UNE FEMME SOUFIE EN ISLAM, Râbi'a al-'Adawiyya

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UNE FEMME SOUFIE EN ISLĂ‚M

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JEAN ANNESTAY

une FEMME SOUFIE e n ISLÂM RÂBI‘A AL~‘ADAWIYYA

entrelacs

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La collection HIKMA est dirigée par A. PENOT et J. ANNESTAY pour les éditions ENTRELACS

Édition française : © Éditions Entrelacs, 2009 22, rue Huyghens, 75014 Paris ISBN : 978-2-908606-58-4 e-mail : contact@editions-entrelacs.fr

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Toute chose porte des fruits, et le fruit de la Connaissance, c’est l’Arrivée au But (al-iqbâl ). Râbi‘a al-‘Adawiyya

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01.Sommaire[21-07]_Mise en page 1 25/09/09 10:32 Page9

SOMMAIRE AVERTISSEMENT REMERCIEMENTS

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13 INTRODUCTION

I. Sainteté et exemplarisme II. Soufisme et mysticisme.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31

RÂBI‘A AL ‘ADAWIYYA III. Naissance et premières années . . . . . . IV. La Voie et le Maître . . . . . . . . . . . . . . V. Souvenir et Repentir . . . . . . . . . . . . . . VI. Du péché et de l’Enfer. . . . . . . . . . . . VII. De la Crainte et de l’Espérance. . . . . VIII. Au-delà de l’Enfer et du Paradis . . . IX. De la Pauvreté . . . . . . . . . . . . . . . . . . X. De la Patience. . . . . . . . . . . . . . . . . . . XI. DuTawakkul . . . . . . . . . . . . . . . . . . . XII. Miracles apparents et vérités cachées. XIII. Le pèlerinage intérieur . . . . . . . . . . . XIV. Célibat et renoncement . . . . . . . . . . XV. De l’amour spirituel . . . . . . . . . . . . . XVI. De l’Amour divin . . . . . . . . . . . . . .

. . . . . . . . . . . . . . 49 . . . . . . . . . . . . . . 59 . . . . . . . . . . . . . . 69 . . . . . . . . . . . . . 101 . . . . . . . . . . . . . 115 . . . . . . . . . . . . . 127 . . . . . . . . . . . . . 143 . . . . . . . . . . . . . 161 . . . . . . . . . . . . . 177 . . . . . . . . . . . . . 195 . . . . . . . . . . . . . 217 . . . . . . . . . . . . . 233 . . . . . . . . . . . . . 251 . . . . . . . . . . . . . 269 XVII. Mort physique et mort spirituelle . . . . . . . . . . . . . . . 299 XVIII. Degré spirituel. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 321 XIX. Spiritualité féminine en Islâm . . . . . . . . . . . . . . . . . . 343

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01.Sommaire[21-07]_Mise en page 1 25/09/09 10:32 Page10

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Une femme soufie en Isl창m APPENDICES

SOURCES . . . . . GLOSSAIRE . . . . NOTICES . . . . . BIBLIOGRAPHIE INDEX . . . . . . .

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 355 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 363 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 407 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 449 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 453

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02.Avertissement [21-07]_Mise en page 1 25/09/09 10:32 Page11

AVERTISSEMENT Cet ouvrage trouve son point de départ dans l’étude de Margaret Smith publiée en 1928 par le Cambridge University Press et intitulée Râbi‘a the Mystic and her fellow saints in Islâm. On y trouve réunies, pour la première fois, les principales sources concernant la sainte dans les différents recueils hagiographiques musulmans. Cette étude remarquable n’est cependant pas exempte de défauts et le présent travail en diverge sur de nombreux points. Sans prétendre remplacer son ouvrage, qui traite aussi, par ailleurs, des principales saintes musulmanes, il en complète le propos, notamment en citant certaines sources dont elle ne fait pas mention, et rectifie surtout diverses confusions et approximations qu’il a pu contenir en même temps qu’il amorce des pistes qu’elle n’avait pas abordées. Sans être un ouvrage de vulgarisation, ce livre n’est pas non plus une thèse de spécialiste pour autant. C’est pourquoi je n’ai pas cru indispensable de conserver les signes diacritiques des termes arabes et persans transcrits, que ce soit dans le corps du texte ou dans les glossaires. J’ai préféré employer une transcription simplifiée plus facile de lecture pour le non-arabisant. De même, dans les glossaires, l’ordre suivi n’est pas celui propre à l’alphabet arabe mais celui de l’alphabet latin afin d’éviter des difficultés d’utilisation inutiles au lecteur non spécialiste ou non arabophone. La transcription des termes arabes utilisée ici n’est sans doute pas la plus précise possible mais elle présente l’avantage de la lisibilité. Le ‘ayn, qui est une gutturale, est rendu par ‘ et le hamza initial est rendu par ’. Le çad, qui est une emphatique, est rendu par le ç. Le shin est rendu par le s qui en est l’équivalent en arabe. Mais les différences entre les le hâ guttural et le hâ aspiré, équivalent du h aspiré de l’anglais et de l’allemand, n’ont pas été

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02.Avertissement [21-07]_Mise en page 1 25/09/09 10:32 Page12

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Une femme soufie en Islâm

signalées. Non plus que certaines emphatiques. D’une façon générale, afin de faciliter la lecture, j’ai préféré unifier les transcriptions dans les textes cités, même quand il s’agit de traductions existantes. En ce qui concerne la traduction, je n’ai pas cherché à être systématique non plus. Et chaque fois que cela a été possible, je suis cependant remonté à la source des textes mentionnés. J’ai essayé d’éviter aussi les expressions qui tendraient à confondre des expériences spirituelles trop distinctes entre elles, telles que celles des mystiques chrétiens et des soufis musulmans, par exemple ; j’ai donc préféré parler d’initiation pour ces derniers plutôt que de mysticisme au sens courant. En ce qui concerne le nom d’Allâh, celui-ci désigne une Réalité aussi intraduisible que le Tao des taoïstes ou le Brahma des hindous, je l’ai cependant rendu le plus souvent par Dieu car, dans bien des cas, c’est à la notion de Dieu que ce terme se réfère mais il ne faut jamais perdre de vue qu’à strictement parler, dans son sens absolu, pour la plupart des saints dont il sera question ici, ce terme désigne une Vérité (Haqq) indicible qui excède la notion de Dieu ou d’Être créateur elle-même. Par souci de clarté et afin de faciliter la compréhension de ces textes destinés souvent à l’origine à une frange de la société musulmane très particulière, celle des membres des confréries soufies, j’ai accompagné la publication de ces articles d’un glossaire des termes arabes. Le lecteur pourra avoir l’impression, et il me le reprochera peut-être, que tous les saints mentionnés ici n’avaient pas de grande différence entre eux et que leurs propos appartiennent à un seul et même corpus. Ce qui est vrai, puisqu’ils relèvent tous peu ou prou du Soufisme, mais qui ne fait effectivement pas la part des divergences qui ont pu exister entre eux et qui pouvaient parfois s’avérer extrêmes. J’ai envisagé leurs propos dans ce qui les relie plutôt que dans ce qui les sépare mais, afin de permettre aux lecteurs de faire la part des choses, j’ai accompagné cette étude de notices situant chacun d’entre eux et indiquant leurs principaux ouvrages afin que le lecteur qui le désirerait puisse s’y reporter.

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02.Avertissement [21-07]_Mise en page 1 25/09/09 10:32 Page13

REMERCIEMENTS Tout en ayant des rudiments d’arabe, je ne prétends pas être un arabisant pour autant. Loin de là. Je me suis donc efforcé de palier à mes propres lacunes en m’appuyant sur des traductions fiables existantes et surtout en faisant appel à des amis arabophones qui ont bien voulu relire et souvent retraduire les sources arabes existantes. Sans leur apport, cette étude n’aurait pu être menée à bien et serait demeurée sans doute à l’état inachevé. Je voudrais donc remercier ici tous ceux qui, au fil des années, ont accompagné sa rédaction et ont eu l’amitié et la patience de me supporter. À commencer tout particulièrement par ‘Abdallâh Penot qui a enrichi le texte de bien des précisions, directes ou indirectes, certaines créditées, d’autres pas, et sans lequel cette étude ne serait pas ce qu’elle est. Son aide aura été quasiment quotidienne au moment de la réécriture du texte. Je remercierai aussi ‘Omar Laazouzi, des éditions Iqra, qui a été au départ de cette entreprise et m’a permis de l’avancer dans sa première phase d’écriture. Comme je l’ai dit, nombreuses ont été les autres personnes qui ont aidé à l’établissement du texte et je remercierai donc également ici B. Carbriand, pour sa relecture du texte, ainsi que O. Mariotte, L. Sary et T. Fenjirou pour les recherches qu’ils ont effectuées et la pertinence de leurs suggestions. Enfin, un très grand merci à Nicolas Andreucci qui a eu la patience de relire non seulement mon travail mais m’a grandement aidé à le compléter et à en corriger les lacunes ainsi qu’à vérifier et rectifier, souvent ligne par ligne, la quasi-intégralité des traductions existantes, les enrichissant de notes et de précisions des plus utiles.

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02.Avertissement [21-07]_Mise en page 1 25/09/09 10:32 Page15

INTRODUCTION

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CHAPITRE 1 SAINTETÉ ET EXEMPLARISME Quasi totalement inconnue de l’Occident contemporain, Râbi‘a est certainement la sainte la plus vénérée en Islâm. Certains la situent dans le panthéon hagiographique directement après les épouses et les filles du Prophète. Treize siècles après sa naissance, un peu partout dans le Moyen-Orient, les gens continuent de faire appel à son intercession, que ce soit au sein des milieux populaires ou des cercles soufis. Et elle continue d’apparaître et d’exaucer les souhaits à ceux qui s’adressent ainsi à elle en sorte que la liste de ses miracles continue de s’accroître plus d’un millénaire après sa mort. Réunis bout à bout ses propos et ses chants ne dépassent guère la centaine de pages mais penseurs et poètes de par le monde continuent d’en commenter ou d’en méditer inlassablement les fulgurances. En dépit des siècles, ses conseils conservent toujours toute leur actualité. La présence de celle que les orientalistes considèrent comme la « sainte de l’hagiographie sunnite par excellence » semble ne pas avoir été affectée par le passage du temps.

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Une femme soufie en Islâm

Selon Munâwî, un de ses biographes, elle aurait été « à la tête des disciples femmes et le chef des femmes ascètes et de ceux qui observaient la loi sacrée et qui craignaient Dieu et étaient zélés dans la foi », c’est-à-dire « une de ceux qui étaient prééminents et réalisés dans la grâce et la bonté. » Il mentionne plusieurs autres grandes saintes mais souligne que Râbi‘a « était de toutes les ascètes qui se sont vouées à l’adoration, à la piété et à la crainte révérencielle (…) la plus grande (…) (et qu’) elle fait partie de ces femmes qui ont brillé dans la vertu et le Bien (…) (par) la perfection de sa pureté et son total mépris des biens de ce monde1. » « Aussi bien en termes de pratiques spirituelles que de gnose (ma‘rifa), Râbi‘a n’avait pas d’égal à son époque et était reconnue en tant que telle par tous les grands maîtres spirituels de son temps2. » Le célèbre maître soufi, ‘Attâr, sans doute son biographe le plus connu, en parle comme « cette élue parmi les recluses de la sainteté, cette femme que le voile de la sincérité (ikhlâç) abritait des regards, elle qui brûlait des feux de l’amour et du désir d’être uni au Principe (ishtiyâq), elle qui se consumait dans la quête de la proximité divine (qurb) et dans la vénération (ihtirâm), cette femme qui s’était perdue (fâniya) elle-même dans l’union spirituelle (wiçâl ), elle en qui les hommes voyaient une seconde Marie, une pure “soufie” (çâfiya çafiyya 3)4. » Dans le Langage des Oiseaux, il déclare même : « Non, elle n’était pas une femme ordinaire mais plutôt l’équivalente de cent hommes : transpercée par la quintessence de la douleur ; plongée de la tête aux pieds dans la Vérité-Réalité ; disparue dans la radiance divine et libérée de tous les excès superflus. » 1. Munâwî, Al-Kawâkib ad-durriyya fî tarâjim as-sâda aç-çûfiyya, traduction Nelly Amri, in Nelly et Laroussi Amri, Les femmes soufies ou la passion de Dieu, Paris, 1992, p. 106. 2. ‘Attâr, Tadhkira al-Awliyâ, cité par Badawî, in Shahîda al-‘Ishq al-Ilâhî, Râbi‘a al‘Adawiyya, Le Caire, 1954, p. 143. 3. Le sens du terme arabe çafiyya (littéralement « claire ») n’est pas à proprement parler çûfiyya (soufie) mais évoque le terme. Il y a ici un jeu de mots sur les sonorités rappelant la racine çwf dont est dérivé le mot çûfî (Note de N. Andreucci). 4. ‘Attâr, ibid., p. 142.

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Sainteté et exemplarisme

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Dépassant nombre de Maîtres spirituels non seulement de son époque mais des siècles à venir, elle fut qualifiée de « Couronne des hommes » (tâj ar-rijâl ). On ne peut traiter de Soufisme sans la mentionner. Sans jamais avoir écrit une ligne, elle a laissé, par ses chants et les récits qui la concernent, une somme spirituelle d’une importance essentielle. Sa science était tout entière ‘ilm hudûrî, dérivant de la réalisation (ou de la présence) intérieure, et non ‘ilm çuwarî ou, si l’on veut, « science formelle », donc dérivée, extérieure, voire simplement livresque. Pourtant, même si Râbi‘a al-‘Adawiyya est la sainte dont nous sont parvenus le plus de récits, ceux-ci se résument à quelques poèmes et courtes histoires rapportées dans des ouvrages écrits souvent fort longtemps après sa mort. On pourrait dire d’elle, en un sens, qu’elle se sera employée, son existence durant, à effacer toute trace de son individualité si bien que, dégagé des limites de la chronique, le récit de sa vie a fini par se confondre avec sa légende. Les éléments qui nous sont parvenus d’elle ont parfois, et même assez souvent, été attribués aussi à d’autres saints et saintes. Il en résulte sinon une dépersonnalisation du moins une « trans-personnalisation » d’un type assez fréquent dans les hagiographies où c’est plus la « personnalité » intérieure de l’être qui est mise en avant que son individualité. Plus qu’une suite de faits historiquement vérifiables, l’existence du saint acquiert ainsi une sorte d’intemporalité. De fait, les différents récits concernant Râbi‘a forment une trame symbolique qui renvoie plus au silence de la méditation et de la connaissance métaphysique – les seules choses qui semblent avoir jamais intéressé la sainte à partir du moment où elle a entrepris une voie de recherche spirituelle – qu’à un portrait réaliste de celle-ci. Il est vrai que, d’une façon générale, quand on parle d’un saint ou d’une sainte, on devrait toujours prendre soin de parler de « sa vie » en mettant des guillemets car ce qui nous en est parvenu au fil des siècles n’est pas tant un portrait qu’une figure symbolique ou emblématique. Son histoire est avant tout un condensé d’enseignements destiné à édifier et aider

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Une femme soufie en Islâm

ceux qui avancent sur la voie. Une hagiographie de soufi est un traité initiatique à part entière. Le récit de « sa » vie est qualitatif et non quantitatif, nourri des éléments essentiels qui l’ont composée plutôt que formé d’une collection de faits accidentels et d’une portée purement humaine. Ce n’est en rien une biographie au sens moderne du genre. S’agissant d’authentiques Maîtres réalisés, même des détails qui, chez d’autres, seraient triviaux, prennent a contrario avec eux une dimension archétypale. Le degré supérieur de cette reconduction réside, bien entendu, dans la vie d’un Prophète, qu’il soit nabî ou, plus encore, rasûl 5 : son imitation devient, dans ce cas, un moyen pour le fidèle qui suit la voie qu’il a ouverte, de participer à la Réalité divine qui l’a façonnée en même temps qu’un support pour avancer dans le processus de réintégration conduisant de la conscience individuelle à la conscience universelle. La vie ainsi que les paroles et les poèmes qui ont été attribués à Sayyida Râbi‘a sont, dans son cas, d’autant plus précieux qu’ils constituent les seules traces qui nous demeurent aujourd’hui de son enseignement. Les éléments connus la concernant offrent de ce fait une valeur emblématique et exemplaire dépassant le plan de l’histoire ou de l’anecdote. Si l’on tient présent à l’esprit, par ailleurs, que l’essentiel des textes qui nous les ont transmis appartiennent au corpus doctrinal du Soufisme, on comprendra aisément que leur fonction, à travers les siècles, aura été principalement de servir d’orientation aux femmes (mais aussi aux hommes) qui, comme Râbi‘a, ont entrepris une recherche spirituelle de type initiatique. Comme pour tout grand Maître, ses paroles et sa vie témoignent en effet d’une Réalité qui dépasse sans commune mesure l’individualité qui en a été le support. C’est à ce titre aussi qu’elles constituent un enseignement. Pourtant, quelques 5. Nabî et rasûl désignent traditionnellement deux sortes de « prophète » : à la diffé rence du rasûl, le nabî n’apporte pas une nouvelle Loi mais vient uniquement confirmer la tradition de son temps et a pour mission d’avertir et d’exhorter les hommes à Dieu. Le terme de rasûl se rapporte à ceux des Prophètes auxquels un Livre ou des feuillets ont été révélés et qui ont été ainsi porteurs d’un nouvel enseignement et d’une nouvelle Loi à l’humanité ou à une partie de celle-ci. Le rasûl, « l’Envoyé », est celui qui transmet au monde le « Message » (risâla) divin.

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Sainteté et exemplarisme

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poèmes exceptés, transmis sous des formes diverses, elle n’a laissé aucun traité ni livre. C’est pourquoi, on ne cherchera pas ici à distinguer ce qui relève du merveilleux de ce qui participe de la chronique vérifiable car chacun des éléments de son existence qui nous a été transmis, ainsi que c’est toujours le cas quand il s’agit d’êtres connus pour leur spiritualité, qu’il s’agisse de Maîtres spirituels ou à plus forte raison de prophètes, appartient en propre à ce que l’on pourrait appeler l’histoire sacrée de notre monde. Fondée non sur une accumulation quantitative de faits mais sur une qualification de l’histoire en vue de mettre en relief ce qui, au sein de celle-ci, constitue une trace du divin en ce monde, une telle forme d’historicité présente un intérêt essentiel pour quiconque aspire à ne pas se nourrir « de pain seul » et s’efforce de retrouver en soi la Vérité qui est au cœur de toute chose. Comme le rappelle Rûmî, l’histoire de Moïse et de Pharaon n’est pas une histoire aux yeux d’un initié, « c’est une description d’un état spirituel, et la présence de l’Ami de la Caverne » (Mathnawî, III, 1149). Dans une telle perspective, la vie d’un être, surtout s’il s’agit d’un Maître spirituel, peut bel et bien constituer un enseignement doctrinal au même titre qu’un traité de métaphysique, la vérité historique de tel ou tel fait s’effaçant ici au profit de sa vérité intérieure. Déterminer si tel ou tel miracle s’est produit ou non, de ce point de vue, ne présentera dès lors qu’un intérêt secondaire comparé à la vérité symbolique et métaphysique au cœur de ces mêmes miracles6. 6. On n’aura pas non plus à se préoccuper du fait que tel épisode puisse être en désaccord, du point de vue des événements, avec tel autre, pas plus qu’on ne s’appesantira sur le fait qu’on attribue à Râbi‘a la rencontre de tel ou tel Shaykh ayant vécu dans un autre siècle qu’elle ; seule importera la concordance de contenu que ces épisodes entretiennent. Les objections d’incohérence historique ou d’impossibilité s’estompent dès lors que l’on tient présent à l’esprit que, pour les soufis qui ont fait mention de ces événements dans leurs écrits, ces rencontres étaient avant tout spirituelles plutôt que temporelles et, par suite, font état d’amitiés qui n’ont rien de « sentimentales » au sens courant mais se réfèrent plutôt à des sympathies au sens où, en Persan, on parle de ham dam, « être de même souffle », à propos d’amis – dans le Soufisme, l’amitié, wilâya, elle-même étant un autre des noms de la sainteté.

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Une femme soufie en Islâm

Il s’agit de relier tout acte à sa raison d’être. C’est dans cette mesure seulement qu’une chose ou un événement acquièrent une signification ou peuvent être dits pourvus de beauté ou de justesse. Rien n’est beau, juste ou doté de sens en lui-même mais uniquement relié à son principe. C’est en tant qu’une chose révèle ou participe du divin qu’elle peut devenir véritablement riche d’enseignements ou exemplaire. Sans une telle participation, l’exemplarité ne pourrait se trouver au départ ni de l’Islâm ni de toute autre tradition. C’est parce que le Prophète est capable de se hisser plus haut et plus près du Principe que le plus élevé des anges qu’il est un exemple à suivre pour chaque être. Ce n’est pas en tant qu’individu. Il est un homme, certes, mais non un homme parmi tant d’autres. Il est dans notre monde comme une pierre précieuse parmi les pierres. C’est parce qu’il a plus de valeur que tout homme qu’il est affirmé dans le Qur’ân : « En vérité, vous avez un excellent exemple dans votre Prophète » (XXXIII, 121) et que tout musulman doit agir en conformité avec sa vie ou que chacun des épisodes de celle-ci peut constituer un sujet de méditation pour le fidèle ainsi que la norme à partir de laquelle il ordonnera sa vie. Une telle exemplarité repose sur la conscience de ce que, pour l’homme traditionnel, ce qui est accompli dans ce monde-ci, matériel et terrestre, doit être à l’image de ce qui est fait dans l’autre monde, spirituel ou céleste, et que, d’une façon plus générale, tout ce qui existe renvoie à un niveau de référence supérieur au plan du monde corporel et formel. « Dans la création des cieux et de la terre, dans la succession des jours et des nuits, dans les vaisseaux qui voguent à travers la mer pour apporter aux hommes des choses utiles, dans cette eau que Dieu fait descendre du ciel et avec laquelle Il rend la vie à la terre morte naguère et où Il a disséminé des animaux de toute espèce, dans la variation des vents et dans les nuages astreints au service entre le Ciel et la Terre, dans tout ceci il y a certes des signes pour ceux qui comprennent » (Qur’ân, II, 159), c’est-à-dire pour ceux qui savent effectuer une reconduction

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Sainteté et exemplarisme

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du plan du monde sensible à celui du monde intelligible. L’œuvre du Principe est à Sa ressemblance et à Son image, non pas considérée en mode distinctif, en envisageant chaque partie séparément de l’autre, mais en les reliant au Tout dans lequel tous les déséquilibres et toutes les imperfections transitoires et contingentes se résolvent et sans lequel rien n’aurait pu être. Toute image, fait ou idée exemplaire pour être tel doit entretenir une « similitude » avec l’archétype auquel il ne pourrait renvoyer sans cela. Tel est le fondement métaphysique de la notion de monde conçu en tant que « miroir de Dieu » qui est au principe de toute sacralisation. « Il est impossible de révéler quelque chose si ce n’est par son opposé. Or, Dieu le Très-Haut ne possède pas d’opposé. Il dit : “J’étais un Trésor caché et J’ai voulu être connu.” Aussi a-t-Il créé ce monde, qui est obscurité, afin que Sa Lumière puisse être manifestée7 » à ceux, tout au moins, qui considèrent les choses non dans leur dualité mais les contemplent dans leur unité transcendante. Toute exemplarité tend en effet à revivifier dans l’être la conscience de la relation unissant l’Un et le multiple. La multiplicité, pour apparente qu’elle soit, tant qu’on se limite à un point de vue contingent, ne se situe pas hors du Principe qui est Infini et la transcende tout en l’incluant. Bien que, de façon illusoire, on puisse la concevoir de façon séparée, elle ne saurait en effet exister sans Lui. C’est pourquoi toute existence, quelle qu’elle soit, ne peut qu’attester de la présence du Principe. Seules notre ignorance, notre limite ou notre incapacité à voir Dieu en toutes choses nous ont fait croire qu’Il est une réalité et que nous en sommes une autre. Mais, pour le spirituel, il s’agit d’une illusion. Pour lui, comme le dit le Qur’ân, « les sept Cieux et la Terre et ceux qui s’y trouvent Le glorifient et il n’est aucune chose qui ne Le glorifie, mais vous ne comprenez pas leur glorification » (XVII, 44). Car « où que vous tourniez votre visage est la Face de Dieu » (Ibid., II, 109). « Allâh a manifesté ce monde afin que tu 7. Rûmî, Fîhi-mâ-fîhi, ch. 17.

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reconnaisses les autres degrés qui restent à parcourir. Il ne l’a pas montré pour que tu ne Le croies pas et que tu dises : « C’est là tout ce qui existe. » L’artiste montre son art et son talent afin que l’on croie en Lui et qu’on reconnaisse les autres arts qu’il n’a pas encore manifestés, et qu’on y ajoute foi8. » « Celui qui se confie à Dieu en tout, comprend en Lui toute chose et interprète tout ; il n’est pas jusqu’aux cris des oiseaux et aux grincements des portes qui ne soient pour lui significatifs et éloquents comme pour Allâh9. » C’est parce qu’il y a autant d’idées que de choses existantes que le monde est un symbole du Principe et qu’on peut y voir la trace formelle d’une réalité informelle. En effet, « le véritable fondement du symbolisme, c’est (…) la correspondance qui existe entre tous les ordres de réalité, qui les relie l’un à l’autre, et qui s’étend, par conséquent, de l’ordre naturel pris dans son ensemble à l’ordre surnaturel lui-même ; en vertu de cette correspondance, la nature tout entière n’est elle-même qu’un symbole, c’est-à-dire qu’elle ne reçoit sa vraie signification que si on la regarde comme support pour nous élever à la connaissance des vérités surnaturelles, ou “métaphysiques” au sens propre et étymologique de ce mot, ce qui est précisément la fonction essentielle du symbolisme, et ce qui est aussi la raison d’être de toute science traditionnelle. C’est pourquoi le monde est comme un langage divin pour ceux qui savent le comprendre10. » Il y a enchaînement et correspondance d’un ordre à un autre car tout participe du Principe et le domaine le plus inférieur atteste toujours du domaine principiel sans lequel il ne saurait exister. « Sous le voile de chaque atome est cachée la beauté ravissante du visage du Bien-Aimé11. » C’est parce que « la Beauté ne peut supporter de rester ignorée derrière le rideau » qu’elle « émerge des saintes régions du mystère pour 8. Ibid., ch. 5. 9. Abû ‘Uthmân al-Maghribî cité par Eva de Vitray-Meyerovitch, Mystique et Poésie en Islam, Paris, 1973, p. 193. Les citations pourraient être multipliées de façon indé finie, que ce soit à partir de sources islamiques ou issues d’autres formes traditionnelles. 10. René Guénon, Aperçus sur l’Initiation, Paris, 1992, pp. 132-133. 11. Shabestarî, Goldshan-i-Râz, 165.

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briller sur les horizons et les âmes » et « se révèle dans le miroir des êtres » et que « tous les atomes constituant l’univers deviennent autant de miroirs reflétant chacun un aspect de l’éternelle splendeur » en sorte que « de chaque atome une voie conduise vers Lui et soit une preuve de son existence 12. » Une telle correspondance présuppose, on le comprendra, une analogie entre le symbole et le symbolisé sans quoi une chose corporelle ne pourrait être le « reflet » d’une réalité d’un ordre supérieur. Elle implique aussi une possibilité d’approfondissement de la connaissance qui variera en fonction de celui qui regarde et de son degré de com-préhension. « Le monde tout entier est la forme de la Raison universelle13 qui est le père de quiconque est le disciple de la Parole divine. Si quelqu’un témoigne de l’ingratitude envers la Raison universelle la forme de l’Univers lui apparaît, en conséquence, laide. Sois en paix avec ce Père (…) afin que l’eau et l’argile puissent t’apparaître comme un tapis d’or. Alors, la Résurrection t’apparaîtra instantanément : le ciel et la terre seront transfigurés à tes yeux14. » L’histoire sacrée, tout comme le symbolisme traditionnel sur lequel elle repose, accentue donc l’aspect « essentiel » ou « qualitatif » plutôt que l’aspect « substantiel » ou « quantitatif » en tant qu’elle a pour fonction d’orienter vers les cieux plutôt que vers la Terre. Il ne faudrait cependant pas croire qu’une telle qualification des faits dans l’hagiographie se fasse au détriment de la réalité. Se référer à des principes métaphysiques ne signifie pas se détourner de la « physique » ou du monde naturel mais simplement l’envisager d’un point de vue plus vaste. Il ne s’agit pas non plus de se détourner de la réalité au profit d’un imaginaire ou d’un subliminal coupés de la 12. Jâmî, Youssouf et Zouleikha, Paris, 1927. 13. Cette « Raison » est le ‘Aql, l’Intellect universel transcendant, lien entre l’homme et Dieu. Ce n’est bien entendu en rien l’activité mentale humaine. Il en est de même du Manas qui, dans la tradition hindoue, peut désigner, selon les textes et les époques, tantôt l’Intellect et être synonyme de Buddhi et tantôt le mental. Plus près de nous, une chose voisine pourrait être dite à propos des divers emplois du mot Logos selon les contextes. 14. Rûmî, Mathnawî, IV, 3259-3262.

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matérialité. « L’accès à la réalité ne s’obtient pas en faisant un choix entre la matière et l’esprit supposés sans rapport entre eux, mais plutôt en voyant dans les choses matérielles et sensibles une similitude formelle des prototypes spirituels que les sens ne peuvent atteindre directement15. » Il s’agit là « d’une réalité envisagée à différents niveaux de référence ou, si l’on préfère, de différents ordres de réalité, mais qui ne s’excluent pas mutuellement16. » L’hagiographie tend par son caractère symbolique a être un lien et un support de transmission d’une influence du Principe sur notre plan de manifestation, c’est-à-dire à faire ressortir l’aspect essentiel de la matière afin de permettre à l’être d’y trouver un support en vue de réintégrer ce Centre ou cette Unité primordiale sans qui tout ne serait que néant. Ainsi qu’il l’est rappelé dans le Qur’ân : « Nous leur ferons voir Nos signes aux horizons et en eux-mêmes, de sorte qu’il leur apparaisse évident qu’Il est la Vérité » (XLI, 53). En effet, « il y a nécessairement dans le symbolisme quelque chose dont l’origine remonte plus haut et plus loin que l’humanité » car « l’origine du symbolisme se confond véritablement avec l’origine des temps, si elle n’est même, en un sens, audelà des temps, puisque ceux-ci ne comprennent en réalité qu’un mode spécial de la manifestation17. » Et c’est à une telle primordialité ou antériorité principielle que renvoie toute histoire sacrée. En ce sens, celle-ci n’est pas tant à lire comme la narration de faits qui se sont produits dans le passé qu’à comprendre comme le rappel sous forme narrative d’une réalité qui demeure à jamais présente en chacun de nous et c’est en cela qu’elle est précieuse et sacrée. D’une façon générale, analyser la vie d’un saint sur la base des critères habituels aux autres hommes revient à ne pas savoir distinguer les pierres précieuses des vulgaires cailloux, ce n’est pas faire preuve de justesse d’esprit mais de manque de discernement. 15. Coomaraswamy, « The Nature of Buddhist Art » in Figures of Speech or Figures of Thought ?, New Delhi, 1981, p. 193. 16. Ibid. 17. René Guénon, op. cit., p. 133.

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La vie d’un prophète ou d’un saint est, pour le croyant, exemplaire car elle est, d’une certaine façon, en correspondance avec ce qui fut fait au commencement. On connaît la parole du Prophète qui affirme que « le meilleur siècle est le mien, puis celui qui suivra et puis celui qui suivra. » Il ne s’agit pas ici de privilégier seulement le passé sur le présent ou le futur mais de privilégier la proximité de la présence spirituelle que représente pour l’humanité la venue d’un Envoyé à l’éloignement graduel de cette présence. Dans les premiers temps, la Lumière principielle est plus apparente et directe aux êtres et, au fil des siècles, ils ont besoin de plus d’explications et de moyens18. Mais quand on se réfère au passé en tant que temps privilégié des Écritures sacrées, il s’agit aussi de l’entendre lui-même comme le symbole de l’antériorité principielle à toute temporalité. Toute histoire sacrée renvoie en effet à un « commencement » qui n’est temporel qu’envisagé de façon extérieure mais qui, en réalité, est symbole d’éternité. Ainsi envisagée, une telle histoire ne se rapporte pas à un moment donné parmi tant d’autres mais bien à l’unique « instant » métaphysique dont tous les autres moments dérivent. L’antériorité temporelle devient ici le symbole de l’antériorité principielle et renvoie, en définitive, à l’in-stant à jamais permanent de l’Éternité. Dans une telle perspective, la vie de Râbi‘a ou de tout saint, pour être saisie dans toute sa plénitude, ne doit pas seulement être rapportée à une époque historique donnée mais bel et bien à la réalité strictement pré-historique ou, si l’on préfère, anhistorique, c’est-à-dire antérieure à toute histoire comme à toute temporalité, en laquelle elle a son principe et sa fin et qui est sa véritable raison d’être. Il s’agit, si l’on veut, d’une 18. Cette « ancienneté » est reliée à une « principialité » ou, si l’on préfère, à une proximité avec le Principe. C’est, en un sens, cette même idée que l’on retrouve dans l’appellation de muqarrabûn pour désigner « ceux qui se sont rapprochés » du Principe et dont il est d’ailleurs significativement écrit dans le Coran (LVI, 13-14) qu’ils étaient « nombreux parmi les premières (générations) et un petit nombre parmi les dernières. » Ce qui souligne encore que la proximité des Anciens avec les temps primordiaux est avant tout une proximité de type cognitif.

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antériorité qui n’est pas horizontale ou temporelle mais verticale ou principielle. C’est un vestige renvoyant à l’instantanéité de l’éternel présent et ce ne sera que plus anecdotiquement ou littéralement qu’une telle trace se rapportera à un moment temporel. C’est une perspective rigoureusement inverse de celle de l’histoire moderne. Cette relation entre le passé et l’éternité lui confère une importance toute particulière au sein du Soufisme qui vaut au passé d’être considéré comme le temps de la connaissance. Et c’est parce que les Maîtres spirituels témoignent d’une antériorité principielle que, quel que soit leur âge, on les pare d’une antériorité temporelle en les appelant du nom de Shaykh qui signifie littéralement « vieillard ». Cette mention ne se réfère pas tant à un âge plus ou moins avancé que certains peuvent avoir qu’à une plus grande proximité de l’antériorité principielle. Sans cette proximité, ils ne pourraient d’ailleurs remplir leur fonction ni transmettre l’influence spirituelle vivificatrice du lien existant entre l’être et son principe19. Et c’est parce que les « Vieillards » (Shuyûkh) du Soufisme peuvent être dits des « Principiels » que, grâce à leur influence, ils peuvent permettre aux « nouvelles plantes » que sont tous les néophytes dans la Voie, de croître et mûrir. Ils participent à cette chaîne de transmission destinée à éclairer les membres de la communauté au fil des siècles. Ils viennent après l’Envoyé, celui qui a ouvert la Voie, pour guider ceux qu’Allâh appelle. C’est pourquoi le Prophète a dit : « Mes compagnons sont comme les étoiles, quel que soit celui d’entre eux que vous prendrez comme modèle, il vous guidera20. » En d’autres termes, si toute histoire sacrée a pour fonction première d’évoquer le passé, c’est avant tout afin d’orienter l’être vers une 19. Notons qu’un tel rapport entre antériorité temporelle et antériorité principielle n’est pas propre à l’Islâm ni au Soufisme mais se retrouve dans toutes les traditions quelles qu’elles soient. Elle a existé même chez les Grecs qui désignaient les « anciens » du terme d’archâioi, dérivé d’arché, « principe », en sorte que ce terme, selon les contextes, pouvait être rendu non seulement par « ancien » mais aussi par « principiel », en tant que les « anciens » avaient pu s’assimiler au Principe pour le connaître. 20. Ésotériquement, ce sont les ‘ârifûn bi-Llah, « connaissants par Allâh », et, exoté riquement, ce sont ceux qui auront le savoir (al-‘ulamâ) des choses divines. Chacun, à un degré différent, compte parmi les « héritiers du Prophète ».

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plus grande primordialité et d’aider chacun à se « souvenir » de ce « passé » mythique et principiel au cœur de toute temporalité et ainsi lui permettre de réintégrer ou de rétablir en lui l’état adamique et paradisiaque primordial21. Toute histoire sacrée repose sur des traces qui témoignent non seulement d’un passé mais d’une éternité et c’est pour cette raison qu’elle peut constituer un enseignement doctrinal pour quiconque suit une voie de connaissance. Sans avoir la portée des paroles d’un Prophète, les actes et les propos d’une sainte telle que Râbi‘a peuvent être considérées comme des ma’thûrât, des « œuvres » d’une portée sans commune mesure avec des écrits littéraires ou philosophiques. Elles dépassent en effet pour le croyant le plan de l’imagination ou du concept. C’est pourquoi elles peuvent faire office de maw‘iza, c’est-à-dire d’« exhortations » ou, si l’on préfère, des « canons de comportement » sur lequel le Musulman peut s’appuyer ou encore de « vérités métaphysiques » et de « critères de jugement », en tant qu’elles témoignent d’une réalisation transcendant les limites de l’état humain. Mais, bien sûr, tout en fournissant des règles de vie et étant des sources de sagesse et de méditation, elles ne sont pas non plus des farâ’id (« obligations ») pour autant et ne peuvent avoir de caractère de prescription absolue comme les 21. Cette double connotation de l’antériorité et de la principialité se retrouve aussi dans le fait qu’en arabe, le terme qadam a le sens de « pied », donc ce par l’empreinte de quoi toute voie se forme, et que l’un des sens principaux de la racine qdm est « précéder », « d’où tout ce qui se réfère, non seulement à une antériorité temporelle, mais à une priorité d’ordre quelconque. C’est ainsi qu’on trouve, pour les mots provenant de cette racine, outre les sens d’origine et d’antiquité (qedem en hébreu, qida ou qidam en arabe), celui de primauté ou de préséance, et même celui de marche, d’avance ou de progression (en arabe taqaddum), et (…) la préposition qadam en hébreu et quddâm en arabe a le double sens de “devant” et d’“avant”. Mais le sens principal, ici, désigne ce qui est premier, soit hiérarchiquement, soit chronologiquement ; aussi l’idée la plus fréquemment exprimée est-elle celle d’origine et de primordialité, et, par extension, d’ancienneté quand il s’agit de l’ordre temporel : ainsi, qadmôn en hébreu, qadîm en arabe signifient “ancien” dans l’usage courant, mais lorsqu’ils sont rapportés au domaine des principes, doivent être traduits par primordial » (René Guénon, « Qabbalah » in Formes traditionnelles et cycles cosmiques, Paris, 1970, pp. 63-64). C’est pour cela que les Muqarrabûn, les « proches » du Principe, sont dits avoir nécessairement réalisé l’état d’« Homme primordial » (Insânu-l-Qadîm) ou que l’on appelle muqaddam, « celui qui est mis en avant », par le Maître pour transmettre parfois l’influence spirituelle à sa place.

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injonctions coraniques ou certains ahâdîth. D’ailleurs, ainsi qu’on le verra, Râbi‘a (ou tout saint) ne s’instaure jamais comme décidant de ce que chacun doit faire dans le monde. Ses propos s’adressent essentiellement à ceux qui, de leur vivant, s’efforcent de quitter ce monde. Il s’agit plutôt de « conseils » (naçâ’ih). De même ils ne fournissent pas une théorie générale, même si, en les juxtaposant, ils participent tous d’un même ensemble et d’une même doctrine qui s’est perpétuée inchangée, quels qu’en soient les lieux ou les époques. La vie de Râbi‘a al-‘Adawiyya, comme de tout saint soufi, ne dément pas cette fonction et tous les éléments qui nous en sont parvenus visent à orienter l’être vers la transcendance divine ainsi que nous allons le voir au fil de ces chapitres. Et c’est pourquoi nous étudierons celle-ci non d’un point de vue historique mais en tant que trace d’un symbolisme métaphysique et exemple pour tous ceux, femmes ou hommes, qui voudront se diriger sur la voie de réalisation spirituelle qu’est le Soufisme.

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CHAPITRE 6 DU PÉCHÉ ET DE L’ENFER Ce qui précède nous aura fait comprendre que, pour une sainte telle que Râbi‘a comme pour tout çûfî, une telle notion du repentir va de pair avec une idée de l’Enfer et du péché très différente et incommensurablement plus profonde que ce qui est entendu d’ordinaire du seul point de vue religieux. Ce qui ne signifie pas pour autant que la crainte de l’Enfer et de Satan ne soit pas présente chez de tels êtres. Tout au contraire, elle culmine chez eux sans commune mesure avec la majorité des croyants. Certains actes ou pensées qui ne seront pas des fautes chez le simple fidèle ou même chez le novice, le seront, par contre, pour ceux qui ont atteint un degré de réalisation élevé. ‘Attâr rapporte qu’une nuit, Râbi‘a s’écria : « Mon Dieu, quand je fais la çalât, éloigne de mon cœur toutes les suggestions sataniques (wasâwis ash-shaytân), ou alors, par un effet de Ta bonté (mann) et de Ta générosité (karam), accepte mes çalawât même troublées par ces suggestions1. » 1. ‘Attâr, Tadhkîrat al-Awliyâ, cité par Badawî, op. cit., p. 157.

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Le waswas (pl. wasâwis) est bien connu en Islâm. Le terme provient de la racine waswasa qui signifie littéralement « sussurer (à l’oreille), suggérer ». Il désigne soit toute suggestion négative au sens large, soit un phénomène assez répandu chez les musulmans conduisant une activité de type névrotique et obsessionnelle et qui se caractérise par un excès de zèle dans la pratique religieuse. Ainsi, par waswas, un fidèle peut, par exemple, être amené à refaire sans cesse ses ablutions de crainte de les avoir rompues. Ce qui pourrait être, de prime abord, un comportement méritoire est jugé en Islâm comme un empêchement. En effet, plus le fidèle refait ses ablutions, plus il se contracte et, son estomac noué, angoissé, aura d’autant plus de risque de rompre celles-ci en émettant un vent et, par suite, de ne plus s’acquitter des rites dans le temps prévu, voire de cesser à terme de les pratiquer afin d’échapper à ce qui sera devenu pour lui, au fil des jours, un empoisonnement de son existence. La tradition voit dans cet excès de zèle maladif une déviance et considère que ce n’est pas le sujet lui-même qui en est la cause mais bel et bien le Shaytân, c’est-à-dire les tendances infraindividuelles ou pulsionnelles. Les excès de scrupule sont même contraires aux principes de l’Islâm qui prône, selon le hadîth et les sources traditionnelles, « l’aisance dans la pratique religieuse ». Le waswas est un des pièges les plus retors que peut rencontrer un être sur la voie et peut atteindre même certains grands saints au début de leur cheminement. Par contre, à la différence du commun des mortels, Sayyida Râbi‘a en est consciente et sait dépasser cette déviance par une sacralisation de sa demande. Il n’en reste pas moins que sa crainte de l’Enfer était si immense que, dans le Siyar aç-Çâlihât, il est dit qu’« elle défaillait à toute mention du feu. » Sha‘rânî raconte que le simple craquement de l’âtre suffisait à la faire s’évanouir. Ailleurs, on dira que cela suffisait aussi à la faire éclater en sanglots. Comme pour les larmes, cette terreur du feu peut être comprise différemment selon la perspective où l’on se situe. Là où un psychologue contemporain y verra une pathologie, le

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métaphysicien y lira le signe d’une tension intérieure et d’une conscience éclairée. Pour un Oriental, le feu n’est pas réductible à la libido, même s’il entretient des liens avec celleci. Le théologien comme le simple croyant voient dans celui-ci avant tout un symbole des tourments de l’Enfer. Par contre, le métaphysicien et l’initié, eux, y voient quelque chose de plus. Sans entrer dans les multiples parallèles et concordances existant entre les différentes traditions, il n’est pas inintéressant de rappeler ici que, chez les hindous, têjas, le « feu », est dit être dérivé de taijasa qui est la condition de l’être correspondant au rêve et au domaine subtil ou, si l’on préfère, aux prolongements psychiques de l’être. Or, en Islâm, c’est également le plan psychique et animique qui est le domaine de prédilection du Shaytân, de « l’Adversaire », dont on sait qu’il condamne ses disciples à brûler dans un feu souterrain et perpétuel. C’est contre ce feu dévorant distinct de la flamme de l’illumination que luttait Râbi‘a. La demande de la sainte d’échapper au feu infernal est à entendre, au-delà de l’image et du sens littéral, comme son désir d’échapper à l’enchaînement perpétuel de la Géhenne2. Comme l’écrit al-Ghazâlî, la perte de l’Autre Vie « est le feu de la Géhenne et le châtiment perpétuel dont la durée de vie en ce bas monde, même si elle était redoublée des milliers et des milliers de fois, ne suffirait pas à en couvrir un millième car il n’a pas de fin3. » C’est cette durée indéfinie qui s’oppose à la réalisation de l’Infini de l’éternité divine pour les êtres qui 2. Cet enchaînement est la version religieuse de l’enchaînement cyclique des actions et réactions concordantes des traditions hindoue et extrême-orientale. C’est en effet à un tel enchaînement que peut être rapportée l’indication des feux de l’enfer consumant et renouvelant sans cesse la peau des damnés (cf. par exemple, Qur’ân, IV, 59). Cette « image » n’est pas une simple « figure de discours » mais signale une réalité des plus « concrètes ». C’est une formulation symbolique de l’indéfinité des passages d’un état individuel à un autre pour l’être qui n’est pas encore sorti du domaine de la manifestation et qui doit ainsi, selon un symbolisme hérité de la Bible, à peine sa « tunique de peau » est-elle consumée (par les feux de l’Enfer), s’en revêtir d’une autre. Signalons encore que c’est à ce même passage indéfini d’une forme à une autre que peut sans doute être référée cette autre image des chaînes dont sont chargés les êtres qui se trouvent en Enfer. « Celui qui cherchera à se soustraire aux exhortations du Très-Haut, Nous lui attacherons Satan avec une chaîne ; il sera son compagnon inséparable » (Qur’ân, XLIII, 35). 3. Ihyâ ‘Ulûm ad-Dîn, IV, 1, rukn I, bayân 3.

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s’obstinent à demeurer dans l’illusion et vivent « de pain seul », séparés de leur principe. Enfer et Paradis ne sont pas des lieux extérieurs à l’être mais intérieurs à chacun de nous. Nous en sommes plus ou moins proches selon que notre éveil intérieur sera plus ou moins grand ou, si l’on préfère, selon que l’on est ou non dans l’égarement. C’est d’ailleurs ce qui est attesté de façon répétée dans divers ahâdîth : « Le Paradis est plus près de vous que le lacet de votre sandale. Et il en va de même pour l’Enfer. » Le comprendre permet d’entendre les paroles de Râbi‘a avec une profondeur et une portée bien plus grandes que ne le permettraient de simples lectures morales ou théologiques, aussi légitimes soient-elles à leur niveau. Ainsi comprise, l’horreur des feux de l’Enfer de Râbi‘a et de certains saints résonne avec une tout autre portée : la crainte de l’Enfer (ou de ses feux) est la crainte de ce qui sépare ou de ce qui dis-trait du Cœur de toute chose. La dis-traction (ghafla) est l’écueil de tout chercheur. La recherche, elle, va de pair avec une exigence extrême et, parvenue à un certain degré, nécessite, de la part du spirituel, une concentration totale et absolue. Ainsi Râbi‘a raconte-t-elle : « un jour, à l’aube, après avoir récité quelques prières, je m’étais assoupie ; je vis alors en songe un arbre d’une verdoyante fraîcheur, d’une beauté et d’une taille incomparables ; sur cet arbre, poussaient trois genres de fruits qui ne ressemblaient en rien aux fruits de ce monde et qui étaient de la grosseur d’un sein de vierge : un fruit blanc, un fruit rouge et un fruit jaune, resplendissant comme des astres, sur le fond vert de l’arbre. – À qui donc appartient cet arbre ? demandai-je avec admiration. J’entendis alors une voix me répondre : – Cet arbre est celui des prières que tu as récitées tout à l’heure4. Comme j’en faisais le tour, j’aperçus un fruit de la couleur de l’or, répandu à terre : 4. Cet arbre est l’Arbre de vie et ses fruits d’or sont le symbole de l’immortalité de ceux qui y goûtent, état qu’ils perdent cependant s’ils viennent à se laisser distraire par les choses de ce monde, aussi dérisoires et futiles soient-elles. L’être qui s’en nourrit

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– Il eut mieux valu à ce fruit d’être sur l’arbre, avec les autres ! m’exclamai-je. Il me fut répondu : – Ce fruit était en effet sur l’arbre, mais au cours de ta prière, tu t’es laissée distraire par la pensée de la pâte que tu faisais lever, et aussitôt le fruit tomba5. » C’est parce que, partout et toujours, le péché est littéralement une dis-traction, ou ce qui empêche l’archer d’atteindre la cible (c’est-à-dire de réintégrer le centre ou, si l’on préfère, revenir vers Allâh), qu’une simple pensée, dans la mesure où elle éloigne, même fugitivement, de Dieu suffit à empêcher l’être d’en cueillir tous les fruits. D’autre part, comme tous les récits rapportés sur Râbi‘a, celui-ci montre à quel degré d’exigence était parvenue non seulement la sainte mais aussi ses contemporains. Qu’une simple pensée qui n’est pas dirigée vers Dieu suffise à faire perdre les fruits de la çalât demeure une vérité même aujourd’hui et cela reste à méditer par tous ceux qui prient, ne serait-ce que pour ne pas s’illusionner sur le degré auquel ils pourraient se croire parvenus. Pour être acceptée de façon parfaite (l’or du fruit est ici symbole de perfection), une çalât doit être concentration parfaite ou, si l’on veut, une tension sans distraction. Tout rite a en effet pour but non seulement d’orienter l’être mais aussi de lui servir de support en vue d’une réalisation intérieure qui sera plus ou moins profonde ou complète selon ce dont Dieu aura bien voulu le gratifier. En effet, les rites, en tant que supports de méditation et donc de réintégration pour l’être, ne sont pas tant des contraintes que des moyens pour s’affranchir des contraintes. Ainsi la çalât a pour but « que tu sois toujours dans l’état où tu es devant la çalât », c’est-à-dire « te souvenant de Dieu6. » Les interdits doit s’être détourné du plan terrestre. Il souligne aussi l’asservissement dans lequel la pensée maintient les créatures, même les plus saintes. C’est dans la pensée discursive que se trouve l’origine des maux. Comme l’écrit Rûmî, « c’est la raison pour laquelle (toutes) les créatures ont le cœur malade et affligé » (Mathnawî, II, 3558). 5. Munâwî in Amri, op. cit., pp. 112-113. Cf. Abû Tâlib al Makkî, Qût al-Qulûb, t. I, p. 103 6. Rûmî, Le Livre du Dedans, Fîhi mâ fîhi, ch. XLIV, p. 222.

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comme les contraintes ne sont là que pour aider l’être à voir (ou à se souvenir) de son Principe. Et ce qui est dit ici de la çalât peut être dit de toute pratique comme de toute règle traditionnelle. De même qu’un peintre qui voudrait apprendre telle technique picturale est obligé de se soumettre à certaines règles et impératifs, sans quoi il ne pourrait ni apprendre ni obtenir le rendu souhaité, de même tout croyant, et a fortiori tout mutaçawwif, qui désire parvenir au salut de son âme ou, plus encore, à la réintégration de son être dans l’état primordial, doit se contraindre à certains interdits et pratiques qui ont, entre autres, pour finalité de l’orienter et de le purifier. En ne s’y soumettant pas, non seulement, pour reprendre les paroles d’un hadîth, « l’homme se frustre des bienfaits que Dieu a créés pour Lui » mais, de surcroît, il se limite. En effet, sur un plan immédiat et transitoire, il a la sensation de s’être libéré du carcan des obligations rituelles mais, à un autre niveau, il se prive du support d’affranchissement de ses propres limites que les rites constituent pour les êtres qui savent les utiliser7. C’est pourquoi il est dit dans le Qur’ân (XXXVI, 9) : « Nous avons mis une barrière devant eux et une barrière derrière eux et nous les avons enveloppés d’un voile de façon à ce qu’ils ne voient plus rien. » Du point de vue soufi, l’Enfer n’est pas tant un lieu de punition qu’un voile séparant l’être de la Présence divine. Et n’y échappe que celui qui effectue une totale « demande de pardon » et se conforme à la Volonté principielle et à Ses préceptes de façon sincère et précise. En effet, seul un être qui s’est purifié du péché peut se voir gratifié de ces paroles divines citées par le Prophète : « Entre, ô croyant, ta lumière a éteint mon feu8. » Mais, ainsi qu’il est dit, toujours dans le Qur’ân, « pour les infidèles, il leur est égal que tu les avertisses ou non, ils ne 7. Il est évident qu’une telle valeur de support en vue d’un dépassement des limites ne prend vraiment une telle portée que pour les êtres dont le lien avec le Principe a été vivifié par la baraka muhammadienne de l’initiation et, bien entendu, pour autant que les rites ne soient pas effectués mécaniquement ou de façon distraite mais avec toute l’intention et la concentration requises. 8. Hadîth ; cf. Suyûtî, Al-Jâmi‘ aç-çaghîr, Alep, 1969, I, p. 132.

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croiront pas » (II, 6). Dans un tel contexte, l’infidèle ou le pécheur est celui à qui Allâh Se cache. Tout péché a métaphysiquement une raison d’être. Le çûfî comprend que celui-ci participe des possibilités de ce monde et il s’en détourne, non par crainte du Jugement Dernier, mais parce que suivre la voie du péché l’enchaînerait dans les limites de ce monde et le priverait de la plénitude divine. Ainsi que le note Margaret Smith, « Râbi‘a détestait le péché non parce qu’il impliquait une punition après ce monde mais car il la séparait de Dieu9. » Comme l’écrit Ghazâlî, il constitue « un voile entre l’homme et l’Aimé » (Ihyâ, IV, 1) et c’est de ce voile dont il faut s’affranchir. De fait, ‘Attâr rapporte que Râbi‘a, qui était tout entière tournée vers « l’union » (ittiçâl), redoutait à ce point la « séparation » (infiçâl) qu’un jour, des gens qui étaient venus la visiter, la trouvèrent en train de déchirer un morceau de viande avec ses dents. Intrigués, ils lui demandèrent : « N’as-tu donc pas de couteau que tu doives la couper ainsi ? » Elle leur répondit : « Par peur de couper le lien (i.e. me séparer d’Allâh), je n’ai jamais eu de couteau dans ma maison, c’est pourquoi non, je n’en ai pas10. » Elle fuyait tout ce qui pouvait avoir trait à la séparation et à la dualité d’une manière aussi minime soit-elle. Ainsi, une fois, Hasan al-Baçrî lui aurait demandé : « Tu sais le pourquoi des choses, (…) parle-moi de ce qui t’a été révélé » et elle lui aurait répondu : « Aujourd’hui, je me suis rendue au bazar, ayant avec moi deux pelotes de corde que j’ai vendues pour deux pièces d’or pour me procurer des vivres. J’ai pris dans chacune de mes mains une de ces pièces d’or, craignant que, si je les tenais ensemble (en une seule), toutes deux réunies ne me fissent dévier de la voie droite11. » On retrouve ici le rejet des biens matériels mais appliqué à sa racine, c’est-à-dire au rejet de toute dualité, la plus minime soit-elle. Il s’agit littéralement de ne rien faire peser qui puisse dis-traire (ou corrompre) l’unification de 9. M. Smith, Râbi‘a the Mystic, p. 57. 10. ‘Attâr, Tadhkira al-Awliyâ, I, p. 68. 11. ‘Attâr, Le Mémorial des Saints, p. 91.

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l’être ou, tout au moins, empêcher que l’être risque de ne plus tendre vers cette unification, but unique de tous les mutaçawwifûn. C’est cette vision non dualiste – on pourrait dire quasiment védantique ou shankarienne – qui est au principe de nombreux discours sur le péché au sein du Soufisme et qu’il est important de garder présente à l’esprit afin d’éviter de ramener toutes ces exigences à de simples propos moralistes. On sait qu’en termes exotériques, l’infidèle est celui qui est dans la séparation (ou la dualité) et le croyant sinon celui qui est dans l’union du moins celui qui est dans la tension vers celle-ci. Râbi‘a reprend cette distinction mais la prolonge en ces termes : « la mécréance (kufr) a le goût de la séparation (faraq) mais la foi (îmân) la saveur de l’union (wiçâl). Goût et saveur seront révélés au Jour Dernier. Le châtiment d’un groupe rassemblé sur cette plaine a pour nom la séparation sans union mais à la compagnie plus élevée revient l’union sans fin. Ceux qui ardent dans le deuil de la séparation larmoient : Être coupé de Lui Fait d’une seconde un millier de jours Par son fardeau de souffrance et ses affres, Une nuit en un millier d’années s’alanguit12. » Pour la sainte, péché et union sont à concevoir reliés au Jour du Jugement, qui, pour elle, n’est pas plus un jour comme les autres qu’un jour à venir mais bel et bien l’instant éternel de la Vérité. C’est pourquoi, métaphysiquement, une seconde de séparation peut devenir un millier de jours, une nuit des milliers d’années. L’union qui permet d’échapper au péché de la séparation ne relève pas d’un moment parmi tant d’autres mais ne fait qu’un avec l’unique instant de l’éternité divine. En dernière analyse, pour Râbi‘a comme pour les soufis, le péché est le fait de quiconque demeure séparé du Principe. Dans cette perspective, tant qu’on n’est pas parvenu à l’union, on demeure dans la séparation et donc dans le mal. Dans une telle conception du péché, l’exotériste et l’infidèle de même que 12. Tafsir-i Ançâri, t. II, p. 538.

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tout chercheur qui n’est pas encore parvenu au But, en dépit de toutes les différences qui les caractérisent, se rejoignent d’une certaine façon. En effet, quiconque persiste à agir de son propre chef, au lieu de laisser agir le Principe à travers lui, demeure dans l’illusion et dans l’enfer de la conscience conditionnée. Et c’est pourquoi, en quelque sorte, le pécheur, s’il fait du mal, se le fait d’abord à lui-même13. D’où l’exclamation de Rûmî : « sauve-nous de cette âme (nafs) détestable : son couteau a atteint nos os » (Mathnawî, II, 2445) – ce couteau est celui de la séparation qui effrayait tant Râbi‘a, celui qui nous donne l’illusion d’exister par nous-même et non de considérer notre propre existence pour ce qu’elle est : une pure et simple illusion. C’est en effet cette tendance à agir selon son propre gré, donc de façon paresseuse, sans faire l’effort de se contraindre et de se soumettre, qui est le fruit de cette illusion égoïste. Car « y a-t-il un homme plus égaré que celui qui suit ses penchants sans aucune direction de la part de Dieu ? » (Qur’ân, XXVIII, 50)14. « Quand tu atteindras le fond de ta propre nature, tu sauras alors que cette abjection venait de toi-même » (Mathnawî, I, 1324). Rien ne brûle en Enfer sinon le moi ou l’âme dont Ghazâlî disait qu’elle était « le plus grand de nos ennemis » 13. Cf. Rûmî, Le Livre du Dedans, Fîhi mâ fîhi, ch. II, p. 33. 14. Pour un tel homme, les produits de ses œuvres sont les divinités devant lesquelles il se prosterne dans un processus idolâtrique (qui, au passage, peut être dit à la base de toute la création actuelle, qu’elle soit culturelle et artistique ou industrielle et commerciale). Sans ce mirage, il n’y aurait pas d’égarement mais uniquement ce qui est et ne peut pas ne pas être. Un tel processus n’est pas récent et remonte à une tendance présente depuis des millénaires mais qui, jusqu’aux siècles derniers, hormis quelques exceptions, demeurait encore contenue et limitée à des déviations transitoires. C’est à lui que se réfère ce verset coranique : « Ce sont eux qui ont perdu eux-mêmes leurs propres âmes et les divinités qu’ils avaient inventées ont disparu » (Qur’ân, XI, 21) C’est aussi lui que visait Platon quand il critiquait « l’art qui copie les apparences superficielles, l’art qui imite simplement les caractéristiques extérieures et produit des “ressemblances” (…) un art réaliste et artificieux qui a recours à la perspective, à la polychromie et aux ombres pour tromper l’œil » et qu’il dénonçait « comme une imposture digne de bateleurs » qu’il attaquait « avec véhémence dans le dixième livre de La République comme étant un “art du divertissement”, qui n’existe qu’au niveau de l’eikasia, qui joue superficiellement avec l’imaginaire en vue de titiller les sens et les émotions, de flatter l’ego et, ainsi, réduire les hommes à une “théatrocratie infantile” de type infra-rationnel » (Cf. Snodgrass, Architecture, Time and Eternity, New Delhi, 1994, pp. 20-21).

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« L’âme et le Shaytân ne sont qu’un seul et même être se manifestant sous deux formes différentes ; essentiellement un au premier jour, il devint l’ennemi envieux d’Adam15. » Le mal n’est pas une chose extérieure à l’homme mais se trouve en lui. C’est selon la tendance à laquelle s’identifie l’être qu’il est bon ou mauvais. « À une certaine heure, un loup entre dans l’homme ; (et) à une autre heure, (c’est) une beauté semblable à la lune avec le visage de Joseph » (ibid., II, 1420). « À chaque instant, une espèce différente surgit dans la poitrine : tantôt un démon, tantôt un ange, tantôt des bêtes sauvages » (ibid., II, 1426). Ce qu’illustre ce récit rapporté dans un de ses traités par le Shaykh al-‘Alawî : « On dit que Râbi‘a al-‘Adawiyya rencontra un Gnostique et l’interrogea sur son état ; il répondit : “J’ai marché dans la voie de l’obéissance et n’ai point péché depuis que Dieu m’a créé” sur quoi elle s’écria : “Hélas, mon fils, ton existence (c’est-à-dire ta conscience individuelle avec tous les attachements et les illusions qu’elle suppose) est un péché à nul autre comparable”16. » Rûmî, tout en reprenant cette idée, la pousse à son extrême et affirme que « le fait que j’adresse (à Dieu) des louanges est en réalité une absence de louanges de ma part, car cette louange est une preuve de mon existence, et l’existence est un péché » (Mathnawî, I, 517)17. C’est pourquoi Râbi‘a est dite avoir été en lutte permanente contre son ego et son âme (mukhkhâlafa an-nafs), en tant que ceux-ci masquent, par ignorance, passion ou illusion, la « Vérité » (al-Haqq) dans le cœur de tout être humain. Munâwî rapporte qu’« elle priait toute la nuit et qu’au lever du jour, elle s’asseyait un peu dans son oratoire (muçallâ) juqu’à ce que le ciel fût devenu clair et, là, s’assoupissait avant de se réveiller et de se reprocher : “Ô Ego, comme tu as dormi ! Peu s’en faut que tu ne t’endormes pour n’être réveillé que 15. Mathnawî, III. 4053. 16. Ahmad al-‘Alawî, Al-Minah al-qudûsiyya fî Sharh al-Murshîd al-Mu‘în bi-Tarîq aç-çûfiyya, p. 41. 17. C’est pourquoi il est enjoint dans le Qur’ân : « Glorifie ton Seigneur par la louange (qu’Il S’est adressé à Lui-même) et demande-Lui pardon car Il accorde Son repentir » (CX. 3).

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par l’Appel du Jour du Jugement dernier”18. » On raconte aussi qu’un jour, elle entendit en songe une servante angélique lui chanter : « Ton sommeil est l’ennemi juré de tes prières. Ta vie est une opportunité, si tu la négliges ou l’ignores, tu disparaîtras en poussière 19 ! » Et ‘Attâr dit que « Râbi‘a jeûna et veilla durant sept jours et sept nuits consécutifs, tout entière consacrée à la prière. Au bout du huitième jour, elle entendit son âme (nafs) se lamenter : “Jusqu’à quand me tortureras-tu ainsi sans relâche20 ?” » Nombreux sont les récits de la lutte que menait Râbi‘a contre celle-ci. Cet acharnement trouve son origine dans la conscience de la fonction séparatrice de toute manifestation individuelle. Il transparaît dans les propos des soufis de quelque époque que ce soit. Elle qui pleurait abondamment n’admettait les pleurs que s’ils venaient du cœur et non de l’ego. Il est, en effet, essentiel pour l’être en quête de vérité de renoncer au moi et à tout ce qui peut l’attacher. Il doit se vider du monde, de sa conscience individuelle pour enfin parvenir à se souvenir du Principe. C’est pourquoi, pour un tel être, l’amour du moi est maudit et s’interpose entre lui et sa foi. Il ne saurait en être autrement dès lors que l’on est conscient de ce que toute recherche vient du Principe et non de Ses créatures, même si, en apparence, ce sont elles qui font la démarche de se tourner vers Lui. Il faut abandonner l’un pour atteindre l’autre. « Ta propre âme (nafs) est ce qui te voile (hijâb) la création (al-khalq), et cette dernière te voile (hijâb) le Créateur (al-Khâliq)21. » 18. Munâwî, cité par Badawî, op. cit., p.135. On trouve le même épisode chez Ibn al-Jawzî, op. cit., p. 57, aussi cité par Badawî, op. cit., p. 127. Le récit dans ce dernier cas est attribué à ‘Abda bint Abî Shawwâl, une « servante » de Râbi‘a qui l’aurait entendu directement de sa maîtresse. 19. Benghal, La Vie de Râbi‘a al-‘Adawiyya, p. 70. 20. ‘Attâr, Tadhkîra al-Awliyâ, cité par Badawî, op. cit., p. 152. 21. Al-Jîlânî, op. cit., p. 173. On a littéralement : « te voile la connaissance (ma‘rifa) de la création », puis « te voile la connaissance du Créateur », mais on a préféré sous-entendre l’idée de connaissance dans la traduction, afin d’en éviter les lourdeurs. L’idée ici est tout de même que l’ego ou la nafs est une entrave à la connaissance, en ce sens qu’elle s’interpose entre le monde et l’être tout comme la création elle-même s’interpose entre Dieu et sa créature, empêchant celle-ci d’avoir une vision directe qui lui permettrait de saisir la création telle qu’elle est en réalité pour qui la voit en Dieu, à savoir, infinie et illuminée.

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Toute cette doctrine doit être présente à l’esprit de quiconque veut comprendre l’enseignement de Râbi‘a. Et c’est pourquoi, la plupart des récits la concernant montrent celle-ci, certes pleurant beaucoup, mais aussi et surtout emplie d’un bonheur radieux et d’une sérénité fort lointains des peurs qui obsèdent souvent bien des exotéristes. Aux feux de l’Enfer, ainsi qu’en attestent divers textes, elle opposait ceux, intérieurs, de la spiritualité qui, dans l’être, consument l’âme et laissent le champ libre à l’esprit. Et de même que le Feu attire le Feu, la Lumière intérieure qui l’animait attirait de même la Lumière. Si bien que, pour employer une distinction que fait Hujwîrî, au « feu de colère », elle opposait la « grâce lumineuse22 » qui, en dernière analyse, est identique au « feu » de l’Amour des Fidèles d’amour iraniens sur lequel on reviendra plus loin. De fait, « ‘Attâr parle de Râbi‘a comme d’une “femme brûlant des feux de l’amour” », et dans ce sens le feu est considéré comme un élément pur et sacré, causant de la souffrance certes mais purifiant des scories. Al-Kalâbâdhî, employant le terme en ce sens, disait : “Il est brûlé celui qui sent le feu mais celui qui est le feu comment serait-il brûlé23 ?”, c’est-à-dire celui qui est sous les liens de l’âme et du péché doit éprouver la colère de Dieu mais celui qui est embrasé par l’amour de Dieu quelle peur peut-il avoir du Jugement Dernier24 ? » Ce « Feu », qui détruit tout ce qui n’est pas Amour, « éteint » tout ce qui relève de l’individualité. C’est « le feu dont Dieu a embrasé le cœur de Ses saints et qui, par conséquent, peut brûler ce qui demeure en eux de rêves inutiles, de désirs, d’intentions et de besoins25. » Ainsi entendus, les évanouissements de Râbi‘a à sa mention peuvent être rattachés non plus à la simple peur, encore moins à l’émotivité, mais à la « crainte révérencielle » face au Principe transcendant de toutes choses et se réfère plus à un état 22. Kashf al-Mahjûb, p. 177. 23. Al-Kalâbâdhî, Ma‘ânî al-Akbâr. 24. M. Smith, op. cit., p. 41. 25. Ghazâlî, op. cit., IV, p. 309.

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spirituel qu’à une simple émotion. L’évanouissement, ici, est lié à un « ravissement » intérieur plus qu’à de la peur. Et ses tremblements, de même, n’étaient pas d’appréhension mais de béatitude. Ils relevaient non de la crainte ou de l’espérance mais dépassaient le domaine de la dualité.

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APPENDICES

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04.Sources[29-07]_Mise en page 1 25/09/09 10:40 Page355

SOURCES Râbi‘a n’a jamais écrit aucun texte. Les poèmes tout comme les propos qui nous sont parvenus d’elle ont été transmis par différents auteurs, tous hommes, pour la plupart grands Maîtres du taçawwuf et saints vénérés en Islâm. La qualité de ces transmetteurs atteste de l’importance que cette sainte eut dans les premiers temps du Soufisme et pourquoi son culte s’est perpétué jusqu’à nos jours. Cette « femme » n’était pas une simple dévote pétrie de piété, ni une ascète remarquable, bien qu’elle fût aussi tout cela, mais un être exceptionnel qui était allé bien au-delà de la réalisation humaine courante. En cela, elle était plus qu’une femme et plus qu’un homme ou qu’un être humain en général et j’espère que ces pages l’auront laissé entrevoir. En ce qui concerne les sources proprement dites, tout chercheur s’intéressant à elle constatera très vite que, bien souvent, ses poèmes ou ses propos furent attribués aussi à d’autres spirituels, hommes ou femmes, sans grand souci de chronologie ni de cohérence. Une des confusions les plus fréquentes tient à une similitude de nom entre elle et Râbi‘a la Syrienne. Cette dernière, née à Damas, serait décédée en 845. C’est elle qui, selon certains textes, serait enterrée sur le mont des Oliviers à Jérusalem. À la différence de Râbi‘a al‘Adawiyya, elle aurait été contemporaine de Daranî (mort en 830) et, elle, mariée, à Ahmad Ibn Abî al-Huwârî, connu aussi sous le nom d’Abû-lHasan ou de Maymûn (« le Bienheureux »). Il n’en reste pas moins que, parfois, certains, tout en distinguant les deux, attribuent néanmoins à l’une comme à l’autre la « paternité » des mêmes poèmes. De telles confusions pourraient laisser croire que la transmission de l’ensemble du corpus des propos et des poèmes attribués à la sainte ne serait

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pas fiable. Ce serait ne pas tenir compte des chaînes de transmission orale dont ceux-ci ont vraisemblablement fait l’objet et qui sont attestées par divers auteurs. Ces chaînes laissent à penser, d’une part, que les propos de la sainte (comme d’ailleurs des grands maîtres du taçawwuf en général) ont été pendant longtemps l’objet d’une mémorisation collective au sein des confréries ou que cette dernière faisait tout au moins partie du travail de transmission entre les shuyûkh et leurs disciples au même titre qu’encore aujourd’hui, on apprend par cœur, dans les confréries tout comme dans les écoles coraniques, les versets du Qur’ân ou les ahâdith avec leurs chaînes. De telles pratiques ne doivent pas surprendre. En effet, toute science en Islâm, donc y compris celles propres au taçawwuf, n’a de valeur que si elle est soutenue par une filiation remontant sinon jusqu’au Prophète du moins jusqu’à un de ses saints. De telles chaînes n’empêchent cependant pas les confusions. Ce qui importe ici est de comprendre pourquoi et comment elles arrivent. On en donnera l’exemple suivant, tiré d’Ibn Al-Jawzî1 : « Al-Qurashî a dit : Muhammad Ibn Idrîs m’a raconté qu’Ahmad Ibn Abî al-Huwârî lui a dit qu’al-‘Abbâs Ibn alWalîd a rapporté : Râbi‘a a dit… » Badawî note que cette silsila ne se rapporte pas à Râbi‘a al-‘Adawiyya mais à la Râbi‘a la Syrienne ainsi qu’en témoigne la présence de son mari Ahmad Ibn Abî al-Huwârî dans la chaîne. Apparemment, pour les auteurs musulmans, plutôt que la paternité proprement dite de tel ou tel propos, deux éléments primaient : d’une part, l’authenticité de la chaîne de transmission qui atteste que les paroles rapportées proviennent bien d’une autorité, qu’elle soit spirituelle ou autre, et d’autre part, le contenu proprement dit ou la vérité des paroles rapportées. Dans le cas des deux Râbi‘a, les propos et leurs contenus étaient à ce point voisins que les biographes et les commentateurs n’ont pas forcément jugé primordial de les distinguer, pratique qui est aux antipodes de l’analyse historique pratiquée en Occident. Un survol succinct des sources peut donc s’avérer utile pour le lecteur. À la fois pour s’y retrouver mais surtout pour mesurer à quel point le crédit que l’on attribuera aux récits qui nous sont rapportés à son propos est avant tout acte de foi. Ce qui ne veut pas dire pour autant que les informations fournies soient purement imaginaires car, répétons-le, quiconque aura approché de près ou de loin, aujourd’hui encore, des spirituels authentiques, les très rares qui demeurent encore en ce monde, aura été témoin, voire acteur, de récits identiques, incroyables pour la généralité des lecteurs occidentaux contemporains bien qu’ils composent cependant le quotidien de ces derniers Orientaux capables de vivre pour autre chose que les biens de ce monde. 1. Çifat aç-çawfa, cité par Badawî, op. cit., p. 126. Certaines chaînes sont parfois plus longues selon le nombre des transmetteurs et les siècles écoulés. Souvent elles constituent non une courte phrase mais un très long paragraphe.

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04.Sources[29-07]_Mise en page 1 25/09/09 10:40 Page357

Sources

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Ces sources témoignent, par-delà toute historicité, qu’elle soit considérée comme anecdotique par les uns ou sacrée par les autres, de l’estime dont a pu et peut encore jouir Sayyida Râbi‘a au sein de la communauté musulmane, non seulement auprès des mutaçawwifûn, mais aussi chez le commun des croyants qui continuent non seulement de faire part à la sainte de leurs souhaits mais souvent de les voir exaucés. Un autre témoignage de cette popularité consiste dans le fait que la plupart des auteurs qui se réfèrent à elle le font en la désignant simplement comme « Râbi‘a » sans plus de précision, attestant ainsi qu’elle était une personnalité suffisamment connue de tous pour ne pas avoir besoin d’être située plus précisément. Le plus ancien des auteurs à l’avoir mentionnée est al-Jâhidh (décédé en 869), auteur du Kitâb al-Hayawân (« le Livre des animaux ») et du Kitâb alBayân wa-t-Tabyîn, un ouvrage célèbre de rhétorique où elle est désignée du nom de Râbi‘a al-Qaysiyya. Jâhidh aurait pu connaître la sainte dans son enfance et, en tout cas, approcher ceux qui l’ont fréquentée. Natif de Bassorah, donc la même ville qu’elle, il fut en tout cas certainement au fait à la fois des pensées, des récits et des mœurs de cette période. Abû Naçr as-Sarrâj (décédé en 988) mentionne lui aussi Râbi‘a dans son Kitâb al-Luma, un des premiers traités de Soufisme qui nous soit parvenu et dont le but était de montrer l’accord de cette voie avec le Qur’ân et la Sunna. Il y prône l’éloge de la connaissance directe dont Dieu gratifie Ses saints. Comme tout auteur traditionnel, son propos n’est jamais de donner son point de vue mais d’exposer le plus fidèlement possible la perspective traditionnelle dans toute son orthodoxie. Abû Tâlib al-Makkî (décédé en 996) mentionne lui aussi plusieurs fois Râbi‘a dans son Qût al-Qulûb (« La Nourriture des Cœurs »), un autre des premiers traités de Soufisme. Il rapporte plusieurs récits sur divers moments de la vie de la sainte et cite son fameux poème sur les « deux amours » qu’il commente longuement. Il cite plusieurs autres auteurs auxquels ces vers ont été aussi attribués mais estime, quant à lui, qu’ils sont d’elle. Al-Kalâbâdhi (mort aux alentours de l’an mille) parle lui aussi de Râbi‘a dans son Kitâb al-Ta‘arruf li-Madhhab ahl at-Taçawwuf (« Le Livre de la Quête en tant que Religion des Gens du Soufisme ») ainsi que dans son Ma‘ânî al-Akhbâr (« Les Sens Cachés des Traditions »). La leçon qu’il donne du poème sur les « deux amours » est légèrement différente de celle fournie par Abû Tâlib al-Makkî. Al-Hamâdhânî (décédé en 1007) est, dans son Shakwa al-Gharîb (« Complainte de l’Étranger »), un des premiers auteurs à nous rapporter

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la demande faite par ‘Abd al-Wâhid Ibn Zayd, un autre spirituel de son époque, de l’épouser et comment la sainte l’avait reconduit. Pendant longtemps le manuscrit complet du Tabaqât aç-Çûfiyya d’Abû ‘Abd ar-Rahmân as-Sulamî (décédé en 1021), auquel Jâmî et Munawwar se réfèrent, ne nous est pas parvenu sous sa forme complète mais amputé de la partie consacrée aux femmes. Cette lacune est désormais comblée par la publication de son Dhikr an-Niswa al-muta‘abbidât aç-çûfiyyât. Abû Nu‘aym al-Içfahânî (décédé en 1039) est un des premiers à avoir rédigé un recueil constitué de biographies de saints. Dans son Hilya al-Awliyâ wa tabaqât al-açifyâ (« La Parure des Saints »), connu aussi sous le nom de Hilya al-Abrâr, une œuvre biographique et doctrinale en dix volumes, sans lui consacrer un chapitre à part entière, il parle à plusieurs reprises de Râbi‘a à propos d’autres saints des premiers temps de l’Islâm. Margaret Smith rapporte à son propos qu’il aurait écrit une biographie de la sainte n’existant que sous forme de manuscrit et qui se trouverait à Istanbul mais qu’elle-même n’a pas été capable d’en obtenir une copie. Elle précise qu’étant donné l’autorité et le crédit dont jouit cet auteur, « si jamais celle-ci pouvait être trouvée, elle éclairerait probablement grandement la vie et les enseignements de Râbi‘a dans la mesure où il s’agirait de la plus ancienne biographie la concernant » (Râbi‘a the Mystic, p. XV.) Sauf erreur, ce manuscrit n’a pas encore été exhumé à ce jour. Sans être à proprement parler un biographe, Abû-l-Qâsim al-Qushayrî (décédé en 1074) rapporte, quant à lui, dans son « traité » intitulé précisément Risâla, de nombreux propos et anecdotes mettant en scène la sainte en relation avec les différentes étapes de la voie spirituelle. Il s’y réfère comme à une autorité spirituelle de son temps et à une Shaykha authentique. C’est au XIIIe siècle qu’est écrite sans doute la biographie aujourd’hui disponible la plus complète concernant Râbi‘a sous la plume de Farîd addîn ‘Attâr (décédé en 1230) dans son Tadhkira al-Awliyâ (traduit en français sous le nom du Mémorial des Saints d’après une traduction ouïgour de Pavet de Courteille, malheureusement à divers égards incomplète). Certainement un des plus anciens traités en persan traitant de la vie des saints, ce texte appartient en propre à l’hagiographie et privilégie la valeur symbolique et la portée spirituelle au détriment d’indications précises quant aux sources dont il tire ses informations ou à leur validité historique. Sa lecture et une comparaison avec les autres biographies de Râbi‘a montrent qu’il a manifestement utilisé les écrits de ses prédécesseurs mais aussi, très vraisemblablement, une autre forme de transmission, fondamentale à cette époque, celle de la transmission orale. Toutes les biographies de son volume ont clairement un seul et même but : édifier le lecteur et l’orienter vers une voie

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de recherche intérieure. M. Smith remarque à propos de la présentation que donne ‘Attâr, un « fait curieux », à savoir que « Râbi‘a, bien qu’étant dotée ici d’un surnom d’origine tribale, n’est jamais appelée par le nom de son père, ainsi que toute femme musulmane non encore mariée l’est jusqu’à aujourd’hui. Son homonyme, Râbi‘a de Syrie, qui mourut quinze années avant elle, est toujours appelée Râbi‘a bint Ismâ‘îl (c’est-à-dire fille d’Ismaël) et sa lignée parentale est détaillée. Le fait que Râbi‘a n’ait pas de patronymie et ne soit appelée que par le nom de sa tribu, est une preuve manifeste de ce qu’elle ait été une esclave et qu’elle n’avait, par conséquent, pas de parenté connue. Il en serait de même aujourd’hui dans les pays où l’esclavage demeure ou est demeuré jusqu’à voilà peu » (Râbi‘a the Mystic, pp. XVIIXVIII). Çibt Ibn al-Jawzî (mort en 1257) est « l’auteur du Mir’â az-Zamân, “le Miroir du Temps”, dans lequel se trouve une biographie de Râbi‘a d’une considérable longueur qui est de grande importance car elle est très probablement dérivée du Çifat aç-Çafwa, “L’attribut de l’élite”, de son grand-père Ibn al-Jawzî, qui est lui-même un résumé de la Hilya d’Abû Nu‘aym » (Margaret Smith, Râbi‘a the Mystic, p. XVIII). Parmi les célèbres biographes de Râbi‘a, on mentionnera aussi Ibn Khallikân (décédé en 1282) qui, tout en ayant affirmé, dans la préface de son Wafayât al-A‘yân (« Nécrologie des Hommes Eminents »), avoir remonté la généalogie des saints dont il traite, aussi haut qu’il a pu et en ayant apporté un témoignage d’autant plus méritoire qu’il cite ses sources, n’en a pas moins à plusieurs reprises confondu la sainte avec Râbi‘a bint Ismâ‘il, la Syrienne. Al-Hurayfîsh (décédé en 1398), un auteur égyptien, rapporte dans son Ar-Rawd al-Fâ’iq (« Le Jardin Excellentissime ») plusieurs récits concernant divers saints et saintes musulmans dont Râbi‘a à laquelle il attribue des vers qu’on ne trouve mentionnés nulle part ailleurs. Taqî ad-Dîn al-Hiçnî (décédé en 1426), originaire de Damas, a consacré un recueil tout entier, par ailleurs très documenté, aux saintes musulmanes, le Siyar aç-Çâlihât (« Vies des Femmes pieuses ») dont une partie est dédiée à Râbi‘a sans malheureusement apporter d’information spécifique puisque son contenu dérive vraisemblablement d’Ibn Khallikân et d’al-Jâhidh. De même Jâmî (décédé en 1492) consacre, dans son Nafahât al-Uns (« les Haleines de la Familiarité »), une section aux saintes musulmanes dont Râbi‘a mais, pour l’essentiel, celle-ci est redevable elle aussi à d’autres ouvrages dont le Tabaqât aç-Çûfiyya (« Les catégories de Soufis ») d’alAnçârî et d’un autre de même titre attribué à Sulamî ainsi qu’à divers autres auteurs, y compris Ibn ‘Arabî.

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Parmi les biographes importants de la sainte, on citera encore ‘Abd arRa’ûf al-Munâwî (décédé en 1622) qui, dans son Al-Kawâkib ad-Durriyya (« Les Étoiles Étincelantes »), consacre une centaine de pages aux femmes soufies en général et à Râbi‘a en particulier. Son étude, très documentée, mentionne quelques-uns des auteurs auxquels il s’est référé tels que Jawzî et Ibn ‘Arabî, même si les anecdotes inédites qu’il rapporte ne permettent pas à l’historien de remonter à ses sources. Certains auteurs n’ont fait que mentionner brièvement Râbi‘a, souvent en rapportant des récits que l’on trouve ailleurs au sein de biographies plus étoffées mais parfois contenant des informations inédites. On rappellera quelques-uns d’entre eux : as-Sarrâj al-Qârî (décédé en 1106), dans son Maçâri‘ al-‘Ushshâq raconte un de ses rêves ; al-Ghazâlî (décédé en 1111), quant à lui, ne compte pas parmi les biographes de Râbi‘a à proprement parler, puisqu’il ne relate aucun récit la concernant, il est mentionné ici surtout pour le commentaire qu’il fit de son poème des « deux amours » à l’intérieur de sa « Somme » qu’est son Ihyâ ‘Ulûm ad-Dîn (« La revivification des sciences traditionnelles ») ; il en est de même d’al-Munawwar qui rapporte quelques propos de la sainte au fil de son Asrâr at-Tawhîd (« Les Secrets de l’Unification ») consacré au taçawwuf à travers la vie et les paroles de son arrière-grand-père le Shaykh Abû Sa‘îd Ibn Abî-l-Khayr, un très grand saint du XIe siècle (remarquable ouvrage traduit en français sous le titre Les Étapes mystiques du Shaykh Abû Sa‘id) ; Ibn Ghânim al-Maqdisî (décédé en 1280) consacre une page des plus remarquable à Râbi‘a dans son Kashf al-Asrâr wa manâqib al-Abrâr (« Le Dévoilement des Mystères et les Mérites du Juste ») dans lequel il cite quelques vers jusqu’alors inédits que l’on retrouve, sous une forme légèrement altérée, au sein d’un manuscrit anonyme sans titre dans un passage intitulé justement Tawba Râbi‘a al‘Adawiyya (« Le repentir de Râbi‘a al-‘Adawiyya ») – sa contribution présente un intérêt particulier au-delà des vers et du récit mentionnés, celui de montrer comment le Soufisme akbarien a pu « revisiter » en quelque sorte et intégrer dans sa tradition les propos de la sainte ; Shihâb ad-Dîn ‘Umar as-Suhrawardî (décédé en 1234), un Soufi qui vécut à Bassorah et prêcha et enseigna à Bagdad, mentionne Râbi‘a dans son ‘Awârif al-Ma‘ârif (« Les liens de la Connaissance ») et se réfère à plusieurs reprises à son enseignement ; adh-Dhahabî (décédé en 1348) mentionne dans son Mizân al-I‘tidâl (« La Balance de l’Équilibre ») les propos du célèbre traditionniste du IXe siècle Abû Dâwûd à son égard ; Imâd ad-Dîn (décédé en 1363), un soufi qui vécut au Caire et à Damas, mentionne les vues de la sainte sur le Jugement Dernier dans son Hayât al-Qulûb (« La Vie des Cœurs ») ; Yâfi‘î ash-Shâfi‘î (décédé en 1367), un autre soufi, rapporte plusieurs propos de Râbi‘a dans son Rawd ar-Riyâhîn fî hikâyât aç-Çâlihîn (« Le Jardin des Parfums dans les Vies des Hommes Pieux ») ; de même Aflâkî, qui vécut au XIVe siècle, et fut le disciple du petit-fils du célèbre Jalâl ud-Dîn Rûmî,

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mentionne, dans sa biographie en persan des fondateurs de l’ordre des derviches tourneurs, intitulée le Manâqib al-‘Arifîn (« Les Mérites des Connaissants »), une anecdote répertoriée nulle part ailleurs sur la sainte – son ouvrage étant bâti à partir de transmissions orales par des membres de la confrérie il ne cite, par contre, lui non plus aucune source ; ‘Abd alWahhâb ash-Sha‘rânî (décédé en 1565) parle lui aussi de Râbi‘a dans son Lawâqib al-Anwâr (« La Manifestation des Vérités Lumineuses »), plus connu sous le titre de Tabaqât al-Kubrâ (« Les Grandes Catégories »), même s’il consacre une plus grande place aux saintes égyptiennes au sujet desquelles il pouvait disposer de témoignages de première main, mais il n’apporte aucune information qu’on ne puisse trouver ailleurs sur Râbi‘a ; on pourrait encore mentionner divers autres grands Maîtres tels que Ahmad Al-‘Alawî qui font, au détour d’un de leurs traités, une allusion à une parole qu’aurait dite la sainte ou à un acte qu’elle aurait accompli mais la liste deviendrait inutilement longue. On mentionnera cependant malgré tout Dâwûd al-Antâkî (décédé en 1599) qui, dans son Tazyîn al-Aswâq (« L’Ornement des Marchés ») tout en ne nommant jamais Râbi‘a, parle d’une femme inconnue auteur de vers sur les « deux amours » et rapporte à son sujet divers récits que l’on trouve également dans le Maçâri‘ de Sarrâj ainsi que plusieurs autres inédits mais dont il est impossible de certifier la validité historique (ce qui reste somme toute secondaire au point de vue où l’on se place). De même, enfin, Hujwîrî (décédé en 1079) rapporte, dans son Kashf alMahjûb (« Le Dévoilement du Voilé »), de nombreux épisodes de la vie de Râbi‘a mais sans la citer nommément lui non plus. Pour terminer, on rappellera ici une source que répertorie Margaret Smith et dont le texte n’a pas été conservé à ce jour. Il s’agit du Manâqib Râbi‘a (« Les Mérites de Râbi‘a ») qui se présente comme une biographie de la sainte et dont l’auteur est anonyme.

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GLOSSAIRE Sauf mention spéciale, les citations d’Ibn ‘Ajîba sont extraites de : J. L. Michon, Le Soufi marocain Ahmad Ibn ‘Ajîba et son Mi‘râj, Paris, 1973

A abdâl voir badal. ‘âbid (pl. ‘ubbâd) : « dévot » ; spirituel vivant dans le monde mais préoccupé plus de la conformité de ses actes avec l’ordre divin que de la contemplation divine. Pour le Soufisme, ils représentent l’aspect extérieur de la dévotion et celle-ci voile Dieu à leur cœur. 63, 348, 403. adab (pl. de âdâb, « convenance ») : « ce qui est convenable » ; désigne la norme héréditaire de conduite traditionnelle visant à mettre l’être en harmonie à la fois avec ce monde et l’autre en intégrant dans la vie quotidienne des actes et pratiques en imitation de la vie du Prophète mais aussi des anciens ; c’est la « courtoisie spirituelle » qui régit les relations entre membres de la tradition musulmane. Composé à la fois de règles de savoir-vivre et de codifications, l’adab permet d’harmoniser l’attitude extérieure avec l’intériorité. Selon Ançârî, c’est « la bienséance dans le comportement avec Dieu et avec autrui. » L’ adab couvre à la fois la manière de vivre, de se vêtir, de manger et, de façon générale, de se comporter. Par extension, il est devenu synonyme de « politesse » et de « bonne éducation » mais aussi de « raffinement » ou

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encore de « culture », voire de « belles lettres » (suite à l’abondante littérature dont l’ adab a fait l’objet). 136, 363, 374, 387, 391, 425. ‘adhîm : « immense (ou sublime) » ; attribut de la suprématie d’Allâh. Nul ne peut s’égaler à Lui. Son immensité est unique et absolue. 154. aghâna : « couvrir ». 96. ahl al-inqitâ‘ : les « solitaires » ; désignation remontant à Hasan al-Baçrî pour désigner les « gens de la rupture » et, d’une façon générale, les « ascètes » et ceux qui ont réalisé le « renoncement au monde » (inqitâ‘ ). 63. ‘âlam an-Nûr : « monde de la Lumière ». Voir Nûr. ‘âlim (pl. ‘ulamâ) : De ‘alima, « savoir » ; « docteur de la Loi sacrée » ; « savant », le plus souvent entendu sur le plan exotérique. On distingue généralement entre les ‘ulamâ adh-dhâhir, les savants de l’extérieur, les exotéristes ; et les ‘ulamâ al-bâtin, savants de l’intérieur, versés dans l’aspect « ésotérique » de la spiritualité. 28, 121, 134, 136, 240, 313, 345, 364, 417, 426, 434, 446. ‘aql (pl. ‘uqûl) : de façon générale, « faculté mentale » ou, si l’on préfère, l’« intelligence » ou la « raison » entendue au sens mental ; « on l’appelle ainsi car elle retient (ya‘qil) celui qui la possède de faire ce qui ne convient pas. (…) Elle est une lumière par laquelle on discerne l’utile du nuisible. Elle se subdivise en deux catégories : la grande et la petite. La “grande Intelligence” est la première lumière qu’Allâh ait manifestée dans l’existence. On dit qu’elle est l’Esprit suprême (ar-rûh al-a‘dham) (…). De sa lumière découle la “petite intelligence” » (Ibn ‘Ajîba). C’est cette dernière qui permet à l’être de connaître les bienfaits de Dieu et Ses attributs ou encore de tirer des leçons de la Révélation et des enseignements qui en ont dérivés, orientant l’être sur la voie bien qu’en elle-même, elle soit impuissante à lui faire cependant accéder à la transcendance et à la connaissance (ma‘rifa) proprement dites. C’est, si l’on veut, « une lumière spirituelle (rûhânî) par laquelle l’être saisit les connaissances nécessaires et théoriques, ou une force qui met l’homme en état de réceptivité vis-à-vis de la connaissance » (Ibn ‘Ajîba).

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05.Glossaire[30-07] Refait_Mise en page 1 25/09/09 10:40 Page365

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Employée dans la lutte contre l’âme, al-‘aql désigne aussi la lumière s’attaquant aux ténèbres et éclairant l’action humaine. Ne cessant de croître chez l’être qui avance dans la voie, elle finit par dépasser le plan de la « raison », rejoindre la notion de rûh, d’« esprit », et se résorber dans la « grande Intelligence ». 25, 122, 175, 287, 386. ‘ârif (pl.‘ârifûn) : le « gnostique » ; l’être parvenu à la connaissance et à la vision de la Vérité divine et s’y étant établi. 28, 63, 135, 368. ‘arsh : « trône » ; désigne le Trône divin englobant les cieux et la terre (Qur’ân. II, 256) tant il est immense (ibid., IX, 130). 218, 246. aslama : « se soumettre », « se résigner ». 64, 260, 383. awtâd (sing. watad) : littéralement « piquets » ; ils sont appelés aussi les « piliers » (al-‘umûd) ; désigne ceux qui, dans la hiérarchie spirituelle, se trouvent sous le Qutb, le Pôle et les deux imâm. Au nombre de quatre, « ils sont comme les piquets marquant les quatre coins de l’univers » (Ibn ‘Ajîba), chacun veille sur un des points cardinaux, au centre desquels se trouve leur résidence. Ils sont dits traverser chaque nuit l’univers et tenir informé le Qutb de ce qui se passe. 340. ‘ayn (pl. ‘uyûn et a‘yân) : « œil », « source » ; ce dernier sens qui se double de celui d’« origine » le dote d’une connotation métaphysique ; c’est pourquoi il est souvent rendu par « essence » mais cela est discuté car, d’un certain point de vue, « il n’y a pas de différence entre l’entité dans la connaissance de Dieu et l’entité dans le monde sinon qu’en Dieu, l’entité est immuable et non existante en relation avec elle-même et les autres alors que, dans le monde, elle est existante en relation avec elle-même et les autres » (Chittick, The Self-Disclosure of God, Albany, 1998, p. 389). On préférera donc souvent réserver l’emploi du terme « essence » pour rendre dhât qui est rarement un synonyme de ‘ayn. On traduira donc ‘ayn plutôt par « entité. » Mais les traductions varieront selon le contexte : ‘ayn sera ainsi rendu par Essence en référence à l’Être divin ; on voit donc que ‘ayn peut renvoyer aussi bien à la « Réalité intérieure », au « Soi » transcendant en tout être, à la Source Unique (al-‘ayn al-wâhida) ou, au pluriel, aux « prototypes » (spirituels) qu’aux « entités » (individuelles). Le pluriel en ‘uyûn désigne principalement les « yeux ». 182.

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B badal (pl. abdâl ) : « substitut ». C’est un des plus hauts degrés de la hiérarchie des saints. Selon la majorité des sources, ils sont précédés du Pôle (Qutb), de ses deux « lieutenants », l’Imâm de la droite et l’Imâm de la gauche, des quatre « piliers » (awtâd) et aussi des sept afrâd dont ils sont en quelque sorte les substituts. Appelés les « vigiles » (al-ruqabâ), les abdâl sont décrits comme les saints cachés, inconnus de la multitude mais remplissant à la fois la fonction de fondation et de support des affaires des hommes. Ils comptent eux-mêmes parmi les afrâd (les « solitaires ») et, en tant que tels, sont équivalents, sur le plan humain, aux Chérubins dans la hiérarchie angélique. Dans le chapitre 73 des Futûhât, Ibn ‘Arabî dit qu’ils sont appelés abdâl car, « lorsqu’ils quittent un lieu et désirent y laisser un substitut (badal), car ils y voient un intérêt et un moyen de se rapprocher de Dieu, ils laissent là une «personne» (shaks) qui a la même apparence qu’eux en sorte que quiconque la voit ne doute d’avoir vu la même personne. En réalité, il ne s’agit pas de lui mais d’une forme spirituelle qu’il laisse à sa place (…). Les abdâl sont au nombre de sept. Jamais ils ne croissent ni ne décroissent [i.e. quand un d’entre eux meurt, il est aussitôt remplacé]. (…) Ils connaissent les affaires et les mystères que Dieu a placés dans les sept planètes. (…) Chacun de ces Hommes a une relation avec un Nom divin par lequel il reçoit les moyens du bien qu’il possède (…) et qui détermine [pour lui] la mesure de sa connaissance. » Ibn ‘Ajîba dit d’ailleurs d’eux qu’« Ils sont ceux qui ont remplacé leurs vices par leurs vertus et leurs attributs par ceux de leur Bien-Aimé. » 340. bâdi ar-ra’y : « sens apparent ». 135. baqâ : « permanence ». Dans le Soufisme, le terme désigne la plénitude dans la Présence divine liée à l’extinction (fanâ) ou, si l’on préfère, la « permanence » qui demeure une fois que les attributs de la créature se sont effacés pour ne laisser subsister que ceux d’Allâh. Ce qui disparaît est le moi et ce qui subsiste est le Soi divin qui a toujours été par delà toute existence conditionnée. Comme le note Chittick, « les Soufis parlent d’annihilation de quelque chose. Et de même on emploie le terme baqâ avec le pronom bi (au moyen de) et on parle de subsistance au moyen de quelque chose. Dans tous les cas, l’extinction est inférieure et la subsistance supérieure » (Imaginal Worlds, Albany, 1994, p. 60). Par la subsistance, ainsi que l’explique Ibn ‘Ajîba, « on voit alors le sensible comme subsistant par Dieu (qâ’im bi-Llâh) et comme une des lumières

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dans laquelle Dieu s’épiphanise. (…) C’est une extension de l’extinction en ce sens que la conscience unitive ne voile pas la conscience séparative. » 181, 301, 374, 417, 436. baraka : « influence spirituelle » ; « bénédiction ». Employé au pluriel (barakât) dans le Qur’ân, ce terme désigne les influences dont Dieu gratifie certains de Ses serviteurs afin de procurer aux autres membres de la communauté la félicité matérielle ou spirituelle. La baraka est la « grâce » indispensable à tout chercheur dans sa quête intérieure ; il ne saurait y avoir de réalisation spirituelle sans elle. Si Allâh peut accorder la baraka à ceux qui Lui obéissent, Il peut cependant la leur retirer s’ils viennent à ne plus se conformer à Sa volonté. Le texte du Qur’ân comme les rites, certains lieux, plantes (comme l’olivier), êtres (tels que les maîtres spirituels ou les saints), reliques ou encore certains moments de l’année (telles que la nuit dite du Destin ou le mois de Ramadân) sont eux-mêmes porteurs de baraka. Par extension, en français, le terme a fini par désigner la « chance » de façon populaire. 63, 66, 67, 144, 184, 200, 201, 260, 276, 304, 343, 392, 393, 400. baraka al-muhammadiyya : que l’on traduira, quoique de façon imparfaite, par « grâce mohammadienne. » C’est cette influence spirituelle toute particulière remontant au Prophète et, par-delà, à l’archange Gabriel et Allâh qui est transmise au moment de l’initiation dans le taçawwuf et permet de vivifier le lien de l’initié avec son Principe. Elle est à l’origine de toute transmission spirituelle de type initiatique. 66, 106, 343. bâtin : « l’intérieur » ; ce qui est caché, secret, ésotérique ; ce qui est intime, propre à certains, distinct de ce qui est extérieur et apparent à tous (dhâhir). Dans le Soufisme, ce terme se rapporte à ce qui ne peut être perçu par les sens ou rationnellement mais uniquement par l’intériorité et la contemplation spirituelle. 148, 381, 396. bay‘a : l’« allégeance » ; le fait de prêter serment, en se rattachant à une confrérie, à son Shaykh et, à travers lui, à Allâh. L’allégeance marque donc pour l’initié l’entrée dans un « compagnonnage spirituel ». 290, 392. Bayt Allâh : « Maison d’Allâh » ; désignation de la Ka‘ba. 222, 385. al-Bayt al-ma‘mûr : la « Maison éternellement visitée ». Cette Ka‘ba des anges est située dans le septième ciel (le premier des cieux situé sous la sphère des étoiles immobiles). Selon certaines traditions, après avoir

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hésité à reconnaître Adam comme lieutenant et craignant que leur réaction ait courroucé leur Seigneur, les anges cherchèrent refuge « sous le Trône divin » en signe d’humiliation et de soumission. Alors, Allâh aurait fait descendre la Miséricorde sur eux et placé sous le Trône une maison à quatre colonnes d’émeraude couverte de rubis afin que les anges ne tournent plus autour du Trône mais autour de cette Maison divine – la « Maison éternellement visitée » (al-Bayt al-ma‘mûr) du Qur’ân (LII, 4) – car cela leur serait plus facile qu’autour du Trône lui-même. La Ka‘ba serait ainsi le Temple sur Terre à la ressemblance de cette Maison céleste. 218, 219, 222, 372. birr : « vertu », « piété », « bonté » et « charité ». 151.

C çâbir (pl. çâbirûna) : « celui qui est constant », « patient ». « Allâh aime ceux qui sont patients » (Qur’ân, III, 146). 162. çabr : « patience », « endurance », «constance». Vertu éminemment coranique, comme le rappelle al-Ghazâlî, selon la tradition, c’est « la moitié de la foi » (l’autre moitié étant le remerciement). Du point de vue du Soufisme, « la constance, c’est de tenir le cœur à disposition des arrêts divins » (Ibn ‘Ajîba). « Çabr, c’est ne pas distinguer entre l’état de grâce et celui d’épreuve, garder la tranquillité d’esprit dans l’un comme dans l’autre » (Abû Muhammad al-Jurayrî). 93, 161, 162, 164, 173. çabr ‘alâ Allâh : la « patience en Allâh » distincte de la « patience du profane ». Elle est le propre des ‘ârifûn et, bien sûr, des Prophètes. Job se réjouissant des tribulations désirées par son Seigneur peut être considéré comme l’archétype de cette « constance » si prônée au sein du Soufisme. 164. çafâ : « pureté » ; pour certains, une des origines du mot çûfî puisque le but du taçawwuf a pour objet la purification (taçfiya). Pour l’initié, en effet, « effacer la faiblesse, c’est affirmer la pureté (aç-çafâ) » (Ibn ‘Ajîba). 18, 146, 401. çahw : la « sobriété » ou, si l’on préfère, la « lucidité » du dégrisement ; ce terme désigne aussi bien celui qui est sobre que celui qui, ayant bu, s’est dégrisé. La sobriété est entendue à divers niveaux : au sens le plus général,

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il s’agit de l’abstention de boissons alcoolisées ou enivrantes ; spirituellement, il s’agit de l’état de celui qui réalise Dieu sans en manifester d’excès à l’extérieur. On peut entendre aussi le terme comme se rapportant à ceux qui, bien que possédés par un état spirituel, demeurent respectueux de la Loi et ne cèdent pas à l’ivresse spirituelle. L’opposition de la sobriété et de l’ivresse (sukr) est emblématique des deux grands courants du taçawwuf représentés par Abû Yazîd al-Bistâmî, dont l’extravagance est célèbre, et Junayd qui a su harmoniser en lui voie exotérique et voie ésotérique. AlQushayrî disait que « la lucidité (çahw) est à la mesure de l’ivresse (sukr) ; celui dont l’ivresse est authentique (bi haqq) aura une lucidité authentique ; celui dont l’ivresse est mêlée de passion mondaine aura une lucidité adultérée. » On attribue la « lucidité » (çahw) à la gnose parfaite. Comme le note Ibn ‘Arabî, « les gnostiques demeurent sobres (çahw – ou, si l’on préfère, lucides) et ne sont pas ravis en Dieu à la façon dont les amoureux sont ravis par Lui » (Futûhât, II, p. 615). 286, 434. çalâ : « vertu » ; par extension, la « bonté », le « bien ». 212. çalât (pl. çalawât) : généralement traduit par « prière », en toute rigueur, cette dernière désignation se rapporte cependant plutôt au du‘â qui la suit qu’à la çalât proprement dite. Ce terme est en fait intraduisible en français. Il désigne l’ensemble des positions et des mouvements corporels (inclinaisons, prosternations, stations debout ou assise) et des récitations composant le rituel que doit obligatoirement accomplir tout musulman cinq fois par jour en relation avec le cycle du soleil et de la lune. Selon le Qur’ân, cette pratique remonte aux origines de l’humanité et a été suivie par tous les prophètes. Elle présuppose de la part de celui qui l’accomplit un état de pureté rituelle obtenu par des ablutions, grandes ou petites, selon le degré d’impureté rituelle dans lequel on se trouve, ainsi qu’une intention, une orientation à la fois extérieure (vers la Ka‘ba) et intérieure (vers Allâh) et une codification précise de son déroulement et des conditions qui l’encadrent (lieu, vêtement, etc). Il existe plusieurs sortes de çalât, en dehors des cinq obligatoires, certaines sont recommandées, d’autres liées à des circonstances et des moments précis. En commun, la çalât s’effectue sous la direction d’un imâm. Deuxième pilier de l’Islâm, elle inclut d’ailleurs le premier, la shahâda, la « profession de foi », puisque cette dernière est renouvelée à la fois lors de l’appel qui précède la çalât et lors du tashahhud qui la conclut. C’est véritablement le « cœur de l’Islâm. » La çalât maintient, par ailleurs, chez tout musulman, son lien avec son Prophète puisqu’en l’accomplissant, le croyant reproduit ce que l’Envoyé a fait au commencement de l’Islâm, à savoir s’orienter intérieurement vers Allâh en prenant pour support ce rite.

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D’un point de vue spirituel, il est enseigné que c’est même Lui qui accomplit la çalât à travers Son serviteur. Toute récitation est en effet un témoignage qu’Allâh, en tant que Seul et véritable Témoin, S’adresse à Lui-même à travers Ses fidèles. Comme il est écrit dans le Qur’ân (XXXIII, 43) : « C’est Lui qui prie (yuçallî – qui répand Sa grâce) sur vous ainsi que Ses anges afin de vous faire sortir des ténèbres vers la lumière et Allâh est particulièrement Miséricordieux pour les croyants. » 35, 70, 72, 83, 84, 86, 89, 101, 105, 106, 108, 115, 128, 151, 209, 212, 224, 321, 377, 385, 396-398, 402, 405, 409, 414, 421, 427. çiddîq (pl. çiddîqûn) : « Juste » ; « véridique » ; celui qui allie la loyauté de la langue à la loyauté du cœur ; « c’est-à-dire un “juste” dont la foi est inébranlable et la certitude parfaite, tel Abraham ou Abû Bakr (…). Selon Ghazâlî, les çiddîqûn occupent le quatrième degré, et le plus haut, de la “profession de l’unité divine” (tawhîd ), degré qui précède celui des muqarrabûn (“les rapprochés”) et n’est dépassé, dans la hiérarchie des entités spirituelles, que par celui des Prophètes et celui des anges » (Michon, Le Soufi marocain Ahmad Ibn ‘Ajîba et son Mi‘râj, p. 198). Abû Sa‘îd al-Kharrâz expose dans son Kitâb aç-Çidq comment la nature du çidq pénètre toutes les stations de la voie spirituelle. 121, 146. çila : « action de se réunir à quelqu’un, de lui remettre un don ». 35. Çirât : Pont en forme d’arche « plus fin qu’un cheveu et plus tranchant que le fil d’une épée » s’étendant au-dessus de l’Enfer et sur lequel tous les hommes passeront lors du Jour du Jugement. Le défunt apportant les bonnes réponses aux questions qui lui sont posées dans la tombe, est transporté sur le Pont par un Ange. Le Çirât lui semble aussi doux et plane que la paume de la main et il le traverse aussi vite que l’éclair, la vue, le vent ou encore des chevaux de race. Le mécréant, lui, par contre, ne parvient pas à le franchir mais chute et se voit précipité en Enfer. 57, 164. çûf : « laine ». Pour certains, l’origine du mot çûfî, interprété alors comme étant « celui qui est vêtu de laine » en signe du peu de cas qu’ils faisaient des choses de ce monde. 146, 401. çûfî (pl. çûfiyya) : celui qui a atteint le degré suprême. Comme le remarque René Guénon, en additionnant la valeur numérique des lettres qui le forment en arabe, on obtient le même nombre qu’al-hikma al-ilâhiyya, soit la « Sagesse divine. » « Le çûfî véritable est donc celui qui possède

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cette Sagesse, ou, en d’autres termes, il est al-‘ârif bi-Llâh, c’est-à-dire “celui qui connaît par Dieu”, car Il ne peut être connu que par Lui-même ; et c’est bien là le degré suprême. » C’est aussi pourquoi « personne ne peut jamais se dire çûfî, si ce n’est par pure ignorance, car il prouve par là même qu’il ne l’est pas réellement, cette qualité étant nécessairement un “secret” (sirr) entre le véritable çûfî et Allâh ; on peut seulement se dire mutaçawwif, terme qui s’applique à quiconque est entré dans la “voie” initiatique, à quelque degré qu’il soit parvenu » (Aperçus sur l’ésotérisme islamique et le Taoïsme, pp. 17, 18 et 16). La traduction courante du terme par « mystique » est donc particulièrement approximative même en l’entendant d’une façon assez large et en appliquant le mot à tout membre du taçawwuf. Innombrables, en fait, en ont été les définitions selon la perspective des différents maîtres. On citera celle de Bundâr Ibn al-Husayn qui recouvre la diversité de sens qui lui est applicable : « le çûfî est l’homme qu’Allâh a choisi pour Lui-même. » Selon Ibn Ishâq, le terme aurait été employé avant même l’Islâm pour désigner les hommes vertueux (cf. Akhbâr Makka). 18, 55, 58, 61, 64, 72, 74, 89, 99-101, 107, 118-121, 123, 132, 145-147, 149, 156, 158, 204, 206, 240, 257, 259, 300, 301, 306, 310-312, 315, 337, 340, 344, 368, 396, 398, 400, 406, 435. Çuhba : « compagnie » et, par extension, « compagnonnage ». Dans le Soufisme ce terme se rapporte à la relation que le disciple entretient avec son Maître et inclut aussi bien le plaisir que le respect sans lequel, comme le note Ibn ‘Arabî, la « compagnie » ne saurait lui être d’aucun profit. Plus généralement, ce terme se rapporte à l’allure communautaire qu’a plus ou moins toujours revêtu le compagnonnage spirituel, avant même qu’il ne prenne la forme connue aujourd’hui des confréries initiatiques du Soufisme. Un tel compagnonnage n’a bien sûr rien à voir avec ce que l’on entend par ce terme en Occident, même si tous deux présentent un aspect confrérique et initiatique ; en effet, en Islâm, il ne présuppose la pratique d’aucun métier spécifique comme support et initiation et les confréries sont, en général, indépendantes de l’exercice d’un métier. 290.

D dahsha : « étonnement ». 287. dâll : « égaré » ; celui qui est dans l’erreur ; celui qui ne suit pas le « chemin droit » (aç-çirât al-mustaqîm). 64.

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adh-Dharâ : « le Lointain ». Autre désignation de la « Demeure visitée ». Selon certaines traditions, après avoir hésité à reconnaître Adam comme lieutenant et craignant que leur réaction n’ait courroucé leur Seigneur, les anges cherchèrent refuge « sous le Trône divin » en signe d’humiliation et de soumission. Alors, Allâh aurait fait descendre la Miséricorde sur eux et placé sous le Trône une Maison à quatre colonnes d’émeraude couverte de rubis qu’il nomma Adh-dharâ (« le Lointain ») afin que les anges ne tournent plus autour du Trône mais autour de cette Maison divine – la « Maison éternellement visitée » (al-Bayt al-ma‘mûr) du Qur’ân (LII, 4) – car cela leur serait plus facile qu’autour du Trône lui-même. La Ka‘ba serait ainsi le Temple sur terre à la ressemblance de cette Maison céleste. 218. dhât : « essence », « nature intime ». Le terme recouvre des sens multiples : il peut être un synonyme de « chose » (shay) mais aussi d’« être » ou même d’« ego ». Tout en pouvant signifier en philosophie à la fois les sens opposés de « substance » et d’« essence » (au demeurant le sens le plus fréquent). Pour le Soufisme, Allâh est « Essence » au sens absolu et source des qualités et des attributs. L’irradiation de Son Essence sans intermédiaire consumerait toute chose conformément au hadîth selon lequel « Son voile est la lumière ; s’Il l’enlevait, les traits de Son Visage consumeraient la création jusqu’à la limite extrême où atteint Son Regard. » « L’Essence suprême (adh-dhât al-‘aliyya) est totale, éternelle, cachée, caractérisée par les attributs de la Perfection infinie (çifât al-Kamâl), unique dans l’éternité sans commencement ni fin. Telles sont ses caractéristiques. Quant à son fond (kunh) réel, Allâh seul peut l’appréhender entièrement » (Ibn ‘Ajîba). « Il n’y a, dans toute l’existence, aucune relation qui “situe” l’Essence, ni aucune relation qui puisse La nier et rien qui Lui soit contraire (…). Elle est trop noble pour être conçue par les intelligences (…) aucune limite, aussi fine et incommensurable soit-elle, ne L’em brasse » (‘Abd al-Karîm al-Jîlî, De l’Homme universel, Lyon, 1953, p. 26). C’est pourquoi on ne réalise l’Essence que par intuition ou dévoilement (kashf ) mais jamais discursivement ou rationnellement. Seul Lui-même Se connaît Lui-même. 285, 364, 366, 374. dhikr : « rappel » ; « souvenir » ; « invocation » ; « remémoration » fondée sur les versets coraniques : « Remémore-toi (udhkur) ton Seigneur quand tu auras oublié » (XVIII, 24) et « Ô vous qui croyez, invoquez/remémorez (udhkurû) Dieu d’une abondante invocation (dhikran kathîran) » (XXXIII, 41). Il désigne le fait de se souvenir mais aussi la mention orale du souvenir.

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Le dhikr se rapporte à la fois au « souvenir » et à la « mention » d’Allâh. Dans le Soufisme, il désigne la technique de répétition ininterrompue d’une formule sacrée en vue de préparer l’être à ce souvenir par la concentration et l’absorption permettant d’accéder à la contemplation. C’est le pivot des techniques du taçawwuf. Il peut être pratiqué aussi bien à voix haute qu’à voix basse, de façon solitaire ou en commun, sans discontinuer durant plusieurs jours (notamment lors de la khalwa, de la « retraite spirituelle »), soit durant un temps limité lors de « réunion collective » (hadra), assis ou debout, immobile ou accompagné de mouvements du corps, avec des variations de rythme et d’intensité. C’est le Maître (Shaykh) qui prépare et guide le disciple lors des séances de récitation, collectives ou solitaires, rythmées par des nombres au moyen d’un chapelet ou sans. Le dhikr est un support pour conduire à un véritable retournement de l’être et permet un passage à la limite et une ouverture intérieure au cours de laquelle le corps du récitant est encore dans la pièce mais son esprit accède à une autre réalité qu’il approfondit par degrés allant de stations en stations. Comme le rappelle al-Ghazâlî, le dhikr est à la fois une méthode et une préparation à recevoir, Dieu voulant, la suprême Miséricorde de la Réminiscence divine. Le dhikr trouve son aboutissement dans son dépassement même dans l’Objet même de tout dhikr. 32, 36, 45, 62, 64, 65, 69-74, 80, 83, 86, 93, 99, 154, 244, 264, 313, 314, 317, 333, 387, 390, 391, 399, 410, 417, 447. dîn : « tradition » ; tout ce qui recouvre la vie traditionnelle du musulman et lui permet à travers tous les aspects de l’existence de se relier à Dieu, c’est-à-dire à la fois son comportement, ses obligations, sa direction, sa soumission mais aussi sa rétribution (un autre des sens du terme dîn). Selon un hadîth célèbre, appelé hadîth de Gabriel, la tradition recouvre à la fois la foi (îmân) en Allâh, aux anges, aux Livres révélés et à Ses Envoyés et au Jour Dernier, la pratique de l’Islâm et l’observance de ses cinq piliers (la profession de foi, la çalât, la zakât, le jeûne du mois de Ramadân et le pèlerinage à la Ka‘ba), enfin l’’ihsân, c’est-à-dire « adorer Allâh comme si on le voyait car si on ne le voit pas, Lui nous voit. » D’une façon générale, c’est tout ce qui s’oppose spirituellement à la seule emprise de la dunyâ (de « ce monde-ci ») sur l’homme. 32, 383, 399. du‘â : « prière » ; « invocation » dont le fondement se trouve dans le verset coranique : « Invoquez-Moi, Je vous exaucerai (ud‘ûnî, astajib lakum) » (Qur’ân, XL, 60). C’est aussi la désignation de l’invocation qui suit souvent la çalât. À la différence de cette dernière, elle est tout à fait facultative, spontanée et, en général, circonstancielle. Il s’agit dans tous les cas d’« appeler » les bienfaits envers le croyant. C’est véritablement une « demande » et donc, à proprement parler, une « prière ». Elle a fait l’objet

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d’un adab particulier et certains traités en prescrivent les conditions nécessaires à ce qu’elles soient effectuées sous les meilleurs auspices et être ainsi les plus efficaces. 91, 151, 324, 369. dunyâ : littéralement « le plus proche », le terme désigne « ce bas monde » ou le « monde d’ici-bas ». C’est le monde matériel, visible, celui de l’agitation profane, le domaine de prédilection de tout ce qui distrait de Dieu et de l’autre monde « meilleur » que celui-ci, et que tout spirituel se doit de rejeter. 74, 137, 147, 323, 373.

F falak : « sphère » et plus particulièrement « sphère céleste », par suite, « ciel ». 78. fanâ : « extinction ». Par « l’extinction spirituelle » (fanâ) les attributs éphémères et illusoires de la créature s’effacent pour ne plus laisser place qu’à la « permanence » (baqâ) éternelle de l’état primordial réintégré. Sous un rapport, le fanâ est « un effacement (mahw), une disparition, un départ hors de toi-même et une cessation (zawâl) (de la conscience individuelle) » (Abû-lMawâhib Ash-Shâdilî). Pour l’être qui a mis à mort son âme, dans le fanâ, l’être perd non seulement la conscience du monde, de lui-même mais aussi de la conscience de cette perte même. C’est « la dissolution (istihlâk) du sensible devant la manifestation de l’intelligible » (Ibn ‘Ajîba) par laquelle se produit un retournement permettant à l’être de passer de la conscience individuelle à la conscience universelle. Al-fanâ est véritablement « l’“extinction” du “moi” et, par cette “extinction”, on atteint la “station divine” (almaqâm al-ilâhî), qui est le point central où toutes les distinctions inhérentes aux points de vue extérieurs sont dépassées, où toutes les oppositions ont disparu dans un parfait équilibre » (René Guénon, « El-Faqru », Aperçus sur l’ésotérisme islamique et le Taoïsme, pp. 47-48). 85, 97, 100, 158, 181, 285, 300, 301, 305, 312, 366, 375, 405, 417, 436. fanâ al-fanâ : « l’extinction de l’extinction ». Le fanâ al-fanâ conduit l’être à s’éteindre, non seulement à l’état adamique qui est désormais le sien, mais à tous les états et toutes les modalités de l’être, même angéliques, et par suite à se réintégrer dans le centre total des mondes. C’est la dispa rition de tout ce qui n’est pas Allâh. Il a abandonné ses attributs de créature au profit des attributs éternels d’Allâh auquel il s’est identifié dans son « Essence » (dhât). Si bien que l’on a pu dire que « lorsqu’on parle d’“extinction” (fanâ), cette expression s’applique en propre à l’extinction dans l’Essence (fanâ fî-dh-dhât) qui est l’effacement des

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contours et des formes par la contemplation (ash-shuhûd) du Dieu Très-Grand (al-Kabîr) et Sublime » (Ibn ‘Ajîba). Dans un tel état, l’être est fondu sans être confondu dans la pure conscience divine. Quand un tel être agit, c’est désormais non lui mais Allâh en lui. C’est « l’Homme Universel » (alInsân al-Kâmil) de l’ésotérisme islamique. 100, 158. faqîr (pl. fuqarâ) : « pauvre ». Dans le Soufisme, c’est la désignation du membre d’une confrérie ou de tout disciple d’une voie spirituelle ; c’est un équivalent du derviche (darwîsh, le « chercheur de portes » ou « mendiant »). Mais la mendicité ici n’est pas extérieure mais se réfère à la « pauvreté spirituelle ». Comme le résume Ibn ‘Ajîba, sous un rapport, « la pauvreté consiste à dégager ses mains de ce monde et à empêcher le cœur de laisser paraître son affliction. » On distingue cependant plusieurs degrés de pauvreté : le plus extérieur consiste à abandonner ses biens, puis à renoncer à sa volonté propre et, enfin, à réaliser l’extinction totale du « moi » (fanâ) et à s’établir dans l’état primordial permanent. Toujours selon Ibn ‘Ajîba, « le “pauvre en Dieu” (faqîr) est celui qui s’est rendu indépendant (iftaqara) de tout hormis d’Allâh et qui refuse tout ce qui le détourne d’Allâh. » Un tel être a une conscience parfaite de ce que, comme l’écrit Ibn ‘Arabî, « rien, absolument rien n’existe en dehors d’Allâh » et son cœur est vide des formes. Seul un tel être peut être dit véritablement faqîr ilâ-Llâh, « pauvre envers Allâh ». Tous ces degrés de « pauvreté » participent bien entendu d’al-faqr al-muhammadî, la « pauvreté mohammadienne » qui en est l’archétype fondateur. 54, 92, 146, 148, 153, 155, 157-159, 161, 181, 224, 228, 337, 375, 376, 442. al-faqr : « pauvreté » (spirituelle). Voir faqîr. farâgh : « vacuité ». 286. faraq : « séparation ». Ce à quoi tout spirituel en quête de l’unité doit chercher à mettre fin. 108. fikr : « pensée » et, par extension, « méditation ». 62. fitra : la primordialité adamique d’harmonie entre l’homme et Dieu ; l’état originel. C’est l’essence du croyant ; la nature primordiale qui porte tout homme à être musulman. Selon le hadîth, les jeunes enfants en sont dotés. 189, 190.

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G ghafara : « recouvrir », « pardonner ». Par la Miséricorde divine, l’être voit ses péchés « couverts » ou, si l’on préfère, « cachés » et, ainsi, « pardonnés ». 97, 384. ghafla : « inadvertance » ; « négligence » ou encore, par extension, « distraction ». C’est l’équivalent soufi de la « dis-traction » qui empêche le tireur d’atteindre le cœur de la cible dans le Bouddhisme zen. C’est ce qui empêche l’être de réaliser Ce qui est. « L’insouciant » est le frivole et l’opposé du faqîr, du « pauvre », tout entier « con-centré » en Dieu. 104. al-Ghafûr : le Pardonneur ; un des noms d’Allâh. 75, 125. ghâna : « être oppressé » et aussi « être voilé ». 96, 126. al-Ghanî : « le Riche », « Se suffisant à Lui-même », « Souverain » ; un des noms d’Allâh. 148, 152. ghayb : « caché », « invisible », « scellé », « non-manifesté », « mystérieux » ; ce qui est absent au savoir humain et caché dans la science divine. « AlGhayb n’appartient qu’à Allâh » (Qur’ân, X, 20). « Il a les clefs d’al-ghayb qui ne sont connues que de Lui » (ibid., VI, 59). C’est le Mystère divin auquel l’homme en tant que tel ne peut accéder sinon par une nonconnaissance suprême conformément au verset qui rappelle qu’« Allâh connaît l’Inconnaissable et n’éclaire personne à ce sujet » (ibid, LXXII, 26). La révélation ne nous en dévoile que les bribes indispensables pour conduire chacun sur la « voie droite ». 65, 186, 427. ghayba : « l’effacement » ; « l’occultation ». Dans le Soufisme, l’effacement du monde va de pair avec la présence en Allâh. 380, 389. al-Ghinâ : « la Richesse Divine ». 152, 181. ghîra : « jalousie » mais aussi « événement funeste », « sort » ou encore « prix du sang » (ce qui le relie au sacrifice). Rapporté à la Jalousie divine, ce terme se réfère à l’attitude visant à soustraire les « amis » (awliyâ) de Dieu

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au regard des hommes ordinaires. Cette jalousie se manifeste donc, pour l’être qui en est l’objet, par l’isolement dans la retraite (khalwâ), prélude à la disparition définitive du saint du monde des hommes. La « solitude » (khalwa) manifeste la soumission de l’être à la « jalousie » (ghîra) divine qui désire que celui qui souhaite Le rencontrer s’isole pour cela. Selon une définition attribuée à Râbi‘a par Maqdisî, la jalousie est « ce qui voile les yeux à toute autre chose » (que le Bien-Aimé), c’est-à-dire ce qui permet de s’affranchir de tout ce qui n’est pas Lui. Entendue ainsi, la jalousie n’est pas un travers égoïste de l’individu mais une attitude spirituelle impliquant de multiples vertus telles que le renoncement, la concentration ou l’attachement exclusif à Dieu. 286, 287, 290, 291-293, 376. ghusl : ablution majeure ; lavage rituel intégral du corps à l’eau pure effectué avec l’intention de se purifier suite à une impureté (éjaculation, menstrues ou perte de conscience) contractée et le rendant inapte à remplir les conditions indispensables à accomplir la çalât ou, par exemple, à séjourner dans une mosquée. Cette pratique est recommandée aussi en certaines occasions (çalât du vendredi ou celle des deux fêtes, etc.). Le ghusl se distingue de l’ablution mineure (‘udû) qu’elle intègre cependant. En cas d’absence d’eau pure à disposition, il est possible d’effectuer une ablution sèche (tayammum) à l’aide de sable ou d’une pierre. 149, 406.

H al-Habib : le « bien-aimé » (d’Allâh), un des noms du Prophète. 185, 251. hadîth (pl. ahâdîth) : « récit », « propos » ; dans un contexte religieux, cela désigne toute « tradition » (remontant au Prophète ou, parfois, à un Compagnon). C’est donc le récit de tout acte et de tout propos qui nous sont parvenus de lui à travers les témoignages des membres de sa famille et de ses compagnons. L’autorité des ahâdîth, pour tout musulman, vient juste après celle du Qur’ân. Elle est bâtie sur une véritable science établissant non seulement les propos et les récits, avec leurs éventuelles variantes, mais aussi la chaîne des transmetteurs (isnâd) et leur degré de fiabilité. Ils sont ainsi classés en : çahîh (litt. « sain », qualificatif des traditions sur lesquelles aucun doute n’est possible), hasan (« bon »), da‘îf (« faible »), sakîm (« malade ») ou mawdû‘ (« forgé de toutes pièces »). Ils sont le second fondement, après le Qur’ân, de la Loi islamique et donc des règles du fiqh, du droit religieux. Ce qui est en conformité avec

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l’injonction coranique qui proclame : « celui qui obéit à l’Envoyé obéit à Allâh » (Qur’ân, IV, 80). Ils ont permis d’établir une ligne de conduite pour le croyant et peuvent également, dans bien des cas, aider à éclaircir certains passages de la Révélation dont ils précisent et détaillent les applications, notamment sociales et économiques. Les recueils d’ahâdîth les plus célèbres sont ceux de Bukhârî et de Muslim. Il existe enfin une catégorie particulière de propos appelée hadîth qudsî ou « tradition sacrée », ou encore hadîth ilâhî ou rabbânî (« tradition divine ou seigneuriale ») et qui se différencie du hadîth nabawî ou « tradition prophétique » (la majorité des ahâdîth recueillis). À la différence du Qur’ân, révélé par l’intermédiaire de l’archange Gabriel, reconnu inimitable, récité dans la çalât, qui ne peut être touché par quiconque n’est pas rituellement purifié, le hadîth qudsî n’a pas la même portée rituelle ni tout à fait la même modalité : ainsi, il peut être révélé en songe ou par inspiration (ilhâm) et ses mots ne sont pas non plus exactement ceux employés par Allâh bien qu’ils aient un sens équivalent (d’où sans doute sa limite du point de vue rituel). 30, 36, 62, 65, 70, 72, 73, 76, 80, 82, 85, 93, 96, 97, 102, 104, 106, 119, 121, 124, 126-128, 137, 150-152, 154, 162-164, 168, 173, 180, 189, 190, 199, 226, 233, 234, 247, 251, 262, 270, 271, 282, 283, 300, 302, 309, 311-314, 330, 334, 343, 356, 367, 372, 373, 375, 377, 378, 381, 385, 391, 392, 410, 414, 415, 418, 419, 426, 427, 429, 434, 436, 437, 440, 442, 444, 446, 447. hajj : pèlerinage aux lieux saints de La Mecque, à la Ka‘ba (la « Maison d’Allâh »), ‘Arafât et Minâ ; cinquième des piliers de l’Islâm. Pratique anté-islamique que Muhammad a intégrée dans sa tradition conformément aux révélations coraniques mentionnant, d’une part, que la Ka‘ba doit être la qibla du musulman, c’est-à-dire là où celui-ci oriente ses prières et que la pratique du « pèlerinage » est une obligation pour tout musulman pubère des deux sexes et disposant d’une santé et de moyens suffisants pour l’accomplir au moins une fois dans sa vie. Il se déroule toujours aux mêmes dates du calendrier lunaire, durant la première quinzaine du mois appelé justement dhû-l-hijja, « mois du pèlerinage ». Ce dernier est dit permettre le pardon des péchés qui lui sont antérieurs. Les différentes parties de son déroulement sont une imitation de ce qui fut accompli par le Prophète et ne conserve de pré-islamique que ce qu’Allâh lui a ordonné d’en conserver. Ainsi, il présuppose une sacralisation (ihram) de la part du pèlerin et suit un parcours particulier (incluant non seulement des rites se déroulant à La Mecque mais aussi en d’autres lieux voisins tels que le mont ‘Arafât et Minâ). Le rituel culmine avec les circumambulations autour de la Ka‘ba, symbole du retour au centre primordial que tout pèlerin accomplit virtuellement de la sorte. On distingue le « grand pèlerinage » (hajj) du « petit » (‘umra) qui, lui, est facultatif, n’inclut pas la totalité des pratiques rituelles du « grand » et

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peut se dérouler n’importe quel mois. Celui qui meurt durant le pèlerinage, « petit » ou « grand », est dit entrer directement au Paradis sans être jugé. Hujjâj est le terme par lequel on désigne les pèlerins qui ont accompli le pèlerinage (hajj ). 224, 385, 435. hâl (pl. ahwâl) : de la racine h w l contenant les idées de « changement », « instabilité » ; « comme leur nom l’indique, les ahwâl, chaque fois qu’ils se produisent, changent et ne durent pas » (Tâdilî). Un hâl est un état spirituel transitoire et incontrôlé, un « don que le Seigneur déverse sur le serviteur » (Kâshânî), le plus souvent indépendant de toute volonté humaine et survenant sans effort ni recherche directs mais pouvant cependant être accordé comme « récompense (mîrâth) du bien agir » (Kâshânî). Dans tous les cas, c’est une « faveur » (fâ’ida) intérieure accordée par Allâh et est lié à l’instant (waqt). « Le hâl descend dans l’instant et l’orne comme l’esprit le corps » (Hujwîrî). Un hâl qui dure et se stabilise devient un maqâm, un « état spirituel permanent ». 157, 158, 198, 260, 276, 286, 306, 328, 333, 335, 379, 390, 419. halâl : « ce qui est licite ». La détermination de ce qui est licite et de ce qui ne l’est pas est établie par la Loi sacrée sur la base de la révélation coranique. Appliqué à la viande, le terme halâl désigne celle d’une bête égorgée rituellement au nom d’Allâh et qui, ainsi purifiée, peut être consommée par les musulmans, sauf s’il s’agit d’un animal de la famille du porc. 264. halqa : litt. « cercle », « personnes placées en rond » ; ce terme désigne, d’une façon générale, les cercles d’enseignement pieux. 62. al-Hamîd : « Digne de louanges » ; le Nom divin (cf. Qur’ân, II, 269). 148. Haqîqa (pl. haqâ’iq) : dérivé du Nom divin, Haqq, le « Vrai », le « Réel », il signifie « Vérité », « Réalité ». Dans le Soufisme, c’est la « Réalité profonde » ou la « Vérité intérieure » à laquelle la réalisation spirituelle permet d’accéder. La haqîqa est la quintessence des choses ; c’est le noyau accessible uniquement à ceux qui auront su briser l’écorce des apparences. On appelle les soufis ahl al-haqîqah, les « gens de la Réalité (cachée) ». La Haqîqa est le fondement et le but de la Sharî‘a (de la « Loi » religieuse s’adressant à tous) et ce sont les turuq, les confréries soufies, qui sont les « chemins » (turuq) permettant de passer de la Sharî‘a à la Vérité centrale

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de celle-ci à la façon dont un rayon relie le centre à la circonférence. « La Loi consiste à servir Dieu (al-Haqq) ; la voie à aller vers Lui ; la Vérité (Haqîqa) à Le contempler » (Ibn ‘Ajîba). Par extension, haqîqa est employé aussi pour désigner le « domaine spirituel » au sens large. 33, 34, 249, 304, 396, 402, 418. al-Haqq : le « Vrai », le « Réel », Nom divin souvent opposé dans le Qur’ân au bâtil, à « ce qui n’est pas réel ». 63, 65, 93, 110, 226, 246, 273, 300, 310, 336, 369, 395, 401. harâm : de la racine h r m désignant ce qui est « sacré », ce qu’on ne peut toucher ; a pour sens : « interdit » ; ce dont l’infraction peut entraîner une peine ; mais aussi ce qui est sacré et inviolable – ainsi, la Mosquée sacrée de La Mecque est-elle appelée al-masjid al-harâm et cette notion d’inviolabilité appliquée à une ville, un lieu ou une enceinte se retrouve dans la désignation de harem pour le gynécée. Le terme désigne le territoire sacré situé dans le périmètre de La Mecque et de Médine et où il est interdit à tout non-musulman de pénétrer. 149, 405. hayba : « crainte révérencielle » dont l’aboutissement est le ghayba, « l’absence » de la créature qui s’efface absolument en présence de son Seigneur. 86. hayûlâ : Équivalent philosophique du al-habâ (littéralement : la « Poussière ») théologique, ce terme désigne la Substance primordiale qui se trouve au commencement du monde et qui est identique à la materia prima scolastique. Il est envisagé, de façon générale, à deux niveaux, tantôt comme materia prima (al-hayûlâ al-ûlâ) proprement dite, tantôt comme materia secunda (al-hayûlâ al-thânîya). Cette « substance » ou materia ne doit pas être confondue avec ce qui est entendu aujourd’hui par « matière » et qui regroupe un ensemble de notions totalement étrangères à la mentalité traditionnelle ancienne. Comme le note Guénon, « nous n’avons pas à notre disposition, dans les langues occidentales, de meilleur terme, dans les langues occidentales actuelles, que celui de “substance” » (Le Règne de la Quantité et les Signes des Temps, Paris, 1962, p. 22). Ce qui est désigné ici est le principe universel de la puissance pure « où il n’y a rien de distingué ni d’“actualisé”, et qui constitue le “support” passif de toute manifestation » (ibid). Cette Substance est sinon identique du moins analogue avec la notion de Prakriti des hindous ou encore avec la hylé des Grecs antiques. Entendue en tant que materia secunda, hayûlâ désigne la substance prise en un sens relatif, soit ce qui jouera un rôle équivalent à la substance primordiale par rapport à un

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domaine de l’existence plus circonscrit. Bien entendu, comme le note encore Guénon, « dès qu’on entre dans le relatif, les termes deviennent susceptibles d’applications multiples à des degrés différents » et « ce qui est materia [substance] à un certain niveau peut devenir forma [essence] à un autre niveau et inversement, suivant la hiérarchie des degrés plus ou moins particularisés que l’on considère dans l’existence manifestée » puisqu’elle n’est pas non plus une substance pure car « il n’y a de puissance pure que la substance universelle, qui ne se situe pas seulement au-dessous de notre monde (substantia, de sub stare, est littéralement “ce qui se tient dessous’, ce que rendent aussi les idées de “support” et de “substratum”), mais au-dessous de l’ensemble de tous les mondes ou de tous les états qui sont compris dans la manifestation universelle » (ibid, p. 23). 331. hijâb (pl. hujub) : le voile traditionnel que portent les femmes musulmanes pour se dérober aux regards en soumission à l’ordre donné par Dieu dans le Qur’ân. 111, 286. al-Hikma : la « Sagesse. » Dans le Soufisme, c’est l’intériorisation de l’extériorisation (butûnuh fî zuhûrih) de Dieu lors de la manifestation du monde par Sa Volonté. Sagesse est le nom de cet « Intérieur » divin (albâtin). 203, 370. hîra : « crainte » ; traditionnellement, c’est la crainte qu’inspire le sacré au fidèle et qui lui fait marquer son respect par le silence. Poussée à l’extrême, cette notion rejoint celle de la timor panicus des Anciens. Elle ne doit pas être confondue avec l’angoisse. 286, 287, 387. hubb ilâhî : « l’amour divin » ; celui du Créateur vis-à-vis de Sa créature dont le principe est résumé par le hadîth qudsî : « J’étais un Trésor caché, J’ai voulu être connu et J’ai créé le monde. » 270. hubb rûhânî : « l’amour spirituel » ; celui de la créature vers son Créateur ; en réalité, il est le fruit de l’Amour divin : la créature qui aime croit qu’elle aime mais, à vrai dire, ne fait qu’obéir à un appel, un attrait venant de son Seigneur. 270. hubb tabî‘î : « l’amour physique ou naturel ». 250, 270.

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hudûr : de hadra, « présence », désigne l’« état de concentration » ou encore le fait d’« être en présence d’Allâh ». 164.

I ihtirâm : « vénération », forme nominale dérivée de la racine h r m désignant ce qui est « sacré », ce qu’on ne peut toucher, qui est intangible. 18. ikhlâç : terme littéralement sans équivalent en français ; dérivé de la racine kh l ç contenant l’idée physique de pureté ; dans le Qur’ân, les mots dérivés de cette racine tels que mukhlaç ou mukhliçûn contiennent les notions de « don spirituel total » et sont employés à propos d’êtres ayant consacré leur vie exclusivement au service d’Allâh tels que des saints ou des prophètes ; d’une façon générale, il désigne la « pure consécration » unissant à la fois les sens de « pureté d’intention » et de « consécration » ou mise en pratique de celle-ci ; étape indispensable dans la recherche de l’union à Dieu, l’ikhlâç consiste à dégager le comportement de l’être de toute préoccupation mondaine grâce à une parfaite « pureté d’inten tion » consacrée exclusivement à Dieu et non centrée sur l’action proprement dite ou encore les éventuelles récompenses qui pourraient en être retirées. 18, 159, 169, 337. ikrâm : « générosité ». 303. ‘ilm çuwarî : « science de la représentation » ou, si l’on préfère, dérivée ou simplement livresque. 19. ‘ilm hudûrî : science dérivant de la réalisation intérieure ou de l’expérience vécue. 19. îmân : « foi ». Pour le musulman, selon le hadîth dit de Gabriel, « croire en Allâh, en Ses anges, en Ses livres, en Ses envoyés, au Jour Dernier et croire dans la prédestination du Bien et du Mal. » 108, 309, 373, 405. inâba : « conversion » ; elle présente de multiples degrés : extérieurement, c’est le passage de l’état de péché à l’état de repentir, de l’état d’infidélité

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à celui de croyant mais son aboutissement est, pour l’homme spirituel, le passage de la conscience individuelle à la conscience universelle par une « brisure » (inkisâr) et un passage à la limite et au-delà des modalités rationnelles d’entendement. 61, 382, 383. infiçâl : « séparation ». 107. inqitâ‘ : « renoncement au monde ». 77, 93, 364. ishtiyâq : « ardeur » ; dans le Soufisme c’est « l’élan joyeux du cœur qui voudrait être toujours uni à l’Ami » (Ibn ‘Ajîba) et le pousse à vouloir être sans cesse initié à de nouveaux secrets et à la vison du Bien-Aimé. 18, 262. islâm : dérivé de le racine s l m qui contient les idées de « paix » et de « salut » ; et de aslama, « s’en remettre à » ; d’où son sens de « soumission » (à la Volonté divine). Selon le Qur’ân, « la tradition (dîn), aux yeux d’Allâh, est vraiment l’islâm » (III, 19). Celui-ci présuppose une « conversion » (tawba) ou, si l’on préfère, un retournement. C’est la remise totale (taslîm) et l’obéissance totale (inqiyâd) aux commandements divins » (Abû Hanîfa) et c’est, par là, que tout croyant s’agrège à la communauté traditionnelle des musulmans. « Les musulmans s’appellent en chinois “hweï-hweï”, ceux qui retournent, obéissants, à leur destinée. La tradition musulmane dit qu’Allâh appelle à Lui toutes les choses, afin qu’elles viennent, bon gré mal gré. Rien ne peut manquer à cet appel. C’est pourquoi tout est musulman d’une façon générale. Les êtres humains qui viennent à Lui de bon gré, s’appellent musulmans dans un sens plus restreint. Les hommes qui ne viennent à Lui, c’est-à-dire qui ne suivent leur destinée que par force, malgré eux, sont les infidèles » (Abdul-Hâdî). L’Islâm est la religion révélée à Muhammad et transmise aux Arabes de La Mecque et de Médine puis, de là, au reste du monde. Elle est une « réactualisation » de la tradition abrahamique et c’est aussi le « sceau » des traditions monothéistes précédentes, juive et chrétienne, qu’elle confirme et parachève. 11, 12, 17, 18, 24, 34, 35, 62, 63, 67, 69, 73, 75, 80, 84, 96, 102, 103, 124, 127, 139, 199, 208, 233, 238, 252, 262, 302, 340, 343, 355, 356, 364, 366, 368, 370-372, 374, 376, 378, 380, 382-384, 386, 387, 390, 392, 394, 396, 398, 400, 402, 404, 406. istadâra : « être rond ». 221.

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istaghfara : « demander pardon ». 96, 227. istaqâma : « droiture ». Pour le musulman, « c’est mettre en pratique ce que l’on sait des paroles du Prophète, de ses actes, (…) et de son caractère, sans recherche ni affectation et sans se laisser aller aux séductions illusoires, ni sortir des sentiers tracés ou déroger aux prescriptions et aux coutumes » (Ibn ‘Ajîba). Dans le Soufisme, c’est de se conformer non seulement au modèle prophétique mais à l’essence du Miséricordieux. 212. istighfâr : « demande de pardon ». Le terme dérive de ghafara qui signifie « recouvrir » ; du point de vue du taçawwuf, le pardon est donc à entendre comme le fait d’être « recouvert ». Il s’agit d’implorer Allâh de « recouvrir » la créature et, par là, d’effacer ses limites dans l’infinité principielle. Selon la tradition, Muhammad demandait pardon à Allâh cent fois par jour. 96, 97, 99, 227. ittiçâl : « l’union » ou plutôt la « conjonction » sans identification de l’être avec le Principe ; la seule forme de ravissement qui soit reconnue par les docteurs exotériques de la Loi. 107. ittihâd : de la racine w h d contenant les idées de « solitude » et d’« unicité », ce terme désigne « l’unification », le fait d’être ré-uni, joint à ; il se réfère à l’état spirituel dans lequel l’être est « fondu sans être confondu » en Dieu. C’est la capacité qu’a l’homme de se « trans-former » et ainsi de « devenir » ou plutôt d’être un autre tout en restant lui-même. C’est « l’évanouissement de la volonté propre de la créature dans la Volonté divine » (‘Alî b. Wafâ). Il ne s’agit pas de produire en cela quelque chose qui n’aurait pas été auparavant mais plutôt de réaliser ainsi ce qui est de toute éternité. Cette « ré-union » est un acte de pure connaissance dans laquelle l’être est tout ce qu’il connaît ; elle ne s’opère que par une totale rupture de la dualité dans une parfaite identification. C’est un équivalent du terme sanskrit yoga. Il arrive que, par extension, ittihâd soit employé dans un sens équivalent à la notion de tawhîd ou de wahdat al-wujûd, donc de doctrine de l’unité divine, dans la mesure où celle-ci est une affirmation de ce que les êtres n’ont pas de réalité propre mais ne font qu’un avec Allâh hors duquel rien n’est ni ne peut être. 308.

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J Jalâl : « Majesté ». Attribut divin lié à la fonction de Justice d’Allâh et à l’aspect de rigueur, tout comme son pendant, l’attribut de « Beauté » (Jamâl), l’est à la Miséricorde divine. 303. jihâd : dérivé de la racine j h d, « s’appliquer », « faire effort », ce terme signifie, par suite, « lutte », « effort » (vers un but déterminé) ; dans le Qur’ân, il est employé pour désigner l’« effort intérieur » du croyant pour vaincre ses limites. Par extension, il en est venu à désigner aussi le commandement divin qu’on traduit habituellement par « guerre sainte », c’est-à-dire « l’effort de guerre » en vue de l’expansion de l’Islâm (ou encore sa défense) ; cette forme de guerre est, selon les ahâdîth, une obligation communautaire (fard kifâya) impliquant tout musulman de sexe masculin, libre et valide. C’est un « acte de dévotion pure » et « une des portes du Paradis ». Mais un autre hadîth enseigne également qu’une fois revenu victorieux de cette « petite guerre sainte » (al-jihâd al-açghar), le musulman se doit d’entreprendre la « grande guerre sainte » (al-jihâd al-akbar), c’est-à-dire, selon les docteurs de la Loi, celle contre ses propres passions et, du point de vue du Soufisme, celle contre son propre ennemi intérieur, le moi, ou encore cette âme (nafs) qui doit être spirituellement mise à mort (apaisée), cet ennemi qui doit être converti afin de faire passer l’être de la conscience individuelle à la conscience universelle, de l’illusion à la Réalité. 117, 143, 401.

K Ka‘ba : désignation avant l’Islâm des sanctuaires de forme « cubique », aujourd’hui, ce terme se réfère au plus célèbre édifice sacré de la tradition musulmane. Bâtie par Adam aidé par les anges, élevée au ciel lors du Déluge, la Ka‘ba sera rebâtie par Abraham et son fils Ismaël puis, après d’autres « remaniements », enfin reconstruite par les Qorayshites avant que Muhammad en fasse le lieu de culte du Dieu unique. Elle est appelée aussi Bayt Allâh, « la Maison d’Allâh ». Située au milieu de la cour de la grande mosquée de La Mecque ; c’est vers elle que s’orientent les musulmans du monde entier lors de chaque çalât et vers elle que convergent des centaines de milliers de pèlerins pour le pèlerinage, grand ou petit (hajj ou ‘umra) ; c’est autour d’elle qu’ils effectuent leur circumambulation rituelle (tawâf ) lors du « grand

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pèlerinage » et symbolisant la réintégration au centre primordial. On ne peut pénétrer dans son enceinte qu’après s’être mis en état de sacralisation rituelle (ihrâm). Dans l’angle nord-ouest de sa façade, est encastrée la Pierre Noire (al-hajar al-aswad) apportée par l’archange Gabriel à Adam qui, selon le mythe, aurait été, à l’origine, une perle blanche que les péchés des hommes auraient rendu noire. Pour Ibn ‘Arabî comme pour beaucoup de soufis, la véritable Ka‘ba est intérieure. Abû Yazîd al-Bastâmî rapporte : « À mon premier pèlerinage, je ne vis que le temple ; à la seconde fois, je vis aussi bien le temple que le Seigneur du temple ; la troisième fois je vis le Seigneur seul ; (…) le sanctuaire est là où il y a contemplation (…) dès qu’il participe à la vue d’Allâh, tout l’univers est son sanctuaire. La chose la plus sombre du monde est la maison du Bien-Aimé sans le Bien-Aimé. » Ce qui importe n’est pas la Ka‘ba de pierre mais Ce à quoi celle-ci renvoie. 187, 217-231, 238, 297, 320, 367-369, 372, 373, 378, 385, 386, 396. karâma (pl. karâmât) : de karuma, « être généreux, bienfaisant » ; « miracle », « faveur divine » ; prodige accompli par un saint par participation à la grâce divine prophétique en rupture avec le cours habituel des choses. En principe, cette faveur est à titre personnel et doit rester secrète. Elle se distingue en cela des « miracles prophétiques » (mu‘jiza), destinés à être connus de tous, aussi bien que, bien entendu, de la magie (sihr), des « sortilèges » (nâranjât) et de tous les miracles sensibles et relevant de ce monde. 101, 199, 202, 203, 212, 213, 410. al-karâmât al-hissiyya : « miracles sensibles » contre lesquels les saints mettent en garde. 203. kashafa et kashf : « dévoilement. » Le terme désigne littéralement le fait d’ôter un voile et désigne, dans le Soufisme, le dévoilement intuitif opéré par l’ouverture des portes de la perception intérieure permettant à l’être d’accéder à une connaissance des réalités célestes. Les voiles qui doivent tomber sont ceux de la raison (‘aql), qui ne peut accéder à ce type de connaissance, et de toute pensée propre s’interposant entre la créature et son Créateur. Le kashf ne saurait, par suite, provenir de l’étude ou de la réflexion. Le dévoilement implique de vider son cœur de tout ce qui n’est pas Dieu ; l’être, ainsi « ouvert » à l’influence divine, participe alors à la révélation de ce que son Créateur désire pour lui aussi bien que pour Lui-même. On considère que le kashf est un approfondissement de la foi et permet le passage de celle-ci à la gnose. « Lorsque s’opère le dévoilement (kashf ), par

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l’effacement des formes matérielles (hiss al-kâ’inât) qui sont les contenants de ces secrets spirituels, le Vrai est reconnu comme l’Être unique » (Ibn ‘Ajîba). Le terme a de nombreux synonymes : mukâshafa, tajallî, fath, etc. 213, 372, 389. khaçîm al-farq : « tendance séparative ». La conscience séparative (farq) en est l’aboutissement, c’est-à-dire « la vision de la forme sensible (hiss) des êtres et le respect des prescriptions (ahkâm) et des convenances (âdâb) qui conviennent à cet état et s’expriment par le service pieux et la servitude (‘ibâda) » (Ibn ‘Ajîba). Sans être rééquilibrée par la tendance conduisant à la conscience unitive, cette tendance n’est qu’ignorance. 203. khaçîm al-jam‘ : « tendance unitive ». La conscience unitive (jam‘ ) en est l’aboutissement, c’est-à-dire « la vision de la réalité intelligible (ma‘nâ) inhérente à toute chose et reliée à l’Océan infini de l’Omnipotence » (Ibn ‘Ajîba). 203. khalîfa : « Calife », « lieutenant », « celui qui remplace, qui succède, à un autre ». Adam fut le premier des « lieutenants » de Dieu sur terre. À la mort du Prophète Muhammad, on désigna par « Calife » celui qui lui succéda à la tête de la communauté des croyants (umma). Les quatre premiers califes dits « bien dirigés » furent : Abû Bakr, ‘Umar, ‘Uthmân et ‘Alî qui remplirent vis-à-vis de la communauté une fonction à la fois spirituelle et temporelle. 218, 396. khalwa (pl. khalawât) : de khalâ, « être seul » ; « retraite spirituelle » durant laquelle le disciple s’isole dans un lieu retiré et se livre à la méditation et à la récitation ininterrompue (dhikr) sous la direction d’un Maître (Shaykh). C’est une imitation de ce que faisait le Prophète quand il s’isolait dans une grotte du mont Hirâ. Le but de la khalwa, dans le Soufisme, est de conduire à la « retraite dans le monde » (khalwa dar anjuman). Pour Ibn ‘Arabî, il s’agit d’atteindre à la parfaite « vacuité » (khalâ) où plus rien n’existe en dehors d’Allâh. 59, 72, 241, 290, 291, 305, 333, 373, 377. khanqa : mot d’origine persane (khânegâh) désignant les sortes de « monastères » ou plutôt de « lieux de retraite », plus ou moins temporaires, destinés aux ascètes (puisqu’il n’existe pas de monachisme en Islâm). 62, 422.

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khashya : « terreur sacrée ». Il s’agit de la crainte révérencieuse poussée jusqu’à la terreur de l’être confronté à une dimension surnaturelle. Elle peut être éprouvée aussi bien par les êtres humains que par les animaux. 121. khawf : « crainte ». « La crainte du vulgaire est celle du châtiment, ou celle d’être privé de la récompense. Ce que craignent les gens de l’élite, c’est d’être réprimandés et de perdre l’occasion de s’approcher (d’Allâh). Quant aux élus de l’élite, leur crainte est d’être voilés (de la présence divine) à cause d’une indélicatesse (vis-à-vis d’Allâh) » (Ibn ‘Ajîba). 88, 123, 183, 418. kufr : « blasphème » ; propre du kâfir, terme généralement rendu par « infidèle » ou « incroyant » mais qui signifiait, à l’origine, « qui couvre », « qui recouvre et dissimule (les bienfaits reçus) » donc « ingrat » mais aussi « voilé » (c’est-à-dire, d’une certaine façon, qui ne perçoit pas la grâce divine). Plus généralement, ce terme désigne l’incroyant. Les docteurs de la Loi distinguent plusieurs sortes de kufr. Dans le Soufisme, on appelle à un dépassement de la foi et de l’infidélité comme de toute dualité quelle qu’elle soit. « Aussi longtemps que la foi et l’infidélité ne seront pas entièrement pareilles, pas un seul homme ne deviendra un vrai musulman » (Abû Sa‘îd). 108, 309.

L al-Latîf : Nom divin, « le Subtil » ; par suite désignation du « monde spirituel ». La « Subtilité » (lutf ) divine est connexe à la protection divine, d’où l’expression : « yâ Lâtif ! » (« ô Bienveillant ! ») accompagnant les situations graves ou tragiques. 213.

M mahabba : « Amour » ; pour le croyant, il s’agit de l’Amour d’Allâh. Dans le Soufisme, on considère que ce que l’on aime on veut le posséder donc le connaître. Il n’y a pas de connaissance sans amour ni don de soi. L’un appelle l’autre. Plus on aime, mieux on connaît, plus on connaît, mieux on aime. « Plus il croîtra en connaissance, plus il croîtra en amour » (alGhazâlî). Cet amour-connaissance procède par une rupture de la dualité et une identification de l’amant avec l’Aimé. « Qu’est-ce que l’Amour ?

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Tu le sauras quand tu seras Moi » (Rûmî). L’aboutissement de l’amour est la mort, l’effacement de celui qui aime au profit de l’Aimé. « L’amour est l’effacement des attributs de l’amoureux et l’instauration de l’essence du Bien-aimé » (Qushayrî). La mahabba est exigence absolue et total désintéressement. L’amant, conscient de l’absence de commune mesure entre lui et l’Aimé, aime sans rien attendre. Seul Allâh S’aime Lui-même à travers Son amant qui n’a aucune existence en dehors de Lui. « Celui qui atteint ce degré aimera rencontrer Allâh. Et il aspirera à mourir (mahabbat almawm) » (al-Ghazâlî). 244, 245, 260, 269, 304. mahall : « lieu » ; « réceptacle » mais aussi « objet ». Dans la terminologie soufie en général et akbarienne en particulier, ce « lieu » désigne souvent le cœur, c’est-à-dire l’endroit où s’opère la vision et l’illumination. C’est le « lieu » qui doit être vidé de toute réflexion mentale pour s’emplir de la conscience de la Présence divine en soi. Ainsi que l’enseigne Ibn ‘Arabî, « il n’y a pas d’autre moyen d’y parvenir (…) que de vider le lieu de tout “autres” » (Futûhât, III, p. 257). Tout lieu est un support de la Présence principielle car, comme il le rappelle dans les Fuçûç al-Hikam : « c’est une règle de l’Activité divine de ne préparer aucun lieu (mahall) sans que celui-ci ne reçoive un esprit divin » (La Sagesse des Prophètes, trad. Burckhardt, p. 111). Ce qui n’est pas « autre chose que l’aptitude (isti‘dâd) que possède telle forme, préalablement disposée, à recevoir le “flux” (al-fayd) inépuisable de la théophanie essentielle (at-tajallî) » (ibid). 289, 295. mahbub : « l’amoureux », litt. : l’« aimé » ; dans le taçawwuf, ce terme désigne celui qui aspire à la connaissance et à la réalisation spirituelle. 269. mahw : « effacement » ; ce terme désigne le détachement intérieur grâce auquel l’être s’efface lui-même et réalise la Présence du Principe en lui. Comme le dit Ibn ‘Ajîba, « l’effacement (mahw) est le fait de s’abstraire des choses existantes par extinction (al-ghayba ‘an al-kâ’inât fanâ’an) ». Cette dissolution des limitations individuelles humaines s’obtient par la réalisation spirituelle du modèle prophétique qui permet d’effacer les attributs « blâmables » et de parfaire et affirmer les attributs « louables » dans un éveil et une pureté parfaites. Ibn ‘Arabî définit le mahw comme « l’effacement des attributs du comportement (individuels) et l’élimination des causes » (Futûhât, II, p. 552). Cette notion a été aussi traitée par Hujwîrî dans son Kashf al-Mahjûb et par Qushayrî dans sa Risâla, 273-276. 285, 301, 374.

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majâlis adh-dhikr : les réunions collectives où l’on pratique le dhikr. 62. majnûn (pl. majânîn) : « fou », « possédé », « celui dont la raison est voilée ». Le terme dérive de j n n qui a donné aussi janna, « être caché, voilé », mijann, « le bouclier », « l’armure » (c’est-à-dire ce qui protège et couvre le corps) ou encore janîn, le « fœtus » c’est-à-dire celui qui est encore caché (dans le ventre de la mère). Dans le Qur’ân, il désigne celui qui est possédé ou inspiré par un djinn. Il fut employé par les adversaires du Prophète pour l’accuser d’être inspiré non par Allâh mais par des djinns. C’est aussi un nom propre rendu célèbre par l’histoire de Majnûn et Laylâ contant le drame d’un homme, Majnûn, qui devint fou d’amour pour une femme, Laylâ. Le récit est une métaphore de l’amour fou et sans limite du spirituel pour Dieu. Le majnûn est celui qui, aspiré par l’autre monde, est, de par son attraction, voilé à ce monde et à ses valeurs. 246, 294. malakût : la « Souveraineté », le « monde de la royauté absolue ». C’est le Royaume céleste, le lieu des secrets des réalités intelligibles, le monde intérieur en tout être, monde non soumis à la corruption, par opposition à mulk, désignant le « royaume » ou le monde sensible. Selon Ghazâlî, n’en foule le sol « que celui dont l’apparence est proche des anges. » 222. ma‘nâ (pl. ma‘ânî ) : terme dont le sens varie selon la discipline qui l’emploie ; ainsi, en grammaire et lexicologie, il signifiera « sens », en philosophie, « concept », « pensée » mais aussi « idées » (au sens platonicien) et, dans le taçawwuf, « Mystères », « significations spirituelles » ou « réalités intelligibles ». 148, 172, 387. maqâm (pl. maqâmât) : littéralement, « lieu », « place », « station », « position », « rang ». Le terme dérive de la racine q w m contenant les idées de « se lever », « se dresser (pour agir) ». Par suite, il en vint à ne désigner plus que la phase initiale, la station immobile précédant le mouvement. Ainsi, dans le Qur’ân, le terme se rapporte, généralement, au « lieu où l’on se tient ». Il a pu désigner aussi, dès les poèmes préislamiques, la « situation », « l’état » dans lequel un être se trouve. Le terme a trouvé diverses applications en arabe – notamment sur le plan musical quand, à la fin de la période abbasside, il vint à désigner certains modes musicaux. Dans le taçawwuf, il signifie « station spirituelle » et se réfère à un état spirituel fixé, distinct du hâl ou « état spirituel éphémère », ou, si l’on

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préfère, au degré d’intériorité permanent dans lequel l’être s’est établi. Chaque maqâm est un degré ou une étape permettant de s’élever et de s’approcher de Dieu. Chacun est un relais ou une « demeure » pour le voyageur sur la route vers le Principe. D’une façon générale, on considère que « la station (maqâm) est le degré de conformité (adab) que le serviteur réalise par le combat intérieur et l’effort personnel (ijtihâd) et les degrés de certitude (maqâmât al-yaqîn) auxquels il accède par son effort d’acquisition (takassub) et sa recherche (tatallub) » (Ibn ‘Ajîba). Le terme peut servir aussi à désigner une construction établie en l’honneur d’un saint mais où il n’est pas enterré ou, plus généralement, un lieu où un saint ou un prophète s’est tenu (comme, par exemple, le maqâm d’Abraham à La Mecque). 75, 117, 158, 186, 198, 222, 260, 286, 323, 328, 374, 379, 402, 415, 419, 435, al-maqâm al-ilâhî : « station divine », terme de la Voie spirituelle. 374. ma‘rifa : « connaissance » ; dans le taçawwuf, de façon générale, elle est toujours ma‘rifa bi-Llâh, « connaissance par et en Allâh », et distinguée du simple savoir mental ou livresque (souvent désignée par le terme ‘ilm). Elle dépasse le champ de la raison par une identification à l’objet connu (en dernière analyse, il s’agit toujours d’Allâh). Cette rupture de la dualité dérive du hadîth célèbre selon lequel « qui se connaît soi-même connaît son Seigneur » (man ‘arafa nafsahu faqad ‘arafa rabbahu). Innombrables sont cependant les sortes et les degrés de connaissance tout comme ses définitions. Abû Yazîd al-Bistâmî disait que « la véritable ma‘rifa, c’est la vie dans le souvenir (dhikr) d’Allâh. » Elle présuppose un dépassement de la conscience individuelle. À un certain niveau, elle se confond avec la contemplation. Comme l’écrit Ibn ‘Ajîba, « c’est une vision (shuhûd) perpétuelle avec un cœur ravi qui ne voit que son Seigneur et Maître et ne se tourne vers rien d’autre que Lui. » En conformité avec le hadîth qui déclare : « si vous connaissiez Dieu comme Il doit être connu (haqqa ma‘rifatih), les montagnes disparaîtraient à votre demande. » 18, 111, 190, 365, 405. ma‘rûf : « le bien » mais aussi une « action conforme à l’ordre », une « bonne action » ; la « charité » ; ce terme peut désigner aussi, dans le Maghreb, le « repas offert près d’un sanctuaire » ; ou encore, notamment, « fameux », « illustre ». 344. mawt : « mort » ; pour le musulman, cet événement, tout comme sa naissance ou toute chose en général, obéit à un décret divin. Les causes extérieures de la mort (maladie, accident, etc.), ne sont que les

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intermédiaires par lesquels s’opère la Volonté divine. La mort n’est pour le croyant qu’un terme « imparti » (adjal) par Allâh pour éprouver l’être en ce monde. Dans le taçawwuf, la « mort » intérieure est un présupposé à toute connaissance ou re-naissance spirituelle. Y parvenir est une promesse et un espoir et l’objet d’efforts de la part de celui qui est sur la Voie. 315. milk : la « possession » ; terme juridique désignant la propriété. 78. mubâya‘a : « rattachement » à une confrérie par l’intermédiaire d’un Maître ; l’acte de prêter serment et « allégeance » (bay‘a) qui est la marque de ce rattachement. 290. mu‘jiza : littéralement « ce par quoi le Prophète confond ses adversaires », par extension, « miracle prophétique ». Miracle public défiant l’ordre courant et accompli par Dieu à travers Ses envoyés, il est toujours destiné à accréditer la mission prophétique ainsi qu’à faire naître la conviction chez ceux qui en sont témoins ou à qui il est rapporté. 202, 212, 213, 386. mukhâlafa an-nafs : « lutte contre son âme » ; en vue de l’abandon de la volonté propre, préalable indispensable pour tout disciple aspirant à la connaissance spirituelle. 143. mulk : « royaume ». 78, 129, 222, 390. munkar : « mal ». Le terme peut aussi avoir le sens de « fabriqué » car, en tant que terme technique de la science du hadîth, il servait à désigner les ahâdîth « discutables » ou à écarter. C’est aussi le nom d’un des deux anges qui interrogent et, éventuellement, punissent les morts dans leur tombe. 216. muqaddam : « celui qui est mis en avant » ; « préposé » ; dans le taçawwuf, c’est le représentant « local » qui est mis à la tête d’une confrérie par un Shaykh afin de transmettre la baraka et diriger la hadra en son nom. Le terme désigne, d’une façon plus générale, le chef, le commandant d’une troupe ou le capitaine d’un navire. 29.

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muqarrabûn : « ceux qui se sont rapprochés » ; désigne les « proches » du Principe occupant le plus haut rang de la hiérarchie initiatique. 27, 29, 75, 316, 336, 370. Murâd : « Celui qu’on cherche » ; l’objet désiré. Pour le disciple, dans la voie spirituelle, il s’agit d’Allâh. Mais le terme peut être aussi entendu selon un autre sens : ainsi, selon Ançârî, le murâd est « celui qui est désiré de Dieu, soumis à son emprise. » Apparemment entraîné par Allâh, un tel élu est un parfait qui franchit les différentes « étapes » comme malgré lui et par la seule grâce de Dieu. 275. murâqaba al-qalb : « vigilance du cœur » ; « contrôle spirituel » précédant la contemplation. « C’est l’état du serviteur perpétuellement conscient du fait que le Seigneur est instruit (de tout). (…) Celui dont la vigilance est extrême atteindra à une contemplation extrême » (Ibn ‘Ajîba). 163. murîd : « celui qui aspire » ; « celui qui cherche » ; le « disciple » en quête des réalités spirituelles. « C’est celui qui ne veut rien, excepté son Seigneur et Maître » (Ibn ‘Ajîba). Dans le taçawwuf, il est dit que le disciple doit être entre les mains de son Shaykh (le représentant de Dieu) comme le cadavre entre les mains du laveur. 65, 139. murshid : « celui qui guide » ; le « Maître spirituel » (Shaykh) qui initie et transmet la baraka (l’influence spirituelle) ; « celui qui oriente dans la voie ». 110. muslim (pl. muslimûn) : le « musulman » ; celui qui, bon gré mal gré, se soumet à la Volonté de son Seigneur. 64. mustaghfir (pl. mustaghfirûna) : « celui qui demande pardon ». On en trouve mention dans le Qur’ân : « ceux qui se montrent patients, sincères et soumis ; qui font l’aumône et qui implorent le pardon (d’Allâh) au point du jour » (III, 17). 76. mustaqîm : « droit » ; dans le taçawwuf, le sentier droit (çirât al-mustaqîm) est l’intellect transcendant reliant l’être au Principe. 351, 371.

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mutaçawwif (pl. mutaçawwifûn) : « celui qui a été initié au taçawwuf, au Soufisme », « celui qui est sur la voie » ; toute personne ayant contracté le lien avec Allâh et Son Prophète au sein du taçawwuf. 36, 59, 73, 86, 92, 100, 106, 108, 129, 139, 146, 180, 239, 243, 304, 323, 357, 371, 421. mutawakkil (pl. mutawakkilûn) : celui qui pratique le tawakkul ; le confiant ; celui qui, en toute chose, s’en remet à Dieu. 180, 181. muwâfaqa : « entente mutuelle » ; « conformité ». 289.

N nabî (pl. anbiyâ) : « prophète » ; à la différence du rasûl, le nabî reçoit une révélation qu’il n’est pas tenu de transmettre au plus grand nombre en sorte qu’il vient uniquement confirmer la tradition de son temps et avertir et exhorter les hommes à Dieu. En Islâm, on appelle nabî un prophète et rasûl un envoyé, c’est-à-dire un transmetteur de Lois. De même on distingue un walî, un saint, d’un nabî et d’un rasûl. Le saint, aussi élevé que soit son degré, accomplit une réalisation ascendante mais n’a pas pour mission de revenir vers le monde pour l’éclairer et il peut très bien parvenir à la réalisation transcendante sans rien en manifester à l’extérieur. Comme le précise René Guénon, « au contraire, un nabî n’est tel que parce qu’il a une fonction à remplir à l’égard des autres êtres ; et, à plus forte raison, la même chose est vraie du rasûl, qui est aussi nabî, mais dont la fonction revêt un caractère d’universalité, tandis que celle d’un nabî peut être plus ou moins limitée quant à son étendue et quant à son but propre » (Initiation et réalisation spirituelle, Paris, 1994, p. 261). D’autre part, « la condition du nabî implique tout d’abord celle du walî, mais elle est en même temps quelque chose de plus ; il y a donc dans le cas du walî, une sorte de “manque” sous un certain rapport, non pas quant à sa nature intime, mais quant à ce qu’on pourrait appeler son degré d’universalisation, “manque” qui correspond à (…) l’être qui s’arrête au stade du non-manifesté sans “redescendre” vers la manifestation ; et l’universalité atteint sa plénitude effective dans le rasûl, qui est ainsi véritablement et totalement l’“Homme universel” » (ibid, p. 262). 20, 151. nadîm : « celui avec lequel on partage le vin » ; « compagnon de beuverie » et, par extension, « compagnon » tout court. 294.

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nafs (pl. nufûs) : « âme charnelle ». Le terme a connu une évolution du sens des premiers textes où il était quasiment synonyme de rûh, à son emploi dans le Soufisme où, tout au contraire, il en est l’opposé et désigne ce qui empêche l’être de prendre conscience de son rûh. La nafs est ce qui doit être mis à mort pour passer d’une conscience individuelle à la conscience universelle. 82, 93, 98, 109-111, 117, 120, 122, 143, 175, 296, 300, 304, 305, 385, 392, 410. na‘îm : « plaisir » ; « volupté » ; « satisfaction », entendus aussi bien sensuellement que spirituellement ; dans le Soufisme, ce terme désigne souvent de façon plus spécifique la grâce et les faveurs divines. 182, 295. nâr : « feu » ; l’opposé de nûr, la « lumière » ; une des trois substances primordiales, avec la terre et la lumière, qui a donné à chaque être sa dominante ou sa tendance propres. 256. nuwwâb al-Haqq : « représentants de la Vérité ». 37.

P pîr : mot persan signifiant « vieille personne », synonyme de Shaykh (voir s.v). et désignant le Maître spirituel. 65, 66, 410.

Q qadam : « pied ». 29, 274. qadîm : « ancien » ; « primordial » ; la racine q d m qui signifie « précéder » et sert à désigner tout ce qui se rapporte à une antériorité au sens métaphysique ; il est ainsi mis en relation avec l’éternité ou la « Pré-existence » (qidam). Traditionnellement, en effet, les anciens sont toujours considérés comme ceux qui sont plus proches du Principe ; c’est pourquoi le Maître spirituel est appelé shaykh, « vieillard ». 29. qawm (pl. aqwâm) : « peuple » ; « gens. » Terme d’origine tribale désignant, au départ, un groupe ayant ou revendiquant un ancêtre

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commun. Dans le Qur’ân, par exemple, XI, 92 et 93 ou VI, 66, il désigne le peuple des prophètes ou celui de l’Envoyé. Il désigna, très tôt, la famille généalogiquement établie ou considérée comme telle au sens large (mythologique, folklorique, etc). D’où son application plus particulière au sein de Soufisme où il se réfère à la « famille » spirituelle des initiés en général. 289, 290. qibla : « direction ». Pour le musulman il s’agit de la direction de La Mecque ou plutôt de la Ka‘ba vers laquelle il doit s’orienter pour effectuer la çalât et qui est le centre du monde de la tradition islamique. La direction est marquée dans les mosquées par une niche (mihrab). 222, 297, 378. al-Qudra : la « Puissance », c’est-à-dire « la manifestation (idhhâr) des choses conformément à la Volonté divine » (Ibn ‘Ajîba). 190, 203, 213. Qutb : « pôle » ; désignation du chef spirituel des soufis, « homme parfait » (insân kâmil) porteur de la « Réalité muhammadienne » (al-haqîqa almuhammadiyya) par laquelle la connaissance divine est transmise aux prophètes et aux saints. Le Qutb est ainsi celui qui se tient au sommet de la hiérarchie des saints musulmans. C’est le khalîfa véritable, il soutient et conserve l’univers par son souffle. Il préside l’assemblée secrète (dîwân bâtinî) des saints présidant les affaires du monde visible et invisible. D’où son nom de « Secours » (Gawth) dispensant l’aide spirituelle aux saints et à l’univers. Intérieurement, « il est l’esprit de l’univers (rûh al-kawn), autour duquel celui-ci décrit ses révolutions, ce que l’on exprime en disant qu’il est comme la pupille est à l’œil » (Ibn ‘Ajîba). 319, 340, 363, 365, 366, 420, 432.

R rahim : « sein », « matrice ». 87. Rahîm : le Miséricordieux. Le terme a appelé de nombreuses gloses notamment pour le différencier de Rahmân. 87, 92, 125. Rahma : la « Miséricorde ». 87, 125.

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rajâ : « espérance ». Il y a de multiples degrés de l’espérance selon qu’on est croyant ou connaissant. Comme l’écrit Ibn ‘Ajîba, « l’espérance du vulgaire est d’arriver au terme parfait (husn al-ma‘âb) en obtenant la récompense (paradisiaque). L’espérance de l’élite est d’atteindre la satisfaction divine et de s’approcher d’Allâh. L’espérance des élus de l’élite est d’obtenir une ferme vision (shuhûd) et de progresser plus avant dans la connaissance des secrets (asrâr) du Roi adoré. » 123, 275, 418. rajul (pl. rijâl ): « homme ». 19, 337. rajuliyya : « virilité » ; dans le Soufisme, elle est entendue au sens spirituel et initiatique et se rapporte à l’état de « l’homme (qui), ayant délaissé l’obscurité de la nature et des plaisirs charnels, est purifié par la lumière de l’intellect et l’observance du parcours spirituel » (Ibn ‘Arabî). 336. rak‘a (pl. rak‘ât ) : « inclinaison » ; désigne l’ensemble de gestes et de récitations formant l’unité rituelle fondamentale de la çalât. 90-92, 234, 321. rasûl : « Envoyé ». On appelle ainsi le prophète qui est porteur d’une missive (risâla), qu’il s’agisse d’un Livre ou des feuillets qui lui ont été révélés, et qui véhicule de la sorte un nouvel enseignement et une nouvelle Loi destinée à l’humanité ou à une partie de celle-ci. Le rasûl a une portée universelle. Un Envoyé est non seulement un être qui s’est élevé jusqu’à Dieu mais est redescendu pour exprimer Sa volonté dans le monde pour une période cyclique déterminée. Il ne doit pas être confondu avec le prophète qui vient simplement confirmer la tradition de son temps, même s’il peut se démarquer de celle-ci à titre personnel sur certains points. 20, 332, 394. ridâ : « contentement ». Pour le spirituel, il désigne la « joie » de celui qui voit se réaliser les arrêts divins, de quelque nature qu’ils soient. 165, 173, 257-261. ridwân : « Satisfaction divine ». 263, 400. rûh : « Esprit ». Ce terme désigne l’Esprit transcendant, dépassant les conditions individuelles humaines ; « l’Esprit total de l’Existence universelle », « produit directement par le “commandement divin” (min amr Allâh) » (René Guénon, « Er-Rûh » in Aperçus sur l’ésotérisme

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islamique et le Taoïsme, p. 55). C’est aussi le messager d’Allâh envoyé au Prophète et à Marie (XIX, 17), l’Esprit saint. Dans le Qur’ân, il désigne aussi le Souffle divin (XV, 29). 93, 122, 263, 275, 308, 365, 395, 396. rûhânî, rûhâniyya : « entité spirituelle ». Bien qu’ils puissent parfois être appliqués aux djinns et aux démons (shayâtin), ces termes vont servir à désigner, dans le Soufisme, la réalité spirituelle sous toutes ses formes, des anges en passant par les « intelligences cosmiques » jusqu’à « l’être spirituel » d’un saint ou d’un prophète dont l’influx peut guider un disciple par-delà les siècles. 326, 365, 404. rujû‘ : « retour ». Pour le çûfî, tout retour est toujours vers Allâh hors duquel rien n’est. 75, 97. rukn : « angle » ; « pierre angulaire » (rukn al-arkân), désignation symbolique du Prophète. 103, 221, 314.

S Sakîna : la « grande paix » ; la « sérénité » ou la « grande paix » de l’âme ; ce terme vient de l’hébreu Shekina désignant le nuage de gloire ; dans les deux langues, il se rapporte à la Présence divine renfermée dans l’Arche d’alliance des Hébreux (Qur’ân, II, 248) et, par suite, aussi à la Présence que Dieu « fait descendre dans le cœur des croyants afin de redoubler leur foi » (XLVIII, 4) et « sur Son Envoyé et sur les croyants ainsi que sur les armées invisibles » (IX, 26). Le Qur’ân mentionne divers moments où Allâh l’a faite descendre : par exemple, lors du serment d’allégeance à Hudaybiyya en 630 ou encore quand le Prophète traqué s’est réfugié dans la grotte (IX, 40). 58. salâm : « paix » ; mot de même racine, salama, que Islâm, rattachant ainsi les deux notions de soumission et de paix au sein de la tradition. C’est un des « beaux noms d’Allâh ». Il est au principe de la salutation traditionnelle dans laquelle les musulmans se souhaitent le salut (as-salâmu ‘alaykum) d’une façon très effective. Cette salutation consiste à souhaiter à celui à qui on s’adresse qu’il reçoive le salut de l’élite des élus en Paradis, comme ceux-ci le recevront alors d’Allâh même. Ce que souligne encore le fait que toute çalât se termine par cette même formule. 74.

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samâ‘ : « audition » ; séance de dhikr mêlant un rituel traditionnel alliant musique, chants et danse sacrés en pratique dans le Soufisme et dont on connaît la forme la plus spectaculaire avec l’ordre mevlevi, plus connu sous le nom d’ordre des derviches tourneurs. Cette pratique spirituelle, tout comme les assemblées spirituelles mêlant dhikr et hadra, a été décriée par certains exotéristes formalistes qui l’assimilent abusivement à des concerts profanes. Le samâ‘ a été défendu par de nombreux saints musulmans tels que Hujwîrî, Qushayrî, Jâmî, Ghazâlî ou bien entendu par Jalâl ad-Dîn Rûmî et, plus près de nous, par le Shaykh Al-‘Alawî. Si l’on voulait néanmoins donner un fondement à cette accusation, il reposerait essentiellement non sur la pratique elle-même mais sur l’attitude de ceux qui peuvent y participer (c’est-à-dire s’ils sont là plus pour le plaisir des sens qui peut s’en dégager que par la spiritualité à laquelle ce rituel devrait conduire). Comme le disait Dhû-n-Nûn alMiçrî : « ceux qui écoutent la musique spirituellement atteignent Dieu et ceux qui l’écoutent sensuellement tombent dans la mécréance. » 36, 409, 410, 435, 440, 442. shahawât : « désirs de l’ego » ; cela recouvre les instincts individuels, en général, et la concupiscence, en particulier, ou encore tout ce qui fait obstacle à la soumission spirituelle de l’homme à la Volonté divine. 82, 238. sharî‘a : « route », « Loi » révélée et, par suite, tout ce qui permet d’agir en conformité avec la Volonté divine en conformité avec le verset coranique : « puis Nous t’avons placé sur une voie (sharî‘a) normative (min al-amr, littéralement « procédant de l’Ordre ») ; suis-la donc et abstiens-toi de suivre les passions des ignorants » (XLV, 18) ; ce terme désigne l’aspect extérieur ou religieux de la tradition (dîn) permettant à l’être d’obtenir le salut de son âme. 32-34, 55, 134, 148, 198, 324, 345, 379, 422, 426. shath (pl. shatahât) : propos hardi, scandaleux ou paradoxal émis durant un ravissement spirituel ; il s’agit de « locutions hardies et inspirées », pour reprendre la formule de Michon, dans lesquelles la vérité revêt des apparences de divagation, d’où cette autre définition, de Corbin cette fois : « paradoxes inspirés ». Selon Ibn ‘Arabî, chez un saint, elles seraient toujours un signe d’imperfection (cf. Futûhât, II, pp. 387-388). 333, 417, 442, 444. sha‘wadha : « tour de sorcier » ou, plus généralement, « sorcellerie ». 202. shawq : « désir ardent » ; dans le Soufisme, « le “désir” (shawq), c’est l’aspiration (inzâ) du cœur à rencontrer l’Ami » (Ibn ‘Ajîba). C’est un fruit de

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l’Amour et des degrés menant à la « Proximité » (qurb). Il cesse à sa vue et lors de sa rencontre. « Le désir du vulgaire aspire aux parures des paradis ; le désir de l’élite à l’obtention de la Satisfaction divine (rîdwân) ; le désir des élus de l’élite à la glorieuse vision du Seigneur » (Ibn ‘Ajîba). 182, 262, 270, 307. shaykh (pl. shuyûkh, fem. shaykha) : « vieillard » ; « Maître spirituel ». 21, 28, 36, 37, 45, 54, 56, 57, 62, 65, 110, 132, 134-137, 139, 144, 145, 171, 181, 186, 198, 199, 203, 205, 228, 247, 248, 265, 291, 308, 313, 320, 333, 344, 349, 356, 360, 367, 373, 387, 392, 393, 395, 399, 402, 415, 418, 420, 421, 426-428, 433, 440. Shaytân (pl. shayâtin) : Démon ou Satan ; c’est l’ennemi, l’Adversaire ; il est celui qui séduit, trompe, égare, fait oublier, rend distrait. Dans le Qur’ân, il est dit craindre Allâh (LIX, 16). 79, 98, 101, 102, 103, 110, 130, 168, 194. shirk : « fait d’associer quelque chose au Principe suprême ». L’associationnisme équivaut à une sortie de l’Islâm. 167. sibgha Allâh : la « teinture de Dieu » (Qur’ân, II, 138) ; par extension, selon les contextes, ce sera la « coloration » que Dieu donne à l’homme ou à la Loi révélée. 157. silsila : « chaîne » (initiatique de Maîtres à disciples remontant jusqu’au Prophète et à Allâh Lui-même) ; le rattachement à une chaîne initiatique et à un Maître est indispensable pour quiconque avance dans la voie spirituelle soufie. Chaque « chaîne » transmet à la fois un enseignement ésotérique et une influence spirituelle (baraka) que le disciple fera fructifier (ou non) selon son degré et par son travail intérieur et extérieur. 144, 341, 356, 439. sirr (pl. asrâr): « secret » ; désignation du centre intérieur reliant l’être et Dieu mais aussi du secret divin absolu et impénétrable. 92, 132, 148, 182, 282, 327, 336, 371, 397. Soufi : voir çûfî. Soufisme voir taçawwuf. sukr : « ivresse ». Dans le Soufisme, il s’agit bien entendu de l’ivresse spirituelle. Qushayrî déclarait : « celui dont l’ivresse est authentique (bi haqq) aura une

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lucidité authentique ; celui dont l’ivresse est mêlée de passion mondaine aura une lucidité adultérée. » 286, 369, 417. sulûk : chemin initiatique. 335. sunna : « voie » ; par extension, tradition ou toute norme héréditaire de conduite ; en général, ce qui est accompli en imitation de ce qui fut fait par le Prophète, exemple et modèle pour la communauté en tant qu’il est celui qui « ordonne le licite, interdit ce qui est blâmable, (…) permet [de consommer] ce qui est sain et interdit les aliments viciés » et, plus généralement, celui qui « ôte ce qui leur pesait (aux croyants), ainsi que les chaînes qui les entravaient » (VII, 147). L’autorité de la sunna repose sur de nombreuses injonctions coraniques ordonnant aux croyants d’obéir à Dieu et à Son Envoyé conformément au fait que « celui qui obéit à l’Envoyé obéit à Allâh » (IV, 80). 147, 234, 236, 237, 334, 336, 338, 357, 408, 413, 415, 437. surûr : « joie » ; dans le Soufisme, ce terme est entendu au sens spirituel et apparenté au « ravissement ». 166, 261, 286.

T tabaqât : « catégories » ; le terme sert aussi à désigner des recueils de biographies (ou parfois des sortes de dictionnaires biographiques) consacrés à une seule catégorie de personnes. 51-53, 84, 94, 145, 236, 249, 345, 358, 359, 361, 404, 409, 412, 413, 432, 436, 438. taçawwuf : « Soufisme » ; voie spirituelle et initiatique musulmane. De nombreuses origines ont été attribuées au terme : çafâ, « pureté » ; çûf, « laine », par allusion aux vêtements de laine que les spirituels portaient en imitation des Prophètes ; çuffa, « banc », en allusion aux « Gens du Banc » (ahl aç-Çuffa) de la mosquée du Prophète, composés d’émigrés pauvres et qui se tenaient en prières sur un banc en attendant de partir pour le jihâd. 35, 45, 62-66, 70, 72, 78, 82, 83, 118, 138, 146, 148, 164, 213, 234, 249, 260, 263, 274, 286, 289-291, 300, 310, 313, 324-326, 333, 338, 343, 345, 347, 348, 355-357, 360, 366, 368-371, 373, 376, 381, 389-392, 399, 403, 405, 409, 410, 415, 417, 419, 421, 422, 426, 431, 434, 435, 438, 445, 446.

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tahqîq : « réalisation ». 117. takbîr : formule consistant à dire Allâhu akbar (« Allâh est le plus grand »), c’est-à-dire à proclamer le caractère absolu et unique du Principe Suprême que ce soit au cours de la çalât ou de la vie quotidienne. Elle marque l’entrée dans la sacralisation de la çalât et celle-ci n’est pas valable si elle n’est pas récitée. 152. tâlib (pl. tâlibûna) : « celui (ou ceux) qui cherche(nt) le But de la Voie ». 158, 338. at-talîm ar-rabbânî : « initiation seigneuriale », tout à fait exceptionnelle et distincte d’at-talîm ar-rijâlî, « l’initiation des hommes », par laquelle le disciple n’est pas rattaché à la chaîne spirituelle par l’intermédiaire d’un Shaykh vivant mais par Allâh Lui-même. 66, 292. talîm ar-rijâl : « l’instruction des hommes » par laquelle un Maître rattache un disciple à une chaîne spirituelle le reliant au Prophète et à Allâh. 66, 292. tarîqa (pl. turuq) : « sentier », désigne la voie initiatique (et étroite) de ceux qui ont reçu l’initiation ; c’est le chemin menant de l’aspect extérieur de la religion à son noyau la Vérité (Haqîqa) et permettant à l’être de se « purifier » afin d’accéder à la connaissance et à la contemplation intérieure. 128, 32-34, 39, 72, 78, 128, 148, 213, 275, 305, 379, 407, 412, 413, 418, 426, 431, 440, 441. tasbih : « chapelet ». 146. at-taslîm : « soumission » (totale au commandement divin). Pour le spirituel, « la soumission (at-taslîm), c’est laisser sereinement [à Dieu] le soin d’organiser et de décider le cours du destin » (Ibn ‘Ajîba). 163, 173. tawâjud : « recherche d’un état spirituel » ; « effort pour provoquer le wajd ou une descente (d’influences spirituelles) dans le cœur ». « Dans la définition de tawâjud (nom d’action de la 6e forme), on retrouve deux idées communément associées à cette forme verbale : idée d’effort tendu vers un but (…) et idée de faire semblant d’avoir reçu la chose » (Jean-Louis Michon, Le Soufi marocain Ahmad Ibn ‘Ajîba et son Mi‘râj, p. 242). 65.

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tawakkul : « confiance en Dieu » ; c’est la mise en pratique directe et sans concession du tawhîd et de la reconnaissance de la dépendance absolue de la créature vis-à-vis de son Créateur. Il consiste à s’abandonner totalement à Dieu pour tout ce qui concerne sa vie et sa subsistance. Le tawakkul « c’est lorsque le cœur a confiance en Allâh au point de ne s’appuyer que sur Lui (…) ou être lié à Allâh et s’en remettre à Lui pour toute chose, sachant qu’Il est connaissant de tout et compter plus sur ce qui est entre Ses mains que sur ce qui est entre les nôtres » (Ibn ‘Ajîba). 177, 180-183, 185, 186, 188, 194, 266, 275, 323, 347, 394, 443. tawba : « repentir » ; il s’étend du regret sincère des péchés au dépassement des défauts et des limites jusqu’à la contemplation de Celui qui, seul, est. Le repentir, en tant que « la première des stations » (awwal al-maqâmât) – selon Sarrâj et la plupart des spirituels –, est au départ de la voie mais les autres stations jusqu’au terme de celle-ci en sont comme un perfectionnement. 75, 76, 89, 97, 98, 117, 360, 383. tawhîd : affirmation de l’unicité divine ; idée centrale de la Révélation coranique ; c’est le monothéisme à l’état pur affirmant la transcendance absolue du Principe. « Dis : Il est Allâh, l’Unique. Allâh Qui Se suffit à Luimême. Il n’a pas engendré et n’a pas été engendré et Il n’a aucun pair » (CXII, 1-4). Cette affirmation va de pair avec la reconnaissance de la dépendance totale de la créature vis-à-vis de son Seigneur. Cette affirmation de l’unité divine s’effectue soit au travers de « preuves » discursives faisant appel à la raison reconnaissant à Dieu seul les actes, les qualités et les essences, soit par voie contemplative directe par laquelle le connaissant est illuminé par une connaissance transcendante par son Seigneur Lui-même. En ce sens, « le tawhîd a cinq fondements : il consiste dans la levée du voile de la contingence, à ne reconnaître l’éternité qu’à Allâh seul, à abandonner ses compagnons, à quitter sa patrie et à oublier ce que l’on sait et ce que l’on ignore » (Junayd). Par extension, le terme peut désigner la réalisation de l’unité par le spirituel. 78, 95, 149, 154, 173, 175, 181, 289, 295, 339, 370, 384. trabba’a : « être carré ». 221.

U ‘ubbâd voir ‘âbid. ‘ubûdiyya : « servitude » ; terme dérive de ‘abd, « esclave », « serviteur » ; il désigne l’état de dépendance totale de l’esclave vis-à-vis du Maître transcendant qu’il sert ; c’est l’état de toute créature, qu’elle le veuille ou non, par le

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fait même qu’elle est créée ; dans le Soufisme, la ‘ubûdiyya implique une compréhension de cet état et une participation consciente du serviteur vis-à-vis de son Seigneur. Religieusement, elle consiste à respecter rigoureusement ce qui a été prescrit en vénérant Celui qui l’a prescrit. Dans le Soufisme, on distingue cependant la ‘ibâda, « l’observance » extérieure de la ‘ubûdiyya, la « servitude » consciente, et de la ‘ubûda, « l’abnégation absolue » par laquelle l’être s’efforce de ne plus agir lui mais de laisser Son Seigneur agir à travers lui et, ainsi, atteindre à la libération des liens et des illusions de l’ego et à la réalisation de la liberté absolue. 276. Umm al-Khayr : « Mère du Bien ». 56, 342. Umm al-Qurâ : « Mère des villes », appellation traditionnelle de La Mecque. 221. uns : « relation intérieure », « intimité », « familiarité » ; état par lequel toute activité de la raison est noyée dans la familiarité de la présence divine et où le spirituel « est comme un amoureux qui converse avec son amant et qui s’entretient familièrement et d’une façon intime avec lui » (al-Ghazâlî). « C’est un état où la révérence disparaît, quoique le respect demeure » (Suhrawardî). 182, 183, 264, 405, 432. uwaysiyya : spirituels ayant reçu l’enseignement spirituel d’un maître décédé parfois plusieurs siècles auparavant. C’est leur forme spirituelle (rûhâniyya) qui dirige alors le disciple vivant. 326.

W waçl : « lier », « joindre », « mettre en rapport », et, de là, « union », « conjonction ». Dans le Soufisme, il s’agit de l’union (au sens de fusion sans confusion) de la créature au Créateur. 35, 173, 258, 274. wajd : « intuition spirituelle » ; ce terme dérive de la racine w j d, « sentir, désirer avec ardeur » ou encore « trouver » et « exister » ; c’est l’état dans lequel l’être a une ouverture qui lui permet de passer de la conscience individuelle à la conscience universelle par laquelle il voit la lumière intérieure divine et non humaine au cœur de toute chose et sans laquelle rien ne pourrait subsister. « Par wajd, on entend ce qui survient dans le cœur et s’empare de lui à l’improviste (bi-ghayri ta’ammul) et sans que

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l’homme y ait aucune part » (Ibn ‘Ajîba). Seul Allâh l’accorde à l’homme et elle ne saurait être le résultat d’un effort, même si des efforts, notamment dévotionnels, peuvent aider à en préparer la venue. 65, 258, 402, 417. walî (pl. awliyâ) : « ami » ; ce terme dérive de walâ (« être proche », « près de » mais aussi « préposé », « patron », bienfaiteur ») ; dans le Soufisme, il désigne l’« ami de Dieu », celui qui Le connaît directement par Lui et en Lui ; Ibn ‘Ajîba précise que « le nom de walî est dérivé de waly qui signifie “la proximité” (…) Allâh leur dispense une aide permanente ». Ce sont les « saints » de l’Islâm. Walî est aussi un des Noms d’Allâh. Cette double attribution repose sur sa double signification, d’une part, de « proche, aimé, protégé, assisté, pris en charge » mais aussi de « protecteur, patron (au sens romain du terme), gouverneur » ; sur tout ceci, cf. M. Chodkiewicz, Le Sceau des saints, ch. I, « Un nom partagé ». 118, 132, 212, 260, 291, 317, 344, 364, 376, 394. wara : « l’abstention scrupuleuse » ; elle consiste pour le spirituel, non seulement à s’abstenir de ce qui est défendu (harâm) ou douteux mais de ce qui peut troubler le cœur et, pour l’élite, à s’attacher à tout ce qui n’est pas Allâh et à se concentrer en Lui par Lui. Le terme contient une notion toute particulière de « scrupule » et de « renoncement ». 145. wiçâl : « union » ; « état de l’être qui accède à l’union spirituelle ». 18, 108, 309. wilâya : « amitié » ; « sainteté » (en tant qu’Allâh est l’Ami – Wâlî). C’est la conséquence de l’intimité avec Allâh (al-uns) et de l’extinction (fanâ). « La sainteté s’applique à trois degrés : la sainteté générale qui est celle des gens de la foi et de la piété (ahl al-îmân wa-t-taqwâ) (…) ; la sainteté de l’élite qui appartient à ceux qui aspirent à la connaissance divine (‘ilm bi-Llâh) ; et la sainteté des élus de l’élite qui appartient à ceux qui sont établis dans la gnose (ma‘rifa Allâh) » (Ibn ‘Ajîba). 21, 343. wuçla : « jonction ». 35, 335. wudû : ablution mineure pratiquée par le musulman afin de retrouver son état de pureté rituelle et consistant à rincer et laver certaines parties du corps. Être en état de wudû est indispensable au musulman pour accomplir la çalât ou simplement toucher le livre sacré du Qur’ân. Il

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présuppose que le fidèle soit bien entendu en état de ghusl (grand lavage) et qu’il ait accompli au préalable le lavage des parties intimes (istinjâ) après avoir accompli ses besoins. Le wudû est annulé par des actes tels qu’aller aux toilettes, émettre des gaz ou se toucher le sexe. 149.

Y yawm : « Jour », désignation traditionnelle du Jour Dernier, appelé aussi Yawm al-Qiyâma, « Jour de la Résurrection ». Ce Jour-là n’est pas un jour parmi les autres mais relève de modalités transtemporelles ; chaque homme, musulman ou non, devra y rendre compte de ses actes et ses propres membres témoigneront contre lui. De nombreux passages et sourates du Qur’ân s’y rapportent. 315.

Z zâhid (pl. zuhhâd) : « ascète(s) »; précurseur du çûfî. 61, 63, 264. zuhd : « ascèse », « renoncement ». Il s’agit pour l’être de renoncer à tout ce qui peut faire obstacle entre l’être et son Créateur. 36, 145, 146, 148, 149, 246, 448.

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NOTICES

A ‘Abd al-Qâdir (Ibn Muhyî-d-dîn), plus connu sous la désignation d’Émir Abd el-Kader Né en 1223H/1808 en Algérie, il fait ses études à Arzeu puis à Oran, se marie et fait le pèlerinage à La Mecque en 1828-29. Il passe sa jeunesse à l’étude des livres saints en général et de l’œuvre du Shaykh al-akbar, Ibn ‘Arabî, en particulier, ainsi qu’aux exercices du corps. Il sera rattaché à la tarîqa qâdiriyya par son père Sidî Muhyi-d-dîn, puis à la tarîqah naqshbandiyya lors de son premier voyage à Damas. Il a alors environ une vingtaine d’années. Homme exceptionnel à plus d’un titre, à la suite d’une vision spirituelle, il deviendra également un guerrier redoutable et redouté. En 1830, il entreprend la lutte contre les colonisateurs. En dépit de certains échecs, son action empêchera la pacification du pays. D’où la décision des Français de traiter directement avec leur adversaire puis d’essayer de détruire sa puissance. Homme de guerre chevronné, il devra cependant rendre les armes fin 1847. Il sera emprisonné avec sa suite en France durant cinq ans puis, libéré, il se rendra à Brousse avant de s’installer à Damas en 1855 où il s’établit dans la maison même où mourut Ibn ‘Arabî auprès duquel il sera d’ailleurs inhumé. Là encore, alors qu’il s’est retiré et mène une vie intérieure, les circonstances le conduiront cependant à sauver des milliers de personnes lorsque les Druzes voudront massacrer la population chrétienne de Damas. Il mourut dans cette dernière ville en 1300H/1883 après avoir vécu depuis son exil dans le recueillement.

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Ses qualités de guerrier ne doivent pas faire oublier qu’il compte parmi les grands maîtres spirituels de l’Islâm. Son œuvre est dans la droite ligne de celle d’Ibn ‘Arabî et son commentaire des Futûhât permet un accès plus aisé à ceux qui ne peuvent l’aborder directement. Son traité al-Kitâb alMawâqif, « Le Livre des Haltes » (trad. française partielle, l’une, sous ce titre, par A. Penot, et l’autre par M. Chodkiewicz intitulée Écrits spirituels), rédigé par ses disciples à partir de ses cours et au deux tiers revu et corrigé par l’Émir avant sa mort, en est un des meilleurs exemples. Son enseignement lui a d’ailleurs valu d’être désigné comme le wârith al-‘ulûm al-akbariyya, « l’héritier des sciences akbariennes ». 96, 117, 119, 120, 125, 203, 204, 272, 273, 307, 308, 313, 326, 331, 428, 449, 453. ‘Abd al-Wâhid ibn Zayd (Abû Ismâ‘îl Hammâd) Théologien de Bassorah, il fut un opposant d’Abû Hanîfa à qui il reprochait de déduire de nouvelles lois de la Sunna en recourant à l’analogie. Après que sa demande en mariage à Râbi‘a al-Azdiyya, selon Sulamî, ou à Râbi‘a al-‘Adawiyya, selon d’autres à la suite d’Abû Tâlib al-Makki, eut été refusée, il fonda une des premières communautés « monacales » dans l’île d’Abbâdân, à l’embouchure du Tigre et de l’Euphrate dans le Golfe Persique. Considéré, tout comme sa sœur, comme un saint, il prôna la voie de la solitude. Il mourut en 177H/793. Certains auteurs lui ont attribué la paternité des fameux vers de Râb‘ia sur les « deux amours. » 167, 238, 358, 453. Abdul-Hâdî Nom musulman du peintre suédois John Gustaf Agelii, né à Sala en 1869. C’est au cours d’un de ses nombreux voyages de par le monde que, lors d’un séjour en pays musulman, celui-ci se convertit et entra en contact avec de grandes autorités à la fois religieuses et ésotériques. C’est en 1907 qu’il devint disciple d’un grand maître spirituel de son temps, le Shaykh ‘Abd arRahmân ‘Illaysh. Avec la collaboration d’un médecin italien qu’il avait rencontré à Paris, il publia en Égypte une revue, Il Convito, dans laquelle il fit paraître de nombreux articles et traductions de traités soufis. Il participa aussi en 1910 à la revue La Gnose, dirigée par René Guénon (qui eut le même Maître que lui), et il y publia la traduction du fameux Traité de l’Unité, attribué à l’époque à Ibn ‘Arabî. Il mourut à Barcelone en 1917. 35, 41, 65, 171, 287, 383, 408, 449, 453. Abû Bakr Premier Calife de l’Islâm, né aux alentours de 570, il fut le premier homme converti à l’Islâm, donc à la fois le plus ancien ami et Compagnon du Prophète. En 620, il accompagna ce dernier à Médine et fut par la suite l’un de ses conseillers les plus proches pour les affaires

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militaires et administratives de l’État musulman alors en gestation. Ce fut encore lui qui fut placé en tête par le Prophète lors de son pèlerinage d’adieu et enfin lui que, lors de sa maladie, il désigna comme imâm pour diriger la çalât. ‘Â’isha, l’épouse préférée du Prophète, était sa fille et, après sa mort, il devint le premier khalîfa rasûl Allâh, « lieutenant (ou représentant) de l’Envoyé d’Allâh ». Son califat sera bref (du 11H/632 au 13H/634) et consacré surtout à réprimer la ridda, l’apostasie, sous les différentes formes où elle se manifestait alors que les tribus bédouines se révoltaient et étaient agitées par la multiplication des faux prophètes. Il y parvint par un mélange de force et de diplomatie. Il réalisa l’unité de la Péninsule arabique et amorçait la conquête des autres territoires (notamment en Perse, en Iraq et en Syrie) quand il mourut en 13H/634. On l’appellera aç-çiddîq, « le véridique, l’honnête, celui qui apprécie la Vérité ». Il est vénéré des Sunnites mais les Shiites lui reprochent de s’être imposé à la place de ‘Alî, neveu et gendre du Prophète, et profèrent même des imprécations à son encontre lors des processions rituelles de deuil. 35, 86, 292-294, 339, 370, 387, 408, 412, 413, 440, 453. Abû-l-Husayn An-Nûrî Spirituel d’origine khurâsânienne, né vraisemblablement en 226H/840 à Bagdad où il passa la majeure partie de sa vie. On rapporte qu’il irradiait de la lumière lorsqu’il parlait au point, quand il entrait dans une mosquée, de briller plus que la lueur des lampes elles-mêmes. Il déclara d’ailleurs avoir regardé la lumière jusqu’à devenir lui-même lumière. Disciple de Sarî asSaqatî, il est connu pour son ascétisme. Durant le procès contre les Soufis, ouvert par le Hanbalite Ghulâm Khalîl, il offrit sa vie pour ses amis. Ce qui eut pour effet de les faire acquitter par le Calife d’alors, al-Mu‘tadid. Il quitta ensuite Bagdad pour Bassorah et n’y revint qu’à la mort dudit Calife. Ami de Junayd, il aimait participer à la danse rituelle du samâ‘. Il blâmait celui qui accomplit ses devoirs religieux pour de l’argent mais savait entendre la louange d’Allâh dans toute créature, fût-ce un chien aboyant. Il est aussi connu pour les nombreux poèmes qui nous sont parvenus de lui. Il mourut suite à des blessures, selon certains, après avoir chuté dans une roseraie, et selon d’autres, lors d’un état spirituel. À sa mort en 295H/907, Junayd déclara qu’avec lui, « la moitié du Soufisme avait disparu. » 64, 439, 453. Abû Nu‘aym (‘Alî Ibn Sahl al-Içfahânî) Né à Isfahân, aux environs de 336H/948, il fit autorité à la fois en matière de fiqh et de taçawwuf. Son grand-père, Muhammad Ibn Yûsuf était lui-même un ascète renommé, le premier de sa lignée à avoir embrassé l’Islâm. Son père, lui aussi un savant, le fit former dès l’âge de six ans par de grands maîtres de son temps. Il voyagea et étudia en Iraq, au Hijâz et au Khurâsân et fut considéré comme une autorité en matière de hadîth.

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Une femme soufie en Islâm

On cite parmi ses karâmât le fait que la mosquée d’Isfahân se soit effondrée deux fois suite à une malédiction qu’il avait proférée à son encontre. En butte à l’hostilité de ses contemporains ceux-ci lui avaient interdit de demeurer dans la mosquée principale puis l’avaient expulsé de la cité. Il compte parmi les premiers biographes autorisés de Râbi‘a. Son ouvrage principal, Hilya al-awliyâ wa tabaqât al-açfiyâ, fut écrit en vue de renforcer le véritable Soufisme ; il y souligne les différentes étymologies du mot et le compose de notices sur 649 saints dont il rapporte propos et actes. Il mourut en 430H/1038-39. Sha‘ranî rapporte qu’il sauva au moyen d’un miracle sa ville quand le sultan Mahmûd s’en empara. 49, 53, 83, 140, 181, 207, 236, 244, 262, 310, 344, 358, 359, 429, 430, 449, 453. Abû Sa‘îd Abû-l-Khayr Né en 357H/967 à Mayhana, dans le Khurâsân, il est un des premiers grands maîtres spirituels persans. Enfant, son père droguiste l’emmenait aux danses rituelles (samâ‘) organisées par les soufis de la ville. Il reçut très tôt un enseignement spirituel auprès d’un Maître, Abû-l-Qâsim Bishri Yâsîn, dont, plus tard, il citerait les vers dans ses sermons. Il étudia le droit shâfi‘îte, l’exégèse du Qur’ân, les dogmes et les ahâdîth. Présenté à Hasan as-Sarakhsî, celui-ci devint son Maître (pîr) et le poussa à prolonger la science exotérique par une réalisation intérieure. Il connut une longue période d’ascèse et de mortification, le conduisant à aller bien au-delà des prescriptions légales, à s’isoler du monde et se consacrer tout entier au dhikr. Cette période eut pour but de briser sa nafs et de l’éveiller intérieurement ; elle s’interrompit lorsque, vers 397H/1006, il parvint à une certaine réalisation intérieure. Il s’adonna alors au « service des pauvres » (khidma derwîshân). Il affirmera d’ailleurs que « le plus court chemin pour parvenir à Allâh consiste à procurer du repos à l’âme d’un musulman. » Puis, il se mit alors à prêcher devant un auditoire de plus en plus étendu et, tout en poursuivant un travail spirituel, à offrir des réceptions somptueuses, voire extravagantes pour qui s’en tenait aux apparences et qui, en général, se terminaient par la danse rituelle (samâ‘). Perpétuellement endetté, il trouva cependant toujours des personnes riches et dévotes pour payer les sommes parfois énormes que lui coûtaient ses banquets. Surnommé de son vivant le « Prince de la Voie Spirituelle », il fut admiré par certains et décrié par d’autres. Son mode de vie et son enseignement scandalisèrent en effet les savants exotéristes et même certains spirituels de son temps qui s’attachaient plus à la lettre et aux pratiques mortificatoires qu’au degré de réalisation proprement dit. Condamné par les autorités religieuses de Nishapur, il risqua sa vie. Mais possédant le don de lire dans les pensées, il sut toujours déjouer les attaques de ses détracteurs. On a vu dans son attitude un précurseur des malâmatiyya, ce groupe de soufis qui, dans le Khurâsân, pour atteindre au renoncement complet et à la pure sincérité, n’hésitaient pas à rechercher le blâme public de leurs contemporains

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et, tout particulièrement, des autorités religieuses exotériques. Abû Sa‘îd s’opposa aux autorités religieuses qui s’étaient alliées au sultan Mahmûd le Ghaznavide et représentaient plus un moyen d’accéder au pouvoir qu’aux Cieux. Abû Sa‘îd extorqua parfois de l’argent aux riches et à ses adversaires pour le redistribuer aux pauvres. Il se moqua aussi de ceux qui, des soufis, n’avaient que la défroque. Moins d’un siècle après la condamnation d’alHallâj, il fut le premier à le réhabiliter en déclarant qu’il était « celui qui, de l’Orient à l’Occident, était sans égal dans les sciences de l’état spirituel ». Lui-même dans une enstase s’écria d’ailleurs : « il n’y a rien d’autre qu’Allâh dans cette robe (laysa fî-l-jubba illâ-Llâh) ». Comme Râbi‘a, il prôna la primauté du pèlerinage intérieur sur le pèlerinage extérieur à La Mecque – une autre des pièces de la condamnation d’al-Hallâj. Il contribua enfin à faire du persan, la seconde langue spirituelle de l’Islâm, après l’arabe. Tout en ayant abandonné les livres et la pensée philosophique et scientifique, il rencontra et correspondit néanmoins avec Avicenne. Pour lui, le monde tout entier était langage et chaque verset du Qur’ân un enseignement ésotérique. Il mourut en 440H/1049 dans la ville où il naquit. Le récit de sa vie et de ses faits et gestes a été écrit, dans la seconde moitié du VIIeH/XIIe siècle, par Muhammad Ibn al-Monawwar, son arrière-petit-fils. ‘Attâr et bien des grands Maîtres spirituels lui vouèrent une vénération particulière même si sa chaîne s’est interrompue. 50, 82, 145, 146, 216, 259, 320, 350, 360, 388, 442, 449, 454. Abû Tâlib al-Makkî Cet ascète vécut et enseigna à La Mecque, Bassorah et Bagdad où il mourut en 386H/996. Auteur soufi d’une grande autorité, Ghazâlî transcrivit dans son Ihyâ des pages entières de son Qût al-Qulûb, un des premiers traités de Soufisme, et, sans doute, s’en inspira, sans forcément le mentionner, dans d’autres de ses ouvrages. Il est un de ceux qui commentèrent longuement et attribuèrent les vers des deux amours à Râbi‘a ; il consacra aussi plusieurs pages à la vie de la sainte. 70, 105, 148, 181, 234, 238, 258, 260-262, 264, 277, 324, 357, 408, 417, 436, 449. Abû Yazîd al-Bistâmî Cf. Bâyazid al-Bistâmî. Aflâkî, surnom de Shams ad-Dîn Ahmad Disciple du petit-fils de Jalâl ad-Dîn Rûmî, Jalâl ad-Dîn al-‘Ârif, qui l’incita à rédiger, entre 718H/1318 et 754H/1354, en persan, la biographie des fondateurs de l’ordre de la Mawlawiyya, plus connu sous le nom d’ordre des derviches tourneurs, intitulé le Manâqib al-‘Arifîn à partir des transmissions orales des membres de la confrérie. 130, 137, 360, 441, 449, 454.

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‘Â’isha bint Abî Bakr aç-Çiddîq Fille d’Abû Bakr, troisième femme et épouse préférée du Prophète, elle est née à La Mecque vers 614. Après la mort de Khadîja, sa première épouse et la première femme convertie à l’Islâm, le Prophète prit ‘Â’isha comme fiancée alors qu’elle n’avait que six ans et se maria avec elle, au tout début de l’Hégire, alors qu’elle en avoisinait les dix. Les sources rapportent qu’elle était exceptionnellement belle. De toutes les autres épouses, elle fut la seule à voir elle aussi Gabriel, la seule encore en faveur de laquelle Allâh témoigna dans quinze versets du Qur’ân. Un des passages les plus fameux concerne l’accusation qui lui avait été faite lorsqu’une nuit, ayant perdu un collier, elle s’était écartée de la caravane avec laquelle elle voyageait si bien que celle-ci était repartie sans elle ; elle n’avait été ramenée au camp que par l’intervention d’un homme qui chevauchait loin derrière. Cet événement ayant entraîné de nombreuses médisances, un verset fut révélé pour l’innocenter (de là provient depuis la nécessité de produire quatre témoins pour fonder une accusation d’adultère). Elle fut, par ailleurs, également la seule épouse à avoir pu s’autoriser d’adresser des critiques au Prophète. Celui-ci mourut chez elle, la laissant veuve à dix-huit ans. Interdite comme les autres épouses de se remarier, elle s’impliqua dans la vie politique de la communauté et, après l’assassinat de ‘Uthmân, le troisième Calife, elle prit parti contre ‘Alî dans le conflit de succession qui suivit. Elle prit même part en 35H/656 à la bataille du Chameau où elle faillit perdre la vie. Après son triomphe sur ‘Alî, elle se retira à Médine où elle vécut jusqu’à sa mort en 58H/678 sans plus jamais faire d’intervention politique directe. Elle transmit un grand nombre de traditions, même si son autorité est rejetée par les shiites et certains fondamentalistes modernes. Elle représente un modèle pour les musulmanes sunnites. Elle était réputée pour sa culture, notamment poétique. 191, 337, 409, 413, 454. ‘Â’isha de Nishapur Elle vécut au Xe siècle et fut la plus ascétique et celle qui parvint au degré spirituel le plus élevé de tous les enfants d’Abû ‘Uthmân al-Hîrî. Elle est connue pour voir ses prières exaucées. Sa fille, Umm Ahmad bint ‘Â’isha rapporte que sa mère lui enjoignait de ne pas prendre plaisir à ce qui est périssable ni de s’attacher à ce qui disparaît mais plutôt d’espérer dans la grâce de Dieu. Elle mourut en 346H/957-958. 349, 454. ‘Alawî (Ahmad Ibn Muçtafâ) Né en 1869 à Mostaganem, dans l’ouest de l’Algérie, c’est le fondateur d’une très importante tarîqa d’Afrique du Nord, la Darqawiyya-‘Alawiyya, une branche de l’ordre Shadilite. Il eut pour maître Sidi Hamû al-Buzidî, Maître

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de la tarîqa Darqawiyya-Shâdhiliyya, dont il deviendra le successeur à sa mort en 1909. La tarîqa prendra ensuite son nom. Son enseignement se répandra dans tout le Maghreb mais aussi au Moyen-Orient et en Europe, avec des aléas divers dans certaines de ses branches occidentales. Il est l’auteur de nombreux traités de métaphysique et d’un Dîwân. Il fut aussi à l’origine de deux journaux distribués dans plusieurs pays, Al-Balagh et Lisan ad-Dîn. Il mourut le 14 juillet 1934 à Mostaganem. On lira la biographie que Martin Lings lui a consacré sous le titre : Un saint soufi du XXe siècle. Le cheikh Ahmad al-‘Alawî, ainsi que les traductions de M. Chabry et de J. González de ses écrits (Lettre ouverte à celui qui critique le Soufisme et Sagesse céleste). 110, 313, 361, 399, 449, 454. ‘Alî ou Abû-l-Hasan ‘Alî Ibn Abî Tâlib Fils d’Abû Tâlib, à la fois cousin et gendre du Prophète par son mariage avec sa fille Fâtima, de laquelle il eut deux fils. Il est né vers 600 à La Mecque, dix ans avant le début de la mission prophétique. Après Khadîja, la première épouse de l’Envoyé, ‘Alî fut, selon les shiites, le premier homme à se convertir à l’Islâm alors qu’il n’avait guère plus de dix-onze ans. Muhammad l’avait accueilli chez lui pour soulager son oncle, Abû Tâlib, tombé dans la misère. ‘Alî fut un des secrétaires du Prophète, il accomplit pour lui certaines missions diplomatiques, à deux reprises, eut pour tâche de détruire les idoles, pratiqua des mises à mort de sa propre main et présida à l’exécution des banû Kurayza. Il participa à presque toutes les expéditions, souvent en porte-drapeau et deux fois en commandant en chef. Toujours il fit preuve d’une bravoure devenue légendaire. Lors de la bataille de ‘Uhud, le Prophète lui confia son sabre, le Dhû-l-fiqqâr, et il s’en servit avec une telle dextérité que celui-ci s’exclama : « Il n’est de sabre que Dhû-l-fiqqâr, et il n’est de héros que ‘Alî. » Après la mort du Prophète, en 632, une querelle l’opposa à Abû Bakr à propos de la direction de la communauté. Il fut cependant un conseiller très éclairé des Califes qui le précédèrent, sans doute plus en matière juridique, du fait de l’excellence de sa connaissance du Qur’ân et de la sunna, que politique. Son élection, après l’assassinat de ‘Uthmân, souleva une opposition immédiate dans plusieurs pays de l’Empire. ‘Â’isha se mit alors à mener une propagande active à son encontre qui finit par une rupture et une lutte armée entre les musulmans partisans de ‘Alî, qui allaient devenir les shî‘a (d’où le nom de shiisme est issu), et ceux qui étaient réunis autour de Mu‘âwiya et de ‘Â’isha. ‘Alî les battit à la bataille du Chameau et il était sur le point d’emporter aussi la bataille de Siffîn quand ses ennemis brandirent des feuillets du Qur’ân pour demander l’« arbitrage divin » qu’il accepta et qui se conclut en faveur de son opposant. Avant de se retirer de la scène politique, ‘Â’isha adressa des paroles de pardon à son égard. ‘Alî mourut assassiné en 40H/661 à la sortie d’une mosquée à Kufa par un Kharéjite, c’est-à-dire un de ceux qui

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l’avait soutenu mais « étaient sortis » (sens du mot kharéjite formé à partir du verbe kharaja, « sortir ») du rang après que, selon eux, il avait eu la faiblesse d’accepter l’arbitrage divin alors que les partisans de Mu‘âwiya auraient été sur le point de perdre la bataille de Siffîn. Il est révéré pour sa piété et comme « calife bien éclairé » ainsi qu’en tant que transmetteur d’ahâdîth à la fois par les sunnites et les shiites. Ses propos et ses sermons ainsi que plusieurs lettres et poèmes sont réunis dans le Nahj albalâgha, « La Voie de l’éloquence », et ont longtemps servi comme exemples de bon usage de la langue arabe. Il établit les bases de la grammaire classique. Son nom signifie « élevé ». Pour les shiites, il est un intermédiaire privilégié, après Sayyidnâ Muhammad, entre les hommes et Dieu et le détenteur des secrets divins et de la signification ésotérique de l’Islâm, qui lui auraient été transmis par le Prophète. Celui-ci l’a en tout cas clairement investi de son autorité lors du pèlerinage d’adieu en déclarant : « Qui m’a comme maître a ‘Alî comme maître. » Certains shiites voient en lui une incarnation divine. La plupart des chaînes de transmission ésotérique soufies remontent à ‘Alî qui le vénèrent en tant que premier Imâm. 35, 311, 339, 348, 384, 387, 409, 412-414, 420, 424, 429, 431, 438, 454. Amatullâh Son nom d’Amatullâh (Amat Allâh) est la forme féminine de ‘Abd Allâh, signifiant « esclave de Dieu ». Contemporaine de Râbi‘a, elle fut l’épouse d’un soufi célèbre – Rabâh al-Qaysî (décédé en 180H/796). Elle considérait le rapport conjugal avant tout comme une obligation légale à accomplir et rien de plus. Sha‘rânî rapporte qu’« après la prière du soir, elle s’habillait et disait à son mari : “As-tu besoin de quoi que ce soit ?” Et s’il répondait que non, elle ôtait son bel habit et priait jusqu’à l’aube. Elle passait toute la nuit en prière et, quand le quart en était passé, elle disait : “Rabâh, debout pour la çalât !” » Et ainsi de suite jusqu’à l’aube. 81, 454. Amatullâh al-Jabaliyya Elle vécut vers la fin du troisième siècle de l’Hégire (neuvième siècle de l’ère chrétienne). Originaire des montagnes de Dâmaghân (d’où son surnom de Jabaliyya, « la montagnarde ») au Nord de l’Iran et au Sud de la Mer Caspienne, d’un village nommé Nûqâbadh, à peu de distance de Bistâm. C’était l’épouse de ‘Abd Allâh al-Jabalî, un compagnon d’Abû Yazîd alBistâmî. Son nom est d’ailleurs la forme féminine de celui de son époux. Sulamî dit d’elle qu’« elle accomplissait miracles (âyât) et prodiges (karâmât), et pouvait deviner les pensées et les caractères de ceux qu’elle voyait (sâhiba firâsât) » (Dhikr an-niswa al-muta’abbidât aç-çûfiyyât, notice 58). Elle pouvait aussi savoir ce que faisait quelqu’un à distance sans être dans la pièce où celuici se trouvait. 349, 454.

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Ançârî voir Harawî ‘Amra al-Farghâniyya Originaire de Farghân, non loin de Merv, dans le nord de la province du Khurasan, cette Afghane vécut vraisemblablement au quatrième siècle de l’Hégire (dixième siècle de l’ère chrétienne). Sulamî dit d’elle qu’« elle était unique en son temps, que ce soit du point de vue de ses dons innés, de ses états intérieurs ou de sa capacité à deviner les pensées et les caractères des gens (firâsa) » (Dhikr an-niswa al-muta’abbidât aç-çûfiyyât, notice 49). Elle disait que “Sagesse et réflexion sont l’héritage du silence. Celui qui, doué de science, apprécie la solitude, héritera de l'intimité jusque dans la foule”. » 349, 454. ‘Atba al-Ghulâm Ascète de Bassorah et disciple de Mâlik ibn Dînâr, on a dit de lui que sa « contrition » évoquait celle d’Hasan al-Baçrî. Il mourut en martyr lors d’une expédition militaire en 167H/783. 259, 454. ‘Athâma Bien qu’elle ait parfois été présentée comme la fille de Bilâl, le fils d’Abû-lDardâ, un des compagnons du Prophète, Athâma en fut plus vraisemblablement la nièce. Elle vécut durant la première moitié du second siècle de l’Hégire (huitième siècle de l’ère chrétienne). Sulamî la compte parmi les muta‘abbidât al-niswân, c’est-à-dire « les femmes qui se vouaient à l'adoration de Dieu » (Dhikr an-niswa al-muta’abbidât aç-çûfiyyât, notice 16), ce qui est à entendre comme étant une femme suivant la voie dérivée de la futuwwa, la « chevalerie » soufie, non qu’elle fût une guerrière au sens classique, mais qu’elle pratiquait plutôt la lutte intérieure et l’abandon de la volonté propre. Selon son fils, « elle serait devenue aveugle. » 349, 454. ‘Attâr (Farîd ud-Dîn) ‘Attâr est né aux alentours de 1140 vers Nishapur, dans le Khurâsân où il demeura toute sa vie. Il connut l’invasion mongole et prôna l’unité transcendante des traditions. On lui a attribué des centaines de milliers de vers et on lui connaît plusieurs ouvrages fondamentaux tels que notamment le Mantiq ut-Tayr, « Le Langage des Oiseaux », l’Asrâr Nâma, « Le Livre des Secrets » et l’Ilâhi Nâma, « Le Livre divin ». ‘Attâr s’occupa toute sa vie de commerce des drogues, des épices et du parfum, d’où son surnom de ‘Attâr, « apothicaire », métier également exercé par son père. Il mourut en 627H/1230. C’est dans son Tadhkirât al-Awliya, traduit en français par Pavet de Courteille sous le titre de Mémorial des Saints, que l’on trouve la biographie la plus complète de Râbi‘a.

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Une femme soufie en Islâm

18, 35, 49-51, 54-61, 64, 77-81, 86, 88-90, 93, 94, 101, 107, 111, 112, 115, 123, 128, 130, 132, 133, 138, 143, 153, 155, 156, 159, 160, 165, 166, 168-170, 176-179, 187, 188, 191-193, 207, 210-212, 214, 224, 225, 227, 230, 242, 245, 247, 248, 256, 265, 266, 273, 280, 284, 288, 297, 301, 302, 307, 316-318, 320-324, 327, 329, 330, 333, 335-337, 339, 341, 342, 344, 351, 358, 359, 411, 417-420, 425, 430, 436, 440, 443, 449, 454. Azrâqî Mort en 858, il est un des différents auteurs des Chroniques de La Mecque où sont mentionnées, entre autres, diverses informations sur les « couvents » de femmes musulmanes. 217, 450, 454.

B Al-Baçri (Hasan) voir Hasan al-Baçrî Bahâ ad-Dîn Naqshbandî Qualifié par Sha‘rânî d’« un des plus grands spirituels doté d’intuitions infaillibles. » Il fut prédicateur à la mosquée de l’Hippodrome et un témoin accrédité auprès du cadi. Il était connu pour ses nombreux ravissements qui lui valurent le surnom de majdhûb, « celui qui est attiré ». Il mourut en 920H/1514. 326, 455. Batja Sainte du IIeH/VIIIe siècle, contemporaine de Râbi‘a, elle suivit le courant des Qâdiriyya al-Hururiyya. Quand il entendit parler de la résistance à la douleur qu’on lui attribuait, Zayd, l’Émîr de Bassorah, lui fit couper mains et pieds pour voir ce qu’il en était. À ceux qui lui rendirent visite ensuite, elle déclara que son attente de la vie future l’avait distraite du froid de leur fer. 170, 455. Bâyazîd al-Bistâmî ou al-Bastâmî (aussi connu sous le nom d’Abû Yazîd Bistamî ou Tayfûr Abû Yazîd ibn ‘Îsâ ibn Surûshân al-Bastâmî) Il naquit en 191H/804 à Bastâm dans le nord de l’Iran (d’où son nom de Bastâmî, « originaire de la cité de Bastâm ») où il passa la plus grande partie de sa vie. D’ascendance mazdéenne, son grand-père, Sorûshân, était un zoroastrien converti à l’Islâm. Il passa la plus grande partie de sa vie à Bastâm dans le nord-est de l’Iran où il mourut, selon certains, en 261H/875, selon d’autres, en 264H/877. Il n’enseigna ni ne prédiqua, n’exerça aucune forme d’activité sociale et n’écrivit pas non plus mais était

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prêt à sauver l’humanité entière en souffrant pour elle. Environ cinq cents maximes et anecdotes nous sont parvenues de lui, recueillies par ses disciples, toutes d’une extrême portée spirituelle, et connues sous le nom de shatahât, « fulgurances » ou « outrances paradoxales ». Certains ont vu en lui le précurseur des « gens du blâme ». De fait, son attitude put apparaître si choquante aux exotéristes et, surtout, aux littéralistes que les ‘ulama le firent exiler à plusieurs reprises de sa ville natale. Il prôna « l’ivresse spirituelle » (sukr). Son maître aurait été Abû ‘Alî Sindî dont on sait fort peu de choses. Sinon qu’il ne parlait pas arabe et que ce fut Abû Yazîd qui lui enseigna les versets coraniques en échange de son initiation à l’éveil intérieur. Il pratiqua longtemps l’ascèse dans la solitude puis eut l’illumination et, tout en demeurant d’une absolue piété, rejeta toutes les pratiques, y compris le dhikr et les états spirituels eux-mêmes, comme étant encore des entraves le séparant d’Allâh. Il accomplit de nombreuses ascensions dans le monde céleste et on l’accusa de prétendre avoir connu une élévation semblable à celle du mi’râj du Prophète. Certaines de ses proclamations telles que « Gloire à Moi, que grande est Ma majesté » ne manquèrent pas d’inquiéter les autorités religieuses. Vénéré aujourd’hui encore par tous les Soufis, il est considéré comme un des Maîtres les plus importants de l’Islâm des premiers temps. Il mit l’accent sur la primauté de la contemplation intérieure qu’il qualifie d’ivresse (sukr ou wajd) et fut un des premiers à parler de l’extinction de la créature dans la Présence Divine (fanâ fî-Llâh) ainsi que de la plénitude qui lui est liée. La créature meurt à ce monde et subsiste en et par Allâh (baqâ bi-Llâh) dans l’autre monde. Il développa aussi les notions d’amour divin au sein du taçawwuf. Il déclara avant de mourir qu’il n’avait cependant que quatre ans, car, pendant plus de soixante-dix ans, il avait vécu voilé et n’avait été libéré de son voile que voilà quatre ans seulement. Junayd dit de lui qu’il tenait le même rang parmi les Soufis que Gabriel parmi les anges et Hujwirî voyait en lui un des « dix (grands) Imâms du Sunnisme ». ‘Attâr rapporte divers récits le concernant dans son Tadhkirât al-Awliyâ mais la source la plus complète le concernant est sans doute le Kitâb an-Nûr fî kalimât. 140, 205, 207, 262, 272, 286, 297, 307, 308, 326, 332, 333, 369, 386, 391, 411, 414, 415, 419, 455. Bishr ibn al Hârith al-Hâfî (Abû Naçr) Bishr ibn al-Hârith al-Hâfî naquit en 150H/767 à Merv et vécut à Bagdad. Il étudia auprès de Yûsuf ibn Asbât et apprit la jurisprudence dans l’école qu’avait fondée Sufyân ath-Thawrî et, selon Abû Tâlib alMakkî, il fut une autorité en la matière. Il fut le disciple de Fudayl ibn ‘Iyâd et mena une vie ascétique et de célibat. Il fut appelé Al-Hâfî (« le va-nu-pied ») suite, selon une légende, à la vie corrompue qui fut la sienne avant de faire repentance. Mais d’autres légendes, d’une nature différente, prétendent elles aussi expliquer ce surnom. Certains ont vu

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en lui un malâmatî, un « homme du blâme » en arguant des propos tels que : « Si tu peux passer aux yeux des gens pour un brigand, alors faisle ! » Il se consacra à la science du hadîth avant de devenir un des premiers maîtres soufis. Il enseigna l’imâm Ahmad ibn Hanbal, fondateur de l’École Hanbalite qui lui reconnaissait plus d’autorité que lui sur les vérités intérieures (haqâ’iq). Il mourut en 227H/841 à Bagdad en Iraq. 180, 236, 417-419, 436, 455.

D Dârânî (Abû Sulaymân ‘Abd ar-Rahmân ibn ‘Atiyya) Né à Wâsit, il vécut à Dârânyâ, un bourg de la circonscription de Damas en Syrie, mais séjourna aussi assez longtemps à Bassorah en Iraq. ‘Attâr dit de lui qu’il « n’avait pas son pareil dans l’exercice des austérités et de la modération dans les désirs, vertu que personne ne sut pratiquer à l’égal de lui. » Il était dit « posséder totalement les mystères de la connaissance de Dieu. » Ses propos nous ont été rapportés par son disciple Ahmad ibn Abî-lHawârî. On lui reconnaît un rôle prépondérant dans l’établissement de la doctrine de l’espérance (rajâ) et de la crainte (khawf ). Il faisait de la crainte de Dieu une méthode spirituelle orientée vers la contemplation divine (mushâhada). Il mourut aux environs de 215H/830. 234, 235, 355, 455. Darqâwî (Abû ‘Abdallâh Muhammad al-‘Arabî) Descendant du Prophète par son petit-fils al-Hasan, il naquit en 1760 au Maroc. Il vécut dans la région des Banû Zarwâl, dans les collines du Rif au nord-est de Fez. Il est considéré comme un « rénovateur » (mujaddid) venu revivifier la tradition. Il refusa de s’impliquer dans les affaires du monde en général et s’opposa au pouvoir en place, ce qui lui valut d’être emprisonné une année durant sur ordre du sultan Mulay Slimane. Réalisant l’erreur qu’il avait commise, ce dernier voulut le faire libérer mais le Shaykh refusa de sortir de prison tant que le Sultan lui-même ne serait pas sorti de ce monde. Ce qui se produisit puisqu’il mourut peu après. En sorte que ce fut son successeur ‘Abd ar-Rahmân qui le libéra. Sa tarîqa appartient à l’ordre shâdhilite. Il ne laissa pas de traité mais uniquement des lettres correspondant aux différentes inspirations qui lui venaient et qui ont été publiées en deux recueils sous les titres de Lettres d’un maître soufi (traduit par T. Burckhardt) et Lettres sur la voie spirituelle (traduit par M. Chabry et J. J. González). Il mourut en 1823. La tarîqa qu’il fonda et porte son nom fut un temps la plus importante du Maroc et est, aujourd’hui encore, très répandue en Afrique du Nord. 205, 426, 455.

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Dhahabî (Shams ad-dîn Muhammad) Ad-Dhahabî est né en 673H/1274 à Damas. Il fut un grand Maître Shafi‘ite, un connaisseur en hadîth et un historien de l’Islâm, né à Damas. D’origine turkmène, il fit ses études dans sa ville natale puis voyagea au Caire et dans d’autres cités, notamment Damas, Alexandrie et La Mecque, à la recherche de la Science sacrée auprès des meilleurs maîtres de son époque il en eut, dit-on, treize cents. Ce que l’on sait de sa vie nous provient surtout des Tabaqât ashshâfi‘iyya al-kubrâ de son disciple, ‘Abd al-Wahhâb as-Subkî. Selon le témoignage unanime de ses biographes, il compta parmi les plus grands traditionnistes de son époque et fut d’ailleurs surnommé muhaddith al-‘açr (« le traditionniste de l’Époque ») et khatâm al-huffâdh (« sceau des hâfidh »). En plus d’être un maître en hadîth, il fut aussi Imâm et une autorité en matière d’exégèse et de lecture coraniques (qira’at). Il devint aveugle sept ans avant sa mort qui eut lieu à Damas en 748H/1374. On lui attribue une centaine d’ouvrages, certains d’une taille considérable comme Tarikh alIslâm al-kabir en trente-six volumes ou La vie des Nobles Personnages (Siyar a‘lam an-nubala) en vingt-trois volumes. Subkî décrira ainsi le prestige de son maître : « Son nom suivait une trajectoire comme celle du soleil ; mais lui ne se voilait ni quand tombait la pluie, ni quand venait la nuit. De tout le pays, on venait à lui et, de toutes parts, les questions l’appelaient. Il était une gloire dont on s’enorgueillissait et un ornement dont se paraît ce bas-monde » (Tabaqât ash-shâfi‘iyya al-kubrâ, 6 vol., Le Caire, 1905, V, p. 217). 74, 234, 360, 455. Dhû-n-Nûn al-Miçrî Il naquit à Akhmîm (l’ancienne Panopolis) en Haute-Égypte vers 180H/796 de parents nubiens. Son nom complet était Abû-l-Fayd Dhû-nNûn Thawbân ibn Ibrâhim al-Miçrî. Son surnom de Dhû-n-Nûn, « celui du poisson », était le nom coranique de Jonas (XXI, 87). Il étudia le taçawwuf auprès de différents maîtres et effectua de nombreux voyages. Alchimiste et thaumaturge, il fut arrêté pour hérésie en 214H/829, à Bagdad. Innocenté, selon ‘Attâr, par le calife lui-même qui devint son disciple, il revint au Caire et demeura en Égypte jusqu’à sa mort à Gizeh aux environs de 246H/861. Il était célèbre au point qu’à son décès, la foule était si nombreuse que l’on craint qu’elle ne fasse s’effondrer le pont que le cortège funéraire traversait. Une nuée d’oiseaux verts l’accompagna jusqu’à la tombe. Tout comme Abû Yazîd al -Bistâmî, il suivit la voie du blâme. Ibn ‘Arabî lui a consacré un ouvrage (traduit en français par Deladrière). Comme Râbi‘a, il mit l’accent sur l’amour de Dieu et sur la ma‘rifa, la connaissance intuitive et spirituelle, qu’il opposait au ‘ilm, la connaissance discursive et mentale. Il compte parmi les premiers à avoir traité de la doctrine des états spirituels (ahwâl) et des stations de la sagesse (maqâmât). 252, 274, 338, 349, 399, 413, 420, 436, 437, 455.

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Dimashqî (Abû ‘Amr) Il fut un des plus illustres maîtres spirituels syriens. Il eut lui-même pour Shaykh Ibn al-Jallâ, lui-même disciple de Dhû-n-Nûn. Il mourut en 320H/932. 117, 455.

F Fâramidhî (Abû ‘Alî al-Fadl ibn Muhammad) Il vécut au Xe siècle et fut un disciple d’al-Qushayrî et un des maîtres d’alGhazâlî. 228, 344, 421, 455. Fâtima Fille du Prophète et de sa première épouse Khadîja, elle naquit à La Mecque vers 606. Selon la tradition, elle fut la fille préférée de Muhammad, qui l’a appelée « la plus noble des femmes ». Elle a épousé ‘Alî, cousin du Prophète et futur Calife, qui lui donna deux garçons, Hasan et Husayn et deux filles, Umm Khultûm et Zaynab. Elle fut la seule enfant du Prophète à atteindre l’âge adulte et à lui donner une descendance. Elle mourut en l’an 11H/622-623. Elle fait partie des quatre que le Prophète abrita sous son manteau. Les shiites prétendent qu’elle aurait eu un troisième fils, Muhassin, mort enfant. Elle a été désignée par certains comme le premier Qutb ou « Pôle » – chef spirituel – des soufis, c’est-à-dire le degré le plus élevé de la hiérarchie des saints. Elle fait l’objet d’un culte tout particulier au sein de l’Islâm shiite qui la considère comme supérieure à tous les êtres humains, à l’exception de Muhammad et de ‘Alî, bien entendu, et qui la qualifie aussi de zahra, « éblouissante », ma’suma, « celle qui est à l’abri des péchés » et pour qui elle jouit d’une faculté d’intercession toute particulière. Dans certaines branches ésotériques, elle est appelée aussi umm abiha, « mère de son père » (ce qui n’est pas sans rappeler le culte marial des catholiques – elle est d’ailleurs appelée aussi al-batûl, « la Vierge »). Son nom est à l’origine de la dynastie arabe des Fatimides (909-1171), qui prétendaient en être les descendants. 340, 345, 348, 413, 433, 435, 438, 455. Fudayl ibn ‘Iyâd (Abû ‘Alî ibn Bishr) Fudayl ibn ‘Iyâd, est né en 726 et faisait partie des Banû Yarbû‘ et était originaire d’un village du Khurâsân (près de Merv, selon certains, près de Samarkande, selon d’autres). Il vécut à Kufa. Selon Sha‘ranî, il subvint aux besoins de sa famille en faisant le marchand d’eau et fut le disciple de Sufyân ath-Thawrî. ‘Attâr dit de lui qu’il était « un grand docteur, un

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savant très expert dans la voie spirituelle, d’une austérité sans borne, opérant de nombreux miracles, consommé dans la connaissance de Dieu. » Il fut chef d’une bande de voleurs mais observait un vrai code de l’honneur et n’omettait jamais de participer à la çalât du vendredi. Il fut un contemporain de Râbi‘a et mourut en 187H/803 à La Mecque. 244, 417, 430, 433, 457.

G Ghazâlî (Abû Hâmid Muhammad) Al-Ghazâlî est né en 450H/1059 à Ghazâlah, une bourgade voisine de Tûs, dans le Khurâsân. Il est considéré comme un des plus grands penseurs musulmans à tel point qu’on le surnomma Hujjat al-Islâm (« la preuve de l’Islâm »). Personnage tout à fait emblématique de la culture musulmane, il fut à la fois un des grands maîtres du taçawwuf de son temps ainsi qu’un éminent théologien à la formation juridique et philosophique poussées. Issu d’une famille persane de condition modeste, dont certains membres étaient connus pour leur savoir ou pour leurs liens avec le taçawwuf, alGhazâlî était encore jeune à la mort de son père. Lui et son frère Ahmad reçurent ainsi leur première éducation d’un des amis de leur père, un mutaçawwif après quoi il entreprit ses études religieuses à Nishapur, alors un grand centre intellectuel du monde islamique. Il y reçut une formation auprès de l’imâm al-Juwaynî, le jurisconsulte de rite chaféite le plus célèbre de l’époque. Il avait alors 23 ans. Après quoi il commença à publier quelques ouvrages et à étudier le Soufisme auprès d’un autre shaykh, al-Fâramidhî. Après ces années d’apprentissage, il se mit à fréquenter, à l’âge de 28 ans, les allées du pouvoir. Il se rend au « camp » du ministre seldjoukide Nizâmu-l-Mulk, où il mène pendant six années la vie des « juristes de cour », faite de combats politiques, de joutes savantes et d’écriture, jusqu’à ce qu’il soit nommé professeur à la Nizâmiyya, la célèbre université de Bagdad, l’un des centres de savoir et d’enseignement les plus importants et les plus connus dans l’Orient islamique à l’époque. Il publie alors ses ouvrages de jurisprudence à caractère politique, participe à divers affrontements politico-intellectuels majeurs qui secouent le monde islamique de cette époque. D’une part, la lutte entre la philosophie et la religion (entre la culture islamique et la culture grecque). Son Tahâfut al-Falasifa (« De l’incohérence ou de l’autodestruction des philosophes ») expose le point de vue traditionnel vis-à-vis de la philosophie et ses limites, Ghazâlî y accuse même les philosophes (et tout particulièrement Avicenne) d’infidélité dans la mesure où leurs ratiocinations les conduisent à contredire la Révélation. Cette œuvre fut un des facteurs du déclin de la pensée philosophique grecque dans le

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monde islamique. D’autre part, Ghazâlî prendra aussi position en faveur du Califat abbasside contre les Batinites. Mais cette campagne ne sera pas couronnée du même succès que celle contre les philosophes. Vers 488H/1095, alors âgé de trente-huit ans, il traverse une crise spirituelle qui le conduira à affirmer la supériorité de l’esprit et de la spiritualité sur la raison, de l’ésotérisme sur l’exotérisme. Il quittera Bagdad, son enseignement et sa famille pour Damas où, pendant près de deux ans, il mène une vie d’ermite, voyageant à Jérusalem, Alexandrie, Le Caire et La Mecque, et commence alors à écrire le plus important de ses livres, Ihyâ ‘ulûm ad-Dîn (« La vivification des sciences traditionnelles »). Divisée en quatre parties, consacrées respectivement aux pratiques du culte, aux coutumes sociales, aux vices et aux vertus, cette œuvre ne prétend pas apporter quoi que ce soit de nouveau mais constitue, avec ses quatre tomes et ses quelque 1 500 pages, une véritable somme de la pensée islamique. À partir de cette époque et jusqu’à la fin de sa vie, il mènera la vie des soufis, sans plus rien modifier de ses convictions ni de sa vie de renoncement, que ce soit dans le ribât d’Abû Sa‘îd de Nishapur ou encore quand, après une retraite de dix ans, sollicité, il acceptera de reprendre son enseignement à la madrasa Nizamiyya de Nishapur. En 503H, il repart et regagne une fois de plus Tûs, sa ville natale. Près de sa maison, il fait construire un khanqa où il écrira son Minhaj Al-‘Abidin (« La voie de la servitude »), qui retrace sa vie et celle de ses élèves : renoncement au monde d’ici-bas, solitude et purification. Il vivra ainsi jusqu’à sa mort en 505H/1111. Les écrits d’al-Ghazâlî réussissent le tour de force d’être à la fois reconnus par les théologiens et les exotéristes ainsi que par les initiés et les ésotéristes. Ils font en quelque sorte le lien entre ces deux tendances de l’Islâm et montrent comment celles-ci peuvent se compléter et comment l’une présuppose et se nourrit de l’autre et vice versa. Toute son œuvre est un développement de l’idée selon laquelle le taçawwuf est essentiellement un approfondissement de la Sharî‘a (de la Loi religieuse) et qu’on ne saurait avancer dans la voie spirituelle du taçawwuf sans se conformer à cette même Loi qui en est à la fois au principe et à la base. La profondeur, la force et l’étendue de sa pensée, consignée dans plus de cinquante ouvrages, permettent de le classer parmi les plus grands penseurs musulmans et parmi ceux qui ont laissé l’empreinte la plus profonde, d’où son autre surnom de « rénovateur du Ve siècle de l’Hégire ». La majorité de ses écrits continuent à être lus et étudiés aujourd’hui un peu partout. Au Moyen Âge, sous le nom d’Algazel, son influence s’étendra au-delà du monde islamique jusque dans les pensées juive et chrétienne, tout particulièrement chez Dante ou saint Thomas d’Aquin, dont la Summa Theologiae (« Somme théologique ») est grandement redevable à son Ihyâ ou à son Kimiya-yi Sa‘adat (« L’alchimie du bonheur »), mais aussi chez Maïmonide (Moshe ben Maimon), notamment dans son Dalalat al Ha’irin (« Guide

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des égarés »), rédigé en arabe et considéré comme un des plus importants traités de la théologie juive. 57, 73-75, 86, 103, 107, 109, 112, 116, 118, 120-123, 131, 132, 158, 203, 222, 251, 252, 257, 258, 265, 279, 280, 301, 303, 306, 309, 311, 314, 324, 331, 360, 368, 370, 373, 388-390, 399, 404, 411, 420-422, 442, 444, 450, 456.

H Hafça Hafça était la fille du deuxième Calife ‘Umar ibn al-Khattâb et la quatrième épouse de Muhammad. Elle fut l'une des premières femmes à se convertir à l'Islâm et, en 622, fit partie des émigrants vers Médine en compagnie de son premier mari. Après la mort de celui-ci lors de la bataille de Badr en 625, le Prophète l’épousa à son tour. Certains témoignages laissent penser que leurs relations ne furent peut être pas toujours des plus faciles. Son père la mit d’ailleurs en garde du fait que, si elle n’avait pas été sa fille, sans doute le Prophète l’aurait-il répudiée. Elle est l’indiscrète dont il est fait mention dans le Qur’ân (LXVI. 3) et celle qui est mise en garde ainsi que ‘Â’isha dans un autre verset. On imagine aisément quel devait être le caractère de ces deux femmes pour que le Très-Haut Lui-même dut en appeler à Sa propre Puissance et à celle de Ses anges pour soutenir Son prophète dans le conflit qui l’opposait à ses deux épouses ; le nom de Hafça signifie d’ailleurs « petite lionne ». Hafça mourut à Médine en 47H/667 et y est enterrée. 191, 456. Hallâj (Abû ‘Abdallâh al-Husayn Mançûr) Al-Hallâj est né vers 244H/857, prés de Tûr en Iran, son grand-père, selon la tradition, était un zoroastrien et descendait de Abû Ayub, un compagnon du Prophète. Il fut conduit par son père qui était « cardeur » (hallâj) à Wâsit sur le Tigre. Il devient hâfidh et se rendit à Bassorah et revêtit la khirqa des soufis. Il eut pour maître Sahl at-Tustarî et fréquenta des maîtres très respectés tels que ‘Amr ibn ‘Uthmân al-Makki et Abû-lQâsim al-Junayd. Il épousa la fille du maître soufi Abû Ya‘qub al-Aqta. Il devint prédicateur en Iran, puis en Inde et se rendit jusqu’aux frontières de la Chine. Rentré à Bagdad, il sera suspecté aussi bien par les sunnites que par les shiites pour ses idées et ses déclarations. Il sera faussement accusé d'avoir participé à la révolte des Zanj, son procès durera neuf ans et sa condamnation proprement dite résulte principalement d'une accusation d'apostasie suite à son affirmation ana-l-Haqq (« Je suis la Vérité »). Il est condamné à mort, supplicié puis décapité à Bagdad le 27 mars 922/309H.

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C’est à Louis Massignon que l’on doit la redécouverte de ses textes, grâce à sa volumineuse étude intitulée La Passion de Husayn ibn Mansûr Hallâj, publiée en 1975. Il en fut le premier traducteur en langue européenne. 411, 425, 434, 444, 447, 456. Harawî Abû Ismâ‘il al-Ançârî (de son nom complet : ‘Abdallâh ibn Muhammad ibn ‘Alî ibn Muhammad ibn Ahmad ibn ‘Alî ibn Ja‘far ibn Mançûr ibn Matta al-Ançârî al-Harawî Abû Ismâ‘il) Né à Hérat, au Kuhandiz, en 396H/1006 en Afghanistan dans la province du Khurâsân. Juriste (faqîh), exégète, maître en hadîth, historien estimé et remarquable orateur, fervent hanbalite, dès l’âge de quatorze ans, il fut connu comme poète. Il compte parmi les grands maîtres du Soufisme et ses recueils en vers parmi les chefs-d’œuvre de la littérature persane. Son Manâzil assâ’irîn constitue un guide précieux pour le chercheur spirituel. Ses tabaqât aççûfiyya se situent entre celles de Sulamî et les Nafahât de Jâmî. Son Kitâb dhamm al-kalâm wa ahlih est un ouvrage développant son opposition à la théologie rationnelle contre laquelle il fut en conflit toute sa vie durant. Adolescent, il poursuit ses études à Nishapur puis à Tûs et à Bistâm. C’est au retour de son pèlerinage, en 423H/1031, qu’il rencontre al-Khirkânî, un grand shaykh naqshbandi, et le prend pour maître de sa voie de réalisation intérieure dont les débuts avaient été orientés par son propre père. Il mena une vie simple et austère. Défenseur fervent de la sunna et connaisseur avisé du Qur’ân , il s’opposa aux déviations asharites et mutazilites et ne ménagea ni le Sultan ni les notables qui cherchèrent à plusieurs reprises mais en vain à le faire condamner et le contraignirent cependant à devoir quitter sa ville à plusieurs reprises. Il réunit autour de lui de nombreux disciples et accomplit divers voyages (à Nishapur, à Bassorah et Bistâm et dans diverses autres villes où il reçut l’enseignement de plusieurs maîtres). Quand il mourut en 481H/1089 dans sa ville natale, il fut gratifié du titre de shaykh al-Islâm. Ses nombreux ouvrages sont encore étudiés et commentés aujourd’hui. Parmi ceux-ci on signalera le Manazil as-sâ’irîn, traduit en français sous le titre Les Étapes des itinérants sur le chemin de Dieu, et traitant de cent stations spirituelles (maqâmât) de la voie. 50, 278, 304, 310, 359, 364, 393, 415, 449, 456. Hasan al-Baçrî (ou Abû Sa‘îd al-Hasan ibn Abî-l-Hasan Yasar al-Baçrî) Né en 21 H/643, non seulement, il fut un théologien célèbre mais aussi un grand Maître spirituel. Son père était un prisonnier de guerre persan, libéré par les Médinois et un des Ançâr, il comptait donc parmi les compagnons du Prophète. Sa mère aurait été la nourrice du fils d’Umm Salama, une de ses épouses. Il comptait lui-même parmi les Tabi‘în (la génération qui succéda aux Çahâbah). Il connut, alors qu’il était encore très jeune, la période difficile de l’assassinat de ‘Uthmân puis la fitna et l’assassinat de son successeur ‘Alî

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mais il demeura toujours neutre. Il enseigna à Bassorah en Iraq et y fonda une madrasa. On compte parmi ses élèves, ‘Amr ibn ‘Ubayd (décédé en 761) et Waçil ibn ‘Atâ (décédé en 749), le fondateur des Mu‘tazilites, mais il fut luimême un grand défenseur de l’orthodoxie et un des ascètes les plus rigoureux de son temps. Il fut un théologien, un juriste, un interprète du Qur’ân et un prédicateur renommés. Il fit de la peur la base de sa voie et il est célèbre pour la tristesse que lui causait tout ce qui n’était pas Allâh et les larmes abondantes qu’il versait. Pour lui, la vie n’était qu’un pèlerinage et il refusait tout confort afin de dompter ses passions. Il est considéré comme un des premiers Soufis. Nombreux sont les témoignages qui ont attesté de la pureté de sa vie, se conformant en tout aux principes des premiers temps de l’Islâm et s’opposant au luxe du Califat des Omeyyades. Il mourut selon certains en 110H/728, selon d’autres en 119H/737. 35, 88, 89, 107, 137, 153, 162, 169, 177, 178, 190, 206, 207, 210, 211, 214, 240-242, 248, 280, 296, 304, 314, 315, 325, 326, 336-339, 364, 415, 416, 424, 430, 436, 454. Hujwîrî (‘Ali ibn ‘Uthmân al-Jullâbi) Il naquit à Ghazna, en Afganistan. On sait peu de choses de sa vie si ce n’est qu’il voyagea beaucoup et parcourut les contrées musulmanes de son temps et étudia auprès des grands Maîtres du Soufisme. Tout comme Rûmî, Hâfiz et ‘Attâr, al-Hujwîrî fut un des grands saints musulmans. Son Kashf al-mahjûb, « Le Dévoilement du Mystère », est le plus ancien traité persan sur le Soufisme et est une référence des plus importantes. Il s’agit d’un recueil écrit à Lahore où il s’était établi et en réponse aux questions de ses disciples. Son Dîwân est un traité sur la méthode du Soufisme, incluant une biographie d’al-Hallâj. Parmi ses principaux ouvrages on mentionnera aussi son Kitâb al-bayân li-ahl al-iyân, « Le Livre explicite destiné aux contemplatifs ». Non seulement il répertorie les vies de grands saints mais traite aussi de sujets de portée universelle tels que la contemplation, la générosité et le sens intérieur des règles de l’adab ou encore de la prière et de l’amour. Il mit en garde contre les faux instructeurs spirituels. Il mourut à Lahore entre 465H/1072 et 469H /1076. 74, 75, 82, 89, 112, 235, 256, 259, 260, 269, 361, 379, 389, 399, 417, 447, 450, 456. Hurayfish (Shu‘ayb ‘Abdallâh ibn Sa‘îd ibn ‘Abd al-Kâfî) On sait peu de choses de ce spirituel égyptien qui est appelé aussi al-Harfush. Il est essentiellement connu pour son ouvrage Ar-Rawd al-Fâ’iq fî-l-mawâ‘idh wa-r-raqâ’iq (« Le Jardin Excellentissime des Sermons et des Contes Édifiants ») qui contient plusieurs récits concernant divers saints et saintes musulmans. Il vécut et prêcha les pauvres du Caire et mourut en 801H/1398. 98, 153, 173, 181, 182, 241, 244, 258, 259, 263, 266, 275, 277, 280, 281, 289, 297, 322, 338, 359, 450, 456.

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I Ibn Adham voir Ibrâhîm Ibn Adham Ibn ‘Ajîba (‘Abdallâh Ahmad ibn Muhammad ibn al-Mahdî) Ibn ‘Ajîba est né aux environs de 1160H/1747 à al-Khamîs, village situé entre Tanger et Tétouan. Shérif hâsanî de la tribu des Anjrâ, il montra très tôt un vif intérêt aussi bien pour les sciences de la Loi (Sharî‘a) que pour le Soufisme et se rendit auprès de divers Maîtres pour apprendre et se perfectionner. Devenu adulte, il débuta alors ses études de la science exotérique (‘ilm azzâhir) qu’il poursuivit douze ans durant avant de se rattacher à la tarîqa darqâwiyya. Auteur d’une quarantaine d’ouvrages religieux ou poétiques, il a rédigé également un commentaire du Qur’ân et des ahâdîth ainsi que des recueils de théologie et de Soufisme. C’est en 1793, à l’âge de quarante-huit ans, qu’il fait la connaissance à Fès de Mawlây al-‘Arabî al-Darqâwî qui devint son shaykh. Ahmad Ibn ‘Ajîba était alors chargé de famille, titulaire de plusieurs chaires d’enseignement dans les mosquées et les écoles de Tétouan, il avait une situation aisée et divers biens qu’il perdit quand il entra dans la voie soufie et tourna le dos aux honneurs de la vie mondaine pour se consacrer exclusivement à la voie spirituelle. Il se mit à porter le vêtement des soufis, pratiqua le renoncement au monde et dut mendier. Ce qui fut, pour lui, une véritable épreuve. Il en fait le récit dans son Fahrasa ainsi que de toutes les autres épreuves qu’il connût alors. Son changement d’attitude lui vaudra les foudres de l’orthodoxie locale et principalement des ‘ulama exotéristes qui le persécuteront. Il fut même emprisonné mais obtint gain de cause et, à la demande de son Shaykh, partira ensuite se réfugier dans la campagne. Il alla alors de hameau en hameau porter le message du « retour vers Dieu » et s’entoura bientôt de très nombreux disciples. Quand, entre 1799 et 1800, la grande peste vint à frapper Tétouan où il demeurait, il ne suivit pas le conseil des autorités qui invitaient ceux qui le pouvaient à fuir la ville. Il y perdit tous ses enfants mais n’en écrivit pas moins un traité blâmant l’attitude de ceux qui pensaient pouvoir échapper au décret divin en fuyant. Il mourra lui-même de la peste en 1224H/1809. Ahmad Ibn ‘Ajîba est enterré dans le petit village de Zammije, entre Tanger et Tétouan. 76, 99, 118, 173, 181, 203, 205, 246, 247, 263, 363, 365, 366, 368-371, 374, 375, 380, 383, 387-389, 391, 393, 396, 397, 399, 400, 402, 403, 405, 450, 451, 456. Ibn ‘Arabî (Muhyî-d-dîn Abû ‘Abdallâh Muhammad ibn ‘Alî ibn Muhammad al-Tâ’î al-Hâtimî) Né en 560H/1165 à Murcie en Andalousie d’une famille qui comptait plusieurs membres appartenant au taçawwuf, il est considéré comme « le plus grand des maîtres » (shaykh al-akbar). Son influence fut fondamentale. On lui

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est redevable de l’organisation du Soufisme en confréries tel qu’on le connaît aujourd’hui. Il fut véritablement le « Vivificateur de la tradition » comme son surnom de Muhyî-d-dîn l’indique. On lui attribue plus de huit cents ouvrages. Ibn ‘Arabî vint à Séville à l’âge de huit ans, y fit ses études et y mena la vie aisée d’un adolescent issu d’une famille noble. Très tôt cependant, lors d’une maladie qui le fit passer pour mort à son entourage, il eut une vision qui détermina sa vie spirituelle. Tout en soutenant que sa connaissance lui fut communiquée sans intermédiaire, on sait cependant qu’il servit de nombreux shuyûkh d’Espagne et d’Afrique du Nord, notamment en Tunisie, en Égypte et à Jérusalem et mentionne Abû Madyan comme son maître bien qu’il ne le rencontra jamais extérieurement. Son rattachement se fit vraisemblablement par l’intermédiaire de Sayyidinâ ‘Îsâ (Jésus) et il fut en contact aussi avec le personnage appelé dans le Qur’ân, Khidr, qui représentait la science cachée dès les temps de Moïse. La filiation spirituelle à laquelle se relie Ibn ‘Arabî s’effectua sous des modalités extrêmement rares et qui dépassent le cadre d’investigation strictement historique. Tout en voyageant beaucoup, jusqu’en 590H/1194, Sidnâ Muhyî-d-dîn garda longtemps Séville comme point d’attache. Il séjourna deux années à La Mecque où il se rendit, pour la première fois, en 598H/1201 et y eut de nombreuses ouvertures et visions. C’est là où il reconnut dans la Ka‘ba le point de jonction entre les mondes de l’invisible (ghayb) et du visible (shuhûd) et où il commença son ouvrage le plus fameux, les Futûhât alMakkiyya qui comprend plusieurs milliers de pages (l’œuvre a été qualifiée de « Bible de l’ésotérisme en Islâm ») et dont le titre complet peut être traduit « Le Livre des révélations de La Mecque concernant la connaissance des secrets du Roi et du Royaume. » Il se rendit ensuite en Syrie puis revint à Jérusalem, au Caire et à La Mecque enfin à Konya et à nouveau en Syrie. Outre Bagdad, il visitera aussi Alep et Sivas. Mais, à partir, de 612H/1216, il demeura surtout à Malatya en Anatolie où naquit son premier enfant, un fils, en 618H/1221. Après avoir vécu célibataire une bonne partie de sa vie, il se maria pour approfondir le sens du hadîth prophétique rapportant que le Prophète avait apprécié trois choses en ce monde : la çalât, le parfum et les femmes. Il se maria d’ailleurs plusieurs fois et eut sans doute de nombreux enfants quoique seul le nom de deux d’entre eux nous soient parvenus. On ignore exactement quand il s’établit à Damas mais sa présence n’y est pas attestée avant 627H/1230, année où il fut en butte aux critiques des exotéristes mais défendu et protégé par de nombreux docteurs de la Loi. Ce fut à la suite d’une révélation qu’il eut en 627, qu’il écrivit son second ouvrage majeur, les Fuçûç al-hikam (en français les « Chatons de la Sagesse »). Il en reçut l’intégralité en une nuit du Prophète lui-même. Dans ce texte, la sagesse est représentée par une pierre, symbole de la Tradition ; si la pierre est la même pour tous, elle est taillée différemment selon les formes traditionnelles et les Prophètes.

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Il mourut en 638H/1240 à Damas où il est enterré. Il fut sans doute, à tous points de vue, le plus fécond de tous les auteurs soufis. Dans son Histoire et classification de l’œuvre d’Ibn Arabi, Osmân Yahia répertorie 846 ouvrages qui lui seraient attribués, Ibn ‘Arabî luimême ignorant, du reste, combien de livres il avait pu écrire. Cette prolixité fabuleuse et le fait qu’une bonne partie de ses textes n’existe qu’à l’état de manuscrits rendent difficile de rendre compte de sa doctrine et de son enseignement dans le détail. Aucun spécialiste n’a d’ailleurs jamais eu accès à tous ses textes ni même ne saurait affirmer avoir compris la totalité de ceux publiés, certains d’entre eux nécessitent certaines clefs qui ne sont plus guère transmises que dans certains cercles restreints. Il n’en reste pas moins qu’en général, ses écrits sont souvent beaucoup plus accessibles que la piètre qualité des traductions (ou la prétention délirante de certains traducteurs) le laisse entendre. Ibn ‘Arabî puise dans des sources islamiques et soufies mais aussi dans d’autres traditions (il fut appelé d’ailleurs le « fils de Platon ») dont il avait réalisé l’unité transcendante ainsi qu’en atteste certains de ses vers où il déclare : « Mon cœur est devenu capable de toute forme : il est un pâturage pour les gazelles et un couvent pour les moines chrétiens, un temple pour les idoles et la Ka‘ba du pèlerin, la Table de la Torah et le Livre du Qur’ân. Je suis la tradition de l’Amour, quelque route que prennent ses chameaux ; ma tradition et ma foi sont la vraie tradition. » Ibn ‘Arabî affirma de même la non-connaissance suprême du Principe. Il compare l’existence de l’homme à un voyage qui, ayant entraîné l’être loin d’Allâh, y revient grâce à l’assistance d’un Maître spirituel (le Shaykh qui accomplit la fonction qu’eurent les Prophètes en leur temps mais sans instaurer de nouvelle Loi) ou d’un guide intérieur et qui se prolonge par un voyage en et par Allâh (safar fî-Llâh) qui n’a pas de fin. L’être qui accomplit ce dernier, en apparence, mène une vie comme les autres hommes mais, en vérité, habite véritablement en Dieu. Il vit non plus lui mais le Principe en lui. Ibn ‘Arabî s’attira parfois la réprobation de certains religieux littéralistes et certains de ses détracteurs, tels que, par exemple, Ibn Taymiyya, se sont avérés eux-mêmes du reste souvent empreints d’hétérodoxie. Sha‘rânî écrivit un ouvrage pour le défendre. Parmi les plus célèbres des maîtres ayant connu son influence, on mentionnera Qunawî, Nâbulsî et l’Émir ‘Abd al-Kader qui en fut le premier éditeur et dont les Mawâqif (« Le Livre des Haltes ») sont profondément marqués par sa doctrine. Il professa également la doctrine de l’amour spirituel qui est au cœur de la tradition des Fidèles d’amour et on sait que la Divine Comédie de Dante n’est pas sans rapports avec ses Futûhât al-Makkiyya. Selon Roger Deladrière, Ibn ‘Arabî est l’auteur de « l’œuvre théologique, mystique et métaphysique la plus considérable qu’aucun homme ait jamais réalisée. » Elle aborde toutes les sciences religieuses islamiques. Parmi les

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diverses traductions en langue française de ces œuvres, en dépit du fait qu’elles ne se prétendent pas exhaustives mais simplement partielles, on mentionnera tout particulièrement celle d’A. Penot des Futûhât ainsi que La Sagesse des Prophètes par Titus Burckhardt et Les Révélations de La Mecque sous la direction de Michel Chodkiewicz. 32, 35, 63, 74, 97, 118, 133-136, 167, 214, 222, 227, 228, 230, 250, 253, 255, 264, 265, 273, 282, 290, 291, 323, 324, 328, 333, 334, 336, 359, 360, 364, 369, 371, 375, 386, 387, 389, 397, 399, 407, 408, 419, 426-431, 433, 436, 437, 445, 450, 456. Ibn al-Farîd (‘Umar ibn ‘Alî) Ibn al-Farîd est né en 1181 au Caire. Son père était juge et une personnalité importante du gouvernement. Très jeune, il fit des retraites dans des oasis proches de la ville. Il suivit ensuite une école de droit religieux. Il vécut quelque temps à La Mecque, devint maître de hadîth mais aussi de poésie. Il refusa cependant les propositions qui lui furent faites d’écrire des chants de propagande politique. Il mourut en 1235 au Caire. Sa poésie est entièrement d’inspiration soufie et plusieurs de ses poèmes ont été écrits en état de ravissement spirituel. On les considère comme un des sommets de la poésie arabe. Ils sont encore appris et vénérés aujourd’hui. 35, 326, 457. Ibn al-Jawzî (Jamâl ad-Dîn Abû al-Faraj) Ce grand savant hanbalite est connu pour son opposition au Soufisme mais, élevé par sa mère et sa tante paternelle, il s’intéressera très tôt à la spiritualité féminine et fut lui-même dirigé par une femme, Shubda bint al-‘Ibarî. On trouve un écho de cette influence dans son œuvre la plus connue, le Çifat aç-Çafwa (« l’Attribut de l’Élu »), dont un quart est consacré aux saintes. Souvent considéré comme un résumé du Hilya d’Abû Nu‘aym, Ibn Jawzî en critique cependant le contenu, notamment du fait de la faible place qu’y occupent les femmes. Il mourut en 587H/1201. Son petit-fils, lui aussi savant mais hanéfite, et connu comme Çibt Ibn al-Jawzî, est l’auteur dans son Mir’âz az-Zamân, « le Miroir du Temps », une œuvre monumentale d’une quarantaine de tomes, d’une longue biographie de Râbi‘a, dérivée des écrits de son grand-père. 51, 84, 89, 95, 97, 111, 120, 154, 179, 305, 315, 324, 327, 344, 356, 359, 443, 450, 457. Ibn Khallikân (Abû-l-‘Abbâs Ahmad) Ibn Khallikân est né en 1211 à Arbelles (actuellement Erbil ou Hewlêr, capitale du Kurdistan). Grand érudit du XIIIe siècle, son plus fameux écrit est connu sous le nom de « Dictionnaire biographique » (Wafayat

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al- A‘yân ou Nécrologies des Hommes éminents), premier ouvrage de ce type au monde et qui lui aurait demandé près de vingt années de recherches. Il mourut en 1282 à Damas. 56, 96, 210, 242, 317, 320, 344, 359, 450, 457. Ibrâhîm ibn Adham (Abû Ishaq ibn Mançûr al-Balkhî) Connu aussi en Occident sous le nom d’Abou Ben Adhem, il naquit à Balkh, à l’est du Khurâsân, d’une famille noble de Kufa, il était un descendant du second Calife ‘Umar ibn Khattâb. Roi de Balkh, selon les sources arabes et persanes, dont Bukhârî, il aurait reçu un avertissement de Dieu et aurait abdiqué pour mener la vie ascétique des Soufis en Syrie. Le récit de sa conversion est devenu célèbre et de nombreux maîtres l’ont racontée, notamment ‘Attâr dans son Mémorial des Saints. Il eut pour maîtres Sufyân ath-Thawrî et Fudayl ibn ‘Iyâd, un disciple d’une chaîne remontant à Hasan al-Baçrî, et devint travailleur manuel jusqu’à sa mort en 165H/782. Il est enterré en Syrie, non loin de Jabala. 54, 55, 140, 223, 224, 426, 443, 456. Içfahânî voir Abû Nu‘aym

J Ja‘far ibn Sulaymân Traditionniste et ascète de Bassorah, il compta parmi les disciples de Mâlik ibn Dînâr. Il mourut en 178H/794. Il occupe une place importante chez les shiites. 254, 258, 277, 457. Jâhidh (Abû ‘Uthmân ‘Amr ibn Bahr al-Jâhidh) Al-Jâhidh est un auteur arabe d’idéologie mutazilite. Il naquit à Bassorah vers 776-780 (IIe siècle de l’Hégire). On le considère comme un des créateurs de la prose arabe, il combina la défense de la culture arabe et de la tradition avec les données de la pensée grecque. Prolifique, il laissa derrière lui plus de deux cents ouvrages sur les sujets les plus divers et dont une cinquantaine ont été traduits en français et parmi lesquels on citera le Livre des Avares, Le Traité sur les Turcs, Éphèbes et Courtisanes et Le Livre des Animaux (inspiré de l’Histoire des animaux d’Aristote, une véritable encyclopédie des savoirs). Il soutint la politique d’al-Mamûn (813-833), un des grands califes abbassides, à travers des écrits satiriques ou polémiques pleins de verve. Il mourut dans sa ville natale vers 868. 117, 179, 204, 357, 359, 424, 451, 457.

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Jâmî (Nûr ad-Dîn ‘Abd ar-Rahmân ibn Ahmad al-Jâmî) Né à Jâm, dans le Khurâsân en 817H/1414, il mourut à Hérat en 899H/1492. Connu comme un des plus grands poètes persans, il fut aussi un grand maître du taçawwuf. Alors qu’il était étudiant en théologie, il fut initié et suivit l’enseignement de Sa‘îd ad-Dîn Muhammad Kâshgharî, disciple et successeur de Bahâ ad-Dîn Naqshbandî et auquel lui-même succéda. Il fut protégé par l’émir timuride Husayn Bayqara à Hérat puis appelé à la cour du sultan Abû-Sa‘îd. Ses poèmes apparaissent dans les compositions de Behzad, le célèbre peintre miniaturiste de la cour de l’Émir qu’il quitta lui aussi à la chute des Timourides pour se rendre auprès des Séfévides d’Iran à Tabrîz. Il composa de nombreuses œuvres en persan et en arabe. Parmi ses œuvres en prose, on citera les Lawâ’ih (« les Jaillissements de Lumière », traduit en français par Y. Richard) inspirés de l’enseignement de Muhyi-d-dîn ibn ‘Arabî dont il écrivit un commentaire des Fuçûç al-Hikam, « Les Chatons de la Sagesse ». Il rédigea également un commentaire aux Lama’ât d’al‘Iraqî et de nombreux commentaires du Qur’ân. Enfin, Silvestre de Sacy a traduit sous le titre Les Haleines de la familiarité les prolégomènes de son Nafahât al-Uns min hadrat al-Quds, « Du plaisir de la fréquentation des personnes connues pour leur sainteté » (réédité sous le titre Vie des Soufis, Paris, 1977) qui sans doute compte parmi les plus importants recueils d’enseignements transmis par les plus grands maîtres spirituels du Soufisme jusqu’au IXe siècle de l’Hégire (XVe siècle). Son Behârestân a été traduit par Henri Massé (Paris, 1925) et est un recueil d’anecdotes en prose mêlé de vers. Son œuvre poétique comprend trois diwâns sept mathnawîs. Il a écrit aussi un recueil de poèmes intitulé Haft Aurang comptant : « Les sept étoiles de l’Ourse Majeure » comprenant : « la Chaîne d’Or », « Salâman et Absâl », « Tufhat al-ahrâr » (« Le cadeau fait aux nobles » – écrit en l’honneur du grand saint al-Naqshbandî, fondateur de la tarîqa dont il devint un des maîtres), « Subhat al-abrâr » (« Le rosaire des pieux »), Youssouf et Zouleikha (traduit par Auguste Bricteux, Paris, 1927), Laylâ et Majnûn et Iskandarnâma, (« Le livre alexandrin de la prudence », sur la « légende » d’Alexandre, Dhu-l-Qarnayn). 25, 50, 51, 81, 120, 122, 123, 157, 158, 171, 180, 254, 266, 271, 272, 282, 301, 324, 340, 341, 344, 358, 359, 399, 415, 451, 457. Jîlânî (‘Abd al-Qâdir) Il naquit entre 1077 et 1083 en Iran à Niff, une petite ville de la province du Djilan, au sud-ouest de la mer Caspienne. Il fut le pôle (Qutb) de son temps et occupe une place centrale dans l’histoire du Soufisme. Son père et son grand-père maternel étaient descendants de ‘Alî ibn Abî Tâlib, le très fameux gendre du Prophète. Sa mère avait déjà soixante ans à sa naissance. Il vit le jour en mois de Ramadân et ne voulut pas prendre le sein avant le coucher du soleil. Et les années suivantes, quand les nuages

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obscurcissaient le ciel, les habitants demandaient à sa mère si son enfant avait accepté ou non d’être allaité. Les circonstances qui précédèrent sa naissance lui valurent plus tard le surnom de « faucon gris des cieux ». Sa mère, Fâtima, portait au visage la cicatrice d’une ancienne blessure qui remontait à bien avant son union avec son mari. Alors qu’elle en tenait secrètes les circonstances, son fils les lui révéla : un jour où, seule, elle était allée puiser de l’eau à une source, un misérable avait voulu l’abuser. Il allait triompher, lorsque du ciel avait fondu sur lui un faucon gris, qui lui avait arraché les deux yeux, la délivrant ainsi. La jeune femme s’était évanouie et, pour lui faire reprendre conscience, le faucon lui avait effleuré la joue de sa griffe, d’où la marque qu’elle portait. Stupéfaite, la mère voulut savoir comment il avait eu connaissance de ces faits qu’elle n’avait racontés à personne et il lui révéla alors que, le faucon, c’était lui. Très tôt, il vit des êtres spirituels que son entourage ne pouvait percevoir. Lorsqu’il eu l’âge de fréquenter l’école, il vit à plusieurs reprises ces êtres l’accompagner. À dix-sept ans, il fut transporté de Niff au mont Arafât où il vit des milliers et des milliers de pèlerins marchant en procession compacte. Sa vision achevée, il supplia sa mère de le laisser partir pour Bagdad, afin de pouvoir s’instruire dans une école de droit et fréquenter les saints personnages réputés de cette époque. En chemin, il convertit les brigands qui avaient attaqué la caravane dans laquelle il voyageait. À Bagdad, il fit des études de droit hanbalite. Mais, ses maigres ressources épuisées, il fut contraint de rechercher sur les bords du Tigre ou dans la campagne des déchets de légumes et de salades laissés par les cultivateurs et de dormir dans les ruines de Madaïne. Ses états spirituels se prolongeaient parfois durant de longues heures et lui occasionnaient des évanouissements et des défaillances. Une fois, il plongea dans un état de léthargie si prolongé qu’on le crut mort et qu’on fit procéder aux soins mortuaires et seul un remuement de paupières lui évita d’être enterré. Confronté aux fastes et aux dérives de la vie dans la ville, déçu, il décida de quitter Bagdad mais ne put en franchir les portes. À chaque fois qu’il s’y essaya, il fut terrassé par un choc violent jusqu’à ce qu’il comprenne l’ordre qui lui était adressé d’y demeurer « pour préparer une œuvre dont les hommes plus tard lui sauraient gré. » Reprenant ses études de droit, il prit pour maître dans la voie Hammad ad-Dabbas et dut subir les épreuves les plus diverses sans perdre de sa vénération pour son guide. Il entreprit une retraite de vingt-cinq années dans le désert iraquien, quand la même voix qui lui avait enjoint de demeurer à Bagdad lui commanda d’y revenir et d’y prêcher, encouragé en cela par le Prophète lui-même. Il obéit et acquit rapidement la réputation de très grand savant doublé de maître vénéré. Son auditoire augmenta bientôt à un tel point qu’il dut se déplacer vers la place publique. Le peuple pouvait rester jusqu’à la nuit pour l’entendre. Il finit par devoir installer sa chaire sur une grande esplanade hors de la ville. Une délégation d’une centaine de savants parmi les jurisconsultes

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et théologiens distingués de Bagdad vint alors l’interroger dans l’intention de démasquer celui qui leur apparaissait comme un imposteur mais, quand ils se trouvèrent auprès de lui, aucun ne parvint à articuler le moindre mot. Alors, le saint donna à chacun l’explication théologique et juridique précises qu’ils attendaient alors même qu’ils n’avaient pu les lui demander. Les savants convaincus, l’engouement populaire s’accrut. Même des Califes vinrent lui rendre visite et lui témoigner leur respect en dépit du peu de crédit que ‘Abd al-Qâdir accordait aux hommes de pouvoir. Une école fut construite qui accueillait chaque année trois mille étudiants et que ‘Abd al-Qâdir lui-même instruisait. Si bien qu’en quarante années, il enseigna à plus de cent vingt mille élèves. On le surnomma Muhyi-d-dîn, le « vivificateur de la religion ». Ce n’est que vers les toutes dernières années de sa vie que ‘Abd al-Qâdir ressentit les atteintes de l’âge et se vit contraint de restreindre l’ardente activité à laquelle il était accoutumé. Alors, dans ses moments de lassitude, le grand saint exprima le souhait d’« une mort à laquelle ne serait pas soumise la vie et d’une vie à laquelle ne serait plus nécessaire la mort. » Il mourut en 561H/1165. Son influence dépassa les frontières de l’Iraq dès avant sa mort. Cependant, il ne fonda pas de voie de son vivant. Il avait prévu la succession de l’école religieuse (madrasa) qu’il dirigeait depuis la mort de son professeur. Ces fils en firent rapidement une zawiya à laquelle ils associèrent l’école ainsi qu’une mosquée et le mausolée du shaykh. La Qadîriyya ne se répandra véritablement qu’à partir du XVe siècle et parviendra à s’implanter dans des pays comme l’Inde, le Turkestan, l’Arabie, l’Égypte, l’Afrique du Nord et certains pays de l’ex-Union soviétique. Plusieurs traités nous sont parvenus de lui, tous riches en enseignements et extrêmement précieux. 33, 76, 78, 92, 93, 98, 111, 118, 128, 129, 140, 146, 148, 161, 164, 172, 245, 246, 276, 283, 299, 302, 318, 319, 323, 434, 449, 451, 457. al-Jîlî (‘Abd al-Karîm ibn Ibrâhîm) Descendant du grand shaykh ‘Abd al-Karîm Jîlanî, il naquit en 767H/1366 à Jîl (d’où son nom) dans la région de Baghad. Il eut pour maître le Shaykh Sharaf ad-Dîn Ismâ‘îl ibn Ibrâhîm al-Jabartî et vécut au Yémen et en Inde. Il est comme l’Émir ‘Abd al-Qâdîr un maître dans la lignée akbarienne et ses écrits portent la marque de l’enseignement métaphysique du Shaykh Ibn ‘Arabî. Il écrivit une trentaine d’ouvrages dont les plus connus sont avant tout son exposé sur la doctrine de l’Homme Universel (al-Insân al-kâmil fî-l-ma’rîfa, traduit en français sous le titre De l’Homme universel) et son commentaire des Futûhât d’Ibn ‘Arabî. Il mourut vers 832H/1428. 297, 372, 457.

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Une femme soufie en Islâm

Junayd (Abû-l-Qâsim ibn Muhammad al-Khazzâz al-Baghdâdî) Surnommé le Shaykh at-Tâ’ifatayu, « le Maître des deux ordres » (les soufis et les ‘ulamâ, l’ésotérisme et l’exotérisme), il naquit dans une famille iranienne originaire de Nehâvand et grandit à Bagdad en Iraq où il demeura toute sa vie. Étudiant, il reçut l’enseignement traditionnel d’un très grand savant de son temps, Abû Thawr al-Kalbî. Il eut pour maîtres, son oncle, Sarî as-Saqâtî, et Muhâsibî. Juriste (faqih), il était aussi un grand maître spirituel de son temps. Un de ses disciples fut al-Hallâj et il compta parmi les juges qui le condamnèrent. Au Calife qui lui demandait de rendre sa fatwa à son sujet, il répondit : « Selon l’apparence extérieure il doit mourir et nous jugeons d’après l’apparence extérieure mais Allâh est plus savant. » Il mourut en 298H/911. Tout comme al-Muhâsibî, il a prôné la « lucidité du dégrisement » (çahw) et la prudence plutôt que l’ivresse spirituelle et a dénoncé les risques d’égarement de ceux qui s’aventuraient imprudemment sur la voie. Il fait remonter le ravissement spirituel au pacte primordial (mithaq) que Dieu a conclu avec Ses créatures quand Il leur a demandé : « Ne suis-Je point Votre Seigneur ? » Il prônait le Qur’ân et les ahâdîth comme base et fondement du Soufisme, attestant de son orthodoxie. Son enseignement est compilé dans des épîtres où il traite aussi bien de la métaphysique de l’Être que des règles de la Voie. Son énorme influence lui valut les surnoms de « Prince de l’Ordre », « Seigneur des Soufis » et « Maître des Maîtres ». 50, 65, 75, 205, 286, 300, 310, 311, 331, 334, 369, 403, 409, 417, 424, 440, 444, 457. Jurjânî (‘Alî ibn Muhammad) Il naquit en 740H/1339 à Tajû. On connaît de lui différents ouvrages sur des sujets aussi divers que la grammaire, la théologie et la spiritualité. Il mourut à Shîrâz en 816H/1413. Il fut surnommé as-Sayyid ash-Sharîf. 65, 158, 457.

K Kalâbâdhî (Abû Bakr Muhammad ibn Ishâq ibn Ibrahîm al-Hanjî alBukhârî) On sait peu de ce personnage sinon qu’il fut juriste. D’origine persane, il est peut-être né en 315H/925 à Bukhara où il passa sa vie et mourut aux environs de 380H/990 et où sa tombe est toujours honorée. Il exposa dans les 75 chapitres de son Kitâb at-ta’arruf limadhhab ahl at-taçawwuf (« Introduction à la méthodologie des gens du Soufisme ») les fondements de la doctrine des soufis. Le livre s’articule en cinq parties : une introduction générale sur le sens du mot çûfî et une énumération des grands Maîtres spirituels ; un exposé

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des dogmes de l’Islâm du point de vue du taçawwuf ; un sur les « stations » (maqâmât) spirituelles ; et un sur les différents phénomènes du Soufisme. Il y réhabilite la valeur spirituelle des rythmes musicaux et du samâ‘, le concert spirituel. Il est un des premiers à tenter de réconcilier la doctrine des Soufis et l’Islâm exotériste. Il fit autorité en son temps et demeure très estimé des musulmans. Son ouvrage fut traduit en anglais en 1935 par J. Arberry sous le titre The Doctrine of the Sufis by al-Kalabadhi. 95, 112, 117, 138, 256, 357, 434. Khadîja (bint Khuwaylid at-Tâhira) Khadîja était la fille de Khuwaylid, la « Pure » (Tâhir). Elle naquit en 555, vécut et mourut à La Mecque. Elle fut la première épouse de Muhammad qui n’épousa aucune autre femme de son vivant. Elle était une riche commerçante, deux fois veuve et membre d’une importante tribu mecquoise. Elle engagea pour convoyer ses caravanes vers la Syrie celui qui allait être connu comme le Prophète de l’Islâm alors qu’il était encore jeune. Ses qualités d’intégrité firent vite de lui son homme de confiance, et elle lui proposa de l’épouser, ce qu’il accepta en 595. Elle avait alors environ quarante ans et lui vingt-cinq. Ils auront ensemble sept enfants, trois fils morts en bas âge (Qâsim, Tâhir et Tayyib) et quatre filles (Zaynab, Ruqayya, Umm Kulthûm et Fâtima). Seule Fâtima leur donnera une descendance mâle. Khadîja fut la première à croire à la mission de Muhammad si bien qu’elle fut la première femme musulmane de l’histoire. Elle soutint le Prophète au cours de sa mission. L’année de sa mort en 619 porte le nom de l’année du deuil, du chagrin. 348, 412, 413, 420, 458. Khâqânî (Afzal ad-dîn Badal Ibrahîm Ibn ‘Alî Khâqânî Shirvanî) Il naquit vers 508H/1106 à Shirvan dans l’Empire Seljukide (l’actuel Azerbaïdjan). Poète persan, son importance repose sur de courts poèmes très denses et incisifs ainsi que sur ses écrits satyriques et ses épigrammes. Son père était charpentier et musulman et sa mère chrétienne nestorienne. Élevé pauvrement, il fut éduqué par son oncle savant. Celui-ci lui enseigna différentes sortes de science dont la grammaire, la syntaxe, la philosophie, les mathématiques et l’astronomie. Très jeune, il composa des poèmes sous le nom de Haqâ’iqi qu’il changea en Khâqânî quand il entra au service de gouverneur de Shervan, le Khaqan Manushihr. Il étudia la poésie et la littérature avec Abû-l-‘Alâ Ganjavî. Il se rendit à La Mecque en 551H et écrivit plusieurs poèmes sur la ville et le rituel du hajj. Il mourut vers 592H/1190 à Tabrîz en Iran. Son Mathnawî, Tuhfatul-Iraqayn, est une description de ses voyages en Iraq et son Habsiyah (« Ballade de prison ») est considéré comme son chef-d’œuvre. 132, 458.

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Une femme soufie en Islâm

Kharrâz (Abû Sa‘îd Ahmad ibn ‘Îsâ) Surnommé le « savetier » (kharrâz), il naquit à Bagdad où il vécut. Il eut pour maîtres Dhû-n-Nûn, Sarî Saqatî et Bishr Hâfî. Grand docteur de son temps, selon ‘Attâr, « il était si consommé dans la science qu’il avait composé un grand nombre d’ouvrages » (Le Mémorial des Saints, p. 269). Ibn ‘Arabî le comptait parmi les Gens du Blâme et avait pour lui le plus grand respect. On dit que ce serait lui qui aurait, le premier, traité publiquement de la doctrine de l’« extinction » (fanâ) et de la « permanence » (baqâ). Il enseignait ses disciples femmes derrière un rideau. Il mourut en 286H/899 selon certains. 311, 331, 370, 458.

M Maghribî (Abû ‘Uthmân) Originaire de la région de Kairouan, ce Maître spirituel qui se singularisa par sa méthode spirituelle, séjourna à La Mecque et finit ses jours à Nishapur en 373H/983. 24, 458. Makkî voir Abû Tâlib al-Makkî Mâlik ibn Anâs (Abû ‘Abdallâh ibn Mâlik Abî ‘Amr ibn ‘Amr ibn Hârith) Juriste musulman, fondateur d’une des quatre écoles juridiques (madhhab) du droit musulman sunnite ; l’école Malékite. Né à Médine aux environs de 715, il vécut au IIe siècle de l’Hégire et connaîtra la transition entre la période des Califes omeyyades et celle des abbassides. Cette période verra l’expansion de l’Empire musulman et la nécessité d’établir de façon explicite la juridiction dérivée du Qur’ân et de la Sunna, en particulier dans les nouveaux territoires conquis. Dans Le Chemin aplani, il donne un tableau de la loi, du droit et de la religion islamiques. Il laisse aussi un livre de recueil d’ahâdîth et d’avis juridique de Compagnons du Prophète d’un intérêt juridique majeur : Al Muwatta. Le rite dit « malékite » relève du Sunnisme et s’est répandu dans tout le Maghreb à travers l’Égypte. Outre le Qur’ân et la Sunna, il inclut la « coutume » (urf ) et les exemples de législation en cours à Médine du temps du Prophète ainsi que le consensus des docteurs médinois et le principe de l’utilité générale. Il mourut aux environs de 796. 33, 437, 458. Mâlik ibn Dînâr Mâlik ibn Dînâr as-Sami était le fils d’un esclave persan du Sijistan (ou de Kaboul). Il fut disciple de Hasan al-Baçrî. Il est cité comme un traditionniste

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fiable et un transmetteur d’autorités telles qu’Anas ibn Mâlik et Ibn Sîrîn. On lui attribue des dons de thaumaturge. Il est mort à Médine en 128H/745. 82, 169, 170, 177, 178, 236, 324, 415, 430, 436, 457. Maqdisî (‘Azz-ad-Dîn ibn ‘Abd as-Salâm ibn Ghânim) Il vécut au XIIIe siècle. On sait peu de choses le concernant sinon qu’il mourut en 678H/1280. Il a consacré une page des plus remarquable à Râbi‘a dans son Kashf al-Asrâr wa manâqib al-Abrâr (« Le Dévoilement des Mystères et les Mérites du Juste »). C’est un auteur dans la lignée akbarienne. Il est d’ailleurs vraisemblablement l’auteur du fameux Shajarat al-kawn attribué fréquemment à Ibn ‘Arabî. 43, 274, 281, 285-287, 290-293, 295, 377, 458. Maymûna as-Sawdâ Esclave noire, surnommée « la Fontaine noire » (al-Maymûna as-Sawdâ) en raison de la couleur de sa peau. Tout comme al-Majnûna al-‘Aqila, « la Folle sage », elle vécut au IIeH/VIIIe siècle. Dans son cas, l’accent est mis sur l’humiliation qu’il y avait à être à la fois esclave et noire ; en effet, les Noirs étaient méprisés par toute une frange de la population des Arabes d’alors. 215, 458. Miçrî (Dhû-n-Nûn) voir Dhû-n-Nûn al-Miçrî Muhammad ibn Munkadir Muhammad ibn Munkadir, également connu sous le nom de Muhammad at-Taymî, était un grand tabi‘î (pl. tâbi‘ûn) et un réciteur du Qur’ân. Il transmit un grand nombre d’ahâdîth. Il mourut en 747. 86, 457. Muhammad ibn Wâsi‘ Cet ascète de Bassorah avait renoncé aux fonctions extérieures, telles que celle de juge qui lui avait été proposée. Il était connu pour faire montre d’une parfaite humilité. Il mourut en 123H/741. 328, 458. Munabbih voir Wahb Ibn Munabbih Munâwî (‘Abd ar-Ra’ûf ibn Tâj al-‘Arifîn) Docteur de la loi shâfi‘ite et spirituel soufi, il naquit en Égypte en 952H/1545 au Caire. Al-Muhibbî le décrit en ces termes : « Imâm vertueux et ascète, homme de grande piété (…) proche de Dieu et dévoué à autrui (…) patient et sincère. » Issu d’une famille célèbre pour sa piété, originaire de Munayt ou Munâw où ses ancêtres

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s’étaient établis après leur départ de Tunisie, il devint très jeune hâfidh et fut initié au taçawwuf par Sha‘rânî. Après sa mort, il se rapprocha notamment de la confrérie khalwatiyya et de diverses autres. Après certaines fonctions religieuses, il se retira du monde pour écrire. Puis il revint dans le monde pour enseigner à l’université d’aç-Çâlihîyya où la très grande qualité de son enseignement, qui attirait à lui les plus éminents savants de son temps, lui fit subir la jalousie de certains au point qu’il fut probablement empoisonné. Il en réchappa mais abandonna alors son enseignement pour, désormais trop affaibli pour écrire, dicter ses œuvres à l’un de ses fils, Tâj ad-dîn Muhammad. Il mourut en 1031H/1621. Le nombre de ses écrits dépasse la centaine et aborde des registres très divers, Soufisme, sciences religieuses mais aussi logique, médecine ou botanique. Ils connurent un certain succès de son vivant et sont encore étudiés aujourd’hui, même si la majorité de ceux-ci ne sont plus guère accessibles que sous forme de manuscrits. Son livre, al-Kawâkib ad-durriya fî tarâjim assâda aç-çûfiyya, « Les astres resplendissants ou Biographies des Maîtres soufis », connu aussi sous le titre Tabaqât al-Munâwî aççughrâ, répertorie la vie des grands spirituels des temps du Prophète jusqu’à sa propre époque. Il y mentionne trente-cinq saintes musulmanes dans la partie qui en a été traduite en français par Nelly Amri. 18, 35, 51, 53, 77, 78, 82, 88, 90, 91, 105, 110, 111, 117, 129, 135, 138, 143, 148, 149, 157, 162, 165, 168, 171, 179, 187, 188, 202, 208, 215, 235, 236, 239, 240, 284, 288, 305, 307, 315, 320, 321, 327, 344, 360, 437-439, 451, 458.

N Nafîsa bint al-Hasan Elle vécut au IXe siècle. Elle était appelée « le joyau de la connaissance ». Elle naquit à La Mecque en 760 mais vécut une partie de sa vie à Médine. C’est une descendante de Fâtima et de ‘Alî. Elle épousa Ishâq, le fils de Ja’far açÇâdiq, et lui donna deux enfants, al-Qâsim et Umm Kulthûm. Après son mariage, ils se rendirent en Égypte et s’établirent au Caire. Elle avait pour réputation de jeûner toute la journée et passer sa nuit en prière. Elle connaissait non seulement le Qur’ân par cœur mais aussi certains de ses commentaires. Elle était si versée dans les sciences religieuses que même l’Imâm Shafi‘î avait coutume de venir l’entendre et de s’entretenir avec elle. Quand il tombait malade, il envoyait un messager l’avertir et il était guéri avant même son retour. Elle était célèbre à travers toute l’Égypte et partout révérée. Elle mourut en 208H/824. À sa mort les gens des villes aussi bien que des campagnes allumèrent des chandelles durant la nuit et prièrent

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toute la nuit. Munâwî rapporte qu’elle fut enterrée dans la tombe qu’elle avait elle-même creusée de ses propres mains et où elle descendait si fréquemment y prier qu’elle y aurait même récité le Qur’ân six mille fois. Sa sépulture demeure d’ailleurs un lieu de pèlerinage aussi bien pour les musulmans que pour les chrétiens. Nombreux sont les miracles qui lui sont attribués. Elle était tout particulièrement réputée pour guérir les maladies des yeux à tel point que le gouvernement égyptien fit bâtir un hôpital spécialisé dans les maladies des yeux à proximité de sa tombe. 202, 305, 458. Niffarî (Muhammad ibn ‘Abd al-Jabbar ibn al-Hasan) On sait peu de chose de lui. Le plus souvent mentionné comme un des premiers soufis, son nom n’apparaît cependant dans aucune silsila. Une source ancienne lui attribue une origine mésopotamienne mais les textes qui nous sont parvenus de lui sont tous écrits en arabe et non en persan et lui-même mourut en Égypte. Son Kitâb al-Mawâqif, « Le Livre des Haltes », est une prodigieuse anthologie de poèmes spirituels, chacune de ses « haltes » y est une voie menant à Dieu. 287, 439, 459. Nûrî voir Abû-l-Husayn An-Nûrî

Q Qushayrî (Abû-l-Qâsim ‘Abd al-Karîm ibn Hâwâzin) Abû-l-Qâsim al-Qushayrî est né en 986. Son traité le plus célèbre, arRisâla al-qushayriyya, est un des textes fondamentaux du Soufisme sunnite. Il raconte le cheminement intérieur que doit accomplir un soufi et a servi de manuel pour former les aspirants à l’initiation. C’est le premier traité qui offre un aperçu synthétique de l’itinéraire intérieur, de sa terminologie et des différentes stations conduisant à la Sagesse divine. Il a fait partie du cercle de Sulamî et est mort en 465H/1072-73. 49, 51, 65, 83, 89, 91, 119, 121, 123, 126, 138, 146-148, 199, 259-261, 300, 310, 324, 345, 358, 369, 389, 399, 401, 420, 442, 451, 459.

R Râbi‘a bint Ismâ‘il Elle contracta un mariage blanc avec Ahmad ibn Abî al-Hawârî, qui attesta à plusieurs reprises de sa supériorité du point de vue de la spiritualité. Elle fut et est souvent confondue avec Râbi‘a al-‘Adawiyya. Elle mourut en 135H/753. Elle repose à Jérusalem sur le mont des Oliviers.

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Elle est appelée aussi parfois Râbi‘a la Syrienne et fut la disciple de Hukayma de Damas. 183, 240, 249, 348, 355, 356, 359, 439, 459. Rudhbârî (Abû ‘Alî Ahmad ibn Muhammad ibn al-Qâsim) Né à Bagdad, ce descendant du roi Cosroe, versé dans l’étude des ahâdîth et du Soufisme, vécut au Caire et fut le disciple de Junayd et de Nurî ainsi qu’en Syrie, d’Ibn al-Jallâ. Il devint un Maître du Vieux-Caire où il mourut en 323H/934. 126, 145, 146, 260, 311, 459. Rûmî (Jalâl ad-Dîn Muhammad al-Balkhî) Né à Balkh, dans le Khurâsân, en Perse (maintenant l’Afghanistan), en 504H/1207, il fut le fondateur de la tarîqa des mawlavîs, plus connue sous le nom d’Ordre des derviches tourneurs. Il est sans doute le plus grand poète spirituel de langue persane. Il est appelé aussi de divers noms et notamment celui de Mawlânâ de Rûm (« Maître de Rûm », c’est-à-dire de Byzance). Il remonte par son père, shaykh comme lui, au premier Calife de l’Islâm, Abû Bakr. Son père, dans un dévoilement spirituel, ayant vu la destruction prochaine de sa ville natale par les Mongols, ils quittèrent Balkh en 516H/1219. Ils se déplacèrent de La Mecque, où ils effectuèrent le pèlerinage, en passant par Nichapour, où ils rencontrèrent ‘Attâr, et Bagdad jusqu’à la Turquie où ils se fixèrent en Anatolie à Konya. Marié à dix-huit ans, il eut deux garçons dont Sultân Walad qui lui succédera à la tête de la confrérie. Un an après la mort de son père, en 1232, il rencontra un disciple de son père devenu maître spirituel, Burhân ad-Dîn Muhaqqiq Tirmidhî dont il suivit l’enseignement jusqu’à son décès, neuf ans plus tard. Sur ses conseils il étudia la théologie à Alep puis se rendit à Damas où il demeura quelques années pour enfin revenir à Konya où il reprit la direction du collège dont s’occupait son père et enseigna le fiqh. C’est vers 642 de l’Hégire, qu’il fit la rencontre qui allait bouleverser sa vie en la personne de Shams de Tabrîz, un derviche solitaire qui arriva un jour à Konya et sur lequel on dispose de peu d’informations sinon qu’il se déplaçait de ville en ville, vivait de petits travaux, devint son maître spirituel et le fit accéder au dévoilement et à la contemplation intérieure. Cette rencontre allait donner naissance aussi à la plus grande œuvre de la poésie persane, le Diwân de Shams de Tabrîz (traduction partielle par E. de Vitray-Meyerovitch et M. Mokri sous le titre d’Odes mystiques, Paris, 1973). C’est à la suite de cette rencontre et du bouleversement qu’elle allait entraîner que Rûmî se mit à se livrer au samâ‘, la fameuse « danse des derviches tourneurs », caractérisée par une rotation rituelle imitant celle des planètes autour du Soleil (shams en arabe) et symbolisant la soumission des disciples vis-à-vis du Maître ou encore l’attraction des êtres vis-à-vis du Principe. Rûmî a

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accordé une importance particulière dans sa tarîqa aux instruments de musique dont il mettait les sons en correspondance avec les harmoniques des sphères célestes. Cet usage et le rituel très spécifique des derviches lui valurent de nombreuses critiques dès son vivant. De même, l’attachement et le respect qu’il témoignait à Shams finirent par susciter la désapprobation et la jalousie des disciples. Au point que complots et médisances finirent par entraîner le départ et, peut-être même, le meurtre du derviche errant qui disparut sans laisser de trace en l’an 645H, au grand dam de Mawlânâ. Deux ans après, Rûmî se résolut à choisir un successeur à la tête de son ordre et entra en retraite jusqu’à sa mort, à Konya, en Anatolie, en 672H/1273. Sa vie est racontée par Shams ad-Din Ahmad Aflâkî dans son Manakib al-‘Ârifîn (écrit entre 1318 and 1353 – traduit en français sous le titre La Vie des Saints des Derviches Tourneurs par C. Huart). Son œuvre, immense à tout point de vue, constitue une somme doctrinale essentielle qui n’a cessé d’être lue et commentée. Outre le Mathnawî, poème monumental de 25 000 vers, et le Dîwân de Shams de Tabrîz, son autre œuvre majeure, en prose celle-ci, est son traité intitulé Fîhi-mâ-fîhi (« Le Livre du Dedans », Paris, 1997). 21, 23, 25, 34, 41, 44, 57, 60, 64-66, 76, 80, 81, 83, 87, 105, 109, 110, 128, 132, 139, 140, 141, 147, 148, 150, 155, 156, 160, 162, 163, 173, 187, 189, 199, 202, 213, 225-228, 242-244, 249, 252, 255, 256, 261, 285, 296, 299, 300-303, 306-309, 311, 324, 360, 389, 399, 411, 425, 440-442, 451, 459.

S Sanâ’î (Hâkim Abû-l-Majdûd ibn Majdûd ibn Adham) Il naquit dans la province de Ghazni au sud de l’Afghanistan. Il fut le poète de la cour de Bahram Shah qu’il quitta suite à une révélation spirituelle. Il cessa d’écrire des panégériques en l’honneur du Roi et se retira du monde. Il écrivit son plus fameux Mathnawî, le Hadiqa-lHaqâ’iq (« le Jardin des vérités ») alors qu’il était très âgé et mourut peu après l’avoir achevé en 525H/1131. Sa poésie est d’inspiration soufie. Sans être véritablement le premier poète soufi – on sait, par exemple, qu’avant lui, Râbi‘a écrivit des poèmes ou encore que le Shaykh Abû Sa‘îd Abû-l-Khayr composa plusieurs quatrains –, il est sans doute celui qui, le premier, a laissé une œuvre essentiellement poétique d’inspiration spirituelle et déclarait d’ailleurs lui-même que « nul n’avait jamais écrit des vers tels que lui » et que si, dans le monde on trouvait des vers semblables aux siens, fussent-ils un millier, c’est qu’ils étaient de lui. Son Kulliyya compte trente mille vers et il écrivit sept Mathnawîs.

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Reconnu par tous les grands Maîtres spirituels, dont Rûmî, bien qu’invitant à abandonner la gloire éphémère et le monde d’ici-bas, son audience se répandit dans les cours royales de son temps aussi bien d’ailleurs que parmi le peuple. Son œuvre demeure de nos jours encore un objet d’études dans de nombreux centres soufis indo-musulmans. 249, 341, 441, 460. Sarrâj (Abû Naçr ‘Abdallâh ibn ‘Alî at-Tûsî) Maître soufi né à Tûs dans le Khurâsân dans la première moitié du IVeH/Xe siècle. On sait peu de choses le concernant sinon qu’il eut pour surnom le « paon des pauvres » (tâwûs al-fuqarâ) et a beaucoup voyagé comme en attestent les mentions des rencontres qu’il fit en Iran, Iraq, Syrie ou Égypte. Selon ‘Attâr, en état de transe, il aurait plongé son visage dans un brasero allumé sans subir ni blessure ni douleur. Il mourut en 378H/988. On ne connaît de ses disciples qu’Abû-l-Fadl Sarakhsî, qui allait devenir le Maître d’Abû Sa‘îd ibn Abî-l-Khayr. Il est connu aujourd’hui essentiellement pour son traité le Kitâb al-Luma (« Le Livre des lueurs »), l’unique traité qui nous soit parvenu de lui, d’une valeur aussi bien spirituelle que documentaire sur le Soufisme des premiers siècles de l’Islâm. Il y montre, en se référant au Qur’ân et aux ahâdîth, la licéité du « concert » spirituel (samâ‘ ), la validité prophétique des miracles ou encore l’orthodoxie des « formules paradoxales » (shatahât). Il fut une référence pour des grands Maîtres tels que Qushayrî ou Ghazâlî. 83, 126, 149, 175, 181, 262, 357, 360, 361, 403, 451, 460. Shabaka Selon Sulamî, elle vécut à Bassorah en compagnie de son frère et sa maison comportait différentes cellules souterraines (sarâdîb) ou une crypte réservées à ses élèves et aux disciples à qui elle enseignait les voies de la lutte pour Dieu (mujâhada) et la pratique rituelle (mu‘âmala) – Cf. Dhikr an-niswa al-muta‘abbidât aç-çûfiyyât, Notice 6 – selon une pratique courante chez les ascètes durant les premiers temps de l’Islâm. Elle vécut au quatrième siècle de l’Hégire (dixième de l’ère chrétienne). 349. Shabestarî (Mahmûd) Né dans les environs de Tabrîz, en Iran, au VIIe siècle de l’Hégire (XIIIe siècle), il mourut en 720H/1320. Ce Maître a écrit des traités célèbres tels que : Haqq al-yaqîn (« La Réalité de la certitude »), Sa‘adat nâmah (« Le Livre de la joie ») ou encore le Mar’at al-muhaqqiqîn (« Les miroirs des initiés ») mais son ouvrage le plus connu reste sans doute son Mathnawî, Goldshan-i-Râz (traduit en français sous le titre « La Roseraie des mystères »). 24, 45, 338, 451, 460.

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Shaqîq al-Balkhî (Abû ‘Alî ibn Ibrâhîm) Ascète et spirituel du Khorâsân, comme l’écrit Deladrière, « il fut le disciple d’Ibrâhîm ibn Adham et le maître de Hâtim al-Asamm. Il prônait la pauvreté et la remise confiante à Dieu (tawakkul). Il serait mort en 194H/809-810 lors d’une expédition militaire. » 169, 324, 460. Sha‘rânî (‘Abd al-Wahhab ibn Ahmad) Né en 1492 au Caire, il y mourut en 1565. Il est le fondateur d’un Ordre appelé justement la Sha‘rawiyya. Il s’efforça toute sa vie durant d’éviter l’écueil des extrémismes qui allaient générer diverses sectes pseudo-musulmanes. Il s’efforçait de toujours retirer le meilleur de chaque courant et de dépasser le terrain des conflits. Son enseignement reposait essentiellement sur sa présence personnelle plutôt que sur ses écrits. Son ordre déclina après sa mort mais se poursuivit jusqu’au XIXe siècle. Il est l’auteur d’un remarquable recueil sur les règles du Soufisme. 51, 84, 94, 102, 145, 236, 249, 305, 345, 361, 410, 414, 416, 420, 428, 438, 451, 460. Sha‘wâna Persane d’origine, elle vécut sur les rives du Tigre, dans la ville portuaire du Golfe persique, Apologos (al-Ubulla), près de Bassorah. Selon Ibn Jawzî dans son Çifat aç-Çafwa, Sha‘wâna aurait vécu au VIIIe siècle du temps de Fudayl ibn ‘Iyâd qui décéda en 187H/803. Elle fut mariée et eut un fils mais elle consacra l’essentiel de sa vie au souvenir du Tout-Puissant. Elle est en effet connue pour sa dévotion et la beauté de sa voix. Sulamî nous rapporte en effet qu’elle « chantait bien, exhortait (ta‘iz) les gens, lisait le Qur’ân pour eux et était écoutée par les ascètes (zuhhâd), les dévots (‘ubbâd) et ceux qui avaient réalisé la proximité divine (mutaqarriba), ainsi que tous ceux qui étaient doués d'esprit et qui s'efforçaient d'avancer vers Dieu. Elle-même était de celles qui combattent leur âme, craignent Dieu, pleurent et font pleurer » (Dhikr an-niswa al-muta‘abbidât aç-çûfiyyât, Notice 14). Il raconte aussi qu’« un jour, elle pleura tellement que l’on eût peur qu'elle ne devint aveugle. On lui dît alors : “Vraiment, nous craignons que tu ne perdes la vue”, et elle répondit : “Nous craignons ? Par Dieu, je préfère que mes larmes me rendent aveugle ici bas plutôt qu'être aveuglée par le Feu dans l'Au-delà !” » (ibid.). Elle disait également : « Comment un œil séparé de son aimé et désirant profondément le revoir ne pleurerait-il pas ? C'est impossible ! » Elle avait une conscience si aiguë de ses propres limitations qu’elle pleurait continuellement au point de finir par en perdre la vue. Ascètes et fidèles venaient la visiter et recevoir son enseignement. Ghazâlî

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rapporte dans son Ihyâ (IV, p. 355) une de ses prières. Selon certains, elle serait morte en 792. 86, 88, 162, 349, 460. Shiblî (Abû Bakr) Né en 247H/861 à Sâmarrâ’, selon certains, à Bagdad, selon d’autres, ce Maître spirituel commença par être fonctionnaire de la cour abbasside en tant que chambellan du frère du Calife, puis devint gouverneur de Damâwand. Savant réputé en droit malékite, il fut aussi un spécialiste du hâdîth. À l’âge de quarante ans, sous l’influence de Khayr an-Nassâj, un soufi de Sâmarrâ, ami de Junayd, il se rendit à Bagdad recevoir un enseignement spirituel et devenir le disciple de ce dernier jusqu’à sa mort en 297H/910. Il est connu pour ses « excentrités », ses allusions symboliques (ishârât), ses shatahât (« outrances paradoxales » dites lors d’états spirituels) et ses provocations apparentes qui lui valurent d’être désapprouvé par certains savants hanbalites et même blâmé par son Maître Junayd. Lui-même cependant désavoua, extérieurement en tout cas, al-Hallâj dont il fut cependant très proche. Sans avoir laissé de traités, ses propos et ses actes ont été recueillis et transmis jusqu’à aujourd’hui et ses poèmes sont toujours célébrés. En tant que Maître, il ne reculait pas devant la violence vis-à-vis de ses disciples et les visiteurs le fuyaient autant que lui-même s’efforçait de les éviter. Junayd conseillait de lui parler « à l’abri derrière un siège car ses épées dégoulinent de sang. » Shiblî demandait à ses disciples de voir en lui le support de la Puissance divine. Nombreux et spectaculaires sont les récits qui nous sont parvenus de lui. Il mourut en 334H/946. 148, 304, 445, 460. Sijistânî (Abû Dâwûd) Traditionniste, né en 202H/817, il fit de nombreux voyages à la recherche de la science et s’attira une réputation de savoir et de piété. Il finit par s’installer à Bassorah en Iraq où il mourut en 275H/889. Son principal ouvrage est le Kitâb as-Sunan, qui compte parmi les six recueils canoniques adoptés par les sunnites et qui fut approuvé par Ahmad Ibn Hanbal lui-même. Il aurait extrait les 4 800 traditions qui le composent d’un ensemble de 500 000 recueillies. 233, 360, 447, 460. Sufyân ath-Thawrî Contemporain de Râbi‘a, de nombreux récits assez sévères concernant ses confrontations avec cette sainte nous sont parvenus de ce grand Maître spirituel musulman. Ascète et grand traditionniste, il naquit à Kûfa en 97H/715 et il vécut de nombreuses années à Bassorah pour échapper aux autorités religieuses. Il fonda une école de droit qui ne rencontra pas un

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grand écho au sein de la communauté musulmane. Il mourut à Bassorah en 161H/778. On ne doit pas le confondre avec Sufyân ibn Uyayna, natif lui aussi de Kûfa, et qui vécut dans la même période mais se fixa et enseigna, par contre, à La Mecque. 35, 36, 78, 80, 89, 120-122, 149, 158, 167, 176, 179, 245, 254, 258, 265, 277, 282, 315, 322, 324, 330, 411, 417, 420, 431, 440, 444, 460. Sulamî (Abû ‘Abd ar-Rahmân Muhammad ibn al-Husayn ibn Mûsâ) Né à Nishapur en 325 H/937, mais d’origine arabe, il est issu d’une lignée de soufis renommés. Son grand-père et son père furent ses premiers maîtres dans la « voie du blâme » dont il fut un des représentants. Âgé de moins de vingt ans à la mort de son père, sa famille n’en fut pas affectée matériellement car sa mère appartenait à la branche des Sulamî, qui possédait de nombreux biens et terrains à Nishapur. Il portait, suivant une coutume familiale fréquente dans les premiers siècles de l’Islam, le nom de sa mère. Il reçut une double formation, exotérique et ésotérique. Très tôt, on lui enseigna les principes de la futuwwa, la chevalerie soufie auquel il consacrera un de ses traités. On connaît peu de chose de sa vie. Connu comme un des premiers historiens du taçawwuf, notamment grâce à son Tabaqât aç-Çûfiyya, il fut avant tout un grand Maître soufi qui occupa un rang extrêmement élevé dans la hiérarchie initiatique. Admiré pour sa compétence aussi bien dans les domaines les plus anodins que dans les sciences religieuses et ésotériques, il fut longtemps reçu dans les cours du Proche-Orient, avant de revenir à Nishapur, où il occupa la fonction de cadi. Il eut de nombreux Maîtres dont plusieurs malâmatî tels que Shiblî et Nasrâbâdhî. Son autorité fut telle qu’Ibn ‘Arabî, en dépit des siècles qui les séparaient, le comptait parmi ses Maîtres ; de fait, comme le remarque Denis Gril, « bien des passages de son œuvre sur les catégories initiatiques annoncent les développements ultérieurs d’Ibn ‘Arabî » (in Ibn ‘Arabî, Les Illuminations de La Mecque, p. 441). Sulamî aurait composé sept cents ouvrages concernant le Soufisme, et trois cents traitant de science du hadîth, une prolixité qui fut favorisée par l’héritage qu’il fit de la fabuleuse bibliothèque son grand-père. De son vivant, sa célébrité fut telle qu’un garçon fut écrasé par la foule venue écouter une de ses lectures. Son commentaire coranique (intitulé Haqâ’iq al-tafsîr), s’il suscita l’admiration, le fit aussi condamner par certains religieux. Son Dhikr al-niswa al-muta‘abbidât aç-çûfiyyât consacré aux femmes soufies fut une référence pour les auteurs ultérieurs. Il mourut en 412H/1021. 50, 51, 53, 71, 89, 94, 253, 254, 324, 328, 358, 359, 408, 414, 415, 439, 442, 443, 446, 450, 452, 460. Suyûtî (Abû-l-Fadl ‘Abd ar-Rahmân ibn Abû Bakr ibn Muhammad Jalâl ad-Dîn al-Khudayrî) Né en 849H/1445 au Caire, ce savant égyptien est connu pour son œuvre prolifique. D’origine persane par son père et circassienne par

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sa mère, il serait né dans la bibliothèque familiale ce qui lui valut son surnom de « fils des livres » (ibn al-kutub). Son père mourut alors qu’il n’avait que six ans. Plusieurs tuteurs le formèrent et, dès l’âge de quatorze ans, il avait une solide base religieuse. À dix-huit ans, il reprit l’enseignement du droit shâfi‘ite qu’exerçait son père à la mosquée de Shaykhû puis du hâdîth à la Shaykhûniyya en 1472. D’une mémoire prodigieuse, il connaissait par cœur quelque deux cents mille ahâdîth. Il se rattacha à la tarîqah shâdiliyya et prôna l’équilibre entre la Loi et la Voie. Il se mit assez tôt à écrire et, avant d’avoir atteint la trentaine, ses livres se répandirent très vite hors d’Égypte jusqu’en Inde. Sa renommée le mit bientôt en butte à la jalousie de ses pairs. On lui reprocha notamment son emploi de l’ijtihâd mais sans qu’il fût jugé condamnable. En 1486, jugeant corrompu le milieu des ‘ulâmâ, il se retira du monde et cessa de délivrer des fatwâs. Ses relations avec le Sultan s’envenimèrent et il s’opposa à lui en diverses circonstances et déclina l’offre que lui fit son successeur de diriger la madrasa. D’une façon générale, il rejeta le pouvoir des Mamelouks. C’est en 1501 qu’il se retira totalement dans sa maison de Rawda où il mourut en 911H/1505. Sa sainteté et la valeur scientifique de ses écrits fut reconnue de tous. Il affirma avoir vu plus de soixante-dix fois le Prophète à l’état de veille et on rapporte à son propos divers miracles. Il prôna la complémentarité de l’exotérisme et du taçawwuf. On lui attribue jusqu’à 981 ou vrages. 106, 452, 460.

T Tâdilî (Muhammad ibn ‘Alî) Né aux environs de 1880 à Rabat, d’une famille descendant du Prophète et originaire de Sijilmâsa, à la frontière du Sahara marocain, ce Maître spirituel étudia le Qur’ân dans sa ville natale jusque vers quinze ans puis partit à Fès poursuivre ses études de sciences religieuses à l’université Qarawîyiyya où il se rattacha à une confrérie soufie darqawie auprès du Shaykh ‘Alî as-Sûsî al-Ja‘farî al-Ilghî. Il mènera ensuite une vie d’ascète errant, allant de zâwiya en zâwiya. D’une très grande rigueur, il brûla un jour tous ses textes car la pensée de les publier l’avait distrait lors d’une retraite spirituelle qu’il effectuait à Marrakech. La majorité de ses manuscrits est aujourd’hui dispersée parmi ses disciples. Il est surtout connu pour son rôle de Maître spirituel. Dans la fin de sa vie, alors qu’il s’était établi dans la petite ville d’al-Jadida, il fut frappé de paralysie et devint aveugle jusqu’à sa mort, une quinzaine d’années plus tard. Un de ses traités,

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ad-dînun-naçîha, a été traduit en français par A. Broudier sous le titre de La Vie traditionnelle, c’est la sincérité. 33, 65, 158, 344, 379, 452, 460. Tirmidhî (Abû ‘Îsâ Muhammad ibn ‘Îsâ Sawra ibn Mûsa ibn ad-Dahhâk as-Sulamî) Né en 209H/824 dans le village de Bûgh, une banlieue de Tirmidh, situé sur les rives du fleuve de Jîhûn. Sa famille appartenait aux Banû Sulaym. Dès son enfance, il se montra désireux d’apprendre les sciences islamiques et étudia auprès des savants de son village puis, à l’âge de vingt ans, se mit à voyager et se rendit dans le Khurâsân, à Kufa, puis en Iraq, à Bassorah et dans le Hijâz, auprès de grands traditionnistes tels que Bukhârî, qui joua un rôle clé dans sa formation à la fois en matière de hadîth et de fiqh, et Muslim ou encore de spirituels tels qu’Abû Dâwûd As-Sijistânî. Il écrivit neuf ouvrages dont al-Jâmi‘, référence incontournable, une des six compilations d’ahâdîth canoniques de l’Islâm sunnite, et al-Ilal,où il exposa, entre autres, la méthodologie qu’il avait adoptée dans la composition d’al-Jâmi‘, sont les plus connus et dont seulement quatre nous sont parvenus. On lui doit d’avoir établi diverses définitions et une terminologie classificatrice plus précise en matière de science du hadîth. Il compte parmi les grands traditionnistes de l’Islâm. Sa droiture et sa piété l’ont rendu célèbre. Par crainte de Dieu, il pleurait abondamment au point de finir par en perdre la vue les deux dernières années de son existence. Il mourut dans sa ville natale le 13 Rajab 279H/892. On lui doit aussi le fameux Ash-Shamâ’il al-Muhammadiyya traitant des qualités et des vertus du Prophète, « le Livre de l’Ascétisme », Az-Zuhd, et enfin al-Kitâb al-Asmâ wa-l-Kunâ. 309, 441, 460. Tustarî (Sahl ibn ‘Abd Allâh) Né à Tustar, dans le Khûzistân, ce grand Maître soufi reçut son éducation de son oncle maternel et du Shaykh Hamza al-‘Abbâdânî. Il vécut une vingtaine d’années ascétiques dans sa maison avant de commencer à enseigner. Il fut chassé de sa ville natale pour raisons politiques et doctrinales, il s’établit à Bassorah où il fut en butte à l’hostilité de certains savants shâfi‘ites. Il fut le premier Maître d’Hallâj et c’est ainsi que ce dernier le suivit dans son exil en Iraq. Sahl y mourut en 283H/896. Nombre de ses ouvrages ont été perdus et bien des textes qui nous sont parvenus de lui sont des compilations effectuées par certains de ses disciples. Le dhikr, qu’il rattache au Pacte primordial, est le pivot de son enseignement, par ailleurs, fort riche. Deladrière note que « ses disciples, les Sahlis, longuement étudiés par Hujwirî, mettaient l’accent sur le rôle des mortifications (mujâhadât). » 224, 424, 460.

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U Umm Harâm Sœur d’Umm Sulaym, lors de la bataille d’Uhud, elle perdit à la fois son mari et son fils mais sut faire face avec patience et persévérance. Elle connut une autre épreuve avec la mort de son frère Haram ibn Milhan, brutalement assassiné par des ennemis de l’Islâm lors de l’incident de Bi’r Ma’una. Le Prophète la tenait en grande considération, elle et sa sœur, et venait souvent les visiter et manger avec elles. Elle mourut alors que Mu‘âwiya envahit Chypre avec sa flotte ; Umm Harâm les accompagnait et elle mourut au cours de cette expédition. À ce titre, elle compte parmi les martyres mortes en guerre sainte. Elle est enterrée dans l’île de Chypre. 348, 460.

W Wahb ibn Munabbih (ibn Kâmil ibn Siraj ad-Dîn Abû ‘Abdallâh alYamanî as-San‘anî). Ascète et traditionniste originaire du Yémen, il naquit à Dhimar, une ville à deux jours de distance de San‘â . Son père, un descendant des Rois de Perse, se convertit à l’Islâm du vivant du Prophète et sa mère était Himyarite. Il mourut à San‘â en 114H/732. Il écrivit sur la vie des Prophètes, une compilation de personnages bibliques à partir de données du folklore juif adapté à la sauce islamique ; son Kitâb al-Isrâ‘îliyya (« Le Livre des Israélites ») ne nous est pas parvenu mais il devait s’agir d’une compilation d’histoires juives. Certains en ont déduit qu’il aurait été juif lui-même mais rien n’a jamais été prouvé à cet égard. 219, 437, 457.

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07.Bibliographie[31-07]_Mise en page 1 25/09/09 10:41 Page449

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M. SMITH, Al-Ghazâlî, the Mystic, Londres, 1944. Rabiah the Mystic and her fellowship in Islâm, San Francisco, 1977. SUHRAWARDÎ, ‘Awârif al-Ma‘ârif, Le Caire, 1854. SULAMÎ, Early Sufi Women, trad. R. E. Cornell, Louisville, 1999. Tabaqât aç-çûfiyya, Beyrouth, 2003. SUYÛTÎ, Al-Jâmi‘ aç-çaghîr, Alep, 1969-1977. TÂDILÎ, La Vie traditionnelle, c’est la sincérité, trad. A. Broudier, Paris, 1971.

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INDEX

A ‘Abda bint Shawwâl, 265. ‘Abd el-Kader, 96, 117, 119, 120, 125, 203, 204, 272, 273, 307, 308, 313, 326, 331, 407, 408, 428, 449. ‘Abdallâh Abû Muhammad, 414. ‘Abdallâh ibn ‘Îsâ, 84, 194. ‘Abd al-Latîf, 156, 269, 282, 299, 314. ‘Abd al-Qâdir voir ‘Abd al-Kader ‘Abd al-Wâhid ibn Zayd, 167, 238, 239, 358, 408. ‘Abda bint Abî Shawwâl, 111, 316, 317. Abdul-Hâdî, 35, 41, 65, 171, 287, 383, 408, 449. Abrad ibn Dirâr, 262. Abraham, 219, 220, 252, 370, 385, 391. Abû ‘Abdallâh ibn Khafîf, 164. Abû ‘Alî Fâramidhî, 228, 344. Abû ‘Alî Faqî, 98.

Abû ‘Alî Sindhî, 417. Abû Ayub, 424. Abû Bakr, 35, 86, 292-294, 339, 370, 387, 408, 409, 412, 413, 440. Abû Dâwûd voir Sijistânî Abû Hanîfa, 383, 408. Abû-l-Husayn ad-Darîr, 122. Abû-l-Husayn an-Nûrî, 64, 409, 439. Abû Madyan, 427. Abû Mâlik, 317. Abû Ma‘mûr ‘Abdallâh ibn Amr, 244. Abû Muhammad al-Jurayrî, 368. Abû Muhammad Ruwaym, 83, 95, 148. Abû Nu‘aym al-Içfahânî (‘Alî Ibn Sahl), 49, 53, 83, 140, 181, 207, 236, 244, 262, 310, 344, 358, 359, 409, 410, 429, 430, 449. Abû Nûr, Khurshîd, 171, 332. Abû-l-Qâsim al-‘Arif, 159. Abû-l-Qâsim Bishr Yâsin, 410. Abû Sa‘îd ibn Abî-l-Khayr, 50, 82, 145, 146, 216, 259, 320, 350, 360, 388, 410, 411, 441, 442, 449.

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Une femme soufie en Islâm

Abû Sa‘îd al-Kharrâz, 311, 331, 370. Abû-s-Su‘ûd ibn Shiblî, 283, 323. Abû Tâlib al-Makkî, 70, 105, 148, 181, 234, 238, 258, 260-262, 264, 277, 324, 357, 408, 411, 417, 436, 449. Abû Thawr al-Kalbî, 434. Abû ‘Uthmân al-Hîrî, 412. Abû Ya‘qub al-Aqra, 424. Abû Yâzid voir al-Bistâmî Abû Yûsuf Hamadânî, 51. Adam, 42, 75, 77, 90, 110, 124, 139, 218, 219, 222, 283, 320, 367, 368, 372, 374, 385-387. ‘Adawiyya voir Râbi‘â ‘Adî, 53. Aflâkî, 130, 137, 360, 411, 441, 449. Aïnî, 118, 140, 162, 164, 302, 318, 449. ‘Â’isha bint Abî Bakr aç-Çiddîq, 191, 337, 409, 412, 413. ‘Â’isha bint Abî ‘Uthmân Sa’îd alKhayrî, 288. ‘Â’isha de Nishapur, 348, 349. ‘Akkâf al-Hilâlî, 233. ‘Alawî, (Ahmad ibn Muçtafâ), 110, 313, 361, 399, 412, 413, 449. Alcantara (Saint Pierre d’), 89. ‘Alî ibn Abî Tâlib, 35, 311, 339, 348, 384, 387, 409, 412-414, 420, 424, 429, 431, 438. ‘Alî ibn Wafâ, 384. ‘Alî al-Jamâl, 181. Amatullâh, 81. Amatullâh al-Jabaliyya, 349. ‘Amra al-Farghâniyya, 349. Amri (Nelly et Laroussi), 18, 36, 77, 88, 90, 91, 105, 117, 148, 153, 240, 321, 324, 439, 449. Ançârî voir Harawî Andreucci (Nicolas), 13, 18, 240, 275, 277, 286, 295, 450. Antâkî (Dâwûd), 361.

Apollon, 85. Aquin (saint Thomas d’), 422. Arberry (John), 435. Al-‘Ârif al-Bûmî, 188. ‘Atba al-Ghulâm, 259, 415. ‘Athâma, 349. ‘Atîk, 53. ‘Atîka al Ghanawiyya, 77. ‘Attâr (Farîd ad- Dîn), 18, 35, 49-51, 54-61, 64, 77-81, 86, 88-90, 93, 94, 101, 107, 111, 112, 115, 123, 128, 130, 132, 133, 138, 143, 153, 155, 156, 159, 160, 165, 166, 168-170, 176-179, 187, 188, 191-193, 207, 210-212, 214, 224, 225, 227, 230, 242, 245, 247, 248, 256, 265, 266, 273, 280, 284, 288, 297, 301, 302, 307, 316-318, 320-324, 327, 329, 330, 333, 335-337, 339, 341, 342, 344, 351, 358, 359, 411, 415, 417-420, 425, 430, 436, 440, 443, 449. Avicenne, 41, 421. Avila (sainte Thérèse d’), 39, 42, 44. Azraqî, 217, 416, 450.

B al-Baçrî (Hasan), 35, 88, 89, 107, 137, 153, 162, 169, 177, 178, 190, 206, 207, 210, 211, 214, 240-242, 248, 280, 296, 304, 314, 315, 325, 326, 336-339, 364, 415, 416, 424, 425 430, 436. Badawî (Ahmad), 18, 56, 57, 59, 79, 81, 92, 97, 101, 111, 120, 150, 154, 155, 158, 168, 170, 178, 182, 183, 186-188, 191, 207, 211, 225, 226, 238, 241, 242, 244, 259, 261, 263, 264,

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Index

274, 275, 277, 281, 286, 288, 291, 296, 297, 317, 320, 322, 324, 327, 337, 338, 356, 450. Bahâ ad-Dîn Muhammad, 150, 157, 166, 416, 431. Bahâ ad-Dîn Naqshbandî, 130, 326. al-Balkhî (Shaqîq), 169, 170, 324, 444. Batja, 170, 416. Benghal (Jamal-Eddine), 60, 111, 304. Bishr al-Hâfî, 180, 236, 417-419, 436. al-Bistâmî (Abû Yazîd), 140, 205, 207, 262, 272, 286, 297, 307, 308, 326, 332, 333, 369, 386, 391, 411, 414, 415, 419. Bouddha, 210. Bricteux (Auguste), 431, 451. Broudier (Antoine), 33, 158, 344, 447, 452. Buhayra al-‘Âbida, 77. Bukhârî, 378. Bullhe Shah, 299. Burckhardt (Titus), 389, 418, 428. Burhân ad-Dîn, 440. Buzidî (Hamî), 412, 413.

C Çâlih al-Murrî, 71, 94, 347. Camus (Jean-Pierre), 130. Chabry (Manuel), 413, 418, 449. Charlemagne, 51. Chittick (William), 136, 255, 325, 366, 450. Chodkiewicz (Cyrille), 32. Chodkiewicz (Michel), 228, 326, 399, 402, 405, 408, 422, 428, 449, 450. Christ voir Jésus

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Çibt Ibn al-Jawzî, 53, 147, 194, 204, 206, 317, 359, 429. Clément d’Alexandrie, 39. Coomaraswamy (Ananda), 26, 34, 57, 61, 173, 210, 220, 227, 236. Corbin (Henry), 254, 399. Courteille (Pavet de), 49, 322, 358, 409, 415, 450.

D Dabbas (Hammad), 432. Dante, 348, 422, 428. Daqûqî, 160. Darânî (Abû Sulaymân), 234, 235, 355, 418. Darqâwî, 205, 418, 426. Deladrière (Roger), 419, 428, 443, 447. Denys l’Aréopagite, 39. Dermenghem (Émile), 204, 450. Dhahabî (Shams ud-dîn), 74, 234, 360, 419. Dhû-n-Nûn al-Miçrî, 252, 274, 338, 349, 399, 413, 419, 420, 436, 437. Dimashqî (Abû ‘Amr), 117, 420. Dîn (Hasan Imâd), 170, 360.

E Eckhart (Maître), 37-39, 41, 42, 285. Émir (l’) voir ‘Abd el-Kader Envoyé (l’) voir Muhammad Ève, 90

F Fâramidhî (Abû ‘Alî), 228, 344, 420, 421. Fâtima, 340, 345, 348, 413, 420, 435, 438.

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Une femme soufie en Islâm

G Gabriel, 191, 219, 367, 373, 378, 382, 386, 412, 417. Gautama, 214. Ghazâlî (Abû Hâmid), 57, 73-75, 86, 103, 107, 109, 112, 116, 118, 120-123, 131, 132, 158, 203, 222, 251, 252, 257, 258, 265, 279, 280, 301, 303, 306, 309, 311, 314, 324, 331, 360, 368, 370, 373, 388-390, 399, 404, 411, 420-422, 442, 444, 450. Ghazâlî (Ahmad), 421. Ghudjawânî, 326. Ghulam Khalîl, 409. Goethe, 40, 423. González (Juan José), 413, 418, 449. Gril (Denis), 445. Guénon (René), 24, 26, 29, 61, 66, 370, 374, 380, 381, 394, 397, 408, 450.

Hayyûna, 242, 243. Héliades, 85. Helminski (Camille), 450. al-Hiçnî (Taqî ad-Dîn), 51, 354. Huart (Clément), 441, 449. al-Huçnî (Abû Bakr), 116, 133, 183, 264, 348-350. Hujwîrî, 74, 75, 82, 89, 112, 235, 256, 259, 260, 269, 361, 379, 389, 399, 417, 425, 447, 450. Hurayfish, 98, 153, 173, 181, 182, 241, 244, 258, 259, 263, 266, 275, 277, 280, 281, 289, 297, 322, 338, 359, 425, 450. Husayn ibn ‘Alî, 420. Huwarî voir Ibn Abî al-Huwarî

I

Iblis voir Satan Ibn ‘Abbâs, 218, 219, 356. Ibn Abî al-Huwarî (Ahmad), 249, 355, 356, 418, 439. Ibn Adham (Ibrâhîm), 54, 55, 140, 223, 224, 426, 430, 443. Ibn ‘Ajîba, 76, 99, 118, 173, 181, 203, 205, 246, 247, 263, 363, Habîba al-‘Adawiyya, 258. 365, 366, 368-371, 374, 375, Hafça, 191, 423. 380, 383, 387-389, 391, 393, Hâfiz, 425. 396, 397, 399, 400, 402, 403, Hajjâj, 201. 405, 426, 450, 451. Halîma, 414. Ibn ‘Amr (Muhammad), 154, 244. Hallâj (Mançûr), 411, 423-425, Ibn Anâs (Mâlik), 33, 436, 437. 434, 444, 447. Ibn ‘Arabî (Muhyi-d-dîn), 32, 35, Hamâdhânî, 357. 63, 74, 97, 118, 133-136, 167, Hamidullah, 220. 214, 222, 227, 228, 230, 250, Harawî (‘Abdallâh al-Ançâri), 50, 253, 255, 264, 265, 273, 282, 278, 304, 310, 359, 364, 393, 290, 291, 323, 324, 328, 333, 415, 424, 449. 334, 336, 359, 360, 364, 369, Hasan ibn ‘Alî, 41, 420. 371, 375, 386, 387, 389, 397, Hâshimî (Muhammad ibn Sulay 399, 407, 408, 419, 426-431, mân), 239. 433, 436, 437, 445, 450. Hâtîm al-Haram, 443. Ibn al-‘Ârif, 301.

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Index

Ibn Aslam at-Tûsî, 320. Ibn Dînâr (Mâlik), 82, 169, 170, 177, 178, 236, 324, 415, 430, 436, 437. Ibn Fârid (‘Umar), 35, 326, 429. Ibn Hajara, 234. Ibn Hanbal (Ahmad), 418, 444. Ibn al-Hârith voir Bishr. Ibn al-Husayn (Bundar), 371. Ibn al-Huwarî, 252. Ibn Idrîs (Muhammad), 356. Ibn Ishâq, 371. Ibn ‘Iyâd (Fudayl), 244, 417, 420, 430, 443. Ibn al-Jallâ, 420, 440. Ibn al-Jawzî, 51, 84, 89, 95, 97, 111, 120, 154, 179, 305, 315, 324, 327, 344, 356, 359, 429, 443, 450. Ibn al-Karbalâ’i, 305. Ibn Khallikân, 56, 96, 210, 242, 317, 320, 344, 359, 429, 450. Ibn Mançûr, 317. Ibn Mu‘adh (Yahyâ), 74. Ibn Munabbih (Wahb), 219, 437, 448. Ibn al-Munkadir (Muhammad), 86, 437. Ibn Taymiyya, 226, 428. Ibn ‘Ubayd (‘Amr), 425. Ibn ‘Uthmân (Muhammad), 316. Ibn al-Walîd (‘Abbâç), 356. Ibn Wâsi‘ (Muhammad), 328, 437. Ibn al-Yûsuf (Muhammad), 409. Ibn Zuhayr (Ka‘b), 294. Ibrâhîm (Muhammad Zakî adDîn), 146. Içfahânî (‘Alî Ibn Sahl) voir Abû Nu‘aym ‘Illaysh (‘Abd ar-Rahmân), 408. ‘Îsâ voir Jésus ‘Îsâ Zâdhân, 55. Iskandarî ‘Atâ Allâh, 289. Ismaël, 219, 385.

457

J Jabartî (Sharif ad-Dîn), 433. Ja‘far Çâdiq, 326. Ja‘far ibn Sulaymân, 254, 258, 277, 430. Jahân Arâ (Fâtima), 349. Jâhidh, 117, 179, 204, 357, 359, 424, 430, 451. Jalâl ad-Dîn al-‘Arîf, 411. Jâmî (‘Abd ar-Rahmân), 25, 50, 51, 81, 120, 122, 123, 157, 158, 171, 180, 254, 266, 271, 272, 282, 301, 324, 340, 341, 344, 358, 359, 399, 415, 431, 451. Jean de la Croix (saint), 44. Jésus, 41, 57, 191, 252, 339, 367, 420, 427. Jibrîl voir Gabriel Jîlânî (‘Abd al-Qâdîr), 33, 76, 78, 92, 93, 98, 111, 118, 128, 129, 140, 146, 148, 161, 164, 172, 245, 246, 276, 283, 299, 302, 318, 319, 323, 431-433, 434, 449, 451. Jîlî (‘Abd al-Karîm), 297, 372, 433. Job, 165. Joinville, 130. Joseph voir Yûsuf Junayd al-Baghdâdî, 50, 65, 75, 205, 286, 300, 310, 311, 331, 334, 369, 403, 409, 417, 424, 434, 440, 444. Jurjânî, 65, 158, 434.

K Kalâbâdhî, 95, 112, 117, 138, 256, 357, 434. Kâshânî, 379. Kâshgharî, 431. Kâshî, 75. Kazimirski, 53.

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Une femme soufie en Islâm

Khadîja bint Khuwaylid, 348, 412, 413, 420, 435. Khâqânî, 132, 435. Kharaqânî (Abû-l-Hasan), 326. Kharrâz (Abû Sa‘îd), 311, 331, 370, 436. Khayr an-Nassâj, 444. Khidr, 427. Khurqânî (Abû-l-Hasan), 147.

L Lale Müldür, 350. Laugier de Beaurecueil (Sylvain), 449. Laylâ, 246, 254, 255, 299, 390, 431. Lings (Martin), 413. Lory (Pierre), 51, 52. Lulle (Raymond), 44, 429.

M Maghribî (Abû ‘Uthmân), 24, 436. al-Mahmûd (le Sultan), 410. Maïmonide, 422. Mâjida al-‘Adawiyya al-Qurashîya, 306. Majmûna al-‘Aqila, 437. Majnûn, 246, 254, 255, 294, 299, 390, 431, 438. Mâlik (Imâm) voir Ibn Anâs Mâlik ibn Dînâr voir Ibn Dînâr Al-Mamûm (le Calife), 430. Maqdisî, 43, 274, 281, 285-287, 290-293, 295, 377, 437. Marie, 18, 56, 191, 192, 339, 348, 398, 407. Marrî (Salâh), 94, 347. Maryam voir Marie Maryam de Bassorah, 144, 180. Massé (Henri), 431. Massignon (Louis), 88, 162, 424. Maymûna as-Sawdâ, 215, 437.

Méléagrides, 85. Meyerovitch (Eva de Vitray), 24, 34, 69, 440, 451. Michon (Jean-Louis), 76, 173, 181, 203, 205, 370, 399, 402, 450, 451. Moïse, 21, 87, 92, 156, 202, 203, 211, 212, 227, 330, 427. Mokri (Muhammad), 440, 451. Monawwar, 70, 98, 145, 146, 216, 340, 360, 411, 449, 451. Mu‘âdha al-‘Adawiyya al-Baçriyya, 321, 348. Mu‘awiya (le Calife), 413, 448. Muhammad, 22, 27, 28, 31, 36, 37, 52, 55, 56, 67-71, 74, 84-87, 89, 92, 95-97, 99, 106, 124, 125, 139, 141, 145, 150, 168, 190, 204, 211, 212, 228, 233-236, 246, 251, 265, 282, 290-294, 309, 313, 315, 330-332, 337, 340-348, 367, 369, 377, 378, 383-387, 390, 392, 394, 396, 398, 400-402, 409, 412, 413, 414, 417, 420, 424, 431, 432, 435, 436, 438, 446-448. Munâwî (‘Abd ar-Ra’ûf), 18, 35, 51, 53, 77, 78, 82, 88, 90, 91, 105, 110, 111, 117, 129, 135, 138, 143, 148, 149, 157, 162, 165, 168, 171, 179, 187, 188, 202, 208, 215, 235, 236, 239, 240, 284, 288, 305, 307, 315, 320, 321, 327, 344, 360, 437-439, 451. Munkar, 241, 319, 392. Muslim, 278. Mustafâ (Abû Muhammad), 145. Mu‘tadid (le Calife), 409.

N Nabahânî (Yûsuf ibn Isma‘îl), 186. Nabulsî (‘Abd al-Ghanîm), 428.

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Index

Nafîsa bint al-Hasan, 202, 305. Nakîr, 319, 320. Nasrâbâdhî, 445. Nicholson (Reynold), 159, 199, 205, 227, 228, 252, 253, 255, 263, 272, 297, 304, 451. Niffarî, 287, 439. Nisâbûrî (Abû-l-Qâsim), 50, 243. Noé, 221, 283, 308, 312. Novalis, 41. Nurbakhsh (Javad), 84, 98, 186, 242, 314, 315. Nûri voir Abû-l-Jusayn an-Nûrî.

O Oudaimah (Mohammed), 84, 97, 274, 451.

P Penot (‘Abdallâh), 6, 13, 97, 145, 152, 202, 289, 305, 331-333, 335, 346, 408, 428, 449-451. Petit (Paul), 38. Pfister (Gérard), 84, 97, 274, 451. Pharaon, 21, 156. Platon, 109, 270, 428. Plotin, 156, 270. Prakriti, 380. Prophète (le) voir Muhammad Punhun, 255, 299.

Q Qârî (Sarrâj), 175, 244, 360, 451. Qays ibn al-‘Adî, 53. Qunawî, 428. Qushayrî, 49, 51, 65, 83, 89, 91, 119, 121, 123, 126, 138, 146-148, 199, 259-261, 300, 310, 324,

459

345, 358, 369, 389, 399, 401, 420, 439, 442, 451.

R Rabâh al-Qaysî, 81, 244, 324, 414. Râbi‘a al-‘Adawiyya, 7, 9, 11, 17-21, 27, 29-31, 35, 44-47, 49, 51, 52, 53-63, 65-71 73, 74, 76, 78-82, 84, 86-92, 94-105, 107-113, 115-124, 126-130, 132-138, 140, 141, 143, 144, 147-160, 162-188, 190-195, 200, 201, 204, 209-212, 214, 215, 217, 223, 224, 226-231, 233, 237247, 250-252, 254, 256-258, 260-266, 273-285, 287-297, 304-310, 315-339, 341-343, 346-348, 350, 351, 355-361, 377, 408, 410, 411, 414-416, 419-421, 429, 437, 439-441, 444, 451. Râbi‘a al-Azdiyya, 408. Râbi‘a bint Ismâ‘il, 183, 240, 249, 348, 355, 356, 359, 439, 440. Râbi‘a al-Qaysiyya, 357. Randjha, 299. Rayhâna al-Majnûna, 88, 288. Richard (Yves), 431. Rûdhbârî (Abû ‘Alî), 126, 145, 146, 260, 311, 440. Rûmî (Jalâl Ud-Dîn), 21, 23, 25, 34, 41, 44, 57, 60, 64-66, 76, 80, 81, 83, 87, 105, 109, 110, 128, 132, 139, 140, 141, 147, 148, 150, 155, 156, 160, 162, 163, 173, 187, 189, 199, 202, 213, 225-228, 242-244, 249, 252, 255, 256, 261, 285, 296, 299, 300-303, 306-309, 311, 324, 360, 389, 399, 411, 425, 440-442, 451. Ruqayya bint Kadîja, 435. Ruqayya al-Mûçuliyya, 35, 148.

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460

Une femme soufie en Islâm

S Sa‘adî, 85. Sacy (Sylvestre de), 431, 451. Sahaf ibn Mançûr, 84. Saint François d’Assise, 215. Saint Hubert, 55. Saint Paul, 316. Salâm ibn Abû Mutî, 74. Sanâ’î, 249, 341, 441, 442. Sarakhaî (Hasan), 410. Sarî Saqatî, 434, 436. Sarrâj, 83, 126, 149, 175, 181, 262, 357, 360, 361, 403, 442, 451. Sassi, 255, 299. Satan, 42, 76, 77, 79, 101-103, 110, 188, 193, 194, 234, 266, 395. Schimmel (Anne-Marie), 74, 130, 156, 157, 224, 255, 269, 274, 282, 299, 306, 314, 336, 337, 340, 341, 451. Shabaka, 349, 442. Shabestarî (Mahmûd), 24, 45, 338, 442, 451. Shâfi‘î (Yafi‘î), 366, 438. Shâdilî, 374. Shams de Tabrîz, 34, 35, 140, 154, 155, 173, 227, 434, 440, 441. Shaqiq al-Balkhî, 169, 324, 443. Sha‘rânî, 51, 84, 94, 102, 145, 236, 249, 305, 345, 361, 410, 414, 416, 420, 428, 438, 443, 451. Sha‘wâna, 86, 88, 162, 349, 443. Shaybânî, 234. Shayban ar-Râ‘i, 186. Shaytân, voir Satan Shiblî (Abû Bakr), 148, 304, 444, 445. Shubda bint al-‘Ibarî, 349, 429. Sijistânî, 233, 360, 444, 447. Smith (Margaret), 11, 44, 57, 84, 107, 112, 117, 159, 170, 181, 194, 204-208, 235, 236, 240, 256, 262, 311, 319, 350, 358, 359, 361, 452.

Snodgrass (Adrian), 109, 220. Stétié (Salah), 52, 133, 182, 183, 207, 261, 274, 275, 277, 286. Subkî (‘Abd al-Wahhâb), 419. Sufyân ath-Thawrî, 35, 36, 78, 80, 89, 120-122, 149, 158, 167, 176, 179, 245, 254, 258, 265, 277, 282, 315, 322, 324, 330, 411, 417, 420, 431, 440, 444, 445. Sufyân ibn Uyayna, 445. Suhrawardî (Abû Hafç ‘Umar), 234, 236, 263, 264, 266, 324, 360, 404, 452. Sulamî (‘Abd ar Rahmân), 50, 51, 53, 71, 89, 94, 253, 254, 324, 328, 358, 359, 408, 414, 415, 439, 442, 443, 445, 446, 450, 452. Sultan Walad, 440. Suyûtî, 106, 445, 446, 452. Suzo, 39.

T Tacy (Garcin de), 449. Tâdilî (Muhammad), 33, 65, 158, 344, 379, 446, 447, 452. Tauler, 39. Tchelebi, 451. Tirmidhî, 309, 441, 447. Turtûsî (Na‘mî), 320. Tûsî (‘Abbaça), 320, 339. Tustarî (Sahl ibn ‘Abdallah), 224, 424, 447.

U ‘Ubayda bint Abî Kilâb, 88, 306. Ukht al-Fudayl, 315. ‘Umar ibn Khattâb, 387, 430. Umm Ahmad bint ‘Â’isha, 412. Umm al-Banîn, 117.

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Index

Umm Harâm, 348, 448. Umm Hârûn, 215. Umm Hasan al-Kûfîya, 179. Umm Kulthûm, 420, 435. Umm Salama, 424. Umm Sulaym, 449. ‘Umra, 170, 378, 385. ‘Uthmân, 387, 412, 413, 424.

V Vitray (Eva de) voir Meyerovitch

W Waçil ibn ‘Atâ, 425. Wâsitî, 131, 442. Wensinck (Arent Jan), 73.

461

Y Yahia (Osmân), 428. Yûsuf, 110, 170, 254, 255. Yûsuf ibn Arbât, 417.

Z Zacharie, 191. Zarrîn Tâj, 349. Zaynab, 349, 420, 435. Zihnî (Muhammad), 53. Zinzendorf, 41. Zubaydî, 238, 277, 331. Zulaykha, 170, 254. Zulfa bint ‘Abd al-Wâhid, 205.

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Dans la Collection HIKMA

Ibn ‘Arabî Les Révélations de La Mecque (trad. A. Penot) À paraître

‘Alawî : De la Révélation Lettre ouverte à celui qui critique le Soufisme (trad. M. Chabry et J. J. González ) Ibn ‘Arabî Par delà le miroir (trad. A. Penot) A. Penot L’Entourage féminin du Prophète Sulamî Femmes soufies (trad. N. Andreucci)

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