Solidarité 4/11

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Numéro 4, novembre 2011

POINT FORT Cinq communes Cinq réalités ACTUALITÉ Du café équitable au travail Le magazine de


2 éDITORIAL

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Chère lectrice, cher lecteur, Le développement durable est indissociable de la démocratie. Hommes et femmes doivent être les acteurs de leur propre développement, s’ils veulent se libérer de la pauvreté et promouvoir la justice sociale. C’est pour cela que Solidar Suisse sou­ tient des organisations de la société civile qui défendent la participation démocratique aux décisions. À l’échelon communal, les hommes et les femmes peuvent s’impliquer directement avec une certaine visibilité; c’est un terrain d’action important. Dans ce numéro de Solidarité, nous présentons des communes de plusieurs pays partenaires qui partagent les mêmes interrogations et soucis: l’emploi, l’égalité entre hommes et femmes, l’accès aux ressources, les infrastructures.

suisses assument leurs responsabilités sociales sur le plan mon­dial. Agissent-elles de manière solidaire en soutenant des projets en faveur des pays émergents et en développement? S’assurent-elles que les produits qu’elles achètent dans des pays pauvres sont fabriqués dans des conditions décentes? En page 9, nous présentons la ville de Nyon, à savoir la mieux classée des communes romandes de moins de 20 000 âmes. La plupart des communes examinées sont sensibles à ce qui se passe au-delà de leurs frontières et s’intéressent à des problématiques globales. Nous aussi, nous persévérons: en soutenant des projets de développement communal dans les pays du Sud et en faisant du lobbying en faveur d’une politique solidaire en Suisse. Votre soutien est précieux, chère lectrice, cher lecteur: il nous donne des forces et rend notre engagement d’autant plus efficace. Merci! Ruth Daellenbach

Ruth Daellenbach, directrice de Solidar Suisse

Nous étendons la réflexion jusqu’en Suisse. Avec le fil rouge «penser globalement – agir localement», nous avons mené le rating Solidar 2009/2010 pour savoir si les communes

POINT FORT Cinq communes – cinq réalités quotidiennes

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Rahovec, Kosovo: l’agriculture, seule alternative au chômage

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Estaquinha, Mozambique: participation de la population au développement communal

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Nyon, Suisse: accompagner la croissance tout en pensant global

9 POINT FORT

Pir Sabaq, Pakistan: se remettre des dégâts dus aux inondations

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POINT DE VUE Carlo Sommaruga: les droits démocratiques au service du développement

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Les portraits de cinq communes montrent des problèmes similaires, mais des réalités quotidiennes très diverses.

ACTUALITÉ Campagne pour du café équitable: chez Nestlé et partout au travail 13

Revue de presse

21.09.2011 Moutier relativement bien notée par Solidar Suisse Solidar a évalué l’engagement de 88 com­ munes suisses, dont 17 romandes, vis-àvis des pays du Sud en matière de co­ opération au développement et d’achats publics équitables. La commune de Moutier s’en sort assez bien et occupe le 33e rang. Dans le domaine de la coopération au développement, la ville obtient 26,3 points sur 50, résultat jugé bon, vu que la moyenne des 88 communes étudiées n’atteint que 17,6 points. «Un tel dynamisme est rare dans une commune de moins de 10 000 habitant-e-s», note l’ONG dans son rapport.

12.09.2011 Nespresso et l’ONG Solidar ont amorcé un dialogue Solidar a créé un buzz considérable grâce à sa vidéo parodique qui met en scène un faux George Clooney et invite les internautes à lui écrire pour que Nespresso propose du «café équitable». Le clip a été visionné plus de 600 000 fois en huit jours. Le succès est aussi politique. Vendredi dernier, lors d’une pre­ mière rencontre, Nespresso et Solidar ont convenu qu’une étude indépendante serait lancée afin de comparer les différents labels du café équitable. La qualité de ces labels est la pomme de discorde dans ce dossier.

19.08.2011 Un carton jaune pour ses impôts Sepp Blatter, 75 ans, président de la FIFA, est visé par une pétition de la Jeunesse socialiste et de Solidar Suisse, qui veulent abolir les privilèges fiscaux accordés à la Fédération internationale de football. Le fooball, c’est un sport fédérateur qui fait rêver des millions de gens. Mais la FIFA est-elle pour autant un organisme d’utilité publique? La Jeunesse socialiste et Solidar en doutent, vu les milliards de bénéfices engrangés. Taxée comme une entreprise, la FIFA aurait dû payer, entre 2007 et 2010, 180 millions d’impôts – et non 3 millions.

Droit sans frontières: les entreprises suisses doivent respecter les droits humains

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jeu & baromètre

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RÉSEAU & rating Nouvelles des OSEO régionales et du rating Solidar

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PORTRAIT Celia Quispe s’engage pour la commune bolivienne de Malla 18

4, 18

POINT DE VUE

L’avenir devra faire rimer démocratie, droits humains, droits sociaux et dévelop­ pement durable.

e presso

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RATING

Solidar Suisse a évalué l’engagement des communes vis-à-vis du Sud. Analyse des résultats romands.

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ACTUALITÉ

Une campagne fracassante de Solidar exige du café équitable: bilan et activités futures.

IMPRESSUM Éditeur: Solidar Suisse, Quellenstrasse 31, Postfach 2228, 8031 Zürich Tél. 021 601 21 61, E-mail: contact@solidar.ch, www.solidar.ch CP 10-14739-9 Lausanne. Membre du réseau européen Solidar Rédaction: Katja Schurter (rédactrice responsable), Rosanna Clarelli, Christian Engeli, Alexandre Mariéthoz, Cyrill Rogger

Layout: Binkert Partner, www.binkertpartner.ch / Spinas Civil Voices Traduction: Irene Bisang, Ursula Gaillard, Walter Rosselli, Jean-François Zurbriggen Correction: Jeannine Horni, Carol Le Courtois Impression et expédition: Unionsdruckerei/subito AG, Platz 8, 8201 Schaffhausen Paraît quatre fois par an. Tirage 37’000 ex.

Le prix de l’abonnement est compris dans la cotisation (membres individuels 50.– par an minimum, organisations 250.– minimum). Imprimé sur papier recyclé. Page de titre: En Bolivie, Celia Quispe travaille aux champs, tout en s’engageant pour sa commune. Photo: Harold Wolff. Dernière page: Campagne pour du café équitable au travail. Photo: Spinas Civil Voices.


POINT FORT

4 Des habitantes d’Estaquinha exposent leurs exigences, lors d’une assemblée du comité de développement de la commune.

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Pir Sabaq. Rahovec. Estaquinha. NYON. Malla. Le présent numéro s’intéresse à cinq communes de qua­ tre continents et décrit la réalité de ces localités très diverses. Des thèmes comme le chômage, la participation démocratique et l’égalité sont d’actualité partout. Le manque d’infrastructures est préoccupant dans les pays du Sud: Pir Sabaq doit se relever d’une catastrophe, Rahovec est mise à rude épreuve par la cohabitation de ses minorités, Malla veut dispenser une éducation de base à sa population, alors que la ville d’Estaquinha lutte pour sa sécurité alimentaire. Face à de tels défis, les tâches auxquelles doit s’atteler la commune de Nyon semblent dérisoires.


6 POINT FORT

CHRONIQUE

THEMA 7

Fahrije Hoti s’occupe de la production, Pranvera Spahiu de la vente. La coopérative Ayvar occupe un nombre croissant de femmes.

Hans-Jürg Fehr Président de Solidar Suisse et conseiller national

CCT, bien d’exportation

Poivrons et vignes

La commune kosovare de Rahovec doit faire face à un chômage élevé. Des projets agricoles très novateurs ouvrent des perspectives. Texte: Katja Schurter. Photos: Brigit Ruprecht Des touches rouges parsèment les alentours des routes de campagne menant de Pristina à Rahovec. Ce sont des champs de poivrons. «Le maraîchage, la fruiticulture et la viticulture jouissent d’une longue tradition. 70 à 80 pour cent des gens vivent de l’agriculture», explique le maire Smajl Latifi, en fonction depuis huit mois. «Chaque famille compte une personne active dans l’agriculture car, en raison du taux de chômage élevé, ce secteur représente la seule survie possi-

tions et des crédits aux paysan-ne-s. Ce serait à notre Ministère de l’agriculture d’intervenir. Il faut des innovations techniques, des canaux de distribution clairs et de bons projets afin de réduire le taux de chômage. Sinon, les jeunes partent à l‘étranger.» Au Kosovo, 80 pour cent des jeunes sont sans emploi.

Une organisation pleine d’idées Mise en place après la guerre pour épauler les veuves, la coopérative féminine de Krusha a créé des emplois. En 2005, deux femmes se «Vu le taux de chômage sont lancées dans la culélevé, l’agriculture constitue ture et la transformation de divers légumes. Dans souvent le seul moyen de l’intervalle, la coopérative survie.» compte 25 membres de tous âges et un site produible.» Mais les subventions trop faibles sant de l’ayvar – une purée de poivrons allouées au paysannat ne lui permettent cuite plusieurs heures durant – et des pas d’être compétitif. Smajl Latifi est per- pickles. «Nous sommes parties de rien, suadé qu’il y a là un important potentiel dans un bureau vide aux murs ornés de en jachère. «La commune n’a toutefois photos de victimes de la guerre. Je pas les moyens d’octroyer des subven- m’étonne encore de ce que nous avons

réalisé», se souvient la directrice Pran­ vera Spahiu. La culture et la transformation traditionnelle des légumes nourrissent la plupart des membres. La coopérative a contribué à la participation économique et politique des femmes: «Au début, toutes cuisaient leur purée de poivrons chez elles; entre-temps, elles sont de plus en plus nombreuses à travailler sur notre site de production», raconte Syzane Baja, coordinatrice de Solidar au Kosovo. En la personne de la présidente Fahrije Hoti, une membre de la coopérative siège également au Conseil communal. La coopérative féminine a décroché le premier prix du concours de Solidar récompensant les initiatives économiques en milieu rural kosovar. Elle a profité de conseils pour établir un plan d’exploitation et a pu trouver des donateurs additionnels. Une installation de pasteurisation améliore la conservation des produits. La coopérative a, récemment, conclu des contrats de commercialisation avec des supermarchés de la région.

Mêmes chances pour tous? Questionné sur l’égalité des chances entre les femmes et les hommes, le maire Smajl Latifi répond: «L’enjeu ne se réduit pas au seul fait d’avoir 30 pourcent de femmes au sein du parlement communal. L’égalité entre hommes et

Rahovec en chiffres Dans la commune, 56 000 âmes cohabitent sur une superficie de 470 kilomètres carrés. 36 villages, dont Krusha, sont rattachés au chef-lieu. 95 pour cent des habitant-e-s sont albanais, la plus grande minorité étant serbe. Suivent les Roms, Aschkalis et Égyptiens. Les principales branches d’activité sont l’agriculture et la viticulture, ainsi que la fabrication de plastique et le petit artisanat. Le revenu minimal est de 180 francs. En 2011, des recettes fiscales de 860 000 francs sont inscrites au budget.

femmes passe surtout par l’éducation et l’autonomisation. Par ailleurs, à Rahovec, les départements de la santé et de l’éducation sont dirigés par des femmes.» La minorité serbe vit dans deux des 36 villages de la commune. Dans les autres cohabitent la minorité albanaise et les autres minorités. Que fait la commune pour l’intégration de ses citoyen-ne-s? «Je ne suis pas pour des enclaves serbes», lance Smajl Latifi, avant d’ajouter: «La commune encourage plutôt les organisations de la société civile à se mobiliser pour intégrer les différentes communautés.» La stratégie de développement et le budget de la commune sont discutés lors de réunions villageoises. Cela permet de renforcer la participation de la population. Interrogé sur sa vision de la Rahovec de demain, Smajl Latifi cite le plein emploi, de bonnes routes et la commercialisation des produits locaux. Il poursuit: «Nous cherchons une cité suisse au profil similaire à Rahovec, en vue d’un partena­riat bénéficiant aux deux localités.»

Des salaires et des conditions de travail équitables: tel est l’objectif pour lequel nos membres et le PS militent en Suisse, avec l’initiative pour un salaire minimum, et pour lequel Solidar Suisse se mobilise avec ses partenaires dans des pays émergents et en développement. Autant l’objectif est similaire, autant les approches divergent. Les pays d’Afrique, d’Asie et d’Amérique centrale consacrent toute leur énergie à la lutte pour les droits élémentaires du travail. En font partie l’interdiction du travail des enfants et du travail forcé, ainsi que le droit de s’organiser en syndicats et de conclure des contrats collectifs de travail. Dans les États d’Europe du Sud-Est, ces interdictions et ces droits peuvent être considérés comme acquis, mais cela ne signifie pas que l’économie réelle est équitable, loin s’en faut. Pour atteindre cet objectif, il faut de bonnes conventions collectives de travail (CCT), négociées par des organisations capables de défendre les droits des salarié-e-s. On peut apprendre à négocier de bons accords et à insti­ tuer des organisations puissantes. Le rôle de Solidar consiste à soutenir les organisations partenaires locales afin qu’elles de­viennent de réels partenaires sociaux. Dans ce contexte, nous pouvons profiter de l’expérience acquise après la guerre dans notre propre pays. Depuis cette année, les fonds paritaires des partenaires so­ciaux suisses soutiennent aussi nos activités en Europe du Sud-Est. Ensemble, nous nourrissons l’espoir que la CCT devienne un nouveau bien d’exportation suisse à succès.


8 POINT FORT

POINT FORT 9 Nyon se soucie de la qualité de vie de ses habitant-e-s, tout en portant un regard global sur le monde.

eau non potable et crocodiles L’amélioration des infrastructures et la création d’emplois sont prioritaires pour la population de la commune mozambicaine d’Estaquinha.

Le comité de développement se réunit pour discuter des futurs projets à Estaquinha.

Texte: Natalia Domingos et Jorge Lampião. Photo: Yunas Vally «Nous discutons de la meilleure manière de remédier aux problèmes de la commune», lance Ana Lourenço pour expliquer la tâche du comité faisant participer la population au développement local. «Par exemple, la répartition des terres: certains ne veulent ni utiliser leurs terrains, ni les rendre. D’autres aimeraient les répartir plus équitablement.» Ana Lourenço défend les intérêts de la population au sein du comité de la commune d’Estaquinha, créé en 2009 avec l’appui de Solidar Suisse. Cet organe adopte le plan de développement et le budget de la commune. Douze hommes et huit femmes y prennent part. L’homme décide La tradition veut que les femmes soient exclues des décisions. La femme a besoin de l’accord de l’homme même pour les décisions urgentes. Cela peut occa­ sionner des situations terribles: «Certaines femmes accouchent sur le chemin de l’hôpital, parce que leurs maris ont décidé trop tard qu’elles devaient s’y

rendre», explique Ernsto Sitoe. Mais la situation des femmes commence à changer peu à peu: elles participent de plus en plus aux débats publics, pratiquent le petit commerce, créent des groupes d’épargne et de crédit, et sont nommées déléguées des tables rondes. Lors de la récente amélioration de la route rurale, les femmes ont également retroussé leurs manches. Quasiment pas d’activité formelle Les engagements formels sont rares à Estaquinha. L’administration surtout propose aux femmes et aux hommes des postes fixes dans l’enseignement, les soins infirmiers et la police. La plantation de canne à sucre de la Companhia de Búzi propose aussi quelques emplois. La majorité de la population pratique l’agriculture ou tient des petits magasins de produits d’usage courant. On sème en octobre pour récolter en mars. En cas de mauvaise récolte, les réserves suffisent jusqu’en novembre seulement, puis les aliments viennent à manquer. La commu-

nauté villageoise soutient malgré tout les enfants orphelins, en leur fournissant nourriture et matériel scolaire. Que veut la population? «Comme il n’y a pas de puits, les gens vont chercher l’eau à la rivière, infestée de crocodiles. Estaquinha a besoin d’un approvisionnement en eau et en électri­ cité, et doit être reliée au téléphone. Elle doit devenir une authentique ville, estime Ana Lourenço. En outre, nombre de personnes ont besoin d’un emploi fixe.»

Estaquinha en chiffres Estaquinha compte 36 100 âmes, réparties dans 29 villages. Elle ne bénéficie pas encore de l’électricité. L’approvisionnement en eau potable par des puits est rudimentaire. Les principales branches d’activité sont l’agriculture et le petit artisanat. Le revenu national moyen de 35 francs par mois n’est pas atteint, loin s’en faut.

Secteur bancaire et solidarité

La petite ville de Nyon contribue, dans la mesure de ses possibilités, à une amélioration des conditions de vie dans le Sud. Eclairage. Texte: Alexandre Mariéthoz. Photos: Ville de Nyon «C’est un paradoxe! Les citoyen-ne-s attendent d’autorités locales qu’elles agissent aussi au niveau global», s’exclame Daniel Rossellat, syndic de Nyon. Cette ville vaudoise de 19 200 âmes a décidé,

aussi par de solides efforts en vue d’achats publics équitables.

Une approche pragmatique «Dans son engagement en faveur d’un développement durable, la Municipalité agit de manière «Nyon veille à ne pas pragmatique et se concentre acheter de produits issus sur des actions concrètes qui correspondent à ses compéde l’exploitation.» tences», explique Sarah Huber, déléguée au dévelopen juillet dernier, d’augmenter sa contri- pement durable de la Ville de Nyon. Et de bution à la coopération au développe- citer un exemple: «La problématique du ment de 16 000 à 46 000 francs par an. commerce équitable est internationale, Un geste fort, qui contribuera à améliorer mais la Commune peut veiller à ce que les conditions de vie dans le Sud. les produits qu’elle achète ne soient pas issus de l’exploitation.» Achats publics équitables La solidarité se manifeste également sur Nyon a participé au récent Rating Solidar le plan local, notamment en matière de des communes. Elle se classe en tête de chômage. La Commune s’engage en peloton, au 16e rang (sur 88 communes). faveur des jeunes par des actions visant En se basant sur le budget 2011, et non à favoriser le passage de l’école au sur les comptes 2009 et 2010, la ville monde professionnel. Elle soutient aussi vaudoise se hisserait même au 7e rang. financièrement l’agence de placement Le très bon résultat de Nyon s’explique Inter-Face – initiée par l’OSEO Vaud.

Accompagner la croissance Et le futur? Nyon bénéficie d’une attractivité économique forte. Cela implique plusieurs défis afin d’accompagner la croissance. «Il faudra notamment, explique Sarah Huber, garantir que la croissance économique apporte des emplois à la région et que les entreprises participent aux efforts pour la qualité de vie locale.» La Ville veut aussi favoriser la mobilité douce et la construction de logements à prix abordables. Tout en continuant à porter un regard solidaire sur le monde.

Nyon en chiffres Nyon se situe sur la Côte vaudoise, près de Genève. Son économie est surtout tertiaire (pharmaceutique, agroalimentaire, technologie de précision, services financiers). Nyon compte 19 200 âmes. Le revenu moyen par habitant-e est de 130 000 francs dans le district. Cela dit, 40% des familles disposent d’un revenu inférieur à 70 000 francs.


10 POINT FORT

POINT DE VUE 11 Le four à pain de Pir Sabaq a été construit avec le soutien de Solidar Suisse.

démocratie et développement La démocratie et le respect des droits fondamentaux sont garants d’un développement durable – et social. L’exemple de l’Amérique latine le démontre.

Blé et marbre Dans la ville pakistanaise de Pir Sabaq, la solidarité est très forte. Mais inondations et chômage mettent la commune à rude épreuve.

Texte: Carlo Sommaruga, conseiller national PS

Texte et photo: Debora Neumann Pir Sabaq se trouve au nord du Pakistan et comprend plusieurs villages, tous dotés de leur propre «jirga» (assemblée) tradi­ tionnelle. Celle-ci réunit des anciens, des enseignants et des représentants de la communauté religieuse, uniquement des hommes. Ils sont nommés à vie par la majorité masculine du village et sont bénévoles. La «jirga» prend des décisions sur tous les aspects de la vie quotidienne, comme la sécurité sociale, la répartition des terres ou les questions religieuses. Solidarité sans égalité Se serrer les coudes dans l’ensemble des situations de la vie et des secteurs

Votre don est une aide réelle Avec un don de 50 francs, une femme reçoit une formation continue et du matériel. Elle pourra ainsi ouvrir un commerce qui l’aidera à subvenir aux besoins de sa famille. Avec un don de 100 francs, un boulanger peut proposer une place d’apprentissage à des jeunes sans emploi, ce qui leur offre des perspectives sur le marché du travail.

d’activité va de soi pour la population de Pir Sabaq. Les femmes sont des figures de proue de la famille, mais elles n’ont aucune influence dans la vie publique. Elles ne peuvent exercer qu’une incidence indirecte, via l’éducation des enfants ou via les époux et les frères. Défis de taille Mais la solidarité n’a pas suffi pour faire face aux derniers événements: les graves inondations de 2010 ont paralysé la vie économique et, une année après, la moitié des infrastructures seulement est à nouveau fonctionnelle. Les plus touchés sont les paysan-ne-s, car le bétail a péri en nombre et les canaux d’irrigation n’ont toujours pas été reconstruits. Avant la catastrophe déjà, la commune luttait pour améliorer ses infrastructures. Comme elle se situe à l’extrême limite du district, les mauvaises routes compliquent le transport des biens agricoles vers les marchés et font obstacle au développement économique. Chômage et exode Ce sont avant tout l’agriculture et l’industrie du marbre qui offrent des emplois; de plus, de petites entreprises fabriquent des allumettes, réalisent des travaux de couture, gèrent des magasins

ou élèvent du menu bétail. À Pir Sabaq, le taux de chômage est élevé et touche essentiellement les jeunes. L’absence d’industrie et le faible niveau d’éducation ne leur permettent pas de s’insérer sur le marché du travail. Ils deviennent souvent des salarié-e-s à la périphérie des grandes villes. Pour mieux utiliser le potentiel existant, notre organisation partenaire Labour Education Foundation (LEF) aide les travailleurs des marbreries à s’organiser en coopératives. Par ailleurs, main dans la main avec LEF, Solidar Suisse a conçu des projets ouvrant des perspectives aux jeunes sans emploi. Ces initiatives mettent l’accent sur la formation continue des jeunes femmes pour leur faciliter l’accès à des activités rémunérées.

Pir Sabaq en chiffres La commune compte 34 000 âmes et ses villages s’étendent sur une superficie de 80 kilomètres carrés. 60 % de la population vit de l’agriculture (blé, maïs et canne à sucre), 40 % travaille dans les marbreries. Le revenu moyen oscille entre 60 et 80 francs par mois.

En Suisse, la démocratie et le respect des droits humains sont des acquis faisant partie intégrante du consensus politique national. À ce titre, ces principes sont reconnus comme des éléments essentiels à la cohésion sociale, à la stabilité politique et au développement économique de notre pays. Par ailleurs, la démocratie suisse, de par sa nature même, engendre une participation active de la société civile au débat politique. Cette véritable culture participative s’exprime sous de nombreuses formes, par exemple lorsque le parlement intègre dans le débat politique des revendications issues de la société civile. Cet espace démocratique laissé à la société civile est fondamental. Il est la seule voie pour contrecarrer l’hégémonie de l’économie, renforcer les droits sociaux et orienter la société vers un développement durable. Manque total de cohérence De façon assez paradoxale, la Suisse est incapable de transposer les fondements de sa culture politique dans sa politique économique extérieure. Ainsi, depuis toujours, les milieux économiques et le Conseil fédéral ont sacrifié sur l’autel du libre-échange commercial les droits humains, les droits sociaux et le développe-

ment durable. Des accords commerciaux ont systématiquement été conclus avec des régimes autoritaires, peu préoccu­ pés par les droits humains et les normes du travail. L’idée d’une cohérence entre les sphères économique, sociale et environnementale reste aujourd’hui encore totalement incomprise par le Secrétariat d’État à l’économie (SECO) et la majorité bourgeoise des deux Chambres.

cessus démocratique et, par ricochet, des conditions de vie de l’ensemble de la population. Un lien indissociable Ce que le Printemps arabe renvoie lui aussi avec force aux démocraties occidentales, c’est la nécessité du lien indissociable, de l’imbrication même, entre les sphères économiques et sociales. Ces mouvements brisent la logique du libéralisme purement économique, imposée par le Fonds monétaire international (FMI) et les pays du Nord, qui avait transformé les régimes à parti unique en appareils de protection des élites locales

Partage des richesses L’équation entre démocratie, droits fondamentaux, renforcement des droits sociaux et développement socioéconomique, s’impose pourtant comme nouveau paradigme. En Amérique latine, la chute La Suisse conclut des acdes régimes autoritaires a cords commerciaux avec permis, par la démocratisation croissante des sociédes régimes autoritaires, tés, de voir les droits so­ peu préoccupés par les ciaux et le développement droits humains et du travail. socialement partagé se consolider. Au Brésil et en Bolivie, les mouvements syndicaux, des prédatrices des ressources nationales. sans-terre et des peu­ples indigènes, La vieille dichotomie entre économie et peuvent mieux faire entendre leurs voix social est une vision du passé. L’avenir et exiger le partage des richesses. s’inscrit dans un projet intégrant démoL’intégration, parfois balbutiante, de leurs cratie, droits humains, droits sociaux et revendications dans les politiques pub- développement durable. liques aboutit à une amé­lioration du pro-


12 BRÈVES

ACTUALITÉ 13

Efforts pour les jeunes en Europe du Sud-Est

Un million de maisons détruites au Pakistan

En septembre, des représentant-e-s d’organisations et de syndicats de BosnieHerzégovine, du Kosovo et de Serbie, se sont rencontrés à Zenica. Leurs projets pour intégrer la jeunesse au marché du travail ont fait l’objet d’intenses discussions. Ces projets portent leurs fruits. Ainsi, le centre de conseil professionnel du Youth Communication Centre à Banja Luka est particulièrement apprécié par les élèves, les parents et les autorités locales. www.solidar.ch/europesudest

À la mi-septembre, le Pakistan a été à nouveau confronté à de très graves inondations. Environ cinq millions de personnes, dont un tiers d’enfants, ont été touchées. Selon les informations du gouvernement, dans le sud du pays, un million de maisons ont été détruites. Dans le district de Badin, 40 pour cent des terres

Bolivie: le gouvernement contre les indigènes En août, la population autochtone du Parc national de Tipnis, dans les plaines amazoniennes, a entamé une marche de protestation vers La Paz. Cette communauté s’insurge contre le projet d’une route transnationale vers le Brésil, qui traverserait leur territoire et une zone naturelle protégée. Les autochtones craignent à la fois des dégâts environnementaux et un afflux de petites exploitations paysannes vers leur territoire. À Yucumo, la marche a été stoppée par la police et des groupes favorables au projet, mobilisés par le gouvernement. Le 25 septembre, les forces policières s’en sont prises brutalement aux auto­ chtones. Cela a soulevé une vague de protestation dans tout le pays. L’Église catholique, les organisations de défense des droits humains et l’ONU ont protesté contre la façon d’agir du gouvernement. Le président Evo Morales a ordonné l’arrêt provisoire du chantier et a décidé de soumettre le projet à un référendum.

Nicaragua: dialogue social dans le secteur du café En août 2011, le syndicat du personnel agricole ATC, le Ministère du travail et une représentation des employeurs ont

Rating des communes: meilleur résultat pour Köniz Le rating des communes effectué par Solidar a examiné l’engagement solidaire, vis-à-vis du Sud, de 88 communes suisses (voir article en page 17). L’évaluation de la commune de Köniz, parue dans Solidarité 3/11, a été ulté­ rieurement adaptée. La commune a, en effet, mis en place des directives pour des achats durables sur le plan social,

sont inondés. Toute la population a dû être évacuée. Grâce à ses partenaires locaux sur place, Solidar Suisse a pu aménager des logements temporaires et distri­ buer des paquets pour subvenir aux besoins quotidiens des victimes. Selon les services météorologiques pakistanais, ces nouvelles inondations, dues à la violente mousson, sont une conséquence du réchauffement climatique. Durant ces prochaines décennies, ce pays sera très exposé à ce genre de catastrophes. Solidar ne fournit donc pas qu’une aide d’urgence, mais contribue aussi à la reconstruction. À l’avenir, les maisons devront mieux résister à de telles inondations. On pourra ainsi éviter beaucoup de souffrances. www.solidar.ch/news constitué une commission chargée, dans le département de Jinotega, d’améliorer les conditions de travail et d’éradiquer le travail des enfants. Cet événement historique fait suite à de longues négociations entre l’ATC et Eduardo Rizo, le plus important détenteur de plantations de café et président de l’Union des entreprises productrices de café de la région. 70 pour cent du café produit au Nicaragua provient de Jinotega. Cette convention entre le syndicat ATC et l’employeur le plus important de la branche aura une influence positive dans toute la région. www.solidar.ch/nicaragua

juste avant la fin de l’évaluation de Solidar. De plus, suite à un malentendu, nous n’avions reçu que des données partielles en matière d’aide humanitaire et de partenariats avec des communes de pays émergents ou en développement. Nous sommes ravis du nouveau résultat de Köniz, qui s’améliore nettement: www.solidar.ch/rating-solidar-descommunes

Pause café: avec un goût d’exploitation? Plus de 40 000 personnes se sont associées à la campagne de Solidar pour un Nepresso équitable. Faisons maintenant pression pour que du café équitable soit servi à votre travail! Texte: Christian Engeli. Photos: Solidar Début septembre, sur www.solidar.ch, la parodie d’un spot de Nespresso invitait à adresser un e-mail à George Clooney. Cette campagne devait mettre Nespresso devant un choix clair: du café équitable ou plus jamais de publicité pour Nespresso avec la star. La campagne s’est propagée à la vitesse de l’éclair, via les médias so­ ciaux: un mois plus tard, 800 000 personnes ont vu notre parodie de spot. 40 728 personnes ont répondu à notre action et envoyé un e-mail à George Clooney. 10 000 personnes ont, de plus, écrit un message personnel au célèbre acteur Réaction de Nespresso Nespresso a réagi sans délai: cinq jours après le lancement de la campagne, nous avons commencé à négocier avec une délégation de Nespresso. Résultat: 1. La multinationale juge son café suffisamment social et durable. Chaque label aurait ses atouts et ses faiblesses. Il serait impossible de prétendre que le café issu du commerce équitable serait plus social que l’actuel café Nespresso.

Nous nous inscrivons en faux contre une telle déclaration. 2. Mais Nespresso est prête à charger une instance indépendante d’examiner la question de la fiabilité des divers labels. À première vue, ce résultat peut sembler peu spectaculaire. Mais nous en sommes convaincus: un jalon essentiel a été posé. Il s’agit d’une importante victoire d’étape vers un café équitable. Du café équitable au travail Nous sommes très heureux que nos exigences, à savoir une offre adaptée de café équitable de la part de Nestlé et de Nespresso, soient soutenues par autant de personnes. Aussi tenons-nous à ne pas en rester là. Comme consommateurs et consommatrices, nous pouvons contribuer à des conditions de travail décentes dans les pays émergents et en développement – dans la mesure où nous n’achetons plus que des biens produits dans des conditions équitables. En Suisse, nous buvons en moyenne 1300 tasses de café par an, dont une

part considérable au travail, à l’école, à l’université, etc. Avec votre aide, nous voulons faire en sorte que votre entre­ prise, votre école, votre commune pro­ pose uniquement du café équitable. Un clic contre l’exploitation Vous pouvez contribuer à la réalisation de cet objectif sur notre site internet: • Votre lieu de travail propose-t-il déjà du café équitable? Si oui, inscrivez votre employeur sur notre site web. Les exemples positifs peuvent motiver des employeurs. • Le café que vous buvez à la pause a encore un arrière-goût d’exploitation? Alors, faites changer les choses! Sur notre site internet, vous pouvez nous charger d’approcher votre employeur – ou télécharger notre lettre-type et écrire vous-même une lettre à la personne responsable au sein de votre entreprise. Merci de tout cœur pour votre précieux engagement! www.solidar.ch/commerceequitable


14 JEU & BAROMÈTRE

ACTUALITÉ 15

Le sudoku de Solidar 3 2

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9

6

7

3

4

2

6 5 7

4

5

8

3 5

8 1

7

1

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5

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2

4

3 9

Évaluation du baromètre

Règles du jeu Complétez les cases de la grille avec les chiffres de 1 à 9, afin qu’il n’y ait aucune répétition et aucun doublon dans chaque colonne, ligne et carré de 3x3. La solution se trouve dans les cases grises lues horizontalement, selon l’équivalence ci-dessous: 1=U, 2=B, 3=A, 4=I, 5=Q, 6=E, 7=L, 8=E, 9=T.

Les multinationales, comme Nestlé, doivent-elles proposer une offre conséquente de café équitable? 8

39

39 Oui, elles doivent proposer uniquement du café produit dans des conditions équitables. 8 Oui, mais. Elles doivent inclure le café équitable dans toutes les lignes de produits – et laisser ainsi le choix à la clientèle. 0 Non.

Les remarques oscillaient entre: «Excellente campagne, continuez!», «Un vœu pieux?», «Des conditions équitables et la qualité doivent aller de pair» jusqu’à «Tous les produits doivent être équitables, pas seulement le café». Ou simplement: «What else!».

droit sans frontières Le Conseil fédéral et le Parlement doivent veiller à ce que les entreprises sises en Suisse respectent, partout dans le monde, les droits humains. Telle est la revendication de la campagne «Droit sans frontières». Texte: Pepo Hofstetter, Alliance Sud. Photo: Marion Nitsch seulement notre pays attrayant pour des sociétés comme Nestlé ou Holcim, mais aussi pour des sociétés étrangères comme Xstrata et Transocean, propriétaire de la plateforme de forage BP qui a explosé dans le golfe du Mexique. Plus de 300 nouvelles firmes se sont installées en Suisse depuis 2003.

SOLUTION:

Baromètre de la solidarité Envoyez la solution à Solidar Suisse via le talon-réponse ci-joint, sur une carte postale, ou par e-mail à contact@solidar.ch, sujet «sudoku». Toutes les réponses correctes participent au tirage au sort. Prix: 1er prix: un verre «Paprika-Pickles» de la coopérative de femmes Krusha 2e prix: un verre «Ayvar» de la coopérative de femmes Krusha La date limite d’envoi est le 12 décembre 2011. Le nom des gagnant-e-s sera publié dans Solidarité 1/2012. Le concours ne donne lieu à aucune correspondance, ni à aucun recours. Le personnel de Solidar n’a pas le droit d’y participer. Le sudoku du dernier Solidarité était impossible à résoudre, en raison d’un problème technique. Nous adressons toutes nos excuses aux participant-e-s, et vous souhaitons bonne chance pour le présent sudoku.

À la maison, buvez-vous du café issu du commerce équitable? Oui Non, je ne bois pas de café. Non, car Votre employeur propose-t-il, à la cafétéria, du café issu du commerce équitable? Oui Non Ne sais pas Participez à notre sondage en renvoyant le talon-réponse joint au présent numéro de Solidarité. Vous trouverez des arguments pour convaincre votre entreprise d’acheter du café équitable sous: www.solidar.ch/commerceequitable

Offrez une machine à coudre Offrez cette belle carte de Solidar: vous soutiendrez ainsi nos programmes de développement partout dans le monde. Depuis la fin de la guerre civile au Sri Lanka, en 2009, Solidar Suisse soutient les personnes réfugiées qui rentrent chez elles, afin qu’elles puissent reconstruire leur vie: 600 familles reçoivent une contribution financière pour se procurer des moyens d’existence. Les familles peuvent ainsi subvenir à leurs besoins quotidiens, pendant qu’elles mettent sur pied un petit atelier pour s’assurer des revenus à long terme. En achetant une machine à coudre, une famille peut ouvrir un atelier de couture dans son village et, ainsi, assurer sa subsistance. Commandez cette carte-cadeau et d’autres articles, au moyen du formulaire en annexe ou sur www.solidar.ch/cadeau

Utilisation de pesticides au Pakistan: en recourant à des produits interdits en Europe, Syngenta fait peser une grave menace sur la santé des travailleurs et travailleuses.

Quand Glencore pollue des cours d’eau et se rend complice de violences poli­ cières pour acquérir des matières pre­ mières au Congo… Quand Syngenta empoche des bénéfices dans des pays en développement avec des pesticides interdits en Europe et qu’il met en péril la santé des paysan-ne-s… À chaque fois, ces firmes n’assument pas leur responsabilité pour les droits humains et l’environnement. La campagne «Droit sans frontières» entend mettre un terme à tout cela, en exigeant le respect de règles claires pour les entreprises suisses, partout dans le monde. La Suisse, paradis des multinationales La Suisse porte une responsabilité particulière, car elle appartient au peloton de tête. Elle est, par habitant-e, le numéro un en densité de multinationales et le numéro deux en investissements directs à l’étranger. Les cadeaux fiscaux et le droit des actionnaires ne rendent pas

La Suisse doit jouer un rôle pionnier Une alliance de quelque 50 organisations, dont Solidar Suisse, entend changer cette situation. Elle exige, du Conseil fédéral et du Parlement, des règles juridiquement contraignantes afin que les entreprises sises en Suisse soient obligées de respecter les droits humains et l’environnement partout dans le monde. La Suisse a refusé jusqu’ici toute règle contraignante, se limitant au soutien à des initiatives volontaires d’autorégula­ tion. Plus grave encore, le droit suisse

Initiatives insuffisantes La nécessité de mieux réguler les activités des entreprises est reconnue depuis longtemps. Les initiatives visant à endiguer les atteintes aux droits humains se sont multipliées. Toutes ces démarches ont cepenLa Suisse a, jusqu’ici, refusé dant un point faible: elles sont volontaires, et non contraigtoute règle contraignante nantes juridiquement. Il manpour les entreprises. que souvent une instance pour vérifier leur mise en œuvre de manière indépendante. Les actuel empêche de rendre les maisonsviolations ne sont pas sanctionnées et mères responsables des violations comles victimes ne peuvent déposer plainte. mises par leurs filiales. La campagne Les organisations internationales tentent «Droit sans frontières» veut changer cela. d’y remédier. Récemment, l’ONU a adop- Merci de la soutenir: té le cadre de référence élaboré par John Ruggie, son représentant spécial www.droitsansfrontières.ch pour les questions des droits humains. Ce concept comprend trois piliers: 1. Les Etats doivent aussi assurer une protection contre les violations des droits humains commises par des entreprises. 2. Les entreprises doivent respecter les droits humains dans leurs activités. 3. Les victimes de violations des droits humains commises par des entreprises doivent absolument avoir accès à une défense juridique.

DROIT SANS FRONTIÈRES Des règles contraignantes pour les multinationales suisses.


16 RÉSEAU

RATING 17 Vaud: Yannick Noah sou­ tient de jeunes chômeurs Yannick Noah, vainqueur de RolandGarros en 1983, était présent début septembre à Villeneuve, afin de soutenir l’enseigne Cooqpit. Ce programme implique une association (l’OSEO Vaud), le Service vaudois de prévoyance et d’aide sociale, ainsi qu’un privé. Près de 30 jeunes au chômage ou à l’aide so­ ciale ont pu réaliser un apprentissage ou un préapprentissage au sein de l’enseigne Cooqpit. «Si l’on peut aider les jeunes par les temps qui courent, je trouve cela judicieux», a expliqué Yannick Noah à 24 Heures. L’ancien sportif, très engagé sur le plan social, était déjà présent en février 2008, lors de l’inauguration de Cooqpit. www.oseo-vd.ch

AMIE Zurich Les jeunes femmes qui mettent au monde un enfant avant la fin de leur formation professionnelle ont moins de chances sur le marché du travail. On ne leur propose généralement que des postes à temps partiel de bas niveau. Dans les démarches de postulation, elles sont désavantagées par rapport aux femmes sans enfants. Les jeunes mères risquent d’être longtemps dépendantes de l’aide sociale, notamment si elles sont célibataires. Le programme AMIE de Solidar Zurich, qui débute le 1er novembre, intervient dans ces situations. Il prépare indivi­ duellement de jeunes mères entre 16 et 25 ans à accéder au monde du travail, les accompagne dans leur quotidien professionnel et les soutient dans l’aménagement des conditions-cadres nécessaires. AMIE Zurich est un projet novateur, taillé sur mesure pour s’adapter à toute situation, besoin, et compétence particulière des jeunes mères. www.sah-zh.ch

Colloque du réseau OSEO Le vendredi 16 septembre, le réseau OSEO a pris le temps de la réflexion, à Bienne. 400 collègues de l’OSEO, des collaborateurs et collaboratrices de Solidar Suisse, ainsi que plus de 50 personnes externes, ont échangé sur le thème du travail décent. Cet événement était organisé à l’occasion du jubilé des 75 ans. Un exposé de Daniel Lampart a tracé les tendances économiques dominantes des dernières années. L’économiste en chef de l’USS a également donné quelques pistes relatives aux développements futurs de notre économie. Dans un deuxième temps, le Professeur Giuliano Bonoli, de l’IDHEAP, a exposé des études sur les effets des mesures

d’insertion en Suisse et dans le monde. Si toutes les mesures ne sont pas efficaces en terme de retour rapide en emploi, force est de constater que ces programmes ont aussi des effets moins visibles, mais bien réels! Ensuite, Yves Ecœur a évoqué divers enjeux, en lien avec les programmes de l’OSEO, liés à la réinsertion en Suisse. La matinée s’est terminée par un exposé de Christoph Baumann, qui a développé et illustré le thème du travail décent avec des exemples tirés de la pratique de Solidar Suisse. L’après-midi a vu un débat reprendre ces questions et les approfondir. En plus des intervenant-e-s du matin, Ruth Derrer Balladore, de l’Union patronale suisse, et l’entrepreneuse Paola Ghillani se sont jointes aux échanges. La table ronde animée par Ueli Mäder a essayé de contextua­liser et problématiser la question du travail décent. Suite à l’apéritif aimablement offert par la Municipalité de Bienne, la soirée s’est prolongée au Foyer du Centre des Congrès. Les collaborateurs et collaboratrices du réseau OSEO et de Solidar Suisse ont fêté dignement le jubilé des 75 ans. www.oseo.ch

Votre commune est-elle solidaire du Sud?

Solidar Suisse a évalué l’engagement solidaire des communes vis-à-vis des pays du Sud. Analyse des résultats romands. Texte et graphique: Alexandre Mariéthoz Population

CAD

Achats

Total

Genève

191400

43.2

42.0

85.2

Lausanne

134800

36.0

34.1

70.1

Yverdon-les-Bains

27100

39.8

17.0

56.8

Vernier

33000

43.2

13.0

56.2

Carouge

19900

43.0

13.0

56.0

Nyon

19200

22.5

31.5

54.0

Delémont

11600

40.9

11.0

51.9

Bienne

52500

11.0

28.0

39.0

Neuchâtel

33000

33.9

4.5

38.4

Moutier

7600

26.3

7.5

33.8

Fribourg

35200

22.2

10.5

32.7

Le Locle

10100

18.5

11.0

29.5

Montreux

24900

22.3

2.5

24.8

Bulle

18900

8.1

7.5

15.6

La Chaux-de-Fonds

37500

11.0

4.0

15.0

6700

7.3

6.0

13.3

Porrentruy Villars-sur-Glâne

11600

5.4

6.0

11.4

Moyenne suisse

17.6

10.3

27.9

Maximum possible

50.0

50.0

100.0

Le rating Solidar 2009/2010 a examiné dans quelle mesure les communes suisses assument leurs responsabilités sociales, vis-à-vis des pays du Sud, en matière de coopération au développement et d’achats publics équitables. 50 points peuvent être obtenus pour chacun des deux volets de l’évaluation. Coopération: podium genevois En matière de coopération au développement, les communes genevoises obtiennent des résultats exceptionnels.

Les communes romandes s’avèrent, dans l’ensemble, plus généreuses que leurs homologues alémaniques. Achats: plus écolo que socio S’agissant des achats publics équitables, Genève mène le bal. Lausanne, Nyon et Bienne décrochent de très bons résultats. Les autres communes romandes recueillent entre 2,5 et 17 points. Mon­ treux écope de la lanterne rouge. La moyenne des communes suisses est de 10,3 points. La plupart d’entre elles veillent davantage au respect des normes écologiques que sociales. En l’occurrence, il n’existe pas de différence notoire entre Suisses romande et alémanique.

Rating Solidar: résultats des communes romandes

Les trois communes étudiées dans ce canton se classent sur le podium. Genève et Vernier se partagent la médaille d’or, juste devant Carouge. Mention très bien également à Delémont, Yverdonles-Bains et Lausanne, qui obtiennent plus de 35 points. Bienne, La Chaux-de-Fonds, Bulle, Porrentruy et Villars-sur-Glâne se situent en dessous de la moyenne suisse. Les résultats de Bienne et La Chaux-de-Fonds, villes de plus de 35 000 habitant-e-s, sont particulièrement décevants.

Genève championne Au classement général, Genève caracole en tête. Lausanne se situe légèrement en dessous du seuil (75 pts) où une commune assume pleinement ses responsabilités vis-à-vis du Sud. Yverdonles-Bains, Vernier, Carouge, Nyon et Delémont obtiennent plus de 50 points – ce qui constitue un score très honorable. Les résultats de Bulle, La Chaux-deFonds, Porrentruy et Villars-sur-Glâne sont largement insatisfaisants. Ces communes ont toutefois promis d’améliorer leur politique. Le Valais absent En Valais, les trois villes sollicitées (Martigny, Sierre et Sion) ont refusé de participer au rating de Solidar.


18

PORTRAIT 19

À côté de son travail, Celia Quispe s’engage pour de meilleures conditions de vie dans sa commune.

«Tu es une fille» Celia Quispe lutte, avec succès, pour améliorer les conditions de vie dans la commune bolivienne de Malla. Son engagement heurte les conceptions traditionnelles de la communauté aymara. Texte: Martín Perez. Photo: Harold Wolff

«Je me démène pour la commune depuis cinq ans», raconte Celia Quispe Mamani. S’investir pour la communauté fait partie de la culture aymara, qui est celle des habitant-e-s de la commune de Malla, située à huit heures de route de La Paz. En l’absence d’infrastructures sanitaires, scolaires, d’emplois, et de toute sécurité sociale, la commune est obligée de miser sur l’engagement de la population. Cette localité bolivienne peut compter sur des citoyen-ne-s bien informés, qui assistent les autorités communales et les font bénéficier de leurs connaissances, qu’il s’agisse de comprendre une loi, de faire participer activement la population à l’élaboration d’un plan ou d’améliorer l’efficacité de la gestion communale. Formés par Solidar Suisse, beaucoup de ces activistes sont des femmes.

Retour à l’école Comme ils n’y connaissent pas grandMais la tâche n’est pas facile dans un chose, ils perçoivent l’expérience des contexte mal préparé à voir des femmes bénévoles comme une menace. Cette aux commandes. «’’Tu n’es qu’une fille, ici jeune femme a dû lutter contre bien des il faut des gens qui ont de l’expérience, et préjugés pour pouvoir travailler efficacepuis, de toute façon, ce n’est pas l’affaire ment. «Sans formation, je n’y serais ja­ des femmes’’, voilà ce que j’ai entendu mais arrivée», dit-elle avec conviction. lorsque je me suis annoncée», se sou­ «Même si le machisme perdure, nous vient Celia Quispe. Elle a 28 ans et sa scolarité s’est arrêtée à la fin de la 4e «Au début de leur mandat, année. Ses parents avaient les maires ont besoin de décidé que sa place serait à notre soutien.» la maison et aux champs, que seuls ses frères continue­ raient à aller à l’école. Mais ce qui repré- avons marqué des points: nous avons sente pour bien des jeunes filles la fin de acquis un savoir-faire et des connais­ leur carrière scolaire ne pouvait arrêter sances pratiques. Et, surtout, nous partiCelia Quispe. Après avoir consacré son cipons à la gouvernance de la commune. enfance et son adolescence à soutenir J’en suis fière.» sa famille, elle est retournée à l’école, à 18 ans. «En 2004, j’ai fini mon cursus Améliorer le système scolaire dans une école alternative et j’ai fait des Rien d’étonnant donc si Celia Quispe études d’infirmière.» s’est lancée dans un nouveau projet: améliorer les écoles. «Cela signifie que nous devons recueillir des informations Une organisation qui a du succès Contrairement à la tradition, Celia Quispe sur le niveau de chaque école de Malla, a décidé de rester célibataire pour se ainsi que sur la qualité du personnel consacrer à sa formation et se mettre au enseignant, propager l’idée que la popuservice de la population. Avec d’autres lation a son mot à dire et créer un poste femmes, elle a fondé l’association Kantu- au budget de l’administration communale titas. Malgré son jeune âge, Celia a assu- pour l’amélioration de la formation. Grâce mé la responsabilité des contacts institu- à notre initiative, l’école est enfin en voie tionnels: elle a incité un nombre d’acquérir des ordinateurs», se réjouit grandissant de femmes à coopérer et a Celia Quispe. réussi à obtenir le soutien financier des collectivités locales. L’association a pu construire un orphelinat et en assumer la gestion, sous la haute surveillance des Malla en chiffres autorités communales de Malla. La commune de Malla compte 4000 Conseils aux maires âmes vivant dans 19 villages dis­persés «Nous continuons à nous former en persur une surface de 320 kilomètres manence, alors que les autorités commucarrés. Les gens y vivent principalenales changent périodiquement», exment de l’agriculture, du petit commerplique Celia Quispe pour expliquer ce et de l’extraction de l’étain. Le travail l’importance des activistes communauformel est pratiquement inexistant. taires. «Au début de leur mandat, les Beaucoup travaillent à leur compte maires ne savent pas comment gérer les dans les mines, tiennent une échoppe affaires communales. Ils ont besoin de ou cultivent leur lopin de terre. Le revenotre soutien, ce qui ne signifie pas qu’ils nu moyen est de 150 à 200 francs. en soient reconnaissants pour autant.»


Votre entreprise ne propose pas de café équitable? Vous pouvez changer cela: www.solidar.ch/commerceequitable

Madame la directrice, café équitable – contrairement à Notre cafétéria ne propose pas de ve cela regret table. Le café équitabeaucoup d’autres cafétérias. Je trou café ord inaire. Il est tout aussi ble coû te à peine plus cher que du laisse pas un arrière-goût bon, voire mê me me illeur. Et il ne d’e xploitation.

et café sont très souvent maltraités Les cultivateurs et cue illeurs de prè s de 100 millions de personnes exploité s. Dans le sec teur du café, travail des enfants ont mê me été luttent pour survivre. Des cas de prouvés.

nous pouvons contribuer à réparer En consommant du café équitable, à des cue illeurs de café d’ê tre cet te injustice. Et perme ttre ainsi que t pourquoi je serais très heureux payés et traités décemme nt. C’es du café équitable. notre cafétéria propose unique me nt esse, r votre engage me nt, je vous adr En vous remerciant d’avance pou res salutations. Madame la directrice, me s me illeu Jean-Claude Génére ux


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