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Conseil général de la
Martinique
(23) editur, nisi Senatus consultis, ionibus principum
atque cons-
confirmatum.
s corps une fois autorisés, ne peuvent a c ir des b i e n s , par achat ni par dons , ni er leurs immeubles, sans l'autorisation du s Législatif. Quant à l'administration de iens , elle est réglée par des lois particuqu'il serait trop long de rapporter ici. T. 558. « Les chemins, routes et rues à charge de la nation , les fleuves et rivières vigables ou flottables , les rivages , lais et ais de la m e r , les ports , les havres , les des, et généralement toutes les portions
t
territoire national qui ne sont pas susibles d'une propriété p r i v é e , sont c o n
érées comme des dépendances du domaine blic. »
ns sa première rédaction, cet article semattribuer au domaine de l'Etat, tous les ns publics, rues et places publiques. O n va qu'il n'y avait dans ce domaine, que utes, rues et places entretenues aux d é iu trésor public ; que les chemins v i c i étaient des propriétés des c o m m u n e s , à mmunication desquelles ils servaient, et aient aussi à leur charge ; que les rues et aces étaient dans la même cathégorie , té celles qui servaient de grandes routes; elle était la jurisprudence du Conseil d ' E -
C A M P A G N E S DES
A
FRANCAIS
SAINT-DOMINGUE.
C A M P A G N E S DES FRANÇAIS A
S A I N T - D O M I N G U E ,
Réfutation
des reproches
Général
faits
au
ROCHAMBEAU
Capitaine;
Par Ph.-Albert de L A T T R E , Propriétaire, ex-Liquidateur des dépenses de la guerre à Saint-Domingue.
LES geant
faits s'altèrent et changent de face en chan de témoins. D'après
l'entreprise; mais combien
l'événement
on juge
de fois l'événement a
couronné l'imprudence et confondu l'habileté ! O n est quelquefois plus heureux que sage , quelquefois plus sage qu'heureux. Dans l'une et dans l'autre fortune , il est très-malaisé d'apprécier les hommes. BÉLISAIRE,
A
Ch.
X.
P A R I S ,
L O C A R D , Libraire, quai des Augiistins, N°. 31. CHEZ
ARTHUS-BERTRAND, AMAND
même quai, № . 35.
K Œ N I G , même quai, et à Strasbourg.
AN
xiii-1805.
TABLE
I.
DES
MATIÈRES.
INTRODUCTION.
P a g e 1.
I I . D e l'utilité de S a i n t - D o m i n g u e pour l a France.
5.
I I I . L ' A n g l e t e r r e considérée sous l e rapport territorial
e t c o m m e r c i a l ; sa politique
e t les crimes du cabinet S a i n t - J a m e s .
IV.
18.
D e s troubles révolutionnaires q u i o n t eu lieu entre les b l a n c s , p r é c é d e m m e n t à l a révolte des esclaves e t des s a n g - m é l é s
V.
VI.
VII.
libres.
37.
D e l a révolte des esclaves
47.
D e la révolte des mulâtres libres
55.
D e la conquête d e S a i n t - D o m i n g u e p a r l e capitaine-général
VIII.
LECLERC.
A v é n e m e n t du général
72.
RocHAMBEAU
au c o m m a n d e m e n t e n chef.
85.
I X . Reproches faits au capitaine-général R o chambeau. 93,
ij
X . Réfutation des reproches faits au capi taine-général Rochambeau.
Pag.
96.
X I . Résumé des campagnes des Français, jusqu'à frimaire an X H .
161.
X I I . De la conquête, ou du rétablissement de l'ordre à Saint-Domingue.
166.
X I I I . De la restauration. De la servitude du
sol. Les colons sont sans qualité pour exercer les droits politiques.
181.
X I V . Des moyens de rendre le commerce national en France. XV.
185.
D u sort avenir des cultivateurs de toute couleur à S a i n t - D o m i n g u e .
XVI.
190.
D e l'état politique des s a n g - m ê l é s anciens affranchis , e t de leurs descendans.
XVII. XVIII.
Dispositions générales.
201. 206.
D e s pertes qu'on a éprouvées à S a i n t Domingue
en n è g r e s , a n i m a u x , bâti—
m e n s , e t c . , e t des fonds nécessaires pour rétablir la culture.
XIX.
D e la dette arriérée des
211.
colons
envers
l e c o m m e r c e métropolitain.
XX.
D e l a cession faite à la France par l ' E s -
232.
pagne de l a partie de Saint-Domingue ( les c i n q h u i t i è m e de l'île ) , dites espa gnole.
XXI.
De
Pag.
la bande
homicide
des amis des
n o i r s , organisée par le cabinet de S a i n t J a m e s . Les quakers, les philanthropes
les nigrophiles
et
, forment une seule secte
en trois sections anti-sociales. La
culture
des denrées coloniales à
Cuba , colonie espagnole , est une suite de la politique assassine du cabinet d e S a i n t - J a m e s contre la France ; elle est un obstacle au rétablissement d e S a i n t Domiugue.
Fin
de
la
Table.
iij
E R R A T A .
Page. Ligne. 7 —
Consommatrices, lisez consommateurs.
6.
22 — 24. 32 —
Cabartiers , lisez cabaretiers. Prolonger , lisez prolongeant.
2.
39 — 22. 62 —
Noir que brun , lisez noire que brune.
1.
Et de leur oter, lisez et auxquels il falloit oter.
68 — 25.
Le plus féroce , lisez les plus féroces.
80 — 27. L'impossible, lisez l'impossibilité. 97 — 20. A la Tortue dont cette île en est peu éloignée , lisez à l'île de la Tortue qui en est peu éloi gnée. 120 — 10.
Concourrait, lisez concourrerait.
153—
12.
Blasphémoient, lisez blasphémèrent.
164—
a3.
Gens d'armes, lisez gendarmes.
166 —
2.
173 —
3.
L'avenue , lisez la venue. Qu'à produites, lisez produites par.
17G — 26.
Debeireau , lisez Desbureau.
133 —
Il n'y a pas un colon de Saint-Domingue qui ne
6.
connoisse , lisez tous les colons de Saint-Do mingue connoissent. 187 — 21. 210 —
5.
Et ses , lisez et de ses, Bompardapolis , lisez Bombardopolis.
352 — 19,
A plaine voile , lisez à plaines voiles.
224 —
Ni efficassemeut , lisez ni ne les a efficassement,
14.
201 — 25. 243 —
23.
Savanack, lisez Savannah. Apte , lisez aptes.
244 —
6.
Que le caractère naturel indolent, lisez que leur
255 —
4.
En 1790 , lisez en 1793.
1.
Et se fit déclarer, lisez et se fut déclaré.
caractère naturellement indolent. 259 284 —
15.
Lasseront-elle, lisez lasseront-elles,
284 — 23. Française, lisez françaises,
I N T R O D U C T I O N . DEPUIS un a n , l'opinion publique n'est pas encore fixée sur les causes de la dernière catastrophe de Saint-Domingue , tant il est vrai que les rapports portent l'empreinte d e considérations o u d ' a f f e c t i o n s particulières. Accuser un grand fouctionuaire, est t o u jours une tâche pénible. Plusieurs personnes en ont eu le courage , en annonçant des faits graves qui ne sont pas prouvés, ou q u i , se trouvant dégagés des circonstances qui les ont
amenés
idée
, flétrissent
l'âme
et laissent u n e
défavorable : les rétablir avec i m p a r
tialité dans cette
c i r c o n s t a n c e , est é g a l e m e n t
p é n i b l e ; mais loin de moi de vouloir nuire à personne ! Il n'y a pas de doute que l'évacuation d a Saint- Domingue ne soit une grande calamité pour la France ; mais à bien apprécier les. rapports et le ton avec lequel ils se d é b i t e n t , on est autorisé à croire que tout le monde a t o r t , et que chacun redoute l'œil scrutateur du gouvernement. O n ne peut se dissimuler que le gouverne ment a é t é trompé dans ses espérances. SaintDomingue a été livrée au pillage : on y a
A
Introduction,
ij
méconnu les droits sacrés de la propriété (1). L'intérêt de l'état n'a pas été plus respecté ; la cupidité a entraîné beaucoup de personnes à s'écarter de leurs devoirs , ce qui a entravé tous les services , fait naître la confusion , perdre la confiance, obligé à payer fort cher les approvisionnemens, et amené la désorga nisation générale. Si les personnes qui ont parlé et écrit s'é taient, avant de prononcer affirmativement, éclairées des causes qui ont amené les mal heurs de Saint-Domingue
si elles eussent
surtout apprécié les scntimens des différentes castes; si, se dégageant des causes qui peuvent leur être personnelles ou de leurs affections intimes, elles eussent pesé avec justice le degré de confiance qu'on pouvait avoir dans les blancs,
les noirs et les jaunes
; si elles
eussent considéré que l'Angleterre veut l'in( 1 ) O n disait auх habitans q u ' o n spoliait , et qui s'en plaignaient : л C r o y e z - v o u s que nous »
sommes
v e n u s ici p o u r chrarger d'air. »
Le
capitaine-général Rochambeau
ménagé
q u e les
habitans.
Une
n'a
pas été
personne
qui
d e v a i t son a v a n c e m e n t , fut e m p r u n t e r en son
plus lui nom
cinquante m i l l e f r a n c s ; l e g é n é r a l en c h e f a y a n t é t é p r é v e n u , défendit compté
de Tien
prêter;
vingt-cinq mille francs.
mais on avait déjà
iij
Introduction. dépendance
générale
de toutes
les
colonies,
et qu'elle desire surtout que les nègres et les mulâtres règnent à Saint-Domingue; que c'est sur l'apathie cruautés
de ces hommes
et sur
leurs
envers les français, qu'elle fonde
son existance politique ; elles
eussent mis
plus de vérité dans la manifestation de leur opinion. Il y a de la déloyauté à prévenir le public contre le capitaine-général R o c h a m b e a u , lorsqu'étant dans les fers de l'implacable ennemi de la France, il ne peut se défendre. L e s vexations inouies que le ministère anglais lui fait
éprouver,
font l'éloge de c e général et
prouvent qu'il a fait son devoir à S a i n t - D o m i n g u e . Il a témoigné
aux anglais
q u e devait inspirer à un h o m m e
le mépris d'honneur
leur atroce politique. L e capitaine-général L e c l e r c , en d e s c e n dant au tombeau, couvert de gloire, a emporté avec lui la douce satisfaction d'avoir
fait
beaucoup d'ingrats. L e capitaine-général R o chambeau a aussi pour lui d'en avoir fait b e a u coup. L e s reproches qu'on fait au capitaine-général R o c h a m b e a u , se trouvant liés aux causes des malheurs de Saint-Domingue , il est indis pensable , avant de prouver que ces reproches sont controuvés , de démontrer :
Introduction.
iv
1°. L'utilité qu'était cette colonie pour la France ; 2 ° . Les motifs qui ont déterminé le cabinet de Saint-James, a faire révolter les nègres et les mulâtres, n'ayant pu faire adopter qu'à quelques habitués des villes, de se séparer de la mère-patrie ; 3 ° . Tracer sommairement ce qui s'est passé à Saint-Domingue depuis le c o m m e n c e m e n t de la révolution française ; 4 ° . Prouver enfin, que les mulâtres
sont
de caractère félon ; qu'ils voulaient envahir l'autorité souveraine , se déclarer
indépen-
d a n s ; qu'ils ont fait révolter les n è g r e s , et qu'ils ont concurremment égorgé les colons , incendié et dévasté leurs propriétés. On
terminera
cet
ouvrage, par
quelques
réflexions sur le régime qu'on croit qui c o n vient à Saint-Domingue , considéré
d'après
l'état politique des colons , des cultivateurs et des
anciens
affranchis
- sangmêlé
,
dans
cette colonie , et sur les fonds nécessaires à sa restauration complète en huit années ( 1 ) . ( 1 ) O n o b t i e n d r a dès la s e c o n d e a n n é e un tiers d e la c o n s o m m a t i o n d e la sième,
m é t r o p o l e , m o i t i é la t r o i
et l a t o t a l i t é l a q u a t r i è m e .
La
cinquième
a n n é e on p o u r r a l i v r e r à l ' é t r a n g e r p o u r 60 m i l l i o n s d e d e n r é e s . ( V o y e z le t a b l e a u n ° .
5.)
CAMPAGNES DES FRANÇAIS A
S A I N T - D O M I N G U E .
De l'utilité de St.-Domingue EN
pour la F r a n c e .
1 7 7 5 , époque o ù , par la possession de
S a i n t - D o m i n g u e , le c o m m e r c e de la France était le plus florissant des deux mondes , les économistes assuraient qu'il était de l'intérêt d e l'état, de renoncer au commerce exclusif d e ses colonies. Ils basaient leurs argumens sur ce que les nations qui n'avaient pas d e colonies , ne payaient pas plus chères
les
denrées coloniales, que celles qui en étaient souveraines. Cette opinion était aussi para d o x e , que de soutenir que dans un empire o ù la population est de trente millions d'indivi dus , la pauvreté est préférable à la richesse. L e s économistes étaient aussi instruits sur les véritables intérêts de leur patrie, que ce d é puté à l'Assemblée nationale, qui s'écria avec une bonhomie peu ordinaire : « H é ! messieurs, » pourquoi tant discuter sur ce qui se passe » à Saint-Domingue : c'est un morceau
de
» terre entouré d'eau. Si nous perdons nos A 3
(6)
» colonies, Orléans nous fournira du sucre. » Les économistes ne virent point que leur système était destructif de la prospérité p u blique , et qu'ils suivaient celui que l ' A n g l e terre tentait de faire adopter aux nations côtières du continent, afin d'être seule puis sance commerçante ; les économistes ne virent point qu'il était de la politique d e l'Angleterre de livrer les denrées coloniales à des prix modérés aux nations qui n'en possèdent point, pour les éloigner de l'idée d'avoir des colonies en souveraineté, et les détourner délever une marine. Le système des économistes devait amener en France une révolution désastreuse; la France devait être victime de leurs princi pes. Saint-Domingue a été livrée aux flammes; les colons ont été massacrés. Les
économistes
disaient
qu'on
pouvait
compenser les avantages que procurait SaintDomingue , en augmentant la culture et les manufactures
nationales : d'une
part,
on
eût augmenté les dépenses en matières p r e mières , sans avoir l'assurance pour le d é bouché des objets manufacturés; d'autre part, on
n'ignore
pas
que
dans tous
les pays
les demandes ne sont jamais qu'en rapport des consommations réelles , et qu'on ne crée pas des consommateurs à volonté.
( 7 ) Par la possession de S a i n t - D o m i n g u e , la France déjouait tous les projets de l'Angle terre , et
rendait le c o m m e r c e des anglais
difficile dans l ' I n d e , par le manque de numé raire. L'habitude que contractaient les nations consommatrices des denrées coloniales, en les recevant à des prix modérés, se constituait en un besoin de première nécessité, et les rendaient tributaires de la France. L e besoin est formé ; il sera de tous les temps. Il n'est d o n c plus question de prouver que les c o l o nies à sucre sont d'utilité première. Il s'agit d e savoir si la France a intérêt à la conserva t i o n de sa souveraineté sur Saint-Domingue , e t au maintien
du commerce
exclusif
avec
cette colonie. Saint-Domingue est située au-delà du T r o pique , et par les 19 degrés de latitude, entre les îles de Cuba,
de Jamaica
et
Porto-Rico.
O n la découvrit en décembre 1 4 9 2 , et on la nomma Hispaniola, fut c o n q u i s e , queya
île espagnole. Lorsqu'elle
on l'appelait Ayty
et
Quis-
( G r a n d e - T e r r e ) . Cette île a environ
160 lieues de long , 40 dans sa plus grande largeur, 25 aux endroits les plus étroits, et 45o de tour, y compris les ances. La variété des climats est surprenante ; au nord et au s u d , dans les plaines et dans les villes, la c h a -
( 8 ) leur serait insupportable sans les brises de terre et de mer. Dans les montagnes, le c l i mat y est tempéré , et extrêmement froid en hiver dans les doubles montagnes,
quoiqu'il
n'y gêle point. La terre est prodigue de fruits délicieux , qui suffisaient
à l'existance
des
naturels du pays, et suffisent aux nègres et aux mulâtres. Elle est ouverte à la culture de toutes les productions dont l'Europe a contracté l'ha bitude, etrenferme dans sou sein des mines d'or abondantes. L e site en est superbe : « Des arbres » toujours verts, des fleurs qui naissent à côté » des fleurs mourantes , un air parfumé , des » odeurs vives et suaves qui s'exhalent
de
» tous les végétaux d'une terre aromatique, » allument le feu de la volupté dans les êtres » qui respirent la v i e ; enfin, des campagnes » chéries du c i e l , où tout invite de jouir en » paix, d'une vie qui semblait ne devoir s'a» bréger et se perdre que dans l'usage et » l'excès des plaisirs (1). » C'est dans cette île fortunée, que des hommes pervers ont porté le fer et la flamme, et détruit la plus belle et la plus
florissante
des colonies du nouveau
inonde. Des h o m m e s qu'on appelait esclaves
y
étaient heureux ; les anglais en ont fait des bêtes féroces. (1)
Histoire
Ph. des deux Indes.
(9) Les productions de Saint-Domingue f o r maient annuellement un revenu de deux cent millions, argent de la colonie, ou 133 millions 333 mille 333 livres 6 sous 8 deniers tournois, que les négocians de France obtenaient en échange
des nègres et des cargaisons qu'ils
importaient dans la c o l o n i e , par 500 cents navires. (Vide le tableau n ° . 3 ) . Il a été c o n s taté par le comité-colonial de l'assemblée na tionale, que le commerce de France a intro duit en 1788, à S a i n t - D o m i n g u e , pour 5 6 millions de livres tournois en c o m m e s t i b l e s , boissons , marchandises œuvrées, e t c . , à quoi il convient d'ajouter la valeur de 28 mille nègres, dont n'a pas fait mention ce c o m i t é ; lesquels au prix d'achat, à raison de 5 o o francs l ' u n , font 14 millions. — Vingt millions pour les frais de mise-dehors et de retour des 500 navires et leur dépérissement. L e total de la dépense du c o m m e r c e métropolitain, pour les ventes qu'il faisait dans la c o l o n i e , n e montait donc qu'à 90 millions tournois. L e bénéfice du c o m m e r c e , sur la vente de ses cargaisons, était de 43 millions 333 mille 333 livres 6 s. 8 den. tournois. Les denrées acquisesàSaint-DomingUe, par le c o m m e r c e
français, pour 200 millions
argent de la colonie, étaient vendues en France
(10) en gros, au m ê m e taux, liv. tournois, qu'elles avaient été achetées argent de la colonie ; c'est-à-dire que le café qui s'achetait à SaintDomingue vingt sous, argent de la c o l o n i e , se vendait en France vingt sous tournois. L e bénéfice du c o m m e r c e sur les retours, était donc de
66 millions 666
mille 666 livres
13 s. 4 den. tournois. L e bénéfice total des négocians - armateurs
de F r a n c e ,
était net
annuellement de n o millions de livres tour nois (1). Les droits que devait la
denrée,
s'acquittaient par deux millions de piastres à 5 liv. 5 s. l'une , faisant 10,550,000 liv. tour nois , que le c o m m e r c e métropolitain
trou
vait dans ses bénéfices, en sus de celui déjà désigné (2). Il convient
encore d'ajouter à
( 1 ) O n dira p e u t - ê t r e que
l e s frais d e r e t o u r d e s
n a v i r e s n e sont p a s a s s e z é l e v é s ; e n l e s
augmen
tant d'un q u a r t , c o n t r e t o u t e r a i s o n , l e b é n é f i c e d u c o m m e r c e se Il
n'y
a
ennemis
trouvera
q u e des
toujours
économistes
d e la F r a n c e ,
très-considérable. influencés
par
les
qui pourraient c h e r c h e r à
d i m i n u e r l ' i m p o r t a n c e d o n t était p o u r e l l e s o n c o m m e r c e exclusif avec cette colonie. L a des v i l l e s m a n u f a c t u r i è r e s
magnificence
et m a r i t i m e s ,
démontre
cette v é r i t é j u s q u ' à l ' é v i d e n c e . (2) Ce faisoient les
numéraire provenait les
du
commerce
que
colons avec leurs voisins l i m i t r o p h e s ,
espagnols.
(11) cette enumeration de bénéfices, quatre m i l lions, annuellement,decréances hypothéquées, pour solde des ventes des cargaisons, et pour lesquelles les capitaines obtenaient des
sen-
tences par corps. Les capitaines recevaient à c h a q u e retour qu'ils faisaient dans la c o l o n i e , un à compte sur leurs créances. D'après les reaux
recensemens
faits dans les b u
des douanes à Saint-Domingue, par
ordre de M. de Marbois, M. de Proisy,
intendant, et d e
qui a été chargé de l'interim,
les
récoltes de 1788 et 1789 paraissent être d'un quart de moins de ce qu'il vient d'être spéci fié. Cette différence provenait de ce que les banques
de
sucre
pesaient
généralement
2000 livres, et q u ' e l l e s n'étaient déclarées ques pour 1500 l i v . ; de
ce que les capitaines,
les officiers des navires , et les matelots, e m barquaient par-dessus
bord,
c'est-à-dire
en
f r a u d e , leurs pacotilles, et souvent partie des cargaisons. L a
même
fraude
s'opérait
en
France à l'arrivée des navires : on chargeait de bord à bord des navires étrangers. Quant aux
denrées
qu'on descendait à t e r r e ,
parvenait facilement
on
dans les d o u a n e s , au
m o y e n d'une gratification, à faire diminuer considérablement les pesées réelles. Indépendamment des bénéfices que les n é -
( 1 2 ) gocïans obtenaient, les cultivateurs, manu facturiers, etc. de France, jouissaient d'un premier bénéfice, celui
de fabrique,
sur les
ventes qu'ils faisaient à 9 , 12, 15 et 18 mois aux négocians armateurs. Ce commerce sala riait plus de six millions d'hommes, répartis sur tous les points de l'empire; ce qui f o r m e rait aujourd'hui le cinquième
de la popula
tion, sans nuire à la culture; ils concouraient au contraire à sa prospérité et à celle
des
manufactures, par leurs consommations qui étaient proportionnées au fort salaire journa lier qu'ils obtenaient. Sans la possession de Saint D o m i n g u e , ils auraient pu être nuisibles à la société; la marine militaire eût été nulle. Ce c o m m e r c e exigeait quatorze
mille
mate
lots constamment à la mer pour S a i n t - D o mingue ; u n nombre égal occupés au cabotage des denrées coloniales, d'un port à un autre de l'empire, et des ports de France à l'étran g e r ; pareil nombre de matelots en repos à t e r r e , ou à la pêche pour la consommation de la colonie. En total, 56 mille matelots, q u i , au premier cri de guerre, étaient obligés de s e rendre à Brest, T o u l o n , R o c h e f o r t , etc. A c e nombre de marins, qu'on y joigne 20 mille charpentiers, calfats , voiliers, cordiers, etc., et on sera convaincu que la conservation d e
(13) la puissance maritime est étroitement liée à la possession de Saint-Domingue. Les bénéfices résultant du c o m m e r c e d'é change de la France avec Saint-Domingue ne se bornaient pas, pour la métropole, à ceux qu'obtenaient les
cultivateurs et les fabri
quants : aux n o millions que prélevaient les négocians armateurs ; à l'avantage inappré ciable de satisfaire à la consommation i n t é rieure en denrées coloniales, sans diminution d u numéraire en circulation ; au numéraire exporté annuellement de la colonie qui a u g mentait la masse des richesses
métaliques
de la France ; l'exportation des denrées c o l o niales à l'étranger, qui se trouvaient en sus d e ses besoins, enrichissaient encore la nation de 170 millions chaque année. Les matières premières que la France était obligée
de tirer annuellement de
l'étranger
pour ses manufactures ; les bois de construc tions , e t c . , e t c . , pour la marine militaire et la marine m a r c h a n d e ; les rentes que la France devait aux diverses nations , pour l'intérêt de ses e m p r u n t s , et ses dépenses
extérieures
relatives à la diplomatie , s'élevaient à cent trente millions. Les trois quarts des productions annuelles de S a i n t - D o m i n g u e , excédaient la c o n s o m -
(14)
mation intérieure, et étaient livrées aux étran gers au m ê m e prix qu'elles se vendaient pour la consommation de la F r a n c e , c e qui for mait un fonds de 150 millions. Les denrées et les objets manufacturés de France, que d e mandaient les nations étrangères, montaient à 5o millions. L e total de l'exportation était de 200 millions tournois. La balance était de 7 0 millions en faveur des cultivateurs, des manufacturiers et des places maritimes. Si la France n'eût pas eu la possession de Saint-Domingue, elle eût été obligée de retirer de la circulation : - 1°. Cinquante millions pour achat de d e n rées coloniales à l'étranger,
la Martinique
et la G o u a d e l o u p e , e t c . , n'en fournissant à la sur
consommation q u e pour
vingt
les
nécessaires alors à la
soixante-dix
millions
millions,
consommation intérieure. 2°. Quatre-vingt millions pour solder les matières premières , les rentes dues à l'étran ger et les dépenses extérieures de la d i p l o matie. Les vins de F r a n c e , les objets m a n u f a c t u r é s , e t c . , n'entraient que pour un quart dans le c o m m e r c e d'exportation, c'est-à-dire pour cinquante
millions.
Il résulte dé ce simple exposé, que la d é
pense pour les denrées coloniales étant obli-
( 1 5 ) gatoire, ainsi que celles en matières
pre
mières, e t c . , e t c . , le gouvernement royal ne pouvait prolonger sa durée dès l'instant de la dévastation de Saint-Domingue. L a désorga nisation devait par l'exportation
s'opérer
en peu d ' a n n é e s ,
de France
du numéraire;
le démembrement s'en serait s u i v i , et l ' A n gleterre eût été reconnue reine
des deux
mondes. Un génie réparateur, un h o m m e unique dans l'espèce h u m a i n e , à rendu à la France sa première gloire : la considération
dont
elle
doit jouir pour le bonheur de tous les peuples, et a
déjoué
les projets de la fière Albion. Il sera
impossible de récupérer les pertes qui sont résultées des
malheurs
de
Saint-Domingue.
La dévastation de cette colonie prive la France depuis quinze années , de deux milliards de numéraire ; l'incendie
de toutes
les habi
tations et l'obligation de les r e l e v e r , présente aussi deux milliards de perte. Par la possession de Saint-Domingue, toutes les nations étaient tributaires de la France » et elle se trouvait propriétaire , de fait, pour plus de moitié de cent
quarante
millions
extraits annuellement des mines du Perrou et du M e x i q u e , que les espagnols et les portu gais offrent tous les ans à la convoitise des
( 1 6 )
nations commerçantes, et dont elles ne peu vent se passer pour activer leur industrie, et satisfaire aux besoins de leurs armées de terre et de mer. L'île de Saint-Domingue procurait, seule à la France, plus d'avantages que l'An gleterre et toutes les nations commerçantes n'en retiraient de leurs possessions réunies de l ' A s i e , de l'Afrique et de l'Amérique ( 1 ) .
( 1 ) Si dans l'ancien r é g i m e encouragé
la culture du
le g o u v e r n e m e n t eût
Nopal
ou
Raquette
é p i n e u s e , on eût o b t e n u à S a i n t - D o m i n g u e dantes
récoltes
d e c o c h e n i l l e s , d o n t la F r a n c e fait
une grande consommation.
M.
t r a n s p l a n t a cet insecte-punaise et l ' y
éleva.
culture,
il
non
d'abon
Un
Thiéry
, botaniste ,
à Saint-Domingue ,
colon , en 1 7 8 8 , entreprit
réussit. L e
cette
gouvernement borna
c o u r a g e m e n t à. u n e gratification d e douze l o r s q u ' i l était du plus grand intérêt
l'en
cents
livres,
d e n e rien m é
n a g e r p o u r a u g m e n t e r des r é c o l t e s d e première cessité,
nê~
qu'on p a y e c h è r e m e n t à l ' é t r a n g e r .
L e s p r o v i n c e s de T a s c a l a , Oaxaca,
Gatimala,
etc.
dans l e M e x i q u e , l i v r e n t a n n u e l l e m e n t à l ' E u r o p e , un
million
quinze La coltes
pesant
millions
cochenille sur
le
terrein aride,
moins
de
de
cochenilles ,
produit
Nopal
ou
se
des p l u s
vend
dans
abondantes
Raquette , cultivé
q u e sur un sol
d'accidens
qui
francs.
fécond. Elle
les expositions
sur
ré un
éprouve
agréablement
Dans
(17) Dans la lutte entre la France et l'Angleterre , le possesseur territorial et des richesses m é talliques , sera victorieux. La guerre sur le continent Joseph
révolutionnerait
II
a ouvert
l'Autriche,
que
à la démagogie.
Ses
t e m p é r é e s , q u e dans c e l l e s où l e froid et l e c h a u d s e feraient trop sentir. Une
nopalerie
d e m i ) , peut
d'un
quarreau
r e n d r e cinq
( deux
arpens
et
cents livres p e s a n t d e
co
c h e n i l l e s p a r an : d e u x n è g r e s suffisant p o u r l ' e n t r e tien
d'une
culture
de cette
étendue.
récoltes par année. L a cochenille
Il
craint
y
a
les
trois vents
d ' e s t , l e s p l u i e s froides e t l a t r o p g r a u d e h u m i d i t é . Les
mexicains
cultivent le nopal
aux environ s
de
l e u r s d e m e u r e s : la plus g r a n d e n o p a l e r i e n'a j a m a i s p l u s d'un quarreau d ' é t e n d u e . O n p o u r r a i t , à Domingue,
avoir dans beaucoup
Saint-
d'habitations,
une
petite nopalerie. I l est d'un t r è s - g r a n d intérêt p o u r l a F r a n c e , q u e l e g o u v e r n e m e n t o b t i e n n e de celui d ' E s p a g n e , q u e l ques
q u i n t a u x de cochenilles
fines
, pour
les m u l t i
plier à Saint-Domingue.
Le g i r o f l i e r
prospérait à S a i n t - D o m i n g u e dans
l e quartier de Jerémie:
en 1 7 8 9
l e t t e s de clous de girofle. culture augmente de
la
France
est
on y
fit
des
cueil
— A l ' î l e d e F rance , c e t t e
annuellement. L a d'environ
mille
consommatiou quintaux
année.
B
par
(18) finances ne peuvent se rétablir que par la paix générale eu Europe. L'Angleterre ritorial,
sous le rapport
considérée commercial
crimes du cabinet
; sa politique
de
ter-
et les
Saint-James.
Les anglais, d'après la stérilité de leur s o l , sont marchands d'obligation : ils sont sur le globe l'homme crocodile. C o m m e cet animal, ils sont amphibies et voraces. Lorsqu'on les poursuit sur la t e r r e , ils fuyent c o m m e lui vers
l'eau, et y
acquièrent
une
férocité
d é c u p l e . Il faut aux anglais c o m m e au c r o C o d i l e , une pâture abondante ou qu'ils p é rissent. L ' A n g l e t e r r e n'a rien de son territoire à offrir a u x nations étrangères; toutes ont chez elles les mêmes objets. Les anglais n'ont dans l'exacte
vérité que l'industrie , que , sous le
rapport d u m a l , iis portent au plus haut degré; ce sont
des
chevaliers
d'industrie,
à qui
tous les m o y e n s sont bons pour assurer leur existance. Chez les a n g l a i s ,
l'orgueil
national
est une
conséquence
de leur misère : leurs hauts faits
maritimes n'ont
pas
o b l i g é s , pour
vivre, de se livrer à la piraterie,
une
autre
c a u s e ; ils sont
(19) En Angleterre, voler sur les grands chemins est un droit de l'homme. Les anglais sont enfin en opposition jusqu'avec la nature, qui a donné le pain à l'homme pour sa sub sistance. Le sol de l'Angleterre n'offrant que peu d e choses à ses habitans, ils se livrèrent dans les temps primitifs à la p ê c h e , aux manufactures et au cabotage. C'est aux anglais qu'on
doit
l'invention des mécaniques en tout genre. U n e population bornée, leurs besoins et le desir d e supplanter les français dans les marchés d e l'Europe , devaient les porter à ces d é c o u vertes d'utilité. Le luxe de propreté pour
fut aussi
les anglais, dans leur p a u v r e t é , un
moyen de lucre. Ils en donnèrent le g o û t , et. obtinrent long-temps par leurs draps, e t c . , la préférence chez les nations m ê m e qui
ma
nufacturaient plus que ne réclamait leur c o n sommation.
Malgré
les
avantages que
les
anglais retiraient de leur industrie, c'était une ressource précaire, étant de l'intérêt de toutes les nations, de porter leurs manufactures à la m ê m e perfection. La découverte de l'Amérique donna aux anglais une nouvelle vie. L'Amérique conti nentale constituait l'Angleterre puissance ter ritoriale ; l'Inde
leur offrait le c o m m e r c e . B 2
(20) L'erreur fut leur g u i d e ; ils ne considérèrent que les avantages commerciaux, et suivirent leur instinct pour la cupidité ( 1 ) . Ils virent dans le commerce le m o j e n d'enchaîner tous les peuples , et d'établir la discorde entre eux. Ils ne se dissimulèrent point que leur existance reposerait toujours sur des futilités, et qu'elle dépendrait du caprice des c o n s o m m a teurs étrangers ; mais ils espérèrent leurs suc cès , des moyens que leur offrait la perfidie. Pauvres en numéraire , parce que leurs objets manufacturés , qu'acceptaient les étrangers , ne balançaient point dans l'échange le prix des matières premières dont ils avaient besoin, ils créèrent un papier monnaie. Les puis sances continentales concoururent elles-mêmes
(1)
Les
premières
opérations
des
anglais
dans
l ' I n d e , furent dirigées a v e c u n e a p p a r e n c e d e b o n n e foi. E n p e u de t e m p s ils m a n i f e s t è r e n t l e u r s iniques p r o j e t s ; ils
s'organisèrent
en b a n d i t s , et p i l l è r e n t
sur t e r r e et sur m e r l e s I n d i e n s . A u r e n g z e b , e m p e r e u r du
Mogol,
condamna
en
Child ,
1689
gou
v e r n e u r de B o m b a y , et tous les anglais qui s e t r o u vaient
clans l e
p a y s , à faire
amende
honorable
à
g e n o u x , la f a c e p r o s t e r n é e c o n t r e t e r r e et les m a i n s liées derrière
le d o s .
Ils
subirent
c e t t e p e i n e , et
p a y è r e n t d i x m i l l i o n s d e d o m m a g e s et intérêts.
(21) à donner du crédit à ce papier monnaie , qui servait aussi à payer les trahisons de leurs agens , et procurèrent par là aux anglais, le m o y e n de les tenir dans leur dépendance. L e crédit de ce papier monnaie s'est maintenu jusqu'à ce j o u r , quoique
la représentation
métallique fût chimérique , et non cautionnée par des propriétés foncières; sa garantie repose sur l'inclination naturelle du cabinet de SaintJames à commettre des crimes : il cessera d'avoirc ours lorsqu'on aura forcé l'Angleterre à respecter le droit des gens. Il n'a jamais existé en Angleterre moitié du numéraire que possède la France. En A n g l e terre , la vaisselle plaqué
en
argent.
est en étain ou en métal En France , la surabon
dance du numéraire a commandé qu'elle soit entièrement eu argent et en v e r m e i l , et a obligé au luxe des broderies en or et en argent pour les parures de toutes espèces. L ' h o m m e un peu aisé a une vaisselle plate; il y a peu de ménages en France qui n'aient quelques pièces d'argenterie , lorsqu'en Angleterre , au c o n traire, il n'y a pour tous que des fourchettes de fer. L'Inde engloutit tout le numéraire que les anglais obtiennent par leur commerce en Europe. Les anglais, sans être effrayés de leur posiB
3
(22) tion
et après avoir apprécié toutes les c o n
séquences, agirent d'audace. La bonne f o i , boulevard sacré qui autorise à la sécurité, fut reconnue nuisible à leurs intérêts : elle fut remplacée par l'injustice, la perfidie , devant, dans
leurs
hauts
faits.
être la première
arme à employer contre la force qui leur manque. C'est par ces principes qu'ils i m a ginèrent la course ; cette piraterie q u i , par imitation fait partie du droit des gens, fut mise en usage par la reine Elisabeth, c o m m e un apanage dépendant de la foiblesse. C'est la guerre des loups contre les moutons. Le cabinet de Saint-James, pour atteindre à ses fins, c o m m e n ç a par faire abjurer aux anglais la religion de leurs pères, parce qu'elle avait pour base l'amour du prochain, entre
tous les hommes. La religion
l'union anglicane
a cela d'avantageux au cabinet de Saint-James, qu'elle dispense crimes!
de
l'aveu auriculaire
Sa politique
des
anti-sociale le
conduit à faire étouffer les remords de la conscience
Que ne doit-on pas craindre
d'un tel gouvernement ! La France pouvant seule en imposer à l'impérieuse A l b i o n , les anglais virent en elle une ennemie dangereuse qu'il fallait affaiblir en paralysant sa force naturelle : ils f o m e n -
( 2 3 )
tèrent la discorde sur le continent ; susci tèrent des ennemis à la France, la livrèrent aux horreurs des guerres c i v i l e s , et à celles qui dérivent de l'opposition en opinions reli gieuses ; conduisirent Louis X I V à révoquer l'édit de Nantes,
et à faire adopter l'intolé-
rence pour principe d'état, ce qui a obligé à, l'émigration les manufacturiers, les artistes, les capitalistes, les négocians, les marins et les h o m m e s de lettres. Les anglais ne pouvant, par leur faiblesse, attaquer avec succès la France sur son terri toire, quoiqu'appuyés d'alliés puissans , ils le firent déloyalenient. L e règne de Louis X V , n a été qu'une suite de calamités commandées par la perfidie du cabinet de Saint-James. C e roi s'endormit sur le trône. Le c o m m e r c e de la France était r u i n é , et tous ses matelots étaient prisonniers en Angleterre, avant qu'on pût présumer la possibilité d'une déclaration de guerre. Il résultait de ces improvistes h o s tilités, que les vaisseaux de guerre français devenaient des corps sans â m e . Les sacrifices dans les deux Indes, et les humiliations , étaient la conséquence de l'imprévoyance du gouver nement. Pondichéry fut prise et démentelée Une première fois, avant qu'on sût dans 1 Inde que la guerre existait entre la France et l ' A n -
(24) gleterre. En 1 7 6 1 , les anglais prirent cette place , et la démentelèrent de nouveau. Tous les établissemens français furent détruits ( 1 ) .
Pondichéry
(1)
et
l'île de France,
sont
la
pour
F r a n c e , dans l ' I n d e , d e u x p o s i t i o n s m i l i t a i r e s qui s e p r o t è g e n t r é c i p r o q u e m e n t . Pondichéry
est l ' e n t r e p ô t
naturel du c o m m e r c e q u e les F r a n ç a i s pourront faire dans l ' I n d e . Si l e s p l a c e s m a r i t i m e s v e u l e n t y mercer utilement,
com
et y r e n d r e l e s anglais e n t i è r e
m e n t en h o r r e u r , c e n'est que p a r la probité , le bon ordre , la justice, prisant
envers
et en r e n o n ç a n t au ton léger l e s naturels
du
et
pays , qu'on y
mépar-
v i e n d r a . C e s p r i n c i p e s f o r m e n t l e s qualités d i s t i n c tives des
du v é r i t a b l e agens d'un
de base
n é g o c i a n t , et d o i v e n t être c e u x
g o u v e r n e m e n t , d o n t la l o y a u t é sert
à toutes
ses t r a n s a c t i o n s .
Le
cabinet
de
S a i n t - J a m e s n'a d ' a u t r e b u t q u e d ' e n c h a î n e r l ' i n d u s trie c h e z tous l e s p e u p l e s : c e t t e atroce p o l i t i q u e e s t p o r t é e à son
c o m b l e . L e s s o u v e r a i n s de l ' I n d e font
des v œ u x pour l a c h u t e de l a p u i s s a n c e b r i t a n i q u e , et
desirent que les français y d e v i e n n e n t l e
centre
d e la haine g é n é r a l e c o n t r e l ' A n g l e t e r r e . Il n'est pas dans le c a r a c t è r e du français, d e faire l e commerce L'industrie individu
:
dans
l'Inde
est en il
d'outre-mer ;
se
par
compagnie
souveraine.
F r a n c e le p a t r i m o i n e d e c h a q u e livre
mais
il
facilement veut
voir
aux la
fin
entreprises de
chaque
s p é c u l a t i o n . C e s c o m p a g n i e s s o u v e r a i n e s ne p e u v e n t a v o i r de succès que c h e z les p e u p l e s qui n'ont
d'exis-
(25) La facilité avec laquelle la France réparait ses pertes, frappèrent les anglais de terreur. Ils ne se méprirent pas sur leur faiblesse, malgré l'apparence formidable de leur marine militaire : ils apprécièrent le peu qu'ils p o u v a i e n t , et virent ce que la France pouvait déployer de f o r c e , pour faire retomber l'An gleterre au rang qui lui est fixé par la nature, tance
q u e p a r l e c o m m e r c e , et
auquel
le
sort
de
l ' é t a t est lié : l ' A n g l e t e r r e et l a H o l l a n d e . T o u t e s l e s vues
de
ces
deux
gouvernemens,
se
rapportent
d'obligation vers le c o m m e r c e : leurs combinaisons politiques
n'ont
quemment
d'autres b u t s , et s o n t c o n s é -
C'est d'après
peuples. le
pas
destructives
cabinet
de
du
commerce
des
autres
cette politique p e r f i d e , que
S a i n t - J a m e s à fait
dévaster
Saint-
D o m i n g u e , et l i v r é c e t t e c o l o n i e
aux n è g r e s . C ' e s t
par
1602,
ces m ê m e s
p r i n c i p e s , qu'en
la France triomphait tion
à laquelle ,
seule
être
de
celle
comparée ,
contre que
coali
la r é v o l u t i o n
les
hollandais
tèrent infructueusement, parmis les déterminer
é p o q u e où
la p l u s f o r m i d a b l e
peut fomen
les i n d i e n s ,
à s ' e m p a r e r d e Pondichéry,
pour
que
ces
d e r n i e r s n e p o u v a i e n t j a m a i s être contraints d e r e s tituer.
La
prévoyance
peut
seule
prévenir
les
dangers. Pour
que
les
vues
du
gouvernement
• sur l'Inde soient p o l i t i q u e s , Pondichéry
français
et l'île de
France
d o i v e n t être m i s e s dans un état de d é f e n s e , et c o n s -
(26) et l'y maintenir, s i , à l'apathie de son gouver nement, succédait la prévoyance. Ils virent également que la prospérité de la France aug mentait annuellement par la culture des d e n rées coloniales; que la balance générale du commerce de l'Europe était en sa faveur, et que s'il ne lui arrivait de nouvelles calamités commandées, elle posséderait avant un siècle tout le numéraire qui existe en E u r o p e , et serait la seule puissance en état d'entretenir des années de terre et de mer. Les anglais virent, d'autre p a r t , avec un sentiment de c r a i n t e , que leurs provinces d'Amérique
prenaient un accroissement de
population qui devait devenir dangereux, et les amener à s'insurger, que l'idée seule de leur force les rendaient indépendantes, et que c e nouveau
peuple,
tamment
garnies
sous le de
rapport d u
troupes
commerce
françaises,
pour
ne
rien c r a i n d r e d ' u n e attaque perfide d e s anglais p e n d a n t la p a i x . toujours qu'on
C ' e s t en
étant en m e s u r e d e p o u v o i r
donner d e l'inquiétude à leurs
entravera
q u ' o n forcera
leurs
opérations
l'Angleterre
comptoirs ,
commerciales ;
à souscrire
à une
paix
p e r m a n e n t e , e t qu'on l ' o b l i g e r a de r e s p e c t e r l e droit des
gens. L e
c a p d e B o n n e - E s p é r a n c e , en la p o s
session d e s anglais , l ' E u r o p e serait e x c l u e du m e r c e de l'Inde.
com
( 2 7 )
deviendrait un ennemi plus r e d o u
de l'Inde,
table que les français; qu'il pourrait fédérer avec les Antilles, q u i , par leur isolement et leur éloignement de l'Europe, sont naturelle m e n t placées sous sa protection , et qu'en résultat il ne resterait à l'Angleterre, que le regret d'avoir
contracté
une
dette
mons
trueuse , et d'être en horreur à toutes les nations. Si les anglais eussent été mus par la raison, l a prospérité à laquelle s'élevaient leurs p r o vinces d'Amérique, et surtout l'accroissement rapide de leur population, eût indiqué au cabinet de Saint-James, que pour être c o m pris au rang des premières nations, et les tenir toutes dans leur dépendance pour les besoins
qu'elles
ont
contractés , il
fallait
transporter le trône de l'Angleterre en A m é rique , au lieu de faire un arsenal de L o n d r e s , des soldats de ses artisans et de ses m a r chands. L'Inde
eût reçu une protection plus
spéciale ; les Antilles commandées aussi par les besoins de première l'assurance
d'être
nécessité,
défendues
et par
efficacement ,
fussent devenues provinces anglaises ; le c o m merce général appartenait alors aux anglais. Ils eussent donné la paix au m o n d e ,
pour
obtenir facilement le débit de leurs denrées, etc.
( 2 8 )
lorsqu'au contraire, le genre humain les a aujourd'hui en exécration. Quoique les
Etats-
Unis soient puissance territoriale, les
anglo-
américains
ont les mêmes principes que leur
ancienne mère-patrie : avec le temps ils d e viendront redoutables. Leurs entreprises avenir prouveront que l'Europe n'aura fait de grands sacrifices pendant trois siècles, que pour les rendre maîtres, avec le nord,
du c o m m e r c e
Universel. Les anglais sévirent contre leurs provinces d'Amérique ; le gouvernement français sortit momentanément de son assoupissement. L ' A n gleterre perdit le fruit de cent cinquante ans d'une astuce politique; la nouvelle
Angleterre
fut reconnue indépendante. Cette indépendance sapa de fond en comble la puissance britanique. Les anglais ramas sèrent les décombres, et les cimentèrent avec du sang. Ennemis implacables des français , ils ne gardèrent plus de mesures ; ils mirent leur caractère à découvert, et dès-lors on vit des cannibales blancs. Ils salarièrent dans les deux mondes des assassins et des incendiaires : ils leur servirent de guides dans l'intérieur d e la France et à Saint-Domingue; ils aiguisèrent la hache révolutionnaire et le couteau parri cide. L'Angleterre était au moment de voir
(29) réaliser ses plus chères espérances; la France allait être démembrée , Napoléon parut ! La réunion des provinces de la Belgique à la France augmente considérablement les moyens
territoriaux d'échanges,
en
même
temps qu'elle lui procure des matières premières q u i lui manquaient. Elle concoure à rendre sa prépondérance i m m u a b l e , et force le c a b i n e t de Saint-James à respecter la France, dont les côtes décrivent un arc autour des rochers anglais. A la paix d ' A m i e n s , les enfans de Mars parurent à Saint-Domingue. Trois mois suf firent
pour y rétablir l'ordre : la culture fut
reprise; l e s habitations et les villes réédifiées. Cette étonnante conquête déçut les anglais de leur espoir; ils l'avaient cru impossible, o u au moins qu'il eût fallu un temps infini, et que pendant cette guerre domestique, ils eus sent fait seuls le c o m m e r c e . Les
anglais
E g y p t e ; ils et
maîtres
citadelles
avaient
croyaient
vu les y
les français en voir
encore ;
de l ' I n d e , sans le secours flottantes.
Ils se rappelaient
des que
toutes leurs escadres avaient été obligées de fuir devant celle du comte Dorvilliers c e vice-amiral pouvait, si ont eût voulu,
; que faire
ancrer ses vaisseaux dans tous les ports d'An-
( 3 0 ) gleterre. Ils avaient vu le bailli de
Suffren,
maître dans l ' I n d e , et à qui il ne manqua que des troupes de débarquement, pour les punir efficacement. Les anglais virent
enfin
que
la culture étant reprise à Saint-Domingue , le produit des mines du Perrou et du M e x i q u e , se trouvait de nouveau pour plus de moitié en la possession de la France ( 1 ) . En fallait-il davantage pour déterminer un peuple c o m merçant, et qui ne peut exister que par le c o m m e r c e , à se porter à dévaster, au sein de la paix, les propriétés de sa rivale, et à établir dans cette colonie le régime des cannibales ? Saint-Domingue fut de nouveau , à l'instiga tion du cabinet de Saint-James, en proie à
(1)
I l est d e l ' i n t é r ê t d e t o u t e s l e s nations
merçantes , sous
que le
la d o m i n a t i o n
L e u r indépendance
P e r r o u et l e
Mexique
de
et
l'Espagne
du
n'a q u e p e u d e c h o s e s
péruviens
et
Portugal.
s e r a i t nuisible à l ' E u r o p e ; l ' e x commandée.
portation d e l ' o r d e c e s p a y s , n e serait plus On
com
restent
à
offrir en
a u x m e x i c a i n s , d'après
échange la n a t u r e
aux de
leurs b e s o i n s . C e u x des e s p a g n o l s et d e s p o r t u g a i s , assurent au c o n t r a i r e à l ' E u r o p e u n e a u g m e n t a t i o n annuelle de r i c h e s s e s m é t a l l i q u e s . L e
P e r r o u ou le
M e x i q u e , en la possession de l'Angleterre , riverait à j a m a i s l e s fers des p e u p l e s c o m m e r ç a n s ,
(31) toutes les horreurs d'une guerre domestique. Les massacres , pendant la première révolte des nègres et des mulâtres, ne furent que partiels : les anglais étant cette fois leurs auxiliaires, les colons furent égorgés sans dis tinction d'âge ni de sexe. Les anglais sont aux abois : ils fomentent eur le continent; mais c'est en vain qu'ils conservent l'espoir de replonger la France dans l'anarchie. Ils ont déclaré
ministériellement
à tous les gouvernemens, que faire révolter leurs sujets est un droit de la guerre. D i e u garde l'empereur ! L e cabinet de Saint-James se noye dans le c r i m e ; aucun frein ne peut l'arrêter. L'Angleterre n'aura jamais d'autres prin c i p e s ; ils sont inséparables de la foiblesse sur
laquelle repose sa puissance : elle sera
constamment déloyale. Faut-il que la France soit constamment victime ? La guerre actuelle est
la plus grande calamité qui ait jamais
frappé la nation anglaise , quoiqu'elle règne despotiquement sur toutes les mers. C'est par la persévérence dans le projet de d e s c e n t e , que la France vaincra cette ennemie du genre humain. L'heure de la vengeance sonnera dans u n e année ou dans une autre, si la France reste en mesure pour l'effectuer. L'inquiétude
(32) qu'éprouvent les anglais de la voir réaliser ; doit en prolonger leur anxiété , amener une révolution terrible dans l'empire britanique. L'Angleterre acceptera la paix , mais dans la seule vue de nuire plus efficacement : elle sait que les français d o n n e n t , sur la foi des traités, l'essor à leur industrie. Le c o m m e r c e de France serait ruiné et Saint - Domingue livrée aux flammes , avant d'avoir connais sance de la première hostilité, si on n'est pas toujours prêt, par des escadres tenant c o n s tamment la m e r , à réprimer son audace ( 1 ) .
(1) On
le patriotisme
vante
que le g o u v e r n e m e n t prunts. D u
des anglais ,
parce
r e m p l i t avec facilité ses e m
p a t r i o t i s m e ! il n'y
en a p a s
en A n g l e
t e r r e . L ' a n g l a i s est m a r c h a n d égoïste ; son p a t r i o t i s m e est passé au c r e u s e t : c'est
affaire d e
c a l c u l . 11 y
en A n g l e t e r r e des f o r t u n e s c o l o s s a l e s en porte-feuilles mais
la
garantie
repose
sur l e s b r o u i l l a r d s
T a m i s e ; un coup de temps
peut
le g o u v e r n e m e n t qui doit.
les
de
a ; la
détruire. C'est
I l autorise l a p i r a t e r i e ;
m a i s il s ' e m p a r e du n u m é r a i r e : il le r e m p l a c e d a n s la c i r c u l a t i o n
par
des b i l l e t s . L a fortune
publique
est l i é e au sort du g o u v e r n e m e n t . Si l e s anglais n e s'empressaient
d e lui p r ê t e r , l e s
lières
perdues. Ils
sèdent
seraient de
fortunes
prêtent
réel , pour conserver
la
particu
ce qu'ils
pos
jouissance
des
créances i m a g i n a i r e s qu'ils ont sur l'état. C'est d o n c
Le
(33) L e cabinet de Saint-James, convaincu qu'à la paix tous les peuples s'adonneront au c o m m e r c e , et qu'alors les bénéfices de l'Angle terre se trouvant b o r n é s , le
gouvernement
ne pourrait faire face aux intérêts de sa dette , il a cherché à démontrer aux anglais , par un écrit rendu public avec profusion , que leur existance politique ne peut se soutenir que par une guerre
avec la France.
perpétuelle
Cette déclaration est un appel de la part des anglais. La France doit être convaincue actuelle m e n t , que l'Angleterre ne cessera jamais de violer les traités, et que ses hostilités seront toujours à l'improviste. Il est de la gloire des français de répondre à cet appel , en s e c o n dant
efficacement
le
gouvernement
toutes ses v u e s , pour
punir
ces
dans
ennemis
p a r intérêt , et n o n par p a t r i o t i s m e , q u ' i l s satisfont aux
d e m a n d e s de leur
dette
monstrueuse sous
accablée, aux
le
intérêts
mentant
sa
gouvernement. D'après laquelle
gouvernement et
aux
dette.
besoins Les
ne de
l'Angleterre peut
la est
faire
face
l'état , q u ' e n
aug
ressources de
cet
empire
s o n t d a n s la piraterie , n e p o u v a n t p a r v e n i r à faire seul
le
commerce
de
l'Europe.
fixée , o u l ' E u r o p e sera dans ses f e r s .
Sa
durée
est
(34) du genre h u m a i n , et affranchir l'Europe de leurs fers. Sous le règne de Louis X V , l'impérieuse Albion a eu des commissaires à D u n k e r q u e , qui y ordonnèrent
jusqu'à la guerre d ' A m é
rique. O n ne doit s'attendre à une paix pétuelle,
per-
que lorsque l'aigle planera au-dessus
de la tour de Londres. Le régime tunisien
et algérien,
sous lequel
Saint-Domingue est asservie, est analogue aux intérêts de la Grande-Bretagne , pour y faire seule le c o m m e r c e , et exiger en Europe, un prix exhorbitant, des denrées coloniales. Sous ce r é g i m e , le produit de la culture ne peut qu'être modique , d'après l'apathie des nègres, et par les travaux réguliers et p e r manans qu'exige la culture des cannes
et la
fabrication du sucre. C'est à cette fin, que l'Angleterre a fait sur les hollandais, la c o n quête de Surinam , qu'elle voudra conserver à la paix , pour satisfaire , par les denrées coloniales , aux demandes de l'Inde , en méraire,
nu-
et pour balancer autant que possible
les avantages que retirera la France de SaintDomingue. L a prospérité à laquelle s'élevait la culture du coton à Saint-Domingue, effrayait égale ment l'Angleterre par l'aliment qu'elle d o n -
(35) nait aux manufactures françaises et suisses ; le coton de Saint-Domingue, pour les fabri ques de toiles , dites coton , mousselines, etc. étant supérieur à celui du levant. Cette cul ture produisait, en 1789, de sept à huit mil lions pesant. Elle aurait doublé en peu d'an n é e s , et prodigieusement augmenté, lorsque les montagnes de la partie française se seraient trouvées entièrement déboisées. Si Saint-Domingue restait dans la dépen d a n c e des nègres, l'Egypte m ê m e , si la France l a possédait , n'offrirait qu'un faible
dédom
magement. Combien ne faudrait-il pas
de
temps pour la rendre susceptible de présenter la
masse
des richesses
que peut produire
Saint-Domingue en peu d'années ; pour
y
obtenir une population laborieuse , garantir les habitans de la perte de la v u e , et des effets de la peste ? Combien ne faudrait-il pas y enfouir de millards ? En admettant
d'ail
leurs , contre la vérité , la possibilité d'obtenir e n Egypte un grand succès dans un temps b r e f , quel serait en résultat l'avantage qu'en retirerait la France? Les Egyptiens peuvent se passer de tous les peuples; il n'y d o n c de c o m m e r c e d'échange
existerait
que pour peu
d'objets. C e serait un nouveau gouffre q u ' o n ouvrirait pour y jeter le numéraire qui existe
C2
( 3 6 )
en France, et enrichir ce pays pour accélérer son
indépendance. Il est de
l'intérêt
peuples du c o n t i n e n t , de laisser le
des
levant
dans l'abrutissement ; il est de leur intérêt que la Turquie d'Europe ne change pas de domination ; autrement c'est livrer tout
le
commerce à un peuple q u i , par sa double population,
serait
plus dangéreux que
les
anglais ; à un peuple qui possède presque e x clusivement
toutes les matières
premières
pour la construction et l'armement des vais seaux. Que n'aurait-on pas à craindre de la Russie , si elle possédait la Turquie
d'Eu-
rope (1)? Elle ne cache pas ses projets
: elle
suit ceux de l'immortelle Catherine.
L'Egypte,
si la France la possédait, ne peut être consi dérée
que c o m m e
position militaire, pour
donner de l'inquiétude
aux anglais, et les
obliger à une paix permanente. Malte,
dans
leurs mains, serait très-préjudiciable au c o m m e r c e de la France dans le levant.
Indépen
damment des effets qui résulteraient par le fait de la marine militaire ennemie, la ville
( 1 ) Lorsque
M a h o m e t II s'empara de C o n s t a n t i
n o p l e , les T u r c s se fussent d é b o r d é s sur l ' I t a l i e , si l a division famille
n e s'était m i s e p a r m i
régnante.
les princes d e
la
de
(37) e t c . , serait
Marseille,
des
exposée à
frais onéreux de relâche et d'avitaillement, e t c . , etc. L e commerce de l'Inde , tout onéreux qu'il s o i t , serait préférable à celui de l'Egypte , par l'avantage qui résulterait pour la marine militaire , en formant des matelots dans ces voyages de long c o u r s , et par les
échanges
auxquels on c o m m e n c e d'accoutumer les i n d i e n s . Le
commerce
ayec l'Egypte
q u ' u n e navigation de cabotage
n'offre
, et des a v a n
tages trop modiques , pour qu'ils puissent d é terminer à faire le sacrifice de S a i n t - D o mingue. O n va tracer sommairement les accès de délire auxquels des français et des habitans d e cette infortunée colonie se sont livrés. Des
troubles
mingue, nègres
qui ont eu lieu à
précédemment et des
Saint-Do-
à la récolte
des
mulâtres.
La population générale de Saint-Domingue consistait en européens, sang-mêlés,
en africains,
La 1 . section, les blancs, r e
se subdivisait,
1°. en propriétaires; 2 ° . les facteurs liés
et en
ce qui forme trois sections.
du c o m m e r c e
domici-
de France et les m a r -
(38) chands; 3 ° . en petits blancs (1) ; 4°. les joueurs de profession et les intrigans, dont l'existance dépendait de la facilité plus ou moins grande dé faire des dupes. Quant aux gérans , rafineurs et é c o n o m e s , ils étaient les représentans des propriétaires. Les chirurgiens
étaient dans la même classe.
La 2 . section, les africains ou esclaves. m e
Cette section était un composé d'hommes de toute couleur, qui tous avaient une d é n o m i nation
particulière : d'abord les nègres , et
ensuite les mulâtres, quarterons, métifs, et définitivement des blancs, puisqu'il y avait beaucoup de métives
esclaves.
Les grifs, les maraboux , etc. provenant de pères de couleur. La 3 . section , les sang-mêlés de descen dance d'affranchis : ils se distinguaient par génération. m e
1 . Génération. r e
— Un blanc avec une n é
gresse , produisaient un
(1)
Les
les p l a i n e s
ouvriers , les et
les
mulâtre.
colporteurs ,
parcourant
m o n t a g n e s ; les a u b e r g i s t e s , l e s
c a b a r t i e r s , les petits m a r c h a n d s , d o n n a n t en m ê m e temps à boire et à m a n g e r ; les pêcheurs , construc teurs d e c h a l o u p e s , l e s c a b r o u e t i e r s , e t c .
( 3 9 ) Moitié 2 .
blanc,
moitié
tresse , produisaient un Trois 3
m e
quart
. Idem.
blanc,
quarteron. et un quart
Sept huitièmes 4
noir.
- Un blanc avec une quarte
ronne , produisaient un
m e
noir.
Idem. — Un blanc avec une m u l â
m e
métif.
blanc, et un huitième
noir.
. Idem. — Un blanc avec une métive ,
produisaient un blanc ( 1 ) . Les malheurs de Saint-Domingue, r e m o n tent à plus d'un demi-siècle ; mais particu lièrement
depuis
la révolution
française,
époque où toutes les connaissances humaines se développèrent avec autant de célérité que d'énergie.
(1) Les sang-mêlés c h e , et p r o v e n u s par t i o n primitive
d'un
e n naissant
un cercle
q u i s'efface a v e c enfans.
Les
à la
blancs ,
d'un
nègre
de la génération
qui
blan
cohabita
négresse , ont des
ongles
,
renaît d a n s l e u r s provenus
de
avec
blan
une
la
d e couleur p l u s
n e s'efface j a m a i s , à q u e l q u e
d e g r é de g é n é r a t i o n b l a n c h e dividu.
une
racine
m a i s qui
sang-mêlés
brun,
avec
noir
l'âge ,
c h e , o n t les parties que
d e s c e n d a n c e d e la
blanc
c o h a b i t a t i o n primitive
noir
p a r v e n u s à la c o u l e u r
que soit p a r v e n u
l'in
(40) Des hommes éloquens , et fort en théorie , donnèrent en France l'essor à leur imagina tion ardente , et rapportèrent à la volonté du créateur de toute chose , ce qui n'était que la conséquence d'une fausse instruction , et d u défaut de connaissance sur l'utilité qui dérive du bien et du mal. Ils méconnurent l'intérêt de la nation ; ils ne virent que les colons ayant des esclaves à leur service, sans c o n sidérer que les nègres étaient les hommes Roi,
et les colons (colonus),
du
les fermiers
de l'état. Des philosophes, des panégyristes
des novateurs
outrés,
de l'homme dans l'état de
pure nature, adoptèrent aveuglément le projet perfidement
émis par le cabinet de Saint-
James , l'abolition de la traite des. nègres et leur
affranchissement
dans les
Ils voulurent aussi que les affranchis égaux
,
colonies. fussent
en droit aux colons.
La manifestation de ces principes destruc tifs de la prospérité publique, porta le trouble dans la c o l o n i e , et indigna en France tous les h o m m e s
sensés , d'après
la conviction
qu'ils avaient, que cette liberté ne pouvait être accordée que progressivement. Les n i grophiles se rendirent par bataillons à SaintDomingue , et en peu de temps y opérèrent
(41) une désorganisation totale. Les esclaves et les affranchis s'insurgèrent le 2 3 août 1791. Les habitations furent incendiées ; les colons qui tombèrent
sous leurs
mains
furent
mas
sacrés. Pendant l'année qui précéda cette révolte , des blancs s'étaient pareillement Les
du droit d'initiative
insurgés.
prétendirent
non-propriétaires
jouir
sur. tout ce qui a r a p
port au régime intérieur. Ils se constituèrent en clubs , et fraternisèrent avec les troupes. L a voix de la raison ne put se faire entendre: ils augmentèrent
d'audace et méconnurent
l'autorité du gouverneur-général, qui était la sauve-garde de tous. Ce c o m m e n c e m e n t d'a narchie ne put être réprimé , les agens du pouvoir-exécutif n'ayant pas de force à leur disposition. Les
habitués
des villes se f o r
mèrent en assemblées provinciales , et y a p pelèrent des députés des paroisses. Ces h o m m e s
égarés par les perfides sug
gestions des anglais, q u i , vers la fin de 1 7 8 9 , leur dirent : traîtreusement, de m ê m e qu'aux français à la côte de C o r o m a n d e l , et aux îles de F r a n c e , et de la Réunion « V o s bas» tilles sont renversées, l'arbre de la liberté » est mis à leur p l a c e ; vous n'êtes plus su» j e t s , vous êtes vos maîtres » ,
oublièrent
(42) que leur sûreté exigeait une soumission abso lue envers la m é t r o p o l e , quel que fût l'arbi traire qui pesât sur e u x , entraînèrent dans leur parti d'honnêtes citadins et des proprié taires. De leurs opinions délirantes, se sont formées les différentes factions connues sous la dénomination des crochus, pompons-blancs ces aréopages d députés qui générale.
des bossus,
des
C'est de
et des indépendans.
, que sortirent les
se constituèrent en
assemblée
La dénomination d'assemblée colo-
niale, que ces prétendus députés auraient dû au moins adopter, fut rejetée : elle eût e x primé clairement la dépendance envers
la mère-patrie.
de la
colonie
L e premier décret de
ces députés, par lequel ils se constituèrent en assemblée générale , fut un acte de félonie au premier chef. Celui d u a8 mai 1 7 9 0 , fut un acte usurpatoire de l'autorité souveraine, sous le prétexte ridicule: « Q u e les droits de Saint» D o m i n g u e , pour avoir été long-temps m é » connus et o u b l i é s , n'en sont pas
moins
» demeurés dans toute leur intégrité (1) ».
(1)
C e t t e p r é t e n t i o n était e x t r a v a g a n t e .
fut le n o m b r e d e s
flibustiers
qui
s'étaient
Quel que emparé
d'une partie d e S a i n t - D o m i n g u e , n'étant pas a v o u é s , ils n'étaient p o u r le r o i d ' E s p a g n e q u e d e s
brigands
(43) Les étranges principes de cette assemblée , divisèrent de plus en plus les blancs, et mirent la discorde entre elle et l'assemblée ciale de la partie
du nord.
provin-
Les députés de
l'assemblée générale cherchèrent à se discul per en F r a n c e , et en donnèrent la mission à des personnes qu'ils appelaient leurs députés , quoiqu'ils eussent reconnu que leur nomina tion avait été faite clandestinement
; mais ils
avaient été admis à voter à l'assemblée natio nale. La grande majorité des propriétaires r é sidant en F r a n c e , se refusa à toute réunion a v e c ces députés, et persista dans son o p i n i o n , que la colonie ne pouvait être régie que par des lois de p o l i c e , Saint-Domingue être considérée en état de siége,
devant
dans le temps
m ê m e de tranquillité, les nègres étant fois
vingt
plus nombreux que les blancs. La colonie
aurait eu besoin alors d'un c h e f du caractère du gouverneur Hugues , elle eût été sauvée. Toussaint adopta en l'an I X , les étranges prin cipes de cette assemblée générale : il
fit,
c o m m e elle voulut faire, une constitution à la léopardine,
rassemblés
q u i , en paraissant conserver à la
sur
son
domaine. C o m m e
çais , le territoire e n v a h i dès qu'ils furent a v o u é s ,
sujets
fran
appartenait à l a F r a n c e ,
(44) France la souveraineté, subordonnait la nation à l'autorité qu'il usurpait. DESSALINES char gea , en l'an X I I , M . Billard,
habitant du
sud, de faire une constitution. Il en fit le pro jet; mais les bases lurent rejetées, parce qu'elles conservaient la souveraineté à la France. La révolte des nègres fut une suite de la suggestion des mulâtres, q u i ,
eux-mêmes
étaient, comme une portion des blancs, portés a la rébellion par les anglais. Lorsque les noirs et les jaunes se soulevèrent, le péril parut réunir les blancs : ils étaient assez nombreux pour forcer ces deux castes à l'obéissance ; mais ils ne sûrent pas s'entendre, ni se sou mettre à la discipline
que les circonstances
impérieuses commandaient. D'autre part, n'existait
pas un seul fusil,
ni un sabre
il
pistolet,
dans les arsenaux, et cependant
les mulâtres étaient let
pas un
de calibre.
armés de fusils
et
pisto-
On demanda six mille fusils
au gouverneur de la Jamaïque : trois
frégates
en apportèrent cinq cents; mais pas un h o m m e , qui était le secours dont avait le plus besoin le gouverneur-général, pour conserver la colonie à la France. Un mois après la révolte, toutes les paroisses souscrivirent aux volontés impératives des m u lâtres. Des deux c ô t é s , la haine était à son
(45) c o m b l e , et impossibilité d'union entre l'as semblée générale et le
gouverneur-général.
L'assemblée provinciale du nord, mit à la dis position du gouverneur-général, la jeunesse de ce département, pour dissoudre par les armes l'assemblée générale, dont les principes consacraient
l'indépendance
de la colonie.
L'assemblée générale, ne pouvant se soutenir quoique appuyée dans l'ouest et le s u d , quatrev i n g t - n e u f députés s'embarquèrent le 8 août 1 7 9 1 , sur le vaisseau le Léopard. Leurs prin cipes furent improuvés par l'assemblée natio nale. Le 3o juillet précédent, le comte de Peynier,
gouverneur
de S a i n t - D o m i n g u e ,
avait, par sa proclamation , cassé cette assem blée , et déclaré ces députés et leurs adhérens, traîtres à la patrie, et criminels envers la nation et le roi. Ils restèrent connus sous la dénomination de faction
léopardine.
Louis X V I envoya à Saint-Domingue des commissaires pacificateurs. Le gouvernement directorial y en e n v o j a quelque temps après , pour proclamer la constitution française de l'an III. Les premiers commissaires, trop faibles en politique , pour le caractère dont ils étaient revêtus, aggravèrent le mal. Ceux qui leur s u c cédèrent, ne consultèrent que leur volonté.
(46) Sonthonax proclama la liberté des nègres : il témoigna à Toussaint le regret de n être pas né de sa caste; il lui dit : « Je suis b l a n c , mais » j'ai l'âme d'un noir
» Toussaint lui
répondit : « Et moi je suis n o i r , et ai celle » d'un blanc. » Ce nigrophile, dont l'existance étonne, e t qu'on a condamné aux remords pour supplice, d o i t , s'il est h o m m e , être en horreur à l u i même. Il a été h o n n i , bafoué et méprisé par ces mêmes nègres , auxquels il avait inoculé son venin : ils l'ont contraint deux fois d e prendre la fuite. Il a été accusé par les m u lâtres, de les avoir, dans sa première m i s s i o n , provoqué au massacre des blancs. L e général noir, Pierrot, était dans les principes que les mulâtres supposaient au commissaire
Son
thonax. Le général Hédouville
succéda à Sonthonax;
mais que pouvait un sage administrateur, un guerrier estimé , n'étant pas entouré d'une force armée suffisante , pour contraindre à l'obéissance trois castes ennemies : il repassa en France, en déplorant le sort de Saint-Do mingue. L e général Hédouville,
à moins d'a-
voir une armée à ses ordres , n'eût jamais p u soumettre les nègres à l'obéissance , le g o u verneur Laveaux ayant sanctionné leur révolte,
(47) en n o m m a n t , impolitiquementi cette époque, Toussaint lieutenant-général au gouverne ment , et en le proclamant, aux desirs de l'abbé R a j n a l , le Spartacus
( 1 ) de la colonie. D'autre
part, Sonthonax l'avait élevé à la dignité de gouverneur, et de général en chef. Les anglais qui avaient été appelés dans la colonie par les indépendans blancs et jaunes, le reconnurent pour CHEF SUPRÊME , malgré la présence d u général Hédouville dans la c o l o n i e , qui était l e représentant du gouvernement français. Toussaint réalisa le vœu de l'abbé R a y n a l , et celui du citoyen Mercier. Cet homme-tigre gouverna la colonie jusqu'à l'arrivée de l'ar m é e française, époque où il se déclara o u v e r t e m e n t en révolte contre la France. De
la révolte
des
esclaves.
L a révolte des esclaves a été la suite des
( 1 ) Spartacus était u n v o l e u r d e g r a n d s c h e m i n s , qui fut c o n d a m n é à l'esclavage
l'an 681 d e R o m e ,
et 73 ans a v a n t l ' è r e c h r é t i e n n e ; il s e fit c h e f d e s e s c l a v e s , qui
firent
la g u e r r e
a u x R o m a i n s . I l se
r e n d i t m a î t r e d e s c a m p a g n e s : il qui é t a i e n t
commandées
défit
e t C l o d i u s G l a b e r ; m a i s i l fut défait Pompée.
les
troupes
p a r l e s préteurs V a t i n i u s par le grand
(48) suggestions. Le premier SpartacuS de SaintD o m i n g u e , était un nègre de nom anglais nommé Bouk-man
,
, qui n'a pas été c o n n u
appartenir à la colonie. Il était un envoyé des anglais, ou l'un des chefs des cent nègres
marons,
vingt-cinq
que le gouverneur-général
de Bellecombe avait reconnu indépendans. Jean-François , Biassou , Toussaint, s u c cédèrent à ce brigand dans le commandement en chef. Toussaint! on n'a pu découvrir celui qui luiavait appris à lire et à écrire, ni comprendre comment M . Bayou de Libertas,
n'en
a eu
connaissance qu'après que cet esclave a su son
Raynal.
Jean-François fut fait lieutenant-général des armées du roi d'Espagne. Biassou et Toussaint furent élevés au grade de maréchal-de-camp. Les passe-ports que délivraient ces c h e f s brigands, avaient pour sceaux un cœur e n flammé. La réunion des mulâtres libres a v e c les nègres esclaves, y était désignée par les lettres caractéristiques réunies M et N , et à côté pour l é g e n d e , le préjugé verge
de fer
vaincu;
l a
brisée ; vive le roi !
La révolte des esclaves, se manifesta le 23 août 1791, par des atrocités qu'on ne peut décrire sans frémir. Trois mois treize
jours après,
(49) a p r è s , ils reconnurent qu'ils avaient été i n duits en erreur : ils adressèrent de leur quar tier-général de la Grande-Rivière, le 6 décembre de la même année, à
l'assemblée
coloniale,
la lettre dont est extrait ce qui suit : « De
grands malheurs ont
affligé
cette
» riche et importante colonie ; nous y avons » été enveloppés , et il ne nous reste plus rien » à dire pour notre justification. Un jour vous » n o u s rendrez toute la justice que mérite » notre position. La mère-patrie exige un r é » girne absolument distinct des colonies; mais » les sentimens de clémence et de bouté , qui » n e sont pas des l o i s , mais des affections du »
c œ u r , doivent franchir les m e r s , et nous
»
devons être compris dans l'amnistie g é n é -
» rale que le roi a prononcée pour tous indis»
tinctement. » Nous voyons par la loi du 28 septembre
» ( 1 7 9 1 ) , que l'assemblée nationale et le roi » vous accordent de prononcer définitivement » sur l'état des personnes non-libres , et l'état » politique des hommes de couleur.
Nous
» défendrons les décrets de l'assemblée natio» nale et les vôtres, revêtus de toutes les for» malités requises, jusqu'à la dernière goutte » d e notre sang. Une nombreuse population » qui se soumet avec confiance aux ordres du D
(50) » monarque
et du corps législatif, qu'elle
» investit de sa puissance, mérite assurément » des ménagemens. Il serait même intéressant » que vous déclariez, par un arrêté sanctionné » de M . le général, que votre intention est » de vous occuper du sort des esclaves; s a » chant qu'ils sont l'objet de votre sollicitude, » et le sachant de la part de leurs c h e f s , à » qui vous feriez
parvenir
ce travail,
ils s e -
» raient satisfaits , et cela faciliterait pour r e » mettre l'équilibre r o m p u , sans perte et e n » peu de temps. » Signé, JEAN-FRANÇOIS , général;
BIASSOU ,
maréchal de camp; DESPREZ, MANZEAU, TOUSSAINT et AUBERT , commissaires
ad
hoc ( 1 ) . Quoique les chefs des révoltés , manifes taient l'intention de se constituer
intermé-
diaires armés , entre l'assemblée coloniale et les nègres, la saine politique commandait d e profiter de leurs apparentes dispositions p a c i fiques. L'assemblée coloniale ne se fût engagée
(1)
L e s nègres
avaient
parmi
e u x des
blancs,
p o u r c o n s e i l l e r s i n t i m e s , n o t a m m e n t plusieurs c u r é s . P h i l e m o n , etc. , quelques sang-mélés instruits.
(51) à aucun sacrifice, en déclarant que son inten tion était de s'occuper du sort
des esclaves.
L e s propriétaires avaient reconnu la nécessité d e l'améliorer. Sur toutes les habitations, d e p u i s plus de vingt-cinq a n s , il y avait des esclaves des deux sexes et de tout â g e , qui jouissaient de la liberté dite de savane;
c'est-
à - d i r e , exempts de travail plusieurs jours de la s e m a i n e , et même indéfiniment. La politique c o m m a n d a i t aussi de capter les chefs nègres, p o u r les opposer aux mulâtres, et les obliger à respecter les décrets de l'assemblée natio nale , sanctionnés par le r o i , que çois
Jean-Fran-
et consorts promettaient de défendre j u s
q u ' à la dernière goutte de leur sang. Mais que pouvait-on espérer d'une assemblée qui était e l l e - m ê m e en révolte contre la mère-patrie 1 L'assemblée coloniale n'ignorait pas, c e p e n d a n t , les
atrocités dont
sont capables
les
n è g r e s , lorsqu'ils sont induits en erreur. Elle aurait dû se rappeler l'époque de Macanda en 1 7 5 4 : les blancs
,
devaient périr par le p o i
s o n , ainsi que leurs nègres de confiance ( 1 ) .
(1) moins le
Un
jésuite ,
le complice
le
père
D u q u e n o i : il
était
d e s e m p o i s o n n e u r s , s'il
au
n'était
chef. Une
négresse
fut c o n v a i n c u e ,
au C a p ,
D 2
d avoir
(52) Les mulâtres
ne furent
pas compris
dans la
proscription.
empoisonné son maître : elle fut conduite à l'échafaud. Après la lecture de la sentence, on lui dit que si elle n'avouait pas ses complices , elle irait au Diable.
« Coumen
» si mo di
! s'écria-t-elle, bon per di moé ;
vérité,
» ma pa di li,
malé
malé
o guiab.
o guiab.
Vou
Zoté
di moé,
cordé;
mo
si velé
» ou ti bon Giu.» ( Comment ! le bon père me dit que si je dis la vérité, j'irai au diable. Vous me dites que si je ne dis pas la vérité, j'irai au diable. Accor dez-vous ; je veux aller avec le bon Dieu ) . Qu'on juge de la sensation que dut produire un tel aveu. La criminelle fut reconduite dans les pri sons : elle avoua ses crimes, nomma ses complices, et donna connaissance de tous les poisons et contre poisons. Elle eut grâce de la vie et une
piastre-gourde
(5 liv. 5 s . ) par jour, pour sa subsistance dans la prison. Macanda et ses complices furent
brûlés
vifs. Le père Duquenoi ne reparut plus, et les empois o n n e m e n s cessèrent dans la colonie. A la Martinique, en 1 7 6 6 , les empoisonnemens ravagèrent également cette colonie. A Saint-Domiugue , c'était un nègre esclave qui était le chef ap parent
des empoisonneurs. A la Martinique , ce
furent des hommes de couleur libres. Ces chefs étaient : Pain,
Nicolas,
Babo
, P a u l , et Mandave,
mulâtre libre; Boromée,
Les jésuites
tous nègres libres ;
métif libre.
ont. joui de toute la plénitude du
( 5 3 )
Après la mort de Louis X V I , le gouverne m e n t directorial envoya des commissaires à Saint-Domingue. A cette époque les révoltés, à l'imitation des moines du monastère
Ecs-
M i a z i n ( Trois-Eglises) en Perse ( 1 ) , avaient u n e grande confiance à Saint-Grégoire
l'illu-
m i n a t e u r : ils portaient son image en sautoir. C ' e s t sous
ce nom que la colonie a été rava
g é e , et que les colons ont été égorgés. Les mulâtres Toussaint l'autel:
n'eurent pas de peine à déterminer à être le défenseur d u trône et de il leur servit pendant un temps de
plastron. Ils disposèrent de son autorité pour J'exécution de leur projet d'indépendance,
et
se rendre de plus en plus favorables l'Espagne e t l'Angleterre. Toussaint
écrivit le 28 août
1 7 9 3 , la lettre suivante aux commissaires de l a République: « Nous ne pouvons nous conformer à la » volonté de la nation,
vu que depuis que le
» m o n d e règne, nous n'avons exécuté que celle franc-arbitre , qu'ils soutenaient contre les molinistes , que Dieu a donné à l'homme pour faire le mal. (1) Le monastère Ecs-Miazin,
ou Trois-Eglises en
Perse , est situé à l'endroit où était le Paradis ter restre , à cinq lieues de d'Erivan.
( 5 4 ) » d'un roi. Nous avons perdu celui de France ; » mais nous
sommes
chéris de celui d ' E s -
» pagne, qui nous témoigne des récompenses , » et ne cesse de nous secourir. C o m m e c e l a , »
nous ne pouvons
»
missaires,
» un roi.
vous aurez
comtrôné
»
Toussaint prouver
vous reconnaître
que lorsque
se
rendit aux
sa foi à la religion
Gonaïves,
pour
chrétienne ( 1 ) .
(1) Les nègres sont extraordinairement supersti tieux , et adoptent facilement tout ce qu'on leur suggère à cet égard. La politique prescrit de n'au toriser à Saint-Domingue que le culte catholique, et de le faire
professer à tous les nègres.
Dans les possessions anglaises , les nègres y p r o fessent, par simulacre , les différens rits en usage en Afrique , et enterrent avec les cérémonies de l e u r pays ; c e qui en fait des peuplades distinctes , les maintient dans les haînes qui existent à la côte de Guiné entre les diverses tributs, et les tient, à l'aide du rhum,
dans un état de fermentation dan
gereuse. Presque tous les nègres domestiques lisent les gazettes : c'est une instruction perfidement don née par les anglais à leurs esclaves , qui dévoile suffisamment leur projet pour l'indépendance géné rale des colonies , et la liberté des nègres. Le roi de Dannemarck
a fixé à une époque très-prochaine,
la liberté générale des nègres soumis à sa domina tion aux Antilles.
(55) Après avoir c o m m u n i é , il monta à l'autel, prit un Christ, et se retournant vers les nègres qui étaient dans l'église, il leur dit : «
Zote
» coné
Blan
bon Giu;
cé li mo fé
zote voer.
» touyé li; t o u y é blan yo toute. » ( V o u s c o n naissez le bon D i e u ; c'est lui que je vous fais v o i r . Les blanss l'ont tué; tué tous les b l a n c s ) . T o u s les blancs qui tombèrent sous leur m a i n , furent massacrés ou noyés. C'est Toussaint qui
mit les
noyades
en
vogue à Saint D o -
mingue. Lorsque la république accorda la paix à l'Espagne, Toussaint
se réunit avec ses troupes
aux français. Pour témoignage de sa fidélité, il fit égorger tous les espagnols qui se trouvaient
sous ses ordres. Sa politique le c o n
duisit à s'emparer des rênes du gouvernement, et par suite à l'indépendance , sous la protec t i o n des anglais. De
la révolte
des mulâtres
libres.
L e s différentes révoltes des mulâtres libres, p o u r assurer leur indépendance, ont été une suite des combinaisons politiques de l'Angle t e r r e , q u i , depuis plus d'un d e m i - s i è c l e , m a nifeste hautement l'intention de rendre toutes les colonies indépendantes : son existance r e posant sur le c o m m e r c e , et sa population
(56) bornée ne lui permettant pas d'en avoir en souveraineté, c'est-à-dire, peupler les c o l o nies d'anglais ; c'est
dans ces vues que
le
cabinet de Saint-James inspira aux jésuites , dont il protégeait les principes parricides, d ' e n vahir la, souveraineté dans le Paraguay
; de
faire usage à Saint-Domingue , contre ménager les sang mêlés libres, un
les
de leurs armes favorites ; mais d e
blancs,
peuple
des sujets
nouveau,
pour en faire
c o m m e ils s'étaient fait
au Paraguay , des peuplades
in-
diennes.
Les diverses révoltes auxquelles les m u lâtres libres se sont livrés depuis quinze a n s , prouvent
jusqu'à
l'évidence qu'ils sont
de
caractère séditieux. La certitude en était m ê m e acquise pour ceux de la Guadeloupe,
depuis
environ soixante-dix a n s , et pour ceux de Saint-Domingue , depuis cinquante ans. La majeure partie des mulâtres libres, était il y
a cinquante a n s , incorporée avec
les
blancs dans les compagnies de milices. Par cet ordre de c h o s e s , il n'existait dans les m u lâtres aucune force offensive à craindre. Cette force était fixée au besoin qu'on en a v a i t , c o m m e accessoire.
Leur réunion aux blancs
dans les compagnies de milices, doublait la force de ces derniers.
(57) On avait impolitiquement formé dans ces temps reculés, des compagnies de mulâtres libres, qui étaient commandées par des offi ciers pris dans leur caste. Ces officiers sangmêlés , apprécièrent ce que présenterait de force leur caste , armée et commandée par eux. Ils obligèrent, en conséquence, les sangm ê l é s , incorporés avec les b l a n c s ,
d'aban
donner ces derniers, et de s'enrôler dans les compagnies de couleur. Ce mouvement séditieux était trop frap p a n t , pour qu'on se méprît sur la cause qui l'avait déterminé. Il fut ordonné que les c o m pagnies
de mulâtres seraient
par des officiers blancs, sent être mises en
totalité
commandées
afin qu'elles ne p u s ou partiellement en
a c t i o n , qu'avec connaissance des motifs qui y détermineraient. En
1 7 7 0 , les mulâtres étaient tellement
prononcés à Saint-Domingue, et reconnus dan gereux , que le procureur-général du conseil supérieur du Port-au-Prince, fut o b l i g é , par les devoirs de sa p l a c e , de fixer l'opinion du gouverneur-général, c o m t e de Nolivos, l a nécessité de conserver aux blancs la
sur supré-
matie sur les mulâtres, pour maintenir la f o r c e m o r a l e , qui depuis
deux siècles tenait les
esclaves dans l'obéissance.
(58) Depuis 1 7 8 9 , les mulâtres ont constamment été en révolte à Saint-Domingue ( r ) : ils ont été en révolte contre leurs pères.
O n en a
entendu qui se portaient mutuellement parricide. « Touyé papa moé, ma touyé
au
quena
» toué. » ( T u e mon père, je tuerai le t i e n ) . Ils ont été réunis aux mulâtres espagnols. Les colons qui tombaient dans les mains de ces assassins, furent par eux vendus
aux nègres
qui les égorgeaient sous leurs y e u x . Ils ont été en révolte contre l'assemblée nationale et le roi , en refusant d'obtempérer au décret d u 2 8 septembre, qui accordait aux assemblées coloniales de prononcer sur l'état des personnes non libres, et sur l'état politique des h o m m e s de couleur. Ils ont été trois fois en révolte contre les agens du directoire : ils ont fait arrêter le gouverneur Laveaux
et plusieurs
membres des premières autorités. Sonthonax a été o b l i g é , par le cri de sa conscience, d e proclamer que ses frères mulâtres étaient en révolte contre la mère-patrie ; qu'ils voulaient
( 1 ) Le nommé Ogé , quarteron, boucher au quar tier du Dondon , vint en France, où il fut
illuminé.
11 repassa dans la colonie, et fut chef de la pre mière révolte. Il s'était fait peindre en France, d é coré de la croix de Saint-Louis.
( 5 9 ) se
rendre
indépendans
;
qu'ils
étaient des
assassins conduits aux crimes par des chefs
a t r o c e s : les deux Monville,
Rigaud,
Salomon,
Villate,
Lefranc
et
Duval, Pinchinat.
L e s mulâtres ont été en révolte contre saint,
Tous-
p o u r usurper la souveraineté dans
le
sud et l'ouest de la colonie. C e c h e f noir ayant d é c o u v e r t leur c o m p l o t , les poursuivît c o m m e d e s êtres d a n g e r e u x , et les contraignit d e fuir l e sol de la colonie : il ne conserva près de lui que
les chefs des mulâtres
qui lui étaient Lamarti-
e n t i è r e m e n t dévoués , n o t a m m e n t nière.
Ils se révolteront, par les m ê m e s p r i n
c i p e s , contre Dessalines
; s'ils se v o y e n t l e s
p l u s f a i b l e s , ils se réuniront à leurs
anciens
a l l i é s , les mulâtres e s p a g n o l s , et traîtreuse m e n t aux français. Il serait avantageux à la chose
publique,
d e les abandonner
à eux-
m ê m e s , contre Dessalines et C h r i s t o p h e . Après les premiers succès d e l'armée fran ç a i s e , les mulâtres se réunirent à nos t r o u p e s , d a n s l'espoir d e quelques chances
heureuses
à leurs projets. L e fléau qui a ravagé l'armée l e u r fut f a v o r a b l e ; l e s généraux et officiers mulâtres
se révoltèrent
le 22
a n X I , contre le capitaine-général
vendémiaire Leclerc.
Six mois a p r è s , la caste entière ayant e u l'as surance de la guerre avec l ' A n g l e t e r r e ,
elle
(60) se mit en révolte contre le
capitaine-général
Rochambeau. Les
mulâtres ont porté les esclaves à la
révolte: ils en ont fait l'aveu en l'an I V , dans plusieurs écrits. « Toussaint,
y disent-ils, eut
» pitié du projet insensé de réunir les » aux
noirs,
contre
les
» qu'ils se sont levés contre » qu'ils ont secondé » conquête
parce et
l'oppression,
les africains
de leur liberté.
blancs
mulâtres,
dans
la
»
Lorsqu'on a appelé ceux des mulâtres qui paraissaient ne pas être réunis aux révoltés, à prêter le serment
civique,
on inséra dans
ce serment de porter respect aux blancs. Cette clause étant une reconnaissance de dance
dépen-
envers les blancs , les mulâtres
s'y
refusèrent. L e refus que firent les mulâtres de respect
porter
à leurs pères , détruisit la force m o
rale, en même temps qu'il fit connaître le degré de leur orgueil et leur prétention, n o n seulement à l'égalité des droits, ver à la
mais à s'éle
suprématie.
Les mulâtres s'apprécient de telle i m p o r tance , qu'ils se croyent supérieurs à la classe des autres hommes. Serait-ce sous les rapports des forfaits qu'ils ont commis? Par leur i m moralité, leurs cruautés envers leurs nègres ,
( 6 1 ) leur insociabilité et leur mépris envers leurs inférieurs ? Par leur caractère félon et leur lâcheté, lorsqu'il faut guerroyer au-dehors pour l'intérêt de la patrie ( 1 ) ? Et ce sont de tels hommes q u ' o n élève au nec
plus ultra ! En croyant faire l'éloge des
mulâtres, on n'a fait que les démasquer. U n de leurs défenseurs a écrit : « Les » lâtres peuvent, »
sans le secours
des
livrer la colonie à une puissance
mu-
blancs,
étrangère
;
» les blancs ne le peuvent pas sans le secours » des mulâtres. » C e défenseur, à qui la colonie doit particu lièrement les malheurs auxquels elle a été l i v r é e , n'a pas senti qu'au lieu de faire l'apo l o g i e des mulâtres, il les présentait c o m m e d e s h o m m e s sur la foi desquels on ne pouvait
(1)
Les mulâtres
ont
p r o u v é au s i é g e d e C a r t a -
g ê n e , e n 1 6 9 7 , qu'ils é t a i e n t l â c h e s . I l s ont p r o u v é à
Savannah ,
eu 1 7 7 9 ,
lors d e la
r i q u e , qu'ils n ' a v a i e n t p a s
guerre
d'Amé
acquis plus d e c o u r a g e
p e n d a n t les q u a t r e - v i n g t s a n n é e s q u i se s o n t é c o u l é e s , durant Pans
ces
deux
le m ê m e
époques
humiliantes
pour
t e m p s , les q u a r t e r o n s et les
eux. métifs
p r é f é r è r e n t s u p p o r t e r l e s h u m i l i a t i o n s l e s plus d é gradantes , pour
plutôt
que d e fournir
l'expédition de
Savannah.
un
seul h o m m e
(62)
c o m p t e r , qu'il convenait de surveiller et d e leur ôter les moyens de nuire. C'est au n o m de tels h o m m e s , que M . Id.... crie anathème et provoque la vindicte p u blique. « Une faute funeste c o m m i s e , dit M.
Id...)
» a été le mécontentement dans lequel on a » jeté les mulâtres par tous les genres
de
» vexations. Ils s'élevaient dans le sud à plus » de huit mille hommes
(1), tous aguerris,
» entreprenans, nourrissant contre les nègres » une animosité égale à la fureur avec laquelle » ils avaient été traités; identifiés au salut d e » la colonie par d'immenses possessions (a)
(1) La population des mulâtres, hommes, femmes et enfans, n'était, en 1789, que de 30 mille individus. Toussaint en a fait périr les trois quarts. En l'an X I , et à l'époque dont parle Ml Id
, cette population.
était réduite à moins de 8 mille individus des deux sexes. Il existait donc alors , tout au plus , deux mille sang-mélés en état de porter les armes dans cette colonie. (2) Celles que possèdent les mulâtres , provien nent des blancs. qu'ils
livraient
vingtième.
L'immensité pour les productions au commerce , se réduisait
au
Dans les mains des blancs , ces posses
sions, qui sont dans l'ouest et le sud, rendraient la quintuple.
( 6 3 ) » notre cause était la l e u r ( 1 ) . Eh b i e n ! qui » croirait que ces h o m m e s , dont l'union avec » nos troupes nous rendait invincibles ( 2 ) , » ont été placés par des mesures, hélas trop » rigoureuses, dans l'alternative affreuse » la rébellion
ou de la mort!
de
L'étendard de
» la révolte a été levé ; dans six semaines il » ne nous restait dans le sud ( 3 ) , que q u e l » ques bourgs. Voilà une vérité bien d o u l o u reuse ; en vain, j'ai voulu la renfermer dans » m o n âme : intérêts de ma patrie, vous m e » l'avez arrachée ! » Eh ! quels sont ces grands c o u p a b l e s , ou c e l u i qui a placé les mulâtres dans native
(1)
a f f r e u s e de la rebellion
Si
raison. pas
M.
Dans
l'alter-
ou de la mort ?
p a r l e des indépendans,
Id
il
l e c a s c o n t r a i r e , son affirmation
a
n'est
véridique.
( 2 ) L e s m u l â t r e s n e se s o n t réunis à n o s t r o u p e s , q u e lorsqu'ils ont reconnu tain ,
et
que
les
nègres
que le étaient
succès
était c e r
subjugués
par la
v a l e u r des F r a n ç a i s . L a m a j e u r e p a r t i e était h o r s d e la
colonie. (3)
Le
sud
a été
mandés
par des
régime
de
envahi
généraux
Toussaint,
par
des nègres
mulâtres ,
s'étaient
qui,
réfugiés
com
sous à la
le Ja-
(64) C'est le secrêt de M . Id
;
ne désigner
aucun des généraux, c'est les inculper tous. Cette politique est très-adroite: O n
pourra
répondre à tous individuellement : ce pas
vous;
on
pourra
même
n'est
accuser
les
morts. Le prétendu coupable n'est cependant point mort. Les deux phrases suivantes déchirent le voile qui le couvre. « Envoyer à Saint-Domingue, dit M . Id..., » un chef à qui les localités seraient étran» gères , c'est lui préparer des écoles ; y faire » passer celui qui y aura marqué par ses v i o » lences, c'est tout gâter. » T o u t est énigmatique chez M . Id
, il
faut trop de pénétration d'esprit, pour d e v i ner à qui se rapporte le pronom celui,
dans
la dernière phrase tortueuse de la citation. D e la franchise , M . Id
, nommez ce p r é
tendu coupable. a-t-il pu oublier
Comment M . Id
que dans tous les temps, les mulâtres ont été traîtres à la patrie ,
et assassins de leurs
pères, lui q u i , commissaire-ordonnateur pour la partie du sud, sous les ordres des généraux Kerverseaux
et Desfournaux,
l'an I V , c o m m e conspirateurs, Sonthonax,
les
a réclamé en au nom
de
chefs des mulâtres q u i , en fuyant
( 6 5 ) fuyant de la colonie , étaient tombés au p o u voir des anglais, et que ces derniers ont r e fusé de remettre. Qu'a l'arrivée de l'armée à S t . - D o m i n g u e , on ait considéré par clémence,
les crimes passés des
mulâtres, c o m m e étant dus aux circonstances du
temps où ils ont été c o m m i s ; qu'on les
ait considérés c o m m e
étant la suite d e la
manifestation des droits
de l'homme,
qui a
ébranlé toutes les nations de l'Europe ; q u ' e n fin o n ait bien voulu oublier les projets des mulâtres , depuis soixante ans, et leurs diffé rentes révoltes, concedo.
Mais pouvait-on voir
d u m ê m e œ i l , la révolte de Clerveau Pétion
et d e
, contre le capitaine-général Leclerc
t
P o u v a i t - o n oublier qu'à l'époque de l'arrivée de l'armée, Lamartinière
fit
saisir beaucoup
d e blancs au Port-au-Prince; qu'il les c o n duisit aux Verrettes,
o ù s'était tenue l'assem
blée principale des mulâtres ( au c o m m e n c e m e n t de la r é v o l u t i o n ) , dans laquelle ils v o tèrent unanimement le refus pect
aux blancs;
de porter
res-
et que l à , Lamartinière fit
égorger tous ces blancs sans distinction d'âge ni d e sexe. Clerveau
et Pétion
étaient, en vendémiaire
an X I , et sont encore aujourd'hui, l'âme de leur caste. La levée en masse des m u l â t r e s , E
(66) contre le capitaine-général R o c h a m b e a u , était la suite de leur révolte contre son prédéces seur; la caste entière n'a différé durant six mois à prononcer ouvertement sa r e b e l l i o n , qu'afin d'avoir pour auxiliaires les anglais , leurs anciens alliés, dont ils connaissaient les dispositions hostiles contre la France. Dira-t-on aussi que c'est par suite des m e sures , hélas ! trop rigoureuses,
que ces d e u x
chefs mulâtres et leurs officiers, se sont r é voltés contre le capitaine-général Leclerc ? Ils étaient comblés d'honneurs et de richesses ; leur traitement
de solde et de table était
toujours acquitté de préférence. Le général Leclerc avait une prédilection pour Pétion
particulière
; il y avait quatre jours qu'il les
avait réunis en Un banquet splandide. veau et Pétion
recevaient ces
Cler-
témoignages
d'affections avec dédain. Ils disaient avec D e s salines et Christophe : « Yo gagné p e u r . » ( ils ont peur ) . Toussaint avait également eu l'intention d e se révolter de nouveau. Dessalines, tophe,
Clerveau
et Pétion,
Chris-
non moins a m b i
tieux que leur ancien chef, le dénoncèrent pour s'emparer eux-mêmes de l'autorité. T o u s saint fut embarqué pour France. Dessalines
remplissait les fonctions d'ins-
(67) pecteur-général des troupes de sa caste. Elles consistaient
en
treize
demi-brigades , qui
étaient incomplètes. Elles formaient alors une armée de sept mille
hommes.
Les deux tiers de ces troupes étaient r é partis à une demi - lieue de la ville du Cap , sous les ordres de Christophe et de Clerveau , dans les bourgs de la Petite-Ance
et du
du Cap. Le troisième tiers était aux s o u s le commandement de
Haut-
Gonaïves
Pétion.
C e s généraux nègres et mulâtres réunirent l e u r s troupes. Ils renvoyèrent au capitainegénéral Leclerc,
quelques canonniers blancs
q u ' i l s avaient en leur disposition, et lui firent d i r e qu'ils lui donnaient cuer
la colonie.
Christophe
trois jours
pour
éva-
Lors de l'évacuation du C a p ,
et Clerveau ne voulaient également
a c c o r d e r que trois jours au capitaine-général Rochambeau. L a garnison du Cap consistait alors en cinq cents
hommes
de troupes de ligne, qui p o r
taient en eux le germe de la cruelle maladie q u i régnait depuis plusieurs m o i s , et en un pareil nombre de gardes nationales, organi sées le jour m ê m e . Le capitaine-général L e c l e r c se mit à la tête d'une partie de la garni s o n et de toute la garde nationale; il fonça s u r les révoltés, et en fit un tel carnage, que E 2
(68) pendant environ un a n , leurs attaques ne furent plus que des incursions de bandits. Pendant les quatre premiers mois de l'an X I , les mulâtres machinèrent sourdement ; l ' a r rivée de quelques renforts leur eu imposait ; ils ouaignaient que la guerre avec l'Angleterre n'eût pas lieu. D'après les avis qu'ils reçurent, ils augmentèrent d'audace avec le r e n o u v e l lement de la saison qui , l'année p r é c é d e n t e , avait été si fatale à l'armée française. On eut connaissance en pluviôse an X I , que les mulâtres de l'Ouest et du Sud,
étaient
dans une rumeur qui annonçait des r é s o l u tions d'autant plus violentes, que leurs propos manifestaient des vues hostiles. On appritqu'ils resserraient
leurs liaisons avec
par l'entremise de Clerveau,
Dessalines
que le capitaine-
général cherchait à réunir aux français. O n eut la certitude qu'il n'y avait plus de foi à faire sur le général de brigade Cangé, le commandant Ferou.
ni sur
O n apprit aussi q u e
l'intimité de ces chefs mulâtres avec les g é n é raux nègres déjà désignés, et avec Mort,
Capoix-la-
autre c h e f nègre et l'un des h o m m e s
le plus féroce qu'ait produit l'Afrique , ten dait à expulser tous les blancs de la colonie. Ces mulâtres faisaient circuler
des lettres
qu'ils avaient reçues de l'étranger; ils t é m o i -
( 6 9 ) gnaient une joie indécente , de ce qu'on leur annonçait que la guerre avec l'Angleterre était certaine. C'est par eux qu'on en eut les p r e miers avis. Ils l'annoncèrent deux mois avant q u ' o n n'en eût la certitude. Begon
, mulâtre
pêcheur , actuellement grand-amiral,
mani
festait alors ses projets , par le nombre de barges
(1) qu'il faisait construire sur les côtes,
depuis la baye des Flamands jusqu'au
Port-
au-Prince et St.-Marc. Malgré tout c e qu'on avait à reprocher aux mulâtres depuis la révolte de Clerveau de Pétion,
et
le général en c h e f ne considérant
q u e l'intérêt de l'état , n'écoutant point les clabauderies des personnes qui tenaient encore aux
anciens préjugés
, suivit la marche poli
tique de son prédécesseur, et leur continua les m ê m e s égards. Il assimila leurs femmes blanches
aux
dans les fêtes qu'il donna pour cal
m e r le public , sur les craintes qu'inspirait la maladie qui décimait chaque jour
l'armée. Le
capitaine- général avait d'autant plus de raison d e tenir cette marche politique, que plusieurs fonctionnaires, des employés, et des personnes chargées de diverses services , avaient épousé
(1)
B a r g e s , p e t i t e s e m b a r q u a t i o n s p o n t é e s , por
t a n t 25 à
30 hommes,
et a l l a n t à v o i l e et à r a m e s .
(70) des femmes de couleur et de couleur
mitigée,
nées dans les différentes colonies françaises. Il fallait cependant convaincre les mulâtres, qu'on avait connaissance de leurs menées e t de leurs perfides intentions. L e capitaine-gé néral Rochambeau, dont le caractère était p a r faitement
connu
des
mulâtres
, puisqu'ils
avaient écrit en l'an I V , lors de son premier commandement à St.-Domingue , et p o u r faire son éloge : « qu'il était inflexible el n e » savait pas plier sous le joug
des
circons-
» tances , lorsqu'il s'agissait de l'honneur » , voulant leur prouver qu'en les assimilant
aux
blancs, il n'agissait pas d'après le sens que p r é sentait leur expression « y o gagné peur»,
leur
donna un bal dans un salon tendu aux trois couleur , blanc , jaune
et noir , qui présentait
aux j e u x l'emblême d'une réunion
générale
des trois castes , mais qui dans son véritable sens, disait à la caste jaune
: choisissez
entre
les blancs et les noirs. Ils fuirent voyant leur trahison découverte. O n avait espéré qu'ils témoigneraient des regrets de leur conduite. Jusqu'à l'époque de ce bal emblématique
,
les mulâtres avaient été choiés , et tout leur avait prouvé de la part du g o u v e r n e m e n t , qu'il n ' y aurait plus de différence
entre
les
blancs et eux. D e s mulâtres avaient été a d -
(71) mis avec distinction, dans le militaire ; d'au tres étaient employés dans les bureaux des d i verses administrations , suivant leur capacité. C'était pendant qu'on les naturalisait
de fait,
qu'ils s'acharnaient contre les français , lorsqu'ils auraient dû leur témoigner leur reconnaissance. La preuve de l'existence de la trahison des mulâtres était acquise depuis long-temps. On avait également la certitude que leur dissimu lation était à son terme. L'explosion se manir festa dès qu'ils furent certains de la guerre a v e c l'Angleterre. Sur ces entrefaites , les c i r constances commandèrent
de repousser un
rassemblement de nègres armés. Le Darbois
général
(1) c o m m a n d a aux gardes nationales
mulâtres , de se réunir à nos troupes. mandant Ferou
répondit : « Nous
Le
com
sommes
» prêts à c o m b a t t r e , mais c'est contre les
( 1 ) C e général q u i , p a r les d e v o i r s d e sa p l a c e , a é t é o b l i g é , plus que tout a u t r e , de s é v i r c o n t r e mulâtres, chose
a été
victime
de son
p u b l i q u e . Il est m o r t
dévouement
prématurément
les à la
entre
l e s m a i n s des a n g l a i s . Il est certain q u e les m u l â t r e s ont demandé
aux
anglais cet o f f i c i e r - g é n é r a l , p o u r
l'offrir en h o l o c a u s t e a u x m â n e s de leurs justicies.
complices
» français. »
(72) Le général de brigade
Cangé
était également en rebellion ouverte. Alors il n'y eut plus à délibérer. Atteindre les factieux par tous les moyens possibles , était un devoir. La caste entière se trouvait hors de la loi.
En vendémiaire
an X I I
,
(1) , fut convaincu d'avoir soulevé les
Ar....
mulâtres de la partie du n o r d , et d'embaucher pour eux. Les exécutions furent de nécessité , en proportion de la nature des délits , ainsi qu'elles avaient déjà eu lieu en vendémiaire an X I , contre les agens complices et a d h é rans de Dessalines
et Christophe.
Si à cette
époque , le capitaine-général Leclerc
eût p u
sévir rigoureusement contre la caste jaune d'après
la révolte
Clerveau
et Pétion
des généraux
,
mulâtres
, les français n'eussent
pas été obligés d'évacuer la colonie. O n voit par tous les faits rapportés , qu'on n'a pas exercé de rigueurs
sans causes, contre
les mulâtres. Conquête
de Saint-Domingue taine-général
par
le
L e capitaine-général Leclerc effectua
(1)
Il d o i t l a v i e
général
Rochambeau.
à
la
capi-
Leclerc.
clémence
du
sans
capitaine-
auxiliaires
(73) , la conquête de St.-Domingue ;
avec une armée de quinze mille hommes qu'il avait en partant de France. Les nègres après avoir incendié les villes et les habitations , se réfugièrent dans les doubles montagnes. Ils y furent atteints de toute part. Ils mirent bas les armes à l'ar rivée des premiers renforts. L e s fatigues de la m e r qu'avait éprouvées l ' a r m é e , mirent des malades à l'hôpital dans l e s premiers instans du débarquement. L'attaque trop valeureuse du
Morne-à-Pier-
rot , o ù le capitaine-général Leclerc
, et tous
l e s généraux sous ses ordres furent b l e s s é s , e n l e v a plus de douze cents hommes à l'armée. C e t t e perte fut une suite du défaut de connais s a n c e des localités , et de la manière dont se battent les nègres. L'attaque se fit avec trop p e u de troupes ( 1 ) . En ajoutant à cette énumération d'hommes tués et de malades repartis dans les hôpitaux, c e u x que le capitaine général Leclerc
(1)
a été
S i l e n o m b r e d e s t r o u p e s eût é t é a s s e z c o n s i
d é r a b l e p o u r c e r n e r e n t i è r e m e n t le M o r n e - à - P i e r r o t , l a c a m p a g n e e û t é t é t e r m i n é e a l o r s , et a v e c m o i n s d e p e r t e q u ' o n n ' e n é p r o u v a dans c e t t e a t t a q u e . D e s sa l i n e s et l e s autres chefs n ' e x i s t e r a i e n t p l u s .
(74) dans l'obligation de mettre en garnison d a n s les places qu'il enlevait , on trouvera que c e général
a f a i t , avec dix mille
hommes
de
troupes
de ligne , une guerre
offensive
et
vaincu des ennemis sanguinaires , aguerris e t habitués à la rapine , par dix années de g u e r r e de révoltés contre révoltés. Les nègres étaient à cette époque organisés, et dans toute la force
de leur enthousiasme
séditieux. I l s
étaient fortifiés dans l'intérieur; ils possédaient une artillerie considérable, des munitions d e guerre de toutes espèces , et plus de v i n g t millions dans leurs caisses militaires,
non
compris les richesses métalliques que p o s s é daient leurs généraux. L'armée française formait une réunion d e braves. Ils devaient vaincre, quelqu'opposition que les nègres eussent présenté par leur n o m bre. L'armée fut victorieuse; en trois mois la colonie fut pacifiée et réorganisée. Les
mulâtres
se montrèrent lorsque les
troupes françaises eurent fait plier e t fuir les nègres de toutes parts. Les uns arrivèrent des diverses Antilles, où Toussaint les avait forcés de fuire. Plusieurs de ceux réfugiés à la J a m a ï q u e , demandèrent à rentrer. D e ce n o m b r e était Férou
et Cangé.
L e capitaine-général
leur envoya une frégate, qui les ramena d a n s
( 7 5 ) la colonie. Les autres étaient dans la stupeur, et cachés dans le
sud.
Après la campagne terminée, l'armée fran çaise fut mise en garnison dans les villes, q u i , p o u r les européens, sont des cimetières.
L'ar
m é e des nègres campa avantageusement. L e s esclaves reprirent leurs travaux
jour
n a l i e r s . Les villes (1) et les habitations incen d i é e s furent réédifiées. L a tranquillité apparente des nègres rendit a v e u g l e sur leurs moyens faciles de révolte.
( 1 ) S i , au lieu de réédifier le Cap , on eût jeté les fondemens de la ville capitale à la Petite ance , ainsi maître
que tout le commandait,
on serait encore
de toute la partie du nord. Les troupes fran
çaises sont invincibles dans la plaine. Les vivres de terre eussent été assurés ; l'entrée de la baye se fût trouvée interdite à l'ennemi, en élevant une bat terie sur LES
RESSIFS , le fort
Picolet
n'offrant que
peu de défense. Un bras de la rivière du haut du Cap , eût traversé la nouvelle ville. La reconnais sance des colons l'eût nommée Napoléon.
Tout con-
court à la Petite-Ance pour y bâtir une ville du premier ordre, et la plus belle, en formant dans chaque rue des avenues d'arbres , avec des trotoirs couverts, attenant aux maisons. Quant aux maré cages , ils eussent disparu par suite des traveaux que la défense de la place eût nécessités.
( 7 6 )
La fortune abandonna les français, dès q u e l'armée fut mise en garnison dans les villes. Les troupes furent atteintes de maladies
in-
( 1 ) . Celles qui arrivèrent
de
(1) Maladies inflammatoires. — Les mortalités
ont
flammatoires
été si multipliées , qu'il a fallu chercher à donner un nom à la maladie. Le fléau a existé ; la dénomi nation de la maladie est restée incertaine. Maladie Siam. — Fièvre
des Barbades.
Depuis l'établissement
— Fièvre jaune
,
de
etc.
de la colonie, tous
les
européens , en arrivant et en séjournant dans les villes, ont payé un prompt tribut au climat. Toutes les maladies sont inflammatoires.
On n'y connaissait
pas la fièvre jaune.
Avant la révolution, les maladies étaient traitées à St.-Domingue, d'après les
connaissances-pratiques.
On sauvait beaucoup de malades; des bains, des saignées
à propos
( les malades sont presque tou
jours épuisés par les jouissances qu'ils ont prises avec les femmes de couleur , lorsque la maladie se d é c l a r e ) , l'émétique en grand lavage, avec quelques grains de tartre solube ; des tisanes un peu aci dulées, des limonades d'oranges de bois ou amères; quelques purgatifs doux ; mais plus que tout, des soins et des attentions recherchés. ( Les femmes de couleur excélaient en ce genre de service ) . Un bon coucher, une grande propreté sur les malades et autour d'eux. ( Le pays fournit abondamment des plantes émoliantes, etc. même la salse-pareills
et
(77) F r a n c e , furent frappées de la crainte de la m o r t , et perdirent toute la confiance qui avait
l a squine,
q u i , à la d o s e d'un quart d e p l u s , p r o d u i t
s u r l e m a l a d e le m ê m e effet que l a m e i l l e u r e
qu'on
a p p o r t e dans l a c o l o n i e ) . L a v e u v e C o t i n , m u l â t r e s s e , qui était a p p e l é e l a b i e n f a i t r i c e du g e n r e h u m a i n , guérissait la m a l a d i e de
S i a m , en faisant
trois verres de vin jaune
p r e n d r e à ses m a l a d e s ,
dans
rouge , une noix m u s c a d e et un
d'oeuf b i e n cuits sous l e s c e n d r e s
et
m i s en
p o u d r e , c e qui produisait d e grandes t r a n s p i r a t i o n s , et
sauvait les m a l a d e s . On
a publié
qu'il y a e u d e nos s o l d a t s qui
é t é a t t e i n t s d e pustules
pianiques.
ont
Il est p r o u v é
par
d e u x s i è c l e s d ' e x p é r i e n c e s , q u e les b l a n c s ne g a g n e n t pas les
le
par
pian
mulâtres
la c o h a b i t a t i o n a v e c l e s n é g r e s s e s .
en
sont
exempts ,
et
beaucoup
dé
n è g r e s c r é o l e s . C ' e s t d o n c e n c o r e un é v é n e m e n t e x traordinaire. Durant nos
les d i x a n n é e s d e l a r é v o l u t i o n française ,
t r o u p e s o n t c o n t i n u e l l e m e n t é t é garnies d e
e t de v é r o l e , p r i s e s e n I t a l i e ,
s o n t pas bénignes. Est-il étonnant, s i d è r e que
ces maladies
n'ont
gale
où ces m a l a d i e s lorsqu'on
été que
ne
con
palliées en
E u r o p e , p a r la faute d e s m a l a d e s , q u e l a c o m p l i c a t i o n d e ces m a u x réunis à la m a l a d i e du p a y s , a i t p r o d u i t a u t a n t d e m o r t a l i t é s ! I l n ' y a pas eu de m a ladies
épidémiques
à
années X , X I et X I I .
Saint-Domingue , D a n s t o u t e s les
dans
les
maladies à
(78) été l'âme des premiers succès de l'armée. Si les troupes eussent été maintenues en
activité
Saint-Domingue, l'objet principal est de rétablir les transpirations. On a également publié que les hôpitaux étaient mal situés, mal distribués, encombrés de toutes sortes de malades et dénués
de tout;
que le tafia
nouveau est un poison; qu'il faut habiller les troupes en drap, et qu'elles furent incommodées dans les caféteries par les chiques. Les mortalités sont provenues de ce que les hôpi taux étaient dans les villes ; il y en avait de bien situés et de bien distribués. Comment les hôpitaux n'eussent-ils pas été encombrés, et manquant de fournitures , lorsque presque toute l'armée était à l'hôpital. L'encombrement dans les hôpitaux rend toutes les maladies mortelles , et prive les malades des soins qui leur sont dus. Dénués de tout, ne présente aucune exception. Qui veut trop prouver ne prouve rien. En 1787, 1788 et 1 7 8 9 , qui sont les années où la colonie a été la plus florissante, et qu'il y arrivait de France et des Etats-Unis plus de six cents n a vires du commerce par année , la journée de malade pour officier, était de 11 liv. 14 s. tournois, écus ; celle du soldat et du marin, 3 liv. 18 s. Il est constant qu'il a existé en l'an X , pendant l ' e x e r c i c e de la régie,
la plus grande abondance; les
malades avaient, dans quelques hôpitaux, un e x -
( 7 9 ) d a n s les mornes, pour le séjour desquelles elles étaient acclimatées en débarquant, elles se
cessif apétit, lafaim canine. On ne citera pour preuve qu'un exemple. Il résulte des étals de l'économe Gramont, et des relevés de visites qu'il a produits pour véridiques , que sur quatre cents malades qu'il y a eu constam m e n t pendant trois mois à l'hôpital des Pères , au Cap , il y en avait trois cents journellement à portion entière.
Ce qui est plus extraordinaire, trois cents
malades à portion
entière,
fous les soirs.
ces relevés portent aussi double légers
Ces états et
portions d'alimens
en ris au lait et pruneaux, malin et soir, en sus
d e la portion entière, et à tous les malades sans exception ; indépendamment encore de mille
œufs à
soixante-cinq
25 centimes pièce, qui se sont trouvés
c o n s o m m é s en trois mois , et à une époque où les habitans ne pouvaient souvent pas s'en procurer. Plus,
six mille francs de confitures. Portion entière
e n v i n , matin et soir, à tous les malades. D'après l'ordre du ministre de la guerre , le vin excédant la quotité de la prescription d'alimens , aurait dû être délivré par la pharmacie. Toutes ces pièces sont dé posées au bureau de la marine. Il y a donc eu abondance dans les hôpitaux en l'an X , puisque l'agent-général et les gardes-magasinsgénéraux ont fourni à la consommation , pour
le
gouvernement, sur la demande des économes. On doit à la vérité de dire qu'il résulte des cahiers de
( 8 0 )
fussent conservées en santé, elles en eussent imposé aux nègres ; la réunion des forces eût
visites
qu'on a p u s e p r o c u r e r , q u e l e s officiers
santé en c h e f
ont fixé l e s
prescriptions
avec
de pru
d e n c e et s a g e s s e ; m a i s l e s états et l e s r e l e v é s n e s o n t pas c o n f o r m e s aux cahiers d e v i s i t e s . D a n s les d i x p r e m i e r s m o i s d e l'an X I , l e s h ô p i taux ont été à l ' e n t r e p r i s e . Il n'y a pas eu de pendant
ce laps de temps.
L a j o u r n é e d'officier soldat
à trois
Tout
était h o r s
était à h u i t
francs. D'après
commerce de
prix.
francs , c e l l e
les
du
consommations
extraordinaires , q u i , par les circonstances , é t a i e n t d e v e n u e s o b l i g a t o i r e s , c'était trop p e u p o u r a c q u i t t e r l'effectif des
journées , en
p a y a n t e n traites e t p a r
à compte. L a
différence d e s p r i x d e l a j o u r n é e e n
l'an X I , avec
ceux
de
1 7 8 7 , 1788
et 1 7 8 9 , é t a i t
d e p l u s d'un tiers en m o i n s p o u r l e s e n t r e p r e n e u r s . Cette considération a déterminé l e préfet
Magnytot,
d'accorder
u n e a u g m e n t a t i o n d e près de moitié ,
nouveaux
e n t r e p r e n e u r s qui o n t pris l e
1
e r
.
service
aux le
v e n d é m i a i r e an X I I , e t d e m e t t r e à l a c h a r g e du
gouvernement
toutes
de circonstances.
les
dépenses
extraordinaires
U n é c o n o m e a v a i t offert d ' e n t r e
p r e n d r e c e s e r v i c e à q u a t r e francs l a j o u r n é e d ' o f f i c i e r et du s o l d a t ; la n o u r r i t u r e
journalière des offi
ciers de
eût
s a n t é à sa
charge. Il
été
imprudent
d'accepter une pareille soumission ; l'impossible
de
satisfaire au s e r v i c e à c e p r i x , était é v i d e n t . Tafia
n o u v e l l e m e n t d i s t i l l é . - Il est e n effet t r è s été
(81) facile, étant maître de l'intérieur et des
été
places le long de la côte : elles eussent assuré
n u i s i b l e à la santé des t r o u p e s . Il e x a l t e la tête des nègres. police
Il en
n'a
jamais
vigueur
s ' e n faisait.
Le
devrait
être
en
peuvent
en
existé
aucun
c o n t r e la
vieux
tafia
délivré
boire
au
réglement
de
facile distribution
qui
est b a l s a m i q u e : il
ne
aux n è g r e s q u e
moment
qu'ils
ce
en
qu'ils
font
la
d e m a n d e , ou sur un b o n de leurs m a î t r e s , p o u r l e service
des h a b i t a t i o n s . L a
vente
du tafia
devrait
ê t r e e x c l u s i v e m e n t r é s e r v é e à des b l a n c s qui s e r a i e n t a u t o r i s é s ad Vêtemens
hoc. Habit-veste
des troupes. —
d e d r a p , en campagne.
et pantalon
H o r s du s e r v i c e , d e u x h a b i t s -
v e s t e e t p a n t a l o n s sans p i e d s , d e coutil b l a n c , p o u r o b l i g e r à l a propreté. Les
Chiques. — C e t i n s e c t e s'attache d e
préférence
a u x p i e d s m a l - p r o p r e s . C e n'est pas s e u l e m e n t d a n s les
cafeyeres
qu'il
existe
t o u t e s les habitations l'attention
et
des
dans
chiques, mais dans les v i l l e s .
On
avait
dans l e s h a b i t a t i o n s , d e faire a l l e r j o u r
n e l l e m e n t à l ' h ô p i t a l l e s enfans
des n è g r e s , o ù o n
l e u r visitait l e s p i e d s et les m a i n s . I l n ' y a q u e p a r e s s e u x e t les m a l - p r o p r e s qui se l a i s s e n t par faut
les c h i q u e s . avoir
A
soin d e
la
première
démangeaison, et
les
ronger
mettre
il
les
faire
retirer,
du
t a b a c dans le t r o u . Le
rotou
est l e p o i s o n des c h i
q u e s : elles s'attachent
d a n s la c h a i r ; m a i s
n a i r e et de p r é f é r e n c e ,
a u - d e s s o u s et a u - d e s s u s d e s
F
d'ordi
(82) la sécurité des blancs, et maintenu la tran quillité dans les plaines, lorsque, réparties dans les villes ou dans les plaines, il n'y a pas d e sécurité pour le séjour des mornes. Les troupes qui arrivèrent eussent été animées du desir de rejoindre leurs devanciers, de partager la gloire de leurs exploits, et de mériter d'être comptées au nombre des défenseurs de
la
colonie. L'armée eût trouvé dans les mornes , une nourriture abondante; les salaisons y e u s sent été utiles , lorsque dans les villes c'est u n aliment meurtrier. La culture eût été reprise avec succès , et on eût eu le temps d'assurer immuablement l'ordre. Une grande faute a été commise ; c'est de n'avoir pas manifesté affirmativement la volonté
souveraine.
A l'époque du départ de
l'armée des ports de France, le gouverne ment avait l'intention bien prononcée d'ap peler les nègres de Saint-Domingue à la liberté
o n g l e s des p i e d s . L a c h i q u e s ' e n v e l o p p e d'une m e n b r a n e b l a n c h e , dans l a q u e l l e e l l e p o n d . I l faut s c a rifier la chair
tout autour d e l a p o c h e , e t l a retirer
e n t i è r e . Si on l a r o m p t , il reste chair,
et
l'homme
mal-propre
des œufs d a n s est
exposé
u l c è r e s m a l i n s qu'il est difficile d e g u é r i r .
à
la des
( 8 3 ) conditionnelle; c'est-à-dire, les obliger avec la liberté à travailler. L e s nègres cultivateurs ont été dans l'in certitude de leur sort, d'après l'opposition de Toussaint,
à main armée. Les colons se sont
j e t é s dans les espaces imaginaires, en c h e r c h a n t dans le silence, des c h e f s , après q u e se fût soumis , à pénétrer ce que
Toussaint
voulait réellement le gouvernement. D u silence d e s c h e f s , il est résulté un conflit d'opinions : l e s uns prétendaient que les nègres étaient libres,
les autres assuraient
qu'ils
étaient
m a i n t e n u s dans l'esclavage. Dans ces d e r n i e r s , il J en a eu qui ont reçu de leurs nègres le prix de leur liberté. L'incertitude était nérale
gé-
; les chefs révoltés en ont profité, pour
f a i r e reprendre les armes aux nègres. M a i s que pouvait seul le capitaine-général Leclerc?
La suite des événemens , jusqu'à
l ' é p o q u e de son d é c è s , prouve qu'il était trahi d a n s sa confiance. Les révoltés étaient préve n u s à l'avance, de toutes les sages dispositions q u ' i l était dans l'intention de p r e n d r e ; il était devancé aussitôt qu'il avait pris une résolu tion. Qui
informait les révoltés? Qui leur
fournissait des munitions de guerre, avant q u ' i l s en eussent reçu des anglais et des angloaméricains ? F a
(84) Il paraissait naturel d'organiser en garde nationale, les habitués
des villes qui s'y t r o u
vaient à l'arrivée de l'armée; mais on ne p o u vait alors avoir confiance en personne. L a majorité des habitués des villes aimait le g o u vernement de Toussaint,
parce qu'il les avait
gorgés de richesses. Le capitaine-général L e clerc distingua les français qui étaient pour le rétablissement de l'ordre, de ceux dont l a cupidité exigeait qu'on les surveillât. D e là dériva l'obligation de désarmer les b l a n c s , et de n'avoir pu les organiser en garde nationale, qu'à l'époque où leur sûreté personnelle se trouva éminemment en danger , et pour p r é venir qu'ils ne fussent victimes de
Dessalines,
qui, en vendémiaire an X I , les eût également fait massacrer pour n'avoir pas pris o u v e r t e ment le parti de Toussaint.
C'était
politique.
L'incertitude sur l'époque de l'arrivée des renforts de F r a n c e , devenus nécessaires l'attente
générale,
d'après la révolte
généraux nègres et mulâtres,
contre des
obligea le capi
taine-général Leclerc à faire évacuer par nos troupes toutes les places et forts de la partie d u n o r d , le môle Saint-Nicolas e x c e p t é , et de les centraliser au Cap. Voyant sa fin appro c h e r , il appela près de lui le général R o c h a m b e a u , en lui annonçant qu'il était désigné pour
lui
succéder. Le
( 8 5 ) chagrin
( 1 ) plus que la
m a l a d i e , conduisit le capitaine-général clerc
au t o m b e a u , le onze
c ' e s t - à - d i r e , dix-neuf
brumaire
jours
Le-
an
XI;
après la révolte
d e s nègres et des mulâtres. Avénement
du général
mandement
Rochambeau
en chef à
au c o m -
Saint-Domingue.
L e général de division Rochambeau
com-
( 1 ) I l n ' y a pas de d o u t e que si l e c a p i t a i n e - g é n é ral Leclerc de
avait
eu
à sa disposition , au
par
les
mulâtres
l'attaque
1,500
Clerveau
moment
et Pétion
,
h o m m e s de p l u s , les rebelles eussent été e n
tièrement
défaits.
Le
succès était é g a l e m e n t
cer
t a i n , e n m e t t a n t b e a u c o u p d e célérité p o u r l ' a r r i v é e des
qui étaient au Borgne.
troupes
Le
g é n é r a l donna ordre à l'officier-général c e t t e division , terre ,
avec
d e se r e n d r e d e
ses
capitaine-
commandant
suite au C a p ,
troupes. C e général
p e r d r e un t e m p s p r é c i e u x pour sauver
fut o b l i g é des blancs.
par de Le
c a p i t a i n e - g é n é r a l prit d'autant plus d e chagrin , q u e attaquer
les
r é v o l t é s , a u g m e n t a i t l e u r f o r c e et l e u r a u d a c e .
chaque
heure
perdue
Le
m o r a l souffrit. L a
fièvre
sans
pouvoir
qui n'était q u ' u n e suite d e
f a t i g u e s , devint m o r t e l l e . L e général
de
division,
a p r è s après a v o i r o b t e n u des e m b a r c a t i o n s , v a c u a t i o n générale
par mer.
Il
arriva
au C a p
q u e s jours après le décès du g é n é r a l en chef.
fit
l'é-
quel
(86) mandait au Port-au-Prince
; il emporta l e s
regrets des habitans de cette ville, et fut r e ç u au Cap avec enthousiasme. Il fut enfin c o n s i déré c o m m e devant être le restaurateur de la colonie que le capitaine-général Leclerc avait sauvée à la France. Il perdit en peu de temps , et par une bizarrerie inconcevable, la c o n fiance des habitués
des villes. La véritable
cause de ce changement
d'opinion envers l e
général Rochambeau , est due aux
circons-
tances, qui commandaient de tenir rigoureuse ment tous les français sous les armes, et de sévir contre les négligences dans le s e r v i c e . Le capitaine-général Rochambeau savait
que
si les habitués des villes eussent voulu
se
soumettre à la discipline militaire, en a o û t 1 7 9 1 , lors de la première révolte des nègres e t des mulâtres, ils étaient assez nombreux p o u r arrêter la rebellion et forcer les révoltés à rentrer sous le joug (1). Quelques reproches que les ingrats
que le
général Rochambeau a la gloire d'avoir f a i t , aient imaginés contre l u i , ils n'ont osé atta-
(1) Le gouverneur de Blanchelande écrivit,
à
cette époque, au ministre de la marine: « I l e s t plus difficile de conduire deux mille gardes nationales, que cent nulle hommes de troupes de ligne. »
(87) quer sa fidélité à Sa Majesté Impériale, sa bravoure ni l'honneur qui fait la base de son caractère ; ils ne lui contestent pas non plus, qu'il a été l'exemple des généraux qui étaient sous les ordres du capitaine-général Leclerc. L e général Rochambeau a pour lui les c i r constances antérieures à l'exercice de son pré décesseur , et les causes de la révolte desnègres et des mulâtres pendant cet exercice. Il a pour lui la difficulté d'avoir eu à choisir le m i e u x pour auxiliaires
, entre deux castes
e n n e m i e s de leurs anciens maîtres, et qui s'é taient portées envers ces derniers aux excès les p l u s atroces. I l a pour l u i , de n'avoir pas pu , p l u s que le capitaine général L e c l e r c , me tre de confiance dans les
blancs
,
la majorité des
h a b i t u é s des villes regrettant, on le r é p è t e , le r é g i m e de Toussaint,
qui les avait enrichis.
Il a pour lui les principes qu'ils ont manifestés d a n s le c o m m e n c e m e n t de la révolution d o m i n g o i s e , dont il avait été témoin et victime , a y a n t été déporté par eux. II a enfin pour lui, la guerre avec l'Angleterre. A
l'avénement d u capitaine-général
chambeau
au gouvernement
Ro
de S a i n t - D o
m i n g u e , l'armée présentait très-peu de forces disponibles. Les malades et les convalescens avaient une existance très-incertaine. La repré-
(88) sentation armée était dans la garde n a t i o n a l e nouvellement organisée dans toutes les villes , et dans cinq à six mille hommes de troupes de ligne, non aclimatés,
répartis dans
places ou f o r t s , situés sur cent lieues de côtes. Les
quinze
cinquante
qui arrivèrent ,
renforts
bataillon par bataillon, détachement par d é t a chement, après la mort du capitaine-général L e c l e r c , jusqu'à la guerre avec l'Angleterre , s'élevèrent à neuf mille h o m m e s , dont c h a q u e jour la maladie diminuait le nombre. Les
sol-
dats polonais désertèrent par compagnies.
Les
troupes virent arriver avec peine des g . . . . . . Ils furent plus nuisibles qu'utiles. Un fonctionnaire, M . Id
(1), à qui
les localités, le caractère et les mœurs d e s nègres et des mulâtres, sont particulièrement connus par quinze années d'une bien d o u l o u -
( 1 ) O n doit à la v é r i t é , de
dire
que M . Id
r é u n i t aux connaissances a d m i n i s t r a t i v e s u n e g r a n d e facilité p o u r le t r a v a i l , et b e a u c o u p d ' o r d r e . 11 p e u t m i e u x que p e r s o n n e , simplifier l e m o d e d e qu'd
convient à Saint-Domingue ,
e r r e u r s qui naissent d e c a r a c t è r e et ses au-dessous colonie.
de
sa
place
qu'il
il n e
travail
prévenir
complication.
connaissances, la
et
Par
sera
occupera
les son
jamais
dans
la
(
8
9
)
reuse expérience, d'après ce qu'il annonce luim ê m e , et qui a été dans les premiers emplois presque sans
interruption,
depuis
1789 à
l'an X I I , s'explique de la manière la plus affir mative dans un précis sur la situation de SaintD o m i n g u e , pour éclairer son pays sur les causes de l'évacuation de cette colonie. « Je m'abstiendrai ici , dit M .
Id....,
» d'entrer dans les causes immédiates qui ont »
forcé
»
D o m i n g u e ; elles se sont assez manifestées:
la
dernière catastrophe
de
Saint-
» il suffira de dire que l'inexpérience et la » méconnaissance
des localités
ont enfanté
» les plans les plus incohérens pour le réta» blissement de l'ordre; d'où sont résultés la » dissonance, le désordre. Pouvait-on espérer »
autre chose ? » Il est encore de sûrs moyens ; c'est de
» faire l'opposé de ce qui a été fait : une » titution coloniale » unanime de tous
cons-
bien digérée. Le concours les
épidemies
anciens
» libres, mécaniquement liés par leurs inté» rêts respectifs. » O n aurait pu, je le soutiens,
éviter l'éva-
» cuation de cette c o l o n i e ; mais la c o m » binaison
des moyens aurait dû être
» long-temps » amenée. »
calculée et
dès
progressivement
(90) Puisque la combinaison
des moyens,
pour
prévenir l'évacuation de la colonie, aurait être dès long-temps
calculée,
dû
ces réflexions
ne peuvent pas porter contre les capitainesgénéraux Leclerc
et Rochambeau.
Si M . I d . . . .
a eu l'intention d'en faire l'application à l ' u n ou à l'autre de ces deux généraux , son affir mation se trouve alors en opposition avec la vérité. Le capitaine-général L e c l e r c , en arrivant à Saint-Domingue, a trouvé les nègres en révolte contre la mère-patrie. Il fallait vaincre, et il a vaincu sans auxiliaires. décimait
Une maladie cruelle
journellement l'armée. Les
nègres et mulâtres
chefs
ont été comblés d'honneur
et de richesses, et ils se sont révoltés ; m ê m e Pétion,
qui était passé avec l'armée dans l a
colonie. L'intérêt public a malheureusement rendu les exécutions multipliées, de nécessité absolue. Le capitaine-général Leclerc était convaincu, en mourant, qu'on ne peut m a i n tenir l'ordre à Saint-Domingue que par des moyens extraordinaires. Le capitaine-général Rochambeau, c o m m e on vient de le démontrer, en prenant les rênes du gouvernement, se trouva dans la position la plus difficile et la plus pénible. Ne pouvant avoir de confiance dans les mulâtres,
puisque
(91) les principaux chefs étaient en révolte, et q u e la caste entière avait été dix fois en rebellion depuis 1 7 8 9 ; il fut obligé de sévir rigoureuse m e n t c o m m e son prédécesseur , contre les complices et adhérens des révoltés. L e s a n glais et les anglo-américains
fournissaient
toujours des munitions de guerre aux rebelles, et les anglais étaient unis avec eux. Dans de telles circonstances, que pouvaient les
capitaines-généraux Leclerc et R o c h a m
beau ? Sur quelle base eussent-ils pu asseoir d e s plans de paix intérieure, en considérant q u e les bienfaits
prodigués aux chefs m u
lâtres n'ont servi qu'à les conduire de n o u v e a u à la révolte ? A qui se rapporte donc l'application : « de » l'inexpérience
et de la MÉCONNAISSANCE
» DES LOCALITÉS qui ont enfanté » les plus incohérens » de l'ordre, » nance, général
pour le
d'où sont
les
plans
rétablissement
résultés
la
disso-
le désordre ? » C e n'est pas au Rochambeau,
qui a commandé
à
Saint-Domingue à deux époques différentes : il avait évidemment autant de connaissance des localités
que M . Id
; mais d'après
c e qu'annonce c e fonctionnaire : « Que la » combinaison
des moyens
», p i s LONG-TEMPS
aurait
calculée»;
du
être
contre qui
(92) dirige-t-il cette partie de ses réflexions g é n é rales ? Pour amener progressivement , il faut avoir à sa disposition la force réelle o u celle d'opinion, autrement on ne peut aller e n avant. Ni l'une ni l'autre n'a existé dans l a colonie,
depuis la révolte de
vendémiaire
an X I . Le capitaine-général
Rochambeau
être blâmable, s i , en une seule
eût p u
expédition
le gouvernement, en lui envoyant dix hommes,
,
mille
il n'eût pas réduit les révoltés
à
l'obéissance avant l'époque de la guerre a v e c l'Angleterre. Lorsqu'elle fut déclarée, mille hommes
(1)
L a population b l a n c h e ayant
les m i l l e considérations tions m i l i t a i r e s
quinze
étaient indispensables (1).
été i m m o l é e ,
qui e n t r a v a i e n t l e s o p é r a
n'existent p l u s .
L e général - c o m
m a n d a n t n'aura plus aujourd'hui à c o n s i d é r e r
que
c'est c h e z e u x q u e l e s français ont à faire la g u e r r e , m a i s uniquement contre une race d ' h o m m e s gers
aux peuples d ' E u r o p e ;
étran
i l est certain q u ' a v e c
six à huit m i l l e
h o m m e s d e troupes f r a n ç a i s e s , l e
général
pourrait
Férand
à volonté parcourir
l'île
d a n s toute son é t e n d u e , e t choisir telle position q u ' i l l u i plairait. Il e s t à c o n s i d é r e r si un s e m b l a b l e
état
d e c h o s e , pourrait r e m p l i r l e s vues du g o u v e r n e m e n t p o u r l e r é t a b l i s s e m e n t d e la c u l t u r e ; on n e le croit p a s . S i u n e t e l l e a r m é e tentait d e faire l a c o n -
( 9 3 ) Reproches faits
au capitaine - général
Rochambeau. Il convient actuellement
de considérer si
le capitaine-général Rochambeau mérite le3 différens reproches qu'on a hasardés, et s'il a pu prévenir réellement l'évacuation
de la
q u ê t e e n t i è r e d e l ' î l e , le n o m b r e d e s b r a v e s qui l a c o m p o s e r a i t serait o b l i g é , pour se s o u t e n i r , et i m p r i m e r l a t e r r e u r , d ' e m p l o y e r à l'infini l e s m o y e n s d e d e s t r u c t i o n , qui d'ailleurs , n e t o m b e r a i e n t sur
l e s c u l t i v a t e u r s , d o n t l ' o b é i s s a n c e sera
l o r s q u e l e s troupes de ligne nègres seront lement
que
assurée non-seu-
d é f a i t e s , m a i s m i s e s dans l ' i m p u i s s a n c e
puire
à l ' a v e n i r . C e sont d o n c
chefs
qu'il
de
l e s t r o u p e s et l e u r s climat
et la
g u e r r e p e u v e n t laisser l e s c a d r e s i n c o m p l e t s .
convient d'atteindre.
Com
m e n t se rempliraient-ils?
Le
A v e c des nègres
m u l â t r e s français e t e s p a g n o l s .
et d e s
C'est possible , mais
c e t t e m e s u r e offre b e a u c o u p d ' i n c o n v é n i e n s . 11 serait n é a n m o i n s d e l a plus g r a n d e i m p o r t a n c e , d e porter des secours
au général
Férand,
dont l'ac
t i v i t é et l ' e n t r e p r i s e d o i v e n t faire e s p é r e r d e s s u c c è s ; e t d e profiter d e l a d é s u n i o n t r o u p e s françaises d o i t
faire
que la présence des naître e n t r e les chefs
n è g r e s , e n l e s p é n é t r a n t q u ' i l s s e r o n t subjugués , e t q u ' i l s n'ont d e p a r d o n à e s p é r e r q u e dans u n e o b é i s sance
absolue.
(94) colonie. D'après l'honneur qui fait la base du caractère de c e général, sa défense devrait se borner à ce peu de mots : J'ai fait
pour
Mais pour dessiller les j e u x a u x
le mieux.
plus incrédules, on va prouver que ces r e p r o ches sont controuvés. D'après l'opinion publique, on a prétendu que ce général, pour se maintenir dans l a colonie , eût dû : 1°. Centraliser
au Cap , dès leur a r r i v é e ,
les renforts qu'il avait reçus ; adopter le p l a n de défense
qu'on lui a proposé.
2°. Employer tous les moyens possibles pour diviser les révoltés : adopter plus p r o m p tement l'embrigadement
des nouveaux
ne pas placer les mulâtres dans affreuse
de la rebellion
libres :
l'alternative
ou de la mort,
et
adopter en temps utile le projet des n o t a b l e s , pour une plantation de vivres dans les habita tions et terreins attenant au Cap. 3 ° . Maintenir
l'union
qu'il n'y eût pas eu de
entre les c h e f s , et déportations.
4 ° . N e pas laisser en stagnation seaux de l'état. 5 ° . Faire une descente à la
les vais Jamaïque,
lorsque le quartier-général a été transféré du Port-au-Prince au C a p . 6 ° . O n eût desiré que l'emprunt forcé,
au-
(95) quel ont satisfait les habitans du C a p , eût empêché l'évacution de la ville, et qu'il n'eût pas conduit M. Fedon à être
fusillé.
7 ° . Que l'on évacuât sur
Santo-Domingo,
avant l'arrivée de Dessalines, l'évacuation de la partie du
et m ê m e dès sud.
8 ° . O n s'était fait l'idée dans le q u e Dessalines
public,
n'était pas assez fort pour
o b l i g e r à évacuer le Cap,
surtout d'après les
actions de valeur des quatre cents hommes de troupes de l i g n e , qui avaient soutenu pendant u n j o u r , tout le feu de l ' e n n e m i , et qui ont tué neuf cents hommes salines.
D'après
g é n é r a l , q u i , avec major-général
des troupes
de
quinze
officiers de l'état-
et une partie de sa garde à
c h e v a l , fit replier les deux colonnes de cents brigands,
Des-
la bravoure du capitaine-
douze
qui étaient sur le point d ' e m
porter de vive force le poste Verdière.
On re
p r o c h e aussi au capitaine-général,
d'avoir
exposé la vie des officiers qu'il avait donnés en ô t a g e , en faisant embarquer
les nègres
d e la chaîne. 9 ° . O n reproche au capitaine-général d'a voir remis la place avant d'avoir essuyé trois assauts. 10°. Il était du devoir du capitaine-général d e ne s'embarquer que le dernier.
( 9 6 )
11°. On reproche également à ce capitainegénéral,
d'avoir remis l'artillerie
à Des
salines. D e n'être pas administrateur.
I D'avoir
E R
.
REPROCHE.
réparti,
les renforts
rens points de la colonie, avoir
centralisé
sur les au lieu
au Cap,
difféde
les
etc.
L E S ennemis du général R o c h a m b e a u , t o u jours en opposition avec
ont
eux-mêmes,
accusé ce général d'avoir décentralisé
l'armée,
en répartissant ses troupes dans l'ouest
et le
sud. Ils lui ont fait en même tempsle reproche d'avoir repris les places du fort du Port-Paix
Dauphin
et
dans la partie d u n o r d , au lieu
de protéger ces deux quartiers qui offroient encore des ressources. O n peut appeler ces r e p r o c h e s , des c l a baudages d'intérêts. Si ces censeurs irréfléchis ne tiraient de
la
contradiction de leurs opinions, l'indécente conséquence que le général Rochambeau n'a repris ces places que pour avoir occasion d e critiquer
(97) critiquer les opérations militaires de son p r é décesseur, et s'en faire un mérite près d u premier C o n s u l ,
on n'en parlerait point. Il
eût fallu être bien aveugle ou bien impolitique p o u r oser une censure aussi déplacée ; on ne croira jamais, d'ailleurs, q u ' u n brave militaire puisse avoir de pareilles petitesses d'âme. L a possession du fort Dauphin
était d'une
importance m a j e u r e , surtout la guerre arri v a n t avec l'Angleterre, pour l'attérage vaisseaux
de l ' é t a t , du c o m m e r c e
des
et des
n e u t r e s , dans le cas de blocus au C a p , par une escadre anglaise. Sous le rapport de la guerre c i v i l e , pour assurer à cette dernière v i l l e , au m ô l e S t . - N i c o l a s , et à la tortue, où on trans p o r t a i t les malades, leurs approvisionnemens, de
la partie dite espagnole. Le Port-Paix était
nécessaire pour assurer les communications e n t r e le Cap et le môle S t . - N i c o l a s , et porter secours au besoin à la T o r t u e , dont cette île e n est peu é l o i g n é e , et pour que les Anglais n'eussent pas la libre navigation du canal. L e général L e c l e r c , attaqué à l'improviste p a r les nègres et les mulâtres, ayant au plus 5 o o h o m m e s disponibles et e n c o r e convales c e n t , fut obligé d'évacuer ces deux places p o u r augmenter ses forces au Cap. Leurs gar nisons étaient
d'ailleurs
trop foibles G
pour
(98) résister aux attaques des révoltés ; encore
ne
donna-t-il l'ordre de les évacuer que c o n vaincu que l'arrivée de la division du
Borgne
tarderait à s'effectuer. On ne peut pas mettre en doute que le g é néral L e c l e r c , s'il eût v é c u , aurait repris c e s deux places renforts, .......
aussitôt l'arrivée des premiers
ou avec
la division
du
Borgne
après qu'il aurait eu chassé les r é
voltés du morne Pierre-Michel où ils
s'é
taient réunis. Si la division du Borgne f û t arrivée avec la promptitude que le c o m m a n daient les circonstances, le capitaine-général eût emporté au tombeau la satisfaction d'avoir entièrement défait les révoltés devant le C a p Quand on considérera avec impartialité la démarche
que
d'envoyer
un officier
le général Rochambeau au premier
fit
Consul,
pour lui annoncer la reprise de ces deux p l a c e s , on sera convaincu qu'il devait le faire ainsi. D'abord 1 importance de ces places ; ensuite l'obligation de rassurer la France entière sur les dangers queprésentait la nouvelle révolte ; démontrer qu'avec peu d e troupes, le rétablis sement de l'ordre était facile ; présenter
un
nouveau plan de campagne c o m m a n d é e par l e s circonstances ; pénétrer le gouvernement que l'illusion sur la force de l'armée n'existant
( 9 9 ) p l u s , l'envoi des troupes nécessaires devait s'opérer en une seule e x p é d i t i o n , si la chose était possible. Le général Rochambeau avait ensuite à remercier le premier Consul de la confiance qu'il lui avait accordée en l'élevant au commandement en chef. L e capitaine-général R o c h a m b e a u , en r é partissant dans les
différentes p l a c e s , les
renforts qu'il avait reçus, n'attendait pour e n trer offensivement
en c a m p a g n e , que le m o
m e n t où l'armée serait assez forte pour m a r c h e r à - l a - f o i s , sur dix
point d i f f é r e n s , et
laisser la garde des places à la garde natio n a l e . Il est évident que tel était le plan de campagne adopté, général
au
en transférant le quartier-
Port-au-Prince.
L a guerre avec l'Angleterre ayant obligé l a France de cesser l'envoi des r e n f o r t s , les dispositions prises par le général en
chef,
n e purent avoir leur effet. En
répartissant les troupes de
sur dix points,
renforts
c'était leur assurer des vivres;
leur faire prendre à l'avance
des positions
avantageuses ; assurer le succès de l'attaque ; faciliter les moyens de repousser les ennemis a v e c célérité, sans fatiguer l'armée, et les for c e r à poser les armes ou à se noyer dans la m e r . Les renforts et les garnisons des v i l l e s , G 2
(100) eussent campé en dehors des p l a c e s , si on. avait pu le
faire
sans
compromettre l e u r
sûreté. Pour centraliser les renforts sur un
point,
lors de leur arrivée, il eût fallu avoir l'assu rance que la guerre
serait déclarée aussi
promptement. Rien ne l'annonçait. Le
présu-
mer ? il faudrait être en d é l i r e , pour soutenir une semblable idée. Quand la guerre a été d é clarée, les communications étaient impossibles par mer. Par terre? le général en c h e f ne p o u vait être partout. Les généraux divisionnaires ont-ils exécuté ses ordres ? le pouvaient-ils ? il y a e u , au bas de la côte,
une division d e
1200 hommes, qui a été obligée de se replier en voulant se réunir à d'autres troupes. La situation du capitaine-général R o c h a m beau, était absolument inverse de celle de son prédécesseur. L'arrivée imprévue de l'armée f r a n ç a i s e , avait jeté les nègres dans la stupeur. L e u r force physique se trouva paralysée par l'affec tion morale. La non-connaissance de la f o r c e réelle de l'armée affaiblissait leurs m o y e n s de d é f e n s e , en même tems quelle augmentait celle des Français. Les nègres étaient persua d é s , avant l'arrivée de l'armée, qu'ils étaient inexpugnables
dans les mornes. Ils furent
( 1 0 1 )
attérés de voir les troupes françaises franchir précipice sur précipice ; se porter avec légèreté, et le sac sur le d o s , au sommet des
mornes
les plus élevés ; leur faire la chasse dans les doubles m o n t a g n e s , avec la m ê m e
facilité
qu'en plaine ; les poursuivre et les atteindre enfin dans leurs repaires, dont ils croyaient l'accès inaxcessible à des Français. L e capitaine-général Rochambeau ne p o u vait suivre le plan de la première campagne. Il n'avait pas pour lui le défaut de connais sance des nègres sur la force réelle de l'armée f r a n ç a i s e , qui a été si favorable au capitainegénéral Leclerc. dessillés,
Les nègres avaient les y e u x
et connaissaient le peu de
force
q u ' o n pouvait leur opposer. On ne pouvait d o n c espérer de vaincre les n è g r e s ,
qu'en
l e s rejetant, par de nouvelles mesures, dans la stupeur. Le m o y e n et le seul qui existait alors, était de les attaquer au même instant sur dix points différens ; détruire les vivres, et forcer les révoltés par le manque de toute
chose,
à subir la loi du vainqueur. L e reproche qu'on fait au capitaine-géné ral R o c h a m b e a u , de n'avoir pas adopté le plan de défense prouve
en
qui lui avait été p r o p o s é ,
sa faveur. C'était
en
pluviôse
an X I . . . . . . . . Par ce p l a n , il fallait réunir
(102) les troupes qui se trouvaient dans le sud
et
l ' o u e s t , les centraliser au Cap, et se maintenir sur la défensive
dans cette p l a c e , en a t t e n
dant des renforts de France. Pour se d é t e r miner à une résolution aussi d é s e s p é r a n t e , les auteurs du plan avaient donc la certitude qu'alors les mulâtres étaient déjà en rebellion ouverte : qu'ils n'avaient cessé d'être les alliés des nègres, et n'attendaient qu'un moment f a vorable pour se déclarer Si on eût adopté ce p l a n , c'eût été m a r q u e r une prudence pusillanime, qui n'eût servi qu'à enhardir les révoltés,
et leur d o n n e r
une grande idée de leurs forces. rassembler les troupes
C'eût été
dans la ville la plus
meurtrière de la c o l o n i e ,
où il
n'existait
aucun édifice pour les caserner. Les eût-on mises sous la tente dans la plaine ? T o u t m a n quait. C o m m e n t aurait-on assuré la s u b s i s tance à cette augmentation de t r o u p e s , l o r s qu'on
éprouvait
au Cap les plus grandes
difficultés pour satisfaire
aux besoins de la
garnison ? Les troupes réparties dans le S u d et l ' O u e s t , étaient presque aclimatées leurs
c a n t o n n e m e n s , et favorablement
posées pour
entrer en campagne dans
dans dis les
mornes. En les en retirant pour les r é u n i n i r
(103) Cap,
c'eût été les exposer à de nouvelles
révolutions de c l i m a t , et les voir périr jour nellement faute de secours. Dans le Sud et l'Ouest,
il y avait une p o
pulation blanche de près de dix mille indivi d u s des deux sexes. Elle en imposait sous la protection des garnisons des différentes places. E n faisant évacuer les troupes du Sud et de l'Ouest,
c'eût été livrer les blancs répartis
d a n s ces deux d é p e n d a n c e s , à la férocité des rebelles.
Les
eût-on
aussi réunis au Cap ?
A v e c quoi eussent-ils vécu ? Aurait-on aussi é v a c u é le môle l'île
St.-Nicolas,
de la Tortue,
Mont-Christ,
le
le fort
Port-Paix,
Dauphin,
et
toutes places de la partie du
nord, et Santo-Domingo
?
Eût-on réparti dans
c e s cinq places et dans l'île de la T o r t u e , les troupes et les habitans qu'on eût fait évacuer d u Sud et de l'Ouest ? Alors le plan proposé était sans effet. O n ne pouvait
sérieusement
proposer d'évacuer toutes les places et forts de la
c o l o n i e , pour se renfermer dans le Cap î
S o u s le rapport de la défense, c u e r sur un seul
point,
contre les n è g r e s ,
en voulant éva-
pour
se soutenir
Santo - Domingo
était
préférable. L'intention du gouvernement s u p r ê m e , pouvait d'ailleurs
être qu'on n'éva-
(104) cuerait qu'à la dernière
extrémité,
et
place
(1).
par place
Si on eût adopté le plan p r o p o s é , on eût rempli les desirs des anglais, et avancé l ' é p o q u e de leurs hostilités. La culture du café et d u c o t o n , fleurissait encore dans le Sud et l'Ouest, et offrait des récoltes qui s'élevaient à plus d e quarante
millions defrancs.
Sous le rapport
commercial, les anglais eussent été au c o m b l e de leurs vœux. Ils eussent, c o m m e en l'an I V , pris possession aux Cayes, au-Prince
et St.-Marc,
Léogane,
Port-
et surtout au
môle
si on eût évacué cette place
St.-Nicolas,
mi-
litaire(a). D'après ce que commandaient leurs intérêts, ils n'eussent fourni des munitions
( 1 ) Il est difficile d e la T o r t u e a é t é gands. L a
de c o m p r e n d r e c o m m e n t surprise
première,
taine-général
deux
pendant l'exercice
Leclerc ;
et
la
l'île
fois par l e s du
deuxième,
bri capi
durant
celui du capitaine-général R o c h a m b e a u . C h a q u e f o i s , M.
Labatu,
négligence. de
propriétaire
de cette
Condamné
la p r e m i è r e à une
cinquante m i l l e f r a n c s ,
île,
a
été
taxé
de
amende
son â g e a v a n c é a
donc
déterminé à la c l é m e n c e la seconde. ( a ) Après l'évacuation demandèrent
de la c o l o n i e , l e s a n g l a i s
à Dessalines
d e leur l i v r e r c e t t e d e r
n i è r e p l a c e , q u ' i l s avaient o c c u p é e en l ' a n
IV.
( 1 0 5 )
d e g u e r r e , et des armes aux révoltés, q u ' a u tant qu'il leur en eût fallu pour harceler et f a tiguer les français au Cap. Ils se fussent de c e t t e sorte maintenus à S t . - D o m i n g u e jusqu'à l a p a i x , et eussent alors gardé la colonie ou e x i g é des compensations.
De la manière dont
l'évacuation s'est faite à S t . - D o m i n g u e , les anglais n'y
occupent aucune
p l a c e , et la
F r a n c e y conserve sa souveraineté.
II Diviser des
.
M E
REPROCHE.
les révoltés; nouveaux
embrigadement
tardif
(1) ; plantation
libres
de
vivres. LA
révolte de Toussain
Dessalines, (1)
Christophe,
Nouveau
libres.
On
et ensuite celle de Clerveau
fit un
appel
et
Pétion,
aux
anciens
n è g r e s e s c l a v e s ; on assura la liberté à c e u x qui s ' e n rôleraient
pour
se
devant
passait
Ance. était
L'ancien obligé
marcher
c o n t r e Dessalines.
n o t a i r e s , au b o u r g d e
m a î t r e , o u son f o n d é
d'accorder,
L'acte
la P e t i t e -
de p o u v o i r ,
gratuitement,
la
liberté.
L ' a c t e d e v a i t être s a n c t i o n n é par l e g é n é r a l en c h e f , e t p r o m e t t r e , au n o m veau
libre,
de
du
gouvernement,
lui c o n c é d e r
quatre
au
nou
quarreaux
t e r r e après la pacification de la c o l o n i e .
de
(106) en vendémiaire an X I , contre le c a p i t a i n e - g é néral L e c l e r c , et qui, pour les deux derniers surtout, c o m m e généraux mulâtres,
et c h e f s
de leur caste, étaientun acte de félonie au p r e mier c h e f , n'obligeaient-elles pas le g o u v e r nement de prendre de nouveau en c o n s i d é ration l'état politique des esclaves
et
des
hommes de couleur libres. Les uns s'étaient rendus indignes de la liberté ; les autres
de
l'égalité des droits, et avaient m ê m e e n c o u r u l'esclavage par leur rebellion. Les mesures qu'eût adoptées le général e n c h e f , pour diviser les révoltés, ne p o u v a i e n t elles pas outre-passer les intentions du g o u vernement suprême ? Dans cette h y p o t h è s e , il était préférable de ne pas traiter avec e u x , et on laissait au gouvernement une latitude entière, sans encourir le reproche d'avoir p r o mis et de ne pas tenir ses p r o m e s s e s , c e q u i pouvait par la suite occasionner de nouveaux troubles. Personne n'ignorait que les
(1)
(r)
mulâtres
Dans l e c o m m e n c e m e n t de la r é v o l u t i o n ,
idées d'égalité firent aussi tourner la t ê t e aux
les mu
l â t r e s s e s : e l l e s r e v i n r e n t d e cette f o l i e , l o r s q u ' e l l e s se v i r e n t l a p r o i e des n è g r e s . L e s n é g r e s s e s de
places
furent dans t o u s les t e m p s d e v é r i t a b l e s furies : e l l e s
(107) n'avaient aucun attachement pour les blancs. Les
vengeances
contre
les nègres,
qu'ils
brûlaient
d'exercer
avaient une toute autre
c a u s e que celle que leur attribue M . Id L e véritable motif était, après que leur projet d'envahissement de souveraineté fut déjoué p a r Toussaint, d'exterminer tous les nègres des
blancs ; de ménager les l e u r s , d'outre
passer les mesures du général en c h e f pour ]a
conservation
des c u l t i v a t e u r s ,
usurper
l ' a u t o r i t é , et amener l'indépendance absolue d e la c o l o n i e , ou une fédération anglo-américains. Toussaint
avec les
obligea les m u
l â t r e s de fuir de la colonie. Ils y rentrèrent avec
les mêmes dispositions qui les en avaient
f a i t chasser. des mulâtres
La félonie
ne se rapportait
p a s s e u l e m e n t , ainsi qu'on l'a démontré, aux g é n é r a u x Clerveau
et Pétion,
et aux officiers
s o u s leurs o r d r e s , mais à toute la caste. Le g o u v e r n e m e n t pouvait seul fixer les moyens de
division,
amnistier et statuer sur
leur
état politique à venir. L e général en c h e f ne pouvait que sévir contre les c o u p a b l e s , et faire prononcer militairement, contre ceux
surpassèrent
les nègres en c r u a u t é s , et les
ç a i e n t de les sacrifier s'ils l â c h a i e n t p i e d s .
mena
(108) arrêtés en flagrant-délit, leurs complices
et
adhérans. Quant aux n è g r e s , cette caste s'était é g a l e ment p r o n o n c é e ,
en
massacrant
tous
blancs qui tombaient sous leurs mains.
les A
l'arrivée de l ' a r m é e , quelques chefs n è g r e s se dévouèrent aux Français. Ils furent m a i n tenus en activité de service. Des nègres gos
con-
se réunirent pareillement dans les d e r
niers temps, aux troupes françaises. Ils f u r e n t armés avec les précautions que c o m m a n d a i e n t les circonstances. Les nègres créoles
ne s u i
virent point l'exemple que leur donnait les Africains. Il est de vérité incontestable, q u e la pacification ne sera r é e l l e , qu'autant q u e l'armée française, sans l'appui
d'auxiliaires
nègres ou mulâtres, aura forcé les révoltés à une obéissance absolue. Les moyens de divisions, par e m b r i g a d e ment de nègres
nouveaux
libres,
ne p o u
vaient se considérer que c o m m e mesure d e circonstance, et ne devaient être adoptés q u ' à la dernière extrémité, ainsi qu'on l'a pratiqué. Ce moyen extraordinaire, tout favorable qu'il paraissait, tendait à altérer la vérité dont s o n t pénétrés les nègres et les mulâtres, de la p u i s sance nationale, et qu'on peut les subjuguer sans le secours d'auxiliaires.
t
(109) L adoption de cette mesure n'était pas d'ailleurs
extraordinaire
de la compétence
du
capitaine-général. Elle ne pouvait émaner que de l'autorité de du
souveraine.
En accordant la li-
une portion plus ou moins considérable
bertéa
n è g r e s , c'était déclarer que la volonté gouvernement
suprême
était que
les
n è g r e s rentreraient dans l'esclavage lors de la pacification. Rien n'était sans doute plus i m p o l i t i q u e , se trouvant sans force pour c o m m a n d e r l'obéissance. Ce m o y e n , bien loin de m e t t r e la division parmi les r é v o l t é s , devait augmenter leurs f o r c e s ,
par la réunion de
c e u x qui ne seraient pas admis à jouir de la liberté.
Le capitaine-général n'a dû c o n s e n
tir à cette mesure extraordinaire, qu'à la trèsg r a n d e extrémité, et sous le seul point de v u e de laisser après le départ de l ' a r m é e , une cause de guerre entre les nègres. C e qui prouve qu'il y
a plus d'envie de
n u i r e , que de vérité dans les reproches qu'on fait au capitaine-général R o c h a m b e a u ,
ce
s o n t les petits moyens dont on se sert pour les accumuler. On lui reproche de
n'avoir
point fait mettre à exécution
le projet du
conseil
relatif à une
des notables
au Cap,
plantation de vivres du pays. C'est au c h e f d e l'état-major-général, que les notables ont
( 1 1 0 )
remis c e projet. Il peut dire s'il en a
fait
mention dans quelques-uns de ses rapports écrits
au
capitaine-général. Il est c e r t a i n
que trois mois après la remise de ce p r o j e t au c h e f de l'état-major, le capitaine-général a adopté celui
qui lui a été
l'ordonnateur Perroud,
présenté
par
et qu'il y avait o r d r e
de le mettre avec célérité à e x é c u t i o n , q u o i que la saison fût déjà fort avancée. D'ailleurs ce n'est point de la plantation de ces v i v r e s que pouvait dépendre le salut de la c o l o n i e .
III
M E
.
REPROCHE.
Défaut d'union entre les chefs. Déportations en France. IL est assez difficile de fixer au j u s t e , ce qu'on entend par désunion entre les chefs. Qu'il ait existé ou non des causes de d é s u nion entre les premières autorités, on doit à la vérité de d i r e , que le préfet
Daure
n'a
jamais manifesté dans le public le moindre m é c o n t e n t e m e n t , et qu'il avait laissé à ses successeurs de grands exemples de prudence à s u i v r e , que la raison et la politique p r e s crivaient d e mettre en pratique. L e m a l h e u r
(111) d e la colonie, est d'avoir eu à supporter l ' i m m e n s e fardeau de beaucoup de personnes, q u i tous se croyaient des phénix.
Ils n'étaient
c e p e n d a n t rien moins que t e l s ,
et ressem
blaient à ceux que le général Pang-Ki p l i a i t l'empereur de la Chine
e n v o y e r ( 1 ) . L'un d'eux est mort L e sous-préfet Fréron,
sup
de ne pas lui d'ambition.
décédé aussi en f o n c
t i o n s , courrait une nouvelle carrière. Le
préfet
Pang-Ki
»
pas
y
supplie votre
à l ' e m p e r e u r d e la C h i n e , e t je n ' h é s i t e
à faire l ' a v e u
ces à
a remplacé le
« Je ne suis qu'un h o m m e , é c r i v a i t l e g é n é r a l
(1) »
»
(2)
Magnytot
de m o n
majesté
lettrés difficiles
redire
à
tout,
de
insuffisance; ne p a s
et o r g u e i l l e u x , qui qui
mettent
mais
m'envoyer
vanité
trouvent à
n'être
»
j a m a i s contens de r i e n ,
»
pour
»
m o r g u e d e la g r a n d e u r c o m m e la g r a n d e u r e l l e -
le
plus
mince
qui sont
qui o u b l i e n t
je do
détail,
toujours
qui
l'ensemble
regardent
la
»
même,
»
chef
»
r o g n e n t l e s ailes à l ' a i g l e , et v o u d r a i e n t q u ' i l
»
v o l â t q u e t e r r e à t e r r e ; qui se c r o i e n t p l e i n e m e n t
m i l i t a i r e , sur l e s
prêts à c o n t r e d i r e un
m o i n d r e s o p é r a t i o n s ; qui ne
»
d o u é s d e c o n n a i s s a n c e s e n tout g e n r e , p a r c e q u ' i l
»
a plu à v o t r e m a j e s t é de l e s r e v ê t i r d ' u n e d i g n i t é ,
»
d'un emploi. » (2)
O n s e r a i t i n j u s t e , s i o n refusait â M .
t o t d'être
a d m i n i s t r a t e u r . Il
Magny
avait d e g r a n d e s v u e s
(112)
préfet Daure. Les circonstances se sont t r o u vées contraires aux bonnes vues d'ordre q u ' i l manifestait. Il y avait des a b u s , ils é t a i e n t connus,
mais il était i m p o s s i b l e ,
à deux
mille lieues de la mère-patrie, lorsqu'on était sous le glaive assassin des anglais, des n è g r e s et des mulâtres, de les saper tous à - l a - f o i s , étant surtout dans l'impuissance de faire f a c e par soi-même aux dépenses journalières; l e s choses étaient telles alors, qu'on ne pouvait o b tenir de secours que par la confiance, et m ê m e par suite des abus existans. Le préfet M a g n y t o t a cherché à s'éclairer sur la moralité, les c o n naissances et les principes des fonctionnaires. Il n'a reçu que des renseignemens dictés p a r la partialité, et quelquefois t r è s - l é g e r s , d e la part de ceux à qui il avait donné cette h o norable mission de confiance ; d'où il est r é sulté une méfiance générale, et des correspon dances irréfléchies ; d'où il est résulté Il annonça officiellement que d'après les i n s tructions du premier C o n s u l , il avait la plus grande latitude. Il annonça également qu'il établissait une barrière d'airain,
entre s o n
d'intérêt p u b l i c . C e n'est p a s un r o u t i e r ; s o n t r a v a i l est à l u i ; m a i s il fallait
la paix
pour remplir
ses
projets.
administration
(113) administration et celle du préfet
Daure.
Les
circonstances étaient cependant telles, d'après l a maladie régnante, que le renouvellement des
préfets pouvait s'opérer par trimestre.
Q u e devenait alors la confiance publique, si, à c h a q u e mutation d'un préfet, il devait s'élever une
barrière
d'airain
(1) ? L e gouvernement
n ' e s t jamais qu'un. La mutation de ses agens n ' a d'autre cause de sa part, que de consolider la sûreté et le crédit public. Déportations.
Il y en a de deux espèces.
C e l l e s politiquement arbitraires, et celles m é ritées. L e s premières sont d'utilité générale, quoi q u e froissant personnellement ceux qu'elles atteignent.
Plus les personnes tiennent
aux
( 1 ) M . B a r b é de M a r b o i s , p e n d a n t qu'il fut i n t e n dant
à S a i n t - D o m i n g u e , avait maintenu la
con
f i a n c e p u b l i q u e , e n respectant l ' a d m i n i s t r a t i o n d e s e s p r é d é c e s s e u r s . L e u r s d é p e n s e s furent s a c r é e s e t a c q u i t t é e s . Il a m é l i o r a les finances de S a i n t - D o m i n g u e , sans a u g m e n t e r les r e c e t t e s qu'il é l e v a , par rordre
seul,
a u - d e s s u s des d é p e n s e s ; il fit d e s i r e r
l ' e x t i r p a t i o n g é n é r a l e des a b u s , par l ' a v a n t a g e q u i r é s u l t a i t à c h a q u e s u p p r e s s i o n d ' a b u s . I l le fit sans produire
de
commotion ;
la c o l o n i e lui d e v a i t d e
l a reconnaissance.
H
(114) premières autorités, plus l'arbitraire q u ' o n exerce sans motif à leur égard, e s t , en de troubles
à St.-Domingue,
temps
utile au g o u
vernement. Elle ne nuit pas à la confiance q u i est due à ceux qui en sont frappés. C'est a u contraire les appeler à des distinctions parti culières. Quant aux déportations méritées, c'est a u gouvernement à peser dans sa sagesse, si l e s individus qui ont encouru cette p e i n e , s o n t assez punis. Le capitaine-général
et le préfet
Daure,
n'ignoraient point qu'il existait des abus sans n o m b r e . Ils cherchèrent à les extirper sans violentes secousses. A c e t effet, le préfet et le général c h e f de l'état-major
Daure général
envoyèrent dans le Sud et l ' O u e s t , c o m m e inspecteurs, pour obtenir une
connaissance
exacte des abus d é n o n c é s , M M . Colbert, sant les fonctions de t e u r , et Levasseur,
fai
commissaire-ordonna officier de l'état-major-
général. Le commissaire des guerres
Léaumont
remplaça l'ordonnateur Colbert. Ce général doit
avoir communiqué
au
gouvernement
les rapports des inspecteurs, et lui avoir fait part des ordres sévères qu'il avait donné. Mais sur ces entrefaites, les communications ayant été interrompues par la guerre avec l ' A n g l e -
(115) t e r r e , ces ordres ne purent être mis à e x é c u tion. Rien n'était sacré. Des
anglo-français,
osèrent réclamer la valeur des munitions de g u e r r e et de l'artillerie qu'ils avaient vendues aux
mulâtres,
lorsqu'ils étaient en révolte
c o n t r e les agens du Directoire.
D'autres récla
m a i e n t la valeur de troupeaux considérables d e bêtes à c o r n e s , qu'ils annonçaient faussement
avoir livrées à l'armée française, e t c . ,
e t c . , e t c . , etc. Il y avait dans les castes b l a n c h e et j a u n e , des anarchistes et des incen diaires mum
qui s'étaient
(1),
qui s'en
prononcés
au
maxi-
glorifiaient et pouvaient
t r o u b l e r l'ordre. Il suffisait de chasser les r é v o l t é s d'une h a b i t a t i o n ,
pour envahir les
m e u b l e s , effets, argent, b i j o u x , animaux et d e n r é e s , que le propriétaire avait été obligé d'abandonner pour sauver sa vie. On peut à c e t é g a r d , se remémorer tout c e qui s'est p a s s é dans la ville du fort D a u p h i n , etc. Il y avait de grands
amateurs
savaient prévoir les révolutions,
de café,
qui
enmagasiner
( I ) Duf... Il s'est tué après le départ de l'armée, Dessalines et consorts ayant refusé de l'employer. Des négocians du Cap le dénoncèrent au général eu chef comme incendiaire. H a
( 1 1 6 )
et expédier. bourse
Ce café était souvent acquis sans
délier ; il fut quelquefois saisi.
Dans plusieurs attaques, les révoltés o n t trouvé une retraite assurée. C'était l'effet d u hasard, niais c'était un fatal hasard! Fallait-il
que le général
complaisamment
en chef se
laissât
déporter ?
Le projet de la déportation du c h e f de l a colonie a cela d ' é t o n n a n t , qu'il est que ce projet
a existé,
prouvé
et que l'auteur, d ' a
près les réciproques accusations
imprimées,
reste encore inconnu. L e préfet M a g n y t o t , d'une part, avait prévenu le capitaine-général, que 200 barils de farine avaient été soustraits à la consommation pendant la disette,
pour
être remis en circulation après sa déportation; ils furent saisis (1). Il avait aussi annoncé avoir instruit par le contre-amiral Latouche-Tréville, le ministre de la M a r i n e , qu'on avait formé le projet de déporter le capitaine-général. (1) Il y a d e s p e r s o n n e s qui assurent q u e M . Fedon avait fait la déclaration d e ces 2 0 0 b a r i l s d e f a r i n e , et qu'il les a v a i t offerts pour l e s b e s o i n s d e la g a r n i s o n . D a n s une affaire aussi m a j e u r e , la r e p r é sentation d e sa soumission, par l ' a d m i n i s t r a t i o n , e t l ' e x p é d i t i o n d e la déclaration qu'a dû faire M . F e d o n , aux c o m m i s s a i r e s qui ont été chargés de l a r e c e v o i r , donneroient beaucoup de lumières.
(117) D'autre p a r t , le chef de l'étal-major-génér a l , par une lettre qu'il rendit p u b l i q u e , annon ç a « que si s u r - l e - c h a m p il n'avait
pas fait
»
connaître au général en c h e f , les proposi-
»
tions qui lui avaient été f a i t e s , de coopérer
»
à sa déportation, c'est qu'il avait pensé que
»
l'intérêt de la colonie
»
parfaite union entre les premières autorités,
»
il devait garder le s i l e n c e , et ne le r o m p r e
exigeant
alors u n e
»
q u e dans le cas seulement o ù on persiste-
»
rait à mettre ce projet à exécution » . Je puis donc d i r e , avec M . I d
» » »
v o u l u les renfermer dans m o n â m e : intéde m a
rêts
»
p a t r i e , vous
me
les avez
arrachées ! »
I V
De
: « voilà
d e s vérités bien douloureuses ; en vain j'ai
M
E
n'avoir
.
R E P R O C H E .
pas effectué
une descente
à la
Jamaïque. LE
capitaine-général
b o r n é , relativement
Roehambeau
avait
aux circonstances, ses
opérations militaires à la défensive,
en
atten
d a n t une réunion d e force suffisante pour se porter à
l'offensive.
(118) Si le général en c h e f eût tenté la conquête de la J a m a ï q u e , ne pouvait-il pas être fait prisonnier avec l ' a r m é e , ou être tué. A l o r s l'unité d e s pouvoirs n'existait p l u s , et l ' a r m é e perdait la force qu'elle offrait, malgré sa f a i b l e s s e , sous les ordres
d'un premier
chef
n o m m é par le gouvernement. Chaque général de division, par les circonstances où il se t r o u v a i t , eût voulu agir à sa volonté. Malgré la g u e r r e , il pouvait arriver des s e cours de France. En morcelant les différentes garnisons, c'était sciemment faire avorter l e plan de campagne adopté, prolonger la g u e r r e avec les révoltés, et obliger à une c o n s o m m a tion d'hommes outre-mesure, et sans utilité. Il eût f a l l u , d'ailleurs, diminuer la garnison du Port-au-Prince, qui était strictement n é cessaire à la conservation de cette p l a c e ,
et
c'eût été livrer les habitans à la discrétion des nègres et des mulâtres. Cette ville est à l a vérité tombée en leur p o u v o i r ,
mais les co
lons avaient o b t e n u , de la force de la garni s o n , la faculté de se réfugier à volonté. Il y a eu des v i c t i m e s , mais leur assassinat est dû à la perfidie des anglais. La conquête de la Jamaïque, si elle eût p u se faire, eût été avantageuse, par la sation
compen-
quelle eût procuré à la paix ; mais elle
(119) n'eût pas empêché les anglais de fournir des munitions de guerre aux révoltés. Cette c o n q u ê t e n'eût servi qu'à faire augmenter la force d e l'escadre anglaise, ou à faire relever la station par une nouvelle escadre envoyée d'Eu r o p e , qui n'eût pas été sensible en moins en Angleterre. L e s forces maritimes des
anglais à la Ja
m a ï q u e » étaient d'ailleurs supérieures à celles des français. O n pouvait hasarder le voyage d u Port-au-Prince au C a p , parce que plusieurs p o r t s s'offraient le long de la côte pour la r e t r a i t e ; mais attaquer un ennemi plus f o r t , c ' e û t été vouloir tout s a c r i f i e r , moindre
V
M
lorsque la
ressource était à ménager.
E
.
Stagnation
R E P R O C H E . de l'armée
navale.
S A I N T - D O M I N G U E est un domaine de la cou r o n n e , qui tient essentiellement au départe m e n t de la marine. Les armées de terre et de m e r sont rivales de gloire
et
animées des
m ê m e s sentimens pour la prospérité de l'état; m a i s les marins c o m m e les troupes de l i g n e ,
( 1 2 0 )
tiennent à ne recevoir d'ordre que des g é n é raux de leur a r m e , ou d'un dignitaire du p r e mierordre. Cette colonie est d'une assez grande importance, pour que le gouvernement g é n é ral soit déféré à un vice-roi.
Cette é m i n e n t e
qualité
difficultés,
lofs
tiendrait
ni à
levrait
toutes
les
m ê m e que le dignitaire ne
l'armée de terre ni à la marine. Cette dignité à laquelle serait élevé le chef de la c o l o n i e , concourrait
efficacement
au
rétablissement
de l'ordre. Les nègres ont un respect religieux pour les volontés d'un roi. « Zote-pai-bouche » cè roé qui vlé».
;
(Tais-toi ; le roi le v e u t ) .
Toussaint avait écrit aux commissaires Directoire,
du
qu'il ne les reconnaîtrait, en leur
qualité, que lorsque les français auraient
trôné
un roi. Les nègres de St.-Domingue, ne voient dans un capitaine-général, qu'un
capitaine.
La stagnation des vaisseaux de l'état, l o r s qu'elle a eu l i e u , a été commandée par les circonstances calamiteuses qui ont affligé la colonie.
Aussi long-temps que les vaisseaux
ont pu former les équipages qui leur étaient nécessaires, ils ont été en croisière. La m a l a die a atteint les marins avec la m ê m e violence que les troupes de terre. Il y a eu une disette totale de matelots et d'artilleurs. La colonie devait de la reconnaissance au contre-amiral
(121) Latouche-Tréville
: il a secondé de la m a
n i è r e la plus particulière, les capitaines-géné r a u x Leclerc et Rochambeau. Il y a eu des navires du c o m m e r c e de pris à
l'abordage
p a r les nègres; mais c e fut dans des temps de c a l m e . Alors les vaisseaux ne pouvaient être d ' a u c u n e utilité. Ils eussent p u , e u x - m ê m e s , ê t r e exposés, par le défaut de v e n t , à être e n trainés sur les côtes. On ne pouvait les armer d'hommes
dixième
au
nécessaires pour la
manœuvre et la défense, contre les flotilles des nègres.
des barges
V I
M
E
.
R E P R O C H E .
Emprunt f o r c é au Cap. M. Fedon
fusillé.
IL était dû cinq mois de solde à l'armée. Il fallait assurer sa subsistance (1); les hôpitaux
( 1 ) tait
L e 29
vendémiaire
an
dans l e s m a g a s i n s d e l ' é t a t ,
X I I , il
n'exis
au C a p , q u e 299
b a r i l s de f a r i n e , pesant 53,871 l i v r e s . L e 1 . ET l e ER
4
brumaire,
il arriva
544
barils,
qui p e s a i e n t
6 1 , 9 2 0 l i v r e s . E n t o t a l , 115,791 livres de farine,
qui
d e v a i e n t p r o d u i r e 144,738 l i v r e s de p a i n , o u 1 2 8 , 6 5 8
(122) étaient dans le besoin. Les entrepreneurs r é clamaient, avec j u s t i c e , l'exécution de l e u r
rations m i l i t a i r e s , à raison d e 1 8 o n c e s l ' u n e . 59,255
livres
de b i s c u i t ,
ou
Plus,
7 4 , 0 6 8 rations
à
12
onces l ' u n e . L e total des r a t i o n s , en pain et b i s c u i t , à 202,726.
Le
nombre
des
individus
nourris au c o m p t e d e l ' é t a t , m o n t a i t
s'élevait
qui
étaient
à trois
mille.
P a r t a n t , il n'y eût eu p o u r e u x , à dater du 2 9 démiaire,
que
pour 6 8
fraîche m a n q u a i t ;
jours
il n ' y
do pain. L a
avait
ven-
vianda
aucunes e s p è c e s
de
salaisons. à cette époque
pour les h a b i -
tans de la v i l l e . L e c a p i t a i n e - g é n é r a l
L a disette
existait
leur a c c o r d a ,
l e 6 b r u m a i r e , sur l ' a p p r o v i s i o n n e m e n t d e s t r o u p e s , un secours de 5 o b a r i l s ment
dans le
miques,
à
la
mois.
de f a r i n e , et
successive
O n fit faire des soupes
Romfort,
pour
les n è g r e s
écono domes
t i q u e s , qui se p a y a i e n t 5o c e n t i m e s l ' u n e . L e 8 f r i m a i r e , j o u r d e l ' é v a c u a t i o n , il r e s t a i t p e u d e farine et d e b i s c u i t , p u i s q u e
partie des
qui c o m p o s a i e n t l e c o n v o i
la J a m a ï q u e , n ' a
pour
navires
v a i t q u e du r i z , du b e u r r e et d e l'eau p o u r l e s é q u i pages,
les
devait
rester le 28 b r u m a i r e , jour
troupes,
e m p l o y é s et h a b i t a n s . qu'on
a
11
ne
traité
a v e c l e s n è g r e s , que p o u r v i n g t j o u r s d e v i v r e s d a n s les m a g a s i n s d e l ' é t a t ,
en y c o m p r e n a n t
le restant
du riz q u i , au 2 9 v e n d é m i a i r e , s'élevait à 4 3 , 5 2 8 l i v r e s . A la m ê m e
é p o q u e , 29
v e n d é m i a i r e , il y
avait
(123) m a r c h é , pour les approvisionnemens qui leur étaient assurés. Le salut des malades c o m mandait impérieusement de les satisfaire ; la f a r i n e , la v i a n d e , les salaisons, etc. ne pou vaient s'obtenir, lorsque
le hasard en pro
c u r a i t , que partie en denrées et partie en argent. Il existait au Cap des négocians qui méri taient la plus grande considération; mais il y e x i s t a i t , c o m m e dans les autres villes, indépendans,
des anciens
afidés à
des
Toussaint,
qui desiraient trafiquer avec les anglais et les anglo-américains. D e s français
anglo-man,
cessèrent leurs spéculations aux Etats-Unis,
a u s s i , dans les m a g a s i n s légumes
de l ' é t a t , 9,082 l i v r e s d e
secs ; 2 4 , 6 7 6 l i v r e s
d e b e u r r e et
( s a i n - d o u x ) ; 3 2 , 0 4 7 pintes d e v i n ; de
vinaigre.
été
c h a r g é du
p e u t mieux plus de
Le
commissaire
service
des
que personne
mantègre
1 0 7 , 8 4 5 pintes
principal H u b e r t
a
a p p r o v i s i o n n e m e n s : il certifier s'il y a v a i t
g r a n d e quantité d e v i v r e s
dans l e s
une
magasins
l'état. O n avait
proposé
5o milliers
de
biscuit;
mais
i l e û t é t é n u i s i b l e a u x t r o u p e s et a u x h a b i t a n s , p a r l a m a u v a i s e q u a l i t é o ù il se t r o u v a i t . A v e c q u o i e u s s e n t v é c u l e s t r o u p e s e t l e s habitans d e l a v i l l e , si o n n'eût pas traité a v e c les n è g r e s , ou si
o n eût é v a c u é sur S a n t o - D o m i n g o ?
(124) sous prétexte du blocus.
D'un autre c ô t é ,
l ' i n t é r ê t , ce mobile de toutes c h o s e s , n e
se
faisait plus ressentir aux négocians de la N o u velle-Angleterre. Quelle en était la cause ? D e ramener Saint-Domingue sous le régime d e s n è g r e s , pour j o u i r , ainsi que par
le
passé,
du commerce de cette c o l o n i e , c o m m e de l e u r propre bien. Il est néanmoins certain, qu'avec des petits bâtimens, quelques précautions et de la h a r diesse, l'arrivée pouvait s'effectuer. L e s n é gocians du Cap ne firent aucune tentative. L e général en c h e f avait envoyé des c o m m i s saires aux Etats-Unis, pour avoir des secours en vivres. Pourquoi ces
approvisionnemens
n'arrivèrent-ils pas ? Un honnête çaise)
da
marin
la Nouvelle-Orléans ( i l était d'origine
fran-
exposa toute sa fortune : il arriva au
Cap avec environ 300 barils de farine, e t c . , malgré la chasse que lui donna l'escadre a n glaise, qui mit tout en œuvre pour l'atteindre. T o u s les vaisseaux lâchèrent leurs bordées sur le bâtiment pour le couler (1).
(1) L o r s q u e les n è g r e s et les m u l â t r e s furent r e s t é s maîtres
de
l a c o l o n i e , les
b o u c h e et l e s
munitions
approvisionnemens
de guerre
abondèrent
de au
C a p . L e s a n g l o - a m é r i c a i n s ne r e d o u t è r e n t plus a l o r s
(125) L e capitaine - général eût desiré que les lesfemmes
vieillards,
et les enfans se fussent
t o u s déterminés à passer au continent
ou à
Pour les y obliger par la crainte d'être
Cuba.
e x p o s é s à la famine et aux horreurs d'une ville q u i pouvait être enlevée d'assaut, il fit publier e t afficher: « Qu'il tiendrait encore plus long»
t e m p s qu'à la Martinique, et qu'il a c c o r -
» derait des passe-ports, même au xpoltrons. » Il n e pouvait mieux manifester ses intentions, et d o n n e r à connaître que toutes ces bouches i n u t i l e s gênaient ses opérations militaires. Il y
e u t quelques femmes et des vieillards qui
r e m p l i r e n t ses vues; mais le plus grand nombre r e s t a dans la ville, c o m m e retenu par attrac t i o n . Les époux des femmes qui étaient par t i e s , et de jeunes célibataires,
désertèrent;
i]s affaiblirent par leur fuite la force publique, ce q u i réduisit à quatre ou cinq cents blancs
les
é v é n e m e n s d e la g u e r r e .
effectué
leur
Nouvelle-Angleterre,
mens,
gouvernement,
à l'entrée
ont la
a m é r i c a i n s , à l'insçu
de
a r m e n t en g u e r r e leurs b â t i -
p o u r r é s i s t e r a u x corsaires
capturent
français qui
d i r o n t , s'ils v e u l e n t être v e r i -
d i q u e s , que les négocians leur
Les
r e t o u r e n F r a n c e , par la v o i e d e
et à l a
français qui les
sortie des
ports
d e la
(126) et de c o u l e u r , la garde nationale q u i , d e u x mois avant, était forte de 1,500 h o m m e s . L a famine augmentait journellement; les anglais en étaient instruits. Les dangers dévenant d e plus en plus imminens, déterminèrent plusieurs personnes des deux sexes à s'embarquer p o u r Cuba. Sorties de la b a y e , les anglais eurent l'atrocité de tirer sur les frêles embarcations qui portaient les victimes de leur c u p i d i t é pour les obliger de rentrer. L e capitaine général, convaincu que c e s bâtimens n'avaient rien à craindre, en longeant la c ô t e , fit tirer au-dessus d'eux,
d u fort Picolet, pour les
forcer à continuer leur route. Ils arrivèrent en effet à leur destination, où ils furent reçus avec toute l'humanité q u e reclamait leur situation. La garnison étant à la veille d e manquer de subsistances ; les hôpitaux denués d'approvisionnemens
les habitans éprouvant l a d i
sette par cause de cessation d e demandes aux Etats-Unis ; le Cap étant cerné par les nègres et les m u l â t r e s , et par leurs dignes alliés les a n g l a i s ,
q u e pouvait le capitaine-
général dans une pareille crise ? Les navires américains se rendaient dans l'ouest
et le sud,
occupés par les révoltés
nègres et mulâtres. L e général d e brigade
(127) faisait entrer de force de
Louis de Noailles,
c e s navires au môle St.-Nicolas. Cette mesure é t a i t commandée par les c i r c o n s t a n c e s , et p o u v a i t suffisamment approvisionner le C a p ; mais
il fallait de l'argent pour payer les car
g a i s o n s . Le capitaine-général ordonna un emprunt forcé
de huit cent mille francs.
Pour
r e n d r e la répartition plus facile entre les ha b i t a n s de la ville, i l en taxa huit qui passaient p o u r millionnaires,
à trente-trois raille francs
c h a c u n . Il chargea les notables de fixer la c o n t r i b u t i o n des autres. La non-exécution de la part des p r e m i e r s , entraînait, annonçat - o n , la peine de mort. M M . Fedon, Brassier, H a r d i v i l l i e r s , Allard et W a n t r o n , opposèrent d e s difficultés ; ils furent conduits en prison. Les autres satisfirent à l'emprunt. L e général en c h e f , en taxant ces huit per s o n n e s , n'entendait pas agir arbitrairement. C e q u i le p r o u v e ,
c'est qu'ayant été c o n s
t a t é q u e M . W a n t r o n , l'un de ceux imposés à 3 3 mille francs
jouissait de plus de réputa
t i o n q u e de richesses, le capitaine-général lui r e n d i t la liberté. M M . Brassier, Hardiyilliers et Allard payèrent. C e n'était pas u n e contribution de g u e r r e , n i m ê m e u n e m p r u n t , mais un échange de v a l e u r réelle contre valeur r é e l l e , qui sau-
( 1 2 8 )
vait aux particuliers une partie de leur
for
tune ; échanger enfin des écus contre des r é cépissés négociables sur le trésor national. I l est rare à S t . - D o m i n g u e , que le ne soit égoïste.
capitaliste
Sa patrie
est
son coffre. Il a été prouvé par les divers
ré
millionnaire
gimes sous lesquels la colonie, a été a s s e r v i e , que peu lui importe qui commande,
pourvu
qu'il augmente son trésor. L e c a p i t a i n e - g é néral avait défendu l'exportation
du n u m é
raire, parce que les anglais en dépouillaient ceux qui l'emportaient, et que le défaut d e circulation
aggravait les maux. Les
préférèrent
courir le risque que leurs écus
fussent p r i s ,
à l'employer
riches
aux besoins de
l'armée. M . Fedon,
principal intéressé à l'entreprise
des transports militaires, fut fusillé le 3 bru m a i r e , vers g heures du malin. Cette sanglante
catastrophe
avait sensi
blement affecté les habitans et l'armée.
Elle
doit être une leçon pour tous les h o m m e s ; mais en pesant avec impartialité les circons tances qui ont précédé cette e x é c u t i o n , il est impossible de faire de cette m o r t , un reproche au capitaine-général Rochambeau. M . Fedon,
principal intéressé dans l'entre
prise des transports militaires, réclamait, c o n jointement
(129) j o i n t e m e n t avec ses a s s o c i é s , à la charge u n e somme de plus Etait-il
du
pour solde de ce s e r v i c e ,
gouvernement,
d'un
million.
présumable que M . Fedon et ses
a s s o c i é s , ne pussent par e u x ,
ou par leur
c r é d i t , prêter avec nantissement, trente-trois mille qui
francs pour les besoins d'une a r m é e , avait
considérablement
augmenté leur
fortune ? D ' a u t r e p a r t , le capitaine-général avait sus pendu
l'exécution.
Pourquoi
a-t-on
outre
p a s s é ses ordres ? Qui les a outre-passés ? L'ordonnateur
Perroud
p i t a i n e - g é n é r a l , une heure tion,
demanda au c a de répit à l'exécu
que les notables
s'obli
g e a i e n t de payer dans ce délai, pour M.
Fedon.
en annonçant
L e g é n é r a l en c h e f l'accorda.
L'ordonnateur
i n v i t a alors le commandant Néraud, de ger
le premier
ordre,
chan-
et de donner l'heure
a c c o r d é e . Ce second ordre fut délivré ainsi conçu : «
Si dans une h e u r e , les six mille gourdes
» n e sont pas versées au t r é s o r ,
le
citoyen
»
F e d o n sera fusillé, conformément aux ordres
»
d u général en chef. » C ' e s t l'adjudant-commandant Néraud, c o m
m a n d a n t de la place et de la garde d ' h o n n e u r d u général en c h e f , qui avait fixé l'heure I
(130)
du d é p a r t , celle de l'exécution, et la m a r c h e du détachement de gendarmerie. C'est lui q u i avait remis à l ' o r d o n n a n c e , pendre, pendant une heure, prescrit à l'ordonnance
l'ordre de s u s l'exécution. Q u i a
d'accompagner
notables ? Pourquoi ce second ordre pas été porté de suite au chef
les
n'a-t-il
d'escadron
Collet, commandant de la gendarmerie, p u i s qu'il était porteur du p r e m i e r , pour faire f u siller M . F e d o n , et qu'il était en marche a v e c le p a t i e n t , pour se rendre
au lieu du
sup
plice ? Il n'y avait que deux portées de f u s i l , du palais du gouvernement
au lieu de l'exé
cution.Les notables et M . Fedon jeune, étaient au palais,
lorsque
l'ordre pour suspendre
l'exécution pendant une h e u r e , a été délivré. Qui d o n c , donnance
on le r é p è t e , a prescrit d'accompagner
M M . Renouard
les notables
et Stansant,
à l'or?
président
et trésorier du conseil des n o t a b l e s ,
s'occu
pèrent, en sortant de chez le capitaine-géné r a l , de faire entr'eux les 33 mille francs. Ils se transportèrent, sans perdre de t e m p s , c h e z le commandant Néraud avec
l'ordonnance,
pour lui annoncer que les fonds étaient faits. Qu'y
apprirent-ils ?
que
M . Fedon
était
fusillé. Pourquoi le frère
de M . F e d o n , qui n ' i g n o -
(131) raît
pas que le général en c h e f avait accordé
u n délai à l ' e x é c u t i o n , ne fut-il pas rendre l'espérance au patient et le c o n s o l e r , au lieu d ' a c c o m p a g n e r les notables ? Pourquoi les n o t a b l e s ne firent-ils pas prévenir M. Collet? I l est pénible de s'appesantir sur cette cruelle c a t a s t r o p h e ; mais pourquoi M . Fedon
jeune,
n e l a prévint-il pas ? O n ne peut se dissimu ler,
que sa situation était h o r r i b l e , que son
e s p r i t devait être frappé de t e r r e u r , et son â m e dans la stupeur ; mais il s'agissait d e s a u v e r un frère,
et le moindre délai pouvait
ê t r e fatal : ce qui est arrivé. L a veille de l ' e x é c u t i o n , r e m i s à son jeune f r è r e ,
M . Fedon avait
u n e lettre pour les
m e m b r e s du conseil des notables. Il leur d e m a n d a i t de lui avancer la somme à laquelle il é t a i t imposé. A quatre heures du soir de c e m ê m e j o u r , M . Fedon j e u n e , c o m m u n i q u a c e t t e lettre à M . Dat,
ex-entrepreneur des
h ô p i t a u x militaires, qui lui dit de la porter d e s u i t e à M . Renouard,
président du conseil des
n o t a b l e s , et s'obligea par é c r i t , d'entrer pour u n quart dans la s o m m e à avancer. S i on doit en croire le conseil des notables, la lettre de M . Fedon n'a été remise à son p r é s i d e n t , qu'à six heures du matin, environ t r o i s heures avant l'exécution. I 2
(132) Que d'inconséquences de la part de ceux q u i pouvaient sauver M . Fedon.
V I I N'avoir
M
pas
Domingo, L E
E
.
R E P R O C H E . évacué
du
avant l'arrivée
Cap
sur
de
Santo-
Dessalines.
capitaine - général en o f f r a n t , par ses
proclamations, des passe-ports,
avait suffi
samment manifesté aux habitans du C a p , la résolution qu'il avait p r i s e , de s'ensevelir sous les ruines de la v i l l e , plutôt que de la livrer aux anglais. La majeure partie de
ceux qui
étaient aptes au s e r v i c e , et capables d'en s u p porter les f a t i g u e s , avait fuit
à l'étranger ;
il ne restait pour défenseurs dans la p l a c e , qu'une faible g a r n i s o n , la compagnie nistrative,
admi-
et quelques blancs de la garde
nationale. Il fallait deux mois et p l u s , pour se rendre du Cap à S a n t o - D o m i n g o , avec la garnison, traîner l'artillerie de campagne transporter les
nécessaire,
munitions de guerre
et d e
b o u c h e , les archives des greffes, celles des d i f f é rentes administrations militaires et c i v i l e s , et
( 1 3 3 )
assurer la marche des habitans des deux sexes, q u i persistaient à rester sous la protection de l a garnison. O n doit juger combien la marche de celte c a r a v a n e eût été difficile. Il fallait gravir des m o n t a g n e s ; tous les chemins avaient été d é f o n c é s ou obstrués par les révoltés. L'obliga t i o n d'être constamment sur e n mesure
le
qui
v i v e ,
de supporter les attaques
et
d'un
e n n e m i sanguinaire ; la faiblesse des valétu d i n a i r e s ; celle du sexe et des enfans q u i , n u i t et jour n'eussent pu être abrités des i n j u r e s du temps, et ensuite les réflexions péni bles
et déchirantes auxquelles on eût été
l i v r é , par l'abandon
des malades qu'on eût
é t é obligé de laisser au C a p , sans pouvoir l e u r assurer de secours ( 1 ) . Il n'existait, le 29 v e n d é m i a i r e , c o m m e on l'a déjà observé, en p a i n et b i s c u i t s , dans les magasins de l ' é t a t , q u e pour soixante-huit jours pour la garnison.
(1)
Lorsqu'on
Perroud
avait
a
évacué
fait u n e
le
Cap,
l'ordonnateur
convention é c r i t ,
avec
les
c o m m i s s a i r e s d e D e s s a l i n e s , p o u r l e s soins à d o n n e r aux malades, place,
q u ' o n était o b l i g é d e laisser d a n s l a
et p o u r l e u r r e t o u r en F r a n c e , p a r la v o i e d e
l a N o u v e l l e - A n g l e t e r r e . A p r è s l ' é v a c u a t i o n du C a p , p e s s a l i n e s l e s fit n o y e r .
(134) La ville était dépourvue de toutes espèces
de
subsistances. A l'époque où Dessalines
se mit en m a r c h e
sur la partie du n o r d , tout faisait espérer q u e c e c h e f noir serait retenu au Nicolas, Noailles,
môle
Saint-
et que le général de brigade, Louis
de
parviendrait à le forcer à r é t r o g r a
der. La belle défense de ce général ne fit q u e hâter la résolution qu'avait Dessalines,
d'at
taquer le quartier-général. Il abandonna le m ô l e S t . - N i c o l a s , et se rendit sur les hauteurs d u Cap.
Christophe
et Clerveau
cernaient
la plaine, depuis la grande rivière au h a u t du Cap. Si à l'approche de Dessalines, c u é sur Santo-Domingo,
on eût é v a
il eût fallu c o m b a t t r e
les divisions de Christophe
et de
Clerveau,
qui se fussent r é u n i e s , et surtout les a t t e i n dre ; ce que ces chefs noir et jaune eussent é v i t é , pour s'en tenir à h a r c e l e r , et d e mettre la
confusion dans
tâcher
la c a r a v a n e .
En supposant qu*on eût vaincu toutes les d i f ficultés militaires, et qu'on fût parvenu à se réunir au général Férand, eussent pas
les habitans n ' e n
moins péri de faim durant la
r o u t e , puisqu'ils n'avaient que peu ou p o i n t d'approvisionnemens à leur d i s p o s i t i o n ,
et
qu'on n'eût pu s'en procurer pendant la m a r -
(135) c h e , ni m ê m e de l ' e a u , lorsqu'on serait par v e n u à vingt lieues de Santo-Domingo. Fallait-il abandonner les habitans dans la v i l l e ? Dessalines a fait égorger tous ceux qui y
s o n t restés après l'évacuation forcée de la
p l a c e , quoiqu'il ait écrit au conseil des n o tables,
qu'il accordait protection spéciale à
t o u s sans e x c e p t i o n , et que leurs personnes et leurs propriétés seraient respectées : c e qui a d é t e r m i n é beaucoup de personnes qui étaient embarquées,
à reprendre leur d o m i c i l e , et
à faire débarquer leurs effets. S o u s le rapport de l ' h u m a n i t é , tout pres c r i v a i t de garantir les habitans de la férocité des révoltés. Sous celui de la p o l i t i q u e , leur c o n s e r v a t i o n était aussi précieuse, puisque les c o l o n s formaient une population qui ne peut s e remplacer que par de très-grands sacrifices, e t q u e le succès à venir, dans la reprise de la c u l t u r e , était dépendant des connaissances q u ' i l s avaient acquises par l'expérience. O n ne pouvait
donc
évacuer sur Santo-Domingo
q u ' a v e c les habitans. Evacuer le C a p , dès l'instant de l'attaque d a n s le sud par les révoltés ? après l'évacua t i o n de c e quartier ou de celui de l'ouest ? C ' e û t été dans l'un et l'autre c a s , l'action d ' u n h o m m e pusillanime. L e général R o c h a m -
(136) beau est d'un caractère trop prononcé
sur
l ' h o n n e u r , pour s'en écarter.
V I I I
M
E
.
De l'évacuation
R E P R O C H E . du Cap. Des officiers en
donnés
otage.
L ' É V A C U A T I O N d u C a p a paru
étonnante,
après Je succès que les troupes françaises o n t obtenus lines,
le jour de l'attaque faite par Christophe
et Clerveau;
Dessa-
d'où o n en
a tiré la c o n s é q u e n c e , qu'elle n'aurait pas eu l i e u , si on avait attaqué les révoltés le l e n d e main. Si les nègres et les mulâtres eussent
été
seuls à combattre ; si les anglais eussent é t é p a s s i f s , c'est-à-dire, si on eût eu l'assurance qu'ils borneraient
leurs opérations
ciales,
et à fournir des munitions
au blocus,
anti-so-
de guerre à leurs brigands noirs et jaunes ; o n e û t , d'après la valeur française, tenté d e vaincre toutes les difficultés, quoique les r é voltés fussent parvenus à élever sur le m o r n e du C a p , une batterie qui portait dans le c e n tre de la v i l l e , et quoique leur armée se p r o -
(137) longeât du bourg du haut du C a p , jusqu'au fort Picolet. Mais les anglais avaient l'inten tion de forcer l'entrée de la b a y e , et de f o u droyer la v i l l e , pendant que les français graviraientla montagne pour atteindre les révoltés; attaque d'autant plus p é n i b l e , que le morne du
Cap est très-élevé, et presque à p i c , ce
q u i , sous ce rapport, centuplait la force des révoltés,
et eût diminué d'autant celle des
français ( 1 ) . La garnison et les habitans se fussent trouvés entre deux f e u x , et il est évi d e n t que tous eussent été
impitoyablement
massacrés. D'autre part, les nègres étaient d é cidés à faire jouer la m i n e , et à faire é c r o u l e r du m o r n e , de fortes parties de rochers
( 1 ) L a ville
du C a p est o u v e r t e d e
toutes parts.
D u côté de la t e r r e , elle est d o m i n é e par la t a g n e , au bas de l a q u e l l e défense de
elle
est
consistait en un b a s t i n g u a g e d e d e u x
t o n n e a u x , remplis de
terre.
mon
p l a c é e ; t o u t e la
L'escadre
rangs
anglaise
é t a i t c o m p o s é e d e o n z e v a i s s e a u x d e l i g n e : on n ' a v a i t q u e trois f r é g a t e s , d é g a r n i e s d ' é q u i p a g e s , o p p o s e r . L e s faire c o u l e r dans les passes une
opération
très-incertaine
et
à leur
! C'eût
été
très-impolitique
p a r l e s u c c è s . C ' e û t é t é m e t t r e à e x é c u t i o n le p r o j e t q u e l e s anglais a v a i e n t f o r m é , l o r s d e l e u r e x p é d i t i o n pierreuse
sur B o u l o g n e .
(138) sur la ville ; espèce d'attaque de la part d e s r é v o l t é s , contre laquelle aucune défense h u maine ne pouvait résister. A i n s i , soit que l e s français se fussent maintenus sur la
défensive,
ou qu'ils se fussent portés à l'offensive,
leur
mort était certaine. Fuir par la plaine ? la c o n fusion eût amené une déroute d'autant p l u s cruelle, que par la fuite m ê m e , on se serait trouvé sans défense. Depuis six s e m a i n e s , le blocus
était u n
thermomètre de sensations politiques. L ' e s cadre anglaise resserrait journellement l ' e n t r é e de la b a y e , en plus, ou moins de ce q u ' e l l e apprenait de la résolution qu'on avait de se d é fendre jusqu'à la mort, plutôt que de lui livrer la ville. Le jour de l'attaque, l'escadre anglaise était composée de onze vaisseaux de ligne. Le capitaine-général Leclerc a vaincu lors de la révolte de Dessalines,
en vendémiaire
an X I , parce que l'attaque des rebelles était fixée dans la plaine, où les nègres ne peuvent résister à la valeur française. Dans cette d e r nière attaque, l'armée
on a également vu
des révoltés n'eût
occupé
que si que
la
plaine, elle eût été entièrement détruite. L e s appeler au combat dans la plaine? alors il fal lait abandonner la v i l l e , q u i , à l'instant, eût été la proie des rebelles. Toutes les f o r c e s
(139) eussent été pour e u x ; la garnison et les habitans eussent été victimes de l'imprévoyance d e leur chef. L'attaque
combinée
des révoltés et des
anglais, nécessitait néanmoins une détermi nation définitive. Il fallait périr par le fer assassin des anglais, et de leurs alliés, noirs et j a u n e s ; ou faire un choix entre ces c a n n i bales pour la remise de la place.
Dessalines
obtint la préférence ! la saine politique le c o m m a n d a i t , ainsi que cela s'était pratiqué pour les autres p l a c e s , excepté la ville du Port-auP r i n c e , qui, après avoir été livrée aux anglais, f u t remise par eux aux nègres, à la condition d'égorger les blancs qui s'y trouvaient. L a possession de S a i n t - D o m i n g u e , par les révoltés, souveraineté
conserve toujours à la France la de cette île. A la paix avec l ' A n
g l e t e r r e , celte colonie n'entrera pas en
com-
pensation. L'adjudant-commandant Duveyrier s'abou cha avec les nègres; le capitaine-général ra tifia les conditions pour la remise de la place : d e part et d'autre on livra des otages. Il traita ensuite avec les anglais pour la sortie par m e r , de la garnison et des habitans (1). (1) L a flotte sortit de la baye au jour fixé. Une
(140) O n fait un reproche au général R o c h a m beau
d'avoir compromis la dignité n a t i o n a l e ,
en livrant des officiers européens pour o t a g e s à des brigands, et d'avoir mis leur vie e n d a n g e r , en prétendant qu'il a condamné
à
m o r t , durant le séjour des otages au c a m p d e Dessalines, les nègres de la chaîne, e m p l o y é s aux travaux publics. Par les arrangemens pris avec on avait dix jours
Dessalines,
pour évacuer la place : i l
était de la plus grande importance que l ' é v a cuation se f î t sans troubles, et que les h a b i tans et les troupes pussent s'embarquer s a n s précipitation. La sécurité a régné pendant c e s dix j o u r s , c o m m e dans un temps de paix. L e s nègres
domestiques
aidèrent
avec
fidélité
dans le transport des effets, et parurent r e g r e t ter les français. petite g o é l e t t e ,
sur laquelle
il y
a v a i t h u i t à dix
b l a n c s des d e u x s e x e s , fut c a p t u r é e p a r u n e b a r g e d e n è g r e s . L e s v i c t i m e s furent c o n d u i t e s sur l a c ô t e . L a m ê m e b a r g e a b o r d a la g o ê l e t t e sur l a q u e l l e était l ' o r d o n n a t e u r P e r r o u d , a v e c v i n g t p e r s o n n e s , tant officiers d ' a d m i n i s t r a t i o n d e d i v e r s g r a d e s , q u e des d a m e s . O n était sous l e canon du fort P i c o l e t .
Quel
ques m o t s dits à p r o p o s , et l e s n è g r e s nous l a i s s è r e n t p a s s e r . L e s trois frégates et l e s n a v i r e s du c o m m e r c e furent a m a r i n é s p a r l e s anglais.
(141) II est étonnant qu'on
ait avancé que le
capitaine-général avait compromis la dignité nationale, en donnant deux officiers en otages a u x b r i g a n d s , et que cette mesure était r é p r o u v é e par l'honneur. Il s'agissait cependant d'assurer la retraite à dix mille français, tant troupes qu'habitans des deux sexes. Ce n'était p a s d'ailleurs la première fois que des officiers avaient été envoyés aux nègres : cette mesure e u t lieu dans des temps aussi dangereux. A l'arrivée de l'escadre devant le C a p , le capitaine-général Leclerc e n v o y a , en parle mentaire à Christophe,
un officier de terre
e t un de marine, au moment que ce
chef
r e b e l l e allumait les torches pour incendier l a ville. L e général Boudet,
avant de
débarquer
a v e c sa division au Port-au-Prince, députa son a i d e - d e - c a m p au c h e f qui commandait dans la p l a c e . D e p u i s , on s'était conduit de
cette
m a n i è r e avec les brigands, sur deux autres points de la colonie. Le capitaine-général
Rochambeau
n'est
d o n c pas le s e u l , ni le premier qui se soit servi de ses officiers pour communiquer avec l e s rebelles. MM.
Urbain Deivaux,
c o m m a n d a n t , et Armand
adjudant-
Levasseur,
lieu
t e n a n t - a i d e - d e - c a m p , envoyés en o t a g e s ,
(142) durent se trouver flattés du choix qu'on avait fait d'eux
pour cette mission. Forts de
la
loyauté du général en c h e f , et de son e x a c t i tude à remplir ses engagemens, ils ne p o u vaient pas craindre d'être victimes de la cruauté de l'homme auquel on les envoyait. Si par l'ordre d o n n é , d'embarquer
les n è g r e s
de la c h a î n e , employés aux travaux p u b l i c s , l ' e x i s t a n c e de ces officiers a pu paraître
à
quelques personnes avoir été un instant c o m p r o m i s e , lorsque Dessalines a réclamé
ces
n o i r s , c e ne serait pas encore au général e n c h e f qu'il faudrait s'en prendre. C e fut le commandant de la place,
Néraud,
q u i , par mesure de sûreté, fit embarquer l e s nègres de la c h a î n e , parce qu'ils
pouvaient
occasionner du trouble dans le Cap. O n n e peut pas conclure pendant
de cet
l'évacuation,
été condamnés à mort.
embarquement,
que ces noirs avaient L'époque m ê m e d e
leur embarquement prouve le contraire. Il est pareillement étonnant que les anglais, toujours atroces dans leur politique, aient e u l'impudence de faire un r e p r o c h e , dans leurs papiers p u b l i c s , au capitaine-général R o c h a m b e a u , de n'avoir pas reclamé les ( q u ' i l s qualifient de prisonniers
déserteurs, de
guerre),
(143) e t de les avoir abandonnés
à la férocité
de
Dessalines. Ces militaires, par leur désertion ( e t désertion
étaitune
révolte contre
avaient encouru la peine
la
cette
France), Ils ont dû
capitale.
p e r d r e la v i e , avec le regret d'avoir mérité la m o r t . Ces déserteurs sont des soldats
polonais,
q u i ont été joindre les révoltés par compagnies. Quant
à des prisonniers
il n'y en
français,
a v a i t point : les rebelles
massacraient
sur le
c h a m p de bataille, les français qui tombaient e n leurs mains. Ils amoncelaient en forme (1)
de pyramide
leurs
N e f a l l a i t - i l pas aussi r é c l a m e r , c o m m e d e s
hommes
p r é c i e u x , un chirurgien
d e m a r i n e Gom
Bena....
qui
et l e
commissaire
o n t été j o i n d r e l e s
b r i g a n d s . Ce dernier a exposé les malades pital
des
Pères,
au Cap,
é v a c u a t i o n , d'après l ' o r d r e f ordonnateur
Perroud,
qu'il
tout
ambition autre
en
avait
leur
reçu
à être i m m o l é s p a r les
l u i d a n s la c o l o n i e ,
d'une
de l ' h ô
en n ' a c c é l é r a n t pas
n i b a l e s . L e s o u s - p r é f e t de Drèmes, avec
têtes
(1).
de can
en faisant p a s s e r
ce jeune h o m m e
o u t r é e , l u i c r o y a i t sans
pétri
doute
c a r a c t è r e . I l y a d'autres b l a n c s qui
s o n t Tendus traîtres à l e u r p a t r i e , en
devenant
un se les
c o n s e i l l e r s i n t i m e s d e D e s s a l i n e s , et en suivant c e t homme-tigre naires.
dans
toutes
ses e x p é d i t i o n s
sangui
(144) Lorsque l'escadre anglaise eut amariné l e s frégates de l'état, et les bâlimens du c o m merce qui portaient les troupes et les h a b i t a n s qui suivirent l ' a n n é e , on se rendit à Royal,
P o r t -
île de la Jamaïque.
O u doit croire que l'amiral, c o m m a n d a n t à la Jamaïque, n'a eu en v u e , d'après instructions,
ses
lors de la signature de la c a p i
tulation, que la vie sauve
des troupes
pour
un temps. O n a volé aux troupes le peu q u ' e l l e s possédaient ; les habitans ont été dépouillés d e tout ce qu'ils avaient pu sauver. L a c u p i dité anglaise a contraint les femmes à s o u f frir sur elles, les recherches et les fouilles les plus indécentes. L a pudeur a été outragée avec une cruauté qui tenait de la rage q u ' a vaient les anglais, de voir que leur expédition maritime, faite à grands frais, ne leur r a p portait que l'odieux d'être compté au n o m b r e des peuples féroces. Les troupes furent e n t a s sées à la Jamaïque, dans des pontons i n f e c t e s , où elles étaient livrées aux horreurs de
la
faim et de la s o i f , et périssaient calcinées par le s o l e i l , en cherchant à éviter
d'être
noyées à chaque marée m o n t a n t e , qui r e m plissait d'eau les pontons. Les anglais livrèrent aux nègres, pour ê t r e égorgés, les équipages des corsaires français
qu'ils
( 1 4 5 ) qu'ils capturaient. O n doit à la vérité de d é clarer qu'il y avait des officiers de la marine anglaise remplis d'honneur, qui rougissaient d e la conduite que tenait leur gouvernement. Il y en a qui ont exposé leur vie pour sauver d e s français ; mais il y en a eu aussi qui se s o n t bien oubliés, et qui ont autorisé, par l e u r silence, des actions outrageantes à l ' h u manité.
I X D'avoir
M
E
R E P R O C H E .
remis la ville du Cap aux
avant LES
.
d'avoir
essuyé
trois
révoltés,
assauts.
ennemis du capitaine-général R o c h a m -
b e a u sont si exaspérés, qu'ils répandent dans: le
public que ce général a encouru la peine
c a p i t a l e , pour avoir livré la ville du Cap aux n è g r e s , avant d'avoir C'est-à-dire
q u e , sans
essuyé
trois
assauts.
exception,
tous
les
généraux et officiers ayant eu le c o m m a n d e n i e n t à S a i n t - D o m i n g u e , d'une ville o u v e r t e , un
b o u r g , une b i c o q u e , un fort, un
frouse
blok-
( m a i s o n - f o r t ) , et qui les ont éva
c u é s ou rendus avant d'avoir résisté à K
trois
(146) assauts,
doivent,
suivant leurs p r i n c i p e s ,
passer par les armes. D e telles idées sont trop extravagantes p o u r être considérées sérieusement. Pour faire usage de l'article du Code m i l i t a i r e , qui condamne à mort le c o m m a n d a n t d'une place de guerre,
qui l'a remise à l ' e n
n e m i , il faut que l'application de la loi p u i s s e se faire avec justice. Dans l'hypothèse d o n t i l s'agit, la question se décide par la c o m p a raison des places. La ville du Cap-Français être comparée à une place
ne peut pas p l u s qu'on
de guerre,
n e peut comparer un village,
ouvert de t o u t e
part et d o m i n é , à la forteresse
de
Luxem-
bourg. La ville du C a p , du côté de la terre,
est
entièrement dominée par la m o n t a g n e , a u bas de laquelle elle est placée. T o u t e sa d é fense consistait en un bastinguage
de deux:
rangs de tonneaux, remplis de terre. D u c ô t é de la mer, la baye est ouverte à l ' e n n e m i , quoique la batterie basse du fort
Picolet
pré
sente une meilleure défense que celle de h a u t , où la garnison est en danger, par l'éboulement des rochers qu'occasionnerait le feu de l ' e n n e m i , le fort étant adossé contre le r o c . L ' e s cadre aux ordres du v i c e - a m i r a l
Vilaret-
(147) est entrée dans la baye du Cap en
Joyeuse,
pluviôse an X , malgré le feu de ces batteries. Alléguera-t-on que la ville du Cap était d é f e n d u e par dix blok-houses,
élevés aux frais
d e s habitans, et garnis de cinquante pièces d'artillerie ? L a majeure partie de ces blok-houses feux
ne se croisant
(leur
n'offrait que de
pas),
g r a n d e s guérites. La protection défensive qu'on en
espérait, se perdit dès que les anglais
eurent fourni des obusiers et des canons aux révoltés. Les troupes renfermées dans
ces
colombiers
les
étaient prisonnières lorsque
r e b e l l e s paraissaient, si elles ne se hâtaient de s e replier. I l y a eu des défenses des plus honorables de
la part des t r o u p e s , lorsqu'elles furent
assiégées dans ces casemates de bois; mais que pouvait la valeur contre la multitude
des
assiégeans et leurs attaques régulières ? Les nègres ont été, dans plusieurs circonstances, e m p o r t é s par l'admiration de la bravoure fran çaise : ils s'écrièrent dans diverses de leurs attaques braves périr. dans
contre ces blok-houses,
qui les défendaient Ils les invitèrent une défense
passage
inutile.
pour se replier
que
ne devaient
les pas
de ne pas
persister
Ils leur
ouvrirent
sur la place.
Mais
( 1 4 8 )
cela ne prouve pas que ces blok-houses
pou
vaient remplir le but qu'on s'était p r o p o s é . Ces défenses prouvent au contraire leur i n u tilité. Toutes les troupes se sont signalées par d e s actions héroïques : elles se sont c o n s t a m m e n t couvertes de gloire. Ces blok-houses,
après que les nègres o n t
été munis d'artillerie, n'ont eu d'utilité c o n n u e , que pour annoncer leur approche. S o u s ce rapport, c'était une protection; mais ils servaient plutôt à avertir qu'il fallait se dis poser à évacuer qu'à combattre, la garnison de la ville étant trop faible. Les lois pénales militaires, relatives à la r e d dition d'une place
de guerre,
ne sont d o n c
pas applicables à celle de la ville du Cap. Les ennemis du capitaine-général R o c h a m b e a u , ne seront sûrement pas pris pour l e s amis des colons. Il fallait, d'après e u x , d e vancer les massacres effectués par les anglais et les nègres, faire passer au fil de 1 épée les vieillards, les femmes et les enfans.
( 1 4 9 )
X De Un doit,
M
E
.
ne s'être général
R E P R O C H E . pas embarqué
le
dernier.
COMMANDANT UNE PLACE, ne
en l'évacuant,
en sortir que le
dernier.
L e reproche qu'on fait au capitaine-général R o c h a m b e a u , a une apparence perfide qui p e r s u a d e ; mais avec la réflexion, la
lâcheté
r e t o m b e sur ceux qui osent lui en faire l'ap plication. Le capitaine-général Rochambeau un lâche ! Personne ne le croira. Une cabale conduisit le comte
de Laly à l'échafaud; sous
l e règne DE NAPOLÉON, la calomnie ne trou v e r a pas d e sauve-garde. Le
capitaine-général
Rochambeau
ne
c o m m a n d a i t pas la place du C a p , quoiqu'il y
résidât. IL ÉTAIT GÉNÉRAL EN CHEF, COM MANDANT LA COLONIE. Son devoir lui pres crivait d'établir le quartier-général en C'est le général Lapoype,
rade.
commandant de la
division du n o r d , qui commandait au Cap ; c e t officier-général, ainsi que le lui ordonnait l ' h o n n e u r , s'embarqua le dernier avec l'adjudant-commandant
d'Hennin,
son c h e f d'é-
tat-major. Après que le traité passé entre
(150) l'adjudant-commandant Duveyrier
et
Dessa-
fut ratifié par le capitaine g é n é r a l ,
lines,
ce
dernier était dans l'obligation de se mettre la disposition
de la marine.
à
Son prompt e m
barquement était nécessaire, pour assurer l a sortie de la flotte hors de la baye du C a p , pour le jour fatal, et obliger, par ce m o y e n , les troupes et les habitans de précipiter leur (1). L'embarquement
le
des troupes était
effectué. Il ne restait à terre que des
traîneurs.
L e général Rochambeau quoiqu'il eût traité avec les a n g l a i s , devait desirer trouver moment favorable pour leur échapper,
un se
et
rendre à Santo-Domingo avec les débris de l'armée. L'intention du capitaine-général était d'ail leurs de sortir le dernier de la place ; une
circonstance impérieuse
lui
mais
prescrivit
d'abandonner cette résolution. Il y resta n é a n moins quatre jours. Les chefs noirs et m u l â t r e s , suscités par les anglais, étaient mécontens
( 1 ) Si
la flotte n ' e û t
j o u r p r e s c r i t , Christophe
pas m i s â la voile pour
c o m m e r c e . L e s grils étaient feu.
que
le
eût fait tirer du fort P i c o l e t ,
à b o u l e t s r o u g e s , sur les v a i s s e a u x
au
de ce
de
l'état
et d u
m o n t é s , et l e s b o u l e t s
(151) Dessalines
n'avait pas imposé des conditions
p l u s dures. Dessalines
leur répondait : j'ai
Pour leur c o m p l a i r e ,
promis.
il tendit un
p i é g e au capitaine-général, afin
d'avoir un
prétexte de violer la foi des engagemens pris. I I écrivit au conseil
des notables,
c o l o n s qui coudraient
rester dans la c o l o n i e ,
jouiraient
de la plus
q u ' i l leur assurait sûreté
grande
que les
protection
;
pour leurs personnes
et leurs propriétés, et chargea le conseil d'en p r é v e n i r les habitans. C'était, de la part de Dessalines, la
placer le capitaine-général dans
position la plus pénible. Les notables n e
p o u v a i e n t rendre publique la lettre de
Des-
s a l i n e s , sans l'agrément du capitaine-général. En
refusant son approbation pour la publica
t i o n de cette l e t t r e , il fallait reprendre les a r m e s , lorsque tout c o m m a n d a i t , d'après les faibles
moyens repressifs qu'il avait en sa
possession, d'accélérer l'évacuation pour sauver l e s débris de l'armée. Les dispositions paci fiques que témoignait Dessalines,
pouvaient-
ê t r e véritables. Elles paraissaient d'autant plus v r a i s e m b l a b l e s , que la tranquillité
régnait
a u x C a y e s , à J é r é m i e , au Port-au-Prince et à S t . - M a r c , et que ce c h e f noir accordait des passe-ports
pour rentrer dans la
colonie,
à ceux q u i , étant obligés de suivre l'armée
(152) pour rendre leurs comptes en F r a n c e , a n n o n çaient vouloir revenir à St.-Domingue. Le c a pitaine-général démontra aux notables c o m bien on devait se méfier des apparentes
dis
positions pacifiques de Dessalines. Il s o u s c r i vit avec peine à leur vœu. Il permit de f a i r e afficher et publier la l e t t r e , et fut établir s o u quartier-général à bord de la frégate la Surveillante,
Barre,
en annonçant au
commandant
qu'il se mettait avec l'armée à la
disposition de la marine. Le président et l e trésorier du conseil des n o t a b l e s , pénétrés des dangers que le général en chef leur avait d é m o n t r é s , s'embarquèrent, Les autres n o t a b l e s , notamment M. Hardivilliers,
res
tèrent au C a p , et furent avec les habitans d e la ville et ceux qui débarquèrent,
victimes
de leur confiance. Dessalifies se voyant déjoué par la publi cation de sa lettre, dans le projet qu'il avait formé d'égorger les troupes avecles habitans, en conçut un second dans les mêmes vues. Les archives ( 1 ) étaient embarquées.
(1)
P a r l'article
5
de la capitulation
Dessa-
avec l e s
a n g l a i s , p o u r l a sortie par m e r de la g a r n i s o n C a p , l e s a r c h i v e s d e v a i e n t être r e s p e c t é e s sées
e n la
disposition
du g é n é r a l Boyé,
du
et l a i s chef
de
(153) réclama celles du greffe,
Unes
« attendu,
» disait-il, que beaucoup de français restant »
dans la ville, ces archives étaient leur p r o -
»
priété » . C e nouvel incident pouvait trou
b l e r 1 évacuation : on les promit. Les archives d u greffe furent débarquées et remises la sur v e i l l e que les vaisseaux sortirent de la
l'état-major-général.
Les anglais,
baye.
entraînés p a r l a
c u p i d i t é , l e s s a i s i r e n t , espérant t r o u v e r d e l ' a r g e n t dans
l e s m a l l e s , caisses et boucauts q u i l e s r e n f e r
maient. maient
Trompés
dans
leur
attente,
ils b l a s p b é -
de rage.
L e g é n é r a l Boyé e t l ' o r d o n n a t e u r - g é n é r a l me
donnèrent
ces
archives.
constatées
ordre de r é c l a m e r , Après
à la
Perroud; Jamaïque,
b i e n des d i f f i c u l t é s , q u i sont
p a r trois p r o c è s - v e r b a u x d é p o s é s au m i
n i s t è r e d e la m a r i n e , les anglais l e s r e m i r e n t a p r è s a v o i r tout b o u l e v e r s é , e t e n a v o i r jeté u n e p a r t i e à l a m e r . I l s refusèrent d e r e m e t t r e c e l l e s qui a p p a r t e n a i e n t à l ' a r m e du g é n i e . I l y avait p l u s i e u r s caisses c o n t e n a n t l e s plans d e s v i l l e s , f o r t s , e t d e d i v e r s e s positions
défensives
de la colonie ; n o m b r e
d'ins-
t r u m e n s d e toutes e s p è c e s , e t tout c e qui était u t i l e , et
pour
long-temps,
pour
les bureaux
a r m e . L e s anglais r e f u s è r e n t é g a l e m e n t d e au c o m m i s s a i r e des g u e r r e s Leaumont, d e l a v i l l e des Caycs, dans
l e s magasins d e
de
celle
remettre
l e s archives
q u ' i l s a v a i e n t saisies e t v e r s é e s Fort-Royal.
(154)
X I Avoir
M
E
.
R E P R O C H E .
livré
l'artillerie
à
Dessalines.
O N doit se rappeler qu'à l'époque o ù l e c a pitaine-général Rochambeau traita avec salines,
Des-
il était impossible de tenir d a v a n
tage au Cap. Voyez
la réfutation du
huitième
reproche. L'évacuation du Cap était f o r c é e , c e l l e du môle St.-Nicolas devait
en être la s u i t e . II
•convenait d'empêcher les anglais de s'empa rer d'une partie de la c o l o n i e , et surtout d'a voir la possession
de
afin qu'il ne pût y
avoir aucun prétexte de
cette dernière p l a c e ,
compensation à la paix. La saine politique commandait d o n c de placer, quoi qu'à r e g r e t , les nègres dans la situation de pouvoir résis ter à l'Angleterre ; punir par-là les anglais de leur perfidie envers la F r a n c e ,
et
déjouer
Il eût été préférable, a-t-on dit, de
remettre
leurs projets. l'artillerie
aux
anglais.
Sans d o u t e , s'ils
avaient les principes des autres peuples p o l i cés ; mais ils sont plus barbares que les nègres. Leur caractère est pire que celui des
tunisiens
(155) et des algériens.
Ils eussent vendu cette artil
l e r i e mille fois sa valeur aux nègres, et ils les e u s s e n t obligés, par le besoin qu'ils en avaient, d e leur livrer en sus les principales places. E n livrant celte artillerie aux anglais, c'eût é t é se mettre entièrement
à leur d i s c r é t i o n ,
e t on sait avec quelle barbarie ils se sont c o m p o r t é s au Port a u - P r i n c e , où ils livrèrent au m a s s a c r e une partie des habitans, en ouvrant l e s portes de la ville aux nègres, avant d'avoir a s s u r é l'embarquement des colons qui v o u l a i e n t suivre l'armée. Ils eussent agi de cette m ê m e manière au Cap. La mort d'un français, i n s p i r e une joie atroce aux anglais. C ' e s t , d i s e n t - i l s , un français
de
moins.
p o u r rendre les nègres indépendans des an g l a i s , il y avait donc nécessité de leur aban d o n n e r l'artillerie. M a i s , dit-on e n c o r e , c'est nègres aux
dans la situation
français,
jyomingue
lorsqu'on
le drapeau
avoir mis
de pouvoir déployera
les
résister à
Saint-
impérial.
L e s anglais, on l'a prouvé, sont les insti gateurs ces
de la révolte des nègres. Lorsque
derniers furent subjugués par le capi
taine-général Leclerc,
les anglais les firent de
n o u v e a u révolter ; et quoiqu'en paix avec la F r a n c e , ils leur fournirent de l'artillerie, des
( 1 5 6 )
armes et de la poudre. N'est-ce pas m e n t i r à sa c o n s c i e n c e , que de vouloir faire
croire
que l'Angleterre, en guerre avec la F r a n c e , refusera de l'artillerie, des armes et de
la
poudre aux nègres, et que ces derniers
se
trouveront dépourvus de moyens de d é f e n s e , lorsque l'armée française débarquera à S a i n t Domingue. On va jusqu'à prétendre qu'il fallait à la mer les canons,
les armes et la
jeter poudre.
Le capitaine-général et les troupes, eussent préféré périr jusqu'au dernier h o m m e , avant de renoncer aux honneurs
de la guerre.
La
remise de l'artillerie aux nègres, a été dix jours francs pour é v a c u e r ; ce qui
mettait
tous les habitans d u Cap à même de suivre l'armée. Quant aux anglais, ils refusèrent p r i m i t i vement d'accorder les honneurs de la
guerre
aux troupes. Ils exigèrent que les faibles débris de
l'armée
se livrassent à discrétion.
Le
général en c h e f leur lit notifier que s'ils p e r sistaient dans leurs prétentions, qui étaient déshonorantes, frégates
il ferait mettre le feu
aux
et aux navires français qui étaient
ancrés dans la b a y e , et qu'il tenterait a v e c ses t r o u p e s , quoiqu'assuré de périr, a c c a b l é par le nombre des n è g r e s , de se r e n d r e à
( 1 6 7 )
Santo-Domingo.
Alors il eût été f o r c é , par
l ' h o n n e u r , d'abandonner les habitans du Cap à l a férocité des anglais et des nègres. P o u v a i t il y avoir une circonstance plus cruelle e t plus pénible. Existe-il un français é t é assez atroce, pour jeter
qui eût
à l'eau l'artillerie,
a y a n t la certitude, par cette action qui eût été
alors barbare, que c'était conduire à une
mort
inévitable de braves troupes, et une
forte
population
blanche. Des soldats
qui
a v a i e n t le courage de mourir, lorsqu'il s'agis s a i t de l'honneur, livrèrent leur artillerie pour s a u v e r sept raille vieillards, femmes et e n f a n s (1). Ils eurent les honneurs
de la
guerre.
L e s massacres qui ont eu lieu postérieurement à l'évacuation du Cap, tiennent à la barbare p o l i t i q u e du cabinet de Saint James. ( 1 ) Lorsque Dessalines fit égorger les habitans du C a p , les militaires qui étaient restés dans les hôpi t a u x , parce que leur état n'avait pas permis à ce c h e f barbare de les faire embarquer avec ceux que, sous le prétexte de les évacuer sur le môle SaintJJicolas, il fit noyer, se traînèrent sur les lieux des massacres : ils offrirent leur vie pour sauver les colons. « Arrêtez, s'écrièrent-ils tous, C ' E S T NOUS »
QUI
SOMMES VENUS
VOUS C O M B A T T R E , C'EST
» A N O U S D E M O U R I R . » Les soldats sont toujours ce qu'est leur général.
(158) Eh 1 que livra-t-on ? L'artillerie de
cam
p a g n e , composée de pièces de 8 et de 4 , a u nombre de quinze environ ; quatre o b u s i e r s et quatre-vingts obus. Quant à l'artillerie d e siège, une partie était depuis long-temps e n clouée. Les pièces qui étaient réparties d a n s les dix blok-houses,
ont été enclouées l o r s
que les troupes furent forcées de se replier d e l'un sur l ' a u t r e , ou sur la place. Partie d e s canons qui étaient dans l'arsenal, les dix f o r t s ou batteries, et à la Petite-Ance, se trouvaient démontés. Les nègres n'ont pas d'ouvriers en état de construire des affûts, et pour remettre en service les canons de bronze encloués. Ils sont de force
à placer leurs canons en batterie
sur terre. Une partie de cette artillerie sera portée dans les mornes. Il est impossible q u e cette opération puisse se faire sans que les nègres éprouvent de grandes pertes. Il n'existe point de magasins à poudre dans les mornes ; quelques précautions qu'on prenne, te poudre à canon
qu'on y emmagasine y perd de sa
force. Dessalines
a trouvé que c e qu'on a
livré en armes et poudre, était si peu de c h o s e , qu'il a demandé aux jamaïcains
UN MILLION
de livres de poudre, 50 mille fusils, 5o m i l l e sabres pour l'infanterie, et 5 mille pour
la
cavalerie. Les jamaïcains n'ont pu satisfaire
(159) à cette demande. Le cabinet
Saint-James
pourvoira.
X I I
M
E
.
R E P R O C H E .
Il n'était LE
pas administrateur
I
capitaine - général Rochambeau
pas
administrateur
n'était
1 c'est un singulier r e
proche. Si on demandait aux ennemis de ce général, de
définir les devoirs d'un général en c h e f
c o m m a n d a n t à S a i n t - D o m i n g u e , et c e qu'on e n t e n d généralement par la qualification ministrateur,
d'ad-
ils seraient sûrement, d'après
l e r e p r o c h e qu'ils f o n t , très-embarrassés pour en
donner une juste définition. Ils eussent
v o u l u qu'il fût courbé sur un bureau, c o m m e l e c o m m i s que ses devoirs y tient ployé. L e s devoirs d'un général en c h e f à SaintD o m i n g u e , qui a à sa disposition une force a r m é e suffisante, sont de ne pas perdre de v u e l'ensemble de la cause qui a déterminé s a mission ; assurer énergiquement l'ordre i n t é r i e u r ; sévir contre les dilapidateurs et les a n a r c h i s t e s ; tenir la main à ce que les deniers
(160) du trésor public ne soient employés q u ' a u x dépenses d'urgentes nécessités. Il n'est
pas
nécessaire que ce dignitaire soit homme d'état c'est au gouvernement suprême bases du régime,
;
à fixer l e s
et le mode de travail d e s
administrateurs. L e chef de la colonie d o i t être passif sous ce rapports c'est-à-dire,
se
borner à faire exécuter la volonté souveraine. Son devoir enfin, est de surveiller. L ' e x a m e n des détails, et l'ordre dans les c o m p t a b i l i t é s , appartiennent à l'administrateur, proprement dit, le
préfet.
Le capitaine-général
Rochambeau
n'était
pas un administrateur ! il était au moins un c h e f extraordinairement
prévoyant.
U n seul
fait le prouvera. Le général en c h e f accordait aux
préfets,
suivant les besoins de divers s e r v i c e s , d e s crédits en argent et en traites
sur le p a y e u r -
général, pour dépenses qu'il avait approuvées sur leurs propositions. D ' a b o r d , il laissait c e s crédits à leur entière disposition ;
ensuite,
pour avoir la certitude que les nouveaux c r é dits ne seraient également pas détournés d e leur véritable
destination, il défendait
au
payeur-général d'acquitter les ordonnances d u préfet, sur ces c r é d i t s , avant que lui, général, eût vérifié si ces ordonnances étaient r é e l l e ment
(161) pour le remboursement des dépenses arrêtées entre lui et le préfet.
ment
C e prétendu reproche est donc une pure calomnie.
R É S U M É . IL
résulte de l'exposé de ce qui s'est passé
à S a i n t - D o m i n g u e , depuis 1790, jusqu'à l ' é v a c u a t i o n , au 27 brumaire an X I I , que cette c o l o n i e a constamment été en état de rebellion, e t q u e c'est par récrimination qu'on calomnie l e capitaine-général Rochambeau. Le
capitaine-général L e c l e r c , après avoir
s u b j u g u é les nègres, n'a pu établir, pour les t r o i s castes, de régime à S a i n t - D o m i n g u e , que ne
celui propre à un pays
conquis,
qu'on
peut contenir dans l'obéissance que par
l'appareil des armes; nombre de français qui s'y
trouvèrent à l'arrivée de l'armée, s'étaient pendant dix a n s , et notamment
familiarisés
a p r è s le départ forcé du général de vivre
Hédouville,
sous les lois des n è g r e s , et à trafi
q u e r avec les anglais. Beaucoup de blancs a i m a i e n t le régime de Toussaint,
parce que
l e u r s liaisons avec les anglais, en consolidant l'usurpation
de ce c h e f n o i r , les enrichis
s a i e n t . La mort du capitaine-général L e c l e r c , L
(162) fut une calamité pour les amis de l'ordre, e t un triomphe pour les anarchistes. Il y
avait
aussi des aveugles En Cayes,
considérant
ce
à Jerémie,
Saint-Marc
qui s'est passé
aux
au Port-au-Prince,
et au Cap,
après
à
l'évacuation
de ces places par les troupes françaises, on ne peut se dissimuler qu'il existait e n c o r e à Saint-Domingue
beaucoup de partisans
du
régime des nègres. Des négocians de ces cinq v i l l e s , écrivirent au continent d ' A m é r i q u e pour reprendre la continuation des affaires c o m m e par le passé. O n ne peut pas douter que les mêmes demandes furent faites à la Jamaïque. Combien ne reste-il pas de blancs à S a i n t - D o m i n g u e , qui sont les conseillers intimes de Dessalines,
et les rédacteurs d«
ses proclamations I Les partisans du régime africain furent, du rant quelque t e m p s , les admirateurs outrés d u général Rochambeau. Ils se disposer de ce général par leurs
flattèrent
et de réussir p a r - l à , connaissant sa probité,
de
adulations,
à enchaîner sa surveillance,
sévère dans
les vues qu'ils avaient d'augmenter, par tous les m o y e n s , leurs richesses, acquises au grand détriment de la mère-patrie, durant le r é g i m e de Toussaint
; mais ils trouvèrent en
lui,
( 1 6 3 )
contre leur attente, un homme dévoué c o m m e son prédécesseur à l'état,
et inaccessible à
toute impulsion contraire à ses devoirs. D è s lors ils devinrent ses ennemis secrets. de honte d'avoir été les afidés de
Accablés
ils répandirent partout,
Toussaint, l'évacuation,
que le général
après
Roehambeau
avait fait regretter le régime de ce brigand. L ' a m b i t i o n , ou des vues de désorganisa t i o n , portèrent des h o m m e s , d'une plus grande i m p o r t a n c e , à s'oublier. Il est constant y a eu révolte contre en voulant
déporter
l'autorité son
qu'il
souveraine,
représentant.
Il
n'existe pas de plus grands délits, que ceux qui tendent au renversement de l'autorité, et à d o n n e r aux troupes l'exemple de l'insubor dination. Q u a n t aux mulâtres, aient on
oublie
blancs
il est étonnant qu'ils
encore des partisans. On les plaint ! !
le massacre
qu'ils
ont fait
des
Leur félonie a été constatée. O n se
bornera dans ce résumé, de rappeler s u c c i n c tement les époques de leur prise d'armes. E n 1791, les mulâtres portèrent les nègres à la révolte. Ils firent cause c o m m u n e , dans l ' i d é e de s'emparer de l'autorité; ils incen dièrent
concurremment
les propriétés
b l a n c s ; ils les massacrèrent. L 2
des
(164) Ils disputèrent la souveraineté a Toussaint ce chef noir en immola quinze mille à
; sa
sûreté. Le surplus de cette population se r é fugia à la Jamaïque, et à la N o u v e l l e - A n gleterre. L e général Leclerc permit aux m u l â t r e s de rentrer dans la c o l o n i e , et de se réunir a u x troupes. Clerveau et Pétion,
chefs de cette c a s t e , se
révoltèrent contre leur bienfaiteur, le 21 v e n démiaire an X I ; c'est à-dire, six mois après que Clerveau
fut amnistié. Pétion
était passé
dans la colonie avec l'armée. L a caste entière ne différa à se r é v o l t e r , que parce qu'elle vit arriver successivement des renforts. Elle trama sourdement jusqu'à l'époque où elle fut instruite, par
l'étranger,
que la guerre avec l'Angleterre était inévitable. Plusieurs chefs de cette caste furent arrêtés en phuviôse Clerveau per,
an XI,
et de Pétion.
Brachai,
comme
complices
Savoir; Bardet,
Desravines,
de
Pros-
père et fils; ainsi
qu'une partie des gens d'armes de l'arrondis sement du sud. Les troubles qu'excitèrent ces cinq c h e f s m u l â t r e s , dans l'ouest et le s u d , coïncident avec l'attaque ( e n p l u v i ô s e ) du c h e f Christophe,
et du traître mulâtre
nègre
Clerveau,
(165) c o n t r e la ville du C a p , où ces révoltés furent défaits et chassés dufort Bel-Air,
qu'ils avaient
durpris. E n ventôse, m ê m e année, les chefs mulâtres Ferou,
Cangé,
Begon,
entraînèrent
nègres
libres,
Geffard,
et
Juste-Vancole
dans leur révolte
les
et soulevèrent tous les cultiva
t e u r s dans l'ouest et le sud. L a révolte des généraux mulâtres e t Pétion,
Clerveau
en vendémiaire an X I , fut précé
d é e de deux m o i s , dans le nord, l'ouest sud,
de celle des chefs nègres
Yaou, caya,
Capoi-la-mort, Lamour
Monfort
Silla,
Derance,
l'Eveillé,
Cotreau,
et Domage. Maurepas
et le
Sans-Soucy, MaBélair,
était au m o
m e n t de se révolter lorsqu'il fut arrêté. M. Id
prétend que la caste des m u
lâtres a été forcée à la rebellion, pour éviter u n s u p p l i c e . . . i n j u s t e . . . C'est son opinion. L a manifestation d'une pareille c r o y a n c e , t e n d à tromper la France entière, et à faire adopter
des
mesures
inverses
de
l'intérêt
public. C'est en pluviôse an X I , que la caste des mulâtres a levé l'étendard de la révolte pour l a dixième fois. C'est à la même époque que l e mulâtre Clerveau,
l'un des coryphées les
p l u s apparens de cette c a s t e , attaquait la
(166) ville du Cap. Les douze chefs nègres c i - d e s s u s désignés, étaient les précurseurs de l ' a v e n u e prochaine des mulâtres, et de l'union
exis
tante entre les noirs et les jaunes. Les g é n é raux mulâtre Clerveau véritables chefs
étaient
les
de ces révoltés, avec
et Pétion,
les
généraux nègres Dessalines, Paul
et
Christophe
frère de Toussaint.
Louverture,
cinq généraux ne se déclarèrent
Ces
subitement,
le 21 vendémiaire an X I , que parce que
Do-
mage ( i l a été pris les armes à la m a i n ) d é c o u vrit le c o m p l o t , e t n o m m a les chefs de la c o n s piration; ce qui détermina aussi les mulâtres Ferou,
Congé et Geffard,
à lever le m a s q u e
dans la crainte d'être arrêtés sans défense. Accordez
donc
confiance aux
mulâtres !
fiez-vous à eux ! De la nouvelle
conquête
de
St.-Domingue.
I L paraîtra, on n'en doute p a s , extraordi n a i r e , que des hommes
de plume
se p e r m e t
tent de traiter de g u e r r e , et surtout de fixer le nombre d'hommes dont devrait être c o m posée l'armée
qui sera chargée
de rétablir
l'ordre à Saint-Domingue. Ils sont excusables par leur amour pour la. patrie, et pour avoir vu tout ce qui s'est passé dans cette c o l o n i e .
( 1 6 7 )
M . Id
que nous avons cité plusieurs
f o i s , assure que l'armée ne peut être moindre de
cinquante
à soixante
mille
hommes.
On
n ' e s t pas plus d'accord avec lui sur ce fait i m p o r t a n t , que sur ce qu'il a avancé que les mulâtres affreuse
ont
été
placés
de la rébellion
dans
l'alternative
ou de la mort.
La
d e s c r i p t i o n qu'il fait de la marche que suiv e r o n t les révoltés à l'arrivée
de l'armée, est
j u s t e . O n se fait un devoir de la copier. « La
destruction,
l'incendie
précèdent,
»
dit M . I d . . . . le débarquement de l'armée
»
française. L'armée nègre se retire dans les
»
triples montagnes; les anciens chemins sont
» carabinés,
obstrués; des piéges et des e m -
»
b u s c a d e s sont p l a c é s , etc. etc. V i e i l l a r d s ,
»
f e m m e s et enfans sont contraints de refluer
»
dans des asiles presqu'inaccessibles. » Les troupes françaises sont débarquées ;
»
elles se mettent en campagne sur des plans
»
militaires bien combinés. Supposons, chose
»
indispensable, que leurs moyens de trans-
»
ports soient parfaitement p r é v u s , que les
»
a m b u l a n c e s , les hôpitaux, les
»
soient convenablement organisés; elles ont
»
au moins 3 o o lieues de postes militaires a
magasins
» parcourir dans l'intérieur, e t cela sur d e s »
lignes tellement pénibles, que la célérité
(168) » si nécessaire à ses m o u v e m e n s ,
éprouve
» souvent des obstacles. » Le n è g r e , ainsi que la bête fauve, f u i t et » reparaît à chaque instant, des précipices les » plus inaccessibles aux monts les plus e s c a r » pés ; il se multiplie par ses connaissances » locales; il vous tient en halaine; q u e l q u e f o i s » il intercepte vos approvisionnemens, v o u s » expose à la faim. Enfin vous l ' a t t a q u e z , le » combat s ' e n g a g e , vous le cernez.
Après
» une longue fusillade, des pertes des cleu\ » c ô t é s , un champ de bataille i n u t i l e , sont » souvent les seuls avantages des vos efforts. » Il vous attaquait dans le s u d , il franchit » dans le n o r d : de ces noires m o n t a g n e s , » mêmes m o u v e m e n s , m ê m e s u c c è s ; il d i s » paraît, on le poursuit : huit jours » des
tirailleurs
annoncent
» mêmes difficultés,
sa
après,
présence ;
mêmes fatigues
pour
» l'engager dans un combatrégulier. Laguerre » se fait n é a n m o i n s ; la valeur, l ' a c t i v i t é , le » bon o r d r e , la discipline, de nos troupes » triomphent. Les nègres se soumettent. » Qu'en résulte-t-il ? C'est ici l'objet
de
» bien importantes considérations. L e détrui» rez-vous?
Le laisserez-vous e x i s t e r !
» pouvez-vous même avec sécurité?
Le
Telles
» sont les questions qu'il faut décider.
Des
(169) » conséquences qui leur appartiennent, devra » résulter le sort futur de S a i n t - D o m i n g u e . » Le
tableau q u ' a tracé
M.
Id
des
difficultés q u e présente la nouvelle
conquête
de S a i n t - D o m i n g u e , est c o n f o r m e à la v é r i t é ; mais il est contre français
pour
la vérité, qu'il faille aux
subjuguer
secours auxiliaire
les r é v o l t é s , un
et local. C ' e s t - à - d i r e , q u o i -
q u ' o n ne le dise p a s , qu'il faudrait supplier îes
mulâtres
révoltés
de se joindre
à nos
troupes pour réduire les nègres à l'obéissance : se livrer sans réserve à leurs perfides c o n s e i l s , s'exposer
à faire périr l'armée de f a t i g u e s ,
en suivant leurs plans de m a r c h e et de contre m a r c h e : traîner la guerre en l o n g u e u r ,
afin
q u e les mulâtres puissent profiter des c i r c o n s t a n c e s , pour effectuer u n e nouvelle révolte ; ou,
s'ils sont
sous le j o u g des n è g r e s , leur
accorder la gloire d u succès de l ' e x p é d i t i o n , et annoncer à l'univers q u e , sans le secours des m u l â t r e s , cette conquête était impossible. L e capitaine-général L e c l e r c a prouvé le c o n traire: il a vaincu sans auxiliaires. Q u e l l e est d o n c la raison qui rend M . I d . .
aussi
partial ? Ce
n e sera jamais par attachement
mère-patrie, aux français.
q u e les mulâtres
à la
se réuniront
S'ils se réunissent au général
(170) Férand,
ce sera par la faiblesse de leur parti
qu'ils s'y seront déterminés, et parce qu'ils se seront trouvés réduits à subir le joug d e s chefs noirs. Lorsque l'armée aura effectué s o n débarquement, elle trouvera plus de nègres et de mulâtres qu'elle ne voudra, pour l u i servir de guides, et pour la prévenir, si on e n a besoin, des précautions qu'il conviendra d e prendre. L'armée que Sa Majesté
Impériale
enverra à S a i n t - D o m i n g u e , jouira du m ê m e prestige qui a favorisé celle que le
premier
Consul avait confiée au capitaine-général L e clerc. Ce n'est
ni soixante,
mille hommes qu'il faudra.
ni
cinquante
Les mulâtres n e
sont pas invincibles ; leur nombre n'a rien d'effrayant. Il serait impolitique de faire passer de France, avec l'armée, des généraux et offi ciers nègres ou mulâtres, lors m ê m e qu'on a u r a i t , par leurs services passés, l'espoir de leur fidélité avenir. L e remplacement présumé nécessaire, être journalier,
doit
autant pour la manifestation
de la puissance nationale, que pour remplir les cadres. Il ne peut y avoir à parlementer. L'obéissance
doit être commandée.
Les, d e m i -
mesures seraient impolitiques, c r u e l l e s , bar bares, et contraires à la conservation des cultivateurs,
nègres
qu'il importe à l'intérêt natio-
(171) nal de réattacher à la culture. Les
chefs
nègres et mulâtres espéreront tout du temps. D'après les événemens p a s s é s , l'armée d o i t , par son a c t i v i t é , De la clémence!
déjouer
tous les
oui. Pardon général
projets. ! oui;
mais la mort à tous ceux qui opposeraient de la résistance à la force armée. Toussaint
n'a
jamais eu que seize mille hommes de troupes. n'a pas celte quantité à sa dispo
Dessalines sition. Les
chefs
Christophe,
se trouvant d i v i s é s ,
mulâtres,
Dessalines
et
pourraient
avec le t e m p s , en avoir un plus grand n o m b r e ; mais cette coalision ne serait pas r e d o u t a b l e , ayant des intérêts opposés. D'ailleurs l e u r sûreté p e r s o n n e l l e , les obligera à se r e trancher s é p a r é m e n t , soit pour parvenir à se constituer en hordes indépendantes,
ou pour
p r o f i t e r , suivant les circonstances o ù ils se t r o u v e r o n t , d'une et les mulâtres u n seul
point,
amnistie.
Si les
nègres
réunissent leurs forces sur la campagne
sera
plutôt
terminée. Malgré qu'on n'ait retiré aucune utilité des dogues,
et qu'ils n'aient servi qu'à faire ressor
tir le caractère inhumain
de quelques
per
s o n n e s , cette ressource n'est pas à négliger. Elle est nécessaire pour faire é v e n t e r , et ren dre inutile les embuscades des révoltés, dans
(172) les doubles et triples montagnes. Il c o n v i e n t qu'on donne des o r d r e s , pour qu'ils arrivent en même temps que l'armée. Sauver la à un français, à un n è g r e , c'est
vie
remporter
une victoire. Il répugne d'employer de t e l s moyens ; mais à les considérer sous leur v é ritable point de v u e , ils sont indispensables. Ils n'ont point produit Tortue,
d'effet à l'île de l a
parce qu'ils précédaient des d é t a -
chemens nègres et mulâtres, et qu'ils étaient familiarisés
avec l'odeur qu'ils exhalent.
Il ne peut y avoir de traité avec les révoltés. La guerre serait de tous les j o u r s , et d'autant plus cruelle q u e , de la part des n è g r e s ,
ce
serait une guerre d'incursion, de dévastation. Les révoltés s'attendent
qu'on
enverra c o n -
tr'eux une nouvelle a r m é e , et il sont i n t i m e ment
convaincus qu'ils ne peuvent résister d e
iront aux troupes françaises. Toussaint à l'arrivée de l'escadre : « Ce » ringo
qui tuoyé
disait
bataye
Ma-
moé » . ( C ' e s t la bataille
de Maringo qui m e t u e ) . Les nègres et les mulâtres sont c o n v a i n c u s , qu'ils ne peuvent rien sans le secours des anglais. C'est à la montagne grand rot,
bois, etc.,
au cahos,
noire,
à celle
à la crête à
que les chefs révoltés se
avec leurs troupes
de ligne,
des Pier-
fixeront
et où ils f o r t i -
( 1 7 3 )
fieront
des p o s t e s , qui présenteront une d é
fense f a c i l e , en
augmentant par l ' a r t , les
difficultés multipliées qu'a produites la nature. L e s garnisons en seraient inexpugnables, si elles étaient composées de français ; mais les nègres peuvent y être réduits avec la pru d e n c e et le temps. Ils ont conservé dans leurs m a s s a c r e s , M. Féreau,
ingénieur. Il est sous
les ordres du mulâtre Dessalines
Barré.
et les autres c h e f s , considèrent
l e s cultivateurs dues.
dit Petit
c o m m e des sentinelles
Ce sont ces derniers qui
per-
supporteront
l e s premières attaques, et qui seront chargés d e soutenir la défense en tirailleurs. C o m m e c'est sur les événemens que peut produire le c l i m a t , que comptent les chefs r é v o l t é s , ils d é t e r m i n e r o n t , par politique, après un laps d e t e m p s , les cultivateurs,
à témoigner une
apparente soumission. La guerre se portera alors contre les chefs qui se trouveront c o u verts par leurs retranchemens, et appuyés de leurs
troupes
de ligne.
tera d'escalader
les
O n c e r n e r a , on ten
m o r n e s , q u i , de leur
base au s o m m e t , présenteront des redoutes multipliées; alors les cultivateurs se soulève ront de nouveau. Il faut donc aller droit au but ; atteindre les chefs rebelles dans leurs repaires, et ne pas oublier que les nègres et
(174) les mulâtres vivent de peu ; qu'ils auront, o n n'en doit pas d o u t e r , des vivres pour l o n g temps ; en bananes s è c h e s , maïs en f a r i n e
et en grains, farine de froment, biscuits, riz, légumes secs et salaisons; ne pas o u blier que de la conservation des nègres c u l tivateurs, dépend la reprise de la culture d a n s la c o l o n i e , et la prospérité de la F r a n c e ; n e pas o u b l i e r , enfin, que les nègres et les m u lâtres sont perfides,
et qu'ils tenteront d e
renouveler la scène d'horreur
du P o r t - a u -
P r i n c e , à l'arrivée de l'armée ( r ) . On aura
à considérer
s'il n'est pas pré
férable de faire débarquer l'armée sur un seul point, et de ne pas la diviser pour les attaques. Quel que soit le point d'attérage pour lequel on se déterminera, les révoltés ne pourront empêcher le débarquement des troupes. O n ne peut révoquer en d o u t e , habitations sont
que toutes l e s
détruites, que toutes l e s
villes seront incendiées : Dessalines l'a annoncé,
et qu'il ferait combler tous les puits.
L'artillerie s e r a , par les conseils des anglais,
(1) Ils c r i è r e n t les
qu'on
troupes f r a n ç a i s e s ;
avait
ordre
celles-ci
de
recevoir
avancèrent
dans
l'idée d e s e r é u n i r à d e s a m i s . E l l e s furent m i t r a i l l é e s à bout p o r t a n t .
(175) répartie sur les m o r n e s , dans le vain espoir que la France sera obligée d'y reconnaître des hordes d'indépendans, la Jamaïque,
c o m m e il en existe à et à
à Surinam
Berbiche.
On prétend qu'il faut attaquer les révoltés, en même temps au nord, et à l'ouest.
au sud,
à l'est
Il faudrait alors former quatre
divisions principales, et plus que doubler la force de l'armée.
Ces quatre d i v i s i o n s , se
trouvant i s o l é e s , ne présenteront point la f o r c e irrésistible hommes
qu'offriraient
trente
réunis sous les ordres d'un seul
mille chef.
O n ne doit pas perdre de v u e , qu'il est i m portant
de
cerner les
révoltés dans
r e t r a n c h e m e n s , et qu'on ne peut y
leurs
parvenir
q u e par une réunion de forces suffisantes, tant p o u r ne pas laisser échapper les nègres
troupes
de ligne,
que pour assurer le succès des e s
calades,
par toutes les parties du m o r n e
q u ' o n sera obligé d'assiéger. Les nègres tien n e n t f e r m e , lorsqu'ils sont couverts par des retranchemens. On en a fait la fatale expé rience au morne à Pierrot.
Le capitaine-général
L e c l e r c et les six généraux qui se trouvèrent à cette a t t a q u e , y furent blessés. C'est en atta quant par toute la circonférence du m o r n e , q u ' o n parviendra à mettre la confusion parmi les révoltés.
(176) Si l'armée excédait trente mille h o m m e s , ce serait multiplier les difficultés sans a u c u n e utilité apparente. Comment assurer la s u b s i s tance d'un plus grand nombre de troupes ? O ù trouverait-on les animaux nécessaires au t r a n s port des vivres et des munitions ? O ù serait l'unité si nécessaire dans le commandement ? Les généraux divisionnaires ( 1 ) seront-ils b i e n ( 1 ) Etat nominatif
des généraux
dans les années Le
Généraux
de
en Angleterre.
De
retour
Morts.
en
et
activité
XII. Mort.
Division. M M . Rochambeau, ca
pitaine-général ; B r u n e t ,
Quentin,
qui ont été en XI
Leclerc.
capitaine-général
Prisonniers
X.,
Lapoype.
France.
Boudet,
Desfourneaux,
Clauzel, Laplume ( n è g r e ) . Dugua, Hardy, W a t r i n , Debelle,
Yablo-
i v o s k i , e t un autre p o l o n a i s . Passés
aux
brigands.
Dessalines
Généraux
de
et
Christophe
(nègres).
A
Santo-Domingo.
Prisonniers net, De
Brigade.
M M . Férand,
en Angleterre.
Debarquier.
Boyer, Pageot, Fressi-
Boyé. retour en France.
la L a n c e ,
Poinsot,
Thouvenot,
K e r v e r s e a u , Pierre D e v a u x ,
Morgan, Debeireau, L a c r o i x ,
Claparede,
Sarrazin,
Humbert,
Du-
t r u i , d ' H e n n i n , Martial Besse ( m u l â t r e ) .
persuadés,
(177) persuadés, étant livrés à e u x - m ê m e s , qu'ils n e peuvent avoir de volonté que celle de leur c h e f ? Avec les meilleures intentions, les g é néraux divisionnaires pourront se trouver dans d e s situations difficiles, et être forcés de s'é carter de leurs instructions. Q u e d e difficultés o n prévoit par le manque d'unité ! C'est entre d e s doubles et triples montagnes qu'il f a u d r a marcher et combattre. M. Id
dit avec raison : « l'homme le
» plus fort ne saurait envisager, sans un » sentiment secret de frayeur, de doute, la » tâche immense que lui imposerait la mis» sion de St.-Domingue. » Y envoyer un chef à qui les localités » seraient étrangères, c'est lui préparer des » écoles. » M . Id
ajoute : «
Y faire
passer
qui aura marqué par ses violences, » c'est tout gâter. Il faut dans ces contrées » malheureuses, une tête froide, adminis»
CELUI
Morts. L a R o c h e b l i n , C l é m e n t , l e D o y e n , P a m b o u r , Delplanque, Spital, Dampierre, Lavalette, D a r b o i s et L o u i s d e N o a i l l e s . M a u r e p a s et l ' E v e i l l é , (nègres). Passés aux brigands. Paul L o u v e r t u r e Vernet,
(nègre),
C l e r v e a u et B a r d e t ( m u l â t r e s ) .
M
( 1 7 8 )
»
trative,
militaire
» des blessures
; il s'agit
: il faut
» baume salutaire
leur
de
cicatriser
appliquer
de la prudence.
le
»
Il est constant qu'un général en c h e f , qui
à
les localités seraient étrangères, s e r a i t
forcé à une prudence qui nuirait c o n s i d é r a blement au prompt succès de l'expédition. 11 n'aurait pas d'opinion à lui ; le plan
de
campagne ne pourrait être son ouvrage ; son commandement serait incertain ; il se t r o u verait isolé au centre de son armée. Le taine général
Leclerc
capi-
a vaincu. Les c i r c o n s
tances actuelles sont bien différentes ; il n'y existe plus de population blanche. La France possède beaucoup de généraux couverts de gloire. Des considérations pour raient déterminer les plus entreprenans, à r e fuser une mission aussi difficile, qui ne pré sente
que des dangers de toutes espèces.
Il est moins nécessaire, dans les c i r c o n s
tances d'un
actuelles,
d'un administrateur, q u e
militaire a c t i f ,
un brave
soldat.
Ce
sont des cannibales qu'il importe d'atteindre, et qu'il faut frapper. Ce ne sont pas des b l e s sures qu'il s'agit de cicatriser ; les blancs ont été immolés. Il existe des
chancres
noirs et
j a u n e s ; il faut les extirper, pour empêcher qu'ils donnent la mort au corps politique. Il M
(179) faut donc une tête plus chaude que
froide.
C e n'est pas dans les plaines qu'on combattera ; mais par monts et par vaux. Ce sera à l a b a s e , sur les revers et au sommet
de
m o i n e s à p i c ; dans les gorges des montagnes; sur des rochers aigus et tranchans. Il faudra e n f i n , combattre
entre des précipices. U n e
tête froide pourrait avoir trop de prudence ; e l l e pourrait voir trop de dangers à surmonter. Il est préférable, il est même à desirer que l e s nègres disent du général en c h e f : « »
ral la, cé guiab»
q u e s'ils disaient : « gineral » France
gine-
( c e général est un d i a b l e ) , la,
cé
mouton
» ( c e général est un mouton
F r a n c e ) . Il f a u d r a , sans d o u t e , un
de chef
e t un administrateur à Saint-Domingue; mais ¡1 faut avant tout subjuguer les nègres et les mulâtres. Non-seulement il faudra plusieurs années d'un régime militaire très-actif, pour assurer immuablement l'ordre; mais il faudra toujours dans l'avenir, c o m m e l'a judicieuse m e n t écrit M. Deslozières,
UN GRAND SABRE
et un grand administrateur. O n a commis des fautes à Saint-Domingue; mais où sont les hommes qui ne sont pas s u jets à l'erreur ? où sont réunissent
toutes les
les hommes
qualités
que M 2
qui
desire
( 1 8 0 )
M.
Id
? Un seul existe ! il fait l ' é t o n -
nement et l'admiration de l'Europe. On d i r a , je n'en doute p o i n t , que je
me
rends l'apologiste du général R o c h a m b e a u . O n en cherchera la cause. L'impartialité e s t m o n g u i d e ; du moins c'est mon
intention.
Je n'ai jamais parlé à ce général. Je pourrais avoir à m'en p l a i n d r e , si je ne consultais q u e l'amour-propre. Je ne connais sa famille q u e de n o m , et par la gloire qu'elle s'est a c q u i s e dans les armées. Je crois néanmoins que le général R o c l i a m beau pourrait, plus promptement que tout autre g é n é r a l , réduire les révoltés à l'obéis sance. La connaissance qu'il a des localités ; les erreurs et les fautes qu'on paraît vouloir lui reprocher ; aclimaté dans le pays ; d'une grande activité militaire ; la terreur de s o n nom pour les malveillans
: tout concourerait
à faire terminer promptement la campagne. Je le r é p è t e , je crois intimement que le général Rochambeau serait l'homme de
l'état.
Cette opinion sur les qualités qui distinguent le général R o c h a m b e a u , est conforme à celle de beaucoup de personnes ; mais d o n t , sans d o u t e , des considérations particulières e m pêchent de déchirer le voile de la c a l o m n i e . En attendant que le temps amène la
vérité
(181) toute entière, on citera M. Dubroca, écrit la vie de
qui a
Dessalines.
« Le général
dit M . D u -
Rochambeau,
» b r o c a , qui avait succédé » clerc,
épuisa,
» lonie,
tout
au général
pour la défense
Le-
de la
ce qu'il est permis
co-
d'espérer
» DU GÉNIE LE PLUS FÉCOND EN RESSOURCES, » ET D'UNE VALEUR A TOUTE ÉPREUVE ; mais » la lutte était trop inégale pour durer long» temps. » O n a désigné dans le p u b l i c , le gouverneur Je dirai avec M . Id
Hugues
» Le gouvernement » sagesse
tout
:
vouloir,
sa
immense peut encore tout ce
qu'il
»
» voudra pE
peut
LA R E S T A U R A T I O N
DE
SAINT-
DOMINGUE. Servitude
du sol à St.-Domingue.
sont sans qualité pour y exercer
Les les
colons droits
politiques. PAR
les lois fondamentales de
l'Empire,
S a i n t - D o m i n g u e , depuis son établissement, est asservie
aux besoins de la métropole. C'est
par cette considération, et pour ne pas alté rer cette servitude, que les terres n'ont pas été vendues aux colons. Les concessionnaires.
(182) tiennent leurs propriétés de la couronne; sont ses vassaux
ils
; leurs terres sont en v a s s e -
lage. Les productions et leurs
fabrications,
ne peuvent être que c e que commande térêt de 1 état (1). Cette
l'in
servitude n'est p a s
proprement d i t , mais intérêt
féodalité,
na-
tional. Les colons propriétaires, sont sans qualité pour prétendre jouir du droit d'initiative Durant
l'exercice
du m a r q u i s
de L a r n a g e , novateur
g o u v e r n e u r à S a i n t - D o m i n g u e , un planteur s e m a du blé.
L e succès
surpassa son a t t e n t e ; il fit
faire du pain du produit h o m m a g e à M. Châtenoye, tie du n o r d . C e t t e n o v a l i o n système
de culture
repréhensible
(2);
d e sa r é c o l t e ,
et e n fit
c o m m a n d a n t d e la p a r était une i n f r a c t i o n a u
a d o p t é , et u n e é m a n c i p a t i o n
L e novateur
fut e n v o y é p o u r
quinze
j o u r s en p r i s o n , a v e c sérieuse invitation d e b o r n e r ses projets d e fortune à l a culture d e s denrées d i t e s coloniales. ( 2 ) I l e s t d e l'intérêt des c o l o n s , q u e l e s n è g r e s soient pénétrés q u e c'est p a r la v o l o n t é d e l ' E m p e reur qu'ils sont o b l i g é s de travailler. A l o r s l e s n è g r e s v e r r o n t d e s bienfaiteurs daus leurs m a î t r e s . blée nationale »
l'état d e s p e r s o n n e s non-libres,
» des assemblées première esclaves
L'assem-
a décrété : « Q u ' i l n e serait statué s u r
coloniales
l o i , que les nègres
ou libres
que sur la
» . Il résulte ne
demande de c e t t e
peuvent
q u e par la v o l o n t é des c o l o n s .
être.
(183) c'est un droit qui appartient à la
couronne.
Autoriser des assemblées
à Saint-
coloniales
D o m i n g u e , c'est appeler la colonie à se saisir
Far la constitution d e 1 7 9 3 , l e s e s c l a v e s o n t é t é déclarés
libres.
Il n'y
a pas
connaisse raient doit
u n c o l o n de S a i n t - D o m i n g u e qui n e
aujourd'hui l e s c o n s é q u e n c e s qui r é s u l t e
pour
eux
d'initiative
et p o u r
O u doit s'attendre qu'à q u e Sa Majesté
manderont
l'état,
de l'exercice
p a r des a s s e m b l é e s
la p a i x , l e s anglais d e Impériale
m e r , à S a i n t - D o m i n g u e , l'esclavage p o u v a n t par
l'une
du
coloniales.
des constitutions
fasse
procla
des n è g r e s ,
le
de l'état. L e s
c o l o n s s e l a i s s e r o n t - i l s p r e n d r e au p i é g e d e s a n g l a i s , comme
l e s m o u c h e s au sirop e m p o i s o n n é .
L e s anglais p r o p o s e r o n t c e t t e
condition,
comme
u n m o y e n d e d é v a s t a t i o n f a v o r a b l e à leurs i n t é r ê t s , p o u r , suivant qu'ils le l e u r p r e s c r i r o n t , s o u l e v e r d e n o u v e a u les e s c l a v e s . Si libres,
les nègres de S a i n t - D o m i n g u e mais
trouvera perd
sont
déclarés
contraints de t r a v a i l l e r , l ' A n g l e t e r r e se
privée
d e ses m o y e n s de d é v a s t a t i o n , e t
ses c o l o n i e s
à s u c r e , parce qu'elle ne
pourra
les garnir s u f f i s a m m e n t d e troupes n a t i o n a l e s , pour obliger moins
ses n è g r e s
esclaves
que l'Allemagne
soldats. Dans cette
ou libres à t r a v a i l l e r , à
lui v e n d e j o u r n e l l e m e n t d e s
d e r n i è r e s u p p o s i t i o n , les
n i e s anglaises s e r a i e n t o n é r e u s e s à l e u r
colo
métropole,
n e p o u v a n t alors l i v r e r au m ê m e p r i x q u e l e s
fran-
(184) de l'autorité. Cette île est presqu'aussi g r a n d e que la France. Le système
colonial
ne
peut
être en France, pour Saint-Domingue, ce n'est en Angleterre
que pour amener
les colonies à l'indépendance. (colonus)
sont fermiers
Les
qui toutes
colons
héréditaires.
Ils
sont à S a i n t - D o m i n g u e , pour l'avantage
de
la m é t r o p o l e , dans une servitude politique. C'était pour adoucir cette servitude q u e , s o u s le gouvernement r o y a l , les colons étaient e n F r a n c e , de tous les genres,
dans l'ordre p o l i
tique de l'état. Ils étaient reconnus habiles à jouir, héréditairement,
de toutes les préroga
tives qu'avait la noblesse. Il suffisait d'être blanc, pour être apte à toutes les fonctions. L e s colons de la Guadeloupe
obtenaient du r o i ,
qu'il érigeât leurs habitations comtés
et marquisats.
la révolution
en
barronnies,
Quelques années a v a n t
française,
on
avait
réclamé
cette même faveur pour les colons de SaintD o m i n g u e , c o m m e un dédommagement
de
leur servitude.
ç a i s , l e s d e n r é e s c o l o n i a l e s . S i le b e s o i n d e c e s d e n rées
les m a i n t i e n t à u n p r i x é l e v é , l ' a v a n t a g e s e r a
également pour
la F r a n c e . E l l e est la s e u l e
nation
q u i , par sa p o p u l a t i o n , soit en état d e c o n t r a i n d r e les nègres à travailler.
Saint-Domingue
(185) doit être r e p r é s e n t é e ,
niais au conseil d'état, par une section ad hoc, chargée spécialement
de surveiller ses inté
rêts et sa sûreté. Le commerce métropolitain doit également être représenté par une section particulière. Ces deux sections seraient d'au tant plus importantes, que, uniquement
occu
pées à chercher et à saisir les moyens d'améliorations, elles préviendraient les entreprises des
peuples purement
commerçans ;
elles
déjoueraient les projets de l'Angleterre, par une prévoyance active et continue. Des déli bérations instantanées
et de c i r c o n s t a n c e ,
ne rendront jamais le
commerce
national
dans l'empire. La révolution commerciale est encore à faire en
France. Elle seule peut
élever l'empire au
degré de
puissance que
c o m m a n d e son propre b o n h e u r , et l'intérêt de l'Europe entière. Il n'y
a peut être en France que M . de
P r a d t , qui puisse, par son éloquente locution et son é r u d i t i o n , y
opérer
la
révolution
commerciale. Il a prouvé dans les trois des colonies, pendance, nature.
âges
quelles tendent toutes à l'indéet que c'était
dans
l'ordre
de la
Se bornera-t-il à avoir annoncé
des
m a l h e u r s , lorsque le Souverain a devancé en sa faveur la reconnaissance n a t i o n a l e ,
dans
(186) l'espoir qu'il éclairera les français sur les m o y e n s qu'il
convient d'adopter
pour assurer
bonheur ? On ne le croit pas
leur
ECONOMISTES.
Un état réduit à la c u l t u r e , est un c o r p s sans âme. La culture bornée ou restreinte à la consommation intérieure, ne produit q u e des esclaves. D u commerce est née la
liberté,
et c'est par lui qu'elle se maintient dans t o u t e sa f o r c e ,
mais corrigée de tout ce q u ' e l l e
présente d'âpreté étant nue. En pénétrant les français de ces v é r i t é s , par une éducation analogue à la position t o p o graphique
de l ' e m p i r e , qui est
toriale et maritime,
semi-terri-
ses vues se dirigeront n a
turellement vers le commerce ; l'intérêt par ticulier fera n a î t r e , c o m m e en A n g l e t e r r e , une jalousie
nationale,
et conduira à la p e r
fection et à l ' é c o n o m i e , qui seules assurent la
préférence
Pour
dans les marchés de l'Europe.
que le commerce
devienne
national,
il faut que le gouvernement et les administrés, concourent à cette fin salutaire ; l'un par principe d'état, et l'autre par des mises de, f o n d s , q u i , avec le t e m p s , donneront en i n térêts, le décuple de l'intérêt o r d i n a i r e , et. détruiront l'usure en intérêt d ' a r g e n t , qui est destructif de la prospérité p u b l i q u e , et
qui
entrave la population, c o m m e les empruntsen
(187) rentes viagères, qui maintient le célibat. Il faut qu'il y ait identité entre l'état et les administrés ; et que le p r e m i e r , c o m m e en Angleterre, fasse tous les sacrifices pécuniaires nécessaires pour donner l'essor,
soutenir le
c o m m e r c e dans son enfance ; pour encoura g e r l'industrie, et pour, sous tous les rapports, l e protéger ; il faut enfin que le gouverne m e n t soit le régulateur du c o m m e r c e ; qu il mette sur les v o i e s , et le dirige sans paraître s'en mêler. L e commerce se composant de tout c e qui a rapport à la c u l t u r e , aux m a n u f a c t u r e s , aux arts et à l'industrie, et aucune de c e s parties ne pouvant fleurir que par l u i , le c o m m e r c e doit-être pour le g o u v e r n e m e n t , la pierre de louche de sa politique et de toutes s e s délibérations. L'Angleterre v i n g t ans d ' e x i s t e n c e , premier ordre,
n'aurait pas
comme
empire
du
et rentrerait dans la classe
q u i lui est prescrite par l'aridité de son sol et ses r o c h e r s , si les maisons opulentes qui exis tent en F r a n c e , et surtout
si les anciennes
grandes m a i s o n s , se livraient au
commerce
e t ouvraient des comptoirs dans leurs bôtels. Les
ducs de Florence
en avaient
dans
leurs
palais. Côme Orand
de Médicis,
surnommé
et le père de la patrie,
Côme-le-
vendait d une
(188) main les denrées du levant, et soutenait
de
l'autre le fardeau de la république ; e n t r e t e nait des f a c t e u r s , et recevait des a m b a s s a deurs. Il faisait la guerre et la p a i x , et é t a i t l'oracle des princes. - Le commerce exige sans doute une a p p l i c a t i o n , mais il est frère du plaisir et le r e c h e r che. Pour le f r a n ç a i s , le temps qu'il d o n n e r a au c o m m e r c e , sera
repos ;
chaque
heure
de sa vie lui présenterait donc une n o u v e l l e puissance. L e français est le symbole m e r c e ; il se trouve bien
vivant du c o m dans toutes
les
régions; il se plie à tous les usages, i d i ô m e s , mœurs et caractères; il se c o m m u n i q u e , il est desiré et répand un fluide vivifiant ; il rend tout ce qu'il a b o r d e , aimable, sociable, et donne une autre â m e . Et un tel peuple qui jouit du sol le p l u s fertile, et dont les côtes décrivent presque u n cercle autour des rochers anglais, trouverait de l'opposition pour rendre son
commerce
national ! C e ne serait pas sa faute; mais d e l'éducation qu'il aurait reçue. La France a eu une marine militaire aussi formidable que celle de l'Angleterre : elle lui fit
la loi en 1778. L'impôt général n'est en France q u e
de
(189) 22 francs par individu, et diminuera avec la paix. En Angleterre, il est de 64 francs, et il ira toujours en croissant. La dette publique est en Angleterre de quinze à-dire, sept fois
milliards ; c'est-
plus considérable que celle de
la F r a n c e , dont la population égale celles des domaines soumis à l'Autriche, à la Prusse et à la Bavière. Elle a le même
nombre
de
troupes que ces trois puissances ; mais son r e v e n u est presque double du leur. Sa dette publique
est moindre que
celle
de
l'Au
triche. En
1784, l'Angleterre
devait
davantage
q u e laFrance, en rentes annuelles à l ' é t r a n g e r . D e p u i s la révolution française, la dette des anglais envers l'étranger a considérablement augmentée. D e sorte qu'en ajoutant à cette dépense les subsides qu'ils payent sur le c o n t i n e n t , pour obtenir de la considération, et y susciter la discorde, l'Angleterre perd annuel l e m e n t une partie considérable de ses richesses métalliques. La France, par sa conduite juste et franche a u - d e h o r s , jouit d'une considération r é e l l e ; elle consolide sa puissance en ne livrant de s o n numéraire à l'étranger, que ce qui est nécessaire pour activer les liaisons c o m m e r ciales entre les différens peuples. C'est, à pro-
(190) prennent d i t , un prêt. La France, territorialement prise, est la première nation du m o n d e . Avec la liberté des m e r s , elle le sera é g a l e ment c o m m e puissance maritime.
Du
sort
à venir
dès cultivateurs
couleur
à
de
toute
St.-Domingue.
D A N S l'ordre social, l'homme qu'on appelle libre,
est un h o m m e lié par les lois. S'il se
révolte, ou s'il tue son semblable, il encourt la peine de mort. L ' h o m m e sauvage et l ' h o m m e s o c i a l , naissent subordonnés ; des besoins impérieux le commandent. Qui dit libre pour d i r e , faire c e qui nous plaît contre l'intérêt c o m m u n , dit un mot vide de sens. Ce s e r a i t , dans le cas contraire, un mot barbare qui autoriserait à toutes les cruautés. naturelle
Liberté
! LE PREMIER HOMME, a été le seul
doué de la liberté naturelle. Ses d e s c e n d a i s sont nés pour la subordination ; la nature a refusé à l'homme de disposer de lui en nais sant. Elle l'a mis à la disposition des a u t r e s ; son existance cesse par le défaut de secours. La liberté naturelle est la raison.
La nature
a donné la raison à l'homme pour vivre en société, s'entr'aider, faire abnégation d e sa
(191) f o r c e , et être soumis à une loi c o m m u n e . Les besoins auxquels les hommes sont
asservis,
prouvent que l'ordre social est d'institution d i v i n e , et qu'il n'a jamais existé de liberté naturelle. Les sauvages ne jouissent point de c e qu'on appelle la liberté:
ils ont des r o i s ,
d e s chefs de h o r d e s , des chefs de familles. L e u r s cruautés, ou les sentimens pacifiques, s o n t la conséquence d une volonté générale. L e sauvage qui s'isole, ne fait qu'une a b s e n c e ; persiste à être seul, c'est l'action d'un
fou.
A l o r s il est sans volonté de raison, bonne ou m a u v a i s e . Le nègre marron
est un malade
q u ' i l faut asservir par la force. La
qualité
distinctive
de l ' h o m m e ,
est
d ' ê t r e propre à l'impression d'utilité publique, v e r s lequel le gouvernement croit nécessaire d e le diriger. Il n'existe de liberté
que pour
l e gouvernement; il doit vouloir. L ' h o m m e n a î t pour obéir et travailler. M. de
Vaublanc
est le seul qui ait consi
d é r é l'état des esclaves,
ce qu'il devrait être,
s'il était possible, en proposant de les classer en
état de domesticité.
M. Malouet,
long
t e m p s avant la révolution, cherchait, par de sages réglemens, à amener progressivement de grandes améliorations dans le sort de ces auxi liaires. M . Moreau de Saint-Méry
avait frappé
(192) d'un jour lumineux toutes les parties du r é gime intérieur de Saint-Domingue. Mais q u e pouvaient des hommes éclairés, lorsque d ' i n justes préventions, et surtout la crainte d e s effets qu'amènent toujours les i n o v a t i o n s , opposaient alors des barrières de préjugés e t d'intérêts insurmontables. La Domesticité
est un état parfaitement
libre. L'homme s'engage et rompt son e n g a gement à volonté; l'état de domesticité d o i t , à S t . - D o m i n g u e , être réservé aux
européens,
aux descendans des anciens affranchis,
et à
ceux appelés politiquement à la jouissance des droits qui seront accordés aux anciens libres. Les
cultivateurs
ne peuvent d o n c être
compris dans la classe de
domesticité.
En Europe, 1 h o m m e est obligé de travail ler pour vivre. Les africains sont indolens et paresseux. Le s o l , à Saint-Domingue, pourvoit a b o n d a m m e n t , et sans labeur, à tous les b e soins de la vie. Par la nature du c l i m a t , les nègres peuvent se passer de vêtemens. L e s deux sexes se plaisent, c o m m e en A f r i q u e , à n e pas être vêtus. Ils trouvent le bonheur dans l'apathie. Un ajoupa ( u n e hutte) au fond des bois, est pour eux un palais. La terre leur sert de lit, une pierre d'oreiller. Ces
considérations
démontrent
que
les
nègres
(193) n è g r e s ne peuvent
être livrés à
eux-mêmes.
e t qu'ils doivent être assujétis à un travail d'obligation. Dans le cas contraire, ils seraient i n u t i l e s ou dangereux à la société. Les esclaves
étaient heureux. Des hommes
e n t r a î n é s par l ' e r r e u r , les ont faits révolter ; i l s s e sont prononcés pour la liberté. a déclarés libres. ditionnellement
O n les
Cette liberté leur fut c o n confirmée
en l'an
X.
a n g l a i s les ont de nouveau conduits
Les à la
r e b e l l i o n . Quel sera le sort avenir des a n c i e n s esclaves, lorsqu'on les aura de nouveau subjugués ? L'établissement de la culture à Saint-Dom i n g u e , a nécessité de se procurer des qui pussent supporter
liaires
sans
auxidanger
l ' â p r e t é du climat : on les trouva en Afrique. Leur
destination était d'être
inviolablement
a t t a c h é s à la terre. Par des convenances parti c u l i è r e s , on toléra en domesticité des
l'emploi
africains, et leurs descendans de toute
c o u l e u r . Ils furent dès-lors, tous abusivement marchandises,
considérés
contre l'esprit de
l ' é d i t de 1 6 8 5 , q u i , en les désignant
esclaves,
l e s déclarait tacitement les hommes
du
inamovibles étaient Les
des habitations
placés
ou
avaient
sur lesquelles pris
roi, ils
naissance.
africains et leurs d e s c e n d a n s , attachés N
à
(194) la terre,
étaient, par l'édit de 1 6 8 5 , c o m
pris c o m m e auxiliaires L'homme
dans l'ordre s o c i a l .
n'était pas la propriété
du p o s s e s
seur du biens f o n d , quoiqu'il l'ait o b t e n u à prix d'argent; il était sous la loi. Il ne pouvait être
la protection distrait
ture, puisqu'il ne pouvait être
de
de la c u l
saisi
par les
créanciers pour être vendu. Le c o n c e s s i o n naire n'avait d o n c réellement que la j o u i s sance du labeur.
Il lui était assuré, tant par
l'intérêt de l ' é t a t , que par la s o m m e qu'il avait comptée à ses agens commerciaux. Le colon qui vendait un nègre cultivateur, agis sait au détriment de l'état. Louis XIII
ne con-
sentit à l'esclavage des nègres que dans les vues du
christianisme.
D'après l'esprit de l'édit de 1680 (Louis X I V ) , l'article qui déclare meuble les esclaves, ne pouvait donc être applicable qu'aux esclaves tolérés en domesticité,
jusqu'à ce qu'ils fussent arrivés
à la destination voulue par les l o i s , qui auto risaient leur importation dans la colonie, pour Ceux tolérés en
do-
étaient c o m m e ceux à bord des
né-
être attachés mesticité, griers,
à la terre.
dans l'attente de leur destination, et
jusques-là réputés dans le c o m m e r c e . C'est donc aussi par abus qu'on a estimé par
tête,
les esclaves des habitations qui ont été v e n -
(195) d u e s , et de celles évaluées pour fixer la p o r tion revenante aux héritiers. On aurait dû se b o r n e r , dans l'un et l'autre c a s , à donner une estimation à la terre, en observant qu'il s'y trouvait attaché tel nombre d'individus. Les esclaves de Saint-Domingue, en recla m a n t la liberté
( 1 ) , demandent qu'ils soient
traités en hommes;
qu'ils ne soient plus c o n
sidérés marchandise
; d'être
compris
dans
l ' o r d r e social ; être reconnus auxiliaires à
la prospérité de l ' e m p i r e , et
utiles
inamovibles
d e s habitations où ils ont été placés, ou ont pris naissance,
qu'ils
considèrent
b e r c e a u ou commune. lucri
Nègre
particeps.
a v e c part
sur le net
comme
Africanus métayer
leur
perpetuo a
vie
produit des récoltes ;
a v o i r la faculté de se marier
( 1 ) , étant pour
l ' h o m m e en s o c i é t é , le seul acte où il puisse a v o i r une volonté
libre.
Il est de l'intérêt du
c o m m e r c e métropolitain, et de celui de l'état, q u e la part dans les f r u i t s , ne soit acquitée q u ' e n articles ouvrés en France. Les nègres ne retiraient déjà que trop de numéraire de ( 1 ) La liberté. L ' a n a g r a m e definit l e s e n s d e c e s mots,
c o n t r e la
définition d o n n é e p a r la c o n f r é r i e
d e s n i g r o p h i l e s . Lier la bet (2)
tions
Se marier. des esclaves
11
y avait dans beaucoup d'habita
mariés.
N 2
( 1 9 6 )
la circulation, par la vente
des
objets d e
leur industrie, en l é g u m e s , volailles, œ u f s , porcs f r a i s , etc. L'homme
ne p o u v a n t , d'après la
raison,
d'un autre homme,
on se
être la propriété
tromperait étrangement, si on croyait que l e s nouveaux
libres
peuvent
maître de f a i t , reconnu cains et leurs descendans sont indolens
se passer
d'un
par la loi. Les a f r i de toute c o u l e u r ,
et paresseux, et n'ont pas b e
soin de travailler pour vivre. Il faut d o n c , en remplacement du propriétaire de la personne, un maître considéré politiquement. Le est classé à vie au service africains
de
matelot
l'état.
Les
n'ont été admis dans l'ordre social,
q u e pour le plus grand avantage de l'état ; ils sont d o n c les hommes
de l ' e m p e r e u r . Sa v o
lonté et l'obéissance des cultivateurs, d o i vent être absolues. L ' h o m m e est né pour t r a vailler. La force doit y veaux
libres
militaire
et leurs
contraindre les
nou-
Le
code
descendans.
d o i t , dans toute la force du t e r m e ,
remplacer pour les peines, corrections
le code noir. Les
de petite p o l i c e , celles j o u r n a
l i è r e s , pourraient se faire à l'allemande ou à la. turque.
Celles russes,
dite de f a m i l l e , s e
raient préférables; c'est-à-dire, remplacer l e
(197) dont on fait actuellement u s a g e , par
bâton,
un nerf de bœuf,
qui
ne présente
pas les
m ê m e s dangers, étant préparé. On ne refusera sûrement pas à
Toussaint,
qu'il connaissait le caractère des
individus
d e sa caste. Il avait constitué les anciens
es-
en une classe d i s t i n c t e , sous la d é
claves,
nomination de cultivateurs.
Ils étaient
mais obligés de travailler sous peine
libres,
de mort.
Ils encouraient la m ê m e peine en cas subordination. étaient obligés
Ils
étaient libres,
d'in
mais ils
de rester colloqués
sur les
h a b i t a t i o n s , dans l'ordre de leur installation p r i m i t i v e , et de ne point s'en écarter sans permission. Ils étaient libres,
et ils ne p o u -
vaient se marier qu'avec les individus attachés à l'habitation à laquelle ils se trouvaient c o l loqués. Ilsavaient lequart des fruits c'est
trop.
L a discipline était à l'allemande. Le bâton r e m plaçait le fouet
( 1 ) . Dessalines
cipes qu'avait consacrés
suit les prin
Toussaint.
( 1 ) I l n'y a pas t r e n t e a n s , q u e dans ment
de
la G i r o n d e , le
v i g n o b l e , suivait a v e c un fouet
dans
les
de chartier,
le départe
maître-valet vignes 11 l e s
d'un
bien
les vendangeurs piquait
lorsqu'ils
m a n q u a i e n t d ' a c t i v i t é , o u faisaient la c u e i l l e t t e s a n s précaution.
(198) La qualification d'hommes
de
l'empereur,
constitue les anciens esclaves, en une c l a s s e distincte et cultivatrice. Ils restent attachés à la terre.
Leur labeur est obligatoire envers l e s
possesseurs des biens f o n d s , qui ne perdent rien en perdant leurs qualités de propriétaires de la personne.
Le sort des esclaves est a m é
lioré. Ils seraient libres, mais ils seraient o b l i g é s , c o m m e les européens,
à travailler; ils ne s e
raient pas journaliers ; ils seraient métayers à vie ; ils cultiveraient et fabriqueraient pour u n e portion des fruits. Ce nouvel ordre de
chose
n'entraverait pas la vente des habitations. Elles ne perderaient seulement
point de valeur. Il
qu'elles
soient
duites à peu de choses. l'intérêt
général.
immuable
empêcherait
morcelées
C'est ce que
ou
ré-
demande
L'ordre ne peut être rendu
Saint-Domingue, qu'en adoptant
un régime militaire. Les sang-mêlés, descendans,
se
anciens esclaves, et leurs trouvent compris dans la
classe des hommes de l'empereur.
Ils seront
à vingt a n s , soumis à la conscription m i l i t a i r e , dans la proportion des besoins de la colonie, pour la défense intérieure : le surplus restera attaché à la culture. Ceux qui t o m beront au s o r t , seront embrigadés pour la vie. Leurs enfans jouiront des mêmes avan-
(199) tages que les descendans des anciens affran c h i s de leur couleur. Il répugnait aux c o l o n s , dans le temps p a s s é , de voir les sang mêlés esclaves et li vrés
aux travaux de la c u l t u r e , par l'igno
m i n i e qu'on y attachait. Ce sentiment d'huma n i t é ou de prédilection était louable. A u j o u r d ' h u i que la culture dans la colonie se trouve rait e n n o b l i e , l'européen verra sans p e i n e , c o m m e en E u r o p e , son enfant naturel de c o u leur,
identifié à la terre. La naissance des
sang-mêlés
sera alors d'intérêt public.
Ils
p o u r r o n t avec le t e m p s , remplacer les nègres. Ils
concourront alors à la prospérité de la
m è r e - p a t r i e , au lieu d'en être le fléau. L'intérêt
des propriétaires ne
f r o i s s é dans l'avenir.
Il y
sera
pas
aura sûreté pour
l e u r p e r s o n n e , sur leurs habitations, puisque l a cause qui les en a expulsés, n'existera plus. L a portion de revenu dont jouiront les culti v a t e u r s , peut paraître un sacrifice, d'après l'ancien d'après
ordre
de
chose ;
maïs
considéré
l'exacte v é r i t é , que les colons, de
Saint-Domingue ne possèdent
plus rien,
ce
sacrifice annuelle n'est r i e n , auprès de ceux q u e le gouvernement sera obligé de f a i r e , p o u r les remettre en possession de leurs p r o priétés foncières. Ils trouveront d'ailleurs le
(200)
leurs
remplacement de ce sacrifice, en fixant
domiciles sur leurs habitations. Le c o m m e r c e y gagnera également les nègres seront m i e u x surveillés, et mieux soignés. D'autre p a r t , il ne reste rien à desirer aux: africains et sang-mêlés cultivateurs. Ils s o n t appelés à faire partie de l'ordre social ; ils y sont compris c o m m e auxiliaires cessaires.
utiles
et
né-
Leurs devoirs est de se livrer à la
culture : c'est la condition de leur admission dans la société. Les nègres ment mineurs, parce
sont i m m u a b l e
quoique nés dans la c o l o n i e ,
qu'ils, forment dans la création
verselle,
une race distincte.
la qualité d ' h o m m e s , ils sont étrangers peuples chevelus.
uni-
Acception de aux
Il y a des préjugés qui sont
respectables, et qu'il est politique de maintenir. Quant aux sang-mêlés de la hommes
de l'Empereur,
également d'être
leur
classe
des
condition est
attachés immuablement à
la terre. Ils o n t , par la
filiation
paternelle,
plus que les n è g r e s , la faculté d'être appelés à jouir des mêmes avantages que les d e s c e n dans des anciens a f f r a n c h i s , en le méritant par des actions distinguées, un service m i l i t a i r e , ou en récompense des services r e n d u s par leurs pères à l'état (s'ils font parti de leurs atteliers) l'Empereur.
et reconnus par un
diplôme d e
( 2 0 1 )
On dira, peut-être, qu'en obligeant mili tairement les nègres
nouveaux
libres,
à tra
vailler, c'est réduire les africains et leurs des cendans de toute c o u l e u r ,
à un esclavage
plus terrible que le p r e m i e r , les nigrophiles
contre lequel
les ont faits révolter. L ' h o m m e
libre est l'esclave de la loi. Il n'y a que les gouvernemens arbitraires, qui ont des ménagemens à garder ; l'intérêt
de l'état est la
suprême loi. Les cultivateurs sont reconnus libres,
mais obligés
de travailler.
Si les n i
grophiles en demandaient aujourd'hui davantages,
ils seraient criminels de l'ès-nation
au premier chef.
Etat
politique
franchis,
des sang-mêlés, considéré
ce qu'il
anciens doit
af-
être
à
Saint-Domingue. L'AFFRANCHISSEMENT qu'on accordait à S t . D o m i n g u e , à des africains, à des sang mêlés, et par suite à leurs d e s c e n d a n s , n'était pas une
reconnaissance qu'ils
l'exercice libres.
des droits
étaient aptes à
politiques
C'était seulement
; c'est-à-dire
une licence
pour
eux et leurs d e s c e n d a n s , de travailler à volonté,
et dans telle profession qu'il leur
( 2 0 2 )
plairait,
en se conformant aux réglemens
de police et de sûreté générale. Saint-Do mingue est une colonie dépendante. O ù il y a d é p e n d a n c e , il n'y a point de droits
poli-
tiques à exercer. Conséquemment, il n'y a d e liberté pour aucune caste. d'origine affranchie, c ' e s t -
Les sang-mêlés à-dire, les mulâtres, tifs et les blancs
les quarterons,
de
presque tous nés en bâtardise, l'imitation
des
les
descendance
blancs
exigèrent, a
non-propriétaires
qu'on les fît jouir sans réserve de des
l'égalité
droits.
Les mulâtres
étant de génération
ils sont accessoires qui exclut l'égalité cice
mé-
esclave,
des droits
mixte,
dans l'ordre s o c i a l , c e sous le rapport de l'exer politiques.
Ils
suivent
blancs ; ils sont égaux avec les b l a n c s ,
les de-
vant la loi. La condition des mulâtres, prise à la let tre,
est
de
confondre
leur
sang
dans
l'une
des deux sources o ù ils ont pris la vie. Il faut qu'ils adoptent le blanc ou le
noir.
Sous le rapport de la nature de la p o l i t i q u e ,
les mulâtres
et de celui
et leur lignée
de m ê m e c o u l e u r , sont toujours
mineurs,
sauf le cas d'alliance légitime avec les blancs. L'émancipation
de droit n'est acquise à la
(203) lignée nuancée des mulâtres,
qu'à l'époque
o ù , par la continuité du mélange de leur sang avec celui des b l a n c s , ils parviennent à la couleur blanche. L'axiôme
que les hommes
naissent égaux en d r o i t s , n'est applicable, s a u f les exceptions p o l i t i q u e s , qu'aux indi vidus nés de père et de mère blancs. En afrique, d e père et de mère La génération
noirs. se divise
des sang-mélés
en quatre classes, avant d'atteindre à la c o u leur blanche parfaite. Vide page 38. La nature a donc gradué elle-même leur état dans la société. Dans l'église,
ils ne sont pas admis à
l a prêtrise. Les africains reçoivent les o r d r e s , p a r c e qu'ils sont sang
pur.
Les
sang-mêlés
demandèrent d'être reconnus blanc,
à la s e
c o n d e génération m é l a n g é e , c o m m e si les h o m m e s pouvaient intervertir l'ordre prescrit par le créateur. Les mulâtres
étant moitié blanc et
ils sont accessoires.
Les quarterons
noir,
obtenant
u n quart de plus de couleur b l a n c h e , ils g a gnent sur les mulâtres. Les métifs
étant aux
sept huitièmes b l a n c s , ils précèdent dans la société les deux premières générations. fant de
L'en-
de la métwe se trouvant b l a n c , la tache descendance
acquiert de droit
d'africain
est
l'émancipation.
éteinte : il
(204) Les prétentions des mulâtres étaient justes ; mais le préjugé descendans
in
qui frappait sur l e s
d'esclaves était barbare.
Non-
seulement il abrutissait les sang-mêlés, m a i s il entachait encore d'une éternelle i g n o m i n i e , la postérité de l'européen une femme
qui s'alliait
avec
s a n g - m ê l é , prouva-t-elle d e u x
siècles de génération blanche. Est-il étonnant que les sang-mêlés ne témoignaient pas d ' a t tachement pour les blancs ? On les accablait d'opprobre, ainsi que les enfans b l a n c s , p r o venant de leur lignée. Cet impolitique et bar bare préjugé n'a pas peu c o n t r i b u é , depuis soixante a n s , à les maintenir dans leurs prin cipes d'indépendance. On affectait d'oublier q u e , provenant du sang-français, ils avaient à peu-près la même subtilité de sens et
d'es
p r i t , et qu'on ne pouvait les confondre a v e c les sang-mêlés des peuples
balourds.
Il serait imprudent de permettre aux
blancs,
à S a i n t - D o m i n g u e , l'exercice des droits p o litiques ; mais si on les y autorisait, la p o l i tique paraît commander a l o r s , d'accorder la m ê m e faculté aux sang-mêlés des deux
degrés
les plus rapprochés de la couleur b l a n c h e , et par exception, aux descendans des européens qui s'allieraient avec des degrés inférieurs. Savoir :
(205) 1 degré
A un quarteron
franc,
né au
deuxième
de légitimité ; c'est-à-dire, à l'enfant
n é d'un quarteron et d'une q u a r t e r o n n e , ou m é t i v e , nés eux-mêmes en légitime mariage. 2°. A un métif franc,
né au premier
degré
d e légitimité; c'est-à-dire, à l'enfant né d'un métif et d'une métive unis par le mariage. 3 ° . L'européen tresse
qui épouserait une
mulâ-
légitime ou naturelle, ne perdrait point,
n i ses d e s c e n d a n s , l'exercice des droits poli tiques. L'européenne lâtre,
qui épouserait un mu-
légitime ou naturel, apporterait à son
m a r i et à ses d e s c e n d a n s , la faculté de l'exer c i c e des mêmes droits. 4°. Les nègres affranchis et leurs descen d a n s n o i r s , resteraient classés avec les lâtres,
mu-
s a u f , pour les p r e m i e r s , prohibition
d'alliance avec les blancs. 5 ° . Il conviendrait d'insérer dans les actes d e b a p t ê m e , un nom propre
aux sang-mêlés
d'ancienne origine affranchie, nés en
bâtar-
O n pourrait décomposer le nom
propre
d u père présumé. De toutes les lettres
de ce
dise.
n o m , le curé formerait celui de l'enfant.
(206)
Dispositions O N
générales.
ne parviendra à rétablir l'ordre et à
accélérer la restauration de la culture à S a i n t D o m i n g u e , qu'autant que le chef qui g o u v e r nera la
colonie durant les cinq premières
a n n é e s , sera doué d'une grande activité m i litaire, tant pour maintenir la sûreté p u b l i q u e , vérifier par l u i - m ê m e tous les travaux de d é fense,
que pour parcourir sans discontinua
tion les divers quartiers, y encourager l'in dustrie, mettre sur les v o i e s , et diriger l ' a c tivité. Le c h e f qui aura la confiance du g o u v e r n e m e n t , n'obtiendra aucun s u c c è s ,
s'il ne
règle sa conduite sur celle de Dogeron,
qui
a été le créateur de la culture à S a i n t - D o mingue. On pourrait, pendant les cinq premières a n n é e s , mais au moins
pendant les trois
p r e m i è r e s , se dispenser d e créer des tribu naux, et d'envoyer un préfel dans la c o l o n i e . D e s chefs d'administration instruits, seront d'une grande utilité. Le partage
de
l'autorité,
durant les premières a n n é e s , pourrait p e u t être affaiblir l'activité
du c h e f ,
paralyser
(207) toutes les opérations, et rendre la culture languissante. Ce serait, pourra-t-on d i r e , en adoptant
un semblable s y s t è m e ,
livrer la
colonie à l'arbitraire du chef. Si on considère que pendant les cinq premières années, l ' o b jet principal sera la sûreté publique,
activer
la c u l t u r e , et y réattacher les n è g r e s , on ne pourra disconvenir qu'un régime purement militaire, pendant ces premières a n n é e s , est indispensable, pour rendre immuable dans l ' a v e n i r , l'obéissance à la loi ; mais il viendrait de faire un bon choix d'un nateur
en chef,
pas étrangères réunirait
à qui les localités ne ; qui,
publique,
en se livrant
du ressort
des commissaires
marine ;
nègres
et des
qui
à la chose
aux détails qui sont
connût
mulâtres,
leur patois. L'ordonnateur à une très-grande
activité,
de son état ; qui
ne perdit pas un temps précieux
de
seraient
à une grande
les connaissances
con ordon-
des guerres le caractère
ou des
et qui sût parler Perroud
réunit
facilité pour le
travail,
toutes ces qualités (1).
(1) J'ai été sous l e s o r d r e s d e l ' o r d o n n a t e u r P e r r o u d , et j e lui d o i s d e la franchise
reconnaissance ; mais m a
eût été plus forte que ces c o n s i d é r a t i o n s ,
s i , d a n s l e f o r t - i n t é r i e u r j e n'eusse été certain qu'il p o s -
(208) Il c o n v i e n t , pour ramener p r o m p t e m e n t l ' o r d r e , de déclarer en p r i n c i p e , q u e les cultivateurs ne sont pas marchandise; que les nègres attachés à la terre, ne seront plus v e n d u s c o m m e des bêtes de somme. Ils seront hommes asservis à la loi ; c ' e s t - à - d i r e ,
libres,
puis
qu'on tient aux mots ; mais obligés de
tra-
vailler. Ils seront politiquement les hommes de l'Empereur,
inamovibles des habitations
où ils ont été placés ou pris naissance. L e u r labeur sera obligatoire envers les propriétaires des biens fonds, sans q u e , sous aucune consi dération ou prétexte, ils puissent être déplacés pour être mis sur des habitations étrangères, o u être employés à un service
quelconque,
autre que pour l'utilité du propriétaire d u bien fonds où ils sont attachés. La domesticité
étant un état l i b r e , elle
ne peut-être exercée q u e par ceux qui j o u i s sent de la faculté de choisir la profession q u i leur plaît. Elle doit être réservée aux e u r o p é e n s , et aux sang-mêlés
descendans
des
anciens affranchis. s è d e t o u t e s c e s q u a l i t é s . C e n'est
pas n o n plus
le
desir d'être e m p l o y é de nouveau à S a i n t - D o m i n g u e qui m ' a d é t e r m i n é ; j ' a u r a i et
de c e u x
d e m a famille
assez d e m e s i n t é r ê t s , à surveiller,
lorsque
l ' o r d r e y sera r é t a b l i .
Constituer
(209) Constituer par conscription à vie, quarterons
et les métifs
sur les
attachés à la t e r r e ,
- m e garde nationale active et soldée, en nement
caser-
dans les v i l l e s , dont un quart serait
constamment en patrouille dans les plaines et les montagnes. Une gendarmerie de
mulâtres
répartie dans les c a m p a g n e s , qui
seraient,
c o m m e les p r e m i e r s ,
commandés par
officiers et sous-officiers blancs. d e la conscription,
dans la c o l o n i e , les blancs
e t les anciens libres. Il serait p o l i t i q u e , temps
des
Affranchir en
que l'européen non proprié
de paix,
taire dans la c o l o n i e , q u i , à son retour en F r a n c e , prouverait y avoir fait un séjour
per-
de six a n n é e s , depuis l'âge de
dix-
manent sept
ans,
ne serait pas recherché pour la
conscription militaire. Incorporer avec les b l a n c s , dans les c o m pagnies de gardes nationales, à pied et à c h e v a l , les mulâtres, tifs,
les quarterons
et les mé-
anciens l i b r e s , avec droit à ceux qui s e
r o n t légitimes
et propriétaires,
de voter dans
l e s assemblées de paroisses, où on ne pourra délibérer et émettre de voeux, que sur des o b jets autorisés, par lettres supérieurs
closes
des officiers
ayant le c o m m a n d e m e n t
de la
division militaire. Incorporer séparément en gardes nationales, les nègres anciens l i b r e s , O
( 2 1 0 )
et les utiliser activement
pour la sûreté p u
blique. Caserner les troupes de ligne e u r o p é e n n e s , en temps de p a i x , dans les mornes. Dans l e n o r d , au Dondon
et à Bompardopolis;
s u d , vers les Cayes; Domingo Marc
et la Véga;
à l'est, entre
au
Santo-
à l'ouest, entre
et le Mirebalais.
Les
Saint-
circonstances
malheureuses survenues depuis quinze a n s , prouvent que la défense de la colonie ne d o i t plus se borner à des fortifications sur les c ô t e s . Il en faut dans l'intérieur. Obliger les propriétaires d'avoir à leur ser vice un blanc, ou
par vingt cultivateurs
nègres
sang-mélés.
Simplifier le travail des administrations, et surtout donner aux commis (1) des appointe mens, qui puissent les faire vivre, et leur faire
( 1 ) En
acquittant l e u r t r a i t e m e n t
perdaient les deux
tiers;
p l u s affreuse m i s è r e . L e s t e l l e m e n t dépourvus un s e r v i c e militaire r a t i o n du
c e qui l e s
en denrées,
ils
a réduits
à la
m a g a s i n s d e l'état
de vivres,
étaient
que, quoique obligés à
j o u r n a l i e r , on l e u r a r e f u s é l a
s o l d a t , m a l g r é q u ' i l s aient i t é r a t i v e m e n t
d e m a n d é qu'on
en p r é l e v â t
l e p r i x sur l e u r
traite
m e n t , n e p o u v a n t p a y e r l e u r a u b e r g e , ni se p r o c u r e r du pain d a n s la v i l l e .
(211)
desirer de
conserver leurs
rigoureusement
places ; obliger
et sans exception,
toutes les
administrations d'être journellement à j o u r , et d'envoyer chaque mois, en F r a n c e , une ex pédition régularisée de leur t r a v a i l , pour être vérifiée par un bureau central, dépendant du ministère de la marine. Fixer la résidence du chef de la c o l o n i e , la cour souveraine et l ' é v ê q u e , au Cap F r a n ç a i s , si, i m p o l i t i q u e m e n t , on n'établit pas la capitale à la Petite-Ance. La politique prescrit de n'autoriser à SaintD o m i n g u e , que l'exercice de la religion R o maine. L'exercer avec p o m p e dès l'arrivée de l'armée ; faire baptiser t o u s les nègres ; réta blir les prières dans les habitations.
Despertes
qu'on a éprouvées
en nègres,
animaux,
des
nécessaires
fonds
à
St.-Domingue
bâtimens, pour
etc.,
et
rétablir
la
culture. IL
existait à Saint-Domingue 7905 habita
tions en c u l t u r e , et 623 établissemens d'in dispensable u t i l i t é , en guildiveries, ries, fours (Voyez
à chaux,
poteries
et
tanne-
briqueteries.
le tableau n ° . 2 ) . Leur valeur en O 2
(212) nègres, animaux, mécaniques, bâtimens
et
instrumens aratoires, s'élevait en 1789, d ' a près les calculs de M .
Id........,
teur des domaines en l'an X , liard
cinq
vingt-seize francs
cent
dix
mille
trois
direc un
millions,
milquatre-
cent
(1)
M.
à
quarante-huit
1,510,096,348 . » . f
Id
estime
qu'à
c
la
reprise de possession de l a c o l o n i e , il y mille
e x i s t e r a trois
nègres.
Tout
cent
démontre
q u e l a totalité n e s ' é l e v e r a p a s à
plus
deux
de
cent
mille,
l e s q u e l s , à 1 , 3 8 8 fr. 5 o
cent.
l ' u n , p r é s e n t e n t un capital d e deux
cent
millions qu'il la
soixante
convient
dépense
connaître
(1)
- dix -
sept cent mille
La
la
sept
francs,
de déduire
de
générale
pour
perte
effec-
dépense
générale
de
réédification
m a n u f a c t u r e s , m o b i l i e r s , exploitation t a t i o n s , pendant les treize premières
des
des
habita-
années de
la
r e p r i s e d e l a c u l t u r e , frais d e v e n t e des d e n r é e s e n F r a n c e , et r e m b o u r s e m e n t d e 50 m i l l i o n s d e d e t t e s a r r i é r é e s , s ' é l e v e r a à la m ê m e
somme.
(213) fr. c. 277,700,000 » 1
tive Il
convient
aussi
de d é
duire
c e qui
a rapport aux mécaniques et aux bâtimens, d o n t on p o u r fr.
r a faire usage à la reprise d
e
)
p o s s e s s i o n que M . I d . . . . esti m e , sans
exa-
gération,
à
quatre-vingtfiuit
millions
cent
quarante-
deux tre
mille qua-
cents fr..... M.
Id
88,142,400 porte
»
en déduc
tion de la dépense g é n é r a l e , la
valeur des c h e v a u x , m u
l e t s , b œ u f s , vaches asines
l a c o l o n i e lors d e l a tion.
et bêtes
qui se t r o u v e r o n t d a n s
Aucun
saurait
pacifica
propriétaire
légalement
ne
constater
q u e l e s a n i m a u x qui e x i s t e r o n t a l o r s , font p a r t i e d e c e u x qu'ils possédaient
s u r leurs
habita-
t i o n s en 1 7 8 9 ou en l'an X I I . C e s
365,842,400
(214) a n i m a u x font e n m a s s e p a r t i e d e l ' i n d e m n i t é de l ' a r m é e , et d o i v e n t être v e n d u s aux P e r t e effective : un cent
quarante-quatre
colons. milliard millions
deux cent cinquante-trois neuf cent quarante-huit
mille francs.
fr.
c.
1,144,253,948
On ne peut se dissimuler que
»
beaucoup
de propriétaires, gérans, rafineurs, é c o n o m e s , o u v r i e r s , charpentiers
m é c a n i c i e n s , et
en
bâtimens, m a ç o n s , serruriers, e t c . , ont été victimes de la férocité des brigands. Il n e serait pas extraordinaire qu'un
tiers des h a
bitations tombât au domaine de la c o u r o n n e , soit
par d é s h é r e n c e , par l'abandon
pourront faire des
qu'en
propriétaires, des h é r i
tiers, et par confiscation sur des h o m m e s d e couleurs. Il est d'une nécessité absolue, pour a c c é l é rer le rétablissement total de la culture, qu'il y ait un temps donné auquel les propriétaires seront obligés d'être rendus dans la c o l o n i e , ou représentés par des fondés de p o u v o i r s , à domicile fixe,
sur les
habitations.
Il serait impolitique de livrer la colonie au domaine, en frappant de séquestre
les h a b i
tations, ne fusse que pour la forme. Ce serait décourager les h a b i t a n s , enchaîner l ' i n d u s -
(215) t r i e , retarder la reprise de la culture, et f o r cer les places maritimes à l'inaction. Un pro priétaire ou son représentant, ne doit pas être asservi à solliciter un acte de mise en p o s session. Les nègres constateront suffisamment, dans le principe, la propriété et les abornem e n s de chaque habitation. D'après la m o r t d e beaucoup de propriétaires, survenue parles cruautés des révoltés, et des titres b r û l é s , le directeur du domaine doit se borner à viser, sans frais
les actes
de main-levée de
sé
q u e s t r e s , qui on tété délivrés dans les années X , X I et X I I , et faire enregistrer son visa SUR u n contrôle ad hoc. Les circonstances s'étant opposées à ce que la totalité des séquestres fus sent l e v é s , la moindre pièce indicative propriété
de
ou témoignage l é g a l , doit suffire.
L e s colons doivent de la reconnaissance à M . Pont-de-Gault,
du zèle infatiguable qu'il a
porté pour terminer
les opérations
de s é
questres. Il est d'une rigoureuse j u s t i c e , et d'intérêt général, qu'après un temps d o n n é , les habi tations abandonnées soient classées par l'ad ministration des domaines, et mises en ventes, sans déplacement des cultivateurs qui p o u r ront se trouver en dépendre. La
préférence
doit être accordée aux propriétaires des habi-
(216) tations attenantes celles abandonnées. C ' e s t l'intérêt des anciens possesseurs et celui
de
l'état. Ce serait tromper le gouvernement, si o n cherchait à lui persuader, qu'avec de l'argent on p e u t , en trois années,
ainsi qu'on l'a r é
pandu dans le p u b l i c , rétablir la culture a u point où elle était en 178g. On ne peut, a v e c le secours du c o m m e r c e métropolitain, y p a r venir à moins de huit années ; encore faut-il qu'on tienne sévèrement la main à c e q u e les nègres qui arriveront de la côte de G u i n é , soient sans réserve attachés à la terre. L'avance des fonds nécessaires se trouvera acquittée la treizième a n n é e , ainsi que les intérêts et la dette arriérée des colons envers le c o m m e r c e . Dès la deuxième année de la reprise de la c u l t u r e , la colonie fournira en d e n r é e s , u n tiers de la consommation de la F r a n c e ; m o i tié la troisième année, et la totalité de l a consommation intérieure la quatrième année. (Vide
le tableau n ° . 5 ) . O n pourrait a c c é l é
rer la restauration de la culture, de trois a n s , par le commerce
étranger
; mais l'avantage
ne pourrait jamais balancer la perte. D'abord il faudrait s'acquitter en numéraire,
ce qui
serait une richesse perdue pour la France. Ensuite les mortalités : elles doubleraient les
(217) dépenses, quoique les anglais livreraient les nègres à un tiers meilleur
marché que le
c o m m e r c e métropolitain. Dans le temps le plus p r o s p è r e , le c o m m e r c e de France n'a jamais introduit, année c o m m u n e , dans la colonie, plus de mille nègres.
vingt-huit
En réclamer aujourd'hui davan
t a g e , ce serait exiger l'impossible. En 1789, il existait réellement cinq mille
recensement fait en 1788, par ordre de Barbé
cent
nègres à Saint-Domingue, quoique le de Marbois,
Celui de M. de Proisy,
M.
ne s'élève qu'à 405,528. pour 1789, à 434,429.
L a différence de près d'un q u a r t , résulte des fausses déclarations 793
des habitans
Les
sucreries ne pouvaient être c a l c u l é e s ,
l'une dans l ' a u t r e , à moins de 250 nègres de tout âge ; ce qui donne 188,250. A quoi ajou tant les nègres des 7,112 c a f e y è r e s , i n d i g o teries et cotonneries, à raison de 3o nègres l ' u n e ; ce qui fait encore 213,36o ; le total était de 401,610 nègres attachés à la culture. Il y avait au moins 100 mille nègres et sangmêlés esclaves, en état de domesticité,
ou
vriers et pêcheurs, dans les villes, b o u r g s , embarcadaires, et dans les dépôts des c h a r rois des denrées. La culture exige réellement 401,610 culti-
(218) vateurs de tout âge. O a doit espérer qu'il e n existera 200 mille, lors de la pacification d e l a colonie. Ceux qui ont considéré la c o l o n i e sous le rapport d'intérêt public, ont d û
se
convaincre qu'il y a beaucoup de s u c r e r i e s dont tous
les nègres ont été tués, et
que
toutes ont é p r o u v é , en nègres, une perte d e moitié. Les habitations des mornes ont m o i n s perdu. On estime que ces dernières p o u r r o n t réunir les deux tiers de leurs nègres. D'après cet exposé, il faut un r e m p l a c e ment de 125 nègres par chacune des 703 s u creries, et dix nègres par chacune des 7 , 1 1 2 cafeyères, indigoteries et cotonneries; ce qui produit un total de cent soixante-cinq deux
cent
quarante-cinq
nègres,
mlle dont o n
porte la valeur, relativement au c o m m e r c e , à 1300 francs l ' u n , prix plus que suffisant; c e qui fait la somme
de....
O n doit considérer toutes les habitations, sansexception, c o m m e ayant perdu tous leurs animaux. Les 793 sucreries ont b e s o i n , l'une dans l'autre, de 80 mulets
et chevaux.
première
quantité
Cette donne
63,440. Les 7 , 1 1 2 cafeyères
214,818,500 fi
(219) D e ci-contre
214,818,500 f.
etc.,
exigent dix
mulets
l'une
dans l'autre;
donc
71,120. En total cent quatre
mille
soixante
trente-
cinq
mulets,
cent à
5oo
francs l ' u n , fait la s o m m e 67,280,000 f.
de Les 79'3sucreries exigent. l ' u n e dans l'autre, 80 b œ u f s et v a c h e s , ou 63,44o. Les 7,112 c a f e y è r e s , e t c . , en réclament 4
l'une
dans
l'autre, ou 28,448. En total quatre - vingt - onze huit cent bœufs
mille
quatre-vingt-huit
et vaches,
à 200
francs l'un
18,377,600 f.
T o u s les bâtimens, g é n é ralement q u e l c o n q u e , qui étaient élevés sur les habi tations, moulins à eau et à b ê t e s , pour les idem,
sucreries;
idem, à grager, piler
et vanner le c a f é , e t c . , ont été incendiés. T o u t est à réparer en maçonnerie, et à garnir des choses néces-
( 220) D'autre p a r t . . . . . . . . . . 3 0 0 , 7 6 , 1 0 0 f. saires les
manufactures.
D'après les calculs de M. Id
,
la dépense de
ces objets, pour les rétablir dans l'état de 1789, monte à 352,569,600 francs. Il es time qu'à la reprise de pos session, on pourra trouver sans exagération, en objets existans, de quoi suppléer au quart de cette dépense, ce
qui
la
réduirait
à
264,427,200 francs. En convenant de l'exac titude de ces calculs, on estime
que
trente-quatre fisent,
deux
cent
millions suf
parce qu'on d o i t ,
dans les premières années, éloigner luxe,
tout c e
qui est
et que les proprié
taires peuvent provisoire ment se procurer leur l o gement dans les manufac tures, e t c . , etc. On fixe en conséquence, les 793 su creries à 100 mille francs
(221) De ci-contre
300,476,100 f.
l ' u n e , ou 79,300,000 fr. Les 7,112 c a f e y è r e s , etc. et les 623 guildiveries, tan neries, e t c . , à 20 mille fr. l ' u n e , afin de pouvoir dou bler cette s o m m e pour les c a f e j è r e s , dont les m a n u factures sont avec moulin. à
eau ;
ce
qui
produit
154,700,000 francs.
En
s e m b l e pour bâtimens, o u vrages de mécaniques, m a çonneries, chaudières, u s tensiles de toutes e s p è c e s , o u t i l s , aratoires, e t c . , la s o m m e de... Avances
234,000,000 nécessaires
à
la reprise de la culture... On doit s'attendre que les révoltés démanteleront les fortifications. Les palais d u gouvernement, les m a gasins de la m a r i n e , les arsenaux, les casernes, les corps-de-gardes et les égli s e s , ont été en partie i n cendiés et pourront l'être
534,476,100
(222) D'autre part
534,476,100 F.
en totalité. C'est une d é pense locale à la charge des colons. O n estime les d é penses d ' u r g e n c e , dans les trois premières années, à trente-cinq
millions
cent vingt-trois cent francs
cinq
mille
neuf
(1)..........
»
35,523,900
TOTAL des fonds n é c e s saires pour rétablir la c u l ture à S a i n t - D o m i n g u e , (1) S o u s l e g o u v e r n e m e n t R o y a l , la d é p e n s e d e la construction
du p e t i t
p o n t d e la R a v i n e ,
qui
fait
la séparation du C a p a v e c l e C a r é n a g e , s'est é l e v é e à plusieurs m i l l i o n s . Il a dix pieds de
long. Tour
figura
rendre l a
vingt
de l a r g e s u r
dépense
sur l e p l a n u n v a i s s e a u d e
plausible,
ligne,
on
passant à
p l a i n e v o i l e sous l ' a r c a d e . En
1788,
Arteau
l'entrepreneur
c o u r , un état des réparations
présenta
à
la
à faire a u x f o r t i f i c a t i o n s
du m ô l e S a i n t - N i c o l a s , qui m o n t a i e n t à d i x m i l l i o n s tournois. D ' a p r è s d e t e l l e s b a s e s , l e s fortifications à r é t a b l i r à S a i n t - D o m i n g u e c o û t e r a i e n t plus de deux millions
de francs;
ont été dans la ont p r o u v é
mais
les
officiers
c o l o n i e aux a n n é e s X ,
qu'ils
avaient
d'autres
cent
du g é n i e XI
et
qui
XII,
principes,
et
qu'ils se faisaient g l o i r e d ' e m p ê c h e r l e s d i l a p i d a t i o n s .
(223) n o n - c o m p r i s ceux indis pensables, pour réédifier les villes qui, étant une dépense et dépendante
secondaire,
d u c o m m e r c e , ne peut faire parti
de ce chapitre.
s o m m e de cinq cent te-dix
La
soixan-
millions de francs.
570,000,000 f.
D'après la récapitulation des fonds néces saires au rétablissement de la c u l t u r e , on aurait tort d'en conclure qu'il faudrait aux c o l o n s cette avance. Il est démontré par le tableau n ° . 1 , que la s o m m e à prêter en quatre a n n é e s , ne s'élève qu'à trois cent l i o n s deux francs
cent
soixante
quinze - deux
vingt
mil-
mille n e u f cent
trois
centimes.
Savoir î
89,841,000 fr. la première année; 117,485,300 francs la deuxième année; 105,885,3oo francs 20 cent, la troisième année; enfin 7,089,003 fr. 42 cent, la quatrième année. Les 249,784,096 francs 38 cent, excédent l'avance f o r c é e , ainsi q u e les frais d'exploitation, frais des denrées p o u r F r a n c e , e t c . , se trouvent acquittés avec le produit des trois premières récoltes. Tous
les colons propriétaires
sont sans
m o y e n s q u e l c o n q u e s , pour satisfaire aux d é penses urgentes de la reprise de la c u l t u r e ,
(224) qu'il importe impérativement à l'état de v o i r relevée promptement. En l'an X et en l'an X I , les colons réunirent tout ce qu'ils possédaient, et repassèrent dans la colonie. Les é v é n e m e n s qui y ont eu lieu, les ont réduits à la plus affreuse misère. Saint-Domingue est un d o maine de la c o u r o n n e ; les colons sont
ses
vassaux. Ils ont constamment été fidèles. L e s erreurs auxquelles se sont livrés non-propriétaires,
quelques
appartiennent à l'ennemie
naturelle de la France. C'est à l'industrie des colons qu'on
devait la prospérité à laquelle
s'était élevée la colonie. Le
gouvernement
royal ne leur a jamais fait d'avances, ni effi cacement protégés : ils satisfaisaient à toutes les dépenses relatives au régime intérieur de la c o l o n i e , et p a y a i e n t , par les droits qui se prélevaient en France sur les denrées, celles des autres colonies françaises. Ils o n t , dans tous les t e m p s , payé de leurs personnes la dette que chaque membre d'une société doit à la patrie. Il n'y a pas dans la colonie u n morceau de terre qui n'ait été arrosé de leur sang. Les deux milliards de numéraire qui sont en circulation en F r a n c e , l'argenterie, e t c . , et la magnificence à laquelle se sont é l e vées toutes les places maritimes, sont dus à l'industrie des colons. Les anglais ont p e r c é le
(225) le sein
de la nourrice
conservateur
des français. Le
génie
de la France avait confié
le
b a u m e salutaire qui devait cicatriser toutes l e s plaies ; niais le Démon
qui préside à la
d e s t i n é e de l'Angleterre, répandit dans la c o l o n i e son soufle empoisonné, et aggrava le mal. L a prospérité de la France dépend de la r e s t a u r a t i o n de la culture à Saint-Domingue ; la tranquillité de l'Europe tient enfin à ce que l a France jouisse paisiblement de cette c o l o n i e , si l'on veut éviter le retour du quinzième s i è c l e , et ne pas l'obliger à devenir, sur le c o n t i n e n t , une seconde Rome.
C'est ce que
desirent les anglais, parce qu'il est de leur e s s e n c e de ne pouvoir assurer leur
pâture
q u ' e n livrant le continent au carnage. Ils f r é m i s s e n t de ce que le cabinet
des
Tuileries
v e u t que toutes les nations puissent c o m m e r c e r avec sécurité. Venise, l'Autriche
leur
en la possession de
porte ombrage ; ils savent
q u e les vénitiens ont régné sur les m e r s , q u ' i l s ont fait le c o m m e r c e
de l'Inde
et par
l ' E g y p t e ; ils craignent enfin qu'ils ne r e c o u v r e n t leur ancienne gloire. En faisant des avances aux c o l o n s , il faut qu'ils puissent s'acquitter; ils ne le pourraient j a m a i s , si la vente de première
main des d e n
r é e s coloniales, en France, neleur étaitréservé; P
(226) c'est-à d i r e , que pendant les treize p r e m i è r e s années, il ne doit être fait dans la c o l o n i e aucune vente des denrées du s o l , que c e q u i sera nécessaire à sa consommation ( 1 ) , s a u f
( 1 ) Les esclaves se révoltèrent à Surinam session
hollandaise),
habitations.
La
et incendièrent
métropole
vint
(pos
toutes
les
au s e c o u r s
des
c o l o n s : e l l e fournit a v e c prodigalité tous les f o n d s n é c e s s a i r e s . L e s coloris
prix
h y p o t h é q u è r e n t leurs h a b i
et s ' o b l i g è r e n t
tations,
courant de la
de livrer
les denrées
au
colonie.
S i les c o l o n s d e S a i n t - D o m i n g u e étaient réduits à l i v r e r leurs d e n r é e s au prix ils éprouveraient le m ê m e times
courant
de la
colonie,
sort dont o n t é t é v i c
c e u x de S u r i n a m , lors m ê m e
qu'ils r e j e t t e
r a i e n t , dans la r e c o n s t r u c t i o n d e s b â t i m e n s , t o u t ce qui
est l u x e , ou pour
faciliter
l'exploitation.
Ne
p o u v a n t se l i b é r e r , ils seraient chassés d e l e u r s h a b i t a t i o n s , c o m m e l'ont
été. c e u x
de S u r i n a m ,
sans
q u e leurs créanciers pussent r e c o u v r e r leurs f o n d s . Dans
les colonies a n g l a i s e s ,
les habitations d o i
vent à leur m é t r o p o l e plus qu'elles n e v a l e n t . J a m a ï q u e a aujourd'hui q u e l q u e s teurs anglais refugés
en
succès,
S i la
les plan
le d o i v e n t a u x français qui s'y s o n t
l'an
IV.
Il est du plus grand i n t é r ê t d e l ' é t a t , d e n e l a i s ser adopter de mesures pour l e r é t a b l i s s e m e n t la c u l t u r e ,
qu'autant
qu'il
sera
démontré
de
q u e le
(227) d e la part des propriétaires dont les h a b i t a com-
se trouveront liquidées. Plus les
tions
missionnaires
vendront cher
en France les
d e n r é e s coloniales, plus ils trouveront, c o m m e n é g o c i a n s , de facilités et de bénéfices sur les ventes
des articles de F r a n c e , et les nègres
q u ' i l s introduiront dans la colonie. L e fret, en retour,
sera u n e grande i n d e m n i t é de la d é
p e n s e des a r m e m e n s . P o u r rétablir (a culture en huit a n n é e s , il est
indispensable q u il y ait dans
des fonds
disponibles
la colonie
à m e s u r e des besoins.
Il y a beaucoup d e négocians disposés à f a i r e , i n d i v i d u e l l e m e n t , les avances nécessaires. C e t o r d r e de chose qui était favorable, a n c i e n n e j n e t i t , à l'amélioration de la culture et du c o m merce,
lorsque
les habitations
étaient
en
v a l e u r , nuirait au rétablissement général. Il faut
q u e tout
rité;
il faut qu'en peu d'années tout soit réta
m a r c h e de front et avec c é l é
bli,
et l'ordre rendu i m m u a b l e ; il faut s u r -
r e m b o u r s e m e n t de l ' a v a n c e générale possible
en
quinze
années
de
au plus
f o n d s , sera
pour
les s u
creries. O n n e p e u t l i v r e r l e s c o l o n s à leurs p a r t i c u l i è r e s de crédit,
à moins
ressources
de s'exposer à voir
l a c u l t u r e languissante p e n d a n t c i n q u a n t e a n s .
P a
(228) t o u t , que tout soit terminé avant l ' é p o q u e
à
laquelle on pourrait concevoir l'idée d e
la
possibilité d'une guerre maritime. Il convient néanmoins, en reconnaissant l a nécessité d'un seul bailleur
d'as
de fonds,
surer en même temps la concurrence.
Il f a u t
laisser aux colons la faculté de traiter d i r e c tement avec les négocians des places
mari-
sans les frustrer de celle de pouvoir
times,
recourir au bailleur général, en remboursant ipso facto
les premiers. L'objet principal est
d'éloigner tout ce qui tiendrait à un exclusif,
privilége
et à entraver le c o m m e r c e
na
tional. La banque de France;
p a r l e crédit dont
elle jouit, et les fonds qu'elle a à sa disposi tion, paraît devoir être chargée de cette o p é ration, qui est intimement liée à l'intérêt de l'état. Une compagnie frirait à faire
les fonds,
particulière,
qui of
pourrait, par l ' i m
portance de l'entreprise, nuire au projet de stabilité
de la banque,
et influer désavanta-
geusement sur le crédit public. La restauration de la culture à S a i n t - D o m i n g u e , étant commandée par l'intérêt pu b l i c , et étant par cela m ê m e , la chose l'état,
c'est au Souverain à assurer la
de
garan-
tie de la banque contre l'envahissement ou
(229) dévastations
nouvelles.
La garantie peut être
hypothéquée sur les forêts nationales. D'après la prévoyance du gouvernement contre l'en nemie de la France, ce cautionnement ne sera que pour la forme. En ordonnant que toutes les denrées c o l o niales seront vendues de première
main
en
F r a n c e , pour le compte des c o l o n s , le r e m boursement des avances est certain. D ' u n e part, les colons gagneront un tiers sur le cours d e s prix de la c o l o n i e ; d'autre part, tous les magasins sont, en Europe, dégarnis de denrées coloniales; ce qui doit leur promettre pendant plusieurs années, que le cours,
quoique i n
férieur à celui a c t u e l , restera élevé. La banque ne peut être dans la colonie que bailleur
de fonds
et receveur
des
denrées;
elle expédierait en F r a n c e , aux négocians désignés
par les colons. Les denrées seraient
assurées pour les risques de la traversée, et vendues
avec commission de garantie. Les
négocians verseraient les fonds dans la caisse de la banque à Paris. L a colonie n'offrira que peu de denrées, les premières années de la reprise de la c u l ture. Il est cependant de l'intérêt du c o m merce métropolitain, de vendre le plus sible
pos-
aux colons. Les ventes seraient tou-
(230) jours assurées ; mais les rentrées difficiles, o u au moins très-éloignées. La c o n f i a n c e ,
en
c e s s a n t , porterait un coup mortel à la c o l o n i e , et par suite au commerce de France. Il serait de l'intérêt des négocians de la m é t r o p o l e , d'autoriser leurs capitaines de p r e n d r e pour écus,
les récépissés des chefs des c o m p
toirs de la b a n q u e , qui seraient
échangés
ou acquittés à vue à la caisse générale à P a r i s . Si la banque lie bien ses opérations, ses b é néfices seront considérables, et elle fera f a cilement
son
service
millions de francs
avec moins de
cent
écus.
Autant qu'il sera possible, il convient de ne rien réclamer du commerce
étranger.
est cependant indispensable d'avoir aux espagnols
Il
recours
de l ' e x t é r i e u r , pour des c h e
v a u x , des mulets et bêtes à cornes ; dépense obligatoire
de 85,653,4oo francs, pour le s e r
vice d'exploitation des habitations, à a c quérir en sept années. L'augmentation de nègres que réclamera la culture en sept a n n é e s , à raison de par
a n , offre une dépense
pour
23,6oo les
lons de 214,814,600 francs. Le c o m m e r c e
co de
France y pourvoira; mais il n'en peut être d e même pour tous les bois de construction et
(231)
mécaniques nécessaires. C'est donc aux EtatsUnis qu il Faudra avoir recours ( 1 ) . Les bois de construction pour les sucreries, et généralement toutes les m é c a n i q u e s , pré sentent une dépense de quarante
millions de
francs. Si on était obligé de faire tous les ouvrages d e mécaniques dans la colonie ,tels que m o u lins à eau et à bêtes pour les sucreries ; m o u lins à eau, à bêtes, et à bras pour grager, piler et vanner le café ; moulins à une, quatre
passes,
deux
et
pour éplucher le coton et en
séparer les graines, etc ; trois mille charpentiers-mécaniciens ne suffiraient poiut pour les établir en quatre années. Les mécaniques pourraient
se
faire
en
France ; alors la dette envers les Etats-Unis p o u r les bois de c o n s t r u c t i o n , ne s'éleverait qu'à environ vingt millions de francs.
C'est
à la b a n q u e , avec la protection du gouverne ment,
à combiner
ses opérations pour
ne
point payer en écus, aux espagnols et aux a n -
( 1 } I l a été fait à S a i n t - D o m i n g u e , v e r n e m e n t , une avance de soixante-quinze s u r caution,
par mille
le
gou francs,
à un fournisseur d e S a v a n a c k , à v a l o i r
p o u r des bois d e c o n s t r u c t i o n à livrer à l ' a r s e n a l du C a p . L e s bois s o n t à l i v r e r
(232)
glo-américains. Il est de l'intérêt de l ' é t a t qu'il ne sorte pas de numéraire de
France
pour l'étranger. générales exigent
un
nombre considérable d'ouvriers européens,
Les constructions
de
tous les états; charpentiers en bâtimens, m e nuisiers, m a ç o n s , etc. On ne peut en fixer le n o m b r e , à moins de deux par h a b i t a t i o n , et encore serait-on plus de trois ans à les r é é difier, dans la supposition aussi, qu'il existe encore des ouvriers,
hommes
de couleur
;
c'est donc 17,056 ouvriers européens. Qu'on joigne à ce n o m b r e , ceux que réclameront les v i l l e s , bourgs et embarcadaires ; ceux qui sont d'une nécessité absolue, pour relever les arsenaux, les c a s e r n e s , les magasins de la marine, fortifications, etc. ; on trouvera qu'il faut une armée
d'ouvriers
égale en n o m b r e
aux troupes de ligne qui seront chargées de rétablir l'ordre.
De
la dette
arriérée
des colons envers
le
commerce. DEPUIS quarante ans, on répète avec satiété, que les colons
doivent au c o m m e r c e
années de leurs revenus ; c'est-à-dire,
deux quatre
(233) cent m i l l i o n s , argent
de la c o l o n i e ,
266,666,667 livres tournois. M . Id
ou
, an
cien négociant de Bordeaux, fixe sans preuve, et par o u ï - d i r e , la créance du commerce à 239,177,861 francs.
On est fondé à croire
qu'elle ne s'élèvera pas à plus de
chiquante
millions de francs. Par principe de j u s t i c e , les négocians offriront de les réduire à une somme inférieure. En 1765, les places maritimes, entraînées contre leurs intérêts par une influence gère
qu'elles, ne pénétrèrent p a s ,
étran-
exigèrent
que les colons de Saint-Domingue, payassent ce qui restait dû au commerce de ses fices
béné-
arriérés. LA COUR sanctionna impoliti-
quement la réclamation, sans connaître l'ef fectif de la dette. Le comte d'Esteing, verneur-général, créa une chambre
gou ardente,
dont plus impolitiquement e n c o r e , il se fit le président,
et perdit par l à , la
du contre-poids,
puissance
qu'il était si important de
maintenir. Il ne garda aucune mesure. dans vingt-quatre
heures,
ou
en
Payer prison.
Plusieurs colons furent emprisonnés, ne p o u vant se procurer des fonds. Les récoltes n ' é taient pas faites. Le commerce
de F r a n c e ,
également contre son intérêt, ne laissait j a mais que peu de numéraire dans la colonie.
(234) Ces sévérités produisirent l'inquiétude,
la
stupeur, et définitivement une rumeur g é n é rale. Les colons convinrent entr'eux, de s ' a c quitter le plutôt possible; de renoncer, j u s q u ' à parfait p a y e m e n t , à toutes acquisions de s u perfluité, et de borner leurs consommations aux vivres du pays. ( I l s y avaient été a c c o u tumés durant les guerres de 1740 et 1 7 5 5 , que la France les avait abandonnés à e u x m ê m e s , quoiqu'il fût connu à la c o u r , q u e l'intention des anglais était de s'emparer de Saint-Domingue.) Cette résolution fit ouvrir les y e u x . La fidélité connue des colons à la couronne ( 1 ) , assurait la colonie à l ' é t a t ;
( 1 ) L e s c o l o n s p r i r e n t une seule fois e n c o r e fut-ce
par
d'une compagnie
les
armes,
intérêt n a t i o n a l . D ' o d i e u x
exclusive,
agens
e x e r ç a i e n t des v e x a t i o n s
i n o u i e s , et e n c h a î n a i e n t l ' i n d u s t r i e n a t i o n a l e e t c o loniale.
Le marquis
de
Sorel,
v o u l u t s ' o p p o s e r a u x effets
gouverneur-général, de
d e s c o l o n s : il fut a r r ê t é . L e s
la j u s t e i n d i g n a t i o n
édifices
qui s e r v a i e n t
a u x o p é r a t i o n s de la c o m p a g n i e , furent détruits ; l e s n a v i r e s qui lui a r r i v è r e n t d ' A f r i q u e , n e furent p a s reçus. Le régent
s'avoua coupable de cette prise d ' a r m e s ,
qu'il avait e x c i t é e par une institution v i c i e u s e . A p r è s d e u x années
de troubles
et d e confusion e n t r e
les
b l a n c s , l a t r a n q u i l l i t é se r é t a b l i t . L e s n è g r e s f u r e n t
(235)
mais le commerce était battu par ses propres armes
et courait à sa ruine. Les négocians
métropolitains reconnurent l'imprudence
de
leur démarche ; ils sentirent qu'il était
de
leur intérêt qu'il leur fût dû par les c o l o n s ; mais
ces derniers profilèrent de
la
leçon.
Beaucoup de dettes furent éteintes. Le se libéra presque entièrement. La
nord
majeure
partie des propriétaires passèrent en France. Le commerce à échange
en souffrit, par leur
non consommation dans la colonie. Les sévé rités qu'exerça le comte d'Esteing, eurent cela d'avantageux, qu'on découvrit que des
fac-
teurs du commerce de F r a n c e , s'enrichissaient en disposant des fonds de leurs c o m m e t t a n s , qu'ils avaient reçus des c o l o n s , et qu'ils an nonçaient en France être encore dus. Dans le m ê m e temps où le c o m m e r c e France faisait sévir contre les
colons,
de des
négocians des deux n a t i o n s , ses plus grandes ennemies, l'Angleterre et l'Autriche, se réunis saient pour offrir des fonds à ces mêmes c o lons. Des maisons de c o m m e r c e de la
sévèrement Depuis
Belgique,
s u r v e i l l é s , et contraints à l ' o b é i s s a n c e .
cette
époque,
les
places m a r i t i m e s
l i b r e m e n t l e c o m m e r c e a v e c la c o l o n i e .
firent
(236) se réunirent à des Londres,
maisons
de banque
de
et établirent, en 1770, des comptoirs
à Saint-Domingue. Les avances que ces c o m p toirs firent dans le sud et l'ouest, en 1789, à vingt millions
s'élevaient,
de francs. Fin
de
l'an X , un négociant de Bordeaux était à l a veille d'acquérir pour cent.
ces vingt millions, à
dix
Les belges y souscrivaient ; l e s
maisons de banque de Londres,
furent p l u s
récalcitrantes : elles traînèrent l'opération e n longueur. La révolte des nègres et des mulâtres, en vendémiaire an X I , durant l'exercice du capitaine-général L e c l e r c , empêcha l'exécu tion de cette opération de banque, qui eût été très-avantageuse aux planteurs du sud et de l'ouest. S'il est juste que les colons acquittent c e qu'ils peuvent devoir d'arriéré au c o m m e r c e , il est également juste qu'il y ait compensa tion de perte. La dette des colons qui pourra être d u e , est pour achat de nègres. deux tiers
Près des
ont été tués. Des négocians
de
Bordeaux, e t c . , n'ont pas été étrangers aux principes qu'ont manifestés leurs frères
noirs
et ceux de descendance cuivrée. On se r a p pelle les Girondins
; il faut croire qu'ils n e
pénétrèrent pas plus que leurs
compatriotes
de 1 7 6 5 , et les négocians des autres places
(237) maritimes, l'influence perfide du cabinet de Saint-James. Il s'en faut de beaucoup que la dette des colons soit aussi considérable qu'on la suppose. D e 1760 à 1 7 7 0 , le nord était presque libéré. Le commerce de France leur a fait peu de crédit depuis cette époque. Les les marchands
négocians,
b l a n c s , les négresses et les
mulâtresses m a r c h a n d e s , en obtenaient des capitaines et des marins-pacotilleurs. marchands
blancs et les marchandes
leur ne sont pas les colons;
Les
de cou-
LES NÉGOCIANS
NON-PROPRIÉTAIRES ne sont pas les
colons.
Les propriétaires de la partie du n o r d , trai taient depuis 1765 avec les négocians du Cap. Ces derniers avaient intérêt d e leur prêter. Ils étaient, pour les c o l o n s , dés, bailleurs
de fonds
procureurs-fon-
et
commissionnaires.
Les colons du sud et de l'ouest traitaient avec les comptoirs
naturalisés.
coup à M . Benezech,
Il était dû beau
décédé préfet à Saint-
D o m i n g u e ; il fut généralement regretté. La représentation des t i t r e s ,
fixera
la
créance du c o m m e r c e . LE SOUVERAIN est le père c o m m u n . Il décidera dans sa sagesse, la quotité à payer. Il est p o l i t i q u e , il est d'une nécessité a b s o l u e , d'ordonner le dépôt des
titres. Les clabauderies
continuelles,
(238) sur la dette présumée due par les c o l o n s , nuit à la c o n f i a n c e , et entrave les opérations du c o m m e r c e . . . . Quand la vérité sera c o n n u e , les mesures de remboursement seront faciles à prendre. Pour statuer avec j u s t i c e , il faut connaître l'effectif de la dette. Il e s t de l'intérêt des c o l o n s , c o m m e du c o m m e r c e , qu'il soit démontré. O n croit que cette dette arriérée, ne s'élèvera pas à plus de
cinquante
C'est la somme qu'on a
millions de francs.
portée dans le tableau n°. 1 ,
pour être a c
quittée la treizième année de la reprise de la culture.
Cession
à la France Domingue
LA
partie
mingue, acquisition
dite
cédée
de, la partie dite
espagnole
de
à la France,
avantageuse
de
Saint-
espagnole. Saint-Do-
est-elle
une
?
Cette acquisition a été improuvée par b e a u c o u p de personnes. O n n'en citera que d e u x , parce que toutes les observations sont les m ê m e s . 1°. Un ex-député
écrivait
en l'an
X:
« cet aggrandissement nous peut être moins » avantageux qu'on ne l'a pensé. Cette partie » de l'île nous était
plus favorable
dans les
(2З9) » mains des e s p a g n o l s ,
par le numéraire
» que leur voisinage et leur commerce d i n » terlope nous procuraient ; numéraire que » nous ne tenions, pour ainsi dire, que d'eux, » en échange des marchandises d E u r o p e , » que nous leur fournissions. » La plus grande partie des plaines ne valent » rien ( 1 ) , elles ne sont propres qu à l'emploi » qu'en faisaient les espagnols, à des hattes L'ambition et l'indus-
» pour les bestiaux.
» trie des français, ne leur permettront ja» mais de suivre une carrière aussi bornée. » Il peut arriver que nous m a n q u i o n s , dans » la partie française, des animaux propres à » la culture
des habitations, et que nous
» soyons privés des viandes fraîches, si utiles » et si indispensables à l'existance des colons, » qui succomberont si elles leurs manquent » et s'ils sont réduits aux salaisons. » 2°. M . I d .
nage entre deux
mais il est du Après
avoir
même
développé les
les français retiraient
( 1 ) Il ne peut être l'intérieur. fertilles.
avis que le
Toutes
de
avantages leur
q u e s t i o n que des
celles
le
eaux, député.
long
des
que
commerce
plaines d e côtes
sont
(240) avec leurs voisins limitrophes, « une » annuelle de onze millions
solde qui
de francs,
» s'acquittait en n u m é r a i r e , pour des » chandises
de rebut,
mar-
qui ne pouvaient être
» goûtées que par les colons espagnols : l ' a s » surance d'obtenir à v o l o n t é , le bétail q u e » l'indolence
élevait dans les
des espagnols
» hattes des vastes plaines de » de la Véga,
» bords de la Yuna, » Samatia, » Cibos,
jusqu'à la presqu'île d e
et au revers de la montagne d u à partir des bouches du
» jusqu'au-delà Id
Saint-Yague,
et sur les fertiles
du Cotuy,
de Santo-Domingo.
Neybe, »
M.
, d i s - j e , après avoir développé ces
avantages, déclare vouloir s'abstenir
de tout
développement sur cettecession de l'Espagne, et de résoudre les deux questions qu'il se
pro-
« Aurait-ou mieux f a i t , d i t - i l ,
d'y
pose.
» laisser les espagnols ? Aurait-on dû se b o r » ner à demander l'établissement de n o u » velles l i m i t e s , qui auraient donné à la par» tie française une étendue égale à
celle
» espagnole ? » Ces deux interrogations M . Id
improuve
la
démontrent q u e
cession
entière.
L e rapport des f a i t s , dont plusieurs p u b l i cistes ont donné c o n n a i s s a n c e , prouvera que les colons espagnols étaient des voisins d a n gereux,
(241) gereux, et qu'il était de l'intérêt de la France d'exiger la cession entière de l'île. Le peuple espagnol domingois,
est i n d o
l e n t , et orgueilleusement paresseux ; supers titieux, fanatique,
v i n d i c a t i f , et
ennemi
naturel des colons français. A la moindre d i f f i c u l t é , ces espagnols se repaissaient de dévastations et d'enlèvement d e nègres. Ils se sont durant
la guerre
de la
cruellement coalition
délectés contre
la
france. Dans tous les temps des divisions entre la France et l ' E s p a g n e , les esclaves français en profitaient pour aller marrons.
Ils se retiraient
sur le territoire e s p a g n o l , o ù ils trouvaient la liberté
sans
travailler.
Dans l'espoir de déterminer les espagnols d o m i n g o i s , à renoncer à leurs brigandages, et
les amener à remettre les transfuges à
leurs v o i s i n s , on fixa la capture à 25o livres. Joignant à cette s o m m e , les droits d'épaves sur le territoire f r a n ç a i s , e t c , nègre marron
la prise d'un
à l ' e s p a g n o l , coûtait souvent
4.00 livres à son maître ; c'est-à-dire, le cinquième marrons
de sa valeur primitive. Les
nègres
d'habitudes, étaient la ruine des c o
l o n s . Ce mode a existé jusqu'en 1789. En 1 7 1 8 , les esclaves quittèrent en Q
» foule
(242) les ateliers. Ces pertes multipliées, u l c é r è rent l'âme des colons. Ils se déterminèrent à chasser de l ' î l e , des voisins aussi dangereux. La guerre ne dura pas assez long-temps, p o u r voir réaliser leurs vœux. Philippe
V ordonna
d e remettre les esclaves. Ils furent embarqués pour les reconduire à leurs anciens maîtres. L e peuple espagnol domingois se s o u l e v a , et les remit en liberté. Ces métis, réputés b l a n c s , sont réellement frères avec les n è g r e s , par leur paresse et leurs vices. Quand vend quelques
on
leur
m a r c h a n d i s e s , il faut avoir
les yeux sur leurs pieds,
et à leurs mains.
D E S LIMITES. En 1700,
Monte-Christe
faisait partie des établissemens français. Les limites se prolongeaient en droite l i g n e , de cette place à la baye de Neybe,
les salines et les
lagons compris. Les cartes de S a i n t - D o m i n g u e , de janvier 1 7 3 1 , par de Banville, graphe ordinaire du r o i , ( i l n'y est que de la partie française)
géo question
en font foi.
Les espagnols empiétèrent peu à peu. Ils fixèrent leurs hattes très-avant sur le
terri
toire français. Les plaintes des colons par vinrent au trône. En 1765, le comte d'Esteing
eut ordre de
fixer les l i m i t e s , avec don Fernando,
que le
Roi d'Espagne avait autorisé ad hoc. Ces d e u x
(243) chefs supérieurs
nommèrent des
commis
saires. Il y eut une convention de f a i t e , mais elle ne fut pas sanctionnée des deux m o narques. En 1770, le comte de Nolivos néral, et le président
gouverneur-gé
espagnol, furent cliargés
d e reviser les opérations faites en 1 7 6 5 , et de fixer, par un nouveau travail, les limites. L e croira-t-on ? Les espagnols furent non-seuleinent maintenus dans leurs envahissemens ; niais encore, deux cents colons furent
chassés
d e leurs habitations, qui étaient en rapport. Un grand nombre d'habitations furent m o r celées. Beaucoup de
colons
furent
égale
ment obligés de renoncer à établir les c o n cessions que, depuis peu de temps, le gouver nement français avait accordées. La cour France
de
s a n c t i o n n a , en 1 7 7 6 , une opération
aussi inique et aussi humiliante pour la n a tion ! Quels peuvent en avoir été les
mo
tifs
(1)
L e s c o l o n s qui o n t été é v i n c é s par la
posses
s i o n e s p a g n o l e , s o n t - i l s apte p o u r r e n t r e r en j o u i s s a n c e des terres qui l e u r avait é t é concédées par gouvernement
français ! L a ratification des
le
limites
p a r l e s d e u x m o n a r q u e s , n ' a - t - e l l e pas a n n u l l é e l e s concessions
qui a v a i e n t été d é l i v r é e s ? L e s
Q2
conces-
(244) L'occupation des cinq huitièmes
de la c o
lonie par les espagnols domingois,
et l o r s
qu'ils n'en eussent eu que la m o i t i é , donnait aux français des voisins d'autant plus d a n g e r e u x , que
l'industrie des
franco-colons
faisait la honte de ces espagnols, que le c a ractère naturel indolent
et paresseux, fixe
dans la classe des pâtres Non-seulement la partie française
restait
ouverte aux entreprises des espagnols, moyens
de
compensations
sans mais
sur eux,
encore leur occupation de l'île était un o b s tacle aux communications entre quartiers, et à la défense contre les ennemis de l'exté rieur.
sions o c t r o y é e s aux années X , légales ? A - t - o n
pu
vendre
D o m i n g u e aux années X ,
XI
X I et X I I
sont-elles
ou c o n c é d e r et
X I I les
à
Saint-
biens
qui
d é p e n d a i e n t des é g l i s e s , m o n a s t è r e s , d e f o n d a t i o n s religieuses,
hospitalières,
même
d'émigrés,
sans loi ad hoc ou arrêté du premier
etc.
Consul ? A - t - o n
p u v e n d r e l é g a l e m e n t , q u o i q u e au profit d e l ' é t a t , des
maisons
d e ville
construites
par des
révoltés
sur des terreins appartenant à des f r a n ç a i s , ment
celle
d i t e Moyse
g é n é r a l Leclerc molir ! Elle
au
C a p , que
notam
le capitaine-
avait p o l i t i q u e m e n t o r d o n n é d e d é
fut d o n n é par à c o m p t e a u x
entrepre
neurs du s e r v i c e des subsistances m i l i t a i r e s .
(245) Cette vérité avait été sentie par
Dogeron
en 1665, lorsqu'il demanda à Louis
XIV,
de l'autoriser à faire la conquête entière de l ' î l e , répondant du succès sur sa tête. Pour avoir négligé c e projet d'une exécu tion f a c i l e , la France fut exposée, en 1688, à perdre ce quelle y possédait. Les
espagnols
réunis aux anglais, pillèrent et réduirent en cendres, en 1695, la ville du Cap. Elle fut e n suite fortuitement incendiée durant l'exercice de M. de Chatenoye.
L'hôtel du gouvernement
(c'était alors une b a r a q u e ) , fut seul pré servé ; ce qui d é t e r m i n a , contre le vœu g é n é r a l , de réédifier une ville meurtrière,
au
lieu de la bâtir à la P e t i t e - A n c e , c o m m e le desiraient les habitans du Cap. En 1 7 2 0 , un
commandant e s p a g n o l , se
jouant des menaces du
gouverneur-général
français, qui l'avait vainement sollicité d'in terposer son autorité contre les espagnols qui favorisaient l'émigration
des esclaves
ç a i s , lui écrivit « que s'il » invasion, » lieue,
il détruirait
plus
la partie
française,
dans
» ne le pourrait » pays soumis
faire
fran
le forçait
dans
en dévastant
à ses ordres.
à
une une qu'on
tout le
» Voilà le hic de
la politique du cabinet de Saint-James. Les établissemens français de l'ouest
et du
(246) sud,
étaient séparés de ceux du nord par l e
territoire espagnol. L'impossibilité où ils étaient de se secourir mutuellement, les exposait s é parément à l'invasion de l'Angleterre : on e n a eu la fatale expérience en l'an IV. Pour q u e les établissemens français pussent être liés e t se soutenir contre cet e n n e m i , en supposant que les espagnols garderaient la n e u t r a l i t é , il eût fallu que les limites fussent tirées e n ligne droite de Monte-Christe Neybe
à la baye d e
; mais ils fussent toujours restés o u
verts aux e s p a g n o l s , quelques places fortes qu'on eût pu bâtir dans l'intérieur. Durant les guerres de la France avec l ' A n gleterre,
les colons
étaient
constamment
livrés à eux-mêmes. Les périls étaient m u l t i pliés,
et s'opposaient aux
communications
avec la France. Les Anglais s'emparaient d e tous les parages de la c o l o n i e , et saisissaient les navires du c o m m e r c e . Il ne pouvait e x i s ter de communication avec la m é t r o p o l e , q u e pour une escadre supérieure à celle de l ' e n nemi. L'île étant entièrement occupée par
les
f r a n ç a i s , les communications avec la m é t r o pole sont beaucoup plus faciles. Les dangers pour les bâtimens du c o m m e r c e se trouvent diminués des trois quarts. Lorsque la c o l o n i e
( 2 4 7 )
se trouvera o r g a n i s é e , et mise sur le pied de g u e r r e , il faudra à l'ennemi deux fortes es c a d r e s , et il y aura toujours des ports libres. Les premiers français s'établirent au vieux dans la partie de l'est.
Cap Français,
Tout
prescrivait de s'y maintenir. D e la baye de à celle de Monte-Christe,
Samana dans
tous
les ports
de cette
qu'on
les
découvre.
Dès
sort
on les perd
de vue.
côte,
le jour
on
entre
le
jour
qu'on
en
L'ennemi n'y peut
préparer aucune ambuscade. Les parages de l'est sont à l'abord
des e u r o p é e n s , et les
voyages d'Europe fort abrégés. La baye de Samana tout
et
celle
de Monte-Christe,
ce qu'on peut desirer, pour
offrent l'arrivée
et la sûreté des vaisseaux de l'Etat. Il paraît inutile d'en
dire davantage, pour
prouver
l'utilité de la possession entière de la
co
lonie. A v e c des réglemens sages, et auxquels on tiendra la m a i n , la colonie ne manquera pas de viande de b o u c h e r i e , aussi belle et bonne elle
qu'à la Jamaïque. a toujours
été
aussi
Depuis deux siècles,
mauvaise à Saint-Do
mingue. Quant au numéraire,
il est de l'intérêt du
c o m m e r c e métropolitain, qu'il y en ait b e a u c o u p en circulation dans la c o l o n i e , s'il veut
(248) obtenir un grand et prompt débouché de s e s cargaisons. S'il continuait à l'exporter, le m a l retomberait sur lui. M a i s , d i r a - t - o n , la France en possédant toute l ' î l e , cultivera les vastes et plaines de l'est, au Cap Français,
à partir de
fertiles
Santo-Domingo
dans la partie
du
nord.
Les établissemens du sud et de l'ouest
seront
abandonnés
France,
par le commerce
de
c o m m e trop éloignés. Ces deux quartiers seront obligés de verser, par le cabotage, rées au Cap,
leurs d e n
et d'en tirer tout ce qu'ils a u
ront besoin. On répond : Il y a actuellement dans l'est de la c o l o n i e , vingt-deux
sucreries espagnoles. Toutes les
plaines le long de la côte sont fertiles ; mais les défrichemens ne peuvent se faire que p r o gressivement. Les besoins de la métropole , en denrées coloniales, pour sa consommation intérieure et son c o m m e r c e d'exportation ; l'obligation d'un débouché pour ses denrées et objets manufacturés, prescrivent de blir les anciens établissemens.
réta-
D'autre part,
pour rappeler les colons à S a i n t - D o m i n g u e , et profiter de leurs connaissances ; y
créer
Une nouvelle population blanche ; réunir l e s nègres
dans leurs ateliers respectifs
;
les
réattacher à la culture, et leur inspirer l'amour
(249) du t r a v a i l , par des bontés qu'ils ne peuvent espérer que d e leurs anciens maîtres. Depuis l o n g - t e m p s , le c o m m e r c e de France fréquente peu le sud et Y ouest,
parce que les
voyages des n a v i r e s , dans ces parties de la c o l o n i e , ont toujours eu u u e durée de deux et trois mois de plus q u e ceux allant, a u C a p , et que généralement les frais et les risques sont plus considérables. Sous le rapport politique et d e p r é v o y a n c e , tout c o m m a n d a i t à la France d'exiger la cession entière de l'île. D ' a b o r d par les considérations c i - d e s s u s d é d u i t e s ; et en second lieu pour lui a s s u r e r , dans tous les t e m p s , les m o y e n s d'a limenter, et dans la même proportion,
le c o m
national. Il est d e tradition
merce
immé
m o r i a l e , q u e la ville du Port-au-Prince
(1)
Port-au-Prince.
» fait
« D e s intérêts particuliers
malheureusement
choisir
le
de t e r r e ,
» fond
en c o m b l e .
arrivé
Un tremble-
en 1770, l a
C'était l e m o m e n t
détruisit d e du repentir.
» V a i n espoir ! L e s m a i s o n s p a r t i c u l i è r e s , » fices publics
les é d i -
o n t é t é r é t a b l i s . T o u t porte à c r o i r e
» q u e l a n o u v e l l e cité »
ont
Port-au-Prince
» p o u r la capitale d e S a i n t - D o m i n g u e . » ment
(1)
est assise
sur l a v o û t e
du
volcan. » Insensé
domingois,
» a l'intrépidité;
dors
donc,
puisque
tu e n
dors sur l a c o u c h e fragile et m i n c e
(250)
repose sur un volcan. On doit craindre que cette partie de l'île, ne soit menacée de grands
» qui
te sépare
d e l ' a b y m e de feu
qui b o u i l l o n n e
» sous ton c h e v e t . I g n o r e l e péril qui te
menace,
» puisque
tous
tes a l a r m e s
empoisonneraient
» instans d e ta v i e , et n e t e garantiraient
les
de r i e n .
» I g n o r e c o m b i e n ton e x i s t a n c e est p r é c a i r e ; i g n o r e » qu'elle
tient à la c h u t e fortuite
» l'infiltration
d'un r u i s s e a u , à
p e u t - ê t r e a v a n c é e d'une p e t i t e q u a n -
» tité des eaux qui l ' e n v i r o n n e n t , dans la c h a u d i è r e » souterraine à l a q u e l l e on a v o u l u q u e ton d o m i c i l e v servit d e c o u v e r c l e . S i » ta s t u p i d i t é ,
que
tu sortais un m o m e n t
deviendrais-tu ? T u
verrais
de la
» m o r t circuler sous tes p i e d s . L e bruit
sourd
» torrens
obséderait
du soufre
mis en
v ton oreille ; tu sentirais
expansion,
o s c i l l e r la c r o u t e
des
qui
te
» soutient. T u l'entendrait s'entr'ouvrir avec f r a c a s ; » tu t'élancerais d e ta m a i s o n ; T u courrerais é p e r d u » dans les r u e s ; tu croirais que l e s m u r s d e ton h a » bitation, que » vas
tes édifices s ' é b r a n l e n t ,
d e s c e n d r e au m i l i e u d e leurs
et q u e
tu
r u i n e s , dans l e
» gouffre c r e u s é , sinon p o u r t o i , du m o i n s p o u r t e s » infortunés d e s c e n d a n s . » sastre
La consommation
qui les a t t e n d , sera plus
» récit. M a i s
s'il
» g r a n d s forfaits ;
existe s'il
du
courte que
démon
u n e justice v e n g e r e s s e
est
des
enfers,
c'est-là,
de je
» l ' e s p è r e , qu'iront g é m i r dans l e s f l a m m e s , qui n e » s'éteindront p o i n t , les scélérats q u i , a v e u g l é s p a r » des
vues
d ' i n t é r ê t s , en ont i m p o s é
au t r ô n e , e t
(151) malheurs. Il appartient au gouvernement de se mettre en mesure pour l'avenir. Les f e r tiles plaines de l'est pourront dédommager la nation de la perte des denrées de l'ouest
et
du sud ; mais si le malheur prédit arrivait, un deuil éternel couvrirait la colonie.
De
la
société
des
amis
des
noirs.
culture
des denrées
coloniales
à
colonie
espagnole,
préjudiciable
La Cuba, à
la
France. DEPUIS cent cinquante a n s , toutes les vues de l'Angleterre tendaient à s'emparer du
com-
merce universel : elle masquait ses projets, en accusant la France de prétendre à
l'empire
universel; elle entretenait par ce m o y e n la discorde sur le continent, et portait les peuples à s'entre-tuer. Les anglais ne
veulent
pas
seulement être riches ; ils veulent être seuls riches. Ils cherchent à étendre leurs colonies
» d o n t l e s funestes
conseils
ont élevé le m o n u m e n t
» d'ignorance e t d e stupidité que tu h a b i t e s , et
qui
» n'a p e u t - ê t r e q u ' u n m o m e n t à d u r e r . » (Histoire
philos,
et politique
des
Deux
Indes).
(252) pour les rendre toutes indépendantes, l e u r population étant insuffisante pour garder e n souveraineté, même celles qu'ils possèdent. Louis
XIV
devait desirer la possession
entière de Saint-Domingue; la saine
poli
tique le commandait. Les anglais s'opposèrent, sous ce règne et les suivans, à une cession de la part de l'Espagne, afin d'avoir toujours dans cette île un auxiliaire à pouvoir f a i r e a g i r , selon que leurs intérêts le c o m m a n deraient. C'est par suite de cette politique a t r o c e , qu'un commandant espagnol, on le r é p è t e , osa ménacer, il y a quatre-vingts a n s ,
d'y
dévaster les établissemens français, en annon çant qu'il n'avait pas de représailles à. c r a i n d r e , d'après l'état inculte du pays soumis à ses ordres. C'est forcé par la même i n fluence
que les espagnols-domingois, e n v a
hissaient journellement une portion du terri toire, pour provoquer les français à des voies hostiles, et qu'ils donnaient asile aux esclaves. C'est également par suite de la politique m e r cantille des anglais, qu'en 1 7 9 1 , ces espagnols métis pnt fait cause c o m m u n e avec les r é v o l tés. Ils vendaient les colons aux n è g r e s , raiso
à
de cinq portugaises ( 2 1 0 f r . ) . En les
livrant, ils étaient égorgés sous leurs j e u x ,
(153)
La guerre de dévaster
de 1750, n'a eu pour
motif
que
Saint.-Domingue.
Quel avantage l'Angleterre a-t-elle pu faire entrevoir à l'Espagne, en 1790, pour la d é terminer, contre son intérêt, à entrer dans la coalition ? D e remplacer la France dans les marchés de l'Europe, par la culture des den rées coloniales à Porto-Rico,
à Cuba,
etc.
Sous cet espoir trompeur, l'Espagne perdit de vue l'intégrité de son e m p i r e , et ne c o m prit pas qu'une révolution commerciale, i n verse aux intérêts de la F r a n c e , en faisant perdre à cette dernière sa puissance maritime, livrait la nation espagnole à la discrétion des anglais, qui la révolutionneraient à son tour avec d'autant plus de facilité, qu'elle se trou verait privée de son alliée naturelle, q u i , pour rétablir la balance en E u r o p e , pourrait être obligée de pénétrer jusqu'au centre de ses états sur le continent. C'est ce qui est arrivé. Les circonstances le
commandèrent,
pour éclairer les espagnols sur leurs véritables intérêts; et en représaille du massacre général qu'ils firent des colons au Fort-Dauphin. L'Angleterre conduisit sourdement sa poli tique mercantille : elle précipita les français dans les controverses de toutes espèces, en profitant de leur caractère naturellement en-
(254)
clin aux nouveautés. Les économistes
entraî
nèrent, de 1770 à 1 7 8 9 , leurs compatriotes à approfondir la plus grande des questions d'état. Ils soutinrent que la prospérité de la F r a n c e , était indépendante de la possession des c o l o nies à sucre, et qu'elle dépendait uniquement de la culture des denrées et des m a n u f a c tures nationales.
Leur système était dans l e s
vues de l'Angleterre; il a amené la d é p o p u l a tion en E u r o p e , il a livré le commerce-général aux anglais. Ces discussions étaient trop sérieuses, p o u r captiver long-temps les français ; mais elles les avaient conduits à considérer si on était bien ou mal gouverné. L'Angleterre fit faire diversion. Pour égayer les français, et les étourdir sur les dangers
que présentait le
gouffre qu'elle avait ouvert sous leurs p a s , parurent les enchanteurs Cagliostro mer,
et
Mes-
qui firent tourner toutes les têtes. V i n
rent ensuite les voyages en Angleterre, p o u r lesquels les hommes
de cour
raffolèrent. Ils
n'y apprirent, pour se servir de l'énergique e x pression de Louis chevaux. ture, jockey,
XV,
qu'à penser
Ils annoncèrent leur
en adoptant
les
destinée f u
pour eux la livrée
signe d'abnégation d'eux-mêmes
de leur patrie. Parut,
disparut,
revint
des et et
(255) disparut
encore
M.
donna l ' i m p u l s i o n .
Il
Necker Trop
prévenu de
lui-
m ê m e , il était dans la ferme persuasion qu'il n'avait qu'à se montrer,
pour réattacher
à
son char les néophytes-philosophes, à qui il avait ouvert une carrière C'est à cette m ê m e é p o q u e , que le roi d'Angleterre offrit à celui d'Espagne de lui fournir les nègres que pourrait exiger la c u l ture des denrées coloniales, dans ses domaines d'Amérique. C e traité précéda la révolution française. L'Angleterre obtint, d'une part, de l'exécution de cette convention, le numéraire qui lui manquait pour mettre en France ses projets en m o u v e m e n t ; d'autre part, elle introduisait à Cuba, cent cinquante mille nègres f é r o c e s , dans la ferme croyance que c e n o m bre
( 1 ) , joint à ceux de
Saint-Domingue
qu'elle était certaine de faire révolter, offri rait assez de force pour assurer leur indé pendance, et priver la France et l'Espagne de leurs colonies. L'aveuglement de l'Espagne à cette é p o q u e , sera toujours une é n i g m e , lorsqu'on considé rera que peu d'années avant la signature du traité précité, elle avait été à la veille de (1)
Il
n ' e x i s t a i t à Cuba,
en
1776,
e s c l a v e s . I l y e n a a c t u e l l e m e n t 200
q u e 44 mille.
mille
(256) perdre ses possessions au M e x i q u e , par
les
prêches des amis des noirs (1) d e la N o u v e l l e
(1) L e s q u a k e r s prirent naissance e n A n g l e t e r r e , au 1 7 m e . s i è c l e . George
Fox
e n fut l e c h e f
et l'instituteur.
sectateurs le qualifièrent d e grand-apôtre, rieux
instrument
Fell,
dans la main
Les
et de
de Dieu.
glo-
Marguerite
son é p o u s e , était u n e d e s plus c é l è b r e s
de l a
secte. George ciel
Fox
s'érigea
pour r é f o r m e r
en prédicateur
les h o m m e s .
envoyé du
I l réduisit
toute
l a r e l i g i o n à la charité m u t u e l l e , à l ' a m o u r d e D i e u , et à une observation attentive ternes et secrets de l'esprit. l e fixa sans
des m o u v e m e n s i n A l ' é g a r d du c u l t e ,
cérémonies ni appareil. T o u t
e n un silence triste
il
consiste
et r e l i g i e u x , en attendant q u e
l'effusion d u S a i n t - E s p r i t l e s e x c i t e à p a r l e r . B e a u c o u p d e m o d e s t i e dans l e s v ê t e m e n s , e t u n e f r u g a l i t é e x e m p l a i r e sur l e s t a b l e s . L e s q u a k e r s n e r e c o n naissent raine, titres
point
la validité
e t refusent d'honneur
d e la p u i s s a n c e
souve
de donner aux magistrats l e s
qui leur
appartiennent.
t e n d e n t q u e tout doit être en commun; n e p e u t ê t r e a p p e l é maître.
Ils p r é
que personne
Ils bannissent toute c é
r é m o n i e d e la s o c i é t é , j u s q u ' à c e l l e d e se saluer l e s uns les a u t r e s , tout le La
e n ôtant l e u r c h a p e a u . Ils
tutoyent
monde. débonnaireté,
la simplicité,
les m a n i è r e s ,
l a c o m m u n i c a t i o n des r i c h e s s e s e t l a p u r e t é
exté-
Angleterre.
(257) Angleterre.
Elle
qu'au tribunal cette f o i s ,
ne
dut leur
conservation
de l'inquisition,
qui,
pour
eut le b o n esprit d e voir dans c e s
révolutionnaires,
d e s sectaires
assassins
et
f a n a t i q u e s , q u i , sous la perfide a p p a r e n c e d e l'amour de Dieu
et des hommes,
d e la c h a r i t é
et de l'égalité n a t u r e l l e , personne n e p o u v a n t , d'après eux, être appelé maître
(1),
cherchaient
à porter les h o m m e s à s'entr'égorger, en m ê m e t e m p s qu'ils c o n d a m n a i e n t la guerre
comme
r i e u r e des q u a k e r s c a p t è r e n t , au 17me. s i è c l e , l'affec tion et l ' a d m i r a t i o n du p e u p l e e n A n g l e t e r r e ; m a i s l e s gens sages s'en d é f i è r e n t . Les quakers, noirs et les philantropes,
p a r l'uniformité
qu'une,
les amis des
sont trois s e c t e s qui n'en font des principes.
( 1 ) A p r è s l a m a n i f e s t a t i o n d e s p r i n c i p e s des amis des noirs,
l e s n è g r e s refusèrent a u x c o l o n s l a q u a l i
fication d e maître. mon bourgeois.
Ils la remplacèrent par celle d e
I l s fut un t e m p s
où ils d i r e n t ,
et le
d i s e n t s û r e m e n t e n c o r e à p r é s e n t : « blan cé nègre ; nègre
cé blan.
blancs
( l e s nègres
sont
l e s m a î t r e s , et l e s
les e s c l a v e s ) . L e s quakers
Nouvelle-Angleterre compatriotes
du nord
de la
s u b o r n e n t l e s n è g r e s d e leurs
méridionaux,
l i b e r t é ; ils l e u r facilitent L o r s q u ' i l s les o n t e n l e u r
en leur promettant l a les m o y e n s de déserter. p u i s s a n c e , ils l e s o b l i
g e n t à t r a v a i l l e r ; ils les i n d e m n i s e n t d e l e u r l a b e u r en l e s qualifiant d e leur enfant.
R
( 2 5 8 )
une fureur plus propre aux bêtes sauvages qu'aux h o m m e s . Ils prêchent la pour faire naître la licence religion
tolérance
et détruire
la
Catholique.
La secte des quakers ou des amis des
noirs,
dut sa naissance au désordre qui eut lieu en Angleterre dans le 1 7 Charles
m e
. siècle. Elle conduisit
I . à 1 échafaud. e r
Cromwel
( l e Robespierre
de l ' A n g l e t e r r e ) ,
après avoir profité des principes de cette secte pour renverser le trône, la livra à la risée populaire. Il la fit ridiculiser sur les théâtres de L o n d r e s , et fit enfermer c o m m e Fox
foux,
et sa f e m m e .
Charles I I , après son avénement au t r ô n e , jugea qu'il était dangereux de laisser subsister les quakers
dans la Grande-Bretagne. Il fit
transporter à la Nouvelle-Angleterre, ces h o m mes antisociaux, qui ne reconnaissaient
pas
l'autorité souveraine, et osaient traiter a v e c mépris les magistrats. Les successeurs de ce monarque, perdirent de v u e , sous le rapport de la conservation de leurs
provinces
pernicieux qui
d'Amérique, devaient
les
amener,
principes avec
le
t e m p s , l'indépendance de l a N o u v e l l e - A n g l e t e r r e , du moment que Guillaume
Pen
eut,
en 1666, constitué ses frères quakers en c o r p s
(259) de nation, et se fit déclarer le c h e f de la secte ; mais les rois d'Angleterre les proté gèrent
comme
propagandistes
nécessaires
contre tous les souverains et leurs sujets. Le synode
général
fut établi à Londres. C'est
dans ce club sanguinaire que se conçoivent les projets révolutionnaires, et les plans des machines infernales que les néophytes mettent à exécution. La Nouvelle
Angleterre
fut e l l e - m ê m e , en
1779 et 1780, à la veille d'être victime des principes de ses amis des n o i r s , et de r e t o m ber sous la domination
de leur
ancienne
marâtre, dont la tyrannie l'avait forcée de se séparer. Les quakers influencés et conduits au crime par le cabinet de Saint-James, firent usage de leurs principes contre leurs c o m p a triotes méridionaux, pour faire soulever leurs nègres, dans l'espoir de faire naître la guerre c i v i l e , et faire recouvrer à l'Angleterre, l'au torité qu'elle y avait perdue par sa faute. L e gouvernement fédératif dans ce p a y s , a été déterminé
d'après
la manifestation de ces
principes anti-sociaux, afin que chaque p r o vince pût, en particulier, assurer sa sûreté contre les ennemis intérieurs. L'Angleterre, c o m m e on voit, ne ménagea pas davantage ses enfans émancipés, qu'elle n'a ménagé la R a
(260) France. Dans sa politique, les crimes sont des vertus. Doit-on être étonné que les provinces du nord des Etats-Unis
(occupées
par les
q u a k e r s ) , favorisent de tous leurs moyens les révoltés de Saint-Domingue, et qu'ils desirent fédérer avec eux ? La France eut aussi ses quakers.
Eh! quels
quakers, grand Dieu ! président de la société des amis
Pétion,
des n o i r s , et l'un des membres du parti la majorité
de
de l'Assemblée nationale, s'écria,
à la suite d'une de ses extases : « » les colonies, » les principes
Périssent
plutôt que de tergiverser
avec
! » Il fut applaudi. C o m m e n t
une grande partie de la nation n'eût-elle pas été subjuguée ? Cette société infernale c o m p tait au nombre de ses furies, des ducs,
des
des barons et des
che-
marquis,
des comtes,
valiers,
de la classe de, ceux qu'on appelait
alors des grands;
mais qui n'étaient vérita
blement que des g r a n d s . . . . nigrophiles. c u r é s , des évêques Le cri de mort de Pétion,
des
! contre les c o l o n s ,
eut son entier effet ; mais le c i e l , en le c o n damnant à mourir de f a i m , et à être la pâture des oiseaux de proie dans les landes de deaux,
vengea l'humanité. Ailleurs
Bor-
( 1 6 1 )
un
fou
L e respect
commande le
silence. Le capitaine-général Leclerc arrêta, à SaintD o m i n g u e , le cours des assassinats ; mais u n autre Pétion, le mulâtre
en se révol
Pétion,
tant en vendémiaire an X I , contre son bien faiteur, fit renouveler les massacres que D e s salines termina. Malgré que l'expérience eût dû convaincre l'Espagne des perfides intentions de l ' A n g l e terre, elle permit de nouveau, il y a deux a n s , au c o m m e r c e étranger; c'est-à-dire, aux anglais et aux anglo-américains, d'introduire des nègres dans ses possessions du Nouveau M o n d e . Elle paralysa à Cuba. l'autorité d u tribunal de l'inquisition, qui y
(tout
était
odieux qu'il est à mes y e u x ) une institution politique nécessaire pour assurer la tranquil lité, à défaut de troupes; et qui, maintenue dans toute sa f o r c e , offrait une barrière insur montable aux amis des noirs,
par la crainte
de figurer dans les auto-da-fés,
q u i , dans ces
circonstances, cessaient d e faire horreur. L'Espagne et le Portugal, considérés sommateurs,
possédaient les mines d'or
d'argent pour l'avantage
de tous les
L'Europe devait espérer que
conet
peuples.
cet ordre
de
choses serait immuable. La faible population
(262) de ces deux puissances, paraissait devoir o b l i ger les espagnols et les portugais, à borner leurs vues à la conservation des
richesses
métalliques. Le
Brésil
fournit au Portugal, l ' o r ,
l'ar
g e n t , les diamans, le s u c r e , le c a f é , le c o t o n , l ' i n d i g o , le c a c a o , le tabac, les bois de tein ture, de marquetterie et de construction ; l a canelle fine. L'huile de baleine y offre aussi de grands avantages. Serait-ce une absurdité de dire que le de Portugal ne peut prendre racine
trône qu'au
Bresil ! La durée de la puissance portugaise en Europe est incertaine. Au Bresil,
elle
ferait contre-poids dans l'Amérique, et p r é viendrait l'indépendance générale qu'y sus citent les anglais et les
anglo-américains,
pour s'emparer du c o m m e r c e , et de
l'or,
signe représentatif de toutes choses.
L'Es
pagne trouverait en Europe la compensation de ce qu'elle serait exposée de perdre dans le Nouveau M o n d e . Le Mexique
offre à l'Espagne, avec l'or et
l'argent, du s u c r e , du c a f é , du c o t o n ,
de
l ' i n d i g o , le c a c a o , la v a n i l l e , la c o c h e n i l l e , le r o c o u , le c a m p ê c h e , du c a r m i n , le j a l a p , la salse-pareille ,1e bois de g a y a c , des b a u m e s , le s a n g - d e - d r a g o n , etc.
(263) N ' e s t - c e pas assez pour l'Espagne ? F a u t - i l , lorsqu'elle peut
satisfaire aux
besoins d e sa
c o n s o m m a t i o n , qu'elle ruine e n c o r e , par u n e surabondance d e denrées c o l o n i a l e s , le c o m m e r c e des autre p e u p l e s , et qu'elle altère leur puissance ? L a culture des denrées coloniales se p o u s s e , à Cuba, avec la plus grande activité : elle y est m ê m e forcée. Les ateliers
n e sont
com
posés que de nègres ; les négresses sont e m ployées dans l'intérieur des cases. L e sejour des français à Cuba,
a devancé de plus d'un
siècle les travaux qu'eussent faits les espagnols. Si l'Espagne peut a u g m e n t e r la culture des denrées besoins
coloniales, comme
s u r a b o n d a m m e n t à ses
consommateur,
lorsque la
France s'en trouve privée pour son c o m m e r c e d'exportation,
et pour sa c o n s o m m a t i o n , la
balance commerciale est rompue. N o n - s e u l e m e n t l'Espagne se trouverait pos sesseur de m i n e s abondantes d'or et d'argent ; mais elle serait encore à m ê m e ,
pouvant s e
passer d e toutes les n a t i o n s , par l a fertilité de son territoire, si les espagnols recouvraient leur ancienne a c t i v i t é , de retirer, par la vente des
denrées c o l o n i a l e s , la majeure partie d u
numéraire en circulation e n E u r o p e , et par celle de ses matières premières, supérieures à
(264) celles des autres peuples ; les laines, par e x e m ple. N'y aurait-il que le bas prix auquel t o m beraient les denrées
coloniales, par la s u r a
b o n d a n c e , que ce serait de la part d e l ' E s p a g n e , porter un coup mortel ait c o m m e r c e de F r a n c e , q u e cette dernière doit prévenir en exigeant des
compensations
m a g e r . Le bas prix
qui puissent la
dédom
d e s denrées coloniales p o r
terait obstacle au débouché à S t . - D o m i n g u e , des productions de la France, et s'opposeroit a u rétablissement de la culture dans cette c o l o n i e . Ces considérations acquièrent un degré d e force q u e rien ne peut altérer, lorsqu'on est pénétré q u e les besoins
de l ' é t r a n g e r , d e s
produits du territoire et des manufactures d e F r a n c e , sont en E u r o p e , bornés à u n e c o n sommation
volontaire,
et qu'il
est constant
que la France n é peut s'acquitter
entièrement
pour les matières premières qui lui m a n q u e n t et ses dépenses extérieures, si elle ne possède des denrées coloniales
en sus d e c e q u i e s t
nécessaire à sa c o n s o m m a t i o n . C e n'est pas l'activité industrielle des espa gnols originaires de Cuba, ni celle de ceux de l a partie espagnole de St.-Domingue,
qui y d o r
mirent jusqu'à l'époque de leur
installation
dans la première î l e , qui soit à redouter. L e u r
apathie résultant du mélange
continuel de
(265)
leur sang avec celui africain, rassure contre tout élan susceptible d'entraîner à de grandes
choses.
Les espagnols-domingois
n'étaient
parvenus en deux s i è c l e s , qu'à établir v i n g t deux
sucreries, quoique jouissant d u sol le
plus fertile.
qu'on
Ce sont les colons franco-domingois a contraints de prendre
possession à
Cuba,
qu'il convient d'assurer à leur patrie par des
secours. Cette île e s t , par les français qui y sont réfugiés, à l'abri de toute entreprise de la part des anglais ( 1 ) .
(1)
Le
Pitt
du jour,
malgré
que la
France
ait
acquis le double de force par la révolution, a les mêmes principes du fanatique Pitt,
et farouche
Guillaume
qui, en 1 7 5 5 , disait que « la modération
n'é-
» tait qu'un mot inventé pour dérober la faiblesse » et l'indolence ; que les empires doivent vouloir » tout ce qu'ils peuvent ; que l'on devait acheter » la victoire par l'argent, et non conserver l'argent » aux dépens de la victoire. La puissance anglaise, » disait-il, fondée sur un commerce qu'elle pouvait » et devait perdre, était peu de chose en compa» raison de la puissance de sa rivale, que la nature, » l'art, les événemens, avaient élevée à un degré de » force qui, sous d'heureuses administrations, avait » fait trembler l'Europe entière. Qu'il fallait dé» pouiller les français de leurs colonies, et les ré-
(266) Depuis quinze ans, les malheurs de SaintDomingue ont obligé beaucoup de colons d e »
duire à la condition
»
ou m o i n s p r o m p t
»
toutes
»
semens.
que l'affranchissement
du N o u v e a u M o n d e ,
les nations
qui y
ont f o r m é
plus
remènera
des
élablis-
»
Guillaume Pitt ne d é m e n t i t pas ses p r i n c i p e s ; il fit attaquer la Guadeloupe. pu
vaincre
elles
les
L e s troupes anglaises
c o l o n s , elles agirent
dévastèrent
et incendièrent
n'ayant
en b r i g a n d s :
nombre
d'habitations.
A l o r s ces c o l o n s m i r e n t bas les a r m e s . La
Martinique
et les autres c o l o n i e s a d j a ç a n t e s , se r e n d i r e n t
sans
o p p o s i t i o n , p o u r n e pas é p r o u v e r l e sort de l a
Gua
deloupe. L ' E s p a g n e c r a i g n a n t q u e l'incendie g a g n â t ses c o l o n i e s , fit d e s d é m a r c h e s auprès du c a b i n e t de S . - J a m e s . Le farouche
Guillaume
vos propositions main,
quand
Pitt
«J'écouterai
répondit:
vous aurez emporté,
la tour de Londres.
l'épèe
ce qu'il c o n v e n a i t d e f a i r e . L ' î l e e s p a g n o l e de fut. attaquée et p r i s e . Saint-Domingue é p o q u e dévastée le
cours
des
incendies avaient
et incendiée,
massacres,
politiques
fait
de
dévastations
l'Angleterre.
arborer
d e la G r a n d e - B r e t a g n e .
L e s colons
quoique
mois
p a i n , de
depuis
quinze
Les
ils
s'y
arrêté et
des
anglais
domingois leurs
si on v o u l a i t
Cuba
eût é t é à c e t t e
si la paix n ' e û t des
pressentir aux
tions f a v o r a b l e s ,
à la
» C'était au m o i n s i n d i q u e r
inten
le pavillon refusèrent,
fussent
v i n , d ' h u i l e , d e c h a n d e l l e s , et
m e n t de toutes e s p è c e s d e c o m m e s t i b l e s .
privés d e générale
(267)
se naturaliser à Cuba. O n porte leur n o m b r e à plus de vingt m i l l e . L e gouvernement
espa
g n o l , en encourageant la culture dans
cette
île,
y fait disparaître s u c c e s s i v e m e n t les s é
vérités r e l i g i e u s e s , q u i , de tout t e m p s , éloi gnèrent les français d e vivre sous la bannière espagnole. Les colons franco-domingois
sont
des h o m m e s précieux perclus pour la F r a n c e , si on n ' y pourvoie efficacement. Q u ' o n y fasse a t t e n t i o n ; leur naturalisation à C u b a fera plus
de mal à la France que la révocation de l'édit de
Nantes,
augmente
che à Cuba assurer
à moins,
Leur
nombre
suffisamment la population
blan
( l ' E s p a g n e n e p e u t , parla s i e n n e ,
la sûreté
de c e l l e
î l e ) , contre les
entreprises des anglo-blancs et noirs. Les espagnols ne continueraient ils d ' e m p l o y e r ces colons qu'en qualité de g é r a n s , d e rafineurs et d ' é c o n o m e s , les vues politiques d u cabinet de M a d r i d , et surtout de celui de S a i n t - J a m e s , se trouveraient
r e m p l i e s , lors m ê m e
français seraient obligés
d'évacuer
q u e les Je p a y s ,
ainsi que cela leur arrive a. la J a m a ï q u e , après avoir m i s la culture dans le cas d e prospérer. L a culture
étant établie à Cuba, et s'y t r o u
vant des sujets espagnols formés par les f r a n çais,
l ' E s p a g n e , m a l g r é la g u e r r e ,
à desirer.
n'a rien
(268) L'état actuel de la culture à la J a m a ï q u e , est dû aux colons d e S a i n t - D o m i n g u e , q u e l e m a l h e u r réduisit
en l'an I V d'accepter d e s
anglais, des places de gérans, de rafineurs e t d ' é c o n o m e s . Ils ont nui à leur p a t r i e , ils sont payés d'ingratitude par les anglais. L e cabinet
de Saint-James
sur l'abolition
de la traite
session en session,
ne
s'acharne
des nègres,
de
que parce qui'il ne p e u t
se dissimuler que le sang qu'il a fait
couler
à S a i n t - D o m i n g u e , r e t o m b e sur la nation a n glaise. L e s discussions au parlement sur cet o b j e t , n'ont d'autres motifs que de porter la F r a n c e à quelques m e s u r e s ,
entravant,
dans
cette c o l o n i e , l'industrie nationale. L e s anglais voient,
mais trop tard peut-être
q u e la manifestation destructive
pour e u x ,
d e leurs
principes est
d e leur c o m m e r c e
de l ' I n d e , e t
les expose à être privés du numéraire q u e l e u r procure Ja vente des denrées coloniales, échouent
dans
leur
projet
s'ils
d'indépendance
générale des colonies. L a population anglaise est trop f a i b l e , pour obliger des nègres o u esclaves
à travailler,
libres
lorsque ceux de l a
France seront libres , mais obligés de s e livrer à la culture.
L a France
est la seule
nation
c o m m e r ç a n t e q u i , par sa population, puisse obliger les nègres
à travailler,
d après l e s
(269) idées liberticides
que les anglais leur ont
suggérées. Le c o m m e r c e de la F r a n c e , de 4'Espagne et de la H o l l a n d e , se trouvant intercepté dans les Antilles, les denrées coloniales que les neutres introduisent en Europe sont toutes propriétés achetant
D'autre part, les
anglo-
les suédois et les danois,
e u en
anglaises.
américains,
à S a i n t - D o m i n g u e , fortifient
les
nègres et les mulâtres dans la rebellion, en satisfaisant à leurs besoins de toutes espèces. A i n s i , soit que les neutres achètent les den rées coloniales à S a i n t - D o m i n g u e , en A n g l e terre, ou q u e l e s anglais les colportent dans les ports neutres,
celles
qui arrivent en France
sont dans le cas de la saisie. O n ne peut pas préjuger que les denrées coloniales qu on introduit en F r a n c e , p r o viennent de la Guadeloupe, nique,
de la
Marti-
de Cuba, etc. ; puisque ces colonies
sont presque toujours bloquées par les anglais. Les visites que les neutres souffrent, contre le droit des g e n s , à leurs b o r d s , ne permettent p a s , par e u x , l'expédition des propriétés fran çaises et espagnoles.
Les
anglais ont pré
f é r é s , par politique, incendier les denrées c o loniales qui étaient entreposées à
St.-Thomas,
à les confisquer à bord des neutres ; ils ne
( 2 7 0 )
pourront jamais pallier l'odieux d'avoir
in
cendié une ville e n t i è r e , quel que soit
le
point de vue sous lequel on considère l e u r action atroce. Cette perte porte plus sur l e s neutres que sur la France et l'Espagne. Il conviendrait de faire le recensement d e toutes les denrées coloniales qui se trouvent en France. Cette mesure pourrait fixer les r é solutions du gouvernement, soit pour y
bor
ner la consommation jusqu'à la p a i x ,
soit
pour
n'en
échange
recevoir
des
neutres que par
réel d'objets du cru et des m a n u f a c
tures de France. La consommation
des danrées coloniales
s'élevait, en 1 7 8 9 , à 7 0 millions de livres t o u r n o i s , elles'est considérablement accrue depuis quinze a n s , indépendamment de l ' a u g m e n tation d'un cinquième, résultant de la réunion de la Belgique à la France. Leur valeur a presque tiercé. Les développemens sont inu tiles pour apprécier les conséquences. Si lés anglais ne trouvaient pas le d é b o u ché des denrées c o l o n i a l e s , ils ne pourraient satisfaire aux dépenses de leur marine m i l i t a i r e , ni à la solde de leurs troupes. Le n u méraire est le nerf de la guerre. L'exporta tion hors de la F r a n c e , serait toute entière à leur avantage. Ils ne feront la paix q u e
(271) lorsqu'au milieu
d e leurs
marchandises, ils
seront réduits a u sort d e Tantale
au milieu
des eaux. L'Angleterre s'était flattée,
e n fomentant
une révolution en F r a n c e , en saisissant par t r a hison ses vaisseaux d e g u e r r e , e n faisant r é volter les nègres à
Saint-Domingue,
et en
coalisant tous les peuples contre les français, d e faire morceler le r o y a u m e , o u l e r é d u i r e , par des principes
fédératifs,
à ne
pouvoir
s'opposer à c e quelle fît seule le c o m m e r c e . La France
a été précipitée
dans le c a h o s ,
m a i s elle est sortie d e la révolution plus forte, et t o u t e
rayonnante
offre le trident.
d e gloire. Neptune
Napoléon
pour le briser.
L e s Anglais
en
C'est pour eux le présage qu'ils sort des Cartaginois.
lui
n e l'acceptera q u e rugissent.
subiront le
Il ont v a i n e m e n t espéré
l'éviter en anéantissant la m a r i n e française ( 1 ) .
(1) L ' a n é a n t i s s e m e n t d e la m a r i n e française a é t é d e tout t e m p s l e v œ u l e plus a r d e n t d e s a n g l a i s . Louis sante,
XIV
ruina
sa m a r i n e m i l i t a i r e encore
p a r l e c o m b a t de la
S o u s l e r è g n e de Louis XV, aussitôt d é t r u i t e fit t o u r n e r (rivière
nais-
Hogues. la m a r i n e r o y a l e
était
q u e r e l e v é e . L e c o m b a t du Croisic
la proue
des vaisseaux
de la V i l a i n e ) .
à l'eau
douce
(272) La détermination qu'ont prise les Anglais, de se maintenir en guerre Malgré fusiller
que l e cabinet
l'amiral
Bing,
perpétuelle,
prouve
de Saint-James
eût fait
pour
électriser l e s officiers
d e la m a r i n e a n g l a i s e , c e l l e de F r a n c e était p a r v e n u e , sous l e règne de Louis XVI ( e n 1 7 7 8 , é p o q u e d e l a guerre d ' A m é r i q u e ) , au plus haut d e g r é d e p u i s sance. A p r è s cent ans d e r e v e r s et d e d é f a i t e s , elle la fière Albion,
fit t r e m b l e r
qui jura
de se venger
par l e c r i m e . M a i s , sous c e m ê m e r è g n e , l ' i n s u b o r dination h a b i t u e l l e . . . . q u e l q u e s officiers supérieurs à O u e s s a n t , a u x A n t i l l e s . . . A u x A n t i l l e s , les a m i r a u x Hood
et Rodenay,
réfugiés avec leurs e s c a d r e s , é t a i e n t
p a r l e u r position forcés d e l i v r e r leurs v a i s s e a u x au comte
de Grasse,
ou d e les b r û l e r . O n eut la g r a n d e u r
d ' â m e d e lui laisser la faculté d e r e p r e n d r e la m e r . R o d e n a y fut v a i n q u e u r ; l e v i c e - a m i r a l français a y a n t été
abandonné
détruite.
Les
érigèrent,
à Rodenay,
A l'époque l'amiral
fut fait
prisonnier,
jamaïcains,
par
l'escadre
dans l e u r î l e , u n e statue.
d e la déclaration
Rodenay
et
reconnaissance,
était
l ' E v ê q u e , pour dettes.
de celte
détenu à P a r i s , L e maréchal
a c q u i t t a , e t lui rendit la l i b e r t é . Rodenay,
guerre, au
Fort-
de Biron
les
en a r r i v a n t
en A n g l e t e r r e , eut l e c o m m a n d e m e n t de l'escadre destinée p o u r l e s A n t i l l e s . L e s anglais n e sont p a s imitateurs
d'actions
Saint-James a oublié sonnier
magnanimes.
L e cabinet d e
que. l e lord Cornwalls
e n A m é r i q u e , et q u e l e m a r é c h a l
cbambeau le renvoya
en Angleterre
fut p r i de R o -
sans é c h a n g e .
qu'ils
(283) qu'ils sont un fléau pour le genre h u m a i n , ne p o u v a n t , de leur a v e u , que par la
Durant
la
révolution,
F r a n c e , par trahison, assassinèrent
les
les
20
anglais
vaisseaux
officiers
de
la
des-
saisirent
en
d e g u e r r e . Ils
marine
Royale à
Quiberon. A Aboukir, que
le
la F r a n c e
commandant
général
perdit une e s c a d r e ,
n'exécuta
BONAPARTE. Il était
pas
les
parce
ordres
cependant
du
généralis
s i m e , a v e c une a u t o r i t é é g a l e à c e l l e du D i r e c t o i r e . L e s m a t e l o t s n e se f o r m e n t pas en u n e c a m p a g n e , comme
les
comme
ceux de terre.
soldats,
ni l e s officiers Il
faut
plus
de
la
que
marine
d e la b r a
v o u r e e t d e l ' a u d a c e a u x officiers d e l a m a r i n e ; b e a u coup de anglais
connaissances et l ' a m o u r évitent
le
combat
d e la p a t r i e . L e s
aussi l o n g - t e m p s
qu'ils
n ' o n t pas l e v e n t p o u r e u x : v a i s s e a u à v a i s s e a u ,
ils
Commander une
ne p e u v e n t résister aux
français.
e s c a d r e , e t surtout u n e
forte e s c a d r e , n'a pas t o u
jours
triomphe pour
été
en F r a n c e u n
commandait. mence
par
En Angleterre, être
mousse.
le
Toutes
fils les
le chef qui
d'un
duc
com
fonctions
sont
h o n o r a b l e s à b o r d d e s v a i s s e a u x a n g l a i s ; la s u b o r d i n a t i o n y est a b s o l u e , et la p o l i c e t r è s - s é v è r e . D a n s la guerre glais encore
tendent
à
naissante,
versel,
a c t u e l l e , toutes les v u e s détruire pour
la
marine
s'assurer le
commerce
soit qu'ils m u l t i p l i e n t l e u r s c o l o n i e s
r e n d e n t toutes
indépendantes.
des an
française,
Jusqu'à
uni
ou l e s
présent,
S
ils
(284) prolonger leur existance politique.
fraction,
Leur résolution sanguinaire est une suite de la conviction qu'ils ont acquise, par les exploits du capitaine-général L e c l e r c , que les nègres ne peuvent se soustraire à la domination de la F r a n c e , dès l'instant de la paix en Europe. La guerre actuelle ne paraît exister que contre la France ; mais elle se poursuit contre tous les peuples de la terre. Les fous rien.
« Le
desir
des
ne
respectent dit l'abbé
anglais,
» Raynal, de rendre leur commerce » leur
a fait
» tices,
commettre
exclusif,
de grandes
injus-
et les met dans la cruelle
» de les continuer. » ront-elles
Les nations
ne se
jamais
de cette espèce
» nie qui les brave
et les avilit f
» ront t-elles
éternellement
un
nécessité de
lassetyran-
Supportetel
despo-
» tisme ? » La richesse qu'en
belle
riaux
sont
chez les Anglais montre.
nuls. Quant au n u m é r a i r e , ils
n e p a r a i s s e n t pas île
par l e s
ne consiste
Leurs revenus territo
c r a i n d r e u n e d e s c e n t e dans l e u r
e s c a d r e s françaises ; m a i s ils r e d o u t e n t
b e a u c o u p les péniches
; ils t r e m b l e n t q u ' u n calme
ne
l e s c o n d u i s e sur l e u r s c ô t e s a v e c 200 m i l l e h o m m e s , p o u r e n l e v e r , l ' é p é e à l a m a i n , la tour d e L o n d r e s , d'après le défit d e Guillaume
Pitt,
en
1755,
(285) sont dans une telle p é n u r i e , qu'ils ne p e u vent
retirer
lions
de
de
la c i r c u l a t i o n ,
f r a n c s , de
et cinquante pauvreté.
mil
quarante
signe de la plus évidente
sols, Ils
5oo
billets de
sont
réduits
à
augmenter
journellement le nombre de ces billets
de
misère. Il y a un d e m i - s i è c l e , que les anglais sont convenus q u e , s'ils agissaient avec
loyauté
envers la France, l ' A n g l e t e r r e n'aurait comme
puissance,
d'existence
vingt - quatre
pas, heures
(1).
Les Anglais ne suivent plus que les projets d'une tête en délire. Ils veulent multiplier les calamités ; ils se constituent en guerre pétuelle
per-
au d e h o r s , sans considérer qu'elle
est fixée dans l'intérieur de leur
île.
Déjà
l'aigle plane vers leurs rivages, et n'attend que le m o m e n t propice pour saisir sa proie.
(1) E x p r e s s i o n s d e Guillaume
D e I ' I m p r i m e r i e de
LEROUGE
m e r c e , Passage de
Pitt.
j e u n e , Cour du C o m Rouan.
№ .
ETAT
i .
P R O D U I T
g é n é r a l des D é p e n s e s nécessaires p e n d a n t les treize a n n é e s q u i s u i v r o n t la r e p r i s e
de l a C u l t u r e ; d u p r o d u i t p r é s u m é vente
des R é c o l t e s ,
durant
le m ê m e
laps
p r é s u m é des r é -
de t e m p s , par
T
O
T
A
L
col tes des treize
en France.
DE L A A N N É E S .
des D é p e n s e s ,
D É S I G N A T I O N
Frais g é n é r a u x
d'exploitation,
Réédification Frêt
des M a n u f a c t u r e s ,
des denrées p o u r
France,
à la r é c e p t i o n ,
nées après la r e prise de la c u l
A c h a t s d e N è g r e s et d ' A n i m a u x ,
Frais
an
premières
D É P E N S E .
à la v e n t e , et
ture,
par vente
A V A N C E S excédant
EPOQUES
le p r o DES
duit des r e v e n u s , durant les quatre
REMBOURSEMENS
premières années
DES,
AVANCES.
en F r a n c e .
30687800
»
9611000
»
13126 b œ u f s e t v a c h e s . 2. tiers des a v a n c e s pour réédifier les m a n u f a c t u r e s .
2625200
»
.
m e
id.
pour r é c e p t i o n , f r e t e t vente des d e n r é e s ,
intérêts.
23606 n è g r e s e t mulets. réédifier
»
2625200
»
les m a n u f a c t u r e s .
id. id. des fortifications. 4 d u r e v e n u p o u r l'exploitation d e s h a b i t a t i o n s . 10 id. p o u r r é c e p t i o n , fret e t v e n t e d e s d e n r é e s , inte'réts.
З0687800
»
9611000
»
13126 b œ u f s et v a c h e s .
2625200
»
10
40
143,486,399
»
139,137,819
24
160,342,365 4 0
21,204,546
16
96,205,719 24
160,342,365
40
64,136,646
16
96,205,719 24
160,342,365 40
64,136,646
16
id.
96,205,719 24
160,342,365
40
64,136,646
16
id.
96,205,719 24
160,342,365
40
64,136,646
16
»
9614000
»
2626400
»
4 du 10
p o u r r é c e p t i o n , frêt e t v e n t e des d e n r é e s , intérêts.
r e v e n u p o u r l ' e x p l o i t a t i o n d e s habitations.
2 id. 10
»
42,932,100
»
64,137,146
16
32,068,573
08
64,137,146 16
p o u r r é c e p t i o n , frêt et v e n t e des d e n r é e s , intérêts.
32,068,573 08
même dépense et recette.
12.
96,205,719 2 4 50,418,864 7 4
id. Plus, r e m b o u r s e m e n t de ladette arriérée des Colons.
f. c.
165245 n è g r e s . 134560 c h e v a u x
et mulets.
f.
1,551,051,665 30
c.
1,551,051,665 30
200000000 »
»
pour France
N O T A .
1789, Exportation générale de St.-Domingue, en
recensemens, les deux dixièmes à-peu-
en sus, afin de connaître l'exportation réelle, d'a 32000000 près la fraude et les fausses déclarations des capitaines
près
d'après les
.... Liqueurs,
Caret. . .
Cuirs. . .
Rocou.
. .
Rhum,
100 » -
26526 pièces. Tafia, etc. . . .
pour
»
» 600
» 400
100000 Campêche.
Canefice. .
Il convient d'ajouter a u x denrées exportées en France,
12З4275
168000000
»
»
» 9ЗЗ4216
»
11667 77 Indigo.
800 »
»
» 768З5219
10506411 150 »
100 » 19
74 70042
768З52 . . . Café.
Sucre.
Coton. . .
8
»2795З25З 12 30 9З1775 brut.
12
liv.
421З6625
le ql. 60 9 702277
Sommes totales. P R I X . QUANTITÉ.
nois était comptée à St.-Domingue, pour trente sous,
331/3pour cent.
de la récolte des denrées exportées en F r a n c e ,
3.
n.° TOTAL.
33 Briqueteries. .
28
313
17З Guildiveries .
..
69 Cacotières. . .
de 1789 ; son produit dans la Colonie. La livre tour
8528
36
З70
182
7905
789 705
2810 Cafeyères. . .
Cotonneries. .
792
З097
Sucreries. . .
Indigoteries. .
ETAT
»
»
17З
789
2810
i d .àeau,
3150
540
793
1639
D'ID. PROISY. DE DE MABBOIS.
MANUFACTURES, etc.
Quantité des Manufactures désignées par MM. DÉNOMINATION
13,717,781
f. c.
S20 215 903 62
91888 b œ u f s e t v a c h e s .
térim, et M. Id..., Directeur des Domaines, en l'an X.
en 1788 et 1789, d'après les recensemens de M. Barbé
me
de Marbois, Intendant ; M. de Proisy,
chargé de l'in
me
des Manufactures qui existaient à St.-Domingue
42,924 ООО
57,394,559 6 0 28,697,279 80
30691700
m e
ETAT
»
p o u r l ' e x p l o i t a t i o n des h a b i t a t i o n s .
Poteries. .
II.
»
9611000
p o u r r é c e p t i o n , f r e t e t v e n t e d e s d e n r é e s , intérêts,
me
2.
129,015,839
30687800 2625200
10.
n.°
80
.
m e
» 9,413,769
13132 b œ u f s e t v a c h e s . 4 d u r e v e n u p o u r l'exploitation des h a b i t a t i o n s
2 10
42,024,000
26,168,884 80
19228 c h e v a u x e t m u l e t s
id.
»
»
p o u r r é c e p t i o a , f r e t e t v e n t e d e s d e n r é e s , intérêts,
nègres
10
23,893.331
114,603,995
10000
8.
» »
52,337,769 60
chevaux e t mulets.
.
42,92.4,000 47,786,662
20
et v a c h e s . d u revenu p o u r l ' e x p l o i t a t i o n d e s h a b i t a t i o n s .
.
7,084,003 42
130,844,424
»
.
89,599,995 20
121,430,654 40
»
2625200
nègres.
96,683,998 62
54
»
9611000
23609 me
105,885,300 2 0
4,862,662
30687800
id.
50
»
p o u r r é c e p t i o n , f r e t e t v e n t e des d e n r é e s , i n t é r ê t s .
d u revenu
67,199.999
119,466,655
. .
4
70
»
13126 bœufs e t v a c h e s .
m e
» » »
.
23606
13
30687800 9611000 2625200
et m u l e t s .
19222
9.
17,919.999
19222 c h e v a u x
.
173,085,299
»
»
35,839999 o8
23606 nègres. 13126 b œ u f s
Ше
id.
id.
7.
des h a b i t a t i o n s .
23606 n è g r e s 19222 chevaux et mulets. 13126 b œ u f s e t v a c h e s . 4 d u r e v e n u p o u r l'exploitation d e s h a b i t a t i o n s .
m e
6.
l'exploitation
»
42,924,000
pour r é c e p t i o n , fret et vente des d e n r é e s , i n t é r ê t s .
Fours à chaux.
5.
pour
»
11,841,300
117,405,300
42 f. c.
320,215,903 des opinions en général, prouvera de plus en plus de quelle importance est la
id.
78,000,000
»
possession de S t.-Domingue, et son commerce exclusif, pour la France.
revenu
»
38,400,000
choc
du
42,934,000
. .
e
»
»
1 3 , 4 3 9 , 9 9 9 90
19222 c h e v a u x et m u l e t s .
Tanneries. . .
m
7,680,000
155,805,300
26,879,999 8o
23606 nègres 4.
»
à la donnée véritable, d'après le
des avancespour
m e
»
9611000
15,360,000
f. с.
cours des dix années antérieures à 1789. Les nouvelles lumières qu'on acquerra par le
13126 b œ u f s e t v a c h e s . tiers 3.
me
З0687800
» »
f. с. »
Il y a des rigoristes qui pourront trouver, a u premier aperçu, que le prix du sucre est
19222 c h e v a u x
78,000,000 11,841,300
89.841,300
élevé d'un sixième de trop. Leurs calculs les rameneront
id.
d e s fortifications. des h a b i t a t i o n s .
»
с.
pour les quatre mille nègres qu'ils introduisaient annuellement sans autorisation ; tous
id.
42,924,000
f.
ces objets peuvent être évalués au dixième de l'exportation par le commerce de France.
.
»
с »
rées qu'ils enlevaient en fraude, et celles qu'on délivrait en contrebande aux Anglais
.
d u revenu p o u r l'exploitation
11,841,300
f. 89,841,300
en denrées coloniales : les sirops et articles divers
.
f. c. »
que les négocians des E T A T S - U N I S étaient autorisés d'exporter de la Colonie : les den
.
78,000,000
Cacao. . .
e
nègres.
.
3.
d e francs.
blanc.
m
à 5o millions
19222 c h e v a u x e t m u l e t s .
23606
2 .
évaluées
T d e s a v a n c e s p o u r l a œ'e'dification des m a n u f a c t u r e s . des fortifications, id. d.
. . .
re
arriérées des C o l o n s ,
DENOMINATION.
I.
des a v a n c e s . Dettes
La consommation de St.-Domingue,
intérêts
62
N.° T A B L E A U
4.
N . °
des R é c o l t e s progressives q u ' o n doit espérer à S a i n t - D o m i n g u e , à
RÉCAPITULATION
5 .
d u Tableau
ci-contre.( A ) .
dater d e la d e u x i è m e a n n é e de la reprise de la c u l t u r e , calculé à raison d'un tiers d'aug m e n t a t i o n e n sus de la d o n n é e o u précédente r é c o l t e , ce qui é l è v e la récolte générale
A N N É E S de la reprise d e la culture.
d e la huitième a n n é e de la reprise de la c u l t u r e , aux trois quarts de celle d e 1 7 8 9 . O n doit s ' a t t e n d r e , d'après l'industrie des C o l o n s , q u e dans les années p o s t é r i e u r e s , les
DÉNOMINATION des
Valeur des Récoltes
Produit
en France.
différentes cultures.
total
par année.
récoltes se t r o u v e r o n t égales à celle d e 1 7 8 9 . f.
ANNÉES de la reprise de la Culture.
R E C O L T E S .
2.
P R O D U I T
F I X A T I O N
P R I X .
MÉTALLIQUE.
annuelles.
progressives.
Café.
f.
с
38,400,000
»
c.
3o,ooo,ooo
»
Coton.
6,000,000
»
Indigo.
2,400,000
»
e
C A F É . f.
1. m e
3
2.
40,000,000 13,333,333
en sus.
3
3.
récolte.
e
m e
53,333,333
17,777,777
en sus.
3
quantité présumée.
53,333,333
»
71,111,110
71,111,110
»
1.
2.
récolte.
e
5,333,333
7,111,110
10,666,665
»
9,481,480
14,222,220
»
5.e
»
400,000
3,200,000
»
533,333
4,266,664
»
Sucre.
28,444,444
»
Café.
71,111,111
»
Coton.
14,222,220
»
5,688,88o
»
Sucre.
37,925,925
20
Café.
71,111,111
»
Coton.
14,222,220
»
Indigo.
7,585,168
»
7.
e
37,920,925 20
Sucre.
50,567,900
»
Café.
71,111,111
»
Coton.
14,222,220
»
Indigo.
7,585,1б8
»
119,466,655
»
130,844,424 20
143,486,399
»
»
168,559,666
67,423,866 40
8.
67,423,866
40
71,111,111 14,222,220
» «
Indigo.
7,585,168
»
160,342,360
la reprise de la culture, 4З9 francs.
50,567,900
Sucre. Café. Coton.
— La quatrième, 407 fr. — La cinquième,411fr. — La
»
126,419,700
e
331 fr.
est à Saint-Domingue, 8 fois | plus productive qu'en France.
rées; ce
tations, et qu'elles rendaient pour 200 millions tournois de den
France ; mais des exceptions ne peuvent être adoptées pour base
générale. Le vrai est qu'il existait 400 mille nègres sur les habi
faisaient estimer la terre pour être15fois plus productive qu'en
fois plus productive qu'en France. Ce dire était exact pour cer
tournois), par tête de nègre
On disait vulgairement, d'après le produit général des diffé
taines habitations ; il y en avait même qui, par leur produit,
42,139,916
de
126,419,750
e
tout âge; c'est-à-dire que la terre était, à Saint-Domingue, onze
récolte.
en sus.
lonie (666 livres13sous 4 deniers
1
rentes cultures, qu'on retirait, brut, 1000 livres argent de la Co
5.
qui présente 5oo livres par tête de nègre. Partant, la terre
31,604.937
3
(A).
89,599,995 2 0
sixième, 420 fr. — La septième, qui fait la huitième année de
94,814,813
3
e
»
67,199,999 50
tête de nègre, 170 fr. — La deuxième, 276 fr. — La troisième,
4 . récolte. e
8.™
»
94,814,813
tournois, représentant 25o milliers de sucre terré. Il y avait des
71,111,110 23,7o3,7o3
récolte.
e
16,000,000
28,444,444
livres tournois), par tête de nègre ; en total 125 mille livres
en sus.
3.
»
71,111,110
(500
17,777,777
gulièrement tous les ans, brut,150livres, argent de la Colonie
en sus.
7,585,168
53,333,333
Une Sucrerie de 120 carreaux(300arpens), en grand rap
X 3
»
21,333,333 20
port, se trouvant garnie de250nègres de tout âge, rendait ré
e
40 le £
53,333,333
13,333,333
récolte.
2.
3
m e
4,266,664
La première récolte générale présumée, donnera brut, par
40,000,000
récolte.
Comparaison :
r e
e
f.
40,000,000
en s u s .
3
7.
Indigo
tauration complète des cultures.
948,146
237,036
quantité présumée. 1.
m e
»
seront privées des possesseurs de 1789, ce qui retardera la res
5,688,88o
S U C R E - B R U T .
6.
10,666,665
et surtout la certitude acquise que les deux tiers des habitations
711,110
711,110
en sus.
1/3
5.
Coton
ensuite la détérioration des terres des montagnes en culture,
m e
2,400,000
177.777
récolte.
e
8 la 1.
6.
533,333
en sus.
4.
me
20
53,333,333
qui est subordonnée à mille événemens qu'on ne peut prévoir ;
133,333
récolte.
e
3
m e
21,333,333
Café.
la reprise de la culture, que 4З9 francs. Il
400,000
3
4.
Sucre.
de
3oo,ooo
récolte.
récolte. en sus.
е
3.
r e
100,000
2.
m e
»
Indigo.
f.
300,000
en sus.
m e
3.
3,200,000
eût été absurde d'offrir pour certitude, une quotité plus élevée,
3
6.
Indigo.
lahuitièmeannée
m e
5.
50
annuellement d'un tiers
2,370,370
quantité présumée.
m e
7,999,999
augmentée
7,111,110
en sus.
1.
4.
Coton
ajouté en sus de la dernière récolte, ne présente par tête de nègre,
récolte.
e
sont la suite de calculs, pris pour l'ensemble, sur une première
3.
» »
7,999,999 50
INDIGO. m e
16,000,000 40,000,000
donnée approximative,
3. 3
2.
Sucre brut. Café.
1,777.777
3
5.me
5,333,333
La récapitulation du tableau n°. 4, côté n°. 5, dont les résultats
m e
4,000,000 1,333,333
récolte.
en sus.
»
fixer la quotité nette du revenu; c'est-à-dire, la portion revenante
4.
r e
6,000,000
e
au propriétaire.
m e
4. 1
A Saint-Domingue comme en France, les frais relatifs à l'ex
3.
f. l50 le q.
4,000,000
3.e
ploitation, mortalités, etc., sont à déduire de ces données, pour
me
»
5,333,333
C O T O N . 2.
40,000,000
par arpent; en total,15000francs par an.
5.
récolte.
e
m e
4,000,000
10,000,000
c.
»
tation, ne produit, brut, en France, au fermier, que 5o francs
4.
3o,ooo,ooo
récolte.
re
en sus.
f.
Зо,ооо,ооо
Une Ferme de З00 arpens de bonne terre, garnie de tout ce qui
3.
1 la l.
3o,ooo,ooo
quantité présumée.
e
peut concourir à l'augmentation du revenu, et faciliter l'exploi
m
Sucreries de cette étendue, qui rendaient jusqu'à un quart de plus.
2 .
40
(23)
d i t u r ,nisiSenatus
consultis,
nibus principum
confirmatum.
atque
cons-
corps une fois autorisés, ne peuvent a c des b i e n s , par achat ni par d o n s , n i leurs i m m e u b l e s , sans l'autorisation d u Législatif. Quant à l'administration de e n s , elle est réglée par des lois particuqu'il serait trop l o n g de rapporter ici. r. 558. « Les c h e m i n s , routes et rues à charge de la n a t i o n , les fleuves et rivières vigables o u flottables, les r i v a g e s , lais et ais de la m e r , les p o r t s , les h a v r e s , les des et généralement toutes les portions territoire national qui ne sont pas s u s ptibles d'une propriété p r i v é e , sont c o n lérées c o m m e des dépendances du d o m a i n e blic. » ans sa première r é d a c t i o n , cet article s e m attribuer au domaine de l'Etat, tous les mins p u b l i c s , rues et places publiques. O n rva qu'il n'y avait dans ce d o m a i n e , que routes, rues et places entretenues aux d é du trésor public ; que les chemins v i c i étaient des propriétés des c o m m u n e s , à communication desquelles ils servaient, et étaient aussi à leur c h a r g e ; que les rues et places étaient dans la m ê m e
cathégorie,
cepté celles qui servaient de grandes r o u l e s ; ue telle était la jurisprudence du Conseil d ' E BIBLIOTHEQUE SCHOELCHER
80015757