HDG magazine Jazz

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Sophie Délitroz HdG

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avril 09

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mensuel

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18fr.

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www.HautdeGamme.com

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Haut de Gamme

ACTU

Festival de Montréal

BIOGRAPHIE

ENTRETIEN avec

Miles Davis

Public Enemy



EDITO

Des racines et des toiles 1

CETTE SEMAINE BIOGRAPHIE DIVA

Des légendes à Montréal 3_4

Miles Davis 5_8 Erykah Badu 9_10 TV on the Radio

PORTAIT

Des images et du son 11_14

DOSSIER SPÉCIAL P.E. Militants engagés Public Enemy 15_ 22 ENTRETIEN avec les ennemis publics de légende

ACTU

Echo de Montpellier Love Trio in Dub feat U-Roy 23_24

DÉCOUVERTE

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SORTIES

Coral Egan Divine destinée 25_26 Jazz à Vitré 27_41


Des racines et des toiles Déjà plus d’un siècle de jazz ! En tout cas si l’on

Edito

s’en tient au premier enregistrement de l’histoire de cette musique ! le 26 février 1917 l’Original Dixieland Jazz Band enregistrait le premier disque de l’histoire

Comment ne pas être saisi par le mouvement de cet-

du jazz. Livery stables blues en était le premier titre

te exposition qui bouge et danse sous nos yeux nous

de ce « disque » et précédait Dixieland jass band One

rappelant aussi à l’évidence esthétique et visuelle du

step . Tout un monde depuis ! Un siècle de jazz et

jazz. Paul Colin et son « Tumulte noir », Winold Reiss,

tant d’évolutions pour cette musique qui sera passée

Man ray, Stuart Davis ou Jackson Pollock témoi-

du ragtime au free jazz en passant par le swing et le

gnent de cet art qui s’inspire de l’urgence à danser.

bop en un claquement de doigt. À la dimension de l’histoire : une micro période. Et dans le même temps l’art aura connu des évolutions aussi rapides qui auront marqué, de Picasso à Basquiat une évolution

Mais cette exposition met aussi en évidence qu’un

dense, fulgurance marquée par autant de moments

lien semble, se déliter progressivement à partir des

de ruptures.

années 70 et des périodes artistiques qui ont suivi les années free. Alors même que cette exposition est vibrante et foisonnante et ce dès les années 20 et

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jusqu’à cette période de « libération free », le temps Porter aujourd’hui un regard sur les liens qui se sont

semble s’accélérer à partir des années 70 (il y a donc

tissés entre le jazz et les autres formes artistiques

près de 40 ans…) et les liens entre les arts et le jazz

durant ce siècle désormais passé, c’est l’idée remar-

de se distendre quelques peu. Quelques pochettes

quable de cette belle exposition qui vient de s’ouvrir

de disques nous montrent que le jazz est toujours

au Quai Branly, haut lieu Parisien s’il en est des arts

présent et quelques artistes continuent de s’y réfé-

premiers et de l’anthropologie. Car le jazz qui est,

rer comme Basquiat, Keith Haring ou Niklaus Troxler

à sa naissance un véritable phénomène de société

et d’autres. Mais la concomitance d’une autre ex-

que, paradoxalement (pour le lieu où elle se tient)

position majeure à Paris consacrée à Andy Warhol

l’exposition éloigne de ses racines africaines sans ja-

est frappante et montre combien la pop a prit un

mais en ignorer l’évident rapprochement, ce jazz-là

relais très fort dans la société pour imprimer une

n’aura cessé tout au long du XXème siècle de s’im-

empreinte forte auprès d’une génération entière,

prégner dans toutes les formes de réflexion artisti-

alors que plus près de nous le hip hop assimilé à cer-

que. En nous faisant voir la réalité du jazz sous cet

taine forme de culture urbaine s’impose aujourd’hui

angle-là, en jetant des ponts évidents entre les jazz

comme le canon esthétique moderne révélateur

et les autres formes d’art (le graphisme en premier

d’une identité sociale. Tout se passe alors comme si

lieu mais aussi la peinture ou le cinéma) cette expo-

l’empreinte du jazz à travers les arts s’estompait peu

sition nous permet d’avoir une vraie profondeur de

à peu. Le petit train du jazz, œuvre contemporaine

regard sur les échanges entre les différents domaines

de David Hammons (Chasing the blue train, 1989)

artistiques au fil de l’histoire. Mais elle alimentera

qui clôt cette exposition doit aussi nous inciter à ré-

aussi certains débats comme celui sur l’influence

fléchir sur le chemin qu’il trace désormais. Plus que

des ruptures historiques sur les différentes formes

jamais la nécessité absolue qu’il a à dialoguer avec

d’expression artistiques. Où ressurgissent les vieilles

les autres sphères des champs artistiques s’impose

questions de l’art comme « reflet » de l’évolution so-

comme vitale. Et cette exposition nous montre avec

ciale, hypothèse que rejette d’ailleurs Daniel Soutif,

acuité que c’est par ce dialogue vivant est toujours

commissaire de l’exposition.

en mouvement qu’il se régénèrera

S.D.



Plusieurs grandes légendes nous feront le cadeau de leur présence à Montréal cette année :

Paul Simon, B.B. King, Brad Mehldau,

récipiendaire du Prix Miles- Davis cette année,

Keita John Pizzarelli Nils PetterMolvaer, Pharoah Sanders, , qui recevra le Prix Antonio Carlos-Jobim 2006, ainsi que

Grande fête gratuite avec trois spectacles Le 29 juin, en ouverture, un Salut à La Nouvelle-Orléans avec les Neville Brothers viendra nous rappeler à nos devoirs de solidarité à l’égard de nos cousins louisianais. Le mardi 4 juillet, le Grand événement General Motors rendra un hommage mémorable à l’auteur-compositeur Paul Simon, qui honore le Festival de sa présence le lendemain à la Place des Arts. La musique délirante de Goran Bregovic et son Orchestre des Mariages et des Enterrements fermera la marche, le dimanche 9 juillet, lors de l’Evénement Alcan. On connaît ici Goran Bregovic Margot, et Underground. Le souci de la qualité a

Le Festival doit sa renommée à la création d’une

également prévalu dans la sélection des artistes qui

formule d’animation urbaine unique au monde

se produiront sur les dix scènes gratuites de notre

qui donne libre accès à des centaines de specta-

site extérieur.

cles, rencontres et activités, en toute gratuité. Tout ceci n’aurait jamais pu être possible sans l’appui

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surtout pour ses musiques de films comme La Reine

Chacun a encore en mémoire la Jam percussion de l’an

des Montréalais, de leur sens de la fête et de leur

passé dont les tours de Montréal résonnent encore !

hospitalité.

L’appui du public Lieu de dépaysement culturel, occasion de fabu-

Rappelons que la totalité des revenus qui sont gé-

leuses découvertes musicales, le site extérieur du

nérés dans les kiosques officiels sur le site – qu’il

Festival, qui comprend entre autres le Parc musical

s’agisse de la Carte des Amis ou des oeuvres de

Alcan, bien connu des tout-petits, et La Petite École

la Galerie, des ventes aux kiosques de boissons,

du Jazz, est le rendez-vous par excellence pour toute

d’aliments ou d’objets promotionnels – est réin-

la famille.

vestie par l’événement à but non lucratif dans la

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promotion du jazz et la présentation de nouveaux talents à découvrir sur les scènes gratuites.


Cette semaine

Des légendes à Montréal

Tony Bennett, Etta James

McCoy Tyner, Sali

, lauréate du prix Ella-Fitzgerald,

Dave Brubeck Ravi Coltrane, Yusef Lateef et

et

, respectivement en ouverture et en clôture du Festival, de même que les

et autres éclaireurs de la note bleue.

Les mots d’Alain Simard directeur du festival Pour accélérer le développement de Montréal, faut-il miser davantage sur la culture et le divertissement ? Il est maintenant bien connu que la personnalité des villes, la richesse de leur vie culturelle, la qualité de leurs attraits touristiques de même que leur rayonnement international sont des avantages stratégiques déterminants pour leur développement social et économique. Depuis qu’on a constaté la forte croissance des voyages de court séjour urbain et découvert les théories de Richard Florida sur l’importance de l’indice bohémien, plusieurs études ont démontré l’importance des grands festivals et du divertissement dans cette lutte que se livrent désormais les grandes agglomérations urbaines pour se démarquer et améliorer leur capacité d’attirer touristes, mais aussi cerveaux et investissements. Lévi Charpentier

John Zorn,


Pourquoi jouer tant de notes

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lors qu’il suffit de jouer les meilleures... Biographie

Miles Davis Des bords du Mississipi, où il est né le 25 mai 1926, Miles Dewey Davis fera très tôt preuve de ce légendaire caractère. Trompettiste autodidacte, il est le plus jeune musicien de l’orchestre de la ville. En 1942, mis au défi de contacter Eddie Randle, alors chef d’orchestre des Blue Devils de Saint-Louis, il n’hésite pas une seconde à se présenter. Après audition, il est engagé. Miles Davis venait de mettre un pied dans l’histoire du jazz.

Dès 1944, et sa carrière durant, Miles Davis tiendra à s’entourer des plus grands. Après la formation de Randle, il intègre celle de Billy Eckstine dans laquelle jouent les musiciens les plus originaux de son époque. Il côtoie Dizzy Gillespie et Charlie Parker. Au lieu d’aller aux cours de l’école Juilliard à New York, Miles passe son temps à traîner dans les clubs de la 52e rue. Il y rencontrera ses futurs partenaires, mais aussi l’alcool, l’héroïne et la débine. Ses années d’apprentissage en disent long sur le futur du jeune homme. Instable, Miles Davis est constamment à la recherche du «nouveau truc» : «The New Thing» comme on l’appellera plus tard. De l’explosion bebop à la naissance du cool, puis de nouveau au radicalisme hard bop, Miles Davis expérimentera tous les styles.


Miles est un éternel Entre 1945 et 1949, le musicien se fait un nom et rencontre Thelonious Monk. Continuellement en mouvement, Miles est toujours là au bon moment. Il

insatisfait

est présent quand le bebop révolutionne une première fois le jazz. Accompagné de «Bird» et de «Dizzy», il enregistre plusieurs classiques du genre. En 1949, quand ceux-ci le quittent pour Los Angeles, il sait tirer parti de sa rencontre avec Gil Evans et accouche de son premier chef d’œuvre : Birth Of The Cool. C’est aussi le moment où Miles commence à imposer sa vision du jazz. A l’opposé des petites formations ou des big bands, alors à la mode, il invente un concept d’orchestre intermédiaire où sont invités mu-

Miles est un éternel insatisfait. La face autodestruc-

siciens blancs et noirs, indifféremment. Grâce à Evans,

trice de son comportement prend le pas sur son exis-

Miles entrevoit des possibilités nouvelles. Viendront

tence. Il connaît des ennuis avec l’alcool et son ad-

les premières tournées-outre-atlantique, Paris et les

diction à l’héroïne devient envahissante. Entre deux

premières heures de gloire internationales.

shoots, il rencontre son futur partenaire : Sonny Rollins, lui aussi accro…

Après avoir effectué son premier enregistrement pour Blue Note, en 1952, il retourne chez son père. Animé de cette volonté inébranlable, il décroche, seul, de la drogue. C’est un Miles purifié, mais toujours aussi exigeant, qui signe les deux grands classiques de hard bop que seront «Walkin’» et «Blue O’ Boogie», avec Sonny Rollins. Il remplace rapidement celui-ci par John Coltrane. La formule fonctionne à

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merveille.


Biographie

Miles Davis

En 1972, c’est dans un chaos de départ (Williams, Shorter)

et

d’arrivée

(Bennie

Maupin,

John

McLaughlin, Harvey Brooks) que Miles Davis entame les sessions qui deviendront légendaires dans l’histoire du jazz. Nom de code : «Bitches Brew». L’époque est à l’»afro-psychédélisme», Miles écoute de plus En 1957, il clôt le triptyque «Miles Ahead», «Porgy

en plus de funk, de rock. Cette soif de nouveauté

and Bess» et «Sketches Of Pain». En 1958, c’est «As-

ne fait pas l’unanimité. Beaucoup d’esthètes arrê-

censeur pour l’échafaud» produit par Marcel Romano,

tent d’acheter ses disques sous prétexte que Miles

puis les premières expériences, avec «Milestones», où

a perdu sa spécificité. Malgré les multiples change-

le musicien s’aventure dans le jazz modal. En 59, il

ments de personnel au sein du groupe, les éclats et

enregistre «Kind of Blue». Cette embellie n’arrange

les exagérations, l’intérêt de Davis pour la musique

en rien son caractère et, en 1960, il insulte deux po-

ne faiblit pas.

liciers, se fait battre comme plâtre et se retrouve au poste. Heureusement, les années 60 arrivent. Autour

En 1972, il écoute Jimi Hendrix, James Brown ou

de Miles, le monde et le jazz changent. Malgré le

Karlheinz Stockhausen. Ses influences donneront

départ de Coltrane, l’artiste est là «au bon endroit,

encore un objet rare : «On The Corner», album qui

au bon moment».

doit autant au funk qu’à l’avant-garde musicale du XXe siècle. Paraissent ensuite «Agharta» et «Pangea» mais à l’heure où sa musique redouble de créativité,

En 1963, sa découverte du batteur Tony Williams et

son corps, rongé par les excès divers, ne suit plus.

du pianiste Herbie Hancok est une révélation ! Miles

Jusqu’à la fin pourtant, Miles Davis sera à l’écoute

va imposer ses règles au free jazz naissant dans l’élan

de l’innovation. Même après quelques «baisses de

du mouvement hippies et des revendications sociales

forme» tels «You’re Under Arrest» ou «Amandla», il

de la communauté afro-américaine. En 1968, fort de

est écouté religieusement par tous ceux qui vénèrent

son nouveau quintet (Wayne Shorter, Hancock, Ron

l’inventivité et l’ouverture dans le domaine musical.

Carter et Williams) auquel il ajoute un guitariste,

Le 28 septembre 1991, il s’éteint et le monde entier

Miles entame ses expérimentations électriques. C’est

perd l’un des plus grands musiciens que le jazz n’ait

l’heure de «Miles in The Sky», «Filles de Kilimanjaro»,

jamais connu.

puis le monument «In A Silent Way» avec le producteur Teo Macero, dans lequel joue, non plus Herbie Hancock mais Chick Corea. Le sextette a également implosé pour devenir un véritable groupe de sept musiciens.


Erykah Badu

Diva

Née Erica Wright à Dallas aux Etats-Unis, Erikah Badu est élevée par sa mère avec son frère et sa soeur. Elle débute sa carrière à l’école en participant à un duo rap féminin sous le pseudonyme de MC Apples. Rentrée à la Louisiana’s Grambling State University, elle prend la décision en 1993 de se consacrer à plein temps à la musique. Elle revient donc à Dallas où elle fait plusieurs petits boulots tout en créant avec son cousin le groupe hip hop Erykah Free. Elle est repérée par Tim Grace du label Legacy Entertainment qui lui obtient les premières parties de A Tribe Called Quest, Method Man et Arrested Development. Elle ouvre également pour D’Angelo en 1995.

Les premiers succès Erikah Badu quitte alors sa ville natale et son cousin pour enregistrer à New York son premier album solo, 9_10

Baduizm. Ce disque sort en 1997 et atteint rapidement les sommets des charts grâce notamment aux singles On & On et Next Lifetime. Elle sort ensuite son deuxième album Live qui se compose de mor-

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ceaux de Baduizm en concert et de nouvelles chansons, I’ll Be The Moon et Tyrone.

La maturité musicale De plus en plus mature musicalement, Erykah Badu livre Mama’s Gun à la fin de l’année 2000, une splen-

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dide mixture de soul et de jazz. Après une parenthèse de trois ans, la diva texane revient en 2003 avec un nouvel opus sous forme de mixtape, Worldwide

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Underground. Il faut attendre 2008 pour qu’Erykah Badu investisse à nouveau les bacs avec un double album intitulé New Amerykah.



Portrait TV on the Radio est un groupe de rock américain à géométrie variable originaire de Brooklyn, à New York, mélangeant rock et soul, avec des influences free jazz, doo-wop, teinté souvent de psychédélisme. Le noyau principal du groupe est composé du chanteur Tunde Adebimpe, du guitariste Kyp Malone et du producteur multi-instrumentaliste David Andrew Sitek.

TV on the Radio.

Un nom encore frais, mais qui résonnera sans

Leur premier album Desperate Youth, Blood Thirsty

doute longtemps dans l’histoire du rock. Ses trois

Babes, paru en 2004, a été un succès critique. Da-

membres originaux ont tissé la base fortement soul

vid Bowie mentionnait à la presse musicale, à l’été

et post rock du groupe. Tunde Adebimpe, chanteur à

2004, que TV on the Radio et Arcade Fire étaient ses

la voix exceptionelle, capable de passer d’un chant

groupes préférés du moment. Il contacte lui-même

de punk rockeur sous acides à de magnifiques en-

le groupe en 2006 pour enregistrer une chanson,

volées soul en moins de temps qu’il n’en faut pour

Province, en leur compagnie.

orthographier correctement son nom. Kyp Malone, guitariste à la barbe de hippie, qui assure aussi les

Cette pièce se retrouvera sur le second album de TV

choeurs éthérés de Tunde. Et David Sitek, producteur

on the Radio. Bowie a récemment comparé les textes

émérite qui travaille aussi pour les Yeah Yeah Yeahs

de TV on the Radio à la poésie américaine, particuliè-

et amoureux farouche de la voix humaine.

rement celle de la génération beat. Ces trois là se rencontrent à la NYU’s Film School Desperate Youth, Blood Thirsty Babes fut précédé de

(une fac de cinéma). Artistes touche-à-tout, ils pra-

Young Liars, un EP contenant Staring at the Sun, qui

tiquent un peu de peinture, de sculpture, mais leur

se retrouva sur le premier album complet du groupe,

coeur ira finalement à la musique. Apparus en 2002

et une reprise doo-wop de Mister Grieves des Pixies.

avec un EP autoproduit, OK Calculator (en référence

Le guitariste des Yeah Yeah Yeahs, Nick Zinner, fait

au OK Computer de Radiohead), ils font suffisament

partie des collaborateurs invités sur Young Liars. En

sensation pour se faire signer sur le label Touch and

2002, TV on the Radio avait imprimé 300 copies d’un

Go et enchaînent sur un autre EP, Young Liars (2003),

autre EP, OK Calculator, un disque dont aucun nou-

un mini-album qui devait servir à tester le nouveau

veau pressage n’a été fait et qu’il est pratiquement

matériel et quelques idées de chansons.

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impossible à retrouver aujourd’hui. Leur première petite merveille de fusion, tissant En 2005, TV on the Radio assure les premières parties de Nine Inch Nails durant la tournée With Teeth et

et la soul apparaît. Suffisament préparés, ils filent en

lance un EP intitulé New Health Rock. Au mois de

studio et en sortent en 2004 avec leur premier album

septembre, ils enregistrent la pièce Dry Drunk Empe-

Desperate Youth, Blood Thirsty Babes, un recueil de

ror, inspirée par les ravages de l’Ouragan Katrina. La

beauté pop, aussi direct qu’éclectique, qui assure

chanson sera offerte sur internet comme un message

leur notoriété. Ils partent en tournée et recueillent

d’encouragement venu de New York pour celles et

les lauriers pour leurs prestations farouches et sur-

ceux touchés par la catastrophe. Dry Drunk Empe-

voltées où s’invite la beat box humaine, tranchées de

ror est aussi une charge indirecte contre le Président

climats trip hop apaisants.

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George W. Bush. Leur deuxième album Return to Cookie Mountain est paru en Europe le 4 juillet 2006 sur le label 4AD (Pixies, Cocteau Twins). David Bowie apparaît sur la HdG

quelque part entre le free jazz, le post-rock, le gospel

chanson Province et Kazu Makino de Blonde Redhead sur Hours.


TV on the Radio

Des images et du son

En 2006, ils reviennent avec Return to Cookie Mountain, un album encore plus peaufiné, et aux pointes encore plus acérées sous les nuages de guitares orageuses, avec un vrai batteur à la place de la boîte à rythme qui, on s’en rend désormais compte, limitait le potentiel du premier album.


Portrait

C’est un chef d’oeuvre. « Province », l’album s’imposera sans doute comme une pierre angulaire du post rock, voire du rock tout court.

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« David et moi étions en train de jouer et de traficoter des sons quand Martin, un pote, a entendu Les concerts qui suivent sont véritablements extati-

ce qu’on faisait. Il nous demande comme ça “Eh,

ques, le groupe maîtrisant ses ambiances et ses com-

les gars, vous vous appelez comment ?”, “Alors les

positions sur le bout des doigts, et s’offrant le luxe

gars, comment vous vous appelez ?”, “C’est quoi

de les manipuler avec grâce. Lorsqu’on demande à

votre nom ?”. On ne le savait pas. Il a marqué une

Tunde pourquoi le groupe s’appelle comme ça, il part

pause de quelques secondes puis nous a dit “Vous

d’un grand éclat de rire :

devriez vous appeler Tv On The Radio”. On a marqué une pause à notre tour puis on a dit “C’est pas mal. Ça marche”. Je ne sais toujours pas pourquoi il nous a dit ça et on en a plus reparlé. De toute façon ça

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change que dalle... on est des hippies. »


TV on the Radio Une tournĂŠe est prĂŠvue en 2009 dont quelques dates en France comme le 17 juillet au Festival des Vieilles Charrues.


DOSSIER S Militants engagés Public Enemy (P.E.) est un groupe de hip hop originaire de Long Island, New York formé en 1982. Ils sont connus pour leurs prises de positions politiques radicales critiquant les médias et en faveur de la communauté afro-américaine. En 1991, le groupe connaît un grand succès avec Issu du collectif de rappeurs et de DJ Spectrum City,

son titre Bring da noise qu’il joue en compagnie du

fondé par Hank Shocklee; le groupe se fait connaître

groupe de thrash metal américain Anthrax, ce qui

en faisant diffuser son premier titre Public Enemy #1

amène aux concerts les publics de deux scènes qui

dans l’émission que Chuck D anime, Super Spectrum

ne se côtoient guère (seuls Run D.M.C. et Aerosmith

Mix Hour sur les ondes de la radio soul WBAU, don-

étaient parvenus à un tel résultat en 1986 avec leur

nant ainsi son nom au groupe.

tube commun Walk this way). Actuellement, Public Enemy assure sa succession en faisant porter le flambeau du Rap Engagé à des rappeurs plus jeunes (musicalement parlant) tels que Dead Prez de New York ou Paris de San Francisco.

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Ce groupe se compose essentiellement de Chuck D et Flavor Flav au chant et de Terminator X aux platines et du groupe de danse S1W.

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Ils sont les pionniers d’un nouveau rap militant et connus aussi pour leur célèbre slogan «Make love, fuck war». Le groupe s’est caractérisé dès ses débuts

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par un son très agressif parfois proche du metal, produit par le Bomb Squad, composé de Hank Shocklee, Keith Shocklee, Eric «Vietnam» Sadler, et Carl Ryder (alias Chuck D), et par des propos très engagés sur la condition de la communauté noire aux Etats-Unis, I

relayant notamment les idées de Louis Farrakhan, le leader de la Nation of Islam. En 1989, Professor Griff aurait eu plusieurs réflexions antisémites. Bien qu’il

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ait ensuite nié avoir tenu de tels propos, Griff est un temps mis à l’écart du groupe. Cet épisode a beaucoup nui à la réputation du groupe.


SPÉCIAL P.E.


DOSSIER SPÉCIAL P.E. Le groupe de hip-hop Public Enemy s’est formé à New York en 1982. Connus pour leurs prises de position politiques radicales, ils enregistrent des brûlots et enflamment les scènes depuis 25 ans... Entretien avec des pionniers du hip-hop. Des icônes. Rencontrés à quelques instants de leur concert parisien, les mythiques Chuck D et Professor Griff sont accompagnés par Archie Shepp, saxophoniste légendaire qui joue avec eux le temps d’une soirée. Humour et émotion, rébellion et subversion, action et révolution au programme d’une interview “Chuck et choc”...

Public Enemy

ENTRETIEN avec les enn Professor Griff : Le futur du hip-hop passe par les

langues nationales. Les gens veulent comprendre ce Chuck D, ça fait 25 ans que vous avez créé Public

qu’ils entendent. Les grands groupes hip-hop du fu-

Enemy. Surpris d’être encore là ?

tur seront multilingues !

Chuck D : C’est bien qu’on soit encore là. Mais pas

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surpris, non… On suit l’héritage de la musique. Et ça permet d’évoluer, de durer… En étudiant la musique,

Que voulez-vous dire à ceux qui disent que le hip-

on peut avoir un aperçu d’où on vient, d’où on va…

hop est mort ?

Le temps, l’histoire, la géographie sont tous très

CD : Il y a plein de réponses à cette question. Quand

importants. Les Etats-Uniens ne sont pas très bons

Nas dit que le hip-hop est mort, de mon point de vue,

pour ça. Surtout les New-Yorkais, qui pensent que le

il veut dire que si les grosses entreprises continuent

monde tourne autour d’eux !

à dire que le hip-hop leur appartient, à prôner une culture mortifère et automutilante… Là, oui, le hip-

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hop est mort ! Ca veut pas dire que ça va s’arrêter, ça Vous ne parlez toujours pas français ?

peut continuer à avancer comme le ferait un zom-

CD : (Rires)… En tant que Public Enemy, on a tou-

bie… Quand on regarde bien, sur Internet ou ailleurs,

jours eu beaucoup de respect pour le reste de la pla-

ce qui se fait, on voit qu’il y a plein de gens qui ont

nète, les autres musiques, les autres cultures… On

envie de faire du hip-hop de façon différente.

n’a jamais été des Etats-Uniens gâtés, qui pensent que le monde entier devrait parler anglais. Les gens

PG : Si on se pose la question de la mort du hip-hop, il faut

s’excusent toujours de mal parler anglais quand on

se demander qui, quoi, quand, où, comment. La question

communique, mais je leur dis que leur anglais est

devrait être : est-ce que le hip-hop peut être ressuscité et

bien meilleur que mon français… La barrière du lan-

qui sera le résurrecteur ? C’est vrai qu’aujourd’hui, il y a

gage existe, et c’est dommage ! Les structures aux

une vraie guerre entre hip-hop et «shit-hop», les merdes

Etats-Unis n’encouragent pas à l’apprentissage des

qu’on entend à la radio… Si tu fais du «real hip-hop»,

langues à l’école. C’est un grand regret pour moi…

l’argent ne peut pas être ton dieu !


emis publics de légende CD : Si on doit prendre la chose de façon réciproque, vous qui êtes la deuxième nation du hip-hop au monde - ce que les Etats-Uniens ne savent pas -, qu’en pensez-vous ? C’est comme le basket aux Jeux olympiques… Les Etats-Uniens roulent des mécaniques en disant qu’ils sont les créateurs du basket, les meilleurs, et à l’arrivée ils se font torcher… Personne ne peut arrêter Tony Parker ! (rires) Pour reparler de la scène hip-hop ici, on a vu les débuts il y a vingt ans. Des gens comme MC Solaar, puis Ideal J… Et aujourd’hui, je trouve une douzaine de magazines hip-hop en kiosque !

Monsieur Archie Shepp, vous fêtez vos 70 ans. Que représente pour vous Public Enemy ?

Vos influences ?

Archie Shepp (en français) : Je suis très heureux de

CD : Un show de Public Enemy, c’est The Roots qui

jouer avec ces gens. Ils portent avec eux l’esprit d’El-

rencontre Rage Against The Machine qui rencontre

lington, de Coltrane. Ils viennent de la rue, ils parlent

Run DMC… C’est un truc unique ! Le blues, le jazz, le

pour les gens de la rue, pour les SDF, pour les RMIs-

rock’n’roll… Tous ces éléments viennent de la créa-

tes, contre le racisme, ils sont mes frères ! Ils luttent

tivité noire. La culture est un truc qui rassemble les

pour la révolution des peuples…

gens, qui abat les différences.


DOSSIER SPÉCIAL P.E.

Public Enemy, des projets de disques avec des musiciens ? CD : Oui, notamment le ‘Tribute to James Brown’, qui 19_20

va sortir bientôt sur le label SlamJamz, distribué par Nocturne en France. C’est important, parce que sans James Brown, il n’y a pas de funk, pas de soul… pas

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de rap ! PG : Personnellement, avec mon autre groupe Seven Octave, on est en studio pour enregistrer

C’est pour vous dire à quel point l’Amérique peut

notre deuxième album ‘God Damage’.

être naze, et qu’il ne faut pas suivre tout ce qu’elle fait ! Regardez, imitez certains trucs si vous voulez, mais ne suivez pas bêtement ! Le point de vue états-

Les événements dans les banlieues en 2005 en

unien, c’est «Attention si vous allez en France ! Ils

France vous ont touchés ?

brûlent des voitures...» Moi, je ne suis pas une voi-

CD : Oui, quand on est venu la dernière fois en Fran-

ture ! (rires)

ce, Time et Newsweek étaient vraiment choqués par les voitures qui brûlaient dans les banlieues. Et ils

PG : En tant que Public Enemy, on voudrait vous de-

blâmaient les Noirs de ne pas retourner en Afrique, le

mander ce que vous pensez de tout ça… On se de-

hip-hop… Alors que les usines ferment, les gens sont

mande vraiment si vous pensez que ce qui vient des

laissés dans la merde depuis deux décennies déjà.

Etats-Unis est ce qu’il y a de mieux !


Quels sont vos rapports avec les médias étatsuniens ? PG : Je n’ai pas de rapport avec les médias. J’en ai uniquement avec ma femme ! (rires) Sérieusement, on est arrivé avec des propos peu orthodoxes et ça n’a pas plu. Je ne m’attends pas à ce que les médias comprennent ce qu’on dit. On n’est pas le genre de groupe à rentrer en studio, à fumer un joint, et à écrire des paroles comme ça… Une interview de Public Enemy est plus instructive que beaucoup de concerts de hip-hop ! CD : La presse aux Etats-Unis est surprise d’apprendre qu’il y a des Noirs en France, et même au Brésil… (rires) PG : Tout est dans le titre ‘MEDIA’ : Multi Ethnic Destruction In America, ou Maniac European Devils In Action…

Que pensez-vous des rappeurs «branchés», des clips où l’on voit de belles filles, de belles voitures, de beaux vêtements ? CD : C’est très facile de dire aux jeunes que ce qui est à l’extérieur est plus important que l’intérieur. Ils sont impressionnables. Mais la société doit aussi construire ce que tu as à l’intérieur, l’estime de soi. L’aspect extérieur vient après. Cette imagerie montre ce qu’il y a à l’extérieur, pas ce qu’il y a dedans. Si on veut être entier, il faut l’extérieur et l’intérieur.


DOSSIER SPÉCIAL P.E.

PG : On vaut plus que ce qu’on porte. La valeur va au-delà de ce qu’on montre. Le hip-hop n’est pas un truc qui se porte. La connaissance de soi est une des disciplines du hip-hop. Cette musique parle aux frères des banlieues d’eux-mêmes, de leur réalité. On a compris pourquoi ils ont brûlé des voitures. On l’a fait aussi… (rires) CD : En fait, les Etats-Uniens sont tombés de très haut. Ils ont beaucoup de mal à comprendre ce qui se passe à l’extérieur de leur pays. Ils sont très loin des réalités mondiales. Quand on leur parle de banlieues («suburbs», ndlr), c’est l’opposé de la France. Chez nous, les banlieues sont riches. Ce sont les centresvilles qui sont pauvres. Au moment des événements chez vous, ils disaient que les banlieusards devraient être heureux, qu’ils étaient plutôt gâtés… (rires) On leur expliquait qu’ils avaient brûlé des milliers de voitures, mais qu’il n’y avait pas eu une seule victime. On va approfondir… 300 ans d’esclavage, c’est la merde. Tout ce qui s’est passé dans les années 1940, en 1965, ou Rodney King, c’est le résultat de l’écoeurement, après 300 ans de viols, de meurtres, d’oppression, d’exploitation… Tout ce que ça a amené est

D’autres sujets de révolte ?

une logique oeil pour oeil, dent pour dent…

CD : Les passeports sont une invention ridicule. C’est

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une façon de distribuer la richesse sur la planète. On a été épatés de voir qu’en France ces révoltes

C’est honteux d’avoir des pays sur cette planète qui

concernaient les machines, pour montrer aux riches

ferment la porte, qui ne veulent plus personne. Ils se

qu’ils aimaient trop les machines… C’est le concept

sont servis de l’Afrique comme d’un frigo : prendre,

de leur matrice, remplacer les êtres humains par des

reprendre, sans jamais remettre… Et à la fin, c’est la

machines ! Les voitures ont plus d’importance que les

faute des Noirs !

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pauvres, en France ! On va donc brûler toutes ces putain de voitures… On va pas vous tuer, on va brûler

PG : Faut bien nous comprendre, on est encore «Pu-

ce que vous aimez le plus… De mon humble point de

blic Enemy», on est pas devenu «Public Friend»… Du-

vue, c’était une façon très sophistiquée de répondre.

rant notre dernière tournée, je n’ai pas pu rentrer en

En utilisant la même mentalité que les multinatio-

Russie soi-disant parce que ne n’avais pas assez de

nales. Brûler les machines qu’ils vénèrent tellement.

pages sur mon passeport… Et c’est le même principe

C’est ironique : les usines qui fabriquent des voitures

aux USA - United Snakes of America ! (rires) La révo-

ferment, et les mecs brûlent ces mêmes voitures…

lution n’est pas éphémère, c’est un processus. Mais

(rires) Pour leur faire comprendre que le vrai truc

si la révolution pacifique n’est pas possible, ça ouvre

c’est l’humanité, les gens…

le chemin à une révolution violente. Et c’est ce qu’ils sont en train de provoquer sans s’en apercevoir…

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C’est inévitable ! Propos recueillis par Rémy Pellissier pour Jazz Mag- Avril 2009



Actu

Echo de Montpellier

Invité du dernier festival de Montpellier Love Trio a donné un concert enivrant. Pas simple d’arpenter un disque de reggae lorsqu’on est plutôt un adepte de la musique électronique, et inversément, pourtant c’est ce qu’ont réussit à faire les Love Trio. Ce groupe est signé sur Nublu, un club new-yorkais transformé en label et qui a vu passer N’Dea Davenport, Norah Jones, Kudu. Trois musiciens donc, Ilhan Ersahin (Wax Poetic) au clavier et saxophone, le bassiste Jesse Murphy (Brazilian Girls) et le batteur Kenny Wollese (Tom Wait). Pour cette expérience unique, il fallait un reggaeman expert en la matière, U-Roy (Thievery Corporation), l’inventeur du reggae moderne dixit

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mon confrère Raging Bull.

«Love trio in Dub» (Nublu Records / Discograph) n’a pas spécialement pour vocation de créer un nouveau sous-genre de reggae dub mais d’explorer des voies

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encore inconnues mais pas inaccessibles pour autant. Le fait que tout soit joué avec des down-tempos po-

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sés rend la digestion beaucoup plus facile et agréable, comme une sieste dans un hamac sur une plage blanche lissée par une eau transparente caraïbéenne. Les roots ne sont jamais loin. Et lorsqu’il s’agit de mélanger dub et style gothique, cela donne l’instrumenI

tal «Goth Dub» et c’est... comment dire... intéressant ! Les titres, contenant deux versions rejouées («Flight In Dub» et «Lovers Rock»), n’en restera certainement

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pas comme un banal coup d’essai de ménage à trois (quatre même), plutôt une approche visionnaire de ce que sera, pourquoi pas, le reggae de demain.


Love Trio in Dub feat

U-Roy

Love Trio In Dub featuring U-Roy est à la fois un retour au temps béni du reggae et du dub, et, une fenêtre ouverte sur les évolutions présentes et futures de ces genres. U-Roy continue de solidifier ses

De superbes invitées, (Sabina Sciubba et Marla Tur-

statuts de légende et fondateur du reggae.

ner, respectivement chanteuses de Brazilian Girls et Wax Poetic) viennent apporter leur touche à cet

A la rencontre de Love Trio (les «Nublu downtown-

excellent mash-up de dub et d’electronica. Jouez la

tronica boys»), il apparaît comme jamais auparavant.

chanson «Lovers Rock» pendant une minute et on se

Love Trio In Dub featuring U-Roy est, sans aucun

croit écouter un de ces fabuleux 45 tours jamaïcains

doute, un live destiné aussi bien aux amateurs de

des années 70, mais on réalise bientôt que c’est bien

dub et reggae, qu’aux fans de Thievry Corporation ou

de 2009...

Matthew Herbert.


Découverte

Divine destinée

Coral Egan

Depuis la sortie de son premier album solo, My Favorite Distraction, Coral Egan est perçue par plusieurs critiques de musique comme la nouvelle coqueluche féminine du jazz canadien.

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Entretien avec une amoureuse de la vie.


Mots de Sagesse Lancé l’hiver dernier et travaillé de manière instinctive, My Favorite Distraction se révèle un enregistrement tout à fait personnel; il colle parfaitement à la peau de la chanteuse jazz. C’est donc sans étonnement qu’on découvre l’influence de Joni Mitchell dans sa facture. «Je n’aime pas employer le mot idole... Je suis une grande fan de Joni Mitchell. Je l’ai écoutée durant toute mon Le téléphone s’anime. Au bout du fil, la voix douce et

adolescence.» Six mois de recherche ont été nécessaires

joyeuse de Coral Egan lance un bonjour incertain, un

avant l’entrée en studio. Lors de cette première aventure

peu comme si elle avait l’impression de s’adresser à la

en solitaire, Coral Egan a été accompagnée par le réali-

mauvaise personne. Rapidement, elle explique qu’elle

sateur Charles Papasoff, qui a su tirer le meilleur d’elle-

se trouve à l’aéroport; elle attend de prendre son vol

même grâce à sa grande ouverture d’esprit. Remy Malo

pour les Îles-de-la-Madeleine, où elle chantera. Le

(basse), Gilbert Fredette (batterie) et Guy Kaye (guitare),

périple s’annonce agréable. Depuis les dernières se-

d’excellents musiciens de la région de Montréal, ont

maines, le quotidien de l’artiste à la chevelure d’or

complété l’équipe. La conception de cet opus a demandé

prend l’allure d’un véritable carnet de voyages. Elle

beaucoup d’énergie à la chanteuse. Elle avoue malgré

a d’abord parcouru l’Ouest canadien afin de partici-

tout avoir apprécié chaque moment. Une révélation.

per à une série d’événements de jazz, puis elle s’est

«C’est là que j’ai su que j’étais faite pour ça!»

produite au Festival de jazz de Montréal en juillet dernier. Les spectacles continuent de se multiplier.

Contrairement à une flopée d’autres artistes, Coral

Son premier album solo, My Favorite Distraction, très

Egan développe sa carrière musicale en visant la dura-

bien accueilli au Québec, fait son œuvre.

bilité. Plutôt sage dans ses décisions, elle évite les pièges du succès instantané. Elle se garde de chanter des

Coral rayonne.

pièces qui ne lui plaisent pas ou de se perdre dans des rythmes qui ne lui conviennent pas. Elle reste toujours fidèle à elle-même, ce qui du coup l’empêche de sentir

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la pression venant de l’extérieur. Si elle flirte actuelleÉlevée dans un milieu où la culture musicale a tou-

ment avec le jazz, l’inconditionnelle de Stevie Wonder

jours occupé une place prépondérante, la fille de Ka-

soulève la possibilité d’explorer un jour d’autres so-

ren Young a glissé un peu malgré elle dans le monde

norités. «Maintenant, le jazz est le genre de musique

artistique. Elle se souvient par ailleurs d’une photo

qui m’intéresse le plus. Mais, je ne me limite pas. J’ai

de l’album familial où elle tient un microphone alors

une vision à long terme. Ce n’est pas le premier album

qu’elle ne sait même pas encore marcher, et aussi de

de Joni Mitchell qui a déterminé sa carrière.» Elle ne

sa première composition, écrite vers l’âge de 14 ans.

cache pas non plus les différents courants musicaux

«Mais je ne me suis jamais dit: «c’est ça que je vais

sur lesquels s’appuie sa personnalité musicale: le soul,

faire !»» Coral Egan a tantôt souhaité être surfeuse,

la pop, la musique du monde.

tantôt massothérapeute, des métiers qui s’éloignent étrangement du dodo-métro-boulot. Petite épicu-

En fait, le principal objectif de l’énergique jeune

rienne, la jeune femme souffre en fait d’une allergie

femme repose dans le fait de créer son propre style.

à la routine. «Tous mes rêves tournent autour de cho-

Elle aspire à ce que les gens reconnaissent ses com-

ses qui sont l’fun !» rigole-t-elle. Cela explique sans

positions en entendant simplement quelques notes.

doute sa courte «carrière de compétition» comme

Un noble labeur qui peut prendre bon nombre d’an-

joueuse de volley-ball de plage. Une passion qu’elle

nées. «Je n’éprouve pas le besoin de prouver quelque

a dû abandonner pour se consacrer à la chanson, où

chose. Je vise la qualité. Ce n’est pas là où je me

elle a vraiment l’impression d’être chez elle.

rends qui est important, mais bien comment je m’y rends», affirme-t-elle avec assurance. «Mes états personnels sont plus importants que l’argent !»

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Quelques mots sont prononcés à propos des voyages. Coral semble avoir la tête ailleurs. Drôle de coïncidence, elle m’annonce qu’elle doit partir, que l’avion

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va bientôt décoller. Au revoir et bon voyage...


Sorties

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Brian Blade


Jazz

à Vitré

FredGuesnier


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Florin Niculescu


Sorties Jazz à Vitré

Ricky

Ford


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Martial

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Solal


Jazz à Vitré

Richard Galliano


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Sorties

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Dimitri

Naiditch


Jazz à Vitré

Wayne

Shorter


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Renaud

Garcia Fon

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s Danilo Perez

Sorties

Jazz à Vitré


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Eric Truffaz

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Léon

Sorties

Parker

Jazz à Vitré


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Trio Mira


DD Bridgewater

Sorties

Jazz à Vitré


Sorties

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Jazz à Vitré

Esperanza

Spalding


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