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CARNET D’ARCHI Philippe Dubreuil le magicien des jardins
Philippe Dubreuil L’AMI DES JARDINS
Cela fait plus de vingt ans qu’il arpente le monde. Passé maître dans l’art de restaurer les jardins historiques, cet architecte paysagiste épaule propriétaires et jardiniers, de la conception à la livraison.
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PAR CAROLINE MORBOIS MESNIL.
Ce jardin dans la palmeraie de Marrakech est l’un de ses premiers projets. Avant son intervention, il n’y avait ici que de la terre et du sable. Beaucoup de palmiers et d’oliviers ont été plantés, et une piscine en ardoise et zelliges noirs a été intégrée à la jolie ruine existante.
SES VÉGÉTAUX PRÉFÉRÉS
« HOSTA SIEBOLDIANA ‘ELEGANS’ »
PIVOINE HERBACÉE FOUGÈRE « ATHYRIUM NIPONICUM ‘PICTUM’ »
CORNOUILLER « CORNUS FLORIDA ‘CHEROKEE CHIEF’ »
« J’ai un faible pour les fl oraisons éphémères, souvent plus spectaculaires »
ARCHITECTURÉ
Composé d’Osmanthus burkwoodii, de Magnolia soulangeana (ici en fl eur), de Muhlenbergia capillaris et d’ifs d’Irlande panachés, ce jardin privé du centre de la Bretagne a nécessité dix ans d’intervention pour retrouver sa superbe.
CE QUI L’INSPIRE
Le jardin japonais de The Huntington Library, à San Marino en Californie, un espace clos où l’âme vagabonde.
Je suis un jardiniste, un mélange entre le jardinier et l’artiste, raconte Philippe Dubreuil en empruntant le terme au XVIIIe siècle, c’està-dire celui qui aime dessiner des jardins et ensuite les planter et pas seulement celui qui orchestre. » Connu comme le loup blanc dans l’univers des paysagistes, sa biographie impressionne. On y lit, entre autres, une licence d’histoire de l’art, un diplôme de la Société royale d’horticulture (RHS), en Angleterre, un troisième cycle en restauration et conservation des parcs historiques et paysages à l’Architectural Association de Londres, l’insigne de chevalier de l’Ordre du Mérite agricole, et bon nombre de projets d’envergure autour du globe depuis la restauration de jardins pour des hôtels particuliers parisiens (couvent des Dominicains, atelier de Géricault) jusqu’à un village au Gabon ou encore la transformation de quelques hectares dans ...
La Villa Getty à Pacifi c Palisades (Los Angeles), pour son lien impeccable et impressionnant entre architecture et jardin.
L’œuvre de Mark Rothko, sa vibration entre couleurs et lumière.
La « Samuel- Novarro House » de Frank Lloyd Wright (1928) à Los Angeles pour son intégration dans la nature. Philippe Dubreuil contre le mur de son potager, dans ses jardins du Montperthuis dans le Perche, attenants à son manoir de la Pillardière.
© Philippe Dubreuil
NOURRICIER
1. Vue du fructueux potager de 800 m2 des jardins du Montperthuis, où poussent des légumes anciens… Philippe l’a dessiné de façon classique, avec des allées longées de buis et des murets d’1,20 m pour garder la chaleur le soir.
HARMONIEUX
2. Assortis à la toiture du manoir de la Pillardière (XVe siècle), les magnolias ‘Susan’, aux fl eurs pourpre violacé, sont plantés en cépées, de part et d’autre de l’entrée du bureau de Philippe. Ils lui rappellent ceux des élégants jardins du Palais Royal.
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« Comme une maison, le jardin est formé de pièces. On retrouve les notions d’espaces, de proportions, de couleurs »
MONTPERTHUIS, À VUE D’OISEAU PARC DE L’ABRÈGEMENT, CHÂTEAU XVIIIE EN CHARENTE
JARDINS DU MONTPERTHUIS
ENTRÉE DE MONTPERTHUIS (CRAYON À PAPIER) PLANS ET CROQUIS
« Je dessine l’hiver quand tout est calme. Dans l’idéal, il me faut un mois pour esquisser un projet. Quand je commence, j’aime imaginer ce qui se passe près de la maison, ce que l’on voit depuis les fenêtres, puis partir de façon très douce sur la campagne et quelque chose de plus sauvage. Je dois d’abord trouver la colonne vertébrale, le grand axe. À Montperthuis, ce sont les ormes, qui mènent aux terrasses et au bassin central. Je trace les grandes lignes, puis je détaille, c’est la partie la plus compliquée. Ici, je savais que je voulais une allée, un potager et une collection de roses, de pivoines et de cerisiers japonais, mon arbre fétiche, pour les couleurs et les parfums. J’aime partir d’une pâture et imprimer ma vision en plantant pour arriver à une oasis de verdure ! » le désert marocain ! Point commun à ces projets variés : Philippe Dubreuil fait dialoguer jardin et architecture. « Il y a un vrai échange entre l’histoire du lieu, le paysage et la botanique, les plantes qui vont s’adapter au terrain, au vent, à l’ensoleillement. Comme une maison, le jardin est un ensemble de pièces qui révèle la personnalité de ceux qui y vivent. On retrouve des chambres, des couloirs, des passages… Les notions d’espaces, de proportions, de couleurs sont primordiales. » Sa méthode ? Flâner, parcourir, arpenter la nature pour la comprendre. Son conseil ? Commencer par rénover le jardin avant la maison pour laisser le temps au paysage de se constituer. « Le jardin m’a appris deux choses : l’humilité et la patience. Mais ce qui est extraordinaire quand on commence à planter c’est que, très vite, un monde se développe, libellules, oiseaux… il y a une vie qui s’organise et qui est merveilleuse ! » ■
PHILIPPE DUBREUIL, JARDINISTE 9, place Saint-Augustin, 75008 Paris. Tél. : 06 85 30 30 81. philippe-dubreuil.com Les jardins du Montperthuis Manoir de la Pillardière, 61360 Chemilly. Jardins ouverts tout l’été les vendredis et week-ends de 14 h à 18 h. lesjardinsdumontperthuis.com