QUOI DE NEUF CHEZ NOUS ?
DES ATELIERS “MYTHES ET RÉALITÉS” POUR TRAVAILLER LA DIMENSION PSYCHOLOGIQUE DE L’ALIMENTATION EN ONCOLOGIE Emma Belissa, diététicienne-nutritionniste, Bettina Presutti, psychologue clinicienne à la Clinique Saint Jean de Dieu.
La création d’ateliers dédiée à l’alimentation part du constat qu’elle occupe une place particulière en cancérologie. Rappelons que le diagnostic de cancer peut provoquer quelque chose de l’ordre d’un tsunami émotionnel, le sujet va subir un certain nombre de bouleversements (équilibres personnel, familial, professionnel). Beaucoup de choses lui échappent alors, ce qui le laisse démuni, vulnérable, avec des angoisses et l’idée de la mort en première ligne. Tous les repères habituels sont bousculés. Dans cette dynamique, l’individu va tenter de se raccrocher à des éléments qui lui permettront de retrouver une certaine maîtrise de la situation. L’alimentation peut justement être un des éléments sur lequel il ressent un “pouvoir d’agir” sur la maladie. Les patients sont alors en quête d’informations et de conseils autour d’une alimentation saine voire “anti-cancer” (envie de contrôle de l’alimentation). Ils opèrent des changements dans leur alimentation, spontanément et souvent sans accompagnement. Leur état nutritionnel et leur équilibre psychique peuvent en être affectés. On peut ainsi observer des prises de poids ou des pertes de poids, avec un risque de dénutrition par éviction alimentaires, ou par des attitudes de « radicalisation », un rapport anxieux peut également s’installer autour de l’alimentation (phobies alimentaires). En consultation, les patients abordent très souvent la question de l’alimentation et expriment leur besoin d’avoir un espace où les partager et surtout obtenir des réponses précises pour sortir de ce flou anxiogène. Pour répondre à cette demande, la diéteticienne-nutritionniste et la psychologue de la Clinique Saint Jean De Dieu ont mis en place des ateliers pour aider les patients à identifier et comprendre la dimension psychologique à l’oeuvre dans leur rapport à l’alimentation avec le cancer. La co-animation psychologue/diéticienne-nutritionniste permet de travailler en interdisciplinarité, donc sans isoler mais en articulant les aspects alimentaires et psychologiques. Par ailleurs, nous avons choisi de travailler en groupe de patients. Le fait de réunir les patients en ateliers favorise les échanges, le partage et l’entraide entre pairs. Pendant l’atelier « alimentation et cancer : mythes et réalités », nous utilisons des outils pédagogiques (photos d’aliments, post-it, emballages alimentaires) permettant aux participants d’exprimer et d’identifier les aliments source de questionnements et de croyances, mais aussi d’en répérer les retentissements psychologiques et émotionnels.
QUOI DE NEUF CHEZ NOUS ? Les participants expriment leurs difficultés à se positionner face aux informations nombreuses et souvent contradictoires. Ces difficultés ont un retentissement psychologique important. Ils expriment de la culpabilité, de l’anxiété, des sentiments contrastés allant de l’euphorie au contrôle. Les objectifs de ces ateliers sont de les aider à sortir d’un rapport binaire d’une alimentation “bonne ou mauvaise”, à se questionner face aux nombreuses injonctions. Nous cherchons également à leur faire mesurer la dimension psychologique à l’oeuvre dans cette quête du “bien manger”.
« cette quête du bien mangé » Le rôle fondamental de l’alimentation, sa dimension plaisir, ou la convivialité disparaissent pour certains totalement. Un rapport anxieux peut également s’installer autour de l’acte alimentaire. Ainsi, un atelier complémentaire « mon équilibre » est proposé. Les patients sont en attente de compréhension, de l’intérêt des aliments et en recherche de solutions concrètes. Les patients ayant participé se disent “plus sereins”. Le rapport à l’alimentation se trouve détoxifié. Ils retrouvent des moments de plaisirs et de convivialité, subissent moins les injonctions et indiquent trouver des réponses à leurs questionnements. Ils ont acquis une capacité à relativiser l’information et gagnent en réassurance. Certains patients complètent la prise en charge par des suivis en consultation avec la psychologue et/ ou la diététicienne-nutritionniste. Ces ateliers en soins de support sont tout à fait novateurs et d’un intérêt essentiel en oncologie.