Newsletter Prévention et promotion de la santé Septembre 2011
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Santé et culture 2
Année importante pour la prévention du tabagisme
La loi fédérale sur la prévention du tabagisme est entrée en vigueur le 1er mai 2010 – marquant ainsi une étape importante dans la prévention du tabagisme. Finalisée fin 2010, la nouvelle campagne SmokeFree a pu être lancée en janvier 2011. Des mesures telles qu’une nouvelle augmentation de l’impôt sur le tabac et l’introduction d’illustrations repoussantes sur les paquets de cigarettes ont fait progresser la lutte contre la fumée. Tous ces sujets sont traités dans le rapport annuel 2010 du Programme national tabac 2008–2012, dont spectra donne un résumé.
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Niccel et Emil Steinberger
Emil Steinberger est une légende vivante. A 78 ans, il parcourt infatigablement la Suisse et l’Allemagne avec ses lectures humoristiques, accompagnée de son épouse Niccel Steinberger, elle aussi professionnelle de l’humour. Agée de 45 ans, cette spécialiste dirige des séminaires du rire et écrit des ouvrages sur le sujet. Que pensent nos deux interlocuteurs de l’influence de l’art et de l’humour sur la santé? Dans l’entretien accordé à spectra, ils nous racontent leur joie de travailler, leurs sources personnelles de nourriture spirituelle, l’établissement d’une culture du rire en entreprise et leur position à l’égard des drogues légales et illégales.
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Charte Intervention Précoce
Le point 2 de la Charte d’Olten sur l’Intervention Précoce auprès d’enfants et d’adolescent-e-s en situation de vulnérabilité stipule que l’Intervention Précoce reconnaît le droit des enfants à la différence et au refus. La Charte a été signée par plus de 200 professionnel-le-s de Suisse alémanique qui s’étaient réuni-e-s le 16 juin 2011. Elle fixe, en neuf points, l’attitude sur la base de laquelle, du point de vue des professionnels, doit avoir lieu la mise en œuvre de l’Intervention Précoce.
Une année riche en événements pour la prévention du tabagisme Programme national tabac 2008– 2012 (PNT 2008–2012): rapport annuel 2010. La prévention du tabagisme en Suisse a connu de nombreuses nouveautés en 2010. Un des principaux jalons a été la loi fédérale sur la protection contre le tabagisme passif, entrée en vigueur le 1er mai 2010. Toute une série d’autres mesures ont également été mises en œuvre à différents niveaux. Le présent article donne un aperçu des principales nouveautés. Le 1er mai 2010, la loi fédérale sur la protection contre le tabagisme passif est entrée en vigueur. Depuis ce jour, il est interdit de fumer dans les espaces fermés accessibles au public ou qui servent de lieu de travail à plusieurs personnes. La nouvelle loi est un bénéfice important pour la santé et contribue de manière essentielle à se rapprocher de l’objectif prioritaire 3 du Programme national tabac 2008–2012 (PNT 2008–2012) visant à réduire l’exposition de la population au tabagisme passif. En novembre 2010, une enquête en ligne a été menée sur les premières expériences et les problèmes rencontrés lors de la mise en œuvre de la loi fédérale. Les résultats seront publiés en 2011. Mais on sait que l’exposition au tabagisme passif avait déjà diminué dans plusieurs cantons en 2009 – c’est-à-dire avant l’introduction de la loi fédérale. Cette baisse est due au fait que de nombreux cantons avaient déjà introduit une réglementation cantonale dans le domaine du tabagisme passif. La loi fédérale fixe des exigences minimales valables à l’échelle nationale et permet aux cantons d’édicter des dispositions plus strictes pour la protection de la santé. Quinze cantons ont fait usage de cette possibilité.
Lancement de la campagne SmokeFree La Section Campagnes a travaillé l’an passé, de concert avec la Section Tabac et l’agence Wirz Werbung SA, sur la nouvelle campagne présentée au public le 10 janvier 2011. S’appuyant sur les connaissances scientifiques actuelles, l’évaluation des campagnes antérieures et les objectifs du PNT 2008–2012, l’Office fédéral de la santé publique (OFSP)
Objectifs prioritaires du Programme national tabac à atteindre d’ici fin 2012 1. L a proportion de fumeurs dans la population résidante en Suisse diminue de 20% et passe de 29% (en 2007) à environ 23%. 2. L a proportion de fumeurs parmi les 14-19 ans diminue de 20% et passe de 24% (en 2007) à moins de 20%. 3. L a proportion de personnes qui sont exposées à la fumée des autres (tabagisme passif) pendant sept heures ou plus par semaine diminue de 80% et passe de 27% (en 2006) à environ 5%.
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a décidé de développer une nouvelle approche qui thématise de manière positive les avantages et le plaisir de ne pas fumer. Financée par le Fonds de prévention du tabagisme, la campagne sera évaluée en 2011 et les résultats seront présentés au nouveau groupe d’accompagnement Communication PNT (voir alinéa suivant). Le site Internet www. smokefree.ch représente le cœur de cette campagne multimédia. Il sert d’interface de liaison, pour les programmes/ projets dans le domaine de la prévention comportementale, des partenaires de l’OFSP, comme la ligne stop-tabac proéminente dans la communication.
Un message – plusieurs voix 2010 a vu la création du Groupe d’accompagnement Communication PNT (GA PNT). Ce groupe a pour vocation d’entretenir les relations et les échanges entre les partenaires de la prévention en ce sujet peut être consultée sur le site matière de communication. En plus des scénarios possibles sont élaborés en Internet de l’OFSP. habituelles rétrospectives et perspecvue d’une optimisation. tives, les membres ont traité, l’année – Lancement du Monitorage national – Réorganisation à l’OFSP: en 2010, des dépendances: le Monitorage sur dernière, de la protection contre le tabal’ancienne Section Alcool et tabac a le tabac Suisse a été inclus, fin 2010, gisme passif et de la campagne Smokeété divisée en deux sections disdans le nouveau Monitorage national Free. Suivant l’idée directrice «One goal tinctes pour des raisons d’organisades dépendances. A partir de 2011, – many voices», («Un message – plution. Madame Joëlle Pitteloud est la les données sur la consommation de sieurs voix») les partenaires sont un élénouvelle responsable de la Section tabac proviendront du Monitorage ment indispensable de ce projet natioTabac. national des dépendances. L’objectif nal sur plusieurs années; l’échange et la est de réunir, dans un seul projet, les 2010 a été riche en événements et en cohésion en sont un facteur de succès données sur tous les types de dépenessentiel. Les membres fixes du GA PNT nouveautés. Pourtant, les objectifs du dances (y compris les dépendances sont l’OFSP, la Ligue pulmonaire suisse, PNT 2008–2012 ne sont pas encore atnon liées à des substances, comme la Ligue suisse contre le cancer, la Comteints. Par exemple, 15% des 14–65 ans Internet), afin de pouvoir les compamission fédérale pour la prévention du sont toujours exposés au tabagisme pasrer. tabagisme (CFPT), la Conférence suisse sif au moins sept heures par semaine. des directrices et directeurs cantonaux – Direction stratégique sous la loupe: Mais l’engagement dont font preuve la direction stratégique du PNT de la santé (CDS), l’Association suisse tous les acteurs permet d’espérer que 2008–2012 a procédé à une évaluapour la prévention du tabagisme (AT les objectifs sont à portée de main. tion de son fonctionnement, de son Suisse), RADIX et Addiction Info Suisse. Contact: Joëlle Pitteloud, rôle et des relations entre les difféAutres nouveautés responsable Section Tabac, rentes parties prenantes. Les résulLa nouvelle loi fédérale sur la protection joelle.pitteloud@bag.admin.ch tats sont en cours d’analyse et des contre le tabagisme passif, la nouvelle campagne et le Groupe d’accompagnement Communication PNT ont été accompagnés d’une série d’autres nouveautés dans le domaine de la prévention Minisérie du tabagisme: Les programmes nationaux de prévention – Illustrations impressionnantes et ligne stop-tabac: depuis le 1er janvier Quid de la prévention du tabagisme, de l’alcoolisme, des dépendances, du VIH et 2010, des mises en garde ont été 3complétées par des illustrations sur autres IST? Quoi de neuf dans l’alimentation et l’activité physique? spectra présentera dans ses cinq prochaines éditions un bilan intermédiaire des quatre grands tous les paquets de cigarettes ou de programmes nationaux de prévention conduits par l’Office fédéral de la santé tout autre produit du tabac. De plus, publique: le numéro de la ligne stop-tabac figure sur chaque emballage. spectra 88 – septembre 2011 – Augmentation de 20 centimes de Programme national Tabac, 2008–2012 l’impôt sur le tabac: avec effet au 1er janvier 2011, le Conseil fédéral a spectra 89 – novembre 2011 augmenté l’impôt sur les cigarettes Programme national alimentation et activité physique, 2008–2012 de 20 centimes par paquet. Les augmentations d’impôt sur le tabac font spectra 90 – janvier 2012 partie des instruments de prévention Programme national Alcool, 2008–2012 les plus efficaces. – Information sur les cigarettes élecspectra 91 – mars 2012 troniques sans nicotine: les e-cigaTroisième programme de mesures en vue de réduire les problèmes de drogue (Prorettes sans nicotine sont considérées MeDro III), 2007–2011 comme des objets usuels et ne tombent donc pas sous le coup de la spectra 92 – mai 2012 loi fédérale sur la protection contre le tabagisme passif. La Lettre d’infor- Programme national VIH et IST, 2011–2017 mation actualisée n° 146, traitant de
Bonnes notes sur les détails – réserve sur le fonds Mise en œuvre du Pacte I de l’ONU. En ratifiant le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (Pacte I de l’ONU), la Suisse s’est engagée à assurer progressivement le plein exercice de ces droits. Elle le fait principalement en fixant des objectifs sociaux dans la Constitution fédérale et en prenant des mesures précises, législatives ou autres. Une attitude trop peu intransigeante pour l’ONU. Les deux Pactes de l’ONU relatifs aux droits économiques, sociaux et culturels (Pacte I) et aux droits civils et politiques (Pacte II) concrétisent la mise en œuvre de presque tous les droits humains. La Suisse a adhéré au Pacte I de l’ONU en 1992. Par sa ratification du document, la Suisse s’est engagée à assurer progressivement et sans discrimination aucune le plein exercice des droits suivants: le droit au travail, le droit à des conditions de travail justes et favorables, le droit d’organisation syndicale, le droit à la sécurité sociale, la protection de la famille, des mères et des enfants, le droit à un niveau de vie suffisant, le droit à la santé, le droit à l’éducation et le droit à la vie culturelle. En tant qu’état-du Pacte, la Suisse livre régulièrement des rapports à l’ONU sur les progrès de la mise en œuvre. Le dernier en date (2008) décrit sur 160 pages, les changements et l’évolution de la situation juridique concernant les dispositions du Pacte I de l’ONU depuis le précédent rapport de 1996.
Buts sociaux dans la Constitution fédérale En la matière, l’article 41 de la Constitution fédérale de 1999 dans sa nouvelle version revêt une importance particulière. Cet article contient en effet un catalogue de buts sociaux dans six champs fondamentaux de la politique sociale: sécurité sociale, santé, travail, logement, éducation et jeunesse. Ces six buts sont étroitement liés à ceux du Pacte I de l’ONU. Par l’ancrage de ces buts sociaux dans la Constitution fédérale, la Suisse souligne l’importance de la dimension sociale de la communauté et revendique au niveau constitutionnel le principe de l’Etat social. L’article 41 contient des objectifs programmatiques pour l’Etat. En tant que tel, le catalogue social est une norme juridique dont la force contraignante est celle accordée à la Constitution. Comparée aux règles concernant les droits fondamentaux et les tâches de la Constitution, sa portée demeure toutefois limitée. D’ailleurs, l’article ne fixe pas les moyens à utiliser pour atteindre les objectifs. Il appartient au législateur de déterminer les moyens qui lui semblent appropriés pour atteindre les objectifs. Il incombe également au législateur de prévoir, éventuellement au niveau légal, les droits des individus à des prestations.
Le droit à la santé Le Pacte I de l’ONU (article 12) concrétise le droit à la santé par ces mots: «Le droit qu’a toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mentale qu’elle soit capable d’atteindre». Les Etats membres du Pacte s’engagent à prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer le plein exercice de ce droit. Ils s’engagent donc à pratiquer une politique de santé active afin de préserver la santé de chacune et de chacun ou de la rétablir dans la mesure du possible. En Suisse, l’objectif de santé stipulé par l’article 41 prévoit que la Confédération et les cantons s’engagent à ce que toute personne bénéficie des soins nécessaires à sa santé. L’interdiction de discrimination, également ancrée dans la Constitution fédérale, renforce l’exigence contenue d’égalité des chances devant l’accès aux soins médicaux. Au sens de cet article et au sens du droit à la santé prévu dans le Pacte I de l’ONU, la Suisse a déjà lancé sur un large front des mesures législatives ou autres. En matière de prévention et de promotion de la santé, les stratégies nationales jouent un rôle important dans les secteurs de l’alimentation et de l’activité physique, du tabac, de l’alcool et du VIH et d’autres infections sexuellement transmissibles. Au niveau de l’égalité des chances devant la santé, la stratégie nationale Migration et santé mérite d’être citée. Elle contient notamment l’encouragement de compétences interculturelles et d’offres de santé et de prévention axées sur les besoins spécifiques des personnes issues de la migration. Dans son rapport, la Suisse documente notamment ses progrès dans la mise en œuvre du Pacte I de l’ONU en matière de santé générale de la population, de la situation des groupes vulnérables (p. ex. la violence faite aux enfants ou aux femmes, la situation des personnes âgées issues de la migration) et du système de santé suisse (p. ex. les coûts, la prise en charge des services de santé et la prévention).
Peu de critique dans le détail Au mois de novembre dernier, le Comité de l’ONU compétent a pris position sur le rapport de la Suisse et formulé des recommandations pour poursuivre la mise en œuvre du Pacte I de l’ONU. En matière de droit à la santé, le Comité a exprimé ses préoccupations uniquement sur deux points: l’incidence élevée des suicides et l’insuffisance de l’éducation sexuelle dispensée. Avec trois à quatre suicides par jour, le taux en Suisse est toujours très élevé en comparaison internationale. Les victimes sont souvent des jeunes, mais l’augmentation du nombre de suicides est remarquable chez les personnes âgées de plus de 80 ans. Le Comité de l’ONU recommande à la Suisse d‘élaborer un plan d’action national de prévention du suicide et de prendre des mesures restreignant l’accès aux armes à feu conservées dans les foyers pour les
En première ligne
Lorsque l’on tape « santé et culture » dans Internet, les premières réponses fournies par Google concernent surtout des offres de bien-être et des voyages intervilles – sans doute liées à la saison d’été. Plus loin, les réponses abordent le thème de la migration et de la santé. Il est question de défis qui se posent dans le contact entre le personnel soignant et médical et les patient-e-s, en raison de la pluralité de valeurs dictées par des convictions culturelles, La seconde critique émise par le religieuses et idéologiques différentes ou Comité de l’ONU concernait l’éducation de la diversité linguistique. Pour répondre sexuelle et les mesures visant à promou- à cette situation, l’ouverture culturelle et voir la santé sexuelle et génésique. Le des connaissances de base des cultures Comité recommande à la Suisse d’adop- étrangères ont été intégrées dans la forter des programmes concrets d’éduca- mation initiale du personnel médical et tion sexuelle et de promotion de la santé soignant, au même titre que le savoir médisexuelle et génésique, y compris dans le cal au sens strict ou les connaissances en matière d’éthique, d’économie et de droit cadre scolaire. médical.
besoins du service militaire. La Suisse a agendé, en 2000 déjà, l’amélioration de la santé mentale comme thème important de politique de la santé. Les programmes d’action de repérage précoce et d’optimisation du traitement des dépressions ainsi que des alliances contre la dépression dans divers cantons sont, par exemple, nés de cette réflexion.
Incompréhension pour l’attitude de la Suisse L’une des principales préoccupations de l’ONU porte toutefois sur une question de principe: le Comité regrette la position de la Suisse selon laquelle la plupart des dispositions du Pacte constituent de simples objectifs programmatiques et des buts sociaux, et non des obligations juridiques. Ceci a pour conséquence que certaines dispositions du Pacte ne peuvent prendre effet en droit interne ni ne peuvent être directement invoquées devant les juridictions internes de la Suisse. Le Comité recommande à la Suisse de prendre des mesures pour que le Gouvernement fédéral et les cantons conviennent de textes législatifs détaillés donnant effet à tous les droits économiques, sociaux et culturels de manière uniforme. La Suisse est priée de répondre à ces dernières questions ainsi qu’aux 22 autres recommandations et exigences de l’ONU dans le prochain rapport périodique qu’elle présentera à l’ONU en 2015. Contact: Regula Ricka, Politique de santé, regula.ricka@bag.admin.ch
Notre culture accorde à la santé une valeur très élevée. Mais cette valeur ne résulte pas seulement du besoin de bien-être, car la santé est également une valeur «afin de», une valeur du possible. La santé nous permet d’exercer notre travail, de nous adonner à nos loisirs, d’entretenir des relations sociales, d’être mobile, etc. Dans ce sens, la santé est, à juste titre, un bien très précieux, même si elle n’est pas un bien absolu. La qualité de vie ne se mesure pas seulement à l’aune (ressentie et effective) de la santé mais aussi à notre capacité à nous confronter à la maladie, au handicap et aux limites. Le caractère, la sérénité, l’humour et la gaité sont de bonnes conditions pour y parvenir. Les maladies non transmissibles sont étroitement liées au mode de vie. Nous connaissons tous les principaux facteurs de risque : tabagisme, consommation excessive d’alcool, troubles du comportement alimentaire et sédentarité. Pourtant, des intérêts économiques et l’invocation du droit à une vie librement choisie, échappant au joug de la raison et au diktat des aspects promoteurs de santé, semblent s’opposer à une politique de prévention cohérente. L’équilibre entre ces intérêts partiellement contradictoires fera donc l’objet de négociations dans des processus politiques et sociaux. L’essentiel n’en demeure pas moins qu’une vie saine repose sur des choses aussi simples qu’une activité physique quotidienne, une alimentation équilibrée et une culture des relations familiales et amicales.
Andrea Arz de Falco Responsable de l’Unité de direction Santé publique Vice-directrice Office fédéral de la santé publique
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«Guide de santé pour la Suisse»: nouvelle édition Migration et santé. La publication «Guide de santé pour la Suisse» aide les migrant-e-s à s’orienter dans le système de santé suisse. La troisième édition actualisée de cette brochure d’informations est maintenant disponible. La plateforme Internet migesplus.ch, le centre de compétence pour le matériel d’information spécifique pour les migrant-e-s a elle aussi été remaniée.
aux cantons, aux communes ou aux services spécialisés la possibilité d’ajouter leur propre matériel d’informations ou des adresses.
La brochure la plus connue du domaine de la santé Avec plus de 50’000 commandes, le «Guide de santé» est, depuis des années, la brochure la plus commandée sur www.migesplus.ch, la plate-forme Internet pour les informations sur la santé dans les langues parlées par les migrant-e-s. Il est apprécié et réputé non seulement auprès des spécialistes, mais aussi auprès des migrant-e-s. Le monitoring de l’état de santé de la population migrante en Suisse a révélé que 20% des personnes interrogées connaissent le «Guide de santé». Il est généralement distribué lors de consultations, de cours ou de manifestations organisées pour ce groupe-cible.
Où s’adresser en cas de maladie ou d’accident? Le traitement médical est-il gratuit ou payant en Suisse? Quelles sont les assurances nécessaires? Que faire pour rester en bonne santé? De nombreuses personnes en Suisse, en particulier des migrantes et des migrants, ne trouvent pas toujours facilement une réponse à ces questions. De ce fait, elles peinent à accéder à un système de soins adéquat. C’est pourquoi le «Guide de Refonte du site de migesplus santé pour la Suisse» est né il y a dix ans, sur mandat de l’Office fédéral de la san- migesplus.ch, le centre de compétence té publique et sous l’égide de la Croix- dans le domaine du développement, de la production et de la diffusion de matéRouge Suisse. riel d’information spécialement adapté Multilingue et multifonction à la population migrante, a remanié son La toute dernière édition du «Guide de site Internet, l’a rendu optiquement plus santé pour la Suisse» existe en 18 lan- attrayant, a optimisé le processus de gues et informe sur la prévention, l’as- commande et élargi son offre. Il est ainsurance-maladie et les soins médicaux. si toujours possible de commander ou De plus, l’ouvrage fournit des explica- de télécharger les brochures, mais détions sur les droits et les devoirs des sormais également de les évaluer et de patient-e-s ainsi que sur les principaux les commenter. Les institutions actives règlements et lois. Il contient des indica- dans le domaine de la santé sont toutions sur des services importants et des jours appelées à faire connaître et à difrenseignements sur le système de soins fuser sur la plate-forme Internet leur pour des groupes particulièrement vul- matériel d’information plurilingue sur nérables comme les requérant-e-s d’asile des thèmes de santé. et les sans-papiers. Il tient également compte du système fédéraliste de la Pour commander le «Guide de santé Suisse: le guide de santé offre désormais pour la Suisse»: la troisième édition est
disponible en 18 langues via www. migesplus.ch où elle peut également être téléchargée au format PDF. Il est désormais aussi possible de télécharger via migesplus.ch (> Guide) des diapositives sur certains thèmes du «Guide de santé» en 18 langues.
Contact: Martin Wälchli, chef de projet Prévention et promotion de la santé, Programme national Migration et santé, martin.waelchli@bag.admin.ch
Forum Culture et santé – un couple indissociable La santé et la culture sont inextricablement liées. La notion de santé telle qu’elle s’est établie dans les années 1980 avec le concept de la promotion de la santé privilégie les aspects sociaux et non physiques. Dans ce sens, la santé est comprise comme un processus. Elle résulte de l’interaction entre l’individu et son environnement social, culturel et matériel, au quotidien, sur le lieu de vie. Cette acception souligne le lien étroit entre la santé et des conditions et des contextes de vie socioculturellement différents qui, à leur tour, influent sur le mode de vie et le style de vie. Quant à la culture, une des interprétations aujourd’hui largement admise est celle de groupes de personnes partageant des règles, valeurs et connaissances communes, autrement dit un certain mode de vie. Dans cette culture, les gens apprennent à percevoir et à expliquer le monde d’une certaine ma-
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nière, tout en assimilant des stratégies pour maîtriser leur quotidien. Grâce aux ressources personnelles, sociales et matérielles dont ils disposent, ils peuvent ensuite influencer à leur tour leur univers de vie et l’environnement qui influent sur la santé. La définition de la prévention datant des années 1970-1980 (annonciatrice du concept de promotion de la santé) soulignait déjà les liens entre les contextes socioculturels et la santé. Elle refusait l’idée que les comportements considérés comme néfastes pour la santé puissent être envisagés et modifiés sans tenir compte du contexte de vie des individus. Elle plaidait bien plus en faveur de l’instauration d’univers de vie aux effets positifs sur les conditions de vie et sur les possibilités d’agir en faveur de la santé. Cette conception était centrée sur l’inégalité des conditions et des chances en matière de santé, rendant indissociables l’amélioration de la santé et, précisément, l’amélioration des condi-
tions de départ. La revendication de la promotion de la santé était et est toujours de mettre en place des processus de soutien dans le but de créer des univers de vie qui encouragent et préservent la santé. Aujourd’hui, la responsabilité personnelle est redevenue un thème dominant de la prévention et de la promotion de la santé, impliquant par là que les citoyenne-s n’adoptent pas les comportements qu’ils devraient. Cette vision fait fi des différences socioculturelles génératrices de l’inégalité qui pèse sur les conditions permettant d’assumer une responsabilité. Il n’y a pratiquement pas de débat non plus sur l’encouragement passé ou présent de modèles culturels empêchant justement cette responsabilité individuelle. Si le contexte socioculturel n’est pas abordé en même temps que la question de la responsabilisation, c’est que l’on suppose un sujet autoresponsable qui
suit un choix rationnel (rational choice). Cette conception implique que chaque individu peut, à condition de le vouloir, modifier son comportement indépendamment de l’environnement dans lequel il vit. En d’autres termes, les conditions socioculturelles ayant un effet sur la santé et la maladie sont occultées – comme avant le modèle bio-psycho-social qui s’est établi à partir de la fin des années 1970 – et ce, bien que le lien entre le contexte social et la santé/la maladie soit aujourd’hui avéré.
Brigitte Ruckstuhl, MPH, experte en prévention et promotion de la santé, Berne
Affiner encore le travail de prévention adapté aux codes et aux moyens de communication habituels de ce groupe de population. Les spécialistes interrogés ont fourni en la matière des pistes pratiques et peu onéreuses. Par exemple un roman photos dans différentes langues, mis à disposition dans les cabinets médicaux ou les services de consultation, ou encore l’inclusion des messages de prévention dans la brochure de bienvenue de l’Office fédéral des migrations et, enfin, une feuille informative contenant toutes les adresses des centres de dépistage de chaque canton. 2. Centre de dépistage IST: la plupart des acteurs interrogés ont reconnu le besoin d’un centre de dépistage des IST (et non uniquement du VIH) pour les migrant-e-s. Si l’existence Affiche de la campagne STOP SIDA 2004 d’un tel centre semble pertinente, sa réalisation apparaît complexe. Une VIH/IST et migration. Comment base d’études bibliographiques et d’inoption réaliste serait d’offrir, dans améliorer la prévention pour la terviews d’experts, sur les besoins en les centres existants, les tests souhaipopulation migrante en matière de recherche et en idées nouvelles pour des tés (p. ex. VIH et hépatite) aux miVIH et autres infections sexuellemesures de prévention efficaces auprès grant-e-s originaires de pays à prément transmissibles (IST)? Quelles des migrantes et des migrants. valence élevée à des tarifs sont les lacunes et où faut-il agir? préférentiels. Trois champs de recherche Une étude de l’Office fédéral de la 3. Comment atteindre les populations 1. Epidémiologie des IST au sein de la santé publique (OFSP) s’est penmigrantes: il existe deux nouvelles population migrante: afin de mettre chée sur ces questions. approches pour accroître l’attention en place des mesures adéquates de et l’acceptation des messages de Plusieurs études l’attestent: la santé de lutte contre le VIH et les IST, il faut prévention. D’abord, renforcer le la population migrante est moins bonne d’abord saisir l’ampleur du problème. nombre d’interprètes communauque celle de la population autochtone. Une étude épidémiologique sur la taires, même si la question du finanCe fait est la conséquence de diverses propagation du VIH et des IST, resp. cement reste à régler. Ensuite, inbarrières socioculturelles ou de difficulsur les co-infections au VIH et aux clure absolument l’aspect des tés de compréhension qui entravent autres IST au sein de la population conséquences des IST sur la santé l’accès des migrant-e-s aux offres de migrante est donc absolument prioreproductive dans les informations prévention et aux prestations médicales. ritaire. Par ailleurs, il serait nécessur les IST. En effet, si elles ne sont Il s’agit donc de préparer et de diffuser, saire de développer un questionpas traitées, les IST peuvent en fonction des groupes-cibles, les infornaire sur les comportements de conduire à la stérilité ou provoquer mations de prévention concernant le protection, à remplir lors des dépisdes fausses couches. Or, les perVIH et d’autres infections sexuellement tages des IST autres que le VIH. sonnes originaires d’Afrique subsatransmissibles (IST). Les migrant-e-s 2. Lien entre santé et précarité: eu égard harienne sont particulièrement originaires de la région subsaharienne, à leurs conditions de vie souvent préréceptives à ce genre de risques. à forte prévalence au VIH et autres IST, caires et incertaines, les migrant-e-s C’est pourquoi des informations sur feront l’objet d’une attention particune considèrent pas le VIH et les IST les conséquences possibles des IST lière. En Suisse, 16 à 23% des nouvelles comme leur problème le plus urgent. peuvent fortement améliorer le cominfections enregistrées ces cinq derPour augmenter le nombre de dépisportement préventif de ce groupe. nières années ont en effet touché ce tages au sein de ce groupe, il faut groupe de migration. Avec les hommes créer des offres à bas seuil et réfléchir Conclusion: il est indispensable d’améqui ont des relations homosexuelles à de nouvelles possibilités de finance- liorer l’accès des populations migrantes (HSH), les toxicomanes par injection, les ment. A ce jour, les personnes qui se aux offres de santé et de soins afin de travailleuses et travailleurs du sexe et font dépister doivent en effet assumer leur garantir l’égalité des chances. Dans les personnes incarcérées, ces migrantelles-mêmes les coûts. l’optique de l’étude, égalité des chances e-s font partie du groupe affichant une 3. Liens entre santé, politique migratoire signifie le droit aux mêmes prestations prévalence fortement élevée au VIH et et éthique: il convient également de pour les mêmes besoins (égalité horiaux IST. clarifier toute une série de questions zontale), mais aussi le droit à des presjuridiques, économiques et humanitations spécifiques pour des besoins Sensibiliser, informer, dépister taires. Que se passe-t-il, par exemple, particuliers à la migration (égalité vertiLe programme national VIH et autres lorsqu’une personne sans autorisacale). infections sexuellement transmissibles tion de séjour est dépistée positive au (PNVI) 2011–2017 a formulé les objecVIH ou à une IST? Comment réagit le L’étude «Le VIH/sida et les autres in tifs de prévention suivants à l’intention système de santé face à des perfections sexuellement transmissibles de ce groupe: une meilleure sensibilisasonnes qui, malgré une décision de auprès des populations migrantes. Un tion et information ainsi qu’un dépisrenvoi, restent en Suisse? L’influence état des lieux.» est disponible en frantage et un traitement améliorés du VIH d’une probabilité de renvoi sur la çais et peut être téléchargée sous le lien et des IST. Pour atteindre ces objectifs, il volonté des migrant-e-s à procéder à suivant: www.bag.admin.ch/hiv_aids faut de nouvelles connaissances et meun test de dépistage mériterait égale> Informations aux spécialistes sures. L’étude de l’OFSP «Le VIH/sida et ment de faire l’objet d’une étude. > Prévention groupes cibles > Migrants les autres infections sexuellement transTrois propositions d’action missibles auprès des populations miContact: Luciano Ruggia, grantes. Un état des lieux» menée par 1. Matériel de prévention: le matériel de prévention contre le VIH et autres Section Prévention et promotion, Lydia Manzanares sous la direction de luciano.ruggia@bag.admin.ch IST pourrait être encore amélioré et Luciano Ruggia s’est penchée, sur la
«Mon poids idéal?!»: conseils dans 527 pharmacies Campagne pharmaSuisse. La campagne «Mon poids idéal?!» a permis à la population suisse de faire contrôler, entre mi-mai et mi-juin auprès de 527 pharmacies, son comportement en matière d’alimentation et d’activité physique, et de bénéficier de conseils sur la manière d’intégrer avec plaisir une alimentation saine et une bonne activité physique au quotidien. La campagne a été conçue par la Société Suisse des Pharmaciens, pharmaSuisse, en collaboration avec un comité scientifique, réunissant notamment des médecins, des psychologues, des médecins du sport, des nutritionnistes et des pharmaciens. La campagne est également soutenue par la Société suisse de pédiatrie (SSP) et la FMH. Le surpoids et le manque d’activité physique ont des conséquences alarmantes sur le bien-être et la santé, à tous les âges de la vie. Les habitudes alimentaires et les activités physiques ont profondément changé ces 100 dernières années – et pas seulement en bien. De nos jours, 37% de la population globale et 15 à 20% des enfants et des adolescent-e-s souffrent de surpoids en raison d’une activité physique insuffisante et d’une consommation excessive de sucres et de graisses.
Dénutrition?! Nouveau guide. Le guide «Dénutrition?!» fournit des indications pour prévenir précocement et pour traiter les déficits d’alimentation, en particulier chez les personnes âgées.
Il contient également un test ainsi que des informations sur les causes et les effets de la dénutrition. Il a été édité par la Vereinigung Diät et le Fachgruppe Medizinische Ernährung en collaboration avec diverses sociétés professionnelles (SSN, SSNC et ASDD). Le guide est disponible en allemand, français et italien. Il peut être téléchargé sous www.fial.ch > Documents.
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«Des centres d’intérêts passionnants et de bons loisirs sont la meilleure Entretien Emil Steinberger/Niccel Steinberger. L’humour conserve-til en bonne santé? Quelle est l’importance de l’art et du rire pour la santé? spectra a interrogé deux personnes bien placées pour le savoir: Emil et Niccel Steinberger. Tous deux ont en effet pour métier de faire rire les gens. Le grand humoriste Emil avec des numéros de scène et des livres inoubliables et Niccel en tant qu’auteure et animatrice de séminaires du rire. spectra: Emil Steinberger, à bientôt 80 ans, vous montez encore sur scène presque 100 fois par an. L’humour maintient-il jeune? Emil: je ne le dirais pas vraiment. L’humour ne résout pas tout. Par exemple, les problèmes au travail. Si l’humour peut, il est vrai, être une base précieuse pour détendre une situation, je ne crois pas qu’il soit capable de résoudre les problèmes professionnels graves.
Emil: je vais sur scène! Entendre les gens rires fait déjà beaucoup de bien. Et parfois cela se poursuit après la représentation. J’espère qu’en quittant le théâtre les spectateurs ne baissent pas complètement le rideau mais qu’ils peuvent encore en profiter un peu. J’apprécie aussi beaucoup les séances de dédicace. Il est déjà arrivé qu’un grandpère vienne avec son fils, sa belle-fille et ses petits-enfants dont le dernier n’était pas encore né. J’avais devant moi trois générations qui avaient, d’une manière ou d’une autre, reçu une part d’Emil. J’aime transmettre ce genre de choses. Cela me procure beaucoup de plaisir malgré les efforts qu’il faut fournir.
Vous créez de la nourriture spirituelle pour d’autres. Quelle est la vôtre?
Emil: la culture a toujours affaire avec le facteur temps. Les gens actifs ont de moins en moins de temps à consacrer à la culture. Pourtant, chacun devrait avoir un centre d’intérêt qui le motive à entreprendre et à vivre des choses. Pour Que faites-vous pour préserver moi, c’est la culture théâtrale. Mais ces votre santé? derniers temps nous sommes souvent Emil: je travaille! Je n’ai jamais été un allés au musée et y avons trouvé beauféru de sport. Je ne suis même pas ca- coup de plaisir. Les musées offrent un pable de respecter les moindres bonnes résolutions, comme les 30 minutes de « Rire fait du bien partout. marche par jour. Ce sont plutôt mes difCela renforce les gens, férentes activités qui me conservent en leur donne du courage, bonne santé, ou du moins me permettent de travailler et de vivre sans les rend créatifs.» douleurs. Niccel Steinberger
Que faites-vous pour votre santé mentale? Nos interlocuteurs Niccel Steinberger, née en 1965, a étudié la germanistique interculturelle à l’Université de Bayreuth. Aujourd’hui, elle écrit des livres et exerce l’activité de gélotologue (science du rire). Depuis ses études, cette Allemande de naissance travaille comme entraîneuse au rire et organise des séminaires sur le thème du rire. Avec son mari Emil, elle a fondé Edition E qui publie les enregistrements d’Emil mais aussi ses propres ouvrages sur le thème du rire. Emil Steinberger, né en 1933, est l’un des cabarettistes suisses les plus populaires et les plus appréciés. Après un apprentissage de buraliste postal et de graphiste, Emil a connu dans les années 1970 et 1980 de grands succès en Suisse, dans l’ex Allemagne fédérale et l’ex Allemagne de l’est. A côté de ces activités, il travaillait également comme animateur de radio et acteur. En 1987, il met fin à la carrière d’EMIL. Fin 1993, il part pour six ans à New York. Aujourd’hui, Emil Steinberger écrit des livres et organise régulièrement des lectures en Suisse et en Allemagne. Mariés depuis 1999, Niccel et Emil Steinberger vivent au bord du lac Léman.
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divertissement très accessible. Il n’y a qu’à entrer et marcher, pas besoin de réserver sa place. On y voit et on y vit des choses qui font tout simplement du bien et incitent à agir soi-même. Parfois, c’est même presque un peu énervant… on ressort la tête pleine d’idées que l’on ne peut pas réaliser – tout simplement faute de temps.
Y a-t-il des manifestations culturelles qui vous ont particulièrement touchés ces derniers temps? Niccel: «Silo 8» de Karls kühne Gassenschau. Nous l’avons vu six fois, et chaque fois nous avons ri aux éclats. Mais c’était également très émouvant. Une manière formidable d’aborder la question de la vieillesse et tout ce qui en fait partie: la sénilité, la mémoire défaillante, etc. En ce moment, tout ce qui a trait au théâtre de marionnettes me touche. Je voulais être marionnettiste dans le temps, et je viens de le redécouvrir. Peut-être est-ce dans l’air du temps. Partout ressurgissent tout à coup ces figurines de chiffons. Récemment, nous avons assisté à une pièce à Hambourg, prochainement nous irons à New York et à Saint-Gall pour en voir d’autres. Et puis, nous avons eu la chance d’assister à un épisode de Sesamstrasse, ce qui m’a permis de serrer dans mes bras Ernie et Bert avec lesquels j’ai grandi. Ce sont de beaux moments.
Emil: en Allemagne, nous avons vu l’exposition de Loriot. Voir toute son œuvre dans un cadre où tout était très bien fait m’a rendu presque jaloux. Nous avons également assisté au concours des Brass Bands. C’était un grand moment! On y voit des formations venues des villages les plus reculés! C’est incroyable, cette capacité à mettre sur pied tout un orchestre de cuivres pour jouer dans la cour des grands! Nous nous plaignons beaucoup de la «jeunesse d’aujourd’hui», mais il y a tellement de jeunes actifs qui font de la musique et apprennent à réaliser quelque chose.
remarqué que je devais écouter de la musique gaie pour aller mieux. Dans les séminaires de rire j’essaie de montrer aux gens tout ce que l’on peut faire pour être plus gai dans sa vie.
Que pensez-vous des clowns d’hôpitaux?
Niccel: je les trouve géniaux. Rire fait du bien partout. Cela renforce les gens, leur donne du courage, les rend créatifs et cela soutient la cohésion du groupe. Je suis intimement convaincue que l’on devrait rire ensemble au travail. Dans notre bureau, nous pratiquons le rire et nous parvenons même à contaminer les Niccel, c’est grâce à l’humour serveurs dans notre restaurant habituel. que vous avez rencontré votre Soudain, ils commencent à être amumari. Pouvez-vous nous décrire sants. Au début, ils étaient curieusement brièvement le chemin qui vous a rigides. Mais lorsqu’ils ont compris que conduit à Emil? nous plaisantions en permanence, ils Niccel: en 1980, je suis allée au cirque sont entrés dans notre jeu. Et tout le Roncalli qui, à l’époque, venait juste de monde en profite; ils jouent avec nous et rouvrir à Cologne, après la phase André nous avec eux. Je pense que l’humour Heller. J’avais alors 15 ans et j’étais aide à gérer plus facilement les procomme électrisée. Je savais enfin ce que blèmes. En tout cas, c’est plus facile que je voulais faire: clown. J’étais ferme- si l’on s’y confronte en ayant peur, à ment convaincue que c’était ma voca- contrecœur ou en ruminant. Cela fait tion. Je ne savais pas, alors, qu’Emil plaisir d’entendre que nos collaboraétait à l’origine de ce programme de teurs se réjouissent tous les lundis de cirque. Cela m’a beaucoup marquée les venir travailler. C’est un très beau comannées suivantes. Je n’ai passé ma ma- pliment et a certainement à voir avec le turité que pour pouvoir intégrer l’école fait que nous rions beaucoup ensemble. de clown Roncalli. Malheureusement Comment instaurer une culture cela n’a pas marché. A 20 ans, j’ai écrit du rire dans une entreprise? une lettre à Emil, le priant de me donner des tuyaux pour devenir clown. Il s’en Niccel: chaque entreprise doit trouver est suivi une amitié par correspondance. sa propre voie. Certains réagissent daEmil: ton parcours était aussi très inté- vantage aux blagues orales, d’autres à la gestique. Il y a peut-être aussi au bureau ressant ... Niccel: ... oui, je suis arrivée aux études un raconteur d’histoires génial. C’est théâtrales après bien des détours, mais très divers. Selon la composition du je les ai interrompues pour entamer des groupe, naît une langue de l’humour études de germanistique interculturelle, très particulière. J’ai déjà dit que nous c’est-à-dire «allemand langue étran- plaisantons souvent avec un serveur. gère». Au début c’était passionnant, Nous faisons sans cesse de nouvelles mais dès la moitié du cursus j’ai com- plaisanteries, nées spontanément de la mencé à m’ennuyer car il n’y avait plus situation du moment. Il n’y a rien de rien de nouveau. Toutefois, je voulais planifié, cela arrive tout simplement. terminer ces études. J’ai alors réussi à C’est fascinant de voir les gens entrer convaincre mon professeur de me lais- dans le jeu. C’est comme pour nos ser écrire mon travail de diplôme dont «feuilles hebdomadaires». L’un de nous le sujet serait le clown. C’était ce qui me deux commence un dessin, l’autre contimotivait pour terminer mes études. En nue. Si j’ai l’intention de dessiner une écrivant ce travail, j’ai découvert le rire bouteille, Emil en fera peut-être un en tant que thème. J’ai remarqué tout ce chien. A moi ensuite de réagir. On essaie de ne rien détruire, mais de poursuivre sur une lancée positive. L’essentiel est « Nous nous plaignons que la «feuille hebdomadaire» soit terbeaucoup de la ‹jeunesse minée le dimanche et qu’elle nous plaise d’aujourd’hui›, mais il y a à tous les deux. Il en va de même avec l’humour. tellement de jeunes actifs
qui apprennent à réaliser quelque chose.» Emil Steinberger
que cela contient et compris l’importance du rire. Je voulais en faire profiter les gens. C’est pourquoi j’ai commencé à donner des séminaires de rire après mes études. Je sentais également que c’était une bonne voie pour moi. Autrefois, lorsque j’étais triste j’écoutais toujours de la musique triste, ce qui n’arrangeait pas les choses. Puis j’ai
Avez-vous des tuyaux pour apporter de l’humour dans un environnement sans humour? Niccel: oui, il faut partir de petites choses. On peut essayer de s’allier des complices dans l’entreprise pour tenter quelque chose. Les autres seront vite pris au jeu. Ou alors on accroche un tableau sur lequel tous les affichages amusants sont permis. On peut aussi chanter une lettre au lieu de la dicter. Ou aussi récompenser la meilleure excuse de retard au lieu de toujours râler contre les
prévention» prétextes artificiels. Il n’y a pas de recette toute prête. Chaque situation, chaque équipe, chaque entreprise est différente. Les personnes harcelées peuvent aussi préférer l’humour à la défensive. L’effet est très souvent positif.
Organisez-vous toujours des séminaires de rire? Niccel: oui et non. J’ai une longue liste de personnes intéressées, mais je n’ai pas encore fixé de date ni trouvé de lieu approprié. Les séminaires ont toujours lieu dans un hôtel et durent deux à trois jours. C’est en effet un concept global qui inclut les repas et les nuits. Les choses ne sont pas limitées au local du séminaire. Nous sortons aussi dans la rue.
Quel genre de personnes viennent à ces séminaires? Niccel: toutes sortes. Il y en a de très jeunes qui veulent écrire un travail de maturité sur ce thème. A ce jour, la doyenne était âgée de 80 ans. Il y en a d’autres qui se font ce cadeau au moment de la retraite. D’autres viennent des soins palliatifs et veulent intégrer le rire dans leur métier. J’ai déjà eu aussi un policier, désireux de mettre davantage d’humour dans ses contacts avec ses subordonnés. Il y a des enseignants soucieux d’inclure l’humour à leur enseignement. L’humour à l’école est d’ailleurs un thème très important. Mais il y a aussi des personnes gravement malades qui viennent au séminaire pour rire à nouveau vraiment, car presque personne ne rit plus avec eux au quotidien, par crainte de paraître déplacé. Pourtant, le rire est très libérateur pour les malades. Emil: il faut dire aussi que cela n’a rien à voir avec ces clubs du rire où l’on rit sans raison, où il s’agit d’un rire purement mécanique déclenché sur commande. Les séminaires de rire n’ont rien à voir avec ça.
Emil, vous vous êtes engagé dans une campagne de l’Office fédéral de la santé publique contre le tabagisme. Vous imaginez-vous aussi vous engager contre l’alcoolisme ou les drogues? Emil: la misère de la drogue me touche beaucoup. Lorsque je vois un toxicomane, je m’interroge toujours sur l’histoire qui a pu le rendre à ce point dépendant des drogues et me demande pourquoi il ne peut pas compenser ses besoins avec autre chose. Il lui manque manifestement une joie dans son quotidien capable de l’empêcher de tomber dans cette situation. Je connais le désespoir qui nous submerge lorsque l’on est dans ce cloaque. Un temps, je ne pouvais tout simplement pas comprendre comment on peut tomber dans une telle situation. Mais il y a manifestement des gens incapables de résoudre leurs problèmes et qui doivent fuir.
Vous vous engageriez donc pour la lutte contre la toxicomanie? Emil: oui, mais indirectement. Je consi-
Niccel et Emil Steinberger
Vous habitez dans un haut-lieu dère l’intérêt et la curiosité des jeunes du Chasselas, au bord du lac comme importants. Bien sûr, pas la Léman. Donc, au milieu de la curiosité d’expérimenter les drogues. culture du vin. Quelle est votre Mais la curiosité de choses vécues, de attitude face à l’alcool qui est nouveautés et de culture. On tombe aussi une drogue? dans cette marmite à la maison, quand on est petit – ou non, justement. Dans Emil: lorsque nous sommes arrivés, certains foyers, les mots théâtre ou ciné- nous avons aussitôt reçu quantité d’invima ne sont jamais prononcés. Les en- tations de toutes sortes, des vernissages chez les vignerons… Niccel: ... ou des conférences de presse, « Tant que nous ne parvenons des séances au théâtre, etc. On se renpas nous-mêmes à marcher contre vers 10 heures du matin, chacun 30 minutes chaque jour, un petit verre de vin blanc à la main... Emil: ... oui, tout à fait. Mais là, je ne nous ne pouvons dicter à marche pas. Je ne vais tout simplement personne ce qu’il doit faire pas aux invitations. Par chance, l’alcool ou non dans la vie.» ne m’a jamais intéressé. Je crois que j’ai Niccel Steinberger bu ma première bière à l’âge de 34 ans, presque forcé par mes collègues qui fants doivent alors de débrouiller tout voulaient que je boive enfin une bière. seuls ou s’appuyer sur des amis pour Mais je n’en avais pas envie. Cela a naconnaître un peu la culture. C’est un peu turellement une raison. Il fallait toujours que j’aille chercher de la bière la loterie, où et comment on grandit. Niccel: on rencontre aussi dans la scène pour mes parents, après quoi mes doigts de la drogue beaucoup de personnes sentaient très fort le houblon, une odeur très curieuses, sensibles et probable- que je détestais. Cela m’a toujours retement même artistiquement douées. Ce nu de boire de la bière. C’est un peu sont sans doute de toutes autres raisons pareil pour le vin. D’ailleurs le vin ne qui les ont poussées vers la drogue et m’aime pas et moi, je préfère l’eau. Et non un désintérêt total. Je pense que je suis assez strict en la matière. Mais bien trop de choses sont ignorées dans il faut vraiment lutter. Il y a quelques notre société. Les toxicomanes ne sont jours, nous avons rencontré à Hampas les seuls responsables de leur mi- bourg, dans un restaurant, un couple qui avait assisté à une de mes représensère, la société l’est aussi. Emil: oui, c’est vrai. Moi aussi j’aurais tations la veille au soir. Ils se sont précifacilement pu basculer à une époque. pités sur moi, m’ont submergé de comMais la scène m’a énormément aidé, pliments et étaient transportés de joie. m’a rendu plus fort. D’autres ont besoin C’était vraiment émouvant. Ils ont alors absolument voulu trinquer au chamde pilules chimiques pour cela.
pagne avec moi. Je me suis défendu de toutes mes forces en disant que je préférais le café. Mais mes protestations ne servirent à rien. Le champagne était déjà commandé, le verre rempli, et le café arriva après aussi – le tout couronné par un double kirsch… Niccel: ... il ne pouvait pas partir avant d’avoir vidé son verre. Et l’homme le remplissait sans cesse. C’est curieux cette manie qu’ont les gens qui boivent de l’alcool de toujours vouloir que les autres boivent aussi et qu’ils aiment ça. Même mon frère a trouvé récemment que je devrais boire aussi un verre de
« Je crois que j’ai bu ma première bière à l’âge de 34 ans.» Emil Steinberger
vin, au prétexte que je devais aussi savourer quelque chose. Quel rapport? Je n’éprouve aucun besoin de boire du vin. Emil: en Allemagne, j’ai été choqué de voir des écoliers attendre le bus pour l’école en buvant de la bière. C’est tragique. Mais que faire? Se changer les idées est la seule chose qui serve. Avoir d’autres centres d’intérêt. Je suis convaincu que de bons loisirs et centres d’intérêt sont la meilleure prévention ... Niccel: ... oui, mais comme tu le dis toujours toi-même: tant que nous ne parvenons pas nous-mêmes à marcher 30 minutes chaque jour, nous ne pouvons dicter à personne ce qu’il doit faire ou non dans la vie.
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Echanges stimulants au Monte Verità: un espace informel d’échanges interdisciplinaires Académie des dépendances 2011. Comment garantir à la fois la liberté individuelle et la sécurité publique? Que doit tolérer et supporter la population, où sont les limites? Comment coordonner au mieux la collaboration entre répression, institutions sociales et société civile? L’Académie des dépendances 2011 s’est penchée sur la consommation problématique de substances et les comportements à risque dans l’espace public sous l’angle de la sécurité et de l’intégration sociale. Espace de dialogue interdisciplinaire apprécié, l’Académie des dépendances a eu lieu pour la troisième fois du 19 au 21 mai 2011 sur le Monte Verità au Tessin. Les organisateurs avaient à nouveau choisi ce lieu propice à la réflexion, là où une petite communauté de personnes à la recherche d’un mode de vie alternatif était venue s’installer avant la Première Guerre mondiale déjà. Quelque 80 spécialistes issu-e-s des domaines du travail social et des dépendances, de la police, de la science, de l’administration, de la politique et des médias se sont réuni-e-s pour échanger des réflexions intersectorielles. A l’invitation du Groupe d’experts Formation Dépendances (GFD), ils ont analysé les problèmes actuels de gestion de l’espace public sur la base d’interventions inspirées de la théorie et de la pratique afin d’élaborer des approches et des solutions durables aux problèmes actuels.
Place du marché et exemples pratiques L’Académie des dépendances ne se limite pas à poser des questions fondamentales mais s’interroge sur les défis actuels rencontrés dans la pratique: Quelles stratégies et mesures existe-t-il dans les villes suisses et quelles sont leurs possibilités et leurs limites? Quel est le degré d’adaptation des stratégies et des mesures à d’autres conditionscadres locales, sociales et politiques? Des projets concrets innovants et potentiellement adaptables ont servi de base à des échanges passionnants entre les participant-e-s à la conférence. Des «étals» dressés sur la «place du marché aux idées» ont permis de présenter une douzaine de projets locaux allant du Fancoaching à Bienne à des actions issues de la Semaine de dialogue alcool, en passant par des projets de travail de rue pour les jeunes, un projet intergénérationnel à Carouge, d’animation de quartier à la Langstrasse de Zurich, des ini-
Informations sur l’académie des dépendances 2011 Un film livrant des impressions sur la conférence ainsi que des info-posters et les résultats des ateliers sont disponibles sous www.suchtakademie.ch
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tiatives anti-littering, des offres sportives règles de comportement. Toutefois, des nocturnes ou des interventions de pré- solutions négociées en fonction du contexte situationnel sont plus profitables que vention lors des dance partys. des règles absolues et intangibles. La Sept champs d’actions responsabilité de ce processus de négoL’Académie des dépendances avait pour ciation incombe essentiellement à des ambition de définir des recommanda- professionnel-le-s œuvrant dans l’estions d’actions à partir des approches pace public. théoriques et des exemples tirés de la 4. Police de quartier pratique. Sept champs d’actions ont été dégagés pour aborder les chances et les La fermeture de la plupart des postes de défis à relever. Les recommandations police de quartier et l’arrivée de nouformulées incitent à agir localement veaux policiers a créé un fossé d’anonydans les villes et les communes et, mieux mat avec les habitants du quartier. Dans leurs voitures de patrouille, les policiers encore, dans les quartiers. suscitent la peur plus qu’ils ne ras1. Jeunes et personnes âgées/ surent. Pourtant, ils devraient être des dialogue intergénérationnel personnes de confiance et entretenir le «Qui jeune n’apprend, vieux ne saura». contact avec la population. Pour cela, il Ce proverbe s’applique également au serait souhaitable de revenir à la police comportement social dans l’espace de proximité. public. L’école doit permettre de sensi5. Dialogue avec les médias biliser largement les enfants et les et la politique adolescent-e-s aux questions de sécurité et d’intégration sociale et leur trans- Les professionnel-le-s œuvrant dans mettre des règles de comportement. l’espace public devraient davantage Parallèlement, la génération des seniors communiquer avec les politicien-ne-s et mérite aussi une attention accrue, car les journalistes. Ce n’est en effet que par elle constitue un groupe d’usagers tou- une communication permanente et acjours plus nombreux de l’espace public. tive avec eux qu’ils obtiendront l’attenL’objectif est d’encourager le dialogue tion nécessaire et la reconnaissance de intergénérationnel entre les jeunes et leurs problèmes au sens de la sécurité et de l’espace public. Les contacts inforles personnes âgées. mels jouent, en la matière, souvent un 2. Familiarité rôle central et déterminant. Pour ce sentir bien, l’être humain a 6. Flexibilisation de la police avant tout besoin de proximité et de faet des institutions sociales miliarité. Il est donc important de parler avec les personnes qui vivent dans l’en- Le développement d’une société des 24 vironnement immédiat et d’apprendre à heures est inéluctable. En conséquence, s’accommoder de normes sociales diffé- les acteurs et les institutions oeuvrant rentes. Le but est l’interconnaissance, dans l’espace public (p. ex. la police et c’est-à-dire un environnement social certaines structures sociales) doivent qui favorise la connaissance et la recon- assouplir le fonctionnement de leurs naissance des compétences de chacun-e. structures, l’engagement de leurs resPour y parvenir, il faut encourager l’in- sources, repenser leurs rôles et, éventeraction et la communication (et non le tuellement, les redéfinir. contrôle social) ainsi que le sentiment 7. Représentation de la ville d’appartenance au quartier. Des lieux bien éclairés et des quartiers 3. Réglementation situationnelle pleins d’enfants augmentent le sentiIl n’y a pas de cohabitation paisible sans ment de sécurité et diminuent le besoin
de présence policière. L’organisation spatiale et architecturale, un développement s’accompagnant de mesures sociales, et la revalorisation de communes et de quartiers peuvent beaucoup faire à cet égard. Pour que toutes ces résolutions ne restent pas lettres mortes, le Groupe d’experts Formation Dépendances (GFD) organisera, en collaboration avec des partenaires locaux, des forums régionaux de dialogue dans toute la Suisse.
Causeries au coin du feu avec T. Zeltner et A. Uchtenhagen Mais il s’agissait également de faire appel aux expériences passées. Au soir de la première journée, Ambros Uchtenhagen, président du Conseil de fondation de l’Institut für Sucht- und Gesundheitsforschung de l’Université de Zurich, et Thomas Zeltner, ancien directeur de l’Office fédéral de la santé publique, ont évoqué au cours d’un dialogue informel les deux dernières décennies de la politique suisse en matière de drogue, livrant aux participante-s leurs précieuses réflexions. Ils ont évoqué les fameuses scènes de drogue ouvertes qui avaient suscité l’intérêt international et, bien sûr, les mesures mises en place pour les éliminer. Pour A. Uchtenhagen, «la fameuse politique des quatre piliers n’était pas une injonction de la Confédération mais une invitation à exploiter sa propre créativité et à rechercher des réponses innovantes à ces défis». Ce genre d’attitude de la part des politiques et de l’administration crée les conditions favorables pour maîtriser de nouveaux défis. Les participant-e-s à l’Académie des dépendances étaient unanimes sur ce point. Contact: René Stamm, Section Drogues, rene.stamm@bag.admin.ch
De nombreux problèmes – mais aussi des solutions Académie des dépendances 2011/ Alcool. En organisant un atelier dédié à l’alcool et l’espace public, l’Académie des dépendances 2011 a fourni une contribution personnelle aux discussions de la Semaine alcool qui a eu lieu du 21 au 29 mai 2011.
turelles, les spécialistes voient une grande palette de possibilités efficaces mais qui, pour l’heure, ne font pas encore l’unanimité d’un point de vue politique. – Les opérations achat-test sont avant tout efficaces lorsqu’elles sont intégrées dans un programme de prévention et effectuées en combinaison La consommation d’alcool dans l’espace avec la formation du personnel de public fait de plus en plus débat ces derservice et de vente. niers temps – souvent en corrélation – Les contrôles d’alcoolémie sur les avec la violence, des accidents de la routes ont contribué à éviter des route ou le «binge drinking» (biture accidents et à réduire le taux d’alcool express). L’atelier organisé dans le général des conducteurs. Le taux de cadre de l’Académie des dépendances a réduction des accidents de jeunes participé en ce sens au vaste débat soconducteurs imputable à la nouvelle cial qui entoure l’alcool (phénomène réglementation reste encore à clariculturel et bien de consommation). Les fier. Les offres à succès telles que déclarations les plus importantes et «Nez Rouge» devraient être dispoles approches de solutions issues de nibles toute l’année. l’atelier sont résumées ci-après: – La police fait savoir qu’elle a besoin – Dans le domaine des mesures strucd’un point d’admission pour per-
sonnes ivres au sens d’une institution psycho-sociale dotée de personnel spécialisé (indépendante des hôpitaux et des cellules de dégrisement). –D ans la discussion autour des problèmes d’alcool, on a tendance à oublier l’encadrement social des jeunes. Pourtant, de nouvelles possibilités d’intervention ont souvent été expérimentées avec succès ces derniers temps. Le plus grand succès étant la démarche qui consiste à aller à la rencontre des jeunes pour leur proposer des possibilités d’occupation alternatives, des opportunités d’échanges et des interlocuteurs professionnels. –P our les médias, le défi vient du fait que très peu de spécialistes s’adressent à eux spontanément. Dès lors, les médias ne reprennent que trop souvent les incidents et
situations négatives dans l’espace public. A l’inverse, les problèmes d’alcool dans la sphère privée n’attirent que très peu l’attention publique. –L a coopération et l’échange doivent être maintenus et intensifiés dans tous les domaines, car c’est seulement ainsi que l’on parvient – lentement mais sûrement – à de bonnes solutions. Les résultats des autres ateliers (Tabac, Drogues illégales, Sécurité, Intégration et Espace virtuel) sont documentés en détail sous www.academie-des-dependances.ch. Contact: René Stamm, Section Drogues, rene.stamm@bag.admin.ch
«Seul un processus soutenu collectivement permet de dégager des solutions.» 6 questions à Jakob Huber. Jakob Huber est directeur de Réseau Contact Berne et président du Groupe d’experts Formation Dépendances (GFD). Il est en quelque sorte le «père» de l’Académie des dépendances dont l’objectif est de donner des impulsions et d’accompagner des processus d’apprentissage sociétal en lien avec des questions de dépendances.
Comment caractérisez-vous l’esprit de l’Académie des dépendances en général, et celui de l’Académie des dépendances 2011 en particulier? Chacun-e d’entre nous n’est qu’une partie d’un processus social en changement permanent. Personne n’a l’apanage de la légitimité pour l’interpréter ou le guider. Seul un processus soutenu collectivement permettra de dégager et de mettre en œuvre des solutions pour les problèmes présents et futurs. La troisième Académie des dépendances 2011 a montré que l’idée fondamentale de l’académie des dépendances est parvenue à s’établir. Dès lors plus besoin de justifier le champ de réflexion. Respect mutuel et recherche commune de solutions ont favorisé le dialogue sous le soleil tessinois.
spectra: En quoi l’académie des dépendances se distingue-t-elle des autres congrès?
Comment est conçue cette plate-forme de dialogue, quelle est la méthode didactique?
J. Huber: l’Académie des dépendances axe principalement sa réflexion sur l’apprentissage sociétal ou collectif. L’apprentissage sociétal vise à acquérir des compétences de coopération pour analyser des problèmes complexes et élaborer des solutions. Il devient possible de mieux comprendre les activités d’autres acteurs et de les prendre en compte activement. À la différence de l’apprentissage individuel, groupal ou organisationnel, le groupe-cible n’est pas limité. Les questions centrales sont les suivantes: Comment la société civile apprend-elle? Comment la population peut-elle être acquise à des changements positifs en matière de santé et d’intégration sociale? Quelles sont les interventions aptes à initier et ancrer des processus de réflexion ou de changement dans un système de société multipolaire?
L’académie des dépendances est conçue comme un congrès-atelier. Le programme est ainsi conçu qu’il permet de ménager suffisamment d’espace aux idées nouvelles et à un processus de réflexion collectif. Outre les contenus professionnels et de politique des dépendances qu’elle dispense, l’Académie s’entend pour ainsi dire comme le miroir d’un champ de forces sociales dans lequel peut avoir lieu un apprentissage sociétal. Le processus vécu met en lumière les écueils qui ralentissent un processus de négociations constructif et les interventions nécessaires pour atteindre un résultat cautionné par tous. La formation moderne des adultes nous apprend qu’un équilibre sain entre la transmission du savoir et la coopération interactive permet d’atteindre les effets d’apprentissage les plus durables. La
par contraste avec leur quotidien professionnel surchargé. Ensuite, il est important pour le déroulement de l’académie que les participant-e-s acceptent le processus global. Les différents éléLes participant-e-s sont ments du programme sont liés entre invité-e-s à titre personnel. eux, établissent des interactions et acComment les sélectionnez-vous? cordent un poids particulier à l’échange Le GFD veut, au travers de l’Académie informel. C’est pour cette raison que la des dépendances nationale, promouvoir localisation est importante. les échanges directs entre les milieux Et enfin, c’est l’occasion de mettre en politiques, les médias, la recherche, valeur cette région de la Suisse largel’administration et la pratique. Tous les ment négligée jusqu’ici par les formadeux ans, nous choisissons pour l’Aca- tions en matière de politique des dépendémie un sujet qui fait l’actualité dans dances. L’Académie des dépendances la politique des dépendances. Entre reçoit le soutien moral et financier du deux académies, les professionnel-le-s canton du Tessin. poursuivent le débat et consolident les Quelles interventions ou quels idées au niveau régional. Pour le Monte projets présentés dans le cadre Verità, le cercle des participant-e-s a été de l’Académie des dépendances sciemment choisi de manière à refléter 2011 vous ont-ils laissé un souà la fois les différentes formes de dépenvenir particulier, en tant que dances et les principaux domaines somoments symboliques? ciaux liés à la question. Les critères de sélection doivent aboutir à une bonne Les efforts fournis pour établir des liens représentation des deux sexes, de tous entre les perspectives théoriques et la les âges, et de toutes les régions. Le transposition pratique, pour ramener la complexité sur terre. Le dialogue interchoix incombe au groupe de projet. générationnel au coin du feu qui a Pourquoi ce congrès a-t-il lieu retracé l’histoire de la naissance de la au Monte Verità, un lieu moins politique drogue et qui restera gravé facile d’accès que d’autres dans les mémoires. Les étals du marché centres de congrès dans les des projets créatifs et novateurs, au grandes villes? soleil. L’ouverture et l’engagement des En organisant l’Académie des dépen- participants au cours de l’open space, dances sur le Monte Verità, au-dessus en quelque sorte une forme d’espace d’Ascona, le GFD poursuit trois objec- public, pour dégager les principaux tifs: d’abord, le Monte Verità est un sym- champs d’actions. La satisfaction que le bole, celui d’un espace d’expérimenta- dialogue a été possible et que le sujet tion historiquement important, qui a de l’académie «Sécurité et intégration donné naissance à de nombreux élans sociale dans l’espace public» n’a pas sociaux, dès la fin du 19ème siècle. La lo- dérapé vers la répression. Bien au calisation, l’ambiance du sud et la mon- contraire même, les représentants de la tagne font naître un lien presque naturel police n’ont pas tari d’éloges sur l’efficaavec l’action, un sentiment de liberté cité du travail social en faveur de soluque bon nombre de visiteurs apprécient, tions dans l’espace public. présence sur place pendant trois jours, complétée par un programme culturel attrayant, renforce sensiblement ce processus.
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Des ponts linguistiques pour mieux guérir – L’interprétariat communautaire et la santé publique en Suisse.
La publication met en lumière certains aspects qualitatifs, juridiques et économiques de l’interprétariat communautaire. Ce document se fonde sur dix rapports d’experts et une soixantaine d’articles extraits de revues ou de recueils consacrés à la communication interculturelle dans le domaine sanitaire en Suisse.
Disponible gratuitement en allemand et français via www.miges.admin.ch (> Interkulturelles Übersetzen > Projekte)
Dossier santé
Ce dossier didactique sur la santé se compose de différents modules bien structurés et offrant une utilisation personnalisée. Il est rédigé dans un français facile à comprendre et contient des indications et des outils pour préparer un cours. Téléchargeable sur Internet, cette documentation s’adresse plus particulièrement aux personnes suivant un cours de français ou d’intégration et dont le niveau de formation est modeste.
www.miges.admin.ch (> Prävention > Projekte)
Ce guide résume les connaissances essentielles sur le thème de la compréhension interculturelle, explique les notions fondamentales et montre comment organiser de façon optimale les entretiens impliquant un-e interprète communautaire. Il s’adresse aux professionnel-le-s du domaine de la santé.
Disponible gratuitement en allemand et français via www.miges.admin.ch (> Interkulturelles Übersetzen > Projekte)
Titre – Date/lieu
Descriptif
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Forum Suisse VIH&IST 2011
Le Forum Suisse VIH&IST s’adresse aux spécialistes du domaine du VIH&IST, aux chercheurs, aux médecins, aux représentants des services de planning familial et des personnes concernées par le VIH et autres infections sexuellement transmissibles, aux médias et au public intéressé par le sujet.
Inscription auprès de Moser Luthiger Consulting, 8853 Lachen, mlcons@bluewin.ch, tél. 055 442 91 02. Pour toute question concernant le programme: M. Gnädinger, OFSP. Tél. 031 323 87 40.
Le trialogue Santé - Guide de collaboration avec les interprètes communautaires
Novembre 2009 et promotion de la santé Newsletter Prévention
spectra 77 spectra spectra 76 Newsletter Gesundheitsförderung und Prävention September 2009
Newsletter Gesundheitsförde rung
3
und Prävention Juli 2009
75
Santé mentale mental important de stress source d’informaLa migration:chacun/e» est le titre d’une brochure
frapper et à leurs proches. Les «La dépression peut touchées par la maladie les par la dépression que tion destinée aux personnes sont plus souvent touchés s’accompagne d’une migrantes et les migrants car le processus de migration brochure a Suissesses et les Suisses, la santé mentale. La – en particulier pour quement série de traumatismes et des contenus spécifi des recommandations donc été complétée par disponible en huit langues. migrantes et sera bientôt national Migration et adaptés aux populations 3 le contexte du Programme dans système s’intègre l’accès au Cette mesure Was passiert, wenn einedes Gesellschaft als Ganzes kollektiv lernt? Diesen chances dans suprême est l’égalité santé dont l’objectif Prozess beschreibt das sozietale Lernen. Erkenntnisse über die Mechanismen de santé suisse. solcher Lernprozesse liefern unter anderem Antworten zu grundsätzlichen Fragen der Prävention. Wie hat die Gesellschaft auf das Elend der Süchtigen in den offenen Drogenszenen in den 80er- und 90er-Jahren reagiert? Wie läuft que vie. Or, bien 4 der Lernprozess beim Passivrauchen? Beimsa sozietalen Lernen, dem die zweite psychique dans deux souffre d’un trouble personne une en Suisse, Une personne surSuchtakademie 2009 imrépandues Tessin gewidmet war, geht es also um den Auf bau von en suicidalité soient très est prise à forts la dépression et la Kompetenzen in einer Gesellschaft, um gemeinsam komplexe Probleme moyens souffrant de symptômes canplusieurs jour dans zu sur quatre seulement analysieren und Lösungsansätze entwickeln können. Und letztlich muss der ont vu le contre la dépression avec pour objectifs charge. Des Alliances Wertewandeldepuis auch nachhaltig verankert werden. deux ans maintenant), reconLucerne tons (Zoug, Berne et La dépression doit être et la déstigmatisation. principaux l’information pas à avoir honte. maladie dont il n’y a nue comme une 4
Sozietales Lernen
Wenn die Gesellschaft lernt
Tous unis contre la dépres
8
sion
Interview mit Verena El Fehri und Sandro Cattacin Wie funktioniert gesellschaftliches Lernen, wie kann es für die Prävention séropositives nes welche Grenzen sind dem sozietalen Lernen gesetzt? Im genutzt werden und person pour les concernant notamment Un cours spectra-Interview äussern sich der Soziologieprofessor Sandro Cattacin und questions, au VIH soulève de nombreuses les assurances, la Une infection die Tabakpräventionsspezialistin carrière, El Fehri über das Konzept und den , la Verena outre sur l’activité professionnelle ont besoin, les répercussions praktischen Nutzenrécemment des sozietalen Lernens, den Austausch von Fachleuten an séropositives Les personnes situation. Exclunouvelle famille, la relation. der Tessiner Suchtakademie, diecette Gefahr der Manipulation und die Chancen de desde soutien dans la gestion du suivi médical, les guettent. Un cours und Grenzen gesellschaftlicher Lernprozesse. qui les plus grands dangers la première fois à Arosa sion et isolement sont du VIH, organisé pour ces personnes tiné aux personnes porteuses indices sur l’aide dont fournit de premiers printemps au printemps 8 dernier, d’un second cours au besoin. Il sera suivi ont le plus urgemment In einer Rekordzeit von nur vier Wochen hat das Bundesamt für Gesundheit 2010. eine Kampagne lanciert, welche die Verbreitung der Grippe in der Schweiz eindämmen soll. Drei- bis fünfmal mehr Menschen als in normalen Jahren könnten sich nämlich diesen Herbst mit dem Virus anstecken. Einfache Botschaften informieren auf witzige Art und Weise, wie jede und jeder Einzelne die Verbreitung der Krankheit bremsen kann. Verschiedene bekannte Komiker vermitteln diese Botschaften in TV-Spots und betonen dabei: Es ist kein Witz!
Eine Grippekampagne in Rekordzeit
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Mercredi 21 septembre 2011, Hôtel Elite, Bienne
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spectra online: www.spectra.bag.admin.ch Impressum spectra No 88, Septembre 2011 «spectra – Prévention et promotion de la santé» est un bulletin d’information de l’Office fédéral de la santé publique qui paraît six fois par an en français, en allemand et en anglais. Il publie également des opinions qui ne coïncident pas avec la position officielle de l’office. Editeur: Office fédéral de la santé publique 3003 Berne, Tél. 031 323 54 59, Fax 031 324 90 33, www.bag.admin.ch Réalisation: Pressebüro Christoph Hoigné, Allmendstr. 24, 3014 Berne christoph.hoigne@la-cappella.ch Responsable de la commission de rédaction: Adrian Kammer, adrian.kammer@bag.admin.ch
10 spectra 88 Septembre 2011 Santé et culture
Textes: Collaborateurs de l’OFSP, Christoph Hoigné et autres auteurs Traduction: Marie-Françoise Dörig-Moiroud Photos: OFSP, Christoph Hoigné, iStockphoto, Vera Bütschi Graphisme: Lebrecht typ-o-grafik, 3006 Berne Impression: Büetiger AG, 4562 Biberist Tirage: 6 400 ex. allemands, 3 400 ex. français, 1 050 ex. anglais Il est possible de commander des numéros séparés et des abonnements gratuits à: GEWA, Alpenstrasse 58, Case postale, 3052 Zollikofen Téléphone 031 919 13 13, Fax 031 919 13 14, service@gewa.ch Le prochain numéro paraîtra en Novembre 2011
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Charte Intervention Précoce Lors de la conférence «Intervention Précoce auprès de jeunes en situation de vulnérabilité», plus de 200 professionnel-le-s venu-e-s de Suisse alémanique ont finalisé une charte. Ce document fixe, en neuf points, la manière d’appliquer l’Intervention Précoce sur la base d’un consensus des spécialistes. La conférence a eu lieu le 16 juin dernier à Olten, organisée à l’initiative de RADIX et du Fachverband Sucht. Cette charte, qui n’a pas encore été discutée par les spécialistes de la question en Suisse romande, est formulée de la manière suivante (traduction non officielle; seul le texte allemand fait foi).
Définition Par repérage précoce, on entend l’identification précoce par la personne de référence d’un enfant ou d’un-e adolescent-e de troubles comportementaux ou de signes d’un développement psychosocial potentiellement perturbé. Ce repérage sera éventuellement suivi d’une évaluation professionnelle par des spécialistes. Si une prise en charge est nécessaire, des spécialistes mettent en oeuvre les interventions appropriées, en collaboration avec les personnes de référence et en intégrant l’enfant ou l’adolescent-e concerné-e dans le processus décisionnel. L’Intervention Précoce vise à soutenir le développement et l’intégration sociale des enfants et des adolescent-e-s en situation de vulnérabilité. L’acception de l’Intervention Précoce admise par les professionnel-le-s doit s’accompagner d’une attitude commune
reposant sur les principes suivants: 1. L ’Intervention Précoce doit respecter le bien-être du jeune concerné ainsi que le principe de proportionnalité. 2. L ’Intervention Précoce reconnaît le droit à la différence et au refus des jeunes. Des périodes de crise et de comportements inadéquats doivent par principe être considérés comme des phénomènes de développement normaux. Ce principe atteint ses limites lorsque l’intégrité physique et mentale, la santé et/ou le développement de l’individu et/ou de son environnement est notablement perturbé. 3. T out adulte en contact avec des enfants et des adolescent-e-s a la responsabilité, dans sa fonction de professionnel, de fournir une contribution appropriée à l’Intervention
Précoce et à soumettre cette dernière à réflexion. 4. Une relation valorisante et encourageante avec l’enfant ou l’adolescente constitue la base de tout repérage précoce et augmente ainsi l’efficacité d’une Intervention Précoce adaptée à la situation. 5. L’Intervention Précoce intègre également dans le processus pour le développement de l’enfant les éléments importants de son environnement social. 6. L’Intervention Précoce est une tâche d’intérêt commun dont la réussite repose sur une coopération engagée et sans faille entre les différents spécialistes et personnes de référence. Des rôles clairs, une orientation objectifs et une définition assumée en commun du risque et de la
vulnérabilité sont des facteurs de réussite importants. 7. L es spécialistes et les personnes de référence respectent tout au long du processus d’Intervention Précoce les droits des enfants et adolescent-e-s ainsi que leur faculté d’autodétermination adaptée à la situation et à leur âge. En tant que réseau coordonné qui protège, soutient et promeut leurs ressources, ils permettent aux enfants et aux adolescent-e-s en situation de vulnérabilité de suivre leur propre voie. Dans ce processus, la collaboration active des enfants et des adolescente-s doit être gagnée et une communication transparente doit être garantie. 8. La promotion et la mise en place de l’Intervention Précoce nécessite un mandat politique clair ainsi que des ressources en matière de financement, de temps et de personnel. 9. L’Intervention Précoce a pour ambition de reconnaître et de dénoncer des conditions sociales et structurelles défavorables ainsi que de s’engager pour un environnement favorable à la santé. D’autres informations sur la conférence sont disponibles en allemand sous www.fachverbandsucht.ch et www.radix.ch Contact: Pia Oetiker, Section Drogues, pia.oetiker@bag.admin.ch
Pères, mères dépendant-e-s – enfants dépendants? Troisième journée nationale Genre et addictions. Les enfants issus de familles ayant un problème de dépendance encourent un risque de développer eux-mêmes des troubles liés à des substances jusqu’à six fois plus élevé que pour les autres. Une approche sexospécifique des pères et des mères toxicodépendant-e-s et de leurs fils et filles peut contribuer à briser ces modèles transgénérationnels. Des études le montrent: les mères alcooliques souffrent davantage que les pères alcooliques de sentiments de honte et de culpabilité et tendent donc davantage également à des «rituels de réparation» pour leurs enfants; les filles se préoccupent bien plus intensément des problèmes d’alcool dans leur famille que les fils; les fils semblent pouvoir mieux prendre leurs distances par rapport à des problèmes de dépendances dans la famille, les filles sont davantage concernées par des troubles intériorisés du comportement tels les dépressions ou les somatisations comme des troubles du comportement alimentaire; de leur côté, les fils développent davantage de
buer à briser les modèles transgénérationnels. Au cours d’interventions en plénière et d’ateliers, des professionnelle-s venu-e-s de Suisse et d’Allemagne ont traité des questions suivantes: Que transmettent les pères toxicodépendants à leurs fils, à leurs filles et que transmettent les mères toxicodépenUne vision différenciée dantes à leurs filles et à leurs fils? Les offres en matière de dépendances Quelles sont les répercussions sexospénon spécifiques, destinées aux «pa- cifiques sur les fils et sur les filles de rents» et aux «enfants» risquent de pas- pères et de mères toxicodépendant-e-s? ser à côté des client-e-s et de leurs pro- Quels sont les facteurs sexospécifiques blèmes. En effet, les offres spécifiques de risque et de protection liés à la paau genre ont désormais faire leurs rentalité de personnes toxicodépenpreuves: elles atteignent mieux les dantes importants pour les stratégies de groupes cibles et créent un contexte prévention et d’intervention? plus favorable à des changements de Un travail systématiquement comportement et d’attitude. La troisexospécifique sième journée nationale Genre et addictions s’est tenue le 9 juin 2011 à Bienne. Dans son allocution de clôture, Marie Organisée par Infodrog en collaboration Louise Ernst, déléguée de l’Office fédéavec Marie-Louise Ernst, déléguée de ral de la santé publique pour la promol’Office fédéral de la santé publique pour tion du traitement sexospécifique des les questions genre dans le domaine de dépendances, a appelé à un travail la prévention et des dépendances, elle sexospécifique systématique. Il s’agit avait pour objectif de trouver une ap- notamment d’instaurer des heures proche sexospécifique des pères et des d’ouverture qui tiennent compte des mères toxicodépendant-e-s ainsi que de possibilités des personnes concernées, leurs fils et de leurs filles afin de contri- ou d’aménager des locaux réservés, en troubles du comportement extériorisés, par exemple du comportement social, des déficits d’attention ou des troubles liés à une hyperactivité. Ce ne sont ici que quelques uns des troubles sexospécifiques déclenchés par des maladies liées à des dépendances.
partie ou pour une durée déterminée, à un seul sexe. Par ailleurs, elle a incité au travail sexospécifique, individuel ou de groupe, capable de renforcer les hommes et les femmes, les fils et les filles dans leurs propres ressources. Elle a cité des exemples, comme l’évocation systématique de la paternité auprès des hommes dépendants, des questions sur les modèles paternels et maternels auprès des client-e-s, le traitement et la diminution des sentiments de honte et de culpabilité ou des expériences de sacrifice. Informations et présentations PowerPoint (en allemand) des interventions et des ateliers sous www.infodrog.ch > Querschnittsthemen > Gender > Tagungen Contact à l’OFSP: Pia Oetiker, section Drogues, pia.oetiker@bag.admin.ch Contacts externes: Maria Lucia Galgano, Infodrog, M.Galgano@infodrog.ch; Marie-Louise Ernst, m.l.ernst@datacomm.ch
spectra 88 Septembre 2011 Santé et culture 11
Miges Balù – un bon départ dans la vie pour les enfants de migrants Santé et migration. Miges Balù est un projet de conseils aux parents axé sur des actions concrètes concernant l’alimentation et l’activité physique. Il est plus particulièrement destiné aux familles immigrées d’ex Yougoslavie, de Turquie et du Sri Lanka. L’objectif est de sensibiliser ces familles avec des enfants en bas âge aux interactions existant entre l’alimentation, l’activité physique et le poids corporel.
tation et l’activité physique; – travail avec les groupes visés et des personnes-clés du groupe-cible; – organisation de séances de discussions; – recherche de contacts (par ex. lors de fêtes, à la mosquée, etc.). L’élément central de Miges Balù est la formation de conseillères et de conseillers sur le thème de la compétence interculturelle, indispensable pour éviter des malentendus et pour gagner la confiance de la clientèle.
Miges Balù est un projet à caractère exemplaire lancé en 2005 par l’Ost schweizerischer Verein für das Kind (OVK). L’OVK avait constaté que les familles originaires de certains pays fréquentaient rarement les centres de consultation par rapport au nombre de naissances. Pourtant, elles avaient un besoin urgent en soutien dans des questions de santé. Les statistiques montrent par exemple que le poids de naissance des nourrissons de familles de migrants est inférieur et le taux de mortalité supérieur à ceux constatés chez les bébés suisses. Plus tard, ces enfants souffrent plus souvent de surpoids ou de mauvaise dentition.
Extension à l’ensemble de la Suisse
considèrent comme plus modernes. Les aliments spéciaux pour enfants sont perçus, grâce à la publicité, comme particulièrement sains et riches en vitamines, les teneurs élevées en sucre et en graisse sont bien souvent ignorées. De même, les jeunes parents issus de l’immigration n’ont souvent pas la culture des excursions en forêt ou des aires de jeux car, chez eux, il n’était pas nécessaire d’organiser spécialement les possibilités de jeux et d’activité physique. Là-bas, les enfants vivent pratiquement Un mode de vie suisse dehors, surveillés par les plus âgés. difficile à adopter Mais en Suisse, les familles de migrants Cela ne signifie pas pour autant que les habitent souvent dans des zones de cirpersonnes issues de la migration ont un culation intense, offrant peu de place au mode de vie fondamentalement malsain. jeu et à l’activité physique. Le déficit Mais certaines mères arrivant en Suisse d’activité physique qui en résulte peut peu avant la naissance de leur enfant déboucher sur de l’insatisfaction et des savent à peine l’allemand et ne agressions, symptômes qui sont à leur connaissent que très mal les habitudes tour enrayés par des sucreries ou la téde vie en Suisse, y compris en matière lévision. d’alimentation et d’activité physique. Formations culturelles De plus, les familles migrantes ne et professionnelles peuvent ou ne veulent pas transposer en Suisse les comportements sains qu’elles Dès lors, comment transférer les avaient dans leur pays. Elles remplacent connaissances nécessaires à un mode donc la nourriture saine de chez elles de vie plus sain à ces familles de mipar des produits tout prêts qu’elles grants? Ou comment faire pour que les
nourrissons et les enfants en bas âge appartenant à des familles issues de la migration aient une chance intacte de devenir des enfants sains, avec un comportement alimentaire et une activité favorables à leur santé? C’est là que Miges Balù intervient. Le projet comprend des mesures visant toutes à surmonter les fossés linguistiques et culturels entre les centres de consultation et les migrant-es et à les sensibiliser à un comportement plus favorable à leur santé: – formation des conseillères parentales en matière de compétence transculturelle; – formation des conseillères parentales sur des questions d’alimentation et d’activité physique particulièrement axées sur les nourrissons et les enfants en bas âge; – recours à des médiateurs et des médiatrices interculturel-le-s pour réduire les barrières linguistiques et les appréhensions; – traduction en albanais, serbe/croate/ bosniaque, turc et tamoul de brochures concernant l’alimentation et l’activité physique; – création de tracts sans texte, avec des illustrations concernantl’alimen-
Le projet pilote de Suisse orientale a remporté des succès impressionnants. En trois ans, le pourcentage de parents originaires de Turquie, d’ex Yougoslavie et du Sri Lanka touché par le programme passé de 5 a 15% à 71%. Avec le soutien de Suisse Balance, Miges Balù et les connaissances acquises dans le cadre du projet sont multipliés, par le biais de Caritas Suisse et des plans d’action cantonaux pour un poids corporel sain, vers d’autres régions de Suisse, comme les cantons de Saint-Gall, Lucerne, Berne, Thurgovie et Argovie. Les collaborateurs de Caritas offrent aux services de consultation parentale un soutien adapté aux besoins et professionnel dans le développement et la mise en place d’un projet Miges Balù. Pour plus d’informations sur l’organisation du projet et sur les expériences faites dans ce cadre, les services de consultations parentales intéressés peuvent consulter la page consacrée à Miges Balù sous: www.suissebalance.ch > Phases de vie l & ll > Projets Suisse Balance Contact: Valérie Bourdin, Section Nutrition et activité physique, valerie.bourdin@bag.admin.ch
Le dialogue sur le thème de l’alcool continue Le 29 mai 2011, la première semaine alcool s’est terminée au bout de 10 jours riches en activités variées. Dans les différentes régions de Suisse, quelque 230 partenaires ont participé à la semaine au travers de plus de 260 activités (au total, plus de 600 manifesta-
12 spectra 88 Septembre 2011 Santé et culture
tions). De nombreuses impressions de ces 10 jours peuvent être téléchargées sous forme d’images et de sons sous: www.je-parle-d-alcool.ch, rubrique «Impressions». Quelle suite? La semaine alcool constituait la première étape de la nouvelle
campagne sur le thème de l’alcool. Le muniquées sur le site et via la newsletter dialogue social va maintenant se pour- (inscription sur la page Internet) à la fin suivre. La direction du projet planifie de l’été. désormais de nouvelles activités sur des Contact: Valérie Maertens, thèmes spécifiques avec les organisaSection Campagnes, tions participant à la campagne. Plus valerie.maertens@bag.admin.ch d’informations sur le sujet seront com-