flotte
française c o m m a n d é e par Missiessy; le 22 elle attaque et rançonne la D o m i n i q u e ; le 2 3 , elle arrive à la G u a d e -
1802-1848
221
loupe; le 3 mars elle part pour attaquer Montserrat, Nièves et Saint-Christophe qu'elle met à rançon, et revient à la Martinique où elle attend durant quelques jours une autre flotte française que doit amener Villeneuve, puis rentre en France. Villeneuve, parti de Toulon le 30 mars, n'arrive à la Martinique que le 14 mai avec 5.000 hommes de troupes. Là, ayant appris que Nelson était à Antigoa que lui-même se proposait d'attaquer, il renonce à cette entreprise et retourne en Europe. Dès lors nulle opération militaire jusqu'en 1808. Mais les corsaires reparaissent; de 1803 à 1810 ils prennent 342 navires contre 358 de 1795 à 1801. Les prises de 1803 à 1810 se traduisent par un produit brut de 29 millions 521.687 francs, qui, après les frais de vente, la commission des armateurs et les frais de justice laissent un produit net de 24.928.725 livres, contre 25.072.275 de 1795 à 1801. A toutes fins utiles, Ernouf recrute un millier de soldats parmi les noirs esclaves. — Ernouf envoie au Vénézuela un détachement d'une centaine d'hommes pour appuyer le mouvement insurrectionnel du général Miranda. 1807. Par suite de la guerre, les relations avec la France sont fort rares et le commerce avec l'étranger est devenu difficile; les objets d'alimentation étant hors de prix, on recourt à des mesures très sévères contre la spéculation. 1808. Les Anglais occupent Marie-Galante le 2 mars et la Désirade le 31. — Ils tentent contre Saint-Martin une expédition qui échoue le 4 janvier; par contre une tentative du général Cambiels pour leur reprendre MarieGalante échoue le 21 août. 1809. Par crainte de mouvements de la part des noirs, il est créé le 6 janvier 11 tribunaux criminels spéciaux,
222
LA
GUADELOUPE
j u g e a n t en dernier ressort et p r o n o n ç a n t m ê m e la peine de m o r t . Ces tribunaux n'abusèrent pas d e leurs p o u v o i r s ; ils cessèrent leurs fonctions le 1 — Sur la nouvelle
er
juillet.
q u e la Martinique
est attaquée
(février), il est créé des corps d e noirs recrutés p a r m i les e s c l a v e s : leurs propriétaires sont indemnisés. L a Martinique a y a n t s u c c o m b é le 24 février, d e nouvelles mesures presque draconiennes sont ordonnées le 2 mars. Il est créé d e u x bataillons d e guerre d'élite, c o m p o s é s de b l a n c s , qui, le danger ennemi paraissant écarté, furent licenciés le 22 j u i n . L e 30 mars, arrive a u x Saintes une division d e trois p a r le chef de division
vaisseaux c o m m a n d é e
Troude.
D e v a n t les forces supérieures de l ' e n n e m i , elle réappareille p o u r la France le 14 avril et les Saintes capitulent le l e n demain. L a situation financière d e v i e n t fort d é l i c a t e ; les i m p ô t s ne rentrent p a s . Deux
flûtes
v e n a n t d e France arrivent d e v a n t Basse
Terre l e 17 d é c e m b r e et sont détruites le lendemain à l ' A n s e à la B a r q u e . 1810. Les Anglais, c o m m a n d é s
p a r le lieutenant-général
B e c k w i t h , d é b a r q u e n t au Gosier le 27 janvier, o c c u p e n t Pointe à Pitre, et se p o r t e n t presque aussitôt sur BasseT e r r e . Mal d é f e n d u e , le place d o i t se prêter à une c a p i t u lation le 5 février. L a nouvelle en f u t c o n n u e à L o n d r e s le 15 mars. Ernouf, fait prisonnier, est c o n d u i t en A n g l e terre, d ' o ù il n e reviendra q u ' e n 1814. 1810-1814. A u cours de l ' o c c u p a t i o n anglaise, les planteurs réussissent à obtenir
des administrateurs
des mesures
équivalant à des réductions d e dettes d'environ 30 % . 1814, 2-14 décembre. — de la G u a d e l o u p e .
L a France
reprend
possession
1802-1848 Louis
XVIII rétablit
223
le régime de 1763 ; les administra-
tions reprennent leur n o m d ' A n c i e n R é g i m e . U n e Chambre d'Agriculture est reconstituée et se réunit le 22 février 1815 à Basse Terre ; elle d e m a n d e à contrôler les finances. L e gouverneur refuse. 1815.
10 août. — Les Anglais, appelés p a r les planteurs
dès le 3 m a i , s'emparent d e la colonie. 1816. 16 janvier. — que la colonie
L e Conseil Privé maniïeste le désir
soit « maintenue sous le g o u v e r n e m e n t
protecteur d e l'Angleterre » . 1817. Etablissement d e la Poste ; elle est affermée p o u r trois a n s . 1818. 32.437 hectares sont cultivés, d o n t 4.988 en café ; 69 en cacao ; 3.248 en c o t o n ; 6.565 en vivres. L e c o m m e r c e a v e c la France s'élève à 26 millions d e francs, d o n t 18 millions p o u r les importations de la colonie. 1819. Arrivée p o u r la première fois à la Guadeloupe d ' u n navire chargé de glace p o u r la conserve des v i v r e s . T o u tefois la c o n s o m m a t i o n courante d e l a glace n'aura lieu q u ' à partir d e 1860. — Introduction 1822.
de la v a c c i n e contre la petite vérole.
Création d ' u n c o m i t é consultatif des colonies, a y a n t
son siège à Paris. M. de V a u b l a n c , ministre d ' E t a t , est n o m m é d é p u t é de la G u a d e l o u p e . — Après
plusieurs épidémies de fièvre jaune à Basse
Terre, le contre-amiral J a c o b , gouverneur d e la colonie, établit dans les hauteurs de Saint-Claude une installation sanitaire qui a conservé son n o m . 1826, 10 novembre. — Ordonnance créant une B a n q u e , sous forme d e société a n o n y m e présidée p a r le sieur L e g r a n d . 1827. L a sévérité est r e c o m m a n d é e a u x tribunaux c o n t r e ceux qui se livrent à la traite des noirs.
224
LA
GUADELOUPE
1828, 17 août. — F o r m a t i o n d e l'infanterie de marine p o u r la défense des colonies. Assainissement des faubourgs d e Pointe à Pitre et
1830.
création d u canal V a t a b l e , qui fut c o m b l é en 1884 p o u r être remplacé par des é g o u t s . 1834, 6 janvier. — Ouverture d u premier Conseil Colonial de la G u a d e l o u p e . 1835.
L a Guadeloupe c o m p t e 90.154 habitants, d o n t 22.824
libres et 67.330 esclaves. L a mortalité p a r m i les blancs était évaluée à 1 sur 23 3/4 et p o u r les affranchis à 1 sur 3 4 . 1837.
L e créole
Auguste
Bebian
(1789-1839)
ouvre une
école p o u r les enfants de couleur. Il m e u r t le 24 février 1839. — L a colonie c o m p t e 96.322 esclaves d o n t 11.741 dans les villes et 84.581 dans les c a m p a g n e s , 4.000
étaient
artisans o u m a n œ u v r e s , 1.400 marins, 1.100 pêcheurs, 4.900 domestiques et 1.600 ouvriers journaliers loués p a r leurs maîtres. Pointe à Pitre c o m p t a i t 6.696 libres et 5.407 esclaves ; Basse Terre 4.088 libres et 7.536 esclaves. 1843, 8 février. — Un t r e m b l e m e n t d e terre suivi d'incendie cause à Pointe à Pitre la m o r t d e 3.000 personnes. — Q u e l ques mois après (26 août) un incendie détruisait plusieurs quartiers d e Basse Terre. 1845.
L a p o p u l a t i o n d e la G u a d e l o u p e est d e 129.109 indi-
vidus d o n t 41.357 libres et 87.752 esclaves. 1847, 9 octobre. — A b o l i t i o n d e l'esclavage à Saint-Barthélemy. 1848,27 avril. — Promulgation de la loi abolissant l'esclavage.
SIXIÈME PÉRIODE: 1848-1935
A v e c l'abolition de l'esclavage, suivie bientôt de la disparition du régime de l'exclusif, c'est une histoire nouvelle qui commence, sans qu'on puisse déterminer avec certitude comment elle évoluera. Les luttes politiques ont joué jusqu'à ce jour à la Guadeloupe, aussi bien d'ailleurs qu'à la Martinique, un rôle important mais
non
prépondérant;
il
est
même
remarquable
que la représentation antillaise en France, quoiqu'issue en général d'une .population très mélangée, où la race blanche ne domine pas, a presque fait toujours preuve de sagesse et l'on regrette parfois
que nos
Antilles,
la Guadeloupe en particulier, ne soient pas plus peuplées pour apporter un concours encore plus utile au p a y s ; ni leurs origines lointaines, ni leurs aspirations présentes ne sont un obstacle à cette collaboration. La
France
n'a peut-être pas fait une force de ces populations de formation
si diverse
dans un territoire trop restreint,
mais elle leur a donné une âme c o m m u n e et c'est là le propre d'une
ANTILLES
politique prudente et avisée.
15
226
LA
1848.
GUADELOUPE
L a G u a d e l o u p e , qui v e n a i t d'élire députés à l ' A s s e m -
blée
Nationale
Constituante
le
Martiniquais
Perrinon,
commissaire général de la R é p u b l i q u e à F o r t de F r a n c e , Charles Dain et L o u i s y Mathieu, n o m m e d é p u t é suppléant Henri W a l l o n , le futur « Père de la R é p u b l i q u e », professeur à la S o r b o n n e , ancien secrétaire de la Commission p o u r l'abolition de l'esclavage qui avait publié l'année p r é c é dente une Histoire de l'esclavage dans l'antiquité. La
Guadeloupe
avait
élu
Pory-Papy
et
Schœlcher,
mais celui-ci a y a n t opté p o u r la Martinique, avait été remplacé par Mathieu. 1849. Schœlcher est élu député à l'Assemblée Législative, 1850. 27 novembre. — Erection de Basse Terre en é v ê c h é . Il est significatif que l'érection de l ' é v ê c h é ait été reculée jusqu'après l ' a b o l i t i o n de l'esclavage.
On avait
craint,
q u ' e n raison de l'influence qu'il aurait prise sur les noirs, u n é v ê q u e ne constituât une véritable contreforce
avec
laquelle les administrateurs auraient d û c o m p t e r . 1848.
L a G u a d e l o u p e e x p o r t e cette année p o u r 20.453.742
kilogs de sucre, 170.437 francs de café, 23.525 de mélasse, 61.995 de r h u m et tafia, 25.000 francs de bois de c a m p ê c h e . 1860.
La
Guadeloupe
e x p o r t e p o u r 28.800.142 kilogs
de
sucre, 248.718 francs de café, 51.432 de mélasse, 1.172.062 d e r h u m et tafia, et 482.095 de b o i s de c a m p ê c h e . 1864.
La
Guadeloupe
exporte
pour
la première
fois
de
la vanille (372 kilos). 1865.
V e n a n t après un v i o l e n t ouragan en s e p t e m b r e , une
épidémie d e choléra asiatique fait plus de 3.000 victimes ; l'épidémie se prolongea, en s'atténuant, j u s q u ' a u
mois
d'avril 1866. 1867.
L a colonie c o m p t e 151.744 habitants. — Elle possède
6 k m . 300 de voie ferrée.
227
1848-1935
1869, 4 avril. — Inauguration de l'usine d'Arbousier à la Guadeloupe. 1870. — L a colonie exporte p o u r 34.216.468 kilos de sucre, 417.892 de mélasse, 1.423.843 d e r h u m , 93.458 de c a c a o , 68.187 de c o t o n et 698 kilos de vanille. 1871-1873. L a Guadeloupe n o m m e députés à l'Assemblée Nationale Melvil-Bloncourt et Rollin. E n 1873, elle élira Lacascade et Germain Casse. 1874, 11 septembre. — L e privilège de l a Banque d e la Guadeloupe est prorogé pour vingt années. 1877, 10 a o û t . — Rétrocession de Saint-Barthélemy à l a France. L a reprise de possession eut lieu le 16 mars 1878. 1879. L a colonie c o m p t e 174.231
habitants.
1881. Création de la Caisse d ' E p a r g n e de la G u a d e l o u p e . 1883,17 mai. — Création d u lycée Carnot, de la G u a d e l o u p e . — Les cultures vivrières o c c u p e n t 23.149 travailleurs pour 89.174 employés a u x plantations. — L e chiffre des importations atteint 28 millions et celui des exportations 32 millions. 1886. L e café o c c u p e 3.579 hectares répartis entre 718 h a b i t a t i o n s ; 6.000 travailleurs sont employés à cette culture. L a récolte s'élève à 683.000 kilos d'une valeur de un m i l lions de francs. L e cacao o c c u p e 929 hectares répartis entre 171 h a b i t a t i o n s ; 659 travailleurs sont employés à cette culture. La
récolte
s'élève
à 343.000
kilos
d'une
valeur
de
425.000 francs. 1887. L a colonie c o m p t e 182.182 habitants. — Depuis 1883 plus de 5.000 hectares o n t été mis en valeur.
228
LA
GUADELOUPE
— On c o m m e n c e la culture d e l ' a n a n a s ; elle d o n n e dès le d é b u t un bénéfice d e 290.000 francs p o u r une récolte de 382.000 kilos. —
Débuts d u riz;
il d o n n e
200 kgs
d'une
valeur
de 320 francs. 1894.
Un essai d ' i n t r o d u c t i o n d e m a i n - d ' œ u v r e
japonaise
à la Guadeloupe échoue d e v a n t l ' o p p o s i t i o n d u Conseil général de la Colonie. L a colonie e x p o r t e p o u r 3.268.000 kilos d e r h u m s ,
1910.
2.000 d e c a c a o , 2.486.000 d e café et 300.000 de vanille. 1912.
L a colonie c o m p t e 212.430 habitants. Elle
possède
116 écoles publiques. 1917.
Création d u « Cours Michelet », école d'enseignement
secondaire p o u r jeunes
filles.
1928,12 septembre. — L a colonie est dévastée par un c y c l o n e suivi
d ' u n raz-de-marée.
On c o m p t e
1.500 m o r t s
et
15.000 b l e s s é s ; on évalue les pertes à 500 millions. L a Métropole v o t e une s u b v e n t i o n extraordinaire de 100
lions; le
Crédit National et le Crédit Foncier de
a c c o r d e n t à la d e m a n d e d u g o u v e r n e m e n t
trois
mil-
France cents
millions de francs. 1931, 6 janvier. — Incendie à Pointe à P i t r e ; le quartier d u centre est détruit. — 10 juillet. — L o i autorisant la colonie à emprunter 125 millions p o u r son outillage é c o n o m i q u e .
LES GRANDS ANTILLAIS LISTES DES ADMINISTRATEURS DES ANTILLES ET DES REPRÉSENTANTS AU PARLEMENT
LES GRANDS ANTILLAIS
AVRIGNY
(CHARLES-JOSEPH L O E I L L A R D
D').
—
Né
à
la
Martinique en 1760, m o r t à Paris le 17 septembre 1823. N o m m é c o m m i s au Bureau des Colonies, il fut ensuite censeur dramatique sous l ' E m p i r e
et la
Restauration.
Il d o n n a en 1794 à l'Opéra-Comique Supercherie amour
et Négociant
de Boston;
en 1797 Mariage
par de la
veille, suivi de quelques autres pièces. Un vaudeville, La Lettre représenté en 1795 et une tragédie, Jeanne jouée au Théâtre grande
Français
une
notoriété.
On a également de lui un Tableau puissance Poésies
d'Arc,
en 1819, lui valurent
britannique
dans
les
Indes
des Progrès Orientales
de la et
des
publiées en 1812.
B A R B E S ( A R M A N D ) , né à Pointe-à-Pitre le 18 septembre 1809, m o r t à L a H a y e le 20 juin 1870. Sa famille était originaire de F o r t o u l , près Carcassonne. A y a n t hérité en 1830 d'une belle fortune, il consacra son énergie à
la
cause
républicaine;
ami de
Blanqui,
il
partagea les opinions politiques de ce dernier et se livra à plusieurs coups de force. Arrêté en 1834, après un m o u v e m e n t séditieux, il est libéré l'année suivante. E n 1839 il renouvelle sa tentative, et à la tête d'une troupe de 1.200 h o m m e s s'empare de l ' H ô t e l de Ville. Arrêté une
232
LES GRANDS ANTILLAIS
seconde fois, il revendique toutes les responsabilités
et
se v o i t c o n d a m n e r à m o r t . D e v a n t l ' é m o t i o n qui s'empara de la p o p u l a t i o n parisienne, d e v a n t les adjurations adressées par V i c t o r H u g o en des vers célèbres à la Duchesse d'Orléans qui v e n a i t de m e t t r e au m o n d e un prince r o y a l , Louis-Philippe
cède et transforme la peine en une c o n -
d a m n a t i o n aux t r a v a u x forcés à perpétuité. A u lieu d'être d é p o r t é , Barbes sera enfermé à la prison de Nîmes où le trouvera la R é v o l u t i o n de 1848. Élu président d u Club de la R é v o l u t i o n , il est n o m m é gouverneur d u Palais d u Sénat et colonel de la 1 2
Légion.
e
Il soutiendra L e d r u - R o l l i n , et sera c o n d a m n é à n o u v e a u le 2 avril 1849. Grâcié en 1854 par N a p o l é o n I I I , il refuse de profiter de cette mesure et quitte la prison
malgré
lui. Il s'arrête à Paris le t e m p s de défier le g o u v e r n e m e n t afin d'attirer la répression, mais n ' y réussit pas. S'exilant v o l o n t a i r e m e n t , il se rend en B e l g i q u e , puis en E s p a g n e , d ' o ù il se fait expulser, au Portugal et enfin à L a H a y e où il s u c c o m b e r a . P r o u d h o n lui avait décerné le s u r n o m d e « B a y a r d de la D é m o c r a t i e ». B I S S E T T E ( C Y R I L L E - C H A R L E S - A U G U S T E ) , né à F o r t - R o y a l le 9 juillet 1 7 9 5 , m o r t à Paris le 22 janvier 1858. C o n d a m n é en 1824 au bannissement p o u r
colportage
d'écrits séditieux, — il se livrait à une p r o p a g a n d e a b o litionniste — il fut c o n d a m n é sur appel par la Cour de la Martinique
aux
travaux
forcés à perpétuité,
peine
c o m p o r t a n t l ' e x p o s i t i o n et la m a r q u e . La Cour de Cassation lui d o n n a gain de cause le 28 septembre 1826 sur plaidoiries de C h a u v e a u - L a g a r d e et d ' I s a m b e r t . R e v e n u d e v a n t la Cour de la G u a d e l o u p e , il fut c o n d a m n é au bannissement p o u r d i x ans ; il s'installa dès lors à Paris et publia de 1827 à 1833 une série d'articles consacrés à
la
thèse
anti-esclavagiste.
Il
collabora
au
Courrier
Français, au Constitutionnel et ensuite créa la Revue des
233
LES GRANDS ANTILLAIS
Colonies. En 1832 il attira l'attention des Chambres par ses Observations sur les projets de lois coloniales présentées à la Chambre des Députés et fut entendu par les c o m m i s s i o n s ; il en résulta une v i v e polémique entre Schcelcher et lui. Lorsque Schcelcher eut été n o m m é sous-secrétaire d ' E t a t en 1848, il se tint à l'écart, puis posa sa candidature à la Martinique.
Élu, il fut invalidé et remplacé
par
Mazulime. Réélu le 3 juin 1849 député à la Législative il siégea à droite et ne protesta pas contre le Coup d ' É t a t . Il a b a n d o n n a la politique après l'avènement de Napoléon I I I . B E A U H A R N A I S ( A L E X A N D R E D E ) , né en 1760 à la Martinique où son père était gouverneur général, m o r t à Paris le 23 juin 1794. Il v e n a i t d'épouser Joséphine Tascher de la
Pagerie
en 1779, lorsqu'il partit avec R o c h a m b e a u pour la c a m pagne d ' A m é r i q u e ; il manifesta à son retour en France des tendances favorables au Tiers. Député de la noblesse aux États Généraux, il se fit remarquer par son d é v o u e m e n t à la cause p o p u l a i r e : il avait c o m p t é parmi les députés nobles qui rallièrent dans la salle des séances les députés roturiers, il s'associa ensuite à tous les votes de l'aile gauche de l'assemblée. Il présidait la Constituante lorsque Louis X V I s'enfuit et fut arrêté à Varenne. Quand la guerre eût éclaté, il rejoignit l'armée Nord a v e c le grade d'adjudant-général
du
et j o u a un rôle
dans la bataille de Mons. N o m m é chef de division à l'armée d u R h i n après le 10 a o û t , il succéda à Custine le 29 mai 1793 c o m m e général en chef de cette armée. Il ne sut pas empêcher les Prussiens de s'emparer de Mayence;
prenant
prétexte
du
décret d'exclusion des
nobles (21 a o û t 1793), il démissionna et se retira en son d o m a i n e de la Ferté-Beauharnais. Il ne p u t échapper aux critiques auxquelles
donnait
prise la perte de Mayence et fut arrêté, c o n d a m n é par le
234
LES
Tribunal
GRANDS
Révolutionnaire
ANTILLAIS
et
e x é c u t é . Il
laissait
deux
enfants, E u g è n e , né en 1 7 8 1 , d o n t les descendants s o n t perpétués j u s q u ' à nos jours sous le n o m de de
Leuchtenberg
avec
rang
d'altesses
se
Ducs
impériales,
et
H o r t e n s e , née en 1 7 8 3 d o n t la descendance légitime s'est éteinte en la personne d u Prince Impérial tué au Z o u l o u land en 1 8 7 8 . B R I È R E D E L'ISLE (LOUIS-ALEXANDRE-ESPRIT-GASTON), né en 1 8 2 7 au François, m o r t à S a i n t - L e u - T a v e r n y (Seineet-Oise), en 1 8 9 6 . Colonel d u 1
E R
régiment d'infanterie de m a r i n e , il prit
une p a r t glorieuse à la bataille de Bazeilles en 1 8 7 0 , où il fut blessé et fait prisonnier. N o m m é g o u v e r n e u r d u Sénégal en 1 8 7 7 , il y a c c o m p l i t une œ u v r e
d'administra-
teur remarquable. Il conduisit les opérations de 1
re
brigade
au cours de la c a m p a g n e d u T o n k i n et en 1 8 8 4 remplit les f o n c t i o n s de c o m m a n d a n t en chef ; il s'empara de K e p , de Chu et de L a n g s o n ; il dispersa les Pavillons
Noirs
qui assiégeaient T u y e n - Q u a n , mais la défaite de la brigade Négrier à L a n g s o n entraîna sa disgrâce. Il termina sa carrière c o m m e Inspecteur général des troupes de la m a r i n e . CHABERT
DE
LA
CHARRIÈRE
né à Baillif
(Basse-Terre)
(U. S. A.) en
1799.
(HILAIRE-FRANÇOIS),
en 1 7 4 1 , m o r t à
Saybrook
Il était conseiller au Conseil Supérieur de la Guadeloupe lorsqu'il fut élu le 9 d é c e m b r e 1 7 8 9 d é p u t é de la colonie. CLUGNY
( J E A N - É T I E N N E - B E R N A R D D E ) , b a r o n de Nuits,
né à la G u a d e l o u p e le 2 0 n o v e m b r e 1 7 2 9 ,
m o r t à Paris
le 1 8 o c t o b r e 1 7 7 6 . Il était le petit-fils par sa mère de Pierre Gilbert de Voisins, c o m t e de L o h é a c et marquis de C r a p a d o , c o m m a n d a n t de milices à la Guadeloupe de 1 7 1 5 à 1 7 3 3 et
LES
arrière-petit-fils
GRANDS
235
ANTILLAIS
par sa grand'mère
du
gouverneur
du
L i o n . (Lohéac était un fief sis à la Guadeloupe.) Clugny succéda à son père au Parlement de
Dijon
en 1748 et fut n o m m é intendant de Saint-Domingue en 1760. I n t e n d a n t général de la Marine et des en 1770, c'est-à-dire
Colonies
c o a d j u t e u r d u ministre, il
obtint
quatre ans plus tard l'intendance d u Roussillon et celle de B o r d e a u x en 1775. L e 21 mai 1776 il fut appelé au contrôle général des Finances à la place de T u r g o t disgrâcié. Il rapporta les célèbres édits sur la corvée et les jurandes mais suivit la politique de son prédécesseur en créant la Caisse d ' E s c o m p t e . Il inaugura le régime des loteries et recourut à divers expédients que sa m o r t interrompit brusquement. Necker lui succéda. Son parent de Clugny fut n o m m é en 1783 gouverneur de la Guadeloupe. D A I N (CHARLES), né à la Guadeloupe le 29 août 1812, m o r t à B o r d e a u x le 22 février 1871. A v o c a t à Paris, il d e v i n t l'ami de V i c t o r Considérant. Adversaire d u néo-catholicisme de Buchez et de R o u x , il fit c a m p a g n e p o u r l'abolition. L a Guadeloupe l ' e n v o y a siéger en 1848 à l'Assemblée Nationale Constituante ; il v o t a a v e c l'extrême-gauche. N ' a y a n t p o i n t été réélu par la colonie en 1849, il obtint l'année
suivante un siège en Saône-et-Loire.
Rallié
à
l ' E m p i r e , il finit sa carrière c o m m e conseiller à la Cour de la G u a d e l o u p e . D E L G R È S , né à Saint-Pierre en 1772, m o r t en 1802. A i d e de c a m p
en 1799
d u commissaire
civil
a v e c le grade de chef de bataillon, le mulâtre
Baco, Delgrès
j o u a un rôle décisif à la Guadeloupe au cours des luttes qui
opposèrent
Pélage
et
Richepanse.
Il
commandait
en 1801 le fort Saint-Charles l o r s q u ' i l apprend que R i c h e panse se fait l'instrument de la politique de Lacrosse ;
236
LES
GRANDS
ANTILLAIS
il prend les armes au cri de « La Liberté ou la Mort ! » Après des c o m b a t s
multiples
autour d u
Baillif
et
de
Basse Terre, Delgrès est contraint de s'enfermer dans le fort. Le 2 1 mai 1 8 0 2 il a b a n d o n n e la citadelle et se réfugie a v e c le reste de ses troupes au M a t o u b a , sur l'habitation L e P a r c . Une semaine plus t a r d , sous la pression des forces de R i c h e p a n s e , il se retire dans la propriété d ' A n g l e m o n t qu'il
avait fait miner à l ' a v a n c e . L o r s q u ' i l
fut
averti
de l ' a p p r o c h e de ses adversaires, il m i t le feu a u x p o u d r e s , se faisant sauter a v e c quelques fidèles. L a rébellion avait été terminée et l'esclavage, rétabli par le décret d u 2 0 m a i , ne rencontrait plus de résistance sérieuse. DU B O U R D I E U (LOUIS-THOMAS-RENÉ-NAPOLÉON, baron], n é à F o r t - d e - F r a n c e en 1 8 0 4 , m o r t à T o u l o n Il était le
en 1 8 5 7 .
fils d u contre-amiral Bernard D u B o u r d i e u ,
b a r o n de l ' E m p i r e . Il c o m b a t t i t à Navarin en 1 8 2 7 et servit successivem e n t au L e v a n t , a u x Antilles
et en Algérie.
Nommé
contre-amiral en 1 8 4 8 , il c o m m a n d a l'escadre qui b o m barda Salé en 1 8 5 1 . Il a c h e v a sa carrière c o m m e préfet maritime de T o u l o n et entra au Sénat en 1 8 5 6 . D U B U G ( J E A N - B A P T I S T E ) , né en 1 7 1 7 à la Martinique, m o r t en France en 1 7 9 5 . Sa famille, originaire de N o r m a n d i e , s'était
installée
à la Martinique dès les d é b u t s de la colonisation, aussi au milieu d u
xviiie
siècle ses alliances s'étendaient-elles
dans t o u t e l'île. L ' a n n é e de sa naissance avait été m a r quée
par l'incident
d u renvoi
des administrateurs
La
Varenne et R i c o u a r t ; le m o u v e m e n t , qualifié par la Cour d e « républicain », avait été c o n d u i t par son aïeul. Il fit ses études en F r a n c e , à C o n d o m , et revint se marier à la Martinique. E n 1 7 6 1 , lorsque la nouvelle Chambre mi-partie
de
LES
GRANDS
237
ANTILLAIS
C o m m e r c e et d'Agriculture eut à choisir un député auprès du
Roi,
elle se p r o n o n ç a
pour
Jean-Baptiste
Dubuc,
qui fut ainsi le premier représentant de la colonie dans la m é t r o p o l e . Il c o n q u i t la confiance de Choiseul et fut nommé
en 1764
Premier C o m m i s au Bureau des C o l o -
nies ; à ce titre il dirigea p e n d a n t six années toute la politique coloniale de la
France.
Il rédigea en 1765 (voir supra année 1765) les célèbres Instructions au C o m t e d ' E n n e r y , — attribuées souvent à Choiseul l u i - m ê m e , —
dans lesquelles il proclamait, à
l'abri d'une profession de foi exclusive, le droit des c o l o nies à c o m m e r c e r a v e c l'étranger. Ce texte suscita dans le milieu des Économistes une très v i v e polémique ; en dépit de sa m o d é r a t i o n il finit par obtenir l'adhésion de ces derniers. Collaborateur
fidèle
de Choiseul, il le suivit dans sa
disgrâce et se fixa sur la terre de Chissey dépendant de Chanteloup où l'illustre exilé s'était retiré. Il sortit de sa réserve en 1784 p o u r défendre les
attaques
des
mercantilistes
impénitents
contre
l'arrêt
du
30 a o û t 1784, instaurant le système de l'Exclusif Mitigé. Il publia successivement Le Pour et le Contre sur un objet de grande discorde et d'importance : convient-il à l'administration de céder part ou de ne rien céder aux étrangers dans le commerce de la métropole avec ses colonies ? (Londres, 1784, in-12, 48 p . ) . En collaboration
avec
Dubuisson,
secrétaire de la Chambre d'Agriculture de S a i n t - D o m i n g u e , il publia ensuite un ouvrage qui attira l'attention : Lettres critiques et politiques
sur les colonies et le commerce des
villes maritimes de France adressées à G.-T.
Raynal par
M. *** (Genève et Paris, 1785, in-8, 264 p.). La m ê m e année il d o n n a une Réponse au contradicteur de la brochure intitulée « le Pour et le Contre » (Londres, 1785, in-4, 138 p . ) . Arrêté pendant la Terreur en son château de Chissey,
238
LES
GRANDS
ANTILLAIS
il fut emprisonné à Blois le 30 mars 1794, et libéré en t h e r m i d o r après la chute de R o b e s p i e r r e . Il m o u r u t à l'âge de 78 ans. D U G O M M I E R (JACQUES COQUILLE), n é à Basse Terre le 1
e r
a o û t 1738, tué à la bataille de la M o n t a g n e
Noire
le 18 n o v e m b r e 1794. Membre 1
e r
de
l'Assemblée
Coloniale
qui
se
réunit
le
d é c e m b r e 1789 à P e t i t - B o u r g , il participa a u x é v é n e -
m e n t s qui se déroulèrent à la Martinique et à la G u a d e l o u p e j u s q u ' e n 1 7 9 1 , date à laquelle il fut rappelé en F r a n c e . N o m m é Maréchal de C a m p en 1792, il fut affecté à l'armée des Alpes et d ' I t a l i e , et c o m m a n d a les opérations dans le V a r . Il succéda le 16 n o v e m b r e 1793 à Cartaux c o m m e général en chef de l'armée d'Italie a v e c mission d'enlever T o u l o n a u x Anglais, ce qu'il fît les 17-19 d é c e m b r e 1793. L e 10 frimaire an I I D u g o m m i e r rendait c o m p t e à la C o n v e n t i o n d e ses opérations d e v a n t T o u l o n et p o u r la première fois le n o m de B o n a p a r t e était p r o n o n c é p u b l i quement : « Je ne saurais trop louer, disait-il, la b o n n e c o n d u i t e d e tous ceux de nos frères d'armes qui o n t v o u l u se battre ; parmi ceux qui se sont le plus distingués et qui m ' o n t le plus aidé à rallier et pousser en a v a n t , ce sont les c i t o y e n s B u o n a Parte, c o m m a n d a n t d'artillerie, A r e n a et Cervoni, a d j u d a n t s généraux. » B o n a p a r t e lui d o i t ses premiers succès. N o m m é général en chef de l'armée des Pyrénées-Orientales le 16 j a n v i e r 1794, il r e m p o r t a le 1
e r
mai sur les
Espagnols la victoire de B o u l o u , reprit Collioure (29 mai) et Bellegarde (17 s e p t e m b r e ) . Il fut tué alors qu'il s'attaquait a u x positions ennemies situées entre Saint-Llorens de la Muga et la m e r . L a C o n v e n t i o n fit inscrire son n o m au P a n t h é o n .
LES
GRANDS
239
ANTILLAIS
G O B E R T (JACQUES-NICOLAS), né à la Guadeloupe le 1
E R
juin
1 7 6 0 , m o r t à Guaraman en Espagne, le 1 7 juillet 1 8 0 8 . R e ç u à v i n g t ans à l ' E c o l e de Génie, il fit a v e c le grade de capitaine la c a m p a g n e de 1 7 9 2 à l'armée d u Nord et des Ardennes. L e 6 mai 1 7 9 3 , il était n o m m é général de b r i gade en récompense de sa conduite lors de la bataille de Famars. Considéré à t o r t c o m m e n o b l e , il fut destitué à la suite d u
décret
d'épuration d u 2 1 a o û t 1 7 9 3 , mais sur
ses protestations il obtint d'être réintégré avec le rang de chef de bataillon ; il fut e n v o y é alors à
Port-Louis
(Ile de France) p o u r remplir les fonctions de sous-directeur d u Génie. Son action d e v i n t prépondérante lorsqu'il fut appelé à seconder H o c h e , puis Schérer c o m m e chef
d'Etat-Major.
E n dépit de ses services, il fut à n o u v e a u destitué en 1 7 9 7 , ses opinions étant jugées trop tièdes, mais il rentra en activité en 1 7 9 9 . Il participa en 1 8 0 0 - 1 8 0 1 à la c a m p a g n e d'Italie, et fut e n v o y é en 1 8 0 2 à l a Guadeloupe
pour
secourir Richepanse. N o m m é général de division, il
figura
dans les premières p r o m o t i o n s de la Légion
d'honneur.
C'est en Espagne qu'il d o n n a un peu plus tard, en 1 8 0 8 , toute sa mesure. Chargé de dégager D u p o n t , qui s'était i m p r u d e m m e n t a v a n c é parmi les rebelles, il r e m p o r t a un premier
succès
à
Peña-Cerros.
Il
atteignit
Baylen
le
1 2 juillet et libéra D u p o n t de l'étreinte ennemie ; il redressa la situation d u général Léger Belair quatre jours plus tard, mais fut tué le lendemain, 1 7 juillet. N a p o l é o n qui le tenait en grande estime avait consenti à être le parrain de son fils, le futur b a r o n Napoléon G o b e r t . J O S É P H I N E , impératrice des Français, née en 1 7 6 3 a u x Trois Ilets, morte en 1 8 1 4 à la Malmaison. Marie-Rose-Josèphe Tascher de la Pagerie, qui descendait par les femmes d u c o n q u é r a n t des Antilles Pierre Bclain d ' E s n a m b u c (voir Tableau généalogique, p. suiv. ) ,
240
LES
GRANDS
ANTILLAIS
épousa en 1779 le V i c o m t e A l e x a n d r e de Beauharnais. Elle eut de son mariage d e u x enfants qui d e v i n r e n t le Prince E u g è n e , fils adoptif de N a p o l é o n , et la Reine H o r tense. Incarcérée aux Carmes après l ' e x é c u t i o n de son mari, elle fut sauvée de la m o r t par la chute de R o b e s p i e r r e . Elle épousa en 1796 B o n a p a r t e et suivit sa fortune. R é p u d i é e en 1809, elle se retira à la Malmaison où elle mourut. NICOLAS, B E L A I N
François
Pierre
D'ESNAMBUC
1
Adrienne épouse Pierre D y e l de V a u d r o q u e s
Pierre D y e l de V a u d r o q u e s
Jacques D y e l d u P a r q u e t
Adrienne é p . D y e l de Graville Adrienne é p . Desprez Marie Thérèse ép. Boureau de la Chevalerie
I
Françoise ép. Gaspard Tascher de la Pagerie J o s e p h ep. Rose-Claire des Vergers de Sanois Marie-Rose-Josèphe épouse
1° Al. de Beauharnais 2° N a p o l é o n B o n a p a r t e
Eugène
Hortense ép. Louis B o n a p a r t e
é p . A m é l i e d e Bavière Tige de la Maison de Leuchtenberg
Napoléon III
1. Tableau tiré du volume de Margry : Belain d'Esnambuc et Normands aux
Antilles.
les
LES
LACROIX
GRANDS
241
ANTILLAIS
( H E N R I D E ) , né aux A b y m e s
(Grande
Terre,
Guadeloupe) en 1844, m o r t à Fleurier (Suisse) en 1924. Il participa à l ' e x p é d i t i o n campagne
de
de
Rome
en
1867 et fit la
1870.
Après avoir servi au T o n k i n en 1884 il entra à l ' E t a t M a j o r et fut n o m m é c o m m a n d a n t de l ' É c o l e de Guerre, gouverneur militaire de L y o n , puis m e m b r e d u Conseil Supérieur de la Guerre d o n t il assuma en 1907 la v i c e présidence. L A C O U R ( A U G U S T E ) , né à Basse-Terre le 5 d é c e m b r e 1803, m o r t dans la m ê m e ville le 7 mai 1869. Magistrat et historien, a laissé une histoire de la G u a d e l o u p e en quatre gros v o l u m e s parus de 1856 à 1860. L A N R E Z A C ( C H A R L E S - L O U I S - M A R I E ) , né à
Pointe-à-Pitre
en 1852, m o r t à Neuilly en 1925. Professeur d'histoire militaire et de tactique générale à l'École
Supérieure
de guerre, il fut n o m m é
général
de brigade en 1906. A la veille de la déclaration de guerre
t
il entrait au Conseil Supérieur de la Guerre et remplaçait Galliéni au c o m m a n d e m e n t de la V
e
armée.
Il conduisit les opérations d e v a n t Charleroi et dut se replier sous le c h o c de l'armée v o n B u l o w . Joffre d u t le sacrifier à la d e m a n d e des Anglais a v e c lesquels il ne réussissait pas à
s'entendre.
L E D E N T U ( J E A N - F R A N Ç O I S - A U G U S T E ) , né en 1841 à BasseT e r r e , m o r t en 1926. Chirurgien de grande valeur, il fut n o m m é professeur de clinique chirurgicale à l'hôpital Necker et membre de l'Académie
de
médecine.
L É O N A R D , né à Sainte-Rose en 1744, m o r t à Nantes le 26 janvier 1793. Poète qui a excellé surtout dans l'idylle, il fut chargé ANTILLES
16
242
LES
GRANDS
ANTILLAIS
d'affaires d e France à Liège d e 1 7 7 3 à 1783, et sénéchal à P o i n t e - à - P i t r e en 1 7 8 8 . L E T H I È R E (GUILLAUME-GUILLON, dit), né à Sainte-Anne en 1 7 6 0 , m o r t à Paris en 1 8 3 2 . S e c o n d p r i x d e peinture en 1 7 8 4 , il e x p o s a en 1 7 9 5 l a Mort
de Virginie,
conservée a u L o u v r e , et en 1 8 0 1
Brutus condamnant ses fils à mort, toile q u i lui v a l u t la gloire. Il succéda en 1 8 0 7 à S u v é e , directeur d e l ' A c a d é m i e d e France à R o m e . É l u m e m b r e d e l ' A c a d é m i e en 1 8 1 5 , Louis
XVIII
d é s a p p r o u v a s o n élection à cause d e s o n
républicanisme. Il f u t n o m m é professeur à l ' E c o l e d e s B e a u x - A r t s en 1 8 1 9 . L I T T É E ( J A N V I E R ) , né à Saint-Pierre en 1 7 5 3 , m o r t à Paris en 1 8 2 0 . Il f u t le premier h o m m e d e couleur élu d é p u t é d e la Martinique. N o m m é le 1 9 septembre 1 7 9 2 représentant de l a Colonie à la C o n v e n t i o n par les républicains réfugiés à R o s e a u d e la D o m i n i q u e , il prit possession d e son siège le 1 8 s e p t e m b r e 1 7 9 3 ; il intervint le 2 2 m a i 1 7 9 5 dans u n e discussion sur les traites des colonies. Il entra le 4 B r u maire an I V a u x Cinq-Cents. M A T H I E U ( L O U I S Y ) , né à la G u a d e l o u p e le 1 7 juin 1 8 1 7 . Homme
d e couleur,
il était
ouvrier
typographe
à
P o i n t e - à - P i t r e q u a n d il f u t élu p a r ses c o n c i t o y e n s d é p u t é à l'Assemblée n a t i o n a l e , l e 2 2 a o û t 1 8 4 8 , en r e m p l a c e m e n t de V i c t o r Schœlcher q u i avait o p t é p o u r la Martinique. Il siégea à l ' e x t r ê m e - g a u c h e ; l a colonie n e le réélut pas l'année suivante à l ' A s s e m b l é e MAZULIME
législative.
( V I C T O R P E T I T - F R È R E ) , né
à Fort-Royal
en
1 7 8 9 , m o r t à Paris en 1 8 5 4 . Homme
d e couleur, il était n é d e parents
esclaves.
E n 1 8 0 2 il a c c o m p a g n a en France son maître, le chef d'escadron M o t t e t et le suivit plus tard a u x États-Unis.
LES
GRANDS
243
ANTILLAIS
Il finit par entrer au service d'un M. Henrion de P a u t e y d o n t la fille, après avoir épousé le v i c o m t e de Pernety, pair de F r a n c e , le ramena en France. Grâce à cette p r o t e c t i o n , sa propre fille put accomplir de bonnes études et fonder un pensionnat à la Martinique et par son influence assurer en 1848 à Mazulime, d e v e n u rentier à Paris, l'un des sièges de député de la Martinique. MELVIL-BLONCOURT
(SUZANNE, v i c o m t e ) , né à P o i n t e -
à-Pitre en 1823, m o r t à Paris en 1880. Il participa au m o u v e m e n t révolutionnaire de 1848, étant à Paris où il avait fait ses études. Arrêté au m o m e n t d u Coup d ' É t a t d u 2 d é c e m b r e , il s'adonna, lorsqu'il eut recouvré sa liberté, à des études d'ordre colonial. Élu par la Guadeloupe en 1871, il prit le parti de la C o m m u n e et assura la direction des engagements p o u r les bataillons de marche et d'artillerie j u s q u ' a u 15 mai 1871. Lorsque les Versaillais eurent triomphé de l'insurrection, il siégea à l'extrême-gauche
de l'Assemblée.
Poursuivi
en 1874 p o u r complicité a v e c les « c o m m u n a r d s
», il
eut le temps de s'enfuir à Genève et ne revint à Paris qu'après l'amnistie de 1880. MOREAU
DE
(MÉDERIC-LOUIS-ÉLIE),
SAINT-MÉRY
né le 13 janvier 1750 à F o r t - R o y a l , m o r t à Paris le 28 j a n vier 1819. Sa famille, originaire d u P o i t o u , était installée à la Martinique depuis plusieurs générations; son grand-père avait été sénéchal de l'île. Élevé par sa mère, v e u v e peu d'années après son mariage, il témoigna très t ô t de grandes qualités de c œ u r en intervenant c o n d a m n é s à des châtiments
en faveur
d'esclaves
corporels.
V e n u en France à l'âge de dix-neuf ans, il y latin et le droit, ce qui lui permit de devenir
apprit le avocat
au Parlement ; mais il préféra s'installer à Saint-Domingue p l u t ô t que de demeurer dans la Métropole dans une situa-
244
LES
GRANDS
ANTILLAIS
t i o n difficile, et il exerça sa profession au Conseil Supérieur d u Cap. A v i n g t - h u i t ans e n v i r o n , Moreau de Saint-Méry
fut
n o m m é m e m b r e d u Conseil et t r o u v a ainsi l'occasion de fouiller les archives de la c o l o n i e . L'idée germa dans son esprit de collationner les textes de lois en v u e de la r é d a c tion d ' u n Code de Saint-Domingue.
Il s'intéressait égale-
m e n t a u x questions d'archéologie et crut d é c o u v r i r dans une de ses p r o m e n a d e s le t o m b e a u de Christophe C o l o m b ; c e t é v é n e m e n t attira sur lui l ' a t t e n t i o n des historiens. A p p e l é en France par le g o u v e r n e m e n t , il rendit c o m p t e de ses t r a v a u x et offrit à L e Mercier de la R i v i è r e , qui s'apprêtait à publier, sur l'ordre d u maréchal de Castries, un C o d e des lois de S a i n t - D o m i n g u e , le manuscrit qu'il a v a i t c o m p o s é et p o u r l'édition duquel il avait déjà o u v e r t au Cap une souscription p u b l i q u e . L'ancien intendant de la Martinique s'effaça d e v a n t lui e t , grâce à l'appui d u ministre, Moreau publia les Lois et Constitutions des Colonies françaises de l'Amérique Sous le Vent. Moreau de Saint-Méry,
qui
avait l ' â m e
d'un
socio-
l o g u e , désirait a c c o m p a g n e r cet ouvrage 1° d ' u n tableau raisonné des différentes parties de l'administration actuelle de ces colonies ; 2° d ' o b s e r v a t i o n s générales sur le c l i m a t , la p o p u l a t i o n , la culture ; 3° d'une description p h y s i q u e , politique et t o p o g r a p h i q u e . Nous n ' a v o n s que l ' a l b u m de gravures, intitulé Recueil de vues des lieux principaux Saint-Domingue,
de la colonie française de
vues destinées à illustrer l ' o u v r a g e d o n t
il avait tracé un plan si large. Chargé de rédiger le Code des lois de la Martinique, de la G u a d e l o u p e et de Sainte-Lucie, il retourna dans les petites Antilles, et regagna le Cap où il f o n d a la Société des Philadelphes.
R e v e n u à Paris en 1788, il y créa a v e c
Pilâtre d e R o z i e r , le Musée de Paris, établissement consacré à une sorte d'enseignement e n c y c l o p é d i q u e basé sur des
LES
GRANDS
245
ANTILLAIS
conférences hebdomadaires données par les savants les plus illustres de son temps. Les académies de R o u e n , de la R o c h e l l e , d'Orléans, de B a y e u x et d u Cap
Français
l'avaient élu tour à tour. L a journée d u 14 Juillet 1789 le t r o u v a président des électeurs d e Paris, et à ce titre il présida la séanee d u Conseil Municipal, demeura à l'hôtel de ville pendant la nuit d u 14 au 15 et dirigea les événements. Son action fut décisive dans la nomination de La Fayette au c o m m a n d e m e n t général de la Garde Nationale et dans la nomination de Bailly c o m m e maire de Paris. Il lui a p p a r tint également de recevoir Louis XVI
à l ' H ô t e l de Ville
le 17 Juillet et de le haranguer. Le 30 Juillet il remit à Necker la nouvelle cocarde en lui disant
« Ces cocardes
nous sont chères, ce sont les couleurs de la liberté ». L'assemblée des Électeurs de Paris clôtura ses t r a v a u x en v o t a n t la frappe d'une médaille
à l'effigie de son p r é -
sident. Moreau de Saint-Méry
était martiniquais ; ni lui ni
ses concitoyens ne l'oubliaient, et en 1790 il fut n o m m é par les planteurs député de la Colonie. Il fit partie de l'Assemblée Constituante où il j o u a un rôle actif ; en réalité il défendit la cause des Grands Blancs. Peut-être doit-on attribuer à la sympathie qu'il manifestait p o u r le Club Massiac son intervention dans la discussion au sujet
de
l'établissement
d'un
ministère
des
Colonies
(9 avril 1791), d o n t il réussit à écarter la création. Arrêté en 1792 a v e c le d u c de la R o c h e f o u c a u l d , que les révolutionnaires égorgèrent froidement, il s'enfuit gagna l ' A m é r i q u e a v e c sa f e m m e et ses d e u x
et
enfante.
Moreau de Saint-Méry se fixa à N e w - Y o r k , puis à Philadelphie où il ouvrit une maison d'édition ; il y
publia
la Description
et
topographique de Saint-Domingue
un
livre sur la Danse. Les événements lui permirent de rentrer en
France
246
LES
GRANDS
ANTILLAIS
en 1798 ; le ministre de la Marine Bruix le n o m m a h i s t o riographe de la Marine et le chargea de préparer le C o d e Pénal Maritime. Napoléon Bonaparte
en fit en 1801 un R é s i d e n t
à
P a r m e , ville d o n t il prit possession au n o m de la France l'année suivante ; il g o u v e r n a dès lors le d u c h é
comme
Administrateur Général et t r o u v a l ' o c c a s i o n de manifester son a t t a c h e m e n t a u x principes libéraux des é c o n o mistes. Disgracié en 1806, il osa tenir tête à l ' E m p e r e u r : « Sire, je ne v o u s d e m a n d e p o i n t d e récompenser m a p r o b i t é ; j e d e m a n d e seulement qu'elle soit tolérée ; ne craignez rien, cette maladie n'est pas contagieuse ; la r e c o n naissance est l a fleur des t o m b e a u x ». L a misère dans laquelle il fut j e t é l'obligea d ' a c c e p t e r l'aide matérielle de J o s é p h i n e , d o n t il était parent éloigné. Louis
XVIII
s'intéressa
et lui
à son s o r t , lui a c c o r d a une pension
acheta sa b i b l i o t h è q u e conservée a u j o u r d ' h u i au Ministère des Colonies. Il m o u r u t le 28 janvier 1819 à 69 ans. (Voir R o b i q u e t ( P . ) . L e Personnel municipal d e Paris. Paris, J o u a u s t , 1890, p p . 114-117 ; et E l y c o n a (cf. p . 271). P É L A G E ( M A C L O I R E ) , né à Saint-Pierre en 1769, m o r t en E s p a g n e en 1813, après la bataille de Vittoria. Il c o m m e n ç a à j o u e r un rôle lorsque R o c h a m b e a u l ' e u t pris à ses côtés en 1793. Il dirigea pro parte les opérations c o n t r e les Anglais et s'enferma a v e c les troupes patriotes dans
le
Fort
Bourbon,
devenu
Fort
La
Convention,
a u j o u r d ' h u i F o r t Desaix. Il fut suspecté d ' a v o i r n é g o c i é en sous-main a v e c les envahisseurs ; il passa a u x É t a t s Unis a v e c R o c h a m b e a u , et regagna la G u a d e l o u p e en 1799 c o m m e chef de b r i g a d e , aide d e c a m p d u civil
commissaire
Jeannet.
Q u a n d l'arrêt consulaire d u 19 avril 1801 eut destitué les A g e n t s d u Directoire, les mesures prises p a r le capitaine général
Lacrosse
soulevèrent
la
colonie.
Les
insurgés
LES
GRANDS
247
ANTILLAIS
s'emparent de la personne de ce dernier et l'intervention de Pélage seule le sauve d'un Conseil de guerre d o n t la sentence n'était pas douteuse. Tandis que Lacrosse s'enfuit sur un navire étranger à la D o m i n i q u e , le mulâtre Pélage e3t reconnu le 24 o c t o b r e 1801 c o m m e chef
de
g o u v e r n e m e n t . Jouera-t-il les Toussaint Louverture ? — Les Consuls le croient et envoient contre lui une escadre c o m m a n d é e par Richepanse. Mais Pélage fera passer la cause nationale a v a n t la cause des noirs et se rangera aux côtés de
Richepanse
pour
combattre
l'insurrection
de
Delgrès. Renvoyé
en France
comme
accusé, il resta
détenu
quinze mois sans passer en j u g e m e n t . Remis en liberté, il fut réintégré dans ses fonctions. « L a France lui était redevable de la conservation de t o u t le sang qu'il avait e m p ê c h é de verser au m o m e n t de l'arrivée des troupes dans la colonie. » PERRINON
(FRANÇOIS-AUGUSTE),
né
à
Saint-Pierre
28 a o û t 1812, m o r t à l'Isle Saint-Martin
le
(Martinique)
le 21 janvier 1861. Il fit ses études à R o u e n grâce aux soins d'un riche planteur et entra à l ' É c o l e Polytechnique en 1832 puis à l ' É c o l e d'application de Metz. D e v e n u chef de bataillon, il obtint en 1847 la direction de la fonderie de R u e l l e . Mulâtre, il fut n o m m é par le gouvernement
provisoire
de 1848 commissaire général d e la R é p u b l i q u e
chargé
d e promulguer et d'appliquer le décret d'abolition.
La
Guadeloupe le 22 a o û t 1848 l'élit d é p u t é à l'Assemblée Constituante où il d e v i n t rapporteur d u B u d g e t de la Marine. Réélu le 24 juin 1849 député à l'Assemblée L é g i s lative, il v o t a toujours a v e c la gauche ; il d o n n a en 1853 sa démission d'officier p o u r ne pas prêter serment à l ' E m pire. Il a laissé un Aperçu sur l'artillerie de la marine (1838) et des Observations sur les dépenses de la marine (1849).
248
LES
GRANDS
ANTILLAIS
P O R Y P A P Y ( P I E R R E - M A R I E ) , né à Saint-Pierre en 1805, m o r t à Versailles en 1874. Il fit ses études à A i x - e n - P r o v e n c e et s'établit à la Martinique après a v o i r passé ses examens de droit à Paris. H o m m e de couleur, son père avait eu de sensationnels démêlés a v e c Bissette ; mis en v e d e t t e par cette p o l é m i q u e , il fut sans peine n o m m é maire de
Saint-Pierre
et il remplissait ces fonctions quand la colonie l'élut d é p u t é en 1848. Il revint à la Martinique après que la Constituante eût clos ses t r a v a u x et fut à n o u v e a u élu d é p u t é en 1871. Il m o u r u t le 27 janvier 1874 et fut remplacé par Godissard. SAINT-GEORGES
(le chevalier d e ) , né à la
Guadeloupe
en 1745, m o r t à Paris en 1799. Il était le fils naturel de Jean-Nicolas de B o u l o g n e , conseiller d u R o i au Parlement de Metz, et d'une esclave de grande b e a u t é . Il se fit remarquer dès sa jeunesse par son aisance dans tous les exercices corporels : à d i x - s e p t ans il l ' e m p o r t a i t à l'escrime sur tous les maîtres d'armes de Paris. A p r è s être entré a u x Mousquetaires, il o b t i n t n o m m é écuyer de M
m e
de Montesson, épouse
d'être
morgana-
tique d u d u c d'Orléans, et fut reçu à ce titre dans
le
monde
sa
élégant.
Son
talent de violoniste lui v a l u t
r e n o m m é e ; il rivalisa a v e c les virtuoses de l ' é p o q u e et fonda a v e c son maître, Gossec, le c o n c e r t des A m a t e u r s . L a Comédie-Italienne j o u a quelques-uns de ses opérasc o m i q u e s : Ernestine
(1777), la Chasse (1778), la Fille-
Garçon (1787), etc..
; en 1777 on songea à lui p o u r la
direction
de l ' A c a d é m i e
de
Musique,
mais le
préjugé
de couleur le fit écarter. L o n d r e s le fêta a u t a n t que Paris en 1789, et il fut un m o m e n t le héros d u j o u r . Dès que la R é v o l u t i o n eût pris un cours un peu vif, il adhéra aux nouvelles idées et, lorsque la Patrie fut en danger, il l e v a une c o m p a g n i e
LES
GRANDS
249
ANTILLAIS
de chasseurs à cheval qu'il c o m m a n d a contre les Prussiens. Il d é n o n ç a la trahison de Dumouriez sous les ordres duquel il servait, mais ni son zèle ni son courage ne le mirent à l'abri des suspicions. Arrêté, il ne fut sauvé que par la chute de Robespierre ; il m o u r u t à l ' a u b e d u Consulat dans un d é n u e m e n t c o m p l e t . S A I N T E - C L A I R E D E V I L L E (CHARLES), né à Saint-Thomas le 26 février 1814, m o r t à Paris le 10 o c t o b r e 1876. Après être sorti de l ' É c o l e des Mines il a c c o m p l i t a u x Antilles à Ténériffe et aux Iles d u Cap-Vert un long v o y a g e consacré à l'étude des p h é n o m è n e s volcaniques. Il visita ensuite la Guadeloupe a v e c cette p r é o c c u p a t i o n . Suppléant d'Élie de B e a u m o n t au Collège de F r a n c e , il lui succéda en 1847. Il fut élu m e m b r e de l ' A c a d é m i e des Sciences au siège de D u f r é n o y . Charles Sainte-Claire Deville fit élever de
nombreux
observatoires météorologiques en France et en Algérie ; on lui d o i t n o t a m m e n t l'observatoire de Montsouris d o n t il assuma la
direction.
Il s'adonna c o m m e son frère à l'étude de la chimie et d é c o u v r i t le soufre insoluble. On lui est redevable de la théorie d u v o l c a n i s m e encore admise de nos jours. SAINTE-CLAIRE
DEVILLE
(HENRI-ÉTIENNE),
né
à
Saint-Thomas le 11 mars 1818, m o r t à Boulogne-sur-Seine le 1
er
juillet 1881.
Il étudia la chimie
et réalisa plusieurs
découvertes
importantes. Chargé d'organiser en 1844 la Faculté des Sciences de B e s a n ç o n , il y professa la chimie de 1845 à 1851 et y remplit les fonctions de d o y e n . Il o c c u p a à partir de 1859 la chaire de Balard à la S o r b o n n e . Élu m e m b r e de l ' A c a d é m i e
de Sciences en 1861, il
prit rang parmi les plus illustres savants de son t e m p s . Il d é c o u v r i t et m i t en lumière le p h é n o m è n e de la dissociation ; il étudia le premier l'acide azotique
anhydre
250
LES
GRANDS
ANTILLAIS
et réussit en 1 8 5 4 à préparer industriellement le s o d i u m et l ' a l u m i n i u m . Il indiqua aussi des procédés d'utilisation d u pétrole et des huiles lourdes,
etc..
Pasteur, d o n t il était l'ami i n t i m e , p r o n o n ç a son éloge funèbre en des termes demeurés j u s t e m e n t célèbres. SONIS
(GASTON D E ) , né à P o i n t e - à - P i t r e
en 1 8 2 5 ,
mort
à Paris en 1 8 8 7 . Il se fit remarquer au cours des c a m p a g n e s d ' A f r i q u e , sous la Restauration, et d ' I t a l i e , sous le S e c o n d E m p i r e . G a m b e t t a lui confia le 1 7 c o r p s , à l ' a r m é e de la L o i r e . E
Sérieusement blessé à la bataille de L o i g n y , il d u t subir l ' a m p u t a t i o n de la j a m b e . Il termina sa carrière c o m m e Inspecteur général p e r m a n e n t des brigades de cavalerie des 1 0 , 1 1 et 1 6 corps E
E
E
d'armée et m e m b r e a d j o i n t d u Comité de Cavalerie. T H I B A U T D E C H A N V A L L O N , né à Saint-Pierre en 1 7 2 5 , m o r t à P o n t o r s o n en 1 7 8 5 . Il fit des études de physique et d'histoire naturelle à Paris sous la direction de R é a u m u r et de Jussieu et se rendit en 1 7 5 1 à la Martinique a v e c la mission d'en tracer un tableau e x a c t . N o m m é m e m b r e d u Conseil Supérieur de la Colonie, il eut toutes les facilités p o u r a c c o m p l i r sa tâche et il p u b l i a en 1 7 6 3 u n o u v r a g e qui attira sur lui l ' a t t e n t i o n d u p u b l i c : Voyage à la Martinique contenant diverses observations sur la physique,
l'Histoire
naturelle,
l'agriculture, les mœurs et les usages de cette isle. Nommé
intendant
à la m ê m e
é p o q u e , Choiseul
lui
confia la direction administrative de la fameuse e x p é d i t i o n d u K o u r o u , en G u y a n e , sur laquelle on p o u r transformer
cette dernière colonie en u n
d ' a b o n d a n c e destiné
comptait grenier
à consoler les Antilles d e la
perte
d u Canada. A la suite d e l'échec
de cette t e n t a t i v e , C h a n v a l l o n
fut à son retour en F r a n c e , en 1 7 6 7 , accusé de malversation,
LES
GRANDS
251
ANTILLAIS
et son procès défraya la chronique p e n d a n t de longs m o i s . C o n d a m n é à la détention perpétuelle au M o n t Saint-Michel et à la confiscation de ses biens, il finit par faire reconnaître son innocence en 1776. Il reçut alors le titre d e commissaire général des Colonies, mais brisé par le chagrin il se fixa à P o n t o r s o n où il a c h e v a son existence. S o n o u v r a g e lui avait
valu
d'être
nommé
membre
correspondant
de
l ' A c a d é m i e R o y a l e des Sciences. TRAVERSAY
(JEAN-BAPTISTE
PRÉVOST
DE
SANSAC,
marquis d e ) , né à la Martinique, au D i a m a n t , le 23 juillet 1754, m o r t en Russie le 19 mai 1 8 3 1 . Fils d ' u n officier de marine, et appartenant
décédé à Port-au-Prince,
par sa mère à
la famille
d'Abraham
Duquesne et d u g o u v e r n e u r général des Iles d u marquis D u q u e s n e , il
Vent,
entra dès qu'il fut en âge dans
l ' a r m é e navale. C o m m a n d a n t de frégate en 1781, il se distingua au cours de la guerre d ' A m é r i q u e et fut créé en 1787 par Louis XVI
marquis de Traversay.
E n 1791, l'impératrice Catherine I I , qui se préoccupait de moderniser sa marine, lui offrit le d'une
escadre ; il a c c e p t a
commandement
a v e c l'assentiment
du
T r a v e r s a y j o u i t successivement de la faveur de Paul et d ' A l e x a n d r e ,
et en 1807 o n le trouve
Roi. I
e r
commandant
en chef des places de Sébastopol et de Nicolaïef. Il était amiral depuis 1801. N a p o l é o n lui d e m a n d a de reprendre d u service en France, mais il refusa d ' a b a n d o n n e r
u n souverain
qui
l'avait
c o u v e r t de bienfaits. Membre d u Conseil d ' E t a t de Russie en 1810, Traversay d e v i n t l'année suivante Ministre de la Marine, et lorsque Alexandre fut entraîné en Occident par la c a m p a g n e de 1814, il assuma la p r o t e c t i o n de la capitale et de la
famille
impériale. Il m o u r u t
sur ses
terres de Penza. E n son honneur un archipel situé au sud de la Pata
252
LES
GRANDS
ANTILLAIS
gonie reçut le n o m de « Iles d u marquis de T r a v e r s a y ». V A S S O I G N E ( J U L E S - J E A N - P I E R R E R E B O U L D E ) , né en 1 8 1 1 ,
m o r t en 1 8 9 1 . Il prit p a r t à l ' e x p é d i t i o n de B o m a r s u n d en 1 8 5 4 , et à la c a m p a g n e d e Chine où il se distingua lors de la prise des forts de P e ï - H o . Il se b a t t i t également en Cochinchine et s'illustra en 1 8 7 0 à Bazeilles c o m m e c o m m a n d a n t d e la division d'infanterie de marine, rattachée à l'armée Châlons.
de
LISTE DES ADMINISTRATEURS
SAINT-CHRISTOPHE CAPITAINES
GÉNÉRAUX
I. — Période de la Compagnie des Iles d'Amérique. 6135.
Pierre B E L A I N D ' E S N A M B U C .
1 6 3 8 . Commandeur DE POINCY. 1 6 4 4 . P h . D E LONGVILLIERS (n'a pas gouverné). 1 6 4 5 . Patrocle D E T H O I S Y (n'a pas gouverné). 1 6 4 7 . Commandeur DE POINCY.
I I . — Période des Seigneurs Propriétaires. 1 6 5 1 . C o m m a n d e u r DE P O I N C Y . 1 6 6 0 . C o m m a n d e u r DE SALES.
I I I . — Période de la Compagnie des Indes Occidentales. 1663.
D E T R A C Y et D E L A B A R R E , son l i e u t e n a n t .
1667.
D E B A A S et D E L A B A R R E , son l i e u t e n a n t .
Le gouvernement général est transféré en 1 6 6 9 à la Martinique. GOUVERNEURS 1669.
PARTICULIERS
D E SAINT-LAURENT.
IV. — Période du Gouvernement Royal. 1674.
D E SAINT-LAURENT.
1689-1702.
Comte DE GUITAUD.
254
LISTE
DES
LA
GOUVERNEURS
MARTINIQUE
G O U V E R N E U R S PARTICULIERS
sous
l'autoritè
du
Capitaine
Général de
Saint-Christophe
I. — Période de la Compagnie des Iles d'Amérique. 1635.
DUPONT.
1637.
D u P A R Q U E T , gouverneur-sénéchal.
II
— Période des Seigneurs Propriétaires.
1651.
Du
1658.
M
PARQUET.
M E
1658. D u
DU PARQUET.
DYEL
1662.
sous la tutelle d'Adrien
PARQUET D'ESNAMBUC, DE VAUDROQUES.
D u P A R Q U E T D ' E S N A M B U C , sous la tutelle du Sieur DE
CLERMONT.
I I I . — Période de la Compagnie des Indes Occidentales. 1664.
D E CLODORÉ.
1667.
D E SAINTE-MARTHE. GOUVERNEURS
1669.
GÉNÉRAUX
D E B A A S et D E S A I N T E - M A R T H E , gouverneur culier.
IV.
— Période du Gouvernement Royal. INTENDANTS
GOUVERNEURS GENERAUX
1674. Marquis 1677.
DE BAAS.
Comte DE B L É N A C
1677.
PATOULET.
1682.
BÉGON.
parti-
DES
LISTE
255
GOUVERNEURS
1685.
DUMAITZ DE GOIMPY.
1696.
ROBERT.
1710.
D E VAUCRESSON.
1 6 9 0 . Marquis D ' E R A G N Y . D E GUITAUT (p.
1691.
t.).
1 6 9 2 . Comte DE BLÉNAC. 1697.
M
1700.
D E GUITAUD
D'AMBLIMONT.
LE
(p.
i.).
1 7 0 1 . Comte DESNOTZ. DE
1701.
GUITAUD
(p. i . ) .
1 7 0 3 . Comte D E MACHAULT. 1709.
C
1711.
R . B . DE PHÉLIPEAUX.
D E G A B A R E T (p. i . ) .
t e
1 7 1 4 . Marquis Le
DUQUESNE.
Gouvernement de Saint-Domingue
est détaché de Fort-
et constitue un gouvernement
Royal 1716.
M
1717.
DE
D E LA V A R E N N E .
l s
général.
1716.
DE
RICOUART.
1718.
DE
SILVACANE.
1718.
BÉNARD.
1723.
BLONDEL DE JOUVAN-
1728.
P A N N I É D'ORGEVILLE.
FEUQUIÈRES.
COURT. 1728.
M
1738.
D E LA C R O I X
1745.
D E CAYLUS.
1746.
DE
1750.
D E BOMPAR.
1750.
HURSON.
1757.
DE
GIVRY.
1759.
LE
MERCIER
1757.
L S
M
DE
CHAMPIGNY.
DE BEAUHARNAIS.
1S
RANCHE.
D E LA
RIVIÈRE. 1761.
LE
VASSOR
DE
LA
TOUCHE.
1 7 6 2 - 1 7 6 3 . Occupation 1 7 6 3 . Marquis DE LA M O T H E FÉNELON.
1763.
Anglaise. LE
MERCIER
RIVIÈRE.
D E LA
256
LISTE
1765.
Comte
1771.
DE
DES GOUVERNEURS
D'ENNERY.
1765.
Présid. D E P E Y N I E R .
1772.
Présid.
1777.
D E MONTDENOIX.
1780.
Président
VALIÈRES.
1772.
Comte
d e NOZIÈRES.
1776.
Comte
D'ARGOUT.
1777.
Marquis D E B O U I L L E .
D E TASCHER.
DE
PEY-
N I E R , P E T I T D E VIÉVIGNE.
1782.
V i c o m t e DE D A M A S D E M A R I L L A C , lieut. d u Gouv
1787.
Président
Général.
r
D E FOUL-
QUIER, F O U L O N D ' E COTIER.
1789.
C
TE
DE V I O M É N I L (p. i.).
1790.
Vicomte DE DAMAS DE
1791.
D E BÉHAGUE avec Eu DE MONTDENOIX, DE LACOSTE,
MARILLAC.
L I N G E R et M A G N Y T O T , commissaires civils.
V. 1793.
— Période Contemporaine.
Donatien DE VIMEUR, comte DE ROCHAMBEAU.
1794-1802
( 1 7 9 4 . R o b e r t PRESCOTT, Sir J o h n V A U G H A M .
Occupation ( 1 7 9 5 . R . Shore M I L N E S . Anglaise 1802.
(
1796. W i l l i a m
KEPPEL.
Amiral D E VILLARET JOYEUSE.
1809-1814 Occupation Anglaise
1810.
Major Général J o h n BRODIRCK, M a j o r Général C h . W A L E S .
1814. C o m t e DE V A U G I R A U D . 1815-1816 : Occupation
Anglaise 1816-1935
1816.
C o m t e D E V A U G I R A U D . — 1818. C o m t e D O N Z E L O T . —
1826.
C o m t e D E B O U I L L E . — 1829. Contre-Amiral B a r o n
LISTE
257
DES GOUVERNEURS
SAULCES DE FREYCINET. — 1 8 3 0 . Contre-Amiral
DE
Du-
POTET. — 1 8 3 4 . Vice-Amiral H A L G A N . — 1 8 3 6 . ContreAmiral Baron D E M A C K A U . — 1 8 3 8 . Contre-Amiral C o m t e DE M O G E S . — 1 8 4 0 . C o n t r e - A m i r a l E. D U V A L D ' A I L L Y . Contre-Amiral
1844.
A.
MATHIEU.
—
—
1 8 4 8 . PERRINON,
Commissaire Général de la R é p u b l i q u e . — 1 8 4 8 . ContreAmiral A . - J . RRUAT. — 1 8 5 1 . Contre-Amiral V A I L L A N T . — 1 8 5 3 . Contre-Amiral Comte DE G U E Y D O N . — 1 8 5 6 . Général C o m t e D E FITTE D E SOUCY. — 1 8 5 9 . DE
Contre-Amiral
M A U S S I O N DE C A N D É . — 1 8 6 4 . D E L A P E L I N . —
Maître
BERTIER, 1869.
d e Requêtes
au Conseil
1867.
d'État.
C O U T U R I E R . — 1 8 7 0 . M E N C H E DE L O I G N E . —
—
1871.
Contre-Amiral CLOUÉ. — 1 8 7 4 . M I C H A U X . — 1 8 7 5 . ContreAmiral
L E NORMANT
D E KERGRIST.
Amiral M. G R A S S E T . —
— 1 8 7 7 . Contre-
1 8 7 9 . Ch. L A C O U T U R E . —
1879·
A U B E , Capitaine de Vaisseau. — 1 8 8 1 . A L L È G R E , ancien d é p u t é . — 1 8 8 7 . CORRIDON. — 1 8 8 7 . A . G R O D E T . — 1 8 8 8
M O R E A U , Commissaire MERLIN,
H.
Général d e la Marine. — 1 8 8 9 ,
ancien préfet.
— 1 8 8 9 . Germain
CASSE,
ancien député. — 1 8 9 1 . MORACCIIINI. — 1 8 9 2 . A . M A T H I VET.
—
1893.
MORACCHINI. —
1895.
Noël
PARDON.
—
1898.
G A B R I É . — 1 9 0 0 . M. M E R L I N . — 1 9 0 1 . M O U T T E T . —
1904.
BONHOURE. —
—
1 9 1 4 . POULET.
CHAND. — DE
1 9 0 7 . LÉPREUX. —
1 9 0 8 . FOUREAU.
1 9 1 5 . Camille G U Y .
—
1919. MAR-
1 9 2 0 . GOURBEIL. — 1 9 2 2 . RICHARD. —
GUISE.
1935.
—
—
1928.
GERBINIS.
—
1926.
1 9 3 4 . ALFASSA.
—
FOUSSIER.
LA
GUADELOUPE
GOUVERNEURS PARTICULIERS
I. — Période de la Compagnie des Iles d'Amérique. 1635.
D E L ' O L I V E et D U P L E S S I S .
1640.
AUBERT.
1 6 4 3 . H O U E L , gouverneur et sénéchal. ANTILLES
17
258
LISTE
II. 1651.
DES
GOUVERNEURS
— Période des Seigneurs Propriétaires.
HOUEL.
III. — Période de la Compagnie des Indes Occidentales. 1664.
Du
COUDRAY
1664.
Du
LION.
(p.
i.).
1 6 6 9 . Le Gouvernement de la· Guadeloupe est réuni à celui de la Martinique jusqu'en 1677. IV.
—
Période du Gouvernement Royal.
1677.
HlNSELIN.
1696.
AUGER.
1704.
R . C L O C H E D E LA M A L M A I S O N .
1 7 1 7 . Marquis D E F E U Q U I È R E S . 1 7 1 9 . Comte DE MOYENCOURT. 1727.
Du
1735.
D E LARNAGE.
POYET.
1 7 3 7 . Gabriel D E C L I E U . 1 7 5 3 . Chevalier D E M I R A B E A U . 1757.
NADAU
DU TREIL.
1759. Colonel KRUMPT. Occupation Anglaise. 1 7 6 1 . Campbell D A L R Y M P L E 1 7 6 3 . Chevalier d e B O U R L A M A Q U E . 1 7 6 4 . B a r o n C O P L E Y et Président D E P E Y N I E R , i n t e n d a n t . 1 7 6 5 . Comte DE NOLIVOS. 1 7 6 6 . B a r o n D E MOISSAC, i n t e n d a n t . 1 7 6 9 . Marquis D E BOUILLÉ et E u D E M O N T D E N O I X , c o m m i s saire-ordonnateur. 1 7 7 0 . Comte DE VALIÈRE. 1 7 7 1 . Chevalier D E D I O N . 1 7 7 2 . C o m t e D E NOZIÈRES. 1 7 7 5 . C o m t e D ' A R B A U D et Président DE P E Y N I E R , i n t e n d a n t ,
LISTE
259
DES GOUVERNEURS
1 7 8 0 . E u D E M O N T D E N O I X , commissaire général o r d o n n a teur. 1782.
Vicomte
de
DAMAS
et
Président
D E FOULQUIER,
intendant. 1783.
B E A U M É D E LA S A U L A I S (p. i.).
1784.
Baron DE CLUGNY.
1786.
C o m t e D E M I C O U D ( p . i.).
1786.
B a r o n D E C L U G N Y et
FOULON D'ECOTIER, intendant.
V . — Période Révolutionnaire. 1789.
B a r o n D E C L U G N Y et P E T I T D E V I É V I G N E , c o m m i s s a i r e
1792.
V i c o m t e D ' A R R O T S ( p . i.) et M I N U T , i n t e n d a n t .
général
ordonnateur.
1 7 9 3 . Capitaine d e Frégate LACROSSE. 1793.
Général COLLOT.
1794.
HUGUES,
GOYRAND
et
LEBAS,
commissaires
civils.
1 7 9 7 . V i c t o r H U G U E S , agent particulier d u Directoire. 1 7 9 8 . D E S F O U R N E A U X , agent particulier d u Directoire. 1799.
P A R I S , B A N A N et R O C H E R U P E Z , m e m b r e s d u G o u v e r -
1799.
J E A N N E T , B A C O et L A V A U X , agents particuliers.
n e m e n t Provisoire. et B R E S S E A U , agents des
Consuls.
1800.
JEANNET, BACO
1800.
J E A N N E T et B R E S S E A U , agents des Consuls.
1801.
LACROSSE,
1801.
P E L A G E , F R A S A N S , D A N O I S et C O R N E I L L E ,
capitaine-général.
d u Gouvernement
VI.
membres
Provisoire.
— Période Contemporaine.
1 8 0 2 . Général RICHEPANSE et LESCALIER, préfet c o l o n i a l . 1 8 0 2 . LACROSSE, capitaine général. 1 8 0 3 . E R N O U F , capitaine général. 1 8 0 5 . Général K E R V E R S E A U , préfet colonial.
260
LISTE
DES GOUVERNEURS
1 8 1 0 . Sir George B E C K W I T H . 1 8 1 0 . Sir H u g h L y l e CARMICHAEL.
Occupation
1 8 1 0 . Sir COCHRANE.
Anglaise
( 1 8 1 3 . John SHINNER. 1814.
B O Y E R D E P E Y R E L E A U (p. i.).
1 8 1 4 . Contre-Amiral C o m t e D E L I N O I S . 1 8 1 5 . D E GUILLERMY, intendant. 1 8 1 5 - 1 8 1 6 . Occupation anglaise. 1816-1935 1816.
—
et
FOULON D'ECOTIER, intendant.
1 8 2 3 . Contre-Amiral
C. D E L A R D E N O Y
JACOB. — 1 8 2 6 . Maréchal d e
Camp
Baron
VATABLE.
— 1 8 2 6 . Contre-Amiral
Baron
A N G O T DES ROTOURS. — 1 8 3 0 . Maréchal d e C a m p B a r o n V A T A B L E . — 1 8 3 1 . Contre-Amiral A r n o u s D E S S A U L C A Y . — 1 8 3 7 . J . - B . J U B E L I N , Commissaire Général d e la Marine. —
1 8 4 1 . Contre-Amiral
M.
LAYRLE.
capitaine
J. GOURBEYRE.
—1845.
d e vaisseau. — 1 8 4 8 . G A T I N E ,
Commissaire Général d e la R é p u b l i q u e . — 1 8 4 8 . Colonel F I É R O N . — 1 8 5 1 . A U B R Y - B A I L L E U L , capitaine d e vaisseau. — 1 8 5 4 . P . A . B O N F I L S , capitaine d e vaisseau. — 1 8 5 6 . G U I L L E T . — 1 8 5 7 . T O U C H A R T , capitaine d e vaisseau. — 1 8 5 9 . N. BONTEMPS. — 1 8 6 0 . F R É B A U L T , colonel d ' A r t i l lerie d e la Marine. — 1 8 6 2 . Général F R É B A U L T . — 1 8 6 4 . L . DE LORMEL. — —
1880.
1 8 6 8 . DESMAZES. —
LAUGIER. —
1 8 8 6 . A.
1 8 7 0 . COUTURIER.
L E BOUCHER. — 1 8 9 1 .
L . N O U E T . — 1 8 9 4 . Noël PARDON. — 1 8 9 5 . COUZINET. 1895.
MORACCHINI. —
ROGNON. — LOCHE. —
1901.
MERLIN. —
1 9 0 3 . A . D E LA L O Y È R E . —
1 9 0 8 . BALLOT. —
PEUVERGNE. —
1909.
1 9 1 3 . MERWART. —
Henry
—
1 9 0 2 . Charles 1 9 0 5 . L . BOULCOR. —
1911.
1 9 1 7 . GOURBEIL.
—
1920.
DUPRAT. — 1 9 2 2 . BERTHIER. — 1 9 2 4 . BEURNIER. —
1926.
GERBINIS. — 1 9 2 8 . TELLIER. — 1 9 3 0 . CHOTEAU.
1932.
BOUGE.
—
LISTE DES REPRÉSENTANTS ET
DE LA MARTINIQUE DE LA GUADELOUPE
MARTINIQUE 1876-1932
De 1 8 7 6 à nos jours, les sénateurs ont été : MICHAUX (1876), ALLÈGRE (1888), KNIGHT (1900) et LÉMERY (1924).
Les députés ont été : en 1876 GODISSART, en 1 8 8 1 , 1 8 8 5 et 1 8 8 9 , HURARD et DEPROGE ; en 1 8 9 4 , DEPROCHE et César LAINE ; en 1 8 9 8 , DUQUESNAY et Denis GUIBERT ; en 1 9 0 2 , CLÉMENT
1
; en 1 9 0 6 , DUQUESNAY et SÉVÈRE ; en 1 9 1 0 ,
LAGROSILLÈRE
et
SÉVÈRE ; en
1914-1915,
LÉMERY
et
LAGROSILLIÈRE ; en 1 9 1 9 , LAGROSILLÈRE et CLERC ; en 1924, SÉVÈRE ET DELMONT ; en 1 9 2 8 , DELMONT et FROSSARD ; en 1 9 3 2 , DELMONT et LAGROSILLÈRE.
GUADELOUPE
1876-1932
De 1 8 7 6 à nos jours les sénateurs ont été : le vicomte de LA JAILLE (1876) ; Alexandre ISAAC 1 8 8 5 ) , CICÉRON (1900)
et H. BÉRENGER (1912). Les députés sont été : en 1 8 7 6 , LACASCADE ; en 1 8 8 1 et 1 8 8 5 , GERVILLE-RÉACHE et SARLAT ;
1. Une seule circonscription, par suite de l'anéantissement de S-Pierre, lors de l'éruption de la Montagne Pelée. t
262
LISTE
DES GOUVERNEURS
en
1889,
Marie-Emile
en
1893,
Aug.
ISAAC
RÉAUX et
et
GERVILLE-RÉACHE ;
GERVILLE-RÉACHE ;
en
G E R V I L L E - R É A C H E et L É G I T I M U S ; en 1902 et 1 9 0 6 ,
1898, GER-
V I L L E - R É A C H E et G É R A U L T - R I C H A R D ; en 1 9 1 0 , L É G I T I M U S et
GÉRAULT-RICHARD ;
GÉRAULT-RICHARD, et B O I S N E U F ;
en
en
1912,
CANDACE,
d é c é d é ; en 1914 1924,
CANDACE
et
en 1928 et 1 9 3 2 C A N D A C E et G R A Ë V E .
et
remplaçant
1919,
Jean
CANDACE
FRANÇOIS ;
SOURCES
I. — S O U R C E S
MANUSCRITES
A. — Relations et Récits de voyage. (Classification
chronologique)
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ARCHIVES
DU MINISTÈRE
DES AFFAIRES
ETRANGÈRES.
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Mémoires et D o c u m e n t s . A m é r i q u e , t o m e s 3, 4, 5, 6, 7 ; F r a n c e , t o m e s 1990, 1 9 9 1 , 1993, 2008, 2017 ; E s p a g n e , tomes 80, 82. A R C H I V E S D U M I N I S T È R E DES C O L O N I E S . — F o n d s v e r s é a u x
A r c h i v e s Nationales : Série A, t o m e s 1-28, Registres renfermant les A c t e s d u Conseil Souverain o u Supérieur, les édits et arrêts d e 1713 à 1756. Série B, t o m e s 1-213, registres c o n t e n a n t les ordres d u R o i a u x administrateurs des Isles d u V e n t . Série C ' A , t o m e s 1-43, registres c o n t e n a n t la c o r r e s p o n d a n c e des administrateurs d e la G u a d e l o u p e (1635-1789). Série C B 1-5, registres c o n t e n a n t des d o c u m e n t s se r a p p o r t a n t principalement à l'histoire militaire d e la Guadeloupe. 7
Série C A , t o m e s 1-92. Registres c o n t e n a n t la c o r r e s p o n d a n c e d e s administrateurs d e s Iles d u V e n t et d e la Martinique, en particulier (1635-1789). Série C B , Cartons 1-16, c o n t e n a n t des pièces diverses, des mémoires et des projets d e lettres. — Cartons 1 7 - 2 2 , c o n t e n a n t des statistiques d u c o m m e r c e des Antilles avec la Métropole et des tableaux des p o p u l a t i o n s , p o u r le dernier tiers d u xviii e siècle. Série F A 19. P r o c è s - v e r b a u x des séances d e la C o m p a gnie des Iles. 8
8
2
Strie F . 287. Registres c o n t e n a n t des copies d e pièces par Moreau d e Saint-Méry, et quelques actes originaux. Elle c o n t i e n t en particulier les Mémoires des Chambres d ' A g r i c u l t u r e d e 1761 à 1764, n 1 24-126 ; u n e série d e Z
0s
265
SOURCES
pièces dite Code de la Guadeloupe, n 221-235 ; une série analogue dite Code de la Martinique, n 244-260. o s
o s
F o n d s conservé au Ministère : Registres Martinique 268-278, contenant la correspond a n c e des administrateurs de la Martinique (1790-1794) ; 2 7 9 - 2 8 1 , m ê m e matière, (1802-1810). Registres Guadeloupe 425-435, contenant la correspond a n c e des administrateurs de la Guadeloupe (1789-1799). Registres Isles d u V e n t , 3, 7, 9, 13, contenant les ordres adressés a u x administrateurs.
II. — S O U R C E S
IMPRIMÉES
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1
Barbes, 229. B a r i n g t o n , 188, 194. Beauharnais, 93, 2 3 1 , 255. Bebian, 224. B é g o n , 132, 254. B é h a g u e , 158, 1 6 0 - 1 6 2 , 1 6 4 , 256. Belgique, 98, 114, 115. Bellegarde, 164, 166. B é n a r d , 6 6 , 68, 1 3 7 , 255. Binkes, 5 9 . Bissette, 1 0 2 , 167, 1 7 1 , 172, 2 3 2 , 248. Blanchetière-Bellevue, 156. Blénac, 59, 6 0 , 131-133, 1 4 1 , 2 5 4 , 255. Blondel, 131. Blondel de J o u v a n c o u r t , 1 3 7 , 255. Boisseret, 44, 183-185. B o m p a r , 139, 2 5 5 . Bonavie, 46. Bordeaux, 4 8 , 4 9 , 59, 7 3 , 135. B o u d e t , 212. Bouillé,87,150,199,256,258.
1. Les noms de lieux sont en italique.
INDEX
DES
Bourlamaque, 76, 77, 258. Bréda, 32. Bresseau, 216. Brésil, 58. Brière de l'Isle, 232. Brissot, 151. Broglie, 96, 105. B y r o n , 87.
NOMS
198,
Cadix, 17. Cahuzac, 2 1 , 263. Cambiels, 221. Canada, 19, 64, 75, 76, 126, 144, 189, 190. Carbet, 171. Case Navire, 141, 173. Casse (Germain), 227. Castries, 8 1 , 82, 8 7 , 151. Cauchy, 49. Caylus, 138, 139, 255. Cérillac, 43, 4 5 , 1 8 5 . Cévennes, 6 2 .
—
Champigny, 72, 7 3 , 1 3 7 , 1 3 8 , 185, 255. Chavagnac, 134. Chevalier, 113. Choiseul, 37, 57, 7 8 , 1 4 9 , 1 9 0 , 237. Chrétien, 209. Clairefontaine, 160, 165, 205. Clieu, 66, 136, 187, 193, 194, 258. Clodoré, 120, 124, 125, 254. Clugny, 155, 197, 200-202, 232, 259. Codrington, 191. Collot, 197, 202, 204, 205, 206, 259.
DE
275
PERSONNES
C o n d o r c e t , 151. Coppier, 4 2 . Coquille, 201. Coster, 214. Corio, 92, 156. Coullet, 66. Crassous de Médeuil, 92, 9 3 , 160, 162. Cromwell, 43. Chine, 109, 112. Curt, 92, 163, 164. Dain, 226, 235. Dalrymple, 195, 258. D a m a s , 8 7 , 151, 158, 256, 259. Danemark, 38, 7 1 , 72. Dantzig, 62. Delessert, 98. Delgrès, 18, 215, 218, 235, 247. De L o o v e r , 186. Desfourneaux, 208, 213, 259. Deshayes, 195, 198. Diamant, 131. Dominique, 18, 23, 30, 7 1 , 7 3 , 76, 203, 212. D o n d o i r e , 160. Dubois, 3 1 . D u Bourdieu, 236. D u b u c (Famille), 56. D u b u c , 92, 153, 157, 1 6 2 165, 168, 170, 203. D u b u c (J.-B.), 75, 85, 148, 234. D u b u c du Ferret, 85, 149. D u g o m m i e r , 93, 155, 156, 158, 160, D u Joncheray, 131. 18.
276
INDEX
DES
NOMS
D u L i o n , 126, 185, 235, 258. D u m a i t z de G o i m p y , 2 5 5 . Dunkerque, 44, 64. D u P a r q u e t , 26, 2 7 , 4 2 , 1 2 1 , 254. Duplessis, 2 3 , 4 0 , 257. D u P o y e t , 7 0 , 188, 192, 2 5 8 . D u p u c h , 92, 2 0 2 , 203. Duquesne, 251, 255. D u t e r t r e , 24. E n n e r y , 37, 8 1 , 8 6 , 148, 150, 1 5 2 , 199, 237, 2 5 6 . E r a g n y , 190, 2 5 5 . E r n o u f , 2 1 7 , 220, 2 2 1 , 259. E s n a m b u c , 1 5 , 1 9 , 2 0 , 2 2 , 23, 3 2 , 4 1 , 120, 1 2 1 , 123, 240. Esnots ou D e s n o t s , 133, 2 5 5 . Espagne, 57, 58, 67, 7 0 , 7 1 , 76. Estaing, 87. Estrées, 19, 59, 68.
F a b i e n , 173. F é n e l o n , 77, 142, 143, 146, 255. Feuquières (Isaac d e ) , 19, 43. Feuquières, 66, 67, 68, 137, 1 9 1 , 255, 258. Flessingue, 24, 39. Fort Desaix, 148, 1 6 9 - 1 7 1 . Foulon d'Écotier, 152, 157, 2 5 6 , 259. F o u l q u i e r , 8 1 , 86, 87, 1 5 1 , 152, 200, 256, 259. F o u q u e t , 39, 43. François, 145, 154. Franklin, 190.
DE
PERSONNES
G a b a r e t , 1 9 1 , 255. Galbert, 201. Galifet, 33. G e m o s a t , 63. Gente, 28. Givry, 255. Gobert, 239. G o d e t , 160. G o n d r e c o u r t , 160. Gottemborg, 88. G o y r a n d , 94, 168, 169, 2 1 1 , 2 1 2 , 259. Grande Anse, 167, 1 7 1 . Grasse, 8 7 . Grégoire XVI, 104. Grégoire, 90. Grenade, 4 2 , 6 2 , 6 3 , 7 1 , 7 5 , 1 2 2 , 123, 1 4 1 , 185, 2 1 2 . Grenville, 9 5 , 97. Grey, 166, 211. Guichen, 87. Guillermin, 203. Guinée, 7 3 . Guitaud, 32, 33, 253, 255. Guyane (Cayenne), 24, 3 2 , 6 2 , 63, 97, 126, 250. Hambourg, 19, 6 2 . H é d o u i n , 183. Hinselin, 190, 258. Hollande, 38, 6 5 , 114, 1 1 5 . H o û e l , 26, 180, 185, 257, 258. Hugues. V o i r V i c t o r H u g u e s . H u r a u l t de Vueil, 4 2 . Hurson, 255. Inde, 1 0 9 - 1 1 1 . Indochine, 116.
ET
DE
Irlande, 71. Italie, 52. J a c o b , 223. Jamaïque, 38, 83. J e r v i s , 206, 2 1 1 . Joséphine, 239. Kœnigsberg, 62. K r u m p t , 195, 258. L a b a t , 69, 191. L a Barre, 125, 253. Lacalle, 132. L a c a s c a d e , 227. L a Charrière (Chabert d e ) , 91, 201,234 L a c o s t e , 256. L a c o u r , 241. L a c r o i x , 239. Lacrosse, 8 2 , 162, 163, 203, 204, 208, 209, 214, 215, 218, 220, 259. L a Luzerne, 155. L a Fayolle, 181. L a Malmaison, 191, 258. L a m b e r t , 182. Lanrezac, 241. Larnage, 7 2 , 192, 193, 258. L a R o c h e f o u c a u l d , 151. La Rochelle, 49, 52. La Salinière, 160. Lavalette (Le P . ) , 140. L a Vallée, 18, 23. La Vallière, 150. La Varenne, 66, 135, 191, 236, 255. L a v e a u x , 213, 214, 259. L a Vernade, 16, 27, 179.
LIEUX
277
L a w , 69. Lebas, 211, 259. Le C o m t e , 42. Le D e n t u , 239. Le Mercier de la Rivière, 55, 66, 71, 8 1 , 86, 105, 112, 143, 144, 146-149, 151, 255. Léonard, 241. Lesseignes, 209. Lethière, 242. L e u m o n t , 25, 26, 181. Levassor, 165, 255. Lille, 65. L i o n , 92, 203. Littée, 92, 162, 242. Liverpool, 189. Longueville, 72, 73. Longvilliers, 16, 25, 253. Lorraine, 62. Lyon, 104. Machault, 65, 133, 134, 255. Madagascar, 73, 116. Madère, 49. Malartic, 199. M a n o n c o u r t , 132. Marès, 142. M arie-Galante, 60, 62, 123, 181, 183, 185, 191, 203, 205, 211, 218, 221. Marivet, 183. Marseille, 50, 52, 63, 140, 155. Martin Le Fol, 61. Massiac, 201, 245. Mathieu, 226, 242. Maurepas, 7 1 . Maurile de Saint-Michel, 43.
278
INDEX
DES
NOMS
Mazulime, 172, 242. M e l v i l - B l o n c o u r t , 227, 243. Mexique, 58, 175. Mirabeau, 53, 5 5 , 194, 258. M o n k t o n , 141. Montserrat, 18, 20, 2 2 , 30, 3 2 , 46, 125, 184, 220. M o o r e , 139. Moreau de Saint-Méry, 8 1 , 92, 93, 94, 1 5 1 , 152, 156, 159, 243. M o y e n c o u r t , 191, 258. Nadal de Saintrac, 201. N a d a u d u Treil, 195, 258. Nantes, 49, 5 2 , 59, 62. N e c k e r , 8 8 , 152. Nelson, 2 2 1 . Nièves, 33, 134, 184. Nimègue, 60. Nîmes, 7, 65. Noailly, 42. N o l i v o s , 201, 258. Norvège, 19. Nozières, 85, 150, 199, 256, 258. O l i v e , 2 3 , 24, 40, 8 1 , 131, 1 7 8 , 1 7 9 , 257. Orgeville, 255. Orléans, 65. Pacifique de Provins (Le P.), 42. Passy, 9 1 , 102. P a t o u l e t , 128, 254. Pautrizel, 2 0 1 , 205. P é c o u l , 172.
DE
PERSONNES
Pélage, 208, 2 1 1 , 214, 228, 235, 246, 259. Pélardy, 213. Perrinon, 226, 247. Petit, 8 5 , 86. Petit de V i é v i g n e , 149, 259. Peynier, 37, 77, 198, 256, 258. P h é l y p e a u x , 66, 134, 255. P o i n c y , 16, 23-30, 4 1 , 184, 253. P o n t c h a r t r a i n , 134. Portugal, 58, 70. P o r y - P a p y , 172, 175, 248. Provence, 50. Prusse, 57, 94, 104.
215,
256, 200, 135, 179-
226,
Quesnay, 55, 78, 142, 146. R a n c h é , 255. R a y n a l , 3 9 , 58. Renaudot, 41. Réunion ou Bourbon, 98, 1 0 5 , 109, 113, 115, 1 1 6 , 137. R e w b e l l , 90. Richelieu, 19, 20, 2 1 , 40. Richepanse, 211, 215-218, 239, 247, 259. R i c o u a r t , 66, 135, 236, 255. Riga, 6 2 . Rivière Salée, 137. R o b e r t , 63, 255. R o c h , 168. Rochambeau, 82, 83, 145, 161,165-166,168,202,204.
ET
DE LIEUX
Rochefort, 43. R o d n e y , 87, 141. R o i s s e y , 15, 19, 20. Rollin, 227. Rouen, 4 9 , 63, 65, 121. Russie, 19, 57, 95, 105, 115. R u s t e , 156. R u y t e r , 128. Ryswick, 3 3 , 53, 64. Saba, 46, 87. Sabouilly, 179, 180. Saint-Barthélemy, 2 1 , 28, 3 0 3 2 , 60, 62,73, 88, 114, 186, 1 9 1 , 224. Saint-Cyran, 162. Saint-Domingue, 3 2 , 37, 62, 6 4 , 134, 144, 243, 244. Saint-Eustache, 2 8 , 3 2 , 46, 88, 125, 2 1 2 . Saint-Georges, 246. Saint-Laurent, 32, 131, 253. Saint-Martin, 2 1 , 28, 3 1 , 3 2 , 46, 60, 6 2 , 7 3 , 8 7 , 212, 220, 221. S a i n t - R é m y , 12. Saint-Thomas, 137. Saint-Vincent, 3 0 , 6 0 , 66, 69, 7 1 , 7 3 , 75, 212. Sainte-Anne, 132, 137. Sainte-Claire Deville, 249. Sainte-Croix, 2 5 , 26, 29-33, 60-63, 72. Sainte-Lucie, 4 2 , 68, 69, 7 1 75, 8 2 , 8 3 , 8 7 , 88, 9 1 , 9 2 , 94, 98, 122, 123, 141, 147, 149, 150, 160, 163, 168, 169, 203, 206, 212, 218, 220.
Sainte-Marthe, 254. Saintes (Les), 87. Sales, 16, 3 2 . Sartines, 8 1 , 86. Saumur, 65. Savoie, 50. Scarborough, 82. Schoelcher, 96, 104,
279
109,
111, 115, 172, 173, 226. Sénégal, 50, 76, 100. Sète, 65. Silvacane, 136, 255. Stanley, 102. Tobago, 44, 59, 60, 73, 76, 8 2 , 87, 91-93, 98, 125, 150, 160, 218. Talleyrand, 213. Tascher, 85, 86, 150, 199. T h i b a u t de Chanvallon, 140, 250. Thibierge, 169. T h o i s y , 25-27, 29, 181-183, 253. T o c q u e v i l l e , 96, 104. Tortue, 24, 62. Tours, 65, T r a c y , 45, 124, 185, 253. Traversay, 251. Trézel, 121. Trinité (Ile de fa), 131-133, 154, 158, 159, 166. Trinité, 97, 145. Utrecht, 33, 53, 66. Vaivres, 8 1 , 86. Vallières, 256, 258.
280
INDEX
DES
NOMS
Valménières (Cacqueray d e ) , 42. Vassoigne, 252. V a u b l a n c , 223. Vauclin, 169. V a u c r e s s o n , 66. V a u d r o q u e s , 124. V a u g i r a u d , 170. Vera Cruz, 114. Victor Hugues, 83, 168, 2 0 7 - 2 0 9 , 211-213, 259.
DE
PERSONNES
V i l l a r e t - J o y e u s e , 97, 169, 170. Villeneuve, 221. V i o m é n i l , 1 5 2 , 154, 256. V o l n y , 171. W a l l o n , 226. Whitehall, 92, 164. W i l b e r f o r c e , 96. W i l l o u g b y , 3 2 , 125, 1 8 5 .
TABLE DES MATIÈRES
Introduction
7
SAINT-CHRISTOPHE
Sommaire
15
Chronologie
17
MARTINIQUE,
GUADELOUPE
ET
DÉPENDANCES
Première Période (1635-1674)
37
D e u x i è m e Période (1674-1763)
51
Troisième Période (1763-1802)
77
Quatrième Période (1802-1848)
95
Cinquième Période (1848-1935)
107
MARTINIQUE.
Première Période (1635-1674)
119
D e u x i è m e Période (1674-1763)
129
Troisième Période (1763-1802)
142
Quatrième Période (1802-1848)
165
Cinquième Période (1848-1935)
172
282
TABLE
DES MATIERES
GUADELOUPE.
Première Période (1635-1674) Deuxième Période (1674-1763) Troisième Période (1763-1794) Quatrième Période (1794-1802) Cinquième Période (1802-1848) Sixième Période (1848-1935)
177 187 196 207 216 225
LES GRANDS ANTILLAIS
231
LISTE DES ADMINISTRATEURS
253
REPRÉSENTANTS DE LA MARTINIQUE ET DE LA GUADELOUPE ( 1 8 7 6 - 1 9 3 5 )
261
SOURCES
263
BIBLIOGRAPHIE
268
INDEX
274
TABLE DES MATIÈRES
ABBEVILLE.
...
IMPRIMERIE F. PAILLART.
8-11-35
281
•
PRIX : 25 francs